LA JUSTICE.
CHAPITRE X.
DD SEPTIÈME PRÉCEPTE.
PREMIER POINT.
De la justice, du droit et du domaine.
, ?. Division delà justice, du droit et du domaine.
2. Pécules du fils de famille. Du pécule castrense
et quasi-castrense.
3. Du pécule profectice et des biens donnés en
patrimoine, ou que le fils a acquis dans le com-merce par sa propre
industrie.
4· Du pécule adventice.
5. Biens de la femme.
6. Biens des clercs: i0bienspatrimoniaux,20biens industriels, 3°
biens ecclésiastiques, 4° biens parci-moniaux.
7. Si le bénéficier a la propriété
absolue des fruits.
8. Celui qui reçoit les fruits du bénéficier.
9. Manière d'acquérir la propriété. 10
à |3. De la prescription.
I. La justice se divise en légale, distributive et commutative.
La légale a rapport aux. droits et aux peines, selon les lois; la
distributive, aux mérites ?. xxiv.
?
INSTRUCTION PRATIQUE
des personnes , touchant les récompenses et les di-gnités
; la commutative « à la valeur des biens, afin qu'il soit
rendu à chacun ce qui lui appartient. Le droit se divise en droit
sur la chose (jus in re) et droit à la chose (jus ad Tem). On appelle
droit à la chose, celui qui donne action pour réclamer une
chose, quoiqu'elle ne nous soit pas encore obligée. Ensuite on appelle
droit sur lachose, celui qui donne l'action à l'égard d'une
chose déjà obligée, tel est le droit qu'acquiert l'acheteur
sur la chose vendue, ou le clerc sur le bénéfice à
lui conféré. De là, le droit sur la chose se divise
en domaine et usufruit. Le domaine se rapporte ou à la juridiction,
à l'égard des sujets, ou à la propriété,
à l'égard des biens. Dansl'un et l'autre, on distingue le
domaine direct, qui appartient au prince sur le feude, et au proprié-taire
sur le fonds donné en empliytéose ; l'autre est le domaine
utile, qui appartient au feudataire et à l'emphytéote. L'usufruit
est le droit de percevoir et même d'aliéner les fruits d'un
fonds, à la différence de l'usage 5 car celui'qui a ce dernier
droit peut bien se servir des fruits jusqu'à concurrence de ses
besoins et de ceux de sa famille, mais il ne peut les aliéner à
des étrangers (l).
IL Voyons maintenant sur quels biens s'exerce le domaine des fils de
famille, des femmes et des clercs. Et d'abord en ce qui concefne les fils
de famille, il faut remarquer que leur pécule peut être de
quatre sortes : castrehse, quasi-Castrense, profec-tice et adventice. Ie
Le pe*cule castrense comprend les biens que le fils acquiert dans le service
mili-taire ou à cause du service militaire ; 20 le pécule
(1) Lib. III. ?. 486 et A87·
POUR LES CONFESSEURS.
0
nuasi-castrense comprend les biens acquis dans les emplois publics
en qualité de juge, d'avocat, de lecteur, de médecin, et
même de notaire, comme l'enseignent Navarre, Molina et Lugo; Sanchez
y ajoute l'architecte du prince ou de la ville. De ces deux pécules,
le fils de famille en a le domaine en-tier, la propriété
et l'usufruit. La même chose se dit des biens que le fils de famille,
qui est clerc, acquiert ainsi au moyen de l'office clérical (ainsi
que le dé-cident les Authent. ?. c. de episc. et cleric), comme
par tout autre titre, suivant le sentiment unanime de Lugo, Sanch., Molina,
etc. (1). Exceptez-en le titre du bénéfice, en vertu duquel
c'est une question de savoir si le clerc acquiert la pleine propriété
d'es fruits, Comme nous le verrons au n. 7.
III. Le pécule profectice Comprend les biens que le fils a gagnés
en négociant l'argent du père, ou pareillement ceux qui ont
été donnés au fils, mais seulement en considération
du père. Ce pécule ap-partient tout entier au père
, tant pour la propriété que pour l'usufruit. Néanmoins
on remarque, i°que lorsqu'il est douteux si les biens ont été
donnés au fils par égard pour lui ou par égard pour
le père , alors seulement le fils peut les garder 'entièrement,
lorsqu'il a commencé de les posséder de bonne foi. On remarque,
2° que les biens donnés par le père au fils en patrimoine,
pour se faire recevoir dans les ordres sacrés, ne sont plus profectices;
mais ils doi-vent, sans aucun doute, se partager avec les autres frères,
lorsque celui qui est clerc demandera sa portion de l'hérédité
paternelle. On remarque, 3°que si le fils a négocié les
biens paternels au nom de son
(») Lib. m. n. 488.
4
INSTRUCTION PRATIQUE
père, les bénéfices constitueront un pécule
profec-tice; mais si c'est en son propre nom, le pécule sera adventice,
comme l'enseignent Lugo et Molina; et lorsqu'il est douteux si les bénéfices
sont provenus des biens du père ou de ceux du fils, alors seule-ment
on les regarde comme profectices, si le fils a eu l'administration des
biens paternels ; Lugo avec Gomez, Bartole, etc. On remarque, 4° <ïue
si Ie fils, lorsqu'il négocie les biens paternels, est domicilié
hors de la maison paternelle, et ne reçoit rien de son père
pour les aliments, alors les bénéfices qu'il fait sont adventices
; mais s'il fait ce négoce dans la maison du père, et s'il
en reçoit des aliments, ils sont profectices. Mais cependant si
les services du fils ont été très considérables,
il peut en demander le prix (1). Sur ce, voyez au chap, ?, ?. 22&·.
IV. Enfin le pécule adventice comprend les biens qui arrivent
au fils de famille d'autre part que du patrimoine paternel, ou qui sont
donnés au fils seulement par égard pour lui-même. De
ces biens, le père peut disposer de ceux qui se consomment par l'usage,
mais à charge de les rendre à son fils après sa mort
; ceux qui ne se consomment pas par l'usage, le fils en a la propriété,
et le père l'usu-fruit , lors même que ce sont des biens constituant
un majorât, comme le dit le cardinal de Lugo. Mais dans certains
cas, l'usufruit appartient aussi au fils, comme cela serait si l'usufruit
même était expressé-ment donné au fils, ou si
la donation était faite contre la volonté du père.
Deuxièmement, si le fils succède, concurremmentaveclepère,à
l'héréditédes frères. Troisièmement,
si le fils reçoit sa dot sans
(i) Lib. HI,-?. 488. V. m. Peculium,
POUR LES CONFESSEURS.
5
s'obliger envers le père. Du reste, hors de ces cas, le fils
ne peut disposer des biens,adventices sans le consentement de son père;
et il ne peut pas, même avec ce consentement, en disposer, par testament,
si ce n'est pour objet de piété, comme dans le cha-pitre
Licet. 4. de sepult. in 6. Ensuite l'usufruit ap-partient au père,
quoique le fils soit affranchi de la puissance paternelle, pourvu qu'il
n'ait pas été nommé à ? episcopal ou à
quelque autre grande di-gnité; Salmant. et Holzmann. Si le père
émancipe volontairement son fils, le cardinal de Lugo dit que* dans
ce cas., l'usufruit appartient pour moitié au père, et^our
l'autre moitié au fils. Mais il n'en est pas ainsi s'il l'émancipé
pour cause de mariage. Il dit de plus, que si le père permet au
fils de partir de sa maison, il ne décide pas pour cela qu'il lui
fait remise dudit usufruit, à moins qu'il le congédie pour
se procurer ailleurs des aliments, ou lorsque le fils emploie cet usufruit
en le vendant sans que le père y mette opposition (i).
V. En second lieu, pour ce qui concerne les biens des femmes, les uns
sont dotaux, les autres paraphernaux ; de ceux-ci elles ont le plein domaine.
Quant aux biens dotaux, l'usufruit et l'administra-tion appartiennent au
mari, la propriété à la femme; et par cette raison,
à la mort du mari, elle est préfé-rée à
tous ses autres créanciers personnels, et elle peut répéter
la dot, même du vivant de son mari, sicelui-cicherche à se
mettredansTimpossibilité-de la restituer. Mais si la dot consiste
en argent, ou en autres objets qui se consomment par l'usagé, le
mari en acquiert la pleine propriété, à charge d'en
(0 Lib. m. ?. ??.
6
INSTRUCTION PRATIQUE
restituer ensuite le prix à la femme ; il en est de même
pour les biens immeubles donnés au mari, après en avoir fait
une estimation préalable, et avec intention de lui en faire une
rente. Par conséquent, si les biens viennent à périr,
ils périssent pour le mari (1).
VI. Enfin, en troisième lieu, en ce qui concerne les clercs,
on distingue quatre sortes de biens : i° les biens patrimoniaux qui
arrivent aux clercs par une cause profane; a° les
biens industriels ou bien quasi-patrimoniaux, qui
sont acquis parle clerc dans l'exercice des fonctions ecclésiastiques,
tels son ties honoraires des messes et des sermons; 3°Jes biens ecclésiastiques
qui sont les revenus des bénéfices; 4° les biens parcimoniaux
qui sont ceux que le clerc déduit des fruits de son bénéfice,
pour son entre-tien, envivantavec économie, autant que la décence
le permet. i° Quant aux biens patrimoniaux, on ne doute pas que le
clerc n'en ait la pleine propriété. 2° La même
chose s'applique aux biens industriels, suivant le sentiment commun deLessius,
Sanchez, Castrop., Lugo, Anacl., Salmant., etc., et c'est avec raison
que Sylvest., Azor, Aug., Bonac, Lugo, Salmant., Less., etc.,
disent de même des distri-butions quotidiennes que l'on donne aux
chanoines (Navar. et Sanch.), parce que ces rémunérations
ne proviennent pas directement du titre constitutif du bénéfice,
mais elles sont le prix du service person-nel (2). 3° La même
chose s'applique aux biens par-cimoniaux, dont le clerc peut disposer suivant
son bon plaisir, comme le décident encore à l'unanimité
(1) Lib. ??. n. 489. (») N. 490 et 491.
POUR LES CONFESSEURS..
J
Navarr., Cabassut., Soto, Less., Anacl., Covarruv. et autres, contrairement
à Petrocor., et à un petit nombre d'autres (1). Saint Thomas
(2) enseigne ex-pressément la même chose en ces^termes : «
De his » autem qua? sunt specialiter suo usui (c'est-à-dire
» du clerc) députai», videtur esse eadem ratio »
quam de propriis bonis. » La raison en est que ces fruits sont accordés
au clerc comme rémunération des fatigues qu'il supporte pour
faire le service de l'église, ainsi que le déclara jadis
le concile d'Agde (can. 36) (?).
VII. 4° La plus grande difficulté s'élève
relati-vement aux biens ecclésiastiques, pour savoir si le clerc
est tenu de restituer le superflu de son entre-tien , quand il en fait
un mauvais usage. Nul doute que le bénéficiaire ne commette
un péché mortel en dépensant mal à propos les
fruits qu'il a de reste, et en ne les réservant pas pour les pauvres
ou pour quelque autre cause pieuse, comme le disent d'un commun accord
les docteurs (4). Le doute s'élève sur la question de savoir
s'il est en outre tenu d'en faire la restitution. La premiere opinion veut
qu'il y soit tenu : elle est partagée par Laym., Concina., Habert,
Ronc., Petrocor, etc., parce que, disent-ils ', il n'est pas prouvé
que le bénéficiaire ait acquis le domaine des fruits du bénéfice;
et si jamais il l'acquiert (comme le disent Laym., Roncaglia, Bo-nac.,
etc.), il acquiert u/i domaine limité (suivant l'intention de l'Église,
à laquelle appartient le domaine souverain des biens ecclésiastiques),
c'est-à-dire un
(1) Lib. Ill, ?. 49?. V. m. idem. (a) 2. 9. q. i83. a. 7. (5J Lib.
III. n. 49 x. (4) Ibid, ad 4.
8
INSTRUCTION PRATIQUE
domaine qui l'oblige à dépenser le surplus en faveur
des pauvres. Ceux qui soutiennent l'opinion con-traire s'appuient sur la
division admise à une cer-taine époque par le pape Simplicius,
lequel distribua ainsi les biens ecclésiastiques, un quart à
l'Église, un quart à l'évêque, un quart aux
pauvres, et le dernier quart aux clercs. Mais Helbert répond que
cette di-vision n'a jamais été mise en pratique, d'où
il pré-tend que tant qu'on ne prouve pas qu'elle a réelle-ment
existé, les pauvres gardent leurs droits sur les biens ecclésiastiques
qui excèdent l'entretien des clercs (i). A.u reste, en définitive,
on ne peut pas nier que l'opinion opposée de Cabass., Azor, Less.,
Lugo, Salm., Holzm. , etc.,ne soit assez probable, et spécialement
d'après l'autorité de saint Thomas(2), qui enseigne expressément
qu'on doit appliquer aux biens du bénéfice la même
décision qui s'applique aux biens patrimoniaux ; d'où il
prétend, en un autre endroit, que si le clerc abuse des fruits de
la pré-bende, « non tenetur ad restitutionem, sed solum »
ad poenitentiam peragendam (?) ; » et à l'endroit précité
le saint suppose assurément que la division des biens fut bien exécutée.
Au contraire, comme l'écrit un autre auteur moderne, le pape Simplicius
n'inventa pas la division dont nous parlons, mais il la trouva déjà
introduite, et seulement il en ordonna l'exécution, comme on le
voit d'après sa lettre par laquelle il ordonna que l'évêque
Gaudentius resti-tuât les trois portions des rentes ecclésiastiques
qu'il s'était appropriées pendant trois ans, et qu'il gardât
(1) Lib. III. n. 4ga.
(2) a. 2. q. i85. a. 7.
(5) Quod lib. VI. a. 12. ad. 3.
POUR LES CONFESSEURS.
9
seulement la part qui lui était due : « Sed sola ex. his
» quarta portio remittatur; tres illas portiones quas , per triennium
dicitur sibi tantum modo vindicasse, » restituat (J). » D'où
les auteurs qui professent la secondé opinion tirent la conséquence
que les fruits des bénéfices attribués aux clercs
tombaient jadis en leur domaine. Cela est confirmée par le concile
de Trente, Sess. 2/J. c. 12. de Réf. en ces termes: « Fructum
quos ratione etiam prebendse, ac resi-»dentise fecit suos, ->eX.
par le concile de Latran, Sess. 9, § Statuimus, d'où l'on dit
que le bénéficiaire, lorsqu'il n'assiste pas à l'office
après six mois depuis le jour de son entrée en possession
, « fructus suos mon facit. »Donc, s'il y assiste , il fait
valablement les fruits siens.
VIII. En cinquième lieu, on demande si celui qui reçoit
indûment du bénéficiaire ces fruits superflus , esttenu
de les restituer aux pauvres. Il fautdistinguer : si, par cette donation,
le bénéficiaire ne s'est pas mis dans l'impuissance de satisfaire
à son obligation, et si le donataire a reçu lesdits fruits
de bonne foi, celui-ci n'est tenu de rien restituer, parce qu'il les a
reçus du clerc qui en était probablement (comme on l'a dit
plus haut) le maître, tout au moins avec un domaine limité.
Du reste, si le clerc se rend insol-vable par cette donation^, et que la
foi du donataire qui reçoit ces fruits soit mauvaise ou douteuse,
nous disons qu'il devra les restituer aux pauvres, au moins pour moitié,
selon ce qui a été décidé pour un cas semblable
, au n. ia6. Je dis pour moitié, parce que la première opinion,
à laquelle adhère saint Thomas, étant déjà
très probable (celle qui
(1) Epist, simpl. ad Florent, ap. Hardui. in collect, concil. ** ff.
p. S80.
10
INSTRUCTION PRATIQUE
veut que le clerc soit maître absolu des fruits), le donataire
ne peut être tenu de restituer le tout ; mais
11 est convenable qu'il soit tenu au moins pour la moitié,
parce que ce n'est pas en s'appayant sur une seule opinion plus ou moins
probable que l'on peut s'approprier une chose quelconque, comme on le décide
en pareille circonstance (i). Relativement à l'administration des
fruits, on observe d'autres règles qui seront exposées au
chap, ???, ? 45, quand on traitera des obligations des clercs,
IX. Examinons en dernier lieu les différentes manières
d'acquérir le domaine. Il s'acquiert de trois manières :
par la volonté du maître, par le droit naturel des gens et
par le droit positif. i° Le do-maine s'acquiert par lavolonté
privée du maître; nous parlerons de ce mode en traitanfdes
contrats; 2° par le droit naturel des gens, comme i. par Y occupation,
parce que les choses qui n'ont pas de maître appar-tiennent au premier
occupant. § Fera ins t. de rer. div. (On parlera des trésors
et des objets trouvés par cas fortuit, aux n. 69 et 70.) 2. La naissance,
d'après la règle qui attribue au maître le croît
de$ animaux. § idem, eodem tit. 3U \ì alluvion, d'après
la-quelle si un accroissement se fait insensiblement au terrain d e quelqu'un,
il lui appartient, mais ? on si cela a lieu d'une manière patente.
§ Prœterea eod. 4. La spécification, lorsque quelqu'un confectionne
un objet avec une matière appartenant à autrui, par exemple,
s'il fait un habit avec de la laine appartenant à autrui. §
Cumexaliena.h. Uaecession : par exemple, si à votre habit on ajoute
un ornement qui ne peut s'en déta-cher facilement,comme une broderie,cet
ornement
(») Lib. III. n. 665. ad,67i.
POOR I*ES CONFESSEURS.
Il
devient votre propriété. § Sic tamen (?). 6. La
con-fusion, comme de l'huile avec de l'huile, ou bien la commijction, comme
de l'argent avec de l'argent, du blé avec du blé; alors l'objet
appartient à celui qui en est en possession (pourvu qu'il ait fourni
la par-tie la plus considérable de l'objet), avec l'obligation néanmoins
d'indemniser le maître de la plus petite portion, comme on le voitl.
alieninummi.§ DEsolut. Et ce que nous disons de l'argent s'applique
aussi aux autres choses semblables, comme le disent Les., Lug., Vasq.,
Silv., etc. Du reste, le maître de la plus petite portion peut toujours
retirer de parmi les choses entassées celle qui lui appartient,
comme le disent probablement Less., Castop,, les Salmant. et Trullench.
(2). 7. h'édification: si quelqu'un con-struit sur son sol avec
des matéiûaux appartenant à autrui, il acquiert la
propriété des matériaux, mais il est tenu de payer
le double de leur valeur. Si en-suite un autre construit avec ses propres
matériaux sur un sol qu'il sait appartenir à autrui, il perd
le tout, § Cum in suo inst. de rer. div., parce que l'on présume
qu'il voulait donner ces matériaux. Mais il en est différemment
lorsqu'il est bien constant qu'il n'a pas voulu les donner. 1. 1. c. de
rei vindic. 8. La plantation : comme lorsque quelqu'un plante dans son
propre sol un arbre appartenant à autrui. Si une plante placée
à côté de la limite d'un terrain voisin pousse ses
racines dans ce terrain, elle devient commune. § Inst. ead. De plus,
si l'arbre planté dans le terrain d'autrui étend ses branches
sur votre terrain,, il ne vous est pas permis de les
(1) N, 495. ad. 497. (a) N. 498 et 499.
12
INSTRUCTION PRATIQUE
couper, à moins que le propriétaire se refuse à
le faire lui-même quand vous lui en donnez avis (1). g. La perception
des fruits faite de bonne foi. § Si quis eod. lo.La tradition ou livraison
de la chose, par le moyen de laquelle le maître veut en transférer
le domaine à autrui, § Per traditionem.
?. 3° Enfin la propriété s'acquiert par le droit
positif, au moyen de la prescription. Mais pour la prescription, quatre
conditions sont requises, sa-voir : i° la bonne foi, c'est-à-dire
que le possesseur croie que la chose est réellement à lui;
2° un juste titre d'achat, de donation, etc., au moins présumé
valable, ou coloré, comme le dit Lacroix avec l'opi-nion commune
(2) ; 3° une possession continue, pen-dant trois ans, pour les objets
mobiliers, comme on le voit au § 1. inst. de usucap., soit entre pré-sents,
soit entre absents, comme le disent Less., Anacl., Verd., et la plupart
des auteurs,.contre Bo-nac.,qui veut quatre ans entre absents. Néanmoins
Busemb. et Trullench., etc., veulent deux ans entre présents, et
quatre ans entre absents pour les fruits récoltés. Quant
aux biens immobiliers, la prescrip-tion est de dix ans entre présents,
et de vingt ans entre absents; c'est-à-dire entre personnes qui
ha-bitent des provinces différentes, comme le veut Anacl., ou bien
en des pays divers, d'après Lugo. Mais si quelqu'un est en partie
présent, en partie absent, on doit doubler les années
pendant les-quelles il a été absent. Si la possession est
dénuée de titre, il faut trente ans, tant pour les biens
meu-bles que pour les immeubles.; et les docteurs exi-
(1) N. 5oi.
(a) N. 5o4 et 5o5.
POUR LES CONFESSEURS.
j5
gent le même espace de temps pour la prescription des actions.
L'Église exige quarante ans pour les immeubles, Ci. de int. restit.
et l'Église romaine cent ans. De plus Anacl., Ostiens., Panormit.,
etc., affirment que le même espace de quarante ans est nécessaire
pour prescrire les biens meubles de l'Église, par la raison que
le texte que nous avons cité n'établit pas de distinction
entre les meubles et les immeubles. Mais Bonac, Less., Laym., Molina, Cast,
et Lug. veulent que trois ans suffisent; l'une et l'autre opinion sont
probables (1). On doit noter aussi que celui qui possède le bénéfice
pendant trois ans, ou les fruits qui en proviennent, les acquiert par prescription,
et d'après la règle de la chancel-lerie relatée au
même endroit par Lacroix (2), en-core même que le titre eût
été annullé, pourvu tou-tefois qu'il n'y ait pas eu
intrusion ou entrée simo-niaque.
XI. On a dit possession continue, parce que la pos-session peut être
interrompue, ou naturellement, par la cessation de la possession elle-même,
ou civi-lement comme quand on intente une action juste au possesseur de
la chose ; ou encore lorsqu'on con-tinue à posséder par ignorance
d'une loi manifeste, comme je l'avais soutenu (?) avec Molina, Dicast.,
Lacroix, etc., dont l'opinion est la plus vraisemblable (contre Lug., Less.,
Cath.), parce qu'alors la bonne foi civile manquant, les lois (en vigueur
desquelles on acquiert la propriété) refusent la prescription.
Si la possession ayant déjà commencé de bonne foi,
il
(1) Lib. III. ?. 5?6. ad. 510.
(2) Lacroix. Lib. IV. ?. 689.
(?) lib. III. u. 5o7. y. Si. quis.
l4
INSTRUCTION PRATIQUÉ
s'élève ensuite des doutes et qu'on ne puisse pas les
éclaircir, la prescription ne sera pas interrom-pue, d'après
Anacl., Lacroix, Lug., Mol.; Less., et la plus grande partie des auteurs
(?).
XII. On doit observer aussi : i° que le succes-seur à titre
particulier (comme l'acheteur, le léga-taire, etc.) du possesseur
de mauvaise foi, peut va-lablement prescrire, mais non pas son héritier,
comme le disent Molina, Lacroix, et les autres com-munément. Et
à Naples ce point a été fixé par la décision
des quatre rotes du S. Cons, de 1^38 ; et cela s'applique même à
l'héritier de l'héritier, comme le soutiennent "avec raison
Lug., Lacroix, etc., contre Less. 2° Qu'avec la bonne foi on peut pre-scrire
la libération d'une dette, s'il est bien prouvé que le débiteur
l'ignorait complètement, comme le disent Lugo et Lacroix; de plus,
ils annoncent que la prescription de trente ans fut admise dans la sus-dite
décision en faveur du tiers possesseur. La bonne foi est présumée
toutes les fois que le demandeur ne prouve pas clairement le contraire.
De plus, il fut établi que les avocats et procureurs ne pouvaient
exiger le salaire de leur travail après -deux ans. La même
chose fut établie relativement aux notaires pour les écritures
par eux faites, s'ils n'en ont pas délivré copie; car une
fois la copie donnée, ils ne peuvent plus agir. Il en est de même
pour les mé-decins à l'égard des débiteurs
principaux, car ils n'ont que deux mois pour agir contre les héritiers
; les artisans ont un an; les domestiques et garçons ont deux mois.
Mais il faut observer que ces prescrip-tions (comme on le dit ici) n'ont
pas lieu si le deman-
(0 N. 5u.]
POUR £ÈS CONFESSEURS.
J5
deur produit à l'appui de sa prétention un écrit
pu-blic ou privé. De plus, on dit qu'elles s'opèrent «non
ope prescriptionis, sed proesumptte solutio-» nis, » de telle
sorte que le débiteur reste, en con-science, obligé, lorsqu'il
sait que la dette n'a réelle-ment pas été payée
(1). 3° Qu'il y a certaines personnes privilégiées, tels
que les mineurs, les établissements pieux, les femmes pour leur
dot oui obtiennent la restitution in integrum pour recouvrer la chose qu'elles
ont laissé prescrire, dans les quatre années après
la prescription écoulée (2). 4» Que la prescription
ne peut pas avoir lieu si la chose n'est pas prescriptible, d'où
il suit que les choses volées ou dont on s'est mis ert possession
par violence, ne peuvent jamais être acquises par prescription. Néan-moins
le tiers possesseur qui, de bonne foi, a reçu du voleur la chose
volée, peut la prescrire,· mais dans ce cas la prescription
est de trente ans entre présents et de quarante ans entre absents·
et de plus, il faut un titre, sans quoi on ne pourrait pas prescrire. Les
biens du fisc se prescrivent par (,ua-rante ans (3).
r u
XIII. En dernier lieu, il faut remarquer que les théologiens
et les jurisconsultes s'accordent à dire que, même dans le
for de la conscience, les cho es aequ.es au moyen de la prescription sont
bien ac qu.ses (Cajet., Soto, Molina, Less., Lug. Silv Covarr Lacroix et
autres). Cette opinion est ap! prouvée par le cap. fin. de rescript
au lieu ? la seule prescription de mauvaise foi est réprouvée
·
(1) 5i5.
(2) N.5i2. ad. 5i4. (s) N. 5i5et5i6.
l6
INSTRUCTION PRATIQUE
la loi humaine peut, en effet, dans la vue du bien commun et pour éviter
de nombreux procès, trans-férer la propriété
d'une chose d'un individu à un autre, et remarquez que la loi commune
des pre-scriptions établie dans notre royaume de Naples, quoiqu'elle
ne soit pas admise dans les tribunaux étrangers à cause de
la difficulté de prouver la bonne foi, ne se trouve cependant abrogée
par aucune autre loi; suivant Staiba., Galisppe, Prat., Verd.,et Amat.,
d'où il résulte que (comme le disent les sus-dits auteurs
contre Ursillo et Revito, et comme l'enseigne le savant évêque
D. Jules Torni) nous pouvons, dans tout ce royaume, nous prévaloir
de la prescription légitimement acquise (1).
DEUXIÈME POINT.
Du vol.
§1. De l'essence du vol.
?4· Définition du vol.
15. Du pauvre réduit à l'extrême
misère ou quasi-extrême.
16. Du rachat des chrétiens.
17. Si le pauvre est obligé de meifdier.
18. S'il peut s'approprier la chose qui a une grande
valeur.
19. Du voleur qui consomme le vol dans l'ex-trême nécessité.
20. Si le riche qui n'a pas secouru la pauvreté est tenu
de faire restitution.
21. De la compensation.
(1) N. 5i7.
????» IBS CONFESSEURS,
17
XIV. On définit le vol : « occulta et injusta
rei alien» ablatio, invito rationabiliter domino, » un enlèvement
caché et injuste de la chose d'autrui quand le nlaître
s'y oppose avec raison. On dit 1» occulte, afin
de distinguer le vol du rapt, lequel se fait avec violence ; dans ce dernier,
à l'injustice se joint l'injure, et de plus le sacrilège
si la chose est sacrée. On dit : 2° injuste, parce que sans
cela il n'y aurait pas vol, ni péché ; d'où il suit
que la femme (par exemple) qui prend de l'argent à son mari, ne
pèche pas, quand néanmoins elle ne le dissipe pas au détriment
de la famille; ou si elle prend du vin, et néanmoins ne s'enivre
pas(i). On dit,3° le maître ? répugnant raisonnablement,
parce qu'on peut, dans deux cas, s'emparer de la chose d'autrui,
même malgré lui, d'abord dans le cas d'extrême nécessité,
et ensuite lorsque c'est pour opérer une juste compen-sation.
XV. Et d'abord, quant à la nécessité, si
on prend la chose d'autrui soit pour soi-même, soit pour un autre
qui se trouve réduit à l'extrême nécessité,
et si on n'en prend que ce qui est absolument né-cessaire, on ne
pèche pas, parce que, dans une telle circonstance, tous les
biens sont communs, comme l'enseigne saint Thomas (2) avec tous les auteurs.
Il en est de même dans le cas de nécessité quasi-extrême,
comme le disent d'un commun ac-cord Lug., Less., Sot., Gaet., Az., Sylv.,
Card, et Salm., etc. Cette nécessité existe, lorsque la vie
de quelqu'un est dans un danger imminent, comme le disent Nav.,Vasq.,Ronc,
etc. ; ou lorsque quelqu'un
(0 Lib. III. n. 5i8et5l9. (s) a. a. q. 66. a. 7. T·
XXIV.
l8
INSTRUCTION PRATIQUE
court le danger de perdre un membre principal, V. Castrop., Dicast.
et Tâmbur. ; ou s'il court le danger d'être fait esclave
ou d'aller en galère, ou d'être affecté soit d'une
maladie grave, soit d'une maladie incurable, soit de l'infamie. V. Lug,
Ronca-glia, Elbel et Sporer d'après saint Thomas. Le père
Mazzotta et Suarez, etc., disent la même chose du danger de livrer
une fille à la prostitution; mais ce dernier point est nié
avec plus de raison par les théol. deSalam·, et d'un autre
côté,il me paraît très raisonnable
d'après Lessius , Castrop. , Bannez,
Rotica., Viva., etc.; qu'un noble puisse s'emparer de la chose d'autrui
s'il est dans une extrême néces-sité, et s'il
a tant de répugnance pour mendier qu'il aimât
mieux mourir que de s'y résoudre (i). XVL Mais ici plusieurs doutes
s'élèvent. On de-mande i° si les riches sont tenus de
racheter les chrétiens des mains des Turcs. Les uns plus com-munément
l'affirment, comme Azox, Cajetan., Ma-jor et Filliut. ; les autres le nient,
comme Sporer et Urtado. Mais si Sporer ne fait pis de difficulté
de permettre de prendre la chose d'autrui quand on court le danger d'être
fait esclave, comment peut-il après cela dispenser les riches de
contribuer par un subside peu considérable au rachat de ceux qui
sont dans l'esclavage? Le P. Concina écrit dans les termes suivants,
et avec beaucoup de raison : «Si le ? riche sait positivement que
quelqu'un de ces escla-ves court le danger de perdre la foi ou la vie,
alors son obligation est plus impérieuse. » Quant au reste,
il dit ensuite que si la rançon s'élève à une
grande somme, il n'osera pas imposer une telle charge au
(?) Lib. ??. ?. 5ao.
POUR tÊS CONFESSBUftS.
j«
riche, parce que cela pourrait encourager les Turcs à maltraiter
davantage les esclaves chrétiens, et à exiger de plus fortes
rançons; ce qui tournerait en-suite au détriment des fidèles
(1).
XVII. On demande 2° si le pauvre réduit à l'ex-trémité
commet un péché lorsqu'il prend le bien d'autrui sans auparavant
le demander au maître. Conninch. prétend que c'est une faute
grave ; mais la plupart des autres, tels que Lessius, Laytnann et Concina,
disent que c'est seulement Une faute lé-gère. Pour nous,
voici la distinction que nous éta-blissons avec le savant cardinal
de Lugo: Si cet ob-jet particulier n'est pas absolument nécessaire
au pauvre, il pèche gravement en s'en emparant sans permission;
car autrement tous les pauvres pour-raient prendre le bien d'autrui sans
le demander, Mais si cette chose lui est absolument nécessaire,
il ne commet pas de péché, comme le dit saint Tho-mas (2),
parce qu'alors il a le droit de se l'appro-prier (?). Nous disons pauvre
réduit à l'extrémité, parce qu'une nécessité
grave n'autorise pas à pren-dre la chose d'autrui, comme bn le voit
par la condamnation de la prop. 36 faite par Innoc. ??.
XVIII. On demande 3° si, dans le cas où, comme nous l'avons
dit, la chose est absolument nécessaire au pauvre pour sauver sa
vie, il peut là prendre quoiqu'elle soit d'une grande valeur. Lacroix
et Concina soutiennent la négative; mais Lugo p/t Spo-rer sont avec
raison pour l'affirmative, e'c Lacroix trouve cette dernière opinion
pliîs équitable parce que, dans la nécessité
extrême, le pa<avre a droit sur
(1) N. 520. q. 1.
(2) 2. 2. q. 66. a. 7.
(3) Lib. III. ?. 5ao. q. 1,
2O
INSTRUCTIO» PRATIQUE
la chose d'autrui, quelle qu'en soit la valeur. Et en vain dirait-
on que dans ce cas-là le riche n'est pas obligé (d'après
l'opinion la plus générale et la plus raisonnable) à
secourir le pauvre lorsqu'il doit lui en coûter si cher, par exemple
trois ou quatse mille du-cats, comme le disent Lugo, Castro., Conninch.,-
etc., si toutefois le pauvre n'est pas.son père ou son fils, parce
que la simple charité n'impose pas des char-ges aussi onéreuses.
Car on répond à cela, avec le même cardinal de Lugo,
que suivant les principes du monde et la première division des biens,
chacun peut bien s'approprier ce qui lui est nécessaire, mais personne
n'est judiciairement obligé à secou-rir son prochain. Ainsi
; dans le cas d'extrême né-cessité (ce qui rend tous
les biens communs), le pauvre peut bien prendre ce qui est au riche, mais
le riche n'est pas judiciairement tenu de lui fournir ce qui lui est nécessaire
; il y serait obligé seulement par la charité; mais la charité
(comme on l'a dit) n'oblige pas à une aussi grande dépense.
Si néan-moins , dans un cas pareil, il s'obstinait à l'empê-cher
de prendre .cette chose, il pécherait contre la justice (ainsi que
l]a dit Sporer), parce que le pau-vre ayant alors le droit de se servir
de cette chose, on ne doit pas l'empêcher de la prendre (1).
XIX. On demande 4° si le voleur est tenu de restituer la chose
volée, après qu'il l'a consommée par suite de l'extrême
nécessité dans laquelle il s'est trouvé. Lugo, Azor,
Concilia, l'affirment probable-ment, et plùls communément
en disant que la né-cessité qui est survenue n'éteint
pas une obligation déjà contractée. ??\?™> malgré
toutes ces autorités,
(i)I4b.HI. n. 5ao, q.;iv
FOUR LES CONFESSEURS.
21
je ne puis condamner comme mal fondée l'opinion contraire soutenue
par Castrop., Navarre, Con-ninch., Sporer etc. (appelée probable
par Lessius lui-même), parce que dans ce cas le voleur, a le même
droit qu'aurait tout autre pauvre de s'appro-prier cette chose-là.
Néanmoins, cela s'entend 1° tout le temps que le pauvre a besoin
de cette chose, particulièrement comme je l'avais dit à la
troisième question ; 2° si Je voleur est non seule-ment pauvre
de fait, mais pauvre d'espérance (1). Ensuite, admettant cette distinction,
nous dirons encore, avec Castrop. , Lugo , Valentin, Holz-mann, Lacroix,
Sporer, Salm. et autres, que si quelqu'un est dans la misère et
sans espoir d'en sor-tir, alors le riche est également tenu de lui
donner comme aumône ce dont il a besoin, et qu'il ne rem-plirait
pas cette obligation s'il le lui prêtait à inté-rêt.
Ainsi le pauvre ne sera pas tenu de le restituer, si plus tard il vient
à s'enrichir ; il serait tenu au contraire, s'il possédait
d'autres biens, ou du moins s'il avait l'espoir probable d'en acquérir
(2).
XX. On demande 5° si le riche qui a refusé de secourir le
pauvre, lorsque celui-ci était dans l'ex-trême nécessité,
est encore obligé quand cette né-cessité a cessé.
Laymann, Concina , etc., soutien-nent l'affirmative, disant que le pauvre
a eu dès lors le droit de prendre la chose du riche. Mais commu-nément
les auteurs sont pour la négative, et avec raison ; V. Lugo, Lessius,
Suarez, Vasques, Con. ninch., Sanchez, Holzmann, Salm, etc., parce que
cette obligation étant imposée par la charité, comme
(1) Lib. III. ?. a5o. q. 5." (a) Ibid. q. 4.
SS
INSTRUCTION PRATIQUE
nous l'avons vu plus haut, elle ne peut avoir aucun effet dès
l'instant où la nécessité a cessé, et bien
que le pauvre ait eu le droit de prendre alors la chose du riche, il n'en
a pas pour cela acquis la pro-priété (?).
XXI. Deuxièmement. On peut encore prendre la chose d'autrui
sans son consentement, quand inter-vient une juste compensation. Pour faire
une com-pensation occulte d'une manière licite, il faut trois conditions:
i°qu'on ne la fasse pas au détriment du débiteur; 2°
que la créance soit certaine et liquide;, 5° qu'on ne puisse
obtenir le paiement par aucun autre moyen. D'où il suit que le créancier
doit d'a-bord former une demande par voie judiciaire; bien que s'il néglige
de le faire, il ne commette pas une faute, même vénielle ,
si la voie du jugement devait occasionner des frais , engendrer des inimitiés
ou autres inconvénients. C'est pourquoi ordinairement le domestique
ne pèche pas lorsqu'il compense en secret le salaire convenu qui
ne lui a pas été payé par le maître, ou si le
maître l'a injustement engagé à le servir pour un salaire
trop modique ; mais re-marquei qu'alors il ne peut prendre que le-mini-mum
du prix ordinaire (2). Quant à la question de savoir si les domestiques
peuvent -compenser les travaux extraordinaires, voyez ce qui a été
dit au chap. 7, ?. ii.
§ IL De la quantité que doit avoir le vol pour être
matière grave.
22. De la gravité de la matière relativement aux diverses
classes de personnes.
(1) Lib. III. ?. a5o. q. 6. (») ?. 6a 1.
POUIt XES CONFESSEURS.
ï3
2? et s4- Des vols des vignes.
25. Et du bois.
g6. Des vols minimes.
27. Vol des reliques sacrées.
28 et 29. Des vols minimes commis contre plu-sieurs personnes, et spécialement
par des marchands.
3o. Des vols minimes commis par plusieurs dans le même temps.
#
??. Ce qui devient matière minime après le vol grave.
32. Des vols faits par les fils.
55. Par les femmes.
34. Par les domestiques.
XXII. Pour juger si la quantité du vol atteint ou non la matière
grave , on doit considérer cette va-leur non seulement en elle-même,
mais encore sous le rapport de la personne, du temps et du lieu. Par exemple,
enlever une aiguille à un tailleur peut être matière
grave, si celui-ci ne peut en cet endroit en avoir une autre pour se procurer
de quoi vivre ; et de même il peut y avoir matière grave (
au moins contre la charité) si l'on vole une chose de peu de valeur,
mais dont la perte doit causer un grand chagrin à son maître
(1). Mais si nous nous occu-pons de la quantité du vol en elle-même,
nous de-vons l'apprécier suivant les qualités des diverses
personnes à qui les choses sont volées ; et comme cette appréciation
dépend du jugement des hommes prudents, les théologiens de
Salamanque disent avec raison qu'eq cela les opinions les plus communes
sont encore dans le fond les plus probables. ifl Relati-vemeni aux pauvres
qui vont mendiant îeûf pain,
(1. N, Sa6,
24
INSTRUCTION PBATIQOE
les docteurs assignent ordinairement un réal ( que certains
auteurs appellent jules, ou pièce d'argent qui s'élève
à peu près à un carlin de notre monnaie), et la moitié
dans quelques cas rares de grande pau-vreté et. de besoin. a" Relativement
aux pauvres qui travaillent, il y a deux règles ; quoique les docteurs
distinguent entre les travailleurs de terre et les ar-tisans, d'où
nous gisons que pour les travailleurs de terre deux réaux sont matière
grave, mais pour les artisans nous voulons au moins deux réaux et
demi, si leur gage journalier est aussi grand ou plus grand. 5° A l'égard
des gens aisés qui vivent de leurs revenus, Concina et Roncaglia
fixent le nombre de réaux à trois; mais la plupart des autres
auteurs le fixent à quatre, et d'autres même à cinq.
Je crois, malgré cela, que l'on doit taire ici une distinction ;
car quoique certaines personnes vivent de leurs re-venus, néanmoins
elles vivent fort économique-ment , et pour ces personnes ·
là trois réaux seront matière grave, et peut-être
même moins de trois réaux si elles mènent une vie misérable.
Au con-traire , pour une personne très opulente, le cardi-nal de
Lugo exige, et avec raison, six ou sept réaux. 4* A l'égard
des marchands fort riches, plusieurs docteurs exigent trois florins (le
florin vaut quatre réaux) ; mais cette somme me paraît trop
forte. Je me range plus volontiers de l'opinion de Lacroix, qui, pour ces
mêmes personnes, n'exige que ? huit réaux. Quant aux autres
marchands de médiocre for-tune les docteurs veulent quatre réaux
, mais je pense que pour ceux dont le patrimoine est peu considérable,
deux réaux suffisent pour constituer une matière grave. 5°
A l'égard des grands, l'opi-nion la plus générale
exige une pièce d'or ( c'est-à-
FOUR LES CONFESSEURS.
?
?-
nt ez
dire un ducat ou un e'cu), quoique certains vei il-lent une plus
forte somme. Sanchez et Cardei décident
la même chose à l'égard d'une commu nauté très
opulente. 6° Enfin, à l'égard des mon! ques, on prétend
qu'il n'y a pas matière grave, t! que la somme n'excède pas
deux ducats. V03 Soto, Silvestre, Wigandt, Làymann, P. Navar Bannez,
etc. (1).
XXIII. On remarque outre cela 1° que dans vols des choSes
très exposées, comme le sont fruits placés sur un
chemin, les fagots dans un bo il faut une plus grande matière pour
constituer vol grave (a).
XXIV. Mais ici on demande 1 ° s'il est permis manger des
raisins d'une vigne qui nevousappartii pas. Covarruvias, Valerius, Ripa,
soutiennentl'afîr-mative, en s'appuyant sur ce texte du Deutéronome
: « Ingressus vineam proximi tui comede uvas qui «tum tibi
placuerit; foras autem ne efferas tea im » a5 et 24· »
Abulens. dit la même chose des pommes et des autres fruits. Mais
la négative est soutenue ] >ar Lugo, Holzmarin, qui disent que cela
ne doit sYp-pliquer qu'aux seuls Hébreux et même qu'aux seuls
vendangeurs qui travaillent dans la même vigne. pendant ces deux,
assertions ne sont pas prouvées, et il paraît même que
l'on prouve le contraire, pi is-que Josephe l'hébreu et plusieurs
autres auteurs après Calmet pensent que le texte ne parlait pas
pour les seuls Hébreux, mais pour tous les autres, et non >as seulementpour
les vendangeurs, mais pour tousles passants, ce qui résulte des
termes du texte précité,
(0 Lib. ??, ?, §a7 et 5a8. (a N. 5a8,
5
es es is, le
de int
n-
s6
INSTRUCTION PRATIQUE
«Ingressus vineam proximi tui ; «lesquels désignent
plutôt un passant que tout autre qui serait déjà dans
Ìa vigne pour y travailler, c'est pourquoi la première opinion
me paraît raisonnable. Du reste, le cardinal de Lugo accorde également
à chacun la faculté de prendre deux pommes ou bien deux raisins
dans la vigne qu'il traverse (i).
XXV. On demande 2° s'il est jamais permis de prendre du bois dant
la forêt d'autrui. Ici il faut distinguer les forêts appartenant
à des communau-tés, de celles qui appartiennent à
des particuliers. Si la forêt est à une communauté,
quoique la commu-nauté puisse défendre sous une peine grave
d'em-porter Je bois {pourvu qu'il y ait un autre lieu d'où l'on
puisse commodément en tirer) ; néanmoins les docteurs disent
communément que lorsque la forêt appartient à toute
la communauté, les habitants du pays qui y coupent du bois malgré
la prohibition, ne pèchent pas grièvement(Soto, Sanchez,
Salonius, Angles, Corduba, etc., veulent même qu'il n'y ait pas seulement
péché véniel). Ils ne sonttenus de faire aucune restitution
, mais ils subissent la con- dam-nation qui est prononcée par le
juge, parce qu'une telle prohibition est réputée loi purement
pénale, qui n'oblige pas par suite-d'une faute. Lugo, iMolina, Bonacina,
Filliutius, disent la même chose de celui qui coupe du bois dans
la forêt appartenant à la communauté voisine, parce
qu'alors cette commu-nauté paraît se contenter de la seule
peine qu'elle exige, toutes les fois qu'elle ne demande pas la res-titution;
ceci s'entend néanmoins, pourvu quël'on n'ait pat abattu un
grand nombre d'nrbree et fait del
(?) Libent, u, ???, q. 1.
POUR ??8 CONFESSEURS.
2J
dégâts considerables. C'est pourquoi Sanchez.'et Hen-riques
excusent celui qui ne coupe qu'un fagot par jour pour son propre usage,
ou seulement deux par semaine pour les vendre et dans le but d'en em-ployer
le produit à l'entretien de sa famille. La même chose s'applique
à plusïorte raison, comme di-sent Soto, Molina, Sanchez, Bonacina
quand ce sont deux pays voisins dont les habitants font du bois mu-tuellement
sur le terrain des uns et des autres. Voilà ce qui s'applique aux
forêts appartenant à des com-munautés, mais si elles
sont à des particuliers, nous dirons avec Soto, Molina, Bonacina
et beaucoup d'autres (quoi qu'en disent quelques auteurs)> que celui qui
coupe du bois est tenu d'en faire restitu-tion , parce que les maîtres
de ces forêts ont sur elles un droit de propriété absolue,
et par consé-quent en vendre le bois suivant leur volonté.
C'est avec raison que Lacroix en dit de même pour les par-ticuliers
qui ont acheté ou affermé à une commu-nauté
tous leurs bois. Parce qu'alors la communauté leur transfère
tous les droits qu'elle a sur ces forêts. Enfin, ce que nous avons
dit des forêts doit s'appli-quer aux pâturages (i).
XXVI. 2° On doit observer qu'il faut une matière plus considérable
pour rendre la faute grave, quand il s'agit de vols minimes, d'après
la condamnation prononcée parlnnocent XI contre la proposition 58,
laquelle portait : « Non tenetur quis sub poena pec-» cati
mortalis restituere quod ablatum est per pauca «furta, quantumcumque
sit magna summa totalis.» D'où il suit qu'il peut y avoir
matière grave, quoique les vols aient porté tous sur une
matière légère, et
W Lib. IV. a. na.
28
INSTRUCTION PRATIQUE
lors même que les choses auraient été volées
à dif-férents individus, comme nous le dirons au numéro
suivant. Néanmoins les docteurs veulent générale-ment
que la matière soit considérable s'il s'agU de vols de peu
de valeur-, et plus considérable s'ils ont été commis
au préjudice de différents maîtres, et bien plus considérables
encore s'ils ont été commis à différentes époques.
Less., Trullench. et Villalobos s'accordent à dire que pour les
vols faits en diffé-rentes fois, la matière doit être
double pour avoir le caractère de matière gravejpar exemple,si
dans une fois ils exigent 4 Jules, dans différentes fois il en faudra
8. Mais je crois plus équitable l'opinion de quelques autres auteurs
qui, plus modérés, disent que si le vol est commis en différentes
fois, ou à la même époque, contre plusieurs maîtres,
il faut seulement la moitié en sus, c'est-à-dire 6 jules
; mais s'ils ont été commis contre plusieurs personnes et
à des époques diffé-rentes, alors il faudra le double,c'est-à-dire
8 jules. Mais ceci s'entend toutes les fois que le voleur n'avait pas,
dès le commencement, l'intention de dérober une matière
grave: car alors il faudrait appliquer la même règle qui s'applique
au vol commis dans une seule fois. Au contraire, ceci n'est pas applicable
lorsqu'il s'est écoulé un long intervalle entre les deux
vols, car, dans ce cas, on ne joint pas les vols minimes pour en faire
une matière grave. Après cela, les auteurs sont divisés
sur la longueur de l'in-tervalle qui peut affranchir de la restitution
dans le cas de la faute grave. Laymann dit qu'il doit être d'un an;
mais Tolet., Navarre, Filliul., Vidal, etc., disent un mois et même
i5 jours. Mais en ceci je suis de l'avis de Roncaglia et Viva qui rejettent
cette dernière opinion. Seulement Viva l'admet pour le
POUR LES CONFESSEURS.
29
cas où la matière serait excessivement légère
; et Roncaglia paraît être du même avis lorsqu'il dit
qu'il faut un intervalle d'au moins deux mois, lorsque chaque vol approche
de la matière grave(1). Ainsi, d'après cette dernière
opinion , un laps de temps de deux mois affranchit de l'ohligation onéreuse
de restituer les choses volées à deux mois d'intervalle l'une
de l'autre, et ces vols ne sont pas joints en-semble pour en former une
matière grave.
XXVII. 3° Que, conformément à ce que nous venons
de dire, on ne pèche pas grièvement pour avoir différé
la restitution pendant peu de temps, comme l'enseignent Sanchez,
Rebelli., Vasquez, Sair, Lacroix , etc. Ainsi Lessius, Lugo
, Lacroix etVasquez disent avec raison qu'il n'y a pas péché
mortel lorsqu'on prend à autrui une somme consi-dérable,
mais avec l'intention de la rendre
de suite (2); et on remarque, dans ce passage, que celui qui vole même
la plus petite portion d'une relique sacrée dans le district romain,
encourt l'excommu-nication prononcée par Clément VIII. Au
contraire, Sanchez, Castro, Lacroix, Bonacina et autres, excu-sent de la
faute grave celui qui aurait pris, dans tout autre lieu, une très
petite portion de relique, sans la défigurer, pourvu que ce ne fût
pas une relique précieuse ou rare, comme serait un morceau de la
Sainte-Croix ou des vêtements de Jésus-Christ ou des cheveux
de Marie (?). "
XXVIII. 4° Que relativement aux vols de peu de valeur,
quelques auteurs, tels que Angelo, Na-
(0 Lib. III. ?. 55?.
(a) N. 531.
(?) ?. 53a. in fin.
5?
TNSTRUCTtON PRATIQUE
varre, Médina, ont dit que ces vols*, lorsqu'ils sont commis
contre plusieurs maîtres,n'emportent pas l'o -bligalion grave d'en
faire la restitution ; néanmoins celte opinion contrarie celle qui
est généralement reçue, et doit être entièrement
rejetée, comme le disent, avec raison, Lugo, Sanchez, Salm, etc.,
d'où il résulte que toutes les fois que de tels vols, réunis
ensemble, constituent une matière grave (comme il a été
dit au n° 22), on doit en faire la restitution, sans quoi on se rend
coupable de faute grave. La raison qui veut que la défense de Toler
oblige non seulement à tenir une promesse solennelle, mais encore
à ne pas s'enrichir avec le bien d'autrui (1), veut aussi que la
matière soit plus considérable toutes les fois que les vols
ont été commis sur plu-sieurs personnes , comme nous l!avons
dit au n° 26. Mais il y a divergenee pout savoir à qui doit
se faire la restitution en pareil cas. Si les maîtres sont incon-nus,
alors on s'accorde à dire que la restitution doit profiter aux pauvres
ou aux établissements religieux, comme nous l'expliquerons plus
au long, n° 67. Si les maîtres sont connus, il paraît que,
d'après la règle générale, la restitution doit
se faire à chacun d'eux, quelque petite que soit leur portion respec-tive.
Cependant, je pense, avec plusieurs savants (que j'ai consultés
sur ce point), qu'on ne commettrait pas un péché grave en
faisant la restitution aux pau-vres de l'endroit, parce que, dans ces cas,
ce n'est pas précisément à ceux qu'il a volés
que ce voleur a causé un dommage grave, mais à la communauté
; et comme c'est alors à elle qu'appartient le droit principal sur
les choses volées, elle est présumée ne
(1) Lib. III. n. 534 V· Quœst. 1,
POUR LES CONFESSEURS.
3Ì
point s'opposer à ceque la restitution en soit faite aux pauvres
ou aux établissements religieux; car ce sont cellesdes parties qui
en ont le plus grand besoin. D'où notis concluons que le voleur
qui restituera les objets vole's, soit aux pauvres, soit aux établissements
re-ligieux du pays, sera absous du péché mortel, et même
du péché véniel, s'il a eu quelque motif de faire
cette restitution; comme, par exemple, s'il n'avait pu restituer an maître
sans un grave incon-vénient, ou sans s'exposer à l'infamie,
ou seulement s'il y avait, dans cet endroit, des pauvres qui eussent grand
besoin d'être secourus; car, dans ce dernier cas, on présume
que les maîtres eux-mêmes auraient consenti à ce que
la restitution se fît de cette ma-nière. Nous en dirons de
même de la restitution qui devrait être faite par des marchands,
pour des vols minimes, par exemple, pour de l'huile, du vin,
etc. Nous dirons, dans ce cas, d'après l'opinion la plus commune
(pour ainsi parler), la restitution ne peut pas être faite aux pauvres,
comme quelques tins le prétendent, mais elle doit être
faite aux pratiques qui ordinairement vont acheter ces sortes
de choses dans ces mêmes boutiques. Mais celui qui restituerait ces
choses-là aux pauvres, d'après les motifs que nous avons
expliqués, plus haut, sera ab-sous du péché grave,
et même du léger si la restitu-tion ne pouvait être
faite aux pratiques sans danger d'infamie, ou sans un notab'e inconvénient
(1). Je trouve cette opinion écrite dans le Continuateur de Tournely,
qui, en traitant l'article du marchand qui a dupé le public, s'exprime
ainsi : « Restituat pau-«penbusloci, vel in alia opera eadem
loco utilia in-
(0 Lib. HI. n. 595.
32
INSTRUCTION PRATIQUE
» sumat, si singulis restituere nequeat, etiam si sin-»
guli defraudat! agnoscantur, si tamen difficilior est » executio,
vel quia periculum est infami» (1).»
XXIX. 5° Que quoique, pour constituer l'obli-gation
grave des restitutions, il faille la faute grave théologique, comme
nous l'expliquerons au n° 3g, néanmoins dans les vols minimes,
quand quelqu'un est arrivé à porter ses vols jusqu'à
la matière grave, il est obligé à la restitution,
sous peine de se rendre coupable de la faute grave, lors même que
dans le dernier vol qui a complété la matière grave,
il n'au-rait pas atteint le péché mortel, parce qu'alors
il est obligé non plus par un injuste accessoire, mais parce qu'il
retient indûment la chose d'autrui. Ainsi le décident Lugo,
Cardenas, Viva, Tamburini, La-croix, etc., contre un petit nombre d'autres
qui ne sont pas de cet avis ; en remarquant cependant qu'a-lors, pour que
le voleur soit libéré delà faute grave, il lui suffira
de restituer la seule malière minime qui a complété
la matière grave, comme disent Lessius, Sanchez, $onacina, Vasques,
Rebellio et Lacroix, contre quelques autres (a).
XXX. 6° Que s'il arrive <jue plusieurs aient volé
des objets de peu de valeur, pourvu qu'ils ne l'aient pas fait d'un commun
accord, aucun d'eux ne pèche grièvement, quand même
chacun aurait connu le vol des autres et le dommage grave qui devait en
résulter pour le maître. Habert.,Lugo, Lessius, Sanch., Sal-mant.,
etc., communément ; et cela s'applique
même au cas où ils auraient volé tous dans le même
temps, comme le disent Lessius, Soto et Sanchez
(?) Tonr de rest loin. I. p. 3gi. (a) Lib. IU. n. 533.
POUR LES CONFESSEURS.
35
(contre Lugo), parce qu'alors aucun d'eux b'est réellement par
lui-même la cause du domu qu'éprouve le maître,
lequel dommage ne de grave que par accident. Cette opinion est par , par
Creiliati, auteur moderne, dominicain , même que
l'on aurait été entraîné par l'exemp l'autre;
Molina, Lessius, Bonac., Sanchez, Lugo, Salniant et autres, s'accordent
à dire que cb de ceux qui volent une matière de peu de va
dont la somme cause au maître un dommage g^ave, pèchent plus
grièvement contre la charité, à du scandale qu'ils
se donnent réciproquemen contre la justice, parce que l'exemple
n'est pak cause qui influe d'une manière directe sur le mage causé
à autrui (i).
XXXI. 7° Que si, après que la matière gra déjà
complétée, on commet d'autres vols min on pèche
de nouveau grièvement, d'après ilugo,
Lacroix, etc.; mais Lessius, Bonac.,Tapia,
soutiennent, avec plus de raison, que les autrejs vols subséquents
ne constituent pas des péchés m
s'ils ne sont pas joints à une nouvelle m
irtels tière grave (2).
XXXII. 8' Que relativement aux vols copimis par les domestiques,
comme relativement à commis par les fils, les femmes et les
servit pour que ces vols soient graves , il faut une matière plus
considérable. Car les maîtres sont ordi
ment moins irrités contre ces personnes que c des étrangers,
et souvent ils sont plus irrités à de la manière (
de prendre à la dérobée), qu'à
age ient ée lors e de
acun eur,
ause ,que une lom
e est. mes,
flm.,
ceux èurs,
aire-bntre :ause :ause
(1) Lib. III, n. 537. et lib. ?. ?. 43. (·) ?. 538.
T.
54
INSTRUCTION
de la substance même de la chose. En traitantdune manière
particulière, i° ce qui regarde les vols commis par les en fan
ts , Lessius, Nav. etFHL, disent que le jeune enfant qui a un père
riche, ne pèche pas gravement s'il lui dérobe deux ou trois
ecus. Et même Bannez dit que le vol fait à un père
très opulent n'est pas un péché mortel s'il ne s'élève
pas à cinquante écas ; mais c'est avec raison que Lugo et
Lacroix rejettent cette opinion^ à moins qu'il s'agisse du fils
d'un prince. Holzmann est du même avis·, lui qui admet au
contraire que voler dut écus n'est pas un péché grave
lorsque le père est très riche. Sanchez l'admet jusqu'à
cinq ou six. Si le père avait confié eent écus à
son fils, qui réside dans un autre lieu pour y faiee ses études,
Soto , Navarre, Laymaun, disent avec raison que le fils peut très
bien en employer cinq en amusements honnêtes (i). Lessius avertit
cependant que bien que le fils ait conamis un péché grave
en volant à son pèrer il n'es* pas obligé à
la restitution quand il a déjà dissipé la, somme volée,
car l'on présume alors q,ue le père ne veut pas lui imposer
une obli-gation aussi onéreuse (2). Quant à la question de
savoir si le fils qui fait le négoce dans la maison de son père,,
peut opéfler la compensation du salaire qui lui est dû pour
prix de son travail, nous la trai-terons- au chap, ? , ?. 227, à
L'occasion du contrat da Société.
XXXIII. Deuxièmement, relativement aux vols commis par les femmes
mariées,. une matière plus considérable est exigée.
Lai femme peut, par les
(1) Lib. III. ?, 543i
(a) ?. 544-
POBft IES CONFESSEURS.
55
mains d'une autre, prendre ce qui est nécessaire pour les dépenses
de la famille, malgré l'opposition du mari, car nette oppositon
est irraisonnable (i). V. Bannez, Truilench., Busemb. En outre, si la femme
a un père ou des enfants d'Un premier lit qui soient pauvres, elle
peut prendre dans les biens communs et même dans ceux du mari autant
qu'il leur en faut pour s'entretenir d'une manière ana-logue à
leur condition, quand même le mari s'y op-poserait, parce que, dans
ce cas, il aurait tort de s'y opposer. V. Navarr., Castrop., Lessius, Bu-semb.,
etc.; ainsi Lugo, Molina, Sanchez,Less., Truilench., étendent cette
disposition aux frères dans la pauvreté (2). De plusj la
femme peut très bien employer en aumônes et en dons ce que
les autres femmes dé son rang ont coutume de dépen-ser pour
ces mêmes objets $ comme les docteurs s'accordent à le dire.
Molina et quelques autres disent que la femme peut employer pour ces objets
le vingtième des rentes annuelles du mari, c'est-à-dire cinqpour
cent. MaisLngo, Spor.,Lacroix, etc., ont pensé avec raison que cette
somme était exces-sive, du moins généralement pailant
(?).
XXXIV. Troisièmement j à l'égard des vols com-mis
par les serviteurs, les docteurs, d'accord avec Lessius, Cajet., Navarre,
Sanchez, Sporer, Busem., disent communément que les petits vols
de vivres qui ne sont pas sous la clef, ne constituent jamais une faute
grave, pourvu qu'ils n'aillent pas les vendre ou les cacher hors de la
maison , et potirv
(t) Lib. III. n. 541.
(a) N. 542. W N. 54e
36
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'ils n'en dérobent pas une quantité extraordi-naire,
et encore pourvu que les choses volées ne soient pas d'une valeur
exorbitante (1).
TROISIÈME POINT.
De la restitution.
§ I. D'où naît la restitution: et quelle est la faute
qui la motive.
35 et 36. Dans quels cas il y a obligation de res-titution.
37. Des sources delà restitution.
38 et 3g. De la fauté théologique et juridique.
40. Si la faute vénielle oblige à la restitution.
41. Si dans les contrats et dans les offices on est obligé
par suite de la faute juridique.
XXXV. La matière dont nous nous occupons, celle delà
restitution, est d'une grande importance, parce qu'elle est hérissée
de questions très diffi-ciles, et parce que le confesseur doit apporter
une scrupuleuse attention à ordonner la restitution aux pénitents
qui sont tenus de la faire, et à ne pas l'ordonner à ceux
qui n'y sont pas tenus; et surtout il ne doit pas y obliger ceux qui possèdent
de bonne foi, lesquels, même d'après les auteurs les plus
sévères, tels que Hubert, Noël, Alex., Wigandt, Henno,
etc., ne doivent pas être contraints à se priver de leurs
biens, à moins qu'il soit prouvé qu'ils détiennent
injustement la chose d'autrui. C'est pourquoi, dans cette matière
de la restitution, comme dans celle du point suivant, qui traite des
(ij N. 345.
POUR UES CONFESSEURS.
3y
cont»to,j'aÎemPloyé le plus grand soin et la plus
grande attention, lorsque je les ai traitées dans mon grand ouvrage
sun>la morale. Et c'est pourquoi je dois aussi, dans celui-ci, employer
plus d'es pace qu'à l'ordinaire pour énumérer les
diverses opinions des docteurs sur un grand nombre de question: qui s'y
rattachent, et la valeur des raisons qu'ils don-nent. Je dois les exposer
au moins succincterrent.
XXXVI. La restitution se définit ainsi : « Es ;
ac· • tus iustitiae commutativse, quo reparatur dam ium «proximo
illatum per injuriam. » On dit i° acli de justice, parce que
toute espèce de dommage c msé au prochain (comme, par exemple,
si c'était co ntre la charité ou contre toute autre vertu),
n'im )ose pas l'obligation de faire la restitution; mais seule-ment celui
qui a été causé au mépris du droit, soit in
re, soit ad rem, que peut avoir le prochain sur une chose quelconque. On
dit 2° de justice con mu-tative, parce que la lésion qui blesse
la justice lé-gale , c'est-à-dire celle qui a rapport à
l'observa :iou des lois, et la lésion qui blesse la justice di >tri-butive,
c'est-à-dire celle qui a rapport au nurite des personnes et à
la distribution des récompe uses ou des peines, n'emportent, ni
l'une ni l'autre, c bli-gation de restituer. On dit ?" par laquelle on
répare le dommage injustement causé au prochain, ? irce que
l'obligation de restituer ne naît pas seulement du dommage que Ton
cause à son prochain, : nais encore de l'injure dont on le rend
victime (1).
XXXVII. Les racines ou les sources de la res; itu-tion, d'après
la plus grande partie des moralistes, sont au nombre de deux : i° ex
injusta acceptione,
(0 lib. HI. ?. 547.
3;8
INSTRUCTION PRA.TIQEE
à laquelle se joint la racine ex injusta damnificatione; 2°
ex injusta retentione, à laquelle se joint la racine ex injusta
obligatione contractus.
XXXVIII. De plus, il faut remarquer qu'autre chose est la faute
théologique, celle dont l'apprécia-tion est laissée
à la conscience, et qui, à proprement parler, constitue un
péché, et la faute juridique qui tombe dans le domaine delà
loi. Cette dernière faute se divise en faute grave (lata), qui a
lieu lorsqu'on né-glige tes soins ordinaires que tout le monde emploie;
en faute légère (levis), qui a lieu lorsqu'on néglige
les soins qui sont employés par les hommes dili-gents; et
en faute très légère (levissima), qui a lieu lorsqu'on
néglige les soins qui sont employés par les hommes
les plus diligents. Les docteurs disent ordinairement, lorsqu'ils traitent
de la faute juridi-que, que si te contrat est avantageux à celui
qui reçoit la chose, comme le sont le contrat âepreca-i-ium,
ou celui de commodatum, le commoda taire est responsable de la faute très
légère. Si, au contraire, le contrat est à l'avantage
de celui qui donne la chose 4 comme le contrat de dépôt,
le dépositaire est responsable seulement de la faute grave. Après
cela , si le contrat est avantageux aux deux parties , celui qui reçoit
fa chose est responsable de la faute légère (1).
XXXIX. Cela posé, les docteurs s'accordent à dire
que pour la seule faute juridique, personne n'est en conscience obligé
à la restitution, sous peine d'encourir la faute
grave, s'il ne s'y joint en-core la faute théologique. (Voir Navar.,
Soto, Azor, Lessius, Corb., Lugo, Layrn., Sal m., Roncaglia,
(i) Lib. ??. ?. 549 et 55°·
POUR IES COSFESSKimS.
59
et tou· les auteurs. ) La raison en est que, pour que la conscience
soit obligée, il est nécessaire que le délit ait rapport
à la conscience , et pour que l'o-bligation soit grave, il faut
de plus que la faute ait été grave. Par conséquent
, celui qui ne comprend ni ne prévoit pas, au moins confusément,
le dom-mage qu'il cause au prochain n'encourt aucune obli-gation, quoiqu'il
fasse une chose illicite; de même qu'il n'y a point d'obligation
pour le voleur qui n'a pas pu commettre le vol qu'il allait faire, mais
qui, en s'en allant, a causé un dommage (tout-à-fait for-tuit),
comme, parexemple, l'incendie d'un blé. (Voir Lessius, Rebell.,
Bonaci, Salm., et la plupart des autres, communément.) (1)
XL. On demande, 10 si la faute vénielle oblige à larestitulion.il
fautdistinguer:Si la faute est vénielle à raison du peu de
valeur de la matière, certainement elle obligea restituer, mais
seulement sous peine de fautelégère. Mais si la faute est
vénielle, parce qu'elle a été commise sans une parfaite
connaissance de cause, ou sans un parfait consentement (deux con-ditions
nécessaires pour constituer le péché mortel, comme
on l'a dit au chapitre 3, n° 24 et 26), dans ce cas, d'autres auteurs,
tels que Laymann, Molina, Lacroix, etc., disent que cette faute impose
l'obliga-tion de restituer seulement «ne matière légère,
comme a été la faute elle-même; mais l'opinion plus
commune et plus probable, de Lessius, Lugo, San-chez, Azor, P. Navar, Filliut.,
Roncag., Viva, et de beaucoup d'autres, veut qu'il n'y aitpas, dans ce
cas, d'obligation de restituer, ni sous peinedefaute grave ni sous peine
de faute légère. De faute grave, parce
(I)1N. 551.
4°
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'une telle obligation serait disproportionnée avec la faute
légère qui l'aurait engendrée; de faute lé-gère,
parce que l'obligation légère serait dispropor-tionnée
avec la matière grave qui en serait l'objet (comme l'a démontré
le savant cardinal de Lugo, qui, au milieu de tant de décisions
contradictoires, a su le premier trouver les raisons intrinsèques
que per-sonne n'avaitconnuesavantlui). D'autantplus qu'une faute qui n'a
pas été commise avec une parfaite in-tention , ne peut pas
produire une obligation par-faite (1).
4i· On demande, 2<> si, dans les contrats, la faute juridique
suffit pour constituer l'obligation de resti-tuer ou de payer : c'est avec
raison que Laymann, Navar., Molina, Vasquez, etc., soutiennent l'affirma-tive
, parce que cette obligation est imposée par la loi des contrats,
loi à laquelle les contractants se sont soumis. Mais l'opinion contraire
n'est pas dé-nuée de fondement; elle est soutenue par Soto,Tolet,
Lessius, Lugo, Fjlliu., Lacroix, Roncag., Salm.,etc, lesquels disent qu'il
est contraire à l'équité d'obliger quelqu'un, en conscience,
à une peine grave, sans qu'il y ait de sa part faute grave , toutes
les fois qu'il rrest pas constant qu'il ait eu l'intention d'encourir la
faute juridique. Soto, Lugo, Vasquez, Salm., etc., décident encore
la même chose, et avec raison, pour les fautes commises dans les
offices (2).
§ II. De ceux qui sont obligés à la restitution.
42 et 43· Des complices et, ?" de celui qui com-mande (mandans).
(?) ?. 55a.
(a) ?. 654 et 555.
POUR LES CONFESSEURS.
4l
?4# 9' Du conseiller.
AS." Dans le doute , si le conseil, etc.
/6. Si l'exécuteur était désigné.
?7. Si l'on donne un conseil qui cause un faible dommage.
48. Si l'on révoque le conseil.
4q. De celui qui donne un mauvais conseil par ignorance.
50. De celui qui donne un suffrage injuste.
51. 4° De l'adulateur {adulator). 5s. 5° Du receleur
(recepta tor).
55. De celui qui achète à un voleur, s'il peut lui rendre
la chose.
54. 6° Du participant (participans).
55. Si plusieurs personnes incendient une mai-son.
56 et 57. Du complice par crainte d'un dommage personnel.
58. De celui qui en retient un autre qui voudrait empêcher
le dommage.
59. 70 Des causes négatives.
60. Quel est celui des complices qui est le pre-mier obligé
; et si le créancier fait remise à l'un d'eux de la portion,
etc.
61. De celui qui emp'êche le prochain d'acquérir
un juste profit, etc.
62. De celui qui empêche le fils de s'emparer des choses confisquées.
65. De celui qui empêche par envie, mais sans employer des moyens
coupables.
XLII. Outre l'auteur principal d'un vol, tous les complices sont tenus
à la restitution, s'ils ont été cause influente et
efficace du dommage fait au pro-chain , même ceux qui, obligés
par la justice à em-
4«
INSTRUCTION PRATIQUE
pêcher le dommage , ne l'ont pas empêché. Ceci est
rendu par les deux vers suivants :
1. Juasio, a. Cçmeiliura, o. consensus, 4· Pajpo. 5.
Recursus, 6. Participans, ?. multis, non obslaiis, non manifestans.
XLIII. Examinons d'abord le premierpoint :Vjus-sio. Celui qui commande,
soit expressément, soit tacitement, de faire quelque dommage, est
tenu à restitution, mais non pas celui qui approuve sim-plement
un dommage déjà fait; ni celui qui, ayant donné un
pareil mandat, l'a révoqué avant son exé-cution, et
manifesté cette intention au manda-taire (?).
XLIV. II0 Consilium. Celui qui a conseillé le dom-mage, est
encore obligé à restitution. Il en est de même de celui
qui a engagé un autre à le commettre, contrairement à
la proposition 5?,, condamnée par Innocent XI, laquelle proposition
excusait le com-pHce dans ce cas-là. Observons iei, i° que celai
qui a conseillé n'est pas obligé à la restitution,
quand il n'a pas péché d'une manière grave en donnant
un mauvais conseil. Néanmoins, il est obligé, par jus-tice
, à faire tout ce qui dépend de (ui pour empêcher le
dommage, (si toutefois il ne doit pas en résulter un grave inconvénient
pour tui - même ). De même que la justice l'oblige encore à
éteindre le feu qu'il a allumé sans le vouloir fah?e dans
la maison d'au-trui. Sanchez, Lessius, Viva, etc., s'accordent sur ce point,
avec l'opinion commune (2); 20 que si l'auteur du dommage était
déjà décidé à le faire, alors le conseiller
s'est tenu à rien. Fbj.
(1) Lib. III. i». 557et5ft8. (JO N. 558. in Çn.
Lessius, *ÌoKna, Vasquez, Busern., Viva, et aut.ee, qui sont
d'accord sur ce point avec saint Thomas (1) qui enseigne que l'injustice
dont il ne provient au-cun dommage, n'oblige pas à la restitution,
t Si «aliquis passus sit injuriam ( paroles du saint ), et ,??? damnum,
illi non est facienda de jure restitutio » realis. » II en
serait autrement si Fauteur du dom-mage avait été aussi influencé
par le conseil qui lui est donné ; car alors le conseiller est une
des causes efficaces du dommage (2).
XLV.Mais on doute, i° si le conseiller est obligea la restitution
dans le cas où il serait douteux que son conseil eût été
ou non la cause du dommage. Silv., Navar. , Bebell. , Henriq. , Satm. ',
Bus., Elbel. , Dicast., etc., le nient ; et il paraît que cette opinion
est aussi celle de saint Thomas (5) ,car il dit que dans ce cas le conseiller
ou Kadulateur est obligé à la restitution , seulement lorsque
: « probabiliter esti-»mari potest, quod ex hujusmodi causis
fuerit in-sjusta acceptio subsecuta. » Par cette expression probabiliter,
il entend parler, vraisemblablement, de la probabilité pour une
seule partie, et qui puisse produire une conviction moralement certaine.
L'o-pinion de ces docteurs est fondée sur ce que l'on ne peut pas
imposer à quelqu'un une obligation certaine de restituer, s'il n'est
pas certain qu'il ait été la cause du dommage. D'un autre
côté, l'affir-mative est soutenue par Habert, Lugo, Sanchez,
La-croix, Ronca., etc., qui disent que dans ce doute le délit a
la possession , et la présomption est que le
(1) Opnsc. 70. c. a. (a) Lib. V. ?. 561. (5) ». a. q. 63. ».
7.
44
INSTRUCTION PRATIQUE
conseiller a été cause du dommage. Quoi qu'il en soit,
la première opinion ne me paraît pas impro-bable; car, comme
le dit le docteur angélique, à l'endroit cité, le
conseil n'est pas toujours mis à exécution. Le P. Concina
dit que dans ce cas, l'o-bligation de celui qui a donné le conseil
doit être proportionnée au plus ou moins de probabilité,·
mais nous répondons -à cela que personne ne peut être
tenu d'une obligation certaine, lorsqu'il n'est pas certain qu'il soit
la cause du dommage. Cepen-dant si le conseiller a élé la
cause d'un dommage, il est obligé à restituer, lors même
qu'il serait certain que s'il n'avait pas donné conseil, il aurait
été donné par d'autres (1). Enfin, ce que nous avons
dit du conseiller, s'applique à tout autre qui coopère, lors-que
la coopération est douteuse.
XLVI. On doute 2° si on est obligé à la restitu-tion
pour avoir donné un conseil sur le mode ou le temps, lorsque l'auteur
du dommage était déjà dé-terminé à
le commettre ; si, par exemple, on lui a conseillé de se servir
de poison et non pas d'une épée, de le faire aujourd'hui
et non pas demain. Ca-jetan, Molina et Viva disent qu'il y est obligé,
parce que sans ce conseil, l'exécution du dommage n'au-rait peut-être
pas eu lieu, car l'auteuraurait pu chan-ger de résolution. Mais
l'opinion la plus générale-ment .admise est celle de Lessius,
Lay manu, Lugo, Holzmann et Sporer, qui soutiennentla négative,
ainsi que saint Antonin, Silvestre, Salmanti., Navarr., qui disent que
dans un pareil eas le conseiller n'est pas cause efficace en ce qui concerne
la substance même du dommage ; et ils répondent aux partisans
(») Lib. III. n. 56a.
POUR LES CONFESSEURS.
45
de la première opinion, que le conseil n'a alors au-cune influence,
puisque la détermination coupable était déjà
arrêtée par l'exécuteur. Ils conviennent ce-pendant
que toutes les fois qu'on doute si l'exécuteur aurait changé
de volonté, ou seulement si le dom-mage ne serait pas arrivé
de la même manière, le conseiller est obligé à
la restitution parce que le mau-vais conseil subsiste et qu'il a déjà
eu un effet cer-tain (1). Il en est tout autrement lorsqu'on peut avoir
la certitude que le dommage aurait été commis également
quand bien même le conseil n'eût pas été donné.
XLVII. On doute 3°, si lorsqu'un individu a l'in-tention de commettre
un dommage considérable, on peut lui donner le conseil d'en commettre
un moin-dre. Nous répondrons affirmativement, d'après San-chez,
Bon., Bus., Viva, etc., pourvu que le dommage que l'on conseille soit fait
contre la même personne. Car on ne peut pas conseiller un dommage
qui frap-perait sur un autre particulier, quoique ce dommage fut plus petit
; ni même sur une autre personne en général (suivant
l'avis de Sporer que je partage, con -trairement à celui de Viva)
parce qu'alors le conseil deviendrait la cause d'un dommage causé
à autrui (2).
XLVIII. On doute 4°, si le conseiller se libère de son obligation
par la révocation du conseil avant que le dommage ait été
effectué. L'opinion la plus répandue, qui est celle de Lessius,
Luca, Herbert, Lacroix, Holz.,Spor., etc., établit la distinction
sui-vante : S'il a donné un simple conseil, il lui suffira de le
révoquer; mais non pas s'il a insinué les rai-
(1) Lib. III. n. 564. (a) ?. 565.
46
INSTRUCTION FR4.TIQUE
sons qui doivent porter le malfaiteur à commettre le dommage,
ou s'il lui a indiqué la manière de s'y prendre. La raison
de cette distinction est évidente, parce qtte, dans le second cas>
la révocation du conseil laisse toujours subsister le motif et le
mode d'exé-cution qui doivent exciter le malfaiteur à commettre
le dommage. De même que celui qui auiait mis le feu à Une
maison serait tenu de payer les dommages quoiqu'il eût fait tous
les efforts pour l'éteindre. L'o-pinion contraire de Goncina, Merbes,
saint Antonin, Âeoij Navarr.j Salmaht> (et que Lessius, Laymann,
Bonaci., Roncag., regardent comme probable ) li-bère le conseiller
de son obligation toutes les fois qu'il cherche à empêcher
le dommage par tous les moyens qui sont à sa disposition. Cette
opinion s'appuie encore sur des motifs tirés du salut éternel,
lesquels doivent l'emporter sur toutes les considé-rations humaines.
Et, comme disent ces derniers au-teurs) l'objection tirée de celui
qui aurait mis le feu à une maison n'est ici d'aucun poids, parce
que le feu opère son effet nécessairement) tandis que lors-qu'un
conseil a été révoqué, ce n'est plus ce conseil
qui est là causé du mal qui arrive, c'est la méchan-ceté
de l'exécuteur. Quoique la première opinion paraisse la mieux
fondée, la dernière l'est aussi, puisqu'elle s'appuie sur
l'autorité des docteurs et sur une raison intrinsèque j car,
comme nous l'avons dit, la raison tirée du salut éternel
doit l'emporter sur toute autre. Mais toujours, dans un pareil cas (comme
le font remarquer Salutant., Sporer» etc.), le conseiller est obligé
par justice à avertir celui qui est menacé du dommage, afin
qu'il se tienne sur ses gardes (1). (0 N. 559.
POUR LB» COKFES'iEWIkS.
4/
XLIX· 5° On doute si un doit obliger à la res-titution
celui qui, par une ignorance coupable , con-seille à quelqu'un une
chose qui doit lui être préju-diciable. Less., Laym., Holz.
et Viv. répondent que le conseiller est obligé, si, par le
caractère dont il est revêtu, il est présumé
instruit et habile, comme, par exemple, si c'est un confesseur ou iln avocat,
ou s'il a quelque autre qualité semblable. 11 en sera autrement
s'il est connu pour tìn ignorant, parce qu'alors on doit plutôt
imputer le dommage à l'im-prudence de celui qui a suivi les conseils
d'un homme dont l'ignorance était notoire ^ pourvu toute-fois que
le conseil n'ait pas été donné par do1! ou avec l'intention
de nuire f parce qu'alors le mauvais conseiller serait tenu à restituer
(i).
L. IIIe Consensus. Lorsque, contre son devoir, l'on a donné
sa voix ou son suffrage f et que cette voix est devenue la cause du dommage;
car ceux dont 1-e vote, quoique injuste, n'est pas la cause du dommage,
comme la voix des derniers votants, com-mettent une faute, mais ne sont
pas- obligés à la restitution , pourvu qu'ils ne se soient
pas concertés auparavant avec les autres pour obtenir un injuste
résultat. Mais on demande ce qu'il faut décider lorsque chaque
votant n'est pas certain qaie son vote ait été la cause du
dommage. Les uns disent que, dans ce cas , tous les votatits sont obligés
solidaire-ment; les autres,, au contraire, soutiennent qu'ils ne sont obligés
à rien ni les uns ni les autres ; mais la véritable décision,
est celle de Lug., Mol. et Spor., qui veulent que chacun des votants soit
tenu pour sa part de la réparation du dommage, mais ils veulent
(a) N. 564.
48
INSTRUCTION PRATIQUE
aussi que chacun soit ohligé pour le tout si les au-tres n'ont
rien remboursé. On ne peut pas opposer ce que nous avons dit plus
haut, au n. 45, que le complice n'est pas obligé lorsqu'il ignore
avoir été réellement la cause du dommage; parce que,
dans l'espèce, chacun des votants a diminué le droit de la
partie lésée à se faire indemniser par les autres
votants de la perte qu'elle a soufferte ; c'est pour-quoi chacun est obligé
à restituer la valeur-du dom-mage en entier si les autres ne font
pas cette resti-tution (i).
LI. IV0 Palpo. Lorsqu'un adulateur engage ou excite quelqu'un à
nuire à une autre personne , soit en le comblant de louanges, soit
en lui reprochant sa pusillanimité (2).
LII V° Recursus. Lorsque quelqu'un donne re-fuge à un voleur,
ou lui garde en dépôt les choses volées. Un tel individu
est obligé à la restitution toutes les fois qu'il est la
cause d'un dommage fait ou futur. La même obligation pèse
sur les auber-gistes qui recèlent les choses volées par les
domes-tiques ou parles fils de famille ; mais elle ne frappe pas l'aubergiste
qui, après le vol consommé, favorise l'évasion du
voleur, ou qui seulement reçoit dans sa maison le voleur et les
objets volés, soit par ami-tié, soit à cause de sa
profession, comme le disent d'un commun accord le P. Conc, Salm. et autres.
Cependant ceci doit s'entendre, comme l'observent très bien Croix,
Bus. et Conc, du cas où ce service rendu par l'hôte au voleur
ne serait pas la cause d'autres vols postérieurs (?).
(?) Lib. III. n. 566. (a) N. 567-(?) ?. 568.
POUR LES CONFESSEUKS.
49
LUI. Nous arrivons maintenant à une question très difficile,
celle de savoir si l'acquéreur d'une chose volée peut, en
la rendant au voleur, lui rede-mander le prix qu'il en a payé. La
première opinion ( qui est la plus répandue) lui permet den
agir ainsi lorsqu'il n'a pas d'autre moyen de recouvrer son ar-gent; V.
saint Ant., Lug.,'Nav., Less.,Sylv., Ileb., Soto, Holz., Salm., etc.,,
lesquels disent que l'ache: teur ne commet pas une injustice envers le
voleur s'il lui restitue la chose dans le même état où
elle était lorsqu'il l'a reçue. L'opinion contraire est sou-tenue
par Laym., Cajet., Mol., Croix, Cunil., etc., qui disent que la chose doit
être restituée à son maî-tre et non à
celui qui l'a volée, parce qu'elle se trouve dans un meilleur
état, par cela seul qu'elle est sortie des mains du voleur, et qu'on
la réduirait à un état pire en la remettant en son
pouvoir. Cette opinion est bien fondée ; maisla première
ne l'est pas moins; car pour détruire les objections que l'on y
fait, le cardinal de Lugo répond : i° que l'acheteur n'est pas
obligé de conserver la chose à son maître à
ses propres dépens. Si quelqu'un (dit-il) prend le vête-ment
d'autrui qu'il trouve sur un chemin, et qp'il s'aperçoive plus tard
qu'en le gardant il en résulte pour lui un grand dommage, il lui
est permis de le rapporter dans le même endroit, quoiqu'il prévoie
que d'autres pourront s'en emparer. 2° II répond (et cette raison-ci
est bien plus décisive ) que, puisqu'on accorde à l'acheteur
le droit de faire rescinder le contrat, on ne peut pas lui refuser une
action pour restituer la chose au voleur, attendu que cette ac-tion lui
est absolument nécessaire pour obtenir la rescision du contrat,
et pour recouvrer le piix qUjl a payé, bien que, par accident, il
en résulte une
T. XXIV.
/
ho
INSTBTJCTÌON PRATIQBB
lésion pour le maître (1), et, comme le disent To-led.,
Prad., Sylv., Alens., Holz. et autres (ce que Less., Lug., Bus. ne contestent
pas). Cela doit s'ap-pliquer même à l'acheteur de mauvaise
foi, parce que celui-ci a, tout aussi bien que l'acheteur de bonne foi,
le droit de demander la rescision du con-trat pour recouvrer le prix qu'il
a payé. Quoique l'acheteur de mauvaise foi ait commis une faute
en recevant la chose des mains du voleur, néanmoins, ayant le droit
de rendre la chose, il n'est pas la cause du dommage qu'éprouve
le maître de cette «hose, ni par- cette acceptation, ni par
la restitution qu'il fait entre les mains du voleur (s). Enfin, l'in-jure
faite au prochain n'oblige pas à la restitution lorsqu'elle ? est
pas cause du dommage qu'il éprouve, ainsi que nous l'avons dit au
n. 44» d'après saint Thomas (3).
LIV. 6· Participans. Celui qui participe au vol peut être
considéré sous deux points de vue : comme prenant une portion
de la chose volée, et dans ce cas il n'est obligé à
la restitution que peur la portion qu'il a reçue ; pourvu toutefois
que le vol n'ait pas été commis par ses conseils, cas auquel
il serait obligé pour la valeur totale de la chose volée.
Il peut être encore considéré comme prenant part à
l'action du vol, et alors plusieurs questions se présentent. La
première est celle de savoir si tous ceux qui prennent part à
un vol sont tenus, chacun solidairement, c'est-à-dire, pour tout
le dommage qui en est résulté. Il faut distinguer : si la
chose
(?) ?. 669. (9) N. 57o (5) N 579.
POVB LES CONFBSSEURS.
est divisible, comme une vigne, un monceau le grains, etc., etc.; alors
l'auteur principal est te m pour le tout, et les autres seulement pour
leur por-tion. V. Lug., Less., Nav., Bon., Salm., etc.; -cela, qnoiqu'ils-aient
été tous d'accord pour «™ ter le vol, et pourvu que
l'un n'ait pas poi
et
execu-
DU
pousse
excité l'autre à voler, et que chacun soit, pour sa portion,
la cause du vol total. Il en sera de mê: ne si le concours simultané
de chacun d'eux a été né-cessaire pour que le vol
fût exécuté, car alors ils seront tous tenus solidairement
pour le tout; b en que dans la pratique il aoit difficile de persuader
aux gens de la basse classe qu'ils sont, dans certains cas, obligés
de restituer ce qui a été pris par d'au-tres. D'un autre
côté, on présume, dans ce cas, < ue les maîtres
se contenteront de la portion de cha< un d'eux, de peur de n'être
pas payés du tout s'ils ? su-lent les contraindre à restituer
la totalité, d'où il suit que le confesseur qui dirige l'un
de ces débi-teurs, doit (surtout si c'est un homme d'une con-science
un peu timorée) l'exhorter à restituer ce qu'il doit, sans
expliquer combien, et en le ren-voyant à ce que la conscience lui
conseillera (1).
LV. Mais la difficulté est plus grande lorsque la chose est
indivisible, comme, par exemple, lorsjue plusieurs personnes ont mis le
feu à une maisoi, à une barque, etc.; il s'agit de savoir
si tous ceux qui ont pris part à cette action sont obligés
soli-dairement à la restitution du dommage. Plus» urs auteurs,
tels que Sot-, Sauch.,Cajet.,Ronc,Sal., < te, sont pour l'affirmative,
parce que, dans ce cas, ( ha-çun est moralement cause de tout le
mal. Mais ceux
(i) lib. IIL n. 579.
1'
52
INSTRUCTION PRATIQUE
qui professent la négative sont également fondés
dans leur opinion; ce sont Silv., Nav., Lug., Spor. et autres, lesquels
disent que, dans ce cas, chacun est obligé pour sa portion seulement,
parce que celui qui a concouru avec d'autres à la totalité
du dommage, n'est tenu que pour sa portion, à cause de la divisibilité
de la chose au sujet de laquelle le dommage a été causé;
de même aussi celui qui ne concourt que pour une partie à
un dommage indi-visible, n'est tenu que pour sa portion seulement, à
cause de la divisibilité de la causalité, ou bien de l'influence
qu'il a apportée dans la résolution géné-rale.
Mais cela a lieu seulement dans les· cas où l.è dommage
aurait dû également arriver sans son concours; car si (comme
nous l'avons dit) l'absence de l'un des complices avait dû empêcher
que le dommage fût produit, alors chacun serait incontes-tablement
tenu pour le tout(i).
LVI. La deuxième question consiste à savoir si Celui
qui ne s'est rendu complice d'une action pré-judiciable à
autrui, que parce qu'il redoutait un dommage pour lui-même,
est affranchi du péché et de la restitution. Sur cette question
les auteurs ont émis des opinions très divergentes et très
confuses, et il me paraît, autant que je puis en juger d'après
mes faibles moyens, qu'ils n'ont pas découvert les vrais principes
d elam atière ; les uns/ tels que Sanch , Less, etBusem.,excusent
généralement le complice dans ce cas. D'autres le condamnent
lorsque son action a eu une influence directe sur le dommage, comme s'il
avait ouvert un coffre-fort ou mis des objets hors de la maison, ou autre
chose semblable.
(?) Lib. lit. a. 579.
1ES CONFESSEURS.
53
Mais ils l'excusent lorsque SOH action a été plus éloignée
du dommage lui-même, comme par exem-ple s'il tient l'échelle
à un voleur, s'il lui a donné les clefs, s'il a transporté
les choses déjà volées. V. Bon., Spor., Holz., et
les Salin.; quoique dans un autre endroit les Salm. disent que même
ces actions indirectes, éloignées, sont répréhensibles
dans le fond, parce qu'elles viennent toutes se joindre à l'action
coupable du voleur. C'est à cause de cette seconde coopération
qu'ils déclarent le voleur coupable de péché et obligé
à la restitution. Pour moi, dans ma théologie morale , j'ai
traité ce point-là d'une autre manière, en disarft
que l'action du complice doit être diversement considérée,
en ce qui a rapport au péché du voleur. A l'égard
du dommage, j'ai déjà dit que personne ne peurç se
ren-dre complice du dommage causé à autrui, pour se soustraire
lui-même à celui dont il est menacé quand ce dommage
est du même ordre que le premier. Cela est applicable lorsque la
coopération est par elle-même la cause du dommage; mais non
pas lorsque le dommage est matériel, parce que, dans ce cas, je
ne suis pas obligé de souffrir moi-même un dommage pour épargner
à un autre celui dont il est menacé (1) ; d'où il
suit que les docteurs ont raison de dire que je puis donner l'épée
au meur-trier d'autrui pour éviter d'être tué moi-même
tandis qu'au contraire je ne puis pas tuer un autre individu pour éviter
la mort dont je suis menacé. 5Iais si le dommage que je dois éprouver
était plus.
(?) Salmact. de rost. c. i. p. 204. cam Soto. Lç$?, T9p<
P»«n, Arag. Villalo. clfcaproix. 1, If, W. S65, en» SaucL,
et Boosci, -
· · «, H
»4
INSTRUCTION PRATIQUE
considérable que celui que je causerai à un autre, je
pourrais l'éviter par ce moyen. Je puis, par exem-ple, prendre des
objets appartenant à autrui, pour me soustraire à la mort
où à l'infamie, parce que me trouvant alors dans l'jextrême
nécessité, ce serait à tort que le maître de
ces objets voudrait m'empécher de les prendre (?).
LVII. En ce qui concerne le péché du voleur, j'ai dit
avec les auteurs qui professent la première opinion, que, lorsqu'il
y va de ma vie ou de mon honneur, j'ai le droit de faire les actions du
second et même du premier genre, mentionnées plus haut, parce
qu'en réalité elles sont purement matérielles et toutes
indifférentes par elles-mêmes, puisqu'elles peuvent toutes
être commises sans péché, lors même que le voleur
en abuserait en les faisant servir à ses lins criminelles. A plus
forte raison ne suis-je pas' obligé à la restitution, lorsque
c'est par un motif équitable que je me livre â ces actions,
comme il est dit au chap. 4, ?. 51 et 32, en parlant de la coopéra-tion
matérielle. Je suis d'accord sur ce point avec le P. Molina, lequel
dit que les captifs peuvent très bien, pour échapp'er à
la mort, prendre les objets qui appartiennent à des chrétiens
: « Quoniam (voilà » la raison qu'il en donne ) sunt
in necessitate eorum «bonorum ad vitam conservandam ; » de
même en-eore que le continuateur de Tournely, lequel dit: «
Non teneor subire grave detrimentum ut alterius » peccatum avertam
; » de même aussi que le savant P. Muante , lequel dit : «
Innoxie cooperatur qui ex » metu ad ea (en parlant de la perte des
objets) con-» currit. » J'ajoute à cela que si c'était
dans tous les
(i) Lib. ??. n. 579. V. Secunda.
POUR LES CONFESSEURS.
55
cas une action mauvaise en elle même de donner les clefs au voleur,
parce que c'est coopérer à sa mauvaise action , il résulterait
de là que je ne pour-rais pas donner les clefs de ma maison pour
me soustraire à la mort ; mais qui est-ce qui admettra jamais une
pareille conséquence ? De plus j'ai dé-couvert que saint
Thomas enseigne expressément le contraire (1), lorsqu'il dit : «
Licet ei qui incidit in » latrones, manifestare bona quœ habet, quae
latrones «peccant diripiendo, ad hoc quod non occidatur, »
exemplo decem virorum qui dixerunt ad Ismael : » noli occidere nos
quia thesauros habemus in agro »(Jer. 41). » Par conséquent
j'appelle mauvaises en elles-mêmes les seules actions qui augmentent
ou raffermissent la volonté coupable du voleur. Comme si on le faisait
monter sur ses épaules, ou si on l'a-vertissait de l'heure, ou toute
autre action propre à faciliter le vol, parce que de telles actions
sont for-melles par l'influence qu'elles exercent sur la mau-vaise intention
du voleur, et par conséquent elles ne peuvent'être autorisées
par aucune crainte quel-conque; c'est ainsi que je l'ai décidé
en recherchant les principes de la matière, et je pense qu'on ne
peut pas soutenir le contraire. Du reste je me sou-roets à l'avis
de ceux qui en savent plus que moi, e est ainsi qu'on le voit à
l'endroit précité (2).
LVIII. Une quatrième question est celle de savoir si on est
obligé à la restitution pour avoir retenu une personne qui
voulait en empêcher une autre de commettre un dommage ; Nav. et Wed.
professent l'affirmative, mais je préfère l'opinion de Lug.,
Les.,
(1) Lib. III. n. 57i.
(») N. 57l.
56
INSTRUCTION PRATIQUE
Moli. et Croix qui établissent la distinction suivante : si,
pour le retenir, il emploie la violence ou des moyens frauduleux, il sera
obligé ; mais non pas s'il a seulement fait une prière ou
donné un con-seil, parce qu'alors il pèche contre la charité
et non contre la justice, pourvu toutefois que dans ce cas il ne fût
pas obligé par la justice à empêcher ce dommage (i).
L1X. 8° « Mutus, non obstans,non manifestans. » Ceci
s'en tenddes causes négatives, c'est-à-dire lorsque onn'apas
empêché le dommage pouvant le faire, soit en parlant, soit
en dénonçant le coupable, et étant obligé à
le faire soit par un pacte , soit par le de-voir. Tels sont les chefs,
magistrats, commandants des armées, tuteurs, administrateurs de
l'Église, gardes, satellites et domestiques(2). Quant aux do-mestiques,
celte obligation ne leur est imposée que lelativemert aux dommages
commis par des étran-gers , comme il est dit au chap. 7. ?. 8. Sur
la ques-tion de savoir si \o confesseur encourt la même obli-gation
pour n'avoir pas ordonné la restitution à un pénitent
qui devait la faire, voyez ce que nous en dirons au chap. 16; où
nous traiterons du sa-crement de la pénitence au ?. ???.
LX. Ici on, remarque, i°que parmi les complices dont nous avons
parlé plus haut, l'obligation de restituer est imposée en
premier lieu à celui qui possède la chose volée; 20
au mandant, si la chose n'existe plus; 3° à l'exécuteur;
4° aux autres^per-sonnes qui ont été causes positives,
telles que le conseiller, le participant, etcr; £° 3 ceux qui
ont
U) Lib, III. n. 57(5,
POUR LES CONFESSEURS.
})j
été causes negatives (1). On remarque 2· que si
le créancier fait remise de la restitution au principal auteur du
dommage, la remise est en même .temps censée faite à
ceux qui y ont pris une part moins ac-tive. De plus, si le créancier
promet à l'un des au-teurs principaux de ne pas le poursuivre, il
est censé avoir fait remise au profit de tous les autres de la portion
de celui-là. Car si après cela il voulait poursuivre-les
autres pour la totalité de la dette, sa première promesse
ne produirait aucun effet, car ces débiteurs contraindraient l'autre
à contribuer pour sa portion dans le paiement de la dette com-mune
(2).
LXI. Il y a encore un autre genre de complices obligés à
la restitution pour avoir empêché leur prochain de réaliser
un juste bénéfice. Mais ici il faut distinguer: si l'individu
tenait de la justice même son droit sur cette chose, vous êtes
obligé à la restitution, quel que soit le moyen que vous
avez employé pour l'empêcher de s'en rendre maître;
si aucontraire la chose ne lui appartenait pas, vousne serez obligé
que dans le cas où vous l'auriez eu en em-ployant la violence ou
la fraude; car quoique, dans ce dernier cas, il n'eût pas de droit
sur cette chose, néanmoins il avait le droit qui appartient à
tout le monde, de faire un bénéfice lorsqu'on n'y emploie
pas des moyens prohibés et qu'on ne s'en est pas rendu indigne.
Les Salm. appliquent la même divi-sion au cas ??? on l'aurait empêché
par des prières d'une importunité excessive ou par une crainte
ré. térentjelle(5); et alors la restitution dpif être
pro.
(1) Lib. III. ? 58·3, (?) ?. 58», ?) »· ?§??
58
INSTRUCTION PRATIQUE
portionnée à l'espoir que cette personne avait d'ob-tenir
ce bien (1).
LXII. Mais ici on demande i° si l'on doit obliger à la restitution
celui qui emploie des moyens illicites pour empêcher le fisc de se
mettre en possession des choses confisquées. Less., Sanch., Lug.,
Azor , Salm. et plusieurs autres s'accordent à dire qu'il est obligé
après le jugement, mais non pas avant, parce que le fisc n'acquiert
le droit à la peine qu'après le jugement. Au moins, comme
le dit Less., c'est de cette manière que l'on entend communément
ce droit du fisc sur les peines (2).
LXIII. 20 On demande s'il faut obliger à la res-titution celui
qui a empêché un autre par envie, mais sans employer de moyens
illicites, lorsque cet individu n'avait pas un droit justifié sur
une chose dont il voulait se rendre maître. Lugo, cajet., Salm.,
etc., se déclarent pour l'affirmative, par la raison que l'intention
injuste rend l'action injuste aussi. Mais la plupart des autres sont pour
la néga-tive , et leur opinion est la mieux fondée et la
plus répandue.Voyez Less., Petr., Cast., Nav., Vasquez, Sot., Laym.,
Mol., Bon. , Sanch., Ronc., Holzm. , _ Croix, et un grand nombre d'autres.
La raison sur laquelle s'appuie cette dernière opinion, c'est que
l'intention injuste ne suffit pas pour engendrer l'o-bligation de restituer,
et qu'il faut de plus un acte extérieur qui ait un caractère
d'injustice grave, comme le dit le P. Conc. et la plupart des docteurs.
Il faut que cet acte extérieur produise une lésion contre
le droit du prochain et infjue sur le dommage
(1) N. 58 7. (Ï) N. 583.
POUR LES CONFESSSUSS.
5g
qu'il épreuve ; car celui qui se bornera à une inten-tion
malveillante, péchera contre la charité, mais non pas contre
la justice(1).Cette opinion est aussi celle de Cuniliati, auteur moderne(2).
Il résulte de tout cela que l'obligation de restituer n'est pas
imposée à celui qui, poussé par la haine, aurait engagé
un testateur (mais sans employer le dol ou la violence)à ne pas
instituer héritier celui qu'il a pour ennemi, ou qui aurait dissuadé
un évêque de lui conférer un bénéfice.
Ceci ne s'applique qu'au bénéfice simple ; il en est autrement
pour le béné-fice de cure, car ( suivant l'opinion la mieux
fondée ) la justice oblige Un évêque d'en conférer
le titre au plus digne, après que le concours a eu lieu (?). Nous
expliquerons ce qu'on doit observer dans ce cas au chap. ??. ?. ?>?.
§ III. A qui doit être faite la restitution.
64 et 65. Si les biens sont certains et que le maître se trouve
au loin.
66. Si le maître rachète la chose des mains de celui
qui la lui a achetée.
67. Si les biens sont incertains.
68. De la composition.
69. Des choses retrouvées.
70. Des trésors»
71. Des animaux pris à la chasse.
72. Si la chasse est défendue aux clercs et aux ministres
de la religion.
(1) N. 584.
(a) Cuniliati. tr. 9. c. 5. § 8. n. 3.
(3) Lib. III. ?. 585. et lib. 4. n. 108.
6?
INSTRUCTION PRATIQUE
LXrV. Il faut distinguer les biens certains des biens incertains. On
appelle incertains ceux dont le maître n'est pas connu : ainsi donc,
lorsque le maître est certain, c'est à lui sans aucun doute
que la restitution doit être faite, pourvu que ces objets n'aient
pas été volés des mains d'une personne qui les possédait
à juste titre, comme par exemple , un gardien, etc., parce qu'alors
on devrait restituer au juste possesseur et non au maître , à
moins que ce possesseur ne parût disposé à en faire
un usage qui serait préjudiciable au maître (1).
LXV. i° On demande, dans le cas où le maître serait
éloigné, aux frais de qui sera le transport de la chose pour
la lui faire parvenir. Si la chose a été prise de bonne foi,
les frais sont à la charge du . maître. Si au contraire, elle
a été prise de mauvaise foi, les frais seront à la
charge du voleur. Mais l'on veut savoir à combien doivent se monter
les frais laissés à la charge du voleur.Les uns veulent qu'il
les paie en entier, quel qu'en soit le montant; d'autres l'obligent seulement
à payer ces frais jusqu'à con-currence de l'équivalent
du vol. Cette dernière opi-nion est celle de la Glos. in e.
Cum tu de usur. tit. ?, où il est dit que le voleur n'est pas obligé
d'envoyer la chose à son maître si les frais du transport
doi-vent excéder la valeur de la chose elle-même. Mais je
préfère l'opinion de Molina, Spor., Tamb. , qui pensent que
le voleur est obligé à faire parvenir la chose à son
maître lors même que les frais de trans-port doivent surpasser
la valeur ; et, comme le dit ., lors même qu'Us devraient êfre
du doubje,
{') ?.
POUR LES CONFESSEURS.
6l
Mais si la somme est encore plus forte, alors nous nous conformerons
à l'opinion commune qui l'o-blige seulement à restituer aux
pauvres. Ceci ne doit s'entonJre que lorsqu'il n'y a pas d'espoir de pouvoir
restituer au maître dans un autre temps, soit Ja chose, soit son
prix. Car dans ce cas le voleur de-vrait attendre. On admet aussi ( d'après
Lugo, Less. et Bon. ), que la restitution peut être différée
lors-qu'il doit en résulter un grave inconvénient pour celui
qui est obligé de la faire, pourvu que ce même inconvénient
ne retombe pas sur le créancier par l'effet du retard apporté
à la restitution (comme le disent Less., Nav., Tamb., Lug., etc.).
Néanmoins le dommage que le maître éprouve par suite
du vol, reste toujours à la charge du voleur.
LXVI. 2° On demande : A quoi seriez - vous obligé si, après
que vous avez acheté une chose de bonne foi, et que vous l'avez
revendue aussi de bonne foi, le véritable maître de cette
chose vient à se présenter? Il faut distinguer si le véritable
maître évince celui à qui vous avez vendu, c'est-à-dire
lui reprend la chose, vous êtes obligé ( d'après l'opinion
bien fondée de Less.,Sot., Bon., Castro., Bus., etc. ) de restituer
à votre acheteur le prix que vous avez reçu de lui, et cela
lors même qu'il aurait été con-venu entre vous que
vous ne seriez pas garant de l'éviction ( comme on l'a expliqué
à la loi Empt. S Aut. , ff. de Act. empt.), parce qu'il n'est pas
juste que le vendeur s'enrichisse aux dépens de l'a-cheteur. Il
y a cependant trois cas où le vendeur n'est pas tenu à la
restitution : iu s'il a été expressé-
(>) N. 598 el 697.
6$
INSTRUCTION PRATIQUE
ment stipule qu'il ne restituerait pas même le prix ; 2°
si la vente ne lui a pas profité, comme par exem-ple si, de bonne
foi, il a consommé le prix en dons, etc.; 3° si l'acheteur était
de mauvaise foi; s'il savait que la chose appartenait à un autre
; alors (si toutefois l'acheteur ne l'a pas expressément ga-ranti
de l'éviction), on lui refuse le droit de répéter
le prix pour le punir de sa mauvaise foi. (V. la loi Si fundimus, C. h
de Evict.) Mais, comme, le fait remarquer Cast., le vendeur ne doit pas
, dans ce cas, retenir le prix, parce que sa conscience l'oblige à
le restituer, avant l'arrêt, au maître de la chose, et après
l'arrêt, au fisc. Si la chose n'est pas reprise par le maître,
et reste entre les mains de l'acheteur, le vendeur n'est obligé
à rien du tout, comme le di-sent Less, et les Salni., parce qu'alors
ce n'est plus vous qui êtes cause que le maître de la chose
en est dépouillé. D'un autre côté, vous n'êtes
pas non plus obligé à la faire recouvrer à son maître
lorsqu'il doit en résulter un grave dommage pour vous-même
(?). LXVII. Voilà ce qu'on doit décider lorsque le maître
de la chose est certain. S'il est incertain, il faut aussi distinguer et
voir si la chose a été prise de bonne ou de mauvaise foi.
Si la chose a été prise de mauvaise foi, il faut faire encore
une autre dis-tinction. Si le maître des biens incertains est in»
connu, mais seulement d'une manière particulière , comme
lorsqu'on sait que la chose appartient à l'une d'entre trois ou
quatre personnes du pays, alors on ne peut pas restituer aux pauvres, mais
la créance se divise entre les trois ou quatre personnes parmi
(») N. 601 et 8oo.
POUR LES CONFESSEURS.
63
lesquelles doit se trouver la personne volée. V. Sylv. Less.,
P. Nav., Cajet. Moli. et Reb.(i). Si le maître est inconnu
d'une manière générale, de telle sorte qu'on ne puisse
faire aucune distinction des person-nes du lieu
parmi lesquelles doive se trouver celui à
qui la chose appartient ; alors c'est aux pau-vres que l'on doit restituer,
comme cela est piescrit C, Cum et tu, de Usur.; et il suffit, dans ce cas,
que la restitution se fasse aux pauvres d'un endroit quelconque ou à
des établissements pieux. Mais cela ne doit s'entendre que lorsqu'on
a déjà fait les dili-gences nécessaires pour retrouver
le maître; car si l'on restituait aux pauvres avant d'avoir fait
aucune recherche, il faudrait encore indemniser les maîtres lorsqu'ils
se représenteraient(2). De plus, ceci ne doit s'appliquer qu'au
cas où les personnes lésées sont en petit nombre,
c'est-à-dire trois ou quatre. Lors même que l'on ferait la
restitution dans un pays 011 il serait peu probable que la chose tombât
entre les mains de ses maîtres, comme le disent Sy tv., Bon. ,Nava.,
Cast., les Salm., Soto, Tap., Reb. (?). Quoique Sylv., à l'endroit
précité (Concl., 4)> "ise qu'il est plus convenable, dans
ce cas, de restituer aux pauvres de l'endroit où le vol a été
commis ; néanmoins il convient, avec Silvest., que cela n'est pas
nécessaire. Si la chose a été volée à
plusieurs per-
(1) Sylv. t. III. ii 2. a. q. 62. aft. 5. conrl. 2. Lessius
de just. a. J4. n. 3a. Castiop. part. 5. tr. 52. d. 1. f·
18. § 8. n. 5. cum. p. Nav. Cajct. Moliti. et Rebel.
(2) Lib III. n. 589 et 59o.
(3) Sylv. verb. Restitutio. 8. q. 5. Bonac. t. II. de rest,
in gen.d. i.q. 3. p. 4. n. 10. Castrop. lac. cit. n. 2. com.
p. Nav. Salmant. tr. i3. dcrest. c. 1. n. ai5. cum. Soto. Tapia
et Rebel.
64 ~
INSTRUCTION PRATIQUE
sonnes incertaines, faisant partie de quelque com-munauté ,
alors la restitution doit être faite aux membres de cette même
communauté comme il sera dit plus bas, et comme on Fa déjà
expliqué plus amplement au n. 28.
LXVIII. On doit remarquer qu'à l'égard de ces det-tes
incertaines il peut y avoir lieu à une composi-tion ; mais cette
composition ne peut se faire qu'a-vec le pape (ou la pénitencerie
), et non avec un évèque, comme le disent très bien
Lug., Mol., Turia., etc., contre l'opinion dequelques autres.Cela ne peut
avoir lieu que lorsqu'il y a une cause légi-time, et que le maître
est tout à-fait inconnu (1). D'oùSoto et Henr. disent avec
raison que la compo-sition n'est pas permise lorsque la restitution se
fait aux pauvres, à cause de l'éloignement du maître,
comme il a été dit au n. 66 (2) ; de même qu'elle n'est
pas non plus permise quand il s'agit de vols minimes, qui doivent être
restitués par les mar-chands de vin, d'huile, etc., parce que, dans
ces cas, il y a nécessité de faire la restitution aux pauvres
de l'endroit même où le vol a été commis. Aussi,
d'a-près l'opinion généralement adoptée de
Laym., Conc, Salm., Dian., Spor., Croix, etc., il ne suffit gas de faire
la restitution aux pauvres de l'endroit, comme l'admettent Vasq., Anac.
,Escob. et St. Tho-mas ; mais elledoitêtre faite aux pratiques mêmes
qui fréquentent les magasins de ces marchands. Néan-moins
on nepèche pas grièvement si l'on restitue aux pauvres, comme
nous le dirons au n. 28 (3) ; de
(0 Lib. III. n. 591. (*) N. 5a4. (S) N. 695.
POUR LES CONFESSEURS.
Qfr
plus, il faut observer que, lorsqu'on obtient une composition de la
sainte pénitencerie , la restitution doit se faire, si cela est
possible, dans le lieu d'où la chose a été enlevée,
comme l'a prescrit Be-noît XIV dans sa bulle gô, Pastor bonus
(au tom. ? de sa bull. ), § 25. On ne s'accorde pas sur la ques-tion
de- savoir si le débiteur reste libéré de toute obligation
envers le maître qui se représente, même après
qu'il a obtenu la composition. La négative est soutenue par quelques
auteurs qui prétendent qu'il est obligé à lui restituer
la somme dont il est devenu plus riche; mais l'affirmative est plus généralement
adoptée par Lugo, Salin., Trull., Tap., etc., parce qu'en pareil
cas, comme administrateur des biens temporels en ce qui a rapport aux biens
spirituels, le pape peut très bien transférer la propriété
et ef-facer toute obligation (j).
. LXIX. Cela s'applique au cas où la chose a été
prise de mauvaise foi. Mais si elle a été prise de bonne
foi, par exemple, si quelqu'un trouve par hasard une bague sur son chemin,
ou si par une erreur excusable il a reçu plus qu'on ne lui devait,
et qu'il ne sache pas à qui il doit restituer ces objets-, alors
pourra-t-il les garder? Soto, Sa, Nav., etc., sont pour l'affirmative,
parce que les choses abandon-nées appartiennent au premier occupant;
il doit toutefois faire des recherches pour trouver le maî-tre. Mais
Less., Laym., Cast., etc., sont pour la négative; ils disent que
cette chose oti la valeur doit être consacrée à des
usages pieux, en présu-mant que telle est la volonté du maître.
Pour nous, nous établissons une distinction avec Lugo,
(») ?. 5ga.
?. xxiv.
5
G6
INSTRUCTION PRATIQUE
Croix et Holz. Si le maître ne peut plus absolu-ment être
retrouvé, alors celui qui a trouvé la chose
peut la garder, parce que cette chose est dès lors considérée
comme abandonnée, et comme telle acquise au premier occupant.
Mais si, après des recherches faites, il y a quelque espérance
de retrouver le maître, celui qui possède la
chose doit la lui conserver ou au moins lui en conserver le prix ; et s'il
ne peut conserver ni l'un ni l'autre, il doit donner la chose au pauvre,
parce que, tant que dure l'espoir de retrouver le maître, celui-ci
en conserve la propriété (i). C'est aussi l'opinion de saint
Thomas, qui dit : « Si ( res) pro derelictis ha-beantur, et ha3C
credit inventor, licet sibi eas re-itineat, non committit furtum (2).»
On doit en dire de même du pauvre à qui le voleur a donné
la chose, n'ayant pas pu trouver le maître; car si dès cette
époque il n'y avait déjà plus d'espoir de re-trouver
le maître, la propriété de la chose a été
transiérée au pauvre, qui, par conséquent, n'est pas
obligé de la restituer à son maître, lors même
qu'il se représenterait ensuite (?).
LXX. On demande ensuite à qui appartiennent les trésors
qui sont retrouvés. Je dis premièrement, d'après le
droit commun, que le trésor appartient à l'inventeur quand
il l'a trouvé dans son terrain; deuxièmement, quand il l'a
trouvé dans le terrain d'autrui, alors, si c'est par l'effet du
hasardée trésor se divise entre le propriétaire du
terrain et l'inven-teur , lequel est obligé en conscience d'en donner
(x) N. 6o5.
(2) 2. 2. q. 66. n. 3. ad. 2.
(3) Lib. III. ?. 5g8.
POUR LES CONFESSEURS,
fam
là moitié au propriétaire du terrain, comme le
di-sent Lug., Less., Cast. , Laym., Salm., etc. ; mais s'il ne l'a trouvé
qu'en faisant des fouilles, il doit le donner tout entier au propriétaire
du terrain , comme il est dit à la loi an. C. dethesaur.; troisième-ment,
si le trésor est trouvé dans un lieu public ou gacré,
il est partagé entre l'inventeur et le fisc ou l'évêque;
quatrièmement enfin, s'il est trouve au moyen de la magie, il appartient
au fisc pour la to-talité , mais ce n'est qu'après que le
jugement a été rendu. Tel est le droit commun. Mais d'après
les lois qui régissent notre royaume, s'il est trouvé dans
un lieu public, et sans qu'on ait employé des moyens illicites,
il appartient tout entier au fisc; s'il est trouvé dans un lieu
particulier et par l'effet du hasard , il y en a un tiers pour le fisc,
un tiers pour l'inventeur, et un tiers pour le propriétaire du fonds
(1).
LXXI. On demande encore à qui appartiennent les animaux pris
à la chasse. Lorsque l'animal est blessé par une personne
et prise par une autre, il appartient à celle qui l'a prise, toutes
les fois qu'il est certain que sans cela il se serait échappé.
Lors-qu'il y a doute, on peut le partager; cependant les animaux pris dans
des filets, appartiennent à celui qui les a tendus (2). Mais si
quelqu'un prend une pièce de gibier dans une forêt réservée
(remarquez que c'est seulement le prince ou les grands privilé-giés
qui peuvent avoir des bois réservés), il com-met, au dire
de Less, et de Laym., un péché mor-tel, et il est tenu de
restituer la valeur de l'animal
(1) N. 602.
(2) ?. 6?4·
68
INSTRCCrlON PRATIQUE
suivant les probabilités qu'il pouvait y avoir que le prince
s'en emparerait. Mais Sot., Mal., etc., n'ad-mettent cette décision
que pour le cas où l'animal est pris dans un- endroit clôturé,
et Less, ne l'ad-met dans aucun cas, lorsque, outre la prohibition d'aller
chasser dans ces bois, il y a de plus une peine imposée à
ceux qui y vont (1).
LXXII. Ici il faufremarquer qu'il n'est pas dé-fendu aux clercs
de faire toute espèce de chasse, mais seulement celle qui se fait
à grand bruit et avec beaucoup de fracas, soit avec des chiens,
soit avec des oiseaux de proie. Less., Cast., Vasq. et Reb., disent même
que ce genre de chasse ne con-stitue pas une faute grave pour les clercs,
lorsqu'ils n'en abusent pas et qu'ils ne commettent pas de scandale, et
ne se livrent pas à de grandes dépenses. D'autres (tels que
Moli, Gajet., Soto, Spor., etc.) ajoutent que dans aucun cas le clerc ne
se rend coupable de faute grave, quand ce n'est que parla chasse qu'il
a causé du, scandale, parce que le texte du chap. Decler. vert,
qui prohibe ceite chasse, ne prononce quela'peine de la suspension. Aussi
Laym., Less., Val. et Sa., disent-ils qu'elle leur est permise lorsqu'elle
est modérée et peu fréquente, ou bien lorsqu'ils ne
la font que parnecessite ou pour faire de l'exercice. D'où le' savant
auteur du livre intitulé : Instr.pour les nouveaux confess., conclut
que la chasse qui n'est pas bruyante ne constitue pas un péché
mortel, si elle n'est pas faite par mépris des lois ou par entêtement.
La chasse bruyante est défendue aux religieux avec plus de rigueur
par la Clem. $ porto, de stat. mun, Mais Cast, dit que même pour
(1; N. 6o5.
POUR LES CONFESSEURS.
69
les religieux, il n'y a pas péché moi tel lorsque cette
chasse est faite sans scandale, ou bien (comme le disent Less., Saim.,)
s'ils la font deux ou trois fois par an, et sans faire un grand fracas
(1).
g IY. Quelles sont les choses que doit restituer le posses-seur de
bonne foi ? quelles sont celles que doit restituer le poisesseur de mauvaise
foi ?
73. Du possesseur de bonne foi.
74· Des fruits naturels, civils, mixtes et in-dustriels.
7a. De celui qui a reçu du voleur la chose volée que
celui-ci a mêlée avec une chose à lui appartenan.
76. De celui qui cause un dommage considéré comme
moindre que ce qu'il est en effet.
77. Du possesseur de mauvaise foi.
78. Du cas où la chose augmente ou aurait aug-menté
de valeur, et des dépenses utiles faitos parle voleur, et de celui
qui veut se faire passer pour pauvre.
79. Du cas'où la chose aurait dû également
pé-rir entre les mains du maître,
80. De celui qui achète une chose, sans être bien
siir qu'elle appartient à son vendeur.
81. De celui qui fraude l'impôt et les gabelles. LXXIII.
En ce qui concerne le possesseur de
bonne foi, c'est-à-dire celui qui cause un tort pure-ment matériel
(on appelle tort matériel celui qui est fait sans intention de nuire,
et formel celui qui est fait avec intention), il est tenu de rendre seule-ment
Ja chose qu'il a prise, si elle existe encore,· et
(«) N. 606,
70
INSTRUCTION PRATIQUE
si elle n'existe déjà plus, ou même s'il l'a confondue
avec une autre chose à lui appartenant, il n'est tenu que de restituer
ce dont il peut avoir profité. Par exemple, s'il a usé l'habit
d'un autre, il est tenu de restituer ce qui lui en aurait coûté
pour se procurer cet habit (i). Mais lorsqu'il n'est pas certain qu'il
en soit devenu plus riche, il n'est tenu à rien du tout, comme le
disent très .bien Saneh., Lacroix et autres ; parce que, dans le
doute, on ne peut obliger personne à se dépouiller de son
propre bien (2). Quelques auteurs disent que celui qui de bonne foi a reçu
de l'argent de la part d'un voleur, n'est pas tenu d'en faire la restitution
au maître, lors même que cet argent existe encore entre ses
mains, toutes les fois que le voleur a de quoi indemniser le maître
avec son argent. Mais pour moi,je ne partage pas cette opinion, parce que,
dans l'espèce, le maître a conservé la propriété
de l'argent comme de tous les autres objets (3). Quant à la question
de savoir quelle est l'obligation du possesseur de bonne foi, lorsqu'il
survient des doutes qu'on ne peutéclaircir, voyez ce qui est dit
là-dessus au çhap. Ier, n° 20, pag. 72.
LXXIV. De plus, le possesseur doit restituer non seulement la chose
y mais encore les fruits qu'il en a perçus. Mais il faut distinguer
les fruits en fruits nature/s, civils, mixtes et industriels. Les fruits
na-turels so.it ceux que la nature seule produit par elle-même, tels
que les pâturages, les petits des ani-maux et autres semblables.
Les fruits civils sont ceux que l'on retire de la location des maisons,
du
(1) N. 607 et 60S.
(2) ?». 7c6.
(3) N. 7c8. V.
POUR LES CONFESSEUIIS.
? ?
louage des bestiaux, des vêtements, des Uvres et autres objets
de ce genre. C'est là l'opinion com-mune , qui néanmoins
est combattue par Laym. Les fruits mixtes sont ceux qui sont produits
en partie par la nature et en pai'tie par l'industrie , tels que l'huile,
le vin, le fromage,etc. Enfin les fruits industriels sont ceux
qui proviennent simplement de l'industrie , comme le
profit que l'on retire de l'argent qu'on a mis dans le commerce, ou bien
le profit qu'on retire des améliorations qu'on a faites
à une chose. Après cela, nous dirons que les fruits industriels
ne doivent pas être restitués, même par le possesseur
de mauvaise foi, parce que le maître de la chose n'a
aucun droit à ces fruits qui n'ont pas été produits
par elle. Mais il n'en est pas de même pour le cas où le maître
aurait également au moyen de son industrie retiré les mêmes
béné-fices, car alors le voleur ne pourra retenir que la
somme que le maître aurait probablement été obligé
de payer pour s'exempter des fatigues d'une telle industrie. Quant aux
fruits naturels et civils, ils doi-vent être restitués intégralement
(sauf la retenue des dépenses faites par le possesseur), et ceci
s'applique au possesseur de bonne foi comme au possesseur de mauvaise foi.
Il y a cependant cette différence, que le possesseur de bonne foi
n'est tenu de rien restituer s'il a négligé de percevoir
les fruits, ou s'il les a consommés de bonne foi sans en être
devenu plus riche , ou encore s'il les a acquis par prescription. Cette
prescription est de trois ans lorsque le pos-sesseur est muni d'un titre,
et de cinquante ans lorsqu'il n'a pas de titre, comme nous l'avons dit
au ?» \Q. Quant au possesseur de mauvaise foi, il OPU toujours reetUuw
la valeur tot»1»* ?? pe» fruits,
79
INSTRUCTION PRATIQUE
lors même qu'il ne les a pas perçus, toutes les fois qu'il
est certain que le maître les aurait fait produire à la chose
s'il l'avait eue en son pouvoir; mais pour ceux qu'il a perçus,
il est obligé de les restituer lors même que le maître
n'aurait pas dû les retirer de la chose en supposant qu'elle fût
restée entre ses mains; parce que tous les fruits que la chose produit
elle les produit pour le maître. Enfin, la restitution des fruits
mixtes doit être faite d'après la même règle,
c'est-à-dire, tant pax* le possesseur de bonne foi que par le possesseur
de mauvaise foi. Mais dans cette restitution, le possesseur ne peut pas
(comme le pré-tendent quelques auteurs) prélever les dépenses
qu'il a faites et le prix deses peines ; mais comme le disent avec plus
de raison Moli, Dicas., Croix et autres (1), il doit restituer la valeur
correspondante à la nature de la chose seulement, parce que la valeur
qui cor-respond à son industrie, lui appartient
tout en-tière (2). Tout cela doit s'entendre dans le sens de ce
que nous avons dit plus haut en parlant des fruits industriels.
LXXV. On demande i° si vous êtes tenu de res-tituer au maître
l'argent , le blé ou autres objets semblables qu'un voleur vous
a transmis, après les avoir mêlés avec des objets à
lui appartenant. Vous n'y êtes pas tenu si le voleur a encore les
moyens de restituer les objets qu'il a pris; car ceux que vous avez reçus
de lui (même de mauvaise foi ) étaient déjà
devenus sa propriété, Mais il en sera autrement si le voleur
devient insolvable, parce qu'alors c'est réellement vous qui par
votre acceptation avez été
(1) N. 825. V. Bene autem, (a) ?. 6io.
POUR LES CONFESSEURS.
^3
la cause du dommage que le maître éprouve. Ainsi, quoi
qu'en disent quelques auteurs, vous êtes obligé de restituer
la valeur totale, suivant l'opinion de Sanchez et de presque.tous les autres
(i).
LXXVI. On demande 2° quelle sera l'obligation de ceh'i qui jette
dans la mer une pierre précieuse appartenant à autrui, parce
qu'il croit qu'elle vaut dix, tandis qu'elle vaut cent. Les uns,suivant
l'opi-nion exprimée par Lugo, veulent qu'il soit obligé pour
une valeur de cent; parce que, disent-ils, celui qui, au mépris
de la justice, porte à son prochain un préjudice qui constitue
la' faute grave, est tenu de restituer la valeur tout entière du
dommage par lui causé, quoiqu'il ignorât cette valeur. Cependant
la plupart desauteurs, tels que Ponce,Esparsa, Holzni., Croix, Dicast.,
Dian., Mazz., etc., disent, et avec beaucoup de raison, que, dans l'espèce,
il ne doit être obligé que pour dix. Cette opinion est fondée
sur ce que l'obligation de restitution doit être pro-portionnée
à la faute, et la faute à l'injustice qu'on a eu l'intention
de commettre envers son prochain. Il suit de là que lorsque la faute
est légère, il ne doit pas y avoir obligation grave de restituer
(c'est ce que Lugo lui-même ne conteste pas) ; de même, lorsque
"la faute est très petite, l'obligation de restitution l'est également.
On répond aux partisans de l'opi-nion contraire, que l'on peut obliger
l'auteur du dommage à en restituer la valeur totale, lorsqu'il a
appris, au moins d'une manière confuse (comme on l'apprend ordinairement
quand on l'entend dire par un autre), la valeur du dommage qu'il commet,
mais non quand il a été dans une ignorance absolue
(») N. 6n cl 72a.
74
INSTRUCTION PRATIQUE
à ce sujet; comme le font remarquer les Salm., Mazz., Croix
et la plupart des auteurs (1 ).
LXXVII. Quant au possesseur de mauvaise foi, il est tenu non seulement
de rendre la chose en na-ture si elle existe, et tout ce dont il s'est
enrichi, mais encore la valeur de la perte qu'a éprouvée
le maître par suite du dommage qu'il lui a causé, ou du profit
qu'il l'a empêché de réaliser, tout autant qu'on peut
le prévoir, au moins d'une manière con-fuse, comme il a été
dit un peu plus haut. Néan-moins , ceci ne doit s'entendre que du
cas où le maître aurait sur la chose le droit de pleine pro-priété
, jus in re ; car s'il avait seulement le jus ad rem, il ne lui serait
dû d'indemnité que proportion-nellement au plus ou moins de
chances qu'il pou-vait avoir d'acquérir cette chose (2).
IJXXVIII. Ici il faut remarquer i° que si la chose volée
augmente de valeur pendant qu'elle est injuste-ment possédée
par celui qui l'a prise, cette augmen-tation profite au maître; et
cela a lieu lors même que le maître, si elle ne lui eût
pas été enlevée, au-rait dû la consommer avant
qu'elle eût pu augmen-ter de valeur. Par conséquent, si le
maître avait dû vendre un agneau à l'époque où
il valait cinq, et que celui qui a volé cet agneau l'ait consommé
à une époque où il valait dix, c'est dix et non pas
cinq que le voleur devra rendre. Telle est l'opinion de Lug., Cast., Com.,
Salm., etc., contre quelques autres. Cette opinion est fondée sur
ce que la chose fructifie toujours pour son maître. Cependant, le
P.Concina dit que sj, après a\oir augmenté jusqu'à
(1) N, 5»4-
fOtJR LES CONFESSEURS.
.
~g
dix, l'agneau diminue de valeur et revient à cinq, c'est- à-dire
à sa première valeur, le voleurne devra restituer que cinq,
parce que-dans ce cas la perte du maître n'est que de cinq. J'ai
adopté cette opinion tdans mon Traité de morale (1) ; mais
aujourd'hui je la trouve très mal fondée , parce que la valeur
de l'agneau s'étant élevée jusqu'à dix, et
le voleur ne l'ayant pas restitué alors comme il le devait, la perte
a été non pas de cinq, mais de dix, et c'est le retard coupable
apporté par le voleur à la restitu-tion, qui a été
cause du dommage. D'un autre côté, il me semble que Less.,
Mol. ; Croix et la plupart des auteurs, sont bien fondés à
soutenir (contre Soto et autres) que si quelqu'un tue l'agneau d'autrui
lorsqu'il vaut cinq, il suffit qu'il restitue cinq, quoi-que l'agneau aît
dû plus tard augmenter de valeur, si le maître l'avait conservé;
cela suffit toutes les fois que le maître peut ,-sans inconvénient,
acheter un autre agneau pareil au -premier avec les cinq qu'on lui a restitués
{2). Il faut remarquer 20 en ce qui concerne le possesseur de mauvaise
foi (L. adeo, § 7 , Ex diverso, ff. De acquis. Join. ), qu'on lui
re-fuse l'action pour se faire rembourser les dépenses utiles qu'il
a faites pour la conservation de la chose ; d'où Sanch. se croit
autorisé à dire que le maître peut sans injustice rttenir
le montant de ces dépenses, (et Lugo appelle ce sentiment siir).
Mais c'est avec juste raison que Less., Cast., Mol., Nava. et Lugo lui-même
trouvent mieux fondée l'opinion contraire, parce que la loi' dont
il s'agit ( comme loi pénale ) n'oblige qu'après la sentence
(») N. 621,
76
INSTRUCTION PRATIQUE
du juge (1). 11 faut remarquer 3° que celui qui se fait passer
pour pauvre, doit restituer les aumônes qu'il a reçues (pourvu
qu'elles ne soient pas d'une trop petite valeur), ou au maître, comme
le dit Mo-lina, on bien aux autre? pauvres, comme le dit Castropalao (2).
JJXXIX. I° On demande si le voleur est tenu de restituer le pris,
de la chose qui a péri, lorsqu'elle aurait dû également
périr entre les mains du maître. Il faut distinguer : si la
chose a péri sans la faute du voleur, dans le même moment
et dans le même ac-cident où elle aurait péri entre
les mains du maîlre (par exemple dans le même incendie), alors
tous les auteurs s'accordent à dire que le voleur n'a en-couru aucune
obligation; parce que, dans ce cas, ce n'est pas le vol qui cause le dommage
; et, comme nous l'avons dit au n. 44 > la seule injustice n'oblige pas
à la restitution. Si, au contraire, la chose a péri par la
faute du voleur ou de tout autre, avant qu'il soit arrivé un de
ces accidents qui peuvent frapper tout le monde, il est certain que le
voleur est tenu d'en restituer la valeur, parce qu'un accident qui arriverait
après ne peut pas le libérer d'une obliga-tion qu'il a déjà
encourue ; quoique Less., Lug., Vasq., Spor. et Laym. l'excusent avec raison,
dans le cas où la chose était déjà menacée
d'un danger imminent à l'époque où il l'a consommée.
Mais il y a de plus grandes difficultés pour le cas où la
chose périt dans un autre danger, après que le dan-ger général
est passé. Castrop. et les Salm. disent que, dans ce cas, le possesseur
est tenu à la resti-
(0 N. C18. (à) N. 62a.
POtîft LES COroESSEVRS.
*?
tution du dommage, à cause du retard coupable qu'il a mis à
restituer la cliose. Mais toutes les fois que le second danger a été
aussi général, et que la chose eût dû également
périr entre les mains du maître, Lacroix veut qu'il ne soit
pas tenu à la resti-tution , parce qu'alors ce n'est pas le retard,
mais le danger qui a été cause du dommage ( ? ). Sur la question
de savoir si le voleur est tenu de faire la restitu-tion , lorsque,' se
trouvant réduit à l'extrême néces-sité
, il consomme la cliose volée, voyez ce qui est dit au n. 19.
IAXX. 2° On demande quelle est l'obligation imposée à
celui qui achète une chose, lorsqu'il n'est pas certain qu'elle
appartienne au vendeur, et lors-qu'après avoir fait des recherches,il
n'a pas pu dé-couvrir la Vérité : quelques uns disent
qu'il est obligé de la donner à celui qu'il présume
en être le maître ou bien aux pauvres; mais généralement,
et avec plus de raison, Castrop.,Lug., Less , les Salm., etc., disent qu'il
doit la partager suivant les doutes qu'il a sur le maître de cette
chose; parce que, d'un côté, il ne peut la garder, car il
ne peut se prévaloir d'une possession qui a commencé sans
bonne foi, et, d'un autre côté, il n'est pas juste qu'il soit
obligé à la restituer tout entière, puisqu'on ne sait
pas si elle appartient à lui ou à tout autre (2).
LXXXI. 3° On demande si l'obligation de resti-tuer est imposée
à celui qui fraude les impôts. L'o-pinion la plus généralement
répandue est pour l'af-firmative; je l'ai adoptée dans mon
ouvrage. Elle est fondée sur ce que le roi est obligé à
gouverner
(1) N. 620. (a) N. 6a5.
78
INSTaUCTIGN PRATIQUE
le royaume, comme le peuple l'est à le maintenir sur le trône.
Voyez Mol., Suar., Sanch., Croix et autres. Gela est prouvé par
les paroles de l'Apôtre : « Redditeomnibus debita, cui tributum
tributum, cui » vectigal vectigal. «(Rom. id ? D'autres auteurs
ne veulent pas qu'il y ait obligation de restituer lorsque la loi prononce
une peine contre les auteurs d'une pa-reille fraude. Voyez Nav. , Beja,
Sa, Duard., Malder., etc. Ces auteurs prétendent que, quoique les
sujets soient tenus de payer à leur prince de lé-gers subsides,
et quoique le prince puisse les y contraindre, sans la faute de conscience,
néanmoins on ne doit pas présumer qu'il veuille les soumettre
à cette faute, toutes les fois qu'il a prononcé, pour ce
fait, une peine pécuniaire très considérable dont
il retire un grand profit, et que les sujets s'y sont soumis. De plus,
en admettant l'opinion qui veut que les lois mixtes imposent en même
temps une peine et une condamnation, on peut dire que cette loi mixte,
qui impose une faute et une peine, une fois établie, celui qui a
commis la fraude fait un pé-ché en refusant de payer la peine,
même après la confiscation de la chose, ou bien en voulant
se pré-valoir de cette confiscation pour établir une com-pensation
avec ce qu'il doit, parce que, dans ce cas, la loi paraît disjunctive,
c'est-à-dire, que ??? doit payer ou l'impôt ou la peine (
suivant l'opinion de Sanch., Sal., Cord., Angl. et autres). Cepen-dant
ils ajoutent qu'il est douteux que, d'après cette loi, l'on soit
obligé à payer l'une et l'autre, et, dans le doute, il ne
peut pas y avoir d'obligation cer-taine (1). Malgré tout cela, je
crois devoir conseil-Ci) N. 616. q. 3.
POUR LES CONPESSBDRS.
j(f
lerde suivre la première opinion. Du reste,Sanch. S. Anton.,
Gabriel, etc., s'accordent peur absoudre ceux qui emploient les choses
à leur usage particu-lier ou à celui de leur famille, pourvu
que ce ne soit pas sur ces choses mêmes que l'impôt soit expres-sément
établi : c'est ce qui résulte de la loi Universi, de vectig.
; ou encore, pourvu que ce ne soit pas un usage établi d'effectuer
le paiement au moyen de ces mêmes objets destinés à
l'usage particulier ; de plus, Silv., Lug., Less., etc., conviennent qu'on
doit absoudre les pauvre qui se trouvent dans un tel état de misère,
que le paiement des impôts leur en-lèverait tout moyen de
subsistance (1).
§ V. Ce que doit restituer celui qui a commis un homicide.
82. Ce que doit restituer l'homicide.
85. Si l'on doit une indemnité pécuniaire pour avoir
attenté à la vie ou à l'honneur de quelqu'un.
84· Celui qui tue une personne pour une autre est-il tenu à
la restitution ?
85. Est-il soumis à l'excommunication et à l'ir-régularité
?
86. Lorsque la personne mise à mort pardonne au meurtrier,
celui-ci reste-t-il obligé envers les fils du défunt ?
87. Que doit-on restituer aux héritiers du défunt?
Est-ce les créanciers ou eux qui doivent être indem-nisés
du dommage?
88. Si l'homicide est imputé à un tiers.
(1) N. fri6. q. S.
8?
INSTRUCTION PRATIQUE
89. De celui qui commet un meurtre par une in-fraction aux lois
de la justice.
90. Les héritiers du condamné sont-us tenus de
réparer le dommage ?
LXXXII. L'homicide est tenu de restituer tout le dommage qu'il a causé
dans le patrimoine de la per-sonne tuée par lui, par exemple, les
frais de mala-die (non ceux de funérailles). Il doit restituer aussi
la valeur des bénéfices qu'il l'a empêché de
faire, suivant le plus ou moins de chances qu'il avait de pouvoir les réaliser,
et parce qu'il a subi sa peine, il n'est pas affranchi de cette restitution,
quoiqu'on soit présumé lui en avoir" fait remise, si on ne
l'a pas exigée lors de la condamnation (1). Quelques auteurs veulent
qu'on déduise de la restitution des bénéfices cessants
la valeur du travail qu'il aurait fallu pour les réaliser ; mais
d'autres professent une opinion contraire. La meilleure est celle de Bonac.,
qui dit que l'on doit seulement faire la déduction de ce que la
personne lésée aurait été obligée de
payer pour s'exempter de ce travail (2).
LXXXIII. i° 11 y a doute pour savoir si, outre les dommages et
les restitutions dont nous avons parlé, l'offenseur est tenu de
payer en argent l'at-tentat à la vie ou à la réputation
de son prochain ; l'affirmative est professée par Sot., Cajet.,
Silv., etc., qui disent que lorsqu'on ne peut pas restituer la to-talité
des dommages qu'il a causés, on doit en resti-tuer au moins une
partie. Ces auteurs s'appuient de la doctrine de saint Thomas, qui dit:
«Cum aliquis «abstulit membrum alicui, debet ei recompensare
(1) Lib. III. ?, 6a6, ad. S9.
(a) ?. 6?,
POUR LES CONFESSEURS.
81
s vel in pecunia, vel in aliquo honore (?). «Néan-moins
l'opinion la mieux fondée et la plus généra-lementreçue,
est celle deLess., Lugo, Bonac.Laym., Sanch., Less., Salm., et beaucoup
d'autres; le père Conc. dit que cette opinion est fondée
(ce qui, dans son sens, revient à dire qu'elle est moralement cer-taine,
ou au moins très probable, d'où il suit que l'autre lui paraît
mal fondée ) ; la raison en est que la justice commutative veut
que la reslitution égale la valeur du dommage causé; mais
lorsque le dom-mage est d'une nature différente de celle de la satis-faction,
il ne peut y avoir entre ces deux choses de rapport d'égalité,
ni de compensation, ni de tout, ni de partie; par conséquent, on
ne peut pas être obligé de donner des objets matériels
pour réparer l'attentat à la vie ou à la réputation,
qui sont des choses d'un ordre supérieur. Ceci est encoreappuyé
sur l'Ecriture sainte, où il est dit que si la personne frappée
vient à guérir :« Innocens erit qui percusse-»
rit, ita tamen ut operas ejus et impensas in medicos » restituat.
» (Exod. 21,19). Ainsi donc, une fois les dommages payés,
le meurtrier reste innocent, c'est-à-dire (comme le dit très
bien Lugo), est libéré de toute obligation pécuniaire.
A l'appui on peut cker encore laJoi Fin. ff. De his quieffud., etc., où
il est dit : « Cicatricum autem aut deformitatis nulla fit
«estimatio, quia liberum corpus nullam recipit esti-«mationem
(2). »
LXXXIV. On demande, 20 si on doit obligera la restitution celui qui,
voulant tuer son ennemi, a tué par erreur son ami. Cette question
est semblable
(1) 2. a. q. 42· a. at ad. 1. (a) N. 6a8et 100.
T. xxiv.
6
82
INSTRUCTION PKA.TIQUE
en tout point à celle qui a pour objet de savoir si on doit
obligera la restitution celui qui, voulant incendier la maison de son ennemi,
incendierait, par erreur, celle de son ami. L'affirmative est pro-fessée
parquelques auteurs, tels que Bonac, Bus. etc., qui disent que toute action
contraire à la justice doit engendrer l'obligation de restituer
; d'ailleurs, ici l'erreur ne porte pas sur la substance de la chose, mais
seulement sur le maître de la maison , ou la qualité de la
personne, et par conséquent elle n'af-franchit pas de l'obligation
de restituer. Cependant d'autres docteurs, Laymann , Moli, Spor., Lacroix,
Leand., etc. (ainsi, que mon ancien maître le savant M. Borni), soutiennent
la négative dans tous les cas où il estbien constant que
l'incendiaire voulaitmettre le feu à la maison de son ennen i, et
non à celle de son ami, parce que, pour que le dommage causé
engendre l'obligation de restituer, il ne suffit pas que l'action soit
matériellement injuste ou injurieuse, il faut encore qu'elle le
soit formellement, c'est-à* dire que l'injure ait été
volontairement dirigée contre la personne qui en*a souffert. Par
conséquent, si je blesse mon ami sans en avoir eu l'intention, je
ne lu* fais pas une injure formelle ; ainsi donc l'erreur porte sur la
substance, et non pas seulement sur la qualité, puisque l'obligation
de restituer le dom-mage naît uniquement de l'injure. Il faut appliquer
la même chose à l'homicide commis par erreur, commele disent
Fill., Lacroix, Tamb. et Leand. Mol., Lugo et Sporer en disent de même
pour le cas de vol ; lors, par exemple, que quelqu'un prend une chose,
croyant la prendre conditionnellement à son ennemi, tandis qu'en
réalité c'est à son ami qu'il la dérobe, et
s'il consomme cette chose ( d'après l'opi-
POUR LES CONFESSEURS.
85
nion de ces auteurs), il ne sera pas tenu à en faire la restitution.
Mais c'est avec raison que Sanchez pro-fesse une opinion contraire dans
le cas de vol, parce qu'entre une action nuisible et un vol, il y a cette
différence , que le caractère principal du vol est un gain
illicite, et l'injure faite au maître n'est qu'un accessoire, tandis
que dans l'action nuisible, le ca-ractère principal c'est l'injure
faite au maître, et le dommage causé n'est que l'accessoire,
d'où il ré-sulte que dans l'action nuisible l'erreur de personne
constitue une erreur sur la substance, et que dans le vol, elle ne constitue
qu'une erreur sur la qua-lité (i).
LXXXV. On demande 3° si on encourt l'excom-munication prononcée
par les canons, lorsque vou-lant frapper un clerc on en a frappé
un autre ? Cette question est résolue négativement par Conci,,
Dian., Suar., etc., qui disent qu'à l'égard de cet autre,
l'injure est involontaire ; mais, tout bien con-sidéré ,
je crois mieux fondée l'opinion de Molina , Sanch., Bon., Viva et
autres, qui ont résolu cette question dans le sens affirmatif, parce
que l'excom-munication est prononcée, non pas à cause de
l'in-jure faite à la .personne, mais à cause de 'celle faite
à l'état ecclésiastique, qui, dans ce cas, se trouve
offensé quoiqu'il y ait eu erreur de personne. Par conséquent,
dans l'espèce, le malfaiteur sera libéré de l'obligation
de restituer la valeur du dommage causé à la personne, comme
on l'a dit en traitant la question précédente, par la raison
qu'il n'y a pas eu injure contre la personne (2), niais il ne sera pas
(1) N. 629. (a) Ibid. q. a.
84
INSTRUCTION PRATIQUE
libéré de l'excommunication , et moins encore de l'irrégularité,
comme le disent Sanch., Cova., Led., Vega, etc., contre l'opinion de Fill.,
Spor., Tambu-rini, etc., parce que l'irrégularité est une
peine qui frappe d'une manière générale toute espèce
d'homicide , et que celui qui tue une personne pour une autre , foit erreur
sur la personne, mais non sur l'action"même qu'il commet, et que,
même en se trompant, il a eu l'intention de tuer un homme. 11 en
serait autrement si on avait donné mandat de tuer un ennemi, et
que, par erreur, le mandataire tuât une autre personne (comme on
prétend que l'a déclaré la S. C. ) ; la raison de
cette différence est que, dans ce cas, l'homicide commis sur l'individu
pris pour un autre, a été tout-à-fait involontaire,
tant sous le rapport de la personne que sous le rap-port du délit
en lui-même ; car cet homicide pro-vient , non pas du mandant, mais
de l'erreur du mandataire (1).
LXXXVI. On demande 4° si le meurtrier à qui sa victime a
fait avant de mourir la remise de la va-leur du dommage par elle éprouvé,
est malgré cela tenu d'en faire la restitution à ses enfants.
Lugo-et Lacroix sont pour l'affirmative, disant que le père ne peut
pas priver ses enfants du droit qu'ils ont sur ses biens. Mais la négative
est plus généralement adoptée par Soto, Sanch., Bonac.,
Salm., Bus., etc., parce que ce n'est pas aux enfants que l'injure est
faite, à moins "qu'elle soit préjudiciable aux biens d'un
père cont.r« sa volonté ; d'où il résulte
que comme c'est paj lui qu'ils acquièrent le droit sur ces biens,
ils le perdent de même, quoique ce soit mal
(ON· 6a9. q. a,"
TOUR LES CONFESSEURS.
85
fait de la part d'un père de faire cette remise lors-qu'elle
doit porter préjudice à des enfants qui sont dans le besoin
(1).
LXXXVII. On demande 5° en quoi doit consis-ter la restitution à
laquelle le meurtrier est tenu envers les enfants du défunt. Si
ces héritiers n'ont pas la qualité d'héritiers nécessaires,
il doit leur restituer toutes les dettes qu'il a contractées envers
le défunt avant l'époque de sa mort, c'est-à-dire
( comme nous l'avons dit au commencement) toutes les dépenses que
lui a occasionnées sa maladie, et tous les bénéfices
cessants pendant tout le temps qu'il est resté dans'l'impossibilite
de se livrer à ses occupations. Maie si ce sont des héritiers
néces-saires, tels que les enfants, les père et mère
et la femme, il est obligé de plus à leur restituer (d'a-près
les espérances qu'avait le défunt ) tous les bé-néfices
que le défunt aurait vraisemblablement réa-lisés s'il
eût vécu, et qui auraient servi à l'entretien de sa
famille. C'est ainsi que la question est résolue par Soto, Sanch.,
Nav. etsaintThom. Cependant La-croix dit avec raison que cela ne doit «'appliquer
qu'au cas où ces héritiers nécessaires auraient reçu
également d'une autre personne les aliments que le défunt
eût pu leur fournir, parce qu'alors ils n'é-prouvent aucun
dommage (2). En outre, cela ne s'applique pas non plus aux frères
ou sœurs à qui le défunt aurait fourni des aliments s'il
eût vécu, lors même que l'homicide connût d'avance
le préju-dice qu'il allait leur causer; comme le disent avec plus
de raison Less., Conc., Sot., Lug., Bonac.,
(?) Lib. III. n. 63?.
(a) N. 63?.
86
INSTRUCTION PRATIQUE
Salm., etc. (centre l'opinion de San ch., Azor,etc), et cela malgré
qn'on puisse dire que celui qui em-pêche par violence son prochain
d'acquérir un juste bénéfice, pèche contre
la justice et doit par consé-quent être obligé à
la restitution, comme il a été dit au n. 61, parce que ceci
n'est vrai que lorsque le dommage a été directement fait
au prochain, et non quand ce dommage n'a été causé
que par acci-dent. D'après ce principe nous dirons, d'un autre côté,
avec Tamb.,Conc, Less., Viva, Lacroix, Elb. (contre l'opinion de Sot.,
Bon., etc. ), que lorsque l'homicide a l'intention de nuire directement
aux personnes dont nous avons parlé (ou à toute autre), il
est tenu de restituer la valeur du dommage qu'il lui a causé, parce
qu'on n'a pas le droit d'empêcher par violence quelqu'un de réaliser
un juste béné-fice^), d'après Less., Bec, Salni.,
Conc, Viva, Tamb., etc( contre quelques autres). La même dé-cision
est applicable en faveur des ciéanciers du défunt, c'est,-à-dire
que le meurtrier doit les in-demniser du dommage par eux éprouvé,
lors tou-tefois qu'il en a été la cause directe ^2).
LXXXVIIJ. 6° On demande si le meurtrier est tenu de restituer le
dommage qu'éprouverait un tiers à qui le meurtre serait imputé?
Nous dirons avec Sot., Less., Sanch., Tamb. et Lacroix (contre un petit
nombre d'autres) qu'il n'y est pas obligé, lors même qu'il
a connaissance de ce dommage, et lors même qu'il aurait eu l'intention
de le causer, parce qu'une intention coupable ne peut pas obli-ger à
la restitution lorsqu'elle n'est pas accompagnée
(1) N. 655 el 634. (a) H. 654.;
POUR LES CONFESSEURS.
87
d'une action extérieure, et constituant une injus-tice grave
contre la personne lésée. Toutefois cela doit s'entendre,
à condition que lés circonstances de l'homicide ne soient
pas de nature à donner la conviction morale que le" meurtrier avait
réellement cette intention ; comme, par exemple, s'il avait com-mis
le meurtre étant revêtu des habits du tiers ou s'il l'avait
commis dans la propriété de celui-ci, etc., parce qu'alors
il y a l'action extérieure et injuste (1). LXXXIX. ?" On demande
si l'on doit obliger à la restitution, celui qui, assailli par son
ennemi, lui donne la mort en excédant les bornes de la légi-r
time défense. Quelques auteurs veulent qu'il n'y soit pas obligé,
parce que, disent-ils, il n'a fait qu'user de son droit ; mais pour, nous,
nous partageons l'opinion de Lugo, Sancti., Nav.,Lacroix et autres,
qui pensent qu'il est obligé, parce qu'en excédant les limites
de la légitime défense, il commet un délit grave contre
son ennemi, qui, malgré qu'il l'ait at-taqué injustement,
n'a pas pour cela perdu le droit qu'il avait à conserver sa propre
vie. Cependant c'est avec raison que Lugo, Vasq. et antres (contre l'opi-nion
de Suar.) affranchissent de l'obligation de res-tituer celui qui ayant
provoqué son ennemi à un combat singulier, le met à
mort ; par la raison que le combat n'est pas, dans ce cas ,
contraire aux règles de là justice, car il est resté
dans son droit en acceptant le combat (2).
CX. 8e On demande si les héritiers du meur-trier sont tenus
de restituer le dommage, lorsque leur auteur a subi la peine de mort ?
Soto et autres
(1) N. 656.
($) ?. 6?7 et 658.
88
INSTRUCTION PRATIQUE
sont pour la négative; mais on doit se décider pour l'affirmative,
qui est soutenue, par Spar., Lacroix, et la plupart des autres. C'est avecraison
que Sot., Less., Fill., Bus. et Lacroix, admettent une-exception pour Je
cas où les héritiers de la personne tuée ne récla-ment
pas cette restitution} parce qu'alors ils sont présumés en
faire l'abandon , pourvu toutefois que la valeur n'en soit pas très
élevée (?).
§ VI. Que doit-on restituer dans le cas de viol.
gi. Quelle est l'obligation de l'auteur du viol lorsque la dame a été
consentante?
Q2. Quelle est-elle lorsque le viol a été commis par
force ou avec des menaces ?
I)3. Celui qui a fait des promesses vraies ou si-mulées, est
obligé de contracter mariage avec la personne qu'il a abusée.
g4. Cette obligation cesse, i° si la dame pouvait reconnaître
le piège;
g5. 2° Si l'on craint que le mariage ait des résul-tats
fâcheux ; 3° si la dame fait remise de l'obliga-tion; 4°
si ce mariage doit déshonorer la famille; 5° si l'homme n'a
fait que des attouchements;
g6. 6° S'il a trouvé une fille déjà corrompue;
7° si la dame refuse le mariage.
97. Du cas où l'auteur du viol avait fait vœu de chasteté.
98. S'il existe des liens de parenté entre lui et la personne
violée.
CXI. Ici il faut distinguer l'obligation imposée à l'auteur
du viol lorsqu'il n'a pas fait de pro-
(1) N. 63K
POUR tES CONFESSEURS.
$q
messe de mariage, et celle qui lui est imposée lors-qu'il en
a fait. Il n'est obligé en rien envers la de-moiselle lorsque, sans
lui avoir fait de promesse de mariage, elle a consenti à se laisser
violer, et d'a-près Lugo, Sanch., Suar. et Less., il n'est pas non
plus obligé envers lès parents de la demoiselle, parce qu'elle
est la maîtresse de son corps. Mais S. Anti, Nav., Sal., etc., veulent
qu'il soit obligé à réparer leur considération
soit par quelque marque de déférence, soit en leur demandant
pardon, si toutefois ils ne refusent pas cette réparation (1). Du
reste,Sot., Suar., Moli, Sanch., Vasq., Rone, Less., Lugo, Salm., etc.,
s'accordent à dire que l'auteur du viol n'est pas tenu d'indemniser
le père du dommage qu'il éprouvera, par suite de la nécessité
de donner une dot plus considérable à sa fille pour l'établir.
Cependant on admet une exception, i° pour le cas où l'homme
aurait proclamé l'aventure; 2° pour celui où la fille
serait pauvre et l'homme très riche, comme le disent les Salm.,
Bann.,Tap., etc. (contre Dicast. et Rebel.), parce que dans ce cas on présume
qu'elle n'avait consenti que sous la condition de cette indemnité.
11 y a exception, 5° lorsque le juge condamne l'homme à donner
une somme d'argent en punition de son délit. Du reste, les lois
(? et 2 de adult., et 1. ? fi", de rapt.) condamnent l'auteur du viol à
épouser ou à doter la personne violée, parce qu'elles
présument qu'il y a abus ou violence toutes les fois qu'on ne prouve
pas le contraire. Mais en conscience, les Salm. disent
avec raison que l'homme n'est pas obligé si la femme a réellement
(1) Lib. III. n. 64t. Si·
9°
INSTRUCTION PHATIQUE
consenti de son propre mouvement. (V. ce qui est dit au chap, n, n°
26) (1).
XGII. Si celui qui a violé une jeune fille a em-ployé
la violence, la fraude ou les menaces , alors il est tenu de l'indemniser,
elle et ses parents, de tous les torts qu'il leur a causés, soit
dans leur honneur, soit dans leurs biens. Cette indemnité con-siste
à lui fournir une dot ou à augmenter celle qu'elle a, et
quoique, d'après Lugo, Less., Salm., etc., il ne soit pas tenu de
l'épouser, néanmoins le juge peut, en punition de son délit,
l'obliger à contracter mariage (d'après le texte du ch. 1"
de adult, et dans l'Exode au c. 92/16) (2). L'auteur du viol est même
tenu d'épouser la fille violée , lorsqu il ne peut pas réparer
d'une autre manière le tort qu'il lui a causé. Voir Less.,
Lug., Salm., ???., Dicast., etc. (?). D'un autre côté il n'est
pas obligé du tout, Ie si la fille avait déjà été
violée auparavant, pourvu toute-fois qu'elle n'ait pas été
déshonorée par ce second outrage ; 20 si malgré cela
elle a trouvé à se marier tout aussi bien que si elle eût
été vierge , parce qu'a-lors elle n'a éprouvé
aucun dommage. C'est l'opi-nion commune; mais on ajoute cependant, que
si plus tard la femme est maltraitée par son mari, parce qu'il a
appris le viol commis sur elle (4) , l'auteur de ce viol doit l'indemniser
de quelque manière de tort qu'elle éprouve. Mais à
quoi sera-t-il obligé s'il a obtenu son consentement par des prières
ou des cadeaux? Sanch., Less., Lugo, Sot., Vasq., Salm.,
(1) Lib. III. a. 64i.§. 1.
(2) Ibid. V. Hœc. deviro.
(3) N. 649.infin.V.ini.
(4) N. 64!. dub. 1. V. Haec. de vko.
POUR LES CONFESSEURS.
nj
s'accordent à dire qu'il n'est obligé à rien pourvu
qu'il ne l'ait pas menacée ou qu'il ne lui ait pas in-spiré
la crainte d'un mal très grave, car dans le cas contraire il serait
obligé à réparer tout le dom-mage (1).
XGIII. Tout ce que nous avons dit est pour le cas où il n'y
a pas eu promesse de mariage; mais quand cette promesse a été
faite, l'auteur du viol est obligé d'épouser la fille, non
seulement lorsque la promesse a été sincère, mais
encore lorsqu'elle a été feinte ; commeon doit le décider
avec saint Thomas (1), dont l'opinion est adoptée par saint Anton.,
Sanch., Less., Salm., Lacroix, Viv., etc. (contre quelques autres, en petit
nombre, qui voulaient lui imposer seulement l'obligation de réparer
le dommage ). La première raison sur laquelle se fonde cette opinion,
est qu'un dommage de cette nature ne peut être con-venablement réparé
que par le mariage ; la deuxième (c'est la plus décisive,
et elle nous servira plus tard pour décider beaucoup de cas), parce
que dans les con-trats innommés «do ut des», et autres
semblables, lors-que l'une des parties a exécuté le contrat
en ce qui la concerne, l'autre partie, lors même qu'elle n'a fait
qu'une promesse simulée, est obligée, par la justice, à
exécuter le contrat en ce qui dépend d'elle, tout aussi bien
que si sa promesse eût été sincère. C'est là
une disposition nécessaire pour préserver les contrats de
traudes sans nombre qui ruineraient le commerce des hommes au détriment
de tous en général (2). Il faut, avec Lug. et Salm. (contre
Sanch.), en dire de
(1) Snpplem. q. 46· a, ad. 4-(a) N. 64a.
92
INSTRUCTION PRATIQUE
même du cas où, avec des promesses de mariage, on aurait
abusé d'une veuve jouissant d'une bonne réputation (1). Cela
est reçu relativement à la con-science ; mais relativement
à la justice extérieure, il ne faut pas oublier le passage
que fait remarquer le Continuateur de Tourne/y (2), où il est dit
que pour éviter ces fréquents inconvénients, il serait
extrême-ment utile que les évêques et les magistrats
décla-rassent nulles toutes ces promesses de mariage, même
lorsqu'elles auraient été faites par serment, si on ne pouvait
en fournir une preuve incontesta-ble, par témoins ou par écrits
valables.
XGIV. L'opinion que nous venons de rapporter au sujet de l'obligation
du séducteur qui a fait une promesse simulée, cesse de recevoir
son application, i° si la fille pouvait, par le terme de la promesse
ou par toute autre circonstance, reconnaître facile-ment le mensonge,
comme, par exemple (d'après Lug., saint Anton., Nav., Silv., Salm.
et autres, ainsi que saint Thomas ) (3), si l'homme était, par son
rang ou ses richesses, bien au-dessus de la condition de la fille, parce
qu'alors ( comme le dit le docteur angélique), on peut raisonnablement
supposer que la fille avait feint d'être abusée, ou avait
voulu se laisser tromper, mais non pas qu'elle avait été
réel-lement séduite. Quant à l'appréciation
de cette iné-galité des conditions, Lessius donne pour exemple
le cas où l'homme serait le fils d'un grand, et où la femme
serait fille d'un ouvrier. Mais Sanch., Nav.
(1) N. 646. in fin.
(a) Tom. III. pug. 434· V. Qnter.
(?; Suppl. q, 46. ?. 5. ad. 4.
POUR LES CONFESSEURS.
QJ
et saint Anton.,disentqu'ilsuffitd'uneinégalitémoins
grande que celle-là; par exemple, la différence qu'il y a
entre un noble (non un grand) et la fille d'un laboureur ou d'un artisan
, à laquelle il aurait fait des promesses de mariage. Ces auteurs
et plusieurs au-tres et Lessius lui-même, décident la même
chose pour le cas où l'homme serait évidemment d'une opulence
bien supérieure au patrimoine de la fille ( ? ), de plus, Sanch.
Lug.', Less., Salm., Yiv. et autres, disent avec raison que cela doit avoir
lieu lors même que la fille aurait été dans une ignorance
absolue de . cette inégalité, parce que, si, dans ce cas,
il y avait obligation de l'épouser, la réparation serait
d'une valeur supérieure à celle de l'injure, et comme la
ré-paration doit seulement égaler le dommage, il suf-fira,
dans ce cas, que le séducteur tâche de l'indem-niser en lui
fournissant une dot (2). Si, au contraire, la fille pouvait avoir connaissance
de cette inégalité des conditions, comme nous l'avons dit
plus haut, il faut dire avec Less., saint Antonin, Lug., Sanch., Silv.,
etc. contre l'opinion de certains autres, qu'alors
V homme ne sera pas même tenu à l'indem-niser du dommage qu'elle
peut éprouver, comme l'enseigne expressément saint Thomas
à l'endroit précité : « Et etiam quoad hoc (c'est-à-dire
à la » réparation du dommage), non tenetur, quia
prœ-» sumi probabiliter potest quod sponsa non fuerit »decepta,
sed decipi se unxerit (5). »
XGV. 20 On ne l'applique pas s'il est à craindre que le mariage
ait des suites fâcheuses. V. Lug.,
(1) Lib. III. n. 64?.
(2) Ibid. dab. s, (3j Ibid. dab. 3.
94
INSTRUCTION PRATIQUE
Sanch., Bus., Henr., etc. (?), ?» On l'applique, si la femme
libère celui qui l'a violée de l'obligation de l'épouser.
Cette libération est bien valable, alors même que la famille
de cette femme serait désho-norée par le viol commis sur
elle, parce que c'est à elle personnellement qu'appartient le droit
de de-mander le mariage, et qu'elle est libre de s'en désis-ter.
V. Lug., Less., Rone, et Lay m. (2). 4° On ne l'applique pas, si l'homme
ne peut contracter un tel mariage sans déshonorer sa famille ; car
alors il n'est pas obligé à le contracter, quand même
sa promesse eût été sincère, cette promesse
étant nulle comme provenant d'une cause illicite,ainsi que ledisent
d'un commun accord Laym., Nav., Sanch., Ronc., Spor., etc. (?). Mais il
serait valablement obligé si, la promesse ayant été
sincère, l'inégalité ne consis-tait que dans la fortune,
en se conformant à ce qui sera dit au ch. 18, n. 16, en traitant
des fiançailles. 5° On ne l'applique pas lorsque l'homme a seule-ment
fait des attouchements sur une fille vierge, d'après l'opinion de
Sanch., Nav., Lug. et Lacroix, parce que de simples attouchements ne produisent
pas un déshonneur assez considérable pour engen-drer l'obligation
de contracter un mariage qu'on n'a promis que par feinte, et ils ne sont
pas d'une assez grande importance pour induire la fille en erreur sur la
valeur de cette promesse. Mais il faudrait faire exception à cette
règle s'd s'agissait d'une dame de condition noble et honnête,
ou encore si l'homme avait demandé, avec cette promesse de mariage,
au-
(i) N. 644. ad. 648.
(9) Ibid. etlib. VI. n. 961,
(3) N. 644. ad. 648.
POtJR LES CONFESSEURS.
Q5
tre chose que ces seuls attouchements, et que la demoiselle eut été
deshonorée parla publicité qu'au-raient reçue leurs
liaisons (1).
XCVI. 6° Elle ne s'applique pas lorsque l'homme a trouvé
une fille déjà corrompue, tandis qu'il la croyait vierge,
comme le disent Sanch., Laym., Salm., Ronc, Holz., Spor., etc. Dans ce
cas, on doit dire, d'après l'opinion mieux fondée de Less.,
Conc. et Ronc. , que l'homme n'est obligé de rien donner, à
causede la faute par lui commise, à moins qu'il y ait eu une convention
expresse à cet égard, ou que la fille ait été
déshonorée dans l'opinion pu-blique. Mais Elbel dit avec
raison que, si c'est elle-même qui a publié son déshonneur,
l'homme n'a plus aucune obligation (2). 70 On ne l'applique pas lorsque
la demoiselle , après s'être laissée violer par suite
de la promesse de mariage qui lui avait été faus-sement faite,
a refusé de s'unir à son séducteur; car alors l'homme
n'est plus obligé à rien, à moins (suivant l'exception
que fait avec beaucoup de rai-son le cardinal de Lugo) qu'il se fût
fait passer pour un homme d'une condition supérieure ou égale
à la sienne , tandis qu'il était d'une condition inférieure.
Car, dans ce cas, quoique la demoiselle ait refusé de l'épouser,
il est néanmoins tenu de l'indemniser en lui fournissant le surplus
de dot qu'il lui faudra pour s'établir. Nous dirons, avec Nav.,
Vasq., Sylv. etHenr. (contre Sanch. et Lugo), que l'homme est obligé
de fournir la même indemnité lorsque ce n'est pas la demoiselle
, mais ses parents qui s'opposent au mariage; parce que l'objet principal
d'une pro-
(1) Lab. III. a. 645. (a) N. 646.
96
INSTRUCTION PRATIQUE
messe simulée c'est d'obliger à payer l'indemnité
du tort qu'on a causé. Nous nous rangeons de l'avis de Less., Az.,
Bon., Lug., Lacroix(contre Molina, etc.), qui décident la même
chose lorsque la demoiselle a été violée sans y être
consentante, et que celui qui l'a ainsi outragée se refuse ensuite
à l'épouser. Au contraire, comme le disent très bien
Lug., Less, et autres, l'auteur du viol n'est pas tenu de l'épouser,
lorsqu'il n'a fait aucune promess,e, ni feinte ni véri-table, lors
même qu'il n'y a pas d'autre moyen de réparer le dommage,
et qu'il n'y a pas grande iné-galité de conditions (1).
XGVII. Une première question est celle de savoir si un homme
qui, ayant fait vœu de chasteté, viole une jeune fille, est obligé
de l'épouser. La négative est soutenue par Laym., Salm. et
Conc. ; mais c'est avec plus de raison que Lug., Sanch., Less., Vasq.,
Tamb.,Spor. et Lacroix, se déclarent pour l'affirma-tive. Je ne
sais jusqu'à quel point l'opinion contraire peut paraître
fondée, car (comme il a été dit au n. y,3 ), afin
de maintenir la bonne foi dans les con-trats , on a établi que celui
qui a fait une promesse simulée est tenu d'exécuter sa part
du contrat, comme si sa promesse avait été sincère,
une fois que l'autre contractant l'a exécuté en ce qui le
concerne. On oppose que la promesse est nulle par l'effet du vœu prononcé
antérieurement; mais on répond en se-cond lieu que les dettes
à titre onéreux doivent pas-ser avant celles à titre
gratuit, et les vœux sont de ce dernier genre. On répond en troisième
lieu que, si l'auteur du viol ne pouvait pas promettre le mariage, il pouvait
au jnoins promettre de demander à être
(0 N. 648.
POUR LES CONFESSEURS,
Q«
délié de son vœu, et c'est à cette dernière
chose qu'il s'est obligé en promettant le mariage, car ce-lui qui
est obligé â exécuter la fin est obligé à
se pro-curer les moyens, c'est-à-dire, dans l'espèce, à
de-mander la dispense; et dans le cas où il ne pourrait pas l'obtenir,
il serait obligé au moins à la répara-tion des dommages,
comme le disent très bien Lugo etSporer(i).
XCVIII. Une seconde question est celle de savoir quelle est l'obligation
de celui qui a violé une jeune fille à laquelle il était
uni par les liens du sang, en lui faisant des promesses de mariage. Lorsque
la promesse a été sincère et qu'elle a été
accompagnée de l'engagement pris par le jeune homme de deman-der
la dispense, Lug., Laym., Sanch., Salm., etc., s'accordent à dire
(et c'est l'opinion commune) que la promesse est valable, et qu'elle oblige
d'abord à demander la dispense, et ensuite à contracter le
mariage , toutes les fois qu'il s'agit d'une dispense que l'on est dans
l'usage d'accorder. Nous dirons la même chose (avec Lug. et Tambu.)
pour le cas où la promesse a été seulement simulée,
lorsque la fille n'a pas pu reconnaître le mensonge, parce que le
promettant est tenu (comme nous l'avons dit plus haut ) de faire tout ce
qu'il aurait dû faire si la pro-messe avait été vraie.
Néanmoins, si par une erreur excusable il n'avait pas connu l'empêchement
qui résulte de la parenté, et que pour obtenir une dis-pense
il lui en coûtât de grandes dépenses ou de graves inconvénients,
il ne serait pas soumis à une obligation si onéreuse. Mais
il est tenu de réparer
(?) ?. 649.
T. XXIV.
7
Ç>8
INSTRUCTION PRATIQUE
le tort, comme le serait tout autre individu qui se serait rendu coupable
de viol(i).
§ VII. Quelle est la restitution qui doit être faite dans
le cas d'adultère,
99, Quelle est l'obligation de la femme adultère? Est-elle obligée
à le déclarer à l'enfant adultérin?
!00. Le fils e§t-U obligé de la croire?
îoi.Quelle est l'obligation de l'homme adultère, lors
même qu'il n'a pas engagé la mère à faire passer
les enfants adultérins sous le nom du mari,
102. Que faut-il décider dans Je doute, si l'en-fant est
au mari ou à une autre personne coupable d'adultère?
103. Si l'on envoie les enfants adultérins à l'hô-
pital?
X.CIX. H faut distinguer l'obligation de l'homme adultère de.
celle de la femme adultère, La femme adultère, lorsqu'elle
ne peut pas réparer Je tort qu'elle a causé à son
mari et à ses enfants légitimes, par la naissance des enfants
adultérins, qui sont le fruit de son crime t est au moins tenue,
de les indem-niser, soit avec les biens qu'elle, possède, soit en
abandonnant ceux qu'elle pourrait réclamer, soit au moyen de son
industrie,, soit en engageant son fils à prendre l'état religieux,
s'il en a la vocation (a). On ne s'accorde pas sur la question de savoir
si elle est tenue de faire l'aveu de son crime ; nous pen-sons qu'elle,
n'y est pas, obligée Îorsquelle a des rai-
(1) ?. 65?. (a) N. 65S.
POUR LES CONFESSEURS.
QQ
sons de craindre que cet aveu ne lui cause la mort ou l'infamie, et
que le danger dont elle est menacée l'emporte de beaucoup sur le
tort qu'éprouvent son mari et ses enfants légitimes. Mais
lorsque son mal doit être égal ou supérieur de peu
de chose, elle ne peut pas cacher son péché. C'est ainsi
que le décident d'un commun accord Lug., Sot., Less., Mol., Toi.,
Croix, Ronc.,-Dian., Tamb., contre quelques au-tres. D'où il suit
que la femme adultère doit déclarer son crime, i° lorsqu'elle
est déjà déshonorée dans l'esprit public, ou
bien ( comme le disent Lessius et Lugo) si elle est d'une condition si
vile, que sa ré-putation ne soit pas d'une plus grande valeur que
le tort que son crime doit causer; 2° s'il doit en résulter
d'un autre côté un inconvénient général,
par exemple, si l'enfant adultérin est mal élevé,
et s'il doit hériter d'une principauté ; 3° si elle peut
en faire l'aveu à son mari sans grand inconvénient. Mais
sur cela, Lug. et Spor. font remarquer avec raison qu'il sera difficile
d'imposer une telle obli-gation à la femme, parce qu'il est presque
impossible que par un tel aveu elle ne s'expose pas à de graves
vexations de la part de son mari, comme il est dit au chap. 7. de Pœnit.,
où on lit ; « Mulieri quae de » adulterio partem suscepit,
quamvis idviro suo· ti-»meat confiteri, non est poenitentia
deneganda. » Mais d'un autre côté, Lugo, Lessius , Rone.,
Spor., Croix, Tamb. % etc., s'accordent à dire que la mère
doit déclarer son crime au fils adultérin, si elle a l'espoir
d'obtenir de lui qu'il abandonne sa part des biens du mari. On a beau dire
que la perte de l'hon-neur l'emporte sur la perte des biens; d'un côté
il n'est pas certain que l'aveu du crime fait devant une ou deux personnes
de probité doive causer un
100
INSTRUCTION PRATIQUE
grand déshonneur, quoique cela puisse très bien arriver,
comme il sera dit au chap. xi. n. 11. Dun autre côté, la mère
est sans contredit obligée à réparer le tort qu'elle
a causé; et par conséquent toutes les fois qu'elle n'est
pas certaine que le mal auquel elle s'expose soit beaucoup plus considé-rable
que celui qui pèse sur ses enfants, elle doit chercher à
les dédommager ( ? ).
C. Mais il est incontestable que le fils n'est pas obligé de
croire sa mère , comme l'enseignent Azor, Fill., Lug., Less., Laym.,
Rone, Salm.,Holz., etc., parce que personne n'est obligé d'ajouter
foi au té-moignage d'une seule personne, quelque digne de foi qu'elle
puisse être, comme cela résulte du chap. Relalum de testim.,
et du chap. 11. de Testib., où il est dit :« Nulla est causa
quae unius testimonio, » quamvis legitimo, terminetur. » Ce
principe est né-cessaire pour le bien public; il sert à éviter
les fraudes qui sans cela pourraient être commises. C'est pourquoi
Elbel et autres disent qu'il ne peut arriver que rarement que la mère
soit obligée de s'accuser auprès de son fils, parce que rarement
il arrivera que le fils soit obligé de la croire. Mais si l'illégitimité
du fils était établie par des indices si évidents
qu'ils dussent entraîner sa condamnation devant un tribunal, par
exemple, si la mère prou-vait c'airement l'absence ou l'impuissance
de son mari à l'époque de la conception, alors le fils de-vrait
ajouter foi aux paroles de sa mère, et celle-ci devrait déclarer
son crime à son fils (2).
Cl. Voilà pour ce qui regarde la femme adultère;
(1) N. 653.
(9) Cit. n. 655. in fin. et 654. p. 99.
POUR LES CONFESSEURS.
(Oj
quant à l'homme adultère, il est tenu de restituer aux
enfants légitimes l'hérédité qui aurait été
laissée à ceux qui sont de lui, comme les aliments qui leur
auraient été laissés à partir de leur troisième
année, parce que jusqu'à l'âge de trois ans la mère
doit les allaiter, si elle peut ; mais si elle ne le peut pas, c'est l'homme
adultère qui doit pourvoir à leur subsis-tance (1). Quelques
auteurs disent que si l'adultère n'a pas engagé la mère
à supposer les enfants adul-térins parmi les enfants légitimes,
et si en cela nega-tive se habuerit, alors il n'est pas tenu à leur
fournir des aliments, ou du moins à restituer l'hérédité;
mais nous préférons l'opinion de Less., Mol., Cajet., Conci.jSalm.,
Lacroix, etc., qui disent qu'il est obligé à l'un et à
l'autre, parce que c'est lui qui en mettant la mère dans la nécessite
morale de supposer les enfants adultérins, est la cause morale et
prochaine de tous les inconvénients que nous avons énu-mére's
(2).
CIL i° On demande quelle est l'obligation de l'a-dultère
lorsqu'il est incertain si les enfants sont à lui ou au mari. Laym.
prétend que son obligation doit être proportionnée
au degré du doute. Mais généralement, Soto., Nav.,
Lugo, Less., Sanch., Castrop.,Tourn., etc., enseignent qu'il n'a pas d'obli-gation
toutes les fois qu'il n'est pas certain que les enfants lui appartiennent.
Cette décision est avanta-geuse au mariage, elle l'est aussi à
l'adultère, qu'elle exempte de l'obligation de payer une indemnité
(5). 11 en est de même, comme le disent très bien Soto,
(1) N. 655. (a) N. 656. (3) N. 657.
102
INSTRUCTION PRATIQUE
Sanch., Salm., Trull., etc., tant qu'il y a incerti-tude pour savoir
quel est celui des deux adultères qui est le père des enfants
adultérins, et cela pour la même raison, parce qu'on ne peut
pas imposer une charge certaine en vertu d'une obligation dou-teuse. On
doit seulement en excepter, avec Elbel et autres, le cas où le second
adultère aurait su que son péché allait être
cause d'une incertitude sur la paternité, laquelle incertitude aurait
pour effet d'af-franchir le premier adultère de l'obligation de
payer une indemnité ; c'est pourquoi le second reste, dans ce cas,
obligé de payer la totalité du dommage ( ? ), à l'exemple
de ce qui est dit au n. 5o.
CIII. 2° On demande si les adultères qui, étant dans
l'opulence, ont mis leurs enfants à l'hôpital, sont tenus
de payer les dépenses de leur séjour dans ce lieu. Spor.,
Elb., les Salm. sont pour l'affirma-tive, parce que, disent-ils, ces établissements
sont institués exclusivement dans l'intérêt des pauvres.
Mais c'est avec plus de raison que Henr., Dicast., Rodrig. et Renzi soutiennent
la négative, et cette dernière opinion n'est même pas
combattue par les partisans de la première. La raison en est que
les hôpitaux sont établis, non seulement pour se-courir les
pères qui se trouvent dans la misère, mais encore, et peut-être
plus spécialement, pour venir au secours des enfants illégitimef,
qui cour-raient grand risque de succomber à la mort tempo-relle
et à la mort éternelle, si leurs pères et mères
étaient obligés de leur fournir des aliments à leurs
frais (2).
(x) N. 658. (a) N. 659.
POUR LES CONFESSEURS.
105
§ VIII. Du temps et du mode de la restitution.
io4- De l'obligation de restituer sur-le-champ, de réparer le
dommage, etc.
105. Lé pénitent ne doit· obtenir son absolution
qu'après avoir restitué.
106. On peut restituer par l'intermédiaire d'au-trui ;
mais si celui qu'on en a charge ne restitue pas, etc. ; si le confesseur
emploie cet argent à faire dire des messes, étaht certain
que le maître, etc.
104. A l'égard dû temps, le voleur (lorsqu'il y a possibilité)
doit restituer sur-le-champ. S'il ne le fait pas, il pèche gravement,
et (suivant l'opinion de Bonaci et plusieurs autres) il pèche autant
de fois qu'il se présente d'occasions de faire cette restitu-tion
; mais, au dire de plusieurs autres, tels que Lugo, Nav., les Salm., etc.,
c'est un seul péché continuel qu'il commet. (Voyez ce qui
est dit au chap, m, ?. 2^.) Celui qui voudrait restituer au mo-ment de
sa mort n'est pas en état d'obtenir l'absolu-tion s'il ne l'a pas
fait pendant sa vie lorsqu'il le pouvait, ou s'il n'a voulu restituer qu'une
partie lorsqu'il pouvait restituer le tout. Du reste, le débi-teur
peut quelquefois différer le moment de la res-titution, lorsqu'il
a pour cela de justes motifs, comme, par exemple, pour éviter le
scandale, son propre déshonneur, ou tous autres motifs que nous
examinerons au paragraphe suivant. Mais il faut re-marquer, suivant l'opinion
généralement reçue de Lugo, Less., Moli, Tamb., etc.
(quoi qu'en disent quelques autres), que lorsque la dette provient d'un
délit, nonobstant le juste motif qu'il peut avoir de différer
la restitution, le voleur est tenu de réparer
INSTRUCTION PRATIQUE
tout le dommage éprouvé parle créancier, car c'est
le délit qui est la première cause de ce dommage (1). Il
en serait autrement si la dette provient d'un con-trat (2).
CV. En outre, la restitution peut être différée
lorsque c'est pour très peu de temps (c'est-à-dire vingt
jours, c'est le terme fixé par Gastrop.), et si le créancier
ne doit pas souffrir de ce retard; du reste, lorsque le pénitent
peut restituer sur-le-champ, régulièrement parlant, nous
pensons avec le père Conci, que le confesseur ne doit lui donner
l'abso-lution qu'après qu'il a restitué, ainsi que nous l'ex-pliquerons
au chapitre dernier, point 1er, en traitant de ceux qui sont dans une occasion
prochaine. Cela est fondé sur ce que la restitution étant
en elle-même une chose très difficile à exécuter,
si le péni-tent obtenait l'absolution avant de l'avoir faite, l'expérience
prouve qu'il serait dans un grand dan-ger de ne pas remplir cette obligation.
Par consé-quent, saint Thomas de Villeneuve a eu raison de dire
: « Prius restituat, et tunc ad confessorium re-» deat ut absolvatur.
» Nous avons dit régulièrement, parce que si la restitution
ne peut pas être faite tout de suite, etsi le confesseur reconnaît
dans le péni-tent la résolution sincère de restituer,
il peut l'ab-soudre dès la première fois, et même probablement
(comme le disent Lugo et les Salin.) la seconde et la troisième
fois, si les circonstances sont telles que le confesseur doive permettre
un tel retard (3). Quant au refus que pourrait faire le pénitent
de
(1) N. 579 ad. 682.
(a) N. 680.
(3) N. 679 et 682.
POUR I/ES CONFESSEURS.
restituer pour obéir à l'injonction du confesseur, voyez
ce qu'on dira à ce sujet au chap, xvi, ?. ??8, en traitant du sacrement
de pénitence.
CVI. A l'égard du mode de restitution , celui qui ne pourrait
la faire lui-même de sa propre main sans s'exposer à l'infamie,
doit au moins la faire en secret par l'intermédiaire de son confesseur
ou d'une autre personne. Mais ici un doute s'élève sur la
question de savoir si lorsque le confesseur a gardé l'argent qui
lui avait été donné par la personne obli-gée
à la restitution, celle-ci est tenue de payer une seconde fois ;
la négative est professée par Sot., Castr., etc., qui disent
que ie débiteur n'étant pas tenu de restituer publiquement,
le créancier doit se contenter de la ? estitution faite par l'intermédiaire
d'une autre personne. Malgré cela, nous préférons
l'affirmative professée par Lugo (qui dit que la pre-mière
opinion est peu probable), Less., Nav., Silv., Spor., Salm., Lacroix, etc.,
i° parce que, quoique le voleur ne soit pas obligé de déclarer
son délit, il est néanmoins tenu d'indemniser le maître
de la chose volée ; 2° parce que le voleur est tenu de dé-dommager
le maître de toutes les pertes accidentelles que peut lui occasionner
le vol, et qu'on ne peut jamais présumer que le créancier
soit satisfait tant qu'il n'a pas recouvré la chose qui lui a été
enlevée. Si, le maître étant certain, le confesseur,
par impru-dence, faisait dire des messes avec l'argent qui doit servir
à la restitution. D'après Tamb., si la première opinion,
c'est-à-dire celle de Soto , etc., est appli-cable dans l'espèce
ci-dessus énoncée, elle le sera aussi dans celle-ci; et par
conséquent le débiteur ne sera pas tenu de fournir une nouvelle
somme pour la restitution. Mais, sur ce point, je ne partage pas
1?6
INSTRUCTION PRATIQUE
son avis, parce que le créancier veut toujours ce qui lui appartient,
il veut en disposer à son gré et non au gré d'un autre
(1); ensuite il est dit au n. 65 que le voleur est tenu de mettre, à
ses frais, le créan-cier en possession de la chose.
§ IX. De l'ordre à observer entre les personnes auxquelles
on doit d'abord faire la restitution.
107. Si la chose existe entre les mains du voleur, il doit la remettre
à son maître. Mais si elle est vendue, etc.
.108. La préférence doit être donnée aux
créan-ciers à titre~onéreux.
109. Si tous les créanciers sont à titre onéreux.
110. Si la créance provient d'un délit ou d'un
contrat, etc.
111. S'il y a des créances certaines ou d'autres incertaines.
112. S'il y a des créanciers hypothécaires anté-rieurs,
et des créanciers antérieurs personnels.
113. Si le débiteur peut choisir pour payer le créancier
qu'il préfère.
11/4. Si le créancier exige, etc.
115. Si le domestique reçoit son salaire d'un maître qui
n'a pas payé ses dettes.
CVII. Quand le débiteur peut payer tous ses créanciers,
il n'a pas d'ordre à observer entre eux; mais quand il n'a pas les
moyens de les payer tous, il doit se conformer, pour l'ordre des paiements,
aux règles suivantes : i° Si la chose existe, elle doit, sans
aucun doute, être rendue à son maître, ou, si elle n'existe
pas, aux pauvres, comme'le ditBusemb.
(Ó Lib. î. n. 39. et lib. III.
POUR LES CONFESSEURS.
Ilren est de même pour une chose achetée dont le prix
n'a pas encore été payé, parce qu'alors la pro-priété
de cette chose n'est pas sortie des mains du vendeur (comme cela résulte
du § Vendite inst. de rer. div. ) ; il en] serait autrement si le
vendeur avait reçu, en place du prix, un gage ou une assu-rance
, parce qu'alors la propriété aurait été transfé-rée
à l'acheteur et que le vendeur serait, dès ce mo-ment, garanti
du prix auquel il a droit. Nous en di-rons de même avec Lugo, Moli.,
Laym.,Castr., Vasq. Azor, etc. (contre Ronc. et Salm.) s'il s'en est rap-porté
à la bonne foi de l'acheteur pour le paiement du prix; parce qu'alors
la propriété de la chose est également passée
sur la tête de l'acheteur, comme nous le dirons au n. 167; Par conséquent,
il ne res-tera alors au vendeur qu'une action personnelle contre l'acheteur
(1). Cependant si c'est de l'argent volé qui ait été
mêlé avec d'autre argent apparte-nant au voleur, Gastr., Roncag.
et Lacroix disent avec raison que cet argent doit être restitué
à son maître; car dans ce cas le monceau d'argent tout entier
reste spécialement affecté à sa créance.
CVIII. 2° Les dettes à titre, onéreux doivent être
payées avant les dettes à titre gratuit, parce que la promesse
qui constitue ces dernières renferme tou-jours cçtte condition
tacite : deducto œre alieno (c'est-à-dire"après les dettes
payées), comme le di-sent d'un commun accord Lugo, Silv., Molv Nav.,
Less. etc. (L. inter. § i5, ff. derejud.) (2).
GIX. 3° Si toutes les dettes sont à titre onéreux,
i° on doit payer leé dettes auxquelles les biens du
(1) N. 684 et 685.
(a) N. 49g. vers, notandum.
1?8
INSTRUCTION PRATIQUE,
débiteur sont affectés par une hypothèque spéciale;
2° les dettes qui emportent une hypothèque tacite, et parmi
celles-ci la préférence doit être accordée à
la dot de l'épouse; 3° les dépôts qui ont été
perdus étant entre les mains du débiteur ; 4° les dettes
envers des personnes privilégiées , telles que les pupilles,
les établissements pieux, etc. ; 5° les autres dettes personnelles.
Mais tous les créanciers, lors même qu'ils auraient hypothèque
spéciate, ne doivent ve-nir qu'après celui qui a fourni l'argent
pour acheter la chose, ou pour cultiver et garder la propriété,
ou couper les moissons, ainsi qu'il est dit dans la 1. 3, ff. qui potiores,
etc. ( ? ).
CX. Il s'élève des doutes, i° sur la question de
savoir quelles sont les dettes qui doivent être le plus tôt
payées, de celles qui proviennent d'un délit ou de celles
qui proviennent d'un contrat. Là-dessus il y a trois opinions différentes
; )a première accorde la préférence aux dettes qui
résultent d'un délit. C'est celle deMedi.,Reb., saint Thom.,
etc. (2), parce que, disent-ils, il y a plus d'injustice, à garder
des choses volées qu'à ne paa satisfaire un engagement pris
par contrat. La seconde opinion accorde la pré-férence aux
dettes qui proviennent d'un contrat, non pas à titre gratuit, mais
à titre onéreux. C'est celle de Cajet., Navarr.,|etc, parce
qu'autrement, disent-ils, on restituerait à la personne volée
des choses qui appartiennent à une autre personne ; mais Lugo ne
trouve pas cette raison bien fondée. La troisième opinion,
la plus répandue des trois, et U mieux fondée à mon
avis, est celle de Lugo, Less.,
(0 ?. 69?.
(a) Opus. 7l. ». 17.
potin tes CONFESSEURS.
( 0«
Cast., Bon., Laym., qui disent que toutes ces dettes doivent être
payées proportionnellement et sans dis-tinction, à moins
que les choses existent en nature telles qu'elles ont été
fournies par le créancier, ou qu'elles soient affectées d'une
hypothèque; car au-cun texte de loi n'autorise cette différence
que l'on voudrait établir entre les créances résultant
d'un contrat et celles résultant d'un délit, en donnant la
préférence aux unes sur les autres (1).
CXI. Des doutes s'élèvent 2° sur la question de savoir
si les dettes certaines, c'est-à-dire dont les créanciers
sont connus , doivent passer avant les dettes incertaines. C'est avec raison
que Less., Bon., Bus., Salm., se déclarent pour l'affirmative, parce
que les dettes certaines doivent être payées, en vertu de
la loi naturelle, aux créanciers eux-mêmes, tandis que la
loi positive permet de payer les dettes incer-taines aux pauvres. Toutefois,
l'opinion deMol., Bon., Tap., Reb., etc. est assez bien fondée,
et Lugo la trouve très raisonnable. Cette opinion veut que la restitution
soit faite au prorata entre les diverses créances. Cela est d'autant
plus convenable qu'il est très probable,comme le disent d'ailleurs
Cajet.,Cova., Arag., etc., que la restitution qui doit être
faite aux pauvres résulte également de la loi naturelle,
puisque l'on admet la présomption que les créanciers inconnus
consentent à ce que cette restitution, qui ne peut lui être_
faite àlui-même, soit du moins faite aux.pauvres pour le profit
de son âme (2).
CXII. Il s'élève des doutes, 5° pour savoir si l'on
doit toujours accorder la préférence aux créanciers
(1) Lib. IU. n. 688. (a) N. 690.
110
INSTRUCTION PRATIQUE
antérieurs à l'égard des créanciers hypothécaires
qui ont une hypothèque expresse. Il est certain que parmi eux, ceux
qui sont antérieurs doivent obtenir la préférence.
Lugo, Vasq., Mol.,, et autres en disent de même pour les créanciers
qui n'ont qu'une hypo-thèque tacite, et Us les préfèrent,
à cause de leur an-térioTÏté, même à
ceux qui s,ont munis d'une hypo-thèque expresse. A l'égard
des créanciers personnels, ,on ne conteste, pas <jue l'opinion
de Cast^, Less.* Holz. ne soit fondée, quoiqu'ils disent qu'ils
doivent tous être payés proportionneflement suivant la quo-tité
de leurs créances, parce que ce n'est pas les biens qui leur sont
affectés r mais la. personne, la-quelle est également obligée
envers tous. Mais l'a-. pinion la mieux fondée et la plus répandue,
est celle de Lugo, saint Antonin, Suar., Nav.^ Bqn., Conc, Lacroix, Tal.
etSalm., lesquels citent saint Thomas et autres» Cette opinion reconnaît
une préférence résultant de l'antériorité,
même parmi les créancier» personnels; parce que, quoique
ce soit seulement pour les créances hypothécaires que le
droit civil ait établi la règle [quiprior est in tempore,prior
est in /are), néanmoins la loi canonique l'applique à toute
espèce de créance ; et cette règle a son fondement
dans la loi naturelle, car quoique l'obligation au profit du créancier
personnel, ne soit établie direc-tement que sur la personne du débiteur,
néanmoins elîe est établie aussi d'une manière
indirecte sur ses, biens (1).
Des doutes s'élèvent, 4° sur la question de savoir
si parmi les créanciers personnels on peut accorder la préférence
au plus pauvre : l'affirmative est sou-
W N.691.
POUR LES CONFESSEURS.
m
tenue avec raison par Moli., Sa., Less., Laym. Mad., etc., ainsi que
par saint Thomas(1), par la raison que la perte serait plus considérable
pour lç pauvre. Mais c'est avec plus de raison que Lugo, Cast.,
Azor.,Vasq.,Less.,etc., professent la négative» parce qu'une
telle préférence ne se trouve indiquée dans aucune
loi. Less., et les Salin, admettent ce· pendant une exception pour
le cas où le créancier pauvre se trouverait dans un grand
besoin; mais je pense que cela ne doit s'entendre que du cas où
les autres créanciers seraient dans l'obligation de venir au secours
de ce pauvre, c'est-à-dire dans l'obliga-tion formelle de lui faire
l'aumône (2).
CXIV. H s'élève des doutes, 5° sur la question de
savoir si le créancier qui a obtenu le paiement intégral
de sa créance est tenu d'en faire part aux autres créanciers
personnels,. Le card, de Lugo pro-fesse l'affirmative pqur le cas où
ce créancier n'est pas antérieur, et où il a exigé
le paiement par des poursuites extra-judiciaires. Mais l'opinion contraire
est la plus généralement adoptée,,c'est celle de Less,,
Nav., Cab., Salm.? etc. Elle est fondée sur la con-sidération
que les lois favorisant les créanciers les plus diligents à
se faire rembourser, ces mêmes lois n'admettent pas la distinction
proposée par le car-dinal eptre les poursuites judiciaires et les
pour-suites extra-judiciaires, comme on le voit à la loi (pupillus
jf. quœ in fraud,, et la loi sinon Q5i./f, dç bon. auct. Jur., etc.)
C'est pourquoi Bus., Sjly,, Nav. et Bon., disent que lorsque l'un des débiteurs
personnels dont les titres sont égaux, demande le
(1) Opus. 75. c. 18. (a) Lib. Ill, n. 691.
IJfl
INSTRUCTION PRATIQUE
paiement de sa créance, le débiteur doit le satis^ faire
(i); mais si au contraire aucun de ces débi-teurs personnels ne
demande à être payé, le débi-teur ne peut pas
à son choix (lorsqu'il n'a pas les moyens de les payer tous) payer
à un seul la totalité de sa créance. Dans ce cas,
nous dirons avec Cast., Tourn., Conc, Salm., Bon., Az., etc. (contre Less.,
et quelques autres), que le créancier ne peut pas re-tenir la totalité
de la somme qui lui a été payée. En vain opposerait-on
que ladite loi {pupillus) ne pro-nonce pas la révocation du paiement
qui a été fait, parce que les lois veulent seulement récompenser
la diligence du créancier qui s'est fait payer, mais non lui donner
le droit de, garder ce que le débi-teur lui a donné mal à
propos, et il ne lui servira de rien de l'avoir reçu de bonne foi
(2).
CXV. Des doutes s'élèvent, 6° sur la question de
savoir si le domestique, qui n'est pas précisément nécessaire,
peutse faire payer par son maître lors-que celui-ci n'est pas obéré
pour dettes. On répond que s'il a déjà reçu
son salaire, de bonne foi, il peut le garder;"mais si, en le recevant,
il voyait que ce paiement allait, sans nécessité, mettre
le débiteur dans l'impuissance de satisfaire ses créanciers,
nous dirons avecNav.j Ang., etc.; qu'il doit abandonner cette somme, et
qu'il ne peut continuer de la récla-mer ; car autrement il deviendrait
la cause du dom-mage éprouvé par les créanciers, comme
il a été dé-cidé dans une espèce semblable'
au n. 75(5). Au contraire, l'épouse et les enfants peuvent recevoir
(J) N. 692. (a) N. 693. (3) N. 694.
POUR LES CONFESSEURS.
j j 3
des aliments de leur père quoiqu'il soit obéré
de dettes, suivant Sanch., Laym., et Lacroix (pourvu qu'ils n'aient pas
d'autre moyen d'existence); car le père, même dans cette position
, est obligé par la justice à alimenter sa femme et ses enfants.
A l'égard de la femme, Moli., Nav., Vasq. et Laym. disent que lors
même qu'elle a d'autres moyens d'existence, elle peut recevoir des
aliments de la part d'un mari obéré de dettes qui ne peut
pas payer ses créanciers, parce que le mari n'est pas moins obligé
à nourrir sa femme, qu'il ne l'est à payer ses dettes. Laym.
ajoute que les ouvriers qui ont travaillé pour les choses nécessaires
à l'usage du débiteur, doi-vent être payés avant
les autres créanciers, même hypothécaires (1).
§ X. Quelles sont les causey qui libèrent de
l'obligation de restituer.
116. Les causes provenant du chef du créancier, sont i°
si l'on a restitué à son créancier; 20 si l'on peut
présumer son consentement; 5° si l'on prévoit qu'il d
oive faire un mauvais usage de la chose res-tituée.
117. Du chef du débiteur, 1 ° s'il n'y a pas faute
; 20 s'il obtient composition ; 3° si le dommage qui doit en
résulter pour lui est beaucoup plus grand ; 4" s'il y a danger pour
le salut de son âme ; 5° ou pour sa vie ou son honneur ; 6°
s'il fait cession de biens.
118. La nécessité sert d'excuse.
119-20. Que décider si le créancier se trouve également
dans le besoin?
(1) N. 695.
T. XXIV.
8
INSTRUCTION PRATIQUE
121. Si le débiteur, ayant oublié la dette, fait un cadeau
à son créancier ?
CXVI. Parmi les causes d'excuse qui peuvent li-bérer de l'obligation
de restituer, les unes provien-nent du chef du créancier, les autres
du chef du débiteur. Du chef du créancier, ce sont i°
lorsque vous payez au créancier de votre créancier, parce
qu'alors votre créancier, se trouvant libéré de sa
dette envers le sien , il peut y avoir une juste com-pensation ; 2°
s'il peut raisonnablement être présu-mé que le maître
de la chose consente à ce que vous la preniez, ou que vous la gardiez
une fois que vous l'avez prise. Cela est généralement admis
par Sylv., Nav., Lugo, Less., Saneh., Sa, Sair., Holz., Lacroix, etc. (1).
C'est aussi ce que saint Antonin (2) enseigne en termes formels, lorsqu'il
dit : « Invito » domino dicitur , quia si credit, dominum permis-»
surum, et subest justa causa credendi, restituere non » tenetur.
» Ce qui est également exprimé daps la loi 46, §
7, ff. de furtis., où il est dit : « Recte dictum »
est, qui putavit domini voluntate rem. attingere, non »esse f'urem
; quid enim dolo fecit, qui putat do-» minum consensurum fuisse?
» La raison en est que taut ce qu'il y a de coupable dans le vol,
c'est d'al-ler cpfltre la volonté du maître en lui dérobant
une chose qui lui appartient; d'où il résulte qu'il n'y aura
plus vol dès l'instant qu'on pourra supposer le con-sentement du
maître. Ce principe est confirmé par les paroles de saint
Thomas (3), qui permet de donner à un religieux, lorsque celui-ci
espère obte-
(1) Lib. III. ?. 700. V. Queer, hic. (a) 2. p. tit. 1. c. l5. in princip.
(3) In 4· d< i5. q. a. a. 5. q. 4.
nir du prplaî la ratification de la donation j c'est-à-dire
s'il espère phtenir la permission d'accepter, en la sollicitant.
5° Le débiteur n'est pas obligé à la res-titution
, s} le ma,ître de la chose devait en abuser et en tirer occasion
de pçcher lorsqu'elle lui serait rendue, comnie le disent Less.,
Lugo, Sot., Mol.( Lacroix, etc., contre d'autres auteurs. Saint Thomas
'enseigne expressément la, même çh,os,e en ces termes;
« Quando res restituenda apparet esse graviter no-»civa ei
cui restitutio facienda estf vel alteri, non » ei debet tunc restitui,
quia restitutio ordinatur ad » utilitatem ejus cui restituitur (?).
» De. même, lors-que le maître doit abuser de la chose
po,ur nuire à un tiers, vous êtes tenu de la lui refuser toutes
les fois que vous le pouvez sans lui causer ?? dommage plus grave ou tout
au moins aqssi grave, comme il a été dit au n. 5o, qù
on explique qu,'il n'est pas permis, pour éviter de perdre $aréputatio,n,
ou deper-dre une chose, de rendre ]'çpée à u^e personne
qui doit s'en, servir pour {uer s,on, çn^emi. S'^l le faisait, \1
pécherait, non ^e^ement contre, |a, ç^aritç, ??? encore
pqptre la justice, cpiflme l'e^seigpept Ley., Spta, Less., Cast., Conci.
e,j Salnji., parpe q^'Qn, n'a pas 1? droit de participer à im fait
qui est n^isib^e, | son prochain (2).
CX VIJ, Du chef du débiteur lui-même, les excuses sont
i° si en causant le dommage il n'a pa,s contis un péché
mortel, comme il a é}é dit au p. 5g; 6° Si la restitution
devant être faite aux pauvre^ è( de l'incertitude des créance^,
le débiteuf du pape une composition, comme il a été
dit au
(1) 9. 2. cf. 63. a. 5.
(a) Lib, III. ?. 697. V. Teneris.
Il6
INSTRUCTION PRATIQUE
?. 68 ; ou encore si le débiteur est dans la misère,
et qu'il s'applique la restitution à lui-même (i). 3°
S'il ne peut restituer sans avoir à craindre pour lui-même
un dommage beaucoup plus grand et plus que double, car alors il peut,très
bien différer la resti-tution , pourvu, toutefois, que le retard
ne cause pas un semblable dommage au créancier, comme il a été
dit au n. 65 ; la seule perte d'un gain ne se-rait pas une raison suffisante
pour autoriser le dé-biteur à différer la restitution,
comme le disent très bien les Salm. Laym. admet une exception pour
le cas où le retard ne doit causer aucun préjudice au créancier
(2). 4° Si le débiteur ne peut pas restituer sans s'exposer
à un grand danger pour le salut de son âme ou pour les siens
; par exemple, s'ilest à crain-dre que sa femme ou ses filles se
livrent au vol ou à la prostitution. (V. Less.,Mol., Bonaci.,Fill.,
etc.)(5). 5° S'il ne peut restituer sans mettre sa vie ou son honneur
en danger, pourvu que la perte de son honneur représente une valeur
supérieure à celle du dommage qu'éprouvera le créancier,
comme il a été dit à la fin du n. 99. 6° S'il
fait cession de biens, parce que les lois permettent au débiteur
qui ne peut pas payer tous ses créanciers, de garder ce qui en est
nécessaire pour l'entretenir, suivant sa condition, en cédant
ses autres biens à ses créan-ciers, et par ce moyen, il se
trouve libéré des dettes qu'il n'a pas pu payer, pourvu qu'il
n'acquière pas une nouvelle fortune {ij.Cum etfilius,c. Quibon.
etc.) malgré que Laym. prétende que, même en restant
(1) Lib. III. ?. 997· V. Tenens.
(2) ?. 698.
?) Ibid. ad. 9.
POUR LES CONFESSEURS.
j j ?
dans cette pauvreté, il est obligé de travailler et de
gagner ce qu'il pourra, afin de payer toutes ses dettes. Remarquez que
cette cession ne peut avoir lieu pour les dettes qui résultent d'un
délit, quoique Less., Nav. et Sal. permettent aussi au voleur de
faire cession de biens en gardant seulement ce qui lui est nécessaire
pour vivre (1).
CXVIII. ?" La pauvreté est aussi une excuse, lorsque la restitution
doit mettre le débiteur dans l'impossibilité de vivre convenablement
selon sa condition, Azor, Lugo, So to, S. Anton., Nav·, Laym., Salin.,
Lacroix, et la plupart des autres (2), pourvu toutefois que ledébiteuraitacquiscetteconditiou
par des moyens licites; car, s'il l'avait acquise par le vol ou par la
fraude, il serait obligé à la restitution, encore que cette
restitution dût le faire descendre dans une condition inférieure,
comme l'enseignent la plupart des docteurs, et de plus comme le di-sent
Castr.,Nav;, Sylv.jLaym., Lacroix, etc., pourvu que le débiteur
ne se soit pas mis lui-même par sa faute dans cet état de
nécessité, soit par le jeu, soit parla débauche; mais
néanmoins toutes lesfoisque le débiteur devra perdre une
condition justement acquise, il me paraît dur, ainsi qu'à
plusieurs au-tres docteurs, de l'obliger à la restitution intégrale.
Du reste, S. Anton., Spor., Elb., etc., font remarquer avec raison que
dans un pareil cas le débiteur est toujours tenu de payer ce qu'il
peut (?).
CXIX. Mais il y a plus de difficulté pour savoir si la pauvreté
peut affranchir de l'obligation de restituer,
? ?. 699.
(a) N. 702.
(3) N. 69.0. ad. 5. 6. 7. et n. 702,
INSTRUCTION PRATIQUÉ
lorsque le créancier est également pauvre. Ici il faut
distinguer la nécessité extrême de la nécessité
grave. Si en restituant, le débiteur devait se mettre, lui ou les
siens ( c'est-à-dire ses enfants, ses parents et son épouse),
dans une nécessité extrême, il serait valablement excusé,
parce qu'alors il se sert des ob-jets qu'il aurait dû restituer,
comme s'il était déjà dans l'extrême nécessité,
et cela lors même que la chose due existerait en nature telle qu'elle
a été donnée par le créancier, comme le disent
d'un commun accord Sot., Less., Cajet., Toi., etc., et lors même
que le maître de la chose serait dans la nécessité
extrême, parce que dans un pareil cas on donne la préférence
à celui qui possède. Mais c'est avec raison que Less, et
Cast, en exceptent le cas où ce serait précisément
le vol de cet objet particu-lier qui aurait mis le rfiaître dans
cette extrême né-cessité, car dans ce cas on doit donner
la préférence au maître qui possédait avant
le vol (1). Sur la question de savoir si le voleur est tenu à cette
resti-tution une fois que cette nécessité est passée,
voyez ce qui est dit au n. 19.
CXX. À. l'égard de la nécessité grave,
si le débi-teur seul se trouve dans cette nécessité,
ou bien si par la restitution il doit perdre une position ac-quise par
des moyens honorables, il peut très men différer la restitution
, comme nous l'avons dît au numéro précédent.
Mais il reste à décider si la res-titution doit avoir lieu
lorsque le créancier et le dé-biteur se trouvent tous les
deux dans la même nécessité grave. On répond
que si le créancier se trouve dans une grave nécessité,
le débiteur doit
(1) N. 70». Qu. 3.
POUB LES CONFESSEURS.
j j q
restituer, lors même qu'il court le risque de tom-ber dans une
égale nécessité, parcs que lorsque la nécessité
est égale, la préférence doit être donnée
au créancier. Voyez Aï., Mol., Less., Laym., Spor., Salni.,
Lacroix, etc. Mais si le créancier et le débi-teur se trouvent
dans la même nécessité grave, et qu'ils n'aient pas
de quoi vivre suivant leur condi-tion , alors , d'après l'opinion
de quelques uns, le débiteur doit également restituer, au
moins lorsque là dette résulte d'un délit, comme le
dit Rone. Mais Less., Cast., Fili, et Trull., ainsi que le même Ronc,
disent avec raison qu'il est convenable, dans «n cas semblable, de
différer la restitution, parce qu'alors la restitution occasionnerait
au débiteur un dommage bien plus considérable, car de la
né-cessité grave il passerait à la nécessité
extrême ou •quasi-extrême. Mais il faut faire exception pour
le cas où te vol particulier aurait mis le créancier dans
cette nécessité grave, et le cas où k chose existerait
fen natute (i). Enfin, il faut ici remarquer que lors-'que le débiteur
ne sait pas si le dommage qu'il a causé est grave ou léger,
il n'est pas tenu de rem-bourser celui tjui est seulement léger.
Mais si la ?chose volée existe, et que le voleur ne sache pas si
elle «st d'une Valeur grave ou légère, il est tenu
de la restituer sous peine de fâut« grave ; autrement il exposerait
injustement le maître à supporter un •dommage grave (2). Sur
la qaestSoti de savoir quelle fest l'obligation diï possesseur de
bonne foi, lors-qu'il s'éiète des doutes au sujet des droits
qu'il peut '«voir sur îa chose, voye* ce 'qui est dit a«a
?-. ?3
(1) N. 701 et 70a. (9) N. 704.
12?
ÏNSTHDCTIOÎi PRATIQUE
de ce chap., et au chap. ?,?. 2O,infràs'infer. per. 6. CXXI.
Enfin , on veut savoir si le débiteur qui fait un présent
à son créancier sans se rappeler la dette qu'il a contractée
envers lui, est par cela seul affranchi de la restitution. La négative
est profes-sée par Sonnh., Laym., Bon., etc., parce que, dis-sent-ils,
un seul paiement ne peut pas éteindre deux obligations,
l'une qui est sanctionnée par la justice, et l'autre
qui esta titre gratuit. Mais Card., Brod., Moizz., Lacroix., Reb. et autres,
sont pour l'affirmative. Cette dernière opinion est assez fon-dée,
lorsqu'il est certain que le débiteur n'aurait pas donné
s'il se fût souvenu de la dette. La raison en est qu'on présume
toujours qu'une personne qui donne veut plutôt remplir
l'obligation que lui im-pose la justice , que celle qui résulte
de sa dona-tion , laquelle ayant été faite par erreur ou
par ou-bli de la dette, peut être rescindée par le donateur,
qui, en conscience, n'est pas tenu de l'exécuter, parce que lorsqu'une
personne s'est trompée, on suppose toujours qu'elle n'a pas eu l'intention
de l'obliger (1). C'est en vain qu'on opposerait i° que dans les contrats
on ne recherche que la volonté apparente et non la volonté
interprétative ou condi-tionnelle , parce que, dans l'espèce
dont nous nous occupons, l'exécution de la première obligation
est censée faite, non avec la volonté interprétative,
mais avec la volonté réelle qu'a eue le débiteur dès
le commencement de remplir l'obligation qu'il avait contractée,
laquelle volonté est supposée subsister tant qu'elle n'a
pas été révoquée, et doit prévaloir
comme antérieure et plus urgente. Gela est prouvé
(1) N. 715.
POUR LES CONFESSEURS.
12I
par les paroles mêmes dont se servent dans des cas semblables
les partisans de l'opinion contraire (1). C'est en vain qu'on opposerait
2° qu'une obligation certaine ne peut pas être remplie au moyen
d'une satisfaction qui n'est que probable, parce que cela ne peut s'appliquer
que loïsque la dette est certaine et le paiement seulement probable,
tandis que,dans notre espèce, le paiement ou bien la donation compensative
de la dette l'est également; par con-séquent il y a là
une parfaite égalité. Ainsi donc, ayant d'un côté
l'oubli de la dette qui a donné lieu à la donation, et qui
la rend nulle ou tout au moins rescindable par la volonté du donateur,
et d'un autre côté "l'accomplissement de l'obligation impo-sée
par la justice, accomplissement qui résulte de la volonté
persévérante du débiteur, nous trouverons que la loi
qui prescrit de satisfaire aux deux obliga-tions, celle qui provient de
la justice, et celle qui résulte de la donation, nous trouverons,
dis-je, que cette loi est obscure, et que par conséquent elle ne
doit pas être obligatoire, suivant ce qui est dit au chap. 1, ?.
55.
QUATRIÈME POINT.
Des contrats.
§ I. Du contrat en général.
122. Combien y a-t-il de manières de former les contrats ?
125. De celui qui contracte sans avoir l'intention de contracter ou
de s'obliger.
(1) N. 7o3. q. a.
INSTRUCTION PRATIQUE
124· Des contrats honteux.
125. Des contrats faits par dol ou par erreur.
126. Ou par crainte.
127. Ou sans employer les solennités requises» CXXïI.
Le contrat se forme de quatre manières :
Ì0 par le Seul consentement, comme dans la vente, ie louage
et autres ; 2° par des paroles, comme dans la stipulation ; 3°
par l'écriture comme dans la rente; 4° par la tradition comme
dans la donation ; le prêt, ie dépôt, le commodat (i).
CXXIII. On remarque 1° que si quelqu'un con-tracte extérieurement,
mais sans avoir l'intention de contracter, il n'est pas obligé (à
moins qu'il s'a-gisse d'uii contrat onéreux et que l'autre partie
l'ait déjà exécuté en ce qui la concerne, comme
il a "4té dit dans le chapitre x, n° g5) ; mais celui qui a
con-tracté sans avtìir l'intention dé s'obliger n'en
reste pas moins probablement obligé (2).
CXXIV. On remarque 20 que les contrats hon-teux, ceux, par exemple,
qui ont pour Objet un as-sassinat, utile fornication, ette.,sontnulstant^nèle
délit n'a pas été commis et n'engendrent pas d'obli-gation
; mais après que le délit a été commis, d'a-près
l'opinion îa p\us générante "efc \k mieux fondée,
qui est celle de Sot., Cajet.> Less., Sanch., Lugo, Mol., les Salm., Lacroix,
etc. (quoique Adrien, Conci., Tourtì. «t Comite, professent
une opinion opposée qui paraît assez bien fondée et
qui s'appuie sur pìtìsieuTs lois qui réprouvent de
pâreih con-trats), il est tenu à payer le salaire qu'il a
protaiîs, et si l'autre l'a^èÇù il n'test pas
tenu, d'e le restituer,
(1) N. 708.
(») Lib. ??. n. 709. et lib. VI. n. 833.
POtTR LES CONFESSEURS.
et cela par la raison mentionnée ci-dessus, que lors-que l'un
des contractants a exécuté la portion qui le concerne, l'autre
contractant doit exécuter la sienne. Comtne aussi, puisque la mauvaise
action est déjà consommée, on peut en faire l'estinialibn
en tant qu'elle est'utile pofcr l'un et onéreuse pour l'autre, quoiqu'elle
ne mérite pas de Salaire comme action coupable (1) ; cette opinion
est professée par Cuniliati (2). Voyei ce qui sera dit à
ce sùje't au ch. xiii, n° 67. Si quelqu'un faisait Un cadeau
à Une femnie pour obtenir ses faveurs, elle ne pourrait pas le garder
en n'accordant pas ses faveurs. Il 'en serait tout autrement si le cadeau
avait é'té fait seu-lement pour engager la femme à
consentir (3).
CXXV. On Remarque 3° que le contrat qui est le résultat
de l'erreUr ou de la fraude, lorsque Cette terreur où cette fraude
portent sur la substance *cUi Contrat, est infirmié, quand même
terreur We serait pas la cause du contrat, c''est-à-dire iorfequfe
la partie n'aurait pas hésité de contracter si elle avait
eoftriu Terreur. Au con'îraîr'é, lorsque l'erreur porte
fcùr la qualité de là chose, et qu'elle n'a jias 'été
causé du contrat, il est bien certainement valable ; maïs Si
Vm-eur qui ne porte que Sur la qualité, avâkété
câus'é dtt contrat, Conc.,Prœp., Medi., etc., disent qu«
te tebntrat serait nul. Mais l'opinion Jquì est h plus gé-nérale
'et tJUi inè paraît la mieUx fondée, veut qtì«
ïè coAràÎ soit valable parcfe qu'on n'e peut Î'ah'iWr-*er,
hi en Vertu du droit naturel, puisqu'il y à ïà lé
eons-éntfemèn't à l'égard de la sufestan'cè,
ni eto
(1) N. 71a.
(2) Cuailiati tra. 9. c. 5. § leonum4·3
(3) Lib. III. n. 7ia.q. a.
124
INSTRUCTION PRATIQUE
\ertti du droit positif, comme cela résulte du texte de Justinien,
Inst., liv. IV, tit. i3, de excep., où il reconnaît la validité
d'un pareil contrat, quoiqu'il accorde à la partie induite en erreur
une action en rescision pour le faire annuler. Mais néanmoins lors-que
l'erreur était invincible , « et res adhuc esset in-stegra,
»il est juste de dire, avec Less., Laym., Ca.str., etc., que la personne
trompée n'est pas tenue en conscience d'exécuter.les clauses
du contrat, car on suppose à tous les contractants l'intention tacite
de ne pas vouloir s'obliger à exécuter les contrats dans
lesquels ils ont été trompés (1).
GXXVI. On remarque 4° que les contrats faits par crainte, pourvu
que la crainte soit grave et in-juste, peuvent également être
rescindés, non seule-ment par le juge, mais encore par la personne
qui a éprouvé la crainte, et de sa propre autorité,
et cela encore même que la chose soit passée entre les mains
d'un tiers possesseur de bonne foi; et si, lorsque la partie lésée
réclame la rescision du contrat, l'au-tre s'y refuse, la première
pourra faire en secret la compensation du dommage par elle éprouvé.
Du reste, ces contrats sont valables par eux-mêmes lors même
qu'ils sont à titre gratuit, suivant l'opinion très bien
fondée et très répandue de Less., Az., Lug., les Salm.
et beaucoup d'autres (2). Néanmoins on en excepte i° le mariage
et même les fiançailles, comme il sera dit au chap, xvm ,
20 la profession religieuse, 3° le vœu, 4° la promesse ou la tradition
des choses de l'Église, 5° l'élection des prélats,
6° l'autorisation du tuteur extorquée par la crainte,
(s) N. 7i5.
0) N. 716. 1. Queer. 8.
POUR LES CONFESSEURS.
?» la juridiction ecclésiastique acquise par la crainte
8° l'absolution des censures, 90 la renonciation des bénéficiers.
A l'égard des autres contrats, nous avons déjà dit
que celui sur "qui la crainte est exercée a l'action en rescision;
cela doit s'entendre de la crainte grave et non pas de celle qui est légère
suivant l'o-pinion la mieux fondée; quoique je trouve aussi quelque
fondement dans l'opinioncontraireprofessée par Less., Nav., Sot.,
Sanch.,Cast.,Salm., etc., mais toujours en exceptant le mariage et la profession
religieuse, qui ne peuvent être invalidés par la crainte légère
à laquelle on a été soumis (1).
CXXY1I. Les docteurs agitent la question de sa-voir si on est obligé,
en conscience, d'exécuter un contrat qui n'a pas été
formé avec les solennités re-quises; un grand nombre soutiennent
l'affirmative, tels que Sot., saint Anton., Sa, Mol., etc. Ces auteurs
disent que les lois humaines n'accordent pas d'action pour faire exécuter
un tel contrat, mais qu'elles n'é-teignent pas l'obligation naturelle
quis'est formée par le seul consentement. Beaucoup d'autres, tels
que Less., Lug., Bon., Salm., etc., sont pour la négative, disant
que la loi humaine peut très bien faire dis-paraître même
l'obligation naturelle, lorsque cela est nécessaire pour prévenir
les fraudes qui pour-raient se commettre. Mais au milieu de ces deux opi-nions
, qui sont l'une et l'autre très raisonnables, je pense que dans
la pratique il faut toujours suivre la 3e opinion de Sanch., Caba., Bann.,
Beja.,etc.(à laquelle se conforme aussi Sot.), laquelle opinion
veut que, dans une telle incertitude, l'on donne la préférence
au possesseur, et que le juge ne le con-
{1) Lib. III. ?. 716. Qurcr.
!26
INSTRUCTION PBATIQUE
damne pas à la restitution (1). Ici il faut remarquer \?\?'?
et si inutiliter, ch. <J,efideicom., où il est dit que si l'héritier
délivre la chose léguée par fidéicommis dans
un testament irrégnlier, il ne peut la réclamer par la raison
suivante : « Cum non ex sola scriptura, » sed ex conscientia
relicti fideicommissi defuncti » voluntati, satisfactum esse videatur.»
C'est pourquoi il est dit dans l'argument : « Agnoscens minus so-llemnem
voluntatem, et solvens non repetit. »
§ II. De la promesse et de la donation.
128. De la promesse.
129. Quels sont ceux qui ne peuvent pas donner, et de celui qui
reçoit des présents d'uqe personne qui n'a.pas payé
ses dettes.
130. Des donations entre époux, et entre père et
61s.
r5i. De la donation non, acceptée; du cas, où elle est
faite par courrier ou par lettre missive.
i3a. Si elle est faite en vertq d'une intention pieuse ; et si l'héritier
peut accepter.
i35. Tradition. Accomplissement. Donation, pro-digue. Cause finale.
134· Causes qui autorisent la révocation de la donation
et spécialement si elle est inofficieuse.
l35. De la donation à cause de mort.
CXXVIII. A l'égard de la promesse,, il faut djre que s'il n'y
a pas eu l'intention réelle de s'obliger sous peine de faute grave,
la simple promesse n'o-blige que sous Ja faute légère. Car
une. telle pbliga-tion ne résulte pas de la justice, mais seulement
de
(1) M. 7n.
POUR LES CONFESSEURS.
la foi ou de l'honnêteté, comme le dit saint Tho-mas(i).
Cette opinion est aussi celle de Gajet., Ban.„ Led., Henr. et Salm. et
autres (2). De plus, il est certain qu'une telle promesse n'oblige à
rien du tout, lorsque son accomplissement devient nuisible ou impossible,
ou illicite ou inutile;ou encore toutes les fois qu'il survient, dans l'état
des choses, un change-ment tel que la promesse, n'aurait pas été
faite si ce changement avait été prévu. C'est ainsi
que l'ensei-gnent saint Thomas (?)etd'autres communément (4). CXXIX.
A l'égard de la donation, il y a plusieurs remarques importantes
à faire. On remarque, i° que les donations sont défendues
aux personnes sui-vantes : 1. ceux qui n'ont pas l'usager de la raison
j 2. les muets et sourds de naissance ; 3. les pupilles et même les
impubères (si ce n'est pour des motifs de piété);
4· les condamnés à mort; 5. les adminis-trateurs d'une
communauté, excepté la donation ré-munératoire
et les aumônes (5); sont encore inca-pables de donner, les débiteurs
obérés; et il faut remarquer que ceux qui reçoivent
des présents de la part de ces débiteurs, sont tenus de les
restituer lorsque, par ces libéralités, ils se seront mis
dans l'impossibilité de payer leurs créanciers, parce que
les donataires sont alors, par leur acceptation, la cause positive de la
perte éprouvée par les créan-ciers, attendu que la
donation est un contrat qui ne consiste pas seulement dans la volonté
du donateur, mais aussi dans celle de l'acceptant. D'où il résulte
(1) 2. 2. q. 88. a. 7. a. 3. ad. 5. (a) Lib. III. ?. 720. V. In hsec.
(3) 3. 2. q. 110. a. 3. ad. 3.
(4) Lib. III. n. 7. V. Notandum.
(5) ?. 7ìi.
ia8
INSTRUCTION PRATIQUE
que ces donataires sont obligés de restituer, comme étant
la cause du dommage éprouvé par les créan-ciers (1).
CXXX. On remarque, 2° que les donations entre époux ne sont
valables qu'autant qu'elles ont été confirmées par
serment ou bien après la mort de l'époux donataire, s'il
a fait la tradition de la chose pendant sa vie. Néanmoins ces donations
sont vala-bles lorsqu'elles sont faites causa mortis, ou si ce sont des
donations rémunératoires, ou si elles émanent d'un
mari prodigue, ou si c'est la femme qui les a faites, dans le but de faire
obtenir quelque dignité à son mari. Les règles des
donations entre époux s'appliquent auK donations faites par le père
au fils de famille (2). Cependant une donation de ce genre est encore valable,
lorsqu'elle est faite pour cause de mariage, ou pour fournir à l'éducation
du fils, (car alors le père n'est pas censé avoir voulu que
la donatum fût imputée sur la portion légitime qui
doit revenir à l'enfant); elle est valable encore si elle est faite
en faveur d'un enfant naturel, ou si elle consiste dans les fruits produits
par le pécule ad-ventice (?).
CXXXI. 5° On remarque que la donation, tant qu'elle n'a pas été
acceptée, ne produit aucune obligation ( excepté lorsqu'elle
est faite à un enfant en bas âge, parce qu'alors la loi accepte
pour lui). Cette opinion est généralement partagée
par presque tous nos auteurs, tels que Lug., Cont., Tourn., Hab., Conc,
Wig., Franz., Cun. et les Salin., ainsi
(0 N. 722.
(2) N. 7a3.
(3) N. 7a5.
POUR LES CONFESSEURS.
l gg
que beaucoup d'autres (1). Cela résulte encore de la loi absenti,
ff. de Don., où il est dit : « Si nesciat » (le
donataire) rem quae apud se est, sibi esse do-» natam, donatae rei
dominus non fit, etiamsi per » servum ejus, cui donabatur missa fuerit:
nisi ea «mente servo ejus data fuerit, ut statim ejus fiat. »
La raison en est qu'il ne peut pas se former une obliga-tion enlre deux
parties sans le consentement de cha-cune d:elles. Car, comme le dit très
bien le savant car-dinal de Lug., personne ne peut, d'après la loi
natu-relle , acquérir un droit sur autrui sans son consen-tement.
Ainsi donc, avant l'acceptation, le donataire n'a aucune espèce
de droit sur la chose donnée, et par conséquent, le donateur
peut révoquer à son gré la donation, tant qu'elle
n'a pas été acceptée, puis-que , jusque là,
il n'a contracté aucune obligation. Ce principe n'est pas détruit
par la loi Si argentum; §/?«., Si autem, ch. de Don., où
il est dit que la do-nation entre absents est valable -, parce qu'on répond
à cela ( comme l'explique laGlosse) que les expres-sions de cette
loi ne s'appliquent qu'à la donation qui a été acceptée
par lettre, comme on le voit à la loi 4, Etiam per interpositam,
ch. Ead. fit, ou au moins à la donation acceptée par l'office
d'un es-clave. Suivant la même loi Absenti, ce principe n'est pas
non plus détruit par le droit canonique au ch.
Qualiter de part., et ch. Si tibi absenti, deprœ-bend. ; in 6 , parce que
le premier de ces deux
. (1) Lugo de contract, d. a5. n. 38. Tournely de promise, p. 567.
Habeit de contr. t. IV. p. 3. c. 18. q. 1. Conc. t. II, 1. IX. diss. 5.
c. 5. n. i3. Wîgandt tr. 8. c. 4. t>. 53, v. Dixi 3. Franïoja
de prsec. dec. c. 5. nuiinad. a. Antoine eod. tit. r, 2. q. 1. 1. Cunil.
decal. c. a. § 1. n. a. Salmaut. de cont. c. 4. a. 68. cum Sot. Less,
Cal. Sanch. Laym,, etc. T, XXIVv
9
???
INSTRUCTION PRATIQUE
iëxtes signifie seulement que la donation est valable eh vertu
d'un simple pacte, sans qu'il soit besoin d'une stipulation. C'est ce qu'on
ne peut pas contes-ter. Le second texte est relatif aux bénéfices.
Il y est dit que, si un évêque confère son bénéfice
à un clerc qui est absent, il ne peut révoquer la provi-sion,
quoique le clerc n'en sache rien. Mais autre chose est la nomination à
un bénéfice, ce qui ne donne à l'évêque
que le droit de nommer, et non pas celui de révoquer la nomination
une fois faite, et autre chose est une donation qui n'a aucune va-leur
tant qu'elle n'a pas été acceptée (1); et ceci s'applique
même à la donation faite avec serment ; car le serment est
lié aU sort de l'acte, c'est-à-dire de la donation, laquelle
est révocable tant qu'elle n'a pas été acceptée.
D'où il résulte que la donation faite par l'intermédiaire
d'un messager peut être ré-voquée si le donataire ne
l'a pas acceptée eli pré-sence de ce messager; et lorsqu'elle
â été faite par lettre, elle peut être révoquée
si le donataire n'a pas répondu (2). Par conséquent, dans
ce cas (suivant l'o-pinion très bien fondée de Lopez, Tiraqeau,
Décius et autres), le donataire ne peut accepter une dona-tion de
ce genre s'il n'eh a connaissance qu'après la mort du donateur,
parce qu'alors le consentement du donateur et celui du donataire ne peuvent
pas concourir simultanément à la formation du contrat, et
ce concours est nécessaire pour le valider. Et d'après cette
opinion, si le messager a négligé, par sa faute, de'remettre
au donataire l'objet de la do-nation, ou bien, s'il n'a pas exécuté
la donation qu'il
(>) Lib. III. n. 737. (a) M. 7ï8.
POUR LES CONFESSEURS.
J3J
était chargé de faire, il sera obligé, après
la môr£ du doiiateur, non seulement à restituer la chose
à son héritier, mais encore à restituer au donataire
la valeur du dommage qu'il lui aura causé. Malgré tout cela,
je ne rejette pas comme improbable l'o-pinion de Less., Sanch. , Lug.,
Salm. et Viv., qui prétendent que le donataire peut accepter, même
après la mort du donateur, par la raison que la vo-lonté
du donateur est virtuellement exprimée soit dans la lettre, soit
dans la mission d'un envoyé, soit dans la commission de faire la
donation. En admet-tant que ces deux opinions soient également pro-bables
, je dis que si le donataire a de bonne foi fait acceptation, et s'il est
déjà en possession de la chose donnée, il peut très
bien la garder,- et il le peut à plus forte raison si, lors de l'acceptation,
ni lui ni le messager ne connaissaient la mort du donateur, car alors l'acceptation
est bien certainement valable, suivant Sanch., Lugo et les Salm., par la
loi Inter causas ff, mandati, etc. Au contraire, le donataire est obligé
à la restitution s'il a reçu la ebose par mauvaise foi, ou
tout au moins si on peut suspecter sa foi (i), conformément à
ce qui a été dit au n. 8 de ce chapitre; j'ai dit encore
dans ma Théologie morale qu'au moyen d'un doute même positif,
ou d'une opinion probable, on ne peut pas acquérir une légitime
possession (2).
CXX.X.II. A l'égard de ce que nous avons dit plus haut, c'est-à-dire
que la donation ne produit d'obli-gations qu'après qu'elle a été
acceptée, cela s'ap-plique même aux donations faites par des
motifs de
(1) N. 669 et 761. q. s. (a) N. 7S9 et 730.
l32
INSTRUCTION PRATIQUE
piété (en observant néanmoins que ces sortes de
donations peuvent être acceptées par qui que ce soit), comme
l'enseignent avec raison Sanch., Cast., Covar., Reb., Salm., etc. ; mais
il y a exception pour la donation qui serait faite directement à
Dieu, parce qu'alors ce serait un vœu ; et dans le doute, la présomption
est en faveur du vœu. On peut ob-tenir d'un évêque la libération
d'un tel vœu, lors même qu'il aurait été accepté
en qualité de donation pieuse (1). Quant à la question de
savoir si la mort du donataire étant arrivée avant l'acceptation
(ceci s'applique à toutes sortes de donations en général
), son héritier peut accepter à sa place. Mol., Suarez, Sanch.,
etc., disent qu'il le peut; mais la négative est soutenue avec plus
de raison par Less., Castro., Salm. et Reb., parce que l'héritier
succède aux droits réels du défunt, mais non à
ses droits personnels, comme serait celui-ci(2).Les légistes, d'accord
avec Sabell., admettent cette même décision. Lib. I. tit.
D. § 60.
CXXXIII. 4° On remarque que la propriété des choses
données n'est acquise au donataire qu'après la tradition;
5° que lorsque la donation est faite, principalement dans la vue d'obliger
le donataire à faire quelque chose, elle n'est pas valable si le
do-nataire n'accomplit pas cette chose-là. Il en serait autrement
si le but de la donation était seulement d'engager le donataire
à donner quelque chose (?); 6° que la donation prodigue n'est
pas valable (4) ;
(1) ?. 7?6.
(i) N. 731.
(?) ?. 73/j et 736.
(4) N. 735, ei Fusius, lib. VI. ?. ;5?.
POUR LES CONFESSEURS.
j33
7que la donation faite pour une cause présente ou passée,
n'est pas valable, si la cause principale n'existe pas. il en est autrement
s'il y a seulement défaut d'une cause accessoire (1).
CXXXIV. 8° On remarque que la donation entre vifs est révocable
pour plusieurs motifs : ?. Pour cause d'ingratitudee/io/vne de la part
du donataire (2). 2. si le donataire a eu des enfants, lorsqu'il n'en avait
pas à l'époque de la donation. Ceci s'applique à la
donation qui comprend une grande partie des biens et qui est faite à
des étrangers, parce que si elle était faite à un
ascendant ou à un établissement religieux, elle ne pourrait
être révoquée que pour compléter la portion
légitime due aux enfants (?). Il est probable que lé père
peut révoquer la dona-tion pour survenance d'enfants, lorsqu'il
en avait déjà à l'époque où il l'a faite
: cependant cette ques-tion est controversée. Mais si le père
ne la révoque pas, les enfants n'ont pas le droit de la révoquer
(4). 5. Si la donation est ino/ficieuse, c'est-à-dire si elle préjudicie
à la légitime des enfants. Dans ce cas, si elle a été
faite par le père à des étrangers, avec cette intention
coupable de porter préjudice à ses enfants , elle est révoquée
pour la totalité, mais elle n'est révoquée qu'en partie
si elle a été faite à d'au-tres enfants, ou à
des étrangers sans cette mauvaise intention. Néanmoins le
donateur n'est pas obligé de rien restituer avant qu'un jugement
ait été pro-noncé. Quant à la question de savoir
si on peut
(0 N. 737. (2) N. 738. (?) ?. 759. (4) ?. 74?. ad. 6. in fin.
l34
INSTRUCTION PRATIQUE
frustrer les enfants de leur légitime en employant les biens
à des œuvres de piété, Nav., Card., Rodr., Lugo, Veg.,
etc. la décidant affirmativement, pourvu qu'on laisse des aliments
aux enfants; mais la néga-tive est soutenue par Sanch., Less., Conc,
Salni.,etc. Et pette dernière opinion paraît plus probable
parce qu'on doit observer les lois civiles dans tous les cas où
elles ne sont pas révoquées par les lois canoniques, comme
nous l'avons dit au cb. II, n. 18 et 87 (1).
CXXXV. Enfin, on remarque que toutes les do-nations causa mortis sont
toujours révocables jus-qu'à la mort du donateur. Elles sont
censées faites causa mortis toutes les fois que le donateur dispose
pour le temps où il aura cessé d'exister, ou qu'il dispose
en vue de la mort qu'il prévoit devoir être prochaine. Dans
le doute, on décide qu'elles sont donations entre -vifs, et par
conséquent irrévo-cables (2). Ces donations causa mortis
ne peuvent être valablement faites en faveur de personnes ab-sentes,
qu'en leur adressant un messager ou une lettre : mais si elles ont été
faites en présence de témoins, elles valent comme fidéi-commis
(3).
§ III. Du commodat, du précaire, du dépôt.
i56. Du commodat et du précaire. 137. Du dépôt.
i3i8. Si l'on doit conserver la chose du maître ? 13g. Dans quel
cas le dépositaire n'est pas tenu de restituer.
(1) N. 74o. (a) ?. 74?. (? ?. 74a.
POUR LES CONFESSEURS.
CXXXVI. Nous nous étendrons très peu sur cette matière.
Il y a commodat lorsqu'on prête une chose pour un temps déterminé
: il y a précaire lorsque le maître d'une chose la prête
avec la réserve de pou-voir la réclamer quand bon lui semblera.
Le précaire prend, fin par la mort de celui qui a reçu la
chose, mais non par la mort de celui qui l'a donnée, si ses héritiers
ne la réclament pas. La chose donnée en commodat ne peut
être réclamée avant l'époque convenue, à
moins qu'il ne doive en résulter un dommage pour le commoda»t(i).
CXXXVII. Il y a dépôt lorsqu'on donne une chose à
quelqu'un pour la garder. D'où il résulte que le dépositaire
ne peut s'en servir sans la volonté, au moins présumée,
du maître. Autrement il serait tenu de restituer la valeur de l'usage
qu'jj ep aurait fait, si la chose n'était pas une de celles qui
se con-somment paj· l'usage (2).
CXXXVIII. ie On remarque que dans le cas d'un incendie, d'un naufrage,
e}c, le dépositaire n'est pas obligé de cqnseryer la chose
déposée, cfe préfé-rence à ses propres
choses, à moins qu'elle^ ne soit d'une valeur beaucoup plus grande,
car alors, il devrait préférer la conservation de la chose,
dépo-sée : mais il peut très bien, dans ce cas, faire
la compensation des choses qu'il a perdues. Au qon-traire, le commodataire
est toujpurs obligé, de pré-férer la conservation
de la chose qui lui a été prêtée, autrement
il serait tenu tout au raoins d'en payer le prix au prêteur (?).
Quant à la question de savoir
(i)N. 744et745. (a) 748. (?) ?. 75a.
l36
INSTRUCTION PRATIQUE
si le commodataire ou dépositaire est obligé à
la restitution quand la chose a péri par sa faute ( non pas faute
théologique, mais seulementyMrà^Me), elle est résolue
négativement par Lugo, Cab., Ronc. et Salmant. (?). Voyez ce qui
a été dit à ce sujet au n. 4i.
CXXX1X. 2° On remarque que le dépositaire n'est pas obligé
à la restitution du dépôt lorsqu'il est certain que
la chose a été volée ou s'il a quelque motif légitime
de compensation, ou s'il doit raison-nablement craindre que le maître
abuse de la chose et en fasse un usage contraire à la justice (comme
s'il se sert d'une épée pour commettre un meurtre), on même
un usage contraire à la charité, comme le disent Less, et
S. Thomas (a), contre Sanch. et Bonacina (?).
§ IV. Bu prêt et de l'usure.
i4o. Du prêt. Dans quel cas doit-on en faire la restitution ?
i4i · Du prêt donné à des mineurs.
i4a. De celui qui est donné à des fils de famille.
?43· De l'usure.
?44· Du P1^ donné dans l'espoir d'en retirer un profit.
145. Du lucre donné gratis.
146. De celui qui est donné par crainte.
147. De la convention de ne réclamer l'accom-plissement
de la condition qu'après un espace de temps très considérable.
(0 ?. 749·
(a) a. a', q. 62. a. 5.
(5) L-b. HI. n. 75S.
POUR LES CONFESSEURS,
148. Du dommage naissant.
149. Du lucre cessant.
150. Première condition, que l'emprunteur en soit averti.
151. Deuxième condition, qu'on n'exige pas plus qu'on
n'avait l'espoir d'en tirer.
152. Troisième condition, que le prêt soit cause
du dommage et du lucre cessant.'
153. Si la perte ou le lucre doivent être cer-tains ?
154 et 155. Du danger.
156. Des monts de piété.
157 et 158. De la peine conventionnelle.
159. Si en exigeant la bienveillance, etc.
160. Des pactes obligatoires, etc.
161. Du pacte de restituer
dans la même quantité.
162. De donner ce qui est dû suivant la justice ou suivant
la charité,
163. Obligation des usuriers et de
leurs hé-ritiers.
164. Des complices.
CXL. Le prêt consiste à 'prêter une chose fun-gible,
c'est-à-dire qui se consomme par l'usage, à la charge d'en
restituer une autre de même qualité et bonté, dans
un temps déterminé. Mais si le temps n'a pas été
déterminé, elle doit être restituée au maître
lorsqu'il la réclame ( en laissant écouler ce-pendant un
espace de temps convenable) ; on ne doit même pas attendre, pour
restituer la chose, qu'elle soit réclamée, si c'est par oubli
ou par res-pect, où à cause de l'éloignement que le
prêteur ne la réclame pas (?).
(1) N. 754et755.
l38
INSTRUCTION PRATIQUE
CXLI. On remarque i° que le prêt fait à une communauté,
à des mineurs, à l'Église ou à d'au-tres établissements
pieux, né peut être réclamésion ne prouve qu'il
leur a été profitable, excepté lors-qu'il a été
donné à quelque église avec le consente-ment du prélat
ou du chapitre (1).
CXLII. On remarque s,° que les fils de famille qui n'ont pas de
biens castrenses ?? quasi-cqctreqses, ne sont pas obligés de restituer
l'argent qui leur a été prêté, d'après
la loi ?. c. de S. C. Maced. Cela est légitime , non seulemept devant
le for extérieur, mai§ encore devant le for intérieur
de la conscience ; excepté lorsque le fils de famille en a promis
le remboursement avec serment (duquel serment il peut cependant être
délié par les supé-rieurs ecclésiastiques);
mais lorsqu'il a reçu ce prêt au su de son père ejç
sans opposition de sa part, ou bien si le prêt a tourné au
profit du père, c'est-à-dire si le fils l'a employé
pour des, choses que son père aurait dû lui fournir, alors
le père est obligé <je le rembourser (2). Néanmoins
ce qui a été dit de l'argent, ne s'applique pas à
toute aqtre chose reçue en prêt par le fils de famille. Voilà
tout ce qu'il y a à dire sur le prêt.
CXUII. En ?? qui concerne l'usure, elle consiste dans Je, bénéfice
qui est esçigé, d'après une estima-tion, pour l'usage
de la chose donnée en prêt. Elle es,t défendue par
le cjro.it positif aussi bien que par le droit na^irel, puisque daps les
autres chps.es l'usage est, à la vérité, distinct
de la propriété, tan-dis qujì daps les çhpse§
fopgibjes, destruet&tee gar
(1) ?. 756.
POTJR LES CONFESSEURS.
l'usage, l'usage ne peut pas être distingué de la pro-priété,
car l'usage que l'on fait de la chose la dé-truit ; il suit de là
que dans le prêt la propriété des objets est nécessairement
transférée à celui qui les reçoit, et si celui
qui les a fournis en exige quelque intérêt, il l'exige d'objet?
qui ne lui appartiennent plu? ej; qui s,ont improductifs par leur nature,
comme de l'argent, du blé, etc. (i).
CXLIV. Ainsi donc on ne peut pas exiger un intérêt en
vertu du seul prêt. Mais cependant il est permis de prêter
avec l'espérance d'en retirer quel-que profit, aussi §aint
Thomas (2) permet-il de comp-ter sur un tel revenu quand on le fait résulter,
non pas d'une obligation, mais de la simple reconnais-sance ; nous disons
néanmoins que cela dqit s'en-tendre seulement du cas où le
prêt est donné principalement daps le but de captiver la bienveilr
lanpe, et que l'espoir du gain n'en est que l'objet secondaire. Mais nous
qualifierons de tput-à-fait il-licite le prêt qui aurait pour
objet principal l'es-poir du lucre (quoique ce lucre ne doive résulter
que de la bienveillance), comme, par exemple, si, sans cet espoir de lucre,
on Refusait de constituer le prêt. C'est ce qui est dit aussi dans
l'Évangile : « Mutuum date nihil inde sperantes ; Luc 6. »
C'est également consigné dans le texte du e, consulit., dç
iisur., où il est dit que l'on doit qualifier d'u-; surier petui
qui prête avec l'intention d'en retirer un profit, quoique sans convention
expresse, alias non traditurus, paroles du texte. C'est la raison même
qui a dicté ces paroles de l'Évangilç {3), d'^ù
(0 N. 759.
(2) a. 2. q. 78. a. a. ad. 3.
(5) Lib, ??. n. 76a.
14?
INSTRUCTION PRATIQUE
saint Raïmond dit avec raison {de usur. § 3):«qui »
sub tali spe mutuavit quidquid postea (etiam gratis » oblatum) ultra
sortem acceperit. » Remarquez en même temps la propos. 42 condamnée
par Inn. XI, qui disait : « Usura non est dum ultrà sortem
exigitur » aliquid tanquam ex benevolentia debitum, » pro-position
justement réprouvée, parce que la bienveil-lance ne peut
jamais obliger à fournir un bénéfice, puisqu'il est
facile de la témoigner de toute autre manière (1).
CXLV. Si celui qui a reçu le prêt donne quelque chose
à la personne qui lui a prêté, à titre tout-à-fait
gratuit, celle-ci peut très bien la recevoir. Mais que doit-on décider
dans le cas où il est incertain que celui qui a reçu le prêt
ait donné au prêteur, à titre gratuit ou pour prix
du prêt ? On répond que si le prêteur a reçu
de bonne foi, et s'il lui est impossible d'éclaircir les doutes
qui se sont élevés après coup, il peut très
bien garder la chose qui lui a été donnée. Mais il
ne le peut pas ( quoi qu'en di-sent quelques uns) si le doute existait
lorsqu'il a reçu la chose, parce que ce n'est jamais avec un doute
que l'on peut commencer de posséder légiti-mement (2). Du
reste, si le prêteur n'était pas dans le besoin , s'il n'était
pas gêné et s'il n'avait pas donné par suite des poursuites
ou des menaces exercées contre l'emprunteur, on pourrait ad-mettre
la présomption morale que le présent est purement gratuit,
surtout s'il l'a fait après la res-titution du principal emprunté
(?).
(?) ?. 764·
(a) ?. 669 el 67°·
(3) ?. 76a.
POUR LES CONFESSEURS.
???
CXLVI. Un grand nombre d'auteurs, tels que Lay m. Sot., Lugo, Cast.,
les Salm. et autres, disent que si, outre les choses prêtées,
l'emprunteur a donné encore autre chose pour ne pas paraître
in-grat , ou par crainte de ne pas obtenir, à l'avenir, un autre
prêt, le prêteur peut très bien garder *ce surplus,
parce qu'alors celui qui a reçu le prêt n'est pas induit à
faire ce présent par le fait du prêteur, mais seulement par
des motifs intrinsèques qui vien-nent de lui-même, et qui
rendent ce présent tout-à-fait spontané de sa part
(1).
CXLVII. De plus, il faut remarquer ici la propo-sition 42, condamnée
par Alexandre VII, laquelle portait : « Licitum est mutuanti aliquid
ultrà sortem «exigere, si se obligat ad non repetendum sortem
» usque ad certum tempus. » Le prêt emporte pour le prêteur
l'obligation de n'exiger la restitution qu'a-près une espace de
temps convenable, ce qui a fait condamner, avec raison, la proposition
précitée, laquelle disait d'une manière générale,
qu'il devait laisser écouler un espace de temps quelconque. Mais
si le prêteur est obligé d'attendre pendant un temps plus
long qu'à l'ordinaire (par exemple, pen-dant trois ou quatre ans),
Mol., Serr., Led.,Trull., Henr. et Spor., disent qu'il pourra exiger quelque
chose, parce qu'une telle obligation n'est pas de l'essence du prêt,
et doit par conséquent être payée. C;ir (comme le disent
les Salm , Prad., Bon., Arag., etc. ), lorsque le prêteur est obligé
d'atten-dre, pendant un espace de temps aussi long, il est niora'ement
impossible qu'il n'en résulte pas pour lui quelque perte ou quelque
grave inconvénient;
(?) ?. 765.
l42
INSTRUCTION PRATIQUE
mais si l'on peut exiger quelque chose, et si l'on peut convenir que
le prêt ne sera donné qu'a-près un long espace de temps
(suivant l'opinion de Mol. qui esf la plus commune), pourquoi ne pouf-rait-on
pas réclamer quelque chose, lorsqu'on s'o-blige à n'exiger
la restitution qu'après un temps d'une longueur extraordinaire (r)
?
CXLVIII. IIy a quatre titres ordinaires,· êh vertu desquels
le prêteur peut exiger un intérêt au-des-sus du sort
principal qu'il a prêté. Le premier titre vient du dommage
naissant, qu'éprouve le prêteur à l'occasion du prêt
; parce qu'alors, comme le dit saint Thomas (2), eti exigeant une rétribution
il ne vend pas l'usage de son argent, mais il s'indem-nise du dommage qu'il
a Souffert (?).
CXLIX. Le deuxième titre vient du lucre cessant, c'est-à-dire
le gain que le prêteur manque d'acqué-rir par suite du prêt.
Quelques auteurs, tels que Soto, ont douté que ce titre fût
fondé y mais c'est mal à propos, car il est.généralement
approuvé par les auteurs, et par saint Thomas lui-même (4),
qui dit qu'on peut nuire au prêteur de deux ma-nières, ou
en le privant de ce qu'il a, ou en l'em-pêchant de réaliser
les bénéfices qu'il était en foie d'acquérir;
et quoique, dans un autre endroit, le docteur angélique (5) dise
que le prêteurne peut pas exiger qu'on lui restitue le gain qu'il
espère ac-quérir, parce qu'il ne peut pas vendre ce qu'il
n'a pas encore ; néanmoins, c'est avec beaucoup de rai-
(1) 760.
(3) a. 2. q. 78. n. a. ad. 1.
(3) Lib. III. n. 76V.
(4) a. a. q. 63. a. 4-
(5) Ibid. q. 78. a, 2. ad. 1.
POUR LES CONFESSEURS.
son que le docte Syfvius (1) fait remarquer qu'on doit entendre parla,
non pas que le prêteur peut exi-ger la totalité du profit
qu'il espérait faire, mais la valeur de cette espérance.
C'est ce que saint Tho-mas dit clairement en ces termes ; n Tenetur tamen
» aliquam recompensationertì facere. » De plus, la va-i
lidité de ce titre est encore confirmée par le chap. Navigantî,
de Usur., où il est dit : « Si tamen eas res «tempore
contractus non fuisset venditurus. » Mais on ne peut plus douter
de la bonté de ce titre après la déclaration de N.
S. P. Benoît XIV, dans sa bulle Vix pervenit, qui porte que l'un
des titres légitimes, pour réclamer l'intérêt
d'un prêt, est celui du lucre cessant,.c'est-à-dire (comme
l'explique la bulle), lorsque le prêteur aurait pu faire un autre
emploi de son argent, « Sive ad proventus annuos sconquirendos, sive
etiam ad licitam negotiationem «exercendam, honestaque lucra percipienda
(2).
CL. Cependant, pour qu'on puisse exiger cet in-térêt en
vertu du dommage naissant ou du lucre cessant, trois conditions sont requises
: la première est que la convention, que l'intérêt
sera payé, ait précédé le contrat ( excepté
si le prêteur était contraint maVgré lui à prêter,
ou que l'emprun-teur ait négligé de restituer à l'échéance
du ter-me); et de plus, que celui qui reçoit le prêt soit
averti, également ayant le contrat, du titre qu'il crée au
profit de son'prêteur. II ne suffitpas que l'on puisse présumer
que l'emprunteur aurait consenti à remeure les intérêts
s'il avait connu auparavant la validité du titre qui en résultait
j parce que, dans
(») 2. 2. q. 77. q. 1. q. 5. (a) Lib. III. ?. 769.
l44
INSTRUCTION PRATIQUE
un contrat, il faut la volonté expresse, et non pas seulement
la volonté interprétative. Néanmoins, si les contractants
ont donnéleur consentement en di-sant qu'ils adoptent les clauses
les plus favorables possibles, Less., Tourn., les Salm. et Lacroix disent
avec raison que, dans ce cas, on peut exiger l'inté-rêt qui
a été promis. Du reste, notre pontife Be-noît XIV,
dans sa bulle précitée, veut que ceux qui prêtent sachent
bien que, pour se mettre à l'abri de toute imputation d'usure, ils
doivent bien expliquer, avant de faire le contrat, toutes les conditions,
et l'intérêt qu'ils entendent stipu-ler. Voici ses paroles
: « Qui ab omni usure labe se «immunes praestare volunt, admonendi
sunt, ut » contractum instituendum antea declarent, et con-»
ditiones inserendas explicent, et quem fructum ex «pecunia postulent
(?), »
GLI. La seconde condition est que l'on ne doit pas exiger, sous prétexte
de lucre cessant, plus que la valeur de l'espérance qu'on pouvait
avoir de réa-liser ce lucre, déduction faite des dépenses
qui au-raient dû être faites pour l'acquérir, et non
pas la totalité de ces dépenses, mais une partie, c'est-à-dire
autant que le prêteur aurait dû payer à une autre personne
pour se décharger de ce travail (2).
CLII. La troisième condition, que le contrat de prêt soit
la véritable cause du dommage ou de la cessation du lucre 5 parce
que si le prêteur a la possibilité de se procurer ce même
profit avec d'au-tre argent qu'il a entre ses mains, ou au moyen d'une
autre industrie à laquelle il n'aurait pas pu se
(1) lib. 111. ?. 769 el775. (a) N. 769', V. iltid. Conditio.
POUR LES CONFESSEURS.
j/5
livrer s'il avait gardé l'argent, et qu'il l'eût mis dans
le commerce ; alors il ne peut rien exiger. Mais si le prêteur a
donné en prêt un argent qu'il desti-nait au négoce,
et qu'il n'ait pas l'intention d'y em-ployer celui qu'il conserve dans
sa cassette pour les besoins de sa famille, ou pour parer aux cas for-tuits
( comme le dit le P. Cunil.)', ou pour tout au-tre projet qu'il a conçu
; alors il peut raisonnable-ment exiger l'intérêt pour cause
de fuere cessant, à l'égard de l'argent donné en prêt,
comme le di-sent Less., Mol., Lugo, Laym., Castr., Val. , les Salm., etc.,
parce qu'alors c'est en réalité le prêt qui est cause
que le prêteur est privé du lucre qu'il espérait retirer
de son argent. Quant au prêteur, il n'est pas obligé de destine^
au négoce, en remplace-ment de l'argent prêté, celui
qu'il réserve pour d'au-tres projets. Cependant je n'admettrais
pas cette décision dans le cas où le prêteur, en donnant
son argent en prêt, avait déjà l'intention de substi-tuer
à cet argent retiré du négoce celui qu'il réser-vait
pour une autre destination (1).
CLI1I. A ces trois conditions, le P. Conc. en ajoute une quatrième,
en exigeant que le dommage ou le lucre cessant soit certain, et que cette
certi-tude résulte du rapprochement des occasions qui devaient
réaliser ce lucre. Mais la plupart des au-teurs , tels que Sylv.,
Nav., Mald., Sal. , Déco., Salm., etc., disent avec plus de raison
que l'on peut très bien stipuler, par un pacte, que l'intérêt
sera exigible en vertu des titres ci-dessus énumérés,
lors même qu'ils seraient incertains, pourvu qu'ils of-frent une
probabilité suffisante, et pourvu que cet
(») N. 771.
T. XXIV.
IO
l46
INSTRUCTION PRATIQUE
intérêt ne dépasse pas la valeur du dommage dont
on est menacé, ou du lucre dont on se trouve privé ; car
il y a très certainement lieu d'indemniser celui qui s'expose à
un dommage même incertain, ou qui se prive de l'espoir même
incertain de réaliser un bénéfice (1).
CLIV. Le troisième titre est le danger de ne pou-voir se faire
rembourser le prêt. La valeur de ce titre est fortement contestée
par quelques auteurs, mais elle est généralement reconnue
par les auteurs les plusrecommandables, tels que Fagn., Petr., Cab., Tourrï.,
Wig., et de plus par Silvest., Silv., Less., Mol., Lugo, Salm. et autres,
pourvu que le danger soit extraordinaire et ne rentre pas dans la ligne
commune. La raison en est que l'on doit très certai-nement une indemnité
â «elui qui s'expose à un tel danger; ainsi que l'enseigne
saint Thomas (2), qui dit : « Res extra periculum plus estimantur
quam » existentes in periculo. » Cette opinion est confirmée
par la deliberation qui eut lieu dans le concile de Latran, sous Léon
X, Sess. 20, où il fut défendu de recevoir un
intérêt pour le "prêt, pourvu
(re-marquez bien ceci) que le prêteur ne courût pas le risque
de perdre la valeur prêtée ou d'être obligé de
faire des dépenses pour en obtenir le recouvre-ment, et le concile
dit que l'intérêt exigé hors de ces cas était
une usure , « quando nullo sumptu nullove «periculo conquiri
studetur. » Cela est aussi con-firmé par la déclaration
émanée de la sainte Congré-gation de propaganda fide,
approuvée par InnocentX et rapportée par les auteurs les
plus graves, tels que
(1) N. 770/
(a) Opus. 75. cap. 6.
POOR LES CGtfFEÇSPPBS
,/-
i., Tourn·, Lacroix, Bonac, et d'abord par Hurr, qui en donne
la copie authentique, faite de la main d'un notaire apostolique, où
il est dit que le prêteur peut recevoir un intérêt en
sus de la somme prêtée « ratione periculi probabiliter
imminentis » (?).
CLV. Les auteurs qui professent l'opinion con-traire , opposent à
cela le texte du chap. Nauiganti, de usur., où on lit que la convention
par laquelle on se réserve d'exiger quelque chose en sus de la valeur
prêtée, doit être considérée comme une
usure, quand le prêteur prend pour son compte le péril du
prêt. Voici les paroles du texte : « Eo quod (le prêteur)
» suscipit in se periculum, usurarius est censendus. » Mais
on leur répond , suivant l'opinion de plusieurs auteurs, i°
que dans le texte sur lequel ils s'ap-puient il est probable que la particule
non a été omise par erreur du copiste, laquelle particule
de-vait se trouver avant le mot censendus, comme le disent, avec un grand
fondement, ïourn., Cab., Laym., Cast., Lep., Cun., etc., à
cause de la contex-ture des paroles qui suivent immédiatement celles
que nous venons de citer :« Ille quoque... non debet ex hoc usurarius
reputari, etc.; » lesquelles paroles désignent un autre cas,
car si on n'ajoutait pas la particule on ne pourrait pas faire accorder
ces der-m'èies expressions avec celles <t usurarius est cen-»
sendus. » Mais ( quoi qu'il en soit de cette première raison
) on leur répond avec Fag. 20 que ce système est admissible
devant la juridiction extérieure, qui présume dans un tel
contrat l'intention de faire l'u-sure, mais non pas devant le for intérieur
de la conscience. On leur répond .3° que ce même sys-
(1) Lib. III. ?. 765.
148
INSTRUCTION PRATIQUE
tème est applicable lorsque le prêteur voulait pour donner
de la stabilité à sa créance, obliger l'em-prunteur
à se mettre à couvert de ce danger, car alors si l'emprunteur
offre une sûreté, le prêteur est obligé de l'accepter,
mais qu'il n'est aucunement ap-plicable lorsque le prêteur n'avait
pas l'intention d'imposer cette obligation à l'emprunteur (1).
CLVI. Ici il est bon de remarquer que dans ce même concile de
Latran, dont nous avons déjà parlé, on sanctionna
rétablissement des monts dits de piété, lesquels exigent
un certain intérêt en dessus de la valeur du prêt pour
couvrir les dépenses occa-sionnées par les employés
et par les soins qu'exige la conservation des gages. Ces gages sont vendus
si on laisse passer le temps fixé d'avance pour la resti-tution
du prêt, et l'excédant du prix sur le prêt est donné
aux maîtres s'ils se retrouvent, sinon on ap-plique cet excédant
aux pauvres, ou au profit du Mont-de-Piété lui-même.
Quelques auteurs préten· dent que ces monts-de-pieté
ne doivent prêter qu'aux pauvres ; mais il faut croire que cela ne
s'applique qu'aux monts-de-piété qui sont pauvres, au point
d'être exposés à se mettre dans l'impuissance de se-courir
les pauvres pour l'avantage desquels ils ont été principalement
institués (2).
CLVII. Le quatrième titre résulte de la peine conventionnelle,
c'est-à-dire du pacte par lequel il est stipulé que si l'emprunteur
ne se libère pas dans un temps fixé, il sera obligé
de payer à titre de peine une certaine somme en sus de la valeur
du prêt. Ce titre est aussi généralement reconnu juste
par Scot.,
(1) ?. 765. V. Objiciant. 2.
(2) Ibid. V. Circa.
POUR LES CONFESSEURS,
Less., ïourn., Caba., Henri de saint Ignace,
,
Salm., etc. Cela résulte aussi de la loi Sipa.cta, eh. de petetis,
et du ch. dilectus de arbitr; parce qu'une telle peine n'est pas et ne
doit pas être imposée dans le but de retirer un profit du
prêt, mais dans le but de contraindre l'emprunteur à restituer
ponctuelle-ment ce qui lui a été prêté, à
époque convenue. Néan-moins, pour que cette peine puisse
être exigée, trois conditions sont nécessaires : i°
que le retard ap-porté par l'emprunteur à rembourser le prêt
dans le temps déterminée, soit considérable et coupable;
2° que la peine soit modérée et proportionnée
à la faute ; 5° que l'emprunteur se soit obligé à
restituer le prêt à une époque où il lui est
réellement possible d'effectuer cette restitution, autrementla convention
serait présumée usuraire (1).
"
CLVIII. On demande si cette peine est due avant qu'un jugement ait
été prononcé; les uns disent qu'elle n'est pas due.
Mais l'affirmative est mieux fondée, elle est soutenue par JLess.,
Tour., Silv., Salm., etc., parce que cette peine est considérée
comme une convention et non comme une peine (ai. Il faut remarquer ici
que la convention appelée legis commissariœ, c'est-à-dire
lorsque le gage doit appar-tenir au prêteur si on ne le rembourse
pas à l'é-poque fixée, cette convention est usuraire,
et que, nonobstant cette convention, le prêteur doit resti-tuer le
surplus de la valeur du gage sur celle des choses prêtées
et en même temps les fruits qu'il en a retirés, lorsque le
gage est une chose qui produit des fruits. Par conséquent la convention
appelée anti-
(1) N. 766. (a) N. 767.
?5?
INSTRUCTION PKATIQTJE
chrèse, par laquelle le prêteur s'attribue les fruits
de la chose <jui lui est donnée en gage, est une con-vention
illicite (cette convention est appelée vulgai-rement a godere).
Il faut faire une exception pour le cas où un pareil gage aurait
été donné dans le but d'accomplir la promesse d'une
dot (laquelle dot n'aurait pas ericore été constituée),
afin de subvenir aux charges du mariage (1), ou bien encore, lors-qu'un
vassal donne sa terre en gage à son maître (ci, defeudis).
CLIX. Pour distinguer les conventions qui sont licites dans le prêt,
de celles qui ne le sont pas, il faut suivre la règle tracée
par saint Thotnas (2), portant que toute obligation, appréciable
en argent, qui est imposée à l'acheteur, est une usure, mais
qu'il n'y a pas d'usure lorsqu'on n'exige qu'une chose qui ne peut être
acquise à prix d'argent, comme la bienveillance (?), pourvu qu'on
n'exige pas en outre quelque avantage particulier, comme résultant
de la bienveillance et dè°la reconnaissance; ce qui résulte
de la proposition 4â condamnée par Innocent II, la-quelle
portait qu'il n'y avait pas usure lorsqu'on exi-geait quelque chose, «
tanquam ex benevolentia et «gratitudîne debitam; » comme,
par exemple, si le prêteur obligeait l'emprunteur à lui rendre
quel-que service; la raison en est que la reconnaissance peut être
témoignée de plusieurs autres manières, par exemple,
en louant et honorant son bienfai-teur, etc. ; d'où il résulte
que l'obligation de rendre un objet particulier est une obligation appréciable
eh argen^ et par conséquent constitue l'usure.
(1) N. 775 et 776. (a) a. a. q. 78. a. a. (3) Lib. Ill, n. 477-
POUR LES CONFESSEURS.
???
CLX. Il est également illicite d'obliger l'emprun-teur à
acheter à l'avenir du prêteur les choses qui lui sont nécessaires,
ou à lui affecter sa maison, ou à lui vendre son grain, ou
à lui prêter de l'argent, ou toute autre chose. Nous disons
à Vavenir, parce qu'il n'y aurait rien d'illicite à exiger
tout cela de l'emprunteur au moment où il demande à emprun-ter,
ainsi que le dit saint Thomas avec la plupart des autres auteurs (?).
CLXI. Est encore illicite le pacte par lequel il est stipulé
que l'argent ou les autres objets prêtés seront rendus en
objets d'une autre espèce, parce que ce serait encore là
une charge appréciable en argent. Après cela, on demande
s'i? est permis de stipuler que la chose prêtée sera rendue
dans un temps déterminé, en même qualité et
quantité ; si, par exemple, le prêt consiste en blé
qui a été coupé en août, et que l'on stipule
qu'il sera rendu en même quantité au mois de mai? On répond
que lorsqu'il est également douteux, qu'au mois de mai le grain
puisse augmenter ou diminuer (cela est applicable à toute autre
chose), ou*bien si le prêteur est décidé à conserver
le blé jusqu'au mois de mai, alors, sans aucun doute, la convention
est licite, déduction faite, cependant, des frais et des chances
qu'offrira la conservation xlu grain ; mais si la chose ne peut pas diminuer
au mois de mai, et si, d'un autre côté, le prêteur n'était
pas dans l'inten-tion de la garder ( quel que soit l'avis de Sot. et Mol.
qui disent qu'il est la nature du prêt d'o-bliger à rendre
la chose en égale 'quantité ), nous dirons avec Less., Salm.,
Az., Bon., etc. qu'une
(J) ?. 780 et 781.
iSa
INSTRUCTION PRATIQUE
telle convention est usurairè, parce que, lorsqu'on oblige l'emprunteur
à rendre le grain précisément au mois de mai, s'il
a augmenté de. valeur,, on est censé avoir eu l'intention
de faire un bénéfice. H résulte de là qu'en
faisant la restitution du prêt, on doit en déduire la valeur
de l'augmentation. Néan-moins, dans un prêt qui consiste en
argent, il est permis de stipuler qu'il sera rendu avec les mêmes
espèces, du moins si la diminution de valeur n'est pas moralement
certaine (1).
CLXII. Les docteurs s'accordent à dire qu'on peut, en faisant
un prêt, exiger une chose qui est due, en bonne justice, comme si
on exigeait que l'emprunteur se désistât d'une vengeance ou
d'une vexation injuste, ou qu'il payât une dette contractée
antérieurement (2). Nous avons dit due. en justice, pavce que cela
ne serait pas applicable si la chose n'était due qu'en vertu de
la charité. Nous dirons donc avec Az., Bon., Spor., Salm.,etc. (quoi
qu'en disent le P. Conci. et autres ) qu'en faisant . un prêt en
faveur d'un médecin ou d'un avocat, lesquels sont objigés,
seulement par la charité, à rendre leurs services aux malades
ou aux plaideurs, on ne peut pas, pour une clause du contrat, les obli-ger
à le faire, parce qu'une fois celte convention consentie, il se
forme une obligation judiciaire qui est appréciable à prix
d'argent (?). Ainsi donc, nous dirons avec Layni., Lugo, Bon., etc., contre
quel-ques autres, que le prêteur ne peut pas obliger l'em-prunteur
à lui pardonner une injure que la charité
(1) N. 782.
(a) N. 674. T. 7. etn. 774·
(3) N. 777.
POUR LES CONFESSEURS.
j 55
lui fait un devoir de pardonner, mais dont la justice lui donne le
droit de réclamer satisfaction (1).
CLXIII. En dernier lieu, au sujet de l'obligation des usuriersetde
tous les autres qui coopèrent, d'une manière grave et directe,
contre la volonté des em-prunteurs, nous dirons qu'ils sont tenus
de restituer toutes les usures par eux recueillies, mais non pas les objets
qu'ils ont acquis au moyen de ces usures, parce que ces objets sont un
fruit de leur industrie, et doivent appartenir'à la personne qui
l'exerce (2). Il est probable que les héritiers des usuriers ne
sont pas tenus, in solidum, à la restitution des usures, mais chacun
au prorata de sa portion héréditaire, ainsi que cela résulte
du ch. Tua nos. 9 de usur., et de la loi ?. c. de delict., lib. 4·
tit. 17 (?).
CLXIV. Les serviteurs de l'usurier employés à des ouvrages
qui nepréjudicientpas à l'emprunteur, comme, par exemple,
à transporter des gages, ou l'argent, ou bien à inscrire
les comptes, ou encore à réclamer amicalement le paiement
de l'usure, ne sont pas obligés à la restitution ; mais il
en est au-trement de ceux qui consolident les billets, ou qui exigent le
paiement par des menaces ou par tout autre moyen (4). Ces principes sont
admis] par Cu-niliati (5),Habert, Tournely et Antoine.
CLXV. Enfin,, en ce qui concerne ceux qui con-seillent l'usurier ou
lui fournissent de l'argent, ils ne sont pas obligés à la
restitution (d'après Lugo, Toi., Silv. et la plupart des auteurs),
lorsqu'ils le
(0 N. 778. (a) M. 7»4. (?) ?. 790.
(4) ?. 67.
(5) Cuniliatitr. 10. e. a. § 7. ?. 4·
l54
INSTRUCTION PRATIQUE
font dans l'intérêt de l'emprunteur (i). On remar-que,
en dernier lieu, que les usuriers publics sont infâmes, que leur
testament est déclaré nul, et qu'ils ne peuvent ni être
admis à la communion, ni être enterre's dans le lieu consacré,
et que celui qui les y enterre, sachant qu'ils sont usuriers, est excom-munié
ipso facto (2).
§ V. De l'achat et de la vente.
166. Détermination du prix et de la chose. 167· Des arrhes.
168. Quand la propriété est-elle transférée?
169. De l'achat sous condition.
170. Si les risques et les fruits delà chose sont toujours
pour l'acheteur.
171. Du pacte d'exiger les fruits jusqu'au paie-ment.
172. Si l'on achète avec l'argent d'autrui, ou si l'on
vend la chose d'autrui.
173. Du prix légitime.
174. Comment le prix augmente ou diminue,
175. Du prix exagéré, et quand est*ce qu'on peut
vendre plus cher»
176 et 177. De la vente (sub hasta).
178. Si, par le retard, et par l'anticipation du prix, etc.
179. De l'achat des billets créances.
180. De la convention du pacte de revendre.
181. Et de racheter.
182. Du contrat moatra et antichryseos.
(1) Lib. ??. ?. 785. CO ?. 79a.
POUR LES CONFESSEURS.
?8? et 184. Du monopole. i85 à 187. Du vice de la chose. 188.
Celui qui sait que dans peu le prix doit aug-menter ou diminer, etc.
18g. Des vendeuses et des courtiers.
190. Si la même chose est vendue à deux per-sonnes.
191. Si la chose périt, etc.
CLXVI. Remarquez 10 que pour la validité d'un contrat d'achat,
il faut la détermination du prix (tout au moins en la confiant à
un tiers), et la déter-mination de la chose, au moins quant à
la mesure : par exemple, si l'on vend le vin de ce tonneau, à tant
le baril; ou bien quant à l'espérance : par exem-ple, si
l'on vend un coup de filet (1).
CLXVlI. Ici on demande si, une fois les arrhes données, celui
qui les a données peut dissoudre le contrat en consentant à
les tìerdre. Ón répond qu'il le peut; par la raison
que tel est l'usage établi; mais il en serait autrement si les arrhes
avaient été don-nées seulement pour plus de garantie.
Du reste, c'est avec raison que le P. Conc. (contre l'opinion de La-croix)'
dit que celui qui a donné des arrhes peut se retirer en les abandonnant,
parce qu'en règle gé-nérale, tout contrat est censé
fait conforniément à l'usage établi (2).
CXLVIIl, Remarquez a° que le contrat d'achat est parfait par le
seul consentement ; mais la pro-priété de la chose vendue
? est transférée que par la tradition. Elle n'est même
pas transférée après la tradition, lorsque l'acheteur
ne paie pas le prix, ou
(0 Lib. Ill, ?. 7?4. (a) Ibid. V. Quaer.
156
INSTRUCTION PRATIQUE
tout au moins s'il n'en fait pas l'offre, ou s'il refuse de donner
un gage ou une assurance (vulgairement appelée la pleggeria), ou
au moins s'il refuse de donner sa foi ou sa promesse ; comme cela résulte
du texte du§ venditce, instit. de rerum divis. (?).?~· à
cet égard ce qui est dit au n° 107.
CLXIX. Remarquez 5° que , dans une vente con-ditionnelle, l'accomplissement
de la condition ré-troagit jusqu'au jour' de la formation du contrat;
par conséquent les fruits que la chose a produits depuis cette époque
appartiennent à l'acheteur, à moins que l'accomplissement
de la condition ait été laissé à sa discrétion
(2).
CLXX. Remarquez 4* que, quoique en règle gé-nérale,
les risques et les avantages de la' chose ap-partiennent à son maître,
néanmoins dans Tachât d'une chose déterminée,
encore, qu'elle n'ait pas été consignée, mais sans
que le prix soit incertain ( cas auquel, comme nous l'avons dit plus haut,
la pro-priété de la chose reste au vendeur), les risques
et les avantages sont entièrement pour le compte de l'acheteur,
comme cela est exprimé dans les textes suivants : § Cum autem,
?. inst. de emptione et vendit. L. id quod ? de peric et commod. ac de.
post perfectum, 1. C. eod. tit. On en excepte néan-moins le cas
où il y aurait convention expresse du contraire, ou si la chose
n'étant pas consignée, le vendeur avait été
mis en demeure de la consigner, ou bien si elle était détériorée
ou périeparsa faute (5). Mais hors de ces cas pour lesquels il faut
faire ex-
(1) N. 795et796. 00 N. 797. (?) ?. 798.
POUR LES CONFESSEURS.
iS7
ception, les risques de la chose sont po ur l'acheteur ainsi que les
fruits qu'elle produit. le droit cano-
nique réprouve comme favorables à 1
usure (1), les
lois civiles qui ont consacré des principes contraires à
ceux-là, suivant ce que disent les théologiens de Salamanque
(2).
CLXXI. On demande si le vendeur peut se ré-server la faculté
de retenir les fruits produits par la chose jusqu'au paiement du prix,
lorsque la pro-priété est déjà transférée
au moyen de la tradition de la chose et de la confiance accordée
à l'aclieteur à l'égard du prix. Quelques auteurs
i outiennent la négative. Mais l'affirmative est professée,
avec plus de raison, parSanch., Mol., Bon., Par.,etc., parce qu'alors le
vendeur peut se réservei la propriété utile de la
chose jusqu'au parfait paiement du prix (?).
GXLXII. Remarquez 5° que si qu< lqu'un achète une chose
avec l'argent d'autrui, mais en son pro-pre nom, cette chose lui appartient,
d'après la loi Si C. de revend. Les docteurs font une exception
pour le cas où l'argent appartiendrait à l'Église
ou à un mineur, ou à un militaire (4) · Au contraire,
si quel-qu'un vend la chose d'autrui, quoique la vente soit nulle à
l'égard de la chose, néanmoins il acquiert la propriété
de l'argent. Mais s'il a vendu de mau-vaise foi, il est tenu d'indemniser
l'acheteur de tout le dommage par lui éprouvé (quand la chose
est ren-trée par éviction entre les mains du propriétaire
), lors même qu'il aurait été convenu jju il ne serait
(1) Lib. ??. V. Ita. •(a) Trac. 14. c. a. n. 17. (5) Lib. III. ?. 798.
vers, discimus. (4) ?. 799. .
INSTRUCTAM PRATIQUE
pas garant de l'éviction. Gomme cela résulte de Ja loi
Empturum, § qui autem, jf. de actionib. empt. Néanmoins on
en excepte, 1* le cas où il a été expressément
convenu que le prix ne serait pas restitué; 2° celui où
le vendeur n'en est pas devenu plus riche, parce qu'il a donné le
prjx qu'il avait reçu; 5° celui où l'acheteur savait
que la chose ap-partenait à autrui ou qu'elle était privée
de quelque charge, suivant la loi fundum, ch. de evict. Tout ce que nous
venons de dire a trait à la justice profes-sée devant les
tribunaux extérieurs j mais en con-scjence, lorsque le prix n'a
pas été adjugé au fisc à titre de peine, il
doit être restitué à l'acheteur (1). CLXXIII. Remarquez
6° que le taux du prix est fixé par la république, et
que tous les citoyens, même les ecclésiastiques, doivent observer
cette taxe, à moins que les circonstances soient changées,
ou que la plus grande partie des habitants ait cessé de l'observer
au su des magistrats (2). Hors de la taxe, le prix de chaque chose a un
minimum, un terme moyen et un maximum, et chacun de ces prix est légitime.
À cet égard, il faut remarquer i° que pour la fixation
du prix il faut prendre en considé-ration l'époque de la
tradition et le lieu de la vente. Il faut remarquer 2° que pour la
fixation du prix des choses précieuses et extraordinaires, on a
plus delatitude que pour celui des choses ordinaires et de peu de valeur.
Pour donner un exemple de cette différence, le vin qui vaut 5, peut
être acheté 4 et 6; s'il vaut 10, il peut être acheté
8 et 12; s'il vaut 100,
(1) Castrop. tr. 55. d. 5. p. 28. § 1. n. 1. et Salm. tr. 14.
c. 3. n. 5i. cum aliis. (») Lib. ??. ?. 8?5.
POUR LES CONFESSEURS.
il peut être acheté o,5 et io5. Voilà pour les
choses ordinaires ; mais à l'égard des choses extraordinaires
et d'un grand prix, une maison de campagne, par exemple, qui a été
vendue 20,000, peut é|re ache-tée 12,000(1). Il faut remarquer
3° que si dans le prix exigé il y a lésion de plus de
la moitié (ul-tra dimidium), la partie lésée peut
poursuivre en jus-tice la rescision du contrat. Mais si cette lésion
est de moins de la moitié [intra dimidium ), l'autre par-tie est
également obligée en conscience (mais non en justice) à
indemniser l'aeheteur jusqu'à concur-rence de la juste valeur de
la chose. Néanmoins si les deux parties ont ignoré la valeur
juste de la chose, alors celle dont elles sont convenues est con-sidérée
comme juste (2). Il faut remarquer, en der-nier lieu, qu'ordinairement
parlant on n'ajoute pas foi aux allégations des vendeurs; par conséquent
un vendeur n'est pas tenu à la restitution si le prix qu'il a exigé
n'excède pas le maximum, ou s'il n'est pas prouvé d'un* manière
certaine que l'acheteur a eu confiance en la bonne foi du ven-deur (?).
CLXXIV. Remarquez 70 que le prix augmente ou par la concurrence des
acheteurs , ou par la ra-reté de la marchandise, et réciproquement
il décroît par suite du manque 4'acheteurs ou de l'abondance
de la marchandise. Cette règle doit être spécialement
observée pour la solution de plusieurs questions dont nous nous
occuperons un peu plus loin (4) · II
(?) ?. 8?4.
(a) ?. 8?5. V. Quod si.
(3) Ibid. V. Hic etiam.
(4) ?. 8?7. V. not. 2.
?6?
INSTRUCTION PRATIQUE
faut encore remarquer que le prix, quel qu'il soit, peut toujours être
justifié par l'usage suivi dans le pays où la chose se trouve
(1).
CLXXV. Remarquez 8° à l'égard de l'acheteur qu'il
peut acheter même à un prix au-dessous du minimum, lorsqu'il
s'agit d'une chose qui lui est peu utile ou d'une chose qu'il achète
pour rendre service au vendeur. D'où quelques auteurs prétendent
que la marchandise qui est en magasin diminue de valeur pour moitié.
Mais suivant l'opinion la plus com-mune , qui est celle du P. Cunil., elje
diminue pour un tiers. La raison de cette diminution est que, dans ces
ventes qui se font dedans, les acheteurs sont en plus petit nombre (2),
et par la même raison-, celui qui achète plusieurs objets
ensemble, peut les ache-ter au-dessous du minimum du prix fixé (5).
Mais le vendeur, au contraire, ne peut vendre au-dessus du maximum, sous
prétexte que l'acheteur a grand besoin de la chose ou qu'il la désire
fortement (4). Mais, si à ces raisons-là Viennent s'en joindre
d'au-tres, il peut exiger plus que le maximum; par exemple, i° s'il
en résulte pour lui un dommage ou un lucre cessant (pourvu qu'il
en avertisse l'acheteur), et cela quand même il y aurait une taxe
établie pour le prix, et quoique ce soit le vendeur qui ait fait
les premières démarches pour vendre la chose; 20 si le vendeur
a une affection toute particulière pour l'objet dont il se dessaisit
(5) ;" 5° s'il s'agit d'objets d'une espèce particulière,
comme pierreries, ta-
(1) N. 808. inf. not. 1.
(2) ?. 802.
(5) Ibid. V. a. Empl. (4 N. 806. (5) Ibid.q.
POUR LES CONFESSEURS.
]gj
, meubles et autres objets semblables. Quant à la question de
savoir s'il peut vendre ces objets-là au plus haut prix possible
(quantiplurimi), quelques auteurs répondent affirmativement; mais
la négative est plus probable, nisi sit usus mulieris honestœ (?).
4» S'il vend la chose en détail, à raison de la peine
plus considérable qu'il est obligé de prendre et de la dépréciation
(vulgairement appelée sfraudo) que la chose'subit(2).
CLXXVI. Remarquez 90 que les choses qui se vendent sub hasta ou qui
sont exposées en vente par les courtiers, peuvent être vendues
au prix qu'on en trouve, quel qu'il soit, comme cela résulte de
la loi 2, de rescind, vend., pourvu qu'il ne soit pas fait usage de moyens
frauduleux, soit de la part du vendeur, comme par exemple s'il cachait
le vice de la chose, ou s'il s'aidait de faux enchérisseurs; soit
de la partde l'acheteur, comme si, par des ruses, des menaces ou des prières
importunes, il avait détourné d'autres personnes de faire
des offres (3).
CLXXVII. i° On demande s'il est permis de détourner quelqu'un
de l'intention de faire des offres, lorsqu'on n'emploie pour cela que de
simples prières. Quelques auteurs sont pour la négative ;
mais le plus grand nombre le permettent. Tels sont Tournely, Lugo, les
Salm., Castropal., Navarre, Vega, Tapia, Conrad., etc. (4).
(0 N. 80S.
(2) N. 809.
(5) 808. V. Notandum.
(4) Ita Tournely torn. I. p. 446. Lugo de cOiltr. d. 26. a. 45. Salmant.
eod. tit. rap. 3. uum. 38. cam Palao. Trull. Tapia ctDicast. ac Diana,
p. 1. tr. 8. A'~?6; O*HH p; Natarr. Regin. Vega. Conrado et Arag.
T. xxiv. ·
1 »
IÔ2
INSTRUCTION PRATIQUE
CLXXVIII. 2Q On demande si plusieurs ache teurs peuvent s'entendre
pour n'offrir qu'une cer-taine somme. Les docteurs se sont peu occupés
de ce cas. Diana(i), Nav. et autres semblent ie per-mettre toutes les fois
que ces acheteurs ont fait une offre qui égale au moins le minimum
de la valeur de la chose. Mais quant à moi, je pense le contraire,
comme le cardinal de Lugo (2) et plusieurs autres savants,
dans le cas où la marchandise est exposée pour être
vendue sub fiasta par l'office du juge. Mon opinion est fondée
sur ce que le vendeur, étant obligé de livrer la chose
au plus offrant, les acheteurs lui causent un préjudice en n'offrant
que le plus bas prix ou même Je prix moyen, parce qu'ils l'empêchent
d'atteindre le prix moyen ou le maxi-mum auquel il a droit ( c'est-à-dire
droit de n'être pas empêché de l'acquérir). Car
il arrive dans ce cas que s'il ne se trouve pas un autre enchérisseur,
\e vendeur court le risque d'être obligé de livrer la chose
à un bas prix, quelquefois même au-dessous du minimum. Et
d'un autre côté, l'équité veut qu'il ne soit
pas privé de l'espoir d'obtenir un prix plus considérable
par le concours de nouveaux enché-risseurs , qui peuvent par émulation
faire augmenter le prix. Cela est exigé par l'équité,
et cela entre d'une manière essentielle dans le droit de la lici-tation.
CLXXIX. Remarquez io° que l'augmentation ou la diminution du prix
ne peut pas résulter précisé-ment du retard ou de
l'anticipation du paiement, s'il ne s'y joint d'autres titres résultant
du dommage
(1) P. 1. tr. 8. ?76.
(3) Disp.36. n. 45. in fin.
POUR I.JES CONFESSEURS.
j£5
ou du lucre cessant, desquels titres cm doit donner connaissance à
l'acheteur, comme il a été dit au ?. i5o; et remarquez ici
que les marchands qui vendent à crédit, et qui, par cette
raison , vendent à un prix plus élevé , peuveqt difficilement
être ex-cusés par ce seul titre »du lucre cessant, parce
qu'en vendant à crédit ils vendent une plus grande quan-tité
d'objets, et rattrapent ainsi ce qu'ils perdent en attendant la rentrée
de leur argent (1). Ils peuvent plus facilement être excusés
par le titre résultant de \& commune estimation , laquelle suffit
pour justi-fier ces ventes à crédit, comme le disent Lugo,
Lessius, Canus, Molina, Toledo, Sanchez, Castro., jBonaci. et les Salm.,
parce que, dans ces vejates-là, il y a une plus grande quantité
d'acheteur.? et moins de vendeurs, et qu'elles entraînent toujours
Je risque de perdre la somnie. Il faut en dire,de même pour les acheteurs
qui, parce qu'ils paient d'avance, veulent donnerun prix qui est au-dessous
du mini-mum, par la raison que^ pour une vente de ce genre, il s,e trouve
au contraire une grande quantité de vendeurs et peu d'acheteurs.,
et quîil f a aussi jjuelque risq?? de ne pas avoir ,1a chose, ou
de ne j),as l'ayoir telle qu'on la désire (2).
CLXXX. Par la même raison,^Nav,.,Cajet., Sanch., Tourii,, Anac,
??·> Lugo, saint Bernard,. de.Sïena et autres, disent avec
beaucoup de justesse que les ti-Jtres d'une créance, lors même
qu'ils sont liquides, peuvent être achetés à un prix
inférieur, parce que> autre chpse est avoir de l'argent en espèces,
autre chose acheter un droit pour réclamer de l'argent,
(1) Lib. III. ?. 8??.
(2) ?. 8??.
l64
INSTRUCTION PRATÏQCT
lequel droit est ordinairement d'une valeur infé-rieiire, parce
que, dans la pratique, il expose tou-jours à des exactions, ou au
moins à des tracasseries et à des frais. Néanmoins,
je pense qu'on doit en excepter les créances des banquiers appelés
fedi di credito, lesquelles n'offrent aucun risque moral, pourvu que la
personne ne soit pas domiciliée très loin, et qu'il n'y ait
pas inconvénient ou danger à l'égard de celui qui
est envoyé pour faire le recou-vrement (1).
CLXXXI. Remarquez 11 ° que la convention de revendre est licite
lorsqu'elle réunit les conditions nécessaires, savoir : 1°
que Je prix soit moindre. Il peut, dans ce cas, être réduit
jusqu'au quart, et sui-vant certains auteurs, jusqu'au tiers seulement.
Alors l'acheteur peut très bien s'obliger par un pacte à
revendre pour le même prix, quand même la va-leur de la chose
aurait augmenté; 20 que la chose soit aux risques et périls
de l'acheteur; 3e que le fonds soit vendu avec ou sans les fruits, comme
il se trouve à l'époque de la consignation (a).
CLXXXII. De plus, suivant l'opinion de Les-sius,Lugo,Molina, Castropal.,
Sylvius,P. Navarre, Bonacina, Azor et autres, il est permis de faire un
pacte de rachat, c'est-à-dire, de convenir que le vendeur sera obligé,
sur la réquisition de l'acheteur, de racheter la chose; mais il
faut, pour cela, plu-sieurs conditions : i° qu'il n'y ait pas là
une inten-tion de faire de l'usure ; 20 que le prix de la pre-mière
vente ait augmenté ; 3° que le vendeur soit tenu d'acheter pour
le même prix; mais si la chose
(1) Lib. 111. ?. 8?9· (a) N. 85a.
POUR LES CONFESSEURS.
a été détériorée, il sera tenu seulement
de payer sa valeur à l'époque du rachat ; et si, au contraire,
la chose a augmenté de valeur, cette augmentation profite au vendeur.
Sous Ge rapport, il y a là une vente et non un prêt,, comme
le supposent les partisans de l'opinion contraire; car, tant que le ra-chat
n'a pas été fait, la chose est a.ux risques de l'a-cheteur
; et il en est tout autrement dans le prêt (1).
CLXXXIII. Le contrat dit de moatra est, sans au-cun doute, un contrat
illicite, comme cela résulte Je la proposition XL, condamnée
par Innocent II. Ce contrat a lieu lorsque quelqu'un Tiend avec la condition
expresse ou tacite que la chose lui soit en-suite revendue à meilleur
marché (2); de même aussi le contrat qu'on nomme antichrèse,
vulgairement appelé a godere, est un contrat illicite et usuraire
: il a lieu lorsque l'une des parties donne en jouissance jun fond qui
rapporte des fruits, et l'autre partie l'usage de l'argent (?) ; mais il
faut se conformer au ch. ?, defeudis.
CLXXXIV. Remarquez 1-20 que le monopole est prohibé lorsqu'il
est exercé des deux manières sui-vantes, savoir: i° lorsqu'un
marchand empêche l'importation des autres marchandises dans le pays,
afin de vendreseulles siennes au détriment des habi-tants ; 20 lorsqu'une
ou plusieurs personnes achètent toutes les marchandises pour les
revendre au-dessus du prix le plus élevé auquel elles pourraient
être ven-dues sur le marché, s'il n'y avait pas s de monopole.
Du, reste^i WJÇjpu ^ifi^spçrs^nnf^ch^ent les
(1) Lib. III. n. 8x3. (a) Ibid. Vers. nota. (3) Vid. Salm. c,5. n.
176 et 916,
l66
INSTRUCTION PRATIQUE
marchandises qui restent après que les habitants ont suffisamment
fait leur provision, pour les revendre à un bénéfice
modéré, ce n'est là qu'un achat bien licite, comme
le disent avec raison Lugo, Mal, Less, et Holz. ; et de tels commerçants
ne pécheraient pas contre la justice ni contre la charité
lors même qu'ils revendraient au maximum du prix de la mar-chandise,
pourvu toutefois qu'ils n'aient pas engagé les autres marchands
àvendreàun prix plus élevé (1). D'où
il résulte que, s'ils se liguaient entre eux pour ne .pas vendre
au-dessous du maximum, il faut bien admettre avfic Less., Viv., Holz.,
Mol., Bon., Salm. et autres ( contre l'opinion de Tourn., Spor., etc. ),
qu'ils ne pécheraient pas contre la justice ; mais il n'en est pas
moins vrai qu'ils pécheraient gravement contre la charité,
cemrne l'admettent tous les au-teurs. Par la même raison, ils ne
pécheraient pas non plus contre la justice lors même qu'ils
n'obser-veraient pas la convention faite de ne vendre qu'au prix le plus
élevé, parce qu'un pacte de cette nature étant illicite
et contraire à la charité n'engendre pas d'obligation, ainsi
que cela résulte du texte reg. jur. 69, in 6, où il est dit
: « In multis promissis fi-» dein non expedit servare (2).
»
CLXXXV. Mais lorsque quelques marchands se sont réunis pour
faire un monopole illicite et vendre au-dessus du maximum, est-il permis
aux autres de vendre au même prix? L!affirmative est soutenue par
les Salm., par Bon., Med. et autres, qui disent que c'est alors ce prix
qui est devenu le plus commun et fait lecoursactuel;maisjenepuisaccéder
àcetteopinion
(1) Lib. UI. n. 816.
(a) N. 817.
POUR LES CONFESSEURS.
l6i
déjà réfutée par Reb., Tap., Dicast. et
Conc, parce qu'un tel cours qui a pris naissance par une illéga-lité
est toujours illégal. Et on ne doit pas regarder comme une juste
estimation celle qui ne sVst for-mée que par injustice (1).
CLXXXVI. Remarquez i3° à l'égard du vice de la chose,
qu'il peut tenir à la substance, ou à la quan-tité,
ou à la qualité. Si le vice tient à la substance le
contrat est nul ou du moins le trompeur doit ré-parer le dommage
causé, lors même qu'il se serait fait donner l'excédant
de la juste valeur'de la chose (2). Ici, il faut remarquer que lors même
que la chose est de meilleure qualilé que celles qu'on vend ordinai-rement,
elle peut, sauf injustice, être vendue au prix ordinaire quoique
mêlée avec d'autres choses d'une qualité inférieure,
comme, par exemple, du vin mêlé avec de l'eau, pourvu que
l'acheteur ne prenne pas ce vin dans l'intention de le conserver, parce
qu'é-tant mêlé avec de l'eau il se corromprait facilement.
On en dit de même pour les pharmaciens qui vendent une drogue pour
une autre en la donnant à meilleur marché, pourvu que celle
qu'ils substituent soit, sans aucun doute, aussi utile que l'autre et que
le prix soit diminué; voir So to, Lugo et les théologiens
de Salamanque-(5). Voici comment s'exprime à cet égard saint
Antonîn : « Cum aliqui sophisticant ea » quae vendunt,
ut se servent indemnes, et cum àli-«quo lucro congruo, quia
si venderent puras res, «emptores non vellent dare justum pretium,
quia » alii vendunt alia sic mixta minori pretio ; videntur
(1) Lib. ??. ?. 617. V. sed. hic.
(a) ?. 819.
(5) Lib. III. ?. 820. dub. ?. etn/822.
l68
INSTRUCTION PRATIQUA
«posse exeusari dummodo non fiantmixturœ, quae uneceant corporibus
in his quœ venduntur in ci-» bum et potum, et praecipue in medicinalibus
(1). » Cela est aussi confirmé par saint Thomas, qui dit :
« Cum usus rei est conveniens emptpri, si venditor » prqpter,
huiusmodi vitium subtrahet quantum opor-» tet de pretio, non tenetur
ad manifestandum vi-» tium (2)·
Ci'XXX-Yitî.Çjie vice., tient à la quantité,
il y a encore lieu à indemniser la personne trompée ; mais
lorsque la taxe est injuste ou que le prix est tombé à un
taux illégal par suite du monopole exercé par les acheteurs,
on peut admettre avec Lugo, Laym., Cast.jSalm., etc., qu'il est permis
au vendeur de se servir d'une mesure plus petite, de manière à
faire le pair du prix légal, mais seulement du minimum de ce prix
(?).
CLXXXVIII. Enfin, si le vice tient à la qualité, il faut
faire une distinction. Lorsque le vice est pa-tent, le vendeur n'est pas
obligé d'en faire la décla-ration et le contrat n'en est
pas moins valable pourvu qu'il ne soit pas averti que l'acheteur ignore
ce vice ; et pourvu encore que la qualité ne devienne pas elle-même
substance, comme, par exemple, si l'a-chetéur avait bien expliqué
qu'il ne voulait la chose qu'avec eette qualité. Mais^si le vice
est caché, il n'y a pas de doute que le vendeur ne soit tenu de
le déclarer, à moins qu'il ait déclaré vendre,
comme on dit vulgairement, tel que se trouve le sac, ou comme (sans cette
protestation) on le pratique dans les
(1) S. Ant. p. 2. lit. 1. C. 17. § 4.
(2) S. Thom. 2. 2. q. 77. a. 2. (3j Lib. ??. ?. 822.
POUR LES CONFESSEURS.
jgg
foires ; en remarquant cependant que dans ce cas la chose ne peut être
vendue à un prix plus élevé que celui qu'elle vaudrait
si le vice caché était connu (1).
CLXXXIX. Qn demande ensuite si quelqu'un peut vendre une chose au prix
courant lorsqu'il est instruit que dans peu de temps elle diminuera de
valeur. Il est probable qu'il le peut, comme le disent (contre l'opinion
de quelques auteurs) Cajet., Less., Sot,, Cast., Tourn.,Salm.,ainsi queSt.
Thomas, qui dit : e Venditor, qui vendit rem secundum pre-» tium
quod invenit, non videtur contra justitiam fa-»cere, si quod futurum
est, non exponat(2). » La raison est que dans une vente il ne s'agit
pas du prix futur, mais, au contraire, du prix actuel de la mar-chandise
; lequel prix doit être fixé, non pas d'après les notions
particulières que peut avoir l'un des contractants , mais d'après
l'estimation générale et actuelle. (De même il estjpermis
également d'acheter les marchandises au prix courant, quoique l'on
soit ainsi instruit par quelque voie particulière queleur valeur
doit augmenter dans peude temps).D'après l'opinion de Less., Bon.,
Tourn., Ronc, Guni. et les Salm., celui qui vend de cette manière
ne pèche même pas contre la charité , à moins
que l'acheteur ne doive par suite être jeté dans une grave
nécessité, ou bien encore si, lorsqu'il pouvait vendre la
chose à unepersonne qui voulait la consommer sur-le-champ, il a
préféré la vendre à une autre qui veut la gar-der.
Remarquez cependant que cela ne s'applique qu'au cas où la diminution
ou l'augmentation du
(1) Lib. III. ?. 8a5.
(») a. a. q. 77. a. 3. ad. 4·
Ì7O
INSTRUCTION PRATIQUE
prix n'est connu que de l'un des contractants en particulier; car,
dès l'instant où le bruit de ce chan-gement est devenu public,
le prix commun aussitôt a varié (1).
CXC. Remarquez i4° que celui à qui l'on con-fie une chose
pour la vendre, même en lui fixant un prix, ne peut pas garder le
surplus s'il l'a ven-due plus cher, lors même qu'il l'aurait vendue
dans •an lieu plus éloigné et qu'il lui aurait coûté
plus de peine ; à moins cependant i°qu'ïl y ait apporté
des soins extraordinaires, 20 que leur valeur égale le profit qu'il
a fait; qu'il ait amélioré la chose; 3° que le profit
soit peu considérable ; 4° <ïu u y ait conven-tion tacite
de ne rendre que le prix fixé, comme, par exemple, lorsque le maître
ne lui aurait pas as-signé de salaire; 5" qu'après s'être
donné du mou-vement pour trouver des acheteurs,le courtier s'en
soit chargé au prix qu'il a pu en trouver et la revendre ensuite
avec bénéfice. Il faut réciproque-ment décider
la même chose à l'égard de celui qui a reçu
commission d'acheter quelque chose (2). Les tailleurs, qui cherchent à
acheter des habits, ne peuvent en retirer plus du prix qu'ils en ont payé,
à moins qu'ils les aient achetés de quelque personne qui,
à cause d'une amitié particulière ou parce qu'elle
a l'habitude de fréquenter leur boutique, les leur laissent au-dessous
du prix ordinaire (?).
CXCI. Remarquez i5° qu'une chose qui a été vendue
"à deux personnes, devient la propriété de celui auquel
elle a été livrée après qu'il en a payé
(1) Lib. ??. n. 834.
(2) N. 8a5. (?) ?. 8a6.
POUR LES CONFESSEURS.
171
Je prix, ou que le vendeur a suivi sa bonne foi, comme il a été
dit au n. 168. Mais si cet acheteur était de mauvaise foi et qu'il
sût que la chose avait déjà été vendue
à un autre, il serait obligé de la rendre au premier acheteur
(suivant l'opinion de presque tous les docteurs),mais il n'y est obligé
que lorsque le jugement a été rendu : à moins i°
qu'il ait engagé le vendeur à lui vendre pour la seconde
fois ; 20 que le premier acheteur soit un établisse-ment religieux,
un mineur ou une communauté; 3° que ce soit un donataire, car
le donataire est obligé de rendre la chose à l'acheteur,
s'il la réclame dans l'année. Voir la 1. 1. ff. Fraud, etc.
(1).
CXCII.Remarquezi 6° que lors quela chose vendue est déterminée,
comme telle maison, tel tonneau, si elle vient à périr, elle
pérît pour l'acheteur pourvu toutefois que le vendeur n'ait
pas été mis en demeure de la consigner. Mais s'il ne s'agit
pas d'une chose déterminée, comme, par exemple, dix têtes
d'un tel troupeau, ou si elle n'est déterminée que par rapport
à la mesure, comme ce tonneau de vin à tant le baril : si
cette chose périt avant la tradition ou le mesurage, elle périt
pour le compte du ven-deur, à moins que ce soit par sa propre faute
que l'acheteur ne se soit pas mis ert possession de la chose, ou que le
mesurage n'ait pas été fait. Voir la loi Lector, ff. de Peric.
Mais l'augmentation ou la diminution de la chose elle-même est pour
le compte de l'acheteur, comme le disent Lessius, Bouac., les Salm. (2).
Lorsque la chose a été Consignée, elle est aux risques
et périls de l'acheteur quoiqu'il n'en ait
(1) Lib. ??. n. 837.
(2) N. 8a8.
INSTRUCTION PRATIQUE
pas encore payé le prix et qu'il n'ait pas donné sa foi,
comme nous l'avons dit plus haut, au n. 170.
§ III. Du commerce.
19?. A qui le commerce est-il défendu, et quand y a-t-il faute
grave de s'y livrer? Si un clerc fait le commerce par l'intermédiaire
d'autrui ou pour le profit d'autrui.
194. Acheter des troupeaux pour trouver un emploi
aux pâturages que l'on possède, etc.
195. Vendre à un prix plus élevé pour acheter
à un prix moindre.—Acheter les laines, etc., s'il y a nécessité.
196. Si un clerc peut remplir les emplois de tu-teur, d'agent
d'affaires, etc.
CXCIII. Le caractère constitutif du négoce, c'est l'achat
des marchandises pour les revendre sans leur avoir fait subir aucun changement.
Les religieux, les clercs ordonnés in sacris, ne peuvent s'y livrer
sans commettre une faute grave. Il n'en est pas de même des minores
lorsqu'ils ne sont pas investis d'un bénéfice, comme le disent
les docteurs, d'après le canon Placuit 3. c. 21. q. 10(1). Par conséquent
il y a péché grave de la part d'un clerc ou d'un reli-gieux,
lorsqu'il fait habituellement le commerce, encore qu'il le fasse sans scandale,
ni sur une ma-tière grave ou honteuse, cotnme le disent Lugo, Lessius,
les Salmant. et autres (contre l'opinion de quelques auteurs) (3),Quoique
ce soit avec proba-bilité qu'on l'excuse de péché
mortel lorsqu'il a fait
(1) Lib. III. ?. 85?. (a) Vers, non peccas.]
FOUR LES CONFESSEURS.
seulement deux ou trois opérations de commerce , et sur une
matière légère, ou bien une seule opé-ration
sur une matière grave, comme cela résulte du chap. fin. de
vita et hon. cler. où il est dit : non insist, etc., Laym.,Cast.,Salm.,
etc., le déclarant non coupable s'il a fait le commerce par l'intermédiaire
d'un autre, pourvu toutefois, d'après Lugo et les Salm., que
sa participation aux opérations ne fût pas très considérable
(1). Mais Benoît XIV, dans sa bulle Apostolicœ, de l'année
174», a déclaré que le clerc qui met son argent dans
le commerce sub alieno laici nomine, comme il l'a déclaré
dans son traité de Synodo dioecesana (2), par les mains d'un autre,
en-court les mêmes peines que s'il faisait le commerce par lui-même.
Cela résulte de la même bull* où le pape ajoute que
les biens acquis par le clerc de cette manière-là, alieno
nomine, sont soumis à la peine de la spoliation. Plus loin, il a
déclaré que si le né-goce avait déjà
été commencé par des laïques, et qu'il dût
en résulter une perte si le clerc n'en pour-suivait pas les opérations,
dans ce cas le clerc peut le continuer, mais seulement pendant quelque
temps et par l'intermédiaire d'un laïque, et en obtenant
une dispense de la sainte Eglise. On remarque de plus que Clément
XIII, dans sa bulle Cum primum, du 27 septembre 1769, a de nouveau défendu
ex-pressément aux clercs de faire le commerce par l'in-termédiaire
d'autrui. Il a en outre, ordonné que lors même que l'intérêt
de la famille l'exigerait, ils ne pourraient se livrer au commerce qu'avec
une dis-pense émanée du Saint-Siège, s'ils se trouvaient
en
(1) N. 83a.
(a) Bened. XIV. de Syno. t. II. 1. & c ?. ?. :4et S.
INSTfiuCTION PRATIQUE
Italie, ou seulement d'un évêque s'ils se trouvaient hors
de l'Italie. Il faut dire de plus que lorsqu'on sera dans le doute pour
savoir si un contrat com-mercial est ou non permis aux clercs, «
expeditissima »erit via scribendi ad S. C. consilii, quas dubia »
decernet. »
CXGIV. Il n'est pas défendu à un clerc d'acheter des
troupeaux, dans le but de les faire paître dans ses pâturages,
et de les vendre ensuite, ou d'en vendre les agneaux, la laine, etet Cela
est admis par Less., Lugo , Laym., Rone, Cast, et Salmant. Mais nous dirons
qu'il ne peut pas acheter ces troupeaux pour les faire paître dans
les pâturages d'autrui qu'il aurait pris à ferme, le concile
de Calcédoine ayant prohibé le louage des dépaissances
d'autrui pour en vendre les fruits. ( ch. Pervenit, 21. q. 3 ) Mais est-il
permis aux clercs d'acheter les dépais-sances d'autrui pour engraisser
des animaux qu'ils ont et les revendre ensuite ? Laymann et Spor. sont
pour la négative ; mais les Salmant. et Sylv. le per-mettent , pourvu
que cela ne cause pas île scandale. Cette dernière opinion
me paraît d'autant plus rai-sonnable , que cela n'est prohibé
par aucun texte de loi (1).
CXCV. Il est permis aux clercs" de vendre plus cher pour acheter meilleur
marché ; de même aussi, il leur est permis de vendre la chose
à un prix plus élevé que celui qu'elle leur a coûté,
non à quelqu'un qui veuille la revendre , mais à quelqu'un
qui veuille la garder. Il leur est permis de plus d'acheter une plus grande
quantité de choses, pour empêcher que les provisions ne manquent
à la maison, et de ven-
(1) lib. III. n. 855.
POUR LES CONFESSEURS.
dre ensuite ee qu'ils ont eu de reste. Ils toeuvent en-core acheter
des couleurs et de la laine pour en faire des tableaux et des habits, et
les vendre ensuite, pourvu toutefois qu'ils ne fassent pas fi briquer ces
objets par d'autres ouvriers par eux loue s (V. Lugo, Salman.,Molina (i),
etc.). De plus, le clerc peut foire réellement le commerce lorsqu'il
n'a pas d'au-tre moyen de subsistance pour lui ni pour les siens
comme il est dit au ch. Multa ne cler.
?vel
non; et
pour cela, il suffit qu'il y ait nécessité grave pour
tenir convenablement leur rang, comme le disent avec plus de raison Cast.,
Spor., Lacroix, Masz. et la plupart des autres, contre Laym., qui ne le
per-met que lorsque cela est nécessaire au soutien de la vie (2).
CXCVI. Il est de plus défendu aux cl< res de gérer
les emplois de tuteurs, tabellions, ou tout autre emploi public qui devrait
les astreiudre à rendre compte un jour de leur administration. Si
un clerc a rempli quelqu'une décos charges, il ne peitt entrer dans
les ordres tant qu'il n'a pas rendu : es comptes, ou au moins qu'il n'a
pas donné des ga: 'anties ; ceci ne doit pas être appliqué
à ceux qui ont administré des établissements religieux,
des biens d s pupilles ou de veuves. Il est, en outre, défendu ai
? clercs de faire l'office d'agents d'affaires pour le compte des séculiers.
Cependant ceci ne s'applique qu'au cas (comme il est dit au ch. Sednec,
4 > ne cler. vel non) où, pour s'acquitter de cette tâche,
le clerc négli-gerait ses fonctions ecclésiastiques. «Si
e uis ab eccle-«siastico (ce sont les expressions du texte) fiat
minis-
(?) Lib. V. ?. 836. (a) K. 8?7.
I76
INSTRUCTION PRATIQUE
» terio alienus pro eo quod, officio clericali neglecto, »
fluctibus saeculi se imniergit; » dans ce cas, le clerc encourrait
la suspension de ses fonctions ecclésias-tiques, mais ferendœ sententiœ
(1).
§ II. De la rente,.
197. Définition de la rente.
198. Conditions exigées par Nicolas V.
199. Conditions exigées par Pie V.
200. Si la rente personnelle est licite.
20J. Si la rente qui est rachetable de la part de l'acheteur est licite.
202. Si la rente s'éteint avec le fonds.
203, Si la rente peut être constituée au moyen d'une
somme qui était due auparavant.
CXCVII. Il y a contrat de rente ou de revenus annuels, lorsque, pour
une somme* déterminée (par exemple 100 ducats),on retire
en échange une pen-sion annuelle de tant pour cent, sur un fonds
en rapport. Ce contrat est très valable, pourvu qu'il réunisse
les conditions voulues; en effet, c'est une véritable achat au moyen
duquel celui qui donne l'argent achète non pas la pension, mais
le droit de percevoir une partie des fruits du fonds qui la doit (2).
CXCVIII.' A l'égard des conditions nécessaires pour la
validité de ce contrat, elles sont énumérées
dans deux bulles, l'une de Nicolas V, l'autre de saint Pie V. La bulle
de Nicolas, qui est en vigueur dans le royaume de Naples, exige i°
que la conven-
(1) N. 838.
(2) N. 839.
POUR LES CONFESSEURS.
\??
tion des paities ait spécialement pour objet une chose déterminée,
et généralement toutes les autres; 2° qu'on y ajoute
la convention de revendre pour le même prix; 5° que la pension
n'excède pas la va-leur de ?? ?. 0/0(1).
CXCIX. Celle de saint Pie exige en outre 1 ° que la rente soit
établie sur un immeuble qui produise des fruits ; il suffit du reste
qu'il s'agisse d'un service perpétuel ou de quelque autre rente
; 20 que le prix soit en argent comptant; 5° qu'on ne fasse pas la
convention de payer la pension par avance ; 4° ??? le vendeur ne.s'oblige
pas à substituer un autre fonds à celui qui fournit la rente,
si celui-là vient à périr ; 5P que le vendeur ne s'qte
pas la faculté d'alié-ner le fonds obligé; 6°
qu'il ne s'engage pas à payer une somme à titre de peine
ou d'intérêts pour le lucre cessant dans le cas de non-paiement
de la rente ; 70 qu'on ne crée pas un nouveau capital de rente avec
les arrérages non payés ; 8e que l'acheteur ne puisse pas
réclamer à son gré le prix qu'il a payé, et
que le vendeur puisse toujours racheter la rente ; cependant c'est un des
principes du droit commun, que celui qui admet <jue Ton peut permettre
de constituer une rente irrachetatle ; 90 que la rente ne soit pas vendue
à un autre pour une prix moindre ou plus élevé, à
moins qu'elle fût devenue non li-quide (2) ; mais à l'égard
de cette bulle de saint Pie, la plupart dès auteurs font observer
qu'elle n'a pas été reçue dans plusieurs royaumes,
savoir dans les Deux-Siciles, l'Espagne, la Germanie, la France, la Flandre
; etle continuateur de Toumely assure qu'elle
(1) Lib. III. n. 845
(a)'?. 846 et 847.
?. XXIV.
Ì78
tStSTftUMIBN PRATIQUE
tià p⣠tnêhlè été misé
eh vigueur àRòtìie. Et 'dâlîs les lieux
où elle a été reçue, on s'accorde a là
re-garder cómtne non obligatoire (1).
CG. On demande i°si la rente pèrsohiieÌÌé
est licite. Quelques auteurs prétendent qife non; mais l'affirmative
fest généralement adoptée avec plus de raison p*ar
un grand nombre de docteurs très graves, qui considèrent
la question "dans ses rap'ports avec le droit naturel. Tels sont Solo,
Lessius, Tournely, Merb., Hab., Wig., Lem., Cast., Ronca.', etc. Mais pour
cela, il faiii que dé niême que, dans une rente réelle,
on dcliète le droit de' percevoir les fruits ptoduite par le fonds,
de'mêrhe aussi, dans la rente personnelle, l'on' acheté les
fruits 8é l'iiiclùstrie où le travail de quelqu'un
qui -esè déjà instruit daris cet erriploî, borhrhfe',
pa"r exemple, le travail d'un peintre, 8'irri courtier, etc. (2). Noù^avoris
dit, sous le rap-port da dróil naturel, parce que, suivant la bulle
de èdirtt Pie, qile nous avoris rapportée', il faut néces-sairement
( flans les endroits où eile a été reçue) que
la rente soît Constituée sur un immeuble.
CCI. On"demande 20 si le contrat est valjble lorqù'c-n corivîeni
que la rente poufia être rachetée et le contrat dissous, non
seulement par lé vendeur, tuais* èhcore par l'acheteur. Quelques
uns, tels que Less1., Laym., C^st., etc., disent qu'il est valable jfoartù1
qu'on idi observe les duères conditions que titius avons expliquées
plus hàui (nk 182) pour le pacte de rachat des fonds ; niais d'autres,
tels que Sot. Cova., les Salai., etc., sont pdur la nullité d'un
tel contrat. C'esè ceitè dernière opinion, sains aucun
(t) Lib. HI. n. 84g. (s) ?. 84?.
????? tÈS CONEESSEUKs.
7q
dó'uie, qui doit kre préférée ·
cSr |)êrlonnë ne con-lëste qu'on ne risque beaucoup ?*?
laisser glis'sêr dans un ièl contrat uhe intërllioh Û'u's'ûre
\ii.
CCII. dn aema'ndè 3° si, 'dim le sens déjà,
bulle de saint Pie, la rente doit s'éteindre, lorsque l'im-mèublè
périt sans là faute du vendeur. LesSalfh., Soto, Cast., etc.,
professent la négative, disant que dans ce cas le vendeur est tenu
de substituer un au-tre imrrleublé I celui qui a pÊri ; maii
qu'ïnt à nò'us, nous Optons potir l'opinion contraire.,
soutenue par Less., Lugo, Rone, etc., parla raison que, dans le contrat
de rente,r l'obligation né porte pas principa-lement sur la
personne, et accessoirement sur la chose, comme lé supposent lès
partisans de l'opinion contraire; mais c'est sur la chose seulement que
porte l'obligation, puisque ce sont lèâ fruits produits par
elle qui sont l'objet du ooîïtràt; et par cons'ëq'uent,ài
le iond est détruit J il né resté plus d'obligation';
par cette raison, nous regardons comme valide le pa"cte qui oblige le vendeur
à payer ièà arrérages ( |»otìrvu
que dans ce cas ils soient diminués) meule s'èffilant les
années stériles, tandis qu'il y a n'imite quàfid on
convient que la rente sera servie intimé après la perte du
fonds (2).
CCIII. On demande 4° si on peut constituer tìfle rente en
donnant en1 paiement une somrîië due antérieurement par
le vendeur. Suivant la bulle de saint Pie, on ne le peut pis, parce que
cette bulle Cxige comme condition que l'argent soit compté au moment
de la formation du contrat. Mais sous le rapport du droit naturel, on pouïrait
valider un
(1) Lib. ??. n. 843. (a) N..847-
?8?
INSTRUCTION PRATIQUE
contrat de cette nature, suivant Nav., Less., Val., etc., par la raison
que la constitution de rente peut être considérée comme
tout autre achat, et, comme telle, être faite au moyen d'une somme
due (1).
§ V. Du change, du louage, de Vemphytéose, du fief f du
libelle.
2?4· Du change, et de ses diverses espèces. 2?5. Celui
qui reçoit de la fausse monnaie.
206. Du louage.
207. Du successeur du locataire.
208. En cas de stérilité, etc.
209. Si l'on peut affermer le droit de demander l'aumône.·
210. Si un émissaire est envoyé dans le même
endroit par deux personnes différentes.
211. Si l'on doit payer le gage au serviteur in-firme.
212. De l'emphytéose. ai5. Du fief.
214· Du libelle.
CCIV. Le change est un contrat par lequel un changeur échange
à une personne de l'argent qu'elle lui apporte, moyennant un bénéfice
convenu. Il y a quatre sortes de changes : le change manuel, par lettres,
réel, et sec. Le change minuto (ou bien manuel ) est licite : c'est
celui qui a lieu lorsque l'on donne des pièces de monnaie plus grandes
pour des plus petites; le change par lettres est également per-mis
, il a lieu lorsque le changeuT reçoit de l'argent pour le rendre
ensuite dans un autre endroit. Quant
(i) Lib. HI, n. 7
VOV& LES CONFESSKUltS.
?8\
à ce paiement, il doit être fait, d'après ce qu'a
établi saint Pie V, dans le terme fixé. Il y a change reel,
lorsqu'au contraire c'est le changeur qui donne l'ar-gent pour le recevoir
ensuite de la personne qui veut échanger, par intermédiaire
de son agent d'affaires. Cette sorte de change est également licite.
Enfin le change secco (ou change simulé, comme on l'appelle encore
aujourd'hui ) est celui dans lequel on suppose -un autre lieu pour le paiement,
et on exige, en at· tendant, un bénéfice; celui-là
est illicite sans aucun doute(1).On peutassimiler à cette espèce
de chenge celui qui est appelé colla ricorsa, lequel, en somme (pour
le dire brièvement), revient à un change avec double fiction(2).
Le change appelé franca-furtense est licite , pourvu que le courtier
ait bien réellement souffert par suite du lucre cessant (?).
CCV. 11 faut remarquer que, si l'on a reçu par hasard une pièce
de monnaie fausse, on ne peut pas la mettre en circulation, et si on l'y
a mise en la don-nant à un autre, on est obligé (suivant
l'opinion la plus vraie) à en faire la restitution ; néanmoins
La-croix et Spor. disent que cela ne doit s'entendre que de la monnaie
dont la matière est falsifiée, mais non quand il n'y a de
faux que l'empreinte (4).
CCVI. Le louage est un contrat par lequel un indi-vidu donne à
un autre, pour un prix convenu, l'u-sage de sa chose ou de sa personne.
A l'égard de ce contrat, il faut remarquer 1" que si la chose cesse
dètre propre à cet usage, celui qui l'a louée n'est
(0 Lib. III. ?. 85?. ad. 853. (9) ?. 854-V. Qua*·
(3) Ibid.
(4) ?. 855.
J §2
INSTRUCTION PRATIQUA
pas tenu de payer plus long-temps la pension qu'il a promise (i). Il
faut remarquer s° que les dépenses ordinaires et de peu de valeur
sont à la charge du locataire ; mais les dépenses extraordinaires
(pourvu qu'elles soient utiles) sont à la charge 4" maître
de la chose louée j lorsque le locataire s'est engagé a faire
des amélioration? à la chose, il est censé s'être
engagé à les faire à ses propres frais (2). Il faut
remarquer 3 que si la chose périt, le locataire n'a aucpne obli
gation, à moins que le locateur ne prouve que la chose à
péri par sa faute. Il faut remarquer 4° que Je locateur ne peut
réclamer la chose avan{; le terme, excepté dans quatre cas
: î.si le locataire laisse pas-ser deux années sans payer
la rente; 2. si la chose devient nécessaire au locateur: 5. si le
fonds ne peut pas être répare différemment ; 4·
sj Ie locataire en abuse (comme, par exemple, s'il loue sa maison a des
filles de mauvaise viej| (5).
GCyiI. H faut remarquer 5° que le successeur ^ ti-tre universel
" c*esf-à-dire l'héritier,' ne peut pas rompre le bail passé
par le testateur; mais un suc-cesseur à titre particulier, tel qu'un
légataire-q'ona-taire ou acheteur, peut le rompre, conformément
à I. &mplorem,ci\. de Légat.; quelques auteurs font une
exception pour le cas où le champ se trouverait
, i· r ,i foi.
* *, tl if I
t 'Ji.lllfi ,
11 1
lapoureousemej mais je ne comprends pas comment il peut y avoir lieu
à une telle réserve, tandis que Ja loi (comme cela est exprimé
dans la loi Quifundum, 25, ff. de locate où il est parle du locataire),
donne déjà au locataire une action contre l'héritier
pour
(1) N. 857. ad. a.
(a) N. 865.
(3) N. 857 et 858.
POPR LES CONFESSEURS.
réclamer les dommages qu'il peut avoir soufferts (?).
CCY11I. Il faut remarquer 6° que le dommage qui résulte
de la stérilité, en considérant l'objet en lui-même,
est à la charge du, locataire; mais sous le rapport de l'équité,
lorsque le locataire n'est pas en faute et que la stérilité
est considérable (comme, par exemple, si pendant plusieurs années
le fonds n'avait pas rapporté seulement la moitié de la rente
(voyez l'opinion d,e Lesssius, Lugo, etc·), on de-vrait lui faire
une remise sur le prix, comme il est dit au cl». Propter de Ipcat.,
et de ta loi P., c. eod. tit., et si la chose n'a absolument rien, produit,
il ?? d.evra rien (3).
CCIX. Pn demande 1° s'il est permis d'affermer le droit de mendier.
Quelques auteurs disent que oui; mais nous préférons l'opinion
contraire, qui est celle d;e la plupart des auteurs, excepté dans
le cas où le pauvre ne pourrait pas aller lui-inême de-mander
l'aumône (3).
ÇCX. lorsqu'un messager est envoyé dans un même
lieu pa_r. deux personnes, peut-il recevoir un double salaire ? Quant aux
voituriers, il est certain, qu'ils le peuvent : c'est l'usage. Quant aux
autres émissaires, il est probable qu'ils peuvent, comme dit le
V. Conc, exiger seulement la moitié; mais il est probable aussi,
suivant l'opinion de Less., Cast., iaym. et Lacroix, qu'ils peuvent exiger
de chacun des mandants le salaire tout entier, car ce n'est que par accident
que leur travail se trouve profiter à tous les deux (4).
(?) ?. 858. (a) ?. 86?. (S) N. 861. (4) N. 86a.
l84
INSTRUCTION PRATIQUE
CCXI. On demande 2° si le maître doit payer le salaire à
un domestique qu'il avait loué pour une' année, et qui est
tombé malade au bout de quelques mois. Nous déciderons cette
question négativement, comme le font la plupart des auteurs ( contre
un petit nombre qui professent l'opinion contraire), à moins qu'on
puisse employer-ce domestique-quel-que part à tout autre usage.
Nous disons avec Lugo, Az. et autres, que le maître n'est pas même
tenu de supporter les frais de la maladie du domestique, à moins
que celui-ci né se trouve dans une grave nécessité
(1 .
CCXII. IiecontratAppéléemphythéose, a lieu lors-qu'un
propriétaire donne à un autre un de ses im-meubles pour toujours
ou tout au moins pour dix ans, afin qu'il y fasse des améliorations;
ainsi ce propriétaire se réserve la propriété
directe, tandis <Jue la propriété utile passe &\'emphjteute
à la charge par lui de payer le cens annuel. Si le paiement de ce
cens reste plus de trois ans interrompu, le maî-tre peat reprendre
sa chose si elle appartient à des séculiers; ce serait deux
ans seulement si elle apparte-nait à l'Église. Le cens dont
nous avons fait men-tion doit être payé, lors même que
le fonds périrait en partie (mais non pas s'il périssait
tout entier), et lors même qu'il se perdrait une grande quantité
de fruits; à moins que ce ne fût une pension considé-rable,
comme, par exemple, si elle était égale à la. valeur
des fruits, parce qu'alors elle devrait équita-blement être
diminuée (2).
CCXIII. Le fief est semblable à l'emphythéose ; il
(1) N. 864.
(a) M. 865 et 866.
POUR LES CONFESSEURS.
consiste dans la concession d'un fonds noble ou roturier que l'on abandonne
à un vassal; ce qui l'oblige à rendre foi et hommage personnel
à celui qui a la propriété directe de ce fonds (1).
CCXIV. Le libelle a lieu lorsque Yemphyteute ou feudataire cède
à un tiers," aux mêmes conditions qu'il l'a reçu, le
même fonds qui lui a été cédé : ce contrat
est encore nommé sous-emphyteuse, et sous-inféodation (2).
§ IX. De la gageure et du jeu.
215. De la gageure, ou bien scomessa; est-elle licite?
216. Si l'une des parties a dit qu'ellfe tenait le fait, pour certain.
217..Du jeu auquel se livrent les fils de famille et les religieux.
218. Des fraudes.
219. Des jeux prohibés ; s'ils sont défendus aux
laïques, et si le gagnant peut garder le gain.
220. Si le perdant est tenu de payer, et s'il a juré qu'il paierait
et ne réclamerait pas.
221. Des jeux défendus aux clercs.
222. Aux religieux. 225. Aux évêques.
CCXV. La gageure (appelée vulgairement scom-messa ) est un contrat
qui se forme lorsque deux personnes , en discussion sur l'accomplissement
d'un fait, parient une somme qui doit être attribuée à
celle qui aura dit vrai. Ces paris ne sont pas pro-
(1) N. 867. (a) N. 868.
l86
INSTRUCTION PRATIQUA
hibés (au moins sous des peines graves), s'ils ne sont pas faits
avec des conditions criminelles; comme, par exemple, si plusieurs personnes
parient à qui boira le plus de vin, ou si une personne s'engageait
à en prendre autant si elle ne commet pas tel péché,
.parce que ce pari l'expose à commettre plus volon-tiers, ce péché.
lien serait différemment si on met-tait ppur condition du pari que
l'une des parties ne commettra pas tel péché (1).
CGVI. Pourqueces paris puissent être valables, il faut que leur
prix égale la valeur d|es chances qu'offre l'accomplissement de
l'événement qui en est la condi-tion . Mais si un des parieurs
préte,nd êjre certain cje la vérité d'une chose,
et que malgré cela l'autre veuille parier, quelques auteurs prétendent
que le premjer peut garder le prix qu'il gagne de cette manière,,
parce que l'autre a sacrjfié §pn fjroiç. R|ais nous
adoptons l'opinion contraire, qui est celle de Lugo, de Lacroix , dans
le cas où le second croyait égale-ment son assertion bien
fondée, parce qu'alors il n'avait pas Vintention de sacrifier son
droit. C'est seulement par 1 erreur ou il était cfu il a ete engage
à parier, et cette erreur ne donne pas à Pauvre par-tie le
droit de garder le prix. ÏI en serait différem-ment si le second
parieur ne croyait pas son opinion certaine, et s'il avait voulu réellement
sacrifier son droit (2).
CC&YII. A. l'égard du jeu, il faut distinguer le jeu en
général du jeu qui est prohibé. En ce qui concerne
le jeu considéré sous un point de vue eé-neral, on
remarque, i° que 1 argent gagne à un fils
(1) N. 869 et 870. (a) N. 879.
POUR LES CONFESSEURS.
l§y
Je famille doit lai être restitué à moins que cet
ar-gent ne provienne de son pécule castrense, ou quasi castrense
,· ou bien que les parents y aient donné leur consentement,
ou que la somme soit de peu d'im-portance , ou bien encore que ce soient
des écono-mies faites par le fils sur les aliments que son père
lui fournit. Il en est de même pour les femmes et }es religieux.
Ces personnes, au contraire , ne sont pas tenues de restituer l'argent
qu'eljes ont gagné au jeu (a rnoins que ce soit une somme très
petite), lors même que les autres joueurs savaient que ces personnes-là,
éçapt soumises à la puissance d'autrpi, ri'^vaienj;
pas de biens qui leur appartinssent en pro-pre (1). Ici on demande si les
religieux qui ont ob-tenu de, Jeur supérieur la permission générale
de dépenser leur pécule comme ils }'enten<jraient, pè-pheraien^
coptre le vœu 4e pauvreté s'ils perdaient cet argenj au jeu, et
si ceux qui l'on| gagné sont tenus de le Jeiir restituer. Plusieurs
aufeurs, tels gue Suar., Lugo, t^urta^., Jleb., £al., Mé<\.,
etc.,' d^ient que çe^e question doit être résolue négaù-vemen|,
soit parce que, dans ce cas, le supérieur a ]evé l'pbstacje
provena.pt d,u vœu d,e pauvreté, soit du moins parce qpe la permission
est présumée émaner de Ja corporation dont il fait
partie, laquelle décide ljbjementa l'égard de la substance,
quoi-qu'elle ne soit pas libre à l'égard du mod.e. Néan-moins
nous partageons l'opinion de Nav., J^essius , |janchez, §aliç.,
qui disent que la solution contraire e^| préférable, parce
qu'une telle permission n'est pas censée accordée par les
prélats, qui (lors même
(?) ?, 875 et 876.
l88
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'ils le voudraient) ne pourraient pas l'accorder, parce qu'ils ne
sont pas propriétaires, mais simples administrateurs des biens du
monastère (i).
CCXVIII. On remarque i° que si le joueur use de moyens frauduleux,
illégaux, soit en marquant les cartes, soit en changeant les points,
etc., alors il doit restituer ce qu'il a gagné, et de plus la valeur
des chances que l'autre partie avait de gagner. Nous avons dit moyens frauduleux,
illégaux, parce qu'on peut, sans commettre de péché,
employer les ruses que permettent la règle et l'usage du jeu, comme,
par exemple, de regarder les cartes que l'autre joueur laisse voir par
sa négligence, ou de recon-naître les cartes qui se font connaître
par elles-mêmes au moyen de quelque signe extérieur qui y
a été fait par hasard (2),
CGXIX. En ce qui concerne le jeu prohibé, il faut remarquer
que tous les jeux de hasard (qui sont ap-pelés ludus alearum), tels
que les jeux de dés, de bassette, deprimiera et autres semblables,
sont dé-fendus par la loi canonique, c. 1. Episcopus, dist.55. et
cap. Clerici, devita et honest, ainsi que par la loi civile L. alearum
de rel.sumpt. fun. Il faut aussi, en cette matière, distinguer les
laïques des ecclésias-tiques. En ce qui concerne les laïques,
les doc-teurs s'accordent à dire que ce genre de jeux ne leur est
pas défendu sous peine de faute grave, parce que le canon Episcopus
que nous avons cité, est tombé en désuétude
; et les lois civiles sont, à cet égard, purement pénales,
lorsque, pour punir les
(1) Lib. ?. ?. 873. et lib. IV. ?. 3?.
(a) Lib. III. u. 882. cum Cuniliati c. 8. § 3. u. 3.
POUR LES CONFESSEURS.
gagnants, elles accordent aux perdants une action pour réclamer
ce qu'ils out perdu (1) ; d'où l'on peut tirer la conséquence
que le gagnant peut gar-der le gain jusqu'à ce qu'il soit condamné
par un jugement à en faire la restitution, comme cela se fait ordinairement
(2), et cela alors même qu'il n'aurait joué qu'avec l'intention
de réclamer s'il ve-nait à perdre (?).
CCXX. D'un autre côté, l'opinion la plus géné-rale
et la mieux fondée, qui est celle de Sanch.,Less., Lug., Viv., Nav.,
Toi., Laym., Mol., Salm.,etc. (contre Sair., Ban. et autres), veut que
celui qui perd ne soit pas tenu de payer; car, puisque la loi lui donne
le droit de réclamer ce qu'il aurait payé, elle lui donne
en même temps le droit de ne pas payer, comme cela résulte
du texte de la loi Credi-tori, ch. depactis, où il est dit : «
Frustra solvitur » quod statim repetendum est (4). » Mais,
s'il veut transiger, il peut très bien le faire, lors même
que son intention ne serait pas de faire des poursuites judiciaires (5)
et lors même qu'il aurait renoncé au bénéfice
de la loi; parce que, la loi étant faite pour l'utilité commune,
une telle renonciation est nulle; pourvu (car on doit admettre une restriction
pour ce cas) que l'une et l'autre des parties ne se soient pas engagées
par serment, non seulement à payer, mais encore à ne pas
réclamer la somme payée ; par la raison que la loi défend
bien de jouer à ces jeux-là, mais non pas de payer une somme
qu'on a per-
(1) Lib. III. n. 886. (a) ?. 887. ' ' (3) ?. 889.
(4) ?. 89?.
(5) ?. 8<,4·
Î$Ô
INSTRUCTION PRATIQUE
due; et par consequent hi l'un iiì l'autre Ses joueurs ne peuvent
demander la résolution dé leiirserment,' lors même
qu'il eh résulterait dû prejudice pOur iiri tiers (i). Si
celui qui a perdu a dëjâ payé le gaghatit; il ne peut
en opérer lui-niême la còmpèrisàiió'n
sans avoir recours au' juge, alors même qu'il ri'â pas fait
le serment de ne pas réclàtîier (2). Qùîih't
à ce qu'il faut décider lorsque le perdant demandé
la récisioh du contrat, et cfù'e l'autre s'^ refuse, voyez
ce qui est dit au fi. 125.
CCXXÎ. En òe qui concerne les ecclésiastiques,
il est hors dé doute que les clerk's1 ( oH èntètid
par clercs ceux qui sont dans les ordres sacrés ou ceux qui ont
des bénéfices^ car â l'égard dèsàtifrès'
bette fcrohibitioH est tombée ëri désuétude )
cbrriruettëiit tïtl péché "mortel lorsqu'ils jouent
aux jeux dé pur hasard dont nous venons de parler, lorsqu'ils s'^
li-vrent fréquemment et pendant un long· espace de temps;
quoiqu'ils ne jouent que pett d'argent, parce que ce genre de jeux est
tout-à-fàit iricdhvefiâht pour dès gens engagés
dans l'état ecclésiastique. Il eti sera de inême s'ils
jouent rarement, riiais dess'om-riies tréà considérables,
du moins lorsqu'il doit en résulter un grand sujet de scandale pour
les autres, comme le veut Laym. (3). Nous avons1 dit aux feux de pur hasard
( di mera fortuna )', parce que les jeux de cartes , -dans lesquels
le sirccès1 dépend autant de l'adresse que du hasard ( comme,
par exemple, .ceux qu'on appelle Yombre, le tressette, et autres semblables),
ces jeux-là ne sont pas défen-
(1) Lib. ??. n. 891.
fa) N. 893.
(3) N. 8c,5. an. 898.
POUR EES CONFESSEURS,
fm
diis aux clefbi sbui péifie Hé fa'ute grave, au moins
Suivant l'usage journalier qu'on en fait, et pourvu qu'ils1 ne produisent
jjas1 un' grand scandale ou" qu'il n'y ait pa's dans certain's endroits
de prohibition spéciale à cet égard (1).
CCXXII. £tì ce qui concerne les religieux, si ce Sont
des religiëdx réformés ott soumis à une disci-pline
sévère, tels que les ca'p'ucins, jésuites, alcania-Hns
et autres otdres semblables, ils commettent un péché grave
en jbuant, même une seule fois, à des jeux de bisard, et les
Supérieurs qui leur en donne-raient la pfei-missiori comnlèttraÎént
aussi, à plus Forte raison, un péché grave.
Je pense qu'on doit en dire de même de ceux qui jouent à des
jeux de cartes, même pour passer leur temps ( comme il a été
dit plus haut ), du" moins s'ils y jouent pendant plusieurs fois, soit
à cause du scandale qui en résulte pour les séculiers,
soit à causé de l'abus que la tolérance de ces jeuxintroduiraïti
Ëh te qui concerne les religieux moins austères, la plupart
des docteurs disent âleUr égard, comttie à l'égard
des clercs, qu'ils pèchent en jouant à des jeux de pur hasard,
soit lorsqu'ils y jouent très Souvent, soit lorsqu'ils jouent des
som-mes considérables, et de plus ils commettent un pé-fché
contre le vœu de pauvreté, comme il sera dit au ch. xm, n. l5 et
14. Mais ldrsque le jeu est seule-ment pour passer le temps (comme nous
l'avons ex-pliqué plus haut ),Pèyr.,Bic., les Salm. etc.,
disent qu'il n'y a pas de faute grave ; il n'y a même pas de faute
légère ( suivant les mêmes auteurs ) lorsqu'ils ne
se sont livrés à ces jeux que pour prendre un mo-ment de
récréation; mais, quant à moi, une telleré-
i) Lib. I1L n· 890·
39 s4
INSTRUCTION PRATIQUE
création me paraît toujours inconvenante pour des hommes
engage's dans l'état religieux, et je ne crois pas qu'elle puisse
être justifiée par l'usage (1).
CCXXIII. Si unévêquejoueàdes jeux de hasard, même
une sewle fois, ou s'il joue souvent aux cartes comme passe-temps, je ne
comprends pas comment il pourrait être excusé d'un scandale
grave. J'en dis de même pour un prélat qui assisterait fréquem-ment
et de propos délibéré à des jeux de hasard.
Mais, à l'égard des clercs et religieux qui y assiste-raient,
la plupart des auteufs pensent qu'ils ne com-mettraient pas une faute grave,
quoique cela leur soit défendu parles canons (ch. Clerici, de vita
et honest.) (2).
§ X. Du contrat de société.
224. Conditions de validité de ce contrat.
225. On doit d'abord déduire le capital pour le donner
à celui qui l'a fourni.
226. Gomment doit se faire la répartition
des profits et des pertes.
227. Les risques de la chose mise en société sont
pour le compte du maître de cette chose.
228. De la'société des animaux à cheptel,
et de la convention de suppléer les, têtes qui viendront à
manquer.
229. Des trois contrats.
2??. Si le fils qui fait le commerce avec l'argent du père,
etc.
251. De la société entre frères.
(1) Lib. III. n. gui. (a)-N. 902 et 903.
POUR LES CONFESSEURS.
202. De combien de manières la société prend fin.
CCXXIV. Le contrat de société se forme lorsque deux personnes
mettent en commun soit leur ar-gent, soit leur industrie, pour partager
le profit ou la perte qui pourront en résulter. Les conditions du
contrat de société sont au nombre de tpois : i° qu'il
ait un objet honnête; 2° qu'il y ait égalité entre
l'estimation de l'industrie de l'un et l'avantage que doit procurer l'argent
de l'autre ; 3° que chacun des associés supporte la portion
des pertes et des frais qui résulteront des opérations de
la société. Mais si la mise apportée par l'un d'eux
vient à-périr, elle périt pour celui qui l'a apportée
(?).
CCXXV. De tout cela on tire la conséquence , i° que lorsque
la mise de l'un consiste en argent et celle de l'autre en son industrie,
lors de la disso-lution de la société on doit restituer la
mise à celui qui l'a apportée, et partager ce qui reste entre
les sociétaires, comme l'enseignent avec raison Lugo, Bon.,Cab.,
Petr.,etc., quoi qu'en disent les autres, par la raison que, de même
que la perte de la chose est pour le compte de celui qui l'a apportée,
de même aussi lorsqu'elle existe en nature, elle doit lui être
rendue. Et l'on a beau dire que puisque l'un apporte de l'argent et l'autre
une industrie, il est juste, lors de la dissolution, de diviser l'avoir
de la société entre les deux associés ; parce qu'on
peut répondre à cela que la mise de celui qui a apporté
.de l'argent ne consiste pas précisément dans les es-pèces
, mais dans l'utilité que ces espèces peuvent rocureràla
société. Et, par conséquent,de même
(i) Lib. III. n. QO4· ad 906.
T. xxiv,
*?
que lorsque la misé de liin des à'ssofeiés corniste
en un navire, ce navire ne cesse certainement pas de lui appartenir, et
ce n'est que l'usage de ce navire qui appartient à la société
; de même aussi lorsque l'un des sociétaires apporte une somme
d'argent, elle ne cesse pas pour cela de lui appartenir (? ).
CCXXVI. La deuxième conséquence qu'on en tire, c'est
qu'avant de procéder au partage, l'on doit (comme nous l'avons dit
plus haut), commencer par déduire le capital au profit de celui
qui 'en a la propriété ; après cela on doit partager
le profit dans la proportion de la valeur de l'industrie apportée
par l'un de5 associés, et de la valeur non pas de la somme (comme
le ditCàbass.), mais de l'utilité de la somme apportée
par un autre : cette estimation doit être faite suivant l'estimation
commune de l'intérêt que peut rapporter l'argent mis dans
le co'mirfefce,'comme le disent avec raison Cast., Ronr. et Reb. MaÏs
fl peut arriver quelquefois que la valeur de l'industrie dépasse
tellement la valeur de L'usage de l'argent, que cela justifie la convention
(qui par elîe-mé"n1e serait illégale ), partant que
la somme elle - même sera partagée. Remarquez d'un auïre
côté, que dans cer-tains endroits , l'industrie est a'une
valeur si faible, par suite des usages du pays ou du grand ndm'bre des
ouvriers, que l'on peut attribuer en partie à celui qui apporte
s'b'n industrie les riscfùes de la somme apportée par l'autre,
quoique Ces risques soient par leur nature à la charge du maître
(fe).
CCXXVII. La troisième conséquence qu'on en tire, c'est
que le dommage éprouvé par la chose,
(?) ?. 906.
(a) lib. III. ». 907. q. a.
POUR LES CONFESSEURS.
est tout entier à la charge de son maître, lors même
que la chose périt avant que l'autre associé ait em-ployé
son industrie (car c'est à tort que quelques auteurs font une exception
pour ce cas) parce que, comme nous l'avons déjà dit plusieurs
fois, ce n'est pas la chose qui fait partie de la société,
mais seu-lement son usage ; d'où il suit que si la chose périt
dès le commencement de la société, le maître
de cette chose n'aura apporté aucun usage de son ar-gent, et par
suite, l'autre associé ne sera pas tenu à faire l'apport
de son industrie (i).
CCXXVIU. La quatrième conséquence qu'on en tire e'est
que, lorsqu'on met des animaux dans une société, il n'est
pas permis de faire la convention ap-pelée cheptel, par laquelle
on devrait, à la disso-lution de la société, rendre
les mêmes animaux ou d'autres de la même valeur, quoiqu'ils
lussent marts ou détériorés, et de ne .partager que
ce qui reste-rait après. Un tel contrat serait illégal, parce
que les risques de l'apport doivent rester (comme nous l'a-vons dit) rpour
le compte du maître et non pour l'autre associé. Nous dirons
aussi avec Tamb., Silv., Ang., etc. ( contre Az., Ronc.,.etc. ), qu'on
ne .peut pas par une convention obliger le gardien d'un troupeau a suppléer
les têtes qui viennent à man-quer, par les petits qui naissent,
parce que les agneaux sont considérés comme fruits «de
la -société et doivent être partagés, non ;pas
substitués. Par conséquent une telle convention serait désavanta-geuse
pour le berger (2). Mais ^d'un autre côté, il
(l) Lib. I[[. n. 907. q. 3. (a) N. 9og.;q. 2.
] <jG
IXsTRLCTION PRATIQUE
faut remarquer que lorsqu'il vient à manquer des lètes
de bétail, c'est au berger à prouver qu'elles n'ont pas péri
par sa faute·, comme le font observer Pontas, Tournely, etc., d'après
la loi Cum duobus hvt § damna ff. pro socio (1).
CCXXIX. La grande question que l'on fait après cela, question
long-temps agitée parmi les docteur?, c'est celle de savoir si l'on
"peut, au moyen de trois contrats, c'est-à-dire de IA société,
de l'assurance de la chose et de l'assurance du gain, exiger un profil
certain sans le charger des risques de la chose , et cela en cédant
à l'autre sociétaire la plus grande partie du profit qu'on
pourrait retirer sans lesdites assurances. Plusieurs docteurs tels que
Merb., Conc, Hab., Tourn., etc., sont pour la négative, parce que,
disent-ils, dans l'hypothèse où la mise et le profit seraient
également assurés, ce contrat ne se-rait plus un contrat
de société, puisque la société expose par elle-même
aux risques de la perte de la chose ; ce contrat deviendrait un prêt,
et par suite on ne pourrait pas en retirer un bénéfice. Mais
la plupart des autres, tels que Nav., Toi., Less., Lug.jLaym., Cast., Bon.,Esco.
,Spor. ,Mol., Maj., Silve., P. Nav., Arm., Med. , Lop., Maid., Az. , Ronc,
Salm., etc., admettent cela par la rai-son que ces trois contrats sont
valables s'ils sont faits séparément, et qu'ils peuvent même
l'être lors-qu'ils sont faits en même temps ; et ces auteurs
ajoutent qu'il n'est pas exact de dire qu'un contrat fait de cette manière
se change en prêt, parce que, dans le prêt celui qui
reçoit l'argent peut
(i) N. 909 V, Hic oper*.
POUR LES CONFESSEURS.
Jq7
le dépenser comme bon lui semble, tandis que dans ]e contrat
de société il doit nécessairement, l'em-ployer au
commerce pour lequel la société a été établie,
ce qui change essentiellement la nature du prêt. Remarquez encore
que ces trois contrats ont été approuvés et reconnus
valables par les facultés théologiques de Cologne, de Trêves,
de Sala-manque, de Mayence et par plusieurs autres, comme cela est relaté
dans un ouvrage édité à Paris en 1745 > sous le titre
de Exam, théolog. sur la so-ciété du prêt à
rente. On a beau opposer la bulle de Sixte-Quint^Detestabiles) où
il réprouve toute "es-pèce de contrat de société
par lequel sors ipsa ?seu capitale semper salvum sit ; Car Less., et les
Salm., répondent que cela ne s'applique qu'au cas où un associé
en obligerait un autre à contracter de cette manière ; mais
Lugo et Ronc. disent d'une ma-nière absolue que cela s'applique
à tout contrat de société qui a pour effet de garantir
la chose, mais non pas lorsqu'on y a ajouté les deux autres con-trats
d'assurance. Lugo rapporte, d'après Filliu. et Comit., que les rédacteurs
de la bulle, les cardinaux de Tolède et San-Serino, répondirent
qu'ils l'avaient entendu de cette manière lorsqu'ils furent interro-gés
à ce sujet. Lugo rapporte encore, à l'appui de cette opinion,
une décision de la cour de Rome, de 1?02, conservée par Chérubin.
Ronc. elles Salm. assurent que ce contrat se fait aujourd'hui partout de
cette manière; et que quant à la bulle, ou elle n'a pas été
reçue, ou elle n'a été reçue qu'avec cette
inter-prétation. Du reste , nous avouons qu'un contrat de cette
sorte risque beaucoup de favoriser l'usure, et par conséquent on
fera mieux de s'en abstenir. Du moins il conviendra de ne jamais le former
sans
lt)8
INSTRUCTION PRATIQUE
avoir préalablement demandé conseil aux théolo-giens
(i).
t
CCXXX. On demande, en second lien, si un fils qui fait le commerce
avec l'argent de son père, peut retenir sur le gain la portion correspondante
à] son Jtravail. Ronc. dit qu'il le peut toutes les fois que c'est
en son propre nom qu'il fait le commerce, parce qu'alors, dit-il, le fils
pourrait, déduction faite des aliments que le père lui fournit,
retenir pour lui autant que son père serait obligé de donner
à un autre pour le salaire d'un semblable travail. Mais nous ne
pouvons adopter cette (Jpinion quel ? que probable qu'elle soit, car l'opinion
con-traire, professée par Lug., Mol., Silv., et autres, est tout
aussi probable. Cette opinion veut que le fils qui travaille dans la maison
de son père ne puisse pas retenir le salaire qui devrait être
payé à un étranger pour le même travail, pourvu,
toute-fois , que ce travail n'ait pas été excessif (2) ;
d'où il résulte que la compensation exigeant un droit cer-tain
et liquide , le fils n'a pas le droit de la faire sans le consentement
de son père (?).
GCXXX1. Il faut remarquer que les frères ne sont point censés
avoir fait un contrat de société s'ils ne se mettent pas
tous ensemble dans le commerce, ou bien si, lorsqu'il n'y en a qu'un seul
qui s'occupe de commerce, les autres ne mettent pas en com-mun les biens
qui leur appartiennent en propre ou-tre ceux qu'ils possèdent ensemble
Par conséquent, si un des frères apporte ses biens propres,
et les
?) ?. 908. vers, haec est.
{i) N. 544 et 488. ad. v. ni. in fin.
(5) N. *;o.
POUR LES CONFBSSStJIXS.
autres seulement les biens communs, celui-là peut opérer
la compensation de la valeur supérieure de ses biens ou de son travail
dans les opérations com-merciales. Si l'un des frères, se
trouvant éloigné dçs autres, fait le commerce dans
l'intérêt de tous, et avec les biens communs, la so.ç^é
est censée, djU-rer autant que les autres frçrgg n^çn
ilemanpeiU pas la dissolution (1).
C(ppmi. %marq^ez, e,ns dernier U(e,u, tj^e la société
peut prendre fin, de pl^sieursi in.ïinièr.e.s, i° qua(i4
l'pp^r^fiqn'.commerci^le e.st terminée oiile terrpe acçjvé;
3° p,ar l'effet du cpnsen^eroent msu|uel des associés, même
lorsqu'il est tacite : par exemple, l'un d'eujç. commence, à
f^ire, let çoqimerce §ey|s, et PQurson prppre compte. ?\\ resfp,
aupmi de,| a§sg-ciés ne peut, malgré les autres, dissgpdje
le;contrat, à moins qu/il soit appelé à s'occuper
diibifsnpu|)]ic, ou que l'autre associé gère ma^ les affajreg
cpnimu-ne,s, pu bien n'observe pas }es conventjops; 3" par la mort de l'un
des associés pour que la socjeté, ije passe pas ^ux héritiers,
à moins qu'il y ait une af-faire commencée qu'il faille poursuivre,
pu que les héritiers se soient engagés par serment envers
}e défunt, à continuer la société. Copimp le
ditBomtc; 4° par l'exil de l'un des associés, ou lorsque l'un
d eux embrasse l'état ecclpsiastjque; 5° lorsqxie pun des associés
ne peut plus s'acquitter des fopctions qui lui étaient confiées,
soit ????- c^use «^'ipiir-mité, soit pour tout autre motif
indispensable; 6°loisqi}e l'argent mis en niasse vient à être
perc|ji. 70 si les choses subissent des moilificatipns tejleg que
(1) N. 907. q. 5.
200
INSTRUCTION PRATIQUE
la société ne puisse plus atteindre le but en vue du-quel
elle avait été formée (1).
§ XI. De l'assurance, fidé jussion ou caution, gage, hypothèque,
tutelle et testament.
a55. De l'assurance.
254· Du cautionnement.
s35. Du gage et de l'hypothèque.
236. Delatutelleet curatelle, si les pupilles peuvent s'obliger et
faire des donations.
937. Des testaments; s'il est certain par la vo lonté du testateur,
etc.; s'il n'y a qu'un seul témoi-gnage, etc.
238. Du legs en faveur des vierges. Si les disposi-tions de dernière
volonté peuvent être changées par le pape ou l'évêque.
93g. De l'obligation de laisser ses biens aux fils , frères
ou autres parents pauvres.
240. Dans quels cas un père peut déshériter ses
enfants.
CCXXXIII. i°Ily a contrat d'assurance, lorsque, moyennant un prix
convenable, on prend sur soi les risques d'une chose, en s'obligeant à
la payer si elle vieni à se perdre. Il faut, pour la validité
de ce con-trat, que l'événement soit incertain, ou tout au
moins que les contractants ignorent l'issue au mo-ment de la formation
du contrat (2).
CCXXXIV. 20 II y a cautionnement ou bien assu-rance (vulgairement appelée
pliggieria ), lorsque quelqu'un s'engage à payer pour le débiteur,
si ce-lui-ci ne peut pas remplir ses engagements : d'où il
(1) N. 907. q. 6. ta) N. 91».
POUR Ï.ES CONFESSEURS^
901
suit que l'on doit faire d'abord la distraction des biens du débiteur
principal, et que, lorsque l'obli-gation de celui-ci est éteinte,
celle de la caution Test également. Il est toujours permis à
celui qui se porte caution, de se faire payer, lors même qu'il ne
s'ex-pose à aucun danger. C'est l'opinion de la plupart des docteurs
qui pensent qu'une telle charge mérite une rétribution; cette
opinion est combattue par quelques autres auteurs (1).
CCXXXV. 5° Le gage et {'hypothèque sont sem-blables. En
effet, le gage a lieu lorsqu'un débiteur donne un objet mobilier
à son créancier. Uhypo-thèque, lorsque le débiteur
donne un immeuble en garantie de la dette, le créancier ne peut
se servir de la chose donnée en gage, sans le consentement du débiteur,
et s'il s'en sert il doit tenir compte au débiteur du produit qu'il
en a retiré. Du reste, on peut très bien présumer
ce consentement, lors-que l'usage n'est pas préjudiciable au maître,
sui-vant ce que dit le P. Viv.; par exemple, si c'était un livre
qui eut été donné en gage, ou autre chose semblable.
Les choses sacrées, comme les calices, chasubles, etc., ne peuvent
pas être données en gage, excepté pour secourir les
pauvres ou les Egli-ses. De plus, il faut remarquer que le contrat appelé
antichryseos (vulgairement a godere), est illicite, comme il a été
dit au n° 182,s'il n'est pas corro-boré par un juste titre résultant
du dommage ou de lucre cessant, ou de la peine conventionnelle (s).
CCXXXVI. 4°La tutelle etla curatelle sontcertains quasi-contrats
en vertu desquels les tuteurs et cura-
(0 N. 912.
(a) N. gi5. ad. 9»fi.
S09
INSTBUCTION PRÀTiQtJi
teurs s'obligent à prendre soin des pupilles et mineurs qui
leur sont confies, tant sous le rapport de leur éducation que sous
le rapport de l'administration de leurs biens. 11 faut remarquer que les
pupilles etmi-neurs ne peuvent obliger leurs, biens (excepté les
bienscastrenses ou quasi-caslrenses) si ce sont des im-meubles, sans l'autorisatiqn
du juge, et sans l'auto-risation de leur tuteur ou curateur si ce sont
des meubles. Cependant il y a incertitude sur la question de savoir si
l'qbligation qu'ils ont contractée sur ces biens, a pour eux la
valeur d'une obligation natu-relle. Nous partageons l'opinion de kess.,
Lug· > Nav., Sancti,, Laym., Cast., Salm. et autres (contre Bonac.)
qui sqnt pour l'affirmative toutes les fois que le pupille qui a contraptg
cette obligation est dans un âge rapproché de la puberté,
et que ce n'est pas envers son tuteur ou son curateur , niais envers un
étranger, qu'il l'a contractée. Cela est exprimé aussi
dins la loi Nwatia ff. de novat. où il est dit que les créanciers
doivent être payés : «dummodo obli-gatio civilitur teneat
aut naturaliter, ut putà ( re-marquez ceci ) si pupillus sine auctoritate
tutoris promiserat. » En outre, il faut remarquer que les pupilles
et mineurs ne peuvent pas faire de dona-tions, excepté pour les
petites choses que les autres jeunes gens de leur rang donnent ordinairement.
Mais les donataires ue sont pas tenus de restituer les choses qu'ils ont
reçues jusqu'à ce qu'ils y soient contraints par un jugement,
parce que de telles do-nations sont valables selon le droit naturel (1).
CCXXXVJI. 5° Sur la matière des testaments, les mo-ralistes
on t écrit des traités fort volumineux; mais pour
(?) ?. 917 et 918.
POUR LES CONFESSEURS,
moi, comme ce sont des choses qui ont plus de rapport à la justice
extérieure qu'à la conscience, je m'abs-tiendrai de traiter
ici ce sujet, me référant à ce que j'en ai dit dans
mon Traité de morale (1). Je rappor-terai ici seulement quelques
considérations qui sont importantes pour les confesseurs. Elles
sont i° que lorsque l'héritier connaît d'une manière
certaine la volonté du testateur à l'égard des dispositions,
en faveur des établissements de piété, il doit s'y
con-former, lors même qu'elle ne serait attestée par au-cune
preuve extérieure. Mais lorsqu'il n'en est pas certain, il n'est
pas obligé d'en croire le témoignage d'une seule personne
qui le lui attesterait, quelque digne de foi que cette personne puisse
être. Il faut donc au moins deux témoins : comme cela résulte
du chap. Relatum de testam, et chap. licet, de lestib. où il est
dit: « Nulla tamen est causa, quse unius testimonio, quamvis legitimo
, terminatur. » Cette règle est certaine an dire de Laym.,
et elle est gé-néralement observée partout (a).
CCXXXVIII. On remarque 2° que le legs laissé à une
fille vierge doit lui être délivré lors même
qu'elle serait corrompue, si sa corruption n'est pas publique (?). On remarque
5° que le legs laissé aux filles indigènes ne doit pas
être donné à celles qui ne sont nées dans ce
lieu que par l'effet du hasard, comme le disent Sanchez, Trullench et Barbosa,
d'a-près le P. Ferrari (4). On remarque 4° que }es dis-positions
pieuses sont les seules qui puissent être
(i) Cap. iv.
(a) W. 9*4-
(5) N. 93o. dab. 6.
(4) Ferr. Bibl. v. Civitas, ?. ??.
204
INSTRUCTION PRATIQUE
changées par le pape lorsqu'il existe pour cela un justemotif;
comme il est dit dans la Clem. Quia conti. de domib. relig. Mais elles
ne peuvent pas être chan-gées par les évêques
(suivant Laym., Bon.,Salm. et Trull. ). Ils le pourront seulement lorsqu'il
sur-viendra une cause de telle nature que si elle eût été
connue du testateur, il aurait, sans aucun doute, disposé d'une
autre manière; alors seulement ils pour-ront interpréter
sa volonté, et appliquer le legs à un autre usage pieux (1).
CCXXXIX. On remarque 4° q»e les testateurs sont, en conscience,
dans l'obligation grave de laisser leurs biens, non pas seulement à
leurs héri-tiers nécessaires, tels que les fils, les pères
et mères, les aïeux et aïeules, lesquels ont droità
une réserve; mais encore à leurs frères et sœurs,
quand ils se trouvent dans la nécessité extrême ou
grave ; sui-vant l'opinion de Lug., Bonac., Silv., Dian., etc., contre
celle des Salm. La raison en est que nous sommes obligés, de notre
vivant, d'aimer et de se-courir nos frères pauvres , et cela sous
peine de commettre une faute grave, comme l'enseignent Laym., Silv., Ang.,
ainsi que les Salm. à cause du lien du sang qui nous unit à
eux, au point que lors-qu'on offense son frère on commet deux péchés
, l'un contre la justice, et l'autre contre la piété. Or,
si cette obligation de piété nous est imposée pendant
la vie, pourquoi ne l'aurions-nous pas au moment de la mort ? J'ai dit
: dans une nécessité extrême ou grave; parce que si,
quoiqne pauvres, les frères ne sont pas réduits à
l'état de nécessité, il n'y aurait plus d'obligation
grave, mais seulement une obliga-
(0 N. 981.
l'OUR LUS CONFESSEURS.
2O5
tion légère. IL en serait de même s'il s'agissait
de parents à un degré plus éloigné qui se trouvassent
dans l'extrême misère ( ? ).
CCXL. On remarque 5° que le père peut dés-hériter
ses fils lorsqu'il a pour cela de justes motifs , comme, par exemple, s'ils
avaient tenté de le tuer, ou de l'empêcher de tester, ou s'ils
lui avaient fait quel-que autre injure grave ; mais il ne pourrait pas
les déshériter par la seule raison qu'ils auraient con-tracté
un mariage qui blesserait les convenances. D'un autre côté
il est probable que le père peut dés-hériter une fille
mineure de vingt-cinq ans qui mène-raitunevie scandaleuse (2). Mais,
dans tous les cas, les fils ou filles ne peuvent être déshérités
qu'autant qu'ils ont de quoi vivre, parce que s'ils étaient dans
la pauvreté, le père serait tenu de leur fournir les aliments
nécessaires pour leur subsistance (3).
CHAPITRE X.
ItHMÀRQUE SUB LE HUITIÈME
PRÉCEPTE.
POINT UNIQUE.
Du jugement téméraire, de l'affrout et de
la detraction.
§ I. Du jugement téméraire.
1. Du jugement et du soupçon téméraires.
2. Avertissements pour la pratique.
(1) N. 946. (0 N. 948. (a) ?. 34«·
INSTRUCTION PRATIQUE
I. Le jugement téméraire constitue un péché
grave lorsque nous jugeons, sans fondement, que notre prochain s'est certainement
rendu coupable d'un mal grave, d'où l'on tire la conséquence
que la plu-part de ces jugements sont exempts du péché mor-tel,
soit parce qu'on les regarde comme suffisamment fondés, soit parce
que cène sont pas des jugements, mais de simples soupçons,
qui, bien que téméraires, ne peuvent pas constituer un péché
mortel; à moins qu'ils ne portent sur une personne qui jouit d'une
bonne réputation, et qu'on ne l'ait soupçonnée d'une
faute très grave : par exemple, d'athéisme, d'héré-sie,
d'inceste, commis avec ses père ou mère, ou au-tres fautes
semblables (1 ).
II. Le confesseur duit, à cet égard, faire atten-tion
que beaucoup de personnes peu éclairées s'ac-cusent d'avoir
fait des jugements téméraires, et il doit s'attacher à
leur faire comprendre i° que lors-qu'elles'ont eu des motifs plausibles
pour juger un fait dans ce sens, il n'y a pas jugement téméraire;
au contraire, c'est ttn jugemertt"bienifondé et exempt de faute
j 2° que le plus souvent ce ne sont pas des ju-gements , mais de simples
soupçons, que les pères de famille et les maîtres sont
même quelquefois obli-gés à former pour empêcher
quelque mauvaise ac-tion : -pa-r exemple, afin que les serviteurs ne ·?
aient pas, ou afin que les fils ne pèchent pas par des rela-tions
coupables et autres choses semblables; seule-ment il faut les avertir qu'on
ne doit pas communi-quer de pareils soupçùnsàd'autres
personnes lorsqu'il n'y a pas nécessité.
(2) N. 963. ad. 96 5.
iÎS CONFESSEURS.
§ II. Réparation.
5. Du mépris et de la réparation de l'honneur.
4. Causes qui peuvent affranchir de cette répa-ration.
5. Lorsgu'onouvreetqu'onlitleslettres adressées à
autrui.
6. A qui cela est-il permis?
III. Le mépris est aussi un péché grave,
lorsqu'il porte une atteinte grave à l'honneur du prochain ; par
conséquent, si l'affront a été public, on doit faire
à l'offensé une réparation publique en lui demandant
pardon , ou du moins en lui rendant quelque marque d'honneur particulière
en présence de toutes les personnes qui ont été témoins
de l'affront, ou au moins en faisant savoir a ces peVsonnes-là que
la ré-paration d'honneur a eu 'lieu(i). Si l'affront a été
secret, la satisfaction doit être secrète aussi, suivant l'opinion
la plus vraie et'laplus générale , ijui est celle deLess.,'Lugo,Spor.,B.onc.,sairit
A.nton.,Salm., etc., Contre celle de Laym., et Molina (2).
IV. 11 faut néanmoins faire exception 1°
lorsque l'on peut'raisonnablement présumer, d'après la con-duite
de l'offensé qu'il a déjà pardonné l'injure,
ou qu'il ne veut pas de dette satisfaction ^publique pour épargner
sa timidité, et, dans ce crts, il suffira de faire en soite
de rêparerson honneur d'une autre manière ; 20 lorsque Ton
a des raisons de craindre que cette satisfaction ne rallume l'animosité;
3° lors-que l'offensé en a déjà tiré vengeance,
ou bien si
(1) N. 966 et n. 984. ad. 988, a N. 685.
2?8
INSTRUCTION PRATIQUE
l'offenseur en a déjà été puni publiquement
par un jugement qui lui a infligé une peine suffisante pour réparer
l'honneur de l'offensé (1).
V. On ferait également un affront au prochain si on ouvrait
ses lettres pour les lire, à moins qu'on eût le consentement
exprès ou présumé de celui qui les a écrites,
ou de celui à qui elles sont adressées, comme le disent Lugo,
Bus., Esco., Nav., etc. ; ce serait même un péché grave
si la matière était grave, ou si on avait lieu de croire
que le prochain doit le regarder comme un grave affront et s'en tenir pour
gravementoffensé ; néanmoins, si dans ce cas la ma-tière
était légère par sa nature, celui qui lirait la let-tre
ne pécherait pas contre la justice, mais contre la charité,
comme le dit très bien Lacroix, d'accord avec la plupart des auteurs,
contre Bonacina (2).
VI. Au contraire, il est permis i° aux
princes d'ouvrir les lettres de leurs ennemis et même de toute personne
qui, en temps de guerre, écrit d'un pays ennemi ; la même
permission est donnée aux minis-tres publics, lorsqu'ils le jugent
nécessaire pour le bien commun; 2e les prélats religieux
peuvent ouvrir les lettres de leurs sujets, lorsque tel est l'usage éta-bli,
ou au moins lorsqu'ils soupçonnent avec fonde-ment que ces lettres
peuvent contenir quelque chose de mauvais ; mais ils n'ont pas ce droit
pour les let-tres qui viennent des supérieurs plus élevés
ou qui leur sont adressées ; 5° il est de plus pormis aux sim-ples
particuliers d'ouvrir les lettres de leurs envieux qui leur font éprouver
des traitements injustes, ain* que le décident Less., Lugo , Lay
m., Sanch., Nav.
(1) Lib. II. ?. 988 et 989.
(2) ? 7?. V. Ita,
POUR LES CONFESSEURS.
g0Q
Bonac, Salin, et Rone. Lugo etBusemb. accordent la même permission,
lorsqu'il s'agit d'éviter à un tiers une injure grave dont
il est menacé (1). Si quelqu'un ramasse les morceaux d'une lettre
déchirée et jetée dans un endroit public (non pas
dans un lieu caché), et si par curiosité il la lit, il ne
commet pas d'injure (pourvu qu'il ne porte pas préjudice à
l'auteur de la lettre en divulguant des secrets qui y sont contenus), parce
qu'on peut se servir comme on l'entend de toutes les choses qui sont comme
abandonnées. Voir Laym., Bus., Dian., saint Anton. , Silv., etc.
Cela a lieu lors même que le maître de la lettre l'avait dé-chirée
en très petits morceaux (suivant Lugo et Ronc.}, quoiqu'il semble
dans ce cas qu'il n'ait pas voulu abandonner au publicle contenu de la
lettre. Mais Lacroix el Reb. professent le contraire, avec plus de probabilité;
car celui qui déchire ainsi une lettre fait bien croire qu'il ne
veut pas qu'on la lise et qu'il n'a pas l'intention de céder ses
droits. Ce que nous avons dit pour les lettres.s'applique à toute
autre espèce d'écriture, parce qu'un chacun a le droit de
garder secrets ses écrits dont il ne veut pas donner communication
à d'autres personnes; comme Je disent Nav., Moli., Bus., etc. (2).
En nous occupant des contempteurs d'une manière générale,
nousdevons remarquer ici ce qui a été écrit et ordonné
par Benoît XIV dans sa constitution Sollicita, sur la prohibition
des livres, donnée le 8 juillet 1753. Ce pontife réprouve,
dans une disser-tation sommaire, l'usage détestable pratiqué
par les auteurs d'aujourd'hui qui écrivent sur des matières
(1) Lib. V. 11. 70. Lib. III. ?, 969. Circa liu, (a) Ibid. III. n.
70. v. 6, si litteras.
?. xxiv,
l4
«10
INSTRUCTIO!» PRATIQUE
de controverse, lesquels s'imaginent qu'ils paraî-traient ne
pas savoir bien défendre leur cause s'ils ne s'entre-déchiraient
pas mutuellement, et s'ils ne se hâtaient pas de condamner les opinions
de leurs adversaires avant que l'Église se soit prononcée
; et qui se plaisent à cribler leurs adversaires d'injures et de
sarcasmes, parce qu'ils ne pensent pas comme eux. Voici les termes dont
se sert Benoît XIV : «Uti-»nam vero in aspectum lucemque
hominum libri xejusmodi in hac temporum licentia et pravitate »non
elferrerentur , in quibus dissidentes auctores » mutuis se jurgiis
conviciis que proscindunt, alio-» rum opiniones nondum ab Ecclesia
damnatas cen-»sura perstringunt, adversarios eorumque scholas, »aut
coetus sugillant, etproridiculis ducunt, magno » bonorum scandalo,
haereticorum vero contemptu , » qui, digladiantibus inter se catholicis,
seque mu-»tuo lacerantibus , plane triumphant. » II ajoute
encore que, quoiqu'on ne puisse pas empêcher les querelles mondaines,
dont, suivant l'opinion de quelques uns , il résulte même
quelquefois de grands avantages ; néanmoins il veut que l'on garde,
clans ies écrits, la modération et la douceur que prescrit
la religion chrétienne. C'est pourquoi il renouvelle l'ordre déjà
donné par Innocent XI, et dit : « Quamobrem firmum sit omnibus
qui adver-»sus aliorum sententias scribunt ac disputant, id »
quod graviter ab Innocentio XI prescriptum est » in decreto edito
die 2 martii 1679 (ou ^ est dit ) : » tandem ut ab injuriosis contentionibus
doctores » aut alii quicumque in posterum abstineant, ut ca-»ritati
consulatur, idem sanctissimus in virtute si » obedientia? praecipit,
ut tam in libris quam in the-»sibus, etc., caveant ab omni
censura, et nota
POIJH LES CONFESSEURS.
ail
«necnon a quibuscumque conviens
contra eas «propositiones quae adhuc inter catholicos cuntro-,, vertuntur
; donec a sede recognitae sint, et su-,,per eis judicium
proferat!»·. » Ensuite, il donne des éloges à
saint Thomas, pour avoir parlé des opinions des
autres théologiens, de manière
à n'offenser personne, et pour avoir gardé la même
modération même en parlant des hérétiques dont
il se contente de réfuter les maximes. II ordonne, en finissant
: « in bujusmodi scriptorum licentiam » graviter censuram intendant
revîsores librorum, » eamque congregationis cardinalibus cognoseendam
» subjiciant, ut eam pro zelo suo et potestate coè'r-«
ceant. » C'est avec raison que le saint pontife or-donne
la suppression de ces sortes d'ouvrages, parce qu'au lieu de servir
à l'éclaircissement de la vérité, ils ne servent
le plus souvent qu'à faire triom-pher les hérétiques
et à scandaliser l'Église. Car ce-lui qui lit ces écrits
remplis d'outrages, d'invec-tives et de sarcasmes contre ceux qui
soutiennent des opinions opposées (et ces injures-là sont
bien plus coupables que celles qui sont foites ouver-tement ) , s'aperçoit
facilement que l'écrivain a été
poussé par Ja passion et influencé par le système·
qu'il avait conçu dans le but de confondre son adversaire;
et tout homme qui écrit avec passion parvient difficilement
à persuader,et il est rarement cru, soit parce que chacun
sait que les passions troublent la vue et empêchent de distinguer
la vé-rité, soit parce que lorsque quelqu'un a recotì-rs
à des médisances et à des injures pour défendre
sa cause, on est porté à penser qu'il n'a pas de bonnes raisons
à faire valoir, et que ce n'est que par défaut de bonnes
raisons qu'il se sert d'injures et de sar·
SIS
INaNìLCUON ??? IIQUE
rusines, afin de coiìfuntlre ainsi son adversaire, et d»;
le réduire au silence.
^ III. ? e la detraction.
?. De la detraction quand elle est coupable.
H. Du secret découvert par fraude.
»). De l'obligation de garder le secret.
«?. Si l'on peut publier un délit pour sa défense.
11, Pour conseil, pour soulagement; et si on le découvre
aune seule personne.
12. Si ce délit est public en un lieu,, etc. ??. S'il
est public en un temps, etc.
14· Si le délit est connexe.
15. Celui qui le rapporte comme comploté par d'autres.
16. Celui qui nomme quelque ordre ou monas-tère.
17. Celui qui conseille, celui qui veut médire.
18. De la réparation de l'honneur, etc.
ig. Causes qui affranchissent de cette répara-tion.
20. S'il y a obligation de réparer les calomnies avec de l'argent.
2 ? Si celui qui a été calomnié peut opérer
lui-même la compensation.
VII. La détraction de !a réputation d'autrui de-vient
un péché grave lorsque l'on accuse publique-ment son prochain
d'un crime qu'il n'a pas commis, ou même d'un crime qu'il a commis,
mais qui était resté caché et qui ne devait pas devenir
public de long-temps ; et de plus quand on fait cette révélation
dans l'intention de le déshonorer; car si elle était faite
dans quelque autre but légitime (mais seule-
ÏOL'R LES CONFESSEURS.
?) ) }
ment pour le crime vrai), par exemple, dans le but de faire corriger
le prochain, ou d'éviter un dom-mage grave pour soi ou pour tout
autre, quand il n'y a pas d'autre moyen de l'éviter, alors il est
per-mis de dénoncer le crime (excepté dans le cas où
le dommage qu'on doit causer à la personne diffa-mée dépasserait
considérablement celui que l'on veut éviter), parce que,
comme le dit saint Tho-mas (i), il n'y a réellement de dénonciation
que lorsqu'elle est faite dans le but de déprécier la répu-tation
d'autrui, mais lorsqu'elle est faite pour un bien nécessaire : *
Si verba (telles sont les paroles »du saint docteur) per quae fama
alterius diminui-»tur proferat quis propter aliquod bonum necessa-rium,
non est peccatum neque potest dici detrao-»tio (2). » Cuniliati
dit la même chose en suivant l'opinion de saint Thomas : «
Licet revelare crimen » alterius ad vitandum grave mahiin, quod ex
rari· » rate non tenemur sufferre (?). »
VIH. Ici s'élève une grande question. Peut-on, pour éviter
un dommage grave, révéler un crime ca-ché dontonaacquis
injustement la connaissance pai la violence ou la fraude ; par exemple,
en ouvrant des lettres, etc. ? 11 y a là-destus plusieurs opinions
divergentes, parmi lesquelles nous préférons celle de Lug.,
Laym., Tourn., Lacroix et Spor. ; lesquels disent qu'il n'est pas permis
de faire une telle révé-lation, parce que cette action qui
est injuste oblige celui qui la commet à restituer à son
prochain la valeur du dommage que cette action peut lui causer.
(1) 2. 2. q. 73. ar. a.
(a) Lib. III. ?. 96/|.
(3) Ciinïl. ira. j). c. 7. § 5. n. (j.
ai4
mTntcnoi»
II sera seulement permis de révéler ainsi le crime d'autrui,
lorsque Tort atlra le droit d'attaquer celle personne, même par la
violence, ou bien d'ouvrir ses lettres; comme, par exemple, dans le cas
où la révélation serait nécessaire au bien
public, ou bien si l'auteur du crime était obligé lui-même,
sous peine de faute grave, à en faire la révélation
pour réparer le dommage; ou bien s'il a etercé contre le
dénonciateur des vexations injustes, et que celui-ci ait lieu de
croire qu'en ouvrant la lettre il y trou-vera des choses qui ont un rapport
direct avec le mal dont il est menacé, ou avec celui qui menace
quelque autre innocent; car si la lettre ne contenait pas la cause directe
des vexations, et qu'il ne pût en retirer que des renseignements
indirects qui lui procureraient seulement quelque avantage, ou qui lui
feraient éviter quelque inconvénient, il ne lui est pas permis
dans ce cas d'ouvrir les lettres, parce que cela est contraire à
l'intérêt général des relations humaines, que
l'on doit préférer à l'intérêt particu-lier.
Voir Less., Laym., les Salm.k et la plupart des autres docteurs (?).
IX. Ici l'on propose une autre question qui est celle de savoir quand
est-ce que nous sommes ou non tenus de garder un secret. ? cet égard
il faut distinguer le secret naturel, du secret promis et du secret confié.
Le secret naturel a lieu lorsque nous avons eu par cas fortuit la connaissance
d'un fait caché. Le secret promis, lorsque nous nous sommes obligés
à ne pas révéler quelque chose. Enfin le se-cret confié,
lorsque quelqu'un fait à un autre la con-fidence d'un secret eu
lui défendant de le révéler.
{?) Lib. III. 696 cir Bin.
I.F.S CONFESSEURS.
5)5
Occupons-nous maintenant de l'obligation qu'impose le secret. L'obligation
de garder le secret promis doit être appréciée d'après
l'intention de celui qui a fait la promesse; mais il faut que cette intention
soit bien 'constante pour que l'obligation puisse être grave. L'obligation
du secret confié (appelé aussi rigoureux) es>t plus forte
que celle qui résulte du secret nature!. Le secret confié
peut être révélé seulement dans les cas suivants
: 1° lorsqu'on peut présumer le con-sentement de la personne
intéressée ; a° si le fait est déjà publiquement
connu. Pe plus, Azor, Lugo, Bon., Konc, Salm. et autres, disent qu'on ne
com-met pas \m péché mortel lorsqu'on communique le secret
confié à une ou deux personnes probes , quoi-que ce secret
porte sur une matière grave, pourvu qu'on ne puisse pas présumer
que celui qui a confié le secret a voulu en cacher la connaissance
spécia-lement à la personne à qui on le révèle;
3° si en gardant le secret on doit causer un mal qui retom-bera sur
le public, ou sur un innocent, ou sur la personne même qui l'a confié;
car dans ce cas vous pouvez ( et même quelquefois vous devez ) en
faire la révélation, si cette révélation suffit
pour prévenir le mal , lors même que vous vous seriez engagé
par serment à ne-pas le révéler. En outre, suivant
l'opi-nion de Solo, Nav., Lay., Less., Lugo, Bona., etc.} vous pouvez aussi
le révéler lorsqu'il s'agit d'éviter pour vous-même
un mal dont vous êtes menacé, attendu que vous avez les mêmes
droits que toute autre personne innocente, pourvu toutefois ( car il faut
faire une restriction) que la révélation ne doive pas causer
un mal général, 'et pourvu que vous ne vous soyez pas obligé
à garder le secret, quand même il devrait en résulter
pour vous quelque in-
2l6
INSTRUCTION PBÀTIQUE
convenient. Sur la question de savoir si vous pouvez le révéler
pour sauver votre vie, lorsque vous vous êtes engagé à
le garder même au péril de vos jours, on peut également
soutenir l'affirmative et la néga-tive (1).
X. On remarque i° qu'il est permis, suivant l'opi-nion de
Lugo, Carde., Tourn. etBusem., de révéler un crime
qui a été réellement commis par notre prochain, lorsque
cela es! utile ou nécessaire pour déjouer les calomnies par
lui tournées contre nous. Nous disons réellement commis,
parce que c'est toujours une faute grave d'accuser quelqu'un
d'un crime qu'il n'a pas commis, ainsi que cela résulte de la proposition
44 > condamnée par Innocent ??, laquelle portait : t Probabile est,
non peccare mor-« taliter, qui imponit falsum crimen alicui, ut suam
» justitiam et honorem defendat, etc. ^2).» Mais plu-sieurs
docteurs disent qu'on ne commet pas un péché mortel, lorsque
pour éviter un grave tourment on s'accuse d'un crime que l'on n'a
pas commis ; mais nous nous rangeons de l'opinion contraire, qui est professée
par d'autres docteurs. On doit observer à ce sujet ce qui sera dit
au ch. xm , n. 84 (3).
XI. On remarque 20 qu'il est permis de révéler
le crime d'autrui, lorsque cela est nécessaire pour son propre soulagement
quand on a reçu une injure grave, comme le disent Nav., Bon., Sair,
Ledesm., Mazz., Busem., Salni. et autres. Plusieurs docteurs très
graves, tels que Less., Gaet., Nav., Bon., Covar., Trull., etc., permettent
(du moins sans qu'il y ait
(1) N. 970 et 971.
(a) N. 97a.
(5) Lib. IV. n. 275.
POUR LES CONFESSEURS,
2I»
faute grave) de communiquer un crime resté secret, à
une ou deux personnes prudentes, parce que la réputation d'une personne
consiste dans l'estime publique, et par conséquent on ne la lui
enlève pas en communiquant le crime à une ou deux personnes
qui doivent le tenir secret. Saint Thomas lui-même se range de cette
opinion, lorsqu'il dit : « Si aliquis «referat prœlato culpam
proximi, intendens vel s cautelam in futurum, vel aliquid hujusmodi, quod
»ad emendam proximi videret expedire, non peccat. »Si autem
ex incautcla alicui,dixerit hoc (c'est-à-jdire le péché
de l'autre), ita tamen quod non pro-» veniat inde infantia delinquens,
tunc non peccat » mortaliter, licet incaute agat(i).» Remarquez
ces mots ita tamen; par conséquent il n'y a pas d'infamie lorsqu'on
ne fait connaître le délit qu'à une seule personne
(a).
XII. On remarque 3° que lorsque le crime est déjà
publiquement connu dans un lieu, il est douteux qu'il soit permis de le
faire connaître dans un autre lieu, lorsque dans cet autre lieu on
doit être long-temps sans en avoir connaissance. Sur cette question
il y a trois opinions différentes,· la première qui
est -professée par Dicas., Vill., Ant.,Tourn., Cunil., etc., veut
qu'il y ait !à une faute grave contre la justice, parce que le coupable
jouit encore de sa bonne ré-putation dans cet endroit; la deuxième
professée par Less., Bon. et Silv., veut qu'il y ait là une
faute grave contre la charité, parce que, quoique le coupable ne
mérite plus sa bonne réputation, néanmoins il doit
apprendre avec beaucoup de peine que son crime soit
(i) Quod lib. H. a. ??. ad. 5.
(») Lib. I. n. 57. et lib. Ill, ?. 97?.
S 1 8
INSTRUCTION PRATIQUE
publié dans un endroit où on n'en avait pas con-naissance;
la troisième, qui est la plus commune, est professée par
Lugo, saint Àntonin, Cajetan, Le-desma, Major (Lugo dit qu'elle
est commune et vraie), et par les Salm., Nav., Bannez, Serra, Filii,, Fagunde.,
Macado et autres (1). Cette opinion veut qu'il n'y ait là de faute,
ni contre la justice, ni contre la charité. Les partisans de cette
opinion rapportent à son appui un grand nombre de raisons ; mais
la plus puissante de toutes est qu'il importe au bien public que les malfaiteurs
soient connus aCn qu'on puisse se méfier d'eux; et ce. bien public
doit l'em-porter sur l'inconvénient qui en résultera pour
le délinquant. Cette raison me paraît très bien fondée
toutr-s les fois que le crime est de telle nature que son auteur devient
pour les autres un homme dan-gereux et qu'il faut fuir, comme s'il s'était
rendu coupable de subornage, corruption, homicide, ou trahison, et autres
crimes semblables. On a beau dire que puisque le coupable jouit encore
d'une bonne réputation dans ce lieu-là, la permission de
l'en dépouiller ne peut pas résulter d'une seule opi-nion
probable, parce que l'on répond à cela que dès l'instant
que son crime devient public, d'un côté le coupable perd probablement
le droit de conser-ver sa réputation, et de l'autre, le public acquiert
le droit d'en être instruit pour pouvoir se tenir sur ses gardes;
et puisque son droit devient incertain, la possession de ce droit devient
incertaine aussi. En-suite je trouve que le père Concina (a) établit
ici une distinction et dit que lorsque le crime est public
(i) Lugo d ?4· n. 59. S'ilm. de resti. c. 4·
n. 61. (a) Con. comp. thcol. t. 1. p, 289. n. 10,
POUR IBS CONFESSEURS.
a m
iwtorielate facti, c'est-à-dire lorsqu'il a été
commis publiquement, alors on peut le publier en tout lieu ; mais lorsqu'il
est public seulement notorietate famœ, voici comment il s'exprime au sujet
de cette révéla-tion : « Cauti omnes sint oportet,
quia facile fingitur «haec publica fama. » Remarquez qu'on
ne peut pas appeler public d'une manière absolue, le délit
qui a été publié seulement dans une famille ou dans
un monastère, et par conséquent on ne peut pas le révé-ler
en d'autres endroits, on ne le peut pas même dans un autre monastère
de même ordre que le premier, et qui aurait avec lui de fréquentes
rela-tions (1).
XIII. Si un délit est public à une époque,
on ne peut pas, sans faute grave au moins contre la charité, le
publier dans une autre pendant laquelle il se trouve caché; excepté
cependant lorsque le délit est public non seulement notorietate
facti., mais en-core notorietate juris, c'est-à'dire par l'effet
d'un ju-gement* ou par l'aveu du coupable devant la justice, ainsi que
l'enseignent Lessius, Lugo, Lacroix, etc.(a). Du reste, malgré tout
cela, il n'est pas défendu aux historiens de rapporter les crimes
publics, même lorsqu'ils ne le sont que par le fait seulement. Voir
Sot,, Mol., Vasq., etc. (?)
XIV. On remarque 4" que lorsque quelqu'un est déjà
diffamé par un crime qu'il a commis, ce n'est pas un péché
grave de l'accuser d'un autre crime connexe ou semblable
au premier, comme, par exemple, d'accuser un soldat de
fornication ou autre
(i) Lib. I. n. 56.
(a) ?. 56. ?. Similiter.
(5) Salm. de resti. c» ?\. ?. 87.
9 20
INSTRUCTION PRATIQUE
chose semblable. Il en serait autrement si on l'accu-sait d'un crime
tout à-fait étranger au premier, ou bien si l'on accusait
celui qui a commis un adultère,, d'en avoir commis deux (1).
XV. On remarque 5° que l'on commet seulement un péché
véniel lorsqu'on rapporte un péché
de son voisin, si on le donne comme raconté par ses ennemis ou par
d'autres personnes peu dignes de foi, ou bien si l'on a des raisons de
penser que les auditeurs ne le croiront pas ; mais il y aurait péché
mortel si on disait l'avoir appris d'une personne digne de foi, ou bien
si l'on racontait un crime très grave, parce que, lorsqu'il s'agit
d'un crime ties grave, il y a faute grave d'en donner seulement le soupçon
(2).
XVI. On remarque 6* que l'on commet un péché lorsqu'on
diffame un ordre religieux ou un monas-tère, et même
lorsqu'on publie le crime do l'un des religieux en l'attribuant
au monastère ou à l'ordre tout entier. Néanmoins lorsque
l'ordre est très considérable, c'est avec raison que le père
Con-cina dit que l'on ne doit pas regarder comme pé-ché grave
ni comme effraction du secret de cacher le péché que l'on
commet en nommant l'ordre, si cet ordre n'est pas d'une étroite
observance (?).
XVII. On remarque 7° que celui qui excite les au-tres à
murmurer commet un péché grave. Quant à celui qui,
sans en avoir été cause, se réjouit de ces murmures,
il pèche aussi grièvement, mais seule-ment contre la charité.
Mais plusieurs auteurs excu-
(») Lib. 3. ?. 976.
(·) ?. 977 et 978.
(5) IN, 97»· et lib. VI. ?. 055. in fine,
1>OBU LUS CONFESSEURS.
3Sj
sent celui qui se réjouit, non pas du désagrément
qu'éprouve son prochain , mais seulement du plaisir Je voir une
chose nouvelle et curieuse , pourvu que ce ne soit pas un supérieur
dont le devoir est de corriger son inférieur qui murmure ; par conséquent
les supérieurs qui souffrent ces murmures , lors-qu'il en résulte
un grave inconvénient pour le pro-chain, commettent un péché
grave contre la charité (mais non pas contre la justice), comme'le
di-sent avec raison Lug., Sot., Reb., Dicast., etc. (i). Mais lorsque ce
n'est pas un supérieur, il n'y a pas de péché mortel,
suivant l'opinion de plusieurs docteurs, si par respect ou par crainte
il ne cherche pas à empêcher la détraction, pourvu
qu'il n'en doive pas résulter quelque autre dommage grave pour le
prochain ( sauf toutefois l'infamie ), et pourvu en-core , suivant saint
Thomas (2), qu'il n'ait pas la certitude d'empêcher le murmure en
faisant des re-montrances à son auteur. Mais il est moralement impossible
d'avoir cette certitude lorsqu'on n'est pas supérieur, ou tout au
moins si on n'est pas beaucoup plus élevé en noblesse ou
en dignité (?). De plus Lug., Bus., etc., font remarquer que l'on
se trompe si, aussitôt que l'on entend parler contre son prochain,
on se croit obligé de faire des remon-trances, parce que souvent
il est plus avantageux pour le prochain que la calomnie élevée
contre lui arrive à son terme, que si elle était interrompue.
Car plusieurs fois, en laissant arriver les discours jusqu'au but, on apprend
qu'il y a beaucoup moins
(1) Lib. III. n.979 et 980. (a) 2. a. q. 71. a. 4· (?) Lib.
III. ?. 9»3·
3Ï2
INSTRUCTION PRATIQUE
de mal qu'on n'en avait cru au premier moment. Du reste, pour s'affranchir
de tout scrupule, lorsqu'on entend médire et lorsqu'il s'agit d'une
matière grave, il n'y a qu'à se retirer ou à tâcher
.d'amener la con-versation sur un autre sujet, ou bien seulement de témoigner
le déplaisir qu'on éprouve , soit en tour-nant la tête,
soit en baissant les yeux, soit en pre-nant ?? air sérieux (i).
XVIII. On remarque 8° que celui qui a médit mal à
propos est tenu de réparer la réputation et le dommage causé
(pourvu qu'il ail pu le pré-voir au moins d'une manière confuse),
et non seu-lement quand ce délit reproché est faux , en se
dé-disant de ce qu'on a avoué devant les mêmes per-sonnes
qui vous ont entendu , se it immédiatement, soit médiatement
( lorsque les auteurs immédiats l'ont fait connaître à
d'autres ) ; mais encore lorsque le délit est vrai, en donnant alors
la meilleure ré-paration possible; par exemple: ? ai pris un èblouis-sement;
j'ai fait erreur, ou bien, suivant d'autres auteurs: Je me suis trompé
; j'ai menti, car tout pé-chéjjest erreur et mensonge , suivant
saint Jean. Pour moi je conseille de dire : Je me le suis mis dans la tête,
parce que toutes les paroles proviennent de l'esprit, c'est-à-dire
de la tête. Mais si l'on doit rai-sonnablement craindre que cette
restitution cause à celui qui doit la faire plus de mal qu'elle
ne peul apporter d'utilité à la personne diffamée,
parce que la calomnie a déjà élé démentie
(comme on doit le présumer lorsque le bruit diffamatoire «st
tombé depuis long-temps et qu'il n'en a plus été question),
alors il vaut mieux tâcher d'bonoxer la personne
(i) Lib. HI. n. 975.
POUR LUS CONFESSEURS·
diffamée en louant les vertus qu'elle peut avoir , et en lui
faisant une bonne réputation , que d'aller sou-lever le souvenir
d'un fait honteux qui est depuis long-temps oublié. Mais lorsque
la restitution de la réputation peut être faite sans inconvénient,
le confesseur doit l'ordonner avant l'absolution, car après il viendrait
difficilement à bout de la faire faire , malgré que souvent
cette restitution soit moins difficile que celle des choses (1).
XIX. On remarque enfin que le diffamateur peut être affranchi
de l'obligation de restituer pour plu-sieurs causes: par exemple, i°si
le délit est déjà der-venu public par une autre voie,
ou bien si la personne diffamée a recouvré sa bonne réputation
par d'au-tres moyens; 2° si l'on peut raisonnablement pré·
sumer que la personne diffamée dispense de la resti-tution ; car
chacun est le maître de sa propre renom-mée, ainsi que le
disent Laym., Nav., Crull., Bus., Holz., etc., suivant l'opinion commune
(2), pourvu toutefois qu'il ail le droit d'accorder ce pardon ; car il
n'en a pas le droit lorsque son déshonneur a causé du scandale,
ou est retombé sur le public, ou sur ses proches ; 3° si ce
détracteur ne peut faire cette restitution sans mettre sa vie en
danger, ou sans s'exposer à un dommage beaucoup plus grave que celui
qu'éprouve la personne diffamée; 4° si le mal qu'on a
dit n'a pas été cru comme lorsqu'il a été dit
avec l'emportement de la passion ; 5° lorsqu'on peut raisonnablement
croire que le fait a été démenti, ainsi que nousl'avonsdit
plus haut ; 6° si la personne même que vous avez diffamée
vous a enlevé aussi
(1) N. 992. (a) N. xooS.
2«4'
INSTRUCTION PUATIQUE
votre réputation, et ne vous l'a pas encore restituée;
car alors vous pouvez différer, votre restitution jus-qu'à
ce que votre adversaire vous satisfasse de son côté. Suivant
l'opinion très bien fondée de Soto., Sita, Wig., Tourn.,
Laym., Salm., etc. (1).
XX. On demande, 1° si, quand il est impossible de réparer
le tort qu'on a fait à la réputation de quelqu'un, on est
obligé d'en fournir l'équivalent en argent. Sylv., Sot.,
etc., ainsi que saint Tho-mas (2), se déclarent pour l'affirmative,
par la rai· son que la réputation est une chose susceptible
d'être appréciée en argent. Mais l'opinion la plus
commune et la mieux fondée est celle de Less., Lugo, San·
chez, Laym., Vasquez, Bon., Salm., Lacroix, etc., qui soutiennent la négative,
se fondant sur ce que la justice oblige à restituer ce qu'on a pris,
ou au moins l'équivalent, mais que la réputation étant
une chose d'un ordre supérieur, ne peut être compensée
par une somme quelconque. D'où il résulte que la restitution
faite au moyen d'une somme d'argent ne peut pas constituer une réparation,
puisque la per-sonne diffamée resterait toujours créancière,
comme elle l'était avant le paiement de cette somme (3). Il faut
observer, à cet égard, ce qui est dit au ch. 10, n°83.
XXI. On demande, 20 si, lorsque le détracteur ne peut
souvent pas restituer la réputation, la per-sonne diffamée
peut en opérer elle -même la com-pensation avec l'argent du
détracteur. Quelques auteurs soutiennent la négative, parce
que ce n'est
(?) Lib. III. u 998. c. 999.
(a) S. Thom. 2. 2. q. 62. a. s. ad. 2.
(3) Lib. III. u. 6a/«t ????.;
POUR LES CONFESSEURS.
220
pas sur UIle opinion seulement probable que l'on peut se fonder pour
opérer la compens ": ~ 1VT ' moins d'autres auteurs,
tels que Less. Ledes., etc., sont pour l'affirmative, et admettent cette
opinion comme vraie tiqu<", en disant que la règle qui prohib
tion. Néan-Mol., Az.,
es Salmant.
lans la pra-la compen-sation, lorsqu'elle ne résulterait que
d'une opinion probable, n'est applicable que lorsque la créance
est douteuse, mais non lorsqu'elle 2st certaine (comme la créance
de la personne à qui ? j a enlevé la réputation),
et lors qu'il n'y a incertitude que sur le mode de compensation, et que
les docteurs en ad-mettent un comme raisonnable (1). Nonobstant tout cela
j'adopte la première opinion, p.irce que la créance de la
personne diffamée porte sur une ma-tière de réputation,
et non pas de choses matérielles; et nous pensons qu'on doit dire
(comme lous l'avons dit plus haut), que le détracteur n'est pas
tenu de réparer la réputation avec de l'argent, lorsqu'il
no peut pas rendre la réputation même, et que toujours est-il
qu'en restituant des choses matérielles à la personne diffamée
; il ne compense qu'une créance probable et non pas certaine (2).
XXII. Nous devons ici dire quelque c
hose des li-?oire lorsque diffamation
cachée. On appelle encore libelle diffamatoire une accusation
écrite remise au juge sanii signature. Les auteurs de
ces libelles encourent l'excom-
belles diffamatoires. Il y a libelle diffama l'on publie dans un écrit
quelque grave
munication : Ferenda du e. qui alterius.
Mais lata, lorsque le libelle est écrit contre le pape
5. quest.
11.
(?) Lib. HI. n. ????. (a; Lib. I, n. 55.
T. XXIT.
IJiSTEUCTION PRATIQUE
pu les cardinaux ; elle est également réservée,
sj Js libelle attaque l'ordre franciscain ou dominicain, ou topte autre
communauté , mais non pas si c'est contre un seul religieux en particulier.
On encourt la même faute et la même peine, lorsqu'on sus-pend
à la porfe de quelqu'un des objets diffama-toires (1).
CHAPITRE XIT.
UfcMABQUES SUR LES PBÉCEPTES
DE L'
I. Les piéceptes de l'Eglise sont en grand nombre; mais les
principaux, ceux qui s'adressent à tout le peuple chrétien,
sont au nombre de cinq : ? en-tendre la messe les dimanches et jours de
fêtes obli-gatoires (mais nous avons déjà parlé
de cela en traitant du troisième précepte du decalogue);
2° jeii-ner pendant le carême, les vigiles et quatre-temps ;
5° s'abstenir de manger de la viande le vendredi et samedi; 4°
se confesser une fois dans l'année, et communier à pâques;
5° ne pas se marier en temps prohibé: nous traiterons ce point
en parlant du mariage. Il ne nous leste donc à traiter que le deuxième,
troisième et quatrième préceptes. Dans le premier
point, nous parlerons du jeûne et en même temps de l'abstinence
de la viande; dans le deuxième point, nous nous occuperons de la
con-fession annuelle.
(t) Lib. 1H. n. 995.
FOUR LES CONFESSEURS.
237
PREMIER POINT.
Du jeûue ecclésiastique. § 1. De l'obligation
de jeûner.
? et 2. De l'abstinence de la viande. 3 et 4· Du laitage.
Des aliments qui renferment du lait.
5. Du lard.
6. Des trois bulles de Benoît XIV.
·}. Si les personnes qui ont obtenu des dispenses peuvent manger
du poisson. 8. De la viande de porc, g. Lorsqu'on ne fait qu'un seul vepas.
1 o. Lorsqu'on divise le repas.
11. Des électuaires, etc.
12. Des boissons.
??. Du vin et de la bière.
?4· Du sorbet.
??. Du chocolat.
16 à 19. De la collation du soir.
20. Si l'on mange de la viande pendant plusieurs fois, ou si
l'on mange plusieurs fois d'un autre mets.
21. De la matière petite au sujet. Si l'fyeure du repas
est fixée par un précepte grave.
II. Trois conditions sont requises pour le jeûne ecclésiastique
: l'abstinence de la viande, un seul repas , et l'heure du repas. La première
cpndition est donc Yabslincnce de la viande. Le jeûne consiste principalement
à s'abstenir de manger de la chair aes animaux qui naissent et vivent
sur la terre, sui-vant la régie de saint Thomas (1) ou bien des
ani-maux dont la chair est réputée viande, et qui ne
(1) 2. a. q, 147. a. 8.
2 28
INSrKUCTION I'HA'I'iQUJ!
sont pas , par conséquent, des poissons , suivant l'opinion
commune, de quelques autres docteurs. Bonaci.,Reg., Conc, Tamb., Holz,Elb.,
etc., disent que l'on peut manger de la chair de tortue, de gre-nouille,
de limaçon (vulgairement maruzze), sau-terelles (ou bien grillons)
ou coquillages. Holz, et Elb. en disent de même des loutres (vulgairement
lutrie), castors, bevères, et d'une espèce particulière
de canards. Les oiseaux, au contraire, quoique quelques uns d'entre eux
se nourrissent dans l'eau, sont tous réputés de la véritable
viande; tels sont les poules d'eau, mélards, corbeaux marins, et
au-tres semblables (1). Sont dispensés de l'observation de ce précepte,
les fous et les .enfants n'ayant pas encore atteint l'âge de raison.
Quant à la question de savoir si on doit en exempter les enfants
qui ont perfectionné leur intelligence avant l'âge.de sept
ans, voyez ce qui est dit ch. n, n. 42.
III. Pendant le carême, les adultes doivent s'abs-tenir, non
seulement de la viande, mais encore des œufs et du laitage, comme on le
voit à la propos. 52, condamnée par Alexandre VII, laquelle
porte : « Non est evidens, quod consuetudo non comedendi »
ova et lacticinia in quadragesima obliget. » Ici on de-mande i°
si le laitage est généralement défendu pour tousles
jours de vigile hors du carême. Un petit nombre d'auteurs soutiennent
l'affirmative, d'après le can. denique 6. dis I. 4> où saint
Grégoire a écrit : « Par autem est, ut jejunemus a
caseo et » ovis. » II paraît même que c'est là
l'opinion de saint Thomas (2), lorsqu'il dit que l'Église ordonne
(1) Lib. III. n. 1011. (s) 9. a. q. J47· a, 8.
POUR LES CONFESSEURS.
\ ceux qui jeûnent de s'abstenir des œufs tout aussi bien que
de la viande. Mais nous préférons l'opinion commune, qui
permet de faire usage du laitage pendant les vigiles, excepté dans
les lieux où il y aura une coutume contraire étabJic.C'est
l'opinion de Nav., s. Ant., Laym., Sanch., Conc. et autres, ainsi que des
Salm., lesquels s'appuient encore sur le concile de Tolède. Le canon
denique, dont nous avons parlé, ne détruit pas cette opinion,
parce que, dans ce canon, saint Grégoire ne parle que du ca-rême.
C'est aussi du carême que parle saint Thomas, mais ensuite, en traitant
des autres jeûnes, au cit. art. 8 ad 5, il dit : « Et ideo
in quolibet jejunio in-» terdicitur esus carnium, in jejunio autem
quadra-«gesimali interdicuntur etiam ova. » Donc les œufs ne
sont pas défendus hors du carême, et on ne peut pas supposer^
non plus ce que dit le S. P. Be-noît XIV, dans sa bulle « in
suprema, in quadrage-»sima aliisque diebus quibus carnium et lacticinio-»rum
esus est prohibitus, dispensari contigerit,» parce que, comme l'a
dit très sagement un écrivain moderne ( le P. de Petio Théatin,
in addit. ad. fel. pot.), les paroles ci-dessus rapportées ne réprouvent
pas l'opinion contraire; car il ne paraît pas qu'elles -s'occupent
spécialement de cette matière-là, et les termes lacliciniorum
esus est prohibitus peuvent être regardés comme s'appliquant
seulement à l'époque du carême et non pas à
d'autres. On peut dire aussi que, dans cette bulle, le souverain pontife
n'avait pasl'intention de déclarerquele laitage était prohibé
pendant les vigiles, comme cela résulte clairement de ce qu'il a
écrit dans J'ouvrage de synodo (?), où
(1) Lib. ?. e. 5. ?. »3<
a 3o
INSTRUCTION .PRATIQUE
pour· les jeûnes hors du carême, dans les endroits
il îrivite les évêqùes à ne pas prohiber
le laitage où l'on en fait usage. Or donc, s'il dit que les évêqUes
ne doiVetìt pas le prohiber, il est bien certain que ddns su bulle
il n'a1 pas eu l'ihtentlbh dé dire qu'il Était prdhihé(i).
IV. Oh demande 20 si dans les pays où on eit dans l'usage de
s'abstenir des laitages, leg habitants sbnt tenus de s'y eBnfortnersoUs
peine deedmmettre Une faute grave. Là négative est Soutenue
par San-chez et Villalobds, Tdhiburlni, etc., parla raison qti'il est incertain
si ces habitants ont adopté un tel tisagë avec l'intention
de s'imposer l'obligation grave de s'y conformer, comme cela est nécessaire
; mais l'affirmative que houfc piéférôHs est p'His
communé-m'ent professée par Less. ,Layin. Cdric. >, Salin.,
Rdnc, Yiva et autres, ainsi q'Ùe saint Thohias (2): parce que, cortirh'e
riOtis l'avons dit au th. ii, ti. 84, infine, cette abstinence étant
une charge très considérable, et lri voyant constamment dbsë'rvé'e,
bri peut très bien préâiimer qu'elle a été
introduite et i-otiservée avec l'intention de s'y obliger ; sans
cela elle serait Facilement tombée en désuétude; en
admettant que 1.1 présdhiption sbit cri faveur de l'obligation,
nous trouvons eheore eu sa faveur la possession constante ??? est opposée
il la liberté (?) ; pdt· \& mêfne raison, nous
en dirons de même de l'obligation contractée pSr les moitiés
de réciter l'office. Vdyefc E±arneti des ohlinhnds.
V. On demande 3° si ceux qui ont la permission
(t) Opits nostram Ml> tf[. ii 1
) > i, (2) a. 2. q. 147· a· 8. ad. 3. (5) Lib. III. n. roog.
dub. 3.
POtIR LES CONFESSEURS.
g3j
de faire usage du laitage peuvent aussi faire usage ??? lard. L'affirmative
est professée par Silv.; Osti., Abb., etc.; elle est jugée
bien fondée par le P; Yivà (bn cite encore Laymann et Azor;
mais j'ai décou-vert que Laym. la rejette complètement et
qu'Azbr Se borne à ne pas la combattre), Tambiirini, Diaria et Henriquez
le permettent seulement lorsque le lard est foridu; mais polir moi, je
pense que l'on doit suivre l'opinion générale que professent
Sarichez} Bonacina, Cottcina, Roncaglia, Elbel, Muante et d'antres qtii
sont pour la négative absolue, parce q'ttë la graisse est véritablement
de la viande(1).
VI. On demande 4° s^ 'es personnes, qui ont la permission de manger
de la viande et du laitage peuvent dans les jours de jeûne manger
du poisson; mais avant d'entamer cette matière , il est nécessaire
deremarquei· plusieurs choses qui tint été ordbrttiéës
et déclarées par le s. pontife Benoît XIV, dans troià
bulles, relativement au jeûne, ? dans la bulle non ambiginius), dtt
? mai 1741, le saint pontife dé-clara que personne ne pourrait être
autorisé à man-ger de la viatide « sine legitima causa
et de utriusque » medici consilio,» c'est-à-dire, dumédecin
et du curé bu du confesseur ,· il déclara de plus
que, pour qu'une dispense fût accordée à un peuple
tout entier, il fal-lait des motifs très graves, et que la dispense
devait toutes les fois être demandée au saint-siége
aposto-lique, et qu'alors ceux qui auraient obtenu la permis-sion de faire
usage de la viande sont néanmoins obligés à ne faire
qu'un seul repas, et à nepasmêler ensemble dans le méhie
repas « licitak atque ihier-"dictasepulas, » c'est-à-dire,
de laviatìdè etdupòìs-
(1) Lib. TH. ?. îoio,
25a
INSTRUCTION PRATIQUE
son, comme il l'a expliqué plus clairement encore dans sa bulle
Libentissime; 2 dans sa bulle in Su. prema , du 22 août de la même
année, il déclara que chaque particulier, ayant une dispense,
n'en était pas moins obligé à l'observation des deux
préceptes, et non pas seulement pendant le carême, mais encore
pendant les autres jours de jeûne; ? dans sa bulle, Libentissime,
du îojuin 1754 , il déclara que les personnes qui avaient
lapermission de manger de la viande, devaient dans la petite collation
du jour « eo cibo eaque potione uti, quibus utuntur je-junantes rectœ
meticulosse conscientia? » ; 4 <ïue ces mêmes personnes
devaient observer l'heure prescrite aux personnes qui jeûnaient;
5 que ceux, qui ont la permission de faire usage de la viande, ne peu-vent
pas manger du poisson (même pendant les di-manches du carême);
par conséquent ils ne peuvent pas mêler ensemble, dans le
même repas, la viande et le poisson : « epulas interdictas
( ce sont les ex-pressions de la bulle) esse pisces, adeoque utrum·
»que simul adhiberi non posse. » 11 faut ajouter à cela
que ceux qui ont une dispense seulement pour le laitage peuvent faire usage
du poisson.
VII. Gela posé, quelques personnes doutaient qu'il fût
permis à ceux qui avaient une dispense pour manger de la viande,
de manger du poisson dans un repas particulier; l'auteur moderne dont nous
avons fait mention ( le P. de Pétio ) écrit à ce sujet
qu'une telle prohibition n'a été établie spécialement
que pour les repas publics", à cause du scandale qu'ils peuvent
produire ; mais non pas pour une seule personne qui voudrait dans un repas
particulier manger mo-dérément du poisson, sans occasionner
de scandale et lorsqu'ellene fait pas cela par gloutonnerie. Mais
POUR I-ES CONFESSEURS.
a 55
malgré toutes ces restrictions, cette opinion-là ne me
paraît pas bien fondée. Car, i° les expressions de la
bulle sont générales ; 2° dans la constitution Fra-ternitas,
insérée dans la bulle Libentissime, le pape ordonne aux médecins
de n'accorder la permission de manger de la viande ( soit dans les banquets,
soit hors des banquets, comme on doit certainement l'entendre ), qu'aux
deux conditions de ne faire qu'un seul repas et de ne pas mettre la viande
avec le poisson; 5° il dit à ce même endroit que l'usage
du poisson est permis seulement à ceux qui ont obtenu une dispense
pour le laitage, par conséquent il «st défendu à
ceux qui ont une dispense pour la viande (1). D'un autre côté,
Franzoja (2) dit avec raison que celui qui a obtenu seulement une dispense
pour manger de la soupe faite avec du bouillon de viande, peut non seulement
manger du laitage et des œufs, mais encore du poisson. La raison en est,
à ce que je crois, que la prohibition du pontife, de ne pas mêler
la viande avec le poisson, doit être entendue dans le sens strict,
c'est-à-dire, lorsqu'on se nourrit spécialement avec delà
viande; tandis que le bouillon est plutôt une sauce qu'un mets. VIII.
On demande 5° si ceux qui ont obtenu une dispense pour faire usage
de la viande, peu-vent aussi manger de la viande de porc. L'affir-mative
absolue est soutenue par le P. Conc. qui se fonde sur un décret
rendu par Clément XI, à Rome, le 24 février 1702.
iUais la négative est générale-ment professée
par Lug., Sanch., Lacroix, Tamb.,
(1) Lib. III. n. 1014 et ioi5.
(2) Franzoja in Busemb. lib. 3. 4 6. e. 3. Anim. II. vcr*. At
hic.
954
INSTRUCTION PRATIQUE
Salm., Trull., Vill., etc., parce que ( suivant eux) ce serait, pour
ceux qui ont une dispense, une chose trop scrupuleuse, méticuleuse
et souvent plus oné-reuse que lejeûneriiême, que d'être
obligés, toutes les fois qu'ils mangeraient de la viande, d'examiner
si elle est d'une qualité permise ou prohibée. Peu importe
l'édit (et non pas décret) du pape Clément que nous
avons rapporté, dans lequel deux choses ont été ordonnées
: la première, que les gens ayant des dispenses fussent obligés
de ne faire qu'un seul repas; la seconde que l'on ne leur permît
pas de faire usage des viandes nuisibles. Je dis que cet édit ne
fait pas d'obstacle , parce que la prohibition qu'il prononce n'était
pas générale , mais particulière pour le seul État
romain, comme l'attestent Viv. et autres, et comme le déclara lui-même
Benoît XIV, lorsqu'il était archevêque de Bologne ,
dans la Notif., au tome I", ne 25 ; et ensuite dans la bulle non ambigimus.
En mentionnant l'édit dont nous parlons, il regarde comme universel
le précepte qui astreint ceux qui ont des dispenses, à ne
faire qu'un seul repas, niais non pas le précepte qui or-donne de
s'abstenir de viandes nuisibles. En ce qui concerne particulièrement
la viande de porc , je ne crois pas qu'on puisse dire qu'elle est absolument
nuisible , car, comme l'a écrit le célèbre médecin
Hoffmann, elle offre une grande analogie avec le sang humain. Riverius
dit, en parlant de la viande de porc : « Galenus eam humana? carni
similem esse » asserit; etsi bene coquatur omnium ciborum po-n tissime
nutrire (1). » Mais, dira-t-on, pourquoi cette viande fut-eile prohibée
par l'Église, sinon
(1) River, inst. medi. 1. 9. c, 17.
POUR LES CONFfcSSEtJRS.
parce qu'elle est nuisible? On peut répondre à cela,
que, dans la Palestine (pays très chaud), cette viande peut tiès
bien être prohibée comme nuisible,parce que là (suivant
Calmet, sur Levit. II) les porcs sont très sujets à la lèpre,
ce qui n'arrive pas clans les au-tres contrées ; de même que
la viande de lièvre fut également prohibée, tandis
que chez nous cette viande n'est certainement pas considérée
cohime nuisible. En outre, saint Thomas (1) dit que parmi les viandes dont
l'usage fut prohibé aux juifs, ce fut, pour les unes , à
cause de la trop grande humi-dité ou sécheresse? pour les
autres, parce qu'elles étaient malsaines , comme la viande de porc,
et en fait, la raison que donne Moïse lui-même d'une telle prohibition,
c'est que ces viandes étaient malsaines pour les Hébreux
: « Horum carnibus non vescimini » quia immunda sunt vobis.
» Ce sont les expressions de l'Ecriture à l'endroit précité,
Lev. xi. 8. Elles sont appelées malsaines, parce que, comme le dit
Plutarque , « nullum animal ita gaudet cserr' -, » sordidis
locis. De plus Noel. Alexandre dit TeMullien l'avait écrit auparavant
(lib. 2. cotttja Marcionëm, eh. 18), que la viande de porc tut pro-hibée
aux juifs j pour mortifier leur avidité et mettre un frein à
leur incontinence.
IX. La seconde condition du jeûne, c'est de ne faire qu'un seul
repas. On doutait d'abord que cette obligation frappât ceux qui avaient
obtenu la per-mission de manger de la viande, par la raison que lorsqu'on
ne s'abstenait pas de la viande, le jeûne était altéré
dans son essence. Mais aujourd'hui (comme nous l'avons vu) il a été
déclaré par Be-
(1) a. 9, q. 109, a. 6. ad 1.
236
INSTRUCTION PRATIQUE
noît XIV que le jeûne consiste dans l'observance des deux
préceptes, par conséquent, quoique le premier qui ordonne
l'abstinence cesse d'être ob-servé , il reste le second (
quoique moins prin-cipal ) qui prescrit de ne faire qu'un seul repas ;
excepté cependant lorsque la permission de man-ger de la viande
a été accordée pour cause d'infir-mité ou d'affaiblissement,
comme le disent la plu-part des docteurs, et comme l'a déclaré
le même pontife dans sa bulle (In suprema ) où il est dit
: » Dummodo nulla certa et periculosa affecta? valetu-» dinis
ratio intercedant , vel aliter necessario fieri » exigat (1). »
X. Néanmoins , on permet i° de diviser le re-pas par quelque
affaire qui peut arriver par inci-dent; mais il n'est pas permis d'interrompre
le repas sans motif, et de se remettre ensuite à table. Mais cela
doit être pris dans le sens moral, parce que, même sans motif,
on peut, après avoir terminé son repas , se remettre à
manger s'il arrive des amis pour dîner, ou si l'on apporte sur la
table quel-que autre mets auquel on ne s'attendait pas. Voir Sanch., Salm.
et Vill. De même Fill., Tamb. et Eli), permettent généralement
de prendre une nou-velle nourriture pendant un quart, et demi-heure après.
Mais il est certain que le repas peut, même sans motif, être
interrompu pendant une heure ; et même Lessius, Diana, Fagundez,Tamburini,
etc., accordent jusqu'à deux heures. C'est avec raison que Holzmann
dit que tout cela est licite lorsque la personne n'a pas suffisamment mangé
; et quant à moi, je n'hésite pas à me ranger de l'avis
de Less.,
(t) I-ib. HT. n. ioi5. in fine.
POUn
CONFESSEURS.
Fill., les Salin., etc., qui disent que, lorsque la per-sonne n'a pas
pris une nourriture suffisante, et qu'elle ne peut pas supporter le jeiii
e sans en être
gravement incommodée, elle peut to
ijours prendre Église n'a pas
une nouvelle nourriture, parce que l'intention d'obliger personne à
pas ier la journée sans avoir suffisamment mangé. Lacroix
, Fagundes et Tamburini disent probablement (1) qu'il est per-mis de prolonger
son repas jusqu'à deux heures ; et Elbeî. ainsi que Gob. le
permettent même jus-qu'à trois ou quatre pour les Germains,
à cause de leur usage (s). « Protrahere prandium ( dit le
père «Cuniliati) ad plures horas, si non vat in fraudem «jejunii,
non est mortale (3). »
XI. 2° II est permis de prendre qiielque chose en qualité
de médecine, comme, par exemple,desélec-tuaires (ce sont
des conserves composées de sucre et de genièvre ou de citron
ou autre ? drogues sem-blables). C'est de ces médicaments que parle
saint Thomas lorsqu'il dit: « Electuaria assumuntur ad » d'igest'ionem,
undè non solvunt jejunium, nisi forte «aliquis in fraudem
electuaria in inagnà quantitate «assumunt per modum cibi (4).
» ^ insi donc il est permis de prendre ces élecluaires lc
rsqu'on a pour cela un juste motif, c'est-à-dire pour aider lu diges-tion
, pour donner du ton à l'estomac, pour conser-ver la voix, pour
faire disparaître la nauvaise odeur de la bouche et pour d'autres
eau .es semblables. ' De même on permet encore de prendre un peu
de
(i) Lib. III. ?. îoao. q. 3 el 4· (a) Ibid. q. 5.
(3) CiiDÌliali trac. 12. e. ?. $ ?· u. /j.
(4) a. 3, q. 147. a. 6. ad. 3.
2 58
INSTRUCTION PRATIQUE
nourriture ( par exemple une once) pour se ranimer, ainsi que le disent
Az.,Less., Toi., Lay m., etc. Quelques auteurs le permettent encore lorsque
l'on doit boire, afin qu'on n'en soit pas incommodé ; mais, comme
le disent certains auteurs, cela ne doit se permettre tout au plus qu'une
ou deux fois dans la journée (1).
XII. 3° On permet toutes les boissons qui sont prises comme
potions, lors même qu'elles sont nour-rissantes, comme l'enseigne
saint Thomas: «Non «autem intendit Ecclesia interdicere
abstinentiam «potûs... licet aliquo modo nutriat (2). «C'est
pour-quoi l'on permet toutes les boissons qui sont prises en forme
de potions telles que le café, le thé, la sauge, etc., mais
non pas le lait et le bouillon, parce que, quoique ces choset-là
s'avalent, néan ? moins elles sont considérées
comme mets plutôt que comme boissons, et elles appartiennent davan-tage
à la nourriture qu'au véhicule des mets. Il en est de même
pour le suc des fruits , comme des pommes , des poires , des melons
d'eau ( contre ce qui a été écrit mal à propos
par un moderne ), ainsi que celui du raisin mâché ou récemment
pressé (5).
XIII. Je dis du raisin récemment pressé, et non
pas du vin, parce que, quoique les premiers chré-tiens s'abstinssent
même du vin, aujourd'hui l'u-sage du vin n'est pas prohibé,
lors même que l'on en a bu pour apaiser sa faim, comme le profes-sent
d'un commun accord Az., Sanch., Less., Nav., Laym., Bon., etc., ainsi que
les Salin, qui regar-
(1) Lib. III. ?. loi8 et 1019.· (a) S. Thomas, fac. citat. ad.
2. (3) Lib. III. n.
FOUR LES CONFESSEURS.
25g
dent cette décision comme certaine , à raison de l'usage
actuellement en vigueur. Et saint Grégoire lui-même , à
l'époque où il vivait, permettait l'usage du vin sans distinction
, dans le chap. Denique dist. 4, où il dit: «Vinum quoque
ita vivere permittitur ut «ebrietatem fugiamus. · Le même
saint dit la même chose de la bière (qui est composée
avec de l'eau, de l'orge et autres ingrédients), laquelle est aussi
considérée comme une pure boisson (1).
XIV. Nous en dirom de même du sorbet ou bien linlonade, qui est
composée de sucre, de jus de ci-tron, ou de cannelle (pourvu que
ces choses-là n'y entrent qu'en petite quantité et soient
mêlées avec une grande quantité d'eau), comme le veut
l'opinion commune, qui est celle de Wiguand, Concina, Roncaglia, Bannez,
Elb. etSalm. Viva, Lacroix, etc; car ^ d'après eux ), toutes les
fois qu'il s'y mêle une petite quantité d'eau, on le considère
comme pure boisson. 11 ne faut pas croire que celte potion change denature
lorsqu'elle se gèle, parce que le change-ment de nature emporte
l'absence du caractère pri-mitif, tandis que l'eau qui est gelée
redevient liquide, et reprend son premier caractère lorsqu'on la
met dans la bouche. Ce principe résulte encore de la rubrique du
missel (au ch. ?, ?. ? ? ), approuvé par saint Pie V, où
il est dit, que si, pendant la messe., les espèces du vin se gèlent
après la consécration , il n'est pas nécessaire deles
consacrer de nouveau : elles devraient, au contraire, être consacrées
de nouveau si la congélation en changeait la nature. 11 faut alors
que le prêtre les fasse fondre au feu et les avale ensuite (2).
(1) Lib. III. n. 1022. a) Ibid. q. 2.
îl\O
INSTRUCTION PRATIQUE
XV. C'est une question très controversée parmi les docteurs
que celle de savoir si la potion de cho-colat rompt lejenne. Le cardinal
Brancas., Ëscob., Huit., Holz., Viva et un grand nombre d'autres,
professent la négative, pourvu qu'il yàit une grande quantité
d'eau, disant que cette eau en fait alors une boisson. C'est pourquoi ils
disent qu'il est per-mis de la prendre tant de fois qu'on veut dans la
journée. L'affirmative est professée par d'autres, tels que
Sanch., Silv., Laym., Ronc., Conc. et ïamb., disant qu'on ne regarde
comme boisson que les po-tions qui servent seulement de véhicules
aux ali-ments, mais non pas celles qui sont des aliments elles-mêmes,
comme le sont le bouillon ainsi que le chocolat. D'où ils concluent
que le chocolat rompt le jeûne, à moins qu'il s'agisse d'une
matière peu importante. Quant à moi, voici mon opinion sur
ce point : je ne regarde pas le chocolat comme une potion, car très
certainement il nourrit le corps, et je ne crois pas qu'il puisse être
pris comme simple boisson. Mais, d'un autre côté , je dis
qu'on doit en permettre l'usage , et cela par deux motifs : le pre-mier,
c'est que si on ne prend pas le chocolat comme boisson, on le prend souvent
comme médecine, et de même que nous avons dit, en adoptant
l'opinion de saint Thomas, que les electuaires sont permis quoiqu'ils soient
nourrissants , de même aussi nous permettrons le chocolat. Cette
opinion-là est ap-prouvée par le P. Concina lui-même.
Le deuxième motif est plus généralement approuvé
: c'est qu'au-jourd'hui tout le monde fait usage de cette potion, ainsi
que l'attestent les Salm., Viva, Holz., ïambur. et Ronc.,.qui dit
que, puisque cet usage est en vi-gueur , il ne doute pas le moins du monde
que l'on
POUR LES CONFESSEURS.
9^
ne puisse prendre cette potion. Mais soit qu'on la prenne pour remède,
soit qu'on la prenne à cause de l'usage établi, je partage
l'opinion des Salm. et de nions. Muante, qui ne permettent de la prendre
qu'une seule fois dans la journée. A l'égard de la quantité
qu'on doit en prendre pour ne pas rompre le jeûne , il y a grande
diversité d'opinions. Le père Concina dit qu'on peut la prendre
en qualité de mé-decine , mais seulement en mettant dans
l'eau un peu de poussière, parum pulveris, ce qui est t£op
rigoureux, et qui n'a été, jusqu'à présent,
professé par personne. D'autres, tels que les Salm., Léon
et Turri., permettent d'en prendre jusqu'à deux onces. L'opinion
qui me paraît la plus raisonnable est celle de monseig. Milante,
qui pense que l'on peut l'ad-mettre jusqu'à une once et demie,-conformément
à l'usage, et avec la quantité d'eau que contiennent les
tasses dont on se sert habituellement, parce que c'est là la quantité
d'eau qu'on a coutume d'y mettre (1).
XVI. 4° On permet de faire une petite collation le soir, suivant
la coutume qui est adoptée aujour-d'hui dans beaucoup d'endroits,
et que les prélats tolèrent, puisque saint Thomas dit, en
parlant du leûne ; « Ex hoc ipso quod praelati dissimulant,
vi-» dentur annuere(2). » Et, eu cette matière, il est
hors de doute que l'on doit avoir plus d'égard à l'autorité
des auteurs modernes quoiqu'en plus petit nornbi e , qu'à celle
des anciens, parce que ces der-niers ne pouvaient pas statuer pour les
usages futurs. H est certain qu'autrefoislejeûne était plus
rigoureux;
(0 Lib. III. n. 1025.
(a) a. 2. g. 147. a 4 ad. 5.
T.
îC
«42
INSTRUCTION PRATIQUE
mais aujourd'hui, d'après la discipline qui est par-tout observée,
on permet la collation. A cet égard, on doit s'attacher à
considérer ce qui est autorisé par l'u-sage,tant pour la
qualité que pour la quantitédes mets. Pour la quantité
(quoi qu'en dise le P. Concina,qui ne permet que trois onces de nourriture),
d'autres auteurs permettent de prendre le quart de ce qu'on mange ordinairement
à son repas. Mais, pour moi, je n'approuve pas cette règle^parce
qu'elle peut être ou trop indulgente à l'égard de certaines
personnes, ou bien trop obscure et trop scrupuleuse. Il vaut mieux, par
conséquent, se conformer à l'opinion des autres auteurs,
qui est généralement reçue au-jourd'hui, ainsi que
l'attestent Cast., Rone., Salm., Viva, Bonac, Holzm., Tamb., Elbel, Dian.,
Spor., Mil., Lacroix, Felix, Pot., Mazs., etc., laquelle opi-nion permet
généralement à tout le monde, même à
ceux qui n'ont besoin que de peu de nourriture , comme cela se dit communément,
une quantité de huit onces, et même un- peu plus, c'est-à-dire
deux onces de plus, ce qui est une matière petite, comme il sera
dit au n. 20, à ceux qui ont besoin d'une nourriture plus considérable
(1). Dans la veille de Noël, on admet ordinairement une collation
double, c'est'à-dire seize onces, à cause de la grande solen-nité
de cette fête; mais cela n'est pas permis pen-dant le Samedi-Saint,
ni la veille de la Pentecôte. Quelques uns, tels que les Salmant.,
permettent, la veille de Noël, de manger jusqu'à satiété
des herbes, des fruits et des sucreries, en disant que tel est l'u-sage
établi. Mais je doute très fort qu'un tel usage soit en vigueur
chez nous, d'autant plus que cela
(0 Lib. III. ?. ??2'5.
POOR LES CONFESSEURS.
3/3
est nié par Mazzotta, Pasqualigo et Renzi. Mais si dans les
jours de veille dont nous venons de parler, on veut changer la collation
et la prendre le matin pour faire ensuite son principal repas le soir,
San-chez fait remarquer avec raison ( contre le sentiment de plusieurs
autres) qu'on ne peut pas dépasser les huit onces, parce qu'alors
la fête n'est pas encore commencée, puisqu'elle ne commence
qu'à partir dusoir(i).
XVII. A l'égard de la qualité des mets, il est cer-tain
que les fruits, le pain, les herbes et les confitu-res sont permis; mais
on demande, i° si les pois-sons sont prohibés. Plusieurs auteurs
tels que Sporer, Marcan., Pasq., Elb., Tamb.,Viva et Burghaher di-sent
que, suivant l'usage actuel, il est permis le soir, comme le matin, de
manger du poisson, lors même qu'il est frais et d'une grande dimension.
Du reste, chez nous l'usage permet de manger des petits pois-sons, même
lorsqu'ils sont frais, et comme le disent le P. Viva,, le P. Mazz., et
Bon.; il permet égale-ment de manger une petite portion ( par exemple,
deux ou trois onces) de gros poisson. Cette opinion est confirmée
par monseigneur Milante (2), qui dit qu'aujourd'hui les communautés
régulières elles-mêmes donnent le soir du petit poisson
pendant le carême ; et à l'égard du gros poisson, voici
com-ment il s'exprime :« Attenta praesenti disciplina sine »
ullo scrupulo posse etiam magnos pisces permitti «existimo, cum debito
moderamine (3).
XVIII. On demande, 20 s'il est permis de manger
(1) Lib. Vl.n. ioi5 . ?. ?? vigilia, (a) In prop. Alex.
VU. exerc. i3. (S) Viffc n, 1026 et ioa8.
244
INSTRUCTION PRATIQUE
huit onces de pain cuit dans de l'eau et de l'huile; quelques auteurs
le permettent, mais cette opinion est rejetée avec raison par les
Salm., Viva, Ronc., Tamb., et la plupart des autres, parce qu'au moyen
de cette cuisson et de cette fermentation le pain acquiert une sorte de
nature différente de celle qu'il avait, et il prend en se mêlant
avec l'eau une sub-stance dont il ne peut plus être séparé
; du moins cela n'est pas admis dans l'usage. Ainsi donc c'est à
peine si l'on peut permettre ( avec Tamb. ) de tremper le pain dans de
l'eau ou du vin, et de le manger tout de suite, pour qu'alors il ne change
pas de substance; ou bien encore, on peut per-mettre avec Ronc, de prendre
quatre onces de pain cuit dans de l'eau, ou tout au plus cinq onces, comme
le permettent les Salm. On peut dire la même chose pour les légumes
cuits dans de l'eau ; c'est avec raison que Castropalao, Laymann, Bona-cina,Azor,
Viva, Mazz., et les Salm. permettent de manger de la soupe cuite avec de
l'huile ou du vi-naigre, ou du vin cuit, en observant néanmoins,
comme le fait remarquer Viva, que l'huile, le vinai-gre, le vin cuit, doivent
entrer dans le poids des huit onces, car ces choses-là ne sont pas
regardées comme pure boisson (1).
XIX. A l'égard de ceux qui ont obtenu la per-mission de manger
de la viande, le pape Be-noît XIV, ayant été interrogé
si ces personnes pou-vaient aussi manger de la viande à la collation
du soir, répondit (comme on peut le lire dans sa bulle Libentissime),
en ces termes: «Non licere,sed opus «habere eo cibo eaque uti
potione quibus utuntur
(?) Lib. VI. n, 1029.
POUR LES CONFESSEURS.
a^5
n homines jejunantes rectae, meticulosse conscientiae.» Avant
cela plusieurs auteurs disaient que l'on pou-vait permettre à ceux
qui avaient une dispense pour la viande ou pour le laitage, de manger un
peu de fromage à la collation du soir; et cela paraissait assez
raisonnable, attendu que beaucoup de per-sonnes avaient cette coutume,
pourvu que l'on ne dépassât pas une once ou une once et-demie
(je parle du fromage et non pas des œufs); mais ensuite, il a été
écrit, à ce sujet, à la pénitencerie, et lors-que
le même pape fut interrogé là-dessus, le cardi-nal
pénitentier répondit que le pape avait déclaré
oretenus, que le fromage était également prohibé;
et j'ai l'original de cette même déclaration entre mes mains.
Quelques auteurs ont voulu prétendre que cette déclaration
ne pouvait être obligatoire qu'au-tant qu'elle aurait été
promulguée; mais suivant ce que nous avons dit au chap. 2, nos j5
et 74, lors-qu'une déclaration est émanée du même
législateur; qui explique son1 intention, elle n'a pas besoin de
promulgation (1). Cette prohibition du fromage à !a collation du
soir a été confirmée par le pape Clé-ment XIII,
dans sa lettre encyclique de 1759, où il a déclaré
deux choses : i° « Non licere per diem » potiones lacté
permixtae sumere ; 20 tantum-» modo admissam comestionem posse carnem
ad-» hibere, vel ea quae ex carne trahunt originem,» tels que
les œufs et Le laitage; il ajoute encore que, dans la collation, ceux qui
ont des dispenses : ctEqui-» parandos esse iis, quibuscum nulla est
dispensa-» tio (2). »
[x] N. 1027. v, Olim.
(a) Dans ce chapitre, n. 191 nous atone dit <jue dans la
246
INSTRUCTION PRATIQUE
XX. Lorsqu'on a gâté le jeûne, on doit expliquer
au confesseur de quelle manière on l'a fait ; si c'est en déjeunant
plusieurs fois, ou bien en mangeant de la viande ; parce qu'autant de fois
on mange de la viande ou du laitage, autant on commet dépêchés;
mais si l'on mange des mets permis, pendant plu-sieurs fois et en grande
quantité, il ne peut plus y avoir déjeune, comme l'enseignent
d'un commun
collation du soir il n'était pas permis aux dispensés
de man-ger du laitage ; nous nous en référons à cetégtrd
à la déclara-tion de Benoit XIV, ot a la bulle de Clément
XIII, Appetente, da so décembre 17S9, où ce souverain pontife
condamne l'abus de prendre du lait hors du repas ; il déclare encore
que Je sentiment de Benoit XIV était qu'il n'était paa permis
aux dispensés de mauger de la viande ou du laitage, excepté
dans un seul repas, hors duquel ils devaient ee conduire comme ceux qui
n'avaient pas de dispense. Et, aCn que l'on com-prenne mieux ce que nous
disons, nous allons transcrire les paroles de la bulle relative à
ce sujet : « Nova infriugendis » jejunii legibus vel opinionum
commenta, vel a vera jejunii » vi et natura abhorrcntes consuetudines
humani pravitate in-» genii sint iincclae, ea omnia radicitus convellcnda
curetis. »ln quibus profecto abusum illum censemus omnino numc-»
raudum, cum nonnulli, quibus ob justns et legitimas causas » ab abstinentia
carnium dispensatur fnerit, licere sibi putant » potiones lacte permixto*
sumere : contra quam praedictus «Processor noster censuit, tam dispensâtes
a carnium absli »nentia, quam quovis modo jejunautes, unica excepta
comes-• tione, in omnibus tequiparaudos iis esse, quibuscum nulla »
est dispensatio, ac propterea tantummodo ad unicam comes-» tionem
posse carnem, vel quae ex carne trahunt originem, » adhibere. »
Telle» que sont tontes les choses qui tirent leur origine de la chair,
ainsi que s'exprime lc can. Denique, dist. 4. où il est dit: «
Quae trahunt originem sementinam a carui-» bus, ut sunt ova et lacticinia.
» D'après cela les dispensés ne peuvent manger &
leur collation d'autres choses que celles qui sont permises aux non-dispensés.
POUR LES CONFESSEURS.
accord Azor, Cajelan, Suarez, Tolet, Sanch., Lay m., Anacl e t, Ronc.,
Holzm; (contre l'opinion de Silvestre, Wìgand autres), par la raison
que l'essence du s'abstenir de la viande consiste dans l'a par conséquent
l'obligation de s'en abs jamais, tandis que l'essence du prece consiste
dans l'observation du repas que l'enseigne saint Thomas (i):« E «ramine
statutum est, ut semel in die » comedatur. » D'où il
résulte qu'une a détruit l'essence du précepte
en repas, le précepte n'existe plus, et on l'observer. Après
le second repas, ce tout au moins douteux, et comme tel pas d'obligation
(2). On demande en
247
aslro Palao, n,Salm.,etc. , Concina et précepte de bstinence,
et enir ne cesse pte du jeûne unique, ainsi :lesiœ mode-jejunantibus
fois que l'on faisant deux ne peut plus précepte est 1 n'engendre
suite si celui qui, sans qu'il y ait de sa faute, a mai gé deux
fois
et en grande quantité, doit s'absteni
d'autre nourriture. Laytn., Bonacina,
Castrop.,
Holz, Spor, etc., ont résolu celte qui venient, par la même
raison. Quant ; désapprouve pas cette opinion ; mais préfère
l'opinion contraire , qui est Az., Valen.jSa etNav., parce que, qu
matériellement le jeûne, en le rompant par inad-
vertance , néanmoins il paraît que, loi
souvient de son obligation, il doit l'observer, autre-ment il détruirait
formellement le jeûne (3). Nous avons dit une quantité considérable;
cela veut dire lorsqu'il y a plus de deux onces; car 1 s deux onces
de prendre
istion negati-nloi, je ne «pendant je •rofessée par iqu'il
rompe
qu'il
se res-
(j) a. 2. q. 147. a 6. (a) Lib. VI. ?. ??3?. (S) Ibid. q. 11.
248
lSSiULCTION PBATIQUE
ne font qu'une matière legere, ainsi que le disent Sanchez,
Viva, Salm., Viva. Tui·., Léon, Tamb., Leand, Spora,, Busemb.,
Elhel et autres (i); mais si l'on prenait pendant plusieurs fois dans la
même journée la matière légère, et que
tout cela réuni constituât une matière grave, on pécherait
mor-tellement, ainsi que cela résulte de la propos. 29, condamnée
par Alexandre VII. On remarque que, même dans l'usage illicite de
la viande, il peut y avoir matière légère; mais elle
est extrêmement res-treinte. Salm., Dian. et Ronc. disent que la
quan-tité de viande qui dépasse la huitième partie,
c'est-à-dire le quart d'une Once, constitue la matière grave
(2). Les Salm. ainsi que Dian. permettent de manger deux biscuits faits
avec des œufs et du beurre (appelés Ctambelle); mais c'est avec
plus de raison que Ledesma et Villalobos disent que cela peut seulement
être excusé comme matière légère (?).
XXI. Enfin l'on demande si le précepte qui fixe l'heure du repas
dans les jours de jeune im-pose une obligation grave ou légère.
Il faut d'abord remarquer que, dans le commencement, cette heure était
6xée après le coucher du soleil ; ensuite elle fut avancée,
et fixée à l'heure de none; et dans le xiv" siècle
elle fut encore avancée et fixe'e à l'heure de sexte, c'est-à-dire
au milieu du jour. Or, l'on demande s'il y a faute grave pour avoir avance
de beaucoup l'heure de son repas, en avant de l'heure fixée. L'affirmative
est professée par Azor., Silves., Sanchez, Noel, Alexan-
(1) N. 1025 et 10:29. v. 5. in conf.
(2) Lib. VI. ?. io5o. ». in confess.
(3) Lib. III. D. 1009. dub. IV. in fin.
POUR. LES CONFESSEURS.
2Aq
dre, Fanzoja, Antoine, Cuniliaii et par Nava. Al-bul., ainsi que par
les Salin, et par Conc. qui assure que vingt-quatredocteurssontpourcetteopinion(i).Gela
est également prouvé par les ch. Soient. 5odist. du concile
de Châlons (mal.à propos cité à la place du
concile de Calcédoine, comme le remarque Silv.) où iï
est dit : «Nullatenus jejunare credendi sunt, qui ante » manducaverant
quam vespertinum celebratur offi-» cium. » D'où il résulte
clairement qu'à cette époque (lorsque le repas était
fixé à l'heure de none) l'heure influaitsur la substance
mêmedujeûne. Saint-Thomas écrit à ce sujet :
« Cum ecclesia instituit certum tem-»pus comedendi jejunantibus,
qui nimis notabiliter » anticipat, jejunium solvit (2). » D'autres
prétendent qu'aujourd'hui le repas fait à une heure trop
avan-cée ne peut pas constituer une faute grave; tels sont Lessius,
Tolède, Bonacina, Laymann, ainsi que lès Salm. avec grand
nombre d'autres, comme nous l'avons fait voir dans notre traité
deaiorale (?). Ces auteurs disent que, d'après l'usage, l'heure
du repas n'a plus aucun rapport avec la substance même du jeûne.
Mais ce raisonnement (soitdit avec la per-mission de tous ces auteurs )
ne peut pas nous per-suader, parce qu'eux-mêmes ( ainsi que le font
re-marquer les Salin, et Laymann (4) ) ne contestent pas que le précepte
qui fixait l'heure du repas n'im-
fx) Azo. tom î.l. 7. c. 11. q. 4· Sylvius, torn. 5. in
2. 2. q. 147. a. 7 concl. 5. Sanch. dec. 1. 4. c. 11. n. 5i. Nat. Alex.
1. A. a. reg. i3. Antou. de jejun. q. 2. Franzoja in Bu-eerab. p. 2i5.
anim. 5. Cunil. Ir. 12. c. 1. § 2. n. 2. apud. Salm. tr. a5. c. 2.
u. 86. conc. t. 5. p. 275. q. 7.
(2) S. Tom. in 4. dist. x5. q. 3. a. 4. q. 3.
(3) Lib. III. ?. ???6. ?. quar.
(4) Salman, lcc. cit. ?. p. Laym. lib, IV. tr. ?. c. 1. n. 1
j,
2??
INSTRUCTION PRATIQUE
posât autrefois une obligation grave, el qu'il n'in-fluât
directement sur la substance du jeûne. Cela posé , tant qu'on
ne prouve pas que l'usage actuel a dérogé à la gravité
que ce précepte avait ancien-nement , la possession reste pour ce
précepte; mais c'est usage n'est pas prouvé, ou tout au moins
il esÎ incertain, puisqu'il est nié par tant de graves au-teurs.
Parconséquent, quoiquej'eussed'aborddonné mon adhésion
à la première opinion, aujourd'hui, après réflexion
faite , je ne la trouve pas fondée. Après cela on demande
quelle est la quotité de l'an-ticipation qui est prohibée
sous peine de faute grave, parce que l'on conçoit que cette heure
doit nécessai-rement varier, comme le dit Saint-Thomas : «Adje-»
junium requiritur hora determinata,non secundum » subtilem examinationem
, sed secundum grossam » estimationem, sufficit enim quod circa horam
no-» nam (i). » Quelques auteurs disent que l'anticipa-tion,
pour avoir ce caractère, doit être de plus d'une heure; les
Salm. assurent que cette règle est admise par tous les auteurs;
mais Noël Alexandre la rejette. D'autres, en plus grand nombre , veulent
que l'anti-cipation soit d'une heure entière; ce sont Noël
Alexandre,Silvius, Azor, Concin., Holzm., Cuniliati, Antoine et Franzoja,
aux endroits cités. Quelques auteurs prétendent que les mendiants
tiennent de LéonXle privilège depouvoir avancer leur repas
de deux heures en hiver et de trois en été. Mais Noël
Alex. et. Franz, disent quel'on n'exhibe aucun docu-ment à l'appui
de ce privilège, et qu'après en avoir fait la recherche ils
ne les ont pas trouvés. Az., Silv., Palud. etNav. que cette anticipation
peut être exemp-
()) S- Thom, a. 2, q. l47· a. 7. ad. 2.
POUR LES CONFESSEURS.
téc de la faute grave, pour cause d'affaires urgentes de faiblesse
de constitution, ou bien lorsque l'on doit faire un sermon, ou faire un
cours, ou lire à table, ou bien entreprendre un voyage , servir
des hôtes , faire des civilités à ses amis. Mais pour
moi je ne puis pas admettre que chacune de ces causes suffise pour affranchir
de l'obligation de se conformer à ce précepte, qui, comme
nous l'avons démontré, est un précepte grave, même
aujourd'hui.
§ II. Des causes qui dispensent du, jeûne.
22. i° De la dispense ; qui est-ce qui peut l'ac-corder ?
23. 2° De l'impossibilité physique. 24· De
l'impossibilité morale.
25. Des jeunes gens et des vieillards.
26 et 27. 3° Du travail.
28 à 3o. Des voyageurs.
3i. Des artisans qui sont riches.
3a. Si l'artisan peut jeûner sans en être grave-ment incommodé.
33. Celui qui, sans motif, se charge de quelque travail.
' 34. 4° De la piété: quelles sont les personnes
excusées par ce motif.
XXII. Les causes qui dispensent du jeûne sont au nombre de quatre
: la dispense, l'impossibilité, le travail, la piété.
Nous allons traiter chacune de ces causes séparément. i°
La dispense. Peuvent accorder cette dispense, i° le pape à l'égard
de toute la chrétienté ; 20 les évêques, mais
seulement à l'é-gard de le*urs sujets, et en particulier,
parce que la
252
INSTRUCTION PRATIQCB
dispense sur la qualité dès mets en faveur d'une communauté
tout entière doit toujours être de-mandée au Saint-Siège
apostolique, comme l'a dé-claré Benoît XIV dans sa
bulle Non ambigimus. Il y a douté sur la question de savoir si un
évèque peut, pour une seule fois, en vertu de quelque mo-tif
particulier, accorder une dispense générale pour le jeûne
ou en changer le mode, alors qu'il se ren-contre une cause urgente, comme,
par exemple, s'il était à craindre que sane cela le jeûne
ne fût pas observédu tout. Plusieurs auteurs lels qu'Az.,
Sanch,, Gajet., Laym., Salm., etc., professent l'affirmative; niais Benoît
XIV, dans sa bulle Prodiit, § io, dit que l'opinion contraire est
plus commune et mieux fondée, et c'est d'après cette opinion
qu'il a répondu lui-même à quelques évêques
d'Italie, en lour don-nant, pourcette année,la permission de changer
la vi-gile du jour de saint Mathias, qui se trouvait arriver au dernier
jour de carnaval (i\ 5° Les curés peuvent aussi accorder la
dispense du jeûne à quelqu'un de leurs paroissiens, comme
il est dit au ch. 2, n.64; et cela lors même que l'évêque
est sur les lieux, suivant 1 opinion de Conc, Sanch., Az., Salm., etc.,
parce qu'un tel acte de juridiction est de la compé-tence des curés,
d'après l'usage qui leur a conféré cette juridiction.
Voir le ch. Cum contingat, defori compet. Le même pouvoir est délégué
aux vicaires des curés, qui exercent les fonctions de prêtres,
pourvu toutefois que le curé ne s'y oppose pas, Sanch., Palac, Salm.,
etc. (2),. 4° Les prélats des régu-liers, même
ceux qui sont attachés à un bien parti-
(1} Lib. III. ?. ??52. ail %. (?) Ibid, aa 5.
POUR LES CONFESSEURS.
g55
culier, peuvent, ainsi que leurs vicaires, accorder la dispense à
leurs sujets, et se l'accorder à eux-mêmes. Mais tous les
supérieurs dont nous venons de parler, le-pape excepté, ne
peuvent pas accorder de dispense sans un juste niolif, autrement elle serait
nulle (?). A. l'égard du sujet, saint Thomas (2) dit que si le motif
qu'il a pour se faire exempter du jeûne est évident et incontestable,
il peut s'en exempter lui-même, surtout lorsqu'il lui est difficile
île s'adresser au prélat (cela s'entend pour la plus grande
tranquillité de sa conscience) ; mais lorsque le motif peut être
contesté, il est tenu de s'adresser aux supérieurs.
XXIII. La deuxième excuse c'est Iimpossibilité, soit
physique, soit morale. L'impossibilitéphysique sert d'excuse i°
aux personnes infirmes que le jeûne pourrait notablementincommoder.
Ilenestdamême poiir les convalescents ou les personnes faibles qui
ne peuvent prendre dans une seule fois une quantité suffisante d'aliments
; 2°les femmes- enceintes ou qui nourrissent des enfants, car le jeûne
leur est même dé-fendu ( excepté pendant une ou deux
fois seulement et lorsqu'elles sont d'une constitution robuste) ; au contraire,
il leur est permis de manger même de la \iamle les jours de jeûne
si elles sont d'une faible constitution, ou si les enfants qu'elles nourrissent
sont affectés de quelque infirmité (5) ; sont encore exemptés
de cette obligation les pauvres qui n'ont pas assez de vivres pour faire
un repas suffisant, comme le disent tous les auteurs et saint Thomas
(1) Ibid. *A\. (a) 2. 2.rj. 147. (5) Lib. III. ?. ??35.
INSTRUCTION PRATIQUE
lui-même qui en exempte ceux « qui non possunt »
simul habere quod eis ad victum sufficiat (1 ). » C'est parconse'quent
avec beaucoup de raison que Sanch., Angl., Ronc, et les Salm. disent que
ceux qui n'ont que du pain et des herbes ou légumes ne sont pas
obligés de s'astreindre à ne faire qu'un seul repas, parce
que de tels aliments sont peu nourrissants et ne peuvent suffire à
une personne qu'autant qu'elle en prend plusieurs fois dans la journée
(2).
XXIV. L'impossibilité morale sert d'excuse à tous ceux
qui ne peuvent pas observer le jeûne sans de graves inconvénients
ou sans une grande difficulté extrinsèque^ c'est ainsi que
l'on dispense du jeûne i° ceux à qui cela cause un grand
mal de tête, Sanch., Ab.,Nav.,Elb., etc.; 2°ceux qui, lorsqu'ils
ont jeûné, ne peuvent plus pendant la nuit recouvrer la cha-leur
ou le sommeil, Castr., Less., Sanch., Laym., Salm., etc.; quelques auteurs
disent que ces person-nes-là doivent faire la collation le matin
afin depou-voir dîner le soir ; mais c'est avec raison que Fill.,
Elbel, Viva, Tamburini, Fagundez et un grand nom-bre d'autres les exemptent
de cette obligationjparce qu'aujourd'hui c'est une chose extraordinaire
et une chose très nuisible à la santé, que de remettre
le dîner au soir y et c'est par cette raison que # l'an-cienne règle
a été changée; ?" les soldats ou ceux qui se trouvent
dans la campagne ou dans les hôtel-leries, Donc, Conc, Pasq., Salm.
et presque tous les autres ; 4° les femmes lorsque l'observation du
jeûne doit leur attirer une grande colère de la part de leurs
maris ; et les hommes lorsque le jeûne les
(1) 2. a.q. ?47· a· 4· ad 4· (3) Lib. III.
cit, n, io33. ad 2,
POUR LES CONFESSEURS.
met dans l'impuissance de remplir leurs devoirs con-jugaux. Sanch.,Gaj.,Nav.,
Laym., Salm., Conc.,etc. Nous avons dit : « dans l'impuissance de
remplir les » devoirs conjugaux ; » mais ils ne seraient pas
excu-sés si cela les rendait seulement moins aptes à les
remplir, ni si cela les empêchait seulement de pro-voquer leurs épouses
, excepté dans le cas où en s'abstenant de les rechercher
ils devraient les expo-ser à tomber dans ce dérèglement,
ou leur faire (1) soupçonner qu'ils recherchent d'autres femmes.
XXV. 5° Sont encore exempts de l'obligation de jeûner,les
jeunes gens qui n'ont pas encore atteint l'âge de ringt-un ans révolus
j 6° les vieillards sexagénai-res; mais s'ils étaient
encore robustes; Bon., Laym., Fill., etc. disent qu'ils seraient également
exempts. Mais l'opinion contraire est mieux fondée: c'est celle
de Sanchez, Castro, Azor, Roncaglia, Holzm., Ana-clet,Salm., Mazzota, Elbel,Viva
et autres ;soit à cause de la coutume universelle , soit parce que
si on le décidait autrement, ce serait pour ces personnes-là
une chose très délicate que d'être obligées
d'exami-ner si elles ont assez de force ou non pour suppor-ter le jeûne;
soit encore parce que ( et c'est là la meilleure raison ), les vieillards
n'ont pas assez de chaleur et de résistance pour prendre la nourriture
qui leur est nécessaire dans une seule fois; car à cet âge-là
les forces sont facilement ébranlées. Ils ont si peu de résistance
que s'ils viennent à tomber dans quelque maladie, ils ont beaucoup
de peine à atteindre une parfaite guérison. C'est pourquoi
Galien a écritque les vieillards doivent suivre un ré-
(0 Lib. III. cit. ?. ioS5.
256
INSTRUCTION PRATIQUE
gime tout aussi bien que les convalescents (i). Pour que le sexagénaire
soit exempt de l'obligation de jeûner, il suffit, d'après
Castrop., Angles, Sa, Naldo, Viva, Busem., Mazzotta, etc., qu'il ait commencé
sa soixantième année; parce que, dans les causes favo-rables,
l'année qui est commencée est censée accom-plie (2).
D'autres auteurs ont voulu exempter de l'obligation de jeûner les
femmes quinquagénaires. Biais cette opinion ( excepté lorsqu'il
s'y joint quel-que considération particulière tirée
de l'infirmité ou de la faiblesse ) est rejetée par un grand
nombre d'autres auteurs, tels que Laymann, Tamburini,El-bel et Lacroix;
ce qui fait que Dianadoute avec raison de sa probabilité (?). Quant
à celui qui a.urait fait vœu de jeûner et qui aurait dit expressément
: « Jus-qu'à ?? mort, ou bien pendant toute ma rie, »
nous "pensons ( quoi qu'en disent quelques auteurs ) qu'il doit observer
le jeûne même après sa soixantième année;
mais on doit décjder autrement ( comme l'en-seignent Elb. et Anacl.)
pour celui qui aurait fait un tel vœu sans employer ces expressions et
ne pensant pas à la dispense qu'il doit avoir à l'âge
de soixante îins; parce qu'à cette époque-là
il se fait une modifi-cation grave dans la constitution, laquelle modifica-tion,
si elle n'a pas été prévue, suffit pour exempter de
l'obligation d'observer son vœu, ainsi qu'il est dit au ch. 5, n. 36 ,
en parlant des vœux. Nous appli-quons la même distinction aux religieux,
en ce qui
(1) Lib. III. ?. ??56.
(2) Ibid, in fin. (3J ?. ??57.
POUR LES CONFESSEURS.
a5«
concerne les jeunes qui leur sont imposés parleurs règlements
(1).
XXVI. Le travail est une autre cause d'exemp-tion. En cette matière,
il faut, avant toute chose, remarquer la proposition condamnée par
Alex. VII, laquelle porte : « Omnes officiales qui in republica »
corporaliter laborant sunt excusati ab obligatione ejejunii, etc. »
C'est avec raison que cette proposi-tion fut condamnée, parce qu'elle
était trop géné-rale; puisque, d'après ces
expressions, l'exemption serait accordée à quiconque travaille,
soit par devoir, soit par amusement, et soit que ce travail soit com-patible
ou incompatible avec le jeûne, et cela ne doit pas être. Du
reste, aujourd'hui même personne ne conteste que tous les métiers
qui nécessitent un grarfd mouvement du corps, ne soient une cause
d'exemption du jeûne. Dans cette classe sont com-pris les travailleurs
de terre, les laboureurs, les char-pentiers, les tailleurs de pierre, les
scieurs de mar-bre ou de bois, les tisserands, les potiers, les lai-iiiers,
les teinturiers, les laveurs,· les porte-faix, les cochers, les
mariniers rameurs , les menuisiers, lés forgeronsjjles fabricants,
les courriers, les maçons, les boulangers, les pannetiers, ceux
qui appiêtent une grande quantité de plats pour beaucoup de
personnes, ceux qui font manœuvrer les presses dans les imprimeries, les
domestiques occupés à de grands travaux, mais non pas les
servantes qui s'oc-cupent à filer ou à toute autre espèce
de travail peu fatigant, les marchands qui colportent leurs mar-chandises
dans les rues, les décorateurs d'églises qui portent des
échelles ; mais il est bien entendu
(i) N. io38.
T. xxiv.
*7
que topfes ces personnes-là ne sont dispensées du jeûne
que lorsqu'elles se livrent à ces occupations, pendant }a plus grande
partie de la journée (1).
XXYII, L'exemption n'est pas ordinairement ac-cordée aux barbiers
^ excepfé, comme le disent Sanch,, Less., Cast., Gone, Maz., etc.,
lorsqu'il y en a quelqu'un qui, à cause de la quantité de
travail ou de la faiblesse de sa constitution, ne pourrait pas exercer
son métier, s'il s'astreignait à l'observation du jeûne.
Nous en dirons de même des tailleurs, suivant l'opinion de Ronc,
Conc, et des Salm. Cela s'applique encore aux notaires, écrivains,
peintres et {îorlogers, c'est-à-dire ceux qui font de petites
pendules, car pour ceux qui en font de grandes, leur travail est ordinairement
considérable (2). D'autres «juteurs exemptent epcore les prfévres
et «es sculp-teurs; mais, pour ceux-là, l'on doit avoir égard
aux circonstances , en ne perdant jamais de vue cette règle généralement
reçue, que celui qui ne peut exercer sa profession (quoiqu'elle
ne soit pas fati-gante par elle-même) sans un grave inconvénient,
à cause de sa faiblesse ou par tout autre motif par-ticulier, n'est
pas obligé d observer le jeûne (?).
XXVIII. Sont encore exemptés du jeûne, ceux qui voyagent
à pied pendant la plus grande partie du jour; tels sont les voituriers
et les muletiers. 11 faut cependant remarquer que si un de ces gens-la,
à la fin de son voyage, se trouve avoir mangé suffi-samment,
quoiqu'il n'ait pas encore pris une quantité très considérable
de nourriture, il ne peut pas
(0 Lib. III. ?. ??4?.
(2) Ibid. V. Barbitousores.
(?) Ibid. V. Alii.
POUR LES CONFESSEURS.
dîner une seconde fois , à moins qu'il ne doive con-tinuer
sa route le jour suivant. En outré,. chacun est tenu
(lorsqu'il le peut sans inconvénient) de différer
son voyage, afin de ne pas se soustiaire à l'obligation du jeûne,
ainsi que l'enseigne saint Tho-mas (1), dont l'opinion est suivie par Lessius,
Lay-inann, Tolet, etc., et suivant ce que nous dirons ci-après,
au n° 33. Mais lorsqu'on a déjà entrepris un voyage,.et
qu'il survient, pendant qu'on est en route, un jour
de jeûner on n'est pas obligé d'in-terrompre sa marche
pour jeûner, ainsi que le disent Sanchez, Laym.,
Abul., Sporer, etc. (#). Néanmoins saint Thomas
dit que dans tous les cas dont nous avons parlé, où le jeûne
doit être rompu pour cause d'impossibilité ou de travail,
avant de le rompre « Videtur recurrendum
ad superioris «dispensationem; nisi forte ubi est ita
consuetum, «quia ex hoc ipso quod praelati dissimulant, viden-tur
annuere (3). »
XXIX.' On demande i° quelle est la quantité de chemin qui
peut donner lieu à une exemption. Pasq. pense qu'ilnefaut qu'un
chemin desixmillesjmaiscette opinion est rejetée par d'autres auteurs
qui veulent que le voyage soit de quatre ou cinq lieues au moins (c'est-à-dire
de douze ou quinze milles, car la lieue comprend trois milles ou bien elle
équivaut à une heure de chemin, ainsi que le dit Lacroix).
Voir Castr., Viv., Saljn., Dian. , etTrull. Mais Lacroix, Bon., Fill.,
etc. exigent au moins cinq lieues. Ce-pendant si le chemin est mauvais,
ou que le voya-
(l) a. 2. q.*l47· a· 4· ad. 5.
(a)* Lib, Ifl. ?. ??47·
(3) S. Thorn, a. 3. q. 147. a. 4· ad. 3
2*)0
INSTRUCTION PBATIQUE
geur soit faible ou peu habitué au voyage, et ne puisse par
conséquent observer le jeûne sans en être gravement
in commode; alors, suivant Sanch., Salin. Ronc. et Lacroix, une distance
de six milles seule-ment à parcourir sera suffisante pour l'exemp-tion
(1).
XXX. On demande 2° s'il faut exempter aussi ceux qui voyagent à
cheval ou en voiture. Alex. VII a condamné la propos, ?? qui portait
: « Excusantur «absolute omnes illi qui iter agunt equitando,
» utrumque iter agant, etiamsi necessarium non sit, »-et etiam
si iter unius diei conficiant. » Du reste, la plupart des docteurs,
ne font pas difficulté d'exemp-ter ceux qui voyagent pendant plusieurs
jours de cette manière-là. Laym. et Viv. veulent que le voyage
dure huit jours, mais cela paraît trop rigoureux. Ce-pendant le P.
Viva a fait remarquer avec raison, que même en voyageant on n'est
pas exempté de l'obli-gation déjeuner, si on peut le faire
sans inconvénient, et d'un autre côté, Azor, Sanch.,
Toi., Ronc, Salni., Lacroix, etc. ,-disent que le voyage qui ne dure qu'un
seul jour peut aussi être un motif d'exemption lorsqu'on doit éprouver
une grande fatigue (comme cela arrive aux coureurs) ou lorsqu'on est très
fai-ble, ou que le temps est rude, ou le chemin fatigant, ou le voyage
extraordinaire. Sanch., Toi., Salm., Cor., etc. (contre l'opinion de Mach.,
Dian., etc.) ne regardent pas comme extraordinaire le voyage qui serait
de huit ou dix lieues. Viva dit avec raison que si un voyageur se trouve
n'avoir pas assez de vivres dont l'usage est permis en carême, il
doit plutôt se nourrir de laitage et observer le jeûne, que
de se
(1) Lib. Jfl. 11, io4?· dub. a.
POUR I.ES CONFESSEURS.
??(
nourrir de choses légères insuffisantes pour se sou-tenir,
et puis manger plusieurs'fois (1).
XXXI. On demande 5° si les artisans riches qui exercent un métier
fatigant sont obligés d'observer le jeûne. Le P. Conc. ainsi
que Dur. et Arm. sont pour l'affirmative; mais la négative est plus
commu-nément professée par Silv., Sanch., Nav., Less., Ronc,
Toi., Viv., Sal m., Elb. et un grand nombre d'autres, parce quel'utilité
publique est intéressée à ce que les ouvriers ne soient
pas interrompus dans les occupations de leur métier ; car, si pendant
les jours de jeûne il n'y avait que les ouvriers pauvres qui tra-vaillassent,
l'Etat en souffrirait. A l'appui de cette opinion, tous les auteurs que
nous avons cités rap-portent une déclaration d'Eug. IV de
i44°> ou ^ es·· dit : « Artifices laboriosas artes
exercitantes, et rus-» lici, sive divites, sive pauperes , non tenentur
jeju-» nare sub praecepto peccati mortalis, etc. (2)..» ? XXXII.
On demande 4° si les ouvriers qui, même en travaillant, peuvent
jeûner sans grave inconvé-nient, sont obligés de le
faire. Tamb., Pasq.,Leand. et quelques autres disent qu'ils n'y sont pas
obligés, soit à cause de l'usage contraire qui est établi,
soit parce que les lois ne sont pas applicables aux cas ex-traordinaires
; mais la plupart des auteurs, tels que Bon., Reg., Conc. et Viv. soutiennent
avec plus de raison l'affirmative toutes les fois que ces artisans peuvent
observer le jeûne sans en être gravement incommodés,
pourvu que cela soit évident ; car s'il y avait doute, la présomption
resterait en faveur de l'exemption du jeûne. Cette seconde opinion
paraît
(1) Lib. III. ?. ??47· dub. >. (a) ?. io4a-
ï6a
INSTRUCTION PRATIQUE
mieux fondée en théorie; car la loi oblige en général
tous ceux qui peuvent jeûner sans être gravement incommodés
;~mais dans la pratique, il est bien dif-ficile que le jeûne ne fatigue
pas ceux qui travaillent, ou tout au moins qu'il ne les affaiblisse pas
de ma-nière à ne pas les empêcher de travailler le
jour sui-vant (1 ). Nous en dirons de même pour l'artisan qui pendant
le carême reste un ou deux jours sans tra-vailler; parce que, quoique
Azor, Sanch., Bonac., Ronc, Lacroix, etc., admettent généralement
qu'il n'est pas obligé déjeuner pendant ces deux jours (le
premier, à cause du travail du jour précédent, le
second, à cause de Celui du jour suivant),-tiéanmoins s'il
peut observer le jeûne sans être incommodé , il doit
le faire, comnie le disentavec faison Bonacina, Viva contre Sanchez et
Elbel (2).
XXXIII. On demande, 5° si celui qui, sans motif, se charge d'un
travail qui doit l'exempter du jeûne, (Sommet un péché;
quelques auteurs, tels queRonc, Bon., etc., professent là négative,
lorsque ce n'est pas pour éluder le précepte qu'on a entrepris
ce ira-vail, c'est-à-dire exprès pour s'exemptei du jeûne..
D'autres, tels que les Salm., Pasq., etc., l'excusent lors même qu'il
s'est mis à travailler exprès pour s'exempter du jeûne,
en disant qu'il ne fait qu'user du droit qu'il a pour se soustraire â
cette obligation. Mais nous croyons, au contraire, qu'il y a là
un péché, lors même qu'on n'a pas eu intention d'élu-der
le précepte; c'est l'opinion de Cast., Sanchez, Laymann, Lacroix
et autres. La raison en est que (comme nous le dirons au chapitre 2, n"
24), toute
(i) N. io4ô. (3) N. 1044.
POUR LES CONFESSEURS.
265
loi doit être observée tant qu'on n'a pas un juste motif
de s'en dispenser. Saint Thomas (1) enseigne expressément la même
chose, en disant que l'on commet un péché lorsqu'on s'applique
à quelque occupation qui doit, plus tard, empêcher que l'on
puisse entendre la messe 5 et il en donne pour rai-son: «Qui enim
vult aliquid cum quo aliud esse non «potest, ex consequent! vult
illo carere. » Nous avons dit qu'on commet un péché;
mais du .reste, si l'on entreprend un travail en conservant l'intention
de jeûner, et qu'ensuite on soit forcé de le rompre, on ne
pèche pas, suivant l'opinion de Laym., Gone, Sylv., Sanchez , Cast.,
etc., qui s'accordent à dire que, quoique l'on se soit livié
à un travail pénible, dans l'intention d'éluder le
précepte ou par tout autre motif coupable, on n'est pas tenu, api
es ce travail, d'observer le jeûne, parce qu'alors on s'est mis dans
l'impossibilité morale de remplir cette obligation. Sanchez dit
en outre, que si quelqu'un a supporté unefatiguequelconquedansunbuthonnête,
par exemple, pour rendre visite à ses parents, pour se récréer
en allant à la chasse, ou en jouant à la balle, il ne -commet
pas un péché. Mais cette proposition^ ainsi exprimée
d'une manière générale, est justement combattue par
Ab. et Spor. dans le cas où ce n'est que par pur amusement que l'on
a fait ce voyage, ou que l'on s'est exposé à cette fatigue.
Quant à celui qui se livre à un grand travail dans l'espoir
d'en retirer un profit considérable, Nav., Cajet., Laym., Sanch.,
Spor., Elb., disent, avec raison, qu'il ne commet pas de péché,
lors même que ce travail ne rentre pas dans les attributions de sa
pro
(j) a. », «j. 7i. a. 5.
INSTRUCTION PRATIQUE
fession {?). Cela résulte de ce que nous avons dit au ch.vi,
n. 22, parce que, suivant la loi i,ch. Desentent,, la perte d'un gain considérable
est réputée un dom-mage grave.
XXXIV. l\" La piété est un motif d'exemption lorsque,
par exemple, l'on doit remplir quelque de-voir de piété qui
a plus d'importance que le jeûne. Sanchez, Bon., Arm., Gabr., Salmant.^etc.
(contre quelques autres ), admettent cette exemption, lors même que
cette œuvre de piété n'est pas un devoir, mais que c^est
par une véritable dévotion que l'on s'y livre, à moins
que l'on ne puisse facilement en remettre l'accomplissement à une
autre époque(-2). Les docteurs exemptent, 1° ceux qui sont occupés
à s-ervir un grand n'ombre de personnes infirmes en se fatiguant
beaucoup, Castr., Bonaci., Salm., etc. ; 2°. ceux qui font quelque
pèlerinage qui doit tour-ner à la plus grande gloire de Dieu,
ou à l'édifica-tion de tous les fidèles, ou bien au
profit de leur âme. V. Sanch., Castr. Silv., HoUm, Salm., etc., à
moins que ce pèlerinage ne puisse facilement être différé,
ainsi que nous l'avons déjà dit, et suivant la restriction
que font, avec juste raison, Lessius, Salm., Holz., ainsi que saint Thomas,
qui dit: «Si pe-» regrinatio aut operis labor commode differri
possit «aut diminui absque detrimento corporalis salutis, »
non sunt ecclesia? jejunia praetermittenda (?).» Mais lorsque le
pèlerinage est déjà commencé, et qu'il survient
un jour de jeûne, on m'est pas obligé de l'interrompre pour
jeûner. V. Laym., Ab., Sanch.,
(1) Lib. III. ?. ??45,
(2) ?. io46 et ?. ??48.
(3) a. 2. q. \!\?. a. 4· ad 3.
POUR LES CONFESSEURS.
Salm., Spor., etc. 3° Sont encore exempts les pré-dicateurs
qui font tous les jours, des,sermons, à cause de leurs
études et de l'agitation corporelle à laquelle ils se livrent.
Cette exemption s'applique spécialement aux missionnaires qui sont
obligés de se donner plus de mouvement dans leurs prédica-tions,
ainsi que l'enseignent Wiga.,Cajet.,Nav., Toi., Salm., etc. Du reste, je
pense que les orateurs sacrés qui doivent prêcher plutôt
par l'exemple que par des paroles, devraient observer le jeûne autant
que cela leu» est possible. Je ne puis pas non plus ad-mettre (généralement
parlant) l'opinion des auteurs qui exemptent même les prédicateurs
qui ne prê-chentvque deux ou trois fois la semaine. 4°
Un grand nombre de docteurs accordent encore une exemption aux chanteurs,
à qui le jei\ne ferait perdre la voix, et les lecteurs de sciences
(Sanchez y joint les lecteurs de grammaire), qui sont obligés d'étu-dier
beaucoup pour faire leurs coins. Ils en disent de même pour les avocats
et les juges , qui ont be-soin d'apporter une grande application à
l'accom-plissement de leurs devoirs, parce que le travail d'esprit auquel
ces personnes-là se livrent, les épuise et les oblige à
prendre "une nourriture, sinon plus abondante, au moins plus fréquente.
De même en-core, Castr.,Ronc, Salm.,Sanch., Spor., Viva, etc., exemptent
les confesseurs qui, à raison del'affluence des pénitents,
seraient obligés de s'imposer un tra-vail extraordinaire.
Mais Tamb. fait remarquer, avec raison, que toutes les personnes
dont nous venons de parler ne sont dispensées du jeûne que
lorsqu'il doit les mettre dans l'impossibilité de rem-plir leur
devoir, et lorsque cette impossibilité est manifeste; car s'il y
avait incertitude, on devrait
266
INSTRUCTION PRATIQUE
maintenir la possession du fait qui existe en faveur de l'obligation.1
Laym., Nav., Gaët., Silv., Toi. et Spor., font remarquer en outre
que si une per-sonne , sans avoir de juste motif pour se dispenser du jeûne
pendant le carême, croit de bonne foi pouvoir" satisfaire à
l'obligation imposée par le pré-cepte, au moyen de deux jeûnes
ou trois dans la se-maine , le confesseur ne doit pas l'obliger à
jeûner tous les jours s'il est à craindre qu'une telle obli-gation
imposée ne le porte à ne plus jeûner du tout(i).
DEUXIÈME POINT.
Du piéceptc de la confession et de la communion annuelles
55. Du précepte de Îa confession annuelle ; si ce précepte
oblige ceux qui n'ont commis que des pé-chés véniels,
et si celui qui prévoit, etc.
36. Si celui qui a négligé de se confesser la pré-cédente
année, doit le faire le pins tôt possible, et. combien de
péchés commet celui qui néglige la con-fession.
37. Si celui qui se confesse pendant l'année sui-vante
satisfait à l'obligation qui lui était imposée pour
l'année précédente.
38. Peines prononcées contre les transgresseurs du précepte,
3c). Dti précepte de ta communion pascale. 4ô. Celui qui
l'a négligée est-il obligé de la faire le plus tôt
possible ? Est-if tenu de devancer, etc.? 4i. Si les excommuniés,
les prisonniers, etc. ?
C?5 tit). Ill, ?. l049. in fin. V. Hic autem».
sexus fidelis
FOUR LES CONFESSEU
^2. La communion doit êtrefait< 43. Sont exempts de cette
oblig les pèlerins et les desservants d quelle époque les
enfants doivent ? nier.
XXXV. En premier lieu, il faut de la confession, que dans le conc sous
Innocent ?? , il fut ordonné les ayant acquis l'usage de la
rai de confesser tous leurs péchés, a 3ans l'année,
voyez le çh. Omnis, de il est dit : ? Omnis utriusque ? ad annos
discretionis pervenerit » cata, saltem semel in anno , fid • proprio
sacerdoti. » II est dit Cela signifie : toute personne bap qu'elle
serait hérétique. Il est dit annos, etc. » Cela signifie
: toute j quis la connaissance dé Dieu ( au. naissance imparfaite
) , et qui géchés, lesquels peut-être, meriten sequent
( comme nous le dirons i l'observation de ce précepte qui ont commis
des péchés sept ans, s'ils ont déjà acquis
l'usage que la déclaration du concile obi générale
tous ceux qui ont I'intell est dit 3° omnia sua peccata ; et si la
confession est imposée même pas commis de péché
mortel Saini-Bonav. etautres sontpourl'a négative est professée
plus commui de vérité par saint Anton,, Cam Lug.,etc., parce
qu'en Ordonnant
penc ant
s·
267
dans sa paroisse. tion,les prêtres,
s monastères. A peuvent commu-
savoir, à l'égard le de Latran tenu jue tous les fidè-on
seraient tenus 1 moins une fois pœnit. et rem.,où
, postquam omnia sua pec-elïter confiteatur 0 omnis fidelis. ;isée,
lors même 2° postquam ad ersonne qui a ac· moins une con-a
offensé par ses t l'enfer. Par con-u ch. Il, n. 5y ) ,
aux enfants avant l'âge de de la raison, parce ge d'une manière
gence formée. II ci l'on demande à ceux qui n'ont l'année.
Silv., firmative; mais la ément et avec plus is., Suar., Gaët.,
la confession, ??-
est imposée
me me
268
INSTRUCTION PRATIQUE
glise n'entend ordonner que celle qui est conforme à l'institution
de Jésus-Christ, et le Seigneur n'exige la confession que pour les
péchés mortels seulement, comme l'a déclaré
leconc. de Trente(sess. i4, ch. v). Cela résulte encore du texte
que nous avons cité ' plus haut, où il est dit : Omnia sua
peccata fideliter confiteatur. L'expression omnia ne comprend pas d'.iutres
péchés que les péchés mortels,,car tous les
auteurs conviennent que l'on n'est pas obligé de confesser les péchés
véniels (1). Il est dit 4° saltem semel in anno. Cette année
devrait, régulièrement, être comptée depuis
le mois de janvier jusqu'à celui de décembre ; mais d'après
l'usage universel on la compte d'une pâque à l'autre, comme
le disent Sua-rez,Lugo, Concina, Holzm.,etc. (2). Ici il s'élève
une autre question : lorsque quelqu'un prévoit que pen-danttout
le courant de l'année suivante,il ne trouvera plus la possibilité
de se confesser, doit-il devancer l'époque, et se confesser avant
la fin de la présente année? Holzm. est pour la négative;
mais nous sommes de l'avis de Lugo et Btiseni. (?), qui pro-fessent l'affirmative,
parce que si cette personne a commis un péché mortel, elle
a contracté l'obligation de se confesser pendant cette année,
et par consé-quent elle doit devancer l'époque de sa confession
si elle prévoit que plus tard il ne lui sera pas possible de remplir
ce devoir. Il est dit 5° fideliter confiteatur, d'où il résulte
que l'obligation n'est pas remplie lorsque la confession n'est pas valable
et encore moins lorsqu'elle est nulle, Alexandre Vllayantcon-
(1) Lib. VI. 667. (a) N. 662. (3) N. 771·
POUR LES CONFESSEURS.
26o
damné la propos. i4, qui portait : ? Qui facit confes-sionem
voluntarie nullam, satisfacit prœcepto eccle-sice. » La raison est
qu'une confession nulle, n'est pas une véritable confession. Il
est dit 6° proprio sacer-doti; ces paroles désignent, non pas
seulement le curé, mais tout prêtre autorisé à
recevoir les con-fessions ; comme l'explique la Glose et comme l'en-tendent
Fagn., Cab. et la plupart des autres docteurs. Cette question n'en est
plus une aujourd'hui à cause de l'interprétation qui a été
consacrée par l'usage. C'est pourquoi la sainte C. déclara,
en i584, que si un évêque ordonnait qu'aucun prêtre
ne pourra à la pâque recevoir la confession des pénitents
sans la permission de leurs curés, on ne devrait tenir aucun compte
d'un pareil décret (1).
XXXVI. On demande i° si celui ]qui a laissé pas-ser l'année
sans remplir l'obligation qui lui étaitimpo-sée de se confesser,
est tenu de réparer sa négligence en se confessant le plus
tôt que cela lui sera possible? St. Anton., Sot., Silv., Toi., etc.,
sont pour la né-gative, en disant que s'il y a un précepte
divin qui ordonne de se confesser plusieurs fois dans la vie, celui qui
règle la confession annuelle est un pré-cepte purement ecclésiastique,
et, comme tel, inhé-rent à i'année ; ce qui fait qu'une
fois Tannée ter-minée, le précepte qui y était
relatif est anéanti. Mais nous adoptons l'affirmative, qui est plus
généra-lement professée par Gon., Suarez, Navarre,
Lugo, Tournely, etc., ainsi que par le cardinal Lamber-tini (2). Cette
opinion est fondée, soit sur le pré-cepte divin, dont la
détermination a été laissée à
(?) Ibid. n. 564-
(a) Liunbeili nati. t. 5. p. 42·
2^0
INSTRUCTION PRATIQUE
l'Église, qui a fixé à une fois par'an l'obligation
dp se confesser, suivant l'opinion la mieux fondée et la plus généraleaient
reçue; soit sur le précepte ec-clésiastique qui ordonne
de se confesser une fois dans l'année, non pas dans le but d'éteindre
l'obli-gation, mais dans le but de l'accomplir (1). Quant à la question
de savoir combien de péchés commet celui qui ne se confesse
pas après ^expiration de l'année , Silv., Lay m., Val en.,
etc., disent qu'il ne commet qu'un seul pécîié continu.
Mais c'est avec plus de raison que Bon., Suar., T<ug., Vasq., etc.,
disent qu'il pèche autant de fois qu'il a l'occasion de se confesser
et qu'il néglige de le faire, parce que-ce péché ne
se continue pas par des effets exté-'ïieurs, mais seulement
par l'intention coupable, laquelle multiplie le.nombre des péchés,
lorsqu'on y persévère pendant long-temps, comme nous le dirons
au ch. ni, n. 52.
XXXVII. On demande %" si le pécheur qui fait dans l'année
suivante la confession qu'il avait né-gligé de faire pendant
la précédente année, accom-plit le précepte
pour l'une et l'autre année? Cette question est résolue affirmativement
par certains auteurs, et négativement par certains autres. Mais
l'opinion la plus exacte est celle de Castr., Viv., Hurt., Salm., etc.,
qui établissent la distinction sui-vante. Si dans cette confession
le pénitent s'accuse des péchés graves qu it a commis,
tant dans la pre-mière année que dans la seconde, il satisfait
aux deux obligations, parce qu'alors il remplit l'objet des deux préceptes,
qui est de se réconcilier avec Dieu pour les péchés
de chaque année. Il en serait
(1) Lib. VI, ?. 668. et vide etiam. n. 297.
POUR 1ES CONFESSEURS.
271
autrement s'il se confessait seulement des péchés graves
commis dans la première année, et qu'après cela il
commît d'autres péchés mortels dans le cou-rant de
cette seconde apnée; car, dans ce cas, il doit se confesser (Je
nouveau pour accomplir le précepte de la seconde année, Cela
est confirmé par Suar,, Laym., Castr., Salin., Lug., etc., etc.,
qui disent que si quelqu'un confesse seulement des péchés
véniels, au commencement de l'année, et commet ensuite, dans
le courant de cette même année, des fautes graves, il est
obligé de faire une nouvelle confession. Ainsi donc, lorsqu'on se-con-fesse
seulement des péchés mortejs commis dans la première
année, on n'accomplit pas le précepte relatif à la
seconde (1).
XXXVIII. La loi commune, d'après le
texte précité (au chap. Omnis), impose deux peines
à celui qui ne se conforme pas au précepie de la communion
ou de la confession ; savoir : 1* défense d'entrer dans l'église,
et la privation de sépulture j mais ces peines-fà ne sont
jamais encourues qu'en, vertu d'un jugement. Les impubères en sont
gêné» ralement exemptés, comme le disent la plupart
des docteurs (2). En traitant du sacrement de pénitence, nous expliquerons
dans quelles occasions et dans quel temps i\s doivent accomplir le précepte
de la confession.
XXXIX. A l'égard du précepte de la communion pascale,
il faut remarquer qu'il est en même temps divin et ecclésiastique.
Divin d'après ce que dit le Seigneur dans saint Jean : « Nisi
manducaveritis car-?? Ibid. ?. 669
(a) Ibid. n. 674.
7
INSTRUCTION PRATIQUE
» nem filii hominis, et biberitis ejus sanguinem, non »
habebitis vitam in vobis. > (Joa.*, ch. 6.) Ecclésias-tique d'après
ce qui est dit au chap, prépité. Omnis : « Suspiciens
reverenter ad minus in pascha eucha-» ristite sacramentum; »
et dans le concile de Trente, sess. 13, ch. vi, où il est dit :
«Si q?is negaverit omnes » fideles teneri singulis annis, saltem
in paschate,ad » communicandum juxtà praeceptum sanctas matris
» Ecclesias, anathema sit.» Pour l'accomplissement de ce précepte,
l'année se compte d'une pâque à l'au-tre, suivant l'usage
communément pratiqué aujour-d'hui. Le temps pascal commence
au dimanehe des Rameaux et finit Su dimanche «'« albis, ainsi
que le déclara Eugène IV,«n i44°> dans sa bulle
Fide dignâ, quoique les évêques puissent proroger ce
délai, soit en vertu d'un privilege, spit en vertu de l'usage établi
(1).
XL. Nous dirons de la communion comme nous l'avons dit de la confession,
que si l'on n'a pas pu la faire dans le délai du temps pascal, on
doit, la faire aussitôt qu'on le peut. Cette obligation est imposée
tant par le précepte divin (dont l'Église a terminé
l'accomplissement à tout l'intervalle du temps pascal ), que par
lé précepte ecclésiastique qui désigne le temps
pascal, npn pas pour éteindre l'obligation, mais pour l'accomplir
(2). Une autre question s'élève, c'est celle de savoir si
lorsqu'on prévoit qu'on ne pourra pas communier à la pâque,
l'on doit avancer l'époque de la communion. A l'é-gard de
la confession, cette même question a été résolue
affirmativement, parce que dès l'instant
(1) Lib. Vt. n. 296.
(2) N. a97.
POUR LES CONFESSEURS.
que l'on a commis un péché grave, on contracte l'o-bligation
de se confesser dans l'année, et par consé-quent si l'on
prévoit qu'on ne pourra pas faire sa confession, on est tenu d'en
avancer l'époque et de la faire avant que l'année soit terminée.
Mais on ne peut pas appliquer cela à la communion, comme le disent
avec juste raison Suar., Azor, Holzm., etc. (contre Laym. et Hab.), parce
que, suivant l'opi-nion reçue aujourd'hui, l'obligation de communier
ne commence qu'à l'époque du temps pascal, et par conséquent
on ne peut pas avoir contracté (1) cette obligation avant que le
temps pascal ait commencé. Si l'on communie avant cette époque,
on n'a pas pour cela accompli le précepte ; au point que si l'empêchement
qu'on prévoyait et qui avait fait avancer l'époque de la
communion vient à cesser, on est obligé de communier de nouveau
à la pâque, comme le disent avec raison Lugo, Salm., etc.,
con-tre Tamburini (2). Il est hors de doute que le temps pascal étant
commencé, si l'on prévoit qu'on ne ' pourra pas communier
ensuite, on doit le faire sur-le-champ sans laisser écouler cette
époque (?).
XLI. Remarquez i° que les excommuniés et les prisonniers
doivent faire leurs efforts pour ob-tenir l'absolution ou la liberté,
afin de pouvoir ac-complir la communion pascale, attendu qu'elle est ordonnée
par un précepte divin, comme nous l'avons dit (4). Remarquez 20
qu'il n'est permis à personne, pendant la pâque, de communier
hors
(1) N.-298.
(2) Ibid. 11. 297. circa fin. V. Dicit autem. (5) ?. ag8. in
fin.
(4) ?. 499·
t. xxiv.
18
274
INSTRUCTION PRATIQUE
de sa paroisse (ou tout au moins de la cathédrale, comme l'admettent
avec raison Bonaci. et Busem., contre l'opinion de Lugo ; mais je ne sais
pas si on doit le permettre dans les endroits où cela n'est pas
autorisé par un usage qui puisse faire présumer le consentement
de Vévêque), excepté lorsqu'on en a obtenu la permission
, soit du curé, soit de l'évê-que, soit du vicaire.
Cependant la permission pré-somptive ou interprétative suffit
à cet égard, comme l'enseignent Suarez, Lugo, Salm., Busemb.,
pourvu que l'on ait la certitude morale qu'ils accordent leur consentement
(1). Quelques auteurs ont ensuite prétendu qu'il était permis
de faire la communion dans les églises des réguliers, à
cause des privilèges dont elles jouissent; mais cette opinion est
géné-ralement rejetée par Suar. Lug., Salm., Tamb.
etc., ainsi que par un décret de la S. C. On ne peut pas arguer
de ces privilèges, caries pontifes ont souvent déclaré
que le droit des curés, à l'égard de la com-munion
pascale, reste toujours intact (2). De plus, Benoît XIV (3) et un
décret de la S. G., du 9 juillet 1644, confirmé ïe 11
juin i65o, donnent à Î'évêque le pouvoir d'interdire
aux réguliers de donner la communion le jour de Pâques, même
aux personnes qui communieraient simplement par dévotion. Le ??
juin 1687, la même S. C. ré-pondit aux curés de Louvain,
qui voulaient qu'il fût défendu aux jésuites de donner
la communion pendant tout le temps pascal, qu'ils pouvaient la donner pendant
tout ce temps, le jour de Pâques
(1) N. 3oo. aa 4.
(2) Ibid. V. fin.
(3) De synodo 1. 9. c. 26. n. 3.'
POUR LES CONFESSEURS.
excepté (excepto die paschatis). Cependant il faut entendre
cela (comme l'entend le pontife ci-dessus nommé ), sauf la défense
qui pourrait être faite par l'évèque.
XLII. Remarquez 5° que cette obligation ne frappe pas, i. sur les
prêtres, lesquels peuvent accomplir le précepte dans tous
les lieux où ils disent la messe, suivant l'opinion commune; mais
si c'est hors da service divin, alors ils ne peuvent commu-nier que dans
leur paroisse, a. Les pèlerins qui se trouvent éloignés
de leur paroisse peuvent com-munier dans une église quelconque.
Ifs ne sont pas même tenus de communier dans la paroisse du lieu
où ils se trowvent, ainsi que le disent d'un commun accord Cajet.,
Soto, Azor, Suarez, Lugo, Sancti., Bona., Castro., Satò., etc.,
contre Barb., Tourn. et Ronc. La raison en est que leur propre pasteur
n'est pas là pour les reconnaître, et qu'alors il n'y a plus
aucun motif pour les obliger à communier dans teHe paroisse plutôt
que dans telle autre (1). 5. Les do-mestiques des monastères qui
vivent dans le cloître même, et sont soumis à l'autorité
de leurs prélats , comme le soutient avec raison le cardinal Lamber-tini
(2), ainsi que Wigandt et plusieurs décrets de la S. C., contre
Castrop., Bonac., Salmantic., ? one, etc., qui accordent cette exemption
généra-lement à tous ceux qui habitent les monastères.
Malgré que k compagnie de Jésws jouisse de ce pri-vilège
pour tous les domestiques qui habitent ses établissements, néanmoins
le P. Zaccar/a (3) atteste
(1) Lib. VI. ?. s4o· ad 9· V. Luic.
(2) Tom. 2. nati. 55.
(3) Apud Lacroix. 1. 6. î>. ?. ?. 5*4·
276
INSTRUCTION PRATIQUE
que la sainte Église'a plusieurs fois déclaré
que ce privilège ne s'étendait pas aux autres corporations
religieuses (1). m ,
XLIII. Remarquez 4° que le concile de Latran a détendu la
communion aux enfants qui n'ont pas encore l'usage de la raison et aux
personnes qui sont dans un état de démence permanent. Mais
il s'agit de savoir si les enfants peuvent et doivent commu-nier aussitôt
qu'ils ont atteint l'âge de raison. L'af-firmative est soutenue par
Palud,, S. Ântonin, etc.; mais la négative est plus généralement
reçue, et avec plus de raison, parce que la communion est un acte
qui exige un profond recueillement, et par conséquent un très
grand discernement. Du moins c'est ainsi que cette obligation a été
interprétée par l'usage pratique de l'Église. Du reste,
c'est avec raison que Soto, Suarez, Lay m., Castro., etc., ainsi que saint
Thomas (2) , conviennent que, quoique ces enfants ne soient pas encore
obligés de commu-nier, on peut néanmoins les y admettre dès
l'instant qu'ils savent distinguer le pain céleste du pain ter-restre
: » Quia (dit le docteur) possunt aliquam de-» votionem concipere
; » et cela est confirmé par le ch. Penult. 26. q. 6, où
il dit : « Cui poenitentiae sa-it cramentum conceditur, neque Eucharistiae
sacra-» mentum negari debet, si desideret. » Et lorsque les
enfants se trouvent à l'article de la mort, non seu-lement on peut,
mais on doit leur donner la com-munion, comme le disent les docteurs déjà
cités, ainsi que BenoîtXIV (3), parce que, dans ce moment
(1) Lib. VI. a. a4o. ad. 10.
(a) 3. 9. p. 80. a 9.
(5) De'synod. 1. J.JC. }2, ». 3»'
JOUR LES CONFESSEURS.
ils sont tenus de communier d'après ce précepte divin,
s'ils ont déjà l'âge de la raison. Hors de ce cas,
c'est-à-dire du danger de mort, les docteurs s'accordent à
dire que, régulièrement parlant, l'o-bligation de communier
ne commence pour les en-fants qu'à leur neuvième ou dixième
année, et qu'ils ne peuvent pas différer de l'accomplir jusqu'au-delà
de leur douzième ou quatorzième année. Voir Suarez,
Laym., Antoine, Lacroix, etc. Saint Charles a ordonné aux curés
de préparer à la communion tous les enfants qui ont atteint
leur quatorzième année (i).
. XL1V. On demande enfin s'il est permis de don-ner la communion aux
insensés. Nous avons déjà dit que l'on doit toujours
refuser la communion aux insensés qui sont dans un état de
démence continuel, dans toute occasion, et même à l'article
de la mort, comme il est dit dans le Rituel romain (de Euchar.). Quant
aux insensés qui n'ont pas toujours été pri-vés
de l'usage de leur Taison, on peut leur donner la communion (ainsi qu'il
est dit au même Rituel), lorsqu'ils se trouvent dans un intervalle
lucide, ou bien, comme le dit saint Thomas (2), lorsqu'avant de tomber
en démence, ils ont témoigné une grande dévotion
pour ce sacrement: « Si prius quando erunt » compotes mentis,
apparuit in eis devotio hujus » sacramenti, nisi timeatur periculum
exquisitionis. » On voit la même chose exprimée dans
le Catéchisme romain (5) ; d'où plusieurs auteurs concluent
avec raison que pour que l'on puisse donner la commu-
(j) Lib. VI. ?. Soi, (a) 5. 9. q. 80. a. 9.
(3) 8. £. c. 4. n. 64.
9?%
INSTRUCTION PRATIQUE
nion à un insensé, à l'article de la mort, il
suffit qu'avant de perdre l'usage, de la raison il ait vécu pieusement
(1). Quant à ceux qui sont à demi fous, Cast., Wigandt, Laym.,
Holz., Salm., etc., disent qu'on ne peut leur donner la communion qu'au
temps pascal, à l'article de la mort, pourvu toutefois qu'ils sachent
faire la différence de cette nourriture avec la nourriture terrestre.
Laym., Castrop. et les Salman, appliquent la même décision
aux sourds et muets de naissance, pourvu qu'on puisse leur faire comprendre
par des signes que ce sacrement contient une personne divine (2).
CHAPITRE XIII.
SUB LES PRÉCEPTES
RELATIFS A QUELQUES CLASSES PARTICULIÈRES
DE PERSONNES.
PREMIER POINT.
De l'état religieux.
§ I. De l'obligation de la profession religieuse.
1. Définition de l'état religieux. Qui est-ce
qui peut autoriser les corporations religieuses ?
2. Le religieux doit travailler à se perfectionner. Quand
y a-t-il péché de la part d'un prélat à ne
pas corriger les religieux?
3. Age, acceptation et spontanéité requises
pour
(1) Lib. VI. ?. 5oa. (?) ?. 3??.
POUR LES CONFESSEURS.
279
la profession religieuse , relativement aux causes de nullité.
4· Si les évêques sont tenus de prononcer des vœux
et de suivre des règles. Si les fugitifs et les exilés y
sont obligés. Causes pour lesquelles on peut être expulsé.
I. La profession religieuse, en ce qui a rapport à la
condition sociale de ceux qui y sont engagés, se définit'ainsi
:« Est status ab Ecclesia approbatus fi-» delium in communi
viventium, et ad perfectionem » tendentium per vota paupertatis,
castitatis et obe-» dientiae.'o i° Ab Ecclesia approbatus, parce
que les corporations religieuses avaient besoin dans le prin-cipe de l'approbation
des évêques; mais le concile de Latran établit que
par la suite elle n'auraient plus besoin que de l'approbation du Saint-Siège.
II. On dit 20 ad perfectionem tendentium, parce que tout
religieux est, par sa profession , obligé de tendre à la
perfection ; car il doit suivre, dans l'exercice
de sa profession , non seulement ce qui est ordonné par les préceptes,
mais même ce qui est de conseil. Par conséquent le religieux
com-met un péché grave lorsque, par mépris, il enfreint
les règles de son ordre, c'est-à-dire parce qu'il les regarde
comme vaines, ou parce qu'il ne veut pas y rester soumis ; du reste, comnie
le dit saint Tho-mas (1), il ne commet qu'un péché véniel
lorsqu'il enfreint ( même fréquemment) par d'autres motifs,
les règles qui ne l'obligent pas sous peiné de faute grave;
mais lors même qu'aucune fauce ne serait attachée comme peine
à l'inobservation de ces rè-gles, il n'en serait pas moins
coupable de péché
(1) a. a. q. 186. a, 6. ad. 3.
28?
INSTRUCTION PRATIQUE
véniel s'il les enfreignait sciemment et sans un juste motif.
Voir Lay m., Sanch., Valen. et autres avec saint Thomas1 (?). 20 Si, par
le mauvais exemple qu'il donne, il est cause du relâchement de la
dis-cipline, au moins lorsqu'il s'agit de quelque règle importante,
comme, par exemple, celle du silence, de la prière ou autre semblable
(2). 3° S'il a pris le parti bien arrêté de ne pas travailler
à sa perfection. Mais l'on demande si celui qui voudrait observer
seulement les règles qui obligent sous peine de péché
mortel, et ne pas s'occuper des autres, pèche griève-ment.
Plusieurs auteurs sont pour l'affirmative, et plusieurs autres pour la
négative. Mais Sanch. dit avec raison qu'il est difficile de l'exempter
du péché mortel, sinon par ce motif,' du moins par d'autres,
c'est-à-dire par le danger dans lequel il se met ou de ne pas accomplir
ses vœux , ou d'être cause (comme nous l'avons dit) du relâchement
de la dis-cipline (3). Remarquez ici que, lors même que [ces religieux
n'auraient commis qu'une faute légère, les prélats
qui négligeraient de les punir péche-raient gravement, si
les infractions étaient nom-breuses et de nature à pouvoir
relâcher la discipline, comme, par exemple, si on avait rompu le
silence, l'oraison ou le jeûne, etc. De même il y a péché
grave (suivant le P. Suar- et autres) de la part de celui qui a la charge
de zélateur, lorsque, par une négligence coupable, il n'avertit
pas le supérieur des fautes qui se commettent sous ses yeux (4).
(1) Lib. IV. ?. io. (a) Ibid. Resp. III.
(3) Ibid. ?. u.
(4) ?. ?3,
POUR LES CONFESSEUas.
28l
Saint Thomas (1) dit de plus que le prélat ( si cela est nécessaire
) peut même donner la bastonnade à ses inférieurs et
les traiter avec indignité, pourvu qu'il ne le fasse pas par un
mouvement de colère ni en présence des étrangers et
des novices.
III. On dit 5° per vota paupertatis, parce que l'essence de, la
profession religieuse consiste dans ces vœux de pauvreté. Il faut
remarquer ici i° que, pour la régularité de la profession
religieuse , il n'est pas nécessaire que les vœux soient solennels,
mais il y a trois conditions qui sont nécessaires : ?. que le sujet
ait seize ans accomplis, 2. qu'il ait fait une année de noviciat,
3. qu'il n'y ait pas quel-que obstacle intrinsèque qui l'empêche
d'entrer dans cet ordre, comme l'a établi le concile de Trente,
sess. 35 et i5, de Reg. A l'égard des femmes, la S. C. a déclaré
qu'elles ne pouvaient pas prendre l'habit avant l'âge de douze ans,
contrairement à l'opinion deSanch.,Villa!o.,etc; de plus, avant
qu'elles pren-nent l'habit et qu'elles Fassent la profession, l'évêque
ou son vicaire doit demander la volonté de chaque postulante ; s'il
négligeait de le faire, il commet-trait une faute grave, quoique
la profession ne fût pas pour cela entachée de nullité.
Les Salm. font re-marquer que l'évêque peut ainsi rechercher
la vo-lonté de la postulante même dans les" monastères
privilégiés (2). 20 II faut déplus l'acceptation du
prélat et des membres du chapitre, suivant les sta-tuts de chaque
ordre. L'erreur qui porterait à la sub-stance , tant de la part
du prélat que la part de celui qui fait la profession, vicierait
cette profession (3).
(1) a. ». q. 73. *? 4· ad. 9,·
(a) ?. ?. (5) ?. 6,
S8a
INSTRUCTION PRATIQUE
On doit remarquer en outre que la profession faite à l'article
de la mort est valable, ainsi que le déclare Léon IX ou bien
Etienne X, ainsi que le rapporte Benoît XIV, de Syn., lib. ??.,cap.
12 , ri. 5 On re-marque encore que S. Pie V donna aux novices do-minicaines
le privilège ( lequel privilège a été, par
extension, appliqué aux autres corporations reli-gieuses) de pouvoir
faire une profession valable à l'article de la mort, lors même
qu'elles n'auraient pas termihé l'année de leur noviciat,
et de faire cette profession entre les mains de l'abbesse, de la maî-tresse
des novices , ou de toute autre supérieure. Néanmoins la
S. C. du concile a déclaré qu'une telle profession n'avait
d'autre effet que de faire gagner les indulgences. Cependant ordinairement
(suivant Laym., Busem.,Holzm. et les autres doc-leurs) la profession doit
être faite entre les mains du supérieur régulier. En
parlant des religieuses exemptes, d'après le chap. Ad apostolicam
de regul., où Innocent III, ayant appris que plusieurs religieux
ou religieuses faisaient leur profession lorsqu'ils se trouvaient dans
l'état de maladie avant d'avoir ac-compli l'année de leur
noviciat, et plus tard, quand ils étaient guéris, rentraient
dans le monde, décide qu'une telle profession est valable lorsqu'elle
a été acceptée par l'abbé ou tout autre par
lui Commis ; la même décision se trouve dans Gonza. , Peyr.,
Tamb. De jure abat., disp. 6, qu. 14, n. 4; Sanch. Dec. lib. V, chap. 4>
?.62. Par conséquent pour que la profession soit Valable, elle doit
toujours être faite entre les mains du supérieur. 3° II
faut que la pro-fession soit spontanée, et non pas l'effet de la
crainte que d'autres personnes auraient inspirée au novice dans
ce but, ou bien d'une crainte révérentielle ou
POUR LES CONFESSEURS.
jes menaces qui lui auraient été faites, ou des mau-vais
traitements que ses pareils lui feraient éprouver continuellement,
ou des prières trop importunes et trop souvent renouvelées
qui doivent faire crain-dre au novice des mauvais traitements pour le cas
où il n'y aurait pas égard et qu'il ne ferait pas sa pro-fession
(1). Celui qui, ayant fait une profession en-tachée de nullité,
veut quitter l'état religieux, doit réclamer dans les cinq
ans, sans quoi il ne serait plus recevableà]efaire,suivantleconc.
deTrejjte,sess.35, chap, xix, parce qu'alors il est présumé
avoir voulu ratifier sa profession et en couvrir le vice. A ce su-jet ,il
est bon de remarquer plusieurs choses établies par Benoît
XIV dans sa bulle Si datum (n° 47> 'n torn. Ill, Bullar.), savoir :
i° que le supérieur ne peut expulser aucun religieux avant que
son procès ait été formellement instruit ; 2°
que les causes de nullité doivent être examinées tant
par le prélat ré-gulier , que par le prélat ordinaire
du lieu ; 3° que le religieux peut, malgré qu'il n'ait pas réclamé
dans les cinq ans , obtenir la restitution in integrum du Saint-Siège
apostolique; 4" que ce religieux ne peut pas sortir après le premier
jugement rendu lorsqu'il en a été fait appel, il ne le peut
qu'après que l'appel est vidé (2).
, IV. Remarquez, 13 que les évêques réguliers ne
sont affranchis des vœux qu'autant qu'ils peuvent se trouver incompatibles
avec les devoirs de leur charge episcopale; saint Thomas (?) et la plupart
des autres auteurs, au ch. Statutum, ?. 18, q. 1.
(?) Lib. VI. ?. 7· (a) Lib. IV. ?. 8. (?) a. a. q. 88. a. u.
ad. 4.
284
INSTRUCTION PRATIQUE
C'est pourquoi le saint docteur défend aux évêques
réguliers de faire un testament (?). Au contraire, un évêque,
d'après l'opinion la mieux fondée, n'est pas tenu d'observer
les règles de l'ordre auquel il appartient, ainsi que cela résulte
du canon où il est dit : « Monachus quem canonica electio
a jugo re-«gulae absolvit, etc. » De même aussi il n'est
pas tenu d'observer les autres vœux particuliers de l'ordre auquel il appartient
(2). Le religieux qui devient curé reste obligé à
observer les vœux ainsi que la règle de son ordre, suivant l'opinion
la mieux fondée; il est obligé encore à en porter
l'habit (3). Les mêmes obligations sont imposées aux religieux
fugitifs ; et remarquez de plus que tout ce qu'ils ac-quièrent devient
la propriété du monastère. Les religieux renvoyés
du couvent restent liés par le vœu de chasteté', mais non
pas par celui de pau-vreté ; et ils ont l'usufruit des choses par
eux ac-quises, tandis que le monastère en a la nue-pro-priété.
Mais, quant à l'obéissance aux règles et aux offices,
ils n'y sont obligés que lorsqu'ils ont été de nouveau
reçus dans le monastère. Cependant il est de leur devoir
de travailler à obtenir la permission d'y rentrer. Les motifs pour
lesquels un religieux peut être chassé sont : i°si,lors
de son admission, il a caché quelque empêchement essentiel,
ou quel-que défaut qui peut devenir très nuisible à
la com-munauté, comme la lèpre ou autre maladie sembla-ble;
20 s'il a commis quelque délit qui entraîne l'infamie, et
qui soit pernicieux à la corporation
(1) Lib. IV. ?. a.
(a) ?. ?. (3} N. 4.
POUR LES CONFESSEURS.
<,$5
tout entière ; 3° s'il a commis d'autres délits moins
graves, mais qu'il soit incorrigible. Autrefois, toute espèce de
délit grave , commis même une seule fois, suffisait pom·
faire chasser un religieux. Mais Ur-bain VIH déclara, en 1644 J
qu'aucun religieux (excepté dans la compagnie de Jésus) ne
pourrait être chassé, à moins qu'il fût reconnu
incorrigible; mais qu'on pourrait seulement le punir par le jeûne
et la prison. Cette punition est la seule que l'on doive infliger aux religieuses,
vlors même qu'elles sont incorrigibles (1).
§ II. De l'obligation des vociix.
5. i° Relativement au vœu de pauvreté. — Des
manuscrits.
6. Du pécule.
?. Quand y a-t-il péché contre la charité? 8 etg.
De la défense d'accepter des présents, ? o. Quelle est la
qualité de la matière grave, et quand est-ce qu'un religieux
est tenu de restituer ?
11. Si la permission présumée est suffisante.
12. Si la permission a été injustement refusée.
Des cas où le prélat l'aurait refusée s'il avait su,
etc. Si les abbesses peuvent faire des présents et donner la permission
d'en faire.
13. Si un religieux emploie l'argent à des choses futiles
ou honteuses, avec la permission générale.
14. Si le prélat peut donner la permission d'em-ployer
l'argent au jeu.
15. 20 Relativement au vœu de chasteté, et rela-tivement
au cloître.
(1) Lib, IV. ?. 70. Exsicf.
a86
INSTRUCTION PRATIQUE
16. 5° Relativement au vœu d'obéissance. Quand est-ce
qu'il oblige, et sur quels objets?
17. Si le chapitre ordonne la première obser-vance
, la désobéissance est un double péché.
Si dans le doute on est obligé d'obéir.
18. S'il y a un précepte qui ordonne de révéler
le secret.
19. S'il survient une nouvelle circonstance. -so. Si un inférieur
donne la permission qui avait
été refusée par son supérieur.
21. A qui doivent obéir les religieuses ?
22. Relativement à la nomination de l'abbesse.
V. Le vœu de pauvreté empêche fes religieux de posséder
aucune espèce de valeur. On en excepte lès manuscrits , comme
le. disent très bien Lugo, Tourn.,Spor.,Salm., etc.(contre Henno);
parce que les manuscrits, renfermant un produit de l'esprit, sont considérés
plutôt comme des choses spirituelles. Cela est confirmé par
un bref de Benoît XIII, où il est dit que le religieux nommé
à l'épiscopat doit remettre tout ce qu'il possède
à ses supérieurs, ex-cepté les manuscrits. Cela est
confirmé encore par une autre déclaration de Clément
VIII, qui porte crue les religieux peuvent disposer de leurs
manu-scrits sans en demander la permission. Les Salm. disent la même
chose pour les reliques sacrées (1)·
VI. On peut, en second lieu, malgré le vœu de pauvreté,
posséder des biens en commun, comme l'enseigne S. Thomas (2), et
comme cela est exprimé au conc. de Trente, sess. 25,c. ?, et à
XExtrav.ex.iis, de verb. sign. Ce TO&H ne fait pas non plus un obs-
(1) Lib. D. 14.
(a) a. a. q. »47· a· 4·
POUR LES CONFESSEURS.
tacle au pécule ou viager que possèdent les religieux
dans plusieurs ordres avec l'autorisation des prélats; parce que,
quoiqu'il paraisse (suivant le concile, sess. 20, c. 2) que l'on ne peut
pas douter que cela n'ait été prohibé autrefois, puisque
le concile di-sait : « Nemini licet bona immobilia vel mobilia.....
» etiam nomine conventus possidere; » néanmoins,
par l'usage qui est devenu aujourd'hui universel, et qui est toléré
par le Saint-Siège, les religieux peuvent, avec la permission de
leurs supérieurs, avoir un pécule pour fournir aux choses
qui leur sont nécessaires, pourvu toutefois qu'ils soient dis-posés
à s'en dessaisir quand le prélat le leur ordon-nera ; car
il est reconnu que, quoique le vœu de pauvreté ne puisse pas être
annulé quant à la sub-stance, il peut néanmoins (suivant
la plupart des auteurs) être changé quant au mode, suivant
l'usage établi. Cet usage est considéré comme juste
toutes les fois qu'il est suivi par les religieux les plus timo-rés,
et toléré par les prélats qui en ont connaissance,
ou du moins lorsque, pouvant y mettre opposition, ils ne le font pas. Mais
il faut remarquer, i° que si un prélat permettait l'usage du
pécule dans un lieu où cet usage ne serait pas établi,
il serait, selon moi, coupable de faute,grave; et cela, non pas à
cause de l'infraction du vœu, mais à causedu relâchement qui
résulterait d'un tel usage. Il faut remarquer,' 2° que si, dans
quelque monastère, les supérieurs voulaient établir
la vie ea commun, les inférieurs ne pour-raient pas s'y refuser,
comme le disent généralement Suar., Nav., Less., et autres,
parce que, quoiqu'il ne soit pas contraire au vœu de ne pas vivre en commun,
néanmoins il serait contraire au vœu de s'y refuser, toutes les
fois (bien entendu) que les
288
INSTRUCTION PRATIQUA
prélats auraient, dans leur sagesse, décidé qu'il
y avait nécessité pour le plus grand bien de tous (1). Vil.
Il est hors de doute que le religieux pèche contre son Yceu, i°
s'il se sert des choses qui lui ont été données pour
un usage différent que celui auquel elles étaient destinées
par le supérieur de qui il les tient, car il doit se conformer à
sa vo-lonté pour l'usage de tout ce qu'il lui a donné (2)
; 2° s'il prête à d'autres les choses qui lui ont été
don-nées pour son usage particulier; cependant Laym., Sanch., Peyrin.
et Alex, dans son ouvrage de Mo-nialibus , disent qu'il ne commettrait
pas un péché grave, s'il était assuré que les
objets qu'il prête lui seront restitués (?); 3° s'il reçoit
pour son usage particulier, ou s'il consomme, ou s'il donne quelque chose
sans la permission du prélat,* il est de plus, dans ce cas, obligé
à la restitution. Il en est de même lorsqu'il reçoit
de l'argent avec pouvoir d'un disposer à son libre arbitre, lors
même qu'il l'emploie à des œuvres de piété,
parce qu'un reli-gieux ne peut avoir ni la propriété, ni
l'usage d'une chose, sans y être autorisé par le prélat.
(V. le P. Rodr.; p. 3, tr. ? , c. i5, ainsi qu'Azor.) Il en est de même
si un religieux cache une chose pour la soustraire à l'autorité
du supérieur; de même encore s'il fait la remise d'une créance
par lui remise antérieurement, ou bien s'il abandonne un héritage
ou un legs à lui faits, mais non pas cependant lorsqu'il refuse
d'accepter une donation. La raison de cette différence est que la
propriété des biens donnés à quelqu'un n'est
point transfére'e
(1) Lib. IV. ?. i5, cir. fin. ta) N. 29. (?) ?. ?7.
POUR LES CONFESSEURS.
par le donateur avant que le donataire ait fait accep-tation , tandis
que pour l'hérédité ou le legs fait à un religieux,
une fois le testateur mort, le droit est aussitôt acquis au monastère.
(V. Lugo., Sanch., Tourn.,etc.) Mais, à cet égard, il peut
y avoir péché contre la charité lorsqu'un religieux
empêche le profit que pourrait.faire son monastère, mais non
pas péché contre le vœu qui oblige seulement à ne
pas aliéner les biens acquis, et non à en acquérir
de nouveaux (1). De même que le religieux a besoin d'une autorisation
pour faire une donation, il en a besoin aussi pour faire un testament.
Cependant le P. Alex, dit que si un religieux, après avoir obtenu
une autorisation, laisse quelque chose à un autre religieux, et
qu'à sa mort le prélat promette d'exécu-ter sa volonté,
il est tenu de remplir la promesse faite au serviteur, suivant Lessius
et Sanchez (2). VIII. En nous occupant spécialement des dona-tions
, il est bon de remarquer ici ce qui a été pres-crit par
Clément VIII dans sa bulle Religiosa;, e. 28, où il a défendu
aux religieux, quelque soit leur ran»·, sous peine de destitution
de leurs fonctions , de perte de leur voix active et passive, et d'inhabi-lité
ipso facto inaurrenda, de faire quelque donation," soit en leur nom particulier,
soit au nom de leur couvent, et même en faveur de leurs religieux
ou prélats, s'ils le faisaient sans le consentement du chapitre
général, excepté cependant lorsque
la donation ne comprend que des objets de dévotion de peu de valeur
; ou bien encore s'ils donnent pour faire une aumône à quelqu'un
qui se trouve dans la
(1) N. 20. (a) N. aa. ?. xxiv.
ago
INSTRUCTION PRATIQUE
nécessite, ou pour remplir les devoirs de l'p lUéjmais
tout cela avec l'autorisation de leurs supé-rieurs, a" II a défendu
aux supérieurs de donner des banquets contraires à la frugalité
qui doit être ojbservée dans les corporations religieuses,
quelle qve soit la-personne ou la festivité qui en est l'occa-sion.
3° Que quiconque reçoit des dons contraire-ment à ce
qui est prescrit dans cette bulle n'acquiert aucun droit sur les choses
données, mais au con-traire doit en faire la restitution au monastère,
et ce n'est qu'après les avoir restituées qu'il pourra obtenir
l'absolution. On ne peut même pas l'affranchir de cette restitution,
ni lui permettre de la faire aux pau-vres. Mais quoique Urbain V, dans
sa bulleNuper, ?58, ait confirmé et renouvelé celle de Clément,
néan-moins il y a fait quelques amendements. i° Re-lativement
aux donations, il permet celles qui sont faites propter actum ?virtutis
et meriti, c'est-à-dire par reconnaissance et pour récompenser
quel-qu'un ou pour faire une aumône (l'aumône n'est pas, à
proprement parler, comme le dit Lacroix, désignée parle mot
munerum), mais toujours avec le consentement du prélat du lieu,
disant que l'auto-risation donnée de vive voix suffit dans ce cas.
&° Relativement aux banquets, il permet ceux qui ont lieu à
la réception des Ordinaires ou des bien-faiteurs, pourvu que la
décence religieuse n'y soit point blessée. 3° Relativement
à la restitution des dons, il dit que lorsqu'on ne peut pas la faire
com-modément à son propre couvent, on doit la faire au couvent
le plus voisin. Il faut remarquer ici, avec le Guide des nouveaux confes»eurs
(?), que cette
(i) Part. a. n. 439.
infraction à la bulle de Clément VIII sur les présents
faits à des religieux est un cas réservé au pape (quoi-qu'il
n'y ait pas de censure), car le pape Urbain ordonna qu'après la
publication de sa bulle, les confesseurs ordinaires ne seraient plus compétents
pQur donner l'absolution d'un tel péché, et que si le présent
était d'une valeur supérieure à ? ? ecus, le religieux
qui Tacait reçu ne pourrait être absous pai la sainte pénitencene
qu'après en avoir fait la restitution : ce qui a été
encore confirmé par Be-npît XIV dans sa bulle Pastor bonus
de 1744 (1)·
I3Ç. Plusieurs auteurs ont dit, d'après les Salm.(2),
que la bulle de Clén^ent n'avait pas été reçue
ou tout au moins qu'elle était tombée en désuétude,
et que par cpnséqueitf elle n'était pas obligatoire ; d'autres
en pnt dit de même (ejlesSalm. adoptent aussi ce(te opinion ) de
la bulle d'Urbain, préten-dant que puisque cette huile n'est que
déclarative de celle de Clément et n'introduit pas ?? nouveau
dioit, elle ne doit pas être plus obligatoire que celle de Clément
qui ne l'est pas aujourd'hui. Mais, quant à moi, je ne comprends
pas que l'on puisse soutenir uneopinipn comme celle-là ; car, comme
le dit très hien le Guide des nouveaux confesseurs (?,), non seu-lement
Urbain dtéclara et amenda la bulle de Clément, mais encore
il la confirma ef la renouvela, et condamna tout usage contraire qui avait
été pra-tiqué jusqu'alors. Cependant Mazzotta et Lacroix
(4) disent que ces bulles ayant été portées pour mettre
(1) Lib. VII. ? 470. ad. ?. 11.
(2) Lib. HI. Ir. ??. do rest. c. 6. ?. io. (5) Paît. 2.
11. 459.
(4) Lacroix. 1. 3 ?, a. ?, 868. et Maziott. de dgnat. t. ». P.
54. c. 4. S ?·
80,2
INSTRUCTION PRATIQUE
obstacle à l'ambition et pour ôter aux religieux la disposition
des biens, on ne serait pas passible des peines fulminées dans ces
bulles, pour avoir donné seulement deux écus, parce que cette
somme ne doit pas être considérée comme matière
grave, lorsqu'il s'agit d'appliquer des peines aussi disproportionnées.
On ne doit pas non plus prohiber les banquets et les donations, lorsqu'ils
sont modérés et en vertu d'un juste motif, par exemple, pour
concilier les esprits à l'intérêt du monastère,
· pour écarter des vexations, ou par pure bienveillance comme
le dit Lacroix. Quant à la quotité de la somme que les su-périeurs
ou les inférieurs peuvent donner aujour-d'hui , ils disent que cela
dépend de l'usage suivant lequel chaque a reçu et appliqué
ces deux bulles.
X. Il nous reste encore sur cette matière beau-coup de doutes
à éclaircir. On demande i° quelle est la valeur que doivent
atteindre les dépenses du reli-gieux pour être matière
grave. Quelques auteurs disent que l'on doit appliquer aux vols commis
par les religieux au préjudice des monastères, la même
appréciation que l'on applique aux vols commis par les fils au préjudice
de leur père ; du reste la plupart des docteurs s'accordent à
dire que pour que le \ol des biens appartenant à un monastère,
commis par un religieux, soit matière grave, il faut une valeur
plus considérable que dans les autres vols, et là-dessus
plusieurs opinions ont été émises : Azor, Nav., Cast.,
Sanch., etc., fixent le taux de la matière grave à quatre
écus, c'est aussi l'opinion pro-fessée par Lacroix (1). Lugo
dit que pour la matière grave il faut 6 carlini et 8 si le monastère
est opulent et
(i} Lib. IV. ?. 24.
iss cojtpEssjnms, silereligieuxlesprend sur la portion qui lui
estassj. gnée pour son usage particulier; mais si la chose dérobée
reste dans le couvent et qu'elle ait été don-née à
des religieux de ce même couvent, il étend la quotité
de la matière grave jusqu'à cinq écus, pourvu que
ce ne soit pas de l'argent qui ait été dérobé.
Sanch,, Bon., Lugo, Salm., etc., admettent qu'il n'y a pas de faute grave
à prendre des comestibles pen-dant plusieurs fois, mais en ne prenant
chaque fois qu'une matière légère, •quoique le tout
s'élève ensuite jusqu'à la matière grave, parce
qu'ils présument que les prélats ne mettent pas à
cela une forte opposi-tion , pourvu ( en se restreignant ) que cela ne
cause pas un grand dommage au couvent, et que les choses dérobées
ne soientpas des objets précieux (1); quant à la question
de savoir si la matière étant grave, le religieux doit faire
la restitution, lorsqu'il n'a pas pris plus que la portion que le monastère
lui denne pour son usage particulier; quelques uns sont pour l'affirmative,
mais d'autres soutiennent la négative, tels quePelli.deLéon,
Fag., Salm., etc., parce qu'on ne présume pas (comme ils le disent)
que le prélat veuille contraindre le sujet à faire une restitution
aussi onéreuse, et cette opinion paraît bien fondée
dans le cas où cette portion est absolument néces-saire au
religieux pour son usage ordinaire (2).
XI. On demande 2° si la permission présumée suffit
pour absoudre de la faute contre le vœu de pauvreté. Il est hors
de doute que la permission ta-cite ou présumée de ?rœsenti
suffit ; comme par exem-ple si le supérieur avait vu un religieux
prendre
(?) ?. s5. (a) N. a6,
194
INSTRUCTION PRATIQUE
ou employer quelque chose, et si, pouvant facile-ment l'en empêcher,
il ne l'a pas fait ( quoique Tourn. dise avec raison que cela ne peut pas
être une règle générale) ou bien encore, suivant
Sanch., Castr., Pell., Salm., etc., si dans cette corporation reli-gieuse
il y a un usage d'employer oude recevoir cer-taines choses sans permission,
et que le prélat tolère cet usage ; la raison en est que
dans ces cas la per-mission tacite équivaut à la permission
expresse (i). La plus grande difficulté est celle de savoir si la
per-mission présumée du supérieur futur ou bien la
ra-tification est suffisante, c'est-à-dire, lorsqu'on peut présumer
que le prélat donnerait la. permission si elle lui était
demandée par le religieux. Sanch. ne l'admet pas; mais Suar., Castr.,
Azor, Nav., Toi., Val,, Holz., lîlb. et autres professent l'affirmative,
et c'est un^ opinion raisonnable toutes les fois que la pré-somption
est fondée (2), caralors le sujet n'agit qu'en se conformant à
la volonté an mpins virtuelle de son supérieur et cela suffit
pour l'affranchir de la faute de propriété. Cette opinion
est encore professée par saint Thomas (?) qui dit qu'un religieux
ne peut pas faire des aumônes, « sine licentia abbatis, vel
??-» pressehabita, vel probabiliter prœsumpta.<i Le saint docteur
déclare même dans un autre endroit, qu'il entend parler de
laprésomption, non pas deprœsenti, mais defiituix) (ce qui est la
ratification). En effet, il s'exprime en ces termes ! «Non esse proprietatum
«religiosum qui don at aliquid ponens spem in ra-» tihabitionepnelati
(4).» Du reste, les actes d'un sujet
(1) H. 17·
(2) N. 18.
5) a. a. q. 5a. a. 8. ad. 1. (4) In 4· diet. j5. q. 3. a. 5.
q. 4.
POUR LES CONFESSEURS.
en vertu de la permission présumée sont le plus souvent
illicites ou du moins elles constituent une faute vénielle, parce
que le plus souvent les supé-rieurs s'y opposent, au moins quant
au mode. Il ar-rive même souvent qu'il y a faute grave, spécialement
lorsqu'elles ont été prohibées pur Une disposition
expiesse (1).
XII. On demande 3° si, lorsque le prélat refuse injustement
de donner l'autorisation, le sujet est par cela seul délié
du vœu de pauvreté; on répond que non , à moins cependant
qu'il n'y ait pas péril dans le retard , au point que le sujet ait
alors le droit de se faire accorder Cette peimission , parce que , dans
ce cas , l'on présume le consentement du su-péiieur le plus
élevé en grade, et quelquefois même, l'on pourra juger
que le vœu ri'est pas obligatoire. Voir Castro., Holz., de Haies, et autres,
ainsi que S. Thomas (2) qui dit: «Si vero subitum periculum, »
non patiens tantam moram, ut ad superiorem re-» curri possit, ipsa
necessitas dispensationem habet » annexam ; quia necessitas non subditur
legi (?).» On demande 4' si? avec la permission, on peut donner une
chose à quelqu'un qui, s'il avait été connu du pré'at,
aurait été cause que celui-ci n'aurait pas donné la
permission. Si l'on doit présumer que le prélat révoquerait
la permission , le religieux ne doit pas donner là chose ; mais
il pourra la donner si le prélat ne devait pas révoquer cetie
permission quoiqu'ilne l'eût pas accordée dès le commencement
s'il eût connu la personne. Dans le doute on doit
(1) Lib. IV. n. 18.
(a) 1.2 q. 96. a. 6. in-fin.
(3) Lib. IV. ?. 35.
gg6
INSTRUCTIO!» PRATIQUE
le demander au prélat lui-même ; mais dans le cas où
on ne pourrait pas s'adresser au prélat, la présomp-tion
reste en faveur de la permission qui est accor-dée, ( V. Molina
et Alexandre (1). On demande 5° si les abbesses peuvent faire des donations
(c'est-à-dire des donations licites), et donner la permis-sion d'en
faire. On répond qu'elles le peuvent toutes les fois que ces donations
sont modérées et raison-nables, parce que les abbesses ont
l'administration des biens du couvent. Elles peuvent aussi, avec leurs
revenus, faire des aumônes, ou les donner à l'Église,
ou les employer à l'accroissement de leur habitation, ou les ajouter
aux revenus du monas-tère (2). Quant aux contrats et aux remises
que peuvent faire l'abbesseet son chapitre, voyez ce qui est dit dans ce
livre (?).
XIII. On demande 6° (et ceci a des conséquences plus graves)
si le religieux qui, ayant une permis-sion générale de son
prélat pour dépenser une cer-taine somme selon son bon gré,
l'emploierait à des usages futiles ou honteux, commettrait un péché
contre son vœu, et serait, comme tel, tenu à la restitution ainsi
que celui qui aurait reçu la chose. Nous adoptons l'affirmative,
qui est l'opinion de Cast,, Sanch., Silv., Mol., Salm., Ronc., soit parce
qu'en donnant la permission , le prélat n'entend pas la donner pour
un pareil usage qui est illicite, soit parce que lors même que ce
serait là son intention, la permission serait nulle, attendu que
le prélat n'est pas le maître, mais simplement l'administra-
it) N. 54. (3) N. 55. (3) Lib. IV. V. Potest,
FOUR IBS CONFESSEURS,
JJA-
teur des biens du monastère, I>'un autre côté,
la ne-gative est soutenue par le P, Alex., Reb., Bord, et autres. Ces auteurs
disent que la permission n'étant pas limitée, elle comprend
les usages illicites aussi bien que les usages licites ; et quoique le
prélat ne soit à la vérité qu'un simple administrateur,·
néan-moins il n'y a pas de loi qui ait restreint son pou-voir à
la permission pour les usages licites seule-ment. D'où ces auteurs
concluent que, lors même que la permission serait illicite, elle
ne serait pas nulle; mais, ajoutent-ils, lorsque le prélat donne
une permission illimitée, ce n'est pas qu'il veuille autoriser ces
usages illicites, ni qu'il la limite aux seuls usages licites, mais du
moins il lève l'obstacle qui empêchait le sujet de dépenser
une somme sui-vant son bon plaisir, c'est-à-dire le défaut
de per-mission; et même, en admettant que cette permis-sion ne fût
pas valable , ces auteurs disent que l'on doit tout au moins présumer
que le couvent fait re-mise de l'obligation de restituer pour ne pas porter
atteinte à la réputation du religieux, ou du prélat,
ou de ht personne qui a reçu le présent. Malgré tout
cela je ne saurais abandonner la première opi-nion parce qu'il ne
me paraît pas suffisamment prouvé que le prélat puisse
donner une permission soit spéciale, soit générale,
pourles usages illicites; car le prélat ne peut avoir, sur les biens
du monastère, d'autre pouvoir que celui que lui accordent les ca-nons,
ou la religion. Mais celui-ci ne lui est accordé ni par les canons
ni par la religion, et on ne peut pas présumer que la religion veuille
autoriser des actes qui tourneraient à la ruine de ses enfants.
Quant à la restitution, Sànch., Mol. et les Salm.,
ainsi que
S98
' INSTRUCTION PRATIQUE
plusieurs autres disent que celui qui a reçu la chose n'est
tenu que de la rendre au religieux qui la lui a donnée, pourvu que
celui-ci ne doive pas en abuser de nouveau. Mais cette opinion n'est pas
admise par là bulle d'Urbain déjà mentionnée,où
il est ordonné de faire la restitution au monastère. De plus
Castr., les Salm., etc., disent : « Quod si niulier ob turpem »
usum rem abceperit a religioso ,y excusatur a resti-» Ultione, si
propter ipsam hortor religionis vel reli-» giosi periclitetur. »
Mais je crois que ce danger pourrait difficilement se présenter.
Ils exemptent encore la femme de l'obligation de restituer, lors-qu'on
peut, à cause de sa pauvreté, présumer que le religieux
avait l'intention de lui donner la chose qui devrait être restituée,
parce qu'alors le religieux a dépensé là chose pour
un usage honnête. Mais ce système est combattu par les bulles
que nous avons citées, dans lesquelles il est ordonné que
la resti-tution soit faite au couvent, et que le couvent ne puisse pas
en faire la remise, ni permettre de la faire aux pauvres (1).
XÌV. Ou demande 70 si le prélat petit autoriser un religieux
à exposer une somme d'argent aux chances du jeu. Il le petit si
c'est uti jeu licite, c'est-à-dire de récréation,
et non pas de pur hasard, et si la somme est très petit**, et si
le religieux n'appar-tient pas à un corps d'observance étroite,
comme nous le disons au chap, ?, ?° 222, et, comme le disent Azor,
Lessiûs, Mol. et Salm. ; il suffit, â cet égard, que
le religieux ait l'autorisation tacite ou présumée. Mais
si la somme est considérable ou le
(?) fo. 3oct5i.
POUR 1ES CONFESSEURS.
2??
jeu illicite, l'autorisation, soit générale, soit parti-culière,
sera nulle ainsi que nous l'avons dit au nu-méro précédent
(1).·
XV. 2° A l'égard du vœu de chasteté, l'on sait
déjà que tout religieux qui y contrevient commet un sacrilège
et de plus vin scandale,lorsque sa faute est préjudiciable à
la réputation du couvent C'est pour préserver la chasteté
que l'oh a introduit l'usage de la clôture, non seulement pour les
religieuses , mais encore pour les religieux, car d'après la Clem.
nullus cap. cherub. Ces derniers ne peuvent sortir du monastère
que pour un juste motif, avec la permis-sion du prélat, et jamais
seuls ; de plus, cette per-mission de sortir ne peut pas être générale,
elle doit être demandée à chaque nouvelle sortie. Les
docteurs s'accordent à dire que la transgression de ce précepte
est une faute grave, à moinâ qu'elle n'ait eu, lieu qu'une
ou deux fois, mais pendant le jour (et non de nuit) et sans scahdale (2).
XVI. 3° Relativement au vœu d'obéissance, il y a plusieurs
observations à faire. Rehiarquez 1° que si le prélat
n'a pas exprimé l'ordre en 'ces termes : J'impose, je commande,
etc., il n'y a pas obligation précise d'obéir. V. Suar. ,
Salin., Pell., etc. Mais je crois qu'ici l'on doit avoir
égard à l'usage établi par chaque corporation, parce
que, dans certaines, les supérieurs, au lievi de dire : Je commande,
ont coutume de dire : Je vous prie, s'il ?vous plaît. V. r. etc.
Cependant, quoique l'obéissance soit tou-jours due, suivant Suar.,
Sanch., Vasq., Méd., etc., on ne commet pas une faute grave en la
refusant, à
(1) N. 3a. (a) N. 57.
5og
jîïSTiuîeTiQw PRATIQUE
moins que le supérieur ait commandé en vertu dç
la sainte obéissance, ou bien au nom de Jésus-Christ; sous
peine d'excommunication ipso facto, et autres formules semblables (i).
Remarquez 20 que le su-périeur peut commander tout qui a un rapport
di-rect à la règle ou à la plus grande observation
de la règle, mais non pas ce qui serait contraire à la règle
ou en dehors de la règle, à moins que ce soit seulement pour
exercer l'obéissance des religieux; il ne peut pas non plus imposer
des pénitences ou autres charges extraordinaires (à moins
que ce soit à titre de punition), ni les forcer d'accepter une charge
d'évêque ou de curé ou tout autre bénéfice,
ni d'aller chez les infidèles lorsqu'il y a un danger manifeste
de mort ou d'esclavage, ni d'assister les derniers moments des pestiférés
du dehors; à moins qu'il n'y ait aucun de ceux qui doivent leur
admi-nistrer les sacrements nécessaires. Nous avons dit /du dehors,
car ils sont tenus d'assister les religieux qui sont de leur ordre. Voir
Sanch., Cajetan, Spor., etla plupartd.es autresauteurs(2). On doit remarquer
ici ce passage du Concile de Trente (sess. a 5, de reg. ch. 4) : «
Non licet regularibus , a suis conventibus » recedere, etiam praetextu
ad superiores suos acce-» dendi, nisi ab iis dem missi aut vocati
fuerint..»
XVII. Remarquez 3° que les religieux ne com-mettent pas de péché
en n'observant pas la règle primitive, lorsqu'elle a été
remplacée par un usage contraire, comme le disent Turria, Sanch.,
Cajetan, Salm.,etc. Mais on demande, après cela,s'ils péche-raient
en n'obéissant pas au chapitre général qui au-
(1) N. 58.
(2} K. 59 et 40.
POUR I,ES CONFESSEURS.
501
rait ordonné de revenir à l'observation de la règle
primitive; c'est avec raison que Castrop., Laym., Sporer, etc., disent
qu'il n'y a pas de péché, à moins cependant que le
défaut de réforme ne dût rendre la corporation plus
nuisible qu'utile; mais ce n'est pas sans raison que d'autres, tels que
Suar., Pellizia, Salm., Alexand., etc. (1), soutiennent l'affirmative d'une
manière absolue. Du reste, il est incontestable que le chapitre
général ou provincial peut toujours faire quelque nouveau
statut, lorsqu'il est utile à la corporation, et qu'il ne contrarie
pas la règle (2). Remarquez 4° que le religieux qui agit au
mépris du commandement de son supérieur commet, non pas un,
mais deux péchés (suivant l'opinion très rai-sonnahle
de Suar., Cast., Pell., Salm., etc.), l'un contre l'observation religieuse
du vœu, l'autre contre l'obéissance promise au prélat; promesse
qui oblige indépendamment du vœu (?). Remarquez ?" que le sujet
doit obéir toutes les fois que la chose qu'on lui commande n'est
pascertainement un péché, ainsi que l'enseignent saint Antonin,-Silvius,
Cajetan, Cabass., ïurnely, ainsi que saint Bernard, saint Bonaventure
et saint Augustin ch. Si quid culpa-tur. dist. 23. quœ 1., par la raison'que
le supérieur a le droit de commander, et ne peut être privé
de l'exercice de ce droit, que lorsqu'il est bien con-stant que.ce qu'il
ordonne est une chose illicite (4) (il fautobserver ce qui a été
dit au.chapitrel, n. 18), il faut en dire de même lorsqu'il y a doute
pour sa-
(1) N. 42. (a) N. 45.
(3) N. 46.
(4) N. 47.
ÔQ2
INSTRUCTION PRATIQUE
voir si l'ordre excède ou non le pouvoir du supé-rieur,
ou s'il est en dehors de la règle, comme le disent Azor, Sanchez,
Valentia, Salmant., etc. (?). Il en est de même encore lorsqu'on
n'est pas certain si celui qii commande est le supérieur légitime;
dans tous les cas, on doit obéir, parce que la supé-rieur
a pour lui la possessipn d\i droit de comman-der (2). Il faut cependant
admettre une exception pour le cas où, d'un côté, l'obéissance
serait très onéreuse pour le sujet, et d'un autre coté,
la chose commandée serait probablement illicite ou excédant
les pouvoirs du supérieur; ou bien si l'accomplisse-ment de l'ordre
devait jeter le sujet dans un danger graye, soit spirituel, soit temporel.
Voir Soto, Les-sius, Tourn., Sanch., Gastr., Salm., Holz., etc. (3).
X-VJII. Relativement au vœu d/obéissance, on demande i°
si \& sujet serait tenvi d'obéir au prélat qui lui ordonnerait
de révéler le secret qu'on lui a con-fié. Saint Thomas
(4), saint Antonin , Navarre, etc., répondent que non , parce que
le précepte naturel l'emporte sur Je précepte du supérieur,
mais il en serait autrement si en cachant le secret cela doit caviser un
dommage, soit au monastère, soit à une personne innocente,
soit au prélat lui-même (5). Quant à la question de
savoir si l'on peut révéler un secret pour se soustraire
soi-même à un danger, voyez ce qui a été dit
au ch. xi, n. 9, in fine.
XIX. On demande 20 si un religieux peut être délié
des vœux qu'il a prononcés en faisant sa pro-
(1) Ibid. V. Infr. 11.
(a) N. 47. in fin. V. dab. a.
(3j Ibid. n. 47. V. Limitant vero.
(4) a. 3. q. 70. a. 1.
(5) Lib. IV. n. 49·
POUR LFS CONFESSEURS.
???
fession, lorsqu'il est survenu quelque circonstance qui, s'il avait
pu la prévoir, l'aurait empêché de les
prononcer. Nous avons dit au ch. v, que cela était raisonnable,
ainsi quel Thom., saint Anton, et autres, à l'égard pies,
mais en exceptant le vœu d'ordre comme le disent Sanch., Suar.,Ponz.
?. 2? et 56,
pensent saint
des vœux sim-
t de chasteté,
,Castr.,Dian.,
Salm. , etc., contre Bonac. qui dit qu'un religieux serait même
exempté de ces dernier» vœux s'il se trouvait dans un grand
danger d'incontinence.Mais
nous disons qu.e si un pareil system
ces vœux seraient presque toujours inutiles. Mais à l'égard
des vœux solennels que l'on
faisant sa profession religieuse ou en dres sacrés, aucune circonstance,
qu( et imprévue, on peut en délier, et par tous-les auteurs
sans aucune cont que celui qui a fait une profession ou
prononce en renant les or-ique nouvelle cela est admis estation, parce
qui'.a recules ordres sacrés, n'est pas considéré
comme un simple particulier qui pourrait, être délié
de son vœu, mais comme membre d'une communauté, dont l'intérêt
doit être préféré à l'intérêt
privé (»), par la même raison, on doit en dire de même
des vœux qui sont prononcés ( quoique sans solennité ), dans
une con -grégation d'hommes ou de femmes, < t à plus forte
raison lorsqu'il s'y joint un vœu ou serment de per-sévérance,
parce qu'alors ( ainsi que nous l'avons dit au ch. v, n. 19 ^ il y a un
contrat Formé entre le religieux et la congrégation, lequel
contrat est obli-gatoire pour les deux parties; et par conséquent,
de même que la congrégation ne peut pas renvoyer le religieux
pour une nouvelle circonst ince qui serait
était admis ,
(») Lib. IV. ?. 5?.
INSTRUCTION PRATIQUE
survenue ( mais sans sa faute ) , de même aussi le religieux
ne peut abandonner la congrégation (1).
XX. On demande 5° si la permission accordée
par un prélat inférieur est valable lorsqu'elle a déjà
été refusée par le prélat supérieur.
Holz., Pell. et Lacroix répondent qu'elle est valable, lorsque le
su-périeur n'a pas défendu d'une manière positive
la chose qu'on lui demandait ; parce que lorsqu'il s'est borné à
refuser la permission , on ne doit pas pré-sumer qu'il s'oppose
à ce qu'un prélat inférieur l'ac-corde, en restant
dans les limites de son pouvoir. Et si le supérieur avait défendu
à l'inférieur de don-ner quelque permission, ils disent avec
raison que cette permission serait valable (quoiqueillicite) jus-qu'à
ce que le prélat supérieur l'eût déclarée
com-plètement nulle (2).
XXI. On demande 4° à qui les religieuses doi-vent
obéissance, par suite de leur vœu. On répond 1 « au
souverain pontife ; 20 à l'évêque si elles
ne sont pas exemptes , et au prélat de leur ordre, si elles sont
exemptes. Mais pour ce qui est relatif à la clôture, celles
même qui sont exemptes, sont tenues d'obéir à l'évêque
ordinaire du lieu, suivant la bulle de Grégoire XV. Inscrutabilis.
Voyez ce qui sera dit au ch. xx depnvil. au n. 80 , à l'égard
de l'obéis-sance qui est due généralement à
l'évêque diocé-sain. Il faut remarquer que les- religieuses
ne sont pas tenues de lui obéir en ce qui regarde l'élection
des officiantes de leur monastère, comme l'a déclaré
la sainte Eglise. Il faut remarquer encore que lors de la visite, les religieuses
doivent dénoncer au pré-
(1)* N. 5o. V. EliJcm. 0) N. 5o. Y, Qn*r, in fin.
POUR IKS CONFESSEURS.
3O5
lat celles d'entre elles qui sont peu zélées et quin'ob-servent
pas la règle, à moins qu'elles se soient cor-rigées
ou que leur faute soit restée dans ìe secret, ou bien qu'elle
ne soit connue que sous l'obligation naturelle de la tenir secrète
et que la non-révélation ne doive pas préjudïcier
à la communauté, ou si elle doit être dénoncée
par d'autres religieuses, oiï enfin si l'on prévoit que la
révélation de cette faute sera inutile et qu'on pourra soi-même
êjre la victime , tandis que personne ne doit souffrir de ce qu'elle
reste cachée (?). ?°En ce qui concerne l'observance de la règle
les religieuses doivent obéir àleurabbesse. Quelques docteurs
prétendent que l'abbessenepeiit pas commander en vertu de
l'obéissance , parce - qu'elle n'a pas de juridiction
spirituelle, mais qu'elle préside seulement à la direction
économique du monastère. Mais c'est avec beaucoup de raison
que le . P. Alexandre, Pasq. et plusieurs autres soutiennent le contraire,
parce que le vœu d'obéissance pro-noncé par les religieuses
les oblige d'obéir à tous leurs supérieurs légitimes,
et que les abbesses sont re-connues comme véritables supérieures
par le pape, lorsqu'il autorise l'établissement de l'ordre (2).
Cette autorité de commandement qui est conférée à
l'ab-besse, lui donne le droit non pas de délier les reli-gieuses
de leurs vœux particuliers, mais d'en, aug-menter les charges,'comme le
disent Soto, Navarre, Silvius, Tamburini et Alexandre (?), et elle le peut
lors même que les vœux eussent été faits de son
(!) N. 57.
(2) N. 52. (5) N. 55.
?, xxiv,
??
3?6
INSTRUCTION PRATIQUE
consentement. Vuir Armilla,Silvius, Salm. et Alexan-dre, etc. (?).
XXII. 11 est bon de remarquer ici que, d'a-près le conile de-Trente
sess. 25, chapitre "vit, on ne peut élire 'pour abbesse qu'une personne
d'au moins quarante ans et qui soit religieuse de-puis huit ans, et que
ce doit être une choriste. Re-marquez de plus que s'il y a dissidence
entre les leligieuses, le prélat doit leur assigner un terme pour
se mettre d'accord , après l'expiration duquel il enverra lui-même
une abbesse de son choix, con-formément au décret delà
sainte Eglise. Dansles mo-nastères non exempts, ce sera l'évêque
qui remplira ces fonctions de prélat; dans ceux qui sont exempts
ce sera le supérieur régulierqui recueillera les votes ,
assisté de l'évêque. Après'l'élection
l'abbessenepourra pas tout de suite entrer en fonctions, ilfaudra qu'elle
• soit confirmée par le prélat. Il y a encore d'autres détails
plus minutieux que l'on observe dans la pra-tique (a).
§ III. A qui est-il défendu d'entrer dans un corps religieux.
B5. Si les fils peuvent y entrer lorsqu'ils laissent leurs parents
dans la nécessité, et si ceux qui y sont déjà
doivent en sortir pour venir'au secours de leurs parents.
24. Si l'on peut y entrer malgré la volonté de ses parents;
si l'on laisse des enfants dans la nécessité; si ce sont
des sœurs ou des frères qu'on laisse dans un état de besoin.
(») N. 54. 00 N. 59.
POUR LES CONFESSEURS.
25. Celui qui détourne quelqu'un d'embrasser
l'état religieux.
26. Celui qui néglige sa vocation.
27. Si les personnes accablées de dettes peuvent y entrer.
28. Si les évêques le peuvent.
29. Si les curés le peuvent.
XXIII. i° Ne peuvent entrer dans une congréga-tion religieuse,
ceux qui en ? entrant devraient lais-ser leurs parents dans le besoin,
lorsqu'en restant avec eux, au contraire, ils pourraient les secourir ;
excepté qu'en voulant les secourir, ils ne dussent s'exposer à
tomber dans une faute grave, comme le dit saint Thomas (1) : « Si
vident non pt>sse vivere » sine peccato mortali , vel non de facili.
» Telles sont les paroles du saint, Sanchez, Castrop., Les-sius ,
Peyr., Salin. (2), professent ïa même opinion. Mais, comme le
disent IesSalm., par danger on doit entendre le danger prochain, et par
nécessité on en-tend non seulement la nécessité
extrême, mais encore la nécessité grave, suivant l'opinion
générale des docteurs, qui est aussi celle de saint Thomas,
qui dit d'un autre côté, au passage déjà cité,
que le fils n'est pas obligé de rester avec ses parents pour les
secourir': « Si (les parents) possent aliqualiter susten-»
tari non honorifice (3). » II fautremarquer cependant que lors même
que le fils laisserait ses parents dans une grave nécessité,
sa profession ne serait pas nulle pour cela , et par conséquent,
suivant l'opi-nion de saint An ton In, Cajét., Sancn., Bon., Salm.,
(1) Quod lib. 10. art. 9.
(2) Lib. IV. ?. 66.
(3) Ibid. V. Sed nunc.
5?8
INSTRUCTION PRATIQUE
Bord., Bus., etc., si le fils est déjà incorporé
dans un ordre religieux, il n'est pas obligé d'en sortir pour secourir
ses parents s'ils se trouvent dans une grave nécessité. La
raison en est que le fils qui a fait sa profession dans un ordre religieux
s'est établi, a pris son état, comme le fils qui se serait
marié, par exemple. C'est ce qu'enseigne le même docteur An-gélique
(1) en disant : « Professus reputatur mor-» tuus mundo undè
non debet occasione sustentatio-»nis parentum exire à claustro.
» Nous avons dit nécessité grave, parce que si elle
était extrême, le fils serait obligé de sortir pour
porter secours à ses parents (2).
XXIV. Néanmoins, hors du cas de nécessité, Lu-ther
prétendait que le fils commettait cependant un péché
en entrant dans un ordre religieux con-tre le gré de ses parents.
Mais le contraire a été établi par tous les saints
pères, par saint Jérôme, saint Ambroise, saint Augustin,
saint JeanChrysos-tome, le'concile de Tolède X. C. ult, saint Thomas
et tous les écrivains catholiques. Car il est incontes-table, comme
le dit le docteur angélique (?), que le fils est libre dans le choix
de son état, et quoiqu'il soit convenable (comme le disent les docteurs)
que le fils ne quitte pas ses parents sans leur consente-ment, cela ne
doit s'entendre que lorsqu'il n'est pas à craindre que les parents
mettent obstacle à la vo-cation de leur fils. Mais comme il est
presque tou-jours à craindre qu'ils y mettent des obstacles, saint
Thomas (4) avertit les fils de ne jamais prendre
(1) 3. a. q. 101. a. 4- ad. 4· (2; Lib. IV. ?. 67.
(3) a. 2. q, io3. a. 7.
(4) Opus. 17, c. 10.
POUR LES CONFESSEURS.
5OQ
conseil de leurs parents lorsqu'il s'agira d'entrer dans l'état
religieux: « Ab hoc consilio (dit le* saint) » amovendisuntpropinqui;
propinquijenimin hocne-» gotio amici non sunt sed inimici ; »
et saint Cyrille, qui est cité par le même saint Thomas (?),
en ex-pliquant les paroles de saint Luc : « Nemo mittens »
manum ad aratrum et respiciens retrò, aptus est «regno Dei,
«dit: « Aspicit retrò qui dilationem quœ-» rit
cum propinquis conferendi (2).,» Les parents, de leur côté,
ne peuvent pas entrer dans une congréga-tion religieuse, lorsqu'ils
laissent des enfants dans une nécessité grave, ou sans leur
avoir procuré une éducation convenable : « Non proviso
qualiter edu-> cari debent, » dit saint Thomas à l'endroit
précité ; mais cela ne doit pas être appliqué,
comme le disent Suar., Cast., Pell., Saim., etc. (dans le langage or-dinaire),
aux fils déjà émancipés (3). En ce qui concerne
les frères et sœurs, ils ne peuvent être em-pêchés
d'embrasser l'état religieux que lorsqu'ils laissent des frères
dans un état de nécessité ex-trême ; mais s'ils
sont seulement dans la nécessité grave, celui qui a fait
vœu d'entrer dans l'état reli-gieux ne peut pas en différer
l'accomplissement, au moins pendant un espace de temps considérable,
sans demander une dispense (4).
XXV. Avant d'aller plus loin, il est bon de remar-quer ici que les
parents qui, sans un juste motif, dé-tournent leurs enfants de la
profession religieuse par un moyen quelconque, soit par des mauvais
(1) 3. a. q. 189. a. 10.
(a) lib. IV. ?. 68.
(?) ?. 69.
(4J ?. 7"·
???
INSTRUCTION PRATIQUE
traitements, soit par de simples prières, soit par des promesses,
commettent un péché mortel. Voir saint Antonin , Nav., Tourn.,
Ab., Salm., Conc., Spor., Ma?., etc.; et, suivant ces auteurs, ce n'est
pas seulement les parents, mais toute personne, quelle' qu'elle s'oit,
qui commet un péché grave en détournant son prochain
de la vocation qui le porte à embrasser l'état religieux
, parce- qu'il résulte de là un dommage très grave.
Mais les parents pèchent doublement, d'abord contre la charité
et ensuite contre la piété ; parce que la piété
les oblige à tâ-cher de procurer à leurs enfants les
plus grands avantages spirituels possibles, comme le fait remar-quer Bonacina
(i ). »
XXVI. Mais on demande encore s'il y a péché grave de
la part de celui qui ayant la vocation reli-gieuse^ ne lui obéit
pas. Lessius (2) répond qu'il n'y a pour ainsi dire pas de péché,
puisque les conseils djvins n'obligent pas sous peine d'une faute; néan-moins
il convient qu*il y aurait réellement péché, si celui
qui a négligé dç suivre sa vocation compre-nait qu'il
ne ppurrait pas se sauver en restant dans le monde. Voici les paroles de
Lessius : « Si conscien-tia, dictet tibi (quod saepe accidit) te
desertum iri »à Deo, nisi divinae vocationi obtempères,
et te pe-»riturum si manseris in saeculo... etc., tunc pecca-ti tuin
est non sequi divinam vocationem. » Du reste, voici de quelle manière
je raisonne ; Si (comme nous l'avons dit plus haut) il y a péqhé
grave lors-qu'on détourne une personne de la vocation reli-gieuse,
à cause du préjudice qui en résulte pour
(1) Lib. ??. n. 77.
(a) De statu vitae clig. q. n. 79.
POUR tES CONFESSEURS.
3 j j
lui, comment peut-on déclarer non coupable celui qui, connaissant
d'une manière certaine que Dieu l'appelle en religion, veut néanmoins
rester dans le monde , lorsque son salut éternel y court un si grand
danger ? Le savant Habert dit que celui qui embrasse une carrière
autre que celle où Dieu l'a appelé, aura beaucoup de peine
à se sauver, quoi-que ( absolument parlant ) il le puisse, par la
raison que (comme il s'exprime lui-même) il sera comme un membre
dérangé de sa plare > et qui parviendra difficilement à
bien remplir ses fonctions. Ainsi, celui qui veut rester dans le monde
malgré la voix du ciel qui l'appelle à l'état religieux,
se sauvera difficilement, parce que Dieu lui refusera au milieu du monde
les secours abondants qu'il lui avait pré-parés dans le sein
de la religion, et quoiqu'il pût (absolument parlant) se sauver sans
ces secours, il n'y parviendra pas. Saint Grégoire, dans sa lettre
à l'empereur Maurice , xjui avait défendu aux soldats d'embrasser
l'état religieux, lui dit que cette loi est injuste, parce qu'elle
ferme à plusieurs d'entre eux les portes du paradis.» Nam
plerique sunt (paroles » de saint Grégoire ) qui nisi omnia
reliquerint, sa]-» vari nullatenus possunt. » Or , je ne puis
et ne pourrai jamais me persqader qu'il n'y ait pas de faute à compromettre
ainsi son salut. Quant à la question de savoir si cette faute est
grave ou lé-gère, je la laisse à décider aux
prudents (1). Mais re-venons à notre sujet.
. XXVII. Ne peuvent entrer dans une congrégation religieuse,
les débiteurs qui se mettraient par là dans l'impuissance
de payer leurs dettes, tandis
(1) Vide hsec et alia num. 78.
3l 2
1NSTHUCTION PRATIQUE
qu'ils peuvent facilement y parvenir, et dans- peu de temps, en restant
dans les affaires. Voir Azor, Nav., Sanchez, etc., quoique nous trouvions
assez bien fondée lOpinionde saintThomas(i), suivie par saint Antonin,
Cajetan, Sylvius, Palud., Armilla, qui dit que le débiteur «
non tenetur in seculo manere , ut «procuret unde debitum solvat,
» disant qu'il lui suffira dje céder les biens qu'il possède,
« quia [c'est »la raison qu'il en donne) persona liberi hominis
«superat omnem aestimationem pecuniae.» Néan-moins,
la première opinion paraît mieux fondée. Toutes les
fois que le débiteur peut (comme nous l'avons dit) satisfaire ses
créanciers dans peu de temps, c'est-à-dire dans deux ans,
comme le disent Sanch. et Nav. , et lorsqu'il peut les satisfaire sans
une grande difficulté, parce que (comme cela est reconnu par les
partisans de la première opinion ), si le débiteur doit,
en restant dans le monde , même pendant ^peu de temps, être
exposé à" un danger presquecertain de tomber dans le péché,
ou de perdre la vocation : il peut alors entrer tout de suite dans l'état
religieux. Il faut de plus que les dettes soient certaines, car s'il ne
s'agissait que de dettes incer-taines , le débiteur ne serait pas
obligé d'attendre, comme l'enseignent Cast., Sunrez.·, Lugo
, Sanchez, Salmant., etc. (2-). Remarquez cependant que Sixte-Quint, dans
une bulle de 1587, ainsi que Clé-ment VIII, défendirent d'admettre
dans une congré-gation religieuse des débiteurs dont les
dettes s'é-levaient à une somme considérable, et qui
avaient dilapidé leur fortune avant d'avoir satisfait leurs
(1) a. 2. q. 189. a. 8. ad. 3, (a) Lib. IV. ?. 7?.
POUR LES CONFESSEURS.
5! 5
créanciers ; et ceux qui ont des comptes à rendre avant
qu'ils les aient rendus (i).
XXVIII. 5° hes évêques ne peuvent encore en-trer dans
un ordre religieux, parce qu'il ne leur est pas permis d'abandonner leurs
églises sans un juste motif; cela résulte , soit du vœu qu'ils
font en les acceptant (comme l'enseigne saint Thomas)(a), puisqu'ils s'obligent
à les servir perpétuellement; soit par le mariage spirituel
que l'évêquecontracte avec son église, union qui ne
peut être défaite que par Dieu, comme il est dit au chap.
Inter corporalia, de trans-lat. episc., où Innocent III dit : «Non
enim humana » sed potius divina potestate conjugium spirituale »
dissolvatur. » D'où Soto , Sanch., Cajetan, Vasq. et Salm.
(contre Suar. et Barb'\ concluent avec raison que la permutation des évêchés
est prohibée par la loi divine, et que le pape lui-même ne
peut pas les permettre sans un juste molif. Je dis sans un juste motif,
parce que le pape peut (comme il est dit au chap. Nisi de rénunt.
), donner la permission de re-noncer à un évêché
ou d'en changer. Les justes motifs pour lesquels il peut donner cette permission
, sont, suivant les docteurs, i° pour le bien de l'E-glise universelle
ou même particulière (pour ce qui est de la permutation ),
si, par exemple, une église n'avait pas d'autre sujet qu'elle pût
élever à l'é-piscopat ; 2° par un défaut
particulier, si l'évêque est infirme, ou si l'air du pays
où il réside lui est contraire, ou s'il est vieux, ignorant,
eu d'une mau-vaise conduite; 5° par un défaut tenant aux sujets,
s'ils sont tels que l'évêque ne puisse plus, à leur
(l) Lib. IV. in V. ad. notandum, (a) a. a. q. 189. a. 7.
INSTRUCTION PRATIQUE
égard, faire le bien ou accomplir les devoirs de sa charge;
4° pour éviter de scandaliser les autres; mais il ne faut pas
appliquer cela à un individu qui aurait voulu fouler aux pieds les
règles de la justice (j).
XXIX. Ce que nous avons dit des évêques n'est pas applicable
aux curés, parce qu'ils peuvent se faire religieux quoique l'évêque
s'y oppose, comme l'a déclaré Urbain II ? au chap. Diu sunt'.
19. q. 2, en disant : « Si quis clericorum in ecclesia sua sub »
episcopo populum ( c'est-à-dire proprium , comme » l'explique
la Glose ) retinet et seculariter vivit si » afflatus spiritu sancto
in aliquo monasterio, vel » regulari canonica salvare se voluerit.
Etiam epi~ » scopo contradicere, est liber nostra auctoritate. »
Et comme le dit saint Thomas (2), un curé n'a pas même besoin
de l'autorisation du pape pour entrer dans une congrégation religieuse.
Cette opinion a été confirmée par Benoît XIV,
dans sa bulle Ex quo di-lectus, de 1747· Cependant ce pape dit dans
sa bulle, qu'avant d'entrer dans une congrégation, le curé
doit en avertir son éyêque. Il déclare de plus que
la cure n'est pas Vacante jusqu'au moment de la profession du curé,
qui a droit aux fruits pendant tout le temps de son noviciat. Il en est
de même pour les autres bénéficiers, suivant ????????
de Suarez et Sanchez· Mais ceux-ci (comme le dit Benoît dans
sa bulle) ne pèchent pas, lorsque, craignant que leur évêque
s'op-pose à leur entrée çjansune congrégation
reugjeus,e, ils négligent de l'en avertir· Du reste ce pontife
dé-clare que, de même qu'un prélat régulier
peut dans
(0 Lib. IV. ?. 76 et 104. (a) a. 3. q. 189. a. 7.
POUR LES CONFESSEURS.
certains cas reprendre un de ses religieux qui serait passé
dans un ordre plus austère, de même aussi un évêque
peut retirer du couvent un de ses curés ou clercs, lorsque sa retraite
cause un préjudice grave à l'église qu'il desservait,
« Si ex transitu suo prima » ecclesia gravem sustineret jacturam,
etc , sed si » ecclesia graviter lsederetur, esset revocandus. «Les
premières paroles sont d'Innocent IV; les secondes sont dePanorme,
sur lequel s'appuie Benoît XIV, dans la bulle précitée
, où il dit en concluant : « Et »sic satis provisum
est episcopo (?).»
SECOND PQINT.
De l'état clérical.
XXX. Relativement à l'état des clercs, on peut considérer
quatre choses principales : leurs privi-lèges, leurs obligations,
les offices et les béné-fices que l'Église leur fournit
pour leur entretien. Quant aux privilèges,nous en parlerons au deuxième
point, ch. xx, en traitant des privilèges. Quant aux obligations
et aux offices, nous en parlerons dans l'examen des ordinante. Ici nous
nous bornerons à parler des bénéfices ecclésiastiques
qui sont conférés aux clercs.
§ I. A qui les bénéfices peuvent et doivent-ils
être conférés.
??. Combien -y a-t-il de sortes de bénéfices ? 32. Quels
sont les modes d'acquisition. Du pa-tronage.
(1) Lib. IV. ?. 74 et 75.
5l6
INSTRUCTION PRATIQUE
??. Si les bénéfices simples doivent également
être conférés aux plus dignes.
?4· Si les maîtres doivent présenter
les plus dignes.
??. Si dans les prélatures , etc. ?6. Si l'élection de
celui qui n'est pas le plus digne, est valable.
5j. Si celui qui l'a élu est obligé à la restitution.
38. Si une personne qui est digne, peut, fans péché,
concourir avec une autre qui
est plus digne.
??,. Si les examinateurs en ne dénonçant pas, etc. 4o
et 4?· De la pluralité des bénéfices. XXXI.
Le bénéfice ecclésiastique est défini : «Est
»jus perpetuum auctoritate ecclesiae constitutum «exercendi
officium spirituale in aliqua ecclesia, et » percipiendi propter
ipsum fructus ex bonis eccle-«sioe. «Après cela,, il
faut distinguer les bénéfices simples des doubles.-Les simples
sont institués seu-lement pour réciter les heures canoniales-,
ou pour le service de l'autel ; tels sont les canonicats et les chapellenies
autorisées par le pape ou les évêques ; tels sont encore
les prêts faits aux clercs pour qu'ils puissent continuer leurs études,
et autres choses sem-blables. Les bénéfices doublessont ceux
qui confèrent une juridiction, tels que les évêchés
et les cures, ainsi que les décanats, les prévôtés,
les archidia-conats, et autres charges semblables qui donnent une juridiction
sur le clergé, ou .qui sans donner une juridiction procurent quelque
prérogative, par exemple, une place distinguée dans le chœur
ou dans les processions ; comme la dignité de primi-cier, de chantre,
de grand sacristain, et les digni-taires qui sont proprement appelés
personati, ou
POUR LES CONFESSEURS.
3,7
enfin ceux qui ont quelque charge ecclésiastique comme celle
de trésorier, économe, gardien, sa-cristain inférieur,
et ceux qui dirigent une admi-nistration , mais sans avoir aucune juridiction^ii
prééminence (1).,
XXXII. Les bénéfices s'acquièrent de trois ma-nières
différentes : i° parla nomination que peuvent faire le pape
oul'évêque; 2° par une élection suivie de l'approbation
du prélat; 5° par la présentation de celui qui possède
le bénéfice et par l'institution ou bien l'élection
qui est faite par le supérieur, quand c'est un bénéfice
de patronage. 11 y a un patronage laïcal, et un patronage ecclésiastique;
et il faut re-marquer à cet égard , que si le laïque
possesseur d'un bénéfice ne présente pas un successeur
dans quatre mois, et l'ecclésiastique dans six^la nomination est
dévolue au prélat qui doit alors instituer un succes-seur,
comme il a été dit au ch. Quoniam, de jure pa-tr., etauch.
i, § verum, eod. tit. in 6 (2). Remar-quez encore que ce délai
court lors même qu'il y a litige sur le droit de présentation,
pourvu que le litige ne soit pas entre le titulaire et l'évêque,
sui-vant Azor, Salm., etc., au ch. cit. Quoniam. Néan-moins l'évêque
a le pouvoir de proroger ce délai pen-dant six autres mois, mais
pas au-delà, comme le font remarquer Barb, et les Salm. au cb. 11
Decon-ces. prœb. (?). Si un bénéficier laïque présente
plu-sieurs successeurs, l'évêque peut élire celui qui
lui convient, parce que l'une et l'autre présentations sont valables
; mais si plusieurs successeurs sont présentés
(1) Lib. IV. ?. 85 et 84-(a) N.-88. (?) ?. 817.
3l8
INSTRUCTION PRATIQUE
par un ecclésiastique bénéficier, l'évêque
doit élire celui quia été présenté le
premier, suivant le ch. Cum authentice, dejurepatr. Lorsque plusieurs candidats
o^t été présentés par divers bénéficiers,
si la charge appartient à un ecclésiastique, l'évêque
doit choisir le plus digne, comme cela résulte clairement du conc.
de Trente, Sess. E4, ch. xvur, où il est dit : « Epîsco-»pus
ex dignis eligat digniorem, quem patronus ei «praesentat.»
Gela doit être entendu du patronage ecclésiastique qui est
celui dont il est question dans ce passage, et cela doit aussi ^'entendre
d'un seul ou de plusieurs maîtres qui auraient le droit de patro-nage,
C'est ainsi que Sixte-Quint et la sainte Église ont interprété
l'esprit du concile, et que les Salm.(i), Garcia et Barbosa le rapportent.
Si le bénéfice appar-tient à un laïque, il suffira
qu'il ait fait une présen-tation valable, comme le déclare
le concile dans le même passage : « Quod si jus patronatus
laicorum » fuerit, debeat praesentatus examinari, et non nisi, »
idoneus repertus fuerit, admitti. » Par conséquent l'évêque
doit nommer celui qui a le plus de voix, comme le disent Lessius, Busemb.,
Laymann., les Salm. et Sanchez (2) ; cela s'applique également aux
bénéfices avec cure, dont parle évidemment le con-cileà
l'endroit cité', quoi qu'en disent les Salm.,
XXXIII. Mais arrivons à la question que nous avons à
résoudre, celle de savoir à qui peuvent et doivent être
conférés les bénéfices. Ici nous avons beaucoup
de doutes à éelaircir. On demande i° si tousles bénéfices
doivent être conférés aux plus di-gnes. A l'égard
des cardinalats, épiscopats, il est
(l) Trait. 28. c. un. punct. 8. n. 291.
(a) Lessius c. 34· n, 33, et Salm. ibid, a. 29/}·
POTJIt LES GOJiFESSETTRS.
5 , Q
certain que l'on doit élire pour ces dignités ceux qui
en sont les plus dignes, comme cela résulte du conc ' deTrente,sess.
24, c. 1, et de la propos.?^? condamnée par Innocent II ; la même
chose s'applique aux bénéfi-ces avec cure, comme le concile
l'a déclaré à l'endroit cité ch. 1 et au ch.
xvm. Le plus grand titre est celui qui est tiré de l'utilité
de l'Église ou des fidèles; mais cœterià paribus on
doit préférer le plus saint ou le plus Sage au plus instruit,
comme le dit saint Thomas (1), ie plus noble ou le
plus puissant, l'habitant du pays, le plus vieux, le plus pauvre, et le
prêtre à celui qui n'est pas prêtre (2). Il s'élève
des doutes à l'égard des bénéfices simples
pour sa-voir si lévêque commet un péché en choisissant
celui qui n'est pas le plus digne. L'opinion de Soto, Nav.,Sa, Sanch.,etc,
qui est reconnue bien fondée parlesSalm., Card., etc., dit que l'évêque
ne pèche pas (c'est-à-dire grièvenient, car les auteurs
s'accor-dent à dire (ju'ii y a péché véniel
), parce que, sui-vant ces auteurs, les bénéfices sont institués
princi-palement en vue de l'utilité de la communauté, et
par conséquent il n'y a pas un mal très considérable
lorsqu'pn préfère, non pas un indigne , mais un moins digne
à celui qui l'est davantage ; on en excepte seu-lement les canonicats
auxquels sont annexées les charges de pénitencier ou d'instructeur.
Cette opi-nion me paraît assez exacte, mais je crois l'opinion contraire
mieux fondée et plus généralement suivie. C'est celle
de saint Thomas (S), Lessius , Lugo, Castro, Holz., Lacroix, Roncaglia,
Viva, Salin, etc.
(1) 2. 2. q. 63. a. a. (a) Lib. IV. ?. g ? et 9a. (3) a. a.q. 63. a.
a. a. 1.
320
INSTRUCTION PRATIQUE
Cette opinion est basée sur ce que les bénéfices
sont, suivant l'opinion des docteurs, institués non seulement pour
l'utilité de l'Église, mais encore (quoique moinadirectement)
pour être la récom-pense du mérite, d'où il
suit que l'évêque qui con-fère un bénéfice
à celui qui n'en est pas le plus digne, pèche gravement
par deux motifs : i° parce qu'il manque à la justice distributive,
en méprisant les droits des plus dignes; car l'évêque
n'est pas maître, comme dit saint Thomas, mais simple distributeur
de bénéfices; 2° parce qu'il occasionne un dommage à
son église, car s'il est reconnu que le choix ne tombe pas sur les
plus dignes, peu de personnes s'appliqueront à se rendre les plus
dignes, .et c'est là un grand mal pour tous (i). Cependant Nav.,
Soto, Less,, Lugo, etc., admettent les restrictions suivantes: i° si
ce n'est que pour un bénéfice simple et pendant une ou deux
fois seulement que l'on a né-gligé le plus digne; et même
si c'est un canonicat, pourvu qu'il ne soit pas accompagné d'une
juridic-tion ou d'une fonction importante j 2° si le surcroît
de mérite se réduit à fort peu de chose ; 3° si
le béné-fice est d'une faible importance; 4° si on a
.donné la préférence à un membre de la famille
du fondateur, comme le disent Tourn. et Silv. ; 5° si la personne élue
doit dans peu de temps renoncer à son bénéfice. Voir
Holzmann et Pichler (2).
XXXIV. On demande 20 si les bénéficiers sont obligés
de "présenter les plus dignes. Quant aux bénéfices
avec cure, il est certain que les ecclésias-tiques qui les possèdent,
ainsi que ceux qui dispc-
(1) Lib. IV. 11. g3.
(3) ?. 96.
POUR LES CONFESSEURS.
sent des évêchés (ce sont les monarques), sont
obli-gés de présenteras plus dignes, ainsi que le déclare
le conc. de Trente, sess. 24, ch. 1 et oh. xvm. Il est hors de doute qu'on
doit suivre l'opinion de Lugo, Sanch., Lacroix, Viva, Roncaglia,Salm.,
etc., qui ap-pliquent la même décision à tous les bénéfices.......
car le concile dit, dans le ch. 1er précité, que tous
les bénéficiers doivent toujours présenter pour Jes
cures ceux qui en sont les plus dignes. Cela est en-core confirmé
par la proposition 47 > condamnée par Innoc. XI, où il est
parlé de toute cure en géné-ral. Quant aux bénéfices
simples, comme nous avons dit des évêques qu'ils étaient
très probablement obligés de nommer les plus dignes, nous
dirons de même que les Patrons sont obligés de les présen-ter;
seulement Lugo admet une exception pour ceux qui entretiennent les chapellenies.
Azor, Molina et Vasquez au contraire ne le permettent qu'aux seuls fondateurs
(1). On demande 3° si la renonciation d'un bénéfice doit
aussi être faite en faveur du plus digne. Il y a sur cette question
un grand nombre d'opinions divergentes dont on peut voir l'exposé
dans le courant de cet ouvrage (2), mais la plus juste de toutes me paraît
être celle du cardinal de Lugo, qui dit que la gravité d'une
telle faute doit être appréciée d'après le dommage
que cette renonciation peut causer à l'Église; d'où
il conclut que les renonciations aux bénéfices avec cure,
et spécialement les renonciations aux évê-chés,
sont rarement faites d'une manière loyale, parce qu'elles sont ordinairement
payées par une
W N.97
(a) .N. 98.
T. XXIV.
21
3s Si
INSTRUCTION PRATIQUE
?pension, et que ce n'est pas tant le mérite qui dé-cide
le choix.
XXXV. On demande 4° si les religieux qui ne nomment pas le
plus digne pour une prélature, commettent un péché
grave. Quelques auteurs di-sent que non ; mais l'affirmative est plus générale-ment
professée par Lugo, Viva, Lacroix, Roncag., Salm., etc., parce que
les prélats doivent, tout aussi bien que les évêques,
veiller sur le bien de la com-munauté, et que ceux qui sont moins
dignes peu-vent facilement devenir indignes, parce qu'ils met-tent moins
d'application à maintenir l'ordre et la discipline (1).
XXXVI. On demande 5" si l'élection d'une per-sonne moins
digne est valable, lorsque le bénéfice a une
cure : la négative est professée par Sancti.,
Cast., Salm., etc.; mais l'affirmative est soutenue avec plus de
raison par Lugo, Fill., Vasq., Holz., Anacl., Lacroix, etc. Cette
opinion est approuvée par une bulle de saint PieV, où, tout
en permettant d'en appeler au plus digne, il déclare que cet appel
n'empêche pas que l'élection du moins digne qui a été
faite, ne reçoive son exécution ; donc elle est re-connue
valable. Peu importe ce qui est dit au conc. de Trente, sess. 24»
ch. xvm : « Provisionespraeter » supradictas formas factae
subreptitiœ censeantur,? car l'expression formas ne désigne pas
l'élection, comme le prétendent les partisans de l'opinion
con-traire , mais à proprement parler, les formalités
prescrites pour la nomination des cures, c'est-à-dire î'édit,
le concours et l'examen (2).
(1) N. 100 et 101. (a) N. io5.
POOR LES CONFESSEURS.
XXXVII. On. demande 6° si celui qui a élu pour un bénéfice
le moins digne est tenu de faire la restitution. Silv., Cajét.,
Bann.,les Salm. et au-tres, disent qu'il y est tenu, même, lorsqu'il
s'agit de bénéfices simples qui sont donnés sans concours;
q ue, dans ce cas , la restitution du dommage doit être faite seulement
au plus digne. D'autres auteurs prétendent qu'elle estaussi due
à l'Église; mais Can., Nav., Toi., Less., Sanch., Lugo, Castr.,
Lacroix, et la plupart des docteurs, disent qu'il ne doit pas faire de
restitution , ni au plus digne, qui n'a pas de droit rigoureux sur les
bénéfices, car les bénéfices sont institués
principalement pour l'utilité publique, et nécessairement
pour servir de récompense au Hiérite; ni à l'Eglise,
qui n'entend défendre aux personnes chargées de nommer aux
bénéfices, que de nommer ceux qui sont indignes (auquel cas
ils devraient sans aucun doute restituer à l'Eglise la valeur du
dommage par elle souffert). Nous pensons que cette .opinion est la mieux
fondée, à cause du ch. ?, n.- 20, et du ch. ?, ?. 35, où
il est dit que le possesseur de bonne foi n'est pas tenu de faire la restitution,
tant qu'il n'est pas certain que son obli-gation existe (?).C'est pourquoi
l'obligation de resti-tuer n'est pas non plus imposée à celui
qui, sans em-ployer de moyens frauduleux, détourne l'évêque
de nommer le plus digne, ainsi que nous le dirons au ch. ? , n. 63, déjà
ché'(2). Mais il y a plus de diffi-culté pour savoir si,
lorsque le bénéficier est nommé au concours, l'électeur
qui nomme le moins digne est obligé de faire la restitution au plus
digne. L'af-
(?) ?. 106 et 107. (a) N. 108.
INSTBITCTION PRATIQUE
fìrmative est généralement professée par
Sanch., Tourn.,Less.,Lug., Gastr., Holz., Lacroix, etc.jpar la raison qu'au
moyen du concours, le plus digne acquiert un véritable droit au
bénéfice, par suite du pacte qui intervient entre celui qui
est chargé d'élire et celui qui concourt, et (comme le disent
ces auteurs) la nature de ce pacte est suffisamment expliquée dansl'édit.
Néanmoins, Soto, Nav., Led., Henr. et autres, exemptent l'électeur,
non pas du péché, mais de la restitution, en disant que le
pacte que l'on suppose ici n'est pas un pacte rigoureux qui produise une
obligation d'après la justice com-mutative, mais plutôt
une interprétation qui est imposée à l'évêque
d'après la justice distributive, de préférer le plus
digne, laquelle interprétation ne l'oblige pas à faire la
restitution. Je ne vais pas jus-qu'à dire que cette opinion est
exacte, mais je n'ose pas non plus la condamner comme sans fondement; car
il m'est impossible d'affirmer comme certain que ledit pacte produise une
obligation rigoureuse, d'après la justice commutative; et tant que
la nature de ce pacte ne sera pas bien déterminée, on ne
peut pas regarder l'obligation de restituer comme cer-taine. Du reste,
les partisans de l'opinion contraire, tels que Sanch., Lug., Rone, et Garz.,
exemptent de_ toute restitution,· lorsque celui qui est
plus digne ne surpasse que de fort peu de chose celui qui a été
nommé (1).
XXXVIII. On demande ?0 si une personne qui est digne d'obtenir le bénéfice
commet un péché lorsqu'elle concourt avec d'autres qu'elle
sait en être plus digne. La négative est soutenue avec rai-
(») N. 109.
POOtt I.ES CONFESSEURS.
son par Lessius, Soto, Azor, Cajetan, Vasquez, Salm., etc., parce que,
l'Église veut, à ce qu'il paraît, qu'on admette au
concours tous ceux qui sont dignes de la place; car, autrement, si l'on
ne permettait qu'aux plus dignes de concourir, il y aurait fort peu de
concurrents, et souvent les plus dignes eux-mêmes, épouvantés
par leurs scrupules, n'oseraient pas se présenter, ce qui serait
préjudi-ciable à l'Église. Sanch. Castr., Nav., Lug.,
etc., se déclarent par l'affirmative , toutes les fois que celui
qui est digne connaît d'une manière bien positive que son
compétiteur est plus digne que lui. Cette dernière opinion
paraît, en théorie, mieux fondée que la première;
mais, en pratique, elle ne semble pas pouvoir être mise à
exécution ; car, dans aucun cas, celui qui est digne ne peut savoir
d'une ma-nière certaine si l'évêque n'a pas quelque
raison particulière, connue de lui seul, pour exclure celui qui
est considéré comme le plus digne (1). Mais ici s'élève
un autre doute. Celui qui est digne, mais qui connaît d'une manière
certaine que son con-current est plus digne, commet-il un péché
en ac-ceptant le bénéfice, et doit-il faire la restitution
? L'affimatire est professée par Nav. et Castr.; mais Soto,Sanch.,?urrian.,
Salm., etc., disent avec plus de raison qu'il n'y a ni péché
ni obligation de resti-tuer. Il n'y a pas de péché, parce
que celui qui ac-cepte le bénéfice ne participe pas à
l'injustice dont l'élection est entachée, comme le supposent
les par-tisans de l'opinion contraire ; car l'évêque, l'ayant
déjà nommé, a déjà consommé son
péché, et par conséquent son acceptation ou son refus
n'est plus
(?) ?. 110.
326
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'une chose accessoire. Il n'y a pas non plus obli-gation de restituer,
parce, que la nomination de celui qui est moins digne
étant faite, elle est vala-ble (comme nous l'avons démontré
au n. 56), d'où il résulte que le bénéfice
n'est plus dans la classe des biens communs, et que, par conséquent,
le plus digne n'a aucun droit sur cet objet. Cette opiniou est admise par
saint Thomas.(i), qui, en parlant des évêchés, dit
que celui qui fait les nominations doit donner
la préférence au meilleur sujet. Mais, en parlant de l'élection,
il dit : «Won requiritur ut » repentit se aliis meliorem, sed
sufficit quod nihil » in se inveniat per quod illicitum in reddatu
assu-»mere prœlationis officium.» D'autant plus que per-sonne
(comme nous le dirons un peu plus bas) ne peut être certain que sa
nomination soit injuste (2). XXXIX. On demande 8° si les examinateurs
sont coupables lorsqu'ils ne désignent pas
à l'évêque celui qui est le plus digne parmi les candidats.
La négative est soutenue par Lugo, Oastr.,
Lacroix, qui disent que les examinateurs on!
rempli leur de^oii lorsqu'ils ont tait connaître a I 'é>èqne
reux qui sont admissibles , car f est a 1évèqne houl qu'il
appartient de déclarer quel est le plus digne; mais l'affirmative
est mieux fondée et plus généralement adoptée
par Az., Ronc, Dian., Saim., etc., parce que, quoiqu'il appartienne à
l'évêque de prononcer sur le mérite des divers candidats,
cependant le concours a été institué afin que
les examinateurs proposent le plus digne, et que l'évêque
puisse par ce moyen faire un choix plus équitable (?). Les exa-
(1) 2. 2. q. l85. a, 1.
(a) Lib. III. ?. u8. V. dub. a.
(3) Ibid. n. m.
POOR LES CONFESSEURS.
niinateurs doivent prêter serment de remplir fidè-lement
leur mission. Voir le cconcile de Trente sess. 24. ch. 18. de réf.
Sans cela le concours serait entaché de nullité, d'après
un décret de la S. C. du conc. a. 2. Decem. 1628.
XL. On demande 90 si l'on peut quelquefois donner
plusieurs bénéfices à la même personne. Mais
il faut, à cet égard, distinguer les bénéfices
compatibles des bénéfices incompatibles. Les bénéfices
compatibles sont tous les bénéfices
simples qui n'astreignent pas à une résidence;
les bénéfices incompatibles se divisent en deux espèces
: les in-compatibles de la première espèce sont
tous les bénéfices doubles énumérés
au commencement du numéro ??; c'est-à-dire,premièrement
tous les bé-néfices avec cure, et ceux qui sont uniformes,
sub eodem tecto, c'est-à-dire qui conviennent aux mêmes fonctions
dans le même temps et dans le même lieu ; et de plus toutes
les dignités personnelles et tousles offices ecclésiastiques
que nous avons énumérés au même endroit. Les
incompatibles de la deuxième espèce sont les canonicats et
tous les autres bénéfices qui astreignent à la résidence.
Mais avant d'entrer en matière, il estbon de remarquer ici que lorsquequel-qu'un
reçoit deux bénéfices incompatibles, dès l'in-stant
qu'il a accepté le second , le premier est vacant de plein droit
[de jure). S'il a l'intention de garder l'un et l'autre, il les perd tous
les deux ipso facto, ainsi que cela résulte du conc. de Trente,
sess. 7, c. 4 et sess. 24. c. 1 et 17. Voilà pour ce qui concerne
les béné-fices incompatibles de la première
espèce. Mais doit-on appliquer cela aux incompatibles de la
se-conde espèce? L'affirmative est soutenue par le
INSTRUCTION PRATIQUE
continuateur de Spor. et par les Salm. (1) ainsi que par Azor, Gonzales,
Fagundes, etc. Ces auteurs s'appuient sur la délibération
du même concile, à l'endroit cité, et sur une déclaration
de la sainte Eglise. Les Salm. et autres soutiennent que la même
chose s'applique aux bénéfices simples, lors même qu'ils
n'astreignent pas à la résidence (2}. Cependant la négative
est professée parbLaym., Bus. et autres au-teurs après les
Salm.,ainsi que Nav.,c[uidLt que cette déclaration n'est pas certaine
; et quant au conc. de Trente, ces auteurs répondent que dans le
deuxième passage, où il est question seulement de la vocation,
le concile ne parle que des bénéfices avec la cure, mais
non pas des autres (?). Et comme le disent les Salm. ainsi qu'Abell., le
pape peut très bien ac-corder une dispense pour cet objet, mais
seulement dans le cas de nécessité ou d'utilité évidente.
Au-trement ( comme le soutiennent Bell., Panorm., Toi., Salm., etc.) celui
qui aurait reçu de cette ma-nière plusieurs bénéfices,
même avec la dispense du pape , ne pourrait pas avoir sa conscience
tran-quille (4).
XLI. Du reste le cumul pour les bénéfices simples est
très certainement prohibé par les canons, dans le cas où
le premier bénéfice estsuffisant pour le soutien du clerc
; ainsi que l'a déclaré le conc. de Trente, sess. 24.5 c.
17, où il est dit: « Mandat ut unum tan-» tum beneficium
singulis conferatur. Quod si unum
(1) Tract. 28. deBeneO.n. 664. (a) Lib. IV. ?. ??8. V. Quser. (5) N.
116. (4) Ibid. V. Prasterea.
POUR LES CONFESSEURS.
52Q
» non sufficiat ad sustentationem, liceat aliud simplex »
sufficiens , dummodo utrumque personalem resi-» dentiamnon requirat
eidem conferri. » Mais la plus grande difficulté à
résoudre c'est celle de savoir si le cumul des bénéfices,
même simples, est prohibé non seulement par la loi canonique,
mais encore par la loi divine ; quelques auteurs soutiennent la néga-tive
d'une manière absolue , ce sont Innoc,, Lugo, Filliu., Valentia,
etc.; d'autres sont pour l'affir-mative et d'une manière tout aussi
absolue. Ce sont Panorme, Tournely et autres, et spécialement Bel*
larmin , qui soutient que le pape ne peut accorder de dispense sans une
cause très urgente ; et cela, soit parce qu'un seul bénéficier
ne peut pas faire d'une manière satisfaisante le service de deux
églises , soit parce que l'on présume que la volonté
des fondateurs a été que chaque bénéficier
ne fût chargé que du service d'une seule église. Mais
il vaut mieux adopter l'opinion commune qui est pro-fessée par saint
Thomas ( ? ), ainsi que par Azor, Lessius , Laymann, Abelly, Holzm, Salm,.,
etc., lesquels auteurs disent que la pluralité des béné-fices
sur une seule tête est véritablement illicite, et qu'elle
l'est suivant la loi naturelle; par consé-quent on ne peut pas,
même avec l'autorisation du pape, garder plusieurs bénéfices
lorsqu'on en a assez avec un seul pour son entretien. Nous adop-tons cette
opinion, non pas tant à cause de la pre-mière raison sur
laquelle elle s'appuie qu'à cause de la seconde, et de plus parce
que l'ordre ecclésias-tique se dégraderait par suite des
inconvénients énumérés par Jean XXII, dans
ÏExtrav. execrabilis
(?) Quod lib. IX. art. 5.
INSTRUCTIO». PHATIQCE
deprœbend., c'est-à-dire que si le cumul des bénéfices
était toléré, il se trouverait que plusieurs ecclésias-tiques
en auraient de trop, et que d'autres qui méri-teraient d'en avoir
seraient obligés d'aller mendier leur subsistance. De plus, parce
que, lorsque les églises n'ont pas un directeur particulier, elles
sont souvent privées de l'honneur qui leur est dû et du service
divin. De plus, parce que celui qui possède plusieurs bénéfices
ne peut pas s'appliquer à défen-dre comme il le doit les
droits de chacun d'eux. De plus, parce que l'excédant des revenus
est un aliment pour le luxe et la cupidité. Cependant nous admettons,
comme l'admet cette même opinion, que ce n'est pas une chose si illicite
que le pape ne puisse pas accorder une dispense lorsqu'il y a pour cela
de justes motifs (1). Ces motifs sont i° la néces-sité,
c'est-à-dire, comme l'enseigne saint Thomas(2): <($i sit necessitas
in pluribus ecclesiis ejus obsequio.» 2° L'utilité, si
le bénéficier peut tout seul, et maigre qu'il n'y ré.side
pas, diriger mieux qu'un autre les intérêts des deux bénéfices,
soit à cause de ses lu-mières, soit à cause de sa-prudence,
comme le dit le docteur Angélique à l'endroit déjà
cité : «Ipse possit » plus desservire ecclesiae , et
tantumdem absens, » quam alius praesens. » 5° La prérogative
des mérites, c'est-à-dire la prérogative de ceux qui
rendent ser-vice à l'Eglise par leur profond savoir, par les in-structions
qu'ils font ou par les ouvrages qu'ils écri-vent. Jl est dit, à
ce sujet, au chap, de multa., § fin. de frœbendi. : « Nullus
plures dignitates aut perso-» natus habere praesumat circa sublimes
tamen et
(?) Lib. IV. n. 117. (a) Quodlib. art. ?5.
POO» LES CONFESSEURS,
33j
«liberatae personas , quae majoribus beneficiis sunt «honoranda,
etc. »
§ II. De la qualité et des obligations des bénéficiera
, et de combien de manières les bénéfices, peuvent
être perdus.
42. Qualité des bénéficiers.
De l'intention de prendre les ordres dans l'année, etc.
43. Celui qui reçoit une cure avec une intention douteuse
ou conditionnelle.
44· Celui qui reçoit un bénéfice avec l'intention
de l'abandonner.
45. Obligations des bénéficiers
à l'égard des fruits, etc. S'ils peuvent les
employer pour leur subsistance.
46. A quoi doivent-ils dépenser leur superflu?
47. Doivent-ils le donner aux pauvres de l'en-droit ?
48. Doivent-ils le donner à leurs psrents :'
49· Si le pensionnaire estubligé de dépenser
»on .superflu.
5o. De ia résidence des chauoiue».
ai.. Peines des non-résidents.
52. Causes d'excuses, et 1° de l'infirmité.
55. 2! De la nécessité.
54· Si l'excommunié, etc.
55. Si l'irrégulier, etc.
56. 3" De l'utilité. De celui qui assiste, etc.
Du pénitentiaire et du théologal.
57. Des examinateurs, visiteurs , etc.
58. De combien de manières les bénéfices
se per-dent ; spécialement par la renonciation et par la loi ; surtout
s'il y a simonie.
352
INSTRUCTION PRATIQUE
5g. Des pensions.
60. Quels sont les actes et les fonctions défendus aux
clercs?
61. De l'aliénation des biens ecclésiastiques.
62. Des solennités requises.
XLII. Et d'abord, en ce qui concerne la qualité, le bénéficier
doit être au moins clerc de première tonsure ; de plus il
ne doit pas être illégitime ( ce-pendant s'il l'était,
l'évêque pourrait lui donner une dispense pour les ordres
mineurs et le bénéfice simple) ; de plus il ne doit pas être
irrégulier, ni criminel, ni excommunié. De plus il doit avoir
les connaissances exigées et l'âge légal, c'est-à-dire,
pour le bénéfice simple, quatorze ans (et il suffit que la
quatorzième année soit commencée , d'après
l'opinion commune et d'après la déclaration de la S. C, dans
Fagnan, in. c. super, deprœbend.n. 25); pour l'ordre de sous-diaconat,
il faut vingt-un ans ; pour le diaconat, vingi-deux ans; pour le sacerdoce,
vingt-quatre ans ; pour le bénéfice avec cure, vingt-cinq
ans ; et il suffit que la dernière année soit com-mencée,
comme cela résulte du ch. licet 24) de Elect. 1. 6. Enfin pour l'épiscopat,
il faut avoir trente ans ré-volus, c. Cum in cunctis ?. ead. tit.
Remarquez de plus que pour parvenir à la dignité du sacerdoce
dans les cathédrales, il faut avoir commencé sa vingt-deuxième
année; mais cela n'est pas néces-saire dans les églises
collégiales, d'après le décret de la sainte congrégation,
ainsi que le dit Fagnan à l'endroit cité, chap, ? de elect.
Ces bénéficiers sont tenus de prendre les ordres sacrés
dans le courant de l'année , et s'ils laissaient passer seulement
une heure de plus, la nomination serait nulle et ils ne pourraient plus
garder leur bénéfice , à moins qu'ils
POUR LES CONFESSEURS.
355
ne l'eussent acquis par prescription en le possédant de bonne
foi pendant trois ans, comme le disent Lessius et Busembaum (?). Par conséquent
celui qui accepte un bénéfice auquel les ordres sacrés
sont joints , doit avoir l'intention de prendre les ordres dans l'année
; et si c'est un bénéfice avec cure, celui qui l'accepte
sans avoir l'intention d'en-trer dans le sacerdoce, non seulement commet
un péché mortel, comme cela est incontestable, mais encore
il est privé de son bénéfice de plein droit (ipso
jure) , et par conséquent obligé de restituer tousles fruits
qu'il en a retirés; excepté si, dans le courant de l'année,
il changeait d'intention, comme le disent très bienLessius, Navarre,
Sanchez et les Salm. ( contre Soto et Tolet. ), et comme cela ré-sulte
clairement du chap. Commissa de elect, in. 6, où 11 est dit : «
Nisi voluntate mutata promotus fue-»ris, etc. » Néanmoins
l'évêque peut à cet égard accorder une dispense
pour sept ans, afin de don-ner au bénéficier le loisir de
faire ses études, en lui substituant, pendant cet intervalle, un
vicaire pour les fonctions de son bénéfice (2). Mais on doit
entendre ceci (comme le dit Laym. ) d'une ma-nière qu'une telle
dispense ne puisse être accordée sans une nécessité
grave ou une grande utilité pour l'Église, comme cela résulte
du chap. Cum ex eo de elect, in. 6.
XLIII. On demande i° si celui qui reçoit un bé-néfice
avec cure, avec l'intention douteuse ou con-ditionnelle d'embrasser le
sacerdoce dans l'année, commet un péché grave, et
s'il est tenu de restituer
(1) Lib. IV. ?. us. (a) Ibid.
554
INSTRUCTIO» PRATIQUE
les fruits. Il y a sur ce point plusieurs opinions dif-férentes.
Quelques auteurs soutiennent la négative, et d'autres l'affirmative
pour le cas où l'intention est douteuse ; mais pour celui où
elle est con-ditionnelle, ils reviennent à la négative, parce
que, disent-ils, l'intention conditionnelle est Véritable-ment une
intention. (V. Less., Sanch., Salm., etc. Mais pour nous, nousadoptonsl'opinion
de Sot., Az. et Conc, qui sont pour l'affirmative, soit que l'in-tention
soit douteuse, soit qu'elle soit condition-nelle; parce que toutes les
fois qu'il n'y a pas l'in-tention réelle d'entrer dans le sacerdoce,
il y a toujours la fraude d'après laquelle le texte, c. cit. commissa,
prononce l'obligation de restituer, en disant : « Teneris ad restitutionem
fructuum, cum » eos receperis fraudulentus » Du reste cela
n'em-pêche pas que le bénéficier, après avoir
accepté le bénéfice avec l'intention réelle
de prendre les ordres, ne puisse pas le quitter en alléguant un
changement d'intention (1).
XLIV. On demande a* si celui qui accepte un bé-néfice
simple, avec l'intention dele quitterensuite, commet un péché.
Il est incontestable ( comme nous l'avons déjà dit plue haut)
qu'il commet un péché grave, si tandis que ce bénéfice
entraîne l'obliga-tion de prendre les ordres sacrés , il l'accepte
sans avoir l'intention deles prendre. VoirCastr., Sanch., Salm., Bus.,
etc. Mais il y a doute sur la question de savoir si, lorsque le bénéfice
n'emporte pas avec lui les ordres sacrés. Il y a péché
de la part de celui qui l'accepte avec l'intention de l'abandonner en-suite
et de se marier. Toled.,Less. et les Salm. di-
(0 Lib. IV, n. u4.
raisen
POOR LES CONFESSEUI
sent qu'il y a péché, parce que ce s désordre
; d'autres, au contraire, t Garz., disent qu'il n'y a aucune faut la plus
commune est celle de Sane Vasq. et Bus., qui disent qu'il y a véniel,
parce qu'ils ne trouvent pa assez grave pour motiver le péc dernière
opinion me paraît plus pr d'après la maxime de saint Antoni
saint Thomas , maxime qui porte ne doit être condamné comme
péch qu'on y soit induit par une Les paroles de saint Antonin so:
eh, m, n. 58.
XLV. Quant aux obligations elles sont très nombreuses
: d'al de porter l'habit et la tonsure, 1 citer l'office ou de restituer
les frui disent .pas. Mais nous parlerons dans VExam des ordinante, au
n. nous reste ici qu'à expliquer l'ob administrer les revenus des
benefit de résider dans le lieu désigné. Ei l'administration
des revenus. Il i° qu'il est certain (quoi qu'en
dii teurs, qui paraissent plus influenc que par la raison) que le benefici
les faire servir à son entretien, lor: biens à lui propres.
Voir Fagnan Anac.Holz. etsaintThomas (2) et est juste que celui qui fait
le servi'
335
rait là un grand 1s que Castr. et . Mais l'opinion ., Nav.,
Laym , eulement péché là un désordre é
mortel; cette bable, au moins , rapportée par qu'aucun défaut
é grave, à moins évidente (1). rapportées
au
ies bénéficiers, lord l'obligation )bligation de ré-s
lorsqu'ils ne le î ces obligations 60 et ^8. Il ne igation de bien
2s, et l'obligation ce qui concerne faut remarquer ent quelques au-is par
la sévérité ? peut très bien même qu'il
a des ïabert, Petroco, [Utres, parce qu'il e de l'autel, vive
(1) Lib. IV. n. 113. q. 1. (a) a. 2. q. i85. a. S. ad. 3.
336
INSTRUCTION PRATIQUE
des revenus de l'autel : Quis militat ( dit l'apôtre ) suis stipendiis
unquam, etc. Mais on doit en excepter, avec le docteur angélique,
le cas où il y aurait quel-que pauvre dans une grande nécessité
ou quelque esclave entre les mains des barbares, parce qu'alors le bénéficier
qui a du superflu est tenu de leur por-ter secours (1). Du reste, hors
de ce cas, le clerc qui s'entretient avec ses propres revenus, peut gar-der
sur les revenus du bénéfice une somme égale à
celle qui lui est nécessaire pour ses dépenses, et en disposer
à son gré, comme le disent Lessius, Anaclet et autres (2).
XLVI. Il faut remarquer, 2° que si les revenus du bénéfice
surpassent ce qui est nécessaire au clerc pour son entretien, il
est également certain qu'il doit les distribuer aux pauvres ou les
employer à quelque autre usage pieux, comme l'admettent la plupart
des docteurs; car le Concile de Trente n'or-donne pas autre chose, sinon
que les bénéficiers ne dissipent pas leurs revenus , et qu'ils
les emploient à des œuvres de piété. Mais on doit
ici admettre l'opinion de Lugo et Lessius, qui font une exception pour
le cas où il y aurait des pauvres dans un état de grande
nécessité. Le P. Viva dit, de plus, à l'é-gard
de ces pauvres, que les évêques et curés doi-vent tâcher
de les découvrir (3). Mais lorsqu'il n'y a pas de pauvres dans cet
état, Holzmann, saint Thomas (4) et autres, disent que le bénéficier
peut garder les revenus pour les dépenser plus tard à
(1) Lib. HI. 5. ?. 491 · <?· 5.
(2) Ibid. q. 1.
(5) Lib. 111. ii. 4gi.q. 1. (4) a. 2, q. i85. a. 7. ad 4·
POUR LES CONFESSEURS.
l'utilité de l'église, et au soulagement des pauvres
futurs (1).
XLVII. Il feut remarquer 3° que les bénéficiers ne
sont pas obligés de faire l'aumône aux pauvres de leur endroit,
de préférence aux autres; c'est là l'o-pinion de la
plupart des docteurs, et elle est basée sur ce que les Canons parlent
de tous les pauvres en général. Mais les Salm. et Holz. admettent
une res-triction pour le cas où il se trouverait dans le pays des
pauvres réduits à l'extrême ou grave nécessité
; mais cette restriction est rejetée par la plupart des auteurs,
tels que Molina, Azor,Bonacina etNavarre, pourvu toutefois { car c'est
ainsi qu'il faut l'enten-dre J que les revenus soient destinés à
d'autres pau-vres qui en ont un besoin aussi pressant, et pourvu que le
fondateur n'ait pas semblé vouloir qu'il en fût autrement;
et pourvu, encore, ajoute Molina, que le bien général du
diocèse n'exige pas qu'on en dispose autrement, par exemple, s'il
y avait un collège des-tiné à l'éducation des
enfants qui se trouvât dans un état de pauvreté et
auquel il fallût porter se-cours (2).
XLVUI. Il faut remarquer 4° que sous le nom de pauvres on doit
comprendre aussi les parents lorsqu'ils se trouvent dans un besoin réel,
de ma-nière à ne pouvoir pas s'entretenir suivant leur con-dition.
C'est ce que dit le conc. de Trente, sess. 25, c. i, et ceci a lieu lors
même qu'il y a d'autres pauvres qui ont de plus grands, besoins,
comme le disent Toi., Mol. et Viva (contrel'opinion de Laym.), parce que
le soutien de ses parents tient à l'état même
(l) Lib. III. a. 491. q. 4· (aj Ibid. q. 3.
T. xxiv.
aa
358
INSTRUCTION PRATIQUE
du bénéficier. C'est pourquoi Az., Cast.,Tol.,Lacroix
et tous les autres s'accordent à dire que le clerc peut employer
les revenus de son bénéfice pour s'en-tretenir, lui et les
siens (1).
11 faut remarquer 5° que si un bénéficier vend les
fruits de son bénéfice pour toute sa vie, moyennant un ou
plusieurs paiements, le contrat est nul, ainsi que l'a déclaré
Benoît XIV, dans sa bulle Univer-salis ecclesiae, du 29 août
1741 , qui se trouve dans son Bullaire, au toni. 1.
XLIX. On demande si celui qui reçoit une pension, doit donner
aux pauvres la portion de ses revenus qui excède ses besoins. Sanch..
Mol., Salm. et plu-sieurs autres, distinguent, suivant que la pension est
laicale ou ecclésiastique (ainsi que cela est expliqué au
?. 5?,) ; si elle est laicale, ils prétendent qu'il n'y est pas
obligé ; si elle est ecclésiastique , ils disent qu'il y
est obligé, parce qu'alors les revenus de la pension sont, suivant
eux, de la même nature que les fruits d'un bénéfice.
Néanmoins je trouve assez probable l'opinion de Lug», Vasquez,
Covarruv., Azor, etc., qui soutiennent qu'il n'y est obligé dans
aucun cas. Azor rapporte que celte question a été dé-cidée
dans ce sens par la cour de Rome. La raison en est qu'en fournissant la
pension avec les fruits du bénéfice, on les a employés
à une œuvre pieuse, et par conséquent on ne doit pis être
obligé de les employer une seconde fois à des œuvres de cette
na-ture. M anstrion et Bonacina disent la même chose pour les revenus
des connnanderies des chevaliers de Saint-Jean,Saint-Jacques, et auxquels
Grégoire XII a accordé la faculté de test er. Mais
Azor , Na-
(1) Lib. ??. n.491. q· ?.
POUR LES CONFESSEURS.
varre , etc. (?), soutiennent le contraire. Quant à la question
de savoir si les Lénéficiers sont oblierés à
la restitution lorsquils ont dépensé les fruits de leurs
bénéfices à des choses frivoles, voyez ce qui est
dit au ch. x, n. 6 et 7, où il est parlé en même temps
des différents pécules des clercs, et de la fa-culté
qu'ils ont d'en disposer. Il faut remarquer seulement ici qu'e, pour qu'il
y ait matière grave, elle doit être d'une plus grande valeur
que celle exigée pour le vol, comme le disent la plupart des doc-teurs.
Con. et Cast, veulent que cette valeur égale le tiers ou le quart
des fruits du bénéfice. Mais Lugo, Lacroix, etc., rejettent
cette opinion, et disent que le vingtième, c'est-à-dire 2
p. °j0, suffit lorsqu'il forme une somme considérable (2).
L. En ce qui concerne la résidence, nous trai-tons- de la résidence
des évêques > et des curés au ch. vu, n. 4 et suiv.,
et au n. 62 et suiv. Il nous reste ici à traiter de larésidence
des chanoines; et à cet égard remarquez i° que les chanoines
qui ont une portion du service des cathédrales ou des églises
col-légiales, peuvent, d3après1econc.deTrente,sess.e4> ch.
xii, rester absents pendant trois mois, pendant lesquels ils conservent
leur droit aux revenus des prébendes, mais non pas aux distributions,
car ces distributions ne peuvent pas leur être rémises par
leurs collègues (il faut remarquer ce passage) quam-vis remissione
exclusa, his careant, comme le dit le, concile à l'endroit cité
(?). Du reste, quant aux re-venus de la prébende, le chanoine n'en
est pas privé
(x) Lib. ??. n. 491. q. 6. et lib. IV. u. l3g.
(2) Lib. III. ?. ?83.
(?) Vide lib. HI. ?. 675. dub. a.
54?
INSTRUCTION PRATIQUE
pendant ces trois mois, lors même qu'il s'absenterait sans utilité
et sans aucun juste motif, comme le di-sent avec raison Sanchez , Pellizia
et autres ; car c'est sans aucune restriction que le concile a permis aux
chanoines de s'absenter pendant ces trois mois. Il faut remarquer cependant
que, d'après un décret de la sainte Congrégation du
concile, rapportée par Jourdain Pax (?), les chanoines ne peuvent
pas, pendant les mois où se tiennent les conciles , s'ab-senter
hors de leur diocèse, sans une permission de l'évêque.
Il faut remarquer encore que les évêques ne peuvent pas (
pour s'absenter ) ajouter les trois mois de l'année précédente
à ceux de l'année sui-vante, ainsi que l'a déclaré
Benoit XIV dans sa bulle Ad universa (2); tandis que les chanoines peuventle
faire pourvu (comme le dit le P. Concilia ) que cela ne cause pas de scandale
et ne leur fasse pas négli-ger le culte divin.
IL Le concile de Trente ordonne, dans le même passage, que le
chanoine qui est absent du lieu de sa résidence pendant plus de
trois mois, soit privé, pour la première année, de
la moitié de ses revenus, et qu'il soit privé de tous les
revenus de l'année s'il persiste à rester absent; et enfin
si son absence se perpétue, on devra procéder d'après
les constitu-tions, c'est-à-dire le priver de son bénéfice.
Bona-cina (3) soutient qu'en cas d'absence prolongée, les chanoines
ne sont pas privés des fruits ipso facto, parce que, dit-il, le
décret du concile est pénal, et
(1) Jordan. Pax. Elticubra. 1. X. tit 40. ?. ?$.
(2) Lib. IV. ?. 222. V. Insuper.
(5) Tom. I. (1. 5. de onere Benef., ad. re»id. p. 4· ".
?6· cam. Macigao.
POUR LES CONFESSEURS.
"
341
ne peut, par conséquent, être applique qu'en vertu d'un
jugement. Quanta nous, nous ne contesterons pas que le décret ne
soit pénal en ce qui concerne la restitution de la moitié
des fruits de toute l'année ; niais à l'égard des
fruits qui correspondent aux trois mois d'absence à l'époque
des conciles, nous dirons avec les théologiens de Salamanque (1)
que le chanoine .coupable ne peut ni les réclamer ni les garder,
car le concile a dit : « Privatur dimidia parte » fructuum
quos ratione praebendam, et (remarquez » cette expression) residentiae,
fecit suos. » Si donc le chanoine fait les fruits siens à
cause de la rési-dence, il s'ensuit que lorsqu'il ne réside
pas, il ne fait pas les fruits siens; c'est ce qu'a expliqué plus
clairement Benoît XIV, dans le bref ( qui est rap-porté au
Bull. ) expédié au cardinal Delf., le 19 janv. .1748, où
il est dit que les chanoines «Non ca-» nentes in choro nullo
pacto ex praebendis et distri-sbutionibus facere fructus suos, atque ideo
resti-» tutioni obnoxios esse. » Or si ceux qui ne chantent
pas n'ont pas droit aux fruits, à plus forte raison ceux qui n'assistent
pas au chœur ne doivent pas y ' avoir droit (9).
LU. Les causes qui peuvent exempter les cha-noines de l'obligation
d'assister au chœur, sont au nombre de trois : » Infirmitas, rationabilis
corporis » necessitas, et evidens Ecclesias utilitas, » comme
il est dit au ch. 1, de Cler. non resid. in 6, en sorte que lorsque l'absence
des chanoines estmotivee par l'une de ces causes, ils ne perdent pas leur
droit aux fruits ni aux distributions. La première cause
(1) De legib. c. 3. n. 65.
0) Lib. III. ?. 675. dub. 3. et lib. IV. ?. i2o.
34 %
INSTRUCTION PRATIQUE
d'excuse est donc l'infirmité, c'est-à-dire l'infirmité
grave ou qui doit probablement le devenir. Cette excuse profite aux vieillards
lorsqu'ils ne peuvent pas, sans un grave inconvénient, venir assister
au chœur. Cependant les aveugles doivent y assister lorsqu'ils peuvent
aller à l'église sans inconvénient ; les sourds y
sont également-obligés, et ils doivent y suppléer
en récitant à voix basse les paroles qu'ils n'entendent pas
(1).
LUI. La deuxième cause d'excuse est la nécessité
du corps, c'est-à-dire lorsqu'on doit craindre un mal très
grave. Cette excuse profite à ceux qui pren-nent des remèdes
ou des bains, ou qui changent d'air pour rétablir leur santé
(s). Il faut remarquer à cet égard, i° que si un chanoine
est injustement excommunié ou suspendu, ou bien si on lui refuse
injustement l'absolution, et que par cette cause il ne puisse pas assister
au chœur, il ne perd pas pour cela les fruits ni les distributions. Il
faut remarquer 2° que si l'église a été profanée
ou interdite, les chanoines, quoiqu'ils n'assistent pas au chœur, ne perdent
ni les fruits ni les distributions, pourvu qu'ils n'aient pas eux-mêmes
donné lieu à l'interdic-tion ou à la profanation de
l'église (5).
LIV. Ici on demande i" si le chanoine excom-munié, même
en assistant au chœur, est privé, ipso jure, des distributions et
des fruits. L'affirmative est professée par le P. Conc. et quelques
autres ; mais ce n'est pas sans fondement que l'opinion con-traire est
soutenue par Sanchez, Bon., Castr., Sal-
(i) Lib. IV. ?. ?39· dab. ?. et et a. et n. i63. q. 3.
(a) N. tag. dab. 3.
(5) Lib. IV. ?. 129. V. Quando.
POUR LES CONFESSEURS
niant., etc., parce que, malgré commette un péché
en assistant au ri te. de perdre les fruits; néanmoins imposée
ipso facto ne se trouve cun texte de loi (1).
LV. On demande 2° si celui qu .la règle doit encourir cette
peine ; de cette question dépend de la solu qui consiste à
savoir si la nominati m lier à un bénéfice est nulle
par elle-gularité n'est survenue qu'après la les auteurs
conviennent qu'elle est conséquent, en assistant au chœur, . alors
conserver son droit aux fruits tions. 11 ne s'agit donc que de savo tion
est nulle lorsque le chanoin l'irrégularité avant d'être
nommé. Sali»., etc. disent que non; mais c raison que l'affirmative
est soutenue] Conc, Holz. et la plupart des autre, opinion est confirmée
par lech. ni duello, où il est dit que le clerc irr. obtenant une
dispense, accepter uik il ne peut pas l'accepter sans dispen iirmée
en second lieu par le conc. de ch. iv, où il est dit : « Non
fiat pro » aetatem et caeteras habilitates inle, «irrita sit.
» Et qu'on ne vienne s'agit, dans ce chapitre, que des a parla
loi naturelle, et non pas de c positive. Par conséquent on doit
pi mieux fondée, la deuxième opinio|n
rias
: cellles
343
te ce chanoine chœur, et mé-une telle peine IC dans au-
Cbst.
consigne
n'observe pas jnais la solution d'une autre d'un irrégu-taiême.
Si l'irré-npmination, tous valable; et par le chanoine doit et aux
distribu-ir si la nomina-avait encouru :.,Con.,Elb., ist avec plus de par
Bon.,Tour., auteurs. Cette Ye Cler.pugn. in Igulier peut, en bénéfice,
donc se. Elle est con-'rente, sess. 22. isio nisi iis qui [re habent, alias
dire qu'il ne ititudes exigées qu'exige laloi éférer,
comme qui,veut que
(1) N. i3o. V. cum autem.
544
INSTRUCTION PRATIQUE
l'irréguller ne puisse pas profiter des fruits de son bénéfice
(i).
???. L'utilité de l'Église est une troisième cause
d'excuse, c'est-à-dire lorsque cette utilité a été
ju-gée importante par l'évêque et le chapitre, et,
d'un autre côté, on ne doit pas entendre par là l'utilité
de l'Eglise à la tête de laquelle se trouve le béné-ficier,
mais de l'Église universelle (non pas particu-lière) ou du
diocèse, comme le disent Conc, les Salin., Pell. , Castr., Bon.
, etc., contre l'opinion d'Holz., qui ne veut pas y admettre le bien de
l'E-glise universelle; mais c'est à tort, car ce bien est le plus
important, et il produit le bien de l'Eglise par-ticulière. Par
conséquent on ne doit pas priver des fruits ni des distributions,
i° le chanoine qui est re-tenu à Rome ou auprès du prince
pour défendre les droits de son bénéfice (mais non
pas le droit propre qu'il a sur le bénéfice); ou qui a été
mandé par le chapitre pour les affaires de l'Église, ou en-voyé
par l'évêque à sa place, pour visiter l'église
des apôtres ; ou bien si l'évêque l'amène avec
lui (car il peut en amener deux) à cette visite, ou bien ? s'il
est devenu vicaire capitulaire ; ou s'il est devenu vicaire de l'évêque.,
il aura droit aux fruits, mais non pas aux distributions '(2); 2" le chanoine
pénitencier qui, pendant qu'on récite l'office, écoute
les confes-sions des pénitents, conc. de Trente, sess. 24,ch. vnr,
on bien qui est dans le confessionnal à attendre que quelqu'un vienne
se confesser, comme le disent Castr., Bon., Conc, Ronc.,Salm., etc., ainsi
qu'une déclaration de la sainte congrégation, et c'est avec
(1) ÌAb. IV. n. i5o. V. Quaeritur autem, (a) Ibid. V. m. Excusât.
POUR LES CONFESSEURS.
345
raison que le P. Conc. dit la même chose pour le cha-noine qui
serait subrogé au pénitencier ou de ceux que l'évèque
aurait envoyés pour l'aider dans ses fonctions à une époque
où il y aurait un grand con-cours de pénitents. La même
chose est encore ap-plicable au chanoine ayant une cure, pendant qu'il
exerce son ministère, d'après Gastr.,Salm. et Conc, qui admettent
cette opinion (contre celle de Bonac), lors même qu'il fait le service-
d'une autre église, pourvu qu'elle se trouve dans le même
diocèse ; 3° le chanoine théologal qui fait une instruction
ou un sermon pendant le temps de l'office, ou qui étudie son sermon
(1).
LVII. D'autres conservent leur droit aux fruits , mais non pas aux
distributions ( à moins qu'il n'y ait un usage contraire établi,
comme le disent Pi-chler et Concina); ce sont : i° les chanoines exami-nateurs,
qui font l'examen pendant qu'on récite l'office; 2° les inspecteurs
du diocèse; 5° les deux chanoines que l'évèque
peut prendre pour l'assister; 4° les chanoines qui enseignent dans
les écoles (ou bien qui étudient, avec une permission de
l'évèque pour cinq ans ) la théologie, ainsi qu'il
est dit au ch. Fin. § Docentes de magistris. La plupart des doc-teurs
et une déclaration de la sainte congrégation étendent
ce privilège à l'enseignement de la gram-maire ; Castr.,
Ronc. et Salm. retendent avec rai-son à l'enseignement de la philosophie
et de la logi-que. Gela est encore applicable aux curés qui enseignent
et non pas à ceux qui étudient, comme le disent les mêmes
auteurs (2).
(1) Lib. IV. ?. ?5?. V. Pariter, (a) Ibid. ?. loi et i5a.
346
INSTRUCTION PRATIQUE
LVIII. H faut enfin remarquer qu'il y a quatre manières de perdre
les bénéfices : ? ° par la mort du bénéficier,
2° par un jugement, 3° par la renon-ciation , 4° Par la disposition
de la loi. Sur les deux dernières, il y a beaucoup de choses à
considérer. Et d'abord, quant à la renonciation ou résignation
des bénéfices, il faut distinguer plusieurs sortes de renonciations
; l'une est la renonciation expresse, l'autre la renonciation tacite, par
exemple la pro-fession religieuse et autres actes semblables} une autre
est la renonciation pure, sans aucun pacte ni condition ; une autre enfin
la renonciation condi-tionnelle, c'est-à-dire faite en faveur d'une
autre personne. Cette dernière renonciation peut être simple
ou qualifiée, c'est-à-dire avec une pension ou bien avec
la réserve de pouvoir recouvrer le béné-fice, ce qui
s'appelle : jus regressus. Plusieurs choses sont nécessaires pour
la validité de cette renonciation conditionnelle : ioque le bénéfice
appartienne à celui qui renonce; 2° qu'elle soit faite avec
libre volonté et non par des menaces, etc.; 3° qu'elle soit
faite entre les mains du pape ; 4° qu'elle soit acéeptée
par le pape, et lorsque la renonciation est pure et sim-ple, il faut, pour
qu'elle soit valable, qu'elle ait été acceptée au
moins par le collateur, comme cela est dit au ch. Admonet, de reruin{\)\
5° qu'elle soit ac-ceptée aussi par celui en faveur de qui elle
est faite ; 6° qu'elle soit faite avec la clause : non aliter, etc.
; 7° que les maîtres y consentent ; 8° que le renon-çant,
s'il est malade, survive à la renonciation, de vingt jours au moins
; Q°que la renonciation soit pu-bliée dans la cour de Rome (2).
Ce que nous disons
(0 lib. III. n. 81.
Ca) Lib. IV. A. i35 et i36.
LES CONFESSEURS,
de la renonciation s'applique également à l'échange
des bénéfices. Deuxièmement. Quant à la dernière
manière, qui est la disposition delà loi, elle fait per-dre
le bénéfice ipso facto , par le mariage, par la profession
religieuse, par l'acceptation d'un autre bénéfice incompatible,
comme il est dit au n. 4o. De plus, les bénéfices se perdent
par le délit de si-monie, et spécialement lorsque le délit
est commis par les examinateurs synodaux dans les bénéfices
avec cure. Lorsque ces examinateurs reçoivent quelque chose à
l'occasion de l'examen, ils devien-nent, ainsi que ceux quileleur ont donné,
incapables de recevoir aucun bénéfice à l'avenir,
et quant au passé, ils sont privés ipso facto de tous les
bénéfi-ces qu'ils possédaient, et cela sans qu'il
soit besoin d'un jugement, comme cela est exprimé au conc. de Trente,
sess. 24> ch. 185 car le concile dit que delà simonie * absolvi
nequeant, nisi dimissis beneficiis.» La privation des bénéfices
qu'on a déjà obtenus est aussi encourue lorsqu'on en obtient
un nouveau par des moyens frauduleux. Il faut distinguer ici di-verses
espèces de simonie : la simonie mentale, conventionnelle, réelle
et confidentielle. La simonie mentale a lieu (comme il est dit au chap.
7, ?. 4o ) lorsque quelqu'un donne le temporel avec l'inten-tion d'obliger
celui à qui il donne de lui rendre le spirituel, ou bien de lui
rendre la même chose, mais sans qu'il y ait aucune convention pour
cet ob-jet. La conventionnelle a lieu lorsqu'il y a un pacte, mais qui
n'est exécuté par aucune des parties. La réelle a
lieu lorsque le pacte a déjà reçu son exécu-tion;
cette simonie entraîne, d'après la bulle de saint Pie V, Cum
primum, de i566, outre l'excom-munication du pape ipso facto, la peine
de nullité
348
INSTRUCTION PRATIQUE
pour la nomination de ce bénéficier. (De sorte que, d'après
l'extrav. de Pie IV In sublimis, donnée le4 mai i562, le bénéficier
coupable de simonie ne peut obtenir l'absolution que lorsqu'il s'est démis
de son bénéfice. ) II y a de plus la peine de la pri-vation
des bénéfices obtenus auparavant, et de l'inaptitude à
en recevoir d'autres à l'avenir; mais suivant l'opinion la plus
commune et la plus proba-ble , qui est celle de Nav., Suar., Less., Sancti.,
Laym.,· Anacl., Ronc, Lacroix, etc3 toutes ces peines ne sont encourues
que lorsque la simonie est accomplie par les deux parties ; telle est,
aussi d:après Navarre-et autres (1), la jurisprudence eu vigueur.
Et lors même que la simonie est accomplie par les deux parties, les
peines que nous avons énu-mérées les dernières,
celles de la privation et de l'in-capacité, ne sont encourues qu'après
un jugement de condamnation, comme le disent d'un commun accord Bon., Castr.,
Sanch., Laym., Fill., Salm.(9), etc., parce qu'on ne peut trouver aucun
texte de loi où ces peines soient prononcées comme encourues
ipso facto. On ne peut pas opposer là bulle de saint Pie V, parce
que (comme le disent les docteurs pré-cités) elle est considérée
comme applicable à la ju-ridiction extérieure seulement,
puisqu'elle porte : « quicumque convictus fuerit;» du moins
c'est là le seul sens qu'on lui a donné dans la pratique.
Enfin la simonie confidentielle a lieu lorsque quelqu'un re-nonce à
son bénéfice en faveur d'une personne qui s'engage à
le lui rétrocéder à lui-même ou à un
au-tre , ou bien à lui donner une portion des revenus.
(0 Lib. III. n. io6. (2) Ibid. n. 212.
POUR LES CONFESSEURS.
~>An
Cette simonie confidentielle est punie des mêmes peines que la
réelle; et de plus il suffit, d'après la bulle de saint Pie
V Intolerabilis, § ?, que la simonie ait été accomplie
par l'une des parties seulement (1). Mais quant à la privation des
bénéfices déjà obte-nus et à l'incapacité
d'en obtenir d'autres, il est dit expressément dans la bulle précitée,
Cum primum , qu'il faut un jugement déclaratif du délit pour
que ces peines soient encourues. C'est aussi ce que di-sent Cajet, Less.,
Sanch., Castr., Sot., Mol., Salm., etc., contre l'opinion de Vasq., Bon
(2). Il faut observer aussi ce qui est dit au chap. 4 > ?. 51 et 52.
LIX. Il est bon de faire encore ici quelques re-marques sur la pension
, objet dont nous avons déjà fait mention dans les numéros
précédents. La pen-sion est le droit de retirer une partie
des fruits que rapporte un bénéfice appartenant à
autrui. Il y en a trois Sortes, la temporelle, la spirituelle et la moyenne.
La pension temporelle ou laicale est celle que l'on donne aux séculiers
ou bien "aux clercs, mais pour un emploi tout-à-fait temporel, par
exemple pour l'emploi de procurateur, d'avocat, de chanteur, etc. La pension
spirituelle ou ecclésiastique est celle que l'on reçoit en
vertu de quelque titre spirituel, par exemple en qualité de prédicateur,
de coadjuteur, de curé, etc. La pension moyenne est celle quon recoitnon
pas comme un émolument temporel, mais en vertu d'un titre spirituel,
comme par exemple celle que reçoivent les curés avancés
en âge, les clercs en état de pauvreté, etc. (3). H
faut remar-
(1) N. loô. ia (in. Quser. 1, (a) N. 111 q. 5. (5) Ibid. IV.Uv»57.
?5?
INSTRUCTION PRATIQUE
quer i° que toute pension qui affecte un bénéfice
de quelque nature qu'elle soit, doit toujours être sanctionnée
par le pape. Quant à la question de savoir si
l'évêque peut établir les pensions dans quelques
cas d'urgence, par exemple pour terminer un procès, pour compenser
la disparité qui se trouve dans un échange de
bénéfices, ou pour venir au secours (comme nous l'avons dit
) de quelque clerc dans l'indigence; quelques auteurs admettent qu'il le
peut. C'est l'opinion de Busem. au chap. 21 de prœbend., ch. ? de Col/us,
et ch. Aquœ ductus, de rer. permul. Mais Lessius et les Salin, professent
une opinion contraire, disant que ce pouvoir est réservé
au pape d'après l'usage de la cour de Rome, lequel usage a force
de loi (1). Il faut remarquer 20 que la pension doit être modérée:
elle ne doit pas par conséquent excéder le tiers des revenus
du béné-fice (2). Il faut remarquer 3» que lorsque
le bénéfice a un patronage, il faut de plus (comme je l'ai
dit au numéro précédent) que la renonciation soit
autori-sée par le ,maître, lorsqu'elle est conditionnelle
; mais cette autorisation n'est pas nécessaire pour la pension.
Voir Less., Bus. et autres (?). 11 faut remar-quer 4° que le pensionnaire,
lorsqu'il reçoit la pen-sion en qualité de clerc (non pas
de laïque), est obligé, d'après la bulle de S. Pie V,
à réciter l'office delà B. Vierge, et que s'il néglige
de le faire, il perd son droit aux fruits. Cependant ceux qui disent le
grand office sont dispensés de cette charge, et les chevaliers des
ordres militaires satisfont à cette
(1) Lib. III. n, 74· Esseque, (a) Lib. IV. a. i58. ad. ii. (3)
lib. lU. ?. 73. et lib, 4· a. 38. ad. 3.
POUR LEÌ CdNFESSEUHS.
551
obligation en récitant les prières qui leur sont indi-quées
par les règles de leur ordre, ainsi que cela est admis par tousles
docteurs (?).
LX. Il faut remarquer ( en parlant des clercs en général
) que les clercs ne peuvent pas exercer des métiers vils, tels que
ceux d'aubergiste, de boucher, de jongleur. Il leur est également
défendu d'exer-cer la profession de chirurgien, qui oblige à
faire des incisions ou des brûlures, à moins qu'il ne se trouve
personne qui soit capable de remplir ces fonttions (2). Mais cette défense
ne frappe que les clercs in sacris, comme cela résulte du ch. Senten-tiam
ne clerc, vel mon., et non les bénéficiers, comme le disent
avec raison Bonacina, Molina, ïournely, Ponas, etc. (?). 2° II
est défendu à ceux qui sont ordonnés in sacris et
aux bénéficiers de remplir les fonctions de juge dans les
causes civiles, et de siéger dans un tribunal séculier, ch.
Sednec 4, ne cler. vel mon. etc., et les fonctions d'avocat de-vant un
tribunal séculier, ch. multa ?. eod- tit. et ch. Clerici, de post.,
où il est défendu aux minis-tres des autels, bénéficiers
et moines : « In placitis » secularibus disputare , excepta
defensione orpha-«norum aut viduarum, » ainsi qu'il est dit
au chap. Multa. On fait encore une antre exception pour le cas où
ils auraientàdéfendre une cause pour eux-mêmes, on
pour un de leur parents jusqu'au quatrième degré, si ce parent
ne trouvait pas d'autre avocat pour le défendre. Néanmoins
les clercs, seulement in minoribus, peuvent postuler pour les autres, de-
(i) Lib. ??. ?. ??\· V. Sed. nat. et lib. IV. ?. i38. ad 4.
(?) Lib. IV. ?. 189. et lib, VII. ?. 584. ad. 5. ?) Lib. VII.
?. 385.;
352
, INSTRUCTION PRATIQUE
vant tous les tribunaux, en matière civile, et même pour
les accusés en matière criminelle(i ). Les moines peuvent
aussi, avec la permission du prélat, pré-senter la défense
des causes dans lesquelles le mo-nastère est intéressé,
chap. Ex part., de Postul. 3° II est défendu aux clercs d'habiter
avec des femmes, à moins que ce ne soit une mère, une sœur,
une tante, ou enfin une femme dont la compagnie ne doive pas causer de
scandale. De plus il leur est défendu de porter des armes, excepté
en voyage , comme le dit Busemb. (2). Quant à la faculté
d'as-sister à des chasses bruyantes, voyez ce que nous avons dit
à ce sujet au chap. ?, ?. ?% ; et quant à la faculté
de faire le commerce, voyez au même cha-pitre, m 193 et suiv.
LXI. Il faut remarquer en dernier lieu qu'il est défendu aux
clercs et religieux d'aliéner les biens ecclésiastiques appartenant
à un établissement de piété, sans le consentement
du pape, comme cela résulte de l'extrav. ambitiosa, de reb. eccl.
non. al. L'expression aliéner comprend aussi Véchange, la
dation en gage, la transaction, lorsqu'elle a pour effet de priver l'Église
d'une portion d'un bien qu'elle possède, car dans ce cas il y a
une,véritable aliéna-tion jl'évêque pourrait
au contraire transiger si la transaction portait sur une chose dont l'Église
n'est pas en possession. Voir Delb., Barb., Reb., Quar., etc. L'expression
de biens ecclésiastiques comprend les biens immobiliers, les titres
de créance, les re-venus annuels, les droits, les servitudes dues
par d'autres fonds, les troupeaux de petit et gros bétail,
(1) Lib. IV. 11, sag. 00 ?. ? go.
POUR LES CONFESSEURS.
353
les arbres fruitiers et les grandes sommes qui ont été
données à l'église pour acquérir des immeubles
; elle comprend dé plus les meubles d'une grande va-leur qui sont
susceptibles d'être conservés, tels que les bibliothèques,
les pierreries, les vases d'or ou d'argent. L'expression établissement
de piété com-prend tous les établissements institués
avec l'auto-risation de l'évêque, tels sont les séminaires,
les hôpitaux et les confréries. Cependant si l'église
a quelque fief qui lui ait été donné avec la faculté
de l'aliéner à la volonté de son administrateur, celui-ci
pourra l'aliéner sans demander le consentement du pape, comme le
disent avec raison Arm., Bon., Covar., Lacroix, etc., parce que, dans ce
cas, c'est le maître primitif de la chose qui a donné à
l'adminis-trateur le pouvoir de l'aliéner; mais si au contraire
le donateur défend l'aliénation de la chose qu'il donne,
alors elle ne pourra pas être aliénée, même avec
la permission du pape, à moins qu'il survienne des circonstances
telles que l'on doive présumer que le donateur lui-même consentirait.à
l'aliénation (i). LXII. Les solennités requises peur l'aliénation
des biens ecclésiastiques sont celles-ci : i° l'avis de la communauté
; 1° le consentement de l'évêque ou du chapitre, ou du
clergé, ou du prélat régulier, et aussi celui du maître
lorsqu'on alièneun objet faisant partie d'un bénéfice
; 5° la signature de celle d'entre ces personnes dont le consentement
a été obtenu: 4° l'autorisation du pape ou de la Sainte-Congréga-tion,
suivant le décret d'Urbain Vill du 7 septembre 1624. Mais lorsque
le prix est d'une faible valeur, d'après le ch. Terrulas, 12, qu.
11, on donne à l'é-
0) U>. IV. n, 187.
T. XXJV.
3^
554
INSTRUCTION PRATIQUE
vêque la faculté d'autoriser l'aliénation ; mais
on n'est pas d'accord sur la quotité du prix qui doit être
considérée comme de peu d'importance. Les uns di-sent que
c'est lorsque la Sommé est au-dessous de cent ducats; mais Delb.
et la plupart desauteurs (suivant Lacroix), ainsi que la Gldse à
l'endroit déjà cité, di-sent que c'est lorsque la
valeur n'excède pas vingt écus d'or, ce qui fait quarante
écus romains. Cepen-dant Fagnan, auch. Nulli, de reb. eccles., etc.,
n. 26, ajoute que l'on ne doit pas fixer un terme définitif, mais
que l'appréciation delà somme doit être laissée
au juge. Plusieurs auteurs prétendent même que, dans un .cas
de nécessité ou d'utilité évidente, l'évêque
peut donner l'autorisation pour toute espèce d'alié-nation
(1); mais cela doit s'entendre seulement des cas où on n'a pas le
temps de recourir à la sainte Congrégation. Quant à
la question de savoir si les aliénations qui sont faites sans les
solennités requises, mais par un juste motif, sont non pas seulement
illi-cites, mais même nulles, plusieurs auteurs disent que.non; mais
l'affirmative,soutenue par Fagnan et plusieurs autres $ est plus probable,
surtout pour le cas où l'autorisation du pape n'a pas été
demandée. Lacroix et un grand nombre d'autres auteurs disent que
lorsqu'il y a une prescription de trente ou qua-rante ans On présume
que le consentement a été donné (2). Il faut remarquer
que les biens ecclésias-tiques qui portent des fruits tous les ans,
ne peu-Vent être donnés à ferme pour plus de trois
ans; cependant l'opinion commune admet que le bénéfi-
(1) Lib. IV. ?. 187. not. 6. (a) Ibid. V. Si autem.
POtJR LES CONFESSEURS.
S55
eier peut affermer les biens qui font partie de son bé-néfice
pour toute sa vie(i).
TROISIÈME POINT.
De l'état et des devoirs de quelques séculiers.
§ I. Des juges et des greffiers.
63 et 64. Des juges. Quand est ce que le juge peut condamner, augmenter
ou diminuer la peiné, et s'il peut juger avec la seule connaissance
Oil science privée.
65. S'il peut juger darts le sens de l'opinion la moins probable.
66. S'il peut partager les profits avec le commis-saire et s'il
peut recevoir des présents.1
67. S'il peut garder le prix d'un jugement injuste.
68. Des greffiers.
LXIir. En traitant ce point, nous laisserons de côté plusieurs
choses qui se rapportent à ha justice extérieure ; nous nous
occuperons seulement de ce qui regarde la conscience et de quelques points
prin-cipaux qui regardent la justice extérieure.
LXIV. Et premièrement, en ce qui concerne les juges, il faut
remarquer 1° que le juge ne peut pas condamner un coupable sans tjue
l'accusation soit soutenue par un accusateur, excepté s'il s'agissait
d'un crime de lèse-majesté ou d'hérésie, ou
bien si Îaccusé avait avoué sa culpabilité en
présence de deux témoins, ou bien si le crime était
de notoriété publique, et que cette notoriété
fût attestée au moins
(J) lib. IV. ?. i87. not. 7#
356
INSTRUCTION PRATIQUE
par deux témoins; néanmoins pour que le juge puisse mander
un individu devant lui, il suffit de la seule renommée ou des indices
connus de la plus grande partie du pays ou du voisinage; il suffit aussi
d'une preuve imparfaite, comme par exemple s'il y a un "seul témoin
digne de£oi(i)-. Il faut remarquer 2* que le juge inférieur
ne peut pas sans une cause urgente diminuer la peine, tandis
que le juge supérieur le peut, pourvu qu'il ait un motif plausible
(2). Il faut remarquer 3° que si le juge apprend par quelque
voie particulière qu'un accusé est 1 éellement coupa-ble
, mais que malgré cela son innocence soit prou-vée en justice,
il ne peut pas le condamner, suivant l'opinion commune qui est celle de
saint Thomas (3); parce que, le juge étant une personne publique,
il doit procéder « Secundum allegata et probata» c'est-à-dire
suivant les renseignements qu'il acquiert sur la cause parla discussion
publique,et réciproquement (comme le disent Sanch., les Salm., et
autres avec S. Thomas) si la culpabilité de l'accusé est
prouvée, tandis que le juge sait en son particulier qu'il est in-nocent,
jl doit néanmoins le condamner; mais cette dernière opinion
est rejetée avec probabilité par Silv.,Less.,Nav. , Toi.,
Bonac.,Holz., Anacl.,etc., parce que la condamnation d'un innocent paraît
une chose réellement mauvaise. Il en serait de même si le
juge condamnait une femme à cohabiter avec un tel individu,tandis
qu'en particulier il aurait la cer-titude que cet individu n'est pas son
mari. Ce que nous venons de dire est applicable aux peines cor-
(1) Lib. IV. ?. 190 cl 200.
N. ao5. (3) a. s. q. 67. n. a.
POUR LES CONFESSEURS.
porelles; mais, lorsqu'il s'agit de peines pécuniaires, et dans
toutes les causes civiles, le juge doit pio-noncer d'après les preuves
qui ont été fournies dans les débats. Voir Less.,
Lugo, Bonac., Laym., etc. ; car la république a incontestablement
le droit de transporter la propriété des biens pour maintenir
une mesure d'utilité publique qui ordonne de juger d'après
la notoriété générale (1).
LXV. Il faut remarquer 4° la propos. 2 condam-née par InnocntXl,qui
portail; « Probabiliter existi-» mo judicem posse judicare
justa opinionem minus » probabilem. » C'est avec raison qu'une
telle propo-sition fut condamnée, parce que le juge est tenu de
rendre à chacun son droit, et certainement celui qui a le plus de
droit c'est celui dont les prétentions of-frent le plus de probabilités.
Lorsque les prétentions des deux adversaires sont également
probables, si la cause est civile on doit partager entre eux la valeur
du litige; à moins que l'une des parties ne soit un pupille, une
veuve, un établissement religieux, parce qu'alors on doit donner
la préférence à ces personnes. S'il s'agit d'une affaire
criminelle, on doit toujours décider en faveur de l'accusé,
lorsqu'il donne de bonnes raisons pour sa défense (2); mais on ne
s'ac. corde pas sur la question de savoir si dans les causes civiles oil
doit, lorsqu'il y a doute, décider en faveur du défendeur
qui est en possession de la chose : il est certain i° que l'on doit
favoriser le possesseur si les raisons sont égales de part et d'autre.
Voir Soto, Silv., Mol., Sanch., ,et un grand nombre d'autres par la reg,
65 <te Reg, /?; in 6? où il est dit ; ? In pari de,
(1) Lib. IV. ?. 308, (a) Ibid. ?· aio. q. 1.
358
INSTRUCTION PRATIQUE
»licto vel causa melior est conditio possidentis. » 11
est certain 2° d'un autre côté que lorsqu'il y a doute,
tant sur la propriété que sur la possession, on doit décider
envfaveur de celui qui donne les meil-leures raisons, ainsi que cela résulte
de la condam-nation de la proposition dont nous avons parlé plus
haut, et lorsque les raisons sont également probables de part et
d'autre, le juge doit, comme nous l'avons dit, partager la chose entre
les deux parties, et il lui est défendu de rien recevoir d'aucune
d'elles pour rendre un jugement en sa faveur, suivant la propos. 26 condamnée
par Alexandre VU (1). Il y a plus de difficulté, lorsque les raisons
du possesseur se trou-vent probables, mais que celles du demandeur sont
plus probables encore. Tamb. dit que dans ce cas on doit décider
en faveur du demandeur ; mais la plupart des auteurs, tels que Card., Holz.,
Elb., Bonac, Filg., Lacroix soutiennent le contraire, et un de nos savants
modernes atteste que cette opi-nion est universellement adoptée.
Elle est fondée S ir ce que (comme nous l'avons dit plusieurs fois
et spécialement au ch. 1, n. 20) la légitime possession donne
un droit certain à garder la chose, jusqu'à ce qu'il soit
prouvé qu'elle n'appartient pas à celui qui la possède;
par conséquent, en décidant en faveur du possesseur, le juge
se conforme à l'opinion non pas seulement plus probable, mais la
plus probable laquelle opinion est fondée sur une autre règle
de droit (re'g. 11 jur. ) qui dit: «Cum sunt partium »jura
obscura «(comme cela arrive, lorsque le dioit du demandeur n'est
pas bien certain ) « potius faven-» dum est reo, quam actori
(2). »
(j) Lib. IV. ?. ai6. V. Sed hinc.
(a) ?. ??9. ? a·
POUR LES CONFESSEURS.
55?
LXVI. Il faut remarquer i° qu'il est défendu au jugedepartageravec
le commissaire les émoluments dus à celui-ci, parce qu'il
est du devoir du juge d'é-lire un commissaire (1). Il faut remarquer
6° que lé juge ne peut pas recevoir de présents d'aucune
des parties. Ceci ne souffre pas de ditficuké lorsqu'il s'agit de
présents d'une valeur considérable, que la loi appelle sportulœ;
mais il s'élève des doutes pour savoir : 10 si le juge peut
recevoir les esculenti et poculenti, appelés xenia. Beaucoup d'auteurs
le lui permettent ; tels sont Azor, Cajetan ,-Silv., Ang., Menoch. (2^·
D'après la loi Solet. § Non ?vero ff. de oj'fw. proc., et d'après
le chap. Statutum , § Insuper, de rescrip. in. 6, on permet au juge
de recevoir les esculenti offerts spontanément, pourvu (comme ajoute
la Glose) qu'il ne les ait pas recherchés, ni directement, ni indirectement.
Mais cette opinion est rejetée par les Salm., au n. 80,-ainsi que
par Soto. Navarre, etc. , parce que, quant à la loi Solet, elle
a été corrigée plus tard dans XAuthent. au §
Scrip-tum, § Jusjurandum. Et, quant au texte des canons, ces auteurs
disent qu'il n'est applicable qu'aux juges délégués
apostoliques; mais une telle réponse ne peut pas nous persuader
, car il nous est impossible de comprendre quelle différence il
y a entre cesjugeS et les autres ; et la raison que la Glose tire du texte
, à l'appui de la première opinipn, n'est pas à dédaj
-gneï. De même (dit la Qlose) qu'il n'y a pas de simonie lorsqu'un
prélat reçoit quelque chose à titre gratuit de celui
qui veut être reçu dans une congré-gation religieuse,
ainsi que cela résulte du chapitre
(1) N. 91?. V. Certum.
(9) Salm. tr. 29. cap. 1. N. 74.
36?
INSTRUCTION PRATIQUE
Ditectus, ?? ? de Si/non, in. fui., où il est dit : «
illud «tamen gratanter recipi poterit, quod fuerit sine xtaxatione
(c'est-à-dire de la part du supérieur) «gratis oblatum,
» parce qu'on ne suppose pas que, pour une chose qui lui est donnée
à titre- gratuit, le prélat veuille vendre l'admission dans
l'état religieux ; de même aussi on ne doit pas supposer que
pour un faible présent, le juge veuille rendre un jugement injuste.
Nous avions rejeté cette opinion dans no-tre premier ouvrage (1)
; mais après y avoir bien réfléchi, nous croyons qu'elle
doit être admise. En cela du moins, comme le dit de Lugo (2), on
ne saurait rejeter l'usage qui a consacré la légitimité
d« cette opinion. Tout le monde convient que les évêques,
dans leur visite du diocèse, peuvent rece-voir le montant de ce
qui leur est nécessaire pour s'entretenir; comme cela résulte
du chap. Romana, § Procuratores de causib. in. 6.
LXVII. On demande 20 si le juge qui a rendu un jugement injuste,en
se laissantinfluencer par l'argent qu'il a reçu de l'une des parties,
est tenu en con-science de faire la restitution avant d'y être condamné.
Quelques auteurs se décident avec raison pour l'af-firmative; ce
sont Soto, Mol., etc.; cependant c'est aussi avec raison qae d'autres soutiennent
la néga-tive; tols s'ont Less., S. Anton., Nav , Lugo, Mo-lina ,
Vasq., Reb. (?), etc. Les Salmant. trouvent cette opinion tout aussi probable
que Ta première, parce, que, d'après la loi naturelle, une
fois que le juge a promis de rendre un mauvais jugement, il est
(i) Lib. IV. ??. an.
(3) Oisp. 57, n. i5a. V. Quarta,
(5) Leseius e. 14. ?. 56, Lugo. diep. 3.11,1 34.
POUR LES CONFESSEURS.
36 j .
juste qu'il en reçoive le prix, comme il est dit au •ch. x,
n. 124. Les partisans de l'opinion contraire opposent la loi Pacta , 6,
de Partis, où il est dit : ? Pacta contra leges , vel bonas mores,
nullam vim » habent. » De plus ils opposent le ch. Statutum,
§ Si quid de inscript, in 6 , où il est ordonné que
le prix soit restitué, et de plus qu'on ne puisse pas faire la remise
de cette restitution. Mais Lessius répond à ces arguments
que les lois dont on s'appuie rejettent sans doute les pactes honteux,
et n'admettent pas qu'on soit obligé en vertu de ces pactes -avant
que la-promesse du jugement injuste .ait élé faite; une fois
cette promesse faite, tout en' refusant l'action judiciaire pour poursuivre
l'exécution de ces pactes, elles laissent subsister (au moins tacitement)
l'obli-gation naturelle qui y est attachée, et elles ne re-jettent
pas Facquisition du prix qui a été payé. Et lors même
qu'il y aurait une loi qui commanderait de restituer avant la condamnation
, il faudrait du moins un jugement déclaratif, suivant ce qui est
dit au ch. II, n. 29 (1).
LXVIII. Deuxièmement en ce qui concerne les greffiers. On comprend
sous cette dénomination ceux qui interrogent les témoins,
qui transcrivent les actes judiciaires et délivrent des copies authen-tiques
aux parties. Ces greffiers sont en faute lors-qu'ils altèrent ou
diminuent les dispositions des actes judiciaires, ou s'ils négligent
d'interroger quelqu'un des témoins qui ont été produits
; s'ils dérobent à la connaissance des parties quelque écrit
présenté, ou s'ils refusent de leur en donner copie ; s'ils
substi-tuent un écrit supposé à celui qui a été
perdg, et
(1) Lib. IV. ?. 3?6.
56s
INSTRUCTION PRATIQUE
de plus s'ils exigent un salaire supérieur à celui qui
est fixé par la taxe. Cependant Lugo, ïur., Salin.' et Coreg.,
ainsi que Mol. et Dian., disent qu'au-jourd'hui il n'y a pas faute de la
part des greffiers à exiger plus que l'ancienne taxe leur attribuait,
parce qu'aujourd hui la valeur des choses est aug-mentée, ce qui
fait que les greffiers ne pourraient pas s'entretenir aujourd'hui avec
les seuls salaires qu'on leur payait autrefois (?). Et puisqu'on recon-naît
que l'ancienne taxe ne peat plus être appliquée aujourd'hui
sans injustice, Coreglia, Sanchez et Macado disent que l'on n'est pas obligé
d'observer cette taxe, même lorsqu'on a fait serment de s'y conformer.
Ou reste, tous les auteurs s'accordent à dire que le.greffier ne
peut rien recevoir des parties au-dessus du salaire fixé, même
à titre de présent, parce que ces présents, faits
dans de pareilles cir-constances, ne sont jamais spontanés : voir
Navar., Rodr., Salm., etc. Cependant, si le greffier est obligé
de faire quelque travail extraordinaire ou de s'exposer à des inconvénients
très graves, il peut alors se faire payer quelque chose de plus.
Quant à la question de savoir si le commissaire qui va faire plusieurs
significations,peut se faire payerparchacun des débiteurs la valeur
de sa journée tout entière, elle est résolue affirmativement
par Lugo et Les-sius(2), par analogie tirée du courrier qui porte
les lettres de plusieurs personnes dans un même en-droit, et peut
se faire payer le même salaire par chacun de -ceux qui les lui ont
remises, ainsi qu'il a été dit au ch. ? , ?. 21 ?. Mais cette
même question
(?) ?. a3i.
(a) LUJÇO de just, d, $7, n. i38, Lessjue 1. II. c. 24. 11.
28.
POUR LES eONFES&EUnS.
565
est résolue négativement par Sanch., Tam., Dian., Salin.,
etc., qui disent que le salaire journalier attri-bué au commissaire
ne doit pas êlre fixé d'après le nombre des exécutions,
mais d'après son travail de chaque jour, excepté pour le
cas où le grand nombre des exécutions l'astreindrait à
un travail extraordi-naire (1). Mais cependant il faut faire une distinc-tion,
car Sanchez et les Salm. s'occupent du cas où la rétribution
du commissaire est fixée pour son travail de chaque jour ; et alors
il est incontestable (comme le dit aussi Lugo), qu'il ne peut réclamer
plus que le salaire déterminé ; mais lorsque les com-missions
sont séparées et qu'il y a un salaire spécial fixé
pour chaque commission, le commissaire peut alors, comme le dit très
bien Lugo, réclamer plu-sieurs salaires, suivant le nombre des significations.
Cette opinion est partagée par Lessius.
§ II. Les avocats et procureurs.
69. Si les moine., et les clercs peuvent exercer les fonctions
d'avocat. Dans quel cas l'avocat est-il obligé
de se charger d'une défense?
70. Quelles causes il peut défendre, et quels sont les
honoraires qu'il peut réclamer, etc.
71. Si la cause est injuste, etc., si les honoraires sont fixés
à la moitié <le la valeur du procès, ou si l'on
convient de quota Utis.
72. Des procureurs ; s'ils ont un avpcat gratis ; s'ils s'offrent
eux-mêmes.
LX1X. En ce qui concerne la profession d'avo-cat il faut remarquer
1 ° qu'il est défendu aux moi-Ci) Lib. IV, ?. 2?7·
364
INSTRUCTION PRATIQUE
nes et aux clercs in sacris de postnier en cette qua-lité pour
d'autres causes que pour les leurs ou celles de leurs parents ou de personnes
qui sont dans la misère ( voyez ce que nous avons dit à cet
égard an n. 60). Il faut remarquer 2"qu un avocat peut, dans les
causes criminelles, prendre la défense d'un accusé, même
lorsqu'il est coupa.ble ; parce qu'il est toujours permis à un accusé
de tâcher d'éviter la peine qu'il mé-rite, tant qu'il
n'a pasétécondamriéou au moins con-vaincu. Mais dans
les causes criminelles qui sont douteuses, l'avocat ne doit pas prendre
la défense de l'accusateur (1). Il faut remarquer 5° qu'un avocat
est obligé d'accepter la défense de ceux qui se trouvent
dans un état d'extrême nécessité, lors même
qu'il y a pour lui un inconvénient grave ( mais non pas très
grave), lorsque le malheureux n'a pas d'autre res-source. Voir Sanchez,
Castrop., Salm. et la plu-part des autres, ainsi que saint Thomas (2).
Il doit même défendre les pauvres qui sont seulement dans
la,nécessité grave,-imis non pas s'il en résulte pour
lui un grave inconvénient; cela ne doit s'entendre que du cas où
l'avocat a du-superflu pour son entre-tien ; lorsque la nécessité
est générale, il suffit qu'il donne aux,pauvres une partie
de son superflu (5).
LXX. Il faut remarquer 4° 1ue l'avocat peut, dans les causes qui
présentent les mêmes probabi-lités en présence
des deux partis, prendre indiffé-» eminentia défense
du demandeur ou celle du dé-fendeur ; il peut même prendre
ceHe du défendeur quoiqu'elle offre moins de probabilités.
Les doutes
(1) Lib. IV. n, soo, (a) »? 9. q· 71, a. a. (3) Lib. IV.
n. aai.
POUR LES CONFESSEURS.
sont sur la question de savoir s'il peut plaider pour le demandeur
lorsqu'il voit que ses prétentions sont moins probables que celles
du défendeur. Quelques auteurs sont pour la négative ; mais
l'affirmative est plus généralementadoptée, elle est
professée avec plus de raison par Lugo, Azor, Sanchez, Busem., etc.,
parce qu'une cause que l'avocat trouve moinsproba-ble peut paraître
plus probable à l'esprit du juge, ou peut le devenir dans le courant
du procès. Cepen-dant l'avocat doit, dans ce cas, avertir-son client
de la moindre probabilité de sesprétentions(i). Il faut re·
marquer 5" que si, -après que les honoraires ont été
fixés, le client ne veut pas poursuivre l'affaire, l'a-vocat peut
en exiger le paiement intégral, comme le disent avec raison les
Salin, et Sair, par analogie de ce qui est dit pour les domestiques au
chap, vu, ?. ? , ad. 4· Cependant cela ne doit avoir lieu que lorsque
les poursuites sont suspendues sans un juste motif (2). Il faut remarquer
6" que si un avocat con-vient avec son client d'une rétribution
annuelle pour toutes les causes qu'il aura à plaider, il peut se
faire payer ce salaire lors même que le client n'au-rait eu aucun
procès ; de même que s'il· a eu un grand nombre de
procès, l'avocat ne peut pas récla-mer un salaire plus fort
que celui qui a été convenu , pourvu qu'il n'ait pas été
obligé de se livrer à quel-que travail extraordinaire. Mais
si l'avocat reste malade pendant un long espace de temps, et que pendant
cet intervalle il survienne des procès au client, il doit au moins
lui faire remise de la por-
(l) N-. 2Î2.
(a) N.' a»5. V. uot. 2,
S66
INSTRUCTION PRATIQUE
tion du salaire qui correspond au temps de
sa maladie (1).
LXXI. L'avocat est en faute 1° s'il embrasse ou s'il continue la
défense d'une cause injuste sous le rapport de la propriété,
quoiqu'elle puisse êlre jus-tifiée sous le rapport de la possession,
parce que, de même que le défendeur ne peut pas dans ce cas
gar-der la chose, de même l'avocat ne peut passe charger de sa défense.
Si la cause est injuste, l'avocat doit restituer le dommage tant à
l'adversaire qu'à son client, lorsque celui-ci ignorait l'injustice
de ses prétentions. Par conséquent, avant de Se charger d'une
cause, l'avocat doit examiner attentivement et faire connaître au
client l'état et la valeur de ses prétentions (2). Il est
enfaute2°lorsqu'ilfixele mon-tant de ses honoraires pendant le cours
du procès; comme cela résulte du chap. Infâmes, 5,
q. y. Les honoraires doivent être fixés ou avant ou après
le procès, parce que, si cette fixation était faite pen-dant
le cours des débats, on pourrait facilement contraindre le client
à payer un prix exorbitant. Cependant si le salaire fixé
pendant le cours du procès était reconnu juste, les Salm.
ainsi que Na-varre disent qu'on ne devrait pas le condamner (?). L'avocat
est encore plus coupable lorsqu'il fait avec le client une convention de
quota parte litis , par exemple , lorsqu'il exige le tiers de la valeur
du pro-cès, si le procès vient à être gagné,
d'après la loi Sumptus, ff. de Factis, et la loi Litem, ch. de Procur.,
parce qu'une telle convention peut exposer l'avocat
(1) Lib. IV. ?, 225. V. not. 3.
(3) ?. 323. (S) ?. 224·
POUR LES CONFESSEURS.
à employer pour le gain du procès toutes sortes de moyens
bons ou mauvais (nuperjas oupemefas). Même dans le cas où
ce n'est que le prix juste de son travail, Lugo , Nav., Laym., Fill., Sanch.
et Henriq. le condamnent à la restitution , c'est-à-dire
que le client ne sera pas obligé de lui payer la somme stipule'e,
parce que ce pacte est reprouvé par la loi; mais l'avocat né
sera cependant pas obligé de resti-tuer ce qu'il aura re^u (1),
II y a péché 5° lorsque, sans en avertir le client, il
prend des valeurs plus considérables que celles auxquelles il peut
avoir droit. ? y a péché 4° lorsqu'il fuit connaître
à la partie adverse les secrets de son client, excepté (sui-vant
la restriction admise par quelques uns ), si eh gardant les secrets il
devairxauser un dommage grave à la partie adverse. Mais cette restriction
est rejetée par d'autres auteurs dont l'opinion est fondée
sur l'autorité de S. Thomas (2). Il y a péché 5°
lorsqu'il met en usage des chicanes ou des causes de retard, inventées
par la mauvaise foi ; néanmoins Sanch. (?), Silv., Armil., Covar.,
Gabassut, etc., disent à ce su-jet que, lorsque la cause est d'une
justice évidente, il peut, sans toutefois alléguer des mensonges,
user de chicane (ou pour mieux dire, de retards obtenus à force
de prières) afin de déjouer les chicanes in-justes mises
en usage par l'adversaire. Ces auteurs citent à l'appui de leur
opinion saint Thomas (4) , qui dit : « Advocata licet prnderiter
occultare ea » quibus impediri posset processus ejus. » Mais,
lors-
(1) Lib. IV. ?. a M- V. Nee licct.^
(a) 2. a. q, 71. a. 3. ad. 2.
(5) Conf. p. 2. 1. VI. c. 7, ad. 9.
(41 Cit, ait. 3. ad 3.
368
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'au lieu d'être évidemment juste, la cause ne l'est
que probablement, je ne vois pas comment on pour-rait permettre les délais
illégaux dont se servent sans scrupule quelques avocats, et qu'ils
appellent governo di causa. On pourrait le permettre seulement dans le
cas où il y aurait de puissants motifs de craindre que le juge ne
rendît un jugement injuste, par suite de la passion qu'il y mettrait
en faveur de l'autre partie, se laissant influencer par des motifs humains.
IJXXII. En ce qui concerne les procureurs, il faut remarquer ? °
que si un procureur a sous ses ordres un avocat ou un greffier qui le serve
gratis et seu-lement par considération pour lui, il peut se faire
payer le salaire qui leijr est dû pour leur travail : mais il en
est autrement lorsque c'est par considé-ration pourle client queravocatou
le greffiern'exigo pas de rétribution. Il faut remarquer 2°
que lors-qu'un procureur se fait remplacer par un autre, il peut ne lui
donner que la moitié des honoraires et garder l'autre moitié,
pourvu qu'il ait averti son remplaçant et qu'il se soit chargé
des périls de la causé dans le cas où elle serait
perdue par ia négli-gence de celui-ci. Il faut remarquer 3°
que suivant l'opinion de quelques auteurs, le procureur ne doit pas exiger
de salaire, lorsqu'il s'est offert lui-même pour défendre
la cause, ou tout au moins lorsque le client est son parent, ou son ami.
Quant à moi, je ne crois pas qu'on doive exempter le client de toute
espèce d'obligation à moins qu'il soit prouvé que
ta pfocureur ait voulu lui faire une donation et qu'il' l'ait acceptée;
car hors de ce cas le procureur a tou-jours droit à un salaire (1).
(i) Lib, IV. ?. 2ô5.
POUR LES CONFESSEURS.
36q
§ III. De l'accusateur, des témoins et du coupable.
yl·. Des accusateurs. Quand l'accusation et la dé-nonciation
doivent-elles être faites? Si les gardes, etc.
74· Quand les clercs peuvent-ils accuser, et si l'on doit leur
permettre d'infliger eux-mêmes une cor-rection, particulièrement
lorsqu'ils se trouvent dans une communauté ?
75. Des moniteurs. .
76. Delà dénonciation des hérétiques.
77. Des blasphèmes prononcés par des hérétiques.
78. Des superstitions.
79. Des témoins. Quand est-ce qu'ils
sont te-nus, etc.
80. Celui qui néglige de dire la vérité,
81. Celui qui cache la vérité.
82. Des coupables. Quand le coupable doit-il se confesser
?
85. Le doit-il lorsque la peine est grande ?
84. S'il s'accuse d'un crime qu'il n'a pas commis.
85. S'il impute à son accusateur un crime faux.
- 8tJ. Si le coupable peut faire résistance, et s'il doit prendre
la fuite, etc.
87. S'il peut briser ses fers, et corrompre sesgar-diens. Si d'autres
personnes peuvent l'aider, etc.
LXXIII. Et d'abord , en ce qui concerne l'accu-sateur, les auteurs
ont beaucoup écrit et l'on peut là-dessus consulter leurs
ouvrages. Nous ne revien-drons pas sur ce qu'ils en ont dit parce que cela
a plus de rapport à la juridiction extérieure qu'à
la conscience. Nous exposerons ici seulement quelques considérations
plus spéciales. Remarquez 1° qu'il faut établir une distinction
entre X accusation, la dé-
T. SMV.
24
37e
INSTRUCTION PRATIQUE
nonciation juridique, et la dénonciation evangélique
ou paternelle, L'accusation est celle que l'on porte devant le supérieur
en qualité de juge, afin qu'il in-flige une punition à l'accusé;
elle entraîne pour l'ac-cusateur l'obligation de prouver la faute,
sans quoi il encourt lui-même la peine qu'il voulait faire in-fliger
à l'autre. La dénonciation juridique est égale-ment
portée devant le supérieur en sa qualité de juge;
mais elle n'entraîne pas, comme la première, l'obligation
de prouver la faute. Enfin la dénoncia-< tion evangélique
ou paternelle est celle que l'on porte devant le supérieur en sa
qualité de père. Remar-quez 2° que lorsqu'il s'agit d'éviter
un mal qui doit retomber sur le public , chaque particulier est tenu de
dénoncer le coupable; comme lorsqu'il s'agit de rébellion,
d'hérésie ou de brigandage sur la voie pu-blique et autres
crimes semblables. Dans ces cas-là, d'après Sanch., le juge
a quelquefois le droit de con-traindre celui qui a été victime
du crime à en dé-clarer l'auteur, afin qu'on puisse exiger
la réparation du dommage éprouvé parle public. Néanmoins
Soto, Cajet., Sanch., Lugo, Salm., etc., disent qu'il suffit ordinairement
de faire une simple dénonciation , parce que les supérieurs
n'en exigent pas davan-tage (a). Cette obligation est encore imposée
lors-qu'il s'agit de préserver un innocent, pourvu que la dénonciation
ne doive pas entraîner de graves in-convénients popr celui
qui la ferait. Cependant ceux qui sont rétribués par la république
ou par leurs maîtres pour accuser ou dénoncer ks criminels
, sont tenus de le faire, même lorsqu'il doit en ré-sulter
un grave inconvénient pour eux ; s'ils ne le
(») Lib. IV: n. a36.
POUR LES CONFESSEURS.
3^ ?
font pas, ils doivent payer la valeur du dommage que cause le défaut
de dénonciation, les auteurs ne s'accordent pas sur la question
de savoir si ceux qui sont préposés à la garde des
propriétés ou des ga-belles, doivent, lorsqu'ils n'ont pas
fait la dénoncia-tion, payer la valeur de l'amende que l'on aurait
in-fligée au coupable. L'affirmative est professée par un
grand nombre d'auteurs, tels que Sot. , Mol. ,
Laym., etc. Mais la négative est plus généralement
soutenue par un grand nombre d'autres , tels que Az., Less., Lug., Sanch.,
Nav., Salm., etc. Les au-teurs se fondent sur ce que, dans ce cas, le garde
pèche contre la justice légale, mais non pas contre la justice
commutative à l'égard de la peine; car le fisc ou les maîtres
ne peuvent avoir de droit acquis à la valeur de l'amende, qu'après
le jugement pro-noncé; d'autant plus que la loi n'a pas d'autre
but que de garantir le maître de tout dommage; et par conséquent
il suffit que le garde restitue la valeur de l'impôt qui a été
soustraite au fisc, ou le dom-mage qui a été causé
(1).
LX.XIV. Remarquez 3° que, lorsqu'il s'agit d'exi-ger la réparation
d'un mal qu'on a souffert soi-même, ou ses parents jusqu'au quatrième
degré, ou bien l'E-glise , les clercs ont le droit de se porter
accusateurs, même lorsqu'il y a homicide, pourvu qu'ils pro-testent
expressément qu'ils ne poursuivent pas la peine corporelle, mais
seulement la réparation du dommage (2). Remarquez 4° que, lorsque
le crime tourne au détriment du public, quand même il serait
resté caché, on doit néanmoins le dénoncer
sans
(1) Lib. IV, ?. 23;.
(2) ?. 38. ad. 6,
372
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'il soit permis d'en faire la correction, surtout lorsque c'est un
crime d'hérésie, ainsi que cela résulte de la propos.
5, condamnée par Alex. VII. Mais lorsque le crime ne cause de préjudice
qu'au cri-minel lui-même , on doit, suivant l'Évangile, per-mettre
la correction. Mais lorsqu'elle ne peut pas suffire, quoique l'Évangile
dise qu'il doit répondre en présence d'un ou deux témoins,
néanmoins, d'a-près saint Thomas (1) et saint Augustin ,
lorsque le crime a été commis dans une communauté
religieuse, il est plus convenable de le faire connaître au pré-lat^
plutôt qu'aux autres, parce que (disent ces docteurs) prœlatus magis
potest prodesse, quam alii (2). Le docteur angélique dit dans un
autre pas-sage (3), que, lorsque le religieux voit qu'elle sera plus utile
si elle est faite parle prélat, qu'elle ne le serait faite par lui,
il peut tout de suite faire la dé-nonciation au prélat, parce
que le but principal de la correction secrète est plutôt de
corriger le frère coupable que de conserver sa réputation.
Bon., saint Ant., Sanch., Sot., Castr., Layin. (4), etc., profes-sent la
même opinion. C'est avec raison que Laym., Sanch. et Suar. ajoutent
que, lorsque le délit (soit grave, soit léger) n'a pas encore
été corrigé, et qu'il y a à craindre une récidive,
il sera toujours mieux d'en faire la dénonciation d'abord au prélat,
que l'on doit raisonnablement croire plus capable qu'un au-tre d'en exiger
!a réparation (comme on doit ordi-nairement le reconnaître,
à moins que le contraire
(1) a. a. q. 53. a 8. ad. 4.
(2) Lib. IV. ?. 24a.
(3) Quodlib. XI. art. i5. M) Lib. IV. ?, 243.
POUR LES CONFESSEURS.
soit prouvé ), d'autant plus que tous les délits com-mis
par des particuliers (comme le dit le P. Suar.) retombent ordinairement
à la charge de tons, soit à cause du scandale, soit à
cause du déshonneur qui peut rejaillir sur la communauté.
C'est donc avec raison que les pontifes ont approuvé la règle
de la compagnie de Jésus qui a autorisé chaque religieux
à faire connaître le délit à son supérieur,
sans qu'au-cune correction puisse être permise (i)
LXXV. Remarquez 5° que lorsque par un édit ou par un avertissement
public, il est ordonné de dénoncer quelque crime, on n'est
pas obligé de le faire à moins que le coupable soit déjà
diffamé ou que les soupçons planent sur lui, ou bien lorsque
le délit est préjudiciable à la communauté
ou à un tiers; mais cependant avec cette différence que lors-que
le délit ne préjudiciequ'à un tiers, la correction
doit être permise, et l'on n'est pas obligé de,le dé-noncer
en s'exposant soi-même à un préjudice. C'est tout le
contraire lorsque le délit cause un dommage à la communauté.
Car alors on n'est pas obligé de permettre la correction , et chacun,
d'un autre côté, est tenu d'en faire la dénonciation
, même à son propre préjudice (2). Cela s'applique
aux avertissements généraux, mais pour ce qui est des avertissements
particuliers , ainsi qu'on les re-çoit ordinairement, dans lesquels
l'évêque fulmine l'excommunication (comme l'a permis saint
PieV, dans sa bulle SancUssimus) contre ceux qui gardent injustement une
chose volée ou trouvée (lors toute-fois qu'elle est, de grande
valeur), ou qui ne dé-
(l) N. 24»· q. 5. el q. 4-(a) Lib. IV. 0. 24a. not. 2.
374
INSTRUCTION PRATIQUE
nonce pas celui qui la possède. Il faut remarquer avec Barbosa
(i) et le Guide dés nouveaux confes-seurs, qui cite plusieurs autres
docteurs du même avis, que l'obligation de dénonciation
ne frappe pas i° sur le voleur lui-même; 2° sur celui
qui connaît le voleur, mais ne peut le faire connaître sans
s'exposer à un grave inconvénient; 5° sur celui qui ne
peut être forcé à cendre témoignage, 'tel que
le fils, la femme, le père. De plus Bon. et le Guide précité
appliquent cette exemption à tous les pa-» rents jusqu'au
quatrième degré, et à tous ceux qui font partie de
la famille du détenteur de la chose volée, mais elle ne profite
pas aux serviteurs qui peuvent perdre leur emploi sans dommage grave. Cependant
les infâmes sont obligés de dénoncer, quoique
leur témoignage ne fasse pas foi ; 4° sur celui qui a seul la
connaissance d'un fait et ne peut pas offrir un autre témoin pour
le prouver; 5° sur celui qui ne le sait pas d'une manière certaine,
ou qui l'a entendu dire par une personne peu digne de foi, ou qui ne se
rappelle pas par qui il Ta entendu dire, ou bien qui le tient d'une personne
qui en a déjà fait la dénonciation ; 6° sur celui
qui a légiti -mement opéré la compensation de ce qui
lui était dû ; 7° sur celui qui, à l'époque
de l'avertissement, se trouvait hors du diocèse, mais non pas celui
qui en sort seulement avant le terme fixé par l'avertisse-ment;
8° sur celui qui n'a été instruit du délit que
sous l'obligation du secret naturel, confié ou pro-mis.
Cependant quelques canonistes (2) tels que
(1) Instrue, p. a. ex 11. 285. et Barbosa ne pat, épis,
alleg. 95. ex n. 44 a<i· 67.
(2) Lib. TV. in pressi, de monit. n. is et i3.
POUR LES CONFESSEURS.
Félino, Abbate, Ripa, etc. , disent, d'après Ricci, que
les laïques doivent dénoncer le voleur lors même qu'on
ne le leur a fait connaître que sous le sceau du secret. Mais la
plupart des théologiens tels que Scot, Suarez, Azor, Salm., Naya.,
Fili. Àrag. etc., ainsi que saint Thomas (1), enseignent le con-traire.
On peut encore faire un avertissement pour obtenir la révélation
d'un écrit authentique qui a été caché, lors
même que cet écrit n'appartien-drait pas à la partie,
mais à un tiers, pourvu que ce tiers he soil pas en cause, comme
le dit le même Guide, au chap, ?, de Probat.
LXXVI. Remarquez 6° que l'on est obligé de dénoncer
les hérétiques lorsqu'ils sont seulement suspects d'hérésie,
tfels que les confesseurs qui sol-licitent ad turpia, ceux qui commettent
dés sortilè-ges , ceux qui abusent des sacrements, ceux qui
prennent deux femmes, ceux qui sans être prêtres administrent
les sacremeflts1. (D'autres y ajoutent les confesseurs qui violent le sceau,
mais cela n'est pas admis par Lugo, Molina, Bonacina, Salm., etc.) De plus
ceux qui profitent des blasphèmes héréti-ques. On
doit dénoncer toutes ces personnes-là, mais on n'est pas
obligé de le faire avec un grave préjudice pour soi-même.
C'est avec raison, d'après Lessius, Bord., Dian.jHomob., etc.,qu'on
exempte de l'obligation de faire la dénonciation, tous les pa-rents
jusqu'au quatrième degré, parce qu'à cet égard
il y a toujours pour eux un grave dommage ou in-convénient. Il en
serait différemment s'il s'agissait d'hérétiques formels,
comme le soutiennent Suar., Salm*, Fil., Pot., etc., contre l'opinion de
quelques
(1) a. s. q. 70. a. 6· art. 3 et_a.
376
INSTllllCTION PRATIQUE
autres, parce que l'hérésie est un fléau qui tourne
toujours au détriment du public; c'est pourquoi on doit les dénoncer
même en s'exposant soi-même à quelque inconvénient.
Cette obligation frappe non seulement sur les frères, mais encore
sur les fem-mes , les fils et les parents, suivant l'opinion la plus commune
qui est celle de Azor, Bonacina, Ronca-glia, Salm., Diana, Viva, etc. (1).
LXXVII. Remarquez 70, en ce qui concerne spécialement les blasphèmes
011 propositions héré-tiques , que lorsqu'ils ont été
prononcés sérieuse-ment et en connaissance de cause, on doit
en faire la dénonciation dans l'espace d'un mois, comme le dit Je
Guide précité, contre les Salm., qui disent qu'on le doit
dans six jours. Mais les Salm. parlent d'après les lois particulières
de l'Espagne. Nous avons dit sérieusement et en connaissance de
cause, parce qu'on n'est pas obligé dé faire la dénonciation
des blasphèmes qui ont été proférés
par ignorance ou par défaut de langue, ou bien par suite d'un accès
de colère qui nous a fait déraisonner, ou encore lors-que
ces blasphèmes ont été proférés sans
obstination, car l'obstination est toujours nécessaire pour qu'on
soit obligé à faire la dénonciation, ainsi que le
disent les mêmes Salm. avec quelques autres (2). Autrefois le concile
de Latran avait imposé l'obligation dé dé-noncer toute
espèce de blasphème quelque simple qu'il fût. Mais,
comme le disent Sanch., Tainb. et Maz., cette obligation est aujourd'hui
tombée en désuétude, et tout au moins elle doit être
effacée,
(1) Lib. IV. ?. a4g et a5o.
(a) Lib. IV. ?. 252. et lib. III. ?. 125.
TOUR LES CONFESSEURS.
comme le disent Bon., Trull etles Salin., lorsque le coupable s'inflige
la correction (1).
LXXVIII. Remarquez 8° que l'on doit en géné-ral dénoncer
les superstitions lorsqu'elles sont qua-lifiées, c'est-à-dire
lorsqu'elles consistent dans un pacte avec le démon ou une invocation
expresse de son assistance, ou lorsqu'elles consistent à l'adorer
ou à réciter certains psaumes ou prières au moyen
desquels on paraît l'invoquer à sou aide, ou à abu-ser
des hosties sacrées, du saint chrême ou de l'huile sacrée,
ou si on l'enseigne ex professo, ou bien si elle a été suivie
de voies de fait. Nous avons dit en général, parce que dans
notre royaume particu-lièrement, d'après l'insinuation de
notre roi Char-les ill, on n'est pas obligé de dénoncer devant
le tribunal ecclésiastique les sortilèges des séculiers,
excepté lorsqu'ils consistent dans l'abus de l'Eucha-ristie ou de
l'huile sainte (2). Remarquez en der-nier lieu que l'excommunication est
encourue par ceux qui par leur faute négligent de faire la dénon-ciation
, mais qu'elle n'est encourue qu'après le ju-gement; elle n'est
plus réservée, comme le font re-marquer Bonacina , Lugo,
Félix Potesta, etc. (?).
LXXIX. 20 En ce qui concerne les témoins, nous omettons également
ce qui a rapport à la juridic-tion extérieure. Nous·nous
bornerons à observer : i° que le témoin n'est tenu de
révéler la vérité, sui-vant saint Thomas (4),
que lorsque cela est néces-saire pour réparer selon la charité
quelque grand
(i)"Lib. IV. n. a3a et a54- nol. 2. (2) Ibid. a. 253. (5) ?. 254. not.
3, (4) 2. 2. q. 70. a. 1.
5y8
INSTRUCTION PRATIQUE
mal de la république ou du prochain, ou pour obéir à
l'injonction du juge, lorsqu'il a le droit de l'in-terroger , c'est-à-dire
lorsqu'il a une preuve impar-faite de la publicité du délit,
ou des indices évi-dents, etc.; car hors de ces cas, un témoin
n'est pas tenu de déposer ce qu'il sait (1) ; demême qu'il
n'y est pas tenu lorsqu'il est hiettacé d'un dom-mage pour kliou
pour les siens, ou lorsqu'il n'a ap-pris le faitquesous le sceau du secret
naturel, comme le dit saint Thomas à l'endroit précité
art., 2, pourvu toutefois que la révélation ne soit pas nécessaire
pour éviter un mal général, ou pour soustraire son
prochain à un danger futur (2).
LXXX. Nous remarquerons 2° que si un témoin fait ert connaissance
de cause une déposition fausse d'où il résulte un
dommage pour autrui, il est in-contestablement tenu de restituer la valeur
du dom-mage (2). Mais il s'élève des doutes pour savoir 1°
si le témoin qui ne dit pas toute la vérité dans les
cas où la justice ou la charité l'obligent à la dire,
commet un péché, et contracte l'obligation de res-tituer.
Il faut distinguer s'il a seulement fait en sorte de n'être pas cité
en témoignage. Il y a péché contre la charité,
mais non pas contre la justice, et par conséquent il n'est pas obligé
à faire de restitution, comme le disent tous les docteurs. Si c'est
après avoir été cité qu'il a refusé
de rendre témoignage, quelques auteurs veulent qu'il soit obligé
à réparer le doirithage. Mais la négative est généralement
professée et avec plus de probabilité
(1) Lib. IV. ?. a64. ad. 267. (a) N. a68. (5) N. 370.
POUR LES CONFESSEURS.
par Lug., Less., Mol., Silv. et Bon., parce que l'o-bligation imposée
par là citation est une obligation de devoir et non pas de justice
(1).
LXXXJ. Orr demande 20 si l'on doit obliger à la restitution
le témoin qui, légalement interrogé par le juge, lui
cache la vérité sans cependant affirmer une chose fausse,
mais en se bornant à dire qu'il ne sait rien. Un grand nombre
d'auteurs se pro-noncent pour l'affirmative, parce que, d'après
eux, lorsque le juge a"ordonné au témoin de dire la vé-rité
, celui-ci est obligé par la justice à
le faire. Mais c'est avec plus de probabilité que la négative
est .professée par Molina, Lessius, Bonacina, Lugo, Rainaudet autres,
pat la raison exposée plus haut, c'est-à-dire que l'obligation
du témoin de faire la déposition lorsque le juge le requiert,
ne lui est pas imposée par la justice, mais par le devoir.
D'où Ciera (2) aver de Jariuariis conclut que ce témoin
n'encourt pas la même peine dû cas réservé pour
celui qui par un mensonge cause du dommage à au-trui, parce que,
suivant lui, la réserve a rapport au mensonge positif, et non pas
au mensonge négatif. Cependant Bonac. dit que lorsque le témoin
a juré de dire ce qu'il sait, il est obligé par la justice
à accomplir ce qu'il a promis par serment. Mais Less, répond
avec probabilité, qu'en jurant de dire la vé-rité,
le témoin n'entend pas s'imposer une obligation de justice, mais
de religion , ce qui ne peut pas don-ner lieu à la restitution (3).
LXXXII. 5° A l'égard des coupables, on remar-
(1) N, 270. dub. 1 et 2.
(a) Cïera de casi. resur, d. 7. n. 62.
(5) Lib. IV, n, 270. dab. 5. Tide alia spectantia ad forum.
?8?
INSTRUCTION PRATIQUE
que i° que le coupable n'est pas tenu d'avouer son crime , s'il
n'est pas légalement interrogé par le juge, c'est-à-dire
(comme nous l'avons dit plus haut) s'il n'y a pas une preuve complète
j ou l'in-famie, ou des indices manifestes du crime. Saint Thomas dit :
« Aliud est veritatem tacere, aliud fal-«silatem deponere:
quorum primum in aliquo casu » licet, non enim aliquis tenetur omnem
veritatem s confiteri, sed illam solum quam ab eo potest re-«quirere
judex puta cum praecessit probatio semi-» plena, etc. (?). »
De même, lorsqu'il est douteux que le juge ait le droit d'interroger
le coupable, il n'est pas tenu de répondre, parce qu'ayant encore
le droit à sa vie ou à sa réputation. un doute ne
peut pas lui enlever la possession de ce droit tant qu'il n'est pas,bien
certain que l'interrogation du juge soit légale. Voir Sot., Lessius,
Laymann, Gaët., Sanchez, Lugo, Nava., Busem., Salm., contre Pa-ladu.
et Silvestre (^). Du reste, lorsqu'il n'y a pas un doute spécial
et positif, il est plus régulier de pré-sumer que l'interrogation
du juge est légale.
LXXXIII. Mais on demande ? ° si le coupable qui est légalement
interrogé doit, avant le jugement, confesser son crime, lorsqu'un
tel aveu peutentraî-ner une grande peine corporelle. L'affirmative
est professée par Spto, Lessius, Sandiez, les Salm., etc., ainsi
que par saint Thomas (?), parce que le juge, lorsqu'il interroge légalement,
a le droitde savoir la vérité. Mais la négative est
soutenue par plusieurs autres, tels qiieSuar., Lugo, Sa., Peyr., Fill.,Henr.,
(j) a. a. q. 69. a. 2.
(j) Lib. IV. ?. 272 et 270.
t3) a. a. i\. 69. art. 1. ad. 2.
POUR LES CONÏESSEURS.
381
Vill., Ëlb., Bus., etc., qui pensent qu'une telle dis-position
serait trop dure et trop au-dessus de la faiblesse humaine, et que par
conséquent on ne peut pas obliger quelqu'un à faire l'aveu
d'un crime et à s'infliger pour ainsi dire lui-même une peine
grave (telle que la mort, les galères, la prison perpétuelle,
ou une perpétuelle infamie, etc.); à moins qu'il s'agisse
de réparer un mal général, par exemple l'hérésie,
la rébellion, etc. S'il est raisonna-ble de supposer qu'une telle
loi ne peut pas exister, il est tout aussi raisonnable de dire que ce juge
n'a pas le droit de contraindre le coupable à lui avouer la vérité.
La première opinion paraît à la vérité
plus probable, mais cependant nous n'oserions dire que celle-ci soit improbable.
Bu reste, Sanch., les Salm. etd'autres auteurs s'accordent audire que dans
un pareil cas le confesseur ne doit pas obliger un coupable à lui
avouer son crime, lorsqu'il voit qu'il pourra difficilement l'y amener,
et qu'il sait d'ailleurs que le coupable a été de bonne foi
(1). Nous avons dit de plus avant le jugement, parce qu'après le
jugement rendu l'instance est terminée, et par con-séquent
le coupable n'est plus obligé à faire l'aveu de sa faute.
Voir Layni., Sanch., les Salm., etc. Ces auteurs ajoutent encore que, même
avant le juge-ment , il n'est pas obligé de faire aucun aveu, s'il
n'est pas de nouveau interrogé ; mais cette opinion est re-jetée
avec plus de probabilité (généralement parlant) par
Soto, Nav., Sayr., et un grand nombre d'au-tres (de l'aveu de Sanch. lui-même),
parcs que la réquisition du juge continue de subsister tant que
le jugement n'a pas été rendu (2).
(1) Lib. IV. ?. ?74. ta) Cit, 11. 274· in fin.
382
INSTRUCTION PRATIQUE
LXXXIV. On demande 2° si un innocent qui, pour se soustraire à
de cruels tourments, s'accuse d'un crime entraînant la peine de mort
qu'il n'a pas commis, complet un péché grave. La négative
est professée par Less., Soto,Tol.,Silv., Bus., etc., qui disent
qu'on n'est pas obligé pour conserver sa vie de supporter de si
grandes souffrances, suivant ce qui est dit au ch. vin, n. 2, in fine.
Bus. etTann.en exceptent seulement le ras où l'aveu d'un délit
qui n'a pas été commis causerait un dommage au pu-blic
ou l'infamie à quelque famille; mais l'affirmative est au coptraire
soutenue avec plus de probabilité par Mol., Lugo, Nav. et Covar.
; et Lugo, quoiqu'il ne condamne pas l'autre opinion à cause des
auteurs recommandables qui la soutiennent , cependant il se déclare
pour celle-ci; la raison en est que, quoique l'homme ne soit pas obligé
de conserver sa vie pai-res mqyens trop pénibles, il ne peut pas
toutefois coopérerpositivementà se, faire injustement condam-ner
à mort, p^rce qu'il n'est pas maître de disposer <}e sa
vie, d'où Mol. conclut avec raison que, même après
sqn aveu, l'accusé doit se rétracter toutes les fois qu'il
peut, parce moyen , se soustraire à la mort; mais je dois dire ici
la même chose qu'à la question précédente, savoir
que, si l'accusé est de bonne foi, le confesseur ne doit pas l'obligera
se dédire, lors-qu'il y a à craindre que, pour s'affranchir
des tour-ments, il ne commette un péché formel en refusant
de se dédire et de se soumettre à tant de souffrances (1
). Cependant, lorsque l'accusé a dénoncé un autre
in-nocent comme étant son complice, il est sans aucun doute obligé
de rétracter son aveu, quel que soit le
(0 Lib. IV. ». 275.
???? LES CONFESSEURS.
335
tourment auquel il s'expose par cette rétractation(i).
LXXXV. Remarquez 3° que l'accusé, quoique innocent, n'a
jamais le droit pour se défendre d'im-puter un crime supposé
à son accusateur ou à un témoin, ainsi que cela est
attesté par la propos. 44 condamnée parlnnocentXIjmaisd'un
autre côté il a certainement le droit de révéler
un délit caché, mais vrai, commis par l'accusateur ou le
témoin, pourvu toutefois qu'il y soit forpé pour démontrer
sa pro-pre innocence et se soustraire à un dommage grave. Voir Sanchez,
Muante, Roncaglia, Salm. et Viva (2); voyez aussi ce qui a été
dit au ch. 11, n. 7. Sanch., Ronc., Salm. etCoreg. décident encorelamême
chose pour le cas où le délit d'un coupable serait resté
en-tièrement caché, parce que, lorsqu'un témoin dé-nonce
un délit entièrement caché, c'est comme s'il dénonçait
un délit faux. Il en est encore de même, suivant Lugo, Moli.
et Viva, quoique le témoin n'ait pas déposé spontanément,
mais par l'ordre du juge ( 3). Remarquez 4e que, lorsque le délit
est du nombre de ceux qui sont exceptés, le coupable doit le dé-noncer
sans attendre qu'on l'interroge ; si au con-traire le délitn'est
pas de cette classe-là , le coupable n'est pas obligé de
le révéler, il lui est même défendu de dénoncer
les complices, lorsque leur méfait est resté caché.
Cependant Laym., Less, et Bus. disent que le coupable ne péchera
pas en les dénonçant, s'\\ y est contraint par la souffrance
des tour-menis (4) ·
LXXXVη Remarquez 5° que l'accusé qui aurait
1) Lib. IV. ?. -iy6. ad. 3. (?)?. 277. Rcs[). ix.
(3) Ibid. V. Sed quid.
(4) ?. a78.
584
INSTRUCTION PHATIQUE
été injustement condamné, ne peut pas résister
aux satellites, vim vi repellendo, en les tuant ouïes frappant, ainsi
que cela est établi dans la prop. 18 condamnée par Alex.
VII ; mais il peur, résister aux archers et chercher à s'échapper
de leurs mains, pourvu que cela ne cause pas un scandale ou un grand trouble,
ainsi que l'enseigne saint Thomas (1). Il en est autrement si sans avoir
été condamné il a déjà été
mis en prison, ou bien s'il a été justement condamné
à la peine de mort ( comme l'enseigne ce même docteur au n.
2), alors il ne peut pas faire de résistance, mais il peut cependant
chercher à s'enfuir de la prison, parce que le jugement défend
seulement de faire de la résistance et non de prendre la fuite.
Soto.Tol., Cajet., Ronc., Salin., etc. disent la même chose po,ur
la peine des galères, de la flagellation, de la prison perpétuelle
; à moins que la prison ne lui ait été assignée
pour lui tenir lieu de peine, comme le disent la plupart des docteurs;
mais Lugo, Sanch., Less., Nav. et les Salm. (contreVasq,, etc.) excusent
les condamnés qui s'échappent des galères. On de-mande
ensuite si le condamné peut résister, lorsque le jugement
est justifié par les preuves extérieures. Les Salm. et Bus.
sont pour la négative, mais Lugo etRono. se déclarent avec
probabilité pour l'affirma-tive, parce que les présomptions
doivent toujours céder à la preuve de l'innocence qui donne
le droit de se défendre, pourvu qu'on puisse le faire sans trouble
et sans scandale, ainsi que nous l'avons dit plus haut (2). Quelques nuteurs
prétendent que celui qui est condamné à mort
doit prendre la fuite s'il le
(1) 2. 2. q. 69. a. 4' in lin. (i) Lib. IV. u. 281. Vcd. sed.
roim LES CONFESSEURS.
585
peut; mais cette opinion est combattue avec raison par Soto, Silvius,Sa,
les Salm., etc., parce qu'il peut très bien rester en prison sans
commettre d'in-justice , surtout s'il le fait pour faire pénitence
de son péché (1).
LXXXVII. Donc,puisque le condamnépeuts'enfuir de sa prison,
il peut aussi briser ses fers; car, si la fin est permise, les moyens doivent
l'être aussi, commele di-sent Soto, Cajetan,Nav.,Lugo,Tolet,Less.,Salm.
et Roncaglia, et il n'est pas pour cela tenu de réparer le dommage
qu'il a causé par effraction, comme l'ajou-tent les Salm., Val.,
Bon. et Sayr. Les Salm., Ronc., Tamb., etc., disent de plus que le condamné
peut aussi corrdlhpre ses gardes avec de l'argent; mais pour moi je ne
saurais admettre une telle opinion, car il ne peut jamais être permis
d'engager son pro-chain à faire une action mauvaise en elle-même,
comme celle que commettrait le geôlier qui manque-rait à son
devoir en ouvrant les portes de la prison. Puisqu'il est permis au condamné
de prendre la fuite (2), il est permis aux autres personnes de lui fournir
les cordes, les limes ou autres instruments propres à faciliter
son évasion. C'est ce qu'enseignent Silv., Vasq., Cajet., Less.,
Lugo, Sanch. , Ronc. > Salm., etc., contre l'opinion de Soto, pourvu toute-fois
(suivant la restriction que font avec raison les Salm. et Ronc.) que cette
évasion ne doive pas être préjudiciable à la
république, comme, par exemple, si le condamne était un voleur
de grande route. Mais d'unautrecôté il n'est permis àpersonne
d'enfoncer la prison pour délivrer un condamné. Voir Ronc.
(1) Lib. IV. ?. a8i. (a) N. 282.
?. ????.
25
386
INSTRUCTION PRATIQUE
et Bus. avec la plupart des autres (1). Quant à ce qui concerne
la conduite que doivent tenir les confes-seurs avec les condamnés
à la peine de mort, voyez ce qui est dit au huitième point
du dernier cha-pitre.
CHAPITRE XIV.
REMARQUES SUR LES SACREMENTS EN
GENERAL ET PARTICULIEREMENT SEB LE
SACREMENT DD BAPTÊME ET
Dû SAIIVT CHRÊME.
PREMIER POINT.
Des sacrements en général.
?. De l'attention et de l'intention.
2. Quelle est l'intention nécessaire chez le mi-nistre
?
3. De l'administration sous condition.
4· Si l'on doit refuser le sacrement aux pécheurs.
5. Quand doit-on leur refuser la communion?
6. Si les époux sont en état de péché,
etc.
I. Ce qui concerne les sacrements en général a été
exposé d'une manière explicite dans l'examen des ordinands.
Nous nous bornerons donc ici à dé-velopper quelques remarques
particulières sur les-quelles on est passé légèrement
dans cet ouvrage, n'expliquant que ce qu'il était nécessaire
de faire con-
(0 N. a85.
POUR LES CONFESSEURS.
387
naître à ceux qui se préparent à prendre
les ordres· nous devons y revenir, parce qu'à l'égard
des con-fesseurs elles exigent de plus longs développements. Remarquez
i°que, d'après Lacroix, le prêtre qui administre le sacrement
doit y apporter non seule-ment l'intention, mais l'attention, afin que
ce sacre-ment soitvalable. Riais une telleopinion est singulière
et n'a que fort peu de fondement, car, si elle était admise, il
arriverait que, lorsque le ministre serait volontairement distrait, quoiqu'il
eût bien son in-tention virtuelle,le sacrement serait nul; mais tous
les auteurs conviennent .que pour la validité des sa-crements il
ne faut que la matière, la forme et l'in-tention du ministre ; c'est
pourquoi Suar., Lug., Lacroix, etc.,enseignent que, lorsque le ministre
est distrait, le sacrement n'en est pas moins bien accom-pli , toutes les
fois qu'il y a intention (1). Quant à la question de savoir si le
prêtre, qui a des distractions volontaires en administrant un sacrement,
commet un péché mortel, l'opinion commune est que dans tous
les autres sacrements il ne commet qu'un péché véniel,
pourvu qu'il ne s'expose pas à se tromper; mais dans le sacrement
de la consécration de l'eucha-ristie il commet un péché
grave, d'après Concina et Tamburini (contre l'opinion
de Lacroix et Maz-zotta) (2).
I. Remarquez, 2° en ce qui concerne l'intention du ministre, que
l'intention habituelle ne suffit pas, encore moins l'interprétative,
mais qu'il faut l'in-tention actuelle ou tout au moins la virtuelle. (Sur
(1) Lib. VI. ?. ?4· et vide etiam lib, IV. ?. ???. V. Ratio
et Lacroix, lib. VI. ?. 64-(a) Ibid. V. Utrum.
588
INSTRUCTION PRATIQUE
la nature de l'intention actuelle, virtuelle, habituelle, inlerprétative,voyez
ce qui estditàl'£'^'a)we«,n.i4.) Néanmoins l'intention
coacta, c'est-à-dire faite par crainte, est suffisante, parce que
la crainte ne fait pas disparaître la volonté.
L'erreur du ministre n'est pas une cause de nullité lorsqu'elle
porte sur la personne, par exemple, si, croyant donner l'ab-solution à
quelqu'un, il la donne à un autre (i). Ces choses sont certaines,
mais ce qui est un sujet de doute, c'est de savoir si le sacrement est
valable lorsqu'il a été conféré avec la matière
et la forme, mais sans qu'on ait eu l'intention de' faire ce que fait l'Eglise.
Luther disait qu'il était toujours va-lable, lors même que
ces cérémonies n'avaient été faites que par
plaisanterie. Mais cette opinion a élé condamnée par
le concile de Trente, Sess. ?, can. 11. Quelques autres, tels que Cajet.,
Juen., Góntens., Serry, Milante, etc., disent que le sacrement est
va-lable lorsque cela a été fait sérieusement ; maisl'opi-^nion
la plus commune et la mieux fondée enseigne qu'il faut l'intention
d'exercer les solennités sacra-mentelles conformément à
l'esprit de l'Eglise instî-tuéepar Jésus-Christ.Voir
Beliar., Suarez, Vasquez, Tourn.,Petr., Conci., Antoine, Salm.,Lugo, Bon.,
et tous les autres avec Benoît XIV (2). Le cardinal Bell, dit que
l'opinion des auteurs opposés est sem-blable à celle des
novateurs ; le cardinal de Lugo dit également qu'elle est rejetée
par tous les auteurs, et qu'elle ne diffère pas beaucoup des erreurs
des luthériens ;et le père Vasquez ditqu'elleest déjà
con-damnée. Quelques auteurs, pour appuyer l'opinion
(1) Lib. VI. ?. ?8. V. sufficit, (?) De synod, 1. 7. c, 4· ?.
9.
POUR LES CONFESSEURS.
38a
que nous professons, citent l'endroit du conc. de Trente, sess. ?4·
ch. 6, où il est dit que l'absolution sacramentelle est nulle :
« Si sacerdoti animus serio » agendi et vere absolvendi desit.
» Mais cela ne prouve rien puisque Luther veut qu'au li.eu de re-mettre
lui-même les péchés, il déclare qu'ils ont été
remis par Dieu, et c'est pour cela que le concile s'exprime de cette manière.
Il vaut mieux appuyer notre opinion sur la proposition 28, condamnée
par Alexandre VI, laquelle dit : « Valet baptismus col-» latus
à ministro qui omnem ritum externum for-smamque baptizandi observat,
intus vero in corde » suo apud se resolvit : ÌNon intendo
facere quod facit «Ecclesia. » En vain dirait-on que la proposition
ntì parlait que des cérémonies extérieures
faites par plaisanterie, parce que cette proposition n'était plus
celle des hérétiques déjà condamnée
par le conc. de Trente. C'était au contraire celle des auteurs catholi-ques
parmi lesquels il ne s'en est jamais trouvé aucun qui ait soutenu
que des cérémonies faites par plaisan-terie fussent suffisantes.
Du moins Benoît XIV dit, dans son ouvrage de synodo (1), que les
partisans de l'opinion contraire ont reçu un grave échec
par la condamnation de cette proposition, d'où il conclut que dans
la pratique c'est toujours notre opinion que l'on doit suivre. La principale
raison qui sert de base à notre opinion, est celle que rapporte
saint Thomas, savoir que l'opération de tout sacrement peut être
rapportée à plusieurs causes ; par exemple, lorsque dans
le baptême on répand l'eau sur la tête, on peut dire
que c'est pour enlever les taches du corps ou celles de l'âme, par
conséquent il faut l'in-
(1) Bcned. XIV. de syn. 1. VU, c. h· n. 8.
5go
INSTRUCTION PRATIQUE
tention du ministre pour déterminer le but de son action, et
pour que le sacrement par lui administré puisse produire son effet.
Voici ses paroles : « Ea » quae in sacramentis aguntur possunt
diversimode » agi : sicut ablutio aquae, qua fit in baptismo, potest
» ordinari et ad munditiam corporalem, et ad sani-Dtatem corporalem
et ad ludum et ad multa alia, et a ideo oportet quod determinetur ad unum,
id est ad ? sacramentalem effectum per intentionem abluen-»tis (i).
» Le docteur angélique dit dans un autre endroit(2) : «Si
minister non intendat sacramentum » conferre, non perficitur sacramentum.
» Du moins Benoît XIV dit, avec beaucoup de sagesse, que le
sacrement, tel que l'admet l'autre opinion, serait tout au moins illicite
et devrait être renouvelé sous condition (3).
III. Remarquez 3° que dans un cas de néces-sité il
est permis d'administrer les sacrements sons condition , et cela n'est
pas seulement permis pour le baptême, ainsi qu'il est exprimé
au ch. 11 de bap-tism., mais encore pour tous les autres sacrements, comme
le disent, d'un commun accord, Castr., Sna-res, Conc, Habert, Ronc, Salm.,
etc., ainsi que Benoît XiV contre Juenin, et non pas seulement dnns
le cas de nécessité, mais toutes les fois qu'il y a une grave
utilité ou toute autre juste cause, comme le disent les auteurs
précités, contre Antoine: si, au contraire, on le faisait
sans un juste motif, ce serait une faute grave ; quoique Tournely et les
Salm. ne déclarent pas coupable de faute grave le confesseur
f 1) 5. p. q. 64- a. 8.
(2) Opus. c. 1.
(5) Lib. XI. ?. ??. ad. a5.
POUR LES CONFESSEURS.
5<?
qui, en donnant l'absolution, ajouteiait pour plus de sûreté
la condition si le pénitent est disposé à la recevoir,
quoiqu'il soit convaincu qu'il cstdisposé(i). Il n'est pas nécessaire
que la condition soit verbale-ment exprimée, il suffit qu'on l'impose
mentalement, ainsi que le pensent Castr. Tourn. et les Salm (2). IV. Remarquez
4° qu'on ne peut pas refuser le sacrement à celui qui a commis
un péché caché s'il le réclame publiquement,
ainsi que l'enseigne saint Thomas (?), et comme cela est exprimé
dans le ch. si sacerdos de off. jur. ord. 11 faut en excepter le sacrement
de l'ordre, que Vévêque peut refuser même à celui
qui n'a commis que des péchés cachés, ainsi qu'il
est dit dans Y Examen des ordinands, i5. Mais on doit au contraire les
refuser à celui qui a commis un péché public, lors
même qu'il les ré-clame publiquement (4) ; mais lorsqu'il
y a doute sur le péché et la pénitence, si le péché
est cer-tain et la pénitence douteuse, on doit également
refuser les sacrements, il en est différemment si le péché
est incertain. Si, sans être tout-à-fait public, le péché
est connu de la plus grande partie des per-sonnes présentes, et
qu'il n'y ait qu'une ou deux personnes honnêtes qui l'ignorent, on
peut égale-ment refuser les sacrements, suivant l'opinion de La-croix
et Diana. Mais c'est avec plus de probabilité que Suarez et Bonacina
soutiennent qu'on ne doit pas les refuser dans ce cas. Voyez ce qui est
dit à ce sujet au ch. xi, n. 11 (5). Lorsque le pécheur
va
Ci) N. 37 et a8. "
(3) N. 39.
(5) ?. ?. q. 80. a. 6. c. 7.
(4) Lib. VI. ?. 44·
(5) ?. 45·
3g2
INSTRUCTION PRATIQUE
réclamer les sacrements dans un lieu où son péché
n'est pas connu, quoique dans un autre il soit pu-blic , nous pensons avec
Cabas., Soto, Vasquez, etc., contre l'opinion de quelques autres, qu'on
ne peut pas les lui refuser; car, si on le pouvait, il en résul-terait
les mêmes inconvénients que si on. pouvait les refuser à
ceux dont le péché n'est publiquement connu dans aucun endroit
(1).
V. Il faut remarquer 5e que, suivant les prescrip-tions du rituel romain
(de sac. Euch.), on doit re-fuser la communion aux. pécheurs publics,
toutes les fois qu'il n'est pas certain que leur pénitence a été
publique comme leur péché, et qu'ils n'ont pas encore réparé
le scandale par eux commis. A ce sujet Poss., Jean, Sanchez, Busemb. et
Lacroix di-sent qu'il suffit de faire sa confession en présence
de plusieurs personnes et de telle sorte qu'elle doive bientôt être
connue de toutes les autres,-pourvu toutefois que le pécheur ne
cherche pas par là à se mettre à même de profiter
d'une occasion qui doit se présenter prochainement, car s'il y avait
une oc-casion de ce genre et qu'elle fût connue générale-ment
, on ne devrait accorder l'absolution au pé-cheur public qu'après
que cette occasion aurait été éloignée (2).
Quant à la question de savoir s'il est permis au prêtre d'administrer
la communion au pécheur public, lorsqu'on l'y contraint en le mena-çant
de lui donner la mort., Bonac., Lacroix, etc., disent qu'il le peut; mais
nous pensons au contraire, avec Ledesma, Concina et autres,, qu'il ne peut
pas l'administrer, parce qu'il doit éviter la profanation
(1) M. 46.
(2) Lib. VI. ?. 47 et 48.
POUR LES CONFESSEURS.
du sacrement, même aux dépens de sa personne. En vain
dirait-on que puisque le prêtre peut (comme nous l'avons déjà
dit) administrer le sacrement à celui qui a commis un péché
secret, afin de ne pas le déshonorer, il doit pouvoir à plus
forte raison le donner pour se soustraire lui-même à la mort;
car on répondrait à cela que si l'on permet de donner la
communion à celui qui a péché en secret pour le soustraire
à l'infamie, c'est parce que son infamie porterait préjudice
à tous les autres fidèles qui mènent une bonne conduite,
en ce que, voyant le déshonneur publiquement infligé à
un pécheur pour une faute cachée, ils pourraient être
facile-ment détournés de se présenter à la
communion par la crainte qu'ils auraient d'être chassés par
quelque prêtre imprudent ; tandis que cette raison, tirée
de l'intérêt général, ne peut pas s'appliquer
au second cas (1).
VI. Remarquez 6° que le curé ne peut pas assister au mariage
de deux personnes qui ont péchépublique-ment, comme le dit
avec raison BenoîtXIV (2) contre l'opinion de Laymann, Lugo, Lacroix,
etc., qui disent que le devoir du prêtre est d'assister au mariage
, et que sa présence est purement matérielle et rien de plus.
Mais pour nous, nous pensons que les époux qui se trouvent dans
cetétatde péchénOntpas droit de réclamer la
présence du prêtre, et que par consé-quent celui-ci
doit les refuser afin de ne pas se ren-dre complice de leur sacrilège.
Il en est d e même pour les témoins ; et le prêtre a
de plus, pour s'y refuser, l'obligation que lui impose son caractère
de prévenir
(0 N. 49.
(2) Dceyn. 1. VIII. c. ?4· n. 5.
INSTRUCTION PRATIQUE
autant qu'il est en lui les péchés de ses ouailles (1).
Remarquez ici que, d'après le décret de Clément XI
confirmé par Benoît XIV, le curé ne doit procéder
aux publications qu'après avoir examiné les futurs époux,
et s'être convaincu qu'ils sont suffisamment instruits des préceptes
de la religion (2). Quant à la question de savoir si la femme peut
célébrer son ma-riage, et par suite administrer le sacrement
(suivant notre opinion qui est que les époux sont eux-mêmes
les ministres du mariage, comme nous le prouvons au chap, xvm ) à
l'époux qui est pécheur public, Sanch., Lugo et Lacroix disent
qu'elle le peut, con-sidérant en cela les époux comme des
contractants ordinaires, par la raison que l'objet direct du ma-riage est
le contrat, tandis que le sacrement n'en est que l'objet indirect. Mais
cette raison-là ne nous paraît pas concluante , parce que
le contrat entraîne d'une manière nécessaire l'administration
du sacre-ment. Par conséquent je crois que tout ce qu'on peut dire,
c'est que l'administration de ce sacrement étant faite par des ministres
non consacrés, n'est pas à cause de cela considérée
comme une faute grave, ainsi gue cela est professé par Gon., Suar.,
Tonrnely, Hab., Juénin, Noël, Alexandre, Con-cilia, Anaclet,
Salm., etc., quoiqu'elle soit consi-dérée au contraire comme
une faute grave par Lugo, Ponce, Nav., Vasq., Conc, Tournely,Lacroix, etc.,
dont l'opinion me paraît plus probable (3), ainsi qu'on peut le voir
dans Y Examen des ordinandi, eh. 1, n. 12. Ensuite personne n'ignore que
l'Eglise a pro-
(1) Lib. VI. n. 54. (?) Ibid. (?) ?. 5».
POUR tES CONFESSEURS.
hibéles mariages avec les hérétiques (1). Les
autres choses qui peuvent avoir rapport aux sacrements en général
ont été consignées dans cet Examen, ch. ?.
DEUXIÈME POINT.
Da sacrement tie baptême.
§ I. De la matière, de la forme et du ministre du
baptême.
?. Combien y a-t-il de sortes de baptêmes ?
8. De la matière éloignée.
9. De la promesse ; et si la mère peut être opérée.
10. 11 et 12. Si l'on peut baptiser l'enfant dans le sein
de sa mère, etc., et sur quel membre, etc.
??. Si les trois ablutions sont nécessaires.
14. De la forme.
15. Du ministre.
16. De l'ordre des ministres.
17. Des étrangers qui reçoivent le baplème.
18. Du retard dans le baptême ; du baptême donné
dans une maison particulière (voyez le r. 3o ).
VII. On distingue ordinairement le baptême flu-minis , flammis
et sanguinis. Le baptême fluminis est celui qui est fait en versant
de l'eau et en pro-nonçant des paroles ; c'est là proprement
le sacre-ment de baptême. Le baptême flaminis est celui de
l'Esprit-Saint qui est appelé flamen (souffle) par al-lusion à
la manière dont l'Esprit-Saint descendit sur les apôtres,
au jour de la Pentecôte, en forme de vent. Ce baptême signifie
proprement la conversion de l'âme à Dieu par l'inspiration
de l'Esprit-Saint,
(1) N. 56.
3g6
INSTRUCTION PRATIQUE
avec le désir exprès ou tacite de recevoir le baptême
réel. Ce désir seul suffit pour opérer le salut lors-que
le baptême réel n'a pu être administré. Enfin
, par baptême sanguinis, on entend la mort soufferte pour la foi
ou pour toute autre venu chrétienne, ainsi que l'enseigne saint
Thomas (1) ; et en fait, l'É-glise célèbre le 28 février
la fête de plusieurs saints morts au service des infidèles.
Ce martyre équivaut au baptême, en ce qu'il a également
pour effet d'ef-facer les fautes et d'exempter de la punition, pourvu toutefois
qu'il soit accompagné de la contrition des péchés
ou bien d'un grand amour pour Dieu, parce que la contrition seule ne suffirait
pas pour le salut sans l'amour prédominant pour Dieu, comme le professent
saint Thomas , saint Bonaventure, Scot, Laym., Petrocot, Wigand, Viva et
autres (2). Il faut remarquer ici qu'on ne doit pas s'offrir au martyre
sans une vocation spéciale du Saint-Esprit, à moins que cela,
soit nécessaire dans certains cas pour pré-venir un grand
scandale, comme le disent la plupart des docteurs : ce qui autorise Laym.
à dire que ce serait commettre un péché si, se trouvant
chez les hérétiques , on voulait pendant le carême,
sans au-cun juste motif, s'abstenir de manger de la viande, et s'exposer
ainsi à être reconnu pour catholique et à être
puni de mort (3).
VIII. Mais à présent occupons-nous en premier lieu de
la matière du baptême. La matière éloignée
licite est l'eau consacrée; car on commettrait un péché
grave si l'on voulait, sans nécessité, se servir
(1) 2. a. q, 124. »»·5·
(a) Lib. VI. ?. g6. ad, 100.
(3) Ibid. ?. ???.
POUR LES CONFESSEURS.
d'une autre eau, comme le disent la plupart des doc-teurs d'après
la Clem. un. debapt. Du reste il est pro-bable que l'eau non consacrée
est permise dans le baptême privé. Voir Lacroix , Gobât,
Pasqualigo et Quintan. (i).'La matière éloignée valable
est toute eau naturelle, soit minérale ou marine, ou de glace fondue
ou mêlée avec un autre liquide , pourvu que la quantité
de celui-ci soit moindre que celle de l'eau et ne l'ait pas dénaturée.
Au contraire, on ne peut pas prendre pour matière valable le vin,
le lait, la li-queur tirée des fruits ou des herbes, ni l'eau gelée
(2). Le bouillon , la lessive et la bière sont des matières
douteuses (5). Est également matière douteuse l'eau distillée,
c'est-à-dire extraite par des moyens chi-miques des fleurs ou herbes,
car l'eau naturelle distillée avec des roses ou autres fleurs n'en
est pas moins de l'eau véritable (4). De même la salive, l'eau
congelée et l'humeur qui découle des arbres (5) ; de même
encore une ou deux gorgées d'eau sont des ma-tières douteuses
(6). On ne peut employer les matiè-res douteuses que dans les cas
de nécessité et en y joi-gnant une condition ; mais remarquez
que lorsqu'il y a nécessité, le ministre ne doit pas faire
difficulté de se servir de la matière douteuse, lors même
que l'on ne peut avoir que très peu de confiance en la valeur du
sacrement, comme l'enseignent Suarez_, Cajetan, Antoine, Holzm. , Yiva
et autres (7). Il
(1) Mb. VI. n. 102.
(3) N. 102 et io3. (5) Ibid. io3.
(4) N. 104.
(5) Ibid. dub. a. 5 et 4.
(6) Lib. VI. n. 104. dub. 5. et n. 107. q. 4·
(7) N. io3, ad. 5. in fin.
3g8
INSTRUCTION PRATIQUE
faut observer ce que nous dirons au chap, xvi, n. 38, quand nous traiterons
de l'absolution donnée au lit de la mort aux pécheurs qui
sont privés de l'usage de leurs sens.
IX. La matière prochaine du baptême est l'ablu-tion, laquelle
peut êtpe faite de trois manières : par immersion, par aspersion,
ou par infusion; c'est cette dernière manière qui est aujourd'hui
en usage parmi nous. Si l'on jette un enfant dans une rivière en
prononçant les paroles sacramentelles,il est pro-bable que le baptême
est alors valable. Mais cette sorte de baptême n'est pas permise,
parce qu'il n'est pas permis de tuer un enfant même pour le baptiser,
etlòrs même qu'il devrait sans cela mourir sans avoir reçu
le baptême. De même il n'est pas permis .comme l'enseigne saint
Thomas (?), de tuer la mère pour baptiser l'enfant ou de lui faire
des incisions qui peu-vent lui occasionner la mort, et cela quand bien
même elle serait mourante et qu'elle y donnerait son consentement.
Il est seulement permis d'extraire l'enfant par incision lorsque la mère
est bien réel-lement morte. Ici Lacroix recommande une précau-tion
que l'on doit prendre en pareille circonstance : c'est d'ouvrir la bouche
de la mère aussitôt qu'elle est morte, afin que l'enfant (s'il
est en vie) puisse avoir de l'air, et ne pas être suffoqué
(2). Déplus Cangiamila(5), Possevin, Gobât,etc., fontremarquer
que les parents commettent un péché grave lorsque .pensant
que l'enfant est vivant, ils négligent de le faire extraire du sein
de la mère morte, ainsi que les
(1) 5, p. q. 68. a. 11. ad. ??.
(») Lib. VI. ?. ??6. V. Omnino.
(3) Cangiauiila. Embryologie, 1. H, c, i5. n. 1.
POUR 1ES CONrESSETJRS.
3gg
chirurgiens qui ne remplissent pas ce devoir ou qui relardent trop
long-temps à faire les incisions. Ils ajoutent que le curé
doit, de son côté, s'opposer de toutes ses forces à
ce qu'on ensevelisse la mère avant de l'avoir ouverte; autrement
il serait, suivant l'o-pinion de ces auteurs, coupable d'irrégularité,
parce que son devoir l'oblige d'empêcher la mort de l'en-fant lorsqu'il
le peut. Pour moi je ne puis admettre cette condamnation du prêtre,
parce que la vie de l'enfant n'étant pas certaine , on ne peut pas
être certain qu'il ait causé sa mort. Voyez ce qui est dit
au chap, ???,?. 22. Cangiamila (?) dit encore que s'il se trouve une personne
qui ait l'idée de faire l'ouverture du cadavre, quoique inexpert
dans ces sortes d'opérations, il doit néanmoins la faire.
Pour le cas où la mère a été condamnée
à mort par un jugement, voyez ce qui est dit dans cet ouvrage sur
ce sujet (2).
X. On demande i° s'il est permis, dans un cas de nécessité,
de baptiser l'enfant dans les flancs de la mère par le moyen de
quelque instrument qui fasse arriver l'eau jusqu'à l'enfant; Gotti,
Concina, Jue-nin, soutiennent la négative en s'appuyant de l'au-torité
de S. Thomas (?) qui dit : «Non debet aliquis » baptizari priusquam
ex utero nascatur. » La rai-son sur laquelle se fondent ces auteurs,
est que l'on ne peut pas renaître avec le baptême, selon l'Évan
-gile {nisisquis renatus fuerit, etc., Jo. 5 ), si l'on n'est pas déjà
né une fois. Mais c'est avec beaucoup de raison que Suarez, P^ignatelli,
Tournely, Elbel,
(1) Lib. VI. cit.
(a) Cit. n. 106. V. Omnino.
(S) 3. p. q.63. a. 11.
4??
INSTRUCTION PRATIQUE
Holz., Conc'na, Lacroix et autres professent l'af-firmative, et leur
opinion est même adoptée par Be-noît XIV (?), parce
que cet enfant étant déjà viable, est par cela même
capable de recevoir le baptême, et que l'on peut considérer
comme né celui qui vit dans le sein de sa mère, comme cela
a été dit pour le Verbe incarné : « Quod in
eâ natum est, de Spi-» ritu sancto est. Math. 1;» parce
que, comme dit saint Thomas (2): «Duplex est carnalis nativitas,
» prima in utero, secunda extra uterum ; » et cela se voit
encore plus clairement par le chap, iv de Bapt., où il est dit :
« In carnali generatione, qua » proles ex viro et femina nascitur,
etc. » Remarquez que l'on ne dit pas sevAemenl ex femina, mais ex
viro et femina. On a donc raison de dire que l'enfant en-gendré
est né; c'est dans ce sens que l'on peut com-prendre que l'enfant
naît du père. Le docteur an-gélique ne combat pas cette
opinion, car dans le passage que nous avons cité (?), il dit que
si l'on ne peut pas baptiser un enfant dans le sein de sa mère,
cela vient de ce qu'on ne peut pas faire l'ablution comme le suppose le
saint : Antequam nascatur, non potest aliquo modo ablui aqua. Par conséquent,
si l'on peut parvenir à faire les ablutions, on pourra baptiser.
Mais Benoît XIV dit qu'il est constant au-jourd'hui, d'après
le témoignage des médecins et des sages-femmes, que l'eau
peut arriver jusqu'à l'enfant dans le sein de sa mère, et
il cite en outre Silv. et Vasquez qui disent (cette opinion est réputée
probable par Laymann, Ang., Arm. etPrepos., etc.)
(1) De synod. I. VII. c. 5. n, 2.
(2) 4- «list. 12. q. 1. ad, 2. (3j 5. p. q. 68. n. 2.
.POUR XES CONFESSEURS.
que l'on peut baptiser l'enfant même pendant qu'il est enveloppé
dans l'arrière-faix, qui est pour ainsi dire une partie de lui-même
puisqu'il y est attaché par le nombril. D'où l'on conclut
que, clans le cas précité, on doit, lorsqu'il y a danger
de mort, bap-tiser toujours l'enfant sous condition (1). Il faut de plus
remarquer avec saint Thomas (2), que si dans un cas de nécessité
on a baptisé l'enfant dans le sein de sa mère, et qu'on l'ait
baptisé sur la tête, on ne doit pas le baptiser de nouveau,
quoi qu'en dise Sainte-Beuve, car cela est confirmé par le rituel
romain ; mais s'il a été baptisé sur Une autre partie
du corps, on doit renouveler le baptême sous con-dition (?).
XI. On demande 20 si l'on peut administrer le baptême ea ne touchant
avec l'eau que les cheveux de l'enfant. Bonacina, Goncina, etc., disent
qu'on ne le peut pas; mais cela est permis par Lugo,Toi., Val., Conqina,
Ledesma, Graffiis, etc., car quoi-que les cheveux ne soient pas animés
parle mouve-ment, cependant ce ne sont pas des excréments, mais
en réalité une partie du corps, de même que l'épidémie
qui n'est pas animé, et qui cependant'est propre à recevoir
le baptême. Par conséquent, dans un cas de nécessité,
on peut aussi donner le bap-tême sur les cheveux, sous condition.
On peut à plus forte raison le donner sur les pieds ou sur les doigts,
ou sur une autre petite partie du corps. Mais le baptême donné
sur les vêtements est très certai-nement nul (4V
(1) Lib. VI. n. 107.
(a) Cit. art. 11. ad. 4.
(5) Lib. VI. cit. n. 117. V. Hic autem.
(4^ Lib. VI. n. io?, q. 5.
?. xxiv.
s6
PRATIQUE
XH. On demande 5° si le baptême qui, au lieu d'être
donné sur la tête, l'a été sur la poitrine,
les épaules, ou toute autre partie principale du corps, est un baptême
valide. La plupart des auteurs pro-fessent l'affirmative; mais Âriaclet,
Concina, Platel, avec saint Thomas (1), élèvent des doutes
à cet égard; c'est pourquoi Tourn., Viva, Sal m., Trull.,
Lev., etc., ont raison de dire que l'on peut, dans ce cas, renouveler le
baptême en ajoutant la condition: Si non est baptizatus, etc. (2).
'
XIII. On demande 4° sî la triple ablution est
indispensable pour la validité du baptême ; mais il est certain
que le baptême est valable avec une seule ablution, ainsi que cela
résulte du ch. de Trin., dist. 4 , de Consecr., où saint
Grégoire dit : « Ter, vel » semel immerge. » Du
reste, le rituel prescrit trois ablutions. Nous pensons, avec saint Thomas(3)
et quelques autres (contre Holzmann) , que c'est là un précepte
grave, parce que la matière est grave , attendu qu'on y fait
mention du mystère de la Sainte-Trinité.
Il faut de plus remarquer avec Laym., Regin., Busemb., etc., que l'on ne
doit termi-ner la forme du baptême qu'après les trois ablu-tions
(4).
XIV. Quant à la forme du baptême, voici com-ment
il s'administre dans l'Église latine : « Ego te » baptizo
in nomine Patris, etFilii, et Spiritus Sancti. » Dans l'Église
grecque, on dit :« Baptizetur servus ·» Christi in nomine
Patris, etc. » Alexandre VIII con-
(l) S. p. q. 68. a. 11. ad. 4. (a) Lib. VI. D. 107. q. 4· (?)
3. p. q. 66. a. 8. (4) Libi VI. a. 10 j. q. 5.
POUR LES CONFESSEURS.
damna la proposition 27, qui disait que les paroles in nomine Patris,
etc., étaient suffisantes. Remar-quez qu'un changement
fait à ces paroles, s'il était substantiel (c'est-à-dire
s'il viciait le sens de la for-me), rendrait le baptême
nul. Il n'en serait pas de même si le .changement
n'était qu'accidentel, c'est-à-dire s'il ne détruisait
pas le sens. On considère comme changement accidentel et comme ne
viciant pas le baptême : i° Si l'on prononce la forme dans un
autre idiome ou avec des mots de plusieurs idiomes différents,
parce que, dans l'administration des sacrements, il n'est pas nécessaire
que le prêtre entende les paroles, il suffit qu'elles aient le sens
nécessaire. Et dans l'administration du sacrement de bapiême,
lorsque, dans un cas de nécessité, ce sont des femmes ou,
des gens sans instruction qui le donnent, il vaut mieux, (suivant l'opinion
de quel-ques auteurs) qu'ils se servent de leur langue ma-ternelle, afin
de ne pas se tromper, en disant : Je te baptise au nom, etc. 20 Si au lieu
de dire : Je te baptise, on disait : Je te lave, je te nettoie, je te purge,
etc., ce changement ne serait qu'un péché véniel,
comme le disent Laym., Bonacina et Busemb. ; mais si l'on disait : Au nom
de celui qui a engendré et de celui qui a été engendré,
ou bien si au lieu de dire du Fils on disait de Jésus-Christ, alors
la validité du baptême serait douteuse (1). 'Si l'on disait
baltizzo au lieu de baptizo, ou bien Fili au lieu de Filii, ou bien Patria
et Filin ou Spiritu Sanctu au lieu de Patris, etc., ce baptême serait
valide selon la déclaration du pape Zacharie, au chap. Retulerunt,
de Consecr. dist. 4. 4° Si l'on transposait les paroles en disant :
Te ego
(1) Ub. Vi. ?. log. V. Hinc. ?. et V. utrum, et 199.
INSTRUCTION PRATIQUB
baptizo, ou bien in nomine Filii et Patris, etc. (?). 5° Si l'on
disait : In nomine Patris omnipotentis, et Filii unigeniti, etc.; ou bien
si, par une dévotion mal entendue, on ajoutait et in nomine Mariœ
Virginis. Le baptême serait au contraire rendu nul si l'on disait
: Je te baptise au nom du Père, ou bien, au nom de la Sainte-Trinité,
ou au nom de la divine-personne. Mais si l'on disait : Au nom du
Père et du Fils, etc., le baptême serait douteux, suivant
l'opi-nion de Bonac., Tourn., Busemb., Salm., etc. (2). 6° Si l'on
omettait le mot ego ou amen; mais si l'on omettait le mot te, le baptême
sérail nul, d'après l'opinion la plus commune. Si l'on mettait
le mot et en disant seulement: Patris, Filii, Spiritus Sancti, le baptême
serait yalide suivant quelques uns, et nul suivant quelques autres : par
conséquent, il fau-drait le renouveler sous condition. Mais si on
met-tait Vet au moins avant Spiritus Sancti, je pense avec-Lacroix que
le baptême serait valable, parce que, d'après l'usage,
il suffit pour distinguer les noms qui se suivent que la particule et soit
placée avant le dernier (3). La validité du baptême
est encore ré-voquée en doute lorsqu'on a omis le mot in;
d'après Soto, Navarre, Cone, etc., cette particule tient à
l'essence de Ja formule ; car, en l'enlevant, le sens reste équivoque,
lorsqu'on dit la foi-mule par l'au-torité de la Sainte-Trinité
ou en invoquant les trois divines personnes. Mais cette opinion est combattue
par Bon., Conc, Salm., etc., qui disent que cette particule ne tient pas
à l'essence, parce que, lors-
1) Lib. VI. n. no. (a) Ibid, ?. îil.
??) ?, ni V.
JPOIR LES CONFESSEURS.
qu'on la laisse, le sens n'en reste pas moins équi-voque (1).
Le baptême est nul lorsqu'il est administré seulement au nom
du Christ, ainsi que l'enseignent tous les auteurs et saint Thomas (2)
lui-même, au çliap. Si revera, 5o, de Consecrat, dist. 4.
En vain opposerait-on le texte des Actes: « In nomine Christi »
baptizabantur viri ; » parce que ces mois signifient seulement que
le baptême avait été institue par Jé-sus-Christ,
et non par saint Jean-Baptiste. Il est au contraire prouvé par les
Actes des apôtres que l'on exprimait les noms des trois personnes
de la Trinité; car quelques uns ayant prétendu que le nom
du Saint-Esprit n'y était pasicompiys, on leur répondit :
« In quo ergo baptizati estis ? » On a beau opposer le texte
du ch. A quodam, de Consecr. dist. 4, où le pape Nicolas dit : «
Si in nomine sanctissimae Trini-»tatis, vel Christi, bapiizati sunt,
rebaptizari non » debent, » parce qu'on répondrait à
cela, comme.le font Gonet., Frassen , Tourn., Salm. ,Holzm., etc., que
le pape disait cela non ex cathedra, mais obiter, parce qu'à cette
époque les doutes qui s'élevaient ne portaient pas sur la
forme, mais sur le ministre qui avait été juif (?), outre
que, comme l'explique la Glose, verb. Trinitatis, le pape, en disant sanctis-sima}
Trinitatis, n'entendait pas exclure l'expression distincte des trois noms
qu'elle contient.
XV. 5° A l'égard des ministres, il faut remarquer i" que
le baptêaie peut être administré par un pas-sant quelconque
( homme ou femme,), même héré-tique ou infidèle
(4). Mais hors du cas où il y a dan-*
(0 Lib. VI. n. m. V. dub. s. (a) 5, p, 9<56. n. 6; (5) Lib. VI.
n. 111, dub. 3. (4) Lib, VI. n. n.
INSTRUCTION PBATKJUÏ
ger de mort, il n'est permis qu'aux prêtres d'admi-nistrer le
baptême. Ainsi le ministre ordinaire de ce sacrement est le pasteur
de l'endroit, c'est-à-dire l'évêque ou le curé,
lesquels peuvent de leur côté confier ces fonctions à
d'autres prêtres, ou à défaut de prêtres, à
des diacres. Mais lorsqu'ils n'y sont pas autorisés, les dlacrçs
ne peuvent pas, même dans le cas de nécessité, administrer
le baptême solen-nellement; et s'ils le faisaient,ils seraient coupables
d'irrégularité, suivant l'opinion bien fondée de Laym.,
Uonac., Tour., Hab., etc.; car le diacre n'a pas qualité pour administrer
le baptême sans y être autorisé par le prêtre.
Tous les auteurs s'accordent à dire que les diacres ou clercs qui
administrent solennellement le baptême sont coupables d'irrégu-larité
, suivant le cliap. Si quis unus de cler. non or-din., etc. D'un autre
côté, Lngo, Cast., Bon., Holz., Laym., Lacroix, etc. (contre
Soto, Suarez,etc), di-sent avec probabilité que les laïques
qui baptisent solennellement ne se rendent pas coupables d'irrégu-larité,
paice que, quoique les expressions des textes soient conçues d'une
manière générale, Siquis,etc.,? on doit néanmoins
ne les rapporter qu'au titre qui traite des clercs (1). Du reste, il est
hors de doute que celui qui, hors du cas de nécessité, baptise
quoique non solennellement, sans l'autorisation de son pasteur, commet
une faute grave. Cependant la permission présumée suffit
pour cet objet, comme le disent les Salmant., ainsi que Miranda et Henri-quez
(2). XVI. Remarquez 20 en ce qui concerne l'or-
(1) Lib. VI. n. 116, (3) Ibid. ad a.
tES CONFESSEURS.
dre des ministres, que l'on doit, pour le baptême, préférer
\e prêtre au diacre (d'après le rituel ro-main) ,1e diacre
au sous-diacre, le clerc au laïque, enfin l'homme à la femme;
quoique cependant on doive quelquefois , par des motifs de décence,
pré-férer la femme à l'homme ; c'est pourquoi Cangia-mild
dit que , lorsqu'on baptise un enfant qui n'est pa's encore entièrement
sorti des flancs de sa mère, on doit choisir la sage-femme pour
administrer le baptême (1), (et là-dessus ïes,prêtres
doivent faire subir un examen rigoureux,
aux accoucheuses, comme il est dit au ch, 9, n. 45) ! ou bien on doit encore
choisir une femme lorsqu'elle se trouve mieux instruite en cette matière
que l'homme; et lorsque cet homme est le père même de l'enfant
qui doit être baptisé, c'est
toujours une femme qu'on· doit prendre, car il est défendu
aux père et mère de baptiser eux-mêmes leurs enfants
hors du cas d'extrême nécessité (2), II est incontestable
que le laïque qui baptiserait en présence d'un prêtre
commettrait un péché grave ( ch. 2i,<fe Consecrat, dist.
4), excepté si le prêtre était frappé d'excommu-nication,
comme le disent avec raison Suar., Castr., Nav., Sil. et Salm. (contre
Scot, et Sair.), parce que le prêtre «xcommunié ne peut
administrer le bap-têaie que dans le cas d'extrême nécessité,
et cette nécessité ne peut pas exister toutes les fois qu'il
y a une autre personne présente (?) ; mais si un laï-que administrait
le baptême en présence d'un clerc, lors même que ce
clerc serait diacre, il n'y aurait là
d) Cangiam. Embriol. 1. IV. c. s. n. a. {?») lib. VI. n. 117
(?) Ibid. dub. % et a.
INSTRUCTION PRATIQUE
qu'un péché véniel(i). Sans aucun doule les parents
commettent un péché grave toutes les fois que hors du cas
d'extrême nécessité, ils font baptiser leurs enfants
par les ministres, lors même qu'ils y seraient contraints par un
édit du prince (2). Nous avons dit un peu plus haut, au n. i5, que,
lorsqu'un enfant est en danger de mort, et qu'il n'y a pas de prêtre
pour le baptiser , le baptême peut lui être administré,
par un laïque ; il est bon d'ex-poser ici quels sont les signes que
les auteurs indi-quent (?) pour reconnaître le danger de mort dans
un enfant; ce sont : i° lorsque l'enfant naît sans pousser les
vagissements plaintifs qu'arrache à tous les petits enfants le contact
de l'air nouveau qu'ils respirent en sortant du ventre de leur mère;
20 lorsqu'après qu'il a respiré, le corps de l'enfant et
spécialement sa figure prennent une couleur li-
ide violette; 3° lorsqu'il est né avec beaucoup de difficulté
et que l'accoucheuse a eu beaucoup de peine à le retirer ; 4°
lorsqu'il est né avant le. sep-tième mois de la grossesse,
il faut en dire de même de tous les avortons ; 5° lorsqu'il
a le crâne très
endreet les sutures très ouvertes, ou toute autre partie du
corps détachée. Il faut en dire de même de tous les
enfants illégitimes pour lesquels on peut craindre que les parents
ne les mettent à mort ou ne les exposent dans des lieux déserts.
XVII. Remarquez 3° que ni les curés ni
les évêques ne peuvent pas administrer le baptême
(1) Lib. VI. ?. ?. dub. 3 el 4, (a).N. ii7.
(3) Gangiam. Embryol. lib, IV. c, 6. n. 2, avec Gobât et
QoinUnada.
POUR LES CONFESSEURS.
^??
bois de leurs diocèses ou paroisses sans en avoir reçu
la commission de la part des propres pasteurs. Par conséquent, les
parents commettent un péché lorsque, sans permission, ils
portent leurs enfants à d'autres prêtres que ceux de leur
paroisse (1). Les pèlerins et les vagabonds qui n'ont pas de do-micile
particulier peuvent faire baptiser leurs en-fants dans quelque église
que. ce soit, comme le di-sent Barb., Salin, et Lacroix, au ch. Nec numerus,
quest, ?. Mais on demande ici si les étrangers sont obligés,
pour le baptême et Jes autres sacrements, de s'adresser au curé
de leur domicile propre lors-qu'ils en sont peu éloignés,
ou 'bien s'ils peuvent les recevoir du curé de l'endroit où
ils se trouvent et où ils ont déjà un quasi-domicile.
XI faut remarquer ici que, pour acquérir un domicile dans un endroit,
il faut y résider, non pas en passant, mais pendant la plus grande
partie de l'année, ou tout au moins pendant une partie considérable,
soit pour affaires, soit pour y exercer la profession de médecin,
de marchand , d'aubergiste, de domestique ou toute autre profession semblable.
Voir Lay m., Nav., le cardinal Lambértini (2) et la plupart des
auteurs. Mais revenons à la question que nous avons posée:
nous répondrons qu'il y a là-dessus deux opinions qui paraissent
fondées : la première est soutenue par Led., Ang., Rodr.,
Henr., etc., qui prétendent qu'on doit recevoir les sacrements du,
curé de son domicile propre, parce qu'autrement ( à ce qu'ils
disent) il arriverait qu'un étrangei) aurait deux pa-roisses, celle
de sa résidence et celle de son domi-
(1) Lib. VI. ?. n4. (s) Not, 52. ?. t).
4lO
INSTRUCTION PRATIQUE
cile. Mais cette raison ne prouve rien, c'est pour-quoi nous regardons
comme plus probable , et d'ailleurs plus répandue, l'opinion de
JBarbo., San-chez, Silvestre, Castr., Ponce , Lacroix, Bonaci., Salm.,
etc., qui est confirmée par plusieurs déci-sions de la l\ote
Rom. ; cette opinion soutient que les sacrements peuvent sans inconvénients
être administrés par le prêtre du quasi-domicile, parce
qu'au moyen de la résidence chacun devient pa-roissien de l'endroit
qu'il habite, ainsi que cela ré-sulte du c. fin. de Paroch. (i).
XVIII. Remarquez 4* que l'on commet un pé-ché grave lorsqu'on
retarde pendant long-temps à donner le baptême aux enfants.
Laym. et Castr. pen-sent que le péclié est grave lorsque
le retard est d'un mois quand il n'y a aucun motif, et de deux mois lorsqu'il
? a un motif. Mais l'opinion la plus com-mune et la plus probable déclare
le péché grave quand le retard s'est prolongé au-delà
de dix ou onze jours (2).
Remarquez 5° qu'il est défendu sous peine de faute grave
de baptiser les enfants dans la mai-son , excepté les enfants des
rois ou des princes, ainsi qu il est dit dans la Clement, un. de bapt.
Sot., Cast., Toi., Conc, Lacroix, etc., disent avec raison que ces enfants
doivent être baptisés solennelle-ment, car l'on ne doit omettre
les cérémonies que dans le cas de nécessité.
Sous la dénomination de princes, quelques auteurs comprennent tous
les baron?; maisSuar., Tourn.,Ronc.,Tamb.,Elb.,etc, ne l'appliquent qu'à
ceux qui ont un domaine ab-
(1) Lib. VI. ?. ? ??. (a) N. 118. not. a, '
POUR. LES CONFESSEURS.
411
solu. Cela est confirmé par la Glose, dans la dé-menti,
précitée (post verb, aliquos), en citant le C. jundamenta
??. %proind. de elect., où il est dit: rex, princeps, marchia, dux;
par conséquent, les •princes sont autre chose que les barons. Cependant,
si l'usage s'est établi, dans certains endroits, de baptiser les
enfants des barons ou des magnats dans la maison, Lacroix dit avec raison
que Ton ne de-vrait pas se montrer trop rigoureux. Voyez là-des-sus
ce qui sera dit au n. 5o.
Remarquez 6° que le baptême serait nul si une personne appliquait
la matière et qu'une autre récitât la forme, comme
l'enseignent la plupart des docteurs, ainsi que saint Thomas (1); et cela
lors même qu'on se servirait de la forme des Grecs : Baptizetur se/vus
Christi, parce que l'on sous-entend toujours les mots per me (2). Remar-quez
7" que si plusieurs ministres donnaient le baptême en même
temps au même enfant, ils com-mettraient incontestablement un péché
très grave; mais, pour la valeur du sacrement en lui-même,
il faudrait distinguer, comme le fait saint Thomas (?), >.i chacun entendait
baptiser avec concurrence, c'est-à-dire de concert avec les autres,
le baptême serait nul; il serait valide, au contraire , si chacun
avait entejidu baptiser par lui-même tout seul. Il en est de ceci
comme de la consécration de l'eu-charistie faite par les prêtres
nouveaux qui célèbrent l'office en même temps que Tévêque
(4).
(1) S. p. q. 67. a. 6. (a) Cit. a. 6. ad. 3.
(3) lib. VI. ?. tig.
(4) Ibid. ?. 130.
41 3
1RSTKICT103 PRATIQUE
§ II. De ceux qui peuvent recevoir le baptême.
îg. Peines prononcées contre ceux qui bapti-sent un enfant
déjà baptisé.
20. Des avortons et des enfants des infidèles.
21. Si les parents s'y opposent.
2î. S'il est permis de vendre les enfants des infi-dèles.
23. Du baptême sous condition.
24· Des enfants exposés.
se 5. De ceux qui sont baptisés par des laïques.
26. De ceux qui sont baptisés par des hérétiques.
27. Si le baptême est douteux.
28. Disposition pour le baptême.
29. Des cérémonies, et i°de l'eau consacrée.
5o. 20 De l'Église.
XIX. Il faut remarquer i° que le baptême peut être
valablement administré aux enfants et aux per-sonnes dans un état
de démence continuelle, tandis que ceux qui ont joui de l'usage
de leur raison ne peuvent pas recevoir le baptême s'ils ne l'ont
pas demandé pendant qu'ils n'étaient pas en démence
(1). Il faut remarquer 2° que lorsque le baptême est re-nouvelé
sans un juste motif, le baptisé et le bapti-sant , à cette
seconde fois, encourent l'irrégu-larité, d'après le
chap. 11 de Apçst. Quant à la question de savoir si cela
s'applique à ceux qui sont baptisés une seconde fois sous
condition, mais sans un juste motif, il y a deux opinions probables. La
négative est soutenue par Suar., Gastr., Laym., Nav., Bon., Anacl.,
Pon., Tonrn., Hoi?., Salm. et
(0 Lib. VI. n. 121,
POUR Ï,F,S COSFESSEl'RS
/J j 5"
Lacroix, par la raison'que rebaptiser sous condition, ce n'est pas
réellement rebaptiser. M; is l'affirmative est professée
par Sot.,Fili., Conc, Renz., Barb. > Sair. et le cardinal Lamb., ainsi
qud par le cathé-chisme romain, par la raison que dette condition
étant, selon eux , illégale, elle est nue(i).
XX. Il faut remarquer 5° que lorsqu tain que les avortons soient
nés sans doit considérer ceux qui n'.ont pas<Tor les baptiser
(sous condition bien ent< d'après l'opinion répandue aujourd'
vants modernes et qui a été accueilli' sèment , savoir
que le fœtus a une même de la conception, o*u du moins après
(2). Il faut remarquer 4° que, sui du Rituel romain, ce n'est que dans
cessité <jue plusieurs personnes peu tisées avec la même
forme, c'est-à-d baptizo, etc. (5). Il faut remarquer 5°, cerne
les enfants des infidèles, que dement leur administrer le baptêm
que leurs parents s'y opposent , ainsi Benoît XIV dans son Instruction
au ainsi que la plupart des autres auteurs faut joindre saint Augustin
, quoi qu rand et Cathariii (4)· Mais il faut enc à ce sujet
que si les parents quittent la
âme
comme non ave-
il n'est pas cer-ie ( comme on ;anes), on doit indu), surtout ui par
les sa-avec empr'es-dès l'instant quelques jours ant le précepte
un cas de né-ent être bap-ire : Ego cos en ce qui con-???
peut vali-lors même que l'enseigne vice-gérants, , auxquels
il ? disent Du-ire remarquer vraie religion
(l) ?. Ï22.
(3) N. 124.
(5) Ub. VI. ?. 12/?. iufin.nd. G.
(4) S. >2G. Qn*r.
4 l4
INSTRUCTION PRATIQUE
pour se mettre dans les rangs des infidèles, on peut leur enlever
leurs enfants ; et il suffit pour cela que l'un des deux, le père
ou la mère, ait professé la vraie foi, comme disent Suar.,
Laym., lionca., Antoine, Salm. et Lacroix. Du reste il est permis de baptiser
les enfants des hérétiques même malgré eux,
et cela lors même qu'ils doivent rester avec leurs parents, suivant
l'opinion de Laym., Lacroix, Aversa, Go-bat , etc. Mais d'un autre côté
il est défendu de bap-tiser les entants des infidèles contre
le gré de leurs parents, excepté dans les ces suivants: i°
lorsque le fils est déjà en âge de raison et qu'il
désire d'être baptisé, comme l'enseigne saint Thomas
(1). Et re-marquez que dans ce cas l'Église peutetdoit séparer
l'enfant baptisé de ses parents, comme le disent Cast., Laym., Salm.
et Benoît XIV à l'endroit précité, n. 29, d'après
le chap, de Judœis dist. 45. Et lorsqu'il est douteux que l'enfant ait
ou non l'usage de sa raison, on ne doit le baptiser qu'après sa
septième année, mais non pas avant, comme dit Benoît
XIV; et jus-qu'à cette époque on doit l'éloigner de
ses parents et le garder dans un lieu sûr (2). 20 On doit bapti-ser
les fils des infidèles lorsqu'ils se trouvent en danger de mort.
5° Lorsque le fils est délivré de la surveillance paternelle
et qu'il est à craindre qu'il n'y rentre. Cela s'applique encore
aux enfants qui sont dans un étal de démence perpétuelle
ou qui ont été abandonnés ou exposés par leurs
pa-rents. 4° Si les parents sont faits prisonniers par des chrétiens,
ou si les enfants sont pris à la guerre.'
(1) 5. p. q. 68. a. io. (a) Lib. VI. ?. ia8.
POUR LES CONFESSEURS.
5° Si l'un des parents au moins consent à laisser baptiser
son enfant, lors même que Vautre s'y op-poserait (1).
XXI. Mais ici on demande 1° si lorsque le père et la mère,
tous deux infidèles, s'opposent tous deux à ce que l'enfant
soit baptisé, il est permis de le baptiser malgré eux. On
répond que cela n'est pas permis lorsque l'enfant doit rester en
leur puis-sance , ainsi qu'il a été décidé
par l'Église , à cause du danger à peu près
certain que courrait cet en-fant d'être perverti. Mais lorsque l'enfant
doit être retiré des mains.de ses parents, l'opinion de Scot,
Frassen, Tournely, Estius, Pichler, Manstr.,Holzm. et autres (quoique combattue
par Gon., Conc, Salm., etc.), qui permet de donner le baptême, est
probable, par la raison que Iles parents1 ne peu-vent pas exercer sur leur
enfant un droit qui serait préjudiciable à son salut éternel,
et puisqu'on peut enlever un enfant des mains de ses parents pour le soustraire
à la mort corporelle, on doit à plus forte raison pouvoir
l'en retirer pour le sauver de la mort spirituelle. Remarquez cependant,
à l'égard des Juifs, que Jules II a probibé, par des
motifs justes, de baptiser leurs enfants contre leur vo-lonté avant
que ces enfants aâent atteint lâge de raison (a).
XXIf. On demande 2° s'il est permis de rendre à des parents
infidèles leurs propres enfants après qu'ils ont été
baptisés. Hurt, dit qu'on ne le peut pas; mais cela est permis par
Suar., Laym., Castr., Yasq., Bon., Con., FUI., etc., parce que cela est
(1) N. 126. ad. 1S1. (a) Lib. VL a. i5a.
4l6
INSTRUCTION PRATIQUE
utile pour conserver la paix générale. Car si on n'a-vait
recours à cette mesure on n'obtiendrait que bien difficilement des
infidèles la restitution des pri-sonniers chrétiens, et l'Église
est plus intéressée à ce que les fidèles conservent
la foi, qu'à ce que les infidèles l'embrassent (1).
????. Il faut remarquer 6° qu'en règle géné-rale,
pour baptiser sous condition ceux qui ont déjà reçu
le baptême, il faut que l'on puisse raisonna-blement douter de la
validité du premier baptême,-ou qu'il y ait sur le baptême
lui-même un doute né-gatif ou positif (2), ainsi qu'il est
expliqué au ch. 1, n. 12. Remarquez cependant que lorsqu'il y a
un témoin oculaire qui affirme que le baptême a déjà
été donné , on ne peut pas le renouveler, à
moins qu'il n'y ait d'autres témoins qui affirment le con-traire.
Voir Suar., Laym., Castr., Bon., Holz., Salm. , etc., et le cardinal Lamb.
Remarquez de plus que l'on ne doit pas baptiser (même sous con-dition)
les adultes qui, nés de parents chrétiens, ont été
élevés parmi les fidèles, lors même qu'on ne
peut avoir aucune preuve qu'ils ont reçu le bap-tême, ainsi
que cela est exprimé au ch. Veniens, ?· de Presb. non baptiz.,
où il est dit : « Et certe de » illo qui natus de christianis
parentibus, et inter » christianos est fideliter conservatio, tam
violenter » praesumitur quod fuerit baptizatus , ut haec pra-esumptio
pro certitudine sit habenda, donec evi-» dentissimis forsitan argumentis
contrarium 'pro-«baretur. » Cependant c'est avec raison que
Laym. et Bus. disent que l'on doit baptiser sous condition
(i),N. i53. Ce) N. i54.
POUR LES CONFESSEURS.
les adultes, même lorsqu'ils ont été élevés
au mi-lieu des fidèles, lorsqu'il est vraisemblable de pré-sumer
qu'ils n'ont pas été baptisés, parce que cette présomption
est un doute qui porte sur le bap-tême primitif. Ainsi, la S. C.,
comme le rapporte le P.- Zacharia (?) , a déclaré plusieurs
fois que l'on devait baptiser sous condition les personnes qui·ne
peuvent fournir aucune preuve de leur bap-tême , ni du mariage de
leurs parents (2).
XXIV. Il faut remarquer ?" en ce qui concerne les enfants exposés
(soit qu'ils aient été exposés avec ou sans écrit,
constatant qu'ils ont reçu le baptême ), qu'ils doivent
être baptisés sous con-dition toutes les fois qu'il n'est
pas constant que le baptême leur a été administré
, parce qu'il est tou-jours plus prudent de douter. Voir Noël, Alex.,
Petr., Conc, Ronc, Holz., Tourn., Henn., et au? tres, ainsi que le cardinal
Lamb, qui cite à l'appui de cette opinion le concile
de Milan et la déclara-tion de la sainte Congrégation, ainsi
que le Rituel romain, où il est dit : « Infantes expositi,
si de «eorum baptismo non constat,
sub conditione » baptisentur (5). »
XXV. Il faut remarquer 8° que les enfants bapti-sés par
les accoucheuses ou par d'autres laïques, ne doivent être rebaptisés
que lorsqu'on a des rai-sons de soupçonner qu'il a été
commis quelque er-reur, comme disent Suar., Laym., Bonaci., Conci., Holzm.jSalm.,
Lacroix, etc., quoi qu'en disent quel-ques autres, et comme cela
a été déclaré par la
(1) Lib.IV. apud. Lacroix lib. VI. p. î.-ad. n. 5io. (i) Lib.
VI. ?. ?54- V. Hic. tamen.
(3) ?. 135.
?. xxiv.
27
Îl8
INSTRUCTION PRATIQUE
sainte Congrégation ( ? ) ,· mais le baptême ne
doit pas être renouvelé lorsque le curé, en examinant
le laïque qui a administré le baptême, le trouve assez
instruit, ainsi qu'il est dit dans le Catéchisme ro-main. Cependant
on doit dans ce cas suppléer les cérémonies qui ont
été omises, ainsi que l'ordonne le rituel romain. Lorsqu'on
renouvelle le baptême pour un adulte, on ne doit pas lui permettre
de se confesser. Il doit seulement avoir la contrition de ses fautes (2).
XXVL II faut remarquer 9° que l'on ne doit pas rebaptiser ceux
qui ont été déjà baptisés par des hérétiques.,
excepté lorsqu'on sait, ou qu'on peut raisonnablement présumer
qu'ils ont manqué en quelque point à l'observation des formalités
exigées par l'église catholique pour la validité du
sacrement, ainsi que cela a été déclare par la sainte
Congréga-tion (3). C'est ce qui arrive principalement pour ceux
qui ont été baptisés par les ministres luthé-riens
et calvinistes, comme le remarquent Tourn., Gob,, Dic., etc., parce que
quelques uns d'entre eux croient pouvoir se servir d'eau distillée.
D'au-tres se mettent deux pour baptiser, un qui pro-nonce la forme et un
autre qui applique la ma-tière ; d'autres versent l'eau sur les
vêtements ; d'autres, et t'est le plus'grand nombre, manquent par
l'intention (4).
XXVII. Il faut remarquer io° que le ministre commet un péché
lorsqu'il ne baptise pas'(sous
(1) ??. P. Zach. ad not. ad Lacroix. 1. VI. p. 1. n. Sa3.
(a) Lib. VI. n. i56.
(S) Ap. P. Zach. ad Lacroix. 1, VI. p. 1. n. 3a3,
(4) Lib. VI, n. iZj.
POUR LES CONFESSEURS.
condition, bien entendu ) lorsqu'il a de justes mo-tifs de douter que
le baptême ait été donné. Mais lorsqu'il y a
un témoin oculaire du baptême, on ne peut pas le renouveler
(1). D'un autre côté il suffit de mettre la condition mentalement,
pourvu qu'il n'y ait pas de scandale à ne pas l'exprimer. Mais il
est toujours plus sûr de l'exprimer en disant : Si tu n'es pas baptisé,
etc. Lorsqu'on rebaptise sous condition, on n'a pas besoin de parrain (2).
XXVIII. Pour qu'on ait la disposition pour rece-voir le baptême,
il faut i° l'intention au moins ha-bituelle chez les adultes (car chez
les petits enfants et chez les insensés, l'Église, ainsi
que nous l'avons dit, supplée cette intention ) , par conséquent
le baptême est valide lorsqu'on le reçoit non pas par violence,
mais par crainte. Il l'est également, quoi-que donné à
des personnes en état de démence ou de sommeil, mais qui
l'ont demandé pendant qu'el-les avaient l'usage de leur raison.
20 II faut la con-naissance des mystères de la religion, suivant
ce qui est dit au ch. IV, n. S. 3° II faut la douleur d'a-voir péché;
mais ici l'attrition suffit sans être ac-compagnée de la charité
prédominante, comme l'enseignent d'un commun accord Gon., Can.,
Sot., Suar., Val., Salm., et autres, ainsi que saint Tho-mas (?), qui dit
: « A.d hoc ut homo se praeparet ad «gratiam in baptismo, prseexigitur
fides, sed non » caritas, quia sufficit attritio praecedens, etsi
non » contritio (4). »
(1) Lib. VI. n. 137.
(2) Ibid. in fin. Resp. 2.
(3) In 4. d. 6. q. 1. ». 3. ad. 5.
(4) Lib, VI. a. i3g.
42?
INSTRUCTION PRATIQUE
XXIX. Enfin, les cérémonies qui doivent être
pratiquées dans le baptême, sont i° l'eau consacrée,
quand le baptême est solennel, ainsi qu'il a été dit
au n. 8. Ce serait aussi un péché grave si sans né-cessité
dinr omettait dans le baptême l'onction du saint Chrême, et
de l'huile des catéchumènes, ou bien si on taisait l'onction
avec du saint Chrême de l'année précédente,
comme disent la plupart des docteurs suivant le Can. : Si quis de alio,
dist. 4· et suivant le Rituel romain, où il est ordonné
que si l'huile bénite vient à manquer et qu'on ne puisse
pas s'en procurer d'autre, on mêle l'huile d'olive ordinaire
avec l'huile bénite, mais de manière que
celle-ci soit toujours en plus grande quan-tité.
Ainsi donc, si pour avoir de l'huile nouvelle il faut attendre pendant
un temps considérable (par exemple dix ou onze jours), alors on
peut donner le baptême sauf à suppléer l'onction plus
tard : on le peut même lorsqu'il n'y a pas une absolue nécessité
: « Cum propter aetatis imbecillitatem ( dit le Rituel »en
parlant des petits enfants) infinita pêne peri-» cula
illis impendant. » Mais lorsqu'il n'y a pas né-cessité
ou quelque autre cause grave, et que l'on peut se procurer l'huile
dans l'espace de temps dont nous avons parlé, on doit différer
le baptême (1).
XXX. 2° II faut que le baptême soit donné
dans l'église ; c'est par conséquent un péché
grave de le donner dans une maison particulière. Il faut cepen-dant
faire exception, i° lorsque l'enfant est fils d'un roi ou d'un prince,
suivant ce qui a été dit au n. i8. 2° Si l'enfant ne
peut être transpoité à l'église sans exposer
ses parents à l'infamie ou à quelque au-
???? LES CONFESSEURS.
421
tre grave inconvénient. Dans ce cas Gob., Jourd. et Lacroix
disent qu'il peut être baptisé dans la mai-son et qu'il peut
l'être solennellement, 5° Lorsqu'il y a un danger de mort imminent
pour le petit en-fant, par exemple, lorsque la mère est délivrée
avec beaucoup de difficulté,-ou lorsque l'enfant est venu au monde
sans pousser des cris, ou bien s'il est né pendant le septième
ou le huitième mois (1) ; mais dans ce troisième cas si l'enfant
conserve la\ie, ort doit suppléer les cérémonies de
l'église, comme dit saint Thomas (2) suivant le ch. 1 : «
De sacram, non »itei\» , etcelasous peine de faute grave ,
comme le disent Pign.,.Lacroix, et Aversa (3),contre Pasq. Si l'on vient
à découvrir que le baptême administré est nul,
devrait - on renouveler toutes les cérémonies? Plusieurs
auteurs, tels que Suar., Bon , Bus. etc.,, disent qu'on ne le doit pas;
mais l'affirmative est soutenue par saint Anton., Castr. et les Sal m.,
etc. Ces deux opinions sont également fondées, et l'on doit
par conséquent suivre de préférence la seconde comme
moins chanceuse (4)· Le Rituel avertit en-core les curés
de tâcher, autant que possible, qu'on ne donne pas aux enfants des
noms ridicules ou des noms de faux dieux ou d'idolâtres, mais
des noms de saints. 11 faut remarquer enfin que le re-gistre des baptêmes
fait pleine foi devant tous les tribunaux; c'est pourquoi le Rituel ordonne
encore aux curés de prendre note du jour et de l'heure de la naissance,
des père et mère de l'enfant et des
(1) Lib. VI. ?. 14a,
(2) 3. p. q. 75. a. 3. ad. l.
(3) Lib. VI. ?. 144.
(4) Ibid. V. ad 6. si baptismus.
422
INSTRUCTION PRATIQUE
parrains. Us doivent noter aussi si le baptême a été
administré sous condition ou sans les cérémonies,
et si l'enfant a été exposé (i ) et l'endroit où
il a été trouvé exposé. 3OI1 faut des parrains.
Nous en par-lerons dans tout le paragraphe suivant.
"§ III. Des parrains et de leurs fonctions.
5i. Obligation des parrains, ??. Qualité du parrain.
35. Dans quels cas les parrains el les baptisés contractent-ils
un ? lien de parenté ? 54· Si les parents, etc·.
55. Si les parrains doivent être désignés.
56. De quel sexe, etc.
?>?. Quels sont ceux à qui il est défendu de ser-vir
de parrain ?
58. Quand y a t-il péché de la part du curé en
cette matière ? ·
XXXI. On appelle parrains ceux qui tiennent les enfants sur les
fqnts baptismaux, et qui les prennent sous leur protection. C'est pourquoi1
ils doivent les inslfuire dans la science de la religion et des usages
lorsque d'autres personnes ne se chargent pas de ce soin. Du reste, saint
Thomas (2) dit que les par-rains peuvent ordinairement
présumer que les enfants sont suffisamment
instruits par leurs pa-rents (3).
XXXII. Les Salm., Laym., Sanch., Nav., en:., disent que, pour
être parrain , il faut avoir l'âge dé-.
(1) Lib. VI. ?. ?45. -
(a) N. 147·
(5) 5. p. q. 67. a. 8.
POUR LES CONFESSEURS.
terminé. Lacroix dit avec raison qu'il faut avoir ac-, compli
sa septième année; il faut de plus, i° l'usage de la
raison; 2° être baptisé; 5° avoir l'intention de servir
de parrain ; 4° tenir l'enfant pendant qu'il re-çoit le baptême,
soit par lui-même, soit par un pro-curateur, ou le prendre des mains
de celui qui lui administre le baptême. Pour ceci,. l'attouchement
moral ne suffit pas, iî faut encore l'attouchement physique,suivant
l'opinion de Sanch., Cast., Bon.; Sâlm., etc., et d'après
la déclaration de la sainte congrégation (?); 5° que
le parrain soit désigné par les parents ou au moins par le
curé ; mais le cure ne peut pas (du moins cela n'est pas permis
) changer le parrain qui aurait été désigné
par les pa-rents (a).
XXXIII. On demandé i° si, par le baptême particu-lier,
ils'établit un lien de parenté tant du côté
du bap-tisé que dé celui du parrain. A l'égard dû
baptisé, cela ne fait pas de difficulté; mais, à l'égard
du parrain, la plupart des auteurs professent la négative : tels
sont Sanch.,Cast., Bon., Tourn.,Salm.,etc. (contre Suar., Laym., etc.),
parce que, d'après le conc. de Trente,sess. 24· c. 2,e?ere/*.,lelienn'atteintque
ceux' qui tiennent sur les fonts sacrés ( de sacrofonte susci-piant)
, et ces fonts n'ont été institués que pour le baptême
solennel, et non pour le baptême pri-vé (?). On demande-2°
si ce lien atteint celui qui sert de parrain dans un baptême administré
sous condition. On répond à cela que, s'il ne s'élève
sur le premier baptême qu'un doute négatif, il est in-
(i) Lib. VI. ?. 148. (a) ?. 146. (3) ?. ?49·
424
INSTRUCTION PRATIQUE
contestable que le parrain s'engage, parce que, lorsqu'on
ne peut avoir aucun indice de la validité du premier, la présomption
reste en faveur de la validité du second. Il en est autrement si
le doute qui s'élève sur le premier est un doute positif,
c'est-à-dire une raison de présumer qu'il a été
valable. Voir Sanchez, Diana et Renzi (1). On demande 5° si l'on s'engage
lorsqu'on tient en baptême un enfant à In place d'un autre
que l'on croyait tenir; Sanch., Tourn., etc., pro fessent la négative,
suivant le c. 2, decogn. spir., où il est dit que la femme qui,
par erreur, tient l'enfant de son mari, « non » privatur jure
petendi debitum. » Mais c'est avec plus de raison que Ponz.,
Castr. et autres soutien-nent l'affirmative dans tous les cas où
le parrain n'aura pas fait connaître expressément quel est
l'en-' fant qu'il entend tenir. De mon côté, je partage
cette opinion, et je réponds à ceux qui opposent le texte
précité, que, si, par cette disposition, la loi permet [petendi
debitum ), c'est parce qu'il n'était pas juste de priver
l'épouse de son droit , alors qu'elle n'avait aucune faute.à
se reprocher; tandis que cette raison-là n'est pas applicable à
notre es-pèce (s). On demande 4° lorsqu'un individu tient un
enfant au nom d'un autre, quel est celui des deux qui contracte le lien
de parenté? Quelques uns prétendent que c'estle procureur.VoirSoto,Conc.
et Toi.; d'autres soutiennent que ce n'est ni le procureur ni le parrain
; voirFill., Sa, etc. ; mais l'opinion la plus commune et la mieux fondée
est celle de Sanch., Castr., Fagn., Nav., Tourn., Lacroix et autres,
(1) N. I5J.
(2) N. i5a.
POUR LES CONFESSEURS.
ainsi que Ponz (lequel rapporte encore une déci-sion de la S.
C): cette opinion est que le parrain seul contracte le lien d'affinité,
parce que, d'après le cane, de Trente, celui qui a été
désigné par les parents pour tenir l'enfant sur les fonts
baptis-maux, est celui qui contracte le lien d'affinité; peu importe
que"le parrain soit absent, car, d'après le principe de la.loi,
« qui per alium facit, per se » facere videtur (?)·
»
XXXIV. On demande 5° si les parents qui bapti-sent leurs propres
enfants ou les retirent du bap-tême, comme fonj les parrains, se
créent un ob-stacle à la réclamation de ce qui leur
est 3û. Il est certain qu'ils necontractentpascet engagement lors-qu'ils
baptisent dans un cas d'extrême nécessité, comme l'enseignent
laplupartdesdocteurs, ainsique S. Thomas (2). Il est certain 2° que
les parents qui baptisent eux-mêmes leurs enfants, sans qu'il y ait
nécessité, commettent un péché grave (3). Il
est cer-tain 3° que les parents qui les baptisent eux-mêmes par
ignorance, ne" contractent pas d'engagement, (Voir le c. 2, De cogn.^ spiri.).
La question se réduit donc à savoir si les parents s'engagent
lorsqu'ils baptisent eux-mêmes leurs enfants, sans y être contraints
par la nécessité. Sanch., Petr., Conc, etc., ainsi que saint
Thomas (4), soutiennent l'affirmative, par la raison que la même
loi qui établit le lien d'affi-nité entre celui qui baptise
et les parents de celui qui est baptise, établit aussi le même
empêchement
(1) N. i53.
(2) Suppl. q. 55. a. 1. ex c. ad Limina. c. 3o, a. 1. (5) Ex
c. de his. 6. q. 1.
(4) Suppl. q. 56. a. 1.
INSTRUCTION PRATIQUE
à l'égard des parents qui, sans nécessite, baptisent
eux-mêmes leurs enfants. Mais l'opinion de Suar., Ponz., Conc, Viva,
Salm., etc., et de la Glôs.'au ch. 2, Viva. debitum, qui professent
la négative, paraît assez fondée, parce que cela ne
se trouve exprimé dans aucun texte de loi, et qu'on ne peut pas
infliger une peine qui n'est pas exprimée « in jure, »
comme tous les auteurs en conviennent. Ainsi, il est dit dans le même
texte, que les époux non sunt separandi, et on ajoute : nec alter
alteri debitum debet subtrahere. En vain dirait-on que le texte parle de
rendre et non pas de récla-mer ; car si l'un n'avait pas le droit
de réclamer, l'autre ne serait pas obligé de rendre (1).
XXXV. On demande 6° si les parrains ont besoin pour contracter
le lien de parenté, d'être désignés, et par
qui ils doiventl'être; à cet égard, le conc. de Trente,
sess. 24, ch. 2, a établi :«Si alii ultra desi-»gnatos
baptizatum tetigerit, cognationem spiritua-» lem nullo pacto contrahent.
» II y a doute sur la question de savoir si, lorsque l'enfant est
tenu par plusieurs parrains, sans qu'aucun ait été désigné,
ils contractent tous le même engagement. Quelques auteurs, tels que
Lacroix, Gob., Dian., etc., disent que, dans ce cas, aucun ne s'engage;
quant à moi, je crois devoir adopter l'opinion contraire, qui est
celtedeNav.,Laym.,Gastr., Bon., Salm., Oliv., etc., ainsi qu'une déclaration
de la Sainte Gongrégation, laquelle opinion veut que tous s'engagent
en même temps ; parce que, quoique le concile veuille que le curé
baptise avec les parrains qui ont été désignés
par les parents, cependant il ne condamne pas l'an-
(1) Lib, VI. ?. ?5?.
POUR LES CONFESSEURS.
427
cien droit qui résultait du ch. fin. de cogn. Spir. in 6, qui
établit l'engagement pour tous ceux qui tou-chent l'enfant. Voici·
les.expressions : « Si tamen «plures accesserint, spiritualis
cognatio inde con-» trahitur; » et cela a lieu, suivaut Castr.,
Conc, Salm., etc., contre Lacroix, lors même que les par-rains désignés
sont présents. Mais si l'un des par-rains désignés
a déjà touché l'enfant, les autres, qui n'ont pas
été désignés, ne contractent pas de lien d'affinité,
ainsi que l'a établi le concile.-Si les pa-rents ont désigné
plus de deux parrains ^ et que tous aient touché
l'enfant ( en quoi le curé péche-rait gravement, s'il
les admettait tous, contre le précepte du concile), Suar.,
Sanch. et Lacroix di-sent avec juste raison que dans ce cas s'ils touchent
successivement, ce sont les deux premiers seulement qui s'engagent; mais
s'ils touchent tous en même temps, d'après l'opinion de Suar.,
aucun d'eux ne s'engage, mais, ~au contraire, ils s'engagent
tous suivant l'opinion plus raisonnable de Sanch., Ponc, Castr., Salm.,
Lacroix, etc., parce que le concile n'a abrogé le droit antique
que pour le cas où, après les deux premiers désignés,
les autres qui ont tou-ché n'étaient pas désignés,
mais non pas pour le cas où ils étaient désignés,
aussi bien que les deux pre-miers; cela doit avoir lieu, à plus
forte raison, comme l'a déclaré la S. C., lorsque,
parmi plu-sieurs parrains désignés, on ne sait pas
quel est celui qui a touché le premier (1).
XXXVI. Il faut remarquer i° que le concile a établi que
l'un des deux parrains devait être du sexe masculin et l'autre du
sexe féminin; ce serait par conséquent une faute de
désigner
(1) Lib. ?. ?54.
42?
„ INSTRUCTION PUATIQUE
deux hommes ou deux femmes. Je pense même, avec Bon. et autres
(contre Sancli. et Lacroix), que ce serait un péché mortel
si les deux parrains étaient d'un sexe différent de celui
de l'enfant, parce que ce serait multiplier les parentés contrairement
à l'intention du concile, et, à Cet égard, la matière
est grave. Si l'on ne désigne qu'un seul parrain , il importe peu
qu'il soit d'un sexe différent, comme le disent avec raison Suar.,
Fill., Gob. et Av. (con-tre Laym.) ; car le concile dit : « Sive
vir. sive mu-» lier (i). »
XXXVH. Remarquez 2° que le rôle de parrain ne peut
pas être rempli i° par les religieux et les religieuses et par
les réguliers d'un ordre quelcon-que, comme le déclare le
rituel romain ( tit. de pa-trinis, in baptismo), où il est dit :
« Admitti non de-» bent monachi, vel sanctimoniales",neque
alii cnjusvis » ordinis regulares a seculo segregati ; » cela
s'entend pour tenir un enfant en baptême et non pas pour bap-tiser.
2° II est défendu aux hérétiques, aux apostats
et aux personnes infâmes; par conséquent, ceux-là qui
pèchent appellent des hérétiques pour parrains de
leurs enfants; tandis que les catholiques, au contraire,
peuvent très bien tenir en baptême les enfants des hérétiques,
pourvu qu'ils ne le fassent pas pour approuver leur rite. Voir Laym., Lacroix,
Gob., etc. (2). 5° II est défendu à un époux de
ser-vir de parrain à son épouse et aux pères de servir
de parrain à leurs enfants, hors du cas de nécessité.
4° Les parrains ne peuvent pas être plus de deux ; car le concède
Trente dit, session 24, c. 2. de réf.,
(?)- ?. i5S. W N. i56.
POUR LES CONFESSEURS.
«que le parrain soit seul, » « Sive vir, sive mulier,
» vel ad summum unus et una. » II n'est pas défendu
à deux époux de tenir ensemble l'enfant d'un autre, comme
l'enseignent la plupart des auteurs, ainsi que S. Thomas (1), qui dit :
«Nihil prohibet, quin vir, et »uxor sùnul aliquem de
sacro fonte levdrent (2). »" XXXVIII. Remarquez 3° que le curé
commet mi péché lorsqu'il rejette les parrains désignés
par les parents ou qu'il admet des parrains qui n'ont pas été
désignés par eux ; 20 lorsqu'il en admet plus de deux; 5°
lorsqu'il baptise sans parrain (3). Cependant, pour le baptême privé,
on peut se pas-ser de parrains, suivant l'opinion la plus commune; mais
du reste on peut en prendre si l'on veut (4).
TROISIÈME POINT.
Delà confirmation. .
3g. De la matière éloignée.
40. Si le chrême doit être béni et si les
prêtres peuvent, etc.
41. De la matière prochaine ; et si l'on doit con-sidérer
comme matière l'imposition des mains que fait l'évêque,
etc.
42. Si, avec la main droite ou avec un instru-ment, etc.
43. De la forme. 44· Du ministre.
(1) lu 4· dUt. !\1. q. 1. a. 5. q. 2. ad. 4·
(a) Ub. VI. n. i59.
(?) ?. ?54. V Sed notandum.
(4) ?. >47·
43?
INSTRUCTION PRATIQUE
45. Si elle peut être appliquée par
un prêtre simple, et si celui qui la reçoit est étranger.
46. De l'obligation d'administrer la confirmation. 47·
De l'obligation de la recevoir.
48. Si celui qui prend les ordres, etc.
49. Si, pour les insensés et les enfants, etc.
50. Des cérémonies.
51. Du parrain.
52. Des autres cérémonies.
55. Des effets de la confirmation.
XXXIX. 11 est de foi que la confirmation, ou le saint chiême,
est un véritable sacrement, comme cela résulte du décret
d'Eugène IV, dans son Instruction aux Arméniens, et du concile
de Trente, sess. 7, cap. 1, et cela est confirmé encore par la tiadition
des Saints-Pères. Occupons-nous donc maintenant de ce qu'il importe
de savoir au sujet de la matière, de la forme, du minisire, de la
nécessité et des cérémonies de ce sacrement,
et i° parlons de la matière : la matière éloignée
du sainte chrême , est le ehrême composée de baume et
d'huile d'o-live, que bénit l'évêque pour ce sacrement,
à la différence de celle dont .on se sert pour le baptême
et pour les infirmes , suivant la distinction d'Inno-cent III, au ch. cum
?venisset unie, de sacr. unct. Mais l'huile qui sert pour ces deux derniers
objets ne peut pas servir pour le premier, suivant l'opinion de Suar.,
Laym. et Henriq. ; mais Bellarm., Castr., Bon., Bar., professent avec raison
une opinion contraire. Il est incontestable que l'huile ? est né-cessaire
de necessitate sacramenti; quant au bau-me, il est exigé de necessitate
prœcepti; mais est-il nécessaire pour la validité dû
sacrement ? C'est ce que nient avec raison Sot., Nav., Juén., le
Conti.
POUR LES CONFESSEURS.
431
de Tourn., etc., en se fondant sur le e. pastoralis, de sacram, non
iter., où Innocent III répondit à ceux qui lui
demandaient si la confirmation pouvait être· validement administrée
avec de l'huile seule : « Ninil esse iterandum, sed
caute supplendum, » quod incaute fuerit prœtermissum.
» Cependant l'affirmative est plus communément soutenue par
Bellarm., Gon;, Petr.·, Conc. et autres, ainsi que par saint Thomas,
et le catéch. romain, ?. 7, et cela est confirmé, premièrement,
par le ch. unie, de sacr. unit. , ou le pape appelle
ce sacrement : « Crismazione » à cause du chrême
qui est com- v posé d'huile et de baume, et non pour
un autre motif. Gela est encore confirmé par le décret d'Eu-gène
IV, approuvé dans le -concile de Florence, où il a été
déclaré que la matière de la confirmation était
crisma confectum ex oleo et balsamo. Hab. pré-tend que ce décret
n'est pas émané du concile, parce qu'il fut rendu après
que le concile était déjà dissous par le départ
des Grecs · mais Petr. répond avec raison i° que
les Grecs qui se retirèrent avaient consenti à
ce que le concile continuât ses travaux pour unir les Arméniens
à l'Église. 2° Que ce décret fut reçu dans
toutes les Eglises catholi-ques. Mais, pour faire une réponse encore
plus dé-cisive, nous dirons que, lorsque le pape enseigne les dogmes
et prend la parole en qualité d'organe de l'Iiglise, toutes les
définitions qu'il donne sont infaillibles par elles-mêmes,
ainsi que nous l'avons prouvé dans notre ouvrage. Quant au texte
que l'on oppose, il faut répondre que le pape entend dire seulement
dans ce passage : · Nihil iterandum, » parce que, suivant
la Glose : « Non dicitur itéra-
43 9
INSTRUCTION PRATIQUE
«tumquod prius actum non fuit. »Du reste la pre-mière
opinion ne manque pas de fondement, comme on peut le voir par le décret
de la sainte congréga-tion du concile, présidé,par
Ferr. Òn s'accorde à dire que, lorsqu'il n'y a pas de baume
dans le saint chrême, il est douteux que le sacrement soit valide,
et que, paT conséquent, on doit le renouveler sous condition. Du
reste, peu importe la contrée d'où le Baume peut être
tiré.
XL. Le saint chrême doit être béni par l'évêque
pour accomplir la nécessité du précepte; mais on de-mande
si cela est exigé aussi par la nécessité du sa-créaient.
Conc., Petr., Salin., etc., ainsi que saint Thomas, professent l'affirmative,
en so fondant sur le décret d'Eugène IV déjà'cité,
dans lequel il est dit que la matière du saint chrême : «
est » chrisma ab episcopo benedictum. » Mais, en théo-rie,
l'opinion la plus fondée est celle de Cajet.,Got., Barb., Juén.,
Tourn., etc., qui soutiennent la né-gative, parce que, de même
que le pape peut con-fier le pouvoir d'appliquer le saint chrême
à un sim-ple prêtre (comme nous le dirons au n. 44) > de même
aussi il peut lui conférer le pouvoir de le bénir. Le décret
d'Eugène IV ne prouve- que la nécessité du précepte.
Nous avons dit en théorie, parce qu'en pratique on doit, en ce qui
con-cerne la validité du sacrement, suivre sa première opinion
(?) ; il est ordonné en vertu d'un précepte grave, au can.
litteris, de consecr.t dist. 3 , de ne pas se servir du chrême bénit
avant une année. Mais, pour ce précepte del Église,
le pape peut accorder
(?) LiL. VI. n. i6£
POUR LES CONFESSEURS.
une dispense, comme l'a accordé en fait le pape Benoît
XIV, dans sa constit. 10 (1) ; c'est pour-quoi on s'accorde à dire
que le saint chrême appli-qué avec du chrême vieilli
est valable (2).
XU. Pour la matière prochaine du saint chrême, il faut
: i° l'onction sur le front, 20qu'elle soit faite en forme de croix,
3° par la main du ministre lui-même. Ces trois choses tiennent
à l'essence du sa-crement (?) ; mais comme il dit dans le pontifical,
qu'avant de faire l'onction, I'évêque doit dire l'o-raison
« Extensis manibus versus confirmandos , » plusieurs auteurs
modernes, tels que Merbes, Tournely , Genet , Habert, Juénin , Concina
, Gotti, etc., prétendent que cette extension des mains influe sur
la valeur du sacrement, se fondant sur ce qui est dit au c. 8, des Actes
des Apôtres :
« Tunc imponebant manus super illos, et accipiebant » Spiritum
sanctum. » Mais celte opinion est com-battue par la plupart"des auteurs,
tels que Gonet," Suarez, Laymaun, Petrocot., Frassen, Antoine, Holzmann,
Viva, Lacroix, ainsi que par le père , Berti, qui défend
très longuement notre opi-nion (4). Nous pensons que l'extension
des mains que fait I'évêque en appliquant le saint chrême
est .suffisante; et cela est confirmé par le décret d'Eu-gène
IV, où il est dit : « Loco manus impositionis » dari
in «cclesia confirmationem, » et plus claire-ment encore par
le ch. 1. § « Per frontis, de sacr.
« unct., » où le pape dit : t Per frontis chrismatio-
(1) Vide-in bullar, lom. I. p. 28.
(2) Ibi. VI. Cit. n. i65.
(3) Ibid. ?. ?64.
(4) beiii. de Ihcol. dise. 1. X-XXÎt. c. 4· Desp.
ad 1.
T. xxiv,
28
INSTRUCTION PRATIQUE
» nem manus impositio designatur, quae alio nomine «confirmatio
dicitur, » Donc le pape reconnaît que dans l'application du
saint chrême il y a une imposi-tion de mains. Ensuite le pape ne
dit pas « super confirmandos , » comme il aurait dû le
dire s'il avait voulu parler de l'imposition, de même qu'il dit,
en parlant de l'ordination : « Tam pontifex quam «sacerdotes,
tenent manus dexteras extensas super «illos; » au lieu qu'il
dit: «Versus confirmandos, » cè qui ne signifié
simplement que la cérémonie or-dinaire que l'Eglise commande
à ses ministres lors-qu'ils récitent les orjisons; car, étendre
les m.iin-,, Ce n'est pas autre chose que les ouvrir et les soule-ver eu
haut; d'où il résulte que l'opinion contr.iiie est dénuée
de tout fondement solide; c'est pour-quoi on peut seulement la conseiller
comme étant plus sûre; d'autant plus que Benoît XIV,
dans sa lettre encyclique, déjà citée (^ ?), a déclaré
que l'opi-nion que nous professons peut être suivie dans la pratique
; car, en traitant la question qui nous occupe : il dit : « Unicuique
licet sequi partem quae s magis ei placuerit. » Voulant dire par
là, que l'on peut suivre l'opinion affirmative comme plus sine en
ce qui concerne la validité du sacrement, mais que l'on peut suivre
aussi notre opinion parce qu'elle est moralement certaine; car autrement
en traitant de la matière du sacrement, il n'aurait pas dit qu'il
était permis de suivre l'opinion néga-tive, s'il ne l'avait
pas crue moralement certaine. Du reste , l'évêque qui voudrait
la mettre en pra-tique pourrait, comme dit Hahert, distribuer ceux qui
doivent être confirmés en diverses classes,
(1) litt. encycli. ad épis. rit. Graeci. I. mart. 17S6.
POUR LES CONFESSEURS.
435
et réciter ensuite l'oraison, sur chacune de ces classes (i).
XLII. L'évêque doit faire l'onction avec le pouce de la
main droite, et par conséquent il commet-trait un péché
s'il le faisait avec celui de la main gauche; et même, d'après
l'opinion commune, ce serait un péché grave. Mais Escobar,
Trullench, Nugnez, Dicastillo, Diana et Tamburini pensent que ce ne serait
qu'un péché véniel ; et il faut con-venir qu'on n'a
aucune raison de regarder cette ma-tière comme grave; c'e,st pourquoi
ces auteurs "di-sent avec raison, que l'évêque pourrait valablement
faire l'onction avec la main gauche s'il avait la droite paralysée
(2). Quelques auteurs ont émis l'opinion que le saint chrême
pouvait être appliqué (comme peut l'être l'extrême-onction)
par le moyen d'un instrument. Cette opinion est justement re-poussée
parla plupart des auteurs; car, ici il man-querait l'imposition des mains,
qui est nécessaire, tandis qu'elle ne l'est pas pour l'extrême-onction.
Quant à la quantité du saint chrême, on n'exige que
la quantité qu'il faut pour oindre le front en for-mant le signe
de la croix. VoirSuarez, Gastropalao, Bonaeina et les Salm. (3).
XLIII. 2° A l'égard de la forme, il y a quatre opinions
différentes : i° les uns, voulant que la seule extension des
mpins que fait l'évêque avant l'onc-tion soit l'unique matière
du saint chrême, disent que la seule oraison récitée
alors par l'évêque sert de forme; 2° d'autres, voulant
que la première
41) Lib. VI. ?. ?64· V. Quser. (a) ?. ?65. (?) ?. ?66.
436
INSTRUCTION PRATIQUE
imposition des mains ainsi que l'onction soient des matières
partielles, disent que la forme se com-pose tant de l'oraison mentionnée
que des paroles prononcées par l'évêque pendant l'onction
rsavoir: « Signo te signo crucis , et confirmo te chrismate «salutis,
in nomine Patris, etc. ; a ?" d'autres pré-tendent que, quoique
les matières soient paitielles (ainsi que nous l'avons dit), la
forme est une, c'est celle qui est prononcée dans l'onction ; 4°
^ autres, soutenant avec raison que l'onction est la matière totale
et qu'elle contient, comme nous l'avons dit, l'imposition des mains,
disent que la forme to-'tale est composée des paroles
« Signo te, etc. » qui l'accompagnent. Voir la plupart des
docteurs, ainsi que saint Thomas (1), et le Catéchisme romain (de
confirm, n. 12), où il est· dit que les doutes sur ce sujet
sont suspendus par l'autorité de l'Eglise catho-lique : «
Non patitur nos ea de re quidquam dubi-»tare. » C'est ainsi
que Eugène IV l'a déclaré en fait en disant dans son
décret : « Forma autem est, » signo te signo crucis
ut, etc. (2). Le docteur an-gélique explique encore que, par l'expression
signo te, on veut dire que celui qui reçoit la confirmation est
marqué comme soldat de Jésus-Christ ; en di-sant :
confirmo , on marque qu'il reçoit la force de combattre ; enfin,
par les mots : « In nomine pa-» tris, etc., on désigne
celui de qui provient cette force. Ainsi donc, les mots : signo te
; les mots : confirmo, et les mots: in nomine patris, etc. (?), tien*
nent à l'essence du sacrement. La forriie grecque
(i) In 4· à. 7· ? >· a· 3·
9·
(a) Lib. VI, ?. ?67.
(3) ?. ?63. V. Hinc. not.
POUR LES CONFESSEURS.
est autrement Conçue; la voici: « Signa sunt dona »
Spiritus Sancti. » Cette forme est également va-lable, comme
l'a déclaré Urbain VIII (?).
XL1V. 5° Quant au ministre de la confirmation, il est certain que
c'est l'évêque seul qui est le minis-tre ordinaire pour ce
sacrement, ainsi que l'a déclaré le conc. de Trente, sess.
7, ch. m :« Si quis dixerit «sanctae confirmationis ordinarium
ministrum non «esse solum episcopum, sed quemvis simplicem sa-«cerdotem,
anathema sit. » Mais on convient que le pape peut autoriser un simple
prêtre à administrer ce sacrement, comme.l'a déclaré
Benoît XIV, dans sa constitution, « Eo quamvis, » du
24 mai 174*>· C'est ce qui fut d'abord mis en pratique par saint
Grégoire-le-Grand (2). Quant à la question de sa-voir si
les évêques peuvent aussi déléguer à
de sim-ples prêtres le pouvoir de donner la confirmation, le même
pape, Benoît XIV, dit; dans son ouvrage de synodo (3), que c'est
là une question très contro-versée où l'on
trouve des raisons plausibles de part et d'autre ; mais, à la fin,
il conclut avec raison que cette faculté est aujourd'hui réservée
au souverain pontife , tant d'après l'usage que d'après une
décla-ration de Nicolas Ier. Malgré qu'il entre dans l'or-dre
des prérogatives episcopales de confirmer les actes sans avoir besoin
de consulter le pape, néan-moins la délégation de
l'exercice de ce sacrement est un acte qui appartient, non pas à
l'ordre , mais à la juridiction, et la juridiction peut être
limitée par le pape/comme elle l'est en fait, dans la faculté
(1) Lib. VI. ?. ?59.
(•2) ?. i7O.
(5) Tom. 1. I. VII. e 8. ?. 5>
INSTRUCTION PRATIQUE
d'accorder des dispenses pour les cinq vœux qui sont réservés
au saint siège apostolique.
XLV. Il faut remarquer i° que l'évêque qui ad-ministre
la confirmation à des diocésains qui ne sont pas dans son
diocèse; commet un péché grave et encourt la suspense
de ses fonctions marquée dans le pontifical ; lors même que
ces diocésains se-raient les siens, ainsi que la déclaré
la S. C. du con-cile de Trente, sess. 6, ch. v; s'il 'donnait la confir-mation
dans son diocèse à des paroissiens d'un au-tre diocèse,
ce serait là un acte illicite en lui-même, mais l'on présume
dans ce cas (suivant l'usage reçu) le consentement interprétatif
des autres pourvu qu'aucun d'eux ne s'y soit positivement op-posé
: voir Castr., Laym., Sa, Lacroix, etc. Cela doit avoir lieu à plus
forte raison lorsque l'évêque doit confirmer un ordinand qui
porte le démissoire de son évêque, parce qu'alors on
doit présumer son consentement, même s'il est présent,
comme le disent les auteurs précités ainsi que plusieurs
autres (1).
LXVI. Il faut remarquer 2° que l'évêque commet un
péché grave (suivant l'opinion commune), lors-qu'il dilfèFe
pendant long-temps de donner la con-firmation à ses diocésains;
par exemple, pendant huit ou.dix ans, comme le disent Lacroix et Dicast.
; que l'évêque doit par conséquent-faire des tournées
fréquentes, au moins dans les principales localités de son
diocèse, à moins que cela lui soit morale-ment impossible,
et il doit le faire à ses irais, à moins qu'il ne se soit
établi un usage contraire ; voir Castr. et les Salin. Bonac.
dit que l'évêque
Ii) N. 17a,
POUR LES CONFESSEURS.
doit également donner la confirmation aux mori-bonds que lui
en adressent la prière ; mais Lug. r Ehcob., Lacroix, Salm., etc.,
disent avec raison qu'il n'y est pas obligé , soit à cause
du grand dérange-ment que cela lui causerait, soit à cause
de l'usage contraire qui est établi (1).
LXVII. 4° En ce qui concerne la nécessité de ce sacrement,
quelques auteurs disent que chacun est obb'gé de recevoir la confirmation,
parce que s'il ne le faisait, il eu résulterait pour lui un grand
mal, car il se priverait de la force que donne ce sacre-ment pour se préserver
de la tentation. Voir saint Bonaventure, saint Anton'in, Merbes , Tournely,
Coneina, Hab'jrt, etc. Mais cette obligation grave esr rejetée par
Soto, Navarre , Suarez, Laymann, Frassen , Wigandt, Castropalao, Anaclet,
Salin., Lac,Taix,etc., parce quel'on ne peut pas prouver que cela soit
ordonné par aucun précepte grave, soit naturel, soit positif.
C'est aussi l'opinion de Soto, qui, en parlant de l'extrème-onction
et de la con-firmation (2), dit : « Neutrum est simplicilurneces-»sarium
nec est praeceptum de isto vel.de illo re-«cipiendo. » C'est
encore ce que dit saint Thomas (?), qui pi étend que la confirmation
est nécessaire, non pas précisément pour le salut,
mais pour la perfec-tion du salut; c'est pourquoi dans un autre pas-sage
(4) il certifie positivement qu'il serait dange-reux de mourir sans avoir
reçu ce sacrement..* Non » quia damnaretur (nisi forte propter
contemptum)
« ?. ?75.
fa) ?? 4· <1· 17· ?· *· ?·
°· ?· 1*
(3) ?? 4· d. 71· <{· ?· ?·
?· ? 9·
(4) 5. p._q. 7a· "· 8. ad. ?.
44°
INSTRUCTION PltATIQl'E
» sed quia detrimentum salutis pateretur.?» Enfin, cela
est encore confirmé par le Catéchisme romain,§ 17, où
il est dit, que l'Église désire, optât, que tous les
fidèles baptisés reçoivent la confirmation, et le
vœu de l'Église n'est certainement pas un précepte. Néan-moins
tous les auteurs s'accordent à dire que l'on commettrait un péché
grave, i°*si, croyant ferme-ment que le défaut de ce sacrement
doit faire per-dre la grâce divine, on négligeait de se le
faire administrer; z" si par l'effet des circonstances on devait
causer un grand scandale en négligeant 'de prendre ce sacrement;
5° si on le négligeait par dé-dain ; mais, suivant Hab.
et Conc, il n'y a pas dé-dain , lorsque c'est par paresse qu'on
a négligé ce sacrement ; il y aurait dédain au contraire
si on le négligeait parce qu'on en fait peu de cas ; ainsi que disent
Suai*., Laym., Conc, Roncaglia,Salm., etc., d'après ce que saint
Thomas enseigne dans un cas semblable rapporté au chap. Ill,
?. 54 (?)· Mais remarquez qu'après avoir écrit c«ci
je trouve dans la bulle de Benoît XIV, difel. mem., dans la bulle
Etsi pastoralis , etc. (torn. I, in Ordine 5j,
§ ?, ?. 4) , qu'il y est déclaré , que ceux qui reçoivent
la confirmation de la main d'un prêtre grec ne sont pas censés
l'avoir reçu ; c'est pourquoi le pontife ajoute que les évêques
doivent avertir ces person-nes qu'elles commettront une faute grave si
elles refusent ou si elles négligent de la,recevoir de la main des
évêques lorsqu'elles en ont la faculté.
Voici les expressions dont il se sert : « Monendi sunt » ab
ordinariis locorum, eos gravis peccati reatu «teneri, si cum possunt
ad confirmationem acce-
(1) Lib. VI. n. 181 et 183.
POUR IES CONFESSEURS.
^?
«dere, renuunt, ac negîiguiit. » De tout cela ? ré-sulte
que l'opinion de ceux qui prétendent que l'obligation de recevoir
la confirmation n'est pas une obligation grave, n'est pas aujourd'hui la
plus probable.
XLVIII. Bon., Toi., Renz., etc., disent, que l'on commet un péché
grave lorsqu'on prend la pre-mière tonsure sans avoir auparavant
reçu la confir-mation ; à cause du conc. de Trente, sess.
il·, ch. IV, où il est dit: « Prima tonsura non initientur,
qui «sacramentum confirmationis non susceperint. » Renzi rapporte
encore une déclaration de la sainte Congrégation, où
il est dit, que celui qui a été tonsuré avant de recevoir
le saint chrême, étant promu irrégulièrement,
ne peut pas prendre les autres ordres ni accepter des bénéfices
sans une dispense du pape. Mais cette opinion est générale-ment
rejetée par Soto , Castro., Az., Esco., Val., Salm. et Cab. , ainsi
que Nav. , Suar., Con., Dica-, etc., ces auteurs en disent de même
pour les ordres. Us répondent à ceux qui citent le concile,
que les préceptes simplement impératifs n'imposent pas par
eux-mêmes une obligation grave , lorsqu'il ne s'y joint pas d'autres
circonstances ; comme le disent Cajetan, Nava., Sa, Sair., etc. (1), et
comme nous l'expliquerons au ch. II, n. i5. Du reste il suffit que l'on
soit censé avoir reçu la confir-mation pour être dispensé
de se faire administrer le sacrement. Benoît XIV (2) rapporte que
c'est ainsi que l'a déclaré le concile des Maronites, convoqué
par ordre de Grégoire XIII.
(1) N. i85.
(2) Benedic XIV. de Synod. 1. VII. c, 9. n. 5a.
44^
INSTRUCTION PRATIQUE
LXIX, Plusieurs auteurs, tels que Bonacina, Escobar, Holzman, Salm.
(?) , etc., disent qu'il n'y a pas de faute à administrer la confirmation
aux petits enfants, parce que cela e'tait permis par l'u-sage antique,
et que c'est ainsi que le pratiquent encore aujourd'hui les Grecs, et en
Espagne, comme l'atteste Vivalde, on est dans l'usage de l'ad-ministrer
aux enfants de deux ou trois ans. Mais on ne peut plus aujourd'hui admettre
un pareil usage, car Benoît XIV, dans sa Const. 129, eo Quamvis,
§ 16, de l'année 1745 (voyez au torn. I de son bullaire) déclare
qu'il n'est pas permis main-tenant de donner la confirmation à quelqu'un
avant qu'il ait atteint l'âge de raison. Voici ses paroles : «
Nihilominus, abrogato prorsus à romana ecclesia » hujusmodi
more, consultissimis pontificum de-«cretis cautum est ut renatis
fonte baptismatis • conferretur sacramentum" confirmationis in ea so-»lum
cetati, in quà fideles intelligerent, tantum ul-ster se differre
baptismum et confirmationem, » quantum in naturali vilfi distat generatio
ab incre-» mento. » Néanmoins, ce même Benoît
XIV, plu-sieurs années après, dit, dans son ouvrage de Sy-nodo
(2), que, quoique le catéchisme déclare qu'il ne serait pas
convenable d'administrer la confirma-tion avant l'âge de sept ans;
cependant, il ne défend pas de le donner aux petits enfants dans
quelques cas. Il ajoute aussi que, par cette considération, Silv.,
Suar.? Silv., Ronç., Juenin, Gotti et plusieurs au-tres affirment
que, même avec les règlements au-jourd'hui en vigueur, on
peut donner le saint chrême aux enfants qui n'ont pas encore sept
ans
(0 Lib. VI. ». ?78.
(a) Benedi, de Syno.Jl. VII. c. 10. a. S.t
POUR LES CONFESSEURS.
lorsqu'il y a un juste motif pour le faire , comme , par exemple, si
Févêque devait rester pendant long-temps absent de son diocèse,
ou si l'enfant se trou-vait en danger de mort, ou pour tout autre motif.
A l'égard de ceux qui sont dans un état de démence
continuelle, Benoît XIV dit, à l'endroit précité,
qu'on pent, sans aucun scrupule, leur administrer la confirmation.
L. 5° Enfin, en ce qui concerne les cérémonies de
ce sacrement, il faut i° les habits sacrés, c'est-à-dire
(suivant la prescription du pontifical) la chasuble par dessus le rochet
ou par dessus le sur-plis , si l'évêque est religieux, et
de plus l'étalé et la chape blanche. L'évêque
commettrait un péché grave s'il administrait la confirmation
sans aucun de ces ornements, mais non pas s'il en avait oublié une
partie, comme disent Sporer, Renzi, Tambu-rini et Diana. 11 faut de plus
la crosse et la mître; mais, quant à la crosse, il suffit
qu'elle soit exposée dans quelque endroit, ou que le clerc la porte,
ainsi que cela est désigné dans la figure tracée sur
le pontifical. Quant à la mitre, la sainte congrégation ayant
déclaré qu'il suffisait que l'évêque portât
l'é-tole pour donner la confirmation , il n'est pas né-cessaire
qu'il ait la mître sur la tête (i).''2° II faut encore
le cierge^ et il faut que l'évêque donne le soufflet au confirmé
après avoir prononcé la for-me ; mais l'omission de ces deux
dernières condi-tions ne constitue qu'un péché vépiel
(2). 3° II faut que la confirmation soit donnée dans l'église
; mais ce n'est pas une obligation grave, comme disent la
(1) N. 184.
(a) Ibid. V. not. 11.
444
INSTRUCTION PBATIQUE
plupart des docteurs (contre l'opinion de Nugnez). Ainsi, Suarez, Bonacina
, Barbosa, Sa, Henri-quez, etc. (1), exemptent de tout faute l'évéque
qui administre la confirmation dans un lieu décent autre qu'une
église. Néanmoins, si l'évéque faisait cela
sans aucun motif légitime, je pense qu'il y aurait au moins péché
véniel, tant à cause de l'usage qui vent que ce sacrement
soit donné dans une église, comme Bonacina et Barbosa en
conviennent eux-mêmes, qu'à cause de ce qui est dit au Pontifical
: « Hoc sacramentum potest conferri minus solem-» niter quocumque
die, hora et loco, ex causa, ad ar-» bitrium episcopi. » On
dit : '« ad arbitrium, » mais en ajoutant « ex causa.
» Cependant l'évéque peut toujours confirmer dans son
oratoire particulier, comme le dit très bien Castropalao ^2). 4°
H faut que le jeûne soit observé tant par celui qui donne
la confirmation que par celui qui la reçoit, suivant le c. jejnni,
de consecrat., dist. 5, et suivant le Pontifi-cal qui porte : « Confirmandi
deberent esse jejuni. » Mais la pluparl des docteurs sVccordent à
dire que cette prescription a été reçue comme un simple
avis et non pas comme un précepte; et d'après cela on est
dans l'usage d'administrer ce sacrement', même après un repas.
Voir Layinann', Castropa., Concina, Salm., Cabassut, Lacroix, etc. De même
l'usage permet aujourd'hui de l'administrer dans un jour de fête
quelconque. Voir Stiarez, Granàdo, Busembaum , Salni. et Lacroix
(?).
LI. 11 faut 5° un parrain qui soit désigné par les
(1) Barbosa de pot. cpisc. 2. p. alb. 3. n, i3. ut Salai. 1i\ 5. c.
4· n. 3s.
(a) Lib. VI. n. 284 V. not. 3. tô) N. 184. not. 4.
POUR LES CONFESSEURS.
445
parents de l'enfant, ou, à leur défaut, par l'évêque
; et cela incontestablement, sous peine de faute grave, toutes les fois
qu'il est possible d'en avoir un ; mais, lorsque cela n'est pas possible,
il est per-mis, d'après Holzm., Gobât et Hillsunc, de confirmer
sans parrain. Quant à ce parrain , i° il ne doit y en avoir
qu'un seul, suivant l'opinion de Castropa-lao, Bonacina,Rebel, Salm, et
Busembaum (contre Tolet, qui en admet deux); et suivant ce qui a été
déterminé au ch. fin. de cogn. spir. Il est vrai que là
on a admis la même détermination que pour le baptême,
et que, pour le baptême, le concile de Trente admet deux parrains.
Mais, puisque le con-cile n'a pas permis qu'on en prît deux pour
la con-firmation, l'ancien droit reste dans toute sa vigueur. 2° Le
parrain doit avoir reçu lui-même la confir-mation, ainsi qu'il
est prescrit auch. in baptismate, 102, dist. 4j où il estait : «
In baptismate, vel chris-» mate, non potest alium suscipere in filium,
-qui «non est baptizatus, vel·confirmatus. » Ainsi que
dans le pontifical, où il est dit : « Nullus , qui non »
sit confirmatus, potest esse in confirmatione pa-» trinus (i) ; »
et cela sous peine de faute grave, at-tendu qu'il s'agit ici d'une [matière
grave, comme le dit très bien le P. Conc, ainsi que la plupart des
au-teurs^). Mais, si l'on a admis un parrain non con-firmé, Soto,
Navarre, Sa et autres disent qu'il con-tracte tout de même le lien
de parenté, parce que, d'après eux , les paroles, non potest,
du texte pré-cité, ne signifient pas que l'acte soit nul,
mais seu-lement qu'il est défendu de le faire; çetle opinion
(i) Lib. VI. n.i85.
(a) N. 186.
INSTRUCTION PRATIQUE
est également approuvée par les Sal m. et Lacroix. Mais
c'est avec plus de raison que Suarez, Tolet, Sanchez, Bonaci., Renzi, et
un grand nombre d'au-tres, soutiennent le contraire.
D'accord avec le texte ci-dessus mentionné, Renzi s'appuie
encore sur une déclaration de la sainte congrégation du concile;
et, comme le prouve Sanchez, les mots: non potest, rendent, dans ce cas
, l'acte entièrement nul (?), 3"" Le parrain, pour la confirmation,
ne doit pas être le même que celui qui a servi pour le bap-tême
, suivant l'opinion commune. Lacroix, Silvius et le concile de Cologne
disent qu'il faut faire ex-ception pour le cas-où il y aurait un
juste motif d'a-gir différemment. 4° Dans la confirmation le
par-rain doit, d'après le rite du Pontifical, être du
même sexe que celui qui doit être confirmé, 5° Le
parrain ne doit pas êlre un moine, comme disent très bien
Sanchez, Bon., Salm., et la plupart des auteurs, suivant le c. monachi,
io4, de consecr., dist. 4i ou ? est dit : « Monachi sibi com
patres »commatresque non faciant.» Castr., Barb., Gob., Spor.,
etc., font une exception pour le cas où celui qui reçoit
la confirmation serait aussi un religieux. Suar., Dicast.·, etc.,
en excepte aussi le religieux qui ferait partie d'un ordre mendiant. Mais
cette opi-nion est combattue avec raison par le P. Concina ; car, ainsi
qu'il a été dit au n. 37, le rituel défend à
tout régulier de remplir les fonctions de parrain. Il est vrai que
cela ne se rapporte qu'au baptême ; mais il y a la même raison
pour la confirmation, et, comme nous l'avons dit au ch. 2, n. 78, lorsqu'il
y a analogie on peut très bien étendre la loi d'un cas
(1) Lib. VI. n. 186. dub. 1.
POUR LES CONFESSEURS.
à l'autre. Ici l'analogie est si grande que, si on n'é-tendait
pas la loi d'un cas à l'autre , on pourrait ac-cuser le législateur
d'inadvertance ou de mauvaise foi. Quant à la manière de
présenter un enfant à la confirmation, le pontifical dit
que celui qui doit être confirmé, doit mettre son pied sur
le pied droit de son parrain ; mais le P. Concina dit avec raison que,
d'après la coutume aujourd'hui établie et approuvée
parla sainte congrégation, le 29 septembre 1749» il suffit
que le parrain pose sa main droite sjur l'é-paule droite de celui
qui doit recevoir la confirma-tion (1).
LU. 6° Le rituel ordonne qu'après l'onction, on entoure
\<t front 'du confirmé avec une bandelette de lin ; mais aujourd'hui
cette cérémonie est encore tombée en désuétude
chez 'nous; car, après avoir fait l'onction, on lui frotte le front
et on le renvoie. 70 Le curé doit inscrire sur le registre le nom
du confirmé et celui du parrain, soit pour ne pas ou-blier le lien
d'affinité qui existe entre eux par l'effet
de la confirmation, soit pour donner au con-firmé le moyen
de prendre les ordres. Barb, et autres disent que l'on peul changer
de nom pour le sacremeut de confirmation ; à la fin
l'évêque donne la bénédiction à
tous les confirmés, c'est pourquoi, pendant la cérémonie,
on doit les avertir de ne pas se retirer avantla bénédiction,
mais Tambu-rini dit avec raison que cet avertissement n'est pas obligatoire,
et qu'en fait (comme dit Lacroix) l'u-sage est que les confirmés
se retirent après avoir reçu le sacrement, et que les
évêques ne les obli-gent pas à rester (2).
(1) Lib. VI. ?. 187. (a) ?. 188.
448
„ 1NSTBUCTI0N PRATIQUE
LU. Les effets de ce sacrement sont de trois sor-tes :.i° le caractère,
2° la grâce, c'est-à-dire la force speciale que l'on reçoit
pour combattre contre les ennemis de la foi, 3° le lien d'affinité
où de parenté spirituelle qui se forme entre le confirmé
et le par-rain qui l'a assisté (i).-
CHAPITRE XV.
REMARQUES SUR LE SACREMENT
DE h EUCHAIUSTIE.
PREMIER POINT.
De l'essence de l'eucharistie.
1. En quoi consiste l'essence et en quoi consiste la raison spécifique;
et d'où tire-t-on l'unité?
2. Si l'Eucharistie est nécessaire ^ et d'une néces-sité
moyenne?
?. Si la consécration-en une seule espèce est nuUe et
illicite, il n'est pas permis de consacrer ime espèce sans l'autre.
4· Cas excepté.
5. Effet de l'Eucharistie.
6. Si, tant que durent les espèces, etc.
7. Si celui qui communie a un péché véniel
:1e reste a été traité dan&VExamendes ordinands,
n. 97.
I. L'eucharistie se définit :
« Sacramentum • corporis et sanguinis Christi sub speciebus
panis
(») N. 169.
POUR LES CONFESSEURS.
449
»et vini ad spiritualem animae refectionem divinitus »
institutum. >> On agite dans les écoles plusieurs questions
sur l'essence de l'eucharistie ; nous en avons
déjà parlé longuement dans notre ouvrage, c'est pourquoi
nous nous bornerons ici -à en faire rémunération :
la première est celle de savoir en quoi consiste l'essence de l'eucharistie.
Les uns di-sent qu'elle consiste, in recto, dans les espèces du
pain et du vin, et que la personne de Jésus-Christ est contenue
dans le sacrement seulement in obli-qua, comme une chose
tout-à-fait extrinsèque · d'autres disent
que in recto, c'est-à dire essentielle-ment, le sacrement consiste
soit dans les espèces du pain et du vin, soit dans le corps de^Notre
Seigneur Jésus-Christ. Ces deux opinions paraissent égale-ment,
probables (1); voyez les raisons que nous avons
rapportées à l'appui de chacune d'elles. La deuxième
question est celle de savoir si ?? raison spécifique de ce sacrement
peut consister tout en-tière dans une seule espèce., soit
celle du pain, soit eelle du vin. Quelques auteurs le pensent
ainsi; mais il est plus probable de dire que les
deux espèces sont nécessaires, parce qu'en réalité
on ne peut pas , au moyen d'une seule espèce, représen-ter
le repas parfait, qui consiste dans la boisson aussi bien que dans la nourriture
(2). La troisième ques-tion est celle de savoir d'où résulte
l'unité numéri-que de ? eucharistie. Les uns disent
qu'elle résulte de l'unité du corps de Jésus-Christ;
mais d'autres sou-tiennent avec plus de raison qu'elle résulte de
la conjonction morale entre les espèces par l'effet de
(0 Lib. VI. u. »89.
(0.' N. 199. V. Super hi*.
?. xxiv.
2 g
4&O
IKITRÏJCTION PRATIQUE
la consécration, lorsqu'elles sont offertes et reçues
comme une seule espèce (1). Mais si elles sont of-fertes sur plusieurs
autels ou reçues par plusieurs personnes, on doit voir là
autant de sacrements dif-férents (a).
II. La quatrième question consiste à savoir si l'eucharistie
est nécessaire au salut, par nécessité de moyen ou
nécessité de précepte. 11 est incontes-table qu'elle
est de nécessité de précepte non seule-ment ecclésiastique,
niais divin, comme on le voit dans saint Luc(cliap. xxn) : « Hoc
facite in meam » commemorationem. » D'un autre côté,
tous les au-teurs s'accordent également à dire que l'eucharis-tie
n'est pas de nécessité de moyen quant à la récep-tion
réelle de ce sacrement ; il n'y a donc de doute que pour savoir
si elle est de nécessité de moyen seulement </i voto,
c'est-à-dire en désir. Saint Bona-venture, Suarez, Cajetan.
, etc., professent la néga-tive, parce que d'après eux le
sacrement n'a pas été institué pour produire la première
grâce. Mais l'af-firmative est soutenue avec plus de probabilité
par saint Thomas (?), Soto, Concina , Salin., etc., qui se fondent, soit
sur le texte de saint Jean : « Nisi «manducaveritis carnem
filii Hominis... non habe-» bitis vitam hi vobis, chap, vi; »
soit sur ce que l'eucharistie est le complément de tous les'sacre-ments;
ce qui fail dire au docteur angélique que personne n'a lagiâce
première deTecevoir ce sarre-ment, sinon par son vœu propre, comme
l'ont les adultes lorsqu'ils reçoivent le baptême ou le sacre·
(?) ?. 199. q. a.
(a) N. 6i.
(3) ô. ? q. 7. a. t. *d. :.
POUR LES CONFESSEURS-
^Sl
ment de pénitence, ou bien par le vœu de l'Église, comme
l'ont les petits enfants (1). Mais il est incon-testable que la réception
de l'eucharistie, ou en effet, ou au moins en désir, est nécessaire
pour conserver la vie spirituelle, ainsi que l'enseignent Soto, Gonzalee,
les Saltn. et saint Thomas (2); parce que de même qu'il est impossible
de faire vivre le corps sans prendre une nourriture maté-rielle
, de même aussi la nourriture spirituelle est nécessaire'à
la vie de l'âme. C'est pourquoi Lugo, Soto, Vulentia, Filliutius,
les Salm. , etc., disent que quoique le précepte n'ordonne que de
commu-nier-une fois dans l'année, cependant on peut, dans quelques
cas, être obligé de communier plus d'une fois dans une année,
lorsqu'on reconnaît que cela est nécessaire pour se conserver
dans la grâce di-vine (?).
III. La matière de l'eucharistie consiste tant dans le pain
que dan's le vin, et il ne peut jamais être permis, par quelque cause
que ce soit, de consacrer une espèce sans l'autre, ainsi que cela
résulté du chap. Conferimus, dist. 2, de consecr., et du
concile de Trente, sess. 22 , chapr 1, où il est dit que Jésus-Christ
ordonna aux apôtres de ne jamais offrir le sacrifice de son corps
autrement que sons les deux espèces. Aussi ce précepte est-il,
sans aucun doute, non pas seulement ecclésiastique, mais divin,
comme l'enseigne l'opinion commune (4). Nous dirons même que le pape
ne peut pas dispenser de l'obser-
(i> Lib. VI. n. 192.
(a) 3. p. q. 80. a 2. ad. a.
(3) Lib. VI. ?. 13g et ng5.
(4) Ibid. n. 196.
45a
INSTRUCTION PRATIQUE
vation de ce précepte (?), car il est très probable que
le sacrement ne peut être accompli qu'au moyen du sacrifice, lequel
sacrifice exige (suivant l'opi-nion véritable ) la consécration
des deux espèces, parce que si on omettait le vin, on n'indiquerait
au-cunement le sang, elle sacrifice de la croix ne serait pas représenté,
et c'est en mémoire de ce sacrifice que le Sauveur a laissé
le sacrement de l'autel, comme dit le concile de Trente, sess. 2 2> chap,
xxi (2). On doit admettre l'opinion de Lugo (contre celle de plusieurs
autres), du reste plus commune, qui dit que si le prêtre avait l'intention
de ne consacrer qu'une seule espèce , le sacrement serait nul, parce
qu'on ne peut pas séparer la nature du sacrement de celle du sacrifice,
attendu que le prêtre ne reçoit le pouvoir d'accomplir ce
sacrement qu'en sacri-fiant, ainsi que cela est suffisamment exprimé
dans la forme de l'ordination: « Accipe potestatem of-» ferendi
sacrificium, etc. » Par conséquent, la con-sécration
des deux espèces a rapport, ainsi que nous l'avons dit, non seulement
à l'essence du sacrifice, mais encore à l'essence du sacrement;
ce qui fait que celui qui n'offre pas le sacrifice n'accomplit pas le sacrement
(?).
IV. Du reste, il peut se présenter quelques cas où la
consécration d'une espèce sans l'autre serait va-lable et
même permise; comme, par exemple, si long-temps après la consécration,
le prêtre s'aper-cevait qu'au lieu de vin il a consacré" de
l'eau , ou bien s'il ne pouvait se proewer le vin qu'en expo-
(?) Lib. V[. n. 19C. dub.
(») ? 2?6.
(3) ? ?96. dub. 5.
i>oun LES CONFESSEURS.
455
sant sa vie ou en-commettant un grave scandale, ou bien encore si depuis
la consécration il est survenu un incendie ou une incursion d'ennemis.
Voir Sua-rez, Azor, Bonacina, Salin., Busembaum, et la plu-part des autres
auteurs (i).
V. Les effets de la communion sonl i° l'augmen-tation de la grâce
(c'est là l'effet principal), comme on Je voit dans la sess. i5,
chap, n, du concile de Trente. Quelquefois il s'y joint accidentellement
un autre effet, qui est l'acquisition de la grâce pri-mitive, c'est-à-dire
lorsque quelqu'un ignorant qu'il a commis un péché mortel
ou bien croyant avoir la contrition, s'approche du sacrement de la commu-nion
avec la seule attrition. Voir saint Thomas (2), Scot, Suarez, Tolet, Roncaglia,
Salm., et la plupart des autres communément (?). La raison en est
que l'uffet de tout sacrement est de procurer la grâce à tous
ceux qui n'en sont pas indignes, et l'onn'enest pas indigne lorsqu'on a
l'attrition, qui efface l'effet actuel comme l'effet habituel du péché
(4)-a°Laré-mission de tous les péchés véniels,
comme l'ensei-gnent saint Thomas (5) et tous les auteurs, d'après
le concile de Trente, à l'endroit précité, où
l'eucha-ristie est appelée « antidotum quo liberemur à
cul-» pis venialibus, et à peccatis mortalibus praeserva-j
mur, » Les Salm. et d'autres auteurs prétendent que la communion
efface par elle-même les péchés véniels, «
ex opere operato , par 'infusion (c'est ainsi qu'ils s'expriment) de la
grâce qui guérit l'âme.
(i)-H. 197·
(a) 5. p.- q. 73. a. 7. ad 2. et cj. 79. a, 5,
(3) Lib. VI. ?. a69.
(4) ?. 6.
(5) 5. ?, q. 79. a. 4.
454
INSTRUCTION PRATIQUE
Mais Tournely dit avec plus de raison que le sacre-ment n'enlève
pas immédiatement par lui-même tous les péchés
véniels, mais par le moyen de
l'acte de charité qu'il excite dan» l'àme. C'est encore
l'o-pinion que professe le docteur angélique dans le passage précité
où il dit :« Quantum ad actum, qui «excitatur in hoc
»ariam«»nto, per-quem peccata ve-»nialia solvuntur
(1).» 3° La préservation des pé-chés
mortels, par suite du secours que donne ce sacrement pour mettre un freina
la concupiscence, résister aux tentations, et marcher dans
les voies du Seigneur. 4° La rémission de la peine temporelle
des péchés qu'on a commis.
Cet effet n'est pas produit directement , mais
indirectement par le moyen des actes de charité que la communion
ex-cite en notre âme. Voir saint Thomas (2), Salin., Conuina, etc.
5° La douceur spirituelle, c'est-à-djre la facilité à
exécuter les clioses qui sont agréables à Dieu. 6°
L'union atec Jésus-Christ: «Qui manducat »me in me manet,
et ego in eo. » j" L'acquisition de la gloire éternelle :
«Qui manducat me habet vi-» tam aeternam (o): »
Vi. Il faut remarquer iei que l'on doit considérer comme plus
probable l'opinion qui dit que tant que l'on conserve l'hostie dans son
estomac, la grâce con-tinued'augtnenter,parce queles dispositions
du sujet augmentent, comme le soutiennent plusieurs au-teurs qui disent
que ce sacrement ayant été institué pour servir de
nourriture, ainsi qu'il est tlit dans le conc. de Florence, il en résulte
que de même que la
(1) Lib. VI. n. 269. V. Effectus, ^a) Ibid. -vere. 5. (?) Lib. VI.
?. a67.
POUR XES CONFESSEURS.
455
nourriture nourrit le corps tant qu'elle séjourne dans l'estomac
, de même l'eucharistie doit nourrir l'âme tant qu'elle séjourne
dans le corps, parce que les lionnes actions accroissent les dispositions
de l'âme. Voir Gonet, Lugo, Hulzmnnn , Reginald, Mans-trio, Bosco,
Suarez, lìecan.Fagundes, Sal m., et de plus Tournely, ainsi que
Cajetan et autres ,-qui di-sent que cette opinion est aujourd'hui'la plus
com-mune (1). Mais, dira-ton, celui qui prend les es-pèces en plus
grande quantité reçoit alors une grâce plus grande.
Tourn. et Gon. répondent qu'il reçoit une plus grande grâce
non pas par lui-même,.mais par accident,- p'est-à-rdire à
l'occasion des bonnes dispositions de son âme qui sont accrues par
le sé-jour des espèces dans l'estomac. C'est dans ce sens
que Tournely dit que l'inquisition d'Espagne a im-pronvé comme inutile
l'usage de se servir d'espèces plus considérables , parce
que l'on croyait que la plus grande quantité des espèces
procurait une plus grande grâce. 11 faut remarquer de plus qu'un
dé-cret de la sainte Congrégation , approuvé par Inno-cent
XI, a condamné comme abusif l'usage de don-ner aux communiants plusieurs
paiticulesensemble, ou des particules plus grandes que les particules usuelles
(a).
VII. On demande si l'on pèche vénièlement lors-que
l'on communie avec un péché véniel actuel. Cette question
a reçu plusieurs solutions différen-tes. Quant à moi,
l'opinion que je préfère est celle de Vasq., Fill., Hurt.,
Led., Sa et Léand. , qui a
(») ?· ?· <1· 79· «rt·
8· (a) Lib, VI. ?. ea8,
456
INSTRUCTION PRATIQUE
obtenu l'approbation de Dicast. et Tamburini (1). Cette opinion fait
une distinction. Si la faute se rap. porte directement à la communion,
par exemple si l'on n'a communié que par vanité ou avec une
dis-. traction volontaire, alors il est incontestable qu'il y a péché
véniel, parce qu'une telle faute est une ir-révérence
positive envers le sacrement, quoique, selon saint Thomas (2), elle doive
empêcher le cou-pable seulement de recevoir la nourriture spirituelle
de l'àme, mais non pas l'augmentation de la grâce ou de la
charité. Mais si le péché véniel n'a pas de
rapport-à la communion, comme, par exemple, si l'on communie pendant
qu'on est sous le poids de quelque péché véniel, alors
qn ne commet pas un péché , parce que cette faute (comme
disent la plu-part des docteurs) n'empêche pas l'effet principal
du sacrement et le secours qu'il procure pour se pré-server des
péchés mortels; attendu que, d'un côté, la faute
vénielle ne détruit pas la grâce, et que, d'un autre
côté, communier avec une telle faute, c'est plutôt un
manque de parfait respect qu'une irrévé-rence (?). Les autres
choses relatives à la matière et à la forme de l'eucharistie,
sont désignées dans Y Examen des ordinarie/, fi. 97 jusqu'au
i51e.
SECOND POINT.
De l'administration de l'eucharistie.
8. Comment les prêtres doivent conserver l'eu-charistie et la
distribuer.
(1) Tamb. in met. commun, c. 1. § 4' n. 9.
(a) 5. p. q. 79. art. 8.
(5) Lib. VI. ?, 270. V. Op. 1 et ?
??«1\ 1,ES C0NPESSKUR5
·
9· Si les réguliers et tous les prêtres peuvent
donner la communion, et si les diacres lé peuvent»'
10. Si, en cas de nécessité, le viatique peut être
administré par les clercs et même par des laïques, et
s'ils peuvent aussi.... etc.
11. Si le prêtre peut se donner la communion à lui-même
par dévotion.
12. Comment doit et peut être donné ïe viatique.
??. Si le viatique peut être donné avec les der-niers
doigts ; si la communion peut être administrée ainsi,
?4· Si elle peut être donnée d;ins les deux espè-ces
et aveGune grande hostie ; si elle peut être don-née aux enfants
et aux insensés.
15. Aux pécheurs publics, aux condamnés.
16. Si on peut la donner dans une messe de morts. ??. A quelle heure
on peut la donner.
-18. S'il reste quelques fragments de l'hostie, etc.
VIII. Voyons maintenant quelles sont les person-nes qui peuvent administrer
l'eucharistie, et quelles sont les conditions nécessaires pour pouvoir
l'admi-nistrer. Quant au premier point, de même que les prêtres
peuvent seuls consacrer la matière de ce sa-crement (suivant le
concile de Trente, sess. 25, chap, ?), de même aussi il n'est permis
qu'aux prê-res seuls de le dispenser, et, à la rigueur, les
pas-teurs seuls ont le droit d'administrer la commu-nion, et Us sont par
conséquent obligés de veiller à ce que l'eucharistie
se conserve dans leur église avec toute la vénération
qui lui est due, c'est-à-dire dans un tabernacle décent avec
une lumière qui brûle jour et nuit continuelletnent, et cela
sous peine de faute grave. Cependant si la lumière restait éteinte
seulement pendant une heure , Dian. et Quint, di-
458
INSTRUCTION PRATIQUE
sent qu'il n'y aurait pas de faute grave. Ces mêmes pasteurs
sont obligés de l'administrer non seulement aux personnes qui sont
aux portes de la mort, mais encore à celles qui se portent bien,
toutes les fois qu'elles le réclament raisonnablement et en temps
opportun, comme le disent d'un commun accord Soto, Suarez, Vasquez, Castrop.,
Filliufius, Azor, Decastillo, Busembauin, Salm. , etc. (i). Du reste, lorsque
la communion n'est pas donnée pour rem-plir ('.obligation du précepte
pascal ou en forme de viatique, les religieux peuvent, en vertu de leurs
privilèges, l'administrer dans toutes leurs églises, et aujourd'hui
( comme cela est attesté par Castr. et lloncaglia), d'après
l.i coutume généralement éta-blie , ce!te faculté
est présumée accordée à tout prêtre qui
célèbre le sacrifice de la messe (2).
IX. Les diacres ne peuvent cependant pas admi-nistrer la communion
sans une délégation spéciale de l'évêque
ou du curé; s'ils en agissaient autre-ment ils se rendraient coupables
d'irrégularité, ainai qu'on le voit au chap. 1, de Cler.
non ord, etc. (3).. Autrefois on était dans l'usage de donner une
auto· risation générale aux diacres pour administrer
la communion, mais cela n'est plus permis aujourd'hui, excepté dans
le cas de nécessité, suivant le chap, ix du concile de Carthage
où il est dit :« Necessitas «cogdt, etc. » Quant
à la nature de cette nécessité, Haberi et Tournely
pensent qu'elle doit être extrême; mais Suarez, Laymann, Castrop.,
Lugo, Concina, Salm., etc., s'accordent à dire qu'il suffit d'une
né-
(1) Lib. VI. ?. s55. Ce) N. a 55.
(?) S.
POUR tES CONFESSEURS.
459
cessité remarquable ou d'un motif juste , comme dit le P. Concina,
par exemple, si le curé était occupé à une
grande solennité ou bien si le nombre des communiants était
trop considérable, etc. Remar-quez que le diacre, lorsqu'il administre
la commu-nion , doit être revêtu de la côte et de l'étole
en travers (1).
X. Dans le cas où il y aurait urgence de donner le viatique
à une personne malade et où le curé manquerait le
sacrement pourrait êlre administré par un prêtre quelconque
ou même par un diacre, quoique le curé s'y opposât,
si son opposition était injuste. Voir Tolet. , Sa. , Dicastillo
, Roncaglia , Salm., Laymann, Solo, Hokmann et la plupart des autres
(2). Suarez, Vaientia , Cajetan , Filltutius , Escobar, etc., disent
que dans un cas de nécessité, la communion pourrait être
administrée même par un clerc ou par un laïque, et cette
opinion est ad-mise par Lugo, Coiicina, Gonet, Bonacina, Salm. et la plupart
des autres docteurs ; parce que, dans ce cas, la communion est prescrite
par un précepte divin , et d'un antre côté il n'y a
pas de précepte qui défende de la donner de cette manière.
Et, si au-trefois la nécessité autorisait les chrétiens
à prendre la communion dans leurs maisons, pourquoi ne leur permettrait-on,
pas de le faire également aujour-d'hui lorsqu'il y a une nécessité
plus grande, c'est-à-dire un danger de mort (5)? Il
est vrai que les auteurs ne le permettent que lorsque cela peut se
(?) ? »?7.
(a) N»a56. in fin. et 257 q. 1. circa fin.
(3) N. a36. q. 1».
4Co
INSTRUCTION J'KATIQÎF,
faire sans scanJale; mais, quant à moi, je pense que l'on pourrait
facilem nt faire disparaître, ce scandale ou plutôt cet e'tonnement
en avertissant les specta-teurs que cette pratique est permise par les
théolo-giens. De même les auteurs ci-dessus mentionne's permettent
que le viatique soit administré aux mo-ribonds par des laïques
lorsque Ton ne peut pas trou-ver des prêtres ni des diacres. En vain
opposerait-on le texte du chap. Peiv. xxix, de- Consecr. dist. 2, où
l'on défend aux prêtres de confier à des laïques
le soin d'administrer l'eucharistie, parce que dans ce chapitre il est
question d'un prêtre qui ferait cela hors du cas de nécessité.
On ne doit même pas (sui-vant ces auteurs ) par un usage contraire,
parce que ce cas se présentant fort rarement, l'usage' ne peut pas
faire preuve en cette matière. Layrn. penche beaucoup pour cette
opinion. Habert dit que cela est permis aux laïques, mais avec une
autorisation de l'évêque (1). Quant à la question de
savoir si [le curé est obligé d'administrer la communion
en temps du peste, voyez ce qui est dit à ce sujet au chap, vu ,11.
28.
XI. On doit admettre que, même sans qu'il y ait danger de mort,
lorsqu'on nVpas d'autre prêtre et que cela ne doit pas causer de
scandale, les prêtres peuvent se donner la communion à eux-mêmes,
même lorsqu'il n'y a pas d'autre motif que celui de la dévotion,
suivant Silvius, Lugo, Bonacina, La-croix et les Salm., parce qu'il n'y
a là aucune irré-vérence et qu'aucun précepte
ne s'y oppose. Vas-quez , Dicastillo et Léander accordent aussi
cette
(1) N. 23(5. ? 3.
POUR LES CONFESSEURS.
461
faculté aux diacres, disant que cela leur a été
permis par le concile de Nicée, chap, ??? (?). Quant à la
question de savoir comment et dans quel cas les réguliers peuvent
administrer la communion, voyez ce que nous dirons au chap, xx, Des privilèges,
?. ? s3. Etpour savoir où doivent faire la communion pas-cale les
domestiques des monastères réguliers ainsi que les pèlerins
et les vagabonds, on doit observer ce qui est prescrit au chap, xii, n.
42·
XII. Voyons maintenant ce qui est nécessaire pour que la communion
soit bien administrée. On doit apporter dans la célébration
de "ce sacrement le respect qu'il mérite et l'observation du rite
établi par FÉglise : c'est pourquoi, remarquez i° qu'en
règle générale on ne doit porter le sacrement aux
malades qu'avec le surplis, l'étole et le luminaire ; ce qui fait
dire à Suar., Fill. etRonc. que donner la communion sans surplis
et sans étole, c'est réellement un péché mortel;
mais que si l'on n'a omis que le lu-minaire, c'est seulement un péché
véniel. Filliutius, Granado , Aversa , Elbel, Gobât, Lacroix,
fienzi , Mazzota, etc., disent avec probabilité que clans un cas
de nécessité il est permis de donner le viatique sans le
luminaire et même sans les habits sacrés, parce qu'on ne doit
pas présumer que le Seigneur veuille, lorsqu'il est impossible d'observer
les cérémonies, que les moribonds restent privés d'un
si grand se-cours. Pasq. dit aussi avec raison que l'évêque
peut accorder la dispense de porter le chapeau en tête lorsqu'on
va porter le viatique au loin dans les campagnes (?). C'est encore avec
probabilité que
(1) Lib. Vi. ?. s38.
(a) Ibid. 11. s4»· V. in'uû^U'are.
46a
INSTRUCTION PRATIQUE
Bonacina, Salm., Gobât et Lacroix ( contre Buseni·. baum
) disent que-dans un cas d'urgence il est per-mis au prêtre de courir
pour être à temps à admi-nistrer le viatique (1) ;
de même qu'il lui est permis aussi de se foire porter sur un cheval
paisible, lorsque le lieu est éloigne, ou que le temps est mauvais,
ou enfin lorsqu'il faut se hâter, suivant l'opinion de Quintanada,Elbelet
Gobât (2). On rap-porte que cela a été permis même
par saint Charles Borromée (3). Pendant une peste, il est permis
de donner le viatique dans une cuillère, suivant l'opinion de Bon.,
Bus., Marcha., Munc, Gob., Léand. etc.; de plus Elb., Prep. et Diana
permettent encore de donner l'hostie dans une cuillère avec de l'eau
, .aux malades qui auraient la bouche trop sèche pour pouvoir l'avaler
(4). Il faut remarquer ici que la sainteCongrégation duconcile déclara
que saint Pie V avait défendu de porter le sacrement à un
malade seulement pour l'adorer, lorsqu'il lui est impossible de le prendre
(5).
XUI. Il est également permis, dans un cas de nécessité
extrême ou très grave, de donner la com-munion avec les derniers
doigts, lorsque le prêtre ne peut pas se servir du ponce ou de l'index,
sui-vant l'opinion deTournely, Concina, Ronc, Salm., Busem., Diatia et
Renzi ( contre Bonacina) ; déplus Gobât, Arriaga , Lacroix,
Léander et ALizzotta disent que cela est également permis
hors d'un cas de nécessité, lors, par exemple, que le prêtre
a la
(1) N. 242. {2) N. 245. (5) Acta mediola.. p. 4. n. 5i.
(4) Lib. VI. n. 244. ». 6. non licet.
(5) N. 245.
90VR LES CQNFESSRimS,
goutte, parce que la main du prêtre est tout en-tière
consacrée. Mais cette opinion est rejetée avec raison par
Bonaci., Possevin , Diana et Renzi, parce que, quoique la main du prêtre
soit consacrée tout entière, néanmoins c'est seulement
le pouce et l'index que le rite de l'Église a spécialement
dé-signés pour faire cet office. L'opinion commune, qui est
celle de Suarez-, Molina, Castro., Bonac., Laymann-, etc., défend
au prêtre de célébrer ce sa-crement lorsqu'il a l'index
ou le pouce malades au point de ne pouvoir briser l'hostie, ainsi que cela
résulte du chap, xr, de Corp. viat. ou il est dit que l'on ne peut
gas ordonner prêtre celui dont le pouce ne pourrait pas briser l'hostie
; et il est de règle gé-nérale que ce qui empêche
de prendre les ordres, empêche aussi d'en exercer les fonctions (1).
XIV. Remarquez 2° que d'après la discipline au-jourd'hui
en vigueur , il faut une dispense du pape pour pouvoir administrer la communion
sous les deux espèces ou sous l'espèce du vin seulement,
même lorsqu'on la donne en forme de viatique. Suivant Lugo, Suarez
, Tamburinï , Dicastillo , Diana, Lacroix , etc., la raison en est
que le pré-cepte du viatique n'est pas obligatoire lorsqu'on se
trouve dans l'impossibilité de le prendre avec les cérémonies
ordonnées par l'Église (a). Il est encore défendu
( quoique ce ne soit qu'un péché véniel ) d'adminis'rer·
la communion avec une portion de grande hostie. Cependant il suffit, pour
que cela puisse se faire, que celui qui réclame la commu-nion soit
un malade, ou un noble, ou un do aies ti-
(0 N. 244.
(a) N. 245. V. Pascal I.
INSTRUCTIO^ PRATIQUE
que, ou tonte autre personne qui ne puisse pas at-tendre sans un grave
inconvénient, lors même que ce ne serait que par dévotion
qu'il communierait, comme le disent saint Antonin, Silvius, Bonacina, Tournely,
Concina , Salin. , Elbel, etc. (?). Il n'est pas permis de faire communier
les enfants avant qu'ils aient atteint l'âge de raison, ni ceux qui
sont dans un état continuel d'aliénation mentale. Voyez à
ce sujet le chap, ???, ?. 42 et 43.
XV. Remarquez 5° qu'on -doit refuser la com-munion aux pécheurs
publics, si leur pénitence n'est pas publiquement prouvée,
ainsi qu'il est dit au chap, xiv, n. 5. Quant à la question de savoir
si l'on commet un péché mortel lorsqu'on se présente
à la communion déjà entaché de péché
mortel, nous l'avons résolue affirmativement, d'accord avec Sua-rez,
Roncaglia, Laymann, Gonet, Viva, clc, contre l'opinion de.quelques autres,
et nous l'avons prouvé par des textes tirés du Catéchisme
romain" et du Hitue.1 (a). Remarquez encore que le prêtre commet
un péché s'il refuse de donne*- la communion aux condamnés
à la peine capitale qui s'y sont disposés par la confession,
suivant l'opinion du P. Concina, et quoi qu'en dise Contenson; quoique,
d'après l'as-sertion de Juenin, en Espagne et en France on ne soit
pas dans l'usage de donner la communion aux con-damnés. Pour nous,
nous avons adopté l'usage con-traire; c'est pourquoi nous disons
que l'on ne doit pas refuser le sacrement au Condamné, lors même
qu'il ne lui resterait plus qu'une heure à vivre (5).
(») N. »/|5. V. Pascal I. (a) ?. a47-f,5) ll.iJ.
POUR LES CONFESSEURS.
465
XVI. Remarquez 4° qu'il est perniis de donner la communion dans
la messe de requi *.m, car dans la rubrique de la messe des morts il est
dit : « Si «sint communicandi eos communicet, antequam »
se piirificet. » Cela est conforme a ? concile de Trente, sess. 21,
chap, vi, où il est d t que le con-cile « optaret ut singulis
missis communicarent. » Or quoique Gavantus -et Lacroix rapportent
un dé-cret contraire à cette opinion, émane de la
sainte Congrégation, en date de 1701, néanmoins le savant
Merati dit qu'il a lu dans le règlemei it de l'Église de
Gênes, que la même S. C. défeiditla publi-cation de
ce décret, et qu'il fut positivement retiré en 1711 (1).
Enfin, le 2 septembre 1741» il fut ex-pressément décrété
que l'on pourrait administrer la communion pendant la messe des morts,
mais seu-lement dans l'intervalle de lu messe, it non pas au commencement
ni à la fin ; car il fut déclaré aussi que la Communion
ne pouvait être adninistree avec les ornements noirs. La sainte congrégation
déclara encore, par le même décret, contrainiment à
l'opi-nion de Benoît XIV (2) et du P. Merati, qui pen-saient que
l'on pouvait communier à la messe des -morts avec des particules
d'hostie consacrées avant, que lorsque la messe était célébrée
svec les orne-ments noirs, on devait communier ave : des parcelles d'hostie
consacrées dans cette même messe. Nous disons avec des ornemens
noirs, parce qu'étant dit dans un autre décret que la messe
di;s morts peut être dite avec les ornements violets, 1 s'ensuit
que Von peut donner la communion, soit au commen-
(1) N; 349- dub. 2.
(2) De sacrif. miss. spcl\ 2, 6. 6. § in lin'. X.
XXIV.
466
INSTRUCTION PRATIQUE
cement, soit au milieu, soit à la fin de la messe. 11 taut observer
à cet égard les décrets du Catalogue rapportés
à la fin de ce chapitre, n. 88, décr. io.
XMII. Remarquez 5° que la communion peut être administrée
pour ainsi dire à toute heure du jour; car il n'y a à cet
égard aucune prohibition. Voir ' Az., Silv., Castr., Bon., Sa.,
Conc. Konc. et plu-sieurs auties, ainsi queSuar., qui s'appuie de l'au-torité
de saint Ambroise, lequel atteste que de son temps on donnait la communion
vers la fin du jour. Cependant il n'est pas permis de la donner quand la
nuit a déjà commencé, ou tout à fait à
la fin du jour, à moins de quelque cause particulière, comme
disent Suar. ,*Castr., Coni., Sa, Tamb., etc. Mais il n'est jamais permis
de donner la communion (ex-cepté pour viatique) intempesta nocte,
comme disent Bon. et les Salm., c'est-à-dire lorsque plusieurs heures
de la nuit sont déjà écoulées. Cependant on
peut donner la communion pendant la messe de Noël, quoiqu'elle se
dise à minuit; cela est permis par plusieurs décrets de la
sainte Congrégation; mais on ne le peut pas, de même pour
le jour du vendredi-saint ; cependant cela n'est pas défendu pour
le samedi-saint; seulement je trouve certain auteur (Macro, in Focabul.
Ecoles.), qui dit que dans la messe du samedi-saint, on omet de dire l'antienne
de la communio, parce qu'autrefois on ne donnait pas la communion ce jour-là;
mais le P. Merati, ainsi que Grancolas, Moretle et autres, prouvent le
contraire par un commandement de l'Église romaine; c'est-à-dire
qu'autrefois, le jour du samedi saint, tous communiaient, grands et petits;
car on lit dans ce commandement, omnes communicent. Il faut ajouter avec
Gav. et Durand.
POUR LES CONFESSEURS.
467
qu'aujourd'hui on omet de dire pendant la messe la communio et la post-communio,
parce que l'on a substitué les vêpres à la place de
ces deux cantiques. D'où l'on conclut qu'il n'y a pas de fondement
à dire que la communion est prohibée ce jour-là. Quant
à l'usage établi pour ce qui est de notre pays, -il est certain
que dans plusieurs églises du royaume, et même dans la ville
de Naples, et spé-cialement dans sa cathédrale, on est dans
l'usage de distribuer la communion au peuple après que la messe
a été célébrée solennellement (1).
XVIII. Remarquez 6° que si, après l'ablution, le prêtre
s'aperçoit qu'il est resté quelques parcelles de l'hostie
consacrée, voici ce qu'il doit fairejd'après la rubrique:
Eassumat, sive parvœ sint, sive magnœ, quia ad idem sacrificium spectant.
Lors même que le prêtre serait rentré dans la sacristie,
s'il est encore revêtu des ornements sacrés, il peut très
bien pren-dre les "restes d'hostie, comme le disent Gobât, Gran.,
Dian., etc., dont l'opinion est adoptée par Cenoît XIV, dans
son ouvrage, deSucrif. missœ (2), lequel ajoute que si le prêtre
s'est déjà dépouillé des ornements, il doit
replacer les restes de l'hosiie dans le tabernacle, s'il y en a un, ou
les garder pour une autre messe qui se dirait dans la même matinée;
autrement il doit également les avaler. Suarez, Lugo, Cajetan, Navarre,
Vasquez, Silvius, Bonacina, La-croix, etc., disent (contre l'opinion de
Tamburini) que l'on doit conserver, si on le peut sans irrévé-rence,
les restes d'une autre messe, parce qu'ils n'appartiennent pas au même
sacrifice; car la ru-
(1) Lib. VI. ?. a5a.
(a) Lib. HI. c. 17. a. 5.et 6.
468
INSTRUCTION PRATIQUE
brique ne permet pas de prendre d'autres parcelles d'hostie que celles
qui appartiennent au même sa-crifice, ad idem sacrificium spectant
(?). S'il est resté une portion entière, elle doit, d'après
la rubrique, à l'endroit cité, n° 5, être replacée
dans le taber-nacle, ou du moins on doit la réserver pour la faire
consommer par celui qui célébrera la messe immé-diatement
après (lors toutefois que le précédent a déjà
pris l'ablution), et si l'on ne dit pas d'autre messe, il faut conserver
l'hostie danslecalice même, et si enfin il devient impossible de
la conserver dé-cemment, on peut la faire prendre par le prêtre
qui l'avait consacrée. Quant aux parcelles qui se trou-vent en dehors
du corporal, comme il est douteux qu'elles soient consacrées ou
non, Bon., Henr., et Gob., disent que le prêtre doit les prendre
après l'ablution, et pour moi je crois qu'il serait mieux de les
prendre avec l'ablution même. De plus, s'il arrivait qu'en portant
le viatique on laissât quelques parcelles dans la patène ou
dans le ciboire, Castr., Tamb. et Bus. disent que dans ce cas le prêtre
peut la prendre, s'il est revêtu des ornements sacrés; ou
bien encore (comme le disent les mêmes auteurs, ainsi que Lug. et
Marc), on peut donner tout de suite ces parcelles au malade qui vient de
prendre les autres, afin que cela ne constitue moralement qu'une seule
communion. Lugo dit que c'est ainsi que cela se pratique ; c'est-à-dire
qu'après avoir fait communier le malade, on verse de l'eau dans
le ci-boire, et avec cette eau on lui donne l'ablution (2). Pour savoir
quand est-ce qu'on peut et qu'on doit
(1) Lik VI. n. a5i.
(a) Lib. VI. ?. 251. V. Sic
POUR LES CONFESSEURS.
donner le viatique, voyez ce qui sera dit au n. 19 et au n. 46·
TROISIÈME POINT.
De Ja reception de la communion.
§ I. De l'obligation de recevoir la communion.
19. Du viatique, et quand on doit le recevoir.
20. Si le malade éprouve le besoin de vomir.
21. S'il est tourmenté par la toux. Quant au pré-cepte
de la communion pascale,, nous en avons parlé au chap, xii, 2e point.
XIX. Le précepte de la communion est obliga-toire à
deux époques : au temps pascal et à l'époque de la
mort. Pour ce qui regarde la communion pas-cale, nous en avons parlé
en traitant des préceptes de l'Église, au chap, XII, n. 3g.
Quant au viatique, chaque fidèle doit le recevoir lorsqu'il se trouve
en danger de mort. On le doit aussi lorsqu'on est gra-vement malade et
qu'on ne peut pas avoir l'espoir de se relever; quand on est sur le point
d'entre-prendre un combat ou une navigation p'érilleuse; les femmes,
lorsqu'elles sont en couches, si elles font ordinairement leurs couches
avec de grands dangers, ou celles qui accouchent pour' la première
fois, si elles sont d'un âge tendre ou d'une faible complexion. Voir
saint Thomas et la plupart des docteurs (1).
XX. Remarquez qu'on ne peut pas donner la communion à
un malade lorsqu'il est incommodé par un vomissement continuel,
ou lorsqu'il n'en a
(1) Lib. VI. n. 291 et 665.
47°
INSTRUCTION PRATIQUE
pas été délivré au moins pendant six heures,
comme dit Bus. Lacroix dit avec raison, contre l'opinion de quelques auteurs,
que, lorsqu'il y a doute, on ne doit pas lui donner la communion, parce
qu'il faut avoir plus d'égard au respect qui est du au sacre-ment,
qu'à. l'utilité du malade. En pratique, s'il arrive que le
vomissement soit occasionné par la nourriture que prend le malade,
on doit faire un essai en lui donnant une parcelle d'hostie non con-sacrée,
et s'il fa garde, on peut alors lui donner la parcelle consacrée.
On doit agir de même (comme disent les Salm.) pour le cas de délire,
afin de s'as-surer si le malade peut recevoir le sacrement avec la décence
convenable (1).
XXI. Si le malade souffrait d'une toux conti-nuelle qui le forçât
à rejeter la salive de son gosier, cela ne l'empêcherait pas
de pouvoir communier; parce que l'on n'a pas à craindre malgré
cela qu'il rejette l'hostie, attendu que le conduit par où passent
les aliments (qui est l'œsophage) n'est pas le même que celui par
où passe la salive el par où l'on respire (qui est la trachée-artère).
Il en serait diffé-remment _si la toux devait l'empêcher d'avaler
la par-ticule (2). Quant à la communion que l'on doit ad-ministrer
aux petits enfants et aux fous au momeut de la mort, cette matière
est traitée au eliap, xn, TJ. 43 et 44· Nous n'en dirons
donc pas davantage sur l'obligarion de communier. H nous reste à
voir maintenant quelles sont les dispositions nécessaires pour pouvoir
communier. Elles sont de. deux sortes : les unes ont rapport à l'âme,
les autres au
(1) agi. V. s. Siinagro. (a) N. 29a.
POUR LES CONFESSEURS.
corps. Nous allons commencer par nous occuper des dispositions de l'âme.
§ II. Des dispositions de l'âme.
22. De la confession qui doit précéder.
a3. Celui qui après la confession faite se souvient d'un péché.
24· Quels sont les cas de nécessité qui peuvent
dispenser de la confession avant de communier?
25. Si en célébrant la messe, le prêtre se
souvient d'un péché ou de la censure.
26. S'il manque un confesseur.
27. Si le péché est réservé.
28. Si l'on doit également dire le péché
réservé.
29. S'il y a une excommunication.
30. Comment entend-on l'expression quam pri-mum.
??. Si ce précepte est obligatoire après la consé-cration.
32. S'il oblige celui qui commet un sacrilège en célébrant
la messe.
33. S'il oblige les laïques.
34· Si l'on peut communier lorsqu'on a des doutes sur un péché.
XXII. La contrition seule ne suffit pas pour au-toriser à communier
celui qui a sur la conscience un péché mortel. Il doit se
confesser à moins qu'il n'y ait pas de confesseurs, et que la communion
ou la célébration de la messe soient nécessaires,
cas auquel la contrition suffirait. Mais lorsqu'il y a un prêtre,
on doit se confessser aussitôt après la célé-bration
de la messe, ainsi qu'il a été établi par une déclaration
du concile de Trente, sess. i3, cap. 7 ±
472
INSTBUCHON PRATIQUE
où on lit : « Communicare volenti revocandum in «memoriam
ejus (c'est-à-dire de l'apôtre) praecep-tum : probet seipsum
homo. Ecclesiastica autem » consuetudo declarat eam probationem necessariam
» esse ut nullus sibi conscius mortalis peccati, quan-wtumvis sibi
contritus videatur, absque praemissa » sacramentali confessione ad
sacram Eucharistiam » accedere debeat. » C'est sur ces paroles
que se fonde l'opinion la plus vraie (1) et la plus générale
qui est enseignée par Suarez, Castropal., Lugo, Concina, Salm.,
Tournely, etc. (contre Navarre et autres), lesquels auteurs disent que
le précepte qui oblige à se confesser avant la communion
est non seulement un précepte ecclésiastique,mais encore
un précepte divin ; car l'apôtre atteste dans son épître
qu'il l'a reçu de la Bouche tie Dieu. <i Ego enim accipi a Do-»
mino quod et tradidi vobis. I. Cor., II. » A cela , le concile ajoute
: « Quod a christianis omnibus, ab his » etiam sacerdotibus,
quibus ex officio incubuerit «celebrare, hoc sancta Synodus perpetuo
servan-» dum esse decrevit, modo non desit illi copia con-«fessarii,
quod si necessitate urgente, sacerdos «absque praevia confessione
celebraverit quampri-» mum confiteatur. »
XXIII. Nous avons donc dit : i° que celui qui a commis un péché
mortel ne peut pas communier s'il ne se confesse auparavant. Nous disons
mortel, parce que les péchés véniels ne privant pas
de la grâce divine, quelque nombreux qu'ils soient, ils ne doivent
pas être un obstacle à la communion. Quant à la question
de savoir s'ils empêchent les fruits que Ton doit retirer de ce sacrement,
voyez
< (-0 N. a5o,-
POUR LES CONFESSEURS.
ce qui est dit au ?. ?. Mais on demande1 si celui qui se ressouvient
de quelque faute grave après s'être confessé avec un
repentir universel de tous ses pé-chés , est obligé
de faire une autre confession pour se faire donner l'absolution de cette
faute avant de communier. Un ^grand nombre de docteurs sont pour l'affirmative
(et du reste c'est l'opinion la plus commune). Voir Suarez, Bonac, Conc,
Tournely, Conine, Salm., etc. Ils en exceptent seulement le cas où
cette nouvelle confession ne pourrait pas se faire sans s'exposer à
l'infamie, ou à commettre un grand scandale. Mais c'est avec bien
plus de proba-bilité que la négative est soutenue par Garz.,Prepos.,
Ferr., Hon., Fab., Corr. etRegin.; enfin cette der-nière opinion
est vivement défendue par le savant continuateur de Tournely, ainsi
que par Pontas, Gibert et A.rriaga, qui prétendent que la première
est dénuée de tout fondement. Quant à moi, je ne me
hâte pas de croire à ces assertions ; mais cepen-dant je dis
que cette seconde opinion est réellement très conforme à
la raison, et je tiens cela du savant mons. Torni, et d'un autre illustre
théologien , exa-minateur synodal de la cité de Naples, amsi
que de plusieurs autres avec lesquels je me suis consulté avant
d'émettre une opinion sur ce point. Notre opinion est basée
sur ce que celui qui s'est confessé une fois a satisfait au précepte
de la confession avant la communion ; et cela est prouvé d'après
le com-mandement de l'apôtre, parce qu'au moyen de la confession,
ce péché oublié se trouve remis indi-rectement. Le
pénitent restera sans doute obligé de se confesser plus tard
de ce péché afin de compléter matériellement
sa confession; mais le précepte ne l'oblige pas à s'en confesser
avant la communion.
474
INSTRUCTION PHATIQUE
Les partisans de l'opinion contraire disent que le précepte
imposé par le concile exige que la confes-sion soit entière,
non seulement formellement, mais encore matériellement. Mais nous
leur répondrons que c'est là une assertion tout-à-fait
gratuite , parce que le précepte n'exige pas d'autre confession
que celle que doit faire le pénitent, c'est-à-dire la con-fession
formellement entière; car cette confession remplit le but et l'effet
du précepte , c'est-à-dire que l'âme reste éprouvée
et beaucoup plus assurée de la grâce divine qui s'acquiert
plus facilement par l'ab-solution sacramentelle, et qui suffit avec la
simple attrition pour effacer les péchés. En vain oppose-rait-on
à cela l'usage pratiqué par les fidèles, parce qu'il
ne doit pas être considéré comme une règle certaine
et obligatoire, mais comme une pratique pieuse et louable dont on doit,
du reste, conseiller l'observation toutes les fois que rien ne s'y oppose(i).
Quant à la question de savoir si, lorsqu'on est in-certain d'avoir
commis un péché mortel ou de ne s'en être pas confessé,
on est obligé de s'en confes-ser avant la communion, voyez ce qui
sera dit au n. 34.
XXIV. Nous avons dit 2° que la confession est obligatoire, pourvu
que l'on ne soit pas dans la né-cessité de célébrer
la messe ou de communier. Voyons maintenant ce que l'on doit entendre par
le mot né-cessité. On n'entend pas par là une grande
dévotion , ni même la pauvreté du prêtre, à
moins que ce soit une pauvreté très grave, comme dit Lacroix.
Mais on entend une nécessité urgente , comme i°, si l'on
devait porter le viatique à un moribond, ainsi que
POUR LES CONFESSEURS.
cela est admis par tous les auteurs (1); a" si l'on ne •pouvait différer
la communion sans déshonneur ou sans scandale grave, comme, par
exemple, si la personne s'était déjà placée
sur le banc des commu-niants et qu'elle ne put pas se retirer sans être
re-marquée par les autres, suivant l'opinion de tous les auteurs(2),
II en serait de même, si lorsqu'on a porté le viatique à
un malade, on ne pouvait pas lui laisser achever sa confession sans l'exposer
à la mort ou à l'infamie, parce qu'alors, suivant l'opinion
de Roncaglia, Sporer, Busembaum , Tamburini, etc., le prêtre,
après avoir entendu quelques péchés, doit absoudre
le moribond et lui donner la commu-nion en lui enjoignant de compléter
sa confession plus tard (5) ; 3° si le prêtre est obligé
de célébrer la messe pour que le peuple puisse l'entendre,
et s'il n'a pas d'autres prêtres pour la dire à sa place,
ou bien s'il ne peut se dispenser de la dire lui-même sans se couvrir
de honte. Mais cela n'est pas permis aux autres prêtres, estimés
probes, comme le remar-quent Lugo, Castrop., Aversa, Salm. et Roncaglia,
contre Diana , lors même que le peuple devrait res-ter sans messe
un jour de fête (4). Nous pensons également avec Suarez, Laymann,
Lugo , Bonacina, Tournely, Concina, etc., contre Soto et Silvius, que dans
un jour de fête , le prêtre doit plutôt se dis-penser
de dire la messe obligée, que de la dire sans la confession, parce
que le précepte de la confes-sion étant un précepte
divin, on doit le préférer au
(?) N. s6o. (a) N. a63.
(3) N. a6o.
(4) N.a6i.
INSTRUCTION PRATIQUE
précepte de la messe qui est simplement ecclésias-tique
(1). Quant à la question de savoir si, pour satisfaire au précepte
de la communion pascale, on peut communier avec la seule contrition , lorsqu'il
n'y a pas de confesseur, elle est résolue affirmative-ment par Soto
, Paludanus, Coninch., Henriquez, Castro., Lugo, etc., par la raison que
le précepte de la communion pascale est un précepte divin;
mais la négative est soutenue par Suarez, Tour-nely, Salmant., etc.,
qui disent que, dans ce cas, on est dispensé du précepte
de la communion pas-cale. Ces deux opinions paraissent également
pro-bables (2).
XXV. S'il arrive que pendant la célébration de la messe,
le prêtre se ressouvienne d'un péché mor-tel, il faudrait
distinguer (malgré l'opinion contraire de quelques auteurs) comme
le font Suarez, Vas-quez,Lugo, Castrop., Bonacina, etc., c'est-à-dire
que lorsqu'il ne s'en souvient qu'apfès la consécration,
il ne doit pas interrompre la messe pour se con-fesser, comme l'enseigne
saint Thomas (?), et comme cela est exprimé dans la rubrique (de
Defect. tit. 8, ?. 4)> bien entendu qu'il doit faire alors un acte de contrition
,· et quoique Lugo, Tamburini et autres disent que si le prêtre
éprouve beaucoup de difficulté à faire cet acte de
contrition dans un es-pace de temps aussi court, il pourra continuer la
messe , et qu'il lui suffira d'avoir tâché de le faire; néanmoins
cette opinion est combattue avec raison par le P. Concina , parce
que dans ce cas on doit
(1) N. 361. V. Si urgent.
(a) Ibid.
(5) 3. p. q. 83. a, 5. ad a.
POUR LES CONFESSEURS.
J^-jj
obéir au précepte divin, et d'un autre côté
nous sa-vons que Dieu ne commande pas des choses impos-sibles, ainsi qu'il
est dit au concile de Trente, sess. 6, ch. xi; qu'au contraire il nous
accorde la force de faire ou au moins de désirer ce que nous devons
faire. Ainsi donc si le prêtre omet de faire l'acte de contrition,
c'est par sa propre négligence ou bien parce qu'il est adonné
au péché. Si c'est avant la consécration, et spécialement
avant le canon, qu'il se ressouvient du péché, il doit se
confesser s'il y a là un confesseur, et s'il peut le faire sans
se déshono-rer; peu importe d'ailleurs que la messe soit inter-rompue,
parce que cette partie est extrinsèque par rapport au sacrifice
(1). Lorsqu'il ne peut pas se con-fesser et que cependant il n'est pas
exposé à se dés-honorer, il doit abandonner le sacrifice
suivant ??-pinion la mieux fondée, qui est celle de Lugo, Silv.,
Tournely, Silvestre et plusieurs autres ; c'est aussi celle de taint Thomas
(2) qui dit que c'est là l'opi-nion qui offre le plus de sécurité
(contre Castrop., Suarez, Navarre, saint Bonaventure, Victor, etc.), c'est
aussi l'opinion la plus conforme à la rubrique (? p., tit. 8, ?.
4 et 5), où il est dit : « Si ante con-» secrationem
recordetur sacerdos se esse in peccato » mortali aut se excommunicatum,
vel suspensum, » aut locum esse interdictum, si non timetur scan-»dalum,
debet missam incceptam deserere. «Nous avons aitplus conforme, parce
qu'il n'est pas certain que par le mot debet, la rubrique veuille imposer
un précepte grave. Du resie, Vasq., Laym., Castr. et Tourn. font
remarquer avec raison que dans ce
(1) Lib. VI. ?. 26a. dub. 1. (a) 5. p. q. 83. a. 6. ad 2.
478
INSTRUCTION PRATIQUE
cas il arrivera bien difficilement que le prêtre puisse sans
déshonneur interrompre la célébration de la messe
(?).
XXVI. Nous avons dit 5° s'il ne se trouve aucun confesseur,
cela signifie, i" lorsqu'il n'y a pas de con-fesseur présent, et
que d'un autre coté le prêtre ne puisse pas, sans un grave
inconvénient, aller trou-ver un confesseur absent. Suivant l'opinion
de Cas-trop., Vasquez,Salm. et autres, absent signifie si le confesseur
reste dans un lieu qui soit à une distance considérable,
par exemple (suivant la fixation don-née par les auteurs), si la
distance est de deux heures de chemin, ou même moins (comme dit Melch.,
Conc.) si la messe doit être célébrée dans très
peu de temps (2). Cela signifie, 20 s'il n'y a qu'un confesseur qui
ne connaisse pas la langue, ou qui soit privé de juridiction, ou
bien un confesseur tel que le prêtre ne puisse pas, sans inconvénient,
se confesser à lui (?).
XXVII. On demande encore i° si celui qui a un
péché réservé doit, afin de pouvoir commu-nier,
se confesser à un confesseur simple, lors-qu'il ne se trouve
pas sur les lieux un confesseur ayant la faculté. On répond
à cette question : si cette personne n'a pas d'autre péché
que le péché réservé, tout le monde s'accorde
à dire qu'il n'est pas obligé de se confesser, mais que,
vu la nécessité, il lui suf-fit de communier avec la contrition.
Mais s'il n'a que la simple attrition, il doit se confesser de quel-ques
autres péchés afin d'obtenir indirectement
(j) Lib. VI. ?. a6a. dub. (a) ?. 364. ad 1. (3) Ibid. ad. a.
POUR tES CONÏÉ5SEURS.
l'absolution du péché réservé ; mais s'il
avait des péchés mortels réservés et d'autres
non réservés, nous pensons, et c'est l'opinion la plus commune,
celle de Suar., Gastr., Viva, Lugo, Cjncina, Salin. et autres (contre Vasq.,
Tourn., etc.), qu'il est obligé de se confesser, parce qu'étant
soumis au pré-cepte de la confession avant la communion, s'il ne
peut pas faire une confession matériellement entière, il
doit la faire au moins formellement (i).
XXVIII. On demande 2° si, en supposant qu'il se confesse en pareil
cas à un conft sseur simple, on est obligé de lui déclarer
les péchés réservés comme les péchés
non réservés ; l'affirmative est soutenue avec raison par
Sot., Fill., Bon., Suarez, Viv., Conc, Salin., etc., parce que le confesseur
doit connaître toute la conscience du pénitent afin de pouvoir
juger s'il a ou non les dispe sitions néces-saires pour l'absolution;
pour savoir, par exemple, s'il a déjà contracté l'habitude
du péché ou s'il est dans une occasion prochaine, etc. IV!
ais c'est avec plus de raison que Castr., Gerson, suint Antonin, P. Soto,
de Halès, Salas, Led. et Lu jo professent la négative; cette
opinion est fondéî, soit sur ce qu'on ne peut pas être
obligé de dire ses péchés à un prêtre
qui ne peut pas en être juge, attendu qu'il n'a pas de juridiction,
soit parce que cela astreindrait le pénitent à se confesser
deux fois des mêmes pé-chés. Quoiqu'il soit incontestable
que si le pénitent avait péché par habitude, ainsi
que nous l'avons dit, et qu'il ne lût pas moralement certain de ses
dispo-sitions, il devrait déclarer tous ses pdcfiés au con-fesseur
afin qu'il pût juger s'il est ou non disposé
(i) Lib. IV. ?. 265.
48?
INSTRUCTION PRATIQUE -
pour l'absolution ; néanmoins on ne doit voir là qu'une
chose accidentelle et non pas un acte fait pour se conformer à l'obligation
de faire une con-fession qui soit matériellement entière,
car alors il suffit, pour ainsi dire, qu'elle le soit formelle-ment (1).
XXIX. Si une personne qui a une excommu-nication réservée
et qui se trouve dans la nécessité de communier n'a aucun
confesseur à qui elle puisse en demander l'absolution, on s'accorde
à dire qu'elle peut communier sans cette absolution parce que le
précepte de la communion qui éloigne de ce sacrement les
personnes excommuniées n'est pas obligatoire lorsqu'il n'y a pas
d'autre moyen d'évi-ter le scandale ou l'infamie. Mais on élève
des doutes sur la question de savoir si dans ce cas on peut se confesser
à un prêtre qui n'a pas la faculté d'absoudre de l'excommunication
; la négative est soutenue avec raison par Silvestre, Can., Sot.,
Vas-quez, etc., qui disent que l'on peut communier pourvu qu'on ait la
contrition ; mais on ne peut pas recevoir le sacrement de pénitence
parce que l'ex-communication s'y oppose. Mais l'affirmative est soutenue
avec plus de raison par Suarez, Sanchez, Lugo, Con., lesSalm., etc., parce
que, dans un pa-reil cas de nécessité, de même que
l'excommunica-tion n'est pas un obstacle au sacrement d'eucha-ristie ,
de même aussi elle ne doit pas être un obstacle au sacrement
de pénitence, puisque le sa-crement doit, toutes les fois que cela
est possible, précéder la communion pour se conformer au
pré-cepte divin qui ordonne de faire précéder la coin·
(?) N. 265. q. a
POUR LES CONFESSEURS.
munion par la confession ; et les auteurs précités démontrent
que l'on peut très bien être absous du péché
sans l'être de l'excommunication, parce que l'Église en imposant
la censure ne peut pas empê-cher l'effet des sacrements qui sont
d'institution divine. Sans doute celui qui est frappé d'excommu-nication
ne serait pas valablement, absous s'il se con-fessait, parce qu'il n'aurait
pas les dispositions né-cessaires, attendu que l'Église lui
défend de recevoir ce sacrement ; mais lorsque la nécessité
l'a affranchi de cette prohibition, il peut alors valablement rece-voir
l'absolution sacramentelle (1).
XXX. Nous avons dit en dernier lieu que si le prêtre célèbre
la messe ayant sur la conscience un péché mortel, et sans
s'être confessé par suite d'une nécessité et
de l'impossibilité où il se trouve de se confesser, le concile
a ordonné qu'après la célébra-tion «
quam primum confiteatur » ; et ce n'est pas là un simple conseil,
comme le disait la propos. 38 condamnée par Alex. Vil, mais un vrai
précepte grave. En admettant donc un tel précepte, on de-mande
i° comment on doit entendre le mot quam primum $ quelquesauteursl'expliquaientainsi:
« Cum «sacerdos suo tempore confitebitur.» Mais cette
stupide explication fut également condamnée par le même
pape dans la propos, ? g. D'autres pensaient que cela voulait dire : lorsque
le prêtre voudra de nou-veau célébrer la messe; mais
cette interprétation n'est pas plus fondée, parce que le
concile ordonne au prêtre de se confesser immédiatement.après
la célébration, c'est-à-dire lors même que le
prêtre voudrait ensuite s'abstenir de dire d'autres messes ;
(i) N. aCS.V. Ones'· 3·
?, ????,
31
48s
INSTRUCTION PRATIQUE
d'autres disent, peut-être avec trop de sévérité
, que le prêtre doit se confesser aussitôt qu'il peut trouver
un confesseur, même dans le même jour s'il le peut; voirWigandt
et Concina; mais nous préférons l'opi-nion commune, soutenue
par Mons. Milante, Coti-cina, Lus;o, Escobar, Viva et autres, ainsi que
La-croix (cedernier rapporte encore une déclaration de la sainte
C. pour cet objet), qui dit qu'il suffit que le prêtre se confesse
dans l'espace de trois jours, par analogie de l'obligation imposée
à ceux qui ont été absous de l'excommunication réservée,
parce qu'ils se trouvaient dans un danger de mort, c'est-à-dire
l'obligation de se présenter au supérieur, « Quam »cito
commode possint, » ainsi qu'il est ditauch. Eosque de sent, excomm.
(sous peine de retomber en censure), laquelle obligation doit également
être remplie dans trois jours. Voir Lugo, Garz. et MU, II en est
de même de l'obligation d'apporter aux évê-ques les
livres des hérétiques. Voir Sanch., Ugol. et Sacr. Cependant
les auteurs précités font remarquer que dans certains cas
le prêtre peut par accident être obligé de se confesser
dans le même jour et peut-être dans la même heure; par
exemple, si le confesseur devait tout de suite partir pour un en-droit
éloigné, ou bien si le prêtre était obligé
de célébrer la messe le lendemain et qu'il ne dût pas
y avoir de confesseur ce jour-là (1).
XXXI. On demande 1° si ce précepte oblige le prêtre
qui, en célébrant la messe, ne se souvient de son péché
qu'après la consécration : Vasquez, Pel-lizia, Lugo et Diana
professent la négative à cause de la rubrique (tit. 18, ?.
5 et 4), laquelle dit, àl'é-
(1) lib, VI. ?. a66. V. Posito.
PQUH tES CONFESSEURS.
gard de celui qui se rappelle un péché avant la célé-bration,
«Tenetur confiteri quam primum; » mais à l'égard
de celui qui se le rappelle après la consé-cration , elle
dit seulement : « Conteratur cum pro-» posito confitendi. »
Cette opinion ne parait pas dénuée de fondement, mais l'opinion
contraire est plus commune et peut-être plus probable; elle est soutenue
par Suarez, Malfez, Megnola, Bonacina, Reginald., etc., par la raison que
le cas prévu par le concile se trouve alors réalisé,
celui où le prêtre célèbre avec un péché
dont il ne s'est pas confessé; d'autant plus qu'avec le mot confitendi
employé par la rubrique, on peut facilement sous-enteudre le mot
quam primum un peu avant la rubrique ci-dessus mentionnée (1).
XXXII. On demande 5° si ce précepte oblige aussi les. prêtres
qui commettent un sacrilège en célébrant la messe,
ou qui étant obligés de se confes-ser et en ayant la facilité,
disent la messe sans s'être confessés. Quelques auteurs disent
que ce précepte leur est applicable ; mais la négative est
plus com-munément et avec plus de raison professée par Suar.,
Vasquez, Lugo, Filliutius, Laym., Moya., etc., par la raison que le précepte
du concile n'a été fait que pour ceux qui ont célébré
de bonne foi, afin de les empêcher de différer la confession
en prétextant la nécessité de célébrer,
mais non pas pour les sacrilè-ges , qui ne doivent pas profiter
du bénéfice de ce précepte ; parce que celui qui méprise
le précepte divin, en célébrant la messe malgré
le péché dont il est coupable , devra mépriser bien
plus facilement
(?) ?. 267.
484
INSTRUCTION PRATIQUE -
le précepte ecclésiastique qui lui ordonne
de se confesserleplus tôt possible.
XXXIII. On demande 4° si ce précepte de se confesser quam
primum ( le plus tôt possible) oblige également les laïques
qui par nécessité com-munieraient sans s'être confessés.
Azor, Na-varre, Coneina et Tournely professent l'affir-mative, disant qu'il
y a la même raison pour les séculiers que pour les prêtres,
et il est de règle générale que ubi currit eadem ratio
, ibi currit eadem legis dispositio. Mais l'opinion contraire est plus
commune et plus probable, elle est soutenue par Vigandt, Ooninch., Suarez,
Vasquez, Layman, Conacinaf, Fill, et Lugo qui assure que la première
est généralement repoussée. Cette opinion est fon-dée
sur ce qu'en réalité on ne peut pas appliquer aux laïques
la même raison qu'aux prêtres. Car la nécessité
de célébrer afin d'éviter le scandale est ordinairement
plus forte pour eux que celle de communier ne l'est pour un séculier
(1).
XXXÏV. L'on demande 5° si celui qui n'est pas certain d'avoir
la grâce nécessaire peut néanmoins recevoir la communion
; j'ai répondu à cela dans mon ouvrage (a) que celui qui
doute s'il est ou non dans le péché, ne peut pas communier
; mais après de plus grandes réflexions il me paraît
que l'on doit établir une distinction ; je dirai donc ainsi : si
l'on doute que le péché soit ou non mortel, on peut s'ap-procher
du sacrement de la communion sans avoir besoin de se confesser auparavant
; et peu importe jme le doute soit positif ou négatif ( attendu
qu'il
(?) ?. 268.
(a) Pi. 43a et 576.
POUR LES CONFESSEURS,
suffit de faire précéder le sacrement d'un acte de contrition
, pour en recevoir les fruits avec plus de sécurité), parce
que le précepte de l'apòtre,probet autem seipsum homo , lequel
précepte impose l'obli-gation de communier,comme l'a expliqué
le concile de Trente, ne s'applique qu'à ceux qui, étant
certains d'a-voir commis un péché mortel, ne s'en sont pas
encore confessés, ainsi que cela a été déclaré
par le concile, sess. i5, chap, vi, où il est dit : « Ut nullus
sibi «conscius peccati mortalis ad Eucharistiam aece-» dere
debeat. » Ainsi donc le précepte de l'appro-bation ne devient
obligatoire que lorsque l'on a connaissance de sa faute. Mais si l'on est
certain d'a-voir commis un péché mortel, on ne peut pas com-munier
avant de s'être confessé, parce qu'alors on est indubitablement
soumis au précepte de l'appro-bation. Par conséquent, lorsqu'on
a un doute po-sitif ou négatif si l'on a perdu la grâce (
par exem-ple, lorsqu'on est incertain si la confession a été
nulle à cause de la disposition ou de la juridiction, ou si l'on
doute de sa contrition dans le cas où on communierait par nécessité
), on ne peut pas rece-voir la communion, parce qu'alors on irait contre
le précepte qui exige une épreuve non pas seulement probable,
mais encore certaine, comme le péché qui a été
certain.
§ III. De la disposition du corps,
35. Du jeûne naturel. S'il y a doute sur le jeûne.
Si les pendules ne sont pas d'accord. Le jeûne est rompu par ce qui
se prend dehors.
36, Des restes de nourriture.
486
INSTRUCTION PRATIQUE
?)?. Des restes d'eau, de sucre, etc.
38. Du tabac pris par le nez.
39. De celui qui est pris en fumée.
40. Du tabac et des aromates mâchés.
41. De l'eau ou autre liquide introduit par les narines, volontairement
ou par cas fortuit.
42 et 43· Si les cheveux , les pierres, le pa-pier, etc., rompent
le jeune. 44· Si, sans avoir digéré, etc.
45. Cracher après la communion.
46. Dans quels cas le jeûne n'est pas obligatoire, et i°
pour le viatique. Si l'on peut renouveler le viatique.
47. Combien de fois.
48. Si celui qui a communié le jour précédent
par dévotion, etc.
4g. Celui qui a communié le matin même.
50. Si l'on peut omettre les paroles Accipe via-ticum.
51. 2° Si, pour donner le viatique, le prêtre
peut célébrer la messe sans avoir jeûné.
52. 3e On n'exige pas le jeûne lorsque cela fait craindre
pour le respect du sacrement.
63. 4° Si l'on craint le scandale. Si celui qui célè-bre
la messe se rappelle qu'il n'est pas à jeun.
54· ">° Si l'on doit perfectionner le sacrifice. Que doit-on
faire si l'on découvre qu'on s'est trompé de vin? Et dans
le doute, etc.
55. 6* Si; pour se soustraire à un danger
de mort, on peut célébrer la messe sans être à
jeun.
56. Si une pollution empêche la communion.
57. Si la copulation des époux l'empêche.
58. Celui qui a un extérieur sale ou qui a la lèpre,
ou les menstrues, ou qui se présente d'une manière
POOH LES CONFESSEURS.
487
indécente. Le prêtre qui communie à la manière
des laïques.
XXXV. Pour que la communion soit valable (suivantle précepte
de l'Église, au chap. Ex parte de celeb.) , il faut, régulièrement
parlant, le jeûne naturel, c'est-à-dire que le communiant
n'ait rien mangé ou bu depuis le milieu de la nuit précédente.
Néanmoins le simple doute d'avoir avalé quelque 'chose depuis
le milieu de la nuit n'est pas un ob-stacle à la communion, ainsi
qu'il est dit au chap, ?, n. 19, parce que (comme on le prouve) ce n'est
pas là un précepte positif qui ordonne>d'aller à jeun
à la communion, mais un précepte négatif qui dé-fend
de communier après avoir rompu le jeûne ; par conséquent
tant qu'il n'est pas certain que le jeûne ait été rompu
, la possession n'est pas pour la prohibition, mais pour la liberté
de celui qui veut communier. C'est ce qui fait dire à Sanchez, Lugo,
Merati, Holzmann , Lacroix , Salm., Quarti, Es-cobar , Villalobos, Trullench,
Fagundes , etc., que sur plusieurs pendules, on a la liberté de
se régler sur la dernière qui frappe l'heure do minuit, à
moins que l'on ne sache que celle-là est dérangée
; et à moins (comme ajoute très bien Lacroix) que cette dernière
pendule n'ait pas un retard très considé-rable, parce qu'alors
on doit présumer qu'elle est dérangée (1). Mais il
faut remarquer ici que le point qui fixe la moitié de la nuit, n'est
pas le dernier coup delà pendule, comme le veulent les Salm. et
autres, mais son premier coup, suivant l'opinion de Lugo , Sanchez, Tournely,
etc. Je tiens même cela d'un très habile fabricant de pendules
qui me l'a
(1) Lib, VI, ?. u8a.
488
INSTRUCTION PRATIQUE
assuré. Par la même raison , c'est-à-dire parce
que le pre'cepte de ne pas communier après qu'on a pris de la nourriture
ou de la boisson, quoique ecclé-siastique, ce précepte n'admet
pas de matière petite, ainsi que cela est reconnu par tous les docteurs,
quoi qu'en disent Giberto et Pasqualigo. Pour rom-pre le jeûne, il
faut trois choses, d'après les règles prescrites par tous
les docteurs: i°que ce que l'on avale soit pris par dehors; 2°
qu'on le prenne comme nourriture ou comme boisson ; 3° que ce que l'on
prend soit considéré comme une nourriture ou comme une boisson.
Ainsi donc, d'après la pre-mière règle, il faut que
la chose que l'on prend pro-vienne du dehors ; voir Suarez, Lacroix, Elbel
, Sporer et saint Thomas (i), qui dit que, pour ce qui vient du dedans,
on ne peut pas dire que ce soit manger, et par conséquent cela ne
détruit pas le jeûne (2). Cela posé , ou peut permettre
la commu-nion à celui qui aurait avalé du sang provenant
de la tête ou des gencives, lors même qu'il l'aurait fait avec
intention; voir Suarez, Laymann, Bonacina, Cabassut, Habert, Antoine, Salm.,
etc. (contre Tournely), parce que (comme nous l'avons dit avec saint Thomas
) (3), ce qui ne se prend pas du dehors ne s'appelle pas manger.
XXXVI. Il s'élève des doutes sur la question de savoir
si celui qui avale volontairement des restes de nourriture restés
dans sa bouche rompt le jeûne. Suai*., Quar., Henr., Gastr., £lb.,
Conc. et autres se prononcent pour la négative, en disant que ces
(1) In 4· distin. 8. q. 1. a. 4· <?·
2,
(2) Lib. VI. ?. *78 el 279·
(?) ?. 379· in fia V. Secus vero.
POUR LBS CONFESSEURS.
restes doivent être moralement considérés comme
faisant partie du repas de la veille. Il paraît que cette opinion
est aussi conforme au sens de la ru-brique du missel (de Defect., ?. ?),
car elle porte : « Si reliquiae cibi remanentis in ore transglutiantur,
«non impediunt communionem, cum non transglu-» tiantur per
modum cibi, sed per modum salivae. » Cependant beaucoup d'autres
auteurs s'accordent à soutenir l'affirmative ; ce sont Vasquez,
Laymann, Bonacina, Tournely, Roncaglia, Cabassut, etc., qui disent que
lorsque ces restes sont avalés avec inten-tion, ils doivent être
considérés comme un nouveau repas. C'est aussi l'opinion
de saint Thomas (1), qui dit : « Reliquiae cibi remanentis in ore,
si casualiter » transglutiuntur, non impediunt communionem. »
Par conséquent (suivant le docteur angélique), si on les
avale volontairement, cela empêche la commu-nion. Cette
seconde opinion paraît plus raisonna-ble, quoique la première
ne soit pas sans fonde-ment. Mais parce qu'en cette matière on ne
doit pas se montrer trop scrupuleux (comme le fait remar-quer le P. Suar.),
j'embrasserais volontiers l'opinion du cardinal de Lugo, adoptée
aussi par le pape Be-noît XIV (2) dans son ouvrage sur la messe,
laquelle opinion veut que l'on crache les restes attachés aux dents,
lorsqu'on les sent sur la langue. Mais, d'un autre côté, on
n'est pas obligé de les extraire avec soin d'entre les dents, quoiqu'on
puisse prévoir que si on ne les en extrait pas on les avalera, car
cette obligation serait la cause d'un trop grand nombre de scrupules. Il
paraît même que c'est là ce que veut
(1) 5. p. q. 86. a. 8. ad. 4. (a) De sacrif. miss. 1. HI c. 17.
INSTRUCTION PRATIQUE
dire la rubrique précitée, lorsqu'elle dit que ces restes
sont avalés comme de la salive (1).
XXXVII. On doit en dire de même des restes de l'eau avec
laquelle on s'est rincé la bouche, lesquels empêchent également
la communion lorsqu'on les avale avec intention, mais non pas lorsque c'est
sans intention. Voir Suarez, Castropa., Tournely, Holz-mann, Salm.,etc,
ainsi que saint Thomas à l'endroit précité où
il dit : « Et eadem ratio est de reliquiis ) aquas, vel vini,
quibus os abluitur, dummodo non » trajiciantur in
magna quanti ta te, sed permistœ «salivae, quod vitari
non potest.» C'est encore ce qu'enseigne la rubrique
en disant : « Idem dicendum (c'est-à-dire que le jeûne
n'est pas rompu) si lavando »œs, deglutiatur stilla aquae propter
intentionem. » Donc si l'eau est avalée avec intention, le
jeûne est rompu (2). Il est hors de doute que le jeûne se trouve
rompu si, ayant mis dans la bouche un morceau de sucre ou de miel avant
minuit, on l'avale après. Il en est de même de celui qui avale
le sang qu'il a tiré de son doigt en le suçant ou les larmes
qui.coulent de ses yeux. Voir la plupart des docteurs. Il en est de même
encore de celui qui, étant tombé dans une rivière
ou étant "violenté par d'autres personnes, aurait avalé
de l'eau ou tout autre liquide (5).
XXXVIII. D'après la deuxième règle,
il faut pour rompre le jeûne prendre quelque chose en qualité
de nourriture ou de'boisson; c'est pourquoi Suarez, Lugo, Goncina, Holzmann,
Roncaglia, Escobar, Lacroix, Elbel et autres (malgré
ce qu'en disent
(1) Lib. VI. n. 279.
(a) Ibid. dub. a.
(3) Lib. VI. ?, 279.V. idem.
POUR LES CONFESSEURS.
quelques uns) pensent que le tabac pris par lesnarines ne rompt pas
le jeûn«, lors même que par accident il en parviendrait
quelque morceau dans l'estomac ; car il y parviendrait non pas par comestion,
mais par attraction) du moins à ce que dit Benoît XIV dans
son ouvrage de Synodo (?). Ce cas est permis par l'usage universel des
fidèles. ? faut remarquer ici que le même pontife rapporte
qu'Innocent X et Innocent XII ont prononcé l'excommunication con-tre
ceux qui prennent du tabac dans l'église du Va-tican , et Urbain
VlII a étendu cette prohibition aux églises d'Espagne ; mais
elle a été abolie par Be-noît XIII (s).
XXXIX. De même, le tabac pris en fumée ne rompt pas le
jeûne, comme l'enseignent encore Suar., Villalobos, Trullench , Salm.,
Aversa, Holz., Viva, Lacroix, Sporer, etc., ainsi que te même Be-noît
XIV (?), qui atteste que cet usage est aujour-d'hui communément
suivi et qu'il est confirmé par l'assentiment de tous les docteurs.
Cependant les Salm. font une restriction en disant que le jeûne se-rait
rompu si de propos délibéré on envoyait la fumée
dans son estomac, en disant que ce serait réellement manger, parce
que cette fumée sert en quelque sorte de nourriture ; mais cette
restriction est rejetée avec raison par Escobar, Preposi., Marchand,
Viva, Sporer, Renzi, Tamburini, Diana, etc.; la raison en est d'abord que
la fumée ne se prend jamais pour nourriture , comme nous le dirons
à la troisième règle, et ensuite parce qu'en réalité
ce n'est pas là
(1) Lib. VII. c. 65.
(a) Lib. VI. ?. ?8?.
(?) De sacrif. miss. 1. III· c. 17.
492
INSTRUCTION PRATIQUE
une nourriture comestible et manducable, et que l'Église ait
eu l'intention de prohiber, suivant l'opi-nion de la plupart des docteurs
(1).
LX. De même le jeûne n'est pas rompu par le ta-bac ou les
plantes aromatiques que l'on mâche, pourvu qu'on en rejette le jus
en crachant. Voyez encore Lugo, IJolz., Bonacina, Sporer, Goncina, Prep.,
Trullench,Salm., Viva,Renzi, contre Henno, qui s'obstine à soutenir
que, lorsqu'on mâche ces choses-là il s'en transmet toujours
quelque portion dans le gosier, et (d'après lui) c'est de là
que pro-viennent ensuite les crachats. Mais le cardinal de Lugo répond
à cela que, pour arracher les crachats, il n'est pas nécessaire
que le jus arrive à l'estomac, il suffit de mâcher le tabac,
car cela seul transmet à l'estomac, par le moyen des nerfs qui y
correspon-dent, la force de rejeter les crachats. Cela a lieu suivant Tanner,
Lugo, Escobar,Tamburini,Viva, etc., lors même que l'on avalerait
quelque peu de jus mêlé avec la salive (pourvu qu'on ne le
fasse pas à dessein), car alors on n'avale pas cela comme nour-riture,
mais simplement comme salive. Lorieh excuse même celui qui en avalerait
quelques grains entiers ; mais cette opinion est justement rejetée
parBonac. et Tamburini. Il en serait autrement si l'on n'en-gloutissait
qu'une parcelle mâchée qui se serait mê-lée insensiblement
avec la salive, car alors cela serait réellement avalé en
forme de salive. Du reste, tous les auteurs conviennent qu'il est indécent
de mâcher ainsi du tabac avant la communion. C'est par con-séquent
un péché véniel, à moins qu'on n'ait quelque
motif pour le faire (2).
(1) Lib. VI. cit. n. 280. dub. 2. (3) Ibid. dub. ?
POUR LES CONFESSEURS.
XLI. Suaiez, Fagundez, Tamburini, etc., pré-tendent
encore que lo jeûne n'est pas rompu par l'eau que l'on
prend par les narines, comme le tabac, et qui arrive à
l'estomac' Mais, quant à moi, je ne puis pas admetre cela lorsqu'on
le fait avec intention, soit pour l'eau, soit pour le tabac, soit pour
toute autre chose qui peut être digérée ; parce
que, malgré que ce ne soit pas manger ni boire, mais seulement
aspirer, néanmoins, lors-qu'on le fait avec
intention, et qu'on s'applique à faire arriver la
nourriture ou la boisson dans l'estomac, on
doit moralement considérer cette action comme si c'était
manger ou boire, parce que ce fait réunit
d'abord la matière potable ou manducable, et ensuite l'action
pour arriver au même but que l'on atteindrait en mangeant
ou en buvant (?). Il en serait autrement si ce n'était que par hasard
que l'on eût envoyé quelque chose dans l'estomac. Navarre,
Suarez, Lugo, Habert, Goncina, Roncaglia, Salm., etc., en disent de même
pour ce qu'on avale en respirant; par exemple un peu de poussière
dispersée par le vent, un moucheron, une goutte
de pluie, ou autre chose semblable ; si c'est par hasard qu'on l'avale,
cela ne rompt pas le jeûne; mais cela le rompt si on l'a pris avec
inten-tion , car alors c'est réellement manger ou boire (2). XLII.
D'après la troisième règle, il faut, pour rompre le
jeûne, que ce que l'on prend ait la qualité de nourriture
ou de boisson ; dès lors on demande si, lorsqu'on a avalé
des cheveux, des ongles, des pierres, du bois, du papier, ou autres choses
sem-
()) Lib. VI. ?, a8o. V. Uub, a. (s) Ibid.
INSTRUCTION PRATIQUE
blables, cela empêche la communion; quelques auteurs professent
la négative pour tous les cas; ce sont Ledesma', Busembaum , Diana,
Renzi, etc., qui se fondent sur la règle que nous venons d'énon-cer,
attendu que ces choses-là ne sont pas considérées
comme nourriture'; du moins, d'après l'usage on ne les fait pas
servir de nourriture. Mais d'autres au-teurs, tels queLaymann, Castropa.,Wigandt,
Ronca-glia et les Salm., sont pour l'affirmative dans tous les cas, disant
que le respect dû à la communion exige qu'on ne mette rien
dans son estomac quand on va la recevoir. Maïs je préfère
l'opinion la plus commune et la plus probable, qui est celle de Lugo, Concina,
Tournely, Escobar, Holzm., Viva, Sporer et autres, qui établissent
une distinction, disant que le jeûne n'est jamais rompu par les choses
quine peu-vent pas être digérées, telles que les cheveux,
le métal, le cristal, la corne, et lesfils de soie ou de laine,
parce que ces choses·là ne-nourrissent pas et ne peuvent
sous aucun rapport être considérées comme nourri-ture.
Les partisans de l'opinion contraire s'appuient sur saint Thomas ; mais
nous avons prouvé dans le courant de cet ouvrage que saint Thomas
n'est pas opposé, au moins ouvertement, à notre opinion (1).
XLIII. Tout ce donc qui peut être digéré rompt le jeûne,
c'est-à-dire tout ce qui se dissout dans l'estomac de manière
à passer dans la substance du corps, tels sont le.papier, la paille,
les fils de lin, les poudres médicales, la cire, parce qu'ordinaire-ment
elle conserve quelque peu de miel. Lugo, Wigandt, Escobar, Viva et Maazota
disent la même chose pour la terre ou craie que mangent ordinai-
(1) Lib. VL n. 281.
POUR ???8 CONFESSEURS,
rement les femmes; car (d'après ces auteurs) il s'y trouve toujours
quelque partie qui peut se dissou-dre dans l'estomac et devenir nutritive
(1).
XLIV. Remarquez i° que si l'on s'approche de la communion aussitôt
après avoir mangé (après mi-nuit bien entendu), mais
sans ayoir dormi ou sans avoir digéré, cela n'empêche
pas la communion, sous le rapport du précepte qui ordonne le jeûne,
comme l'enseignent Suarez, Juenin, Bonaeina, Sot., Nav., etc. Du reste,
Tournely, Concina, saint Tho-mas (2), font remarquer avec raison qu'il
convient quelquefois de s'abstenir de la communion à cause de l'engourdissement
de l'esprit, par lequel (comme dit l'Ang.) « homo sit ineptus ad
sanctiones hujus sacramenti. » Mais cela ne veut pas dire cependant
que l'on doive se priver de la communion lorsqu'on a fait son possible
pour dissiper cet engourdisse-ment, et pour se présenter décemment
à la com-munion, particulièrement si la veille ou l'indigestion
sont provenues d'un motif juste et naturel, ainsi que nous l'expliquerons
au numéro 56 dans un cas semblable (3).
LXV. Remarquez 20 que ce n'est pas une faute de cracher aussitôt
après la communion, toutes les fois que l'on ne doit pas raisonnablement
soupçonner que quelque fragment d'hostie soit resté dans
la bouche. Voir Sanchez, Azor, fipnacina, Wigandt, Holzmann, Lacroix et
saint Thomas (4). Holzmann en dit de même pour celui qui mange ou
qui boit
(1) Lib. VI. ?. a8i. V. Si vero. (a) 3. p. q. 80. a. 6. ad. 5. (?)
Lib. VI. ?. a8g. V. Hic ultimo. (4) 3. p. q. 80. a, 8. ad. 6.
496
INSTRUCTION PRATIQUE
aussitôt après la communion, parce que, (juoiqu'au-trefois,
d'après le chap. Tribus, de Consecr. dist. 9, on dût faire
durer le jeûne jusqu'à sexte, cependant saint Thomas atteste
que ce précepte n'était déjà plus observé
de son t'emps. Du reste, il y aurait péché véniel
si on le faisait sans un juste motif, pendant que les espèces consacrées
sont encore dans l'estomac (comme, par exemple, dans un quart d'heure,
du moins pour ce qui concerne les prêtres). Voir Suarez, Aversa,
Quarti, Lacroix, Decastillo et saint Thomas, qui ajoute, dans le passage
précité: « Debet esse aliqua mora inter sanctionem
hujus «sacramenti, et reliquos cibos. » Nous avons dit : sans
Juste motif, parce que lorsqu'on a un juste motif, il n'y a pas de péché.
Par exemple, si le reli-gieux était forcé de se rendre au
signal qui les appelle tous à table, ou autre motif semblable (1).
XLVI. Voyons maintenant dans quels cas on peut prendre la communion
sans avoir jeûné. On le peut i° lorsqu'on la prend pour
viatique dans un danger de mort. Nous avons dit danger, parce que, pour
recevoir le viatique, il n'est pas nécessaire, ni même·convenable,
d'attendre qu'il n'y ait plus aucun espoir de vie; mais il suffit que le
danger de mort soit probable. Aussi les docteurs s'accordent-ils à
dire que l'on peut prendre le viatique plusieurs fois même pendant
1a même maladie; car l'objet de ce sacrement n'est pas seulement
de satisfaire au précepte, mais encore de fortifier contre les tenta-tions
qui deviennent plus nombreuses et plus dan-gereuses au moment de la mort,
et on le peut non seulement pour un nouveau danger <jui serait sur-
(1) Lib. VF. n. a85. V, Omnes.
POU» Ï.ES CONFESSEURS.
497
venu , mais encore pour le même, s'il continuait, suivant Soto,
Suarez, Toledo, Laymann, Silvius et Benoît XIV (i),qui recommande
aux évêques d'aver-tir les curés qu'ils doivent administrer
le viatique jusqu'à deux et trois fois dans la même maladie
(2). XLVII. Les doutes qui s'élèvent sont i° sur la question
de savoir quel est l'intervalle qu'on doit mettre entre une communion et
une autre. Silvius, Concina, Tourn., Busembaum, Salm.,,etc, disent ordinairement
qu'il faut huit jours ; d'autres, tels qu'Arnnlla, Filliutius, Diana, Possevin,
etc., disent six jours; et ce n'est pas sans raison queLaymann, Escobar,
Roncaglia et Hurtado vont jusqu'à dire que le viatique peut être
renouvelé même le jour suivant lorsque le malade est une personne
qui avait coutume de communier souvent, et lorsque le danger de mort est
imminent. De même Castro-palao, Armilla, Tamburini et Decastillo
admettent généralement qu'on peutle renouveler quelque jour
que ce soit (3).
XLVIII. On demande 20 si celui qui a communié par dévotion
quelques jours auparavant est tenu de prendre le viatique, lorsqu'il se
trouve en danger de mort. Cette question est en général résolue
négati-vement, lors même que la communion qui a précédé
la maladie date de huit jours. Voir Laym., Suarez, Concina, Roncaglia,
Bonacina, etc. Cette opinion est fondée sur ce que, par le moyen
de cette com-munion , le malade s'est déjà préparé
à la mort et a rempli le but du précepte. Nous pensons qu'elle
est
(1) De synodo. lib. VIL
(2) Ibid. n. 5.
l3) Lib. VI. ?. 284 et 285.
?. ????.
3 a
INSTRUCTION PRATIQUE
assez probable, au moins, comme disent Lugo et Suarez, lorsque le danger
de mort est survenu naturellement; car alors on doit présumer que
le danger avait commencé moralement dès l'époque même
de la communion. Mais c'est avec plus de probabilité que Vasquez,
Ciistr., Conc, Tourn., Habert, Diana,Salin., etc., soutiennent l'affirmative,
parce que ce précepte ( qui esr un précepte divin) devient
obligatoire précisément au moment où le danger de
mort est actuel; et de même qu'on ne peut pas satisfaire une dette
avant de l'avoir con-tractée, de même aussi on ne peut pas
accomplir un précepte avant qu'il ait commencé à être
obligatoire. En vain dit-on que la communion précédente a
rempli le but du précepte, parce que, si cela devait suffire, il
suffirait, pour accomplir celui de la com-munion pascale, que l'on eut
communié la veille du dimanche des Rameaux, et c'est là une
proposition qui n'est pas soutenable (i).
XLIX. On demande 5° si celui qui a communié le matin par
dévotion doit ou peut prendre le via-tique le soir s'il tombe en
danger de mort. Sur cette question il y a trois opinions différentes
: la pre-miere dit qu'il doit prendre le viatique pour accom-plir le précepte
; la deuxième dit qu'il n'y est pas obligé, mais qu'il peut
le faire ; voir Roncagha, Go-bert, Anaclet, etc. ; la troisième
dit que non seule-ment il n'y est pas obligé, mais même qu'il
ne le peut pas, attendu que les usages de l'Eglise ne per-mettent pas de
communier deux fois dans la même journée. Benoît XIV
dit à l'endroit précité (2), que, sur ces trois opinions,
le curé peut suivre celle qui
(1) Lib. VI. ?. 285. dab. 2. (3) Desyuodo. Jib. VII. c. 13.
POtIR Ï.KS CONFESSEURS.
499
lui convient,1emieux, et, par conséquent,il les donne toutes
trois pour également probables. Du reste, je pense que la
meilleure opinion est celle du cardi-nal de Lugo, qui distingue, et dit
que dans une ma-ladie violente résultant,par exemple, d'un coup
ou d'unechute,le malade peut communier,mais qu'une le peut pas dans une
maladie naturelle, parceque ce-lui qui a communié le matin étant
déjà atteint d'une maladie (laquelle devient mortelle dans
le même jour), esl censé avoir communié dans la vue
de la mort, puisqu'il renlermait déjà moralement le dan-ger
de mort ,.quoique non encore manifeste. On' doit en dire de même
avec le P. Suarez, de l'apoplexie; car l'on,présume alors que celui
qui en est attaqué en renfermait déjà les germes au
montent où il a com-munié (1). 11 faut remarquer avec Viva
et les Sal-mant., etc., que si le malade peut facilement sup-porter le
jeûne pour le jour suivant, on doit at-tendre jusque là à
lui donner le viatique, pourvu qu'il ne coure pas le danger de mourir pendant
cet intervalle, ou bien qu'en observant le jeûne le len· demain,
il ne soit pas obligé de négliger une méde-cine qu'il
serait opportun qu'il prît; il en serait encore dispensé
si on devait lui apporter le sacre-ment au milieu de la nuit. Du reste,
Soto, Navarre, Filliutius, Salm. et la plupart des auteurs disent avec
raison que l'on ne doit pas s'arrêter à des scru-pules
trop légers; car le concile de Constance, sess. 13,exempte,
en règle générale,les moribonds de l'obligation du
jeûne (aJ.
L. On.demande 4° si, en administrant le viatique,
(i) Lib. VI. u. a85. dub. 3. (a) Ibid. V. Hic autem.
INSTRUCTION PBATIQUR
le prêtre peut quelquefois, en vertu d'un juste mo« tif,
omettre les paroles: « Accipe, frater, viaticum » corporis,
etc. » Clericatu, Tamburini, Quarti, etc., professent la negative,
par la raison que les paroles sont expressément prescrites par le
Rituel romain ; et Paul V, en parlant des rubriques prescrites dans le
Rituel, dit : « Inviolate observent. «Malgré cela ,
le P. d. Aless. ( de monialib. ), Tonelli. et Pasqual., le permettent avec
raison pour le cas où le malade, en prenant la communion en qualité
de viatique, devrait en éprouver du trouble et de l'affliction,
parce qu'on peu t açcoipplir un précepte sans qn e pour cela
l'intention soit nécessaire ; il suffit que l'on fasse ce qui est
ordonné, ainsi qu'il est dit au ch. n, n. 29. Quant au Rituel, ces
auteurs répondent qu'il ne s'applique pas à toutes les choses
qui y sont énoncées, mais seulement à celles «quasEcclesia,
et «probatus usus antiquitatis statuit, » suivant les expressions
de la bulle. Du moins, ne peut-on pas dire que le précepte qui ordonne
de prononcer ces paroles impose une obligation grave ; dès lors
il n'y aurait qu'un péché véniel, lequel peut être
cou-vert par toute cause juste, comme serait celle que nous avons mentionnée
plus haut (1).
LI. On demande ?" si le prêtre peut célébrer sans
être à jeun, lorsqu'il doit donner le viatique. L'affir-mative
est soutenue avec probabilité par Conc., Mayor et Fernand ; et cette
opinion est aussi admise par Lugo, Filliut., Esc.,Viva, etc., parce que,
dans un pareil cas (suivant ces auteurs), on doit obéir de pré-férence
au précepte divin qui ordonne au malade de prendre le
viatique, plutôt qu'au précepte ecclé-
(1) De sjuocl. 1. Vil. c. 13. dob. 4-
POUR I-ES CONFESSEÏins.
Soi
siastique qui enjoint au, prêtre de ne pas célébrer
quand il a rompu le jeûne. Mais la négative est professée
plus communément et avec plus de proba-bilité par Soto,Silvius,saint
Antonin,Suarez, Lugo, Navarre, Busembaum, Salm.,Tournely, etc., parce que
le précepte qui défend de célébrer après
avoir mangé, est aussi d'essence divine par rapport au respect que
l'on doit à ce sacrement. En vain dirait-on que le même précepte
permet au malade de communier sans être à jeun, affranchit
également le prêtre du jeune, afin que le malade puisse com-munier;
car on répond à cela que si le malade a la permission de
communier sans être à jeun, c'est parce que dans ce cas il
y a conflit entre le précepte ecclésiastique et le précepte
divin, et que l'on doit préférer le dernier. Mais le prêtre
qui n'a qu'un précepte à observer, celui qui lui défend
de célébrer sans être à jeun, ne peut pas violer
ce ^précepte pour faciliter au malade l'accomplissement de son obligation
(i).
LII. Nous avons dit tout ce qui est relatif au viatique.'Voyons maintenant
les autres cas dans les--quels on peut recevoir l'eucharistie sans être
à jeun. On le peut deuxièmement, lorsqu'il esta craindre
que sans cela le sacrement périsse ou qu'il éprouve des avanies.
Dans un pareil cas, un laïque même peut le prendre lorsqu'on
ne trouve aucun prêtre ; ou bien le prêtre peut le donner à
des laïques quoi-qu'ils ne soient pas à jeun. Voir Suarez,
Vasquez, Lugo et Busembaum (2).
LUI. Troisièmement, lorsqu'il est à craindre que
(1) Lib. VI. ?. a86. (a) ?. a87.
3*09
INSTRUCTION PRATIQUE
cette personne ne cause un giafd scandale, en ne communiant pas ou
en ne célébrant pas. Par consé-quent, lorsqu'un prêtre
se rappelle, pendant qu'il célèbre le sacrifice, qu'il n'est
pas à jeun, si,c'est après la consécration, il est
hors de doute qu'il doit continuer le sacrifice parce qu'il ne peut pas
le lais-ser imparfait, ainsi que nous l'expliquerons au nu-méro
suivant ; mais lorsqu'il s'en souvient avant la consécration, il
doit interrompre la messe, i ou tes les fois qu'il peut le faire sans scandale
ou sans se déshonorer, comme disent saint Thomas (i) et tous les
docteurs. Cependant le P. Concina et quelques autres disent que ce scandale
ne peut être à craindre que bien rarement, parce qu'il est
facile de le faire cesser en déclarant que l'on a pris quelque chose
sans y faire attention. Mais saint Bonaventure,Soto, Ang., Regin., etc.,
disent au contraire que le prêtre ne doit jamais laisser la messe
commencée lorsqu'il célèbre ea public, parce qu'il
ne peut guère l'in-terrompre ainsi sans causer du scandale. Pour
moi, je pense la même chose, ainsi que le continuateur de Tournely,
qui dit que le scandale est toujours à craindre, excepté
lorsque le célébrant est d'une probité reconnue ou
au moins présumée (2).
LIV. Quatrièmement, lorsque l'on doit complé-ter le sacrifice
, ce qui peut se faire de plusieurs ma-nières : i° si le prêtre
s'aperçoit qu'il a pris de l'eau à la place du yin, et alors
il peut, ou consacrer une nouvelle hostie avec du vin, comme le prétendent
plusieurs docteurs, ou bien il peut consacrer seu-lement 'e yin > ainsi
que cela est admis par plusieurs autres. La rubrique (de Defect, c. 4·
n. 5.) dit que
(1) 4. p. q. 85. a 6. ad a.
(a) Lib. VI. ?. 387. V. 5. si^rave.
FOUR LES CONFESSEURS.
5??
l'une et l'autre opinion sont également probables, lorsqu'on
célèbre en public. Lugo , Tamb. et Conc. disent que si le
prêtre s'aperçoit de son erreur lors-qu'il a déjà
l'eau dans la bouche, il doit l'avaler, et non pas la rejeter, parce qu'on
pourrait rejeter en même temps quelque fragment de l'hostie. De plus,
Conc. , Laym, , Snlra. et Busembaum font remar-quer que si le piètre
ne s'en aperçoit que lorsqu'il est déjà entré
dans la sacristie , il n'est pas obligé de taire une nouvelle consécration.
Si dans le courant de la messe, soit après avoir pris les espèces,
soit après les avoir consacrées, il conçoit des doutes
sur la substance du vin, Tanibur., Sporer et Mazzotta disent qu'il ne doit
pas s'y ariêter, parce que la substance est présumée
bonne à cause de la posses-sion qu'elle a. liais Pasq., Gobât,
Aversa et Lacroix disent avec |>lus de probabilité que toutes les
fois que les doutes sont fondés , et qu'il est facile de se procurer
d'autre vin, on doit attendre, parce qu'il n'est pas vrai de dire que la
possession existe en fa-veur d'un vin lorsqu'il n'est pas certain que ce
soit du vin; la possession est bien plutôt pour le pré-cepte
qui ordonne de faire le sacrifice entier. Ce-pendant, lorsque le doute
est de celle nature, je pense que l'on doit consacrer le second vin sous
condition, c'est-à-dire si l'autre n'a pas été consa-cré
, car autrement on s'exposerait à faire un sacri-fice inutile (i);
a° le sacrifice doit être complété par un prêtre
qui n'est pas à jeun , lorsqu'il arrive que le célébrant
(a) est obligé de se retirer après la consécration,
parce qu'alors, s'il y a un autre prêtre,
(i) lib. VI. ?. 288 et etiam ao6. V. Quod vinum, (a) ?. ?88. ad 2.
5?4
INSTR0CTION PRATIQUE
il est obligé de compléter le sacrifice ; 3° si,
après la consécration d'une seule espèce, le prêtre
se rap-pelle qu'il n'est pas à jeun, car alors il est obligé
de terminer la messe. Nous disons après ; car si c'est avant, le
prêtre doit interrompre la messe , toutes les fois qu'il le peut
sans scandale.ou sans déshonneur, ainsi que nous l'avons dit dans
le précédent nu-méro (1) ; 4° si, après
l'ablution , le prêtre s'aper-çoit qu'il a laissé quelques
restes du sacrifice, comme il est dit au n. 5 (s). Bonac, Filliut. et autres,
disent que si, après que le prêtre a bu le sang de Jésus-Christ,
il est resté dans le calice quelque parcelle de l'hostie, ou si
elle est restée attachée au palais, il est plus décent
de l'avaler avec l'ablution que de la mettre avec le doigt sur les bords
du calice et de la prendre ainsi ; mais la rubrique n'est pas aussi scrupuleuse
, elle permet de faire l'un et l'autre. Ou reste,il est certain que, soit
les prêtres, soit les laïques, peuvent prendre l'hostie avec
l'ablution, sans contrevenir à la loi du jeûne, parce que,
quoi-qu'on avale le vin de l'ablution avant l'hostie, cela doit être
considéré comme si on l'avalait en même temps, comme
l'enseignent Benoît XIV (3), ainsi que Lugo, Suarez, Vasquez, Laymann,
Gastropal., Concilia, Bonacina, Holzmann, Lacroix, Sal-mant., etc. (4).
LV. 5* II est permis au prêtre de célébrer la messe
sans être à jeun, lorsque sa vie est en danger, comme l'admettent
Silvius, Diana, Satinant., etc., pourvu que cela ne soit pas exigé
pour faire injure
(?) N. 287. V. Si sacerdos, et ?. 288. ad 3. (ï) N. 288. ad 4-
(3) lib. VI. De sacrif. miss n. a. c. 22.
(4) Ibid. ad Y. cum. seg. dicant.
POUR LES CONFESSED
à l'église. Silv. et Dian. disent au: est menacé
de mort, le prêtre p« autel et sans habits sacrés, parce
auteurs, l'Église n'entend pas qu préceptes lorsque cela
entraîne, d graves. Mais ces deux opinions s raison par
Suarez, Tambur., To Rone., Gone, Cajetan , Sanchez, lors même que
ce serait pour donn le prêtre devrait célébrer, comme
Dicastillo et Benoît XIV (1), parce remarque très juste de
Lacroix) le: nions' ne peuvent guère être toléi tique,
parce qu'il serait bien diffici cette manière sans s'exposer au
tants, comme l'avouent Laymann mêmes, du au moins sans causer qu
quelque irrévérence grave. Ainsi d précepte
naturel tout au moins di sacrifice, duquel précepte on ne ? pensé
même par crainte de la mort LYI. « Pro complemento hujus dispositionis
ad communionem
pollutio habita eadem communioni
illa. Distinguendum : si pollutio fui
solute loquendo, per se non impec
sent, intellige, debita confessio) ut ? mnes concedunt
communiter tamen DD. docent, t<
sub veniali abstinere ea die a comr ìunicando
ter reverentiam sacramento debi
Salmant., Conc,Viva,etc., ex D. T
s.
5o5
si que, lorsqu'il ut célébrer sans
ue, d'après ces ? obéisse à ses s inconvénients
it rejetées avec îrnely, Merati, Clastropal., etc.,
le viatique que l'ajoutent Lugo, que ( suivant la
premières, opi-ées dans la pra-e de célébrer
de lépris des assis-ît Escobar eux-[que scandale ou >nc, il
y a là lé
respect dû au iut pas être dis-
?)· ·
materiae, nempe quaeritur ?. an die impediat ab voluntaria, ab-it (modo
praeces-
poenitentem , prop- ita Lugo, oma (5),qui ta-
m
(i) De sacrif. miss. S. c. 19. ?. 6.
(a) Lib. VI. ?. 289.
(3) In 4· dis'· 9, <?· « >· ?
?*· acl a>
INSTRUCTION PRATÏQPJE
men excepit : « Nisi magna necessitas urgeret ; » quod
intelligitur, ut recte aiunt Bon., Led., pran., Salman t., Viva et alii
passim, nempe si scandalum, yel alia jus,ta causa communionem exigat, «prout
«prudenti confessam) videbitur,» uti loquitur- ru-brica missalis
(Dg defect· ?, g). Si vçro pollutio fue-rit involuntaria,
etiam communiter 4t)Cei?P S· Bo-naventura , Ger., Nav,, Laym,,$Qto,
Suar., Vasq., Salman,, et alii plures cum rubrica loco cit., nullam essepbligationem
abstinendi a communione, modo nulla fuerit relicta, et adhuc perseveret
perturbatio mentis, orta. ex delectatione ante habita, vel ex turpi imaginatione
polkujonem concomitante; cum luijusniodi enim p<" rtrrbatione accedere
^communi ter non excusatur ^ vepiali, nisi adsit aliqua justa causa necessitatis,
aut devotionis, ut recte limitant Cas-trop., Sanph, ? Qers,, Laym. ? ????.
f Salm., ef alii cum I). Thotna facp ci(., ubi ait : « Si necessitas,
im-» mineat, vel devotio exposcat, tajis non impedi-»tur. »
YeJ nisi homo cpngtpr quantum potest per-turbdtionem ill^m repellire, et
media adhibere ut devote açpeda);, pi'ouf rationabiliter dpcent
omnes AA. mox supra relati cum P. Suarez, qui prp hac re affert S,. Justinum
dicentem : <i Non est aequum prop-» ter banc involuntariam passionem
abstinere a «mysteriis (1). »
LVII. «Quaeritur 2. an copula coniugalis a com-munione impediat.
Quidquid aliqui dicant, com-muniter DD. tradunt non excusari a yeniali
propter indecentiam, qui ad Eucharistiam accedit eadem die qua eopulam
hapuitcausa voluptatis; ita S· An-ton., S. Bon., Sanch., Suar.,
Tourn., Salmant. cum
(1) Lib. VI. ?. 87a.
POTJR LES CONFESSEURS,
S. Thoma (l) ex D. Gregorio in cap. Fir. vu, caus. 5, q. 4 > ?" a't
'? « Cum vero non amor ob pro-» creandas soboles, sed voluptas
dominatur in opere, Btunc prohiberi debet, ne accedat ad hoc sacramen-ta
tum. » Recte vero dicunt Sanch., Antoine et Sal-niant. cum aliis,
quod a praedicta culpa excusât quse-?yjs causa honesta, puta solemnitas.
sive indulgentia eadem die occurrens, evitatio scandali autnotae, spe-ciajis
devotio, etc. Si autern copula fuerit absque culpa, v. gr. ad prolem gignendam,
tunc quamvis sit congruum ad aliam diem communionem difft-rre, nulla tamen
est obligatio ab illa abstinere ; quia procreatio sobolis, cum sit actus
omnino honestus, satis réparât indecentiam, ut communiter
dicunt S. Thomas loco citato, Lugo, Sanch., Conc, Petro-cpr., Salmant.,
etc., ex D· Gregorio supra relato. Nec obstat textus in cap. Sciatis
xxxin, qu. 4, ubi D. Hieronymus docet abstinendum ; nam respondet Angelicus
(a), ibi sermonem fieri tantum de altaris ministris conjugatis, quales
sunt Graeci (5). Item communiter docetur de conjuge reddente debitum, nempe
quod iste tantum causa consilii abstinere po-test à communione,
sed non tenetur, itaS. Thomas, S. Rorçav., S. Anton., Albert., M.
Dion., Cartus., Sotus, Palud., Suar., etc. Et sic pariter docuit sanctus
Franciscus Salesius (4), sic dicens : « Dieu » trouvoit mauvais
en l'ancienne loi, que les créan-»ciers fissent exaction de
ce qu'on leur devoit es «jours de fegtes : mais il ne trouva jamais
mauvais » que les débiteurs payassent et rendissent leurs
dn-
(1) 5. p. q. 8. a 7. ad a.
(2) In 4· d. 3a. q. 1. a 1. ad 1.
(3) Lib. Vr. n. 7a5. V. Si vero.
(4) Introduc, à la vie dév. p. 2. chap. 20.
·5?8
INSTRUCTION PRATIQUE
» voirs à ceux qui les exigeoient. C'est chose indé-»
cente bien que non pas grand péché, de solliciter »le
paiement du devoir nuptial, le jour que l'on » s'est communié;
mais ce n'est pas chose malséante, »ains plutôt méritoire
de le payer. C'est pourquoi spour la reddition de ce devoir-là,
aucun ne doit «êtreprivé de la communion, si d'ailleurs
sa dévo-» tion le provoque à la désirer. Certes
en la primitive «Eglise, les Chrétiens commun ioient tous
les jours, » quoiqu'ils fussent mariés, et bénis de
la généra-»tion des enfants. » Idemque videtur
clare docuisse adhuc D. Augustinus {super psalm. 149. ) di-cendo : «
Si non exigis, redde; pro satisfactione per-efectaDeus tibi computabit,
si reddis quod debetur * uxori. » Et revera, si reddere debitum conjugale
est actus virtutis, cur à communione impediet (1)? Hinc si confessarìus
rogatur ab uxore, quid agere debeat, si in die communionis vir debitum
ab ipsa petat, sapienter docent Suarez , Laymann et San-chez, respondendum,
quod si mulier frequenter communionem suscipit, reddat et communicet ;
si autem raro, ipsa. virum precetur, ut pro illa die abstineat; at si rogatio
non proficit, adhuc commu-nicet, nisi ex redditione magnam patiatur perturba-tionem,
et ipsa non conetur repellere (2). Debitum autem reddere in die communionis
post ipsius ac-ceptionem excusatur ab omni culpa. Petere vero post communionem,
alii dicunt esse veniale, et qui-dem probabiliter, nisi justa subsit causa
; sed com-munius Sanch., Nav., Victor, et Tamb., sentiunt, id esse tantum
consilii (3). »
(1) Lib. VI. n. 274.
(2) Lib. ÏIC. ?. 2 74· V. Quid autem, (?) ibid. V.
Die autem.
POUR ??3 CONFESSEURS.
LVIII. La disposition du corps exige encore que l'on n'approche pas
de la communion avec quelque souillure extérieure trop remarquable
et qui peut être facilement enlevée; car si elle est cachée
ou in-curable et involontaire, comme serait la lèpre ou la gale,
ce n'est pas un empêchement, comme le disent la plupart des auteurs.
Remarquez cepen-dant que si le prêtr-e est affecté de la lèpre,
ou qu'il ait quelque membre qui soit d'un aspect dégoûtant,
il doit lui être défendu de célébrer,.ainsi
qu'il est dit au ch. Tua nos, de cler. œ'grit, pro scandalo et abominatione
populi, suivant les expressions du texte; par conséquent, il peut
célébrer en secret. Quant à la question [de savoir'
si les femmes peu-vent communier à l'époque où elles
ont leurs men-•strues, Suarez dit qu'elles doivent, sous peine de péché
véniel, différer la communion si elles peuvent le faire commodément.
Mais la plupart des au-teurs, tels que Palud., Alense, Castropal., Salm.
et Laym., pensent avec plus de probabilité que ce n'est là
qu'un conseil qui ne peut être obligatoire. Et saint Grégoire,
en parlant d'une femme dans cet état, dit (Laymann) : « Si
ex veneratione magna per-» cipere non praesumit, laudanda est ; sed
si perci-»peat, non judicanda. » Le P. Concina dit avec raison
que l'on doit refuser la communion aux femmes qui s'y présentent
d'une manière indécente, par exemple avec le sein découvert.
En outre, si ce sont des personnes qui portent des armes, elles doivent
les'déposer en allant à la communion (?). Il faut remarquer
encore que, lorsqu'un prêtre communie à la manière
des laïques, par suite de
^1) Lib. VI. ?, 275. V. an vero et V. congruam.
5lO
INSTRUCTION PRATIQUE
quelque infirmité, il doit tenir i'étole sur ses deux
épaules. C'est ce qu'a ordonné le concile de Pra-gue, sous
peine d'excommunication, ainsi qu'unie lit dans le ch. Ecclesiastico, ix,
inst. s3. Azor, Turrecremata et Tamburini disent que ce décret est
tombé en désuétude , et que, par conséquent,
cette obligation n'existe pas aujourd'hui; néanmoins c'est avec
plus de probabilité que Suarez, Gavant., Bonacina, Barbosa, etc.,
disent, non pas qu'il y a péché mortel, mais qu'd y a péché
véniel, d'autant plus que cette cérémonie est expressément
pres-crite par la rubrique : « Sacerdotes vero cum stola »
communicent (?). »
QUATRIÈME POINT.
Ou sacrifice de la messe.
5g. On renvoie à ce qui a été dit dans l'Examen
des ordinands. Il est permis même aux prêtres ri-ches d'exiger
l'honoraire de la messe.
60. De celui qui se fait payer plusieurs fois l'ho-noraire d'une
seule messe.
61. Quel est l'honoraire juste de la messe?
62. On peut exiger un honoraire supérieur à la
taxe, mais on peut en refuser un qui lui serait infé-rieur. Celui
qui se contente d'un inférieur peut-il di-minuer les messes?
65. Celui qui néglige de dire une messe qu'il a promis de dire
pour un honoraire très minime. 64· Celui qui convient de
l'honoraire. 65. Celui qui en garde une partie ou qui fait
(1) N. s76.
POUR LES CONFESSEURS,
5ll
célébrer la messe par un prêtre moins probe; et
à qui doit êire restituée la portion ret<»nue?
66. Si l'aumône est très considérable, spéciale-ment
par considération pour la personne à qui on la donne.
67. Des chapelains.
68. Des administrateurs des églises.
69. Si le célébrant remet la portion qu'il a gardée,
et si l'exécuteur testamentaire, etc.
70. Celui qui recueille les aumônes.
71. Celui qui change les messes.
72. A. qui les curés doivent les appliquer.
75. A qui doivent les appliquer les autres béné-fleiers,
et les chapelains des monastères, etc. S'ils peuvent quelquefois
les appliquer à d'autres ou s'abstenir. S'ils sont indisposés.
De la messe dite dans les couvents.
y4· De la prescription des messes.
75. Si le chapelain peut changer l'église , l'au-tel,
etc. ; s'il ne célèbre pas sur un autel privilégié;
s'il célèbre par l'intermédiaire d'un autre.
76. De la réduction.
77. Si, lorsque les revenus sont
insuffisants, l'évêque peut diminuer les messes.
78. Si le chapelain peut le faire. Des messes gré-goriennes.
79. Si le religieux peut l'appliquer contrairement à la
volonté du prélat.
80. Si l'application habituelle suffit.
81. De l'application confuse.
82. Delà conditionnelle.
85. Si dans le jour des Morts. 84, 85 et 86. Celui qui célèbre
le sacrifice à la hâte commet un péché grave.
S»SS
INSTRUCTION
87. Des résolutions de la S. C, ete.
88. Catalogue des décrets de la sainte Eglise. LIX. Nous
avons assez parlé, dans l'examen des
ordinands, n. 142, de l'eucharistie considérée comme
sacrifice : nous nous bornerons donc ici à exposer, sans ordre,"quelques
principes particuliers relatifs à l'honoraire des messes et à
leur application; et d'abord, en ce qui concerne l'honoraire, personne
ne conteste au prêtre le droit de recevoir un hono-raire pour la
messe j cat, comme dit saint Tho-mas (1) : « Sacerdos non accipit
pecuniam quasi «pretium consecrationis, sed quasi stipendium suae
» substentationis;» et de même que les personnes, même
riches, se font payer lorsqu'elles font quel-que travail qui mérite
un salaire, de même aussi les prêtres peuvent, même sans
être réduits à l'état de pauvreté, exiger
une rémunération, comme l'ensei-gnent Soto, Gerson, Suarez,Tournely,
Concina et autres (2) (contre Cajetan et Silvius). Le prêtre ne se
rend pas coupable de simonie pour avoir dit la messe, principalement dans
la vue d'en retirer l'ho-noraire; c'est ce" que nous avons expliqué
au ch. iv, n. 45, et notre opinion est fondée sur la raison que
donne saint Thomas, ainsi que nous l'avons rap-porté plus haut,
parce que cet honoraire n'est pas reçu comme' le prix d'une chose
spirituelle, mais comme devant servir à l'entretien de la personne
qui emploie un travail corporel pour célébrer le sacrifice.
LX. Il faut remarquer i° les deux propositions condamnées
par Alexandre VU. La première, n. 8,
(l) 3. a. q. 10. a. 2. ad. 3. (s) Lib. VI. ?, 5?6 et 317.
POUR LES CONFESSEURS.
5l5
disait : « Duplicatum stipendium potest sacer-» dos pro
eadem missa licite accipere, appli-» cando petenti partem etiam specialissimam
fruc-»tus ipsimet celebranti còrrespondentem, id que »
post decretum Urbani VIII. » La raison pour la-quelle cette première
proposition a été condamnée est que l'application
du fruit spécial de la messe est une chose très incertaine
, quoique cela soit admis par plussieurs docteurs ; cependant Lugo, Lay-mann,
Suarez, Vasquez, Tamburini, etc., le rejet-tent. La deuxième proposition
qui a été condam-née, n. 10, disait: «Non est
contra justitiam pro » pluribus sacrificiis stipendium accipere et
sacrifi-»cium unum offerre; neque etiam est contra fideli-»
tatem , etiamsi promittam cum juramento danti «stipendium, quod pro
nullo alio offeram. » La rai-son pour laquelle a été
condamnée cette seconde proposition, est que, malgré qu'on
doive admettre l'opinion de Gonet, Habert, Pétrocor., Pignatelli,
Tournely, Concina, Canus, Salmant. et saint Tho-mas (1), qui disent que
la messe est d'une valeur infinie, parce que le sacrifice de l'autel est
le •même que celui de la croix, lequel fut d'une va-leur infinie.
Néanmoins quoique la nature de la messe soit infinie en elle-même,
elle est finie quant à son effet, parce que l'aptitude de celui
qui célèbre est finie et que chacun doit être rétribué
selon son aptitude; mais, malgré tout cela, l'opinion contraire
de saint Bona., Scot, Palud., Roncaglia, Soto, etc., est encore probable
; ils prétendent que la valeur de la messe est toujours finie, soit
intensivement, soit extensivement; de telle sorte que, lorsqu'elle est
(») 5. p. q. 79. a. 5.
T. xxiv.
33
INSTRUCTIO!?
appliquée à plusieurs, elle leur profite moins que si
Von en disait une pour chacun d'eux en particu-lier (1).
LXI. Remarquez 2° que la taxe qui fixe l'honoraire de la messe
ne doit pas être basée sur la valeur de ce qu'il faut au prêtre
pour son entretien d'une journée entière, comme disent Cajetan
et Soto, car le prêtre n'emploie qu'une très petite partie
de la journée pour dire la messe ; la taxe doit être fixée
d'après la détermination donnée, soit par le synode,
soit par la coutume, soit par l'évêque du lieu, comme disent
Suarez, Busem., Concipa7 Tam-burini, etc., et comme l'a déclaré
la saipte Congré-gation (2). Cette taxe est obligatoire même
pour les réguliers, comme le disent encore Vasquez, Mo-lina, Concina
et Viva, avec une autre déclaration de la sainte Congrégation
(3). C'est pourquoi Ron-caglia dit avec raison que si un testateur laisse
des messes à célébrer sans en fixer le prix, il doit
être fixé d'après la taxe commune, ou bien par l'évêque
en se conformant à l'usago du lieu, comme l'a en-core déclaré
la sainte Congrégation; et, d'un autre cqté, il faut avoir
égard à la valeur plus ou moins, grande de l'hérédité
(4).
LXII. Remarquez 3° que quoique les prêtres n.e puissent pas
exiger une rétribution supérieure à celle qui est
fixée par la taxe, néanmoins la cou-tume ne leur défend
pas, et l'évêque lui-mênje ne peut pas leur défendre
d/accepter une rétribution
(I) Lib. VI. n. Sis. (a) N. 53. (5) N. Sao. (4) Ibid, dob. 5
POUR LES CONFESSEURS.
5l5
plus forte lorsqu'elle leur est offerte spontanément, comme
disent très bien Lessius, Lugo, Suarez, Bo-nacina» etc., et
comme l'a reconnu un décret de la S. C. (?) ; au contraire, l'évêque
a le droit de leur défendre de recevoir une rétribution moindre
que le juste prix, au moins le minimum de ce prix; ce qui représente
chez nous la valeur d'un carlin ou d'un jules, ainsi que l'a déclaré
la S. C. du concile, et comme l'enseignent avec probabilité, Suar.,Bon.,
Roncaglia et le cardinal kambertini (2), contre l'o-pinion de Soto et Navarre
qui citent à leur appui saint Thomas (?) ; mais lors même
que l'opinion de Soto paraîtrait fondée, les sujets n'en seraient
pas moins tenus d'obéir si l'évêque faisait une telle
pro-hibition, parce que lorsqu'il est incertain si le supé-rieur
a excédé ou non ses pouvoirs, l'inférieur doit obéir
(4). Il faut se conformer pour cet objet à ce qui a été
dit au ch. un, n° 17. Cependant si le piètre a accepté
une rétribution qui soit au-dessous du minimum de la rétribution
fixée par la taxe, il ne peut pa.s (quoi qu'en disent certains auteurs)
di-minue?" lenonibpe des messes, ni appliquer la même messe à
deux personnes qui n'auraient donné que moitié prix pour
en avoir une chacune, comme l'a décrété Innocent XII
dans sa bulle Nuper confirmé par un décret que rendit la
sainte Congrégation sur l'intimation d.e Urbain VIII. Voyez le décret
indi-qué à la fin de cechap., n. 88, decr. H;cependant cela
pe doiç s'entendre que du cas où le prêtre a
(1) Lib. VI. ?. Sao. dub. 5.
(a) Notif 56. ?. ? \.
(5) a. a. q. 100. a, 3.
(4) Lib. VI. n. 3ao. dub, 3,
5l6
INSTRUCTIO^' PRATIQUÉ
promis de dire un nombfe de'terminé de messes pour un prix convenu,
mais non pas lorsqu'il l'a promis sans faire attention à la faible
valeur du prix, comme le font remarquer Laym., Barb., Ronca., Tournely,
etc. Lorsqu'un prêtre promet à l'héritier de dire tout
de suite les messes pour le testateur en lui faisant crédit pour
le paiement du prix, il doit les dire avant d'avoir été payé.
Voir Salm., Tapïa, Villalobos, etc. (1).
LXIII. Il s élève des doutes sur la question de savoir
si le prêtre qui a promis une messe pour une rétribution trop
faible, pèche gravement en ne la disant pas. Castr., Spor., Salm.,
etc. professent la négative, se fondant sur ce que la rétribution
n'est pas matière grave. Mais l'affirmative est soutenue avec plus
déraison par Lacroix, Holz., Ronc, etc., parce qu'on ne doit pas
tant regarder ici la valeur de la rétribution, que la gravité
du mal que l'on cause à son prochain en le privant injustement (à
raison de la convention faite) du fruit de la messe. Mais les auteurs,
ainsi que Suar., Sanch., etc. pro-fessant une opinion différente
pour le cas où la messe a été promise gratis ; parce
que, d'après l'o-pinion la plus raisonnable, ainsi qu'il est dit
au ch, x, ?. 127, les simples promesses n'imposent pas une obligation grave
(2).
LX.IV. Remarquez 4° qu'il est permis au prêtre de faire nne
convention pour le prix des messes, lorsqu'il est conforme à la
taxe ou à la cou-tume. Voir Less., Sanch., Laym., Castr., Solo,
Ronc., Salm., etc. (conire le P, donc.) Cette opinion est
(1) lAb. VI. ?. 3ao. dub. 3. Casu autem.
(2) Lib, VI. ?. 017. q 3 et /|.
POUR LES CONFESSEURS.
0I7
vraie parce que, quoique l'honoraire ne soit pas dû en justice
pour prix de la messe, comme nous l'a-vons dit, néanmoins il est
dû. en justice<comme sou-tien du prêtre, et par conséquent
il peut faire l'ob-jet d'une convention. En vain"opposerait-on le C. fin.
de partis, qui paraît défendre toutes conven-tions sur des
choses spirituelles, parce que cela ne doit s'entendre, comme l'a très
bien répondu Ron-caglia, que des pactes illicites, car il y est
dit :? « Nam pactum turpe vel rei turpis, nullam obliga-tionem inducit.
» Et en vérité ce sont les seuls pactes'réprouvés
par le concile de Trente, sess. 22, deer, de obseiv. in cel. miss., à
l'égard de la rétri-bution des messes, car le concile de
Trente ordonne aux évêques d'empêcher « importunas
atque illibe-» raies eleemosynarum exactiones. » II dit illiberales
pour désigner celles qui ne sont pas données spon-tanément,
mais par l'importunité de celui qui les réclame (1).
LXV. Remarquez 5° que lorsqu'un prêtre a reçu l'honoraire
d'une messe il ne peut pas la faire célé-brer par d'autres
en en gardant pour lui une partie. Cela fut établi par un décret
de la sainte Congréga-tion du concile, approuvé par Urbain
VIII et con-firmé par Innocent XII. (On peut voir ce décret
dans le catalogue, à la fin de ce chapitre, n. 88, décret
3'.) C'est pourquoi Alexandre VII a condamné la proposition qui
portait: « Post decretum Urbani, » potest sacerdos, cui missae
celebrandae traduntur, » per alium satisfacere, collato illi minori
stipendio, » alia parte stipendii sibi retenta ; » et cela
était ad-mis par la plupart des auteurs, qui supposaient faus-
(1) Lib. Vt. n. 3so. dub. 4.
5l8
INSTRUCTION PHATIQUS
sentent que le décret d'Urbain n'avait pas été
accepté. Enfin, Benoît XIV, le 5o juin 1741, dans sa bulle
Quanta cura, prononça contre les clercs qui faisaient cela, la suspension
ipso facto réservée au pape, et contre les laïques l'excommunication
papale. Plu-sieurs docteurs soutenaient que le prêtre qui le fait
commet un péché, mais qu'il n'est pas obligé
à la restitution delà portion qu'il a gardée. Voir
Suar., Navarre, Vasquez, Bonacina, etc. ; et Viva dit que cette opinion
n'est pas dénuée de fondement, parce qu'en recevant l'honoraire
le prêtre en devient pro-priétaire , et que, d'un autre
côté , il remplit son obligation quant à
la messe ten la faisant dire par un autre prêtre. Mais je ne crois
pas qu'on puisse soutenir encore cette opinion, après la condamna-tion
de la proposition ci-dessus mentionnée. Aussi Vidal, Coreglia, Lacroix,
Sporer, Holzmann,- Con-eina, Tournely et Mazzotta, s'accordent-ils à
dire que le prêtre est obligé de restituer ; parce que quoi-qu'il
acquière la propriété de l'honoraire, il ne l'àc-quiert
que selon l'intention de celui qui le lui
donne, et celui qui l'a donné veut non seulement que
la messe soit dite, mais encore qu'elle le soit avec l'honoraire qu'il
a donné, parce que la plus grande valeur de l'honoraire augmente
les fruits qu'il doit retirer delà messe; or, cette
intention entre dans l'essence du contrat, et, par conséquent, le
prêtre commet une injustice envers celui qui lui a donné un
honoraire en en gardant une partie contre sa volonté (1).
En outrej il est bon de re-marquer que Lacroix, Pasqualigo, Concina et
Vita, disent que lorsqu'un prêtre a reçu d'une personne
(1) Lib. VI. ?. 5aa. V. dud 1.
POUR LES CONFESSEURS.
5jt)
un honoraire considérable pour dire une messe, parce que cette
personne lui croit une grande pro-bité, il ne peut pas faire dire
la messe par un autre prêtre, même en lui donnant tout ce qu'il
a reçu, à moins que ee ne soit un prêtre d'une probité
égale à la sienne. Cependant Lacroix et Coiibina disent que
ce n'est pas une faute grave toutes les fois que cela ne cause pas uii
préjudice considérable à celui qui a fait dire la
messe (1). Quatit à là persenne à qui le prêtre
doit restituer la portion qu'il a gardée iur une rétribution
considérable , Lacroix et Pas-qualigo disent qu'il peut la restituer;
srtit à celui qui a célébré la mfcsse, soit
à celui qui lui a donné l'ho-noraire. Mais Spdrer, Holztnann
, TeUrnely, disent avec plus de probabilité qu'il doit restituer
à celui qui a célébré la nlesse, parce qu'en
transférant à celui-ci la charge de la célébration,
il liii a trahsféré en même temps le droit à
la totalité de l'honoraire, suivant la volonté de celui qlii
l'a dotiné (è).
liXVi. Par conséquent, la rétribution1 qui est perçue
pour la célébration d'Une messe dtìlt être donnée
tout entière à celui qui l'a dite ; niais il faut faire exception
i° ptìUr le tas dû cette rétribution plus considérable
serait donnée non pas par raprJdrt à la messe, mais par dès
considerations d'amitié, de-parenté, de reconnaissance, de
pauvreté, ou autres semblables. Il n'est pas nécessaire qUe
le tìévót ait exprimé sa volonté a cet
égard, il suffit de la certi-tude hldrale que les tirconstdnceé
peuvent en don-ner. Ydir PaSSfer., Mihdd, Roncaglià, Débastilldj
Viv* et autres (3).
(1) Lib. VI. ?. 321. V. Hic autern, (a) ?. 5aa. V. Qui autem, (?) ?.
3ax. V. Ab hac,
INSTRUCTION PRATIQUE
LXY1I. Il faut faire exception 2° pour les chape-lains bénéficiers
qui peuvent confier à d'autres la célébration des
messes de leur bénéfice, en leur donnant seulement la rétribution
ordinaire, comme le disent la plupart des docteurs, et comme l'ap-prouva
Innocent XII dans sa bulle Nuper (1). Cela s'applique aussi aux chapelains
amovibles, comme disent Lugo, Roncaglia et autres, et comme l'a dé-claré
la sainte Congrégation du concile. Voyez le catalogue des décrets,
n. 88, décret4.Viva, Lacroix, Gobât, etc., disent, que cela
s'applique aussi aux prêtres qui sont chargés d'une messe
perpétuelle, et Koncaglia, Passer., Tamburini, Ricci et autres,
l'appliquent encore au prêtre à qui un legs consi-dérable
a été laissé pour qu'il célèbre un nombre
de messes assez grand pour durer toute sa vie. Ces opinions sont fondées
sur ce que tous les décrets qui. ont consacré les principes
contraires ne par-lent que des messes manuelles (s). -
LXVIII. Remarquez 6° cependant que l'exception que l'on fait en
faveur des chapelains ne peut pas profiter aux administrateurs des églises,
qui ne peu-vent rien garder du prix des messes; ils ne le peu-vent même
pas pour èouvrir les frais de la célébra-tion , excepté
lorsque les revenus de l'église sont insuffisants..En définitive,
il faut se conformer à un décret de la sainte Congrégation
sur cet objet, qui a été confirmé par Innocent XII,
n. 188, dé-cret 5; et remarquez en passant que le même Inno-cent
XII, dans sa bulle Nuper, de l'année 1697, or-donna aux administrateurs
des églises d'afficher le
(1) N. 5JI. V. Eicipitur. («) Ub.VI.n. Sai. V. ideni.
POUR LES CON FES
tableau des messes, soit perpét relies (?).
LXIX. Quelques docteurs adi exception pour le cas où le prêtr<
le soin de dire la messe, aurait veinent abandonné une portion nely,
Roncaglia, Viva, etc. M peut plus être soutenue depuis 1; dont nous
avons fait mention, déclaré que le prêtre, qui a reçu
prix considérable, ne peut pas même du consentement de celui
q «Non posse (telles sont les expr » tife ) alteri stipendium
minoris » eidem sacerdoti celebranti, se » mosynam accepisse
indicasset (I pas admettre l'opinion de Tamb. cuteur testamentaire faisait
dire par le testateur dans quelque en rait moins élevée,
il pourrait re prix, parce que re serait là un dustrie. Gela est
généralement re; K.enzi, Roncaglia, Goncina, etc. teur testamentaire,
n'ayantjamai de l'honoraire des messes, n'a retenir une portion (?).
LXX. On demande i° si le ? les aumônes pour les messes, ?
que chose pour le prix de son tr dit que non, se fondant sur un
(i) Vide instruct, confess, nov. poi (a) Lib. VI. ?. 5ai. V- V. Eicip.
a (5) ?. 3a» dub. a.
DUS.
521
îles, soil tempo-
lettent encore une à qui on a confié son propre mou-ii
prix. Voir Tour-cette opinion ne bulle de Ben. XIV ,ns laquelle il est
)ourune messe un garder une partie, ii célèbre la messe :
sions du saint pon» pretii irrogari, etsi majoris pretii elee-On
ne peut même qui dit que si l'exé-les messes laissées
roit où la taxe se-enir le surplus du iroduit de son in-ité
par Viva, Diana, parce que l'exécii-acquis la propriété
icun titre pour en
;tre, qui recueille :ut en retenir quel-rail ; le P. Goncina lassage
de la bulle
n. 4o6.
5a2
INSTRUCTION PRATIQUE
de Benoît XIV, où il condamne « qui stipendias tna-»joris
pretii colligens missas, retenta sibi parte, s celebrari fecerit. »
Cependant ce n'est pas sans fon-dement que le P. Viva soutient l'affirmative
dans tous les cas où la portion retenue· est proportionnée
au travail et que l'honoraire des messes ne lui a pas été
remis pour qu'il les célébrât lui-même, car cette
rémunération est juste et conforme à la volonté
des dévots eux-mêmes. En vain opposerait-on ce qui est dit
dans la bulle précitée, parce que cela ne s'ap-plique qu'à
celui qui s'est chargé d'aller recueillir les aumônes pour
en tirer Un profit illicite en rece-vant pour les messes un tau* très
élevé et en le ren-dant moindre; mais cela n'est pas applicable
à celui à qui on a imposé le devoir d'aller recueillir
l'hono-raire des messes (1 ).
LXXI. On demande 2* si le prêtre, qui reçoit une rétribution
considérable pour célébrer une messe aujourd'hui,
peut la donner à dire à un autre prê-tre en lui promettant
de dire à sa place celle du len-demain pour laquelle le prêtre
ne doit recevoir que la rétribution ordinaire ; Lacroix et Mazzotta
disent qu'il le peut parce que j d'après eux , ce n'est pas là
retenir une portion du prix, mais seulement changer les messes et les jours
; mais je préfère l'opinion contraire professée par
le P. Concilia, car un tel échange ne peut pas être entièrement
exempt de l'intention de faire un profit illicite. Néanmoins j'accorde,
comme Concina, qu'il n'y a pas de péché grave, Surtout si
cela est motivé par la pauvreté du prêtre (2).
(») Lib. VI. ?. Saa. dub. 2. (a) N, 3a2. dab. 4·
POUR LES CONFESSEURS,
LXXII. On demande 5° quelles sont les person-nes à qui les
bénéficiera doivent appliquer les messes. En ce qui coneerne
les curés, il y avait autrefois un grand nombre d'opinions diverses;
mais aujourd'hui il a été décidé par Benoît
XIV, dans sa bulle Cum semper, donnée le 29 août 1741* que
le curé doit appliquerla messe pour ie peuple tous les dimanches
et jours de fêtes (on y comprend ceux pour lesquels le pape a dispensé
des travaux, serviles), et cela lors même qu'il serait en peine pour
son entretien. Il déclara, d'un autre côté; que quoique
la paroisse eût des revenus abondants-, le prêtre né
serait pas obligé pour jcela d'appliquer plus souvent la mesàe
au peuple (tandis que les autres auteurs voulaient qu'il y fût obligé)
(1).
LXX1I1. Il faut observer à ce sujet ce qui est dit au eh. vu,n.
29, à l'égard des autres bénéfieiers qui n'ont
pas de cure. Ils sont obligés de célébrer la messe
pour le fondateur, comme l'a déclaré la saïnte Cong,
du concile (2), toutes les fois qiîe dans l'acte de fondation il
n'a pas été exprimé qu'ils ne seraient pas tenus d'appliquer
la messe pour le fondateur. Il en est de même pour les chapelains
des confra-ternités ou des couvents de religieuses, qui célèbrent
la messe afin que les confrères oit les religieuses l'entendent
; c'est donc pour eux qu'ils doivent appli-quer Je sacrifice. Voyez le
décret au n. 188, infi'a, n. 5. Néanmoins Lezana.Homobonus,
Filliu.,Diana, Etienne, Salm. et la plupart des autres docteurs accordent
au chapelain la faculté de célébrer de quatre à
six fois l'année, soit pour le salut de leur
(1) N. 3a5. q. a. (») N. 5a4.
5 24
INSTRUCTION PRATIQUE
âme, soit pour quelque proche parent, soit pour quelque ami intime,
soit pour un bienfaiteur, parce que l'on peut présumer en cela le
consentement du fondateur luirmême, pourvu toutefois que le cha-pelain
ne se fasse pas payer, comme le remarquent avec raison Bonacina, Gobât,
Holzmann, Pasqualigo, Diana, Salm. et un grand nombre d'autres ; car alors
ce serait agir contrairement à la volonté du fonda-teur.
De plus Suarez, Azor, Bonacina , Silv., Salin.j Bus., etc.j disent que
le chapelain peut par respect omettre de célébrer la messe
une fois par semaine ainsi que cela résulte du ch. Significatum
deprœbend., où il est dit que les chapelains doivent célébrer
tous les jours: « Salva honestate et debita devotione. » Cependant,
d'après Lugo, les Salm. etla plupart des auteurs, cela n'est pas
applicable au cas où il s'agirait de l'obligation de célébrer
dans une église particu-lière, par exemple, si le fondateur
avait dit : « Je » veux que l'on dise tous les jours une messe
dans telle » église, » mais cela est applicable seulement
lorsque c'est au prêtre que l'obligation est imposée, et aussi,
comme disent Gob.,-Tamb. et Ronc., lorsqu'il n'est pas prouvé que
Je testateur ait eu une volonté con-traire ; car si dans l'acte
de fondation il avait recom-mandé que la messe fût célébrée
tous les jours, « par » le chapelain ou par un autre, »
alors on ne pour-rait jamais manquer dédire la messe, commedittrès
bien Roncaglia qui rapporte une déclaration de la sainte Congrégation
(1). Si le chapelain vient à être malade, Lugo, Lezana, Ricci.,
Diana, Busembaum, Salm., etc., disent que, lorsque la maladie est tde peu
de durée, il n'est pas obligé de se faire rempla-
^(i) Lib. VI. ?. 33 a.
POUR LES CONFESSEURS.
525
cer par un autre, à moins que le testateur ait voulu que la
messe ne manque jamais dans un Heu désigné, ainsi que nous
l'avons dit plus haut. Quant à la du-rée de la maladie, quelques
auteurs qui se montrent trop sévères disent qu'elle ne doit
pas dépasser dix jours,· d'autres, en plus grand nombre,
la fixent à quinze jours," tels sont Bonac, Anacl., Diana et Êlb.,
et cela est aussi confirmé par une déclaration de la sainte
Congrégation du concile ; d'autres la portent jusqu'à un
mois, tels sont Laym., Hurt., les Salm. Ceci est confirmé par le
septième concile de Milan, tit. De missis, qui dit :« Si capellanus
saltem » per annum celebravit in aliquo loco, si etiam per «mensem
segrotet, adhuc integram eleemosynam iijudicio episcopi accipere potest.
» Enfin Lugo, Navar. , Fill., Dicas., Naldo, Leandre la portent jusqu'à
deux mois ; cette opinion est adoptée par le P. Conc. et elle est
reconnue bien fondée par Castr., Dicasti. et Busemb. (1). Il faut
remarquer ici en pas-sant que la messe conventuelle , qui est dite tous
les jours par le clerc, doit être appliquée dans chaque église
pour ses bienfaiteurs, comme l'a ordonné Be-noît XIV (2).
LXXIV. Plusieurs docteurs, tels que Laym., Nav., Tamb., Pasquali et
Gobât disent, en s'ap-puyant sur une décision de la Rote romaine,
que l'on peut fixer une prescription tant pour le nombre des messes que
pour les autres conditions imposées dans les aetes de fondation
, et ils pensent que l'es-pace de vingt ou trente ans, ou quarante ans
au plus est suffisant; mais, d'après l'opinion la plus vraie, on
(0 Lib. VI. n. 533. (<t) Ibid. n. 3a6.
PRATIQUE
ne doif pas admettre dp prescription ; car le çpncile de Trente,
sess. 25 de fief., défend de déroger à au-cune des
charges stipulées soit dans im.e fondation , soit dans toute au,tre
disposition pieuse ou consti-tution de bénéfice^ et Pie IV
dans, la bulle par la-quelle il confirma le décret de ce concile,
déclara nul toqt ce qu.i se ferait à l'avenir contre sa teneur;
et, comme du Lacroix, les clauses d'un d,écret prohi-bitif sont
obligatoires, même pour ceux qui les igno-rent, et daps le$ causes
où il s'agit de bénéfices, elles suffisent pour vicier
le titre ainsi que la possessiqn, du moins nous dirons qpe l,i première
opinion ne peut guère être admise dans la pratique , parce
qu'on ne peut pas présumer la bonne foi dans des bénéfi-ciers,
attendu qu'ils ne sont jamais censés ignorer les lois du bénéfice
(1).
LXXV. Ainsi donc le chapelain commet un péché lorsqu'il
ne célèbre pas toutes les messes prescrites par }e fondateur,
pi* bien s'il néglige de les célébrer dans l'église
ou sur l'autel ou à l'heurç désignés, comme
disent Cas.tr·, LugQ, Azor, Nav., Tourn., Sajm., etc. H pèche
même mortellement (suivant ces mêmes auteurs) Lorsqu'il y manque
souvent sans mo-tifs, ou sans dispense. Nous avons dit i° souvent,
parce qu'il n'y aurais pas péché grave, si Von n'y manquait
que rarement, une ou deux foi» le m,ois,, par exemple, ou bien si
on n,'^ fait que changer d/au-tel; n,pus avons dit 2° çqns-motif,
parce qu'il peut y avoir des motifs qui effa^ceRt entièrement le
péché, comme si l'église était en. réparation
ou si l'a,u,tel était dégradé, etp. ; nous avqns,
djt 5° sçws dispense, parce que (comme le disent plusieurs auteurs)
l'é-
(0 Lib. VI. ?. ?53.
POUR LES CONFESSEURS.
yêque peut djspenser ?? prêtre d'aile»; célébrer
dans, un autre endroit, par égard pour ses occupations, sa faiblesse,
ses affaires, la trop grande fatigue qu'il éprouverait pour se rendre
à l'église, ou pour l'uti-lité de l'église
elle-même ou enfin pour toute autre raison semblable, comme djsent
Castr.,I\anc. ,Barb., Conc., Passer., Henriquez, Busembaum, Lacroix , §alrn.,
Tamburini, Mazzotta. La raison sur laquelle cette opinion es( fondée,
c'est qu'au moyen d'une telle dispense l'on rie contrarie la volonté
du testateur qup sur des choses accessoires et que cet inconvé-nient
est compensé par le bien général qui en ré-sulte.
Cela est d'autant plus juste que le concile de Trente,sess. 25,ch. iv,
accorde atjx évêques le pou-voir de faire, dans certains cas
particuliers, des changements aux dispositions de dernière volonté.
Voyez le ch. xx des Privil., n. 32. Néanmoins Lacroix et Pasquali.
disent que l'évêque ne peut pas accorder çle dispense,
lorsque le testateur, en désignant l'église et l'heure, a
euspécialement en vue le bien, public (?). Pu reste, il a été
rencju à ce sujet plusieurs décrets de la sainte Congrégatiqn
du concile, rapportés par le P. Ferrari (2)J lesquels décrets
disent que, pQur obtenir cette dispense, on doit toujours avoir re-cours
au saint-sjége apostolique. Si le prêtre, lors-qu'il devait
célébrer la inesse sur un autel privilégié,
l'a célébrée sur un autre autel, Ronc. dit qu'il sera
obligé de restituer le prix, s'il
est supérieur à la taxe, mais non pas s'il est
seulement ordinaire, ni même s'il a gagpé ailleurs l'indulgence
plénière applicable aux défunts, cgmme
le disent égale-
(1) Lib. VI. ?. 329.
(a) Ferrar. Bibliot. torn· II. ?. ?4· Capellania.
INSTRUCTION PRATIQUE
mentKoncaglia, Anaclet, Sporer, Elbel, etc. Cepen-dant Azotr, Bonacina,
Navarre, Diana, Salm., etc. disent que le prêtre ne remplit pas son
obligation, s'il célèbre sur un autel non privilégié
en appliquant l'indulgence des pierres ou médailles bénites,
parce que ces indulgences ne iont pas aussi certaines que celles des autels
(1). Le chapelain pèche aussi lors-qu'il ne célèbre
pas la messe lui-même, si cela se trouve prescrit par l'acte de fondation
; sinon il peut toujours célébrer par l'intermédiaire
d'un autre, comme le disent avec raison les Salm., Dicastillo, Diana et
Campanile, et cela est confirmé par une dé-cision de la cour
et par plusieurs déclarations de la sainte Congrégation (2).
LXXVI. Remarquez ?» que Jes
évéques ne peuvent pas aujourdhui réduire, modérer
ou chan-ger les obligations relatives aux messes imposées dans un
acte de fondation. Cela leur est défendu par la sainte Congrégation
du concile tenu p'ar or-dre d'Urbain "VIII, et confirmé par Innocent
XIII. Voir au catalogue des [décrets 11. 18, décr.
vnt, le pouvoir qui leur avait été accordé à
ce sujet par le concile de Trente, sess. 25, ch. iv, ainsi qu'il est expliqué
dans le susdit décret (quoi qu'en disent les Salm.), ce pouvoir
ne concernait pas la réduction des messes qui n'étaient pas
imposées dans l'acte de fondation, ou qui l'avaient été
avant la tenue du concile. Ainsi donc aujourd'hui cette réduction
est réservée au saint Siège apostolique qui ordinaire-ment
la prononce pour de justes motifs, par exem-ple, pour l'économie
du prêtre, la modicité du prix,
(1) Lib. VI. ?. 329· V, not. a, ?·?) ?. 33?.
MIS CONFESSEURS.
5sg
l'insuffisance des revenus, les réparations de l'église
ou du monastère, ou pour toute autre cause ur-gente (0-
LXXVII. Mais on demande i° si l'évêque peut diminuer
lui-même le nombre des messes lorsqu'il ne se trouve personne qui
veuille les dire, à cause de la modicité de l'honoraire,
Pasqu., Tamb. et Lacroix professent l'affirmative; mais l'affirmative est
niée par Je P. Conc. qui. se fonde sur plusieurs décrets
de la sainte Congrégation, lesquels défendent aux évêques
soit de réduire, soit de diminuer en au-cune manière les
charges des messes ; malgré cela, Fagnan et Felino disent que cela
ne doit être'ob-serve que lorsque, dès le principe de la fondation,
ces charges ne dépassaient pas les revenus ; mais dans le cas où
les revenus qui, au commencement, étaient suffisants, auraient tellement
diminué par la suite qu'ils seraient devenus tout-à-fait
insuffisants , il dit qu'on ne peut pas ôter aux évêques
la faculté de réduire les messes, faculté qui leur
est accordée de jur. commun. Voir au ch. Nos quidem de test. (2).
Pasqualigo applique la même décision aux charges des bénéfices
relatives aux prêts ou aumônes an-nexés aux anniversaires,
en disant que la* prohibi-tion n'est relative qu'aux messes (?).
LXXVJII. On demande 2° si, lorsque les revenus viennent à
manquer, le chapelain peut lui-même di-minuer le nombre des messes.
Il est certain que lorsque les revenus manquent totalement et sans sa faute,
il n'est pas obligé de dire les messes, suivant
(\) Lib. VI. ?. 531 et a54· not, a. (2) Ibid. dub. ?. (5) ?.
53i.dul>. ?.
T. XXJV.
54
SSo
INSTRUCTION pRATJQV»
l'opinion la plus commune confirmée par plusieprs décrets
de la sainte Congrégation (1). Lorsque les re-venus manquent seulement
en partie, Escobar assure que le chapelain peut également diminuer
les messes si le testateur a fixé le Jaux de chacune, par exem-ple,
deux Jiuli par messe; parce que, dans ce 04s, de même que le nombre
des messes devrait être ac-cru si les revenus augmentaient, de même
aussi les revenus diminuant, ce nombre doit être diminué.
Il s'élève des doutes plus difficiles sur là question
de savoir si le chapelain peut réduire les messes lors-que le testateur
en a fixé le nombre, et qu'ensuite les revenus ont diminué
jusqu'au point qu'il ne reste même pas l'honoraire ordinaire de chaque
messe. Tamburini, Diana, Castr., Salm.,Mazz,otta,etc, pro-fessent la négative,
se fondant soit sur le décret du pape Urbain ci-dessus mentionné,
soit sur un autre décret que l'on trouve dans Lacroix, où
il est dit que dans un pareil cas on doit avoir recours au Saint-Siège
apostolique : « Legatum sit ità tenue (ce » sont les
termes du décret) ut non sit qui velit «onus illi injunctum
subire. » Mais malgré tout cela l'affirmative est professée
par Rusem., Fran-çois Lugo, Escobar, Bardon., Pasqual. et autres,
ainsi que Roncag. qui dit que cela est raisonnable et conforme à
l'intention du testateur qu'on ne doit pas supposer avoir voulu obliger
le chapelain à dire des messes pour un honoraire moindre que le
juste ; mais Roncag. dit qu'en général, pour éviter
tout dan-ger d'hallucination,il est plus convenable d'avoir re-cours à
l'évêque (ce que Lacroix et Tourn. disent être nécessaire
dans cç cas)?ouau^noii^sàoine per-
(1) Lib. VI, ?. ia3. V. Hic autem.
POUR LES CONFESSEURS.
53l
sonne expérimentée. Quant aux décrets qu'on leur
oppose,Ronc.etPasq.répondent que ce ne serait pas là une
réduction définitive, de la nature de celles qui sont réservées
au Saint-Siège, mais seulement une cessation de l'obligation à
cause du manque de revenus, parce que les décrets tiennent un langage
conforme à l'esprit du concile -de Trente, sess. 25, ch. îv,
où il n'est pas question des revenus qui man-quent, mais seulement
des aumônes assignées pour l'honoraire djps messes, lorsqu'il
devient si mo-dique qu'il est très difficile de trouver des prêtres
qui veuillent les célébrer. Quoi qu'il en soit de cette opinion,
Tamburini dit que si ce chapelain a reçu -par le passé une
rétribution supérieure au taux or-dinaire, il doit, lorsque
la rétribution devient moin-dre, faire une compensation en célébrant
le même nombre de messes, attendu qu'il est juste que celui qui retire
les avantages supporte les inconvé* nients (1). Remarquez en dernier
lieu sur cette ma-tière de la rétribution, que les trente
messes grégo» riennes sont prohibées par la sainte
Congrégation, comme remplies de choses inconvenantes (2).
LXXIX. Occupons-nous en second lieu de ce qui est relatif à
l'application de la messe. Il n'appartient qu'au prêtre seul d'appliquer
le fruit de la messe : par conséquent, lorsqu'un religieux l'applique
con-trairement à }a volonté de son supérieur, il fait
un acte yalable quoique reprehensible, comme l'ensei-gnent avec raison
Suar., Vasq., Laym., Lugo (qui assure que l'opinion contraire est généralement
re· jetée), Tourn., Anac, Salm., Spor., etc., contre Scot
(1) Lib. VI. ?. S3i.dub. 2.
(a)· Benedi. XIV, de eacrif. miss. 1, III, c, a5, t».
a,
53à
INSTRUCTION PRATIQUE
et Gavanti, parce que l'inférieur, on ce qui con-cerne le pouvoir
de Tordre dont il fait partie , n'est pas soumis à la volonté
du prélat (1),
?????? L'application doit être faite avant la célé-bration,
ou tout au moins avant la consécration. Mais l'on demande \" si
Fapplication habituelle suf-fit , c'est-à dire celle qui est faite
une fois polir tou-tes, sans être renouvelée ensuite. Vasquez,
Abelly et isambert disent que cela ne suffit pas, parce que de même
que, pour consacrer ce sacrifice, il faut toujours l'intention actuelle
ou tout au moins vir-tuelle, de même aussi il faut tous les jours
une nou-velle application de ses fruits. Mais l'opinion la plus vraie et
la plus commune, qui est celle de Snarez, Bonac.,Lugo, Tournely, Ma^zotta
, Sporer, Biisem-baiim, etc. (et le P. Concina pense aussi la même
chose au fond) , enseigne que l'application habi-tuelle est suffisante,
attendu que l'application de la messe résulte tout simplement d'une
donation ver-bale qui, uni fois faite, continue d'être valable tant
qu'elle n'est pas expressément révoquée." On répond
encore aux partisans de l'opinion contraire que si, dans la célébration
des sacrements, l'intention ac; tuelle ou virtuelle est nécessaire,
c'est parce que c'est l'intention du ministre qui constitue le sacre-ment;
tandis que pour ce qui concerne l'application de la messe, l'intention
de celui qui la dit ne con-stitue pas les fruits, car elle les produira
égale-ment sans son intention, et par conséquent il suffit
de faire l'application une fois en donnant les fruits à quelqu'un
(2).
(1) Lib. VI. ? 534.
9) ?. 355,
POUR LES CONFESSEURS.
_ 5??
LXXXI. On demande 2° si lorsqu'un prêtre a reçu de
dix personnes le prix de dix messes, il rem-plit son obligation en appliquant
confusément à ces dix personnes les dix premières
messes qu'il dit. L'affirmative est professée par Silv. et Conc.,
pour tous les cas; mais c'est avec plus de raison que Bo-nac, Ronc, Av.,
Tamb., Hem et autres distinguent en disant : s'il applique chaque messe
indéterminé-ment pour chaque personne, il n'a pas accompli
son obligation, parce qu'il faut pour cela que le fruit de la messe soit
appliqué déterminément à la per-sonne afin
qu'eue en profite. Il en serait autrement si le prêtre appliquait
chaque messe aux dix per-sonnes ensemble, voulant en attribuer à
chacune la dixième partie , attendu que le fruit du sacrifice est
certainement divisible : par conséquent, une telle application rend
à chaque personne ce qui lui est dû, parce que chacune d'elles
recevant la dixième partie de chaque messe, lorsque les dix messes
sont dites, elle a reçu tout le fruit auquel elle avait droit (1).
LXXXII. On demande ?' si l'application condi-tionnelle est valable.
Il faut répondre à cela que si la condition a pour objet
un fait passé, elle est va-lable ; mais non pas si elle a pour objet
un événe-ment futur qui* ne peut être connu que de
Dieu. Cependant Castr. et Lugo disent qiiié si un prêtre applique
la messe à celui qui le premier en donnera 1 honoraire, cette application
sera valable, quoique certainement illicite, suivant la prohibition de
Clé-ment VIII, promulguée par Paul V. Néanmoins, l'opinion
1* plus probable est celle de Lacroix, qui dit
(0 Lib. VI, ?. 335. q. a.
534
INSTRUCTION PRATIQUE
que cette application doit être nulle, parce qu'il arri-verait
souvent que la messe serait dite pour une cause qui encore n'existerait
pas ; par exemple, si 1er pre-mier qui en donnera l'honoraire veut par
ce moyen être délivré de quelque maladie ou de quelque
accu-sation , la messe étant dite d'avance , il n'en pourrait pas
retirer le fruit qu'il désire ; car, d'un coté, la cause
n'aurait pas existé au moment de la célébra-tion de
la niesse, et, d'un autre côté, le fruit de la messe ne peut
pas rester en suspens. Néanmoins, si un prêtre prévoit
qu'on viendra bientôt lui de-mander des nieSses pour quelque défunt,
il peut les dire d'avance, comme disent très bien Vasquez, Tournely,
Aversa., etc. (1).
LXXXIÎI. Il est bon de faire ici quelques autres remarques pour
ce qui concerne l'application des messes. Il faut remarquer i" que, le
jour des morts, le prêtre n'est pas obligé d'appliquer la
inesse aux ittorts en général, ainsi que l'a déclaré~
la sainte Congrégation ; Voyez le décret à la fin
de ce cha-pitre, n. 88, décret 9 ; et en admettant que le prêtre
puisse appliquer cetie messe à qui bon lui semble, Tournely dit
avec raison qu'il a le droit de s'en faire payer l'honoraire (2). Il faut
remarquer 2° que l'on ne gagne pas l'indulgence sur l'autel privilégié,
à moins qu'on y célèbre la messe de Requiem, lorsque
l'office est sëmi-double, lors même qu'on célébrerait
dans là niêniê église quelque solennité.
Mais, dans les jours où il h'y a pas de messe de mort, il suffît
au prêtre pour gagner l'indulgence de dire la messe ordinaire, ainsi
que l'ont déclaré plusieurs décrets
(1) Lib. VI. ?. 557· V. Dicunt. (a) ?. 538.
POUR LES CONFESSEURS.
555
dé la sainte Congrégation (1). Il faut remarquer 5°
que lorsque le privilège n'est pas perpétuel, le temps de
la durée commence à courir, non pas du jour de la publication,
mais du jour de la cohces-sion (2). Il faut remarquer 4° que lorsque
le privi-lège d'un autel rehferme la clause (que du reste on y met
presque toujours), pourvu qu'il soit dit dans l'église cinq OU sept
Messes, alors le prêtre ne peut pas gagner l'indulgence s'il ne dit
pas toutes des messes, ainsi qu'il à été déclaré
par la sainte Con-grégation du concile, dans Un décret approuvé
par Innocent XI. D'un autre côté, la sainte Congréga-tion
déclara que pendant que les prêtïes restaieht absents
de leurs églises l'indulgence était suspendue, mais non pas
perdue ; et lorsqu'ils sont malades, ils la gagnent également avec
les messes qu'ils ont la force de célébfer (3).
LXXXIV. En ce qui concerne le temps et le lieu de là célébration,
l'autel, les vases , les habits et les autres formalités nécessaires
pour là messe, on doit observer ce que nous avons dit dans l'Examen
des ordïnands, n. 1S8. Seulement, il est bon d'examiner ici un peu
plus au long un point sur lequel nous n'avons pas beaucoup insistë
dans cet ouvrage î c*est celui de savoir si le prêtre commet
un péché grave lorsqu'il dit la messe dans moins d'un quart
d'heure. Je n'ignore pas que Cette matière est traitée avec
beaucoup de science dans un petit ouvrage que va faire paraître l'illustre
piètre D. Joseph Jorio, ou-vrage très Utile , qui sera intitulé
la Messe méprisée,
(x) Lit». VI. n. 35g. V. Quaer. 1.
(a) Ibid.
(5) Ibid. V. Qua*, a.
536
INSTRUCTION PRATIQUE
Je dis très utile, parce qu'en effet c'est une chose affreuse
et en même temps déplorable de voir ce que font beaucoup de
prêtres (Dieu veuille que ce ne soit pas le plus grand nombre!) de
Jésus-Christ, en célébrant la messe sur l'autel. Or,
dans ce petit ouvrage , on soutiendra peut-être (comme je l'ai entendu
dire ) que c'est un péché mortel de ter-miner le sacrifice
de la messe dans moins d'un quart d'heure. Et, quant à moi, je ne
suis pas éloigné d'adhérer à cette opinion
si l'on veut parler des messes les plus longues, comme, par exemple , de
celle où il y a un Gloria, un Credo, ou autres prières extraordinaires.
Mais, pour garder une juste me-sure, je dirai que si un prêtre dit
une messe quel-conque en moins d'un quart d'heure, soit la messe des morts,
soit celle de la madone {de sancta Ma-ria in sabbato), il est bien difficile
pour ne pas dire impossible de l'excuser de péché mortel;
et voici comment je le prouve : les rubriques qui traitent des cérémonies
à observer dans la célébration de la messe sont toutes
préceptives , ainsi que nous l'a-vons prouvé dans notre ouvrage
(1); et je ne com-prends pas comment on peut nier une telle propo-sition
: car dans la bulle de saint Pie V, il est prescrit de célébrer
la messe Juxta ritum, modum et formam in missali prœscriptam, et cela est
prescrit districte, in virtute sancta; obedientia. Ces expressions im-posent
sans aucun doute un précepte grave, et si on y contrevient on commet
un péché mortel, sui-vant ce qui est dit au ch. H, n. i5.
Cela posé, nous disons qu'il est impossible de terminer la messe
dans moins d'un quart d'heure sans commettre une irré-
(i) Lib. Vi. ii. 3gg.
POUR tES CONFESSEURS.
537
vérence grave, et sans être la cause d'un grand scandale
pour le peuple. Par conséquent, le prêtre qui dit la messe
dans moins d'un quart d'heure, commet deux péchés : d'abord
l'irrévérence envers le sacrifice, et ensuite le scandale
qu'il occasionne aux assistants.
LXXXV. Et d'abord quant à l'irrévérence, le concile
de Trente, sess. 22, deer, de Observ. in celeb. missœ, déclare que
dans la célébration de la messe, «omnem operam ponendam
esse, ut quanta «maxima fieri potest exteriori devotionis ac pieta-»
tis specie peragatur. » II dit encore que la malédic-tion
prononcée par Jérém., ch. 48, contre ceux qui apportent
de la négligence dans l'exercice des fonc-tions relatives au culte
divin, doit être précisément appliquée aux prêtres
qui célèbrent la messe sans y mettre le respect et la gravité
que mérite ce sacri-fice , ajoutant qu'une telle négligence
implique tant d'irrévérence, qu'elle devient pour ainsi dire
une impiété « quae ab impietate vix sejuncta esse po-»
test ; » telles sont les expressions du concile. Si donc les cérémonies
de la messe, sont prescrites (comme cela est certain) dans le but d'entourer
la célébration d'un si grand sacrifice du respect qu'il mérite,
comment n'y aurait-il pas une faute grave de la part du prêtre qui,
en célébrant avec tant de célérité,
doit nécessairement manquer à ce respect en mutilant les
paroles, les bénédictions, les génu-flexions, etc.,
se mouvant et se tournant d'une ma-nière peu décente, et
confondant les paroles avec les cérémonies, ou bien les avançant
ou les retar-dant contrairement à l'ordre prescrit par la rubri-que?
J'ai dit plus haut: avec le lespecl et la gravite que mérite ce
sacrifice; je me suis exprimé ainsi
538
INSTRUCTION PRATIQUE
parce que, quoiqu'il puisse se trouver quelqu'un qui ait la langue
assez déliée et les mouvements assez prompts pour pouvoir
terminer la messe dans Un espace de temps aussi court, sans omettre aucune
parole ni action, au moins n'est-il pas possible, dans si peu de temps,
de célébrer la messe sans hianquer à la gravité
convenable, qui est une partie extrin-sèque de la vénération
que l'on doit avoir pour elle. LXXXVI. Secondement en ce qui concerne le
scandale que cela occasionne au peuple, le concile de Trente dit, sess,
a5, ch. v, de Réf., que les cé-rémonies ont été
instituées dans le but de faire com-prendre aux fidèles la
majesté de ce sacrifice et la profondeur des mystères qui
y sont contenus : « Ec-» clesia ceremonias adhibuit ( dit le
concile) ut ma-»jestas tanti sacrificii commendaretur, et mentes
» fidelium per hœc visibilia religionis signa ad rerum » altissimarum,
quae in hoc sacrificio latent, con-» tempïationenl excitarentur.
» Mais lorsque ces cé-rémonies sont faites avec trop
de célérité, comme elles doivent 1 être dans
un temps si court, non seu-lement elles n'ajoutent pas de vénération
à la messe elle-même, mais encore elles éloignent la
vénération du peuple. Ainsi doiic, sous ce second rapport
comme sous le premier, le prêtre qui célèbre le sa-crifice
avec tant de célérité commet un péché
grave à raison du scandale, qui n'est pas sans gravité, parce
que, au Heu d'exciter dans l'esprit du peuple une grande vénération
pour le sacrifice, cela lui fait plu-tôt perdre la vénération
qu'il avait 6h lui par le peu de respect avec lequel le prêtre lui-même
traite ce sacrement. C'est dans le but d'empêcher ce scandale que
le concile de Tours, en i583, ordonna que les prêtres fussent soigneusement
instruits descérémo-
POtIR LES CONFESSEURS.
55g
nies de la messe, « ne populum sibi commissum a » devotione
potius revocent, quam ad sacrorum mys-teriorum Venerationem invitent (i).f>
LXXXYII. On demande en dernier lieu si les résolutions de la
sainte Congrégation des rites sont obligatoires ì là
dessus* le P. Merati (2) établit une distinction : lorsque ces résolutions
sont de vérita-bles décrets, comme lorsqu'elles portent ces
expres-sions : « Ab omnibus servetur ; servari ab omnibus »
mandavit, etc;, » alors elles sont obligatoires et doi-vent être
régulièrement observées; Car Sixte-Quint, dans sa
eonstit. ??^, a conféré à cette Congrégation
le pouvoir de décider tous les doutes qui étaient relatifs
au rite. Mais lorsque ce sont de simples ré-ponses adressées
à des particuliers, alors, d'après l'opinion de plusieurs
auteurs, elles doivent être considérées seulement comme
des déclarations di-rectrices et non comme des préceptes.
Esuobat· dit la même chose, d'après Lacroix (?)·.
CATALOGUE
Des décret» les plus notables relatifs à la célébration
du sacrifice de la sainte messe.
Ì. ? Eleemosynas manuales et quotidianas ita «demum sacerdotes
accipere possint, si oneribus » antea impositis ita satisfecerunt,
ut nova quoque «onera suscipere valeant; alioquin omnino absu-nt
neant. (t)ecr. S. C. conc. 21 jun. i'6!25,exauctori-» tate Urbani
Vltl.) Possunt nova onera suscipere ,
(1) Lib. VI. n. 4oo.
(2) Merati addit, ad GaT. p. 788. ?. ?.
(3) Lacroix 1. V. ?. ?8.
54?
INSTRUCTION PRATIQUE
» dummodo infra modicum tempus possint omnibus » satisfacere.
» Et ensuite expliquant ce modicum tempus anno 17, elle déclare:
« Modicum tempus «non reputandum spatium duorum vel trium men-»
sium, sed intelligi infra mensem (1). » Voyez, à l'é-gard
de la brièveté du temps, ce que disent les doc-teurs dans
l'Examen des ordinands, au ?. ?64·
II. «Pro pluribus missis celebrandis
stipendia » quantumcumque exigua, sive ab uno, sive a plu-»
ribus personis collata fuerunt, aut conferentia in » futurum sacerdotibus
et clericis, S. C. sub obtes-» Ultione divini judicii mandat, ut
absolute tot missae «celebrentur, quot ad rationem attributa? eleetno-»
synse praescriptae fuerint. ( Decr. S. C. conc. editum » j ussu Urbani
VIII, et confirmatum ab Innocente XII » in bulla Nuper (2). ) »
III. « Omne damnablle lucrum ab Ecclesia remo-» vere
volens, prohibet sacerdoti, qui missam suspi-»cit celebranda m cum
certa eleemosyna, ne eamdem » missam alteri, parte ejusdem eleemosynae
sibi re-» tenta, celebrandam committat. (Decr. S. Ç. conc
» ab Urbano VIII approbatum. ) »
IV. Dans le décret de la S. C. approuvé par In-nocent
XII dans sa bulle Nuper à l'égard des béné-ficiers,
il fut dit : « Non habere locum ( decretum » Urbani ), sed
satis esse ut rector beneficii, qui po-» test missam per alium celebrare,
tribuat sacerdoti ce-> lebranti eleemosynam congruam secundum morem »
civitatis, vel provinciae, nisi in fundatione beneficii » fuerit
aliud cautum (5). » La sainte Congrégation
(1) Apud card. Lambert, notif. 56.
(2) Vide apud Lacroix. 1. V. p. 2. ?. 64· (3j Apud Lacroix.
1. VI. p. a. u· 96.
POUR LES CONFESSEURS.
fij1
ayant été interrogée sur la question de savoir
s'il était permis à un prêtre amovible de célébrer
les mes-ses pour le taux ordinaire et de garder le reste, elle répondit
: « -Id licere, modo pro capellania certi » redditus sint annuatim
constituti, et perpetuto ca-spellano pro qualibet missa celebranda certa
detur » eleemosyna. » Cela fut ainsi décidé le
i5 mars 1745, et pour moi j'ai observé ce précepte.
V. « Permittendunv non esse, ut loca pia, seu ? illorum
administratores ex eleemosynis missarnm » celebrandarum ullam
minimam portionem reti-» neant ratione expensarum in
missarum celebra-» tione , nisi alios non habeant redditus; et tunc,
» nullatenus debere excedere valorem expensarum, » qua? pro
ipsoinet tantum missae sacrificio necessa-» rio sunt subeundœ. (Decr.
S. G. conc. confirmatum »ab Innoc. XII (?).) »
VI. « Archipresbyterum non teneri ad mini-»
stranda utensilia iis qui celebrant in sua ecclesia » ex obligatione
beneficii sive capellaniœ. Quoad » missas vero adventitias
teneri ad dictam submini-» strationem, quatenus permittat eas in
sua ecclesia «celebrari, nec teneri ad has missas adventitias ad-»
mittendas, nisi solutis utensilibus per celebrantes, ? ( Decr. S. C. conc.
die 6. jul. 1726 (2). ) »
VII. « Quando in fundatione beneficii, seu ca-»
pellae, expresse cautum est, non teneri celebran-»tem
ad applicationem sacrificii, eo casu poterit » celebrans
accipere novum stipendium, et unica » missa satisfacere obligationi
sacrificii, seu capella·, » et item danti novum stipendium.
(Decr. S. C. conc.
(1) Apud Lacroix. I. VI. p. 2. n. 95. (a) Cardinal Lambert, notif.
56, ?. ?3.
34»
» sub die j ? j ul. ? Q3Q ( » )·) » ^a même
sainte Congré-gation ayant été interrogée le
18 mars 1668 sur la question de savoir si les messes doivent être
appli-quées pour l'âme du testateur, lorsque, dans le tes-tament
, il n'a rien déclaré relativement à l'applica-tion
, elle répondit qu'on devait les appliquer pour le testateur. Elle
déclara encore la même chose le 6 février 1627, relativement
aux chapelairjs qui célè-brent la messe pour les confraternités
ou les cou-vents de religieuses, ep disant qu'il ne lçur était
pas permis de recevoir d'autre honoraire pour ces messes.
VIII. « Districte prohibet, ne episcopi in dioe-cesana
synodo, aut generales in capitulis generali-bus, vel alias quoquo modo
reducam onera ulla » missarum celebrandarum, apt post idem concijipm
» imposita, aut in limine fundationis, sed pro "his » omnibus
reducendas , aut moderandis, yel com-» mutandis ad Apostolicam Sedem
recurratur, etc » Alioquin reductiones , moderationes
, et com-» mutationes huiusmodi, si quas contra hujus for-imam fieri
contigerit , omnino nullas et inanes «decernit.»
IX. « In die commemorationis omnium fidelium »
defunctorum sacrificia possunt a sacerdotibus ce* • lebraiitibus applicari
ad libitum, scilicet vel pro » omnibus fidelibus defunctis, vel pro
aliquibus tan-»tum. ( Decr, S. £. sub die 4 augusti i663 (2).
) »
X. « In missis defunctorum, quae jn paramentis »
nigris celebrantur , non ministretur Eucharistia » per modum sacramenti,
scilicet cum particulis
(1) Card. Lambert, nolif. ?. 8. (a) ApadMcratiinindice n. 4n.
POUR Ï.ES CONFESSEURS,
» consecratis , extrahendo pixjdem a custodia ; po-t test tamen
ministrari per modum sacrificii, prout » est quando fidelibus praebetur
communio cum par-Dticulis intra eamdem missam consecratis. (Decr.S.C. »
rit. sub in Aquensi, sub die 2 septembris 1741 ?) » Et le décret
fut d'abord rédigé dans cette forme ; « Missae »
defunctorum non possunt celebrari, nisi cum co-»lore nigro, vel saltem
violaceo. (21 jun. 1670, in «Oritana. } »
XI. « Non est licitum missas celebrare in die »
sabbati sancti in quibuscumque ecclesiis et orato-riis, non obstante quacumque
contraria consueiu-» dine, prout Papa approbante suo decreto generali
«statuit eadem S. C ( Decr. S. C. rit. sub die 11 «mart. 1690
(1).) » II y a dans Pitton un semblable décret qui défend
de célébrer la messe le jour du jeudi-saint. Et ce qu'il
y a de plus important, c'est que ces décrets ont été
expressément confirmés par Clément XI (comme on peut
le lire dans les œuvres du cardinal Lambertini et dans Pitton) et par un
décret émané du même pontife le i5 mars 1712,
où il est dit : « Sa Sainteté déclare, en-dernier
lieu, que, par la susdite prohibition pour le Vendredi-Saint, il n'entend
point permettre que l'on célèbre des messes privées
le Jeudi et le Samedi-Saints, mais seulement la conventuelle, selon le
rit de la Sainte Église. » Et ce décret, comme le rapporte
le P. Merati, fut confirmé par Innocent XJÎ.etpar le même
Clément XI (a).
XII. « Habens indultum a Sede Apostolica eri-»
gendi oratorium privatum in propria domo , sj
(1) Apud Monacel. tit. i5. forinul. 5 in fine.
(2) Merat in indice décret, ?. 5?? et 5o2,
544
INSTRUCTION PRATIQUE
» quis voluerit ibi aedificare altare ligneum, non «indiget
facultate apostolica, dummodo altare li-»gneum cum sacro lapide parieti
colligatum amo-«vibile non sit, et altaris portatilis imaginem non
»prse se ferat. (Decr. S- C. rit. sub die 5 decem. » 1661 (1).)
» Le P. Merati dit, en expliquant le mot colligatum , qu'on doit
l'entendre largement, c'est-à-dire qu'il suffit que l'autel soit
appuyé au mur, de manière qu'il n'y ait pas d'intervalle
et qu'il ne res-semble pas à un autel portatif ; au moins ( dit-il
) c'est ainsi que l'usage l'a interprété.
XIII. Les autres décrets de la sainte Congréga-tion
des rites sont rapportés par Lacroix (2) : « Missa »
conventualis canenda est quotidie in collegiatis, «quarum clerus
est numerosus, et redditus non » tenues. »
XIV. « Missse ad satisfaciendum
eleemosynis » alicui ecclesiae traditis non sunt celebranda? per
» exteros, ubi commode possunt satisfieri per sacer-» dotes
ejusdem ecclesiae. »
XV. « Inferiores episcopo non debent sumere de «altari
paramenta pro missa. 7 jul. 1712. » Mais cela signifie, d'après
Gavant., que les parements ne doivent pas être posés au milieu
de l'autel à la ma-nière des évêques, car la
rubrique elle-même per-met de les poser à l'anglede l'autel
(p. 2, tit.12,11. ?) où il est dit : « Si vero (sacerdos)
dimissurus sit pa-ît ramenia apud altare, ubi celebravit, finito
evan-»gelio, ibidem illis seexuit. » Au moins, dit La-croix,
cela doit être permis lorsque le prêtre n'a pas d'autre endroit
pour poser ses vêtements.
(1) Apud Merat. t^I. p. 2. in indice, n. 3g3. (a) Lacroix. I. VI. p.
3. n. 3o55,
POUR LES CONFESSEURS.
54«>
XVI. « Altare portatile ligneum cum ara lapidea »
permitti debet, non obstante constitutione syno-xdali, dummodo habeat solitum
reliquiarum repo-» sitorium. Die 19 jan. ?6?4· »
XVII. «Solus episcopus potest habere fenestras »
in ecclesia, per quas in earn prospectus haberi «possit. 19
jan. ???4· »
XVIII. « Non permittitur ad altare majus cele-»bratio
missae, dum dicuntur in choro matutinum, » et horae. i5 sept. 1664.
»
? XIX. « Potest fieri commemoratio de S. Sacra-» mento,
si expositum sit, etiam in missa de feslo » duplici, quod non^iti.
vel.2. classis. Decr. 1668.»
Remarquez de plus que le pape Clément XIII a ordonné
que tous les dimanches la messe eût pour préface celle de
la Trinité, parc* qu'il n'y a pas de préface particulière
pour ce jour-là. En-suite il s'est élevé des doutes
sur la question de savoir si, pendant le carême ou pendant l'octave
de la sainte Vierge, par exemple, ou des apôtres et autres semblables,
on devait dire une préface par-ticulière ou celle de la Trinité.
Jusqu'à ce que la sainte Congrégation des rites se soit déclarée
sur cette question, je pense que pendant les octaves on doit dire la préface
de l'octave, parce que c'est la préface propre pour ce jour ; mais
pendant le ca-rême , c'est la préface de la Trinité
que l'on doit dire, parce que celle du carême est la préface
propre du temps, mais non pas du jour. De plus, remar-quez un autre décret
de la sainte Congrégation: » Non potest prohiberi celebratio
missae in oratorio » iuri aedificato per laicum, antequam celebretur
» missa parochialis. » Decr. S. C. Ie3i mars 1629(1).
(1) Apud. Merat. intl. n. 242.
?. xxiv.
35
546
INSTRUCTION PRATIQUE
XXI. · De rigore juris non posse prohiberi
(scil. a parocho), ut missa? non celebrentur ante missam »a parocho
non celebratam. » Decr. s. ch. 27, fun. 1641 (1). Mais dans un autre
décret il est dit : « Sœ-s pius S. C. censuit, constitutiones
synodales dispo-» nentes, ut diebus festis missae celebrari non debeant
»in aliis ecclesiis, nisi celebrata missa in ecclesia » parochiali,
esse observandas ; ita tamen ut missa in » ecclesia parochiali hora
opportuna celebretur. » a5 mai 1625 (2).
XXII. « S. C. censuit, non licere regularibus}
«etiam in eorum propriis ecclesiis S. Eucharistiae »
sacramentum publice adorandum exponere nisi ex » causa publica, quae
probata sit ab ordinario; ex «causa autem privata posse,
dummodo S. Sacra-» mentum e tabernaculo non extrahatur, et sic ve-»
latum, ita ut ipsa sacra hostia videri non possit. » Le 17 août
???? (?). Cela fut confirmé par Ëen. XIV clans un autre décret
où il est dit : « Non licere ex-» poni publice divinam
Eucharistiam, nisi causa pu-»blica, et episcopi facultas intervenerit.
» Le i& «avril 1746 (4)·
Sur quoi je dis que si quelque par-ticulier désire l'exposition
du Saint-ÎSacrement afin d'exciter la dévotion publique, on
peut la faire selon son désir, mais non pas lorsqu'il ne la veut
que pour sa propre dévotion. Remarquez de plus que les égli-ses
fondées par des séculiers sont également soumises
au décret de la sainte Congrégation devescet dereg. qui defend
de tirer le saint Ciboire du tabernacle,
(1) Âpud card. Lambert, notif. 44· "· 12·
(2) Ibid.
(3) Notif. 5o. n. n.
(4) lu in Bull, t. IL
POUR LES CONFESSEURS.
lorsquec'est pour un simple particulier : î Siquando-»
cunque privata ex causa sacrosancta Eucharistia » exponenda videbitur,
a tabernaculo nunquam ex-» trahatur, sed pixide velata in aperto
ejusdem ta-» bernaculi ostiolo cum assistentia alicujus sacerdotis
» stola et superpeliceo induti, et cum sex saltemlu-» minibus
cereis collocetur: Quod idem in ecclesiis «saecularium servari mandamus.
» Le ?, décem-bre 1692 (apud card. Lambert, no/if. 3o, n.
21), et Benoît XIV dans sa bulle Cum ut recte nosti; in Bullario,
t. iv, p. 317 al § i3, en mentionnant les décrets précités,
dit que l'on ne doit pas sortir le saint Ciboire, lorsqu'il ne s'agit que
d'un simple particulier, pas même pour donner la bénédiction.
Voici comment il s'exprime : « Si autem Sacramen-tum non debet a
tabernaculo educi, facile intelli-» getur, in designatis casibus
non esse illud offeren-» dum ad ecclesiœjanuam, nec cum eo benedictionem
0 impertiendam. » II est bon de remarquer encore ce que dit le même
pontife au § 12 : « Neque enim fas » cuique esse debet
privata auctoritate novum ritum » inducere, » et là
il cite \ecan. ?5 duconc. de Trente, sess. ?. Le pape applique ici le canon
qui prohibe de faire des changements aux rites usités dans l'ad-ministration
des sacrements et pour le culie de la sainte Eucharistie, et en parlant
des rites nouvelle-ment introduits, il ajoute: «Et quoties aliquem
ritum » ejusmodi induci contigit, etsi nihil continentem »
pietati oppositum, Apostolica Sedes eumdem in-» terdicere non dubitavit,
ex quibusdam extrinsecis » circumstanciis nullatenus prsevisis, vel
neglectis ab 1· eo qui ritum invexit. »
XXIII. Remarquez en dernier lieu que le décret d'InnocentXI>
du ? «» septembre» 760, a prohibé «ap·
548
INSTRUCTION PRATIQUE
» poni statuas, reliquias sanctorum, ac imagines » animarum
purgatorii in altari, ubi iit expositio S. «Sacramenti(2). »
Remarquez encore que le sacrement de l'Eucha-ristie ne peut pas être
administré dans une église autre que l'église paroissiale
sans une dispense du saint-siége , attendu que
les ordinaires ne peuvent pas l'accorder, comme l'enseignent
Barb., Pign. et plusieurs autres , d'après le cardinal Petra,
qui rapporte plusieurs décisions de la sainte Congréga-tion
sur ce point applicables tant aux hôpitaux qu'aux conservatoires,
et même pour les églises situées dans le périmètre
des paroisses, ainsi que pour les églises rurales dans lesquelles
les curés vont célébrer. Il y est dit que la sainte
Congrégation n'accorde une telle permission que lorsque ces églises
ou chapelles ren-ferment une grande quantité de peuple, et spéciale-ment
lorsqu'elles sont très éloignées de la paroisse; enfin
BenoitXIV danssa constitution Quamvisjusto. donnée le 5o avril 1749
(voyez au t. m de son Bul-laire) a déclaré qu'une telle permission
devait dans tous les cas être accordée par le saint-siége
aposto-lique , en ces termes : « Quoniam vero hujusmodi » gratiœ
concedenda (c'est-à-dire de tenir le saint-» sacrement) jus
ad nos et Apostolicam Sedem priva-» tive pertinet, quod innuit decretum
superius rela-»tuin, et canonica docet disciplina,
juxta quam » sacrosancla Eucharistia in ecclesiis quse parochiales
» non sunt retineri non potest absque praesidio apos-»tolici
indulti, vel immemorabilis consuetudinis, «quae hujusmodi indulti·praesumptionem
inducit.» Cependant la sainte Congrégation dit que la posses-
(1) Apud Meiat. p, 681.
????? LES CONFESSEURS.
549
sion de quarante ans, accompagnée d'un titre putatif, est suffisante,
parce qu'un tel espace de temps suffit pour faire présumer la permission
apostolique; mais elle ajoute que lorsqu'il est prouvé que l'Eucharistie
n'est gardée qu'en vertu de la permission d'un ordi-naire, la possession
ne peut plus suffire, serait-elle centenaire ou immémoriale. Ces
décisions Sont rap-portées par le cardinal Petra déjà
cité.
XXIV. Remarquez en dernier lieu que, suivant le décret
de la sainte Congrégation des rites de 1737 le i5 septembre,
rapporté par Merati, lorsqu'on administre la communion à
des religieuses on ne doit pas leur donner la bénédiction
par la petite fenêtre avec le saint Ciboire, mais seulement avec
la main droite, lors même qu'on a là le Sacrement.
XXV. Régulièrement la messe doit correspondre à
l'office, mais on en excepte, comme il est dit dans un décret de
la sainte Congrégation des rites : « Sa -«cerdotes (etiam
regulares) diebus, quibus propria » officia recitant sub ritu duplici,
celebrantes in » alienis ecclesiis, quando peragitur festum cum so-«lemnitate
et concursu populi, debent celebrare «missas, conformando se ritui
et colori earumdem «ecclesiarum. In aliis vero diebus, possunt;
sed » quando prohibentur missee votivœ, vel defuncto-» rum,
debent se uniformare saltem quoad colorem.» Voir un décret
du 11 juin 1701 rapporté par Me-rati dans son Indice de'decreti,
?. S58. Remarquez de plus que, lorsque la fête est de première
ou de seconde classe, on ne peut pas dire les Collectes. Il y a sur ce
point deux décrets que rapporte l'auteur du Compendium de Mera'i,
l'un du 18 août 1717, l'autre du 2 décembre 1684; de plus,
Gavanti dit que, lorsque la messe renferme la troisième oraison
INSTRUCTION PRATIQUE, ETC.
ad libitum, on peut, en place de cette oraison, dire la Collecte ordonnée
par l'évêque ; mais il y a dans le susdit Compendium de Merati
un décret de la sainte Congrégation du 17 août 1709,011
il est éta-bli que la Collecte ne doit être dite qu'en quatrième
lieu.
FIN DU TOME XXIV.
TABLE
DES CHAPITRES.
CHAPITRE X.
Du septième précepte.
Premier point. De la Justice, du droit et du domaine.
? Second point. Du vol.
§ I. De l'essence du vol.
16
$ II. De la quantité que doit avoir le vol pour être matière
grave.
22
Troisième point. De la restitution.
$ I. D'oà naît la restitution, et quelle est la fauU qui
la motive.
56
$ IL De ceux qui sont obligés à larestitution.
4o
§ III. A qui doit être faite la restitution.
69
§ IV. Quelles sont les choses que doit restituer le possesseur
de bonne foi. Quelles sont celles que doit restituer le possesseur de mauvaise
foi.
69
? V. Ceqte doit restituer celui qui a commis un homicide.
79 $ VI. Que doit-on restituer dans le cas de viol.
88
$ VII. Quelle est la restitution qui doit être faite dans
le cas d'adultère ?
98
$ VIII. Du temps et du mode de la restitution.
lo5
< IX. De l'ordre"1 à observer entre les personnes auxquelles
on doit faire la restitution.
106
$ X. Quelles sont les causes qui libèrent de l'obligation de
restituer.
u3
Quatrième pointa Des contrats.
552
TABLE DES CHAPITRES.
§ I. Du contrat en generat.
121
§ II. De la promesse et de la donation.
126
§ III. Du commodat, du précaire, du dépôt,
i54
$ IV. Du prêt et de l'usure.
l36
§ V. De l'achat et de lavente.
l54
§ VI. Du commerce.
172
§ VII. De la rente.
176 § VIII. Du change, du louage, de l'emphytéose, du fief,
du
libelle.
180 § IX. De la gageure et du jeu.
l85 § X. Du contrat de société.
.
192 § XI. De l'assurance , de la caution, du gage, de l'hypo-thèque,
de la tutelle, des testaments.
200
CHAPITRE XI.
Du huitième précepte.
Point unique. Du jugement téméraire, du mépris,
de la détraction.
§ I. Du jugement téméraire.
2?5
§ II. De Fajfront et de sa réparation.
207
§ III. Delà détraction.
a 12
CHAPITRE XII.
Avertissement sur les préceptes de l'Église.
226
Premier point. Du jeûne ecclésiastique.
5I. De l'obligation du jeûne.
227
§ IL Des causes qui dispensent dujeane.
a5i
' Second point. Du précepte de la confession et de la com-munion
annuelles.
26(3
TABLE DES CHAPITEES.
555
CHAPITRE XIII.
Remarques sur les préceptes relatifs à quelques classes
particulières de personnes.
Premier point. De l'état religieux.
§ I. De l'obligation de la profession religieuse.
278 § H. De l'obligation des vœux.
2 85 § III. A qui est-il défendu ([entrer dans un corps reli-gieux.
5 06
Second point. De l'état clérical.
5i5
§ I. A qui les bénéfices peuvent et doivent-ils
être con-férés ?
Ib.
§ II. De la qualité et des obligations des bénéficiers;
et de combien de manières les bénéfices peuvent être
perdus. 351
Troisième point. De l'état et des devoirs de quelques
sé-culiers.
.
555
§ I. Des juges et des greffiers.
lb·
§ II. Des avocats et procureurs.
565
§ III. De l'accusateur, des témoins et du coupable.
CHAPITRE XIV.
Avertissement sur les sacrements en général, et spé-cialement
le baptême et la confirmation.
Premier point. Des sacrements en général.
586
Second point. Du sacrement de baptême.
5g5
§ I. De la matière, delà forme et duministre du
baptême. Ib. § II, De ceux qui peuvent recevoir
le baptême.
4i2
§ III. Des parrains et de leurs fonctions,
4'22
Troisième point. De la confirmation,
4*9
554
TABLE DM CHAPITRES.
CHAPITRE XV.
Du sacrement de l'eucharistie.
Premier point. De ('essence de Ceucharittie.
448
Second point. De l'administration de i'eucharistie.
4*>6
Troisième point. De la reception de Veucharistie.
§ 1. De l'obligation de la recevoir.
§ H. Des dispositions de Came.
§ IIT. Des dispositions du coips.
47l
Quatrième point. Du sacrifiée de la messe.
4&5
Catalogue des décrets les plus notables relatifs a la celé-
5io
oration du sacrifice de la tamte messe.
539
PIN »E LA T1BLI
PBS CIUPITIVE5.