Saint Thomas d’Aquin - Somme Théologique
1a = Prima Pars =
Première Partie
Question 66 : De
l’ordre de la création considéré par rapport à la distinction des créatures
Après
avoir parlé de la création, nous avons à nous occuper de la distinction des
créatures. Nous traiterons, 1° de l’ordre de la création considéré par rapport
à cette distinction ; 2° de la distinction considérée en elle-même. — Sur le
premier point quatre questions se présentent : 1° La matière créée a-t-elle été
informe pendant un temps ? (Dans cet article saint Thomas se propose de
concilier le sentiment de saint Augustin avec celui de tous les autres Pères
sur l’état primitif de la nature.) — 2° N’y a-t-il eu qu’une seule matière pour
tous les corps ? (Aristote et ses disciples ont distingué un cinquième élément
qui n’est ni le feu, ni l’air, ni la terre, ni l’eau, et qu’ils appelaient la quintessence, ou la cinquième essence.
Ils ont supposé que le ciel était composé du cinquième élément, et que pour ce
motif ce n’était pas un corps corruptible, comme les corps inférieurs qui
peuplent notre sphère. Saint Thomas adopte cette théorie, et cherche à la
justifier.) — 3° Le ciel empyrée a-t-il été créé en même temps que la matière
informe ? (La science moderne nie l’existence de ce ciel empyrée, mais nous
ferons observer que tous les Pères ont admis avec saint Thomas l’existence d’un
ciel supérieur dans lequel les anges et les bienheureux habitent.) — 4° Le
temps a-t-il été créé simultanément avec la matière ? (Cette question difficile
a été le sujet d’une foule de controverses. Saint Thomas nous fait ici
connaître le sentiment de saint Augustin et celui des autres Pères, et nous
montre en quoi ils diffèrent.)
Article
1 : La matière informe a-t-elle précédé de quelque temps la matière formée ?
Objection
N°1. Il semble que la matière ait été informe pendant quelque temps avant
d’être formée. Car il est dit dans la Genèse (1, 2) : La terre était informe, vide, ou d’après une autre traduction (C’est
la traduction des Septante.) : Elle était
invisible et n’était pas formée. Ce qui signifie, d’après saint Augustin (Conf., liv. 12, chap. 12, et Sup. Gen. ad litt., liv. 2, chap. 11), que la matière était informe.
Elle fut donc informe pendant quelque temps avant d’être formée.
Réponse
à l’objection N°1 : Dans ce passage saint Augustin ne prend pas le mot terre
dans le même sens que les autres Pères. Il veut qu’en cet endroit la terre et
l’eau expriment la matière première. Car Moïse ne pouvait représenter à un
peuple grossier la matière première que sous l’image des choses qu’il
connaissait. C’est pourquoi il emploie plusieurs similitudes ; il ne l’appelle
pas exclusivement eau ou terre, dans la crainte que la matière première ne leur
parût en réalité être la terre ou l’eau. Elle a cependant de l’analogie avec la
terre, puisque comme la terre elle sert de base aux formes (Elle est le sujet
premier de tout ce qui existe dans l’ordre de la nature.), et elle en a aussi
avec l’eau, puisque, comme l’eau, elle est susceptible de revêtir des formes
diverses (Elle est susceptible de recevoir les genres de toutes les substances,
comme la cire peut recevoir toutes les figures. Ces deux caractères donnent la
définition de la matière première.). D’après cela il est donc dit que la terre
était nue et vide, ou invisible et sans ornements, parce que c’est par la forme
qu’on connaît la matière. D’où l’on conclut que considérée en elle-même elle
est invisible et nue, et que sa puissance est remplie par la forme. C’est aussi
de là que Platon (Timée) concluait
que la matière est un lieu. Mais les autres Pères entendent par terre l’élément
lui-même auquel nous donnons ce nom, et nous avons dit (dans le corps de
l’article.) de quelle manière ils comprenaient qu’elle avait été informe.
Objection
N°2. La nature imite dans ses œuvres l’œuvre de Dieu, comme la cause seconde
imite la cause première. Or, dans les œuvres de la nature l’être est toujours
informe avant d’être formé. Donc il en est de même dans les œuvres de Dieu.
Réponse
à l’objection N°2 : La nature fait sortir d’un être en puissance un effet en
acte, et c’est pourquoi il faut que dans toutes ses œuvres la puissance précède
l’acte, l’informité la formation. Mais Dieu produit de rien l’être en acte ; il
peut donc immédiatement faire une chose parfaite en raison de l’étendue de sa
puissance.
Objection
N°3. La matière est au-dessus de l’accident puisqu’elle fait partie de la
substance. Or, Dieu peut faire qu’un accident existe sans sujet comme il arrive
au sacrement de l’autel. Donc il a pu faire que la matière existât sans sa forme.
Réponse
à l’objection N°3 : Un accident étant une forme est par là même un acte, tandis
que la matière est d’après son essence un être en puissance. Il répugne donc
plus à la matière dépourvue de forme d’être en acte sans forme qu’à l’accident
d’exister sans sujet.
Objection
N°4. Mais c’est le contraire. Car l’imperfection de l’effet prouve
l’imperfection de l’agent. Or, Dieu est l’agent le plus parfait ; c’est
pourquoi il est dit de lui (Deut., 32, 4) que
toutes ses œuvres sont parfaites. Donc ce qu’il a créé n’a jamais été
informe (Cet argument et le suivant ont pour objet de soutenir la contrepartie
de l’antithèse.).
Réponse
à l’objection N°4 : On fait en faveur de la thèse opposée que si, comme le
prétendent les autres Pères, l’informité de la matière a temporellement précédé
sa formation, ce n’est pas que Dieu ait été dans l’impuissance de faire
autrement, mais c’est que sa sagesse a voulu qu’il suivit un certain ordre dans
la création de l’univers, et que tous les êtres passassent de l’imparfait au
parfait.
Objection
N°5. La formation des corps a été le résultat de la distinction que Dieu a
établie entre eux. Or, la confusion est opposée à la distinction, comme l’informité est opposée à la formation.
Par conséquent si l’informité de la
matière a eu une priorité de temps sur sa formation, il s’ensuit que dès le
commencement il y a eu dans le monde matériel cette confusion à laquelle les
anciens ont donné le nom de chaos.
Réponse
à l’objection N°5 : Il y a eu des philosophes païens qui ont supposé que
primitivement tout était dans une confusion qui excluait toute distinction, à
l’exception de la réserve que fit Anaxagoras à
l’égard de l’entendement qu’il regardait comme distinct et pur de tout mélange
(Aristote rapporte ce sentiment d’Anaxagore (De l’âme, liv. 1, chap. 2, § 13), et le discute dans le même traité
(liv. 3, chap. 4, § 9).). Mais avant de parler de la séparation des êtres,
l’Ecriture établit plusieurs distinctions : 1° celle du ciel et de la terre où
elle exprime une distinction qui repose sur la matière, comme nous le verrons
(quest. 69, art. 1). C’est ce qu’elle dit par ces paroles : Au commencement Dieu créa le ciel et la
terre, etc. 2° La distinction des éléments quant à leurs formes, et c’est
ce qu’elle désigne en parlant de la terre et de l’eau. Elle ne parle pas de
l’air, ni du feu, parce que aux yeux des hommes grossiers auxquels Moïse
parlait, ces éléments n’étaient pas aussi manifestement des corps que la terre
et l’eau ; bien que Platon (Tim., chap. 26) ait cru que ces mots, le souffle du Seigneur, indiquaient l’air, car souvent on donne à
l’air le nom de souffle, et qu’il ait pensé que le feu était désigné par le mot
ciel, qu’il considérait comme étant d’une nature ignée, d’après saint Augustin
(De civ. Dei, liv. 8, chap. 11). Mais
le rabbin Moïse, d’accord sur tout le reste avec Platon, dit que le feu est
désigné par les ténèbres, parce qu’il ne brille pas dans une sphère qui lui est
propre. Au reste il semble plus convenable de répéter ce que nous avons dit précédemment
; c’est que ces mots : spiritus Domini, sont
ordinairement pris dans l’Ecriture pour l’Esprit-Saint,
qui d’après la Genèse était porté sur les eaux, non corporellement, mais comme
la volonté de l’ouvrier se porte sur la matière qu’il veut former. 3° La
distinction de position, car il est dit que la terre était sous les eaux qui la
rendaient invisible. Et l’Ecriture indique que l’air qui est le sujet des
ténèbres était au-dessus, par ces autres paroles : Les ténèbres étaient sur la face de l’abime.
Ce qui nous reste à dire (quest. 71) fera connaître les distinctions que Dieu
avait encore à établir entre les êtres.
Conclusion
L’informité de la matière n’a pas eu une priorité de temps, mais une priorité
de nature sur sa formation ou sa distinction, mais elle a eu sur elle une
priorité de temps si par la formation de la matière on entend sa beauté, son
ornement.
Il
faut répondre qu’à cet égard les saints Pères sont partagés de sentiments.
Saint Augustin veut (Sup. Gen., liv. 1, chap. 15) que l’informité de la matière
ait eu sur sa formation non une priorité de temps, mais seulement une priorité
d’origine ou de nature. Saint Basile (Hom. 2, sup. hexam.),
saint Ambroise (Hex., liv. 1, chap. 8) et saint Chrysostome
(Homil. 2 in Gen.),
prétendent qu’elle a eu une priorité de temps. Quoique ces opinions paraissent
contradictoires, elles ne diffèrent cependant les unes des autres que
légèrement. Car saint Augustin n’entend pas par le mot informité (informitas)
la même chose que les autres Pères. En effet, d’après saint Augustin, le mot informité signifie absence absolue de
toute forme. Dans ce cas il y a impossibilité de dire que l’informité de la
matière ait temporairement précédé sa formation ou sa distinction. C’est en
effet évident pour sa formation. Car si la matière informe a eu une priorité de
temps, elle était déjà en acte, comme la création l’implique. Or, le terme de
la création est l’être en acte, et ce qui est en acte est une forme. Dire que
la matière a préalablement existé sans la forme, c’est dire que l’être a été en
acte sans être en acte, ce qui implique contradiction. On ne peut pas dire non
plus que la matière a eu d’abord une forme vague, générale et qu’ensuite elle a
revêtu des formes diverses qui l’ont individualisée, distinguée. Car ce serait
tomber dans l’erreur des anciens philosophes qui faisaient de la matière
première un corps en acte, comme le feu, l’air, ou l’eau, ou quelque chose
d’intermédiaire (Ces philosophes supposaient la matière incréée, et dans leur
système, la production des êtres n’était qu’un changement, une modification de
forme.), d’où il résultait que la production des êtres n’était rien autre
qu’une modification, un changement. Car dans cette hypothèse, comme la forme
donnait l’être à une chose en la plaçant dans le genre des substances et en en
faisant un individu quelconque, il s’ensuivait que cette forme ne produisait
pas l’être en acte absolument, mais qu’elle déterminait seulement sa manière
d’être, ce qui est le propre de la forme accidentelle ; et que par conséquent
les formes subséquentes n’étaient que des accidents, insuffisants pour rendre
compte de la production des êtres et n’influant que sur leur changement. Il
faut donc dire que la matière première n’a pas été créée absolument sans forme,
qu’elle n’a pas été faite non plus avec une forme vague ou générale, mais
qu’elle est sortie des mains de son auteur sous des formes distinctes. Par
conséquent si par l’informité de la matière on veut dire que dans son état
primitif la matière a été privée absolument de toute forme, il est clair que
l’informité de la matière n’est point antérieure, selon le temps, à sa
formation ou à sa distinction ; elle lui est seulement antérieure, comme le dit
saint Augustin, quant à l’origine ou la nature, comme la puissance est
antérieure à l’acte, ou comme la partie est antérieure au tout. Pour les autres
Pères, l’informité ne signifie pas la négation de toute forme, mais seulement
l’exclusion de ce qui fait la beauté et l’ornement des choses corporelles.
C’est dans ce sens qu’ils disent que l’informité de la matière, corporelle a
temporairement précédé sa formation. Ainsi sous un rapport leur sentiment
s’accorde avec celui de saint Augustin, et sous un autre il en diffère, comme
nous le verrons (quest. 69, art. 1). D’après le récit littéral de la Genèse on
peut dire que les trois espèces de formes qui font maintenant la beauté de la
création manquaient à la matière, et que pour ce motif on l’a appelée informe.
Ainsi, l° le ciel et l’air n’étaient pas rendus clairs et transparents par l’éclat
de la lumière ; et tel est le sens de ces paroles : les ténèbres étaient sur la face de l’abîme. 2° La terre n’avait
pas l’aspect qu’elle a eu depuis que les eaux se sont retirées, et c’est ce que
signifient ces mots : la terre était nue
et vide, c’est-à-dire invisible,
parce que les eaux qui la couvraient empêchaient de la voir. 3° Elle n’était
pas comme aujourd’hui couverte d’herbes et de plantes, et c’est pour cela qu’il
est dit qu’elle était vide, non arrangée,
c’est-à-dire, d’après une autre version, sans
ornements (Cette autre version est toujours celle des Septante.). Ainsi,
après avoir dit que Dieu avait créé deux natures, le ciel et la terre, Moïse a
désigné ce que le ciel avait d’informe par ces paroles : les ténèbres étaient sur la face de l’abîme, et ce qu’il y avait
d’informe dans la terre par ces mots : la
terre était nue et vide.
Article
2 : N’y a-t-il qu’une seule matière informe pour tous les corps ?
Objection
N°1. Il semble qu’il n’y ait qu’une seule matière informe pour tous les corps.
Car saint Augustin dit (Conf.,
liv. 12, chap. 2) : Je trouve deux choses que vous avez faites, l’une qui avait
une forme et l’autre qui n’en avait pas. Et il ajoute que cette dernière est la
terre invisible et dépourvue d’ornements par laquelle il dit que la matière des
corps est désignée. Donc il n’y a pour tous les corps qu’une seule et même
matière.
Réponse
à l’objection N°1 : Saint Augustin suit en cet endroit l’opinion de Platon, qui
n’admettait pas une cinquième essence. Ou bien on peut dire que la matière
informe est une, c’est-à-dire qu’elle ne forme qu’un seul et même ordre, comme
tous les corps sont un dans l’ordre des choses corporelles.
Objection
N°2. Aristote dit (Met., liv. 5, text. 10) que les êtres qui ne font qu’un seul et même
genre sont d’une seule et même matière. Or, toutes les choses corporelles
appartiennent au genre des corps. Donc elles n’ont toutes qu’une seule et même
matière.
Réponse
à l’objection N°2 : Physiquement parlant, les corps corruptibles et les corps
incorruptibles ne sont pas du même genre, puisqu’ils ne sont pas tous les deux
en puissance de la même manière, comme le dit Aristote (Met., liv. 10, text. 26). Mais en parlant
logiquement, tous les corps ne forment qu’un seul genre parce qu’ils sont tous
compris sous l’idée de corporéité (Entre les corps corruptibles et les corps
incorruptibles il y a une différence dans l’ordre de la nature, mais
rationnellement il n’y en a pas.).
Objection
N°3. La diversité d’acte suppose la diversité de puissance, et l’unité d’acte
l’unité de puissance. Or, tous les corps n’ont qu’une seule et même forme, la
corporéité (Nous avons cru nécessaire de forger ce mot pour rendre le mot latin
corporeitas.).
Donc pour tous les objets corporels il n’y a qu’une seule et même matière.
Réponse
à l’objection N°3 : La forme de la corporéité n’est pas la même dans tous les
corps, parce que cette forme n’est pas autre que les formes par lesquelles les
corps sont distingués les uns des autres, comme nous l’avons dit (dans le corps
de l’article.).
Objection
N°4. La matière, considérée en elle-même, n’existe qu’en puissance, et les
distinctions qui existent entre les êtres matériels proviennent des formes
qu’ils revêtent. Donc il n’y a qu’une seule et même matière absolument parlant
pour toutes les choses corporelles.
Réponse
à l’objection N°4 : La puissance étant déterminée par l’acte, les êtres en
puissance diffèrent entre eux par là même qu’ils se rapportent à des actes qui
diffèrent aussi ; ainsi la vue qui se rapporte à la couleur diffère de l’ouïe
qui se rapporte au son. La matière des corps célestes diffère donc de la
matière des corps terrestres par là même qu’elle n’est pas en puissance par
rapport à la forme élémentaire que les corps terrestres prennent.
Mais
c’est le contraire. Tous les êtres qui ont la même matière peuvent se
transmettre leurs propriétés réciproques, agir l’un sur l’autre, et
s’influencer mutuellement, comme le dit Aristote (De Gen., liv. 1, text.
50). Or, les corps célestes et les corps inférieurs n’ont pas les uns sur les autres cette réciprocité de rapports. Donc il n’y a pas
en eux qu’une seule et même matière.
Conclusion
Il n’y a pas qu’une seule et même matière pour tous les corps corruptibles et
incorruptibles, il y a seulement entre eux une certaine analogie.
Il
faut répondre que sur ce point il y a eu parmi les philosophes diversité de
sentiments. Car Platon et tous les philosophes avant Aristote ont supposé que
tous les corps étaient naturellement composés de quatre éléments. Ces quatre
éléments composant une seule et même matière, comme le prouve la vertu qu’ils
avaient de s’engendrer et de se corrompre réciproquement, il s’ensuivait
conséquemment que tous les corps ont une seule et même matière. Platon
attribuait l’incorruptibilité de certains corps, non à la nature de la matière,
mais à la volonté de l’auteur de l’univers, qu’il fait parler ainsi en
s’adressant aux corps célestes (Tim., in princ.) :
« Vous êtes corruptibles par votre nature, mais vous êtes incorruptibles par ma
volonté, parce que ma volonté est supérieure au lien qui vous unit. » Aristote
combat ce système et le rejette en vertu des mouvements naturels des corps (De cælo, liv. 1,
text. 5). Car le corps céleste ayant un mouvement
naturel différent du mouvement naturel des éléments, il s’ensuit que sa nature
est différente de la nature des quatre éléments (Saint Basile expose ce
sentiment d’Aristote (Hexam., hom. 1).).
Et comme le mouvement circulaire, qui est le mouvement propre des corps
célestes, n’est opposé à aucun autre, tandis que les mouvements des éléments
sont contraires les uns aux autres (par exemple, celui qui va en haut est
contraire à celui qui va en bas) ; de même le corps céleste existe sans
principes contraires, tandis que les corps élémentaires sont toujours formés de
principes opposés. D’un autre côté, la génération ainsi que la corruption
provenant d’éléments contraires, il s’ensuit que le corps céleste est par sa
nature incorruptible, tandis que les corps élémentaires sont corruptibles. —
Quoique parmi les corps les uns soient naturellement corruptibles et les autres
incorruptibles, Avicébron (Avicébron
et Averroës exerçaient une grande influence au XIIIe siècle ; c’est pour ce motif que saint
Thomas prend à tâche de les combattre et de les réfuter avec beaucoup de soin.)
a néanmoins avancé qu’il n’y avait pour tous les corps qu’une seule et même
matière, parce que, dit-il, la forme corporelle est une. Mais si la corporéité
était par elle-même une seule et même forme à laquelle viendraient se
surajouter d’autres formes qui serviraient à établir entre les corps une
distinction, il faudrait nécessairement admettre que cette forme est
immuablement inhérente à la matière, et que tout corps serait par rapport à
elle incorruptible. La corruption ne serait l’effet que des formes subséquentes,
et ce ne serait plus une corruption absolue, mais une corruption relative,
parce que sous la privation produite par la corruption il y aurait un être en
acte, comme le supposaient les anciens philosophes païens, qui admettaient pour
sujet des corps un être en acte comme le feu, l’air et autre chose semblable. —
Mais si l’on suppose que la forme qui est dans un corps corruptible ne reste pas
soumise à la génération et à la corruption, il s’ensuit nécessairement que la
matière des corps corruptibles et celle des corps incorruptibles n’est pas la
même. Car la matière, d’après sa nature, est en puissance par rapport à la
forme. Il faut donc que, considérée en elle-même, elle soit en puissance par
rapport à la forme de tous les êtres dont la matière est commune. Une forme ne
peut la mettre en acte que par rapport à elle-même ; elle la laisse donc en
puissance par rapport à toutes les autres formes. Ceci est encore vrai dans le
cas où une des formes serait plus parfaite que les autres, et les contiendrait pour
ce motif virtuellement, parce que la puissance se rapporte au parfait comme à
l’imparfait sans aucune différence. C’est pourquoi, quand une chose existe sous
une forme imparfaite, elle est en puissance par rapport à sa forme parfaite, et
réciproquement. Par conséquent, la matière existant sous la forme d’un corps
incorruptible pourra encore être en puissance par rapport à la forme des corps
corruptibles. Et puisqu’elle ne possède pas cette forme en acte, elle existera
donc tout à la fois sous une forme et sans elle, c’est-à-dire dans un état de
privation ; car on donne ce nom à l’état d’un être qui n’a pas la forme qu’il
pourrait avoir. Il est donc impossible que les corps corruptibles et les corps
incorruptibles aient naturellement la même matière. — Toutefois, il ne faut pas
dire avec Averroës (De Subst. orbis, chap. 2) que le corps
céleste est la matière du ciel, un être en puissance par rapport au lieu et non
par rapport à l’être, et que sa forme est une substance séparée qui lui est
unie pour le mouvoir. Car il est impossible d’admettre un être en acte sans
qu’il ne soit tout entier acte et forme, ou qu’il n’ait acte ou forme. En
faisant donc abstraction de la substance séparée dont Averroës
fait un moteur, si le corps céleste n’a pas de forme, c’est-à-dire s’il n’y a
pas en lui une forme et un sujet qui la reçoive, il s’ensuit qu’il est tout
entier forme et acte. Or, tout être qui réunit ces conditions est une chose
intellectuelle en acte, ce qu’on ne peut dire du corps céleste qui est une
chose sensible. On est donc obligé de reconnaître que la matière du corps
céleste, considérée en elle-même, n’est en puissance que par rapport à la forme
qu’elle possède. Peu importe à la proposition que nous établissons
de quelle nature est cette forme, que ce soit une âme ou toute autre chose. Il
n’en est pas moins constant que cette forme perfectionne la matière au point
qu’elle n’est plus d’aucune manière en puissance relativement à l’être, mais
seulement relativement au lieu où elle existe, comme le dit Aristote (De Eccl., liv.
1, text. 20). Ainsi donc la matière des corps
célestes n’est pas la même que celle des corps terrestres. Il y a cependant
entre l’une et l’autre une certaine analogie, c’est qu’elles sont l’une et
l’autre en puissance (Elles sont en puissance à l’égard de leur forme, mais le
corps céleste, quand il a revêtu sa forme, est immuable dans son être. Il ne
peut plus changer que par rapport aux lieux.).
Article
3 : Le ciel empyrée a-t-il été créé en même temps que la matière informe ?
Objection
N°1. Il semble que le ciel empyrée n’ait pas été créé en même temps que la
matière informe. Car le ciel empyrée, si c’est un être, doit nécessairement
être un corps sensible. Or, tout corps sensible est mobile, tandis que le ciel
empyrée ne l’est pas. Car s’il se mouvait on s’apercevrait de son mouvement au
moyen du mouvement de quelque corps apparent, et on ne s’en aperçoit pas du
tout. Le ciel empyrée n’est donc pas quelque chose qui a été créé en même temps
que la matière informe.
Réponse
à l’objection N°1 : Les corps sensibles sont mobiles dans l’état du monde
actuel, parce que le mouvement des corps est ce qui produit la multiplicité des
éléments. Mais dans la consommation dernière de la gloire, le mouvement des
corps cessera. Il a été convenable que dès le commencement l’empyrée fût dans
cet état.
Objection
N°2. Saint Augustin dit (De Trin.,
liv. 3, chap. 4) que les corps inférieurs sont régis d’une certaine manière par
les corps supérieurs. Si le ciel empyrée est un corps supérieur, il faut donc
qu’il ait une influence quelconque sur les corps inférieurs. Mais cela ne
semble pas possible, surtout du moment où l’on suppose le ciel empyrée
immobile, puisqu’il n’y a pas de corps qui meuve s’il n’est mû. Donc le ciel
empyrée n’a pas été créé en même temps que la matière informe.
Réponse
à l’objection N°2 : Il est assez probable, d’après quelques auteurs, que le
ciel empyrée n’ayant été fait que pour l’état de gloire, il n’a pas d’influence
sur les corps inférieurs qui appartiennent à un autre ordre, puisqu’ils ont été
faits pour le cours naturel des choses. Cependant, il paraît plus probable que
comme les anges supérieurs qui sont près de Dieu ont de l’influence sur les
anges intermédiaires et sur les anges inférieurs qui sont envoyés, bien que,
d’après saint Denis (Cæl. Hier., chap. 8), ils ne reçoivent pas
eux-mêmes de mission ; de même le ciel empyrée a de l’influence sur les corps
qui se meuvent, quoiqu’il ne se meuve pas lui-même (Saint Thomas rétracte ici
ce qu’il avait dit dans son commentaire du Maître
des sentences, où il prétend que l’empyrée n’a pas d’influence sur les
corps inférieurs, parce qu’étant immobile, il ne peut les mouvoir (liv. 2
Sent., dist. 2, quest. 2, art. 3).). On peut donc dire, pour ce motif, qu’il
influe sur le premier ciel qui se meut, non par un mouvement de va et vient,
mais par une force fixe et stable, comme serait par exemple une puissance de
capacité ou de causalité, ou toute autre énergie qui ne dérogerait pas. à la dignité de sa nature.
Objection
N°3. Si on prétend que le ciel empyrée est un lieu de contemplation qui n’a
aucun rapport avec les effets naturels, on répondra avec saint Augustin (De Trin., liv. 4, chap. 10) que quand
notre esprit s’élève aux choses éternelles, nous ne sommes plus en ce monde.
D’où il est manifeste que la contemplation élève l’âme au-dessus des choses
corporelles. On ne peut donc pas considérer un lieu matériel comme un lieu de
contemplation.
Réponse
à l’objection N°3 : On assigne à la contemplation un lieu matériel, non par
nécessité, mais par convenance, afin que la clarté extérieure soit en harmonie
avec la lumière intérieure. C’est ce qui fait dire à saint Basile (in Hexa., hom.
2) que l’esprit ne pouvait vivre clans les ténèbres, mais qu’il était fait pour
vivre dans la lumière et la joie.
Objection
N°4. Parmi les corps célestes on trouve un corps qui est partie diaphane et
partie lumineux. C’est ce qu’on appelle le ciel étoile. On trouve aussi un ciel
qui est complètement diaphane, et que quelques auteurs appellent le ciel d’eau
ou de cristal. S’il y a au-dessus un autre ciel il faut donc qu’il soit
totalement lumineux. Mais il ne peut en être ainsi, parce que dans ce cas l’air
serait continuellement illuminé, et la nuit ne se ferait jamais. Le ciel
empyrée n’a donc pas été créé en même temps que la matière informe.
Réponse
à l’objection N°4 : D’après saint Basile (in
Hexa., hom. 2), il est constant que le ciel est
terminé sous la forme d’une sphère, qu’il est d’une nature assez compacte et
assez forte pour séparer ce qui est hors de lui de ce qui est au dedans de lui.
C’est pour cela qu’il a laissé derrière lui une région déserte sans lumière,
puisqu’il a intercepté la splendeur des rayons qui s’étendaient au-delà. —
D’ailleurs, comme le corps du firmament, bien qu’il soit solide, est néanmoins
diaphane, puisque nous voyons la lumière des étoiles malgré les deux
intermédiaires qui s’y opposent, on pourrait dire que le ciel empyrée n’est pas
une lumière condensée, qu’il ne projette pas des rayons comme le corps du
soleil, mais qu’il a une lumière plus subtile, plus déliée ; ou bien on
pourrait dire encore qu’il brille de la splendeur de la gloire et que cette
splendeur n’a rien de commun avec la clarté naturelle.
Mais
c’est le contraire. Car sur ces paroles : Au
commencement Dieu créa le ciel et la terre, la glose dit que par ciel il
faut entendre non le firmament visible, mais l’empyrée et le ciel de feu.
Conclusion
Il a été convenable que dès le commencement du monde il y eût un ciel
totalement lumineux qui fût le séjour de la gloire des bienheureux, et auquel
on a donné le nom de ciel empyrée.
Il
faut répondre que le ciel empyrée n’est admis que par Strabus,
l’auteur de la glose, le vénérable Bède et saint Basile (Il y a beaucoup
d’autres Pères qui ont été du même sentiment, quoiqu’ils ne se servent pas du
mot empyrée.). A cet égard ils sont
d’accord sur un point, c’est que ce ciel est le séjour des bienheureux. Car Strabus et le vénérable Bède disent qu’aussitôt qu’il a été
fait, il a été rempli d’anges. Et saint Basile ajoute (Hom. 2 in hexam.) que comme les damnés sont
précipités dans les ténèbres les plus profondes, de même les justes reçoivent
la récompense de leurs œuvres dans cette lumière qui est hors du monde, et
c’est là qu’ils trouveront une demeure tranquille. Cependant ce n’est pas la
même raison qui les porte à admettre ce ciel. Strabus
et Bède disent qu’il existe parce que le firmament dont ils font le ciel étoile
n’a pas été créé, d’après la Genèse, au commencement, mais au second jour.
Saint Basile a eu l’intention de faire voir par là que l’œuvre de la création
n’a pas commencé par les ténèbres, comme le prétendaient les manichéens, qui
appelaient le Dieu de l’Ancien Testament un Dieu de ténèbres. Ces raisons ne
sont pas très concluantes. Car, à l’égard du firmament qui, d’après la Genèse,
a été fait au second jour, saint Augustin résout la question d’une manière, et
les autres Pères d’une autre. Touchant les ténèbres, saint Augustin dit (Sup. Gen. ad litt., liv. 7, chap. 27) qu’ils ont d’abord existé
parce que l’informité qu’ils représentent a eu sur la formation des choses non
une priorité de temps, mais une priorité d’origine. D’après les autres Pères,
les ténèbres n’étant pas une créature, mais une privation de lumière, ils ont
d’abord existé pour prouver que l’action de la sagesse divine, qui a tiré les
êtres du néant, les a d’abord établis dans un état imparfait, pour les amener
ensuite à leur perfection. — On peut trouver une meilleure raison de convenance
dans la nature même de la gloire qui nous est réservée. En effet, nous
attendons pour notre récompense deux sortes de gloire, l’une spirituelle et
l’autre corporelle, qui ne doit pas seulement servir à glorifier les corps des
hommes, mais encore à renouveler le monde entier. La gloire spirituelle a
commencé avec le monde par la béatitude des anges dont les saints doivent
partager les jouissances. Il a donc été convenable que dès le commencement des
choses la gloire corporelle existât dans un corps quelconque, qui a été
primitivement créé, exempt de toute corruption et de toute altération, et qui
soit totalement lumineux, comme toutes les créatures matérielles le seront
après la résurrection. Et c’est ce corps qu’on appelle empyrée, ou ciel de feu,
non parce qu’il a la chaleur du feu, mais parce qu’il en a tout l’éclat — Nous
devons faire observer que saint Augustin rapporte (De civ. Dei, liv. 10, chap. 9 et 27) que Porphyre distinguait les
anges des démons en ce que les démons habitaient les airs, tandis que les anges
habitaient le ciel éthéré ou l’empyrée. Mais Porphyre était platonicien, et il
pensait que le ciel étoile était du feu, et il lui donnait le nom d’empyrée ou
d’éther, en attachant à ce dernier mot le même sens qu’au mot enflammer, sans avoir l’intention de
désigner par là la rapidité du mouvement, comme le fait Aristote (De cælo, liv. 1,
text. 22). Nous faisons ici cette remarque uniquement
pour qu’on ne croie pas que saint Augustin a compris l’empyrée de la même
manière que les auteurs modernes.
Article
4 : Le temps a-t-il été créé simultanément avec la matière informe ?
Objection
N°1. Il semble que le temps n’ait pas été créé simultanément avec la matière
informe. Car saint Augustin dit en s’adressant à Dieu (Conf., liv. 12, chap. 12) : Je
trouve deux choses que vous avez faites sans les assujettir au temps, la
matière première des corps et la nature angélique. Le temps n’a donc pas été
créé simultanément avec la matière informe.
Réponse
à l’objection N°1 : Saint Augustin parle ainsi parce que, dans son sentiment,
la nature angélique et la matière informe ont sur le temps une priorité
d’origine ou de nature.
Objection
N°2. Le temps est divisé par le jour et la nuit. Or, dès le commencement il n’y
avait ni jour ni nuit. Cette alternative de la nuit et du jour n’a existé
qu’ensuite : Lorsque Dieu eut séparé la
lumière des ténèbres. Donc le temps n’existait pas dès le commencement.
Réponse
à l’objection N°2 : Comme, d’après les autres Pères, la matière fut d’abord
informe et qu’elle fut ensuite formée, de même le temps fut d’abord informe et
il fut ensuite formé, c’est-à-dire régulièrement divisé par le jour et la nuit.
Objection
N°3. Le temps est le nombre qui mesure les mouvements du firmament. Or, d’après
la Genèse, le firmament n’a été fait qu’au second jour. Donc le temps
n’existait pas dès le commencement.
Réponse
à l’objection N°3 : Si le mouvement du firmament (Le mot firmament ne désigne
pas ici les étoiles fixes, mais le premier mobile, que dans le système de
Ptolémée ou plaçait au-delà, et qui en était séparé par le second et le premier
cristallin.) n’a pas commencé immédiatement dès le principe, alors le temps qui
a précédé n’avait pas ce mouvement pour mesure, mais un autre mouvement premier
quelconque. Car si le temps a aujourd’hui pour mesure le mouvement du
firmament, c’est parce que ce mouvement est le premier de tous. Mais s’il y
avait un autre mouvement premier, ce mouvement deviendrait la mesure du temps,
parce que tous les êtres ont pour mesure ce qu’il y a de primordial dans leur
genre. Il faut donc dire que dès le commencement il y a eu un mouvement
quelconque, ne serait-ce que celui qui résulte de la succession des pensées et
des affections des anges. Or, on ne peut concevoir le mouvement sans le temps,
puisque le temps n’est rien autre chose que ce qui compte le moment d’avant et le
moment d’après dans le mouvement.
Objection
N°4. Le mouvement est antérieur au temps. On devrait donc mettre le mouvement
plutôt que le temps au nombre des choses qui ont été d’abord créées.
Réponse
à l’objection N°4 : Parmi les choses qui ont été primitivement créées, on
compte celles qui se rapportent généralement à tous les êtres. On a dû y
comprendre le temps, qui est la mesure commune de tout ce qui existe, mais on
n’a pas dû y comprendre le mouvement qui ne se rapporte qu’aux choses qui sont
mobiles.
Objection
N°5. Comme le temps est la mesure extrinsèque des choses, de même aussi le
lieu. On ne doit donc pas mettre le temps plutôt que le lieu au nombre des
choses qui ont été d’abord créées.
Réponse
à l’objection N°5 : Le lieu est compris dans le ciel empyrée qui embrasse tout.
Et comme le lieu est une chose permanente, il a été créé tout entier
simultanément. Mais le temps étant une chose qui passe, il a été créé seulement
dans son principe ; car maintenant encore on ne peut en saisir que l’instant
présent.
Mais
c’est le contraire. Car saint Augustin dit (Sup.
Gen. ad litt., liv. 1,
chap. 3) que les créatures spirituelles et corporelles ont été créées au
commencement du temps.
Conclusion
A l’origine du monde, le temps a été créé simultanément avec la matière
informe.
Il
faut répondre qu’ordinairement on distingue quatre choses qui ont été
primitivement créées : la nature angélique, le ciel empyrée, la matière
corporelle informe et le temps. Mais il faut remarquer que ce système n’est pas
celui de saint Augustin. Car il ne distingue que deux choses qui ont été
primitivement créées, la nature angélique et la matière corporelle, et il ne
fait aucune mention du ciel empyrée. Ces deux choses, d’après ce docteur, la
nature angélique et la matière informe, précèdent la formation des êtres, non
d’une priorité de temps, mais d’une priorité de nature. Comme ces deux choses
sont naturellement antérieures à la formation des êtres, elles sont également
antérieures au mouvement et au temps ; par conséquent, on ne peut pas dire que
le temps ait été créé avec elles. — L’autre énumération que nous avons faite
est conforme au sentiment des autres Pères qui admettent que l’informité de la
matière a précédé temporairement sa formation, parce que cette durée antérieure
suppose nécessairement l’existence du temps, autrement elle n’aurait pas eu de
mesure.
Copyleft. Traduction
de l’abbé Claude-Joseph Drioux et de JesusMarie.com qui autorise toute personne à copier et à rediffuser par
tous moyens cette traduction française. La Somme Théologique de Saint Thomas
latin-français en regard avec des notes théologiques, historiques et
philologiques, par l’abbé Drioux, chanoine honoraire de Langres, docteur en
théologie, à Paris, Librairie Ecclésiastique et Classique d’Eugène Belin, 52,
rue de Vaugirard. 1853-1856, 15 vol. in-8°. Ouvrage honoré des
encouragements du père Lacordaire o.p. Si par erreur, malgré nos vérifications,
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