Saint Thomas d’Aquin - Somme Théologique
2a 2ae = Secunda Secundae
= 2ème partie de la 2ème Partie
Question 44 : Des préceptes de la charité
Nous avons
ensuite à nous occuper des préceptes de la charité. — A cet égard huit
questions se présentent : 1° Devait-on établir des préceptes à l’égard de la
charité ? — 2° Fallait-il un ou deux préceptes ? — 3° Deux préceptes
suffisent-ils ? — 4° Est-il convenable de commander qu’on aime Dieu de tout son
cœur ? — 5° A-t-on eu raison d’ajouter : de
tout son esprit, etc. ? (Cet article a pour objet de justifier toutes ces
expressions de l’Écriture.) — 6° Peut-on accomplir ce précepte en cette vie ? —
7° Du précepte : Vous aimerez votre
prochain comme vous-même. (Cet article est l’explication de ces paroles de
l’Ecriture : Tu aimeras ton prochain
comme toi-même (Gal., 5, 14).) — 8° L’ordre de la charité est-il de
précepte ?
Article 1 : Devait-il
y avoir quelque précepte à l’égard de la charité ?
Objection N°1. Il semble qu’il
ne fallait pas qu’il y eût de précepte sur la charité. Car la charité impose le
mode d’être aux actes de toutes les vertus qui sont de précepte, puisqu’elle
est la forme des vertus, comme nous l’avons dit (quest. 23, art. 8). Or, le
mode n’est pas de précepte, comme on l’avoue généralement. On ne doit donc pas
établir de préceptes à l’égard de la charité.
Réponse à l’objection N°1 : Comme nous l’avons dit en
traitant des préceptes (1a 2æ, quest. 100, art. 10), le
mode de l’amour n’est pas l’objet des préceptes qui sont établis par rapport
aux autres actes de vertu. Ainsi l’acte de charité ne tombe pas sous ce
précepte : Honore ton père et ta mère
(C’est-à-dire qu’on peut remplir ce précepte sans le remplir par charité. Ainsi
celui qui honore son père et sa mère dans des vues purement humaines remplit ce
précepte, seulement il ne le fait pas d’une manière méritoire.), mais il tombe
sous des préceptes particuliers.
Objection N°2. La charité qui est répandue dans nos cœurs par l’Esprit-Saint
nous rend libres, parce que où est
l’esprit du Seigneur là se trouve la liberté, selon l’expression de
l’Apôtre (2 Cor., 3, 17). Or,
l’obligation qui résulte des préceptes est contraire à la liberté, parce
qu’elle impose une contrainte. Il ne doit donc pas y avoir de préceptes au
sujet de la charité.
Réponse à l’objection N°2 : L’obligation du précepte n’est
opposée à la liberté que pour celui dont l’esprit est éloigné de ce qui est
commandé, comme on le voit à l’égard de ceux qui gardent les préceptes de la
loi uniquement par crainte. Mais le précepte de l’amour ne pouvant être rempli
que par la volonté propre, c’est pour cette raison qu’il ne répugne pas à la
liberté.
Objection N°3. La charité est la première de toutes les vertus
auxquelles les préceptes se rapportent, comme on le voit d’après ce que nous
avons dit (quest. 31, art. 4, arg. 1 ; et 1a 2æ, quest. 90,
art. 2 ; quest. 100, art. 2). S’il y avait des préceptes qui regardent la
charité, ils devraient se trouver parmi les préceptes les plus remarquables,
qui sont les préceptes du Décalogue. Comme il n’y en a pas dans le Décalogue,
il s’ensuit qu’on n’a pas dû non plus en donner ailleurs.
Réponse à l’objection N°3 : Tous les préceptes du Décalogue
ont pour fin l’amour de Dieu et du prochain. C’est pour cela qu’on n’a pas dû
compter les préceptes de la charité parmi les préceptes du Décalogue, mais
qu’ils se trouvent renfermés dans chacun d’eux.
Mais c’est le contraire. Ce que Dieu demande de nous est l’objet
d’un précepte. Or, Dieu demande à l’homme de l’aimer, comme on le voit (Deut., chap. 10). Il doit donc y avoir des
préceptes sur la dilection de la charité qui est l’amour de Dieu.
Conclusion Puisque la charité mène l’homme à sa fin
dernière et le dispose à l’égard des moyens par lesquels il l’atteint, il a été
convenable qu’il y eût des préceptes à l’égard de cette vertu.
Il faut répondre que, comme nous l’avons dit (quest. 16, art. 1 ;
et 1a 2æ, quest. 99, art. 1), le précepte implique le
devoir. Par conséquent une chose est de précepte, selon qu’elle est de devoir.
Or, une chose est de devoir de deux manières : 1° par elle-même ; 2°
relativement à une autre. En toute circonstance ce qui appartient à la fin est
de devoir par soi-même, parce que ce qui appartient à la fin est bon absolument.
Mais le moyen qui se rapporte à la fin n’est qu’un devoir relatif. Ainsi le
devoir absolu du médecin, c’est de guérir, et son devoir relatif, c’est de
donner une médecine pour opérer la guérison. Or, la fin de la vie spirituelle,
c’est cette union de l’homme avec Dieu qui est produite par la charité. Tout ce
qui regarde la vie spirituelle tend à cela comme à sa fin. D’où l’Apôtre dit (1 Tim., 1, 5) : que la fin des commandements, c’est la charité qui naît d’un cœur pur,
d’une bonne conscience et d’une foi sincère. En effet, toutes les vertus
dont la loi ordonne la pratique ont pour but ou de purifier le cœur du
tourbillon des passions, comme les vertus qui ont les passions pour objet, ou
de rendre la conscience droite, comme celles qui regardent les opérations, ou
de conserver la pureté de la foi, comme celles qui ont rapport au culte divin ;
et ce sont ces trois choses que l’on exige pour qu’on aime Dieu. Car le cœur impur
est éloigné de l’amour de Dieu par la passion qui l’entraîne vers les choses terrestres.
La mauvaise conscience fait qu’on a horreur de la justice divine, parce qu’on
craint le châtiment. La foi qui est feinte trahit l’affection que l’on a pour
les choses qu’on suppose en Dieu, et qui écartent l’esprit de sa vraie notion.
Et comme en tout genre ce qui est absolu l’emporte sur ce qui est relatif, il
s’ensuit que le plus grand précepte a pour objet la charité, comme on le voit (Matth., chap. 22).
Article 2 :
A-t-on dû établir deux préceptes à l’égard de la charité ?
Objection N°1. Il semble qu’on
n’ait pas dû établir deux préceptes à l’égard de la charité. Car les préceptes
de la loi se rapportent à la vertu, comme nous l’avons dit (art. préc., Objection
N°3). Or, la charité est une vertu unique, comme nous l’avons prouvé (quest. 33,
art. 5). A l’égard de la charité on aurait donc dû n’établir qu’un seul
précepte.
Réponse à l’objection N°1 : Quoique la charité soit une vertu
unique, néanmoins elle se manifeste par deux actes dont l’un se rapporte à
l’autre (L’amour de Dieu et l’amour du prochain ; c’est pourquoi il faut des
préceptes qui se rapportent à ces deux sortes d’amour.) comme à sa fin. Les
préceptes ayant pour objet les actes des vertus, il a fallu établir plusieurs
préceptes de charité.
Objection N°2. Comme le dit saint Augustin (De doct. christ.,
liv. 1, chap. 27) : La charité n’aime que Dieu dans le prochain. Or, pour nous
porter à aimer Dieu, c’était assez de ce précepte : Vous aimerez le Seigneur votre Dieu. Il n’a donc pas fallu ajouter
un autre précepte pour l’amour du prochain.
Réponse à l’objection N°2 : On aime Dieu dans le prochain
comme la fin dans le moyen qui s’y rapporte ; cependant il a fallu établir
explicitement des préceptes à l’égard de l’un et de l’autre, pour la raison que
nous avons donnée (dans le corps de cette question.).
Objection N°3. Les divers péchés sont opposés à divers préceptes.
Or, on ne pèche pas en omettant d’aimer le prochain, si on n’omet pas d’aimer
Dieu. Il est même dit (Luc, 14, 26) : Si
quelqu’un vient à moi et qu’il ne haïsse pas son père et sa mère, il ne peut
être mon disciple. Le précepte de l’amour de Dieu n’est donc pas autre que
celui de l’amour du prochain.
Réponse à l’objection N°3 : Le moyen tire sa bonté de son
rapport avec la fin, et que c’est en ce sens, et non autrement, que l’on pèche
en s’écartant du moyen (Nous ne pouvons manquer à l’amour que nous devons au
prochain, sans manquer à l’amour que nous devons à Dieu ; mais si le prochain
était pour nous un obstacle qui nous détournât de l’amour de Dieu, nous
devrions haïr, non sa personne, mais son iniquité.).
Objection N°4. L’Apôtre dit (Rom.,
13, 8) : Celui qui aime le prochain a
accompli la loi. Or, on n’accomplit la loi qu’en observant tous ses préceptes.
Tous les préceptes sont donc renfermés dans l’amour du prochain ; un seul
précepte, celui de l’amour du prochain, suffit, et par conséquent il ne doit
pas y en avoir deux.
Réponse à l’objection N°4 : L’amour de Dieu est renfermé dans
l’amour du prochain, comme la fin dans le moyen qui s’y rapporte, et
réciproquement. Cependant il a fallu donner à l’égard de l’un et de l’autre un
précepte explicite pour la raison que nous avons exposée (dans le corps de
cette question.).
Mais c’est le contraire.
Saint Jean dit (1 Jean, 4, 21) : Nous avons reçu de Dieu ce commandement que
celui qui aime Dieu doit aussi aimer son frère.
Conclusion Non seulement on a dû faire un précepte à l’égard de
l’amour de Dieu, mais pour ceux qui sont peu instruits dans la loi divine, il a
fallu ajouter explicitement un précepte sur l’amour du prochain.
Il faut répondre que, comme nous l’avons dit (1a 2æ,
quest. 100, art. 1, réponse N°2, et quest. 91, art. 3, et quest. 94, art. 2) en
parlant des préceptes, les préceptes sont dans la loi ce que les propositions
sont dans les sciences spéculatives, dont les conséquences sont virtuellement
contenues dans les premiers principes. Par conséquent celui qui connaîtrait
parfaitement les principes dans toute leur étendue n’aurait pas besoin qu’on
lui en exposât les conséquences à part. Mais parce que tous ceux qui
connaissent les principes ne sont pas capables de voir tout ce qu’ils
renferment virtuellement, il est nécessaire, à cause de leur faiblesse, que
dans les sciences on déduise des principes les conséquences. Dans les choses
pratiques, où nous avons pour guides les préceptes de la loi, la fin tient lieu
de principe, comme nous l’avons dit (quest. 23, art. 7, réponse N°2, et quest. 26,
art. 1, réponse N°1). Or, l’amour de Dieu est la fin à laquelle se rapporte
l’amour du prochain. C’est pourquoi on n’a pas dû seulement ordonner d’aimer
Dieu, mais on a dû encore ordonner d’aimer le prochain, dans l’intérêt des
ignorants qui n’auraient pas aisément remarqué que l’un de ces préceptes était renfermé dans l’autre.
Article 3 : Est-ce
assez de deux préceptes à l’égard de la charité ?
Objection N°1. Il semble que ce
ne soit pas assez de deux préceptes à l’égard de la charité. Car les préceptes
se rapportent aux actes des vertus. Comme les actes se distinguent d’après les
objets, il s’ensuit que l’on doit aimer par charité quatre choses : Dieu,
soi-même, le prochain et son propre corps, comme on le voit d’après ce que nous
avons dit (quest. 25, art. 12, et quest. 26). Il devrait donc y avoir quatre
préceptes de charité ; par conséquent deux ne suffisent pas.
Réponse à l’objection N°1 : Comme le dit saint Augustin (De doct. christ., liv. 1, chap. 23), quoiqu’il y
ait quatre choses qu’on doive aimer par charité, il n’était pas nécessaire de
faire des préceptes pour la seconde et la quatrième, c’est-à-dire pour l’amour
de soi et de son propre corps. Car, dans quelque écart que l’homme tombe, il
lui reste toujours l’amour de soi et l’amour de son corps (Seulement, dans ce
cas nous ne nous aimons pas nous-mêmes, et nous n’aimons pas notre corps selon
Dieu.). Mais on doit prescrire à l’homme la manière dont il faut qu’il aime,
pour qu’il s’aime lui-même et qu’il aime son propre corps convenablement ; ce
qu’il fait d’ailleurs par là même qu’il aime Dieu et le prochain (C’est pour
cette même raison que le Décalogue ne prescrit pas à l’homme des devoirs envers
lui-même. Car, du moment qu’il remplit tous ses devoirs envers Dieu et le prochain,
ses facultés sont parfaitement ordonnées, et par conséquent il remplit ses
devoirs envers lui-même.).
Objection N°2. L’acte de-charité comprend non seulement l’amour,
mais la joie, la paix, la bienfaisance. Or, on doit établir des préceptes à l’égard
des actes des vertus. Deux préceptes de charité ne suffisent donc pas.
Réponse à l’objection N°2 : Les autres actes de charité
résultent de l’acte d’amour, comme l’effet naît de la cause, ainsi que nous
l’avons vu (quest. 28, art. 4, et quest. 29, art. 3). Par conséquent les
préceptes qui regardent les autres actes de cette vertu sont virtuellement
renfermés dans le précepte de l’amour. Toutefois, pour solliciter ceux qui sont
trop lents, il y a dans l’Ecriture des préceptes explicites pour chacun de ces
actes. Ainsi l’Apôtre dit, sur la joie (Philipp.,
4, 4) : Réjouissez-vous toujours dans le
Seigneur ; sur la paix (Héb., 12, 14) : Cherchez
la paix avec tout le monde ; sur la bienfaisance (Gal., 6, 10) : Pendant que
nous en avons le temps, faisons du bien à tous nos semblables. Il y a même
dans l’Ecriture des préceptes sur chaque partie de la bienfaisance, comme on le
reconnaît quand on la médite attentivement.
Objection N°3. Comme il appartient à la vertu de faire le bien, de
même il lui appartient d’éloigner du mal. Or, les préceptes affirmatifs nous
portent à faire le bien et les préceptes négatifs à éviter le mal. Il ne
devrait donc pas seulement y avoir à l’égard de la charité des préceptes
affirmatifs, mais encore des préceptes négatifs. Par conséquent les deux
préceptes de charité que l’on a précédemment rapportés ne suffisent pas.
Réponse à l’objection N°3 : C’est une plus grande chose de
faire le bien que d’éviter le mal ; c’est pour cela que les préceptes négatifs
sont renfermés virtuellement dans les préceptes affirmatifs. Cependant il y a
des préceptes explicites établis (Ces préceptes sont pour les faibles, qui ne
sauraient pas par eux-mêmes tirer ces conséquences.) contre les vices opposés à
la charité. Ainsi il est dit contre la haine (Lev., 19, 17) : Ne haïssez
pas votre frère dans votre cœur ; contre le dégoût (Ecclésiaste, 6, 26) : Ne vous ennuyez point des liens de la
sagesse ; contre l’envie (Gal.,
5, 26) : Ne devenons pas désireux de la
vaine gloire en nous provoquant et en nous portant envie mutuellement ;
contre la discorde (1 Cor., 1, 10) : Dites tous la même chose et qu’il n’y ait
pas de schisme parmi vous ; contre le scandale (Rom., 14, 13) : Ne soyez pas
une pierre d’achoppement ou un scandale pour votre frère.
Mais c’est le contraire.
Le Seigneur dit (Matth., 22, 40) : Toute la loi et
les prophètes sont renfermés dans ces deux commandements.
Conclusion Puisque le bien qui est l’objet de la charité est la
fin ou le moyen qui s’y rapporte, il ne doit y avoir que deux préceptes sur la
charité, et on les a convenablement exposés en disant que l’un a pour objet
l’amour de Dieu et l’autre l’amour du prochain.
Il faut répondre que la charité, comme nous l’avons dit (quest. 23,
art. 1), est une amitié. L’amitié se rapporte à un autre, et c’est de là que
saint Grégoire conclut (Hom. 17 in Evang.)
que la charité ne peut pas exister entre moins de deux individus. Nous avons
d’ailleurs expliqué comment par charité on s’aime soi-même (Nous ne pouvons
nous aimer de la sorte qu’autant que nous aimons Dieu comme notre fin.) (quest. 25, art. 4). Mais puisque l’amour a pour objet le
bien et que le bien comprend la fin ou le moyen qui s’y rapporte, il a suffi
d’établir deux préceptes à l’égard de la charité : l’un qui nous porte à aimer
Dieu comme notre fin, l’autre qui nous fasse aimer le prochain à cause de Dieu,
c’est-à-dire à cause de notre fin.
Article 4 :
Est-il convenable d’ordonner qu’on aime Dieu de tout son cœur ?
Objection N°1. Il semble qu’on
ne doive pas ordonner d’aimer Dieu de tout son cœur. Car le mode de l’acte
vertueux ne tombe pas sous le précepte, comme nous l’avons dit (art. 1 réponse
N°1, et 1a 2æ, quest. 100, art. 9). Or, ces mots de tout cœur impliquent le mode de
l’amour divin. C’est donc à tort que l’on dit dans le précepte qu’il faut aimer
Dieu de tout son cœur.
Réponse à l’objection N°1 : Le précepte qui a pour objet
l’acte d’une vertu quelconque ne comprend pas le mode ou la manière d’être que
cet acte reçoit d’une vertu supérieure ; mais le précepte embrasse le mode qui
appartient à l’essence propre de la vertu qu’il ordonne, et c’est ce mode que
ces mots expriment : De tout cœur.
Objection N°2. Le tout et le parfait est une chose à laquelle rien
ne manque, comme le dit Aristote (Phys.,
liv. 3, text. 63), Par conséquent, s’il est de
précepte qu’on aime Dieu de tout son cœur, quiconque fait une chose qui
n’appartient pas à l’amour de Dieu, agit contre le précepte et par suite pèche
mortellement. Or, le péché véniel n’appartient pas à l’amour de Dieu. Dans ce
cas il serait donc mortel, ce qui répugne.
Réponse à l’objection N°2 : Nous pouvons aimer Dieu de tout
notre cœur de deux manières : 1° En acte, c’est-à-dire de sorte que le cœur de
l’homme soit toujours actuellement porté tout entier vers Dieu ; c’est ce qui
constitue l’état de perfection de ceux qui sont dans le ciel. 2°
Habituellement, c’est-à-dire que le cœur de l’homme soit tout entier porté vers
Dieu, sans s’attacher à rien qui soit contraire à son amour. Cette perfection
existe ici-bas, le péché véniel ne lui est pas contraire ; car il ne détruit
pas l’habitude de la charité, puisqu’il ne tend pas à un objet qui lui soit
opposé, mais il en empêche seulement l’usage.
Objection N°3. Aimer Dieu de tout son cœur, c’est le fait de la
perfection, puisque, d’après Aristote (Phys.,
liv. 3, text. 64), le tout et le parfait sont une
même chose. Or, les choses parfaites ne sont pas de précepte, mais de conseil.
On ne doit donc pas ordonner d’aimer Dieu de tout son cœur.
Réponse à l’objection N°3 : La perfection de la charité à
laquelle les conseils se rapportent tient le milieu entre les deux perfections
dont nous venons de parler (Ces deux perfections sont celle des élus, qui n’est
pas possible en ce monde, et celle des chrétiens ici-bas, qui est de précepte
et qui consiste à ne faire aucun péché mortel. La perfection qui est de conseil
est plus élevée que cette dernière, mais elle l’est moins que la première ;
c’est ce qui fait dire à saint Thomas qu’elle tient le milieu entre l’une et
l’autre.) (Réponse N°2). Elle consiste en ce que l’homme se détache, autant
qu’il lui est possible, des choses temporelles, même de celles qui sont
permises, mais dont les préoccupations empêchent le cœur de se porter actuellement
vers Dieu.
Mais c’est le contraire.
Il est dit (Deut.,
6, 5) : Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur.
Conclusion Puisque nous devons aimer Dieu comme notre fin dernière
à laquelle nous devons tout rapporter, il était convenable qu’on nous ordonnât
de l’aimer de tout notre cœur.
Il faut répondre que puisque les préceptes ont pour objet les
actes des vertus, un acte n’est de précepte qu’autant qu’il est vertueux. Or,
pour qu’un acte soit vertueux, il faut non seulement qu’il porte sur une
matière légitime, mais il faut encore qu’il soit revêtu des circonstances
requises et qu’il soit par là même proportionné à l’excellence de sa matière.
Or, puisque nous devons aimer Dieu comme notre fin dernière, à laquelle il faut
tout rapporter, il s’ensuit que le précepte de l’amour de Dieu doit exprimer
une sorte de totalité ou
d’universalité (Si le précepte n’exigeait pas que l’on aimât Dieu de tout son
cœur, l’acte qu’il commanderait ne serait pas proportionné à son objet.).
Objection N°1. Il semble qu’après
ces paroles : Vous aimerez le Seigneur
votre Dieu de tout votre cœur, on ait eu tort d’ajouter (Deut., 6, 5) : Et de toute votre âme, et de toute votre force. Car le cœur ne
s’entend pas ici de l’organe corporel qui porte ce nom, parce que l’amour de
Dieu n’est pas un acte du corps ; par conséquent il faut qu’on prenne cette
expression dans un sens spirituel. Or, le cœur ainsi compris est l’âme
elle-même ou il en est une partie. Il était donc inutile d’ajouter ces autres
paroles.
Objection N°2. La force de l’homme dépend principalement du cœur,
soit qu’on prenne ce mot dans un sens spirituel, soit qu’on le prenne dans le
sens matériel. Donc, après avoir dit : Vous
aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, il était inutile
d’ajouter : De toute votre force.
Objection N°3. Saint Matthieu dit (Matth.,
22, 37) : De tout votre esprit.
Ce qu’on ne lit pas dans le Deutéronome (chap. 6). Il semble donc que dans la
loi ancienne ce précepte ait été mal exprimé.
Mais c’est le contraire. L’autorité de l’Ecriture est formelle.
Conclusion C’est avec raison qu’il nous est ordonné d’aimer Dieu
de tout notre cœur, c’est-à-dire de rapporter à lui notre intention tout
entière ; de tout notre esprit, c’est-à-dire de lui soumettre entièrement notre
intelligence ; de toute notre âme, c’est-à-dire de régler tous nos appétits
conformément à lui, et de toute notre force, c’est-à-dire de lui soumettre tous
nos actes extérieurs.
Il faut répondre que ce précepte se trouve exprimé de différentes
manières en divers endroits de l’Ecriture. En effet, dans le Deutéronome (chap.
6), il y a trois choses : De tout notre cœur,
de toute notre âme et de toutes nos forces. Saint Matthieu n’exprime que
deux (chap. 22) de ces paroles : De tout
notre cœur et de toute notre âme ; il omet de toutes nos forces, mais il
ajoute : De tout notre esprit. Saint
Marc en énumère quatre (chap. 12). Il dit : De
tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute notre
vertu ; ce qui revient au même que le mot force. Saint Luc (chap. 10)
exprime aussi ces quatre conditions ; puisqu’au lieu des mots latins fortitudo ou virtus, il emploie le mot vires,
qui est synonyme. C’est pourquoi nous devons assigner la raison de ces quatre
expressions ; car, s’il y en a une d’omise dans les autres passages, c’est
qu’elle se comprend d’après les autres (Elle est renfermée en elles
virtuellement.). — Par conséquent il faut observer que l’amour est l’acte de la
volonté qui est ici désignée par le cœur. Car, comme le cœur corporel est le
principe de tous les mouvements du corps, de même la volonté, surtout quand
elle se propose la fin dernière qui est l’objet de la
charité, est le principe de tous les mouvements de l’esprit. Or, les actes se
rattachent à trois principes qui sont mus par la volonté : il y a l’intellect,
qui est désigné par l’esprit (mens)
; la puissance appétitive inférieure, qui est exprimée par l’âme (anima), et la force extérieure
exécutive, que désignent les mots latins fortitudo,
virtus et vires. Il nous est donc ordonné d’élever notre intention tout
entière vers Dieu, et c’est l’aimer de tout
son cœur ; de lui soumettre notre intellect, et c’est l’aimer de tout son esprit ; de régler notre
appétit d’après lui, et c’est l’aimer de toute
notre âme ; enfin de lui obéir dans tous nos actes extérieurs, et c’est
l’aimer de toute notre force, de
toute notre vertu et de toutes nos puissances. Toutefois saint Jean Chrysostome
(Hom. 42 in Matth.,
op. imperf.) entend dans un autre sens que le
nôtre les mots cœur et âme (Cette homélie a été faussement
attribuée à saint Chrysostome. D’ailleurs l’auteur entend la partie supérieure
de l’homme par l’âme, et la partie inférieure par le cœur.). Saint Augustin (De doct. christ., liv. 1, chap. 22) rapporte le cœur
aux pensées, l’âme à la vie, l’esprit à l’intellect. D’autres entendent par le cœur l’intellect ; par l’âme, la volonté ; par l’esprit, la mémoire. Ou bien, suivant
Némésius (On attribuait faussement cet ouvrage à saint Grégoire de Nysse.) (Lib. de hom. opif., chap. 8), le cœur
exprime l’âme végétative ; l’âme,
la partie sensitive, et l’esprit, la
partie intelligente ; parce que nous devons rapporter à Dieu ce qui produit en
nous la vie, le sentiment et l’intelligence.
La réponse aux objections est par là même évidente.
Article 6 : Le
précepte de l’amour de Dieu peut-il être accompli en cette vie ?
Objection N°1. Il semble qu’on
puisse observer en cette vie le précepte de l’amour de Dieu. Car, d’après saint
Jérôme (Expos. fid.
ad Damas.), il est maudit celui qui prétend que Dieu a commandé
l’impossible. Or, Dieu a donné ce précepte, comme on le voit dans le
Deutéronome (chap. 6). Il est donc possible de l’accomplir ici-bas.
Réponse à l’objection N°1 : Ce raisonnement prouve que l’on
peut accomplir ici-bas ce précepte d’une certaine manière, quoiqu’on ne
l’accomplisse pas parfaitement.
Objection N°2. Quiconque n’accomplit pas un précepte pèche
mortellement ; parce que, d’après saint Ambroise, le péché n’est rien
autre chose qu’une transgression de la loi divine et une désobéissance aux
ordres du ciel. Si donc il n’est pas possible d’observer ce précepte ici-bas,
il s’ensuit que nul ne peut être sur cette terre sans péché mortel, ce qui est
contraire à ces paroles de l’Apôtre (1
Cor., 1, 8) : Dieu vous affermira
jusqu’à la fin sans péché. Et ailleurs (1
Tim., 3, 10) : Qu’ils soient admis
dans le saint ministère, s’ils ne sont coupables d’aucun crime.
Réponse à l’objection N°2 : Comme le soldat qui combat
légitimement n’est pas coupable et ne mérite pas d’être puni, s’il ne remporte
pas la victoire ; de même celui qui n’accomplit pas ce précepte ici-bas, mais
qui ne fait rien de contraire à l’amour de Dieu, ne pèche pas mortellement.
Objection N°3. Les préceptes ont été établis pour diriger les
hommes dans la voie du salut, d’après ces paroles du Psalmiste (Ps. 18, 9) : La loi du Seigneur est une lumière qui éclaire les yeux. Or, il est
inutile de diriger quelqu’un vers un but qu’il ne peut atteindre. Il n’est donc
pas impossible d’observer ce précepte ici-bas.
Réponse à l’objection N°3 : Comme le dit saint Augustin (De perf. just.,
chap. 8) : Pourquoi ne ferait-on pas à l’homme un précepte de cette perfection,
quoique personne ne la possède en ce monde ? Car on ne court pas bien, si l’on
ne sait pas où l’on doit courir. Et comment le saurait-on, s’il n’y avait aucun
précepte qui l’apprît (Il faut toujours à l’homme un idéal de perfection qui
sollicite sans cesse ses efforts. Il ne parvient pas à réaliser parfaitement
cet idéal, mais il l’a toujours sous les yeux, et il se perfectionne en
s’efforçant de l’atteindre.).
Mais c’est le contraire. Saint Augustin dit (De perf. just., chap. 8) que
ce précepte sera accompli dans la plénitude de la charité des élus, parce que
tant qu’on a à réprimer un reste de concupiscence charnelle, on n’aime pas Dieu
absolument de toute son âme.
Conclusion Quoiqu’il n’y ait que dans le ciel qu’on accomplisse
parfaitement le précepte de l’amour, cependant ici-bas on peut l’accomplir
imparfaitement selon qu’on participe plus ou moins à la bonté de Dieu.
Il faut répondre qu’on peut accomplir un précepte de deux
manières, parfaitement ou imparfaitement. — On l’accomplit parfaitement quand
on arrive à la fin que se propose celui qui l’a établi. On l’accomplit
imparfaitement quand on ne s’écarte pas de l’ordre qui mène à cette fin, bien
qu’on n’atteigne pas la fin elle-même. Par exemple, si un général d’armée
ordonne à ses soldats de combattre, il remplit parfaitement le précepte celui
qui, en combattant l’ennemi, remporte la victoire que son chef avait en vue. Il
le remplit, mais imparfaitement, celui dont les efforts ne sont pas couronnés
de succès, pourvu que toutefois il n’agisse pas contrairement à la discipline
militaire. Or, par ce précepte, Dieu veut que l’homme lui soit totalement uni,
ce qui aura lieu dans le ciel quand Dieu
sera tout en tous, comme le dit l’Apôtre (1 Cor., 15, 28). C’est pourquoi ce précepte s’accomplira pleinement
et parfaitement dans le ciel. Il s’accomplit aussi ici-bas, mais d’une manière
imparfaite (Car il n’y a personne, quelque juste qu’il soit, qui ne commette
quelques péchés.). Toutefois, sur cette terre, il y en a qui l’accomplissent
plus parfaitement que d’autres, selon qu’ils approchent davantage de la
perfection que nous aurons dans le ciel.
Article 7 : Est-il
convenable qu’il y ait un précepte qui nous ordonne d’aimer notre prochain ?
Objection N°1. Il semble que ce
soit à tort que l’on ait commandé d’aimer le prochain. Car l’amour de la
charité s’étend à tous les hommes, même aux ennemis, comme on le voit (Matth., chap. 5). Or, le mot de prochain implique une
espèce de proximité qui ne paraît pas exister entre tous les hommes. Il semble
donc qu’on ait mal établi ce précepte.
Objection N°2. D’après Aristote (Eth., liv. 9, chap. 8) : Ce que l’on aime pour autrui provient de ce
que l’on aime pour soi. D’où il résulte que l’amour de soi est le principe de
l’amour du prochain. Mais comme le principe l’emporte sur la conséquence qui en
découle, il s’ensuit que l’homme ne doit pas aimer le prochain comme lui-même.
Objection N°3. L’homme s’aime lui-même naturellement, mais il
n’aime pas ainsi le prochain. C’est donc à tort qu’on lui commande d’aimer son
prochain comme lui-même.
Mais c’est le contraire. Il est dit (Matth.,
22, 38) : Le second précepte est semblable au premier : Vous aimerez votre
prochain comme vous-même.
Conclusion Indépendamment de l’amour de Dieu, il était convenable
d’ordonner à l’homme d’aimer son prochain comme lui-même, c’est-à-dire d’un
amour saint, juste et véritable.
Il faut répondre que ce précepte est parfaitement conçu ; car il
renferme la raison et le mode de l’amour que nous devons à nos semblables. La
raison est indiquée par le mot de prochain
sous lequel on comprend tous les hommes. Car le motif pour lequel nous
devons aimer par charité les autres hommes, c’est qu’ils sont nos proches,
parce qu’ils sont faits par nature à l’image de Dieu et qu’ils sont aptes à
jouir de sa gloire (Ces deux caractères sont communs à tous les hommes, et, à
ce titre, ils sont membres de la même famille.). Il est d’ailleurs indifférent
qu’on emploie le mot de prochain, ou qu’avec saint Jean on se serve du mot de frère (1 Jean, chap. 4) ou qu’on prenne
le mot d’ami (Lév., chap. 19), parce que toutes ces expressions désignent la même
affinité. — On indique le mode de l’amour en disant : comme vous-même ; ce qui ne signifie pas qu’on doive aimer le
prochain autant que soi-même (Ce qui serait faux, car nous devons préférer
notre salut à celui des autres.), mais d’un amour semblable, et cela de trois
manières : 1° Par rapport à la fin : il faut qu’on aime le prochain à cause de
Dieu (Et non dans des vues d’intérêt inspirées par l’égoïsme.), comme on doit
s’aimer soi même à cause de lui ; de telle sorte que l’amour du prochain soit saint. 2° Par rapport à la règle de
l’amour. On ne doit pas condescendre aux désirs du prochain au point de faire
pour lui le mal, mais on ne doit faire que le bien, comme l’homme ne doit
satisfaire sa volonté qu’autant qu’elle désire de
bonnes choses. Par conséquent il faut que l’amour du prochain soit juste. 3° Par rapport à la raison de
l’amour. Il ne faut pas qu’un individu aime le prochain pour son intérêt propre
ou son plaisir ; mais il faut qu’il veuille le bien du prochain, comme il
veut son propre bien, et que par là même l’amour du prochain soit vrai. Car, quand on aime le prochain par
intérêt ou pour son propre plaisir, ce n’est pas l’aimer véritablement, mais
c’est s’aimer soi-même (Ces considérations bien développées pourraient être
l’objet d’un excellent discours sur ce sujet.).
La réponse aux objections est par là même évidente.
Article 8 : L’ordre
de charité tombe-t-il sous le précepte ?
Objection N°1. Il semble que
l’ordre de charité ne tombe pas sous le précepte. Car quiconque transgresse un
précepte fait une injure. Or, si l’on aime quelqu’un autant qu’on le doit et
qu’on en aime un autre davantage, on ne fait injure à personne. Par conséquent
on ne transgresse pas de précepte. L’ordre de la charité n’est donc pas
commandé.
Réponse à l’objection N°1 : L’homme fait plus à celui qu’il
aime davantage. Par conséquent si quelqu’un aimait le moins celui qu’il doit
aimer le plus, il voudrait par là même faire plus de bien à celui à qui il en
doit le moins, et par suite il ferait injure à celui qui devrait être l’objet
spécial de son amour (Ainsi il y aurait injustice à aimer des étrangers plus que
nos propres parents et à négliger ceux-ci pour s’occuper des autres.).
Objection N°2. L’Ecriture nous fait connaître suffisamment les
choses qui sont de précepte. Or, l’Ecriture ne parle en aucun endroit de
l’ordre de la charité que nous avons établi plus haut. Cet ordre n’est donc pas
de précepte.
Réponse à l’objection N°2 : L’Ecriture exprime l’ordre des
quatre choses (Ces quatre choses sont : Dieu, notre âme, le prochain et notre
propre corps.) que nous devons aimer par charité. Car le précepte qui nous
ordonne d’aimer Dieu de tout notre cœur,
nous fait comprendre que nous devons l’aimer par-dessus toutes choses. Quand on
nous dit d’aimer le prochain comme
nous-mêmes, on met l’amour de soi avant l’amour du prochain. De même quand
saint Jean nous dit (1 Jean, 3, 16) que nous
devons donner notre âme, c’est-à-dire notre vie corporelle, pour nos frères, il nous donne à
entendre que nous devons aimer le prochain plus que notre propre corps. Enfin
lorsque saint Paul écrit (Gal., chap.
6) : Faisons du bien à tous, mais
principalement aux serviteurs de la foi, et qu’il blâme (1 Tim., chap. 5) celui qui n’a pas soin de ses gens et surtout de ses domestiques,
il nous fait comprendre que parmi le prochain nous devons aimer davantage ceux
qui sont les meilleurs et ceux qui nous sont les plus proches (Et par là on
entend ceux qui nous sont les plus proches par le sang, ou par alliance, ou par
amitié.).
Objection N°3. L’ordre implique une distinction. Or, on commande
indistinctement l’amour du prochain quand on dit : Vous aimerez votre prochain comme vous-même. L’ordre de la charité
n’est donc pas de précepte.
Réponse à l’objection N°3 : En disant : Vous aimerez votre prochain, on fait entendre par là même que nous
devons aimer davantage ceux qui nous sont les plus proches.
Mais c’est le contraire. Ce que Dieu produit en nous par la grâce,
il nous l’apprend par les préceptes de la loi, d’après ces paroles du prophète
(Jérem., 31, 33) : Je mettrai une loi dans leurs cœurs. Or, Dieu produit en nous
l’ordre de la charité, d’après ces autres paroles de l’Ecriture (Cant., 2, 4) : Il a ordonné en moi la charité. L’ordre de la charité tombe donc
sous le précepte de la loi.
Conclusion L’ordre de la charité est certainement de précepte,
puisqu’il appartient à l’essence même de la vertu.
Il faut répondre
que, comme nous l’avons dit (art. 4, réponse N°1), le mode qui appartient à
l’essence de l’acte vertueux tombe sous le précepte qui ordonne cet acte. Or,
l’ordre de la charité appartient à l’essence même de cette vertu, puisqu’on le
considère selon la proportion qu’il y a entre l’amour et l’objet qu’on aime,
ainsi que nous l’avons dit (quest. 25, art. 12 ; quest. 26, art. 1 et 2). D’où
il est manifeste que l’ordre de la charité doit être de précepte.
Copyleft. Traduction
de l’abbé Claude-Joseph Drioux et de JesusMarie.com qui autorise toute personne à copier et à rediffuser par
tous moyens cette traduction française. La Somme Théologique de Saint Thomas
latin-français en regard avec des notes théologiques, historiques et philologiques,
par l’abbé Drioux, chanoine honoraire de Langres, docteur en théologie, à
Paris, Librairie Ecclésiastique et Classique d’Eugène Belin, 52, rue de
Vaugirard. 1853-1856, 15 vol. in-8°. Ouvrage honoré des encouragements du
père Lacordaire o.p. Si par erreur, malgré nos vérifications, il s’était glissé
dans ce fichier des phrases non issues de la traduction de l’abbé Drioux ou de
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