CHAPITRE XX.
DES PRIVILEGES.
PREMIER POINT.
Des privilèges eu commun.
?. Différence entre le privilège, la dispense et la permission.
2. Quand le privilège déroge-t-il au droit com-mun?
?. Quand le privilégié est-il tenu de se servir de son
privilège?
4· Si hors du sacrement, les censures, etc.
5. De la clause ad instar, etc., quatenus sacris^ can. non adversetur,
etc., supplentes defectus.
6, 7 et 8. De l'interprétation des privileges. 9, 10 et
11. De la communication.
?2. Des privilèges des réguliers qui ont été
révo-qués, etc.
??. Des brefs de grâce et de justice; s'ils expirent à
la mort du pape.
?4· En combien de manières cesse le privilège.
i5. Gomment il cesse par la révocation. T. xxvi.
l
S
INSTRUCTIO^ PRATIQUE
16. De la révocation expresse.
17. De la révocation tacite. S'il faut que la révo-cation
soit intimée ou au moins publiée.
I. Le privilège redéfinit ainsi: Lex privata, ali-quod
speciale concedens beneficium. Il diffère de la dispense, laquelle
exempte de la loi, ce qui la rend toujours odieuse, et de la permission,
que l'on n'ac-corde seulement que pour certains actes. Nous parlerons en
leur Heu des privilèges en particulier; nous allons seulement donner
ici quelques règles à suivre à l'égard des
privilèges en commun.
IL Et d'abord, pour que le privilège déroge au droit
commun , il n'est point nécessaire que la clause y déroge
également, parce qu'on présume que le pape connaissait déjà
les lois communes. On en excepte néanmoins les cas suivants : 1°
lorsque le privilège ne peut avoir d'effet sans cette déroga-tion
expresse ; a" loi-sque dans la loi se trouve ren-fermée la clause
non obstante quocumque privilegio, Cela néanmoins s'entend, pourvu
que dans le privi-lège il n'y ait point la clause ex certa scientia,
ou bien ex plenitudine potestatis (?) ; ?* lorsque le pri-vilege est contre
quelque usage ou contre quelques lois municipales, parce qu'on ne doit
point les re-garder comme dérogées, à moins qu'il
n'en soit fait une mention spéciale (2).
III, En second lieu, le privilégié n'est point tenu,
régulièrement parlant, de se servir de son privilège,
reg. 6, Jur. in 6 ; mais on en excepte les cas sui-
(1) Salmant. Ira. 18. n. 42 <"l 45 cum a'"s·
(2) Suar. de leg. 1. \ III. c. 14. n. 4. Castrop. t. I. trac.
3. d. 4* I1· 10 n. 9· et Salutant, c. cit. c. 1. n.
8. cum t ellk. Tamburiui. tec.
-ES CQNFKSStiUftS.
|
vants ï 19 si, en s'abstenant de spn privilege, \[ causait au
prochain de graves dommages,, non poin.^ par des conséquences immédiates,
niais par luU même. Ainsi, par exemple, le confesseur qui a (e privilège
d'absoudre les péchés réservés, est obligé,
après avoir entendu la confession, de se servir de son privilège
(t); S0 si le privilège est un bien commun, ce qui est alors un
privilège d'immunité dont chacun est obligé de se
servir, comme nous l'apprend le c. Si diligenti, de foro compet; 5°
si le privilège enlève l'empêchement à l'obseryatjon
d'un précepte. Ainsi, par exemple, si up rnalade a un? chapelle
particulière dans sa maison où il pont faci-lement entendre
la messe, qlors le privilégié esj; obligé de se servir
de son privilège (2) ; (f si lepFÎ-vilége n'est point
personnel, mais réel, attaché a*j lieu ou à la dignité,
ou bien à l'Etat, comme s.ont par exemple les privilèges
accordés aux évpqijes et aux réguliers (3).
IV. En troisième lieu, celui quia le privilège
pour la justice pénitentiaire, comme par exemple d'ab-soudre des
censures et des peines ecclésiastiques, peut, selon toute
probabilité, se servir de son privi-lège, même hors
du sacrement, quoiqu'il ne lui ait été expressément
donné qu'en sa qualité de con-fesseur, sacerdoti conjessario
(4).
V. En quatrième lieu, nous disons, en parlant de
(1) Salmant. trac. 18. n. 11. cum aliis, (a) Suar. c. 55. n. 8. Pal.
p. 7. n. 5. Sanch. tic malri. l.VI. jjjc. 6. ?. ?/|· etSalmaut.
c. 1. i>. 12. cum. Sjlvcst. Avila, etc.
(3) Salmant. c. 1. n. 17 et 18.
(4) Suar. 1. VIII c. 6. ?. ?5. Castrop. d.
4. jp. s». § 5 n. 6. et Salmaut. c. 1. n.
35. cum Sylv, Tab. ejtc coptra alios qui probabiliter etiam negant.
4
INSTRUCTION PRATIQUE
la clause, que celle ad instar veut que le premier privilège
cesse aussitôt que le second (accordé pa-reillement comme
le premier ), a été valide au moins dès le commencement,
quoique après on le révoque ou qu'on né l'accepte
point, comme le remarque le P.Mazzotta Mais au contraire si le premier
privilège a été nul, le second l'est également,
à moins que dans ce dernier on ne spécifie ce que l'on accorde
(1). Cela néanmoins a lieu (comme le disent les doc-teurs) quand
on ajoute ad instar, mais non point quand on ajoute sicut concessum est,
etc., comme le limitent Bonac. et Garz., après les Salmantic. La
clause Quatenus sacris canonibus non adversetur, doit s'entendre seulement
de ces canons où l'on a exprimé : Non obstante quocumque
privilegio (2). La clause Supplentes singulos defectus s'entend seulement
des défauts de certaines choses-que l'on exige sim-plement de jure
positivo, et qui ne sont qu'acciden-telles, mais non point des défauts
naturels ou bien substantiels, comme par exemple si le suppliant était
excommunié, ou si la requête était subreptrice ou frauduleuse,
ou bien encore si le défaut était ?sur la cause ou la personne
du suppliant (?). Quant aux autres clauses, voyez ce qu'en disent les Sal-marit.
(4).
VI. En cinquième lieu, en parlant de l'interpré-tation
des privilèges, on doit remarquer plusieurs choses, savoir: i°
que tout privilège doit être in-
(1) Suai·, c. i5 n. a. Castrop. d. 3. 2. §8. n. 1. Salmant.
c. 1. n. 39. cum. Bon. etc. et P. Mazzo. 1.1. de privil. p. as. T. Sexto.
(a) Salmanl. c. 1. n. 5o cum Nat. Suar. Gare. etc.
(3) Salmant,. ci. n. 5i. cumBaxbosa et Tambur.
14) Ibid. ex a, 4o.
POUR LES CONFESSEURS.
S
terprété de manière à ce qu'il ne soit
point inutile ou onéreux au privilégié; 2» que
le pape seul ou celui qu'il en a chargé a'ie droit d'interpréter
les privi-lèges authentiquement et juridiquement. Quant à
l'interprétation doctrinale, elle est permise à tous les
docteurs; il leur est même permis de s'en tenir à leur sentiment,
comme le disent tous les auteurs. Lorsque dans le privilège on prohibe
toute inter-prétation, qn veut parler seulement de l'interpréta-tion
authentique et juridique (1), ou tout au plus, de l'interprétation
faite ex professo, comme on l'a dit dans les lois (chap. 11, ?. 8?) ; 5°
que ClémentIV et d'autres pontifes ont défendu aux évêques
d'in-terpréter juridiquement les privilèges des réguliers;
seulement Alexandre VI et Paul III ont accordé cela ( quand on ne
peut consulter le saint-siége aposto-lique) aux savants en droit
et aux autres juges en faveur des réguliers. La même chose
a été accordée au général, aux visiteurs,
et même au provincial, mais ils doivent se consulter avec les docteurs.
Il en est de même pour l'interprétation des règles,des
consti-tutions et des usages. Il est encore permis aux pré-lats
que nous venons de nommer, d'ôter ou de limi-ter l'usage des privilèges
aux susdites personnes (2). VII. Nous disons en général des
privilèges, qu'on doit régulièrement les interpréter
tous d'une ma-nière large, comme l'enseigne le c. olim 6, de -verb,
sign., où il est dit : Sunt beneficia principum inter-pretenda largissime,
etc., comme l'enseigne encore la 1. ult.ff. de constet.princ. Au contraire,
on doit
(1) Sal m. n. 70 et 71. (a) Salmant. 7a et j3. (3) Salmant, c. 1. a.
??\· j5 et 76.
.??
INSTRUCTION PRATIQTIB
interpréter strictement les privilèges odieux, comme
sont ceux qui dérogent au droit commun (1) ou aux. statuts, ou bien
aux usages particuliers; à moins que ces statuts soient contre le
droit commun, ou que le privilège soit inséré m corpore
juris. C'est pourquoi Sanch. etMazzotta (2) prétendent que tous
les privilèges réels doivent être interprétés
large-ment, puisque, par leur perpétuité, ils sont comme
insérés dans le droit commun. De plus on en excepte le cas
où le privilège, s'il n'en était ainsi, serait nul,
et si on y avait ajouté la clause ex certa scientia, ou bien ex
mota proprio ; ou bien encore si le privilège était d'absoudre,
de dispenser, ou si on devait le communiquer à d'autres (5). Quant
aux privilèges qui sont au prejudice d'autrui, comme sont ceux d'obtenir
plusieurs bénéfices , de conférer ceux qui sont vacants,
de dispenser de l'observation de la règle, nous devons les interpréter
strictement, quand ils auraient été accordés ex proprio
motu (4).
VIII. Ce que nous avons dit dans le précédent numéro
doit également s'appliquer aux privilèges accordés
aux particuliers; mais pour ceux que l'on a accordés à certains
ordres, à certaines commu-nautés ou congrégations,
ou autres institutions re-ligieuses, on doit les interpréter non
seulement d'une manière large, mais même très large,
quoique Ces privilèges soient contre le droit commun ou le
(1) Ita communiter Sanch. de matr. 1. VIII. d. 1. n. 1. et 5. Bon.
de priv d. 1. q. 3. p. 7. ji.n. 5 Suar. de legk 1. VIII. c
3-j. Salmant. tr. 18. c. 1. n. 79. et alii passim.
(?) Sanch de Malr. 1. VIII. d. ». n 8. et Mazzotta loco cit.
p. 923. c. a. v. Risp.
(3) S»lmant. tr. 18. c. ». n. 78. »«1
86.
(4) Salmant. n. 85 et 84.
PÒBR LBS CONFESSEURS.
7
droit d'un tiers, comme le disent communément les docteurs (1),
parce qu'on doit regarder les pri-vilèges accordés aux communautés
comme autant de récompenses pour les services qu'elles ont ren-dus;
c'est pourquoi nous devons les croire tous fa-vorables, selon la 1. Sicutpersonnœ
ff. de relig. (?). IX. En parlant de la communication des privi-lèges
, nous observerons, en premier lieu, que les monastères de religieux
mendiants se communiquent parfaitement entre eux les privilèges
passés et fu-turs , soit à l'égard des personnes ,
comme à l'égard des lieux, des fêtes et des indulgences,
comme le déclarent les bulles de Sixte IV, de Clément VIII
et de Léon ? (?). Cela a également lieu, quand même
le monastère à qui le privilège aurait été
accordé n'aurait point voulu l'acc<-pter, ou n'en fait aucun
usage. De plus, quand on étend le privilège accordé
à un monastère, il se trouve également étendu
pour les autres (4). De plus encore, les monastères de re-ligieux
mendiants participent aux privilèges de tous les autres monastères,
congrégations ou collèges monastiques ou non monastiques
f5). Cela a égale-ment lieu quand même on aurait ajouté
à ces pri-vilèges la clause de ne point les communiquer;
cat il existe d'autres bulles qui lèvent tout empêche
(?) Suar. e. «7. n. 7. Caslrop. d. 4· P· lo·
"· 6- Maitotta loco cil. etSalmant. c. 1. n. 27 et a8. ei iterum
n. 85 et 86. cum Aior. Lay m. Sjiv. Bonne. Henr. Coninch. Lezana. Bord.
et alii».
(s) Solmant. c. 1. n. «3. ad 17.
(5) Ibid. n. 88 et 89.
(4) Ibid. n. 98 et 99.
(5) Ita communissime Salm. tr. 18. c. 1. n. 90 cnm Rodr. Pelliz.
? am bur. etc.
8
INSTRUCTION PRATIQUE
ment de communication (1). En outre, lesconvers jouissent e'galement
de ces privile'ges, parce que ceux-ci, comme les novices, sont de véritables
re-ligieux (2), selon la déclaration de Clément VIII, et
le sentiment commun avec Suarez, Sanchez, Cas-tropal., etc. (?). De même
les religieux devenus évêques en jouissent également,
pourvu qu'en s'en servant, étant évêques, ils ne portent
point préju-dice au monastère, comme serait, par exemple
, s'ils habitaient le monastère, s'ils donnaient leur voix, etc.
(4). Les frères et les sœurs ( ou béates ) dépendant
des religieux mendiants, et qui portent l'habit religieux après
avoir fait vœu de chasteté (à quelque chose près),
jouissent aussi de ces privi-lèges dans toutes les choses auxquelles
ils sont pro-pres. Quant aux confrères du scapulaire, du cor-don
, etc., ils n'en jouissent seulement que pour ce qui est des indulgences
et des rémissions des pé-chés; mais ils ne participent
point aux autres effets des privilèges (5). Au contraire, tous les
autres or-dres religieux non mendiants participent à tous les privilèges
de ces derniers et de toutes les maisons religieuses, comme s'ils étaient
réellement de l'ordre des religieux mendiants ; c'est pourquoi ils
doivent toujours faire attention aux clauses de leurs bulles
(1) Salai, tr. ;8. c, 1. n. 170. Rodr. Basseo. Miranda.
Boa. Diana, Dona to. etc.
(a) Sain», tr. i5. de statut, rei. e, 1. n. 53.
(3) Suar. t. IV. de rei. tract. 10. lib. IX. c. 1. n. 18.
et Salm. ibid. c. 3. n. 85. cum jSanch. Castrop. Lezana. Pellii
et aliis.
(4) Salm. die. tract. J5. cap. 5. n. 43· cum Saar. Le«.
et Caitrop.
(5) Salmant. tracU i5, n. 94. cum alii».
POUR LES CONFESSEURS.
9
pour connaître, soit les restrictions ou les amplia-tions apportées
aux privilèges dont nous venons de parler. Voyez les Salmant., tr.
i8, n. 90 in fin.
X. Remarquez, en deuxième lieu, que les reli-gieuses, soit de
l'ordre des mendiants ou non-men-diants, jouissent également des
privilèges des moines de leur ordre, et par conséquent de
ceux de tous les autres ordres, dans toutes les choses où elles
sont propres et qui leur sont favorables. Cela a éga-lement lieu
quand même le privilège ne s'adresserait directement qu'aux
hommes, comme nous l'apprend la bulle de Léon X. Pareillement, les
frères partici-pent aux privilèges des religieuses de tous
les ordres, par la raison (comme nous l'avons dit plus haut ) qu'ils peuvent
jouir de tous les privilèges accordés à chaque ordre,
à chaque congrégation et monas-tère (1). Mais à
l'égard des religieuses, ces privilèges sont également
communs à toutes celles qui sont sous la dépendance du pape
ou de l'évêque. De même encore, quand on accorde aux
religieux le privilège d'être absous ou dispensé par
leur prélat, les religieuses qui sont sous la dépendance
de l'é-vêque peuvent être absoutes et dispensées
par ce même prélat, quand même dans le privilège
il ne serait fait mention que des religieuses qui vivent sous la dépendance
des réguliers (2).
XI. Remarquez, en troisième lieu, que lorsque les privilèges
sont odieux et contraires aux statuts propres, alors la communication
n'a plus lieu,
(1) Salmant. tract. 18. de privil, c. 1. n. 91.
(a) Suor. de leg, 1. VIII. c. 10. n. 7. Bon. d. x. q. 3. p. 7. ? s,
n. a. et Salm. tr. 18. c. a. n. 93. cum Castr. Lei. Pellit. Bord. Boss,
et aliis contra paucos.
IO
INSTRUCTION PRATIQUE
comme aussi lorsqu'ils portent préjudice au bien du monastère
ou à l'observation de la règle (1). Re-marquez , en quatrième
lieu, que les privilèges ac-cordes à un individu, non point
comme particulier, mais à cause de l'office qu'il remplit ou de
la dignité qu'il occupe, ou bien encore parce qu'il est mem-bre
d'une communauté; remarquez, dis-je, que ces mêmes privilèges
sont également accordés à tous les autres qui remplissent
le même office ou la même dignité, ou qui sont membres
de la même communauté. De plus , les privilèges accordés
aux susdits ou à des prélats inférieurs, s'entendent
éga-lement accordés aux prélats supérieurs
(2). Pareil-lement, les privilèges que l'on donne, soit à
un cou-vent ou à une église, soit à un particulier
de quelque couvent, mais comme membre de ce couvent j ces privilèges,
dis-je, doivent être considérés comme également
accordés à tous les autres religieux de cet ordre et des
autres ordres qui s'unissent entre eux pour combattre la même chose
ou pour toute autre raison (3). Cependant on ne doit point étendre
cela aux privilèges que l'on accorde à quelques congré-gations
à certaines époques, ou-que l'on donne par bref particulier
à quelque monastère pour des rai-sons spéciales, ou
bien encore quand ce sont de ces privilèges que l'on n'accorde d'ordinaire
que très difficilement (4).
Xif. 7. Il est certain , comme on le voit, d'après la condamnation
de la proposition 36 faite par
(1) Castrop. d. 4- § 9· ?· 2. et Salm. c. 1. n.
100. Suarez. Pclliz. Porlel. Tarnb._Bord. clc. (a) Sulm. ci.n. îioctm.
(5} Ibid. cam. Pelliz. Garcia. Quintan. Tamb. etc. (4)
Salm. c. 1. n. 118. cam Peyr. Tamb. Mor. etc.
POUR LES CONFESSEURS.
11
Alexandre VII, que les religieux ne peuvent plus se servir des privilèges
révoqués par le concile de Trente. Cependant, malgré
cetie défense, il faut remarquer certaines déclarations de
ce même con-cile faites par saint Pie V dans sa bulle Etsi men* dicàntium.
Les voici : 1° II est permis aux séculiers d'entendre la messe
et le sermon dans l'église des réguliers. 2° Les évêques
ne peuvent accorder de permission pour entrer dans lés monastères
des reli-gieuses libres. 5° La quarte funèbre ne doit s'enten-dre
que de ce qu'on apporte (1). fy· Les confesseurs des religieuses
exemptes et les réguliers prédiea* teurs de leurs propres
églises, ne sont point exami-nés par l'Ordinaire. Mais ce
privilège accordé aux confesseurs est une dérogation
aux véritables con-Stiuitions apostoliques et spécialement
à la bulle Apostolici ministerii d'Innocent XIII, de l'an 1723,
et confirmée par Benoît XIII le 23 septembre 1724·
Là, dans le § 18, on déclare que les confesseurs des
religieuses libres doivent être examinés et ap-prouvés
par l'évêque diocésain;» remota quacum-»
que contraria consuetudine, etiam immeniorabile. » XIII. 8. Il faut
distinguer le rescrit de grâce, c'est-à-dire d'absoudre, de
dispenser, etc., et le rescrit de justice, c'est-à-dire d'exercer
la juridic-tion , d'assigner, etc.; dans le premier on ajoute'que gratia
facta, lorsque le délégué n'est simplement qu'un exécuteur
indispensable, et que la gratia fa-cienda doit être accordée,
lorsqu'on accorde la fa-culté de dispenser au délégué
et qu'on lui donne tout pouvoir. Le rescrit de justice expire à
la mort du pape, à moins que l'affaire ne soit déjà
commen-
(1) Salmant. tract. 18. c. 1. n. 137.
12
INSTRUCTION PRATIQUE
cée. Mais au contraire le rescrit de grâce, c'est-à-dire
d'absoudre et de recevoir les ordres extra tempora de l'oratoire privé
a toujours lieu (?). Il est probable ensuite que le privilège accordé
avec la clause donec voluero, n'expire point à la mort de celui
qui l'a accordé (2). Voyez ce qui a été dit au chap,
xvi, n. 82, En outre, si dans la concession on exprime l'office du délégué,
à la mort de ce dernier, la con-cession passe même à
celui qui lui succède (5).
XIV. 9. Le privilège peut cesser de plusieurs manières
: i° par l'expiration de l'époque assignée au privilege;
20 par la cessation de la cause finale, pourvu toutefois que le privilège
ait été accordé sous la condition de cette cause ;
mais si le privi-lège avait été donné d'une
manière absolue, il est très probable que la cause cessant,
le privilège dure encore, quand même on s'en serait servi
une fois (4), comme nous l'avons dit en parlant de la dispense au chap.
11, ?. 66, in fin. ; 5° par la renonciation au privilège ; ici
nous observerons que les parti-culiers ne peuvent point renoncer au privilège
de la communauté, et pour que la renonciation soit valide, il faut
que celui qui a accepté le privilège la fasse entre les mains
de celui qui a donné ce même privilège (5) ; 4°
P»r l'usage contraire qu'on en fait, ou par le non-usage; dans le
doute néanmoins, la présomption doit être en faveur
de l'usage. Remar-quez cependant que les privilèges favorables qui
ne
(1) Castr. d. 5. p. 16. §4. n. 11. Sanch. de matr.
1. VIII. d. 38. n. 4i. Salm. c. 1. n. i4l. ad lifi·
cum Suarez.
(2) Satinant, tr. 18. n. 149, (5) Ibid. n. 161.
(4) Ibid. c. 3. n. Set 4.
(5) Ibid. 11. 5. ad 8.
POUR LES CONFESSEURS.
l5
sont point à charge aux autres, comme par exemple, celui de
dispenser, d'exempter du jeûne, etc., ne cessent jamais par le non-usage,
et même par l'u-sage contraire, quelque reculée qu'en soit
l'époque où ils ont été accordés (1).
Au contraire, les privi-lèges qui sont onéreux à un
tiers, comme par exem-ple, ceux de ne point payer la dîme, etc.,
ceux-là sont prescrits pour l'usage contraire et même pour
le non-usage particulier ( non pas seul négatif), ce qui a lieu
lorsque le privilégié, n'ignorant point son privilège,
refuse volontairement de s'en servir, lorsque les occasions se présentent.
Mais il faut pour cela que dans le privilège on n'ait point ajouté
la clause de s'en servir lorsqu'il le jugera à propos, à
suo arbitrio (2). En outre, cela doit s'entendre pour la justice extérieure,
puisqu'en conscience celui-là ne peut point perdre son privilège
qui n'a point l'intention d'y renoncer (5). Le privilège peut ensuite
cesser soit entièrement, soit en partie, par l'abus qu'on en fait
(4).
XV. En cinquième lieu, le privilège cesse lors-qu'il
est révoqué par le pape. Mais en cela, il faut distinguer
les privilèges gratuits des privilèges lu-cratifs, et de
ceux qui sont onéreux. Si le privi-lège est purement gratuit,
il peut être révoqué va-lidement, même sans qu'il
y ait de motifs valables ; mais cela n'est point sans péché
véniel, quand bien
(1) Suar. de leg. 1. VIII. c. 34. n. 17. Bon. d. 1. q. 5. §5.
n. 4. Castr. Ir. 3. d. 4, p. 18. n. 3. et p. 19. n. 1. et Salm. c. 2. n.
i3. cum Laym. Pont. Lezz. Garcia, etc.
(a) Castrop. p. 18, n. 4· Bonac. 11. 3. et Salm. ?. ?4·
cum Laym, Gare. Lez. etc.
(S) Salm. c. a. n. 18.
(4) Ibid. n. 57.
»4
IMSTRDÇTIOIÎ PRATIQUB
même il n'y aurait point de scandale (?). Cependant, si avec
le privilège on avait accordé au privilégié
la possession de quelque chose, alors la révocation du privilège
ne peut point avoir lieu, ni licitement, ni vulidemenr, à moins
toutefois qu'il n'y eût une cause très urgente du bien commun,
ou quelque grave délit de la part du privilégié, ou
bien quel-ques unes de ces choses pour lesquelles on révoque toute
donation (a). Si ensuite, le privilège est lu-cratif, s'il a élé
accordé comme récompense ou s'il est le fruit de la reconnaissance,
il faut toujours de graves et justes motifs pour qu'il soit révoqué
vali-dement. Et s'il est onéreux, par exemple, s'il a été
accordé pour quelque prix reçu, ou comme une charge imposée
au privilégié, alors, entre de justes motifs, il faut qu'il
y ait compensation. Il en est de même des privilèges lucratifs
par justice, comme le disent communément les docteurs (3).
XVI. Il y a deux sortes de révocations: la révo-cation
expresse et la révocation tacite. La première exige, régulièrement
parlant, la clause générale : non obstantibus privilegiis,
etc., afin qu'elle puisse révoquer tous les privilèges contraires.
-On en ex-cepte néanmoins, i° les privilèges accordés
en forme de contrat, soit onéreux, soit lucratif, par justice (comme
nous l'avons dit plus haut"), dans lesquels pn fait une mention spéciale
des mérites en particu-
(1) Pondus 1. VIH. c. 19. nu i5. Castrop. p. 31. S 5. U. 5. ul Salin,
c. 2. u, 37. cum. Siiar. Sanch. Bon. elc.
(îl Cash-up, p. ai. § 2. n. 2. Bon. p. 8 $ 2. n. 5. Snar.
\. VIII, c. 5j. n. 7. cl Salai, c. 5. n. 20. cum Pont. Gaet. Lez. etc.
(3) Su?r. loc. cit. n. 6 et 7. Pont, n. i3. et Salin, tr. 18. c. a.
n. 3o et 36. cu£n allie.
POUR 1/ES CONFESSEURS.
1&
lier. En second lieu, les privilèges qui possèdent la
clause dene point être soumis à la dérogation, à
moins qu'il n'en soit fait une mention spéciale. En troisième
lieu, les privilèges des réguliers, qui exi-gent une mention
spéciale, parce qu'ils sont lucra-tifs, et qu'ils ont la clause
dérogatoire de la révo-cation future , s'il n'en est point
fait mention spéciale, comme le disent Rodriguez. Portel. et Miranda,
après le P. Mazzotta. En quatrième lieu, les-privi-lèges
insérés in corpore juris parce qu'ils sont de véritables
lois ; c'est pourquoi pour qu'ils soient ré-voqués, ils exigent
la clause spéciale : Non obstanti. bus privilegiis in contrarium
(?); Bonac, Sanchez, Castrop. et les Salmant., avec Molin. et Pellicier
(contre Ponz. ), en disent autant des privilèges ac-cordés
par quelque concile général, que l'on ne doit point croire
révoqués, à moins que l'on n'a-joute la clause expresse,
Non obstante quacumque constitutione , etiam a concilio generali edita
, comme l'enseignent les canons, ex parte, et ult. de capill., mori (2).
Ponz. oppose à cela la pratique de l'Église et une déclarailon
de saint Pie V pour le contraire; mais Castrop. répond avec Garcia
que tout cela n'a pas de fondement. Seulement il ajoute que Garcia rapporte
une déclaration particu-lière de saint Pie V, où il
est dit que les concessions signées de la propre main du pape ne
demandent au-
(1) Suar. 1. VIII. c. 38. n. 1. Bon. Ir. 9. d. 3. p. 8. §4. B.
11. Castrop. tr. 3. d. 4. p. 21. § 3. a. n. a. Pout. 1. VIII. ç.
19. n. 17. Mazz. t. 1. de Privil. q. 2. c. 1. p. 23. et Salin. c. 2. n.
59 et /jo.
(a) Bou. n. i3. Caslrop. § 4. n. 6. Sancb. de Mat. 1. III. à.
36. n. 7. et Salm. tr. 18. c. 2. u. 4>· cum Pelliz. Basseo. etc.
contra Pontium. n. 19.
l6
INSTRUCTION PRATIQUE
cune révocation du concile de Trente, soit géné-rale,
soit spéciale. Du reste, Castrop. a raison de ne point approuver
ce que dit Sanchez, savoir que les constitutions du concile de Trente doivent
être de plus nominativement révoquées. Voyez ce que
nous avons dit au 38, n. in fin. Néanmoins, toutes les exceptions
que nous venons de faire plus haut ne doivent avoir lieu, d'après
le sentiment commun des docteurs, qu'autant qu'iln'est point certain que
l'esprit du dérogeant n'est point contraire, c'estpour-quoi si la
loi révocatoire est accompagnée de la clause, ex certa scientia,
??? propriomotu, ou bien encore, de potestatis plenitudine, alors tout
privilège, soit gratuit, soit onéreux est révoqué,
quand bien même la révocation devrait léser le droit
acquis par un tiers (1).
XVII. Quant à la révocation tacite, nous disons qu'on
doit regarder comme révoqués les privilèges antérieurement
accordés , par toute loi universelle qui leur est contraire, quoiqu'elle
ne soit point ac-compagnée d'une clause révocatoire," lorsque
cette loi ou le nouveau privilège accordé à un autre
ne peut avoir son effet propre sans la révocation de ces privilèges
antérieurement accordés ; car l'on ne peut pas présumer
que le législateur ait eu l'inten-tion de porter une loi inutile
ou de donner un pri-vilège ( soit général, soit particulier
) qui ne soit qu'illusoire. Or, cela doit s'entendre ainsi toutes les fois
que les privilèges antérieurement donnés sont connus
du supérieur, comme on présume que le sont tous les privilèges
insérés in corpore juris, ce que, au contraire, l'on ne présume
point pour les
(1) Salman t. c. ? n.'4oet4<i.
POUR LES CONFESSEURS.
I7
autres qui sont extra jus; aussi exiget-on,à l'égard
de ces derniers, une mention spéciale (i). Cepen-dant quelques docteurs,
tels que Soto, Henriquez, Quintanada, prétendent, conformément
aux Sal-mant. (2), que le privilège est toujours en vigueur tant
que la révocation n'est point spécialement in-timée
à la cité ou au monastère. Mais les mêmes Salmant.
se rétractent ensuite avec raison dans un autre endroit (3), car
ils disentavec Laymann,Suar., Postel, Lezana, qu'il suffit pour annuler
les pri-vilèges ( comme nous l'avons dit en parlant des lois, chap,
??, ?. 5) que la révocation soit publiée, et qu'à
dater de ce jour, deux mois se soient écoulés pour que les
privilégiés aient pu en avoir connais-sance.
Jusqu'ici nous avons traité des privilèges en com-mun
; dans les chapitres suivants nous parlerons des privilèges en particulier
des ecclésiastiques des évêques et des religieux.
DEUXIÈME POINT.
Des privilèges des ecclésiastiques.
18. En quoi les ecclésiastiques ne dépendent point
du pouvoir des laïques.
19. Des privilèges du canon, et de la justice, pour ce
qui est des personnes.
(1) Snar. 1. VIII. c. 59, n. a. Pont. 1. VIII. c. 19. n. ig. Caslrop.
d. 4· d. si. § 4- n- 10- B°n l'· 3. p. ?. §
4· ?. ?4· Salin, c. a. ?. 43 et 44· ct cum aliis communiter.
(3) Salin, tr. 10. de consur, c. 3. ?. 8?.
(3) Tract. 8. de ??????, c. 3. ?. 5,
T. XXVI.
2
l8
mSTHUÇTlQM PRATIQUE
20. Pour ce qui est des biens.
21. Ceux qui jouissent de ces privilèges.
22. Des bénéficiés. a3. Des tonsurés.
24· De ceux qui ont quitté l'habit. 25 à 28. De
l'immunité des lieux pieux, XYIII. Les ecclésiastiques, en
veitu de la loi di-vine , ne dépendent point du pouvoir séculier
pour ce qui est relatif aux matièrea spirituelles ou pure-ment ecclésiastiques
, comme sont, par exemple, les ordinatiops, les élections des prélats,
etc., ainsi que nous le voyons constaté dans le canon m du concile
rpmain. Pour ce qui est ensuite des person-nes et des lieux des ecclésiastiqnea,
il reste à savoir s'ils en dépendent ou non, en vertu de
cette même loi divine. Plusieurs docteurs , tels que Lessius, Cajetan,
Recan., et les Salmant. (1), prétendent qu'ils n'en dépendent
point, mais d'autres au con-traire l'affirment, et de ce nombre sont Suarez,
Azor, Laymann. Or, ils appuient leur sentiment sur plusieurs témoignages
et principalement sur le ch. Quamquam, de gentil·, in 6, et sur
le concile de Trente, sess. i5, ohap. xx, De ref.x Ecclesia? et per-sonarum
ecclesiaticorum immunitatem Dei ordina-tione et canonicis sanctionibus
esse constitutam. II est certain néanmoins que les ecclésiastiques,
tant par le droit canonique que par le droit civil, ne sont point soumis
à la justice des laïques (2). Au reste, ils sont tenus en conséquence
d'obéir à toutes les lois civiles qui ne sont point incompatibles
avec leur éta,t 1 non vi coercitiva, comme il est dit, sed di-
(1) Tract. 8. de orcl. c. 7. n. 6.
(a) Jur. ap. Less, de just. 1. a. c. 5i. dub. 5.
POUR LES CONFESSEURS.
ig
rectiva, c'est-à-dire pour se conformer au com-mun des
fidèles (1).
XIX. En premier lieu , les ecclésiastiques jouis-sent donc de
la liberté en ce qui concerne leur personne. Outre le privilège
du canon , qui excom-munie ceux qui les persécutent injustement
(voyez ce qui a été dit au chap, xix, n, 48 ), ils jouissent
encore de l'immunité de ne pouvoir être punis par les tribunaux
séculiers, comme on le voit par les lois rapportées par Becan.
(2). Or, quoique le droit civil ne les exempte que dans les causes civiles,
et que dans les causes criminelles il se soit réservé le
droit d'informer sur eux sans les condamner pour cela avant qu'ils aient
reçu la dégradation , cepen-dant le droit canonique les exempte
entièrement (3). Mais, nonobstant cela , il est des cas où
le pouvoir séculier peut poursuivre les clercs , comme, par exemple
, si la nuit on en surprenait quelqu'un avec des armes prohibées,
ou sous un habillement qui ne serait point le sien, ou bien encore en flagrant
dé-lit , alors il peut les arrêter pour les remettre entre
les mains des juges ecclésiastiques ; et si c'est du-rant le jour
qu'on les surprend avec des armes pro-hibées, il peut toujours les
leur ôter. Il est encore des cas où le pouvoir séculier
peut même leur infli -ger des peines ( à l'exception toutefois
de la peine de mort ); par exemple, si quelqu'un d'entre eux excitait une
révolte contre le prince, ou soulevait le peuple, et si leur évêque
ne les punissait pas lui-même. En outre, il est probable que l'autorité
sé-
(1) Est commune cum Salin, t. VIII. c. 7. n. 16. (3) De sacram, e.
26, q. g. (3) Salm, tr. 8. c. 7. ex a. a4·
20
INSTRUCTION PRATIQUE
culière peut châtier les' clercs qui se livrent réel-lement
à la sodomie, puisque Léon X et saint Pie V les ont exclus
de tout privilège clérical ( ? ). Du reste, pour ce qui est
des autres délits, l'autorité sécu-lière nje
peut point les punir, comme nous l'ap-prend le chap. Fin. de vita et hon.
eler., et le canon Inaudientia xxv, de sent, excom.
XX. En second lieu, les ecclésiastiques ne sont point également
soumis à l'autorité séculière, pour ce qui
est des biens ecclésiastiques, de quelque ma-nière qu'ils
aient été acquis. C'est pourquoi ils ne sont point tenus
de payer l'imposition pour ces biens, comme nous le voyons dans le chap.
Quia, et clericis, de immuni eccles. in 6, et dans la 1. Sanc-tius, xxii,
chap. De sacro. eccl. (2). Les clercs néan-moins qui trafiquent
de ces biens purement ecclé-siastiques , et qui se livrent au commerce,
sont privés de toute exemption, chap. Quamquam de censib. in 6.
Quant aux biens propres, ils ne sont privés de toute exemption qu'après
la troisième mo-nition (3). De plus, observez que dans le cas de
né-cessité urgente, le prince a le droit d'enlever des greniers
ecclésiastiques et de vendre le grain ap-partenant aux ecclésiastiques
(4).
XXI. Quant à ceux qui ne dépendent point de l'autorité
séculière, soit pour leur personne, soit pour leurs biens,
ce sont d'abord tous les réguliers avec leurs novices, leurs frères,
et même les béates du troisième ordre franciscain,
les carmélites qui
(1) Salm. tr. 8. à n. 27. ad 29 et à n. ï8. ad ao,
(a) Ibid. c. 7. n.55 et 55.
(3) Ibid. ?. 5i. cum Less. Mol. etc.
(4) Ibid. p. 7. ?. 17. cum Diana. Molf.
FOUR LES CONFESSEURS.
21
portent l'habit et qui ont fait vœu de chasteté, comme l'a déclaré
la,S. C. En outre, les chevaliers de Saint-Jean, de Saint-Jacques, d'Alcantara
et de Calatrava, comme le prouvent Bonac, Filliuc. et Diana (i); en outre
encore, tous les clercs ordonnés in sacris. Pour ce qui est des
autres qui sont ordonnés in mi-noribus , ou qui sont simplement
tonsurés, voici comment s'exprime le concile de Trente, sess. 25
, chap, vi: « Fori privilegio non gaudeat, nisi bene-»ficium,
ecclesiasticum habeat, aut clericalem ha-» bitum et tonsuram deferens
, alicui Ecclesiae de » mandato episcopi inserviat ; vel in seminario
cle-» ricorum , aut aliqua scola , vel universitate de li-»
centia episcopi quasi in via ad suscipiendos majores » ordines versetur.
» Les clercs mariés qui portent l'habit et la tonsure et qui
sont attachés au service de l'église jouissent encore de
ce privilège. Mais le chap. Ult. de temp. ord. in 6 , défend
de donner la tonsure à ceux qui sont mariés, à moins
qu'ils ne veuillent se faire religieux ou recevoir les ordres sa-crés,
a'vec le consentement de leurs femmes (2).
XXII. Ainsi donc ceux qui jouissent du privilège de la justice
sont premièrement les bénéficiés, quand même
ils ne seraient point attachés au ser-vice de l'église, et
qu'ils ne porteraient point l'habit, comme le prouvent avec probabilité
le témoignage du concile et le sentiment des Salm., de Filliuc,
de Diana et de Rodrig., contre Suar. Ils jouissent encore de ce privilège,
quand même ils ne retire-raient aucun fruit de leur bénéfice,
et qu'ils n'en auraient pas la possession, puisqu'il suffit qu'ils en
(1) Salm. c. 7. n. 87.
(a) Lib. VI. ?. 827. in fin.
92
INSTRUCTION PRATIQUE
portent le titre, comme le disent Garcia, Filliuc, et Diana avec les
Salrnant. Il suffit encore de la cha-pellenie ou du prestimonio qui sont
des véritables bénéfices , à l'exception toutefois
delà pension (i).
XXIII. Secondement, les clercs in minoribus et les tonsurés,
pourvu qu'ils portent tout à la fois l'habit et la tonsure, selon
ces paroles du concile : « Clericalem habitum et tonsuram deferens,
» et selon le sentiment plus probable de plusieurs doc-teurs, avec
Gastropalao et Barbosa, contre les théo-logiens de Salamanque, etc.,
qui interprètent la particule et par la suivante -vel; c'est pourquoi,
selon eux, il suffit de porter l'un ou l'autre (2). En outre, il faut encore
qu'ils soient attachés au service de l'Église; mais pour
ce qui est du service de l'É-glise (il faut qu'il soit spirituel,
parce que le tem-porel n'est point suffisant), il suffit qu'ils soient
attachés à une église quelconque, quand même
elle n'aurait point été assignée par l'évêque,
comme l'a déclaré la S. C, après le cardinal Lambertini
(5^.
XXVI. Pour priver les clercs in minoribus dès pri-vilèges
de la justice (car, sans cela, ils en jouissent réellement d'après
le canon ), il n'est point néces-saire de faire les trois monitions,
parce que cette mesure n'est de rigueur qu'à l'égard des
bénéficiers, des clercs in sacris, selon le chap. Contingit
de sent, excom., ou bien de ceux qui se mêlent de faire le commerce,
comme les séculiers, ainsi que le déclare le chap. Es litteris,
de vita et hon. cleric. (4); mais
(1) Salin, tract. 8. c. 7. n. 62 et 65. cum aliis.
(2) Lib. VI. ?. 827.
(5) De eyuod. lib. VII. cap. 69. ?. 4· (4) Lib. VI, ?. 827.
POUR LES CONFESSEURS.
S 5
il suffit qu'ils aient quitté l'habit et la tonsure, comme l'a
déclaré plusieurs fois la S. C. (1), et comme le disent communémentles
docteurs, pourvu toutefois qu'ils l'aient quitté pendant long-temps,
comme le remarquent les Salman t., avec Bonacina, Suarez, Balbo, etc. Cependant,
quoique ces clercs ne puissent échapper àla justice, l'évêque
néanmoins peut les arracher des mains de l'autorité séculière,
selon la déclaration de la S. C., approuvée par N. S. père
le pape (s). Si ces derniers reprenaient plus tard l'habit religieux, ils
rentrent aussitôt dans leurs anciens droits, pourvu qu'ils ne le
fassent point par fraude, ce qui arrive lorsque quelqu'un d'entre eux,
dans une cause civile, a été cité au tribunal séculier,
ou a été mis en prison dans une cause criminelle,ou bien
encore a été mis sous la surveillance publique en sortant
de prison, comme le disent les Salmant., Bonacina (contre Guttierez ou
Ceballos) et le Car-dinal Lambertini, d'après plusieurs déclarations
de la S. C. (3). La grande question maintenant est de savoir si le pouvoir
séculier peut juger l«s causes des innocents contre les ecclésiastiques.
Parmi les théologiens, les uns l'admettent sans restriction J mais
d'autres, plus communément, le tolèrent seu-lement quand
on ne peut pas, ou qu'on ne peut que très difficilement recourir
aux autorite's supérieures du clergé (4).
XXV. L'immunité ecclésiastique des lieux, pour
(1) Limbert. de syn. 1. V. c. îa. ex ?. ?. et Salm. tracl.
8. c. 7. 11. 65.
(2) Lambert, die syn. 1. V. c. ??. ex n. i.
(5j Salm. tract. 8. c. 7. n. 67. et Lamb, de synod, c. 67.
Q. I.
(4) Ibid. c. 7. ex n. 76.
24
INSTRUCTION PRATIQUE
ce qui est du refuge des coupables, comprend, en vertu du droit ecclésiastique
et civil, toutes les églises, quoique interdites ou souillées,
et même détruites ( à moins que ce ne soit avec l'autorité
du prélat); elle comprend également leurs chapelles, leurs
sacristies, leurs cimetières, même séparés de
l'église, leurs murs, leurs clochers, leurs toits, leurs âtres
et les degrés des âtres, avec un rayon de quarante pas de
plus pour les cathédrales, et de trente pour les autres églises
(cela s'entend de celles qui sont hors des murs de la ville ou de l'endroit),
à moins que la voie publique, ou la maison de quel-que séculier
ne traverse ce rayon. Il n'en serait pas de même toutefois si cette
maison était celle du clerc (1). Les hôpitaux où il
y a une chapelle pu-blique, les oratoires fondés par l'évêque,
le palais de l'évêque et les maisons des réguliers
avec leurs dortoirs, leurs cloîtres, leurs jardins et leurs por-tiques,
qui sont en face de l'église ou du monastère, jouissent également
de la même immunité (2). Mais selon le concordat qui a été
fait avec la cour de Na-ples, chap. 11, il n'y a que les églises
qui se trouvent dans la ville ou les lieux habités qui en jouissent,
et celles qui ne sont que rurales n'en jouissent point, à moins
qu'elles ne soient paroissiales, ou succur-sales de ces dernières,
ou bien qu'elles ne soient desservies par le vénérable. Quant
à l'immunité de ces dernières églises, elle
ne s'étend pas au-delà des âtres qui sont environnés
de murs jusqu'aux porti-ques, ni au-delà de l'escalier, des portes
et de la façade antérieure de l'église, ni au-delà
des maisons
(1) Salm. tract. 8. c. 7. 11. 84. (a) Ibid. ex n. 88.
POUR LES CONFESSEURS.
s5
qui communiquent avec elle immédiatement, pourvu qu'elles soient
habitées par les ecclésiastiques qui la desservent.
XXVI. Relativement aux coupables qui se sont réfugiés
dans les lieux sacrés que nous venons de mentionner, pourvu qu'ils
soient chrétiens, ils jouis-sent de l'immunité attachée
à ces lieux, quand bien même ils seraient hérétiques,
interdits, ou qu'ils se seraient échappés de leurs prisons.
C'est pourquoi l'on doit récuser tout usage qui y porterait atteinte,
d'a-près le ch. Noverint de sent.excom. etauthen. de sa-cro, eccles.
(1). Néanmoins la bulle de Grégoire XIV en exclut les voleurs
publics ; ceux qui ravagent la campagne, ou qui commettent l'homicide
par in-térêt ou pour assassinat, soit dans ces mêmes
églises, soit dans leurs cimetières ( mais Benoît XIV
en ex-clut tous les homicides pour toutes les églises);
en outre elle en exclut encore les hérétiques et les séditieux
envers la personne même du prince (2). Or, dans les cas clairement
exceptés, le juge séculier peut par lui-même arracher
les coupables de l'église, comme cela se pratique communément;
cependant, dans le doute de l'exception, le juge doit s'en rap-porter à
l'évêque, selon le sentiment des Salmant. et des autres docteurs
(5). Enfin, à l'exception des coupables que nous venons de citer,
tous les autres jouissent de l'immunité, ainsi que les débiteurs
qui se réfugient dans l'église (4)·
XXVII. Reste à savoir si les clercs et les
reli-
(1) Salm. tract. 18. c. 3. n. 91. cam. Suar. Gastrop. Pelliz. Guttïc.
etc.
(a) Salm. tract. ??. exn.96.. (?) Ibid ?. îai ad ia5. (4) Ibid.
?. g5.
?6
INSTRUCTION PRATIQUE
gieux jouissent de la même immunité à l'égard
de leurs prélats; plusieurs l'affirment, et parmi ces doc-teurs
l'on compte Barbosa, Bordone, Guttierez; leur sentiment est appuyé
sur une déclaration de la S. C, et il est très probable,
comme le disent les Salmant. Néanmoins ces derniers, d'après
le senti-ment très commun de Suarez, Castropalao, Laym., Bonacina,
Silvestre, etc., prétendent le contraire, d'après une bulle
de Grégoire XIV, où, en parlant de ladite immunité,
il est dit, au sujet des laïques seulement ; « Ut laicis ad
ecclesiam confugienti-»bus, etc.» En outre, ces derniers ont
pour eux l'usage commun et généralement reçu; si cela
n'était ainsi, comment pourrait-on punir les religieux, qui sont
toujours enfermés dans les monastères ? Or, de même
que les supérieurs ecclésiastiques (les évèques
et leurs vicaires) ont* le pouvoir d'arracher les clercs et les religieux
de l'église ; de même encore, lorsque cela est nécessaire,
ils peu-vent accorder ce pouvoir à la justice séculière
(i). Néanmoins, l'évêque ne peut arracher de l'église
des réguliers, les clercs qui dépendent de lui; non point
à cause de l'immunité, mais parce que ces églises
sont des lieux exempts de leur juridiction (2).
XXVIII. Quant à ceux qui arrachent ou qui tentent d'arracher
un coupable des lieux sacrés où il s'est réfugié,
ceux-là encourent l'excommunica-tion ipso facto, qui ne peut être
levée que par le pape, ou bien par l'évêque; car Clément
VIII prive de cette faculté seulement le confesseur simple, quand
bien même il serait régulier (?). Observez
(1) S;ilm. tract. 18. c. 3. n. ao.
(3) Ibid. n. îa 3.
(3) Ibib. n. 117.
POUR lES CONFESSEURS·
S^
que les religieux qui chasseraient de leur église ou de leur
monastère quelque criminel, afin de se dé-livrer de quelque
péril ou de quelque incommodité, ne porteraient point atteinte
à l'immunité, et qu'ils peuvent le faire en toute conscience
(1) (*).
(0 Salm. tract. 18. n. 118.
(*) AVERTISSEMENT.—Dans le chap, xx, des Privilèges, n. 28,
nous avons dit, d'après l'opinion des tbéologiens de Salaman·
que, tract. 18, de Privil. cap. 5, n. 116, 117, avec Bonacina, Castropalao
et plusieurs autres, que ceux qui ont encouru l'excommunication pour avoir
tiré quelques coupables de 1 É-glise, peuvent être
absous par l'évdque, par la raison que Clé-meut VIII Ole
une telle facullé aux simples confesseurs quoi-que réguliers,
mais non aux évêques. Mais ayant réfléchi un
peu plus , je dois tenir le contraire avec Fagnan in cap. cum pro causa,
de sentent, excommunicat., Farinace et quelques autres, parce que Grégoire
XIV a déclaré que les violateurs de l'im-munité encourent
toutes les censures et peines imposées par les canons, les conciles
et les papes contre les violateurs de la liberté, du droit, et de
l'immunité ecclésiastique. « Dechira-»mus (telles
sont les paroles de la bulle) cum ipso facto cen-«suras et poenas
ecclesiasticas incurrere quae contra libertatis, » juris, et immunitalis
ecclesiasticae violatores per sacros ca-» nones et conciliorum generalium,
nostrorumque praedeces-sorum constitutiones sunt promulgatam. » De
plus on trouve dans I Extravagante 5, inter communes, de peenit et rem.
de Paul 11, que l'excommunication papale avait été imposée
aux violateurs de la liberté ecclésiastique. Et qu'on ne
dise point que la seule violation de la liberté qui regarde les
personnes était réservée, et non point la violaiion
de l'immunité qui re-garde les lieux; et que depuis Grégoire
XIV l'excommuni-cation fut sans aucun douteinfligée aux violateurs
de l'immu-nité, mais non pas néanmoins la réserve,
laquelle n'est pas censée faite, si elle n'est pas exprimée
; parce que nous répon-dront que Grégoire ayant imposé
aux violateurs de l'immu-nité cette même censure qui avait
été imposée aux violateur» de la liberté,
il s'ensuit que la censure qui était déjà réservée
pour la lésion de la liberté est encore réservée
pour celle de l'immunité 1 d'autant plus que Clément VIII,
d.ins les deux
28
INSTRUCTION PRATIQUE
TROISIÈME POINT.
Dee privileges des évêques.
29. I. Faculté du chap. Liceat. Si l'évêque peut
dispenser dans l'irrégularité ex delicto, et dans celle ex
defectu, lorsqu'elle est douteuse.
3.0. Si daos l'endroit où n'est point reçu le con-cile
de Trente, etc.
31. Qu'entend-on sous le nom d'évèque?
32. Des voyageurs. Si l'évêque peut absoudre, hora
de la confession, des cas réservés au pape.
33. Qu'est-ce que le délit occulte?
34· Si l'évêque peut déléguer cette
faculté.
35. Si, pour les cas réservés des autres
évê-ques, etc.
36. Si, pour les cas réservés depuis le concile
de Trente, etc.
37. Si l'évêque peut absoudre le confesseur qui
absout son complice dans le péché honteux.
38. Si les évêques, dans les cas de la
bulle Cœnœ, etc.
3g. S'ils peuvent dispenser dans l'irrégularité encourue
pour hérésie.
décrets qu'il a fails sur les cas réservés aa
pape et aux évêques daus son premier décret, prohibe
à tous les confesseurs de don-ner l'absolution d'un cas quelconque
réservé au pape, et dans le second, après l'énuméralion
de trois cas réservés au pape, il compte encore la violation
de l'immunité dans les termes de la bulle de Grégoire XlVj
or, dans ce second décret, dans la première partie, il traite
des cas réservés au pape ; et dans la seconde, des cas réservés
à l'évêque. Da reste, la lésion de l'immunité
est un cas réservé au pape, les évêques ne peuvent
pas en absoudre. C'est ce que dit Fagnan in fine, n. 36, qui s'appuie à
cet égard sur une décision de la S.C. du concile.
POUR LES CONFESSEURS.
S g
40. S'ils peuvent absoudre ceux qui sont em-pêchés.
41. S'ils le peuvent par le moyen d'un autre.
42. Qu'entend-on sous le nom d'empêche's?
43. De ceux qui sont empêchés pour toujours. 44·
Si ces derniers sont obligés par lettre, etc.
45. S'ils sont au moins obligés de recourir
à l'évêque; et s'ils ne peuvent recourir, etc. ; et
s'ils sont à l'article de la mort.
46, 47· 48. H. Des cas réservés aux évêques,
et principalement de l'absolution pour la censure du clerc.
49. III. De la dispense des enfants naturels.
50. Des bigames.
51. IV. Touchant l'irrégularité pour délit
oc-culte.
5s. De l'homicide casuel.
53. V. Touchant l'incapacité.
54. VI. Des pouvoirs des évêques sur les ma-riages.
55. De la dispense des publications, du vœu de chasteté,
de l'empêchement ad petendum, remissive, chap, xvm, ?. 68, touchant
les empêchements diri-mants douteux.
56. Touchant les empêchements dirimants cer-tains, si le
mariage est contracté.
57. Si le mariage n'est point contracté.
58. Si l'évêque peut déléguer cette
faculté.
59. VII. De la dispense des interstices.
60. VIII. De la dispense pour le chapelain de célébrer
dans une autre église.
61. IX. De célébrer dans l'après-midi.
62. X. Des oratoires.
63. Dans quels lieux l'évêque peut célébrer.
??
INSTRUCTION PRATIQUE
64· S'il peut accorder la dispense pour célébrer
dans une maison.
65. XL De la faculté qu'ont les évêques et
les prélats de se choisir un confesseur.
66. XII. Touchant la clôture des religieuses.
67. De l'approbation des confesseurs des reli-gieuses.
68. XIII. S'ils peuvent commuer les volontés dernières
du testateur.
60.. XIV. De la composition dans les restitutions incertaines.
70. XV. De la réduction des messes.
71. Touchant les serments et les vœux (renvoyé au chap,
?, ?. 19, et l\i ). De l'union des bénéfices. De la formation
de nouvelles paroisses, etc.
XXIX. Les évêques, en vertu du concile de Trente, sess.
24, ch. vi, Liceat, jouissent des facul-tés· suivantes :
« Liceat episcopis in irregularitatibus » et suspensionibus
ex delicto occulto, excepta ea «quae oritur ex homicidio voluntario,
et aliis de-» (lucris ad forum contentiosum, dispensare; et ìn
» quibuscumque casibus occultis, etiam Sedi Apo-sstolirae reservatis,
delinquentes sibi subditos in «dioecesi sua per se ipsos, aut vicarium
ad id spe-«cialiter deputandum, in foro conscientiae gratis «absolvere,
imposita poenitentia salutari. Idem et in i> haeresis crimine in eodem
foro conscientiae eis » tantum, non eorum vicariis, sit permissum.
» Ainsi donc, les évêques, en vertu de ce chap. Liceat,
peuvent dispenser dans toutes les irrégularités et suspenses
papales encourues pour délit occulte, mais non point pour homicide
volontaire, et pour les autres qui sont jugés dans le for contentieux.
Ces paroles du chap. Pro delicto occulto ont fait dire
POUR LES CONFESSEURS.
3l
avec raison à Bonaeina, Castropalao, Salm., etc., contre plusieurs
autres, que l'évêque ne peut, par cette faculté, dispenser
dans aucune irrégularité ecculte ex defectu (?); à
moins toutefois qu'elle ne soit douteuse, selon le sentiment probable de
Tournely, Gibert, etc., appuyé sur le chap. Nuper de sent, excomm,
(2), dont nous avons parlé au chap. 11, ?. 62. En outre, les évêques
peuvent ab-soudre leurs sujets par eux-mêmes, ou par un autre ecclésiastique
spécialement chargé de cela, de tout cas papal occulte, et
selon le concile, ils peuvent même absoudre de l'hérésie
(par eux-mêmes, mais non point par un autre). Voyez ce qui a été
dit au n. 38.
XXX. Au sujet de cette faculté accordée par
le eoncile, nous devons faire plusieurs observations très essentielles.
Et d'abord nous disons que dans les endroits où le concile de Trente
n'est point reçu les évêques ne peuvent se servir de
la susdite fa-culté du chap. Liceat, comme le remarquent com-munément
les docteurs (?); et certes c'est bien avec
raison,puisqueles évêques ne peuvent recevoir la faculté
accordée par le concile, qu'en acceptant le concile
lui-même; car il n'est pas raisonnable que celui-là
jouisse des privilèges du concile qui re-fuse de se soumettre à
ce qu'il impose.
XXXI, Observe?, en second lieu, que sous le nom d'évêcjues
sont également compris, selon le senti-
(1) Lib. VII. ?. 469.
(s) Fagnan. in e. veniens, de filiis presbyter, ?. ? et 8. et Touïn.
eum aliis t. II. p. 106.
(3) Suar. de consur, d. l\\. sect. 2. ?. 6. Sanch. dec. 1. II. d. 11.
ii. 3. Salm. de poenit, e. i3. n. 3. dum alter. Castnjp. 1.1. tract. 4·
d. 4· ?· 3. § ?, ?. a. cum Barbo. et G a rei.
Ô a
INSTRUCTION PRATIQUE
ment commun, les vicaires capitulares sede vacante, à l'exception
toutefois des vicaires des évêques,char-gés en général
de tout ce qui concerne le vicariat; puisque le vicaire a la même
autorité que l'évêque d'un pouvoir ordinaire propre
(comme nous le di-rons au n. 47); mais il n'a pas l'autorité de
l'évêque qui a un pouvoir délégué, bien
qu'ordinaire, étant comme attaché à l'office (ainsi
que nous le dirons aux n. 54 et 47)· En outre de cela , le concile
exige expressément une délégation spéciale
pour cette fa-culté^). Mais doit-on comprendre aussi sous le nom
d'évêques les abbés qui ont la juridiction episcopale?
Il y a à cet égard deux sentiments opposés : selon
Conc, Barbosa, etc., et le P. Suarez, qui cite même à l'appui
de son opinion une déclaration de la S. C, ils ne doivent pas être
compris sous le nom d'é-vêques ; mais plus communément
Fagnan, Sanchez", Castrop., Sair, Avila, Salman t., Lacroix, etc., sou-tiennent
le contraire, en disant que lorsque la con-cession a été
faite in jure, elle a raison de loi qui s'étend à tous les
cas où cette même raison a lieu. S'il n'en était ainsi,
ajoutent-ils, les sujets de ces prélats ne sauraient à qui
recourir (2).
XXXII. Remarquez, en troisième lieu, que soiis le nom de sujets
on doit également comprendre les voyageurs qui peuvent être
absous par l'évêque du lieu de tous les cas occultes réservés
au pape, comme l'enseignent Suarez, Sanch., Bonac., Nav., Barbosa, Trull.,
Bossius, etc. ; parce que, quoique le concile de Trente permette seulement
aux évêques d'absoudre delinquentes sibi subditos, néanmoins,
(?) Sanch. de Malrim. 1. H. ?. !\?. n. 16.
(2) Lib, YI, n. 5g3. Y. d. eamdem, et 1, 7. a, 7,
FOUR LES CONFESSEURS.
53
disent ces docteurs, les étrangers en se soumettant à
la justice sacramentelle, deviennent par là leurs sujets; le P.
Suarez rapporte même un décret de la S. C. où H est
dit que le voyageur peut être absous des cas occultes que nous venons
de mentionner, par l'évêque du lieu où il se trouve,
quand même cet évêque ne serait point le sien, puisque
l'absolu-tion sacramentelle dont parle le concile exige la pré-sence
(1). C'est pourquoi la même déclaration ajoute que les évêques
hors du sacrement ne peuvent ab-soudre desdits cas, ce que rejettent les
Salman t., avec Bonacina, etc. Fagnan (2) prétend que Gré-goire
XIII a également porté la même déclaration.
Or, cela a lieu pour ce qui est de l'absolution des cas ; mais relativement
à la dispense de l'irrégularité et de la suspense
pour délit occulte, le même Gré-goire ??? a déclaré
que les évêques du lieu ne peuvent l'accorder même à
ceux qui se trouveraient dans son diocèse, avec l'office de prêteur
ou de médecin, comme le rapporte Fagnan dans l'endroit que nous
venons de citer. Reste à savoir si l'évêque propre
peut dispenser dans l'irrégularité quelqu'un de ses sujets
absents de son diocèse ; Avila et plu-sieurs autres docteurs lenient;
mais Bonac, Tour., Suarez, Barbosa, Sanch. et les Salmant. soutiennent
plus communément et plus probablement qu'il le peut, parce que la
dispense peut être accordée même aux absents, et que
la juridiction volontaire peut l'étendre même hors des limites
qui lui sont assignées. Qu'on ne nous oppose point les paroles in
dioecesi sua duch. Liceat, puisque, selon les tliéo-
(1) Lab. VI. n. 595.
(a) Inc. delectus île temp. ord. n. S.
t. xxvi.
3
34
1NSTKUCTI0N PRATIQUE
logìens de Salamanque et Tournely, elles se vérifient
suffisamment lorsque l'évêque dispense dans son propre diocèse.
Ainsi Suarez, Sanchez, Lacroix, Holzm.,avec Gastrop. et Pignatelli, disent
encore avec beaucoup de probabilité que ces paroles ne se rapportent
point à la première partie de la dispense de l'irrégularité,
mais seulement à la seconde partie de l'absolution des cas ; d'où
ils concluent que l'é-vêque peut dispenser quand même
lui et son sujet seraient hors du diocèse (1).
XXXIII. Observez, en quatrième lieu, que par délit occulte
on n'entend point seulement ceux qui ne peuvent pas être prouvés
en justice par deux témoins, comme le veulent quelques docteurs,
se fondant sur une déclaration de la S. G., d'après Fa-gnan,
où il est dit que celui-là ne doit point avoir la conscience
tranquille qui a été absous ou dispensé dans le cas
contraire. Mais le sentiment commun des docteurs veut qu'on entende par
délit occulte, tout délit qui peut être caché
de quelque manière que ce soit, quand même il pourrait être
prouvé en justice. C'est pourquoi Azor, Sanchez, Tournely, Bonac.,
Castrop., Salmant., etc., prétendent que le délit est regardé
comme non occulte, lorsqu'il est connu de la plus grande partie des fidèles,
ou par le voisinage, ou par le collège, pourvu qu'il y ait seulement
dix personnes qui en aient connais-sance^). Et le cardinal Lambertini (?)
ajoute avec Tibur., Sair, Navar. (en parlant des empêchements occultes
du mariage pour lesquels a lieu la même
(?) Lib. VII. ?. 8?.
(2) ?. 5g5. V. Hic autem.
(?) Notif. 87. ?. 45. io fin-.
FOUR LES CONFESSEURS.
55
règle), qu'on doit regarder comme obculte l'empê-chement
qui est connu seulement de sept ou huit personnes dans une ville, et de
six dans le pays.En outre, le même Fagnan, dans le c. Festra, de
Cohab. cler., etc., ?. 118, atteste que la S. P. regarde comme occulte
l'empêchement qui est connu seulement de . quatre ou cinq personnes.
Pour moi, je puis assurer que la S. P. a dispense dans un certain empêchement
qui était connu de dix personnes environ (1). Malgré cela
(comme il est dit au chap, xviii, n. 77), le même Fagnan soutient
que le délit ou l'empêche-ment ne passe point pour occulte,
lorsqu'il est connu de deux témoins, pourvu que dans la faculté
d'absoudre ou de dispenser il y ait la clause j dum-modo sit omnino occultum.
XXXIV. On doute en premier lieu si l'évêque peut déléguer
généralement aux autres ecclésias-tiques cette faculté
accordée par le concile de Trente. Pour ce qui est de la dispense
des irrégula-rités, il suffit (comme le disent Suarez, Barbosa,
Sanchez, etc.), que l'évêque transmette simplement aux autres
sa faculté propre, sans délégation spé-ciale,
puisque la susdite faculté de dispenser est du domaine de tous les
évêques revêtus du pouvoir ordinaire; car elle est attachée
à l'office de l'évêque et non point à ^'industrie
de la personne. Quant à ce qui regarde l'absolution des cas , quelques
doc-teurs prétendent qu'il faut la délégation speciale
pour tout cas particulier , selon ces paroles du concile de Trente, «
Per se, aut vicarium ad id ; » specialiter deputandum. » Mais
malgré cela, le sentiment très commun et plus probable veut
avec
(1) Lib.VI. n. im.
36
INSTRUCTION PRATIQUE
Suarez, Sanchez, Barbosa, Navar., Laymann, La-croix et les Salin.,
etc., que l'évêque ait le pouvoir de déléguer
même généralement, à quelque prêtre que
ce soit, la faculté accordée par le ch. Liceat, pourvu qu'il
la spécifie d'une manière expresse, puisqu'un la spécifiant
il semble faire la délégation expresse qui peut être
ensuite générale pour tous les cas qui se présentent;
car (comme nous l'avons dit) cette faculté appartient à tous
les évêques re-vêtus du pouvoir ordinaire , parce qu'elle
est atta-chée à la dignité episcopale (1).
XXXV. On doute, en second lieu, si l'évêque peut absoudre
ou déléguer, en vertu du ch. Uceat, la faculté d'absoudre
même les cas réservés avec la censure des autres évêques,
lorsque ces cas sont occultes. Bonacina et plusieurs autres docteurs l'af-firment
à cause de la particule etiam qui se trouve dans le susdit chapitre
: « In quibuscumque casibus «occultis etiam sedi apostolica?
reservatis. » C'est pourquoi ils disent que pour que la particule
etiam n'ait point été mise inutilement, on doit regarder
comme accordée aux évêques la faculté d'absoudre
même les cas occultes des autres évêques qui se les
ont réservés (2). Mais nous soutenons le contraire, d'après
deux déclarations de la S. C du concile, une qui date du 29 novembre
1711, et-l'autre du 24 janvier ? ? 12, Apudthesaurum résolut. S.
C. 1.1, ?. 392; et principalement, d'après une déclaration
dans un cas semblable du pontife régnant, laquelle a paru le 20
août 1752 , et qui commence ainsi : Pias fide-lium. Voici les propres
paroles de cette déclaration :
(1) Lib. VI. ?. 5g4. dub. 9. (•a) ?. 593. dub. 8.
POUR LES CONFESSEURS.
??]
« Hujusmodi... absolvendi facultatem, etc», praeter-»
quam in casibus nobis, et sedi apostolicae dun-» taxât, non
vero ordinariis locorum reservatis..· Et «consequenter absolutiones
contra prœsentis decla-» rationis nostrae tenorem, forsan de praeterito
im-«pertitas, aut in posterum impertiendae, nemini » suffragari
potuisse, sive posse, decernimus, et » declaramus (1). »
XXXVI. On doute,en troisième lieu, si la faculté du concile
de Trente doit s'entendre également don-née aux évèques
pour les cas et les irrégularités réservés
après le même coucile. Garcia et Floreno lenient avec Diana,s'appuyant
sur une déclaration de Grégoire XIII, où, dans le
doute si l'évêque pouvait absoudre la religieuse qui s'échappe
du cloître, de l'excommunication (quand elle est oc-culte) réservée
par saint Pie V, le pape assura qu'il ne le pouvait pas. Néanmoins
le sentiment très com-mun prétend le contraire avec Sanch.,
Bon., Suar., Bossius, Diana, Vega, puisque dans le ch. Liceat, on accorde
la faculté sans restriction aucune, et que c'est un axiome·généralement
x'eçu « que nous ne devons point distinguer, lorsque la loi
ne distingue point. «C'est donc en vain qu'on nous oppose la dé-claration
de Grégoire XIII, puisque la bulle de saint Pie V, renfermait la
clause , « A qua prœterquam a » romano pontifice , nisi in
mortis articulo, absolvi » nequeat, ? C'est pourquoi nous ne doutons
pas avec Diana , que dans les bulles qui sont accompa-gnées de quelque
clause dérogatoire, comme celle nisi in mortis articulo , la faculté
doit être regarde'e comme ôtée aux évêques
(2).
(1) Beued. XIV. de synod. 1. V. e. 5. ?, g. (a) Lib. VI. D, 5g4.
38
INSTRUCTION PRATIQUE
XXXVII. On doute, en quatrième lieu, si l'évêque
en vertu du ch. Liceat, peut absoudre de l'excommu-nication qu'encourent
par la bulle de N. S. P. le pape Benoît XIV, Sacramentum , les contesseurs
qui ab-solvent leurs complices in peccato turpi. D'un côté,
il ne le peut pas, parce que, ce cas étant par lui-même occulte,
si les évêques pouvaient l'absoudre, il s'ensuivrait
que la réserve papale deviendrait inutile; et déjà
nous avons dit au n. 17, qu'on doit regarder comme tacitement révoqué
tout privilège qui empêche la loi portée après
lui d'avoir son effet. D'un autre côté, l'on peut répondre
que quoiqu'on accorde aux évêques cette faculté, la
réserve que nous venons de citer ne restera point tout-à-fait
inutile, soit parce qu'il peut arriver qu'un semblable cas devienne quelquefois
public, soit parce que tou-jours la susdite réserve peut avoir
au moins son effet dans la ville de Rome, ou bien dans tous les
?lieux où le concile de Trente n'a point été reçu,
puisque (comme nous l'avons déjà dit) les évêques
ne peuvent y jouir des privilèges accordés par le même
concile. De plus, notre sentiment est encore celui des Salmant. (i), qui
citent à son appui plu-sieurs auteurs qui ont écrit sur la
bulle de Be-noît XIV.
XXXVIII. On doute, en cinquième lieu, si la bulle
Cœnœ a révoqué aux évêques la susdite faculté
du concile de Trente, pour l'hérésie occulte et pour les
cas qui y sont réservés. Navarre, Coninch. et plusieurs autres
docteurs le nient, et leur sentiment est approuvé par Milante ,
Concin. et les Salmant., es quels ajoutent que la bulle
ne révoque point
(1) In opusc. append, de bull, crue. c. 6. p. 171, n. 5oo.
POOR LES CONFESSEURS.
?§
d'une manière expresse la concession du concile de Trente, comme
il le fallait d'après le ch. Nonnulli, de Rescrip. Mais nous l'affirmons
avec le sentiment beaucoup plus commun , et d'après plusieurs décla-rations
de la S. C., comme aussi d'après la clause dérogatoire nisi
in mprtis articulo, qui se trouve dans la bulle, comme nous l'avons montré
au n.56 qui précède, et en outre par l'autre clause qui défend
d'absoudre , « praetextu quorumvis indultorum per » nos ac
cujusvis concilii decreta concessorum. » Fagnan et le cardinal Lambertini
(1) rapportent à ce sujet plusieurs-déclarations même
de saint Pie V et de Grégoire XIII. De plus, Alexandre VII a con-damné
la proposit. 3 , qui avançait que le premier sentiment de la S.
C. avait été vu et toléré; et cette condamnation,
comme le disent avec raison Viva , Holzman, Elbel et le cardinal Lambertini,
a cer-tainement rendu improbable le sentiment du con-traire, puisqu'en
déclarant qu'il n'avait jamais été toléré
d'une manière implicite, le pontife a déclaré encore
qu'il n'était point tolerable. De là, Lamber-tini conclut
qu'aujourd'hui il ne serait point sage de J'adopter. Qu'on ne dise donc
point que par les ré-vocations des facultés accordées
dans les constitutions pontificales, on n'entend point révoquer
les facultés accordées par les conciles généraux
, à moins qu'il ne soit fait une mention spéciale de ces
concessions; parce que Fagnan, Roncaglia, le cardinal de Luca, répondront,
d'après le sentiment commun, qu'il ne s'agit point ici des facultés
accordées dans les con-stitutions pontificales, mais bien de ces
facultés ac-cqrdées par les brefs pontificaux, dans lesquels
on
(1) De synod, lib. VII/c. 3a.
4?
INSTRUCTION PBAïiQUE
n'apporte point toute la réflexion qu'on apporte dans les constitutions
(1).
XXXIX. Nous observerons cependant que, quoi-que l'évêque
ne puisse, dans le for intérieur, ab-soudre de l'hérésie
occulte, il peut néanmoins, comme délégué apostolique
, dispenser dans l'irré-gularité encourue pour cette hérésie
occulte, comme le disent les Salmant. et Félix Potesta (2). L'évêque
peut encore, comme délégué apostolique, absoudre l'hérélique
même notoire pour ce qui est de la jus-tice extérieure, pourvu
qu'auparavant il ait fait ab-juration devant le notaire et en présence
de té-moins ; et, ainsi absous par l'évêque, le coupable
peut ensuite recevoir l'absolution de son péché d'hérésie
de quelque prêtre que ce soit, selon le sentiment commun des docteurs
(?).
XL. On doute, en sixième lieu, si l'évêque a le
pouvoir d'absoudre de l'hérésie et des autres cas de labulle
Ccenœ ceux qui ne peuvent point allerà Home. Quelques docteurs le
nient d'une manière absolue; d'autres le nient seulement pour ce
qui est de l'hérésie. Mais nous affirmons généralement
qu'il le peut, d'après le sentiment commun des théologiens
et des canonistes, soutenu par Lugo, Laymann, Concina, Roncaglia, Castropalao,
Milante, Salm., Avila, Potesta, Viva, etc., parce que, lorsqu'il y la empêchement,
on rend aux évêques le pouvoir or-ii) Lib. VII. ?. 84. (?)
?. 7?·
(>) Roncaglia tr. 4· fl· '· °· "·
? 4· ?· 8?. cum. Farinae. Ctmiliali île s. pœn. §
? *- cum Rcnfect. Caslrop. de fide Ir. 4· ii, 4. p. 3. §2,
n. 1 et a. cum. Sancb. Navarr. Bon. Gult. Cumii. Vivald. etc, ci huila,
cum «cui. Clcra. VII. edita SH. i5Sq.
POUR LES COSFF.SSEtmS.
Î\l
dinaire qu'ils avaient auparavant en vertu des chap, xiii, ???? et
LYIII, Deserit, excnmm., où, quoiqu'on parie seulement de la censure
encourue par la vio-lence faite à un clerc, néanmoins on
comprend communément toutes les autres censures; comme le prouve
clairement le chap. Eos qui, XXII,IW/. tit., où l'on parle généralement
de touies les censures Canonis vel hominis. Voici les paroles du cliap.
: « Cùm ad illum a quo fuerunt absolvendi, nequeunt »
propter impedimentum habere recursum, ab alio nabsolvantur (i)·
»
XLT. Et d'ahord nous observerons que, dans ce cas d'empêchement,
l'évêque peut, non seulement absoudre de l'hérésie
par lui-même, mais encore par les autres délégués
généralement. Certainement le concile de Trente est loin
de s'y opposer lors-qu'il dit : « Iis tantum non vicariis sit permissum,
» puisqu'alors l'évêque n'absout point en vertu du concile
, mais en vertu du droit commun, selon le-quel les évèques
ont le pouvoir d'absoudre et de déléguer, comme tous les
autres cas (2).
LXII. Nous observerons, en second lieu, que par impediti, ceux qui
sont empêchés, l'on doit enten-dre les vieillards, les femmes,
les enf.ints, les mala-des, les pauvres, ceux qui ont quelque inimitié,
et tous les autres qui ont des raisons valables pour se croire dispensés
de faire le voyage, comme le dé-clarent les chap. De caetero. De
sentent, excom. et. ea noscitur, et quamvis, eodem titulo. Cependant nous
observerons que si l'empêchement était temporel et notable
(durant, par exemple, six ou sept mois),
(1) Lib. VII. ?. 8?.
(a) ?. 85111?7.
4 2
INSTRUCTION PRATIQUE
alors les empêches peuvent, il est vrai, être ab-sous,
mais ces derniers, à l'exception des femmes et des enfants, doivent
promettre par serment de se présenter, aussitôt l'empêchement
disparu, au saint siège apostolique, au moins par procureur pour
y être absous directement; et, dans le cas où ils ne se présenteraient
pas, ils tombent de nouveau dans la même censure, comme le déclare
le chap. Eos qui, de sent, e.rcoin., in 6; quand bien même ils se
seraient amendés et qu'ils auraient donné satisfaction à
la partie offensée (1).
XLIII. Cependant, si l'empêchement est perpé-tuel (c'est-à-dire
s'il doit durer dix ans ou au moins cinq ans, comme le disent Roncaglia,
Viva, Tam-burini), ceux qui ont été absous restent entière-ment
dégagés de l'obligation de se présenter. Or, généralement
parlant, voici ceux qu'on entend par impediti in perpetuo : ? les fils
de famille; 2° les religieux, quand même ils auraient encouru
la cen-sure avant d'entrer au monastère; 3° les septuagé-naires,
ou au moins les sexagénaires; 4° les domes-tiques; 5° les
pauvres; 6° ceux qui sont condamnés pour toute leurvie aux galères
ou à la prison; y0 les infirmes qui sont atteints d'une maladie
grave et longue, comme de la fièvre quarte, etc.; 8° ceux qui
sont obligés de nourrir leur famille ou d'en ad-ministrer les biens;
90 toutes les femmes, quand même elles ne seraient point religieuses;
on en ex-cepte néanmoins la religieuse qui, en sortant du cloître
, aurait encouru l'excommunication , laquelle excommunication, quoique
cachée , est toujours réservée au pape, d'après
la déclaration de Gré-
(1) Lib. VII. ?. 85. ad 87.
POUR LES CONFESSEURS.
4»>
goire XIII, comme nousl'avons dit aun. 36; io° les enfants, quand
même ils ne recevraient l'absolution que dans l'âge de puberté;
11" ceux qui sont obli-gés d'habiter des lieux d'où ils ne
peuvent sortir, comme sont, par exemple, les soldats , les sémina-ristes;
J2° enfin tous ceux qui ne peuvent aller à Rome sans éprouver
un grand dommage, soit spirituel, soit temporel (1).
XLIV. Remarquez, en troisième lieu, que ceux qui ont un empêchement
perpétuel ne sont point obligés de recourir à Rome
par procureur ou par lettre, selon le sentiment plus probable et plus com-mun
de Castrop., d'Avil., Coninch., des Salm., de Viva, de Spor., Dicast.,
etc. ( contre Bonacina et Potesta ), parce que, lorsqu'il y a empêchement,
comme nous l'avons dit au n. 4o, on restitue aux évêques le
pouvoir ordinaire de les absoudre, pou-voir qui leur avait été
ôté par la réserve du pape; d'autant plus que la loi
n'oblige à autre chose, sinon d'aller à Rome en personne
; par conséquent celui qui est empêché d'y aller, n'a
point d'autre obliga-tion à remplir (2).
XLV, Observez, en quatrième lieu, que lorsque le pénitent
ne peut point se présenter devant le pape, il est nécessairement
obligé de se rendre auprès de l'évêque pour
recevoir l'absolution de l'excommu-nication papale, cqmme le déclarent
les chap. De caetero, i,et ea noscitur, i3, de sent, excom, (Voyez, le
chap, xvi, n. 97, pour ce qui est du cas où il serait à l'article
de la mort. ) Mais cependant s'il ne pouvait pas non plus se présenter
à l'évêque (même
(1) Lib. VII. n. 87 et 88. OON.98.
44
INSTMJCTIO» PRATIQUE
hors du danger de la mort), il est très probable, selon Soto,
Nav., Suar., Castrop., Laym.,Roncng., les Salmant., Larroix, etc., qu'il
pent être absous par quelque prêtre que ce soit (avec l'obligation
néanmoins de se presenter à l'évêque aussitôt
l'em-pêchement cessant), comme on le voit par le texte du chap. Nuper.
eod. tit. (?). Dans ce cas, nous disons que le pénitent, probablement
selon le sen-timent de Castr., Gerson, Soto , Lugo, Salm., etc., n'est
point tenu de confesser les péchés réservés,
à moins q»'il n'y soit retombé ou qu'il n'y ait quel-que
occasion prochaine de rechute, ce qu'il est alors obligé de dire
au confesseur, afin que ce der-nier paisse juger sainement de sa disposition.
Voyez ce qui a été dit à ce sujet dans le chap, xv,
n. 27, 28, et dans léchap. xvi, n. i33, in fin. (2). Ensuite, lorsque
le pénitent est à l'article de la mort, il est probable que
tout confesseur, même en présence de l'évêque,
peut l'absoudre des cas réservés au pape, parce que la mort
(comme nous l'avons dit), lève toutes les réserves. Voyez
ce que nous avons dit au chap, xvi, n. 69. Nous ajoutons qu'il peut l'absoudre
des cas réservés au pape, mais non pas cependant des cas
réservés par le même évêque, puisque le
confesseur doit même imposer au mori-bond l'obligation de se présenter
à son supérieur lorsqu'il sera guéri, afin de recevoir
de sa bouche l'admonition convenable et la pénitence de la cen-sure
quoiqu'il ait été absous, selon le sentiment commun; c'e&t
pourquoi comment peut-il l'absou-dre en présence du supérieur
(3) ? Mais parlons
(0 Lib, VU. n. 92.
(3) Lib. VI. n. a65. qu, 11.
?) ?, 563. dub, 1·
POUB LES CONFESSEURS.
?\ 5
maintenant ties autres privilèges et des facultés dont
jouissent les évoques.
XLVI. a. Il y a dans le droit quelques excommu-nications dont l'absolution
est réservée aux évêques seuls. Ces excommunications
sont : i° contre celui qui frappe légèrement, soit un
clerc, soit un moine ou autres qui jouissent du privilège du canon;
2° contre celui qui opère Vavortement d'un fœtus animé;
3° contre celui qui est absous en péril de mort de l'excommunication
réservée à l'évêque et qui néglige
ensuite de se présenter au même évêque; 4°
contre les frères mineurs qui admettent dans leur église
aux offices divins les frères du troisième or-dre; 5°
contre celui qui communie avec le même délit pour lequel il
avait été excommunié par l'évê-que ;
6° enfin toutes les excommunications que l'é-vèque s'est
réservées à lui-même, sont réservées
réellement (i). Mais arrêtons-nous sur quelques con-sidérations
spéciales touchant l'absolution de l'ex-communication encourue par
la violence faite à un clerc. Avant tout, il faut distinguer la
violence lé-gère de la violence grave (ou bien médiocre),
et de la violence très grave. Premièrement, pour en-courir
l'excommunication , il faut toujours qu'il y ait péché mortel.
Voici ce que l'on entend par vio-lence légère, d'après
la définition qu'en donne l'Ex-travag. Perfectis, rapportée
par Navarre (2). Elle consiste dans un coup, soit de la main ou du pied,
soit d'un bâton ou autre chose semblable. Il y a violence grave,
lorsqu'on arrache une dent ou une poignée de cheveux, ou que
l'on porte un coup
(1) Ub. VU. u. ai3.
(a) Munu;il. cap. 27. a. 91.
46
INSTRUCTION PRATIQUE
qui laisse après lui des marques ou une contusion dans la chair,
ou bien encore lorsqu'on fait couler le sang soit par des égratignures
ou par un coup de poing. H y a enfin violence très grave, lorsqu'on
mutile quelque membre, que l'on fait une grande blessure, soit par un instrument
tranchant ou autre chose, et que cette blessure est accompagnée
d'une grande effusion de sang ; ou bien encore lorsqu'on fait une grande
injure. D'où il suit que, de légère qu'elle est, la
violence peut devenir grave, et même très grave, à
cause, soit de la dignité de la personne offensée, et du
scandale, comme, par exemple, si un religieux frappait un clerc, soit à
cause du lieu sacré ou public ( sur la place publique), soit à
cause du temps où la violence a lieu, comme, par exemple, s'il le
frappait dans ses fonctions sacrées ; enfin, soit à cause
de l'injure, qui par elle-même petit être énorme (1).
XLVII. Ainsi,il est évident, d'après l'Extravag. Perlectis,
que nous venons de citer, que, s'il y a excommunication pour une violence
légère , l'évê-· que et même son
vicaire peuvent absoudre de cette excommunication, parce que cette faculté
appar-tient àl'évêque revêtu du pouvoir ordinaire,
selon le sentiment de Sanchez, Bonacina, Molina , etc.; et, selon la règle
générale (voyez le n. 5i), le vi-caire a le même pouvoir
que l'évêque, revêtu de la juridiction ordinaire et
non délégué ; c'est pour-quoi l'évêque
et le vicaire ne forment ensemble qu'un même tribunal, comme le prouvent
Fagnan, Sanchez et autres (2). Il est probable encore que ladite excommunication
peut encore être levée par
(1) Lib. VII. ?. a77 et 378.
(2) N. a»4.
POUR LES CONFESSEURS.
l\"}
ceux qui ont la juridiction quasi-épiscopale, et qui sont compris
sous le nom d'évêque, comme nous l'avons dit au même
11. ??. Mais si la violence avait été très grave ou
même grave, et si elle avait été publique, le pape
seul ou son légat peut absoudre de l'excommunication, mais non point
l'évêque. (On peut recourir encore à la S. P.,
comme nous l'a-vons remarqué au chap, xix, n. i5o, au i°.) On
en excepte néanmoins le cas où la violence aurait été
occulte, ou si elle avait été faite par un enfant ou parunejjfemme,
comme le déclarent les chap. Pueri, et Mulieres de sent, excoin,,
ou bien encore si les dé-linquants avaient des empêchements
qui ne leur per-missent point d'aller à Rome, comme nous l'avons
dit au n. 4«. Ceux qui vivent en communauté peu-vent être
absous par l'évêque, si la violence a été grave,
mais non point si elle a été très grave, comme on
le voit parle chap. Quoniam de vitœet hon. cler.(i). XLVI1I. Observez,
en premier lieu, que dans le doute si la violence a été légère
ou grave, on la juge grave, comme le déclare la susdite
Extravagante' Perfectis, où il est dit : « Potius in dubio
esse per-» cussionem gravem, et ab ea non posse absolvere. »
On observe, en second lieu, que, selon le sentiment plus commun et plus
probable, celui qui donne du poison à un clerc encourt
l'excommunication aussitôt que le poison commence à produire
son effet, puisqu'alors la violence a réellement lieu ; mais, avant
cela, il n'y a point de violence effective, mais seulement l'action propre
à causer la violence ; ainsi pensent Bon. , Viva, Diana, etc. (2).
(1) Lib. VII. n. 279. (a) N. 280.
48
INSTRUCTION PRATIQUE
XLIX, S. Pour ce qui est des irrégularités non occultes,
l'évêque, d'après les chap, ? et n, De filiis presbyt.,
a le pouvoir de dispenser les enfants non légitimes pour recevoir
seulement les ordres mi-neurs et les bénéfices simples, le
canonicat dans les collèges, comme aussi les portions non entières
dans les cathédrales ou autres bénéfices qui ne sont
point attachés aux ordres sacrés, mais non point pour recevoir
les bénéfices avec charge d'âmes comme on le voit dans
le chap. Is qui eocl. til. Tous les docteurs sont en cela d'un commun accord.
Ce-pendant l'on doute si l'évêque peut dispenser pour le canonicat
dans les cathédrales. Nous disons avec le sentiment plus probable
et plus commun de Boss., Castr., Barbosa, Concina , Salmant. , etc. (contre
Pontas et Tournely avec Gibert ), qu'il ne le peut pas, parce que , bien
que le canonicat soit en lui-même un bénéfice simple,
néanmoins il a été atta-ché aux ordres sacrés
par le concile de Trente, sess. 24. chap, xu; c'est pourquoi, de sa nature,
le canonicat exige les ordres sacrés (1). On doute, en second lieu,
si l'évêque peut dispenser générale-ment de
cette irrégularité les enfants naturels oc-cultes. Diana,
Barbosa, Avila, admettent qu'il le peut, ajoutant que le concile de Trente
donne aux évêques la faculté de dispenser dans les
irrégularités pour délit occulte. Mais nous soutenons
le contraire avec Suar., Laym., Bon., Castrop., Tournely et d'autres ;
Diana lui-même se rétracte en cela , at-tendu que cette irrégularité
n'est point par délit, mais par défaut ; et quand bien même
elle serait par délit, le chap. Liceat entend qui; cette irrégularité
(?) Lib. VII. ?. 4«8 cl 429.
POUR LES CONFESSEURS.
49
soit par délit propre et non point par délit étran-ger
(i). On doute, en troisième lieu, si l'évêque peut
dispenser l'illégitime occulte, au moins pour faire les fondions
des ordres majeurs qu'il a reçus. Laym., Castrop. et Diana affirment
qu'il le peut, non seulement dans le cas où l'illégitime
aurait reçu ces ordres de bonne foi, mais quand même il les
aurait reçus de mauvaise foi ; et ils prouvent leur sentiment par
le chap. Nisi personœ de renunc, où il est dit que l'évêque
peut dispenser l'illégitime occulte qui a reçu criminellement
les ordres. Mais nous soutenons le contraire avec Suarez, Fill., Salm.,
etc., par les mêmes raisons que nous ayons données plus haut,
c'est-à-dire que l'évêque ne peut pas dispenser dans
les ordres majeurs. C'est en vain qu'on nous oppose le texte cité
précédem-ment, attendu que c'est du pape qu'on veut certai-nement
parler et non point de l'évêque; d'autant plus que dans cet
endroit il s'agit d'un évêque qui avait été
ainsi criminellement ordonné (2).
L. Nav., Sanchez, Concina, disent avec saint Thomas que l'évêque
a même le pouvoir de dispen-ser de la bigamie pour recevoir les ordres
mineurs et les bénéfices simples. Mais nous le nions avec
Suar., Laym., Castrop., Tourn., Barbos., Bonac., d'après une déclaration
de Sixte V où le pape sus-pendit un évêque pour avoir
conféré un bénéfice à un bigame, et
ajouta que le bigame avait encouru une peine comme ayant été
promu à des ordres pour lesquels il n'était point propre
(3). Néanmoins si la
(1) Lib. VIL n. /j5o.
(a) N. 43i.
(5) Fagnan. in e. quoniam de const, n. 3a.
T. xxvi.
A
So
INSTRUCTION PRATIQUE
bigamie n'est que ressemblante, bien que publi-que, le sentiment commun
veut avec Toled., Suar., Castrop., Sanch., Tourn., Salmant. et autres,
que l'évêque puisse accorder la dispense, même pour
recevoir les ordres majeurs, et il s'appuie sur le chap. 4> Decler. conjugal.,
et le chap, ?, Qui cler. vel vov. Mais on excepte le cas où le clerc
aurait épousé une veuve ou toute autre femme non vierge,
ou bien encore où il aurait été déjà
marié une pre-mière fois avant de recevoir les ordres (1).
LI. 4· Comme nous l'avons dit au commence-ment, l'évêque
peut dispenser dans les irrégularités encourues pour délit
occulte, excepté dans le cas d'homicide volontaire. Cependant quelques
docteurs prétendent à ce sujet que si l'homicide était
telle-ment pcculte qu'il ne pût être prouvé en aucune
manière en justice, l'évêque alors a le pouvoir de
dispenser. Mais les Salmant. et Roncaglia repous-sent avec raison ce sentiment,puisque
réellement les' évêques n'ont d'autre pouvoir sur les
irrégularités que celui que leur a accordé le concile
de Tien te dans le chap. Liceat, où l'on fait une exception for-melle
pour l'homicide volontaire occulte ; si ensuite par occulte on entend seulement
ce qui peut être prouvé en justice, comme le disent nos adveisaires,
et non ce qui est même prouvé d'une autre ma-nière
, le sentiment que nous venons de citer n'en reste pas moins incontestable
pour cela (2). Du reste, la S. G. du conc. du 21 mai 1718 l'a elle-même
dé-claré formellement ; car, interrogée si l'évêque
pou-vait dispenser dans un homicide commis par un
(0 Lib. VII. n. 55a. (a) N. 59a.
rOVtl LES CONFESSEURS.
5Ì
enfant qui, en jouant, avait frappé d'un coup de couteau son
camarade, lequel était mort de sa bles-sure au bout de quarante
jours, la Sainte Congré-gation répondit que l'évêque
ne le pouvait pas , quoique ce délit eût resté dix-huit
ans occulte et qu'il fût moralement impossible qu'il fût jamais
cité en justice; In thesauris, declar. S. C, pag. 85. Ce-pendant,
selon le sentiment commun , l'évêque a le pouvoir de dispenser
quand il y a péril de mort ou une autre cause très grave,
et quand il est difficile de recourir au pape (i). En outre, Sunr., lionacina,
Salmant., etc., disent communément que l'évêque peut
dispenser dans l'irrégularité encourue pour mutilation occulte
(«). De plus encore, le sentiment très commun veut, avec Nav.,
Laymann, Silvius, Barbosa, etc., que l'évêque puisse dispenser
dans l'irrégularité pour homicide casuel., non seulement
occulte, mais même notoire, et permettre de re* cevoir les ordres
mineurs et les bénéfices simples , parce qu'antérieurement
les évêques le pouvaient, comme l'attestent un grand nombre
de docteurs, et parce que le concile de Trente a fait seulement une exception
pour l'homicide volontaire , non pas casuel, quand même il serait
public (5j.
LII. On entend ensuite par homicide casuel, ce-lui, par exemple, que
commettrait une personne qui, n'ayant intention que de frapper un individu,
lui donnerait néanmoins la mort par négligence, ou celui
que commettrait un chirurgien qui tuerait un malade par négligence.
On doute ensuite si l'on doit
(?) Lib. VII. ?. 59?. (a) N. 38i. (?) ?. 395.
5»
INSTRUCTION PRATIQUE
regarder comme casuel l'homicide commis dans une rixe.. Plusieurs docteurs
tels que Diana et les Salmant., etc., prétendent qu'on doit le regarder
comme casuel ; mais nous soutenons le contraire , d'après le sentiment
beaucoup plus commun de Suar., Nav., Tambur., Sporer et plusieurs autres
avec Diana lui-même qui se rétracte ; car celui qui tue dans
une rixe, tue déjà volontairement (1). Voyez ce qui a été
dit au chap, xix, n. 108. Cepen-dant il. est très probable , d'après
le sentiment très commun de Suarez, Laymann, Navarre, Tournely,
Bonacina et Lacroix. ( qui l'appelle commun ) , que l'évêque
peut dispenser celui qui tue pour sa propre défense ; défense,
il est vrai, portée un peu trop loin, puisqu'un semblable homicide
ne peut pas être jugé absolument volontaire.
LUI. Relativement aux incapacités infligées comme une
peine par les papes, on doute si les évêques peuvent accorder
de dispense. Telle est, par exem-ple, l'incapacité à recevoir
des bénéfices portée par Sixte V, dans sa bulle EJfrœnatum
contre ceux qui opèrent un avortement, et cette autre incapacité
à célébrer, enjointe par le pape Benoît XIV
dans sa bulle In generali congregatione, contre les confes-seurs'qui sollicitent
au mal. Ànaclet lenie, et Ronc. en doute pour ce qui est de l'avortement
; mais Elbel et Sporer l'admettent sans aucune restriction} d'après
la règle communément reçue ( comme ils disent) par
Scot., saint Bonav., etc., qui veut que la dispense de toutes les peines
infligées par la loi commune et non réservée spécialement
au pape, doit s'entendre comme accordée aux
évêques,
(1) Lib. VII. ?. 394.
I'OBR LES CONFESSEURS.
53
comme on le prouve dans le chap. Nuper, xxix , de sent, excom. iUais
lisez ce qui a été dit au chap, IT de la loi dun. 58, où
j'avais soutenu le contraire (1).
LIV. 5. Touchant la matière des mariages, l'é-vêque
peut dispenser de plusieurs choses, il peut dispenser des publications.
Voyez ce qui a été dit au chap, xviii en parlant du mariage,
n. 55. Il peut encore dispenser du vœu de chasteté fait par l'é-poux
; nous avons aussi parlé de cela au n. 58. En outre, il peut dispenser
de l'empêchement ad pe-tendum , comme nous l'avons dit au n. 68.
H reste maintenant à examiner si les évêques ont quelque
faculté touchant les empêchements dirimants.
LV. Dans les empêchements dirimants, le pape seul a le pouvoir
de dispenser. Mais lorsque l'empê-chement est douteux, l'évêque
même peut dispenser, selon le sentiment très commun; ce sentiment
est en-core celui de Sa, Merbes, Tourn., Diana, Pocher, et quoique Sanch.,
dans son traité Du mariage, le nie (2), néanmoins dans son
Décalogue il se rétracte en donnant comme règle générale
ce qui suit : « Cum «dispensationis reservatio sit odiosa,
est restrin-»genda ad casus certos; dubii enim non compre-shenduntur
sub reservatione ; » comme il assure l'avoir prouvé auparavant
au liv. I, chap, ?, ?. ? (3).
LVI. Au contraire , lorsque l'empêchement diri-ment est certain
et que le mariage a été conclu, l'évêque, selon
le sentiment commun, peut dis-penser dans le cas où il ne serait
point facile de recourir au pape, et s'il devait par là prévenir
tout
(1) Lib. I. n. 597. in fin. etl. VI. n. 705. in fin.
(a) L. IV. c. 4o. n. 36.
(3) Lib. VI. n. 90». V· vers. Cœtsium.
54
INSTRUCTION PRATIQUE
le scandale et tout le déshonneur qui résulteraient de
la séparation des époux, et l'incontinence qui serait le
fruit de leur union s'ils ne se séparaient point ; ainsi pensent
Sanchez, Castrop., Concilia, Merbes., Tournely, Cabassut , Noël Alexandre,
Bonacina , Barbosa, les Salmant., Cuniliati, contre un
petit nombre de docteurs (1). Benoît XIV (2) entend la même
chose , lorsqu'il dit : « Prsesiimendum est, » summum pontificem
delegare episcopo facultatem » disponendi, quam certe requisitus
non esset dene-» gaturus. 1 Cependant Lacroix et Fil., Potesta, ob-servent
que si l'on peut facilement obtenir la dis-pense de la Sainte Pénitencerie,
et que si les époux sont en bonne foi, il faut alors attendre que
la S. P. l'ait envoyée, et en attendant laisser
les époux dans leur bonne foi, comme nous l'avons dit au chap,
xvi, ?. ? ??. Nous remarquons en outre, avec Ponz., Castrop., Barbosa,
Escobar, Sancti., Salm. el les autres communément, que l'évêque
ne peut point dispenser si les deux époux s'étaient mariés
en mauvaise foi ; parce que si on donnait lieu à cette dispense,
on donnerait aussi lieu à faire tous les jours des mariages nuls
avec l'espérance de la dis-pense. De plus, le concile de Trente,
sess. 24» c. v, veut que celui-là soit privé de toute
espérance d'ob-tenir la dispense , qui se marie
dans un degré prohibé. Cependant nous observerons
ici, avec Sanch., Salmat., Bon., Concina, etc., que,
pour établir la mauvaise foi dans un cas semblable, il faut
que celui qui se marie ait fait non seulement l'acte sciemment, mais encore
qu'il ait su qu'il y
(1) Lib. VI. n. na5.
(3) Bened. XIV. de synod. 1. VU. c. Si.
potm LES CONFESSEURS:
55
avait empêchement dans le mariage avec sa parente, et qu'il en
ait compris toutes les conséquences ; car le concile ajoute : Scienter
prœsumpserit ; par con-séquent, si c'est par ignorance profonde
qu'il, a agi ainsi, il peut être dispensé. On doit refuser
la dis-pense à celui qui, par malice, a négligé de
se faire publier, comme le déclare Je même concile dans Je
lieu que nous venons de citer (1).
LVII. Mais si le mariage n'avait pas encore eu lieu, il est très
probable, d'après le sentiment com-mun , que l'évêque
peut accorder la dispense de l'empêchement dirimant, quand, par là
il prévient le déshonneur, et qu'il n'est point facile de
recourir au pape; ainsi pensent Suarez, Pignatelli, Ponz., Concina, Castropalao,
Salman t., Bonacina, Silvius, Lacroix, Viva, Cuniliati, avec Benoît
XIV (2), contre le sévère Fagnan, qui défend d'accorder
la dispense, même à l'article de la mort, et dans la nécessité
de légitimer les enfants; mais les autres docteurs disent communément
qu'alors l'on pré-sume que le pape délègue à
l'évêque la faculté de dispenser, ou bien que la réserve
de la dispense cesse dans un cas de si grande nécessité,
et que l'évêque dispense alors en vertu de son pouvoir ordinaire
(?). Ainsi, Pignatelli (4) dit et prouve que, dans un tel cas, non seulement
la réserve cesse, mais encore la loi de l'empêchement, comme
étant devenue nuisible; car il est certain que la loi pernicieuse
n'obligé point, comme renseignent
(1) Lib. VI. ?. na4.
(9) De synod, lib. IX. e. 2. ?. alias 1. VII. e. ??. (ò) Lib.
VI. ?. lias, et cod. lib. n. 6?5· (4) Tom. III. consult. 33. n.
5.
56
INSTRUCTION PRATIQUE
tous les docteurs, avec saint Thomas. De là Ron-caglia
et l'Instructeur des nouveaux confesseurs
( comme nous l'avons dit au chap, xvi, ?. 114 )-, en concluent que s'il
arrivait par hasard que les époux fussent déjà à
l'église, et que l'un d'eux déclarât au confesseur
l'empêchement occulte contracté avec péché;
si alors on ne pouvait sans scandale ou déshonneur différer
le mariage, le confesseur a, dans ce cas, le pouvoir de déclarer
que la loi de l'empêchement n'est point obligatoire,
et qu'on peut licitement se marier. Ils conseillent néanmoins, pour
plus de sûreté , d'obtenir ensuite la dispense de la S. P.
(1). Mais nous observerons que celanedoit avoir lieu que lorsque l'évêque
est éloigné; parce que, lorsqu'il est possible, c'est
à lui qu'il faut recourir nécessairement, afin qu'il
accorde la dis-pense, selon ce qui a été dit au n. 4^·
Sainte-Beuve et Gibert disent ensuite que si les époux ne sont pas
du même diocèse, chacun d'eux doit obtenir séparément
la dispense do son évêque propre ; mais Honoré Tournely
et d'autres le nient avec proba-bilité, parce que l'évêque,
enlevant l'empêchement de son sujet, le rend par là
capable de se marier avec empêchement; de même que celui
qui a la faculté de dispenser dans quelques degrés de pa-renté,
en accordant la dispense à l'un des deux époux l'accorde
également à l'autre (2).
LVIII. On demande si l'évêque peut déléguer
à un autre cette faculté de dispenser des empêche-ments
dirimants dans les cas que nous venons de citer. Quelques uns le nient;
mais communément
(1) Lib. VI. ?. ??. (?) ?. ? 4a·
POOR LES CONFESSEURS.
57
Castropalao, Bonacina, Barbosa, Silvestre, Sanchez, Ponz., Coninch.,
Salm., Escobar, etc., l'affirment. Or il peut la déléguer,
non seulement en particu-lier, mais encore en général, dans
tous les cas qui se présentent, selon le sentiment de Sanchez, Cas-tropalao,
Salm., Bonac, Elbel, Valentia, Vasquez, Salas, Henriquez, Coninch., Guttierez
; parce que, cette faculté étant attachée, non point
à l'industrie de la personne,mais à l'office de l'évêque,
elle doit être regardée comme ordinaire, et par conséquent
on peut la déléguer, comme nous l'avons observé au
n. 34· II en est de même encore pour toutes les autres facultés
que possède l'évêque sur les publi-cations et les autres
empêchements. Observez que le vicaire de l'évêque n'a
point la faculté de dis-penser si l'évêque ne la lui
a pas déléguée d'une manière spéciale
; car nous avons dit au ?. ?? que parla commission générale
du vicariat, on ne doit point entendre comme déléguée
au vicaire la fa-culté qu'a l'évêque de dispenser dans
ce cas par la volonté présumée du pape (1).
LIX. 7° L'évêque peut dispenser dans les in-terstices
prescrits par le concile de Trente pour les ordinations des clercs. Et
d'abord , quant aux ordres mineurs, le concile confie cette dispense à
la prudence de l'évêque, en ajoutant : « Minores »
ordines per temporum interstitia, nisi aliud epi-«scopo expedire
videretur, conferantur, a sess. 23, chap. 22. Ainsi donc, entre les ordres
mineurs mêmes, il faut qu'il y ait un certain intervalle de temps,
c'est-à-dire le temps d'une ordination géné-rale à
une autre, comme le disent quelques uns,
(1) Lib. VI. D. 6i3. et fusius, ?. ua6v
58
INSTRUCTION PRATIQTJB
pu d'une fête à une autre, selon le sentiment de quelques
autres. Du reste , il suffit d'un motif quel-conque pour dispenser de ces
interstices, comme l'enseignent plusieurs docteurs. Entre la première
tonsure ensuite, et les ordres mineurs, il est plus probable qu'il n'est
point nécessaire qu'il y ait un intervalle, parce que la première
tonsure n'est point un ordre. En second lieu, relativement au sous-dûiconat,
le concile exige qu'il y ait un an d'inter-valle des ordres mineurs, ajoutant
néanmoins : «Nisi necessitas, aut utilitas ecclesiae aliud
requirat,» Cit. cap. II. Le mot ecclesiae désigne l'église
où le clerc a été assigné, comme le prouve
le chap. xiu. En troisième lieu, entre le sous-diaconat et le dia-conat,
il exige un intervalle d'un an; mais l'évêque peut dispenser
à cet égard pour toute cause raison-nable, car, dit le concile,
«Nisi aliud episcopo t videatur, » sess. 23, chap. XIII. En
quatrième lieu, enfin , du diaconat à la prêtrise il
réclame également un intervalle d'un an ; mais ici il est
beaucoup plus rigide, puisque, pour la dispense, il demande non seulement
l'utilité, mais encore la né-cessité de l'Église.
Voici ses paroles : « Ad minus ? annus integer, nisi ob Ecclesiae
utilitatem, et » necessitatem, aliud episcopo videretur (i). »
LX. 8" L'évêque peut même accorder la dis-pense
de célébrer à un autre autel, ou dans une église
autre que celle qui a été désignée par le fon-dateur
lorsqu'il y a de justes motifs; par exemple, s'il devait en résulter
quelque chose d'utile pour l'Église, ou bien encore si le chapelain
était infirme ou appliqué à l'étude, ou à
autre chose, et qu'il
(?) Lib. VI. ?. 7g5,
POUR LES CONFESSEURS.
5()
dût éprouver une grande gêne en allant à
l'église destinée, etc. Ainsi pensent communément
Castr.,· Concina, Lacroix, Salmant'., Barbosa, Roncaglia , Passeri,
Henriquez, Tambur., Mazzota, etc.; puis-qu'alors l'évèque
interprète (comme nous le dirons au n. 69) la volonté du
fondateur. Néanmoins Lacroix, avec Pasqualigo, en exceptent avec
raison le cas où le fondateur aurait désigné l'église
et l'heure, soit pour la commodité spéciale de sa fa-mille
ou du peuple ; soit pour l'honneur particulier de quelque saint. Au contraire,
Lugo et Tournely prétendent que si le fondateur n'avait eu en cela
aucun but, ou s'il avait cessé, le prêtre qui célèbre
dans une autre église ne pèche alors que vénielle-ment
; ainsi il n'est nullement coupable s'il célèbre à
un autel privilégié, parce qu'alors il cause une plus grande
joie au fondateur (1).
LXI 90 En outre, l'évèque peut célébrer
lui-même, dans l'après-midi, pour de justes motifs, et en
accorder la dispense aux autres, comme le disent Lugo, Wigandt, Navarre,
Castr., Laymann, Salmant., etc. (2).
LXII. io° Anciennement, les évêques, en vertu du canon
Missarum 11, dp. consecra. dist. 1, avaient le pouvoir de célébrer
et même de faire célébrer la messe dans quelque lieu
que ce lût, même dans les maisons privées; mais, plus
tard, le concile de Trente, sess. 22, in decr. de celeb, miss., etc., a
ajouté: « Ne patiantur (episcopi) privatis in do-» mibus,
atque omnino extra ecclesiam et ad divinum » tantum cultum dedicata
oratoria, ab eisdem ordi-
(1) Lib. VI. n. 529. (a) N. 344* in fin·
6?
INSTRUCTION PRATIQUB
«nariis designanda et visitandae sanctum hoc sacri-» ficium
a secularibus aut regularibus quibuscunque «peragi.* Ainsi, on leur
a ôté la permission de célébrer dans d'autres
lieux, excepté dans les ora-toires qu'ils ont eux-mêmes bénits
et destinés à un usage sacré et qui sont ouverts au
public. Là ils peuvent célébrer quelque jour que ce
soit. Ces ora-toires doivent avoir la porte du côté de la
voie publique; mais cela ne doit point s'entendre de ceux qui sont dans
les maisons des réguliers ou de quelque communauté, comme
dans les séminaires, les consistoires, les hôpitaux, ou bien
dans les pri-sons. Il n'est point nécessaire alors que la porte
donne sur la voie publique, et on peut célébrer dans ces
lieux, même les jours solennels, comme l'a déclaré
la S. C. Il en est de même pour les ora-toires que les évêques
ont dans leurs maisons mêmes de campagne qui sont hors de leur diocèse
(1).
LXIII. En outre, d'après le,chap. VU. deprwihg. in 6, les évêques,
anciennement, qui étaient absents de leur diocèse , avaient
le pouvoir de célébrer ou de faire célébrer
dans quelque maison que ce fût, hors de leur propre habitation. Clément
XI les priva de cette faculté ; néanmoins Innocent XIII,
dans sa bulle Apostolici ministerii, sess. 22, en date du 4 ma' 172^, déclare
que la défense ne doit point s'entendre appliquée aux maisons
dans lesquelles ils se trouvent : « occasione visitationis vel »
itineris, ut nec etiam quando episcopi in casibus » a jure permissis
absenter nioram faciunt in aliena » domo. » Cela a encore été
confirméjdans cette autre bulle In supremo, portée par Benoît
XIII. Néan-
(1) Lib, VI. n. 357.
POUR LES CONFESSEURS.
6l
moins, comme ce privilège est personnel aux évê-ques,
Tamburini observe avec raison que les autres prêtres n'ont point
le pouvoir, en l'absence de l'évêque, de célébrer
dans lesdites maisons (1).
LXIV. On doute si l'évêque peut en même temps accorder
la dispense pour célébrer dans les oratoires des maisons
privées. La loi ordinaire ne permet point et n'a jamais permis aux
prêtres cle dire la messe hors des lieux consacrés ou au moins
bénits par l'évêque, comme le déclare le canon
Sicut. 2, dist. 1 de consecr., du pape Félix. Mais on excepte premièrement
le cas de nécessité; comme on le voit exprimé dans
le texte que nous venons de citer. Or ces cas de nécessité
sont : i° si les églises sont en ruines, comme le dit le e.
concedimus 3o, dist. 1, de cons. ; 20 si quelque prêtre entreprend
un long voyage à travers des régions désertes ou infidèles,
pomme le déclare le même e. concedimus; 3° lorsque l'église
ne peut point contenir le peuple, et que plusieurs, par conséquent,
devraient rester privés de la messe; 4" si l'année occupe
la cam-pagne, ou bien si une multitude de navigateurs se trouvent sur le
rivage de la mer. Ainsi les docteurs admettent communément que l'on
peut s'en rap-porter là-dessus à ce que disent le cardinal
Petra et les Salmant. (2). Enfin, dans ces cas de nécessité,
tout prêtre peut célébrer hors de l'église sur
un autel portatif. Néanmoins, Laymann (3) observe , avec Suarez
et Soto, que quand l'évêque est présent,
t) Lib. VI. n. 558.
(a) Petra torn. IV. in const. a. Urb. V. n. 3». Salm. tr. 5.
de miss. sacr. e. 4· eI· n· 5o. (3) Lajm. lib. V.tr.
5. n. 5.
jì»
INSTRUCTION PRATIQUE
ïl convient de lui en demander la licence. En outre, Castropalao
(1) avertit que lorsque'le cas nécessité est douteux, l'évêque
a le pouvoir de dispenser, comme nous l'avons dit au chap, xi, n. 65.
De plus, on fait une exception pour l'éVèqiie qui accorde
la dispense pour célébrer hors de l'église dans
un cas particulier, lorsqu'il y a de justes mo-tifs; puisque les évêques
n'ont plus aujourd'hui fa-cu\téjpleine et eniière
de permettre de célébrer dans les maisons particulières,
faculté qu'ils avaient anciennement, comme on le voit par le
c. Missa-????, dist. ?, de cons., où ils permettaient de dire
la messe « in locis ab episcopo consecratis, vel ubi ipse permiserit;
»et dans le chap. Hic ergo, ibidem, où il était dit
: « In locis in quibus episcopus proprius iusserit. »On voit
la même cho.se exprimée dans le can. in his, 3o, de privilegiis
où, Honorius III déclara que les fières franciscains
et dominicains, en vertu du privilège apostolique, pouvaient célébrer
sur un auiel portatif, sans même avoir la licence de l'évê-que
du lieu, donnant pour raison que, s'il n'en était ainsi, leur privilège
leur serait tout-à-fait inutile, puisque sans ce piivilége
ils pouvaient bien, avec la seule permission de l'Ordinaire, célébrer
hors de l'église. Voici les propres paroles du pontife:* Cùm
» autem nihil eis conferret memorata indulgentia, »sine quâ
id prelatis annuentibus liceret. » C'est pourquoi
le P. Siiarez (2) observe avec raison, d'a-près le sentiment de
plusieurs autres docteurs, ainsi que de Silv., Solo et Nav., qu'anciennement
les évêques avaient la faculté de faire célébrer
dans les
(1) Castrop. tr. aa. de sacr. miss. il. 1. p. 8. n. 5. (a) Suar. torn.
III. in 3, part. sect. 3. ?. a.
POUR LES CONFESSEURS.
65
maisons privées sans interruption et sans aucune né-tcessité:
quia illis (dit Suarez) non eratdispematio, »sed usus propriae potestatis,
» Pour moi, j'ajoute que, quoique le concile de Trente, dans le décret
rapporté au n. 63, ait privé les évêques de
cette fa-culté, néanmoins tous les docteurs s'accordent com-munément
à dire que cela doit s'entendre pour la permission continuelle de
célébrer per modum habi-tus, selon la faculté qu'ils
en avaient auparavant; mais qu'on ne-leur a point défendu d'accorder
celte per-missioiìper modum actuspour uncertain temps,lors-qu'il
y a de justes motifs. Ainsi le P. Suartz, dans le lieu cité, vers.
2°, in fin., ajoute, après en avoir excepté le cas de
nécessité:» Item facultas haec est nper modum dispensationis;
concilium autem ab » episcopo non abstulit potestatem rationabiliter
(dispensandi, quam habet in hujusmodi rebus, ? maxime cum revera sit moraliter
necessaria.» Et ii ajoute : « Tandem usus hoc confirmat, quia
ita fit Dsineulloscrupulo. «Bonacina dit la même chose(i).
« Episcopus potest in casu aliquo, justa concurrente ? causa, dispensare,
ut missa extra ecclesiam in loco * honesto celebretur. » II cite
ensuite à l'appui de ses paroles Reginald., Beja et Cenedo. On peut
voir encore ce qu'a écrit Uonacina («) dans un au-tre endroit
où, en parlant de l'opinion soutenue par quelques docteurs, et que
nous avons rapportée au chap, ??, ?. 63 (laquelle, au surplus, ne
plaît pas plus à Bonacina qu'à nous; car t Ile veut
que l'é-"vêque puisse dispenser dans toutes les lois canoni-ques
où la dispense n'a
point été expressé-
(l) Bonac. de euchar. d. 4· q. ult.
(a) ibid. de leg. d. i. q. a. p. ?. n. 17.
64
INSTRUCTION PRATIQUE
ment réservée au siège apostolique), il ajoute
que cependant ce sentiment peut être valable dans certains cas qui
adviennent fréquemment et qui réclament la dispense, tels
que les cas de grande nécessité ou de grande utilité
; et· lorsqu'on n'a point la commodité de recourir au saint
siège ; Tamburini (1) en dit autant, et il donne la même raison
<jue Bonacina, c'est-à-dire que ces cas se présentant
fréquemment, il est moralement néces-saire que l'évêque
ait le- pouvoir de dispenser, comme nous l'avons déjà dit
au chap. 11 , ?. 62. Barbosa (2) soutient la même chose : «
Concilium «loquitur de communi modo celebrandi, non vero »
abstulit episcopis potestatem rationabiliter dispen-» sandi, stante
necessitate , vel justa causa. » Esco-bar (?) en dit autant: «Talis
autem dispensatio cum » rationabili causa non debet inter abusus
recenseri ; » unde potest episcopus hanc concedere facultatem • (celebrandi
extra locum sacrum) quando persona «nobilis ratione senectutis, vel
infirmitatis, nequit » adire ecclesiam, ut missam audiat, et eucharistiam
» recipiat. » Laymann (4) est encore de ce sentiment: ? Non
videtur haec potestas ablata {episcopis} oc-«currente casu necessitatis
dispensandi, ut semel, «aut saepius, quatenus rationabilis causa
suaserit, » in loco honesto, sed profanis usibus destinato, su-J
per altari sacrato missam celebrare liceat. » Holz-mann (5) dit la
même chose : « Excipiendus est prae-
(1) Tamb. in meth. ed. miss. 1. I. e. 6. § 2. n. 7.
(2) Barbosa de pol. ep. alleg. 23. n. 5. (5) Escob. t. III. de
cucli. e. 6. n. 85.
(4) Laym. 1. V. tr. 5. 3.
(5) Holim. t. II. de euch. e. 1, 11.
370. V. Excipiendi^ prKterea.
POUR LES CONFESSEURS.
65
«terea casus, quo episcopus rationabili ex causa »
dispensat, ut in privatis sedibus, ?. gr. alicujus in-» firmi, super
altari portatili celebrari possit. » Enfin ce sentiment est celui
des Salmant., d'Elbel, de La-croix, deConinch., de Rodrig., Pasqualigo,
Quarti, Diana, Marchant, Hurtado et Fagundes (i) ; d'où il résulte
que nous avons de justes raisons pour appe-ler commun le sentiment que
nous soutenons. Nous observerons ici que lorsque les docteurs que nous
venons de citer parlent de la nécessité au sujet de la dispense,ilsn'entendent|pointlanécessitéde
célébrer, parce que cette dernière n'a pas besoin
de dispense, comme on l'a vu plus haut, dans la première excep-tion
que nous avons faite, mais de la nécessité où est
celui qui reçoit la dispense de ne pouvoir célé-brer
ou d'aller entendre la messe à l'église, ce qui est véritablement
un juste motif de dispense. Le décret de Clément XI que nous
oppose le P. Maz-zottane détruit en rien ce que nous venons de dire,
ni même ceux de Paul V et d'Urbain VIII, où l'on défend
aux évêques d'accorder ladite dispense, soit parce que ces
pontifes (ainsi que le concile de Trente) entendent parler, comme
le remarquent Escob. et les Salmant., n. 58, avec Philibert, Hur-tado,
Nov., Quintanad., Diana, Fagundez, de la dispense per modum habitus, mais
non point per modum actus, pour un certain temps et dans cer-tains cas
particuliers où il y a des raisons valables pour dispenser; soit
encore parce que, après le dé-cret du concile, plusieurs
auteurs , tels que Soto , Emma., Sa, avancèrent qu'on pouvait sans
faute
(i) S aim, de sacr. miss. tr. 5. c. 4· n. 56. Elb. iheol. mar.
cod. tit. p. ?3?. ?. 9Ô3. et Lacroix 1. 6. p. â. n. 263. ?,
xxvi,
5
6§
INSTRUCTIO» PRATIQUE
grave célébrer hors de l'Église, pourvu que ce
fût dans un, lieu honnête. Ainsi, par exemple, Soto écri-vit,
comme le rapporte le P. Suarez (1), qu'en cela il n'y avait aucune faute,
pourvu qu'on célébrât le sacrifice de la messe de manière
à ne point causer de scandale ; c'est pourquoi les papes que nous
ve-nons de nommer jugèrent à tort ou à raison devoir
prohiher aux évêques cette faculté par des décrets
plus pressants et plus formels. On doute ensuite pour combien de fois l'évêque
peut accorder la dis-pense, lies Sal mar» t. disent pour une ou deux
fois ; mais les autres, comme Suarez, Laymann, Bonacina, Escobar, Elbel,
Holzmann avec Pasqualigo, parlent 4'une manière indéfinie,
et pensent qu'il peut l'ac-corder pour tout le temps que dure la maladie
ou toute autre cause accidentelle. Certes, ce n'est point sans raison
qu'ils parlent d'une manière indéfinie , puisque la défense
de dispenser (comme on l'a vu plus haut) s'entend faite seulement pour
les dispenses continuelles et permanentes, et non point pour celles que
l'on accorde pour un certain temps à l'égard de quelque cause
transitoire, et qu'il est évident que l'on doit interpréter
les prohibitions d'une manière stricte. A l'appui de cela, Gallemarte
(2) rapporte encore une certaine déclaration où il est dit
: « Per-» mittit pontifex ordinarii arbitrio, necessitate per-osonarum,
et infirmitatis qualitate pensata, ut pro «infirmorum commoditate
etiam in privato orato-» rio, vel altari ad hoc deputato, facultatem
cele-» brandi concedat. » Le cardinal Petra. (3) admet
(0 Suarez in 3. part. I. III. d. 8i. sact. 3. inprinc. (a) Galleniarl.
in Trid. sess. 22. deer, de obs. etc. (3) Petra. t. IV. in coast. 3. Urban.
II. n. 5i. '
POUR 1ES CONFESSEURS.
6?
aussi la même chose, en disant qu'il est très bienjper-mis
aux évêques d'accorder la permission de célébrer
dans la maison de quelque personne remarquable qui se trouve malade, afin
qu'elle entende la messe et reçoive la communion. On ajoute que
Honorius III, dans le canon déjà cité, in his 5o,
de Privilegiis, en parlant de la licence de pouvoir célébrer,
dit que dans cette matière on doit plutôt interpréter
favo-rablement. Or, si les évêques peuvent accorder cette
permission en faveur de séculiers infirmes, afin qu'ils ne
soient point privés d'entendre la messe, comme nous l'avons déjà
dit, à plus forte raison peuvent-ils l'accorder aux prêtres
qui sont forcés , en quelque sorte, de célébrer fréquemment,
comme le déclare le concile de Trente, sess. 22 , chap. 14, lorsqu'il
dit : a Curent episcopi, ut ii saltem omni-»bus diebus festis et
solemnioribus missam cele-0 brent. » C'est pourquoi je
n'oserais assurer que le prêtre qui, pouvant célébrer
tous les jours (à l'ex-ception d'un jour dans la semaine par respect)
, néglige de le faire, ne commet point de péché vé-niel;
parce que le prêtre ne dit point la messe seu-lement pour son intérêt
particulier, mais encore pour l'intérêt de toute l'Église
et de tout le peuple chrétien dont il a été constitué
le ministre et Fin-tercesseur auprès de Dieu, selon ces paroles
de l'a-pôtre : « Omnis pontifex ex hominibus assumptus , »
pro hominibus constituitur in iis quae sunt ad » Deum,
ut offerat dona et sacrificia pro peccatis. » Hebr. 5, 1. »
De là naît, comme je le disais, une certaine nécessité
pour le prêtre de célébrer. C'est pourquoi les évêques
doivent accorder plus facile-ment aux prêtres la licence de célébrer
dans leur maison durant tout le cours de leur infirmité. Nous
68
INSTRUCTION PRATIQUE
avons, je crois, traité assez au long cette question ; passons
maintenant à une autre matière.
LXV. Dans le chap. Fin. depœnit. et remiss., il a été
aussi accordé aux évêques qui sont hors de leur diocèse,
de même qu'aux autres supérieurs et prélats mineurs
qui sont indépendants, de pouvoir se choisir un confesseur, sans
avoir besoin d'obtenir la per-mission de l'ordinaire du lieu où
ils sont. Or, par prélats et supérieurs, nous entendons encore
les abbés, les supérieurs particuliers et même les
pré-lats de la cour de Rome, comme aussi les protono-taires , etc.,
selon le sentiment de Suar., Lugo, Diana, etc. Cependant la S. G. déclara
(et Gré-goire XIII l'a confirmé d'après Fagnan ) que
les évêques pouvaient, il est vrai, se choisir un confes-seur,
mais qu'il fallait que ce confesseur fût un de leurs sujets ; et
si le confesseur n'était point un de leurs sujets, il fallait alors
qu'il lut approuvé par l'ordinaire propre, c'est-à-dire par
l'évêque du dio-cèse de ce dernier, comme le déclare
Lugo (?). Les cardinaux jouissent encore de ce même privilège,
mais non point hors de la ville de Rome, selon le sentiment del'agnan;
ils peuvent se choisir pour confesseur un prêtre quelconque, soit
par eux-mêmes, soit par la communauté, et ensuite le con-duire
hors de Rome s'ils veulent. Cela a encore été accordé
aux évêques (2).
LXVI. Les évêques sont les délégués
du siège apostolique pour veiller à la conservation des cloî-tres
de religieuses, même indépendantes, et sous la direction des
réguliers, comme nous le démontre-
(1) Lib. VI. ?. 365. vers. Dubitatur hic 1. (?) Ibid. vera, <lnb.
2.
POUR LÉS CONFESSEURS.
67)
rons au n. 81. Alexand.,Bautr., Pelliz, etc. (contre Diana et Pasqual.),
concluent de là que les évêques peuvent très
bien se re'server à eux-mêmes les cas touchant les cloîtres,
comme l'a déclaré la S. C. du concil., le 16 nov. 1720 ;
et cela a également lieu à l'égard des jésuites,
comme le déclare le c. xix, n. 43 5 voyez le n. 80, infra 5.
LXVII. Tous les confesseurs des religieuses, même indépendantes,
doivent être approuvés par l'évêque, comme le
prescrit Grégoire XV dans sa bulle In-scrutabilis, confirmée
dans tous ses points par Clé-ment X, par une autre bulle Jnscrutabili,
?, puis enfin par Benoît XIII et Clément XIF, qui a renou-velé
dans tous ses points la bulle de Grégoire (1) (nous en parlerons
au n. 80 ), même dans les choses que Benoît XIII avait accordées
contre cette bulle; c'est pourquoi Tamburini ajoute que même les
re-ligieuses indépendantes encourent les cas réservés
par l'évêque, parce que, de même que ce dernier peut
limiter le temps et les personnes, de même en-core il peut limiter
les cas; mais plus communément et plus probablement, Pellizia, Quintan.,
Alexand. le nient, parce que les religieuses indépendantes sont
hors de la juridiction de l'évêque, et que l'ap-probation
du confesseur dépend seulement de son pouvoir ; d'autant plus que
dans la bulle de ClémentX, Superna, il est dit, il est vrai, que
l'évêque peut limiter le temps, le lieu et les personnes,
mais il n'est fait nullement mention des cas (2). Cependant il n'en est
point ainsi pour ce qui regarde le cloître dont l'évêque
peut se réserver à lui-même les cas ,
(1) Lib. VI. n. 577. (a) N. 602. q. 6.
??
INSTRUCTION PRATIQUE
comme la censure, de même que nous l'avons dit au chap, xix,
n. 43 , de même encore que nous le dirons au n. 80. En outre, l'on
observe qu'en vertu je la bulle Pastoralis de Benoît XIV, l'évêque
a le pouvoir d'assigner le confesseur extraordinaire aux religieuses indépendantes,
si leur prélat régulier re-fuse de le donner lui-même
, et cela non seulement à l'article de la mort, mais encore durant
le cours ordinaire de la vie(i).
LXVIII. ??. Plusieurs docteurs, avec saintTho-maSj Silv., Armilla,
Tabiena, etc., et Lacroix (qui y adhère), disent que l'évêque,
pour de justes mo-tifs , peut commuer les pieuses dispositions du tes-tateur,
ajoutant qu'il a le pouvoir, quand il y a sujet, de dispenser de l'obligation
de remplir les ?volontés dernières du testateur; ce que confirme
encore le concile de Trente, sess. 22 , chap. 6. Mais Molina, Laym., Sanch.,
etc., le nient d'après le sentiment plus probable, puisque dans
le c. Tua de testam., et dans le c. vin de ladite sess. 22 , on im-pose
aux évêques l'obligation d'exécuter de point en point
les volontés dernières du testateur. Les rai-sons qu'on nous
oppose sont vaines, ainsi que ce qui est dans ledit c. vnl, parce qu'on
y charge seu-lement les évêques du soin d'examiner si les
causes sont véritables, lorsque le saint-siége apostolique
commue lui-même les volontés dernières du testa-teur.
C'est avec d'autant plus de raison que dans la Clement. Quia contingit,
de rei. dom., il est dit que les biens qui sont destinés pour un
usage assigné ne doivent point être employés pour un
autre, sinon par (le siège apostolique. Du reste, il est très
pro-
(1) Lib. VI. n. 576.
POUR LES CONFESSEURS.
^î
bable, comme le disent Laymann, Bonacina et les Salmant, Coninch. et
Trullenoh., que s'il survenait quelque motif, ou si le testateur avait
ignoré quel-ques causes qui, s'il les eût connues, auraient
pu changer ses dispositions, alors l'évêque peut com-muer
le testament, mais il faut pour cela qu'il s'en-tende avec l'héritier;
cependant, si ce dernier s'y opposait, l'évêque, comme le
disent plusieurs doc-teurs, peut agir par lui-même (1).
LXIX. 14. Plusieurs docteurs, avec Viva, Diana, Trullench. etBusemb.,
prétendent que l'évêque peut faire l'évaluation
des restitutions incertaines (c'est-à-dire de ces restitutions dont
le maître n'est point certain ) pour en gratifier les pauvres, puisque
( comme le disent ces docteurs ) une telle évaluation ne se trouve
réservée au pape dans aucune loi, tart-dis qu'au contraire
elle est selon la volonté présumée du créancier.
Mais Lugo, Molina, Turrien,Corduba et d'autres prétendent le contraire
avec plus de rai-son , parce que l'administration de te'ls biens appar-tient
spécialement au pape ou au prince (2). Efc dans le fait, le pape
Benoît XIV, dans sa bulle Pastor bonus (22 avril 1744)» a accordé
cette faculté à là Sainte Pénitencerie (3),
voyez le chap, xix, ii. ìetì, infrà ?. io.
- LXX. i5. Lacroix, Tamburiniet Pasqualigó.di-sent encore que
l'évêque pourrait diminuer le nom-bre des messes laissées
par le testateur, si -, à cause de la modicité de l'aumône,
il ne se trouvait per-sonne qui voulût se charger de les dire. Mais
là
(1) lib. ??. ?. 63i. q. a.
(a) N. 192. V. Notât.
(3) Lib. VI. ?. 470. ad 10.
Jit
INSTRUCTION PRATIQUE
P. Concina repousse ce sentiment, et c'est avec raison ; car le décret
de la S. G. fait par l'ordre d'Ur-bainVIII, et confirmé par Innocent
XII, défend rigou-reusement à l'évêque de réduire
le nombre des messes assignées in limine fundationis, ou de les
commuer, voulant qu'on eût recours pour cela au siège aposto-lique
depuis que le concile de Trente a statué là-dessus. Ainsi
donc, ce décret déclare formellement que la faculté
accordée aux évêques et aux autres prélats dans
le concile, sess. 25, c. 4> était seule-ment de réduire le
nombre des messes laissées avant le concile. Du reste Fagnan. ajoute
avec ïelin., que si, dès le commencement, les revenus suffisaient,
et si, plus tard, ils devenaient si modiques qu'ils fussent tout-à-fait
insuffisants, les évêques alors peuvent se servir de la faculté
qu'ils possèdent, de jure communi, pour réduire le nombre
des messes, comme le déclare le chap. Nos quidem, de test. (1).
LXXI. Nous avons déjà dit au chap, ?, ?. 63, que l'évêque
n'a pas le pouvoir de dispenser dans les lois canoniques, si cette faculté
ne lui a point été spécialement accordée par
le pape. Enfin, quant à ce qui concerne le pouvoir des évêques
sur le relâ-chement des serments, et sur la commutation ou la dispense
des vœux, il en est parlé dans le c. v, n. 19 et 42 et sequen. On
observe en dernier lieu que l'é-vêque, en vertu du concile
de Trente, sess. 21, ch. 7, peut réunir ou conférer à
d'autres églises les béné-fices simples de peu de
valeur, ou fondés dans quel-que église que le temps a détruite,
de manière qu'il ne soit plus possible de la réparer.Voy.
Barbosa(2).
(1) Lib. VI. ?. 55?. V. dub. 1.
(a) Barbosa. de potest, épis. ail. 66. ex ii/15·,'
POUR LES CONFESSE0HS.
j3
En outre, l'évêque a encore le pouvoir de joindre aux
séminaires les bénéfices simples, même réser-vés
, possédés ou vacants dans la cour romaine, d'après
le concile de Trente, sess. 23, ch. xvm. Il peut encore dans ses visites
contraindre les parois-siens à fournir au curé son nécessaire,
selon le con-cile de Trente, sess. 22, c. 21 , c. 4· De plus, il
peut même créer de nouvelles paroisses, et leur as-signer
un revenu sur les fruits de la terre s'ils sont abondants, pourvu toutefois
que cela ne porte au-cun préjudice aux possesseurs, d'après
le même concile de Trente. Il peut encore joindre deux pa-roisses,
si, étant divisées, elles ne suffisent point chacune à
entretenir leur curé, pourvu que le peuple ne soitpoint tellement
éloigné qu'un seul curé ne suf-fise point pour le
desservir, c. 5.
QUATRIÈME POINT.
Des privilèges des réguliers.
§ I. Des privilèges qui appartiennent à tous les
réguliers en commun.
72, 73 et 74. I· De l'exemption delà juridiction des
évêques.
75. Cas exceptés, et principalement touchant la célébration
des messes.
76 Déclaration de la S. C.
77. Dans quels cas l'évêque peut obliger, etc.
78. Si les réguliers sont tenus d'obéir aux pré-,
ceptes de l'évêque.
79. Si l'évêque peut les visiter.
80. S'il peut visiter le cloître des religieuses.
74
INSTRUCTION PRATIQUE
81. S'il peut demander compte des messes lais-sées , etc.
82 et 85. Dans quel cas il peut procéder crimi-nellement.
84 à 87. II. De l'exemption de la dîme.
88. III. Touchant les fondations.
89. Et des couvents soumis aux évêques.
90. Du juge conservatoire. : 91 et 92. De la
sépulture.
9§ et 94. De la portion canonique. LXXII. 1. Les réguliers
ont le privilège de n'ê-tre point soumis à la juridiction
des évêques; car les prélats réguliers ont dans
leurs églises et dans leurs monastères une juridiction quasi
episcopale, soit sur les personnes, soit sur les lieux, comme le prouvent
les théologiens de Salamanque ; ces deiv niers traitent fort au
long de tous les privilèges mentionnés dans ce paragraphe;
pour nous, nous nous contenterons d'observer ce qu'il y a de plus re-marquable
(1).
LXXIII. Nous remarquerons donc, en premier lieu, sur la susdite exemption,
que, dans le doute de quelque privilège, là décision
appartient au pape, comme l'ont déclaré Clément IV
et plusieurs autres pontifies (2). Notis observerons, eu second lieu, que
les réguliers ne peuvent point se soustraire à ce privilège
de l'exemption, comme on le voit par le chap. Cum tempore, de arbitriis,
parce que cela por-terait préjudice au monastère; par conséquent,
tout usage qui Voudrait le contraire ne saurait ici préva-loir (3).
(1) Salm. tract. 18. c. 5. n. 5. (a) Ibid. n. 6. (3) Ibid. ?. ?.
POUR IiES CONFESSEURS.
7a
LXXIV. Nous observerons, en troisième lieu, que non seulement
les profès et les convers jouis-sent de ce privilège, mais
même les novices, les-quels, dans ce qui est favorable, sont compris
sous le nom de religieux; et même encore les frères et les
béates, comme nous l'avons dit au n. 8. En ou-tre, lés domestiques
des réguliers qui sont en acti-vité de service, résidant
dans l'intérieur des cloîtres, et vivant sous leur direction,
ne sont point soumis à la juridiction de l'évêque,
selon le concile de Trente, sess. 24, chap, xr, même pour ce qui
est des censures (selon la bulle d'Alexandre. IV, d'après les Salinant.),
comme aussi pour ce qui est de la communion pascale (1). On remarque, en
quatrième lieu, que les apostats ou les fugitifs peuvent être
arrêtés, il est vrai, parl'évêque, mais seulement
pour être rendus à leur prélat. L'évêque
ne pourrait les punir lui-même, qu'autant que leurs couvents se-raient
éloignés, et que ceux-ci, malgré ses avertis-sements,
refuseraient des'en retourner, comme l'en-seigne le concile de Trente,
sess. 7, chap, m (2). Voyez ce que nous avons dit encore sur cette ques-tion
au n. 82 et 83. Observez, en cinquième lieu, que les séculiers
qui sont dans les monastères et qui y commettent quelque faute,
n'encourent point les peines portées par l'évêque (?),
à moins tonte-fois qu'ils ne contrevinssent aux ordres de ce der-nier
touchant la célébration des messes, comme nous le dirons
à la fin du numéro suivant.
(.1) Salinant. c. 3. n. 8. et opus nostrum. 1. VI. ?. ?4°·
in fin.
(a) Ibid..
(3) Ibid. n. g. et tract. 10. dé cenSur. c. S. ?. llS.
com Layman, Avili. Peyr. Garcia et alii» pluribus.
76
INSTRUCTION PRATIQUE
LXXV. En sixième lieu, nous observerons ici plusieurs choses
dans lesquelles les réguliers dépen-dent principalement des
évêques. Et d'abord ils ne peuvent ériger des monastères
sans en avoir aupa-ravant obtenu la permission de l'évêque,
d'après la bulle d'Urbain VIII, en date du 28 août 1724. Nous
remarquerons que dans la bulle Alias, etc., de Gré-goire XV, il
est défendu aux évêques d'accorder cette permission,
à moins que les revenus ou les aumônes du couvent ne soient
assez considérables pour entretenir au moins douze religieux; mais
cette règle n'a point lieu pour les hospices comme le disent Barbosa,
Peyri., etc. 20 Les réguliers ne peuvent imprimer aucun ouvrage
sans la permission de l'évêque, comme le déclare le
concile de Trente, sess. 4» décret, de edit. Ubror. (1). 3°
L'évêque a le pouvoir de forcer les réguliers à
restituer aux no-vices qui ne veulent point faire profession , tout ce
qu'ils ont apporté en entrant dans le monastère (2). 4°
La disposition que doit faire un novice deux mois avant de faire profession,
il ne peut le faire sans la permission de l'évêque ou du vicaire
(comme l'a déclaré le concile de Trente, sess. 25, c. 16.
5° L'évêque a la faculté de connaître , de
concert avec le prélat du religieux, la cause qui l'empêche
de faire profession (?). 6° L'évêque ou son|délégué
doit examiner la volonté des vierges quand elles entrent dans le
monastère ou qu'elles font profes-sion, selon le concile de Trente,
sess. 25, c. 7. 70 Mais il doit s'acquitter de ce devoir dans l'es-
(1) Salin, c. 5. n. 10 et 12. (a) Ibid. tract. 15. c. 5. p.-7. (S)
Ibid. c. 5. n. i5.
POUR LES CONFESSEURS.
77
pace de quinze jours, sans quoi il ne pourrait plus s'introduire dans
le cloître pour cela. L'évêque peut empêcher dans
les monastères de religieuses, même indépendantes,
qu'elles ne soient pas plus nom-breuses que les revenus en peuvent nourrir,
comme l'ordonne la bulle de saint Pie V (i). 8° L'évêque
a le pouvoir de convoquer les moines qui vivent con-tinuellement hors du
monastère pour les obligations qu'ils ont à remplir envers
les personnes misérables, comme les pupilles, les veuves, etc. (2).
90 L'évê-que peut forcer les réguliers d'assister aux
proces-sions, d'après le concile de Trente, sess. 25, cha-pitre
xiii, pourvu qu'il les invite à cela non point par un édit
public, mais personnellement par quel-que messager (3). io° L'évêque
a la juridiction sur les couvents qui ne peuvent point nourrir douze religieux,
comme nous le dirons au n. 88. En der-nier lieu, on en excepte les ordres
de l'évêque tou-chant la célébration des messes,
puisqu'en cela le concile de Trente, sess. 22, de Obs., leur a enjoint
de procéder comme délégués apostoliques en
disant: « Ut non solum ea ipsa, sed quaecumque alia huc » pertinere^visa
fuerint, ipsi ut delegati sedis apo-«stolicas prohibeant, mandent,
etc., atque ad ea » inviolate servanda censuris, aliisque poenis,
fide-»lem populum compellam : non obstantibus privi-» legiis,
exemptionibus, ac consuetudinibus quibus-» cumque. » En outre,
nous observerons qu'il y a encore là-dessus un décret de
la S. C. à l'évêque deNebiojle 7 février
i652. (Voyez le liv. i5, de
(1) Salin, tract. 18. c. 3. n. i4.
(a) Ibid. ?. ?5.
(5) Ibid. diet. c. 3 ?. i6 et 17..
^($
INSTRUCTION PBA.TIQUK
Creator., pag. 571, ? tergo), où généralement
par-lant il est dit : « In his, in quibus a jure communi, »a
S. concilio Tridentino, a constitutionibus aposto-licis tributa est episcopo
jurisdietio in regulares, • potest illos etiam per censuras ecclesiasticas
comr spellere. » La même chose a été également
décidée dans un autre décret le 4 ju>n 1672 ( liv.
27, De creator., pag. 4°6)· Ainsi donc, comme l'observe avec
raison Benoît XIV (1), les évêques, pour ce qui est
de la célébration de la messe, ont le pou-voir de forcer
tous les prêtres et même les réguliers à observer
non seulement les choses ordonnées par le concile, mais encore ce
qu'ils prescrivent eux-mêmes. C'est pour cela que l'émin.
card. Pinelli, étant archevêque de Naples, enjoignit avec
raison, le 5 janvier 1743, même aux réguliers, sous peine
de suspense a divinis, de ne point permettre à au-cun prêtre
étranger de célébrer dans leur église sans
la permission de l'ordinaire.
LXXVI. Nous observerons encore plusieurs au-tres choses que la S. C.
déclara dans un décret le 2 juillet i52O. Et d'abord que
les réguliers peuvent, il est vrai, recevoir les offrandes des personnes
pieu-ses , mais sans faire le tour de l'église. En deuxième
lieu, qu'ils ne peuvent porter le pallium ou la chape par la paroisse,
hors de leur église Ou de leurs environs, ni même faire la
procession avec ces ornements, à moins que l'usage ne les autorise
à faire le contraire, comme le disent Rodrig., Bordon. et Villalobos
(a). En troisième lieu, lorsqu'ils sont appelés pour des
obsèques, ils doivent se rendre à
(1) De synod. 1. IX. c. i5. n. 5. (s) Salm. tract. 18. c. 3. n. 18
et 19.
POUR LES CONFESSEURS.
79
l'église où les clercs sont assemblés ; mais en
cela, disent les Salman t. avec Lezana , l'usage du con-traire a prévalu
(1). En quatrième lieu, on ne peut point défendre aux réguliers
de célébrer la messe dans leur église, avant la messe
paroissiale, ni de sonner les cloches, comme ?'? déclaré
formellement saint Pie V dans la Const, et si mendicantium s. 2, 5. En
cinquième lieu, les réguliers ne peuvent publier les mariages.
En sixième lieu, il leur permis de prêi-cher dans leur église
dans le temps de l'avent et du carême, quand même on prêcherait
dans la pa-roisse (2).
LXXVII. Il y a donc trois cas dans lesquels l'é-vêque
peut obliger les religieux à lui obéir, même sous peine
de censure. Le premier de ces cas est re-latif à la restitution
des biens des novices, comme nous l'avons dit d'après le concile
de Trente, sess. 25, chap, xvi ; le second concerne la surveillance des
cloîtres au sujet des religieuses, selon le concile de Trente, ib.
chapitre v. Le troisième enfin a rap-port à l'observation
de tout ce que l'évêque pre-scrit touchant la célébration
de la messe, comme nous l'avons déjà dit au n. 75. Benoît
XIV (?) rap-porte à ce sujet deux déclarations de la S. G.,
où il est dit que les évêques, comme délégués
aposto-liques, peuvent même forcer les religieux, sous peine de censure,
à l'obéissance et procéder contre eux, s'ils admettent
à célébrer dans leur église les prê-tres
étrangers qui n'ont point la permission de l'é-vêque
, comme le déclare le concile de Trente,
(1) Salm. tract. 18. c. 3. n. 19.
(a) Ibid. 1. IX. c. 3. n. 19.
(3) De synod. 1. IX. c. ??. n. 5.
8?
INSTRUCTION PRATIQUE
sess. 22, décret, de Observ. in cel., où l'on enjoint
formellement aux évêques de défendre de laisser célébrer
la messe à tout prêtre errant et inconnu : -vago et ignoto
sacerdoti. 11 reste maintenant à savoir si l'évêque,
dans les autres cas que nous venons de mentionner, peut contraindre les
religieux sous peine de censure; Barbosa, Garcia, etc., prétendent
qu'il le peut; mais plus communément Sanch., Le-zana et les Salm.
soutiennent le contraire, d'après plusieurs privilèges pontificaux
qu'ils citent à ce su-jet; Barbosa, Diana , Lezana, ajoutent, contre
quel-ques docteurs, que l'évêque n'a pas même le pon-voir
de) dénoncer les réguliers excommuniés même
pour délit public (?).
LXXIII. On demande, en premier lieu, si les réguliers sont obligés
de se soumettre aux décrets des synodes provinciaux ou diocésains,
ou bien encore aux autres préceptes de l'évêque. Il
est cer-tain que les réguliers ne sont point tenus d'inter-venir
dans lesdits synodes, à moins qu'ils ne soient curés, comme
le déclarent le concile de Trente, sess. 24, ch. 2, et plusieurs
décrets de la S. C. tou-chant cette question. Vasquez, Sanchez,
Busem-baum, etc., disent qu'ils sont obligés d'observer tout ce
qui ne porte point préjudice à leur règle; mais cela
non pas « quoad vim coactivam, » c'est pourquoi, en y contrevenant,
ils n'encourent au-cune peine, mais bien seulement « quoad vim di-rectivam,
» c'est-à-dire pour se conformer à la repu·
blique dont ils sont membres. D'autres docteurs néanmoins, comme
Suarez, Lezana, les Salin., etc., le nient (pourvu que cela ne soit point
nécessaire
(1) Sain». c. 3. § 5. per totum.
PODK LES C ONFESSECBS.
8l
pour prévenir le scandale ou qu'il n'y ait point quelque
religieux qui possède quelque office dé-pendant de l'évêque,
comme l'office de curé, de confesseur, de prédicateur, etc.).
Or, ils prouvent leur sentiment par le chap, ?, Dcprivil., in 6,
où il est dit que les réguliers ne sont point soumis aux
préceptes de l'évêque, excepté dans les cas
expri-més in jure. La raison du contraire, disent-ils en-suite ,
n'est valable qu'autant que les partis sont homogènes, et
non point lorsqu'ils sont hétérogènes, comme sont
les religieux qui, à la différence des sé-culiers,
ont plusieurs autres charges p'articulières. Du reste, .«ur
deux points, les religieux sont cer-tainement obligés à l'obéissance,
comme le déclare le concile de Trente, sess. 25, ch. xn. Le premier,
dans l'observation de l'interdit porté par l'évêque,
lorsqu'il s'agit des fruits de la terre; le second, dans l'observation
des fêtes ordonnées par l'évê-que (1); outre
les ordres touchant la célébration des messes, comme nous
l'avons dit au ?. 15 sur la fin. En outre, nous observerons que l'évêque
a le pou-voir de défendre aux confesseurs réguliers de con-fesser
dans leurs cellules, selon le décret de la S. C, du i5 septembre
1617, rapporté par le P. Fer-rari (2). De même encore il peut
défendre à tous les confesseurs de confesser les femmes et
les enfants hors du confessionnal, sous peine d'être suspendus de
la confession, en vertu du décret de la S. C. des évêques,
le 18 décembre 1693, rapporté encore par le même Ferrari
(5).
(1) Sa Im. tract. 18. a. 3. ij 4· ?'-'? totum. , (a) Ferrai·,
bill. V. Confess. 11. 8. (3) Ibid. n. io.
?. xxvi.
6
82
INSTRUCTION PRATIQUÉ
LXXIX. On demande, en second lieu, si lès évê-qùès
ont le pouvoir de visiter les personnes et les uaônastères
des réguliers. Communément parlant, il est certain ,
d'après le e. Nulli xvi, quœst. ?, et d'après
le concile de Trente, sess. a5, c. ????, que les personnes, comme les monastères
et les églises dès réguliers, sont exemptés
des visites de l'évêque (pourvu qu'il y ait douze religieux,
voyez le ?. 88)1; et, selon plusieurs déclarations
dé la S. C, les églises mêmes paroissiales des
séculiers qui dépen-dent d'es réguliers, et dont le
curé est religieux ,1e sont également ; poiir ce qui est
de ce dernier l'évê-que n*à pas même le pouvoir
de le punir, s'il man-quait même à ce qui concerne son office.
Cependant malgré cela, outre ta bulle de Grégoire XV,Inscruta-bilis,Benoît
XIV, dans sa bulle Firmantis, qui parut le î5 novembre 1744»
déclara que les curés régu-liers étaient soumis
aux corrections de l'évêqtte pour ce qui est de l'administration
des sacrements et même de leur conduite hors du
monastère. De ïhême, il
est certain que l'évêque peut visiter les paroisses qui sont
séparées des couvents et infliger même des peines à
leur curé, quoique religieux, et quand même il aurait été
présenté par soin monas-tère, s'il ne remplit point
comme il convient les fonctions d<? son ministère, ainsi qu'on
le voit par le chap, xv, In eos, clepricil., in 6, et par le concile de
Trente, sess. 7, e. vin. L'évêque a encore le pou-voir de
visiter les églises attachées et soumises aux couvents,
si elle sont desservies par des curés
séculiers, comme l'a déclaré
plusieurs fois la Sainte Congrégation, après
Bellarmin etBarbosa, à moins qu'elles ne fussent incorporées
aux couvents <pu qu'elles ne fussent d'aucun diocèse. En outre,
il
,P<JTJR LES CONFESSEURS.
#5
peut iriêhàe visiter les confréries de séculiers
fondées dans les monastères, mais seulement pour ce qui regarde
l'administration des biens, et non pour ce qui est du service de l'autel,
comme le déclare le concile de Trente, sess. 22, chap. vm. Toutefois,
l'on en excepté entièrement les confréries qui sont
d'un ordre particulier, comme de l'ordre du Ro-saire , des Garnies, etc.,
comme on le voit par le concile de Trente, sess. 25, en. xx, et paj plusieurs
décrets de la S. C. On en exdepte encore celles dont le préfet
est religieux, en vertu du privilège de Gré-goire XIII, contre
lequel ne peut prévaloir aucun usage contraire (1).
LXXX. On demande, en troisième lieu, si les évêques
peuvent visiter les cloîtres dés religieuses indépendantes.
Les Salm., avec Navar., San'eh., So-nac, prétendent qu'ils ne le
peuvent pas, d'après le canon Periculosi), de statu monach. in.
o, où l'on confie évidemment aux prélats réguliers
les soins que réclament les cloîtres de religieuses indépen-dantes.
Le concile de Trente (comme ils dispnt) ne s'oppose point à cela
dans la sess. 25, ch. ?, en vertu de laquelle les partisants du sentiment
contraire prétendent que les évêques sont les délégués
apo-stoliques pour ce qui est des cloîtres des religieuses indépendantes.
Il est vrai, ajoutent ces docteurs, que le concile enjoint aux évêques
de veiTlèr au ré-tablissement et à la conservation
des cloîtres:«In «omnibus monasteriis sibi subjectis
ordinaria, in » aliis vero apostolica auctoritate, «Mais, disent-ils,
par le mot in aliis, etc., le concile n'entend point parler des monastères
soumis aux réguliers, mais
(1) Sahnant. tract, 18, c. 3. n. 01 ad 56,
84
INSTRUCTION PRATIQUE
seulement de ceux qui sont immédiatement soumis au pape, ainsi
que Fa entendu, assurent-ils, saint Pie V, dans sa bulle Circa Pastoralis
; d'autant plus que le concile dans cet endroit, renouvelle le texte déjà
cité Periculose), au lieu de le révoquer. Malgré cela,
nous devons suivre le sentiment contraire, avec Barbosa, Gavan.,
Lezana, etc., parce que, quoiq-tie le concile de Trente ne soit point en
op-position à l'autre sentiment, néanmoins il est certain
que Grégoire XV s'y oppose formellement dans sa bulle Inscrutabilis,
de 1622 , où il est dit : 1° que les réguliers ne peuvent
assigner pour confesseurs à leurs religieuses que celui qui a été
approuvé par l'Ordinaire (nous observerons ici ce que en outre Benoît
XIV a ordonné dans sa bulle Pastoralis, le 5 août 1748, confirmant
la-bulle Apostolici ministerii de Benoît XIII, savoir, que si le
prélat régulier négligeait de donner au moins une
fois par an. un confesseur extraordinaire ou séculier, ou bien d'un
autre ordre, comme le prescrit le pape, l'évêque du diocèse
peut alors en assigner un lui-même) ;2° que Grégoire XV
ordonne que les ministres des monas-tères desdites religieuses rendent
compte à l'évêque de l'administration des biens qui
leur sont confiés ; 5° que l'évêque peut éloigner
le confesseur ou tout autre ministre du monastère, si le prélat,
malgré l'avertissement qu'il en a reçu, ne le fait pas lui-même;
4° que l'évêque peut présider à l'élection
de Vabbesse ; 5° enfin la bulle ajoute queTévêque peut
-corriger et punir, comme délégué du.Siège
aposto-lique, tous ceux qui manquent à ce qui concerne la clôture
des religieuses même libres. Il est bon de donner ici les propres
paroles de la bulle : « Tam » seculares, quam regulares, nullis
privilegiis tueri
POUR LES CONFESSEURS.
85
»se possinff, quominus si deliquerint circa personas »
intra septa degentes, aut circa clausuram monìa-» lium, etiam
regularibus subjectarum, ab episcopo, » tanquam ab hoc Sedis apostolicae
delegato , puniri » et corrigi valeant (1). » En outre, Barbosa
rapporte dans le même endroit un décret de la S. C., où
il est dit qu'on ne peut en aucune manière empêcher l'évêque
de visiter les cloîtres indépendants et soumis aux réguliers,
pour ce qui est de l'inspection du cloître, et que celui qui voudrait
l'empêcher, en-courrait, après avoir été averti
trois fois, l'excommu-nication, ipso facto, d'après la Clément.
Attendentes, de statu mon. (2). De plus, nous observerons que Clément
X et Clément XII ont prescrit d'observer la bulle de Grégoire
XV, «non obstante quacumque » contraria consuetudine. »
LXXXI. On demande, en quatrième lieu, si les évêques
ont le pouvoir de demander compte aux réguliers de l'héritage
abandonné avec la charge des messes, ou des legs, auxquels doivent
satisfaire les séculiers. Il paraît qu'ils le peuvent, comme
le dé-clare le concile de Trente , sess. 22, c. vin, où l'on
donne aux évêques la faculté de visiter tous les legs
pieux, « non obstante quocumque privilegio in con-» trarium
; » ce qui pourrait bien, comme le disent l'es Salmant. , rendre
probable ce sentiment. Mais cçux-ci soutiennent ensuite le contraire,
d'après plusieurs privilèges accordés aux réguliers,
et particulièrement par Sixte V, où l'on déclare les.
Biens des réguliers exempts de toute juridiction,
(i)Barb, de' pot. cpisc. alleg. 102. n. 7, et Salin,
c. 5. n. 37. ad So.
,·-,.-..·.
(3) De Alexand. de moriial. c. 6. § 4· ? 3.
$?
INSTRUCTION PRATIQUE
episcopale,» non obstantibus quibuscumque consu-ltationibus apostolicis
et conciliis (1).»
LXXXI1. Ondemande,eh cinquième lieu.si l'évèque
pour quelque motif peut procéder criminellement contre les réguliers.
ïious avons déjà dit que ces der-niers ne sont point
soumis aux évêques, hormis dans les cas exprimés injure.
Outre la matière de la célébra-tion de la messe et
de la clôture dés religieuses, il y a encore deux cas, d'après
le concile de Trente, où les évêques peuvent procéder
contre eux. Le pre-mier , si quelque régulier commettait quelque
délit pendant qu'il est hors du monasjèrc; conc. de Trente,
Sess. ?, ch. 3. Mais cette règle s'applique seulement à ceux
qui vivent continuelleinênt hors du couvent, et non point aux religieux
qui sortent du couvent pour quelque cause, s'oit de confession, de prédica-tion
, soit <}e toute autre affaire, simplement pour un certain temps, ou
bien encore qui habitent la ville, ou un autre heu indépendant du
monastère, pour affaire concernant le croître. Cepèndanj
l'on doute si l'évèque a lé pouvoir de, punir le délinquant
qui ferait un long séjour hors du monastère, avec la permission
île son supérieur. Les uns l'affirment, tels que Tàmb.,
Barbosa, Lezarià, etc., d'après plu-sieurs déclarations
de la S. C. ï)'àutres, comme les Salm.. avec Sancti., Sïlvest.,
Perina , etc., le nient, se fondant sur le, chap. Ex Rescripto, de Jurejur.,
où il est dit que celui qui sort du cloître avec la permission
de son supérieur est censé toujours l'ha-biter , ce qui fait
dire à ces docteurs que le concile, comme lesdites déclarations,
? entendent parler que
île ceux qui sont sortis da cloître sans permission,
'f ?
(1) Salm. tract, c. 3. n. 4°· ad 4?·
FOUR LES CONFESSEURS.
87
ou qui habitent un lieu si éloigné de leur prélat,
qu'ils ne pourraient être punis que très long-temps après
leurs fautes (1).
LXXXI1I. Le second cas est, si quelque reli-gieux vivant même
dans le cloître commettait au dehors un délit accompagné
d'un grand scandale pour le peuple, et si le prélat refusait de
le punir lui-même, comme le déclare le copcile de Trente,
sess. 25, ch. xiv. Or, parce que certains prélats fai-saient sortir
du diocèse ces délinquants afin qu'ils restassent impunis,
Clément VIII ordonna , l'année ^5g6, dans sa bulle Suscepti
oneris, que dans ce cas le supérieur, à la demande de l'évêque,
éfait tenu\ de rappeler le délinquant dans le temps prescrit
par l'évêque , et de le punir, sans quoi l'évêque
du Jieu où celui-ci avait passé avait le pouvoir de le châtier
lui-même (2). Les théologiens de Ç>alarpanque,aveç
plusieurs autres docteurs, observent i° que ce dé-cret du concile
n'a de force que lorsque le délit est notoire même de fait
; 2° qu'il est impuissant; contre les prélats délinquants
qui, en matière jiéFa-vprable, ne sont point compris sous
le nom de réguliers, comme le dit le concile ; 3° que l'évé/me.
ne peut procéder qu'après avoir plusieurs fois averti le
préjat de punir le délinquant, sans qu'il ait tenu compte
de ses avertissements. Néanmoins, si j'é-, Teque surprenait
le délinquant en flagrant délit, il pourrait l'arrêter
(comme on dit) , mais seulement pour le remettre aussitôt après
entre les mains de son prélat': et si le délit avait été
accompagné d!un grand scandale, il pourrait même le mettre
en pn-
(l) Salm. c. 3. n. 46. ad 48. (a) Ibid.
88
INSTRUCTION PRATIQUE
son pour le rendre ensuite au prélat dans l'espace de 25 heures.Le
prélat ensuite doit donner à l'évêqué
des preuves suffisantes comme quoi le châtiment du coupable a eu
lieu. Quoique l'évêqué puisse prendre quelques informations
pour en faire part ensuite au supérieur, néanmoins pour cela
il n'a pas le pouvoir de faire juridiquement le procès du coupable
; ce-pendant s'il l'avait fait par hasard, le prélat pourrait probablement
s'en servir pour procéder contre son religieux, comme le disent
les Salm., avec plusieurs autres docteurs (1).
"
LXXXIV. 2. Les réguliers ont le privilège de ne point
payer la dîme. Puisque l'occasion s'en pré-sente , il n'est
pas mauvais de faire quelques obser-vations sur la dîme. On entend
par dîme cette portion des fruits ou de l'industrie personnelle que
les fidèles sont tenus de donner pour fournir aux besoins des ministres
de l'Église. Les dîmes en substance sont dues en vertu du
droit divin natu-rel; mais pour ce qui regarde la quantité des dîmes,
c'est-à-dire la dixième partie, cela est de loi ecclé-siastique;
car la loi ancienne, comme judiciaire, a cessé, De là il
suit i° que le pape peut exempter de la dîme qui bon lui semble.
Le pape seul a ce pouvoir, mais non point les évêques ; seulement
ces derniers, en vertu du concile dé Trente, sess. ??, ch. ?, vi
et vu, peuvent appliquer les dîmes d'un lieu à un autre, et
joindre ou diviser les bénéfices (2); 2° que l'usage
peut bien encore exempter quelqu'un de la dîme, toutes les fois que
d'ailleurs le traite-ment des ecclésiastiques est suffisant; mais
il faut
(1) Salm. c. 3. n. 5o et5i.
(3) Ibid. tract. 18. c. ?. ?. 5a. ad. 54.
POUR LES CONFESSEURS.
89
que cet usage soit prescrit pendant quarante ans, sans interruption,·
quoique dans le principe il n'y ait aucun titre formel ou aucunebonne foi.
Pour la prescription, ensuite (entendue comme prescription et non point
comme usage), il faut qu'il y ait la bonne foi, ainsi qu'un lapsdetemps
de quarante années, et un titre; et lorsque le titre manque, il
faut qu'il soit remplacé par un Japs de temps immémorial.
Pour les dîmes futures, il peut y avoir des arrangements; mais le
pape seul a également le pouvoir de statuer là-dessus et
non point l'évêque, à moins toutefois que ces arrangements
ne dussent avoir lieu qu'entre deux églises. Nous disons futures,
parce que, pour ce qui est des dîmes passées, celui à
qui elles ap-partiennent est libre de les abandonner s'il veut (1).
LXXXV. Autrefois les dîmes provenaient, comme nous l'avons dit,
soit des fruits des biens, soit en-core de l'industrie personnelle; mais
aujourd'hui l'usage presque général veut qu'on ne paie la
dîme que des fruits des biens, tant meubles qu'immeubles, comme on
le voit par le chap, non est de decim- On doit donner les fruits en entier,
sans réduire l'espèce et la charge des impôts, comme
le dit S. Thomas (2) avec plusieurs autres docteurs communément,
d'a-près le chap. Cum non sit, de dec. (?).
LXXXVI. Tous les fidèles, même les princes, à l'exception
toutefois des pauvres, sont obligés de payer la dîme; néanmoins,
si ces derniers n'é-taient point réduits à une extrêmes
nécessité, mais seulement à une grave nécessité,
ils sont tenus,
(1) Salcn. tract 18. c. 4. ?·?5£. (a) a. 2. q. 87. a.
2. a<jl 4? (5) Sala), c. 3.'ii. "58V.....
9Q
INSTRUCTION PRATIQUE
lorsqu'ils seront plus fortunés, de payer les dîmes arriérées,
comme le disent Suarez, Laymann, Cas-tropqlao, les Salm., etc. (?). En
vertu de la loi -commune,les clercs, commjjlei. religieux, et même
les curés , sont obligés de payer la dîme de leurs
biens patrimoniaux, quoiqu'ils aient été assignés
comme titres (le l'ordination , mais non pas de biens bénéficiaux,
comme l'jenseigne saint Thomas (2). Pour ceux ensuite qui ne paient point
la dîme, voici ce que dit le concile de Trente, sess.
aS,
,1
* -> ?» ?.
, .
'
(? '
chap. xii : « Qui decimas subtranunt, vel impe-«diunt,
exoommunîce'ntur, neque ab illo crimine, «nisi plena restitutione
secuta, absolvantur (jj). »
LXXXVII. Mais ce qui est de droit antique, c'est qu'en vertu de plusieurs
privilégesponlificaux, tous les réguliers, même les
religieux de quelque ordre que ce soit (comme aussi les chevaliers de Malte),
sont exemptés de payer les dîmes, non seu-lement personnelles,
mais encore les dîmes des bîeqs fonds, soit propres (quoique
cultivés par des colons), soit affermés, soit tenus en emphy-téose
(4). Néanmoins les biens soumis à la dîme, qui passent
entre les mains des religieux, restent toujours sous leur même charge;
comme on le voit par plusieurs déclarations de la S. C. et de la
Rote, rapportées par PignatelU (5).
LXJL&VIII. 5. Autrefois il était défendu aux ré-guliers
de fonder de nouveaux couvents ou d'aban-donner ceux qui étaient
déjà fondés, sans la per-
(1) Salm. c. 3. n. 5g.
(a) Ibid. a 4· in corp. et ad 1. ex c. si quis laicus 16. q.
1.
(5) Ibid. ?. 6?. ad ad 62.
(4) Ibid. tract. x8.n. 7a. ad 70.
(5) Pignat. t. I. cons. 55. et t. VTII. n. Q.
POtlB LES CONFESSEURS.
Ql
mission expresse du pape, chap, ? de excess, prœlat. jn 6, ex cap.
un. de rei. don. in 6. Mais depuis ils ont obtenu avec le temps divers
privilèges qui plus tard ont été limités par
Urbain VIII. En effet, ce pontife, dans sa bulle Romanus pontifex qui parut
en 1624, leur enjoignit dene fonder aucun nouveau monastère, sans
observer toutes les formalités du canon du concil. de Trente et
de la bulle de Clé-ment VIIJ, Quoniam qd institutam. Ainsi donc»
pour fonder un nouveau couvent, trois choses sopt nécessaires aux
réguliers : i° la permission, de Vé-yêque. Pour
ce qui est de celle du pape, }es uns, comme Barbosa, Tamburini, disent
qu'elle esj; p^-çessaire, s'appuyant sur une déclaration
de la S. p. Mais les Sal niant., avec Lezana, Suar., Rpdri., etc., prétendent
le contraire; 20 II faut qu'ils aient le consentement des personnes intéressées
et particu-lièrement de tous les couvents qui sont dans un rayon
de quatre milles, sans quoi l'évêque ne peuj donner ladite
licence, à moins toutefois que ces der-niers refusassent injustement
de donner leur appro-bation (2). Les carmélites néanmoins
ont le privi-lège d'empêcher les autres ordres de venir s'établir
dans un espace de i4o cannes de leur propre cou-vent, et les mineurs dans
une espace de 3oo. Mais les minimes et les jésuites ont le privilège
de ne pas se conformer à cette règle. Nous observerons ici
que tous ces privilèges peuvent être communiqués à
d'autres religieux. Cependant, pour ce qui est des privilèges qui
regardent les 140 cannes de distance, l'usage veut qu'ils n'aient point
lieu pour les cou-vents que l'on bâtit dans les villes; 3° il
faut que le
(0 Salin, tract. 18. c. 3. a. n. 124. ad. i3i. (a) Ibid. ?. 13 7. ad
i4o.
g2
IÏTSTRBCTIOtf PRATIQUE
nouveau monastère puisse loger commodément douze religieux,
et que, d'un autre côté, les aumônes et les revenus
lui donnent l'espérance probable de pouvoir fournir à leur
subsistance. Dans le cas en-suite où le monastère (on parle
ici de ceux qui ont été fondés depuis la bulle de
Urbain VIII, qui parut l'an 1624) ne pourrait contenir le nombre de douze
religieux, la S. G. a ordonné par plusieurs décrets confirmés
par Grégoire XV et Urbain VIII, qu'il resterait entièrement
soumis à l'évêque de la ma-nière suivante :
« Ordinarii loci visitationi, correc-tioni, atque omnimodae juridictioni
talia monaste-ria erecta, absque eo quod 12. fratres in eis va-»
leant habitare, et de facto habitent, subjecta esse » intelligantur
( 1 ). »
Les mêmes conditions sont également de rigueur dans les
fondations des couvents de religieuses. Nous observerons, en dernier lieu,
que le concile de Trente et la S. G. ont défendu formellement de
fonder des couvents de religieuses dans les lieux non habités (2).
LXXXIX. Les conditions dont nous venons de parler ne sont point nécessaires
pour créer des hos-pices de religieux, comme le remarquent Perrin,,
Tamburini; etc., pourvu (comme le limite Lezana) que dans ces hospices
on ne célèbre point la messe et qu'il n'y ait point d'église
\{l·). Elles ne sont point également nécessaires dans
les translations de couvent, selon le sentiment des Salmant., de Nav.,
de Barbosa, Perrin, Lezana, qui disent qu'on n'a pas besoin pour cela d'obtenir
le consentement ni
(1) Salm. tr. 18.c. 5. a. 12g ad i5o.
(2) Ibid. ?.·?54.'
(3) Ibid. ?. !52.
POUR LES CONFESSEURS.
<)5
du pape, ni de l'évêque, ni même des autres cou-vents,
pourvu que ces translations ne portent aucun préjudice à
personne ; car, ajoutent ces docteurs, ces couvents .avaient reçu
autrefois ce privilège de plusieurs pontifes, et il n'a été
limité ensuite que pour les nouvelles fondations que l'on ne peut
point regarder comme une translation, attendu que cette dernière
n'est qu'un simple changement d'un lieu à un autre plus commode
situé dans le même pays ou dans lé voisinage. Or, lorsqu'une
transla-tion de couvent a lieu, les religieux jouissent tou-jours de tous
les biens et de tous les droits du mo-nastère'abandonné (t).
En outre, ils peuvent encore en vertu de la concession que leur en ont
faite Ur-bain VIII et. Innocent VIII, unir et incorporer "un couvent à
un autre, lorsque les revenus et les au-mônes de] ce couvent sont
trop modiques (2). Ils peuvent encore retourner, s'ils veulent, dans le
mo-nastère abandonné, à moins que leur retour ne cause
quelque préjudice aux autres couvents (3). Déplus, les supérieurs
des monastères, en vertu de la concession que leur en a faite Sixte
IV et le même Urbain VIII, peuvent supprimer les couvents misé-rables
et transporter leurs biens à des monastères plus considérables.
Nous observons ici que les cou-vents donnés par l'Université
doivent être remis entre les mains de l'évêque, lorsqu'ils
sont aban-donnés ; mais s'ils se sont fondés eux-mêmes
par leurs propres revenus ou par leurs aumônes, ce sont les religieux
qui en restent possesseurs; c'est pour-
(1) Salm. Ir. 18. c. 5. n. i35 ad l43. (3) Ibid. ?. ?5?. (3)
Ibid. ?. ?48.
<)4
INSTRUCTION FSATIQTJÉ
quoi ils peuvent disposer de ces couvents comme bon leur semble (?).
XC. 4· Les réguliers ont le privilège d'élire
eux-mêmes le j"ge conservateur qui juge toutes lés causes
dans lesquelles les religieux comparaissent comme coupables , et même
encore comme ac-teurs; pourvu toutefois que tout leur crime con-siste dans
des injures et dans des violences mani-festes (2).
XCI. 5. Les réguliers ont le privilège de lais-ser
ensevelir dans leurs églises tous ceux qui le demandent. Arrêtons-nous
ici sur quelques considé-rations principales relatives à
la sépulture dont les Sal m. (?) ont parlé fort au long.
Et d'abord, tout individu qui a atteint l'âge de puberté peut
se faire enterrer où il veut. Les évêques le peuvent
égale-ment ; mais si avant de mourir ils n'ont point choisi d'endroit
pour leur sépulture, on doit les ensevelir dans la cathédrale
(4)· Néanmoins les religieux doi-vent être ensevelis
dans le monastère, quand même ils seraient morts hors de son
enceinte, pourvu que ce né soit point dans un endroit très
éloigné du monastère ; et s'ils ne l'avaient point
choisi pour le lieu de leur sépulture, on doit tout de même
les y enterrer, quoiqu'ils soient morts dans une maison avec la permission
de leurs prélats (5). Il en est de tnême pour les commensaux
et les domestiques qui sont en activité de service et qui vivent
dans le cou-Vent sous la direction de son prélat; ils peuvent
(1) Salm. tr. 18. c. 3. n. 147. (a) Ibid. n. i5a ad 78. (3) Ibid. p.
6. (?) Ibid. ?86. (6) Ibid. n. 187.
POUR 1ES CONFESSEURS.
g5
encore recevoir tous lès sacrements des religieux, à
l'exception du sacrement de baptême et du ma-finge (i). Il y a de
graves peines portées contre les religieux et les clercs qui font
promettre, soit par serment ou par vœu, soit encore sur la foi, de se faire
ensevelir dans leur propre église (a)..un doit priver delà
sépulture ceux qui meurent dans l'im-pénitence finale et
que tout le monde sait ne pas s'être confesses dans le cours de l'année
et n'avoir point communié au temps pascal ; il en est de même
pour les hérétiques, les excommuniés, pour ceux qui
ont donné la mort dans un transport de colère, à moins
qu'ils n'aient donné ensuite des signes de pénitence; pour
ceux qui meurent eh duel, quand même ils auraient donné des
signes de pénitence, comme le déclare fe Rituel romain. 11
en est encore de même pour les pécheurs manifestes, quelle
que soit la nature de leurs péchés, et pour ceux qui meu-rent
in flagranti crimine (comme oh le voit dans le chap. Fures de furto ) saris
donner des signes de repentir, puisqu'alors on présume qu'ils sont
morts même dans le péché, comme le disent communé-ment
les docteurs et le Rituel, comme encore l'af-firment Lezana et Sanchez
(3). Celui qui ensevelit un hérétique óu son complice,
un excommunié pu-blic ou un usurier, encourt même l'excotrimunicà-
· tion; et on doit, s'il est possible, exhumer ces dé-funts.
Du reste, on ne doit priver personne de la sépulture dans quelque
cas que ce soit sans la
(i) Salm. tr. i8. c. 3 p. 6. n. 188. ai4et ai5. (a) Ibid. ?. îgi.
(3) Ibid. 109.
g6
INSTRUCTION PRATIQUE
sentence de l'évêque ou du prélat, si le mort est
un religieux (1).
XCII. Mais reprenons notre sujet et parlons des réguliers. Ici
nous ferons remarquer plusieurs cho-ses qui ne nous paraissent point ^inutiles.
i° Tout clerc ou séculier peut se faire ensevelir dans l'é-glise
des réguliers ; et lorsque quelqu'un y a la sépulture de
ses ancêtres et qu'il meurt sans choisir d'autre église, les
réguliers peuvent très bien Vense-velir à côté
de ses ancêtres (a). 2° Les curés qui exi-geraient davantage
pour ensevelir dans l'église des réguliers que dans la paroisse,
afin de détourner les fidèles de s'y faire enterrer, encourent
l'excom-munication papale portée dans la bulle de Clé-ment
VIII, citée par les Salmant. ; et quoique cette bulle n'ait été
faite qne pour les curés de l'Inde, néanmoins Lezana, Perin
et les Salmant. pensent qu'elle doit s'appliquer à tous les prêtres
en géné-ral (?). ?° Lorsqn'il y a un mort à ensevelir
dans leur église, les réguliers doivent mander le curé
et l'at-tendre ; mais si ce dernier refusait de venir, ou s'il venait trop
tard, les réguliers ont le pouvoir d'enlever le cadavre et de le
conduire à leur église , selon le sentiment commun de Barbpsa,
Lezana, Peyrin. et d'autres avec les Salmant. , et d'après plusieurs
décrets de la S. Ç. (4)· L'office doit être
recité alors en l'honneur du mort, non par le curé ou le
chapelain , mais par les réguliers eux-mêmes.
(?) Salm. tr. 18. c. S. p. 6. aoa et 204. (a) Ibid. ?. 9?5.
(3) Ibid. ?. ao6.
(4) Ibid. ?. 2?8 et 209.
POUR LES CONFESSEURS.
97
Le curé ne peut pas non plus remplir aucune fonc-tion dam l'église
des réguliers, ni forcer les héri-tiers à faire célébrer
les messes ou une partie des messes dans la paroisse, comme le déclarent
encore plusieurs décrets de la S. C. La même règle
a éga-lement lieu pour les monastères des religieuses in-dépendantes
(1). Observez néanmoins que dans les églies des religieuses,
on ne peut pas ensevelir au-cun laïque sans la permission de la S.
C, à moins que ce laïque n'y eût le droit de sépulture
(2).
XGIII. On demande si les réguliers sont tenus de payer la portion
canonique à l'évêque ou au curé. Il y a deux
portions canoniques : l'une est la portion episcopale, et c'est celle qu'on
doit donner aux évêques pour toutes les donations causa mortis,
et tous les legs laissés aux églises ou aux lieux pieux de
leur diocèse, -comme on le voit par la Clémen-tine Dudum
de sepult. Cette portion a été tantôt la troisième
, tantôt la quatrième partie ; mais In-nocent lit a déclaré
, dans le chap. Requisitis de testam, , qu'il fallait s'en rapporter à
l'usage pour la quantité des portions canoniques (3). L'autre est
la portion paroissiale, que l'on appelle plus pro-prement la taxe funéraire,
et que l'on donne au curé sur les funérailles, sur les legs
pieux et sur tout ce qui revient à l'église de la paroisse
où a été enterré le défunt. Cette dernière
a également éprouvé divers changements; mais c'est
toujours SUE- l'usage qu'on doit se régler (4).
(1) Salm. tr. 18. c. 3. p. 6. n. sis et aio,
(a) Lib. IV. ?. 6a.
(3) Salm. tr. 18. c. 3. n. ai6.
(4) Ibid. n. 339, ad aS3.
ï. XXVI.
XGIV. Cependant, en parlant dès réguliers, »ó*À
disons que* pour ce qui est de là portion épisèb*
pale , leurs monastères, tant d'hommes que de femmes > en sont entièrement
exempts , d'après l'Extravagante Inter cunctas, s. De ?quibuscumque
de privil. (1). Quant à la taxe funèbre, tous les régU·
liers étaient tenus autrefois de la payer en vertu dû droit
commun. Mais aujourd'hui , d'après leurs privilèges, d'après
le concile de Trente, sess. s5, ch. xiii, et la bulle de saint PieV, Etsi
mendicantium de i5i)7, ils ne sont obligés de la payer que pour
les monastères qui, malgré la prescription de qua-rante ans
avant le décret du concile, avaient l'ha-bitude de la payer. C'est
ainsi que le prouvent leS Salmant., avec le sentiment commun des docteurs
et plusieurs déclarations de la S. C, s'appuyant sut les privilèges
nombreux qui leur ont été accordés par les pontifes
et principalement par Sixte ÏV,qui impose la peine d'excommunication
et la privation des bénéfices auxcurés qui voudraient
exiger la sus-dite taxe (2). On en excepte néanmoins les couvents
qui la paieraient en vertu d'un traité préexistant ou d'après
un bsage immémorial (?).
§ II. Des privilèges des régitliers tn particulier.
95, 96, 97. J. Du pouvoir d'absoudrelears sujets dès cas et
censures.
98. De la réserve des cas, etc.
99. Du pouvoir qu'ils ont à l'égard des séculiers.
(1) Salm. tr. 18. c. 3. n.217. (a) Ibid. ?. 2?8. ad aa8. (3) Ibid.
?. 229 "d a53·
POUR IBS CONFESSEURS.
gÇ)
100. S'ils peuvent absoudre des cas réservés aux
évêques par le droit ou l'usage.
101. S'ils peuvent absoudre des cas réservés au
pape.
102. Si en voyage ou en vertu de la bulle De la croisade, etc.
103. Si les confesseurs peuvent être de nouveau examinés
par l'évêque.
io4> it>5. II. De la dispense touchant les irré-gularités.
106. III. De la dispense dans les préceptes ec-clésiastiques,
etc.
107. IV. Touchant l'office.
108. V. Touchant la dispense des voeux et ser-ments.
109. Touchant le vœu de chasteté des époux et des
épouses.
110. VI. Du privilège des religieux, des novices et des
domestiques d'être confessés par quelque prê-tre que
ce soit.
in. Des religieux qui sont en voyage.
112. Si pendant le jubilé, etc.
De n3 à 116. VII. Touchant la réception des ordres.
De 117 à 160·· Touchant le pouvoir de conférer
lès ordres.
121 et 120. VIII. Touchant la célébration des messes.
125. Touchant la faculté de donner la commu-nion.
De 124 à 128. Touchant la prédication.
XCV. Du pouvoir qu'ont les prélats réguliers touchant
l'absolution des cas réservés et censurés. Il faut
distinguer ici le pouvoir à l'égard des sécu-
100"
INStRTJCTION PRATIQUE
liers. Sous le nom de prélats réguliers sont compris
non seulement les généraux , les provinciaux et leur
vicaires subrogés en leur place, mais même tous les supérieurs
looaux ou recteurs, comme aussi leurs vicaires qui les remplacent, en leur
absence, au moins pendant un jour entier ; ainsi pensent
communément les docteurs (1), d'après le ch. Ab-batis , de
privil. in 6. Or, tous ceux-ci peuvent absoudre leurs sujets i° de
tous les cas et censures non réservés au pape, quant! même
elles auraient été fulminées ab homine
par sentence spéciale, comme le disent les
Salman t., avecLezana, Cantl., Pelliz., etc., d'après
les privilèges accordés par Paul V, Sixte IV et Eugène
IV (2). Et ce qui a lieu pour les profès a également lieu
pour les novices ; par conséquent ils peuvent être absous
par les pré-lats réguliers des cas réservés
aux évêques, qu'ils ont encourus non seulement depuis leur
entrée dans le monastère , mais même auparavant, comme
le prétendent les Salmant. avec Bonacina, Petlizia et le P. Mazzotta
avec Sanchez et Tamburini (?). Les Salmant. et Mazzotta en disent autant
avec Peirin. «t Tamb. (4) pour ceux qui sont sur le point d'être
reçus, comme , par exemple, s'ils faisaient leur no-viciat dans
le monastère pour prendre l'habit ; et cela en vertu de la bulle
de Clément VU, rapportée par Candide, Rodriguez et les Salmant.
(5), où l'on accorda aux provinciaux réguliers et à
leurs vicaires ou autres délégués la faculté
d'absoudre les novices
(1) Salm. tr. 8. c. 5. n. 1. (a) Ibid. ?. a.
(3) Ibid. e. 5. ?. 87 et Mazz. t. II. de re. e. a. q. 5.
(4) Ibid. n. 88. et Mazï. loc. cit.
(5) Ibid· tract. 40. de couf, e, -a. n. 80.
POUR LES CONFESSEURS.
ÌOt
de l'ordre, de tous les cas (à l'exception de ceux de la bulle
Cœnce) encourus avant leur entrée, et des censures attachées
à ces cas. A cela, quelqu'un pourrait opposer le décret d'Urbain
VIII, rapporté dans notre ouvrage(i),et dans lequel il est dit que,
dans la confirmation des privilèges obtenus par les-réguliers
depuis le concile de Trente, on ne com-prenait point les nouveaux ni ceux
qui avaient été supprimés par le concile , comme par
la S. C, sa-voir d'absoudre des cas réservés à l'ordinaire.
Les Salmant. répondent bien, il est vrai, à celte objec-tion
dans l'endroit que nous avons cité; mais leur réponse
n'est point convaincante, comme je l'ai fait observer dans mon ouvrage
(2). La réponse, à mon avis, la plus satisfaisante, est celle-ci,
savoir : que le décret d'Urbain VIII n'entend parler que des
séculiers, de même que la propos. 12, con-damnée
par Clément VII, mais non point des no-vices qui, dans les choses
favorables, au dire des docteurs, sont réputés comme religieux
; ainsi pen-sent Sanchez, Suarez, Castr., Lezana, etc., avec les théologiens
de Salamanque et plusieurs autres (3). Cela est d'autant plus vrai que
Clément VIII l'a également déclaré , et que
Diana (4) fait mention d'un privilège accordé aux jésuites
(lequel, en se communiquant, s'étendait à tous les religieux)
de pouvoir communiquer aux novices tous les privi-lèges de la compagnie.
Néanmoins Bonac., Pelliz.,
(1) Lib. VII. ?, 95.
(a) N. io3.
(?) Salm. tr. 24. c. 5. n. 85.
(4) Diana part. 3. tract, a. resp. 73.
103
INSTRUCTIO!» PRATIQUE
et les Salmant. (?) en exceptent le cas où l'évêque
aurait déjà porté son jugement sur le novice avant
qu'il entrât au monastère ; parce qu'alors, disent-ils, l'évêque
pourrait l'en faire sortir et lui infliger une punition. Ce que nous venons
de dire des novices , le P. Mazzota, dans le lieu déjà cité,
le dit égale-ment avec Peirin. des domestiques des monastères
réguliers, pourvu qu'ils fassent comme partie de la communauté
et qu'ils soient comme des commen-saux perpétuels, ainsi que le
déclare la bulle Superna de Clément X.
XCVI. En second lieu, les réguliers peuvent absoudre leurs sujets,
les proies comme les novices, ainsi que nous l'avons dit plus haut (2),
de tous les cas occultes réservés au pape, de la même
manière que les évêques peuvent absoudre leurs sujets,
en vertu du chap. Liceat; et cela, d'après le privilège de
saint Pie V (rapporté par les Salm. et Concina), confirmé
par Benoît XIII, dans sa bulle Pretiosus, de 1727, où il accorda
aux réguliers le pouvoir d'absoudre des cas même de la bulle
Ccenœ, à l'ex-ception des rechutes dans l'hérésie,
de l'altération des lettres apostoliqnes, et du transport des choses
prohibées aux infidèles. Nous observerons que dans ce passage
on accorda au général des domini-cains le pouvoir de dispenser,
même dans l'irrégu-larité, pour homicide commis par
ses sujets, pourvu qu'il n'eût point été prémédité
et consommé dans l'enceinte du monastère (?); mais, depuis
lors, Clé-
(1) Salmant. tr. 34. c. ?. ?. 87.
(a) Lib. VI. ?. 5?5. V. Eamdem in fin.
(?) ?. ?. ???.
POOR IBS CONFESSEDÇa.
nient XII» dans sa bulle Romanus, qui parut Je So mai 1752, a
révoqué toutes les lettres et consti-tutions, ainsi que tous
les privilèges et facultés ac-cordés par Benoît
XIII, réduisent tout à son état primitif, comme si
les susdites constitutions n'avaient point été faites. En
outre, comme quelqu'un pour-rit peut-être prétendre que la
révocation du privi-lège des réguliers d'absoudre
les hérétiques, fajte par le concile de Trente, s'applique
exclusivement aux autres, mais non point aux religieux, nous ob-servons
que la S. C. a décidé qu'elle s'appliquait à tous
en général, comme le rapporte le P.Ferrari (1).
XCV{I. En troisième lieu, les réguliers ont le pouvoir
d'absoudre leurs sujets de l'excommunica-tion encourue par violence, même
grave, très grave et publique, faite non seulement par les religieux
du roêine ordre, mais encore des autres ordres , e,t même par
les clercs séculiers; ainsi pensent Castr., Roncaglia, Salman t.,
Lacroix, etc., d'après les pri-vilèges accordés par
Boniface IV et Clément Vlll. Ici nous observerons que si la violence
était légère, ?? bien occulte, le religieux qui en
est l'auteur peut se. faire absoudre , s'il le veut, même par l'évêque,
mais avec la permission de son prélat (s). Nous avons dit sujets,
parce que les réguliers n'ont point le pouvoir d'absoudre les séculiers;
car ce cas a été limité à ceux d'Italie, et
qui sont hors de Jlome, par Clément VIII, comme nous le dirons en
peu de mots dans le n. 0,9.
XGVIII. JNTous observerons en outre que les pré-lats réguliers,
en vertu de la concession que leur en
(1) Ferrai·. Bibliolh. t. I. verb, abeolvere. (?) Lib, Vil.
p. JP7.
??4
INSTRUCTION PRATIQUE
a faite Clément VIII, peuvent, s'ils le jugent utile, se réserver
onze cas, mais non pas davantage, sans le consentement du chapitre général,
ou au moins provincial pour les provinces. ??· les cas qu'ils peu-vent
se réserver,nous les avons insérés au ch. xvi, n.
i3o. Pour ce qui est du cas où le prélat refuse-rait la permission,
et de savoir si les religieux, pour la première fois, peuvent être
absous des cas ré-servés , voyez au même chap, le ?.
i34·
XCIX. Pour ce qui concerne les séculiers, les re-ligieux mendiants
jouissaient autrefois du privi-lège de les absoudre de tous les
cas et censures ré-servés , soit par le pape, soit par les
évêques. Mais, plus tard, Clément VIII, dans un décret
de l'an 1602, confirmé par Paul V en 1617, et par Urbain VIII en
1627, limita ladite faculté, et ordonna que les réguliers
habitant hors de Rome et dans l'Italie ne pourraient absoudre les séculiers,
ni des cas de la bulle Cœnœ, ni de ceux qui suivent, savoir : i° de
la violence d'un clerc ;· 20 du duel ; 3° de la violation de
l'immunité5 4° de la violation de la clôture des religieuses
avec mauvaise intention ; 5° de la simonie confidentielle dans les
bénéfices, et enfin de tous les cas que les évêques
se sont réser-vés. Ainsi donc, autant en vertu du décret
de Clé-ment VIII qu'en vertu de la bulle de Grégoire XIII,
Cum sacra, et principalement de la proposition 12, condamnée par
Alexandre VII, laquelle disait : « Mendicantés possunt absolvere
a casibus episcopis » reservatis, non obstante ad id episcoporum
facul-» tate ; » aujourd'hui l'on ne doit plus douter ( ce
que disent quelques uns ) que les réguliers ne peu-vent point absoudre
les séculiers des cas réservés par les évêques;
de même ils ne peuvent pas non plus
POUR LES CONFESSEURS.
??5
les absoudre des cas de Clément, quand' même ils seraient
occultes (1), contrele sentiment duP. Viva; puisque la faculté qu'ont
les réguliers, par la bulle de saint Pie V, rapportée au
n. 96, de pouvoir ab soudre les cas occultes, comme les évêques
l'ont également en vertu du chap. Liceat, n'est seulement qu'à
l'égard de leurs religieux, et non point des séculiers ;
néanmoins ce que nous regardons comme probable, avec Viva, Comitole,
et même le P. Con-cina, c'est que les réguliers ont le pouvoir
des cas que l'évêque s'est réservés à
lui-même dans le sy-node , mais non de ceux qu'il a exprimés
dans la table; parce qu'on présume alors qu'il en a voulu accorder
la faculté à tous les confesseurs qu'il a lui-même
approuvés (2).
C. On doute, en premier lieu, si les réguliers ont le pouvoir
d'absoudre les séculiers des cas réservés aux évêques,
non pointa se, mais in jure, ou bien des cas réservés aux
évêques par l'usage, comme sont l'avortement du fœtus animé,
et des autres que nous avons mentionnés au n. 46. Viva, Bordone,
Cabassut, Milan te et autres le nient; parce que, disent-ils, dans les
décrets de Paul V, d'Urbain VIII et de Clément X, il est
défendu aux réguliers d'ab-soudre les laïques des cas
réservés aux évêques , « à »
casibus eisdem ordinariis reservatis ; » telles sont les paroles
du décret d'Urbain VIII. Néanmoins , Concina, Lacroix, Sporer,
Salm., Lesana, Sanchez, Peyrin, etc., l'affirment avec plus] de probabilité
; et à ces derniers se joint même (après s'être
rétracté) le P. Viva dans sa morale. La raison en est que
les
(1) Lib. VII. u. 59g. V. certum est. et lib. VII. a, g5. (a) Lib. VILn.
100.
paroles que nous venons de citer d'Urbain, YIJI et de Pjiul V, doivent
s'entendre des cas que les évê-ques eux-mêmes se sont
réserves; car ces décrets, comme je l'ai dit su, numéro
précédent, ne font que confirmer le décret de Clément
YHI, dans lequel on ne parle que des cas que les évêques se
réservent à eujf-mêmes, « nec a casibus quos
ordinarii reser-»varunt, aut in posterius^ sibi reservabunt;»
telles, sont Jes, propres paroles du pape Clément. C'est d'autant
plus, vrai, cqpinie le dit le P. Suarez, que les ca$ réservés,
a^£ évêques «? jure doivenl plutpt être
regardés çomrpe délégués que réservés,
Cepen-dant nous observerons qu'il n'en est pajnt ainsi pour la viplenpg
faite à un pjerc, ni pour tqu§ le§ autres cas que les
évêques se réservent pqrticuji^-remen|; à eu^-mênjes
5 pujs,qup (cpmme nous, l'^vops dit au numérp précédent),
9. l'égard de ces d,e.rr niers, le pqqvoir ej> a été
eptièrement qté auç ré-r guliers (1),
CI. On doute, en second lieu, si les réguliers peu-vent absoudre
les séculiers des cas réservés au papç Quelques
uns, en petit nombre, c'est-à-dire Viva, avpG Borcfoije et Florono,
le nient, s'appuyanï sur les mêmes décrets de Paul V
et d Urbain VI{I, où il fut également défendu aux
réguliers d'absou-dre des cas réservés au siège
apostolique; mais Bonacina, Ayersa,les Salmant.,Pellizia, Epdrigue?, Podesta^
Peirjn, }'af£rment plus communéiiiept eç plus probablement,
avec le P. Viva lui-même dans sa florale (bien que ce dernier ne
l'affirme seule-ment que çles, cas, pptjtjficap^ occultes); et cela,
d'après le privilège de Paul III accordé l'an »54S
(1) Lib. VII. n. 99.
ÎOtJR IBS CONFESSEURS.
IO?
aux jésuites, où il est dit qu'ils pouvaient absoudre
les séculiers e ab omnibus peccatis, etiam sedi s apostolicae reservatis,
exceptis contentis in bullâ » Ccence. ?» C'est en vajn
qu'on voudrait nous opposer les susdits décrets de Paul V et d'Urbain
VIII? parce que ceux-ci ( comme nous l'avons dit au nu-méro précédent
) ne parient que des cas cités dans le décret de Clément
VIII (que les susdits pontifes voulurent confirmer), dan.s lequel on ne
fit excep-tion que des cas de la bulle Çœnœ et de quelques autres
(1). Il faut observer de plus que cette faculté n'est valable que
pour la seule justice intérieure. Pour ce qui est ensuite des abbés
qui qnt la juri-diction quasi-épiscopale, voyes ce que nous avons
dit au n. 3i.
Cil. Observez qu'autrefois les confesseurs ré-guliers , en vertu
de la concession que leur en avait faite Grégoire 3ÎIII et
Eugène IV, pouvaient» lorsqu'ils étaient en voyage,
entendre les confes-sions, non seulement des sujets du diocèse où
ils étaient approuvés, mais même de tous, les autres.
En outre, d'après la bulle de la Croisade, lorsqu'ils étaient
approuvés en un lieu ils l'étaient également dans
tous les autres (2). IVJais Innocent X ordonna dans la suite que les réguliers
ne pourraient point confesser dans aucun diocèse sans avoir la permis-!
sion de son ordinaire, quand bien même ils auraient le privilège
de la Croisade, comme le déc|ara Inno-eent XII dans sa bulle Cum
sicut, de j^oo («>)·
CUI. Nous observons en outre, qu'autrefois en-
(1) Lib. VIL n. 96 et 97;
(a) Salm. tr. 18. c. 4· n. 71 et 73.
(3) lib. VI. n. 548. V. tertia, et n. 549.
INSTRUCTION PRATIQUE
core, en vertu de la Clement, dudum de specul., les réguliers,
une fois approuvés sans restriction par Févêque, ne
pouvaient plus être forcés de passer un nouvel examen. Néanmoins,
saint Pie V, dans l'Extravag. Romani pontificis, déclara que les
évê-qui succédaient pro majori quiete suœ conscientiae,
avaient le pouvoir de les examiner de nouveau; mais depuis, Grégoire
XIII, dans sa bulle In tanta negotiorum, etc. (rapportée par Navarre
à la fin de son manuel), pour mettre fin à toutes les con-testations
qui s'élevaient au sujet des réguliers, réduisit toutes
les déclarations de saint Pie V, et principalement celle de l'approbation
des confes-seurs réguliers, à l'ancien état de la
disposition du concile de Trente, qui dans la sess. 2 3, ch. xv , n'exigea
autre chose pour' les réguliers que d'être approuvés
par Févêque. C'est ce qui fait dire à plusieurs docteurs,
tels qu'Aravius Dicastillo, Vil-lalobos, Delbène, etc., d'après
les Salmant. (1), que les réguliers approuvés et examinés
par-Févêque ne pouvaient pas denouveau être examinés
par son successeur. Toutefois le contraire est soutenu par Diana, p. 5,
tr. 2, resp. 27, et Luzana, Boss., Bor-done, etc., qui s'appuient sur un
décret de la S. C. (rapporté par Lezana et par Diana), où
il fut dé-claré que, nonobstant la bulle de Grégoire
XIII, Févêque qui succédait pouvait examiner eeux qui
avaient été approuvés par son prédécesseur;
et Diana, ainsi que les Salmant., attestent que cela se pratique ainsi
aujourd'hui parmi les évêques. Cepen-dant les Salmant (2),
avec Viilalobos, prétendent
(1) Salm. tr. 18. c. 4. n. 119. (a) Ibid. ?. i9o.
POUR IE9 CONFESSEURS.
log
avec probabilité qu'en vertu de la composition de saint Pie
V, et de la déclaration de la S. C., l'évêque qui succède
peut très bien faire subir un examen au prêtre ou au régulier
de la capacité desquels il doute; mais il n'a point le pouvoir de
suspendre par un édit général tous les confesseurs
réguliers, jusqu'à ce qu'ils aient passé un nouvel
examen. Nous ferons remarquer en outre que quand même l'évêque
ré-voquerait en général toutes les licences, cette
révo-cation n'atteint point les réguliers qui ne sont point
compris dans les choses défavorables, à moins qu'il n'en
soit fait une mention formelle (1). De plus, nous observerons que le vicaire
capitulai ? e sede vacante, n'a point le droit d'appeler à un nouvel
examen les réguliers, selon le privilège qu'ils en ont reçu
de Clément IV (2). En dernier lieu, nous remarquerons que ce que
nous venons de dire s'ap-plique également aux approbations données
sans restrictions, mais non point à celles qui ont été
données pour un certain temps, pour six mois, par exemple, comme
cela se pratique ordinairement; car il est certain, d'après la bulle
d'Innocent XIII, Apostolici ministerii, confirmée par Benoît
XIII, que les confesseurs, tant séculiers que réguliers,
ne peuvent confesser que les personnes qui dépendent d'eux, et dans
les lieux et dans le temps qui leur sont assignés, quels que soient
les privilèges qu'ils aient reçus. Voyez le chap, xvi, n.
75.
GIV. 20 Du pouvoir -qu'ont les réguliers de dis-penser dans
les irrégularités. Il est certain que les réguliers,
en vertu du privilège de saint Pie V, que
(1) Salm. tr. 19. c. 4· ?. ? ï5. cum communi. ?<0 Ibid.
n. no, et JPJ4ba. j>. ?. tr. 2. jcesp. 7.
110
INSTRUCTION PRATIQUE
nous avons mentionné au n. 96 et que Jules II a confirmé,
peuvent dispenser leurs sujets dans toutes les irrégularités
occultes dans lesquelles les évêques peuvent dispenser leurs
diocésains, en vertu du chap. Liceat, comme nous l'avons dit au
n. 29· Us le peuvent également à l'égard des
séculiers, selon le sentiment de Suarez, Sanchez, Pelliz, de Sair>
Salmant, Sporer, Lezana, d'après les concessions que leur en ont
faites Sixte IV et Jules II (1).
CV. En outre, les réguliers peuvent dispenser leurs sujets dans
quelque irrégularité que ce soit, encourue par délit
ou par défaut, d'après le privi-lège de Martin V (2).
Ainsi donc , pour en venir au particulier, lés prélats peuvent
dispenser leurs su-jets, i° dans l'irrégularité pour
homicide occulte, comme le leur a accordé Martin V, dans son privi-lège.
En ce qui concerne l'homicide volontaire, voyez ce que nous avons dit au
n,96 au sujet du privilège de Benoît XIII, que nous avons
dit avoir été révoqué par Clément XII
dans sa bulle Romanus. 20 Relative-ment aux défauts de l'âme,
ils peuvent accorder aux religieux la dispense pour dire la messe, quand
même ces derniers auraient été affligés d'une
ma-ladie continuelle, pourvu que le médecin ait assuré qu'il
n'y a plus à craindre aucun danger de re-chute (3); 3° pour
ce qui est des défauts du corps, comme s'il manquait a quelqu'un
un pied, ou même l'œil gauche, ils peuvent également dispenser,
comme le prouve les-Salmant. (4), avec Bordone,
tO Lib. VL n. 355.
(2) Ibid.
(3) Ibid. ?. 4??. in fin.
(4) Tract, io. de ceusur. c. g, n. 764
idtJR ÌÉS CÒÌ)*ESSEURS.
Ill
d'après le privilège de Sixte IV ; et dans lé
doute, ils peuvent aussi déclarer que le défaut ne s'oppose
point, comme le peuvent les évêquës à l'égard
de leurs sujets (1); 4° quant aux défauts de naissance, cette
irrégularité cesse d'elle-même par la profession religieuse,
pour ce qui regarde la réception des 'ordres, comme le déclaré
le "châp. t défit. Presbyt., puisque la dispense n'est nécessaire
que pour ce qui est dé la prélature, mais en vertu dé
plusieurs privilèges (tomme nous l'avons dit au chap, xix, n. 87).
Les prélats réguliers peuvent aussi en cela dispenser leurs
sujets, au moins dans les chapitres généraux ou provinciaux
(2). Pour ce qui est du Sentiment de Soto, qui prétend que toute
irrégu-larité cesse par la profession religieuse, on ìe
nie plus communément (5). 5" Ils peuvent dispenser dans la
bigamie, en vertu du privilège de Martin Yj ainsi pensentCastr.,
Pelliz, Macado, Sa]m. (4), etc. 6uIls le peuvent également dans
l'irrégularité, même publique, encourue par défaut
de mansuétude (5). ?° Enfin, les prélats réguliers
peuvent dispenser leurs sujets dans toutes les incapacités ou peines
encourues pour cause de délit, comme, par exem-ple , dans les privations
de bénéfices, d'office, de voix, de lieu, etc., quand même
toutes ces peineis seraient réservées au pape, comme le disent
Suarez, Sanchez, Pelîiz et les Salmant., d'après lès
privi-
(\) Lib. VIL n.4. v. in fin.
(2) N. 554 et 4a6. Balm. tr. 10. 9. n. 57. et tr. 18. c. 4. n.
a8. cum. Bord.Perin. Leza. Pelliz. etc.
(3) ?3??.??. io. t. 7. n. 58.
(4) Lib. VI. n. 469.
(5) Salm. tr. 18. c. 4· ». 39.
INSTRUCTION PRATIQUE
léges de Sixte IV, de saint Pie V et de Gré-goire
XIV (i).
CVI. 5° Les prélats réguliers ont même la fa-culté
de dispenser leurs sujets dans les préceptes ecclésiastiques,
comme le peuvent également les évêques à l'égard
de leurs diocésains, ainsi que nous l'avons dit au ch. ir, n. 62
, puis/jue ceux-ci ont la juridiction quasi-épiscopale, comme l'en-seignent
communément les docteurs, d'après la clémentine Ne
Romani, de elec. (2). Cependant ils ne peuvent point dispenser dans tous
les cas qui n'ont point été spécialement réservés
au pape, comme nous l'avons dit au chap, ?, ?. 65, mais seulement lorsque
l'on doute si la chose a besoin de dispense, comme BOUS l'avons déjà
re-marqué au n. 62. Ils ont encore le pouvpir de dis-penser, lorsqu'il
y a motif (comme cela s'entend toujours) dans les lois pontificales, quand
elles ont été faites pour quelque province ou quelque cou-vent
particulier, parce qu'alors on présume que cette faculté
leur a élé accordée; soit encore lors-que l'usage
le veut ainsi, ou qu'on ne peut point facilement recourir au supérieur,
ou quand il s'agit de choses de peu d'importance, qui n'obligent point
sous faute grave, ou qui se présentent fré-quemment, comme
les jeûnes, l'abstinence delà viande, l'observance des fêtes
et la récitation de l'office ; pourvu que l'on n'accorde point la
dispense pour un temps considérable, comme le disent les Salm.,
avec Cajetan, Soto, etc. Il en est de même pour la règle du
monastère (?). De même encore
(1) Salm. tr. 18. c. l\. n. 5j. um, J3onac. Pasqua],
etc. (a) Ibid. n. 33. (3) Ibid. n. 34 et 35.
POUR LES CONFESSEURS.
1 1 3
Azor, Castropalao, les Salmant., Trullench., Ma-cado, etc., accordent
que les prélats peuvent dis-penser, soit les religieux, soit
les domestiques, pour travailler les jours de fête, mais non point
les étrangers, car les premiers peuvent en outre travailler pour
le monastère, si le monastère est pauvre, comme le
disent Silvestre, Fagund. et les Salmant., avec Pasqual., Léandre,
etc· (?). Voyez là-dessus ce que nous avons dit au
chap, vi, ?. ??. CViI. Observons ici quels sont les privilèges des
réguliers sur l'office divin, ?° Léon X accorda aux religieux
la faculté de réciter les heures en parti- -culier, et" tout-à-fait
mentalement; et de plus d'an-ticiper sur les offices les plus longs, et
de réserver les courts pour les jours où ils seraient
très oc-cupés. 2° Clément VII accorda à
tous les réguliers infirmes (nous parlons ici de ceux qui par eux-mêmes
ne sont point exemptés de l'office), et aux infirmiers, le privilège
de satisfaire à l'office en récitant six ou sept psaumes
(désignés par le supé-rieur), avec sept pater et deux
credo, et Martin V accorda aux convalescents la faculté d'y satisfaire
en disant la partie de l'office que le confesseur voudrait bien leur assigner.
3° Innocent IVaccorda aux reli-gieuses de Sainte-Claire (ce qui s'entend
également de toutes celles qui "communiquent dans les pri-vilèges)
la faculté de satisfaire elles-mêmes à l'olfice des
converses pour toute raison valable, comme, par exemple, si la religieuse,
au jugement de l'ab-Lesse ou du confesseur, n'était point suffisamment
instruite dans l'office des choristes, ou si elle était scrupuleuse
ou fatiguée, ou bien encore livrée à
(l) Salin, tr. 18. c. 3. n. Zj.
T. xxvi.
8
H 4
INSTRUCTION PRATIQUE
des affaires se'rieuses ; comme, par exemple, le reli-gieux qui serait
pendant la plus grande partie du jour occupé à confesser
ou à prêcher, ou bien à étudier des matières
religieuses ; puisque les reli-gieux eux-mêmes jouissent ad invicem
des privilèges accordés aux religieuses , ainsi que nous
l'avons dit au n.. 10. En outre, les Salmant. observent qu'ils peuvent
user de ce privilège sans la permission du supérieur, puisqu'il
a été accordé sans cette con-dition; ils observent
encore qu'une religieuse, en vertu de ce privilège , pourrait, sans
pécher mor-tellement , laisser de côté l'office des
dames laïques5 parce qu'alors elle est censée comme une de
ces dernières, qui ne sont point tenues à réciter
leur office sous faute grave. Mais je n'approuve point ce sentiment, parce
que le privilège ne veut pas que la religieuse puisse passer en
qualité de laïque, mais seulement que l'œuvre, c'est-à-dire
son office de choriste, passe, en se communiquant, dans celui des dames
laïques.
CVI1I. 5° Les confesseurs mendiants et les autres réguliers
qui communiquent dans les privilèges, ont la faculté d'annuler,
de relâcher les serments et les vœux et d'en dispenser; mais nous
avons parlé de cela au chap, ?, ?. 19, 36 et suivant. En outre,
ils peuvent dispenser les époux dans l'empêchement ? ad petendum
debitum, propter incestum com-» missum cum consanguineâ conjugis,»
comme le disent communément Sanch., Ponz., les Salin., etc. (contre
le P. Concina),et cela en vertu de plusieurs privilèges accordés
par différents pontifes (1). Mais nous observerons ici que le confesseur
doit en otn
(1) Lib. VU. n. 1076. V. Insuper.
POUH LES CONFESSEUR»,
It5
tenir la licence spéciale, au moins du prélat infé-rieur
de son couvent (1).
CIX. De plus, les confesseurs mendiants ont le pouvoir
de dispenser les époux du vœu de chasteté
fait avant leur mariage : ad petendum debi-tum, comme le soutiennent communément
Castrop.» Ponz., Sanch., Tourn., Wigandt, Salmant., etc., d'après
le privilège que leur en a fait saint Pie V; ils le peuvent également
dans le vœu fait depuis le mariage, comme le disent avec raison Sanch,,
Sal-mant., etc., contre Ponz.), en vertu de plusieurs autres
privilèges qui leur permettent de dispenser dans tous les vœux dans
lesquels les évêques peu-vent dispenser leurs sujets de jure
ordinario (2); ce dont on doute le plus, c'est s'ils peuvent, dans le cas
de nécessité, dispenser les époux, comme les évêques
peuvent dispenser dans le vœu de chasteté pour se marier. Plusieurs
l'affirment, comme Ana-clet, Vidal, BasSeo, Henriquez, etc., et ce senti-ment
est regardé comme probable par les Salmânt. et Elbel. Mais
plus communément Laymann, Bar-bosa, Sanchez et Ponz, soutiennent
le contraire, ajoutant que les réguliers peuvent dispenser seule-ment
dans les vœux dans lesquels les évêques peu-vent dispenser
en vertu du droit ordinaire$ mais non point extraordinaire, comme dans
ce cas. A cette objection, les partisans
du contraire répondent que dans le cas de nécessité
les évêques dispen-sent , quoique revêtus simplement
du pouvoir or-dinaire , parce que cette faculté se trouve attachée
à l'office et à la dignité episcopales, comme nous
(1) Lib. VII. ?. 1076. V. An autem. (3) Ibid. Etn. 1038.
1 16
ÎWSTRUCTIOλ PRATIQUE
l'avons dit au n. 34 et 4i 5 c'est pourquoi nous n'o-sons point regarder
comme non probable le pre-mier sentiment (?).
CX. 6° Quand les se'culiers reçoivent, soit du pape, soit
de leur prélat, la faculté de se choisir un confesseur, on
entend toujours que le confes-seur soit approuvé par l'évêque
; tandis que les ré-guliers, avec la permission expresse ou tacite
de leur prélat^ peuvent se confesser à un simple prêtre;
ainsi pensent communément Suarez, Lugo, Sal-maiit., etc. (2). D'où
il résulte que les prélats réguliers ont le pouvoir
de se choisir pour confesseur quel-que prêtre que ce soit, comme
le disent même com-munément les docteurs, d'après le
chap. Ult..depœ· nit. Or, ce qui a lieu pour les religieux a également
lieu pour les domestiques commensaux du couvent, comme l'a déclaré
le concile de Trente, sess. 25, chap, ir, qui les a autorisés à
recevoir des religieux les sacrements de la pénitence , de l'eucharistie
et ?de l'extrême-onction; nous pouvons en dire autant ?des novices
qui, dans les choses favorables, sont compris sous le nom de religieux,
comme le disent tous les docteurs, et comme l'a déclaré la
S. C. le 14 août i665. Ainsi donc ces derniers ont le pouvoir de
se faire absoudre de tous les cas réservés par l'é-vêque
(?), comme nous l'avons observé au n. Q5. Mais il n'en est pas de
même pour les chevaliers de ?Saint-Jacques et autres semblables,
d'après les Salm. «tie sentiment commun, parce que l'usage
le veut ainsi (4).
(1) Lib. VI. n. na8. circa fin. (a) Salm. tr. 18. c. 4.11.49. (5) Ibid.
n. 67. (4) Ibid. n. 58.
PO17R IKS CONFESSEURS.
I I 7
CXT· Remarquez, en outre, que si les religieux qui voyagent
ont nn compagnon (pourvu qu'il soit apte) du même ordre qu'eux, ils
doivent se confes-ser à lui ; mais faute de compagnon ou de tout
autre prêtre du même ordre, ils peuvent se confesser à
quelque ecclésiastique que ce soit, végulier ou sé-culier;
tel estle sentiment commun de tous les doc-teurs. Cependant
l'on doute si cet ecclésiastique doit être
approuvé dans ce lieu. Quelques docteurs en petit nombre, tels queWiguandt,
Concina, etc., veulent qu'ils soient approuvés; mais Suarez, Ron-caglia,
Castrop., Elbel, les Salmant., prétendent le contraire plus communément
et plus raisonnable-ment, soit parce que tel est l'usage des monastères
qui fait présumer le consentement du prélat, soit parce qu'Innocent
VIII accorda sans restriction aux reli-gieux en voyage qui ne peuvent avoir
un confes-seur de leur ordre, la faculté : « quemcumque alium
» presbyterum idoneum religiosum , vel secularem «eligere valeant
(1). » Voyez ce qui a été dit
au chap, xvi, ?. -88.
CXII. En outre, Lugo (2) et les Salmant. préten-dent avec Navarre
(3) ,Soto, Castrop., Peirin , Bos-sius, etc., qu'en temps de jubilé
universel, les ré-guliers et même les religieuses peuvent,
sans la licence de leur prélat, se confesser aux religieux d'un
autre ordre , quand même on leur aurait dési" gné pour
confesseur un ecclésiastique de leur ordre en vertu de plusieurs
privilèges que rapportent Lugo et Mendo (4).
(1) Lib. VI. ?. 575.
(a) Disput. 90. n. 86.
(5) Salmant. tr. 18. c. 4· n. ia4·
(4) Lib. VI. n. 788. noU &
Ii8
INSTRUCTION ÎBATIQUE
CXIII· Pour ce qui concerne Jes ordres, les ré-guliers
ne doivent point recevoir leurs dimissoires des évêques, mais
bien de leurs prélats eux-mêmes; autrement ils pécheraient
grièvement et encour-raient la suspense. Néanmoins , quant
aux ordres j saint Pie V leur avait autrefois accordé le privilège
de les recevoir de quelque évêque que ce fût; mais il
fut révoqué par Grégoire XV, et cette révocation
a été confirmée par plusieurs pontifes , et en dernier
lieu par Benoît XIV, dans sa bulle impost., etc., de l'an 1747? °ù
? prescrivit que le religieux devait se faire examiner et ordonner par
l'évêque du lieu, si ce dernier faisait l'ordination ; mais
s'il était absent, ou s'il ne faisait pas lui-même l'ordination,
alors il était libre de se faire ordonner par quelque évêque
que ce fût," mais avec l'attestation du vicaire, ou du chancelier
de l'Ordinaire, laquelle constatât de son empêchement, sans
quoi il encourrait les mêmes peines que celui qui reçoit les
ordres sans dimissoire. En outre il a été défendu
au religieuxde se retirer dans un autre lieu, afin d'y recevoir les ordres,
et d'éviter par là de passer à l'examen de l'évêque
de l'endroit d'où il est parti. Pour ceux ensuite qui sont dans
les diocèses n'appartenant à personnels doivent se faire
ordonner par l'évêque le plus voisin (1).
CXJV. On doute, en premier lieu, de qui les no-vices doivent recevoir
les ordres; Suarez ei Henri-quez prétendent que c'est de l'évêque
de l'endroit où ils sont nés ou qu'ils habitent; mais Sanchez,
Castropalao, Delbene et Fagnan., etc., soutiennent qu'ils peuvent être
ordonnés par l'évêque du lieu où ils ont fait
leur noviciat. Lacroix, et le P. Maz-
(1) Lib. VI. n. 765.
VQVR LES CONFESSEURS.
ÎlC)
zotta disent avec beaucoup de raison, que l'un et l'autre de ces deux
sentiments sont probables, pourvu (ajoutent-ils sur le dernier), que le
novice soit résolu, en ce qui le concerne, de demeurer continuellement
dans le couvent où il se trouve et qu'il en fasse serment, comme
on le prescrit dans la bulle Speculatores (?).
CXV. On doute, en second lieu, si les religieux peuvent être
ordonnés extra tempora; Vasquez, Le-zanna, etc., le nient, parce
que , disent-ils, quoique Grégoire XIII ait accordé ce privilège
aux jésuites, néanmoins il a défendu qu'il fur communiqué
à d'autres. Mais aujourd'hui on ne peut plus révoquer en
doute qu'ils le puissent, soit en vertu de plusieurs privilèges
accordés à d'autres religieux, soit en-core d'après
la déclaration faite dernièrement par Benoît XIII,
dans le concile romain , tit. 5, ch. H, dans laquelle il est dit que ces
privilèges « in suo ». robore persistunt ; nec eis derogatum
fuisse con~ «stat (3). »
CXVI. On doute, en troisième lieu, si les régu-liers
qui sont ordonnes extra tempora peuvent l'ê-tre dans quelque jour
que ce soit où l'office est double, quand même ce ne serait
point une fête d'obligation. Fagnand, Villalob., Diana, etc.,l'affir-ment
, et Suare*, etc., appelle probable leur senti-ment, parce qu'Alexandre
VI a dit au sujet de ce privilège, qu'ils pouvaient être ordonnés
diebus dominicis, siuefestwis duplicibus, mais il n'a fait nullement mention
4es fêtes d'obligation. Je n'ose ici réprouver ce sentiment
; cependant le contraire
(?) Lib. VI. ?. 768 et 788. V. not. 8. (a) M. 797. dub. a.
I2O
INSTRUCTION PRATIQUE
me paraît plus probable, ainsi qu'à Lugo, Azor. et Escobar;
parce que Grégoire XIII, en parlant de ce même privilège,
l'expliqua en disant : diebus dominicis, etfestivis diebus, sans ajouter
duplicibus· Or, le jour de fête signifie proprement celui
où il est défendu de travailler, et par conséquent
les fêtes qui sont d'obligation. C'est ainsi que cela se pratique
de nos jours à l'égard de ceux que l'on or-donne avec la
dispense : In tribus diebus festiv is, et pour lesquels a lieu la même
règle (1 ).
CXVII. Pour ce qui est de ta faculté de conférer les
ordres, autrefois les abbés réguliers, en vertu de la concession
qui leur en avait été faite dans le synode vu (comme le déclare
le can. Quoniam, dist. 169 ), avaient le pouvoir de donner la tonsure et
les ordres mineurs, non seulement à leurs sujets religieux, mais
à tous les autres. Néanmoins, le concile de Trente, sess.
25, c. 10, borna cette fa-culté aux seuls sujets réguliers.
Malgré cela, plu-sieurs docteurs ont soutenu que les abbés,
au moins ceux qui portent la mitre ( comme le disent les Sal-mant., d'après
plusieurs décrets de la S. C. ), les-quels remplissent les fonctions
de pontife, pou-vaient ordonner même les séculiers leurs sujets,
et même les autres qui avaient leur dimissoire de leur prélat.
Mais toutes ces questions n'ont plus lieu aujourd'hui, depuis le décret
de la S. C., ap-prouvé par Urbain VIII, le 17 de juin 1642 , dans
lequel, après avoir rejeté toute opinion, on défend
aux abbés de donner les ordres ou les dimissoires à d'autres
qu'aux réguliers leurs sujets, sous peine d'encourir la suspense.
On en excepte néanmoins
(1) Lib. VI. ?. 797. dub. /?
POUR ILES CONFESSEURS.
12 ï
plusieurs abbés désignés dans la chancellerie
ro-maine, lesquels ont le privilège de donner, des di-missoires,
tels que l'abbé du Mont-Cessin, de la Cava, etc. (1).
CXVIII. On doute, en premier lieu, si au moins les abbés qui
ont la juridiction quasi-épiscopale dans quelque territoire séparé,
peuvent ordonner leurs sujets séculiers. Molfes., après Lacroix
(2), rapporte une déclaration de la S. C. qui affirme qu'ils le
peu-vent; mais Benoît XIV (?) ea rapporte une autre qui veut le contraire
; et le P. Zacharia conclut la même chose, après Lacroix,
dans le lieu que nous venons de citer.
CXIX. On doute, en second lieu, si les abbés qui peuvent ordonner
les profès qui sont leurs sujets, peuvent également ordonner
les novices. Castrop , Barbosa, Sair, etc., le nient; mais Suarez, Laym.,
Sanch., Escobar, lesSalmant., etc., l'affirment plus communément
et plus probablement, puisque ré-gulièrement, dans les choses
favorables, les no-vices (4) sont encore compris sous le nom de régu-liers,
comme nous l'avons dit au n. 100.
CXX. On doute,en troisième lieu, si les ordres conférés
par ces abbés aux séculiers ou aux réguliers qui ne
sont point leurs sujets, sont valides. Suarez, Lacroix, etc., le nient;
mais on doit l'affirmer avec Sanchez, Salm*, Tanibur., Pellizià
, etc., parce que (comme nous l'avons dit), cette faculté a été
ac-cordée dans un temps aux abbés; et ce n'est que
(1) Lib. VI. ?. 765.
(a) Lacroix 1. VI. p. a. n. 3239.
(3) De synod, lib. ?. e. 11. ?. ?5.
(4) Lib, Vit ?. ->5fc ·??? ?
INSTRJJÇTÏOir PRATIQUE
plus tard seulement que l'exercice de cette même faculté
leur a été ôtée par le concile et par le décret
du p?pe Urbain; d'où il.résulte qu'ils peuvent or-donner,
illicitement il est vrai, mais validement. Et ce, qui le prquve encore
, c'est ce même décret (Ju pape Urbain dans lequel on prononce
la sus-pense contre ceux qui ont été ordonnés de cette
ma-nière; par conséquent on regarde comme réellement
valides les ordres qu'ils ont reçus. C'est ainsi que le portent
encore plusieurs décisions de la S. G., et Benoît XIV (>).
GXXI, Ç, Pour ce qui est de djre la messe et de donner la communion,
autrefois les réguliers, en Ye,rj.u des privilèges de Sixte
jLY, d'Alexandre VI et d'Prbain VIII, pouvaient célébrer
sur un autel por-tatif, soit dans leurs maisons, soit dans leurs granges,
quand même J'évêque s'y serait opposé (a). Mais
Clément XI, l'an ijo3 , déclara dans un décret que
tqus }es privilèges qui leur permettaient de célébrer
sur un autel portatif, sans la licence de l'évêque, avaient
été révoqués par le concile de Trente. Be-noît
XIV déclara la même chose dans sa bulle Ma-gno, $ 29, Je ne
saurais admettre ici le sentiment du P. Mazzotta et des Salmant. (?), qui
prétendent que cette défense n'a été faite
que pour les maisons pri-vées , mais non point pour les propres
maisons des religieux, puisque dans le décret de Clément
XI on parle du privilège de célébrer dans les lieux
que l'on habite; or, les lieux que nous habitons sont nos propres maisons
et non point celles des autres. En
(1) De synod. 1. IL c. 1 r. ». ??.
(2) Saltn. tr. i5. c. 7. n. 97.
(3) Ibid. tract. 5. de sacrif. miss. c. 4. n. 6a.
POOR ?-BS CONFESSEURS.
125
outre, Innocent XIII, l'an 1725, dans sa bulle Apo-stolici ministerii,
défend « ne in privatis regularium ? cellis, seu cubiculis
erigantur altare, remota qua* «cumque in contrarium consuetudine
(1). »Et cette bulle d'Innocent qui n'avait été faite
que pour l'Es-pagne seulement, fut confirmée 'ensuite par Be-noît
XIII dans une autre bulle qui commence par In supremo , faite pour tout
le monde chrétien. Cependant tout le monde sait que Benoît
XIII a ac-cordé aux provinciaux des jésuites de consacrer
des oratoires publics dans leurs églises où tous peuvent
célébrer (2). '
CXXII. En vertu du privilège de Grégoire XIII, les réguliers
peuvent célébrer une heure avant l'au-rore ; par conséquent
ils peuvent dire la messe trois heures avant le lever du soleil, comme
le disent Lu-go, Suarez , Rodriguez, Salmant., etc. (5). Ainsi, lorsqu'il
y a de justes motifs, ils peuvent la dire deux heures après minuit,
en vertu des privilèges d'Alexandre VI et de Clément VIII.
Or, ces privi-lèges, selon le sentiment de Lugo, Rodriguez , Diana
, Narbona, Salmant., etc., n'ont point été ré-voqués
par le concile de Trente, dans sa sess. 22, de Evitand., etc. Cependant
ces docteurs obser-vent n'est valable que pour les églises propres
j c'est pourquoi ils ajoutent que les séculiers mêmes peuvent
user de ce privilège (4). En outre, Eu-gène IV a accordé
aux réguliers la faculté de célébrer, lorsqu'ils
ont des motifs valables, trois
(1) Lib VI. ?. 36?. V. Hanc.
(2) Merat. p. 1. tit. 20. ad litt. F. (5) Salm, tract. »5.
e. 6. n. 84.
(4) De Lugo, de Each. d. 20. ». 37. et Salm. tr. g. H. ?.
1«4
INSTRUCTION PRATIQUE
heures après la moitié du jour. Mais Azor, Fagun-dez,
etc., prétendent que ce privilège a été iévoqué
par saint Pie dans sa bulle Amantissimus, l'an 1566; et à l'appui
de cela, Lezana cite une déclaration de la S. C. Cependant, malgré
cela, Lu go (i) et les Salm. disent avec Aversa, Dicastillo, Narbo., Diana,
etc., que l'on n'est point certain de l'authenticité de cette déclaration,
ni de la révocation de saint Pie V, qui ne fait seulement mention
que des messes que « Ton dit lorsque la soirée est avancée,
et quelquefois même lorsque le soleil se couche. D'où ils
concluent que le privilège d'Eugène IV existe toujours, et
que pour en jouir il suffit de quelques légers motifs, comme, par
exemple, de convalescence , d'étude, et autres choses semblables
(a).
CXXIII. Relativement à l'administration de la communion, Paul
III et d'autres pontifes ont permis aux réguliers de la donner dans
leurs églises à tous les fidèles. On en excepte néanmoins
le cas suivant, 1° si l'évêque avait défendu avec
raison la commu-nion à quelqu'un. On en excepte en second lieu,
la communion à l'article de la mort ou en danger de mort, à
moins qu'il n'y ait une extrême ou une grave nécessité,
et si le curé ne pouvait ou refusait de l'administrer lui-même;
ainsi pensent Lugo, Roncaglia, etc. On en excepte en troisième lieu
la communion pascale, c'est-à-dire celle par laquelle on satisfait
au précepte, comme le disent commu-nément Filliu., Busemb.,
etc. Voyez là-dessus ce que nous avons dit au ch. xn, n. 4i«
CXXIV. Touchant la faculté de prêcher, ancien-
(i) Lugo de Euchar. d. ao> n, hi\ et&alm* n, $5» (a) JUJfc
yi..«. a$9«ta4&
nement les réguliers, en vertu de la Clément.Dudum, desepult.,
pouvaient librement prêcher dans l;urs églises et sur les
places publiques; mais le cor cile de Trente , sess. 5 , ch. H, ordonna
qu'ils ne pour-raient prêcher dans les églises étrangères
sans la permission de l'évêque, et dans les propres ég
lises de leur ordre, sans demander à l'évêque sa béné-diction.
Ainsi donc, pour prêcher dans leurs égl ses, il suffit aux
religieux de demander la bénédiction de l'évêque,
quand bien même elle leur serait refusée, comme le disent
Leza, Pell., Bor. et les Salin., etc., et comme le déclare un décret
de la S. C. (1) Ce-pendant, cette bénédiction n'est point
nécessiire/ comme le disent les Salmant., pour prêcher si
r les places publiques, attendu que le concile ne parle seulement que des
églises. Néanmoins, les régi liers doivent toujours
avoir l'approbation de leurs pré-lats, qui se rendraient certainement
coupables si, sans examen, ils leur permettaient de prêche ' (3).
En outre, les prélats peuvent permettre de prêcher aux simples
tonsurés, en vertu du priviléj e de Grégoire XIII,
quoique la S. C. ait déclaré q le la prédication ne
peut pas être confiée à tous les ton-surés (3).
CXXV. Pour ce qui est ensuite des églises étran-gères,
les réguliers, comme nous l'avons dit, ne peuvent y prêcher
sans la licence de l'Ordina re, à moins que cela n'arrive qu'une
ou deux fois, ce raine le disentNavar., Barbosa, Diana, les Salmant. etc.,
ou que l'évêque ne soit point dans le lieu, o4 bien
(1) Salm. tr. 18. c. 4. n. 178.
(2) .bid. n. 176 et 177. <3) Ibid. n. 174.
126
INSTRUCTION PRATIQUE
encore que le religieux ne fasse que passer dans cet endroit; car alors
le curé peut lui donner la licence de prêcher, comme l'a'accordé
Grégoire VIII (1). Toutefois, lorsque le religieux a obtenu la permis-sion
de l'évêque, il a le pouvoir de prêcher dans les paroisses
, contre la volonté même du curé, soit parce que l'évêque
est supérieur au curé, soit en-core parce que cela a été
expressément accordé par Alexandre VI (2).
CXXVI. On demande, en premier lieu, s'il est permis aux réguliers
de prêcher contre la défense de l'évêque. Lorsque
l'église est étrangère et que l'évêque
refuse au commencement de donner la per-mission , il est certain que cela
n'est point permis ; mais si l'évêque l'avait déjà
donnée et si ensuite il la retirait, ou bien si c'était sa
propre église, Peir., Vega, Pellizzia, Salrn. et Diana ,etc. (?),
prétendent que les réguliers ont alors le pouvoir de prêcher.
Mais le concile de Trente , sess. â4» ch. iv, s'oppose à
cela, lorsqu'il dit : « Nullus secularis, sive regu-» laris
, contradicente episcopo, praedicare prae-» sumat ; » de même
encore la bulle de Grégoire XV, Inscrutabilis, où il est
dit que l'évêque, comme délégué du Saint-Siège
apostolique , peut ptmir les réguliers « qui in alienis ecclesiis
suorum ordinum, «non petita benedictione, aut ipse» contradicente,
«praedicare prœsumserint. » A cela, les Salmantic. répondent
que cette bulle, ainsi que le concile» doivent s'entendre de la même
manière que ce qui est dit dans la Clément. Dudum, déjà
citée, où on
(1) Salm. tr. c. 18. c. l4. u· 184. (a) Ibid. n. 179. (?) Ibid.
n. ?8?.
POUR LES CONFESSEURS.
\ij
ne défend seulement de prêcher qu'aux heures où
l'évêque prêche lui-même ou que Von prêche
so-lennellement avant lui. Ils ajoutent encore que la S. G. des évêques
et des réguliers l'a ainsi décidé le 5o janvier 1629,
d'après Barbosa (1). Pour moi, après avoir examiné
cet endroit de Barbosa, j'ai trouvé que la déclaration de
la S. C. ne regardait seulement que les églises propres des réguliers
; d'où il suit que pour ce qui est des églises étran-gères,
la réponse des Salmant. ne me paraît point probable.
CXXVII. On demande, en second lieu, si l'évêque peut examiner
les religieux qui demandent la per-mission pour prêcher dans les
églises étrangères. La S. C., au dire de Barbosa (2),
répondit que oui, le I2 janvier 1628. Mais les Salm.(3), avec Pellicier,
Bordone, Diana, Peyrin, etc., le nient d'après la bulle de Léon
X, Superna, où il est dit que personne n'était admis à
prêcher, « sans avoir été auparavant examiné
comme il convient par ses supérieurs. » II est dit encore
dans la bulle que le religieux doit montrer l'approbation de son prélat
qui l'autorise à prêcher. Les Salm., avec Pellizzario, ajoutent
en-suite que la susdite déclaration de la S. C. qu'on leur oppose,
n'établit qu'un sentiment probable; c'est pourquoi, disent-ils,
on ne doit point îa préférer à la bulle de Léon.
Et moi je répondrai qu'au moins il est probable par cette déclaration,
que l'évêque a le pouvoir d'examiner le religieux, et que,
sans cet examen, il peut, s'il le juge à propos, refuser la
(1) lu trident, sess. 5. c. 2. n. 19.
(2) Ibid. u. ao.
(3) Ibid, c. 4. n. 188.
128
INSTRUCTION PRATIQUE
licence; qu'au contraire la bulle de Léon défend bien,
il est vrai, à l'évêque de permettre de prê-cher
au religieux qui n'est point muni de l'appro-bation de son prélat,
mais qu'il ne lui défend point de le soumettre à un examen,
si bon lui semble, et de refuser la licence si ce dernier récuse
l'examen.
CXXVUI. Nous observerons, en dernier lieu, que l'évêque
en vertu du concile de Latran, a le pouvoir de suspendre et de punir les
prédicateurs réguliers dans trois cas , dans lesquels ceux-ci
sont suspendus de la prédication ipso facto : i° s'ils prêchent
mi-randa, falsa aut incerta; 20 s'ils prêchent des pro-phéties
non fondées sur la Sainte Ecriture ou non approuvées par
le siège apostolique ; 3° si, dans leurs sermons, ils médisent
des évêques ou de leurs propres supérieurs. En outre,
en vertu du concile de Trente, l'évêque a encore le pouvoir
de sus-pendre et de punir les réguliers qui prêchent des propositions
hérétiques, erronées ou scanda-leuses (1).
CHAPITRE XXL
DI LA CHARITÉ ET DE LA PRUDENCE
DU CONrESSEUB.
1. De la charité du confesseur en accueillant le pénitent.
2. En l'écoutant.
3. En l'avertissant.
(0 Salm. tr. 18. c. 4. a. 188.
FOUR LES CONFESSEURS.
129
4. De la prudence du confesseur en l'interro-geant, en l'instruisant
et en le disposant.
5. Remèdes généraux.
6. Remèdes particuliers.
I. Le bon confesseur a quatre devoirs à remplir, celui de père,
de médecin, de docteur et déjuge. Pour ce qui regarde le
devoir de doeterir et de juge, nous en avons suffisamment parlé
dans le cours de cet ouvrage, dans toutes les instructions que nous avons
données jusqu'à présent. 11 reste donc à parler
du devoir de père qui demande de la charité, et du devoir
de médecin qui demande de la prudence. Le confesseur, pour tenir
la place d'un bon père, doit être plein de charité.
Et d'abord il doit user de cette charité en accueillant tout le
monde sans aucune distinction, pauvres, riches et pécheurs. Il en
est qui ne confessent seulement que les âmes dévotes, ou bien
quelques personnes par égard, parce qu'ils n'osent point les renvoyer
; mais si ensuite il se pré-sente un pauvre pécheur, ils
ne l'entendent qu'à contre-cœur et le renvoient enfin avec mépris.
Si c'est au contraire quelque misérable qui n'arrive au confessional
qu'avec une peine extrême, qu'advien-dra-t-il? Se voyant mal accueilli
et rebuté, il prendra en haine le sacrement de la pénitence,
s'obstinera plus que jamais à ne point se confesser, et, perdant
ainsi l'espérance de trouver quelqu'un qui l'aide et qui l'absolve,
il s'abandonnera alors à une mauvaise vie et au désespoir.
Cette conduite n'est point celle que tiennent les bons confesseurs; lorsqu'ils
ren-contrent quelques uns de ces infortunés, ils les ser-rent contre
leur cœur et se réjouissent quasi victor captdprœdâ, en pensant
au bonheur qu'ils ont alors d'arracher une âme des mains du démon.
C'est qu'ils T. xxri.
y
INSTRUCTION PRATIQUÉ
savent que ce sacrement n'est point Fait proprement pour les âmes
dévotes, mais bien pour les pécheurs , puisque, pour être
absoutes, les fautes légères n'ont pas besoin de l'absolution
sacramentelle, et qu'elles peuvent être effacées par d'autres
moyens différents. Ils savent que Jésus-Christ en à.
rendu lui-même té-moignage, en disant : « Je né
suis point venu appeler les justes, mais les pécheurs. » C'est
pourquoi se revêtissant d'entrailles de miséricorde, comme
le recommandé l'àpôtfe, plus ils trouvent une àmè
enfoncée dans le péché, plus ils s'efforcent d'user
de miséricorde, afin de l'attirer à Dieu eii lui disant,
par exemple:«Allons, prenez courage, faites main-tenant une bottnê
Confession ; dites toutes vos fautes avec franchise : n'ayez point de honte.
ïl n'est poinl nécessaire que Vous Vous soyez entièrement
exa-miné ì il suffit que Vous répondiez à tout
ce que je vous demanderai. Remerciez le Seigneur qui vous a attendu jusqu'aujourd'hui
: maintenant c'est à vous de changer de vie. Soyez plein dtt confiance;
soyez certain que Dieu Vous pardonnera si vos intentions sont pures ; s'il
vous à à<tendu jusqu'à présent, c'est pour
vous pardonner. Dites donc avec joie, etc. »
II. Le confesseur doit user d'une plus grande charité encore
en l'écoutant. tTest pourquoi il doit bien se garder de montrer
de l'impatience, de Ten-nui òu de l'étônnemént,
au sujet des pèches que le pénitent lui avoué, a moins
que ce dernier n'eût le cœur si dur et si effronté qu'il confessât
plusieurs fautes énormes sans donner aucune marque de corn fusion
ou de repentir; car alors il est bon de lui en faire comprendre toute la
laideur et toute l'énor-mité, et de le réveiller par
quelque correction de sa léthargie mortelle. 11 est Vrai, comme
le disent les
POtrft. LÏS CONFESSÏtJRS..
docteurs, que le confesseur doit s'abstenir àe faire la correction
au milieu de la confession des per-sonnes timides, dans la crainte de ìes
abattre et de les empêcher de dire les péchés qui restent
encore. Néanmoins cela s'entend ainsi régulièrement
parlant] du reste, il convient en même temps de ne point passer outre
et de faire aussitôt la correction, pré-cisément lorsque
le pénitent se confesse de quelque péché plus grave,
ou bien habituel, afin de lui faire comprendre toute la gfièveté
de ce vice, mais sans toutefois l'aigrir ni l'abattre. C'est pourquoi après
? avoir ainsi repris autant que cela est nécessaire ,1è confesseur
doit aussitôt l'encourager à confesser le reste de ses péchés,
en lui disant : «Allons, youlez-\ous chasser de votre cœur un vìcé
si détestable ? Oui, n'est-ce pas? eh bien, tenez-vous dans la joie
: dites donc toutes vos fautes sans en laisser aiicune. Vous ne voudriez
pas faire sans doute un sacrilège! Hélas ! ce crime mettrait
le comble à tous vos for-Faits. Avouez tout avec confiance, et faites
une bonne confession afin que Dieu vous pardonne.»
Ht. Sur la fin de îa confession , il est nécessaire que
le confesseur fasse connaître au pénitent, avec plus de chaleur
que jamais, toute l'énormité et toute la multitude de ses
péchés, et l'état misérable de réprobation
dans lequel il se troftve; mais il faut que toujours la charité
accompagne 'chacune de ses paroles. Il est vrai qu'il peut alors prendre
un ton plus grave pouf le faire rentrer en lui-même j mais il <3oit
le prévenir que tout ce qu'il lui dit n'est point 1 elfet de l'indignation,
mais bien de la charité et de la compassion. Par exemple : «
Mon fils, doit-il lui dire, voyez quelle vie est celle des damnés;
voyez le mal que VOUS avez fait. Que vous a fait Jésus-
l5s
INSTRUCTION PRATIQUE
Christ pour le traiter ainsi ? Si le Seigneur avait été
votre plus mortel ennemi, auriez-vous pu le traiter plus indignement ?
Un Dieu qui est mort pour vous 1 Hélas ! si vous étiez mort
pendant ce temps, pendant cette nuit, où auriez-vous été?oùseriez-vousmain-tenant?
Hélas 1 vous seriez damné pour toujours. Que vous en semble-t-il?Si
vous continuez à vivre ainsi, pourrez-vous vous sauver? Pensez-vous
qu'il n'y ait personne qui se soit damné ? Quel fruit avez-vous
retiré de tant de péchés que vous avez com-mis? Ne
saviez-vous pas que le péché a son enfer dans celte vie comme
dans l'autre? Allons, mon fils, finissez-en avec le mal ; donnez-vous à
Dieu autant que vous l'avez offensé ; je. ferai tout mon possible,
de mon côté, pour vous aider; venez me trouver toutes les
fois que vous le voudrez. Dès au-jourd'hui vivez saintement; allez
en paix. Oh! qu'il est beau de se tenir dans la grâce de Dieu! »
etc. Saint François de Sales, pour attirer les pécheurs à
Dieu, s'efforçait d'ordinaire de leur faire comprendre la paix,
dont jouissent ceux qui vivent en grâce avec Dieu, et la vie malheureuse
que mène celui qui vit loin de son Dieu. Il aidait ensuite le pénitent
à faire l'acte de contrition, et s'il le voyait bien disposé
il lui donnait l'absolution, en lui indiquant les re-mèdes à
suivre pour se corriger, remèdes dont nous parlerons en peu de mots
aux n. 5 et 6. S'il ne pou-vait l'absoudre, ou s'il jugeait utile de différer
l'ab-solution , il lui assignait l'époque où il devait reve-nir,
en lui disant : « Allons, je vous attends tel jour j ne manquez pas
de venir. Soyez plein de courage, comme je vous ai dit ; recommandez-vous
à la sainte "Vierge, et venez me trouver. Si je suis au confession-nal
approchez-vous, je vous ferai passer, ou bien
PptJR T.ES CONFESSEURS.
l35
envoyez-moi chercher, je laisserai tout pour vous entendre. »
C'est ainsi qu il renvoyait son pénitent avec douceur. Le moyen
de sauver les pécheurs, c'est de les traiter avec le plus de charité
possible; autre ment, s'ils rencontrent un confesseur austère qui
les traite avec des manières rudes, et qui ne les encou-rage point,
ils prennent en horreur la confession , négligent de se confesser,
et se perdent.
IV. Le devoir du médecin réclame une grande prudence;
c'est pourquoi le confesseur, afin de bien traiter son pénitent,
doit, avant tout, s'informer des causes et de l'origine de toutes ses infirmités
spirituelles, l'interrogeant sur ses habitudes, sur les occasions qu'il
a de pécher; lui demandant dans quel temps, dans quel lieu il a
péché. C'est là-des-sus qu'il doit se régler
pour lui faire les réprimandes qu'il mérite, se gardant bien
de les omettre par égard pour le pénitent, quand bien même
ce der-nier serait un prince, un magistrat, un prélat, un curé
ou un prêlre, dès lors qu'il s'accuse de fautes graves commises
avec réflexion. Il est vrai qu'avec ceux-ci, le confesseur doit
mettre plus de douceur et de ménagement dans ses réprimandes;
mais en place il doit parler avec plus de force et de gravité, puisque
les péchés de c"es personnages ont des con-séquences
plus terribles, et que leur mauvais exemple1 peut entraîner les autres
au mal. C'est pourquoi, toutes les fois qu'ils manquent à leur devoir,
il doit les reprendre, quand même ils seraient dans la bonne foi.
Pour ce qui est ensuite de ceux qui sont dans une ignorance non coupable
, si le confesseur doit les réprimander, lorsque la réprimande
sera sans fruit, voyez ce que nous avons dit au chap, ??? (en parlant de
la confession), au n. 108; ensuite,
154
INSTRUCTION PRATIQUE
lorsqu'il a entendu la confession, le confesseur doit disposer le pénitent
à. recevoir l'absolution , en lui faisant dire l'acte de contrition
et de ferme propos. Nous observons une seconde fois ce que nous, avons
dit au chap, ???, n.ioS in fin, savoir : que, lorsque le pénitent
n'est point disposé, le confesseur est teçiu (comme le disent
Suar. y Layra., etc. ) à faire tout son possible pour le bien disposer,
sans s'in-quiéter que les autres attendent ou s'en aillent. Nous
avons encore parlé, dans le même chap, xvi, n. 5q, de la prudence
que doit avoir le confesseur, en im-posant la pénitence, selon les
farces spirituelles du pénitent, afin de ne pas le charger d'un
poids si grand qu'il ne puisse le porter ; mais surtout le con-fesseur
doit s'appliquer à donner des remèdes pro-pres à conserver
le pénitent dans la grâce de Dieu.
V. Or, parmi ces remèdes % les uns sont généraux,
les autres particuliers, pour délivrer le pénitent de quelque
vice particulier. Les remèdes généraux que l'on doit
insinuer à tous sont, \° l'amour de Dieu, puisque ee n'est que
pour l'aimer qu'il les a créés et mis au monde,leur faisant
entendre par là-de quelle paix jouissent ceux qui sont en grâce
avec Dieu, et quel enfer anticipé éprouvent les pécheurs
qui vi-vent loin de Dieu, avec la ruine même temporelle que le péché
porte toujours avec lui -r %' la fréquente recommandation à
Dieu et à la sainte Vierge, en ré-citant tous les soirs le
rosaire, en invoquant son ange gardien, ou quelque saint en particulier;
3° la fréquentation des sacrements, ayant bien soin de les avertir
de venir se confesser aussitôt, si jamais, ils avaient le malheur
de retomber dans le péché ; 4° 1» considération
principalement de l'éternité, et de la mart ea particulier,
engageant le père de famille à
FOUR LES CONFESSEURS.
faire tous les jours l'oraison mentale en commun avec toute sa maison,
ou au moins à reciter le ro-saire avec tous ses enfants ; 5°
la présence de Dieu au moment de la tentation, en disant : Dieu
me voit; 6» l'examen de conscience tous les soirs, accompa-gné
de l'acte de contrition et du ferme propos ; 7° enfin, le confesseur
doit engager les séculiers à entrer dans quelque congrégation,
et les prêtres chargés du ministère à se livrer
à quelque oraison mentale (sans laquelle ils ne sauraient être
que très difficilement bons prêtres); à faire leurs
actions de grâces après la messe, ou à lire au moins
quelque livre spirituel avant et après la célébration.
VI. Pour, ce qui est des remèdes particuliers , OB doit les
appliquer selon la diversité des vices \ par exemple, on engage
celui qui a en haine quelqu'un de réciter tous les jours pour cette
personne un pa-ter et un ave ; celui qui est piqué du souvenir d'une
injure qu'il a reçue x À se rappeler toutes celles que lui-même
a faites à EHen ; celai qui est tombé dans l'impureté,
à fuir l'oisiveté, les mauvqi^ea compa-gnies et les occasions}
celui qui a depuis long-temps une habitude vicieuse, à éviter
non seulement les occasions prochaines, niais même certaines occa-sions
éloignées qui, eu égard à sa faiblesse, seraient
pour lui e€fm«*e des occasions prochaines : oe der-nier, spécialement,
ne doit point manquer de dire tous les jours-, matin et soir, les trois
ave. Maria en l'honneur de la pureté de la bienheureuse Marie, eti
renouvelant sans cesse au pied de son image l'aete du ferme propos et la
prière de la persévérance. Il doit ensuite avoir soin
de fréquenter (autant qu'il est possible) la communion, que l'on
appelle te vin qvbfait germer tes viergeâ, On engage celui qui a
l36
INSTRUCTION PRATIQUE
eu l'habitude de blasphémer à faire pendant quelque temps
cinq ou six croix avec la langue par terre, et à dire un pater et
un ave tous les jours en l'honneur du saint qu'il a blasphémé.
En outre, on l'exhorte, en se levant tous les matins, à renouveler
le ferme propos d'avoir la patience dans les occasions de co-lère,
et de dire trois fois le matin : « Vierge Marie, donnez-moi la patience.
» Non seulement ces paroles peuvent lui obtenir la protection de
la mère de Dieu, mais encore, prenant l'habitude de les dire, le
pénitent les prononcera dans les occasions de colère. Pour
ce qui est des autres remèdes, c'est à la prudence du confesseur
de les assigner, selon les circonstances des occasions, des personnes et
des lieux.
CHAPITRE DERNIER.
COMMENT DOIT SE CONDUIRE
LB CONFESSEUR ENVERS LES
DIFFE-RENTES SORTES DE PECHEURS.
? à 7. S I· De ceux qui sont dans l'occasion pro-chaine
de pécher.
8 à 17. § II. De ceux qui ont des habitudes et de ceux
qui retombent.
18 à ??. § III. Dès demandes que l'on doit faire
aux pénitents sur le mauvais état de leur conscience, et
I. des demandes que l'on doit faire aux gens gros-siers selon l'ordre des
préceptes.
Sa. II. Des demandes que l'on doit faire aux pé-
POOR Ï.ES CONFESSEURS.
nitents de divers états et de diverses conditions, et i" aux
prêtres.
33. 20 Aux religieuses.
34. 3° Aux juges. 4" Aux écrivains. 5° Aux mé-decins.
35. 6° Aux chirurgiens et aux
apothicaires. ?" Aux négociants. 8° Aux tailleurs.
?6. g0 Aux courtiers, ou vendeuses.
57. io°Aux barbiers et aux perruquiers : on parle ici des jeunes
gens qui arrangent les cheveux des dames.
38 à 42. g IV. Des enfants et des filles.
43 et 44· S "V' ^es personnes dévotes.
43 et 46. § VI. Des muets et des sourds.
47 et 48. § VII. Des moribonds.
49 et 5o. § VIII. Des condamnés à mort.
5i à 54· § IX· Des possédés.
55 et 56. § X. Des femmes.
§ I. Comment doivent se comporter les confesseurs avec ceux qui
se trouvent dans Coccasion prochaine de pécher.
I. Une des choses les plus indispensables pour bien diriger les pénitents
et leur faire faire leur salut, c'est de bien se conduire à l'égard
de ceux qui sont dans l'occasion de pécher, ou bien qui ont des
habitudes, ou qui récidivent. Or, ce sont là les deux écueils
(ceux qui sont dans l'occasion et qui récidivent) où viennent
échouer la plus grande partie des confesseurs ; c'est là
encore où ils man-quent ordinairement à leurs devoirs. Dans
le cha-pitre suivant, nous parlerons de ceux qui ont des habitudes et qui
récidivent ; parlons donc mainte·
nant de ceux qui sont dans l'occasion de pécher. ï\ est
certain que si les hommes s'appliquaient à fuir les occasions, ils
éviteraient la plus grande partie de* fautes qu'ils ço(nm.euent,
car le démon , sans les occasions, remporterait bien peu de victoires
; mais lorsque l'homme se met volontairement dans l'occasion prochaine,
le plus souvent, et l'on peut dire presque toujours, son triomphe est assuré.
L'occasion, principalement en matière de plaisirs sensuels, est
comme un filet qui attire av, péché, et qui, en même
temps, aveugle tellement l'esprit, que l'homme fait le mal sans presque
voir ce qu'il fait. Mais venons à la pratique. L'occasion premièrement
se divise en occasion volontaire et en occasion né-cessaire : l'occasion
volontaire est celle que l'on peut éviter facilement ; l'occasion
nécessaire, au con-traire, ne peut s'éviter sans de graves
pertes Ou sans scandale. Cette dejm'ere se subdivise- en, occa-sion prochaine
et en occasion éloignée. L'occasion éloignée
est celle où l'homme pèche rarement, ou bien celle que l'on
ren,co«tre partout; l'occasion prochaine, au contraire, considérée
en elle-même, est celle dans laquelle les hommes d'ordinaire tom-bent
le plus souvent. Ensuite l'occasion prochaine par accident, ou bien relative,
est celle qui, bien qu'elle ne soit point prochaine pour les autres , parce
que, de sa nature, elle ne porte point com-munément les hommes au
péché, ne laisse pas ce-pendant d'être prochaine pour
certaines personnes , soit parce qu'elles sont tombées fréquemment
dans Une semblable occasion, soit encore parce que pru-demment elles doivent
craindre de tomber, d'api es l'expérience qu'elles ont faite de
leur fragilité. Quelque* docteurs prétendent qu'on ne doit
appfe
FOtfR LES CONFESSEURS.
1er occasion prochaine que celle dans laquelle l'homme est tombé
dans le mal presque toujours ou le plus souvent ; mais le sentiment le
plus com-mun et le plus vraisemblable veut que l'occasion, prochaine soit
celle dans laquelle une personne a failli fréquemment (1). Cependant
nous devons ob-server ici, comme nous l'avons dit en parlant de l'occasion
relative, que de même que l'occasion qui est prochaine pour certaines
personnes peut être en Hiême temps éloignée pour
d'autres plus pieuses et plus sûres (2), de même aussi certaines
occasions qui seraient communément par elles-mêmes éloignées
pour celui-ci, pourraient être prochaines pour ce-lui-là qui,
par ses fréquentes rechutes ou par sa prc* pension à quelque
vice ( surtout s'il est impur), se» sait devenu faible et facile
à vaincre. C'est pourquoi ce dernier serait obligé non seulement
à fuir les oc» casions prochaines, mais encore les occasions
éloif gnées, qui sont pour lui comme prochaines.
II. Du reste, il est certain qu'on peut regarder comme dans l'occasion
prochaine les personnes suir vantes : i° celui qui garde dans sa propre
maison quelque femme avec laquelle plusieurs fois il a eu l'habitude de
pécher ; 20 ceux qui, dans le jeu, se sont livrés fréquemment
aux blasphèmes ou à la fraude; 3° celui qui, dans quelque
auberge ou autre maison, s'est abandonné d'habitude, soit à
l'ivro-gnerie, soit aux rixes, soit encore à des actes, ou paroles,
ou pensées obscènes. Or, tous ces individus Be peuvent être
absous qu'après avoir rois tin à l'oc-easion, ou au moins
après avoir promis d'y mettre
(1) Lib. VI. ?. 45a. (a) Ibid.
?4?
INSTRUCTION PRATIQUE
fin, selon la distinction que nous ferons dans le nu-méro suivant.
11 en est de même pour celui qui, tout en n'allant qu'une fois par
an dans une maison, s'y est livré cependant au péché
toutes les fois, puisque cette maison est pour lui une occasion pro-chaine.
On ne peut pas non plus absoudre celui qui, quoiqu'il ne pèche point
dans l'occasion, néanmoins est toutes les fois pour les autres un
sujet de scan-dale grave (1). Quelques docteurs ajoutent (2), et ce n'est
point sans raison, qu'on doit même refuser l'absolution à
celui qui ne laisse point l'occasion ex-térieure , quand à
celte occasion est jointe une habi-tude vicieuse, ou bien une grande tentation,
ou bien encore une violente passion, quand même, jusqu'à présent,
il ne se serait point encore livré au péché, puisqu'après
il peut facilement s'y livrer s'il ne s'éloigne de l'occasion. C'est
pourquoi ils disent, que si même une servante avait été
sollicitée au mal par son maître, et si elle se connaissait
facile à céder à ses instances, cette servante est
tenue de partir de cette maison, si elle le peut librement ; sans quoi
ce serait une témérité pour elle de se croire en sûreté.
III. Nous avertissons en passant les confesseifrs de ne point permettre
aux fiancés d'aller dans la maison de leurs fiancées, ni
à ces dernières d'aller dans celle de leurs fiancés,
ou bien de ne point permettre à leurs parents de les recevoir dans
leurs maisons, parce que rarement il arrive que ces fian-cés ne
se livrent point au péché, au moins en paroles ou en pensées,
dans une semblable occasion; car tous leurs regards , tous leurs entretiens
tendent tous
d) Lib. VI. ?. 452. V. ex pricmis»is. (2) Ibid.
POUR LES CONFESSEURS·
l4<
au pe'ché, et il est moralement impossible qu'ils vivent ensemble
sans sentir les aiguillons de la chair qui les portent à ces actes
impurs qui sont les suites immé-diates du mariage. En parlant en
général de ceux qui font l'amour, nous disons qu'il est vrai
qu'on ne doit point indistinctement les accuser de péché
mortel; mais ordinairement parlant, nous ajoutons que ceux-ci sont difficilement
hors de l'occasion prochaine de tomber dans des fautes graves. C'est ce
que nous apprend l'expérience de tous les jours, car sur cent personnes,
à peine s'en trouve-t-il deux ou trois exemptes de péchés
mortels ; et si ce n'est point au commencement, c'est au moins dans la
suite. En effet, ces amoureux ne cherchent d'abord qu'une simple affection
de lame; cette affection se change ensuite en passion, et une fois que
la passion s'est enracinée dans le cœur, elle aveugle el fait tomber
dans mille fautes. C'est ce qui faisait dire au grand cardinal Pic dé
la Mirandola, évêque d'Albane, dans ses Instructions
aux confesseurs de son dio-cèse, qu'il ne fallait point absoudre
ces amoureux , si, après être avertis trois fois, ils ne se
corrigeaient point de faire l'amour, surtout la nuit, soit pendant un temps
considérable , soit secrètement, ou dans l'intérieur
d'une maison, s'exposant ainsi au danger des embrassements ou des attouchements,
soit con-tre l'ordre de leurs parents, ou quand l'autre parti s'échappe
en paroles obscènes, soit avec scandale , comme, par exemple, s'ils
se livraient à l'amour dans l'église, ou avec des personnes
mariées ou cloî-trées , ou bien epeore avec des clercs
in sacris. Or, il est bon de faire remarquer ici, que toutes les fois qu'il
y a danger de péché formel, et surtout de pé-ché
ho»teux, plus le confesseur usera de rigueur
avec le pénitent, plus il te fera avancer dans les voies du
salut; au contraire, plus il sera condescendant et facile à permettre
qu'il reste volontairement dans l'occasion , plus il sera cruel envers
lui. C'est pour-quoi saint Thomas appelle impie pios les confesseurs qui
montrent de la condescendance en cela. En effet » une telle charité
est réellement contraire à la charité. Dans de semblables
cas, les pénitents ont coutume de représenter aux confesseurs
que s'ils éloignaient l'occasion, il en résulterait un grand
scandale ; mais que le confesseur soit fort et qu'il ne tienne aucun compte
de ce prétendu scandale ; certes, il y aurait bien plus de scandale
de voir le,pénitent n'évitant pas même l'occasion après
sa confession. Ou les au-tres ignorent son péclvéj et alors
ils ne peuvent point avoir de mauvais soupçons sut lui s'il fuit
l'oc-casion, ou bien ils le connaissent; et alors le pé-nitent recouvre
l'honneur qu'il avait perdu, en ne s'exposant point désormais aux
dangers des occa-sions.
IV. Quelques docteurs prétendent que pour la pre-mière
ou seconde fois oh peut bien absoudre quel-qu'un qui se trouve dans l'occasion
prochaine, quoique volontaire, même avant qu'il ait éloigné
l'occasion ,· pourvu qu'il ait un fermé propos de l'é-loigner
aussitôt. Mais nous devons distinguer ici, avec saint Charles Borromée
( dans son Instruction à ses confesseurs), les occasions qui font
dans l'état, comme lorsque quelqu'un garde chez soi sa concu-bine,
ou lorsqu'une servante cède aux sollicitations de son maître,
etc., de ceUes qui ne sont point dans l'état, comme celui qui dans
le jeu se livre aux blas-phèmes , dans les cabarets aux rixes et
à l'ivrognè-ïie, dans les conversations s'abandonne
à des pà-
PÔtJit LES CONFESSEURS.
l^S
roles ou à des pensées déshonnêtes, etc.
Or, dans Cette seconde espèce d'occasions qui ne sont point dans
l'état, saint Charles Borronvée ajoute que lors-que le pénitent
promet fermement de les éviter, on peut l'absoudre pour deux et
même trois fois ; que si ensuite il ne se corrigeait point, on doit
diffère* de l'absoudre jusqu'à Ce qu'il se corrige entièrement
en fuyant l'occasion. Pour ce qui est ides autres oc-casions dont notis
avons parlé d'abord, lesquelles se trouvent dans ? état,
le saint observé que l'on ne doit point absoudre le pénitent,
s'il n'a point eïitiè-fèment éloigné l'occasion,
et qu'il ne suffit point d'une simple promesse. Or, ce sentiment j'e l'ai
tou-jours tenu et je le lions encore pour certain , ordi-dinairement parlant,
et j'e pense l'avoir clairement prouvé dans le cours demon ouvrage
(1). La raison en est qu'un tel pénitent n'est point disposé
pour l'absolulion, s'il veut la recevoir avant d'avoir éloi<-gtié
l'occasion; en eifet, eft agissant ainsi, il s'ex-pose bientôt à
manquer à la resolution qu'il a prise, et à ne point remplir
l'obligation stricte où il s'est engagé d'éloigner
l'occasion. Il est certain que ce» lui qui est dans l'occasion prochaine
volontaire de péché mortel et qui n*a pas soin de s'en éloigner
pèche mortellement. Or, comme il est très difficile de fuir
l'occasion, et qu'on n'en vient à bout qu'en se faisant une grande
violence, celui <jui aurait déjà reçu l'absolution,
se ferait difficilement cette vio-lence ; car, une fois délivré
de la crainte de n'être point absous,il se flatterait bientôt
de pouvoir ré-sister à la tentation, sans éloigner
l'occasion; et ainsi ne se mettant point en peine de la fuir, il re->
(1) Lib. VI. n. 454-
l44
INSTRUCTION PRATIQUE
tomberait certainement dans son premier péché. C'est
ce que nous voyons tous les jours par Inexpé-rience de tant de misérables,
qui, une fois qu'ils ont pu se faire absoudre par des confesseurs impru-dents,
n'éloignent point ensuite l'occasion et retom-bent pire qu'auparavant.
D'où il résulte que le pé-nitent qui s'expose au danger
de manquer à son ferme propos, en recevant l'absolution sans avoir
éloigné l'occasion, pèche grièvement, et que
le con-fesseur qui la lui donne pèche plus grièvement en-core.
V. J'ai dit ordinairement parlant, puisque les docteurs (1) en exceptent
d'abord le cas où le pé-nitent donnerait de tels signes extraordinaires,
qu'on aurait.raison de juger qu'il n'est plus dans le dan-ger prochain
de manquer à la résolution qu'il a prise d'éloigner
l'occasion ; car alors ces signes indiquent que le pénitent a reçu
du ciel une grâce plus abon-dante par laquelle il peut espérer
d'être fidèle à éloigner l'occasion. Malgré
cela, toutes les fois qu'il est facile de différer l'absolution,
je suis d'avis qu'on doit encore le faire dans ce cas, jusqu'à ce
que le pénitent ait réellement éloigné l'occasion.
En second lieu, on en excepte encore le cas où le pé-nitent
ne pourrait plus revenir à confesse, ou bien de long-temps ; alors
on peut lui donner l'absolution, si on le voit bien disposé et bien
résolu à éloigner aussitôt l'occasion ; parce
que, dans ce cas, on re-garde comme éloigné le danger de
manquer à son ferme propos, à cause du grand péril
auquel est exposé le pénitent en s'en allant sans recevoir
l'ab-solution, soit de répéter sa confession à un
autre
(1) Lib. VI. ?. 454- V. iliiJt amen.
POUR LES CONFESSEURS.
prêtre, soit encore de rester long-temps sans la grâce
du sacrement. Ainsi donc, se trouvant dans une nécessité
morale de recevoir l'absolution avant d'a-voir éloigné l'occasion,
il a toutes les raisons né-cessaires pour être absous (?),
puisque, dès lors qu'il ne peut éloigner l'occasion sans
avoir aupara-vant reçu l'absolution, il est censé être
dans une oc-casion nécessaire. Mais cela ne devrait pas non plus
avoir lieu , si le pénitent avait été déjà
averti par un autre confesseur d'éloigner l'occasion et s'il né
l'a-vait point fait; parce qu'alors il est censé faire une rechute,
c'est pourquoi il peut être absous, à moins qu'il ne donne
des marques extraordinaires de re-pentir, comme nous le dirons dans le
paragraphe sui-vant, n. 12.
VI. Voilà pour l'occasion prochaine volontaire ; mais si l'occasion
est nécessaire, soit physiquement, comme si quelqu'un était
en prison ou bien à l'ar-ticle de la mort et qu'il n'eût point
le temps ou les moyens de chasser sa maîtresse ; soit encore mora-lement
, c'est-à-dire si l'on ne pouvait éloigner l'oc-casion sans
scandale ou sans de grandes pertes, soit pour la vie, pour l'honneur ou
pour les biens de la fortune, comme l'enseignent communément les
docteurs (2). .Dans ce cas, le pénitent peut très bien recevoir
l'absolution sans éloigner l'oc-casion; car alors il n'y est point
obligé, pourvu qu'il promette de prendre tous les moyens néces-saires
pour faire en sorte que l'occasion de-vienne éloignée, de
prochaine qu'elle est, comme, par exemple, en matière de péché
honteux, de fuir la
(1) Lib. VI. ?. ?54. V. Excipe a. (a) N. 455.
T, XXVI.
10
l46
INSTRUCTION PRATIQUE
familiarité et même la vue, s'il est possible, de Son
complice; de fréquenter les sacrements; de se re-eommander souvent
à Dieu, en renouvelant tous les jours (.précisément
le matin ) aux pieds du cru-cifix la promesse de ne plus pécher
et d'éviter l'oc-casion autant qu'il sera possible. La raison de
cela, c'est que l'occasion de pécher n'est point propre-ment un
péché en elle-même, et qu'elle ne force point à
pécher ; d'où il suit que, même dans l'oc-casion ,
on peut avoir un véritable repentir et un ferme propos de ne plus
retomber. Et quoique cha-cun 'soit tenu de s'éloigner du péril
prochain de pé-cher, il n'y est tenu cependant qu'autant qu'il court
lui-même de son plein gré vers ce danger; mais quand l'occasion
est moralement nécessaire, alors le péril, au moyen de remèdes
salutaires, devient éloigné, et Dieu ne manque jamais d'assister
de sa grâce celui qui est véritablement résolu de ne
point l'offenser. La sainte Ecriture ne dit point que celui qui est dans
le danger périra, mais bien celui qui aime le danger ; mais peut-on
dire qu'il aime le danger celui qui le court contre sa propre volonté?
C'est pourquoi saint Basile (1) a dit : « Qui urgenti » aliqua
causa, et necessitate se periculo objicit vel » permittit se esse
in illo, cum tamen alias nollet, »??? tam dicitur amare periculum,
quam invitus » subire ; et ideo magis providebit Deus , ne in illo
» peccet. »
VIL D'après cela, les docteurs disent que ceux qui refusent
de laisser quelque office, ou quelque affaire, ou bien quelque maison où
ils ont péché ordi-nairement, parce qu'ils nepeuvent le faire
sans éprou-
(l) In Conet. men. c. 4·
l>Otm LÉS CONFESSEURS.
l4?
verde pertes graves, ceux-là peuvent être également
absous toutes les fois qu'ils ont la véritable résolu-tion
de se corriger ou de prendre les moyens pour se corriger ; tels sont,
par exemple, les chirurgiens qui, en traitant les femmes, ou bien les curés
qui, en entendant lenrs confessions , se sont laissé aller au péché
; si ces derniers cessaient de s'exposer au péril, il est évident
qu'ils ne pourraient point vivre selon leur état (1).
Cependant tous conviennent que dans des cas semblables il est
bon'de différer l'absolution, afin que le pénitent apporte
au moins plus d'attention à mettre en usage les remèdes qu'on
lui a prescrits. Quant à moi, je pense que le confesseur non seulement
peut, mais même est tenu d'agir ainsi toutes les fois qu'il peut
le faire sans inconvénient, surtout lorsqu'il s'agit de matière
honteuse; car, comme médecin des âmes , il est obligé
de leur ad-ministrer des remèdes salutaires. Or, je crois qu'il
n'y a pas de remède plus propre à celui qui est dans l'occasion
prochaine de pécher que de lui différer l'absolution ; car
l'expérience ne nous a que trop appris qu'un grand nombre
de ces individus , après avoir reçu l'absolution, négligeaient
d'employer les moyens qu'on leur avait assignés, et que bientôt
ils retombaient dans leur premier état. Mais , au contraire, qu'on
diffère l'absolution à quelque pé-nitent, on le verra
bien plus vigilant à exécuter les moyens que lui a prescrits
le confesseur, et à résister aux tentations, dans la crainte
d'être renvoyé de nouveau sans absolution lorsqu'il retournera
à con-"fesse. Peut être qu'en cela on me taxera de trop de
rigidité ; mais je ne crains point de le dire, j'ai tou-
(î) Lib. VI. ?. 455 in fin.
148
INSTRUCTION PRATIQUE
jours pratiqué ainsi, et toujours je pratiquerai de même
à l'égard de ceux qui sont dans l'occasion prochaine quoique
nécessaire, et quoiqu'ils don-nent des signes extraordinaires de
douleur, toutes les fois que je ne serai point strictement obligé
de les absoudre sans aucun retard ; et cette conduite, à mon avis,
paraît la plus utile et la plus propre pour aplanir aux pénitents
les voies du salut. Oh! plût à Dieu que tous les confesseurs
imitassent mon exemple! combien de fautes ils empêcheraient de commettre,
et combien d'âmes ils délivreraient de la damnation éternelle
! Oui, je le répète, lorsqu'il s'agit d'arracher les pénitents
du péché formel, le confesseur doit alors suivre les opinions
les plus bénignes, autant que le permet la prudence chré-tienne
; mais lorsque les opinions bénignes rendent plus voisin le péril
du péché formel, comme préci-sément il arrive
en matière d'occasion prochaine, alors, dis-je, il est de toute
utilité et de toute néces-sité que le confesseur suive
l'opinion la plus rigide, puisque cette dernière est d'une plus
grande utilité pour le salut des âmes. Ensuite, si quelqu'un,
étant dans l'occasion prochaine, retombait toujours de la même
manière, malgré l'emploi de tous les remè-des, et
s'il ne donnait que très peu d'espérance de se corriger,
je dis alors qu'on doit à tout prix lui refuser l'absolution, à
moins qu'il n'évite d'abord l'occasion (1), comme l'on croit que
l'enseigne ce précepte de l'Évangile :« Si oculus tuus
scandalisât » te, ejice eum (2). » On en excepte toutefois
le cas où le pénitent donnerait des marques d'une dou-
(1) Lib. VI. ?. 457. (a) Marc. 19.
POUR LES CONFESSEURS.
l^Ç)
leur si extraordinaire qu'on pourrait sans impru-dence espérer
qu'il se corrigera (i).
§ II. Conduite du confesseur à l'égard
de ceux qui ont des habitudes, et de ceux qui retombent.
VIII. Il faut distinguer ici ceux qui ont des ha-bitudes de ceux qui
font des rechutes. Les habitués sont ceux qui ont contracté
une habitude dans quelque vice, de laquelle ils ne se sont point encore
confessés. Or, ces derniers, comme le disent les docteurs (2), peuvent
très bien être absous la pre-mière fois qu'ils se confessent
d'une mauvaise habi-tude, ou bien quand ils s'en-confessent après
s'en être corrigés, pourvu que leur disposition soit ac-compagnée
d'une véritable douleur et d'un ferme propos de prendre tous les
moyens efficaces pour se corriger. Cependant lorsque l'habitude est pro-fondément
enracinée , le confesseur peut avec rai-son différer l'absolution
pour éprouver comment se conduit le pénitent dans la pratique
des moyens qu'il lui a prescrits, et pour lui inspirer plus d'hor»
reur de son vice. Nous observerons qne cinq re-chutes dans un mois peuvent
bien constituer une mauvaise habitude dans quelque vice de péchés
ex-térieurs, pourvu que ces rechutes aient entre elles quelque intervalle.
Et en matière de fornioatior, de sodomie, de bestialité,
il n'est point nécessaire de cinq rechutes pour constituer une habitude
; ainsi, par exemple, celui qui se livrerait à la fornication une
fois par mois dans l'espace d'un an, celui-là
(1) Lab. VI, n. 457- »n fin. (a) N. 458.
INSTRUCTION PRATIQUE
peut bien être regardé comme en ayant contracte l'habitude.
IX. Ceux qui récidivent, au contraire, sont ceux qui, après
leur confession, retombent dans les mêmes péchés
ou presque dans les mêmes péchés, sans avoir
apporté aucune amélioration à leur conduite. Or, ceux-ci,
comme l'enseignent communément les docteurs (1), ne peuvent être
absous, s'ils ne don-nent simplement que des signes ordinaires,
c'est-à-dire, s'ils se contentent d'avouer leurs fautes et de dire
qu'ils se repentent et qu'ils sont résolus de ne plus pécher,
ainsi que nous le voyons par la propo-sition 5o condamnée par InnOi
XI; car l'habitude que le pénitent a contractée et ses fréquentes
re-chutes sans aucune amélioration dans sa conduite font grandement
soupçonner que la douleur et le propos qu'il assure avoir ne
sont point véritables. C'est pourquoi, on doit différer pendant
quelque temps de donner l'absolution à ces derniers, au moins jusqu'à
ce qu'ils donnent des signes certains d'un changement véritable.
C'est ici surtout que nous avons grand sujet de pleurer, en voyant les
maux sans nombre que causent les mauvais confesseurs en donnant indistinctement
l'absolution à ceux qui font des rechutes. En effet,
ces malheureux se voyant toujours ainsi absous avec tant de
facilité, finissent par ne plus concevoir d'horreur du péché
et persévèrent à vivre dans leur mauvaise habitude
jusqu'à la mort (2). Quelques docteurs admettent
que celui qui retombe peut être absous sans aucun retard, pourvu
qu'il donne des signes ordinaires
(1) Lib. VI. ?. 458. V. Recidivu.. (a) N.458.V. Dicunt.
POU» LES CONFHSSEURS.
l5l
jusqu'à la troisième et quatrième fois ; mais
ce sen-timent, jamais je n'ai pensé devoir l'adopter; car l'habitué
qui est retombé après une seule confes-sion, sans s'être
corrigé, fait déjà une véritable re-chute,
et donne des soupçons bien fondés sur sa mauvaise disposition.
Nous observerons ici que cette règle a lieu également pour
les péchés véniels, puisqu'on a beau admettre communément
que ceux qui retombent dans les mêmes péchés véniels
peuvent être absous avec plus de facilité, attendu que dans
ce cas les occasions sont plus fréquentes. Néan-moins, comme
le sentiment commun (?) veut que ce soit un péché mortel
et même un sacrilège de s'accuser de fautes légères,
sans avoir une véritable contrition et un ferme propos, ainsi que
le déclare le chap, xv, num. 2$. On doit craindre avec raison que
de sem-blables confessions ne soient autant de sacrilèges, ou au
moins qu'elles ne soient invalides. C'est pour quoi, nous avertissons le
confesseur de ne point abj soudre indistinctement de tels pénitents;
car alors, quand même ils seraient dans la bonne foi, ils n'en commettraient
pas moins un sacrilège, s'ils rece-vaient l'absolution sans être
bien disposés. Cepen-dant, s'il veut l'absoudre, qu'il ait au moins
soin de disposer le pénitent à se repentir spécialement
de quelque faute vénielle pour laquelle il conçoit le plus
d'horreur; ou bien de-lui faire répéter quelqie péché
de la vie passée contre quelque vertu (il n'est pas nécessaire
qu'il le spécifie ), afin d'avoir une matière certaine sur
laquelle il puisse appliquer l'absolution; sans quoi, il est tenu, de différer
pour quelque temps de lui donne!· l'absolution.
(1) Lib. VL u. 44g. dub. ?.
?5?
INSTRUCTION PRATIQUE
X. Je dis « pour quelque temps : » car , autant
pour ceux qui retombent dans des fautes légères, que pour
ceux qui retombent dans des fautes graves, il n'est point nécessaire
de différer l'absolution pendant un an ou un mois, comme Juénin
(1) le prétend avec trop de rigidité. Mais il suffit, si
le péché est l'effet de la fragilité intrinsèque,
d'un dé-lai de huit ou dix jours, selon le sentiment du sa-vant
auteur de l'Instruction pour les nouveaux confesseurs,
imprimée à Rome (2). Cet auteur écrit la même
chose pour les confesseurs des bourgs et des villages (?), et il
cite à l'appui de cette doctrine Louis Habert (4)· Ces deux
docteurs ajoutent qu'il est excessivement dangereux de différer
l'absolution d'un mois, parce que, après un si long espace
de temps, il est difficile que le pénitent revienne
à confesse. Benoît XIV (5) semble favoriser ce sen-timent,
lorsqu'il dit, en exhortant les confesseurs qui diffèrent précisément
l'absolution aux pénitents: « Illos quantotius ut revertantur
invitent, ut ad sa-«cramentale forum regressi absolutionis
beneficio «donentur.» En somme, je crois que le confesseur
peut différer quinze ou vingt jours de donner l'ab-solution à
de semblables pénitents. Cependant, il faut en excepter ceux
qui se confessent pour rem-plir leur devoir pascal; car, à
l'égard de ces der-niers, il faut une épreuve de plus
de huit ou dix jours, attendu que l'on peut soupçonner avec raison
(1) Lib. VI. ?. 463.
(a) Part. 1. c. 9. a. 9l5.
(5) Cap. 1. § 4-
(4) ?? praxi, pœnit. tract. 4· ?· 4'7·
(5) Bulla apostolica in bullar. t. 3. p. 343. § aa,
POUR 1ES CONFESSEURS.
l55
qu'ils evitent toute rechute plutôt pour ne point encourir la
censure, que parce qu'ils sont véritable-ment résolus de
changer de vie. Il faut encore en exempter ceux qui tombent par occasion
prochaine extrinsèque; car ceux-ci ont besoin d'une plus grande
épreuve, attendu que l'occasion (comme nous l'avons dit au paragraphe
précédent) est un puissant aiguillon qui stimule au ' péché.
Néan-moins, toujours il suffit que l'épreuve ait duré
un mois ; mais le confesseur doit bien se garder de dire au pénitent
qu'il a nn mois à attendre avant de revenir, parce qu'il l'effraierait
d'un si long délai :il doit, au contraire, lui recommander de revenir
au bout de huit jours ou de quinze jours au plus. C'est ainsi que, par
de belles manières, il lui fera attendre un mois pour recevoir l'absolution.
XI. Ainsi donc pour absoudre ceux qui font des rechutes, il ne suffit
point qu'ils donnent seulement des signes ordinaires, mais il faut qu'ils
donnent des signes extraordinaires de douleur et de ferme propos. Or, selon
le sentiment commun (t), ces derniers suffisent pour faire absoudre le
pénitent; puisque le signe extraordinaire, pourvu qu'il soit solide
et fondé, détruit les soupçons qu'avaient fait naître
ses rechutes. C'est bien avec raison que les évêques de la
Flandre, rassemblés l'an 1670, dans un décret fait pour l'Instruction
des confesseurs de leurs diocèses, dirent", en parlant sur le même
sujet : « que Dieu considérait moins, dans la conversion du
pécheur, la mesure du temps que celle de la dou-leur. » «
Deum in conversione peccatoris non tam
(?) Lib. VI, u. 45?. V, recldivus.
âS4
INSTRUCTION PRATIQUE
» considerare mensuram temporis , quam dolo-»ris(i). »
C'est pourquoi ils défendirent aux con-fesseurs d'exiger^ en vertu
d'une loi stable, que les pénitents, même ceux qui font des
rechutes, fissent une longue épreuve avant d'être absous.
Certes, c'est bien avec raison, puisque là seule preuve du temps
? est point l'unique signe du changement de la volonté ; car la
volonté du pécheur change par la vertu de la grâce
divine qui he demande point du temps, mais opère à la fois
en un instant ; d'où il résulte qu'il est d'autres signes,
sans l'épreuve du temps, qui peuvent faire connaître le changement
survenu dans la volonté. Ainsi, les autres signes de la dis-position
actuelle du pénitent manifestent également le changement
de la volonté beaucoup mieux que la preuve du temps -, puisque ces
signes démontrent directement la disposition, tandis que l'épreuve
ne la démontre qu'indirectement ; car souvent il arrive qu'un pénitent
s'abstient pendant long-temps de pécher, sans encore avoir pour
cela une véritable disposition. C'est ce qui a fait dire à.l'auteur
de l'Instruction pour les nouveaux confesseurs : « que si la chute
est l'effet de la propre fragilité, sans autre cause extrinsèque
volontaire, c'est presque une té-mérité de dire qùé
tout pénitent qui retombe est mal disposé (9). » 11
ajoute encore ailleurs (?) que celui qui fait une rechute par la force
de sa mau-vaise habitude, doit être absous toutes les fois qu'il
manifeste une volonté ferme de faire tout son pos-sible pour se
corriger. « Et nous croyons, dit· il,
(1) Lacroix 1. VI. p. *, n. 18a. (a) Ibid. p. c. i5. v. 35o.] (5) Ibid;
e. 9. ». 5i3.
POUR LES CONFESSEURS.
i5l
que faire autrement serait agir avec trop de rigueur, et que le confesseur
qui agirait ainsi s'éloignerait de l'esprit de l'Eglise du Seigneur
et de la nature du sacrement, qui n'est point seulement un juge-ment, mais
encore un remède salutaire.
XII. Or, ces signes sont de diverses natures^
comme l'enseignent les docteurs (i) : Premièrement, une grande
douleur manifestée par des larmes
(pourvu qu'elles soient le fruit d'une véritable com-ponction),
ou bien par des paroles qui partent du, cœur , lesquelles peuvent bien
être en même temps des signes plus certains que les larmes
elles-mêmes. a. Le nombre considérablement diminué
des pé-chés (on entend que le pénitent se soit trouvé
dans les mêmes occasions de pécher et dans les mêmes
tentations), ou bien si, après sa dernière confession, le
pénitent s'est maintenu long-temps en état de grâce
, comme, par exemple» l'espace de vingt ou trente jours,
tandis qu'auparavant il avait l'habitude de tomber dans le péché
plusieurs fois la semaine; ou bien s'il est tombé après avoir
lutté long-tenips contre la tentation; ou bien encore si, avant
de ve-nir à confesse, il s'était abstenu
pendant long-temps de pécher mortellement selon son
habitude. 3. Les soins qu'on apporte à se corriger, comme, par exemple,
si le pénitent avait fui l'occasion, s'il avait employé les
moyens prescrits par le confesseur, ou bien s'il avait jeûné,
s'il avait fait des aumônes, des prières, s'il avait fait
dire des messes, pour faire une bonne confession; 4· Si le
pénitent cher-che alors des remèdes ou de nouveaux moyens
pour se corriger, ou biea s'il promet de faire usage
(i) Lib. VL ?. 46?.
156
INSTRUCTION PRATIQUE
de ceux quelui enseigne le confesseur, surtout si d'au-tres auparavant
ne l'avaient point averti déjà de les employer. Mais rarement
on doit avoir une si grande foi en ces promesses, qu'on les croie suffisantes
s'il n'y a pas quelque autre signe ; car les pénitents, pour avoir
l'absolution, font beaucoup de promesses, et les tiennent ensuite difficilement.
5. La confession spontanée, c'est-à-dire si le pénitent
vient se con-fesser, non point pour satisfaire au précepte pascal,
ni par un pieux usage de se confesser à certaines fêtes, comme
à la Nativité, à la fête de la Sainte Vierge,
ni par l'ordre de son père, de son patron ou de son maître,
mais s'il vient au tribunal de la pénitence par un effet de sa propre
volonté, ou par une véritable inspiration du ciel, dans l'intention
seule de recevoir la grâce divine, surtout si, pour se confesser,
il a fait un long voyage, ou s'il s'est abstenu d'un gain considerable,
ou bien encore s'il a supporté de graves incommodités, ou
s'il a résisté à de grands combats intérieurs
ou extérieurs. 6. S'il est venu à confesse poussé
par Une impulsion ex-traordinaire , comme, par exemple, au sortir d'un
sermon qui l'a frappé, à la nouvelle de la mort de quelque
voisin, ou bien par la crainte de quelque châtiment qui le menace,
d'un tremblement de terre ou de quelque peste, etc. ?. Si le pénitent
confesse quelques péchés graves que la honte lui avait empêché
d'avouer dans ses autres confessions. 8. Si, après avoir entendu
l'avertissement que lui a donné le confesseur, le pénitent
montre une plus grande connaissance et une plus grande horreur de son péché
ou du péril qu'il court de perdre pour toujours son âme. 9.
Si, avant de se confesser, le pénitent avait eu soin de rendre^es
biens-à celui à
POUR 1ES CONFESSEURS.
nui il les avait dérobés, ou l'honneur à la personne
à qui il l'avait lait perdre. D'autres docteurs ajou-tent encore
d'autres signes, comme, par exemple , si le pénitent se soumettait
à une grande pénitence volontairement, s'il assurait s'être
repenti de son péché aussitôt après l'avoir
commis , s'il jurait qu'il mourra plutôt désormais que de
consentir au pé-ché. Mais je crois que ces signes ne peuvent
point suffire lorsqu'ils sont seuls, et que plutôt ils peu-vent venir
au secours d'autres qui, étant seuls , sont suffisants par eux-mêmes.
XIII. En général, toutes les fois qu'il y a quel-que
signe qui fait juger avec raison que la volonté du pénitent
est changée, ce dernier peut être ab-sous ; puisque, quoiqu'il
faille que le confesseur soit moralement certain pour l'absoudre, néanmoins
nous observons que dans les autres sacrements où la ma-tière
est physique, la certitude doit être encore phy-sique ; tandis que
dans le sacrement de la pénitence, la matière étant
morale comme les actes du péni -tent, il suffit que la certitude
soit morale ou res-pective, comme nous l'avons déjà prouvé
(?), c'est-à-dire qu'il suffit que le confesseur ait une sage probabilité
de la disposition du pénitent, sans qu'il y ait aucun soupçon
fondé pour le contraire; autre-ment il ne pourrait absoudre les
pénitents que diffi-cilement , attendu que les signes que donnent
ces derniers n'établissent autre chose, sinon une pro-babilité
de leur disposition : « Ne demandez point autre chose, » dit
l'auteur de l'Instruction pour les nouveaux confesseurs pour administrer
le sacre-ment de la pénitence, sinon un jugement sage et
(0 Lib. VI. ?. 57 et 46i,
158
INSTRUCTION PRATIQUE
probable de la disposition du pénitent; c'est pour-quoi , si
les circonstances ne font point douter avec fondement que le pénitent
n'est point suffisamment disposé, le confesseur ne doit point s'inquiéter
lui-Hiême, ni inquiéter son pénitent pour avoir une
évideHce qu'il est impossible d'avoir (?). Voyez là' dessus
le ehap. xvi, n. 117, à la fin. On observe, au sujet des mauvaises
habitudes, qu'il est plus fa-cile d'absoudre ceux qui retombent dans les
blas-phèmes que ceux qui retombent dans d'autres pé-chés
, soit de haine, soit d'impureté ou de vol; car l'habitude que l'on
contracte de ces derniers, jette de plus profondes racines à cause
de la plus grande concupiscence qui y intervient.
XIV. Nous avons dit que le confesseur peut don-ner l'absolution à
ceux qui ont de mauvaises habi-tudes ou qui retombent, quand leur disposition
est accompagnée de signes extraordinaires ; mais nous n'avons point
voulu dire pour cela qu'il y était obligé; car, il peut encore
la différer lorsqu'il le juge avan-tageux, comme l'enseignent communément
tous les docteurs (2). En effet, quoique le pénitent ait droit à
recevoir l'absolution aussitôt qu'il a fait l'aveu de ses péchés
, néanmoins il n'a point droit à, être ab-sous tout
de suite; car le confesseur, comme méde-cin , peut bien, ainsi qu'il
y est obligé, différer l'ab-solution, lorsqu'il juge que
ce remède est néces-saire au salut de son
pénitent. Maintenant, est-il avantageux ou non de faire usage
ordinairement de ce remède , sans le consentement du pénitent?
11 est certain que non, lorsque le délai peut être
(1) Lib. VI. p. c. i5. n. S60, (») N. 469.
Î>OtR tlîS CONFESSEURS.
plus nuisible que profitable. Les docteurs disent la même chose,
si le pénitent avait à éprouver par ce délai
quelque perte dans l'estime publique, ou s'il était exposé
|à perdre son honneur (1). Mais, hors de ces cas, quelques uns prétendent
qu'il vaut mieux différer l'absolution à ceux qui retombent
ainsi ; d'autres plus communément soutiennent que cette conduite
est rarement utile ; or, ce dernier sentiment a été celui
encore d'un grand missionnaire de notre siècle, le P. Leopard, de
Port-Maurice, dans son Traité mystique et moral, qui a été
imprimé à Rome. Néanmoins, il vaut mieux dire qu'on
ne peut établir sur ce point aucune règle certaine, mais
que le confesseur doit se guider sur les cir-constances présentes,-qu'il
doit se recommander à Dieu et ensuite n'écouter que son inspiration.
Cet avis est le mien, et je dis, d'après le sentiment plus commun
des docteurs (2), que si le pénitent est retombé par l'effet
de la fragilité intrinsèque (pomme il arrive dans les péchés
de colère, de haine, de blasphème, de pollution ou de jouissance
qui dure long-temps), je pense qu'il est rarement utile de différer
l'absolution à celui qui retombe, pourvu qu'il soit bien disposé;
car on doit espérer que la grâce du sacrement sera plus profitable
à ce der-nier que le délai de l'absolution.
XV. Je dis par fragilité intrinsèque ; car l'on de-vrait
agir autrement à l'égard de celui qui serait retombé
par occasion extrinsèque, quoique néces-saire , attendu que
cette dernière provoque à des pensées beaucoup plus
vives, et que la présence de
(1) Lïb. VI. 465. (a) Ibid, V. ut autem,
l6o
INSTlttJCîION PRATIQUE
l'objet remue avec beaucoup plus de force les sens, et rend l'affection
au péché beaucoup plus intense que ne le fait la mauvaise
habitude intrinsèque ; c'est pourquoi le pénitent doit faire
de grands efforts, non seulement pour vaincre la tentation, mais encore
pour fuir la familiarité et la présence de l'objet, afin
que le péril, de prochain qu'il est, devienne éloigné.
Or, cela est encore plus nécessaire si l'oc-casion est volontaire,
et si l'on doit l'éloigner en-tièrement , parce qu'alors
celui qui recevrait l'abso-lution sans l'avoir éloignée auparavant,
courrait grand risque de manquer à la résolution qu'il a
prise de l'éloigner, comme nous l'avons démontré au
pa-ragraphe précédent, 'n. 4- Dans l'habitué, au con-traire,
par occasion intrinsèque, le péril de ne point tenir sa résolution
est plus éloignée; car, d'un côté, il n'y a
point d'objet qui le pousse avec violence au péché, et de
l'autre, il ne dépend point de sa volonté de réprimer
sa mauvaise habitude, comme il dépend de sa volonté de ne
point éloigner l'occa-sion; aussi, dans ce cas, Dieu vient en aide
aux be-soins de celui qui a contracté une mauvaise habitude; et
pour cela, en lui donnant l'absolution on peut espérer qu'il se
corrigera plutôt avec la grâce du sacrement, que si on différait
de l'absoudre j en effet, la grâce du sacrement rendra plus efficaces
les moyens qu'il emploiera pour extirper de son cœur sa mauvaise habitude.
C'est pourquoi, disent les théologiens de Salamanque (i), doit-on
espérer ja-mais que le délaide l'absolution soit plus profitable
à un pécheur qui n'a point la grâce, que ne l'est à
un serviteur de Dieu l'absolution qui lui donne la grâce?
(i) Salm. de pœnit. c. 5. n. 67, in fin.
POUR LES CONFESSEURS.
l6l
Le cardinal Tolet (i), parlant précisément du péché
de mollesse, pense qu'il n'y a pas de remède plus efficace pour
ce vice que de se fortifier souvent avec le sacrement de la pénitence;
et il ajoute que ce sacrement est le frein le plus grand pour retenir celui
qui se livre à ce péché, et que celui qui ne fait
point usage de ce remède ne doit espérer de se corriger que
par un miracle. Et. en effet, saint philippe de Néri, comme on le
lit dans sa vie (2) se servait beaucoup du moyen delà fréquente
con-fession à l'égard de ceux qui font des rechutes dans
ce vice. A l'appui de cela, on peut encore rapporter ce que dit le Rituel
romain en parlant de la péni-tence; void ses propres paroles :«
in peccata facile » recolentibus utilissimum fuerit consulere ut
sœpe » confiteantur; et si expediat communicent; » «
facile » recideimbus. , Or, en parlant de ceux qui retom-bent facilement,
il est certain qu'il entend parler des personnes qui n'ont point encore
extirpé de leur cœur leurs mauvaises habitudes. Quelques au-teurs,
prétendant sauver les âmes, par la seule voie de la rigueur,
soutiennent que tous ceux qui font des rechutes deviennent pires, toutes
les fois qu'ils reçoivent l'absolution avant de s'être corrigés.
Mais je voudrais bien savoir de ces fameux docteurs, si tous ceux qui retombent
deviennent plus forts lorsquils sont renvoyés sans absolution, et
si tous se corrigent. Hélas! combien n'en ai-je point con-nus dans
le cours de mes missions qui se sont aban-donnés à l'inconduite
et au désespoir, parce qu'on leur avait refusé l'absolution,
et qui ne se sont plus
(1) Toi. c. 6. n. a. (a) Cap. 6. n. 2. T. XXVI,
II
i6a
confessés de plusieurs années! Du teste, je le ré-pète
, c'est sur les lumières que le Seigneur liti ac-corde, que chacun
doit se régler là-dessus. Ce qui est bien certain, c'est
que dans cette matière celui qui donne l'absolution avec trop de
facilité, celui-là se trompe autant que celui qui est trop
difficile à absoudre. Plusieurs, par trop de condescendance sont
cause que beaucoup d'âmes se perdent ; et l'on ne peut nier que ces
derniers ne soient en plus grahd nombre et qu'ils ne fassent plus de mal
par la rai-son que ceux qui ont de mauvaises habitudes se présentent
à eux en plus grand nombre. Les autres, au contraire, par leur trop
de rigueur, ne causent pas moins de ravages. Aussi, je crois qu'un confes-seur
ne doit pas seulement se faire scrupule d'ab-soudre ceux qui ne sont point
disposés, mais en-core de renvoyer sans absolution ceux
qui sont suffisamment disposés, ,1e conclus en donnant mon avis
sur ce point : je dis , en premier lieu, et j'a-voue que quelquefois
il peut bien être utile de dif-férer à celui qui fait
Une rechute l'absolution lors-qu'il est bien disposé. Je dis, en
second lieu, que toujours il est Utile que le confesseur fasse semblant
de fie pouvoir l'absoudre. Je dis en dernier lieu, qu'ordinairement parlant,
le bienfait de l'absolution est beaucoup plus utile qiie le délai
à l'égard de ceux qui retombent par fragilité
intrinsèque, et dont la disposition est accompagnée
de quelque signe extraordinaire. Dieu veuille que les confes-seurs
ne donnent l'absolution à ceux qui font des rechutes que lorsqu'ils
portent •avec eux des signes extraordinaires! Le mal est que, la plupart,
pour ne point dire le plus grand nombrfe deâ confesseurs, absolvent
généralement ceux qui tetombent sans
FOUR LES CONFESSEURS.
163
aucune distinction, sans aucun signe extraordi-naire, sans réprimande,
et sans leur donner au moins quelque remède pour se corriger. De
là naît véritablement (non point d'absoudre ceux qui
sont disposés) la ruine universelle de tant d'âmes in-fortunées.
XVI. Cependant ce que nous venons de dire en général
pour ceux qui ont contracté de mauvaises habitudes et ceux qui retombent,
n'a point égale-meut lieu pour les ordinands qui sont dans l'habi-tude
de quelque vice (surtout de l'impureté), et qui veulent être
élevés à quelque ordre sacré, puisque pour
ces derniers il existe d'autres raisons. En ef-fet, le séculier
qui a une mauvaise habitude peut être abbous toutes les fois qu'il
est disposé pour re-cevoir le sacrement de la pénitence;
mais pour l'ordinand qui a également une mauvaise habitude, ce n'est'point
assez, s'il veut prendre les ordres sa-crés, qu'il ait les dispositions
nécessaires pour le sacrement de pénitence; il faut encore
qu'il soit disposé pour le sacrement de l'Ordre , sans quoi il ne
serait disposé ni pour l'un ni pour l'autre de ces deux sacrements.
En effet, comme celui qui est à peine sorti de l'état de
péché et qui n'a point encore les qualités positives
nécessaires à la hauteur du ministère auquel il veut
parvenir, est indigne de monter à l'autel, il s'ensuit qu'il se
rend coupable de péché, si, sans avoir ces qualités,
il prend les ordres sacrés, quand bien même il se mettrait
en grâce avec Dieu. C'est pourquoi le confesseur ne peut l'absoudre,
à moins qu'il ne promette de re-noncer aux ordres, auxquels il ne
pourra aspirer qu'après avoir fait une longue épreuve, au
moins de plusieurs mois. Cela a été pleinement prouvé
dans
l64
INSTRUCTION PRATIQUE
la dissertation que nous avons donnée dans notre ouvrage (1),
d'après le sentiment commun des doc-teurs (2) que nous y avons cités,
et qui disent que, pour prendre les ordres sacrés, il ne suffit
point d'avoir des qualités communes, c'est-à-dire, d'être
exempt simplement de fautes graves, mais qu'il faut avoir des qualités
spéciales par lesquelles le su-jet est purifié de toute mauvaise
habitude, comme l'eiaseigne saint Thomas par ces paroles : « Ordines
» sacri prœexigunt sanctitatem, undè pondus ordi-nnuin imponendum
parietibus, jam per sanctitatem » dessiccatis , id est, ab humore
vitiorum (?). » La raison de cela, c'est que l'ordinand, qui n'a
point cette bonté spéciale, est indigne d'être constitué
au-dessus du peuple pour remplir le ministère su-blime de l'autel
: « Sicut illi (dit le saint docteur) qui » ordinem suscipiunt,
super plebem constituuntur «gradu ordinis; ita et superiores sint
merito sanc-» titatis- (4). » Et dans un autre endroit (5),
il donne plus expressément la même raison que nous venons
de donner : a Quia per sacrum ordinem aliquis dis-1 ponitur ad dignissima
ministeria, quibus ipsi «Christo servitur in sacramento altaris,
ad quod re-» quiritur major sanctitas interior, quam requirat »
etiam religionis status. » Voyez le chap, vu, n» 48, où
nous avons parlé plus au long sur ce point.
XVII. Néanmoins on en excepte le cas où le Seigneur donnerait
à quelqu'un une componction
(1) Lib. VI. ?. 63. (a) ?. 68.
(3) s. a. q. 186. a. 1. ad 3.
(4) Suppl. q. 35, a. 3. ad 3.
(5) a. 2. q. 184. a. 8.
POTTR LES CONFESSETIRS.
l65
si extraordinaire, qu'elle le guérirait de sa première
faiblesse, puisque, comme le dit le même saint Thomas, « Quandoque
tanta commotione convertit » (Deus) cor hominis, ut subito perfecte
consequa-jtur sanctitatem spiritualem (?). »I1 est vrai que de semblables
conversions sont rares, surtout parmi les ordinands, quand même ils
viendraient faire leurs exercices dans quelque maison religieuse, ' parce
que le plus souvent ils n'y viennent que par force. Mais, si quelqu'un
recevait véritablement une grâce si abondante du Seigneur
(dont les misé-ricordes sont admirables) qu'elle le changeât
tel-lement, que, quoiqu'il sentît encore quelque mou-vement déréglé
dans ses sens, néanmoinsil s'aperçut que son horreur pour
le péché est extrême, et que l'ardeur de sa concupiscence
est considérablement diminuée; si, dis-je, fortifié
par la grâce, il triom-phait facilement des tentations, s'il était
fermement résolu à l'avenir non seulement de fuir les péchés
et les occasions, mais encore de prendre les moyens les plus propres pour
vivre en digne ecclésiastique; si déjà il s'aidait
de la prière, s'il conjurait le Sei-gneur de lui donner la persévérance,
avec une si grande confiance en Dieu, qu'il se crût moralement certain
de changer entièrement de vie; alors, dans un cas semblable, je
dis que le confesseur pourrait l'absoudre, quand même il aurait l'intention
de re-cevoir les ordres sacrés aussitôt après sa confession.
Malgré cela, quoique dans ce cas le pénitent ait une grande
componction, le confesseur toutefois doit faire tout son possible pour
l'engager à différer son ordination, afin qu'il puisse mieux
se corriger de
(1) 3. p. q. 8. a, 5. ad ?.
i6f,
sa n1ai5yai.se Ijytbitiwje, et mieux accomplir son ferme propos. Ainsi,
à cet effet, si^èelui-ci s'obstine à vouloir prendre
les ordres, le confesseur peut en-core, comme médecin, différer
l'absolution dans l'intérêt du pénitent, afip que ce
dernier soit obligé de retarder son ordination, pourvu toutefois
que ce délai ne l'expose pojntà l'infamie, car alors (comme
nous l'avons remarqué au n. 4)> 'e pénitent est en droit
d'être absous tout de suite. Du reste, les confesseurs ne doivent
que difficilement absoudre ces sortes d'ordinands, lorsque cela est possible;
car d'ordinaire ils font de déplorable? rechutes et sont la ruine
des peuples et de l'Église (1) Or, tout ce que je viens de dire
là, Benoît XIV l'a prescrit lui-même dans son célèbre
ouvrage de Sinodo (2).
§ JII,' De quelques interrogations spéciales que le confes-seur
doit faire aux pénitents touchant les péchés qu'ils
ont commis.
I. Des demandes à faire aux ignorants.
XVIII. Nous avons déjà dit au ch. xvi, n. 102 , que quoique
l'obligation d'examiner la conscience regarde proprement le pénitent,
néanmoins lorsque le confesseur a un motif de croire que ce dernier
ne s'est point suffisamment examiné, il est alors obligé
de l'interroger. En outre, en parlant des ignorants, nous avons encore
dit au n. 2o3, que c'était une erreur de les renvoyer en leur recom-mandant
de mieux s'examiner, mais que le confes-
(0 Lib. VI. n. 66.
(a) Beaed. XIV. de synod. 1. II. 0. 3. 1. 17 jet 18.
LES CONFESSEURS.
167
$e,ur doit lui-même lps examiner, les interrpger selon l'ordre.
de,s préceptes du D,écalqgue, non pas sur pus les péchés
qu'ils opt pu commettre, mais seule-ment sur les plus usuels que ces personnes
ont cou-tume de faire, surtout si ce sont des cochers, des soldats, des
archers, des domestiques, des auber-gistes et autres semblables.
XIX. Touchant le premier précepte, le confes-seur doit demander
au pénitent, i° s'il connaît les articles de foi, comme
nous l'avons dit au chap. vi, n. 3. Mais c'est avec bien plus de raison
que le sa-vant missionnaire que nous avons cité plus haut, le P.
Léonard de Pprt-Maurice, observe dans son Traité mystique
et moral, n. 26, que le confesseur est obligé d'instruire les pénitents
ignorants, sur les mystères de la foi, au moins dans les quatre
princi» paux ; puis il ajoute : « Ce n'est point une sage mé-thode
de renvoyer ces ignorants, afin que d'autres les instruisent, car tout
le fruit qu'il en résulte, c'est qu'ils restent dans leur même
état d'ignorance. Mais il convient de leur enseigner en peu de mots
les susdits mystères principaux, en leur faisant faire un acte de
foi, d'espérance, de charité et de contrition, leur imposant
ensuite l'obligation de se faire in-struire d'une manière plus parfaite
sur les autres mystères que les préceptes de l'Église
nous obligent de savoir. » Quant aux personnes mieux élevées,
qui rougiraient d'être interrogées sur de semblables choses,
voici ce que le même écrivain ajoute qu'il est bon que le
confesseur leur dise : « Allons faisons ensemble les actes de foi.
» Et en faisant l'acte de foi, il ajoute : « Mon Dieu, parce
que vous êtes la vérité infaillible, et que vous l'avez
révélé à la sainte Égh'se, je crois
tout ce que m'enseigne la
l68
INSTRUCTION PRATIQUE
sainte Eglise de croire ; je crois surtout que vous êtes trois
personnes en un seul Dieu ; je crois que le Fils s'est fait homme, qu'il
est mort pour nous en croix, qu'il est ressuscité et qu'il est assis
dans le ciel, d'où il viendra juger tous les hommes, pour donner
le paradis aux bons et la damnation éter-nelle aux méchants.
» On observe, en outre, que Benoît XIV, dans la const. 4^,
de doctrina christiana, § 12 (V. le Bullarium,t. i),'déclare
qu'on doit refu-ser l'absolution à celui qui par sa faute a négligé
de s'instruire sur les choses qu'il est nécessaire de sa-voir ,
ou que les préceptes de l'Église nous obligent de savoir.
Mais quant aux choses qui sont de précepte, il ajoute qu'on peut
absoudre le pénitent, pourvu qu'il promette de tout son cœur et
qu'il fasse un ferme propos de les apprendre. Voici ses propres paroles
: «Eo quandoque casu poenitens absolvi potest, quosi » vincibilis
hujus ignorantiae reum agnoscit, et pro-» mittit,operam se impense
daturum addiscere neces-» saria necessitate praecepti. » En
second lieu, le con-fesseur doit demander au pénitent s'il a fait
ou ensei-gné des choses superstitieuses, et si dans ces choses il
a employé quelque autre personne en la faisant coopérer à
son péché. Il doit surtout bien expliquer aux ignorants que
les superstitions sont toujours il-licites , quoiqu'on les fasse par charité
et dans un cas de nécessité. Pour ce qui est de savoir si
ces actions sont superstitieuses ou non, voyez dans le cours de l'ouvrage.
En troisième lieu, il doit demander au pénitent si dans ses
confessions passées il n'a point caché quelque péché
par honte, et il doit avoir soin de faire surtout cette demande aux ignorants
et aux femmes qui fréquentent rarement les sacrements, à
peu près en ces termes : « N'avez-vous pas quelque
POUR LES CONFESSEURS.
l6g
scrupule sur votre vie passée ? Faites maintenant une bonne
confession; avouez tout avec franchise; n'ayez point peur, délivrez-vous
de tous vos scru-pules. » C'est par de telles demandes qu'un bon
con-fesseur disait qu'il avait sauvé à un grand nombre d'âmes
des confessions sacrilèges. Dans le cas où le pénitent
a commis de semblables sacrilèges, le con-fesseur lui demande (pour
en connaître le nombre) combien de fois il s'est confessé
et combien de fois il a communié depuis qu'il a caché ces
péchés ; et si chaque fois qu'il se confessait ou qu'il communiait,
il se rappelait son sacrilège; car il arrive souvent à des
personnes de faire quelque confession sacrilège, surtout dans leur
enfance, et puis de les oublier. Dans ce cas, elles ne sont poiut obligées
de recom-mencer les confessions qui ont immédiatement suivi l'oubli.
En outre , il lui demande, s'il savait qu'avec cette confession ou communion
sacrilège, il trans-gressait encore le précepte pascal. Il
est bon de faire cette demande sur les sacrilèges au commencement
de la confession, afin que par ce moyen , si l'on découvrait par
hasard que le pénitent a commis quelque sacrilège, on ne
soit point tenu à lui faire recommencer avec plus d'exactitude la
confession de sa vie passée. Or, il faut observer à ceux
qui ont caché leurs péchés quel crime abominable ils
ont commis en foulant aux pieds !e sang de J.-C. En qua-trième lieu,
le confesseur doit encore demander au pénitent s'il a satisfait
à la pénitence qu'on lui avait imposée; s'il n'y a
point manqué, ou bien s'il n'a point eu l'intention de la laisser
ou de la différer pour la remplir plus tard, ou bien pour se la
faire changer. En cinquième lieu, il doit l'interroger sur les scandales,
lui demandant s'il n'a point cherché à
INSTRUCTION PRATIQUE
incjuirg les autres au péché; si en cela"il ne s'est
point servi d'autres personnes, et s'il n'a point co-opéré
au péché d'autrui. Si le pénitent est un au-bergiste,
il doit l^i demander s'il n'a point donné du vin à une personne
habituée de se soûler ; si c'est une femme, il doit lui demander
si par des paroles peu modestes, ou des plaisanteries, des soqrires, des
œillades, ou bien encore par l'indécence de ses vêtements
ou de son corps, elle n'a poinf; provoqué les hommes à des
mauvaises pensées ; si elle n'a point reçu de ces derniers
des présents donnés avec de mauvaises intentions.
XX. Touchant le second commandement, le confesseur doit demander, en
premier lieu, au péni-tent s'il n'a point violé quelque vœu
; en second lieu, s'il n'a point juré, soit par quelque saint, soit
par quelque chose de'sacré, soit par l'âme, par la con-science
ou par la foi. En troisième lieu, s'il n'a point blasphémé;
si, comme nous l'avons dit, il n'a point prononcé ces mots mannagia,
atta ou potta. Il doit encore lui demander contre quoi il a blas-phémé
, si c'est contre les saints, contre les jours ou contre les choses saintes,
en outre s'il n'a point blas-phémé en présence de
ses fils ou déjeunes gens, parce qu'alors au péché
de blasphème se joindrait celui de scandale. Voyez sur le blasphème
ce que nous avons dit au ch. v, n. i et suiv. Cependant nous devons observer
ici avec l'Instructeur des nouveaux confes-seurs, que les blasphémateurs
ne sont point exempts de fautes graves, quoique la force de l'habitude
ou la violence de la colère leur ait empêché de con-naître
ce qu'ils disaient; car, bien qu'ils aient une connaissance moins vive
que les autres qui ne sont point habitués à blasphémer,
néanmoins ils ont la
POUR tpS CONFESSEURS.
I7I
connaissance actuelle suffisante pour que l'acte soit délibéré
et mortel. En effet, ils font peu de cas du péché, parce
que dans leur esprit il se fajt une im-pression moins sensible que celle
qu'éprouverait toute autre personne dont la .conscience serait plus
pure ; de là il résulte qu'ils ne conservent dans leur mémoire
aucun vestige de la connaissance actuelle qu'ils ont très bien eue
du péché) ou bien ce vestige est si léger que lorsqu'on
les interroge, ils répqndent aussitôt qu'ils n'en ont eu aucune
connaissance. Sfais un sage confesseur ne doit pas les croire ; néanmoins
il doit leur demander s'ils se sont aperçus ou non qu'ils blasphémaient
: enfin, il doit prendre pour de véritables blasphèmes actuels
ceux que ces derniers regardent comme tels (1).
XXI. Touchant le troisième commandement, le confesseur demande
au pénitent, i° s'il n'a point manqué quelquefois la
messe un jour de fête, et s'i} s'est aperçu qu'il la manquait
; ou bien s'il n'a point eu de doute sur le temps qu'il pouvait l'entendre;
car souvent il arrive que le pénitent, attendant trop tard pour
entendre la messe, bien que par hasard il en ait encore trouvé une,
néanmoins il s'est ex-posé sans motif valable au péril
de la manquer ; c'est de quoi les ignorants ne s'accusent jamais. 2°
II doit lui demander s'il n'a point travaillé le dimanche ; combien
de temps il a travaillé et à quelle sorte de travail il s'est
livré ; si ce travail était pénible ou léger.
Si ensuite le pénitent disait d'une manière confuse que des
fois il a travaillé plus, d'autres fois moins; alors c'est au confesseur
à lui demander combien de fois environ il croit avoir travaillé
en
(0 Lib. VI, ?, ??5.
I72
INSTRUCTION PRATIQUE
matière grave. Il faut bien observer aux ignorants que Je travail
n'est jamais licite le dimanche, quoi-qu'il soit occulte et sans salaire.
En outre, il doit demander au pénitent pour quel motif il a travaillé;
s'il y était forcé pour obéir soit à son père,
soit à son mari, soit à son patron.
XXII. Touchant le quatrième commandement, si ce sont des enfants
qui se confessent, le confes-seur doit leur demander s'ils n'ont jamais
manqué de respect à leurs parents, soit par des actions,
soit par des paroles injurieuses, ou par des imprécations; s'ils
ne les ont point-pris en haine, s'ils ne leur ont point désobéi
en matière grave. Nous observerons que les enfants qui ont manqué
de respect à leurs pa-rents sont obligés de leur faire réparation
d'hon-neur en implorant leur pardon , et même en pré-sence
des personnes qui ont été témoins de leur faute. Quelques
confesseurs peu sages imposent dans ce cas pour pénitence aux enfants
d'embrasser les pieds de leurs parents lorsqu'ils seront de retour chez
eux, et puis ils les absolvent. Mais ceux-ci n'en font rien , et continuent
de pécher comme au-paravant, II vaut mieux faire en sorte, avant
de les absoudre, qu'ils demandent pardon à leurs parents, mais sans
leur imposer l'obligation d'embrasser leurs pieds ou leurs mains, parce
que les enfants qui n'en ont point l'habitude s'y soumettraient dif-ficilement.
Cependant, si le confesseur ne pouvait pas commodément exiger avant
l'absolution qu'ils demandassent pardon à leurs parents, alors il
ne leur en ferait pas une obligation grave , mais plutôt il le leur
conseillerait ; car on peut présumer avec cer-titude, au moins pour
le plus souvent, que les parents dégagent leurs enfants de cette
obligation,
POUR LES CONFESSEURS.
173
pour ne pas les voir de nouveau dans la disgrâce de
Die H·
XXIII. Si ce sont, au contraire, les parents qui se confessent, le
confesseur leur demandera, i0·s'ils ne manquent point à l'éducation
de leurs enfants en négligeant de leur apprendre la doctrine
chrétienne, en ne veillant point à ce qu'ils entendent la
messe, à ce qu'ils fréquentent les sacrements, à
ce qu'ils fuient les mauvaises compagnies ou les personnes de différent
sexe. En outre, il leur demandera s'ils ne leur ont point donné
quelque sujet de scandale en blasphémant en leur présence,
etc.; s'ils n'ont point négligé de les corriger dans leurs
fautes, surtout dans les vols qu'ils ont commis ; s'ils n'ont point
souffert que les fiancés de leurs filles vinssent dans leur maison,
et particulièrement s'ils n'ont point laissé leurs filles
et leurs fils coucher dans le même lit ou dormir ensemble pêle-mêle.
11 demandera encore aux patrons s'ils ont corrigé
leurs garçons qui blasphèment, ou qui
ne remplissent point leur devoir pascal, ou qui
n'entendent point la messe, ou bien encore qui tiennent des
discours déshonnêtes, surtout en temps de vendanges, puis-que
les patrons sont obligés , lorsqu'ils le peuvent, d'empêcher
les blasphèmes qui se commettent alors. Il demandera ensuite aux
maris s'ils ont eu soin de pourvoir aux besoins de leur famille; aux femmes,
si elles ont provoqué leur mari à blasphémer, et si
elles ont rendu le devoir conjugal. Le confesseur doit le
plus souvent faire cette demande
aux femmes, parce qu'il en est plusieurs qui se damnent sur ce chapitre,
et qui sont cause de la damnation même de leur mari, qui, se voyant
refuser le devoir, se livrent à mille excès. Néanmoins,
dans de sem-
INSTRUCTION PRATIQUE
blables demandes, le confesseur doit Se servir des termes les plus
modestes, par exemple , comme les suivants : « Etes-vous obéissante
à votre mari, même dans le mariage ?» ou bien : «
N'àvez-Vous aucun scrupule sur le mariage ? » Mais il hé
doit point faire cette demande aux personnes qui mènent une vie
spirituelle.
XXIV. Sur le cinquième commandement, le confesseur demandera
au pénitent s'il ne s'est point réjoui du mal arrivé
au prochain, ou s'il ne lui a point souhaité du mal en l'envoyant
à la malédiction. Car, ce qui embarrasse le plus les pauvrfis
confesseurs, c'est de distinguer si les imprécations auxquelles
se livrent d'ordinaire ces ignorants, sont des péchés mortels
ou des péchés véniels. En cela, le confes-seur doit
demander eri premier lieu au pénitent, si c'est de propos délibéré
qu'il a désiré de voir arriver du mal à son prochain..
Mais cela ne suffit pas en-core pour porter un jugement sûr; c'est
pourquoi il doit lui demander en second lieu, si c'est à la malédiction
des étrangers ou des parents qu'il l'a envoyé ; car si c'est
à la malédiction des parents, spécialement des enfants,
des époux ou des pères , rarement il y a mauvaise intention.
En troisième lieu, il doit lui demander la raison qui l'a fait agir
ainsi, parce qUe si la raison est grave et si c'est une violente colère,
il peut bien se faire qu'il y ait eu mauvaise intention. Du reste, pour
excuser ces ma-lédictions, il ne suffit point (comme l'observe Gaé-tan
), de dire qu'on voulait dans l'acte même voir arriver le mal t mais
non point après ; parce que cela même est assez pour que cet
acte ait été suivi d'un péché grave. C'est
pourquoi le confesseur s'informe du nombre de ces malédictions et
les juge au moins
POUR LES CONFESSEURS.
Ìj5
comme elles le sont en présence de ÎDieU. Si le pé-nitent
par hasard était retombé dans ce vice, il ne doit point l'absoudre
qu'il ne le voie corrigé aupa-ravant , ou que ce dernier rie donne
des signes extra-ordinaires de douleur. En second lieu, il lui deman-dera
s'il a fait ou dit des injures graves au prochain, si c'était en
présence d'autres personnes ; car alors le pénitent est obligé,
en présence de ces mêmes personnes, de lui faire réparation
d'honneUr en lui demandant pardon ou en donnant d'autres preuves d'estime
; à moins qu'il ne présumât avec raison que l'injure
a été pardonnée ou que l'offensé refuse de
re-cevoir une satisfaction publique pour ne point renou-veler sa propre
horité en ce qui le concerne, et pouf ce qui est des autres , le
souvenir de l'injure qu'il â reçue ; ou bien encore qu'il
ne craigne que-cette ré-paration ne fasse réveiller la haine.
Si néanmoins l'injure avait été faite en secret,le
péniteht est encore obligé de demander pardon, selon le sentiment
véri-tabledes docteurs. Cependant nous observerons que les injures
que se disent réciproquement les ignorants, bien que graves en elles-mêmes,
ne le sont point tou-jours à l'égard de ces derniers (comme
par exemple lorsqu'ils s'appellent voleurs , sorciers, libertihS)
, parce qu'ils y attachent bien peu d'importance et que celui qui les entend
n'y ajoute aucune foi, à moins toutefois qu'ils ne spécifiassent
les faits, et qu'ils ne nommassent les complices particuliers. Le confesseur
doit demander, en troisième lieu, au pé-nitent, s'il n'a
point fomenté des discordes en rap-portant ce que les uns disaient
des autres.Èn outré, si le confesseur sait que le pénitent
a reçu quelque injure, il doit lui demander s'il a accorde la rémis-sion
de l'offense, lorsqu'on lui a demandé excuse.
INSTRUCTION PRATIQUE
Voyez là-dessus ce qui a été dit au chap, iv,
n. 17. Nous observerons ici ce qui a été avancé par
Tour-nely (1), savoir que l'offensé a le pouvoir de pré-tendre
en justice à la satisfaction de l'injure qu'il a reçue, si
sans cette mesure sa famille restait plongée dans le déshonneur.
Nous observerons encore ce que dit saint Thomas (2), savoir que l'on peut
exiger avec raison le châtiment du coupable, soit pour mettre un
frein à son insolence, soit encore pour obtenir la tranquillité
des autres. Voici ses propres paroles : « Si vero intentio vindicantis
feratur prin-» cipaliter ad aliquod bonum per poenam peccantis »
(puta ad emendationem vel ad cohibitionem ejus, 1 et quietem aliorum et
ad justitiae conservationem), * potest esse vindicatio licita. »
Mais pour ce qui est du maintien de la justice (ce que les offensés
met-tent presque toujours en avant), il faut que le con-fesseur agisse
avec une extrême prudence, parce que ordinairement, comme nous l'avons
dit dans le lieu que nous venons de citer, sous le voile de l'in-térêt
de la justice, le pénitent cache le désir de sa propre vengeance.
Il doit encore demander à ces ignorants, sur le cinquième
commandement, si jamais ils ne se sont soûlés jusqu'à
perdre la raison et leurs sens. Voyez là-dessus ce que nous avons
dit au chap, vin, n. 4·
XXV. Touchant le sixième commandement : 1° Interrogentur
de cogitationibus, num desidera-verint, aut morose delectati fuerint de
rebus in-honestis ; et an plene ad eas adverterint, et consen-serint. Deinde
num concupierint puellas, aut viduas,
(?) Tom-?. t. V. p. a65. (?) a. a. q. 108, art. a.
POUR LES CONFESSEURS.
I77
aut nuptas ; et quid maii cum illis se acturos inten-derint. In quo
avertendum, quod rustici, communi-ter loquendo, existimant majus peccatum
stuprum, quam simplicem fornicationem. E contrario igno-rant malitiam adulterii;
ideo cum iis, quihujus vitii consuetudinem habent, non expedit eos monere
de adulterii malitia, cum providetur monitio parum profutura. De his
autem cogitationibus, quibus assentiti sunt, sumendus est
numerus certus, si haberi potest; sin autem, exquirantur quoties
in die , vel hebdomada, vel in mense cogitationibus consenserint. Sed si
nec etiam id explicare possint, interrogent™·, num concupierint
singulas feminas qua? sibi occurrerint, vel in mentem venerint. Aut num
habitualiter turpiter de aliqua in particulari cogitarint, nunquam pravis
consensibus resistendo. Et an semper illam concupierint, vel an tantum
quando ipsam aspiciebant. Demum interrogentur etiam, num media apposuerint
ad malas cogitationes exequendas; nam (ut diximus,cap.ni, n. 48, in fin.)
tunc illa media a malitia interna informantur, et ideo explicanda ut peccata
externa, sive opera in-coepta.
XXVI. 2. Circa verba obscœna, interrogentur, i° coram quibus et
quoties ita locuti sint, ratione scandali; an coram viris, aut feminis;
conjugatis , aut non; pueris, vel adultis; facilius enim scanda-lizantur
puellae et pueri, quam adulti, praesertim qui in hoc vitio sunt habituati.
a' Quae dixerint verba, an v. gr. nominarent pudenda sexus a suo diversi;
hoc enim difficulter excusatur a mortali. 3° Num verba protulerint
ex ira, vel joco ; nam ex ira difficilius aderit complacentia et scandalum.
( Caveat confessarius ab absolvendis hujusmodi x. xxvi.
12
I78
INSTRUCTION PRATIQUE
recidivis in colloquiis turpibus, quamvis dicant ea protulisse ex joco,
nisi prius emendentur, vel si-gnum extraordinarium doloris afferant. )
4° Num jactaverint se de aliqua peccato; tunc enim tria peccata frequenter
concurrunt, scilicet ingens scan-dalum audientium, jactantia de maio commisso,
et complacentia de peccato narrato. Ideoque interro-gandi sunt, de quo
peccato in. specie se jaetarint. Interrogentur etiam, an delectati sint
audiendo alios inhoneste loquentes, et an tunc adverterint ad correctionis
praeceptum, putantes, eam profu-turam.
XXVII. 5. Girea opera, interrogentur, cum qua rem habuerint; num alias
cum eadem peccarint; ubi peccatum fuerit patratum (ad occasiones remo-vendas
); quoties peccatum fuerit consummatum; et quot actus iuterrupti adfuerunt,
seorsim a pec-cato. Num peccato multum ante consenserint; nam tunc, si
multum , actus interni interrumpuntur, juxta dicta cap. in, ?. 52. Et tunc
expedit formare judicium, toties multiplicata esse peccata, quot mo-ruloe
somni^distractionis, etc*, interfuerint, prout sunt coram Deo , tantum
interrogando de temporis durations in peccato. Secus si malum propositum
perdiâiTasset tantum per duos vel tres dies, et intra illud tempus
non fuisset retracta tum; vide ibid.
XXVIII. Se polluenies interrogentur etiam de tactâbus impiidicis,
separatis a pollutionibus, et moneantur eos e_sse mortalia. Item interrogentur,
an in actu polkitionis concupierint, vel an delectati fuerint de copula
GOgitata cum aliqua vel pluribus mulieribus, aut pueris; tunc enim tot
peccata dis-tincta committunt. Circa autem peccata conjugum, respectu ad
debitum maritale, ordinarie loquendo,
POTR LES CONFESSEURS.
179
eonfessarius non tenetur, nec debet interrogate nisi uxores an illud
reddiderint, rnodèstìori modo qtiò possit, puta an
fuerint obedientës viris in omnibus, pe aliis taceat, nisi certior
fiat a poenitente. Qua? autem liceant, et quae non, inter conjngês,
circaf debitum conjugale, vide quae dicta sunt in e. xvm, ex n. 3?.
XXIX. Sur le septième commandement, le con-fesseur
doit demander au pénitent s'il a dérobé le bien d'autrui;
si cela lui est arrivé une ou plusieurs fois; si c'est à
un ou à plusieurs patrons; si ces derniers étaient riches
ou pauvres, afin de discerner si la matière a été
grave ou légère.
XXX. Touchant le huitième commandement, il doit demander
au pénitent s'il a médit du prochain en matière grave;
si la médisance était fondée ou non; dans le cas où
le fait eût été véritable, s'il était
secret ou public; si, étant secret, il l'avait dit à quelqu'un
qui ne le savait point, et à combien de personnes il l'avait
dit; en outre, s'il l'a donné comme certain, ou comme
l'ayant appris d'autres individus qui le racontaient ; s'il a engagé
les autres à le divulguer; si d'autres personnes en
ont été témoins; enfin, s'il s'est réjoui d'entendre
diffamer le prochain. De plus, il doit lui demander s'il n'a point attaqué
l'honneur du prochain en sa présence; car, dans ce cas, il y a même
calomnié, laquelle est un péché distinct de la médisance.
Pour ce qui est ensuite de la conduite des confesseurs touchant la réparation
de 1 honneur et de la réputation du pro-chain, voyez le chap, xi,
n. 3, 4» 18 et suivants. Sur ce huitième commandement,
il n'est point né-cessaire que le confesseur demande au pénitent
s*il a porté des jugements téméraires, par'ëe
que ces
?8?
INSTRUCTION PRATIQUE
jugements que l'on porte communément, entraînent rarement
à des fautes graves; car, pour le plus sou-vent, ce ne sont point
des jugements, mais des soupçons, et quand on porte un jugement
sur une personne, c'est qu'on a des motifs suffisants pour juger ainsi.
Par conséquent, il importe en même temps de détromper
ceux de ces ignorants qui se font scrupule d'avoir des soupçons,
lorsqu'ils y sont obligés pour prévenir le mal qu'ils peuvent
empê-cher ; par exemple, certaines mères dont les filles fréquentent
leurs fiancés ou leurs parents en secret ou bien avec trop de mystère.
De même encore certains maris dont les femmes fréquentent
avec trop de familiarité d'autres hommes. Or, lorsque ces personnes
se confessent d'avoir porté des juge-ments ou d'avoir eu des soupçons
téméraires, le confesseur doit les avertir de n'avoir aucun
scrupule là-dessus, leur représentant que dans ces cas ils
sont obligés de soupçonner le mal qui peut exister, afin
d'éloigner les occasions et d'arrêter de sem-blables confidences.
XXXI. Pour ce qui est ensuite des commande-ments de l'Église,
il n'y a point d'autres demandes à faire aux pénitents, sinon
s'ils ont jeûné pendant le carême et les vigiles, lorsque
le confesseur suppose qu'ils y sont obligés. Il doit encore leur
demander s'ils ont mangé des mets défendus le vendredi et
le samedi, et pendant le carême et vigile.
IL Des demandes que le confesseur doit faire aux personnes de divers
états ou de diverses conditions qui ont négligé l'état
de leur conscience.
XXXIII. Observez que, touchant les obliga-tions attachées à
notre état ou à nos fonctions, le
POtTR LES CONFESSEURS.
l8l
confesseur ne doit pas toujours se contenter de demander seulement
au pénitent s'il les a remplies : lorsqu'il voit que la personne
a négligé l'état de sa conscience, ou bien lorsqu'il
a, d'un autre côté, de justes soupçons qu'elle a manqué
à ses obliga-tions, alors il faut qu'il l'interroge en particulier,
au moins sur les obligations principales. Et d'abord si c'est un
prêtre qui se confesse ,
le confes-seur doit lui demander s'il a toujours satisfait
aux offices et aux obligations des messes y ou-s'il ne les a point différés
pendant long-temps (Oh! com-bien de confesseurs se damnent par ce péché
! ); s'il ne se livre point à quelque commerce ; s'il ne joue point
à des jeux prohibés, s'il ne dit point la messe à
la hâte (voyez là-dessus ce que nous avons dit au chap, xv,
?. 84, 85 et 86). Si ce prêtre est un béné-ficié
, il doit l'interroger sur les fruits de son béné-fice ,
sur l'emploi qu'il en a fait. Si c'est un con-fesseur, il doit lui demander
surtout si jamais il n'a donné l'absolution à ceux qui se
trouvaient dans l'occasion prochaine avant qu'ils eussent éloigné
l'occasion, ou bien à un pénitent qui avait fait une rechute,
quoiqu'il ne donnât aucun signe extraordi-naire. Si c'est un curé,
il doit l'interroger sur les obligations spéciales de son office,
comme nous l'avons dit au ch. vu, ??. ?4· Mais surtout à
l'égard de ce dernier, il doit bien se garder d'oublier de ?lui
faire les demandes suivantes : i° s'il a été
at-tentif à corriger ceux de ses paroissiens qui avaient des haines
ou de mauvaises habitudes, ou bien qui fréquentaient
la maison de leurs fiancées;
2° s'il a eu soin de faire remplir à ses paroissiens le devoir
pascal, en exigeant d'eux un certificat ou quelque autre marque certaine,
sans faire acception
l82
ÌXSSHPCTJON PfiATIQUE
de personne. Jp crains bien que plusieurs curés ne se daffinent
en négligeant de remplir cette obliga-tion; 5° s'il a. pu soin
de prêcher les dimanches, d'enseigner la doctrine chrétienne,
et d'administrer les sacrements, surtout aux moribonds ; 4° il doit
principalemept lui demander s'il n'a point donné aux ordinands des
certificats de bonnes mœurs at-testant qu'ils ont fréquenté
les sacrements, sans être pertain de la moralité et de la
conduite de ces der-niers. Enfin, si le pénitent était un
évêque, et si le confesseur savait qu'il a négligé
l'état de sa con-science, il ne doit point oublier de l'interroger
sur ]es obligations qui lui sont spéciales, dont nous avons parlé
dans le même chap, vu, n. 47- H doit lui demander surtout s'il a
eu soin de se convaincre si les ordinands étaient suffisamment instruits,
et s'ils ?valent les qualités positives pour être, prêtres
(pomme ripus l'avons dit au chap, vu, que nous venons d,e citer, n. 47
et 5?), sans se contenter seulement de la seule attestatiqn des curés,
laquelle, le plus souvent, est pu fausse ou soupçonnée d'être
fausse, comme ayant été. fa,ite par respect humain. Çn
Çjutre, s'il a, donné la permission de confesser à,
des prêtres toujours bien versés dans la doctrine el; dans
les mœurs; sans quoi ces derniers seraient beai^coup plus nuisibles qu'utiles.
Il doit s'informer encore des scandales qui ont eu lieu dans le diocèse;
enfin, il doit lui demander s'il a soin de faire sa visite.
X)pÇIII. 2° Si le pénitent est une religieuse .cloîtïée,
il doit l'interroger sur le vœu de pauvreté, lui demandant comment
elle l'accomplit. Sur l'obli-gation de l'office divin, si elle ne garde
point rancune à quelqu'une de ses sœursj mais surtout il doit lui
FOUR LES CONFESSEURS.
185
demander si elle n'a point quelque correspondance périlleuse;
or, si elle avait réellement une corres-pondance, et si elle ne
voulait point la rompre, que le confesseur montre de la fermeté
en lui refusant l'absolution ; car, dans ces correspondances , si le but
n'est point extrêmement mauvais , au moins il y a à craindre
qu'il ne le devienne. Au moins il peut y avoir du scandale pour le correspondant
et pour les autres religieuses,qu'un semblable exemple peut entraîner
à en faire autant. Si cette religieuse était par hasard la
concierge, le confesseur doit lui demander si elle ne porte point des lettres
ou des messages suspects de liaison dangereuse. Si elle était dispensatrice,
il doit lui demander comment elle gère les biens du monastère;
si elle était la su-périeure, il doit surtout lui demander
si elle a été attentive, lorsque des hommes sont entrés
et ont demeuré dans le monastère; si elle a soin princi-palement
de ne point permettre que l'on tienne des conversations dangereuses à
la grille, et d'empê-cher qu'il ne s'introduise des abus nouveaux
qui, quoique de peu d'importance, pourraient néan-moins lui être
imputés comme faute grave, s'il en résultait quelque relâchement
général dans l'obser-vation de la règle,
XXXIV. ?" Si le pénitent est un juge, le con-fesseur doit lui
demander s'il a toujours approfondi les causes; s'il n'a point jugé
par passion, ou sans étude. 4° Si c'est un greffier, il doit
lui demander comment il s'est conduit en prenant les informa-tions ; s'il
n'a point fait des demandes de suggestion ; s'il n'a point diminué
ou altéré les dépositions; s'il ? a point exigé
ce qui ne lui appartenait point. 5° Si c'est un médecin, il
doit lui demander i. s'il s'est
l84
INSTRUCTION PRATIQUE
suffisamment versé dans la théorie et dans la pra-tique,
pour ce qui est du passé, et s'il s'applique à étudier
lorsqu'il se présente des cas plus difficiles, comme il y est obligé;
2. s'il n'a point permis de manger de la viande, ou de laisser l'office
ou la messe, par respect humain, sans nécessité, ou au moins
sans le doute que l'accomplissement de ces devoirs pouvait occasionner
quelque perte grave, ou apporter quelque grande incommodité 5 5.
s'il a administré quelque remède dangereux à un malade
qui n'était point encore sans espoir de guérir ; 4·
s'il a envoyé les recettes à quelque pharmacien infidèle,
ou peu habile, ou bien dont les remèdes étaient mauvais,
par la seule raison que ce dernier était son ami; 5. s'il a eu soin
de traiter les pauvres qui se trouvaient dans une extrême ou grave
nécessité, quoiqu'il ne dût recevoir aucun salaire;
6. ce que le confesseur doit demander encore avec beaucoup plus de soin,
c'est s'il a veillé à ce que les malades se confessassent
dans un temps favorable , selon le précepte des pontifes. Nous avons
parlé de cela dans plusieurs endroits de notre Morale (1), où
nous avons rapporté qu'Innocent III ordonna que les médecins
ne traitassent les malades qu'après la confession de ces derniers,
et que saint Pie V, en confirmant ce précepte, avait ajouté
que le médecin était tenu de cesser ses visites au bout de
trois jours, s'il n'était certain que le malade ne se fût
confessé; en outre, que tout médecin, avant de prendre le
grade de docteur, devait jurer d'observer ce pré-cepte , et que
cela était prescrit à tous les collèges. Mais on doute
comment on doit entendre ce pré-
(l) Lib. 3. ?, i6i. et Melius 1. VI. ?. 664.
POUR LES CONFESSEURS.
185
cepte et ce serinent ; plusieurs docteurs ont soutenu que cela devait
s'entendre lorsque la maladie est dangereuse , ou au moins quand on doute
qu'il y a danger; et ils ajoutent que c'est dans ce sens que la bulle du
saint Pie V a été reçue ; mais le sentiment plus commun
veut que ce précepte, quoique non obligatoire pour les maladies
légères , ne doive pas seulement s'entendre pour les maladies
actuellement dangereuses , mais encore pour celles que l'on juge avec raison
pouvoir dans la suite devenir mortelles. Or, la raison de cela, c'est que
le pape Innocent III prescrit aux médecins de faire confesser les
malades avant de leur donner leurs soins; afin, dit le pon-tife , que l'avertissement
de se confesser ne plonge le malade dans le désespoir et n'accélère
sa fin. Par conse'quent, il entend qu'on
fasse confesser les malades avant que leur maladie ne devienne mor-telle.
Ce sentiment me paraît le plus raisonnable; néanmoins je
n'ignore pas que généralement les médecins font
tout le contraire, au moins dans notre royaume, et je pense qu'il
en est de même dans tous les autres. Je parle même ici des
méde-cins qui ont la conscience timorée ; car, d'ordinaire,
ils n'avertissent leurs malades de se confesser que lorsque la maladie
est devenue probablement dan-gereuse. Or, en cela, ils.ne pensent
point pécher contre le serment qu'ils ont fait d'après la
bulle de saint Pie V, se fondant sur le sentiment de Navarre, Lay m., Vega,
de Graifiis, Rodrig., Giera, etc. (?), qui disent que ce
sernient n'oblige que pour la partie dans laquelle il a été
consacré par l'usage. Du reste, il est certain que ces médecins
qui n'avertis-
{i) Lib. VI. ?. 664. V. notant in fin. ad n. 5.
186
INSTRUCTION PRATIQUE
sent les malades de se confesser que lorsque la ma-ladie est grave
ou que l'on doute qu'elle soit grave, pèchent au moins mortellement.
Quel triste spec-tacle de voir tant de malades (et surtout quand ce sont
des personnes de condition ) réduits à mettre ordre à
leur conscience sur le point de mourir, lors-qu'ils ne sont plus déjà
que des cadavres, qu'ils peuvent à peine parler, à peine
entendre, à peine concevoir l'état de leur conscience et
la douleur de leurs péchés! Et tout cela par la faute des
médecins, qui, pour ne point déplaire aux malades ou à
leurs parents, ne les avertissent point du danger où ils sont, les
flattant ainsi de l'idée qu'il n'y a rien à craindre, jusqu'à
ce qu'enfin ils soient entièrement désespérés.
Que le confesseur ait donc soin, lors-qu'il confesse un médecin
qui a négligé l'état de sa conscience, de l'interroger
sur ce point, et de lui recommander, non point en passant, mais avec force
et d'une manière expresse, l'obligation de faire confesser les malades
, au moins lorsqu'ils s'a-perçoivent que leur maladie est grave
ou douteuse-ment grave. Je dis avec force ; car c'est de ce point que dépend,
non seulement le salut spirituel du médecin pénitent, mais
encore de tous ceux qu'il traite.
XXXV. 6° Si le pénit&nt est un chirurgien, ou un apothicaire,
le confesseur doit lui demander s'il n'a point donné des remèdes
à des femmes enceintes pour les faire avorter; s'il n'a point donné
un mé-dicament pour un autre, et à un prix plus cher qu'il
ne valait. Nous observons ici que Grégoire XIII, dans sa cons tit.
29, Officii nostri, prohibe toute association d'apothicaires avec des médecins
et des chirurgiens, ?" Si c'est ua négociant, le confesseu ?
POUR LES CONFESSEUfiS.
187
doit lui demander s'il a observé les poids et me-sures ; s'il
a vendu à un prix plus élevé, surtout en vendant à
crédit, lorsque les acheteurs étaient des personnes sûres,
et qu'il n'y avait aucune perte pour lui. Pour ce qui est dé savoir
s'il peut vendre plus cher lorsqu'il vend à crédit, par la
raison que tel est le prix courant des ventes à crédit, d'après
l'estimation commune, et si les marchandises en détail peuvent être
vendues à un meilleur prix, voyez ce que nous avons dit au chap,
?, ?. 174 et 178, avec Less., Lugo, Salman t., etc., et le senti-ment commun.
Si c'est un tailleur, le confesseur doit lui demander s'il a travaillé
pendant un temps considérable les jours de fête, pour finir
des habil-lements et les porter à leurs patrons, sans quelque cause
extraordinaire ; s'il a observé les jeûnes com-mandés
par l'Eglise, puisque les tailleurs n'en sont point exemptés par
le travail de l'aiguille ; s'il a altéré le prix en disant
que le marchand lui avait vendu le drap à meilleur marché,
à cause de lui. Dans le cas où il serait vrai que cette portion
du prix lui eût été en effet donnée à
sa considération, alors il peut se l'approprier, pourvu qu'il y
ait mis tous ses soins, et qu'il soit certain que les autres marchands
ne vendent pas cette marchandise à meilleur prix ; mais il faut
que cela soit plus que certain; autrement il ne pourrait rien exiger au-delà
du prix qu'il l'a payé. Voyez le chap, ?, ?. 18?. En outre, s'il
a gardé les rognures des habillements, puisqu'il ne le peut qu'autant
qu'il y est autorisé par la volonté du patron, ou que ce
dernier dût payer la façon au-dessous du plus bas prix, selon
l'estimation commune. Il doit lui demander encoresipar hasard ce n'est
pas pour lui une occasion prochaine de pé-
l88
INSTRUCTION PRATIQUE
cher de prendre la mesure des dames, comme il arrive souvent à
des jeunes gens de mauvaise vie.
XXXVI. g" Si le pénitent est un courtier ou une vendeuse ( on
veut dire ici ceux qui se chargent de vendre les marchandises des patrons
), le confes-seur doit leur demander s'ils n'ont rien retenu du prix exact
de la vente ; puisque nous avons soutenu (voyez le chap, ?, ?.
189), contre l'opinion des autres, que le courtier ne peut retenir le surplus
du prix même déterminé que le patron voulait de sa
marchandise ; parce que, lorsqu'on fixe le prix d'un objet, c'est afin
que cet objet ne se vende pas au-dessous, et non polir que le courtier
s'empare du surplus; il en est de même encore, quand même le
patron aurait assigné l'endroit où la marchandise devait
être vendue, si le courtier, par sa diligence et ses soins, avait
trouvé à s'en défairedans un au-tre endroit plus éloigné,
à un prix beaucoup plus élevé ; car alors nous disons
également qu'il ne peut pas retenir tout le surplus, mais seulement
ce que raisonnablement il a droit d'espérer à cause de la
peine extraordinaire qu'il s'est donnée; car il est certain que
la marchandise doit toujours fructifier au profit de son maître.
Dans quels cas ensuite le courtier peut retenir le surplus, voyez ce que
nous avons dit dans l'endroit que nous avons cité. Ce que nous venons
de dire, nous le disons encore du cas où le courtier, chargé
par quelqu'un d'acheter des marchandises à tel prix, les aurait
achetées à meilleur marché; car alors il ne peut s'approprier
le surplus de ce qu'il les a achetées , à moins que ce ne
soit en récompense de la peine extraordinaire qu'il s'est donnée
pour faire cette épargne, ou à moins que le courtier n'ait
acheté les marchandises
POTJR LES CONFESSEURS.
en son nom même, prenant sur lui toutes les chan-ces de cet achat.
Néanmoins on entend pour cela qu'il ait apporté une grande
exactitude et qu'il n'ait pas trouvé à acheter à plus
bas prix.
XXXVII. io° Si le pénitent est un barbier ou un perruquier,
il doit lui demander s'il n'a point fait la barbe les jours de fête
dans les endroits où ce n'était point l'habitude
; car cela est permis au contraire partout où
l'usage le veut ainsi, ou bien encore partout où les personnes sont
forcées de se faire raser le dimanche , comme sont, par exemple,
les individus qui vivent de leur travail. Il doit en-core lui demander
s'il n'arrange point la chevelure des dames selon la mode introduite de
nos jours par le démon ; je crois ( communément parlant )
que cela est une occasion prochaine pour les jeunes gens de pécher
mortellement par complaisance sen-suelle ou par mauvais désirs ;
d'où je conclus qu'on ne doit permettre cela à personne,
à l'exception de ceux qu'une longue expérience assure du
contraire. Ce-pendant si quelqu'un avait éprouvé pendant
un temps considérable que cela ne le fait point pécher, alors
il ne devrait point être accusé de péché mortel.
Mais, malgré cela, le confesseur doit avoir soin d'éloigner
autant qu'il le peut ses pénitents de ce métier, qui en lui-même
est certainement périlleux. Je n'entre point ici dans la question
si les dames qui se font arranger la chevelure par les hommes peuvent avoir
ou non la conscience tranquille. J'en vois un grand nombre agir ainsi,
et néanmoins se confesser et communier comme si de rien n'était
: videant ipsœ et ipsarum confessam. Au moins mon lecteur leur enjoindrait
de faire tout leur possible pour trouver quelque dame qui sût s'acquitter
de cet office, et si elles
INSTRUCTION PBATIQDE
n'en trouvaient pas, de ne pas se servir au moins déjeunes gens,
et surtout de ceux dont elles ont lieu de soupçonner la simplicité.
Du reste, je crois Lien certainement que les dames dont la conscience est
plus pure ne se serviraient jamais du ministère des hommes pour
ajuster leur chevelure, mais qu'elles se contenteraient plutôt du
ministère des femmes qui savent arranger les cheveux à une
mode plus décente.
§ III. Conduite des confesseurs envers les enfants, les
jeunes gens et les jeilnès filles.
XXXVIII. A l'égard des enfants, le confesseur doit user de toute
la charité et des manières les plus douces qu'il est possible
d'avoir. Il doit d'abord leur demander s'ils connaissent les articles de
foi, et s'ils ne les connaissent point, il faut alors qu'il ait la patience
de les leur apprendre, s'il a le temps, ou de les leur faire apprendre
par un autre, au moins pour ce qui est des choses indispensables au salut.
Venant ensuite à la confession, il faut, en premier lieu, qu'il
leur fasse dire les péchés qu'ils se rap-pellent d'eux-mêmes,
et ensuite il pourra leur adres-ser les questions
suivantes : i° s'ils n'ont point caché quelque
péché par honte ; 2° s'ils n'ont point blasphémé
contre les saints" ou contre les saints jours et s'ils ne jurent
point avec mensonge ; 3° s'ils n'ont point manqué la messe,
et si pendant qu'on la disait ils n'ont point parlé
; enfin s'ils n'ont point travaillé
les dimanches; 4° s'i's n'ont point désobéi à
leurs parents ou s'ils ne leur ont point manqué de respect en levant
la main contre eux, ou en leur disant quelque injure en leur présence
même , ou bien encore en les maudissant de ma-nière à
ce qu'ils l'entendissent ou en se moquant
POUR LES CONFESSEURS.
10,1
d'eux. Voyez ce que nous avons dit, au n. 21, sur l'obligation que
l'on doit imposer aux enfants de demander pardon à leurs parents.
5° S'ils n'ont point commis quelque péché honteux. Mais
c'est ici que le confesseur doit être extrêmement pru-dent
dans ses demandes. Il commencera par les interroger en se servant de paroles
détournées et générales. Et d'abord il leur
demandera s'ils n'ont point dit de mauvaises paroles, s'ils n'ont point
fait des plaisanteries atec leurs camarades ou avec des petites filles,
et si ces plaisanteries ils ne les ont point faites en cachette et en se
touchant l'un l'autre ; ensuite il leur demandera s'ils n'ont point fait
des choses honteuses ou de mauvaises paroles ( ainsi que les enfants appellent
les actions obscènes ). Quand même ils diraient que non plusieurs
fois , il faut néanmoins les prendre par adresse afin de sa-voir
la vérité, et leur dire, par exemple:* Eh bien , combien
de fois avez-vous fait ces choses ? Vous dites quinze fois ? » II
doit encore leur demander avec qui ils couchent, ou si dans leur lit ils
ne se sont point amusés avec leurs mains. Il doit deman-der aux
jeunes filles si elles n'ont point fait l'amour et si elles n'ont point
eu de mauvaises pensées , si elles n'ont point dit des paroles ou
fait des actions mauvaises. Et d'après leurs réponses il
verra les au-tres demandes qu'il a à leur faire. Sed abstineat ab
exquirendo à puellis, vel à pueris, an adfuerìt semi*
nis effusio. En général, avec les enfants, il vaut mieux
manquer dans l'intégrité matérielle de la con-fession
que de s'exposer à leur apprendre quelque chose qu'ils ne savent
point encore ou que la cu-riosité les porterait à savoir.
Il doit encore deman-der aux enfants s'ils n'ont point porté des
messages
1?2
INSTRUCTION PRATIQUE
ou des presents à des dames de la part des hommes; et aux filles,
si elles ont reçu des présents de per-sonnes suspectes et
surtout des époux, des ecclé-siastiques ou des religieux.
?° 11 doit encore leur demander s'ils n'ont point dérobé
le bien d'autrui, ou s'ils n'y ont point nui avec des animaux ou de quelque
autre manière. 8° S'ils n'ont point médit -de quelqu'un.
En-fin , touchant les commandements de l'Église, il doit leur demander
s'ils se sont con-fessés et s'ils ont communié à.
Pâques; s'ils n'ont point mangé de la viande les jours défendus,
comme les vendredis, les samedis, etc.
XXXIX. Pour ce qui est ensuite de l'absolution que l'on doit donner
à ces enfants, il faut que le confesseur apporte une grande attention
sur ce point. Quand il est certain qu'ils ont suffisamment l'usage de la
raison, comme , par exemple, s'ils se confessaient avec distinction ou
bien s'ils re'pon-daient exactement aux questions qu'il leur adresse, et
s'il voyait qu'ils comprennent parfaitement que par le péché
ils ont offensé Dieu et qu'ils ont mé-rité l'enfer
, alors il peut les absoudre s'ils sont disposés ; mais s'ils avaient
fait des rechutes dans des péchés mortels, il doit les traiter,
dans ce cas, comme des adultes; c'est pourquoi s'ils ne donnent point des
signes extraordinaires de douleur, il doit leur différer l'absolution.
Si ensuite il doutait s'ils jouissent parfaitement de l'usage de la raison,
comme, par exemple, si, pendant qu'ils se confessent, ils ne se tenaient
point recueillis, et s'ils tournaient les yeux à droite et à
gauche , s'amusant avec leurs mains et répondant des choses impertinentes,
alors s'ils sont à l'article de la mort ou en temps de précepte
pas-cal, il doit les absoudre sous condition, comme'
POUR LES CONFESSEURS.
Ig3
l'enseigne le sentiment très commun avec Lessius, £,ugo,
etc. (i). A plus forte raison encore s'ils se sont confessés de
quelque péché mortel douteux ; car il est bien permis alors,
même hors du temps du devoir pascal (comme le disent Laym., Ponz.,
Mazzotta ), de leur administrer le sacrement sous condition, puisqu'il
y a de justes motifs de les déli-vrer de l'état de damnation
éternelle si jamais ils y étaient. Ainsi doit-on agir encore
quand même l'enfant aurait fait une rechute; car l'on ne doit dif-férer
l'absolution à ceux qui ont le jugement parfait, qu'autant que l'on
espère qu'ils reviendront bien dis-posés. Mais on a rarement
cette espérance avec les autres qui n'ont pas parfaitement l'usage
de la rai-son ; et c'est avec probabilité que Sporer , Gobât,
Schilder, Diana et Mazzotta (2) disent que ces en-fants douteusement disposés
peuvent être absous sous condition ( au moins tous les deux ou trois
mois), quand même ils n'auraient sur la conscience que des péchés
véniels, afin qu'ils ne restent point privés de la grâce
sacramentelle, et peut-être même de la grâce sanctifiante,
si par hasard ils^avaient quel-que faute grave qu'ils ne connussent point.
Le con-fesseur est enspite obligé de faire faire à ces enfants
l'acte de contrition d'une manière plus propre à leur âge,
comme, par exemple:» Ètes-vous bien à Dieu qui est
un Seigneur aussi grand, aussi bon, qui vous a créé et qui
est mort pour vous , etc. ? Priez ce Dieu, vous qui l'avez offensé.
Il veut vous pardonner} espérez que par le sang de Jésus-Christ
il effacera toutes vos fautes; mais il faut pour cela
(1) Lib. VI. ?. 43a. circa fin. (a) Ibid.
?. xxvi.
>3
INSTRUCTION PRATIQHB
que vous vous repentiez. Que dites-vous? vous re-pentez-vous de l'avoir
offensé, etc. ? Hélas ! par ces fautes que vous avez commises
envers Dieu, vous avez mérité l'enfer ; êtes-vous fâché
de les avoir commises ? Jamais plus , etc. » La pénitence
ensuite que le confesseur doit imposer à ces enfants doit être
légère autant qu'il est possible, et il faut la leur faire
faire le plus tôt possible, autrement ou ils l'ou-blient ou ils ne
la font pas. Il faut surtout leur in-spirer la dévotion à
la bienheureuse Marie, en les engageant à dire le rosaire avec trois
Ave Maria le matin et le soir, et toujours avec cette prière: «
Ma bonne mère, délivrez-moi aujourd'hui et toujours du péché
mortel. »
XL.-Touchant l'état que doit choisir un jeune homme, le confesseur
doit bien se garder d'agir de manière à déterminer
sa volonté; au contraire, il doit seulement se régler sur
les signes de sa voca-tion, afin de lui conseiller l'état auquel
il croit avec raison que Dieu l'appelle. Quant à ceux qui \eulent
se faire religieux, le confesseur a soin avant tout de voir dans quel monastère
le jeune homme veut entrer; parce que, si ce monastère était
relâché, généralement parlant, il vaudrait beaucoup
mieux qu'il restât dans le siècle; car en allant dans ce mo-nastère,
il ferait comme les autres et laisserait de côté le peu de
bien qu'il a d'abord fait, comme il est arrivé à plusieurs.
Que le confesseur se fasse donc bien scrupule, surtout si c'est à
l'instigation des parents qu'il agit, de lui conseiller d'entrer dans une
semblable communauté. Mais si le monastère observait bien
sa règle, il peut bien approuver la vocation de son pénitent,
en examinant toutefois si ce dernier n'a point pour cette vocation quelque
empêchement de salut, de peu de talents, de pau^ vreté
du côté de ses parents. Il doit surtout bien examiner si le
but qu'il se propose est droit,comme, par exemple, de s'unir plus étroitement
à Dieu, de se corriger des écarts de sa vie passée,
et de fuir les dangers du siècle. Dans le cas où le but qu'il
se propose serait mondain, comme, par exemple, de vivre plus agréablement,
de se délivrer des embar-ras de sa mauvaise condition ou de faire
la volonté de ses parents qui l'importunent, alors le confesseur
doit bien se garder de l'approuver, parce que, dans ce cas, cette vocation
n'est point véritablement la sienne, et que sans vocation il aurait
une fin bien déplorable. Mais si ses intentions étaient droites,
le confesseur (ni les autres, comme l'enseigne saint Thomas) ne peut ni
ne doit l'empêcher de suivre sa vocation. Il est vrai qu'il serait
également prudent de lui faire différer l'exécution
de son projet, afin de mieux éprouver s'il est bien arrêté,
surtout si le confesseur savait que le jeune homme est ineon-stant, ou
bien si sa résolution avait été prise en temps démission
ou d'exercice spirituel; puisqu'il arrive dans ces occasions que l'on prend
telles ré' solutions que l'on oublie ensuite lorsque la première
ferveur est passée. En effet, si la résolution s'éva-nouissait,
il aurait bientôt mis de côté, en sortant du monastère,
tout le peu de bien qu'il aurait fait auparavant.
XLI. Si par hasard un jeune homme voulait se faire prêtre séculier,
que le confesseur soit très dif-ficile à le lui permettre
sans avoir longuement éprouvé auparavant s'il est suffisamment
instruit, Ou au moins s'il a la capacité requise, et si ses intentions
sont droites. En effet, les prêtres sécu-
ig6
INSTRUCTION PRATIQUE
liers ont les mêmes obligations et même de plus grandes
encore que les religieux; et, au contraire, ils restent toujours exposés
aux périls du siècle. C'est pourquoi, pour qu'un bon prêtre
réussisse dans le siècle (dans lequel ils sont rares, pour
ne pas dire très rares) , il faut qu'auparavant il ait mené
une vie très régulière, éloignée des
jeux, de l'oisiveté, des mauvaises sociétés, et appliquée
à l'o-raison et à la fréquentation des sacrements,
mais quis est hic ? et laudabimus eum, sans quoi il tombe-rait dans un
état presque certain de damnation, surtout s'il le faisait pour
seconder les vues de ses pa-rents qui veulent soutenir leur maison. Nous
avons déjà fait observer au chap, vm, n. 5, quel grave péché
commettraient les parents qui forceraient leurs enfants à se faire
prêtres ou religieux contre leur volonté.
XLII. Pour ce qui est des filles qui veulent consacrer leur virginité
à Jésus-Christ, le con-fesseur ne doit leur permettre de
faire le vœu per-pétuel de chasteté qu'après avoir
vu qu'elles sont bien enracinées dans la vertu, dans la vie spiri-tuelle
et surtout dans l'oraison. Au commencement il peut leur permettre de le
faire pour quelque temps, comme, par exemple, d'une solennité aune
autre. Enfin, quant à ces jeunes gens qui veulent et qui doivent
se marier (je dis, qui doivent, en parlant de ceux qui se sont livrés
à l'incontinence et qui ne veulent pas se servir des autres moyens
favorables pour changer de vie ) , nous disons que de même que leurs
parents pécheraient s'ils les em-pêchaient de se marier sans
de justes motifs, de même encore ils pécheraient eux-mêmes
(c'est pour-quoi le confesseur doit les empêcher ), s'ils voulaient
POUR LES CONFESSEURS.
I97
faire un mariage qui déshonorât leur famille, etsi, supposé
que le mariage ne fût point déshonorant, ils voulaient néanmoins
le faire contre la volonté et au grand scandale de leurs parents,
sans avoir aucune raison valable pour excuser une semblable conduite. Voyez
ce que nous avons dit là-dessus au chap, ????, ?. 16.
§ V. Comment doit se comporter le confesseur avec les personnes
dévotes.
XLIII. Le confesseur, régulièrement parlant, doit engager
les personnes dévotes qui fréquentent les sacrements à
recevoir au moins l'absolution une fois par semaine. Ces personnes se confessent
alors des seules imperfections qu'elles peuvent commet-tre, et qui ne sont
point, dit le P. Bonacina, des fautes vénielles certaines que l'on
peut absoudre sous condition. Cependant, moi, je n'admettrais point cela,
sinon rarement, et quand elles peuvent assigner une matière certaine
de leur vie passée, ou bien lorsque le refus de l'absolution doit
leur causer un grand chagrin. Du reste, je disque lorsque le pénitent
ne donne point une matière certaine, le confesseur n'est point tenu
de la chercher soigneu* sèment pour lui donner l'absolution; et
que, dans le cas où il l'aurait cherchée avec soin et qu'il
ne l'au-rait point trouvée, il n'est point obligé de lui
donner l'absolution sous condition. Cela arrive quand le pénitent
se confesse des imperfections desquelles on doute si ce sont des péchés
véniels ; mais s'il con-fessait des péchés véniels
certains, qui sont usuels, comme l'impatience, l'intempérance, la
distraction pendant l'office, etc., il faut examiner pour l'ab-
ig8
INSTRUCTION PRATIQUE
soudre, s'il a oppose de la résistance et s'il a triom-phé
de la passion, parce qu'alors on peut juger que ses faiblesses sont plutôt
l'effet de la fragilité hu« maine que du manque de contrition
ou de propos. Dans le cas contraire où le pénitent ferait
de fré-quentes rechutes dans ces fautes, et sans opposer aucune
résistance, alors il faut le traiter comme ce-lui qui retombe, d'après
ce que nous avons dit au n. 9.
XLIV. Que le confesseur se garde bien d'em-pêcher ces personnes
dévotes, surtout les femmes, de se confesser à d'autres prêtres
; au contraire, qu'ii leur en exprime sa satisfaction. En effet, quel-quefois
il doit leur commander de le faire ; excepté toutefois à
certaines âmes timorées qui feraient craindre avec raison
que le nouveau confesseur ne connaissant point l'état de leur conscience,
ne les je-tât dans le trouble etlinquiétude. Le confesseur
doit bien se garder de manifester à certaines âmes le désir
qu'il a de les guider; qu'il ne dise jamais de mal des autres confesseurs;
mais, au contraire, qu'il ait soin d'excuser les erreurs qu'ils pourraient
com-mettre. Qu'il refuse de confesser celui qui cherche à changer
de directeur sans une cause urgente, comme le disent saint Philippe de
Néri, saint Fran-çois de Sales et saint Charles Borromée
; car il ré-sulte delà plusieurs dissipations pour l'esprit,
des troubles et souvent même du scandale. Il ne suffit pas pour changer
de confesseur que le pénitent entende sur son compte quelque abomination,
ou qu'il n'ait plus de confiance dans ses paroles ; car souvent c'est une
tentation du démon , comme le dit sainte Thérèse.
C'est pourquoi saint François de Sales nous apprend : « Qu'on
ne doit point changer de
POUR LES CONFESSEURS.
I99
confesseur sans de grandes raisons ; cependant (ajoute t il au contraire
), on ne doit point rester invariable, lorsqu'il survient des raisons légitimes
qui nous autorisent à changer. » Du reste, sainte Thérèse
écrit que le défaut de qualités dans le con-fesseur
peut être un juste motif de changer :« Si le confesseur (dit
cette sainte) a quelque penchant vers quelque vanité, on doit le
quitter, parce qu'é-tant lui-même vain, il fera partager sa
vanité à ses pénitents. » En outre, le défaut
d'instruction peut être encore une cause valable pour changer; néan-moins,
pour cela, il faut que la présomption soit certaine. Dans un autre
endroit, sainte Thérèse ajoute que, dans les doutes, le pénitent
peut et même qu'il lui est avantageux de prendre con-seil auprès
d'un autre directeur. En outre, que le confesseur ait bien soin d'éviter
toute partialité; car souvent l'on voit certains confesseurs choisir
de préférence quelques âmes qu'il est facile de guider,
facile de soigner et de guérir. Il est vrai que certai-nes âmes
réclament des soins plus particuliers que les autres; mais il y
a une grande différence entre donner des soins et faire un choix
qui assure peu de peines et une cure facile; c'est pourquoi il serait bon
que le confesseur assignât à ces âmes, qui de-mandent
plus de soins que les autres, des jours, des heures à part, afin
que les autres pénitents n'en souffrissent point. Il doit bien faire
attention de ne pas élever trop haut la voix en confessant ces per-sonnes
dévotes, quand même il ne parlerait pas de péchés,
attendu que les autres peuvent S'effrayer de confesser leurs péchés
dans la crainte que le confesseur n'élève trop la voix. Qu'il
soit très diffi-cile de permettre aux filles dévotes de se
couper
2OO
INSTRUCTION PRATIQUE
les cheveux et de vivre selon quelque usage reli-gieux; mais qu'il
ait soin avant tout de les affermir pour long-temps dans la vie spirituelle
et dans la vertu. Hélas! combien, par cette facilité des
con-fesseurs, n'en voit-on pas qui mettent ensuite de côté
l'habit et qui se marient,au grand scandale du pays, et donnent ainsi mauvais
exemple aux autres. Qu'il se garde donc bien de permettre à ces
jeunes personnes de prendre jamais des hommes des le-çons de lecture
et encore moins d'écriture. Com-bien de filles simples qui, en apprenant
ainsi à lire, ont perdu leur âme! En effet, si ce n'est point
là une occasion prochaine de pécher, au moins c'est une occasion
très dangereuse. Qu'il leur donne pour maîtres
quelques dames ou quelque petit frère ( en usant encore d'une grande
prudence), sans quoi le confesseur court risque de les perdre, ainsi
que les mères qui ont le malheur de leur permettre de se faire instruire
par des hommes. Que le con-fesseur se garde" bien de laisser courir çà
et là les jeunes filles, de leur permettre de visiter les églises,
d'y rester plus long-temps qu'il ne faut, au grand mécontentement
de leurs parents ; mais qu'il ait bien soin de
leur recommander de leur obéir, de les aider dans leurs travaux
et dans tout ce qu'il y a de pénible dans la maison paternelle.
Ensuite, comment et avec quel soin le confesseur doit éviter toute
familiarité avec ses pénitents, voilà ce qui formera
la matière de la dernière section.
§ VI. Conduite du confesseur à l'égard des sourds-et-muets.
XLV. Lorsque le muet est encore sourd, comme
POUR LES CONFESSEURS»
201
il arrive d'ordinaire, le confesseur doit le conduire dans quelque
lieu secret pour le confesser et pour tirer de lui quelques signes de ses
péchés et de sa contrition , en se servant des moyens les
plus pro-pres pour cela. Cependant, avant tout, il doit s'in-former auprès
des personnes qui vivent avec lui, si elles ne lui connaissent point quelque
vice, et de la manière qu'il faut s'y prendre pour s'en faire enten-dre
et pour l'entendre lui-même. Or, s'il parvient à avoir quelque
connaissance de ses péchés et s'il lui voit quelque signe
de repentir, le confesseur doit alors l'absoudre. Pour moi, je l'absoudrais
toujours sous condition, à moins que je n'eusse quelque certitude
morale de sa disposition.
XLVI. Dans le cas où le muet saurait écrire, alors, selon
notre sentiment (voyez le chap, xvi, n. 3(>), il est obligé de faire
sa confession par écrit ; car celui qui est tenu d'en finir, est
tenu d'employer les moyens ordinaires. Je dis ordinaire parce que l'écriture
cesserait d'être pour le muet un moyen ordinaire s'il devait résulter
pour lui une grande peine de faire ainsi sa confession, et s'il avait à
craindre qu'elle fût manifestée à d'autres. Pour ce
qui est ensuite du cas où le confesseur s'apercevrait que son pénitent
est une femme sourde et qu'elle ne répond point aux questions qu'il
lui adresse, voyez ce que nous avons dit au chap, xvi, n. io,5.
§ VII. Conduite du confesseur envers les moribonds.
XLVIF. En confessant les moribonds, le confes-seur ne doit point rechercher
une exactitude par-faite touchant le nombre et les circonstances des péchés,
surtout s'il a apporté avec lui le saint via-
$03
INSTRUCTION PRATIQUE
tique et si le médecin presse de le lui administrer sans délai;
? ar alors mieux vaut rechercher la dis-position que l'intégrité
ven ayant soin toutefois d'im-poser au moribond l'obligation de faire une
confes-sion entière lorsqu'il sera guéri.- Que la pénitence
qu'il lui donne soit très légère, lui recommandant
de ne la faire qu'à mesure qu il reprendra des forces, ou bien qu'il
se contente de lui commander de venir le voir lorsqu'il sera en parfaite
santé. Quant aux blessés et aux femmes en couches, qui d'ordinaire
ne peuvent se passer d'assistants, il suffit de les faire accuser en général
de leurs péchés, et en par-ticulier de quelques fautes légères,
comme d'impa-tience ou de mensonge, en leur faisant promettre toutefois
de se confesser entièrement lorsqu'ils se-ront rétablis.
Nous observons au confesseur que, si le pénitent a quelque restitution
à faire, et s'il peut la faire alors, il doit lui jimposer l'obligation
de la faire sans délai; qu'il ne suffit point que le malade charge
ses héritiers de ce soin. Et que le confesseur lui refuse l'absolution
s'il ne veut point acquiescer à ses demandes.
XLVIH. Dans le cas où il verrait que le mori-bond est en état
de recevoir l'extrême-onction et qu'il refuse de la recevoir, le
confesseur doit alors lui représenter les grands effets de ce sacrement,
c'est-à-dire qu'il donne à l'âme une force extraor-dinaire
pour résister aux tentations de l'enfer dans le dernier combat,
et qu'il efface les péchés véniels et même mortels
s'ils sont occultes, qu'entre autres, il rend encore la santé au
corps, lorsqu'elle est né-cessaireau salutde l'âme; maisqu'il
ne larendpoint lorsque le malade est réduità unteletatqu'ilne
peut plus être guéri que par l'effet d'un miracle ; car le
POUR LES GONFESSEURS.
So3
sacrement opère par des voies ordinaires, comme en venant au
secours des causes naturelles* Si ce-pendant le malade ne se rendait point
à toutes ces représentations, il est très probable
alors qu'il pèche mortellement, au moins contre la charité
envers lui-même, puisqu'il se prive d'un secours aussi grand dans
une aussi grande extrémité (voyez le chap, ????,?. 12). Dans
le cas ensuite où le ma-lade éprouverait une grande peine
en s'apercevant qu'il ne reçoit que le saint viatique, il est probable
que le curé peut en ce cas lui donner la communion, en omettant
les paroles : accipe viaticum, etc., et en les remplaçant par celles
de la communion ordi-naire, savoir : Corpus domini nostri Jesu-Christi
cus-todiat, etc.
§ VIII. Conduite du confesseur envers ceux qui sont condamnés
à mort.
C'est avec ces infortunés que le confesseur doit déployer
toute sa charité et toute sa patience. Dans la première visite
qu'il leur fait, il commence par leur faire entendre que la mort qu'ils
vont souffrir est une grâce de Dieu qui veut les sauver. Il leur
observe que tous nous devons mourir, et, en peu de temps, passer à
une éternité de bonheur avec les élus, ou à
une éternité de tourments avec les réprouvés.
Ensuite il les exhorte à rendre grâce au Seigneur de ce qu'il
les a attendus jusqu'à ce moment et de ce qu'il ne les a point fait
mourir lorsqu'ils étaient en état de péché.
Enfin, il les engage à se résigner à la mort, l'unissant
à celle que Jésus Christ a souf-ferte pour son amour, les
encourage en leur disant que s'ils se résignent à la mort
ils seront sauvés, et
2?4
INSTRUCTION PRATIQUE
sauve'savec beaucoup de mérite; c'est pourquoi ils re-cevront
dans le ciel une grande récompense. Après cela, il engage
le patient à se confesser et à avouer franchement tous ses
péchés. Il lui demande surtout s'iln'apoint de haine contre
quelqu'un.s'il ne conser-ve point sur lui-même quelque particule
consacrée ou autres choses saintes, ou bien quelque écrit
de superstition, et s'il n'a point fait quelquepacte avec le démon,
etc. Après l'avoir absous, il a soin de le faire communier plusieurs
fois, en lui disant sou-vent de se recommander à la Sainte Vierge,
afin qu'elle l'aide à faire une bonne mort. En sortant avec la justice,
il lui dit : « Allons, mon fils, marchez sur les traces de Jésus-Christ,
qui a monté sur le Calvaire pour donner sa vie pour vous, J»
Arrivé au lieu du supplice, il le réconcilie de nouveau et
l'absout en lui faisant gagner quelques indulgences ; puis, il lui dit
: « Courage, mon enfant, tenez-vous dans la grâce de Dieu;
déjà sont ouvertes pour vous les portes du paradis. C'est
là que Jésus-Christ vous attend avec sa bienheureuse Mère;
unissez donc votre mort avec celle de Jésus-Christ, qui est mort
au milieu des supplices et de l'ignominie peur l'amour de vous. Vous êtes
bien tout entier à lui, n'est-ce pas? Dites-lui donc,·avec
moi: Oui, Seigneur, je vous aime par-dessus toutes choses ; je veux mourir
pour faire votre sainte vo-lonté ; j'accepte la mort pour les péchés
que j'ai commis. J'espère, ô mon Dieu, que vous m'avez par-donné
; oui, je me repens de nouveau des offenses que je vous ai faites ; je
désire voler à vos pieds dans le paradis, afin de vous aimer
durant toute l'éter-nité. » Quand on lui bande les
yeux et qu'il monte sur l'échelle, alors il lui dit ; « Mon
fils, invoquez
POUR LES CONFESSEURS.
SO&
la bienheureuse Marie pour quelle vous assiste. Acceptez la mort pour
vos péchés, et offrez-la à Dieu avec la mort de Jésus
- Christ. Jurez-lui de ne point consentir à aucune tentation de
l'esprit malin. » Lorsqu'il est monté sur l'échelle,
et qu'il va recevoir le coup de la justice : « Voilà, mon
fils, que Jésus-Christ vous ouvre ses bras pour vous em-brasser
, dites-lui donc: Seigneur, je vous ai offensé; je m'en repens ;
je vous aime maintenant de tout mon cœur. Dieu de mon âme, vous m'appelez
à vous; me voilà. Sainte Vierge, aidez-moi; Jésus,
mon Dieu, je vous donne mon cœur et mon âme. »
L. Si par hasard le condamné s'obstinait à ne pas vouloir
se confesser, le confesseur cherche premiè-rement à l'aider
par la prière, et le fait recommander à Dieu par d'autres
personnes, surtout par les com-munautés religieuses, afin qu'on
dise en son hon-neur des messes, des litanies, etc.; 2° il représente
au condamné que, s'il se confesse, ou non, la jus-tice n'en aura
pas moins son cours ; 5° il lui de-mande ensuite si son désespoir
vient par hasard de ce qu'il a donné son âme au démon
; car alors il doit lui bien persuader que ce pacte est nul, puisque l'âme
appartient àDieu, et que dèslors qu'il se repent de sa mauvaise
volonté, Dieu lui pardonne tous ses péchés ; 4°
? ^ demande encore s'il a une haine contre quelqu'un, et si c'est là
la cause de son obsti-nation. En outre, le confesseur doit avoir soin,
les premières fois, de ne pas trop l'importuner pour qu'il se confesse,
parce que peut-être il ne ferait que l'endurcir davantage ; il vaut
mieux lui parler de la miséricorde de Dieu, des joies du paradis,
des peines de l'enfer, et de la mort à laquelle nous
INSTRUCTION PRATIQUE
sommes tous sujets. Il lui raconle quelques exemples de pécheurs
morts dans l'impénitence, ou de quel-ques condamnés morts
en état de sainteté, comme l'exemple de celui qui mourut
innocent et qui ré-pondit à une personne qui lui demandait
pourquoi il n'avait point fait tous ses efforts pour prouver son innocence
: « A quoi bon ? dit-il ; depuis plu-sieurs années je priais
le Seigneur qu'il me fît la grâce de mourir dans l'ignominie,
comme Jésus-Clirist, mort lui-même pour moi; voulez-vous,
maintenant qu'il m'a exaucé, que je laisse échapper une si
belle fortune?» C'est dans ces heureuses dispositions qu'il marcha
à la mort. Après ces pa-roles le confesseur le laisse réfléchir
un instant; puis il revient à la charge, s'il n'est point encore
changé, et lui dit : « Mon fils, la mort s'avance, que voulez-vous
faire? \rous avez à choisir entre le paradis et l'enfer. Songez
bien que si vous mourez dans l'ob-stination , vous vous en repentirez pendant
toute une éternité, et il n'y aura plus de remède
pour vous. » Le voyant toujours endurci, il fait dire en Son honneur
les litanies de la sainte Vierge par les personnes qui sont présentes;
puis il se jette à ses genoux, et le conjure de ne point s'obstiner
à se perdre. S'il ne gagne rien en lui parlant à lui-même,
il doit alors parler au crucifix. Enfin, si le coupable est déjà
arrivé au lieu du supplice, le confesseur prie le peuple de se mettre
à genoux et de prier Dieu de vaincre son obstination. Il peut encore
s'aider de paroles terribles et capables de l'épouvanter, en lui
disant, par exemple : «Va, maudit! à l'enfer éternel,
puisque tu veux te damner; sache bien que ta plus grande peine au milieu
des supplices sera de n'avoir point profité de ce temps précieux
POUR Ï.ES CONFESSEURS.
207
que Dieu t'accorde pour te convertir. » Mais aussi-tôt
après il reprend les paroles douces. Si par ha-sard , arrivé
au haut de l'échelle, le condamné demandait à se confesser,
alors il doit prier les ministres de la justice de le laisser descendre
; car alors ils sont obligés de lui donner le temps de se confesser.
Je parle ici pour celui qui ne se serait point encore confessé,
parce que, si le coupable s'était déjà confessé,
le confesseur lui fait faire un acte de contrition, en lui faisant dire
qu'il se confesse de tous ses péchés, et surtout de ceux
qu'il lui a d'abord avoués; après quoi il lui donne l'abso-lution.
§ IX. Conduite du confesseur envers les possédés
:
du démon,
II est certains possédés qui ressentent'des accès
de terreur, des afflictions corporelles, des violences, des douleurs. Or
avec ceux-ci le remède est facile : on les exhorte d'abord à
l'oraison, à la patience, et pardessus tout àla résignation
, à la volontéde Dieu. Que le confesseur se garde bien d'être
tellement incrédule, au point de penser que toutes ces inva-sions
et toutes ces possessions de démon ne sont que des fantaisies ou
des infirmités corporelles ; car Ion ne peut nier qu'il y ait de
véritables possédés, même parmi les chrétiens,
puisque Jésus-Christ a donné pour signe distinctif
des vrais fidèles le pouvoir de chasser
le démon en son nom : « Or voici, dit-il, quels
sont les signes qui distingueront ceux qui croiront: ils chasseront les
démons en mon nom. » * Signa autem eos qui crediderint, haec
se-» quentur : in nomine meo demonia ejecient (Marc.
2?8
INSTRUCTION PRATIQUE
x6, 17). En outre, l'Église a institué contre ces possessions
un grand nombre d'exorcismes dont la pratique, selon le concile de Trente,
sess. il·, ch. n, a toujours existé dans l'Église.
Or, je le demande, s'il n'y avait point de possédés, ne serait-ce
pas en vain qu'on aurait institué l'ordre de l'exorcisé,
par lequel, dans sa forme, on donne le pouvoir sur les énergumènes
et les catéchumènes? Et cet ordre n'est-il pas un des sept
qui ont toujours existé dans l'Église de Dieu, comme l'a
déclaré le concile dans le lieu que nous venons de citer?
Du reste, il est prudent de se défier toujours de ces possessions,
puisqu'on ne peut nier que la plupart ne soient ou des intpostures ou des
fantaisies, ou bien des ma» ladies, surtout parmi les femmes.
LU. Qui tamen magis solent confessariorum mentem gravioribus difficultatibus
implicare, sunt ii qui turpibus visionibus, motibus, ac etiam tacti-bus
vexantur a dœmone, qui non solum fomitem sensimiem excitat, sed aliquando
etiam cum eis car-nale commercium sub forma viri, aut mulieris, habet,
quapropter Succubus, vel Incubus appellatur. Quidam hos daemones incubos,
vel succubos dari negarunt; sed communiter id affirmant auctores, ut Martinus
Delrio in opere Disquis. magic, P. Hiero-nym. Menghi, lib. ?, e. xv, alius
quidam doctus auctor ep. par. 2, lib. 2, opusc. 5, cap. xv, ?. 5, et Sixtus
Senensis, lib. 5, ? ibi. Sacr., ann. ??, ex s. Cypr., s. Just., Tertull.,
etc. Et maxime hoc confirmat S. Aug., lib., i5, de Civitate Dei, cap. 53,
ubi scribit : « Apparuisse hominibus angelos in ta-nlibus corporibus,
ut non solum videri, verum » etiam tangi possent, verissima scriptura
testatur; »et multos (quos vulgo incubos vocant) improbos
POOR LES CONFESSEURS ,
209
»S£epe extitisse mulieribus, et earum appetiisse, ac »peregìsse
concubitum. Quosdam daemones hanc » assidue immunditiam, et
tentare, et efficere, plures »talesque viri asseverant, ut hoc negare
imprudentia » videatur. » Equidem possunt daemones ad
hunc improburn usum defunctorum corpora assumere, vel de novo sibi assumere
ex aere et aliis elementis ad carnis similitudinem;ac palpabiliumet calidorum
corporum humanorum species effìngere, et sic ea corpora ad coitum
aptare. Iino tenet praefatus Delrio, citans D. Thomam, D. Bonav., Scotum,
Abnlens.; aliosque plures quod daemon potest etiam verum semen affere aliunde
acceptum, naturalemque ejus emissionem imitari, et quod ex hujusmodi concubitu
vera proles possit nasci, cum valeat daemon semen illud accipere, puta
a viro in somno pollutionem pa-tiente, et prolificum calorem conservando,
illico in matricem infundere; quo casu proles illa non erit quidem filia
daemonis, sed illius cujus est semen, ut ait D. Thomas apud citatum auctorem.
An autem, inspectis legibus a divina providentia constitutis, pro propagatione
generis humani, haec aliquando evenisse aut evenire posse credendum sit,
sapien-tiorum judicio remittimus. Hìc autem fit dubium, an possit
daemon, permittente Deo, absque hominis culpa, manus admovere, ad se tactibus
pòlluendum. Affirmat pater Gravina dominicanus, et quidem
probabiliter; si enim valet daemon totum corpus alicujus movere , ut narratur
de Simone Mago, ope daemonis in aerem sublato, cur non poterit et ma-num
? Praeterea, si daemon potest alicujus commo-nere linguam, ut invitus proferat
obscsena verba, aut blasphemias contra Deum, quidni manus ut turpia perpetret
? Idem sentit citatus quidam doctus ?. xxvi.
i4
a 10
INSTRUCTION PRATIQUE
auctor /. e., ubi sic inquit : « Non semel compertum »
fuisse, quod daemon aliquam partem in humano » corpore coeperit quodammodo
possidere, puta «oculos, linguam, vel etiam verenda. Hinc fit, lin-»
guam obscaenissima verba proferre, licet mens » talia tunc advertàt.
Hinc impetus et affectus quan-»doque se turpiter denudandi proveniunt;
hinc » fœdiora, qua? conscribere pudet. »
LUI. Sed maxime praedicta confirmantur a S. Thorny (?), qui sic ait:
« Respondeo, dicendumj »quod diabolus propria virtute, nisi
refrasnetur a » Deo, potest aliquem inducere ex necessitate ad fa·
nciendum aliquem actum, qui de suo genere pec-» catum est, non autem
potest inducere necessitatem » peccandi, quod patet ex hoc, quod
homo motivo »ad peccandum non resistit, nisi per rationem, «cujus
usum totaliter impedire potest, movendo » imaginationem , et appetitum
sensitivum, sicut in » arreptitiis patet : sed tunc ratione sic illi
gâta, quid-»quid homo agat, non imputatur ei ad peccatum. *
Sed si ratio non sit totaliter ligata, ex ea parte » qua est libera
potest resistere peccato, sicut supra «dictum est; unde manifestum
est, quod diabolus » nullo modo potest necessitatem inducere homini
»ad peccandum, » Juxta igitur S· Thomam bene potest
daemon (permittente Deo) omnem libertatem ad resistendum homini auferre,
sicut aufert obsessis eumque inducere ad faciendum aliquem actum de se
peccaminosum, sine hominis peccato formali.
Huic opponi possunt duae propositiones Michaelis MolinosproscriptaeabInnocentio
XI. Prima, quae est n. 44, dicebat: «Job blasphemavit, et tamen non
pec-
(1) S. Thom. i. 2. q. 8o. a. 5. in corp.
ncavit labiis suis, quia fuit ex daemonis violentia. » Altera
n. 4g, quae magis ad casum pertinet, dicebat : «Job ex violentia
daemonis se propriis manibus pollue-T, bat eodem tempore, quo mundas habebat
ad Deum » preces. » Sed primo respondetur, hasce propositio-nes
esse patenter falsas ; nam prima innititur textu illo : « Pereat
dies in qua natus sum, et nox in qua dic-»tum est: Conceptus est
homo. Job. 3. 3. » Hunc textum varie iuterpretes explicant. Estius
commen-tât inquiens, quod Job optabat illic nunquam fieri mentionem
de die suae nativitatis propter suam in-felicitatem : «Pereat dies,
idest (verba Estii)sum • infelicissimus, itaque pereat dies, necanniversaria
«recolatur.» Alii autem, cum Tirino, aiunt quod Job sine culpa
aerumnas maledicebet naturales, tan-quam causas suorum cruciatuum. Quid
igitur ad haec pertinent blasphemia et violentia daemonis?
Caeteroquin bene potest daemon, ut dicit auctor in-nominatus supra cit;
card. Petrucius loco supra cit., linguam hominis movere ad
turpia verba pro-ferenda. Et P. Joannes Baptista Scaramelli, in vita ven.
sororis Maria? Crucifix» Satellico refert, quod daemones ad blasphemandum
ipsam cogebant, sic scribens : « Quand le démon l'avait
émue, il lui mouvait la langue avec rapidité et lui faisait
pro-noncer des blasphèmes et des malédictions contre les
choses les plus saintes, et se servait de ses mains pour lui faire jeter
à terre des médailles et des li-vres sacrés. »
Deinde refert verba ejusdem famula? •Dei , quae
paenam suam enarrans sic scribebat : « Avec cette langue,
consacrée le matin au con-tact de Jésus-Christ, je le maudissais...
Ces malé-dictions variaient selon les solennités, etc. »
Idem dicendum de altera propositione 49, Michaelis Moli-
212
INSTRUCTION PRATIQUE
nos, nempe quod sit falsa, et insuper scandalosa, dum Job non loquitur
de pollutione» sed tantum dicit : « Haec passus sum absqueiniquitalemanusmeœ,
cum «haberem mundas ad Deum preces.(Job. 16. 18.)» Explicat
Malvenna, quasi dicat : « Haec venerunt » mihi praeter culpam
meatn. » Et Menochius : Cum » manus supplices ad Deum elevarem,
quas neque » rapina, neque alio scelere contaminaveram. » Re?
peto, quid ad haec pertinent pollutio, et violentia daemonis? En quam falsae
erant duae propositiones relatae.
Sed quoad propositiones istas responsio magis propria et convincens
haec eat : propositiones pro-scriptae nemo ignorat intelligendas esse juxta
sensum auctoris, qui eas protulit. Quaedam Quesnellii pro-positiones videntur
primo intuitu aequae et sanctae, attamen juxta illius sensum sunt perversae.
Exempli gratia propositio 5o, sic dicit : « Omnes quos Deus »
vult salvare per Christum, salvantur infallibiliter. » Haec propositio
in sensu recta et catholico tenetur ab omnibus, qui propugnant pro gratia
efficaci ab intrinseco ; sed damnata est in sensu Quesnellii, nempe quod
Deus velit tantum salutem praedestina-torum. Et sic dicendum damnatas etiam
esse pro-positiones relatas 44 et 49 Michaelis Molinos. Hujus impii systema
hoc erat, quod cum persona libertatem suam Deo donavit^non debet amplius
resistere malis commotionibus, nec ullum exercere conatum adactus malos
impediendus, quoniam illi imputandi sunt, non jam propriae voluntati, sed
violentiae daemonis, aut sensualis passionis. En propositio sua funda-mentalis
(quae est n. 17), sicut loquitur : « Tradito » Deo libero arbitrio
, et eidem relicta cura animae » nostrae, non est amplius habenda
ratio tentationum,
PODR LES CONFESSEURS.
2 1 3
» nec eis alia resistentia fieri debet, nisi negativa, , nulla
adhibita industria. Et si natura commovetur, » oportet sinere, ut
commoveatur, quia est natura. » Adest alia sua propositio (n. 47),
quae individua-liter ad casum nostrum pertinet, et dicit : «Cum jhujusmodi
violentiae occurrunt, sinere oportet, ut » Satanas operetur, nullam
adhibendo industriam, jnullumque conatum etiamsi sequantur pollutio-»nes,
etc. » Notentur verba, « sinere oportet, nul-» Ium adhibendo
conatum, etc. » Sed quomodo potest esse sine culpa, omittere resistentiam
in hujus-niodi commotionibus, et sinere ut daemon operetur etiamsi pollutiones
sequantur? Nonne patenter hîc apparet concursus propriae voluntatis?
Hoc quidem erat, quod aiebat Molinos, et ita intelligendae sunt omnes aliae
ipsius damnatae propositiones.
Caeterum cur permittente Deo non poterit daemon cogère hominem
sine ullo ipsius voluntatis assensu ad faciendum aliquem actum nialum ?
« Nequimus » autem nos, aitS. Augustinus, per rationes philo-«sophicas
et humanum ratiocinium scire ad quid » extendatur vel ne potentia
naturalis angelorum. « Quapropter in hac materia plus quam philosophicae
rationes movere nos debent ad iudicandum aucto-ritates theologorum, qui
justa lumina ex sacris Scripturis accepta loquentur. Habemus in evangelio
Matthaei, quod daemon usum linguae bene potest impedire : «Obtulerunt
ei (sic ibi dicitur) hominem »nuitum daemonium habentem, et ejecto
daemone • locutus est mutus. » (Matth. 9, 52 et 33.) Inquit Chrysostomus
apud Cornelium a Lapide : « Hinc «videtur quod daìmon
fecerit eum mutum, impe-1 diendo usum linguae. » Sicut igitur daemon
huma-norum usum membrorum impedire potest, sic illa
INSTRUCTION PRATIQUE
etiam commovere sine hominis voluntate. Item in eodem Matthaei evangelio
habetur, quod daemon transtulit ipsum Christum super templi pinnaculum
: «Tunc assumpsit eum diabolus in sanctam civitatem, > et statuit
eum super pinnaculum templi, et dixit »ei : Si filius Dei es, mitte
te deorsum. » (Matth. iv, v. 5 et 6 ). Si igitur potuit daemon movere
et transvehere totam ipsius Domini personam, tanto magis linguam aut manus
alicujus movere poterit. Praeterea habemus apud Danielem, quod Habacuc
fuit ab angelo translatus in lacum leonum : «sEt ap-» prehendit
eum angelus Domini in vertice ejus, et «portavit eum capillo capitis
sui, posuitque eum » in Babylonem super locum in impetu spiritus
sui » ( Dan. xiv, 35.) Animadvertantur verba, « in impetu »
spiritus sui, a qua? clare dénotant naturalem angeli potentiam.
Hinc merito dicunt theologi, sat posse daemonem sua naturali vi, Deo
permittente, suo arbitrio mem-bra hominis agitare. Praeter S. Thomae et
S. Bona-ventura? auctoritates supra relatas idem scribunt plures auctores
nuperrimi. Id scribit cardinalis Gotti : « Diabolus quidem potest
cogère ad actum, » qui ex genere suo est peccatum ut in energumenis,
» quos capit ad enunlianda verba blasphema, vel » etiam ad
alios actus ex objecto malos. Sed tunc, » ratione ligata, id non
imputatur homini ad pecca-» tum, quia deest libertas arbitrii. »
( Theol. schol. torn. 2, tract. 4» de vitiis qu. 6, § 2, ?.
??. (Idem scribit P. Wigandt, tract. 4) e°d. tit. ex. 2, n. 69, in
fin. Idem scribit Cal met (auctor, quem omnes sciunt quam sit ponderatus
in suis effatis); ipse in dissertatione, quam apponit in evangelio Lucas
de energumenorum veritate art. a, p. mihi 587, post-
POUR LES CONFESSEURS.
2l5
quam sedulo exponit sententiam de praedicta poten-tia daemonis, hanc
sibi objicit oppositionem : « Si sdiemon de ee operaretur in homine
adessent in , eodem corpore duo principia activa, nempe duo » spiritus;
sed hoc repugnat, quia unus posset agere jin contrarium ad id quod alter
vult. » At Calmet sapienter respondet, quod cum Deus permittit dae-moni,
ut operetur in humano corpore, tunc Satan eodem tempore (prout docet etiam
S. Thomas) im-pedit etligatin homine usum rationis, ita ut eodem tempore,
quo operatur daemon, spiritus hominis non operatur. Caeterum prsefatus
auctor minime du-bitat, quin daemon sine miraculo sed tantum sua naturali
vi, cum Deus id permittit, ligare possit libertatem hominis, eumque cogère
contra ipsius voluntatem etiam ad blasphemias proferendas. Idque potest
intelligi de quocumque alio actu peccaminoso. Deinde Calmet ait, signum
esse, operam esse dae-monis : « Cum homo (sunt sua verba) alio veluti
» spiritu animatur, angitur invitus, plura admittit ab J insita sibi
indole longe aliena, sed ita admittit, ut ïsingularia omnia videantur,
et violenta. »
Un auteur moderne, le P. Scaramelli, a écrit la même chose
dans son Direct, mjsti., tract. 5, chap, ??, ?. 124, eu ajoutant : «
Cela peut bien ar-river sans péché formel de la part de la
personne, si le démon, pendant qu'il agit extérieurement,
in-térieurement l'empêche de se servir de l'usage de sa raison
et lui ôte toute liberté de résister (selon le sentiment
de saint Thomas ), en excitant avec tant de violence son appétit
sensitif, et en lui trou-blant l'esprit avec tant de force, qu'elle ne
conserve plus aucune étincelle de raison. C'est pour cela que le
confesseur doit hien demander au pénitent si
2)6
INSTRUCTION PRATIQUE
dans les choses qu'il souffre il ne remarque point la malice du péché,
et s'il n'a point quelque sentiment qui le détourne de cette action.
Or s'il répond que dans ce moment son esprit est tellement troublé
qu'il ne connaît plus rien et qu'il ne sent aucun re-mords, le confesseur
peut le regarder comme non-coupable ; mais il n'en serait pas de même
si dans ces moments il conservait encore quelque étincelle de raison,
et s'il ne perdait poiot entièrement la raison si bien qu'il pût
résister. » En outre, le même auteur avertit les confesseurs
d'avoir soin que ceux qui sont sujets à ces vexations se confessent
de ces actes ; car il est difficile qu'ils ne se rendent cou-pables au
moins de péchés véniels, soit en négligeant
quelque avertissement, soit en n'opposant pas toute la résistance
possible.
Si par hasard il se présente au confessionnal quelque possédé
qui éprouve cette espèce de tenta-tion (appelée esprit
de fornication, dont l'Église nous fait prier le Seigneur de nous
délivrer), le confesseur doit être très attentif à
prémunir le pé-nitent contre de si terribles attaques, puisque,
ajoute l'auteur cité (au n. 7 et g), ces personnes courent de grands
dangers, si elles ne font point usage de remèdes très forts
et même extraordinaires, s'il le faut ; puisque, ayant besoin pour
résister d'un puis-sant secours de la part de Dieu, et de grands
efforts de leur coté, difficilement elles sortiraient victo-rieuses
de ces combats, si elles ne se livraient point constamment à une
grande mortification, et surtout à de ferventes prières,
se recommandant à Dieu mille et mille fois, aux pieds du crucifix
et de Marie, pleurant, gémissant, implorant la miséricorde
du Seigneur. Autrement, continue le même auteur, si
POUR I-ES CONFESSEURS.
81 ?
l'âme se refroidissait, si elle cessait de se mortifier et de
prier, bientôt elle courrait grand risque de tomber dans quelque
secrète complaisance de quelques jouissances honteuses, au moins
indi-rectes. Ainsi donc, pour en venir aux remèdes , si le confesseur
peut justifier qu'il n'y a point de faute de la part du pénitent,
il l'exhorte en premier lieu à se fortifier par la prière,
et à invoquer souvent les saints noms de Jésus et de Marie.
En outre, il l'engage à fuir autant qu'il est possible tous les
plai-sirs sensibles, à fréquenter la communion, à
pro-tester souvent qu'il ne veut point consentir à aucune suggestion
du démon, ou à aucune des jouissances qu'il lui fait éprouver,
de faire souvent usage du signe de la croix (qu'il doit avoir soin de porter
toujours sur lui-même) et de l'eau bénite, et d'en arroser
son lit et sa chambre ; enfin d'avoir toujours sur lui quelque relique
de saints , et l'Évangile de S. Jean; de s'aider encore de l'exorcisme
privé, en faisant lui-même le signe de la croix, et en disant:
? Infâme démon, jeté commande, au nom de Jésus-Christ,
de te retirer de moi, et de ne plus me tour-menter. » De plus, il
l'exhorte à s'humilier souvent et à faire des actes d'humilité
; car souvent le Sei-gneur permet que nous soyons affligés de ces
ten-tations, afin de guérir nos âmes de quelque orgueil secret.
LIV. Mais ce qu'il y a de plus difficile, c'est de guérir ceux
qui consentent à de semblables actes , ou bien qui les recherchent
eux-mêmes. Or, ceux-ci rarement se convertissent de cœur, puisque
d'un côté le démon- a acquis un certain empire sur
leur volonté, et que de l'autre ils sont eux-mêmes trop foibles
pour résister. Ils auraient besoin pour cela
2l8
INSTRUCTION PRATIQUE
d'une grâce extraordinaire ; mais difficilement Dieu l'accorde
à de tels coupables. Toutefois, lorsqu'il se présente quelqu'un
de ces malheureux,le confes-seur ne doit point perdre tout espoir. D'abord,
il doit user envers le pénitent d'une grande charité , et
l'encourager en lui disant que là où il n'y a point la volonté,
là aussi il n'y a point de péché ; qu'ainsi toutes
les fois qu'il résiste avec la volonté , jamais il ne pèche.
Avant tout, le confesseur doit faire contre le démon l'exorcisme
au moins privé, qui est cer-tainement permis, en ces termes:* Ego,
ut minister » Dei, praecipio tibi, aut vobis, spiritus immundi, ut
» recedatis ab hac creatura Dei. » Ensuite il demande au pénitent
si jamais il n'a invoqué son ennemi et s'il n'a point fait quelque
pacte avec lui; s'il n'a ja-mais nié la foi, ou s'il n'a point fait
quelque acte contre elle. Il lui demande encore dans quelle forme lui apparaît
le démon ; si c'est dans la forme d'un homme, d'une femme ou d'un
animal, etc.; car, alors, outre le péché contre la chasteté
et contre la religion, il y a encore le péché de fornication
ou de sodomie, de bestialité ou d'inceste, d'adultère ou
de sacrilège affectif. En outre, il lui demande dans quel temps,
dans quel lieu ce commerce a eu lieu. Il lui représente ensuite
toute l'énormité de son péché, et fait tout
son possible pour l'engager à se convertir véritablement
et à faire une confes-sion entière de tous ses péchés
; car il arrive souvent à ces personnes de cacher quelques uns de
leurs péchés. Enfin, il lui recommande les mêmes re-mèdes
que nous avons mentionnés plus haut, c'est-à-dire de recourir
souvent à Dieu et à la Sainte Vierge ; de faire usage de
l'eau bénite et du signe de la croix, de porter toujours sur lui
quelque re-
POUR 1ES CONFESSEURS.
21g
Iique et l'évangile de saint Jean ; de s'aider même de
l'exorcisme privé, ainsi que nous l'avons déjà dit.
Cela fait, il diffère de lui donner l'absolution ; mais il a soin
de l'engager à revenir souvent, afin de voir comment il résiste
aux assauts que lui livre le dé-mon , comment il fait usage des
remèdes qu'il lui a assignés; or, ce n'est qu'après
une longue épreuve qu'il peut l'absoudre, parce que de semblables
con-versions sont rarement véritables, et très rarement elles
sont persévérantes.
§ X. Conduite du confesseur envers les femmes.
LV. Le confesseur doit user d'une grande pré-caution en entendant
la confession des femmes. Nous observerons en premier lieu ce qui a été
dit dans le décret de la S. C. des évêques, le 21 jan-vier
1620, savoir : « Confessarii sine necessitate «audire non debent
mulierum confessiones post » crepusculum vespertinum et ante auroram.
· Par-iant ensuite de la prudence que doit avoir le con-fesseur,
noust disons que dans le confessionnal il doit être régulièrement
avec les jeunes femmes plus sé-vère que prévenant;
qu'il ne doit jamais permettre qu'elles viennent lui parler auparavant,
et encore moins qu'elles lui baisent la main. Quand elles se con-fessent,
il ne doit jamais faire voir qu'il les connaît, puisque quelques
unes de ces personnes qui veulent passer pour dévotes ne s'accuseraient
point entiè-rement de leurs péchés, si elles venaient
à s'aper-cevoir que le confesseur les connaît. Il n'est point
prudent de regarder les pénitentes et de les accom-pagner des yeux
quand elles quittent le confessional. Hors ensuite du confessional, que
le confesseur ne
220
INSTRUCTION PRATIQUE
s'arrête point avec elles à parler dans l'église;
qu'il évite toute familiarité ; qu'il se garde bien de recevoir
d'elles des présents, et surtout d'aller dans leur maison, à
moins qu'il n'y soit obligé par une occa-sion de grave nécessité,
et alors qu'il use d'une grande précaution en les confessant ; qu'il
laisse la porte ouverte, qu'il soit à la vue des gens du dehors
et qu'il ait soin de tourner la tête d'un autre côté,
surtout si ce sont des personnes spirituelles avec lesquelles le péril
des liaisons1 est encore plus à craindre. Le P. Sertorius Caputo
disait à ce sujet que le démon, pour attacher les personnes
spiri-tuelles entre elles, se servait d'abord du prétexte de la
vertu, afin que la liaison une fois formée dans leur cœur se change
ensuite en passion sous le masque de la vertu. C'est aussi ce qui a fait
dire à saint Augustin (i) : « Sermo brevis et rigidus cum
»liis mulieribus habendus est; nec tamen quia «sanctiores sunt,
ideo minus cavendœ; quo enim » sanctiores fuerint, eo magis alliciunt
; » et plus tard à saint Thomas (2) : « Licet carnalis
affectio sit omni-» buspericulosa,ipsis tamen magis perniciosa,quando
» conversantur cum persona, quse spiritualis videtur; «nam
quamvis principium videatur purum, tamen » frequens familiaritas
domesticum est periculum; » quae quidem familiaritas*, quando plus
crescit, in-» firmatur principale motivum, et puritas maculatur.»
Or,le saint docteur ajoute encore que ces personnes ne s'aperçoivent
pas de cela tout de suite. En effet, le démon ne lance point d'abord
ouvertement ses traits envenimés, mais seulement ceux dont les
(1) S. Augustin, t. VIII. in ps. 5o.
(a) S. Thotn. opusc, 64· tit. De peric. famil. etc.
POUR LES CONFESSEURS.
321
blessures ne sont point mortelles et qui ne font qu'accroître
la passion. Cependant, ces personnes ne tardent pas à faire voir
qu'elles ne vivent plus ensemble comme des anges, ainsi qu'elles faisaient
au commencement, mais plutôt comme des hommes de chair|; car elles
se cherchent mutuellement des yeux, s.'enflamment par de tendres paroles
qui sem-blent encore partir de leur première dévotion ; en-suite
elles désirent la présence l'un de l'autre,; puis enfin elles
donnent sujet de tirer cette conclu-sion : « Sicque spiritualis devotio
convertitur in car-» nalem. » Et en effet, combien.de prêtres
qui étaient d'abord de dignes ministres de Jésus-Christ,
et qui ensuite, par ces liaisons qui n'avaient rien de dan-gereux en premier
lieu, ont fini par perdre l'esprit de Dieu !
LVI. JËn second lieu, le confesseur ne doit point tellement s'adonner
à confesser les femmes,qu'il re-fuse de confesser les hommes lorsqu'ils
se présentent. Quelle douleur de voir tant de confesseurs passer
toute la matinée à entendre des béates, des dévotes,
et si ensuite il se présente de pauvres hommes, des maris qui sont
accablés de travaux, les renvoyer en leur disant : ? Je suis occupé,
allez vers d'autres.» Or, qu'anive-t-il? ces individus ne trouvant
per-sonne qui les confesse, passent les mois et les années sans
sacrement et sans Dieu. Certes, ce n'est point là confesser pour
Dieu., mais bien pour l'esprit; c'est pourquoi* je ne sais quel mérite
doivent attendre ces confesseurs qui remplissent ainsi leur ministère.
Je ne dis pas, comme font quelques uns, que c'est un temps perdu de conduire
les âmes à la perfec-tion ; je dis au contraire que c'est
une œuvre très agréable au Seigneur. Mais les bons confesseurs,
222
INSTRUCTION PRATIQUE
qui confessent seulement pour Dieu ( comme fai-saient un saint Philippe
de Néri, un saint François de Sales, un saint Pierre d'Alcantara),
lorsqu'il se présente quelque âme bien malade, la préfèrent
aux âmes dévotes ; car pour ces dernières on trouve
bien ensuite le temps de les entendre et de les diri-ger, quand on veut.
PROPOSITIONES DAMNATA.
PROPOSITIONES DAMNAT*
AB ALEXANDRO PAPA VII. Feria 4 die 24 septembris i665.
In congregatione generali sanctae romanae et uni-versalis inquisitionis,
coram Ss. d. n. Alexandro papa VII, mature discussis infra scriptis propositio-nibus.
«?. Homo nullo unquam vitae suae tempore tenetur elicere actum
fidei, spei, et caritatis, ex vi praecep-torum divinorum ad eas virtutes
pertinentium.
»2. Vir equestris ad duellum provocatus potest illud acceptare,
ne tìmiditatis notam apud alios in-currat.
» 3. Sententia asserens, bullam Cœnœ solum prohibere absolutionem
haeresis, et aliorum crimi-num , quando publica sunt, et id non derogare
fa-cultati Tridentini, in qua de occultis criminibus sermo est, anno 1629,
18 juh'i consistorio sacrae congr. eminentis, card, visa et tolerata est.
POTJK £ES CONFESSEURS.
8?5
»4· Praelati regulares possunt in foro conscientiae absolvere
quoscumque seculares ab haeresi occulta, et ab excommunicatione propter
eam incursa.
» 5. Quamvis evidenter tibi constet Petrum esse haereticum, non
teneris. denuntiare, si probare non possis.
» 6. Confessarius qui in sacramentali confessione tribuit poenitenti
chartam postea legendam , in qua ad venerem incitat, non censetur sollicitasse
in con-fessione ; ac proinde non est denuntiandus.
???. Modus evitandi obligationem denuntiandœ sollicitationis est, si
sollicitatus confiteatur cum sollicitante , hic potest ipsum absolvere
absque onere denuntiandi.
»8. Duplicatum stipendium potest sacerdos pro eadem missa licite
accipere , applicando petenti partem etiam specialissimam fructus ipsimet
cele-branti correspondentem, idque post decretum Ur-bani vm.
»9· Post decretum Urbani potest sacerdos, cui missae celebrandae
traduntur, per alium satisfacere , collato illi minori stipendio , alia
parte stipendii sibi retenta.
» io. Non est contra justitiam pro pluribus sa-crificiis stipendium
accipere , et sacrificium unum offerre: neque enim est contra fidelitatem,
etiamsi promittam promissione etiam juramento firmata, danti stipendium,
quod pro nullo alio offeram.
» ii. Peccata in confessione omissa, seu oblita, ob instans periculum
vita?, aut ob aliam causam , non tenetur in sequenti confessione exprimere.
» 12. Mendicantes possunt absolvere a casibus episcopis reservatis,
non obtenta ad id episcopo-rum facultate.
2 24
INSTRUCTION PRATIQUE
» ??. Satisfacit praecepto annuae confessionis qui confitetur
regulari, episcopo praesentato, sed ab eo injuste reprobato.
»?4· Qui facit confessionem voluntarie nullam, satisfacit
praecepto Ecclesiae.
» i5. Poenitens propria auctoritate substituere sibi alium potest,
qui loco ipsius poenitentiam adim-pleat.
«17. Qui beneficium curatum habent, possunt sibi eligere in confessarium
simplicem sacerdotem non approbatum ab ordinario.
«17. Est licitum religioso vel clerico calumnia-torem gravia
crimina de se, vel de sua religione spargere minantem occidere, quando
alius modus defendendi non suppetit; uti suppetere non videtur, si calumniator
sit paratus vel ipsi religioso, vel ejus religioni publice, et coram gravissimis
viris prae-dicta impingere, nisi occidatur.
» 18. Licet interficere falsum accusatorem, fal-sos testes ac
etiam judicem, a quo iniqua certo im-minet sententia, si alia via non potest
innocens damnum evitare.
»io,. Non peccat maritus occidens propria auc-toritate uxorem
in adulterio deprehensam.
» 20. Restitutio a Pio V, imposita beneficialis non recitantibus,
non debetur in conscientia ante sententiam declaratoriam judicis, eo quod
sit poena.
9 21. Habens capellaniam collativam, aut quod-vis aliud beneficium
ecclesiasticum, si studio lit-terarum vacet, satisfacit suae obligationi,
si officium per alium recitet.
» 22. Non est contra justitiam beneficia ecclesias-tica non conferre
gratis, quia collator conferens illa beneficia ecclesiastica, pecunia interveniente,
non
FOUR LES CONFESSEURS.
2 25
eXi<rit illam pro collatione beneficii, sed veluti pro emolumento
temporali, quod tibi conferre non te-nebatur.
, 25. Frangens jejunium Ecclesiae ad quod tenetur, non peccat mortaliter
, nisi ex contemptu, vel in-obedientia hoc faciat, puta quia non vult se
subji-cere praecepto.
????. Mollities , sodomia, et bestialitas sunt pec-cata ejusdem speciei
infirmae, ideoque sufficit dicere in confessione, se procurasse pollutionem.
»25. Qui habuit copulam cum soluta, satisfacit confessionis praecepto,
dicens: Commisi cum soluta grave peccatum contra castitatem, non explicando
copulant.
* 26. Quando litigantes habent pro se opiniones aeque probabiles ,
potest judex pecuniam accipere pro ferenda sententia in favorem unius prae
alio.
» 27. Si liber sit alicujus junioris, et moderni de-bet opinio
censeri probabilis, dum non constet, rejectam esse a sede apostolica tanquam
improl a-bilem.
«28. Populus non peccat, etiamsi absque ulla causa non recipiat
legem a principe .promulgatam. » « Quibus peractis , dum similium
propositionum examini cura , et studium impenderelur, interea idem Sanctissimus,
re mature considerata, statuit, et decrevit, praedictas propositiones,
et unamquam-que ipsarum, ut minimum tanquam scandalosas esse damnandas,
et prohibendas, sicut eas damnat, ac prohibet; ita ut quicumque illas aut
conjunctim, aut divisim docuerit, defenderit, ediderit, aut de eis etiam
disputative, publice, aut privatim tracta-verit, nisi forsan impugnando,
ipso facto incidat in excommunicationem a qua non possit ( praeter-T. xxvi.
i5
quam in articulo mortis) ab alio, quacumque etiam dignitate fulgente
, nisi pro tempore existentea ro-mano pontifice absolvi.
» Insuper districte in virtute sanctae obedientia}, et sub ìnterminatione
divini judicii prohibet Christi fidelibus cujuscumque conditionis, dignitatis
, ac status, etiam speciali et specialissima nota dignis, ne praedictas
opiniones, aut aliquam ipsarum ab praxim deducant. »
Feria 5 die 18 martii 1666.
« Prop. 29. In die jejunii, qui saepius modicum quid comedit,
non frangit jejunium.
» 3o. Omnes officiales, qui in republica corpora-liter laborant,
sunt excusati ab obligatione jejunii ; nec debent se certificare, an labor
sit compatibilis cum jejunio.
»3i. Excusantur absolute a praecepto jejunii om-nes illi qui
iter agunt; equitando utcumque iter etiamsi iter necessarium non sit, et
etiamsi iteragant unius diei conficiant.
» 3a. Non est evidens , quod consuetudo non comedendi ova et
lacticinia in quadragesima obliget.
» 53. Restitutio fructuum ob omissionem horarum suppleri potest
per quascumque eleemosynas, quas antea beneficiarius de fructibus sui beneficii
fecerit-
» 54- In die palmarum recitans officium paschale satisfacit praecepto»
»35. Unico officio potest quis satisfacere duplici praecepto
pro die praesenti et crastino.
» 36. Regulares possunt in foro conscientiae uti privilegiis
suis quae sunt expresse revocata per Concilium Tridentinum.
POUR LES CONFESSEURS.
027
„ 5y. Indulgentias concessae regularibus, et revo-catas a Paulo V,
hodie sunt revalidatse.
»38. Mandatum Tridentini'factum sacerdoti sà-crificanti
ex necessitate cum peccato mortali, con-fitendi quamprimum , est concilium,
non praecep-tum.
» 3g. Illa particula , quamprimum , intelligitur , cum sacerdos
suo tempore confitebitur.
j>4°· Est probabilis opinio, quae dicit, esse tan-tum veniale
osculum habitum ob delectationem carnalem, et sensibilem, quae osculo oritur,
secluso periculo consensus ulterioris, et polluti onis.
»4i· Non est obligandus concubinarius ad eji-ciendam concubinam,
si haec nimis utilis esset ad oblectamentum concubinam , vulgo t-egalo,
dum, deficiente illa, nimis aegre ageret vitam , et aliae epulae taedio
magno concubinarium afficerent, et alia famula nimis difficile inveniretur.
»4a. Licitum est mutuanti aliquid ultra sortem exigere, si se
obliget ad non repetendam sortem usque ad certum tempus.
» 43·. Annuum legatum pro anima relictum non durât
plus quam per decem annos.
»44· Quoad forum conscientiae, reo . cor^ecto, èjusque
contumacia cessante, cessant censurae.
»45· Libri prohibiti, donec expurgentur , pos-sunt retineri,
usquedum adhibita diligentia corri-gantur. »
PROPOSITIONES DAMNAT*
A SS. INNOCENTIO ???? XI. Fèria 5 die 3 martii 1679.
« 1. Non est illicitum in sacramentis conferendis
228
INSTRUCTION PRATIQUE
sequi opinionem probabilem de valore sacramenti, relicta tutiore, nisi
id vetet lex, conventio,aut pe-riculum gravis damni incurrendi. Hinc sententia
probabili tantum utendum non est in collatione bap. tismi, ordinis sacerdotalis,
aut episcopalis.
» 2. Probabiliter existimo, judicem posse judicare juxta opinionem
etiam minus probabilem.
» 5. Generatim, dum probabilitate sive intrinseca, sive extrinseca,
quantumvis tenui, modo a probabi-litatis finibus non exeatur, confisi aliquid
agimus, semper prudenter agimus.
» 4· Ab infidelitate excusabitur infidelis non cre-dens
ductus opinione minus probabili·
» 5. An peccet mortaliter qui actum dilectionis Dei semel tantum
in vita eliceret, condemnare non audemus.
» 6. Probabile est, ne singulis quidem rigorose quinquenniis
per se obligare praeceptum caritatis erga Deum.
> 7. Tunc solum obligat, quando tenemur jus-tificari, et non habemus
aliam viam, qua justificari possumus.
» 8. Comedere et bibere usque ad satietatem ob solam voluptatem,
non est peccatum, modo non obsit valetudini, quia licite potest appetitus
natu-ralis suis actibus frui.
« 9. Opus coiìjugii ob solam voluptatem exerci-tum , omni
penitus caret culpa ac defectu veniali. » 10. Non tenemur proximum
diligere actu in-terno et formali.
» 11. Praecepto proximum diligendi satisfacere possumus per solos
actus externos.
» 12. Vix in saecularibus invenies, etiam in regi-bus , superfluum
statui, Et ita vix aliquis tenetur
POOR LES CONFESSEURS.
«20,
ad eleemosynam, quando tenetur tantum ex super-fluo statui.
, ??. Si cum debita moderatione facias, potes absque peccato mortali
de vita alicujus tristari, et Je illius morte naturali gaudere, illam inefficaci
af-fectu petere, et desiderare, non quidem ex displi-centia personœ, sed
ob aliquod temporale emolu-mentum.
» ?4· Licitum est absoluto desiderio cupere mor-tem patris,
non quidem ut malum patris, sed bo-num cupientis, quia nimirum ei obventura
est pin-guis haereditas.
s i5. Licitum est filio gaudere de parricidio parentis a se in ebrietate
perpetrate propter ingen-tes divitias inde ex haereditate consecutas.
» 16. Fides non censetur cadere sub praeceptum speciale, et secundum
se.
» 17. Satis est actum fidei semel in vita elicere. »
18. Si a potestate publica quis interrogetur fidem ingenue confiteri, iit
Deo et fidei glorio-sum consulo, tacere, ut peccaminosum per se non damno.
»ig. Voluntas non potest efficere, ut assensus fidei in seipso
sit magis firmus, quam mereatur pondus rationum ad assensum impellentium.
» 20. Hinc potest quis prudenter repudiare as-sensum, quem habebat
supernaturalem.
» 21. Assensus fidei supernaturalis, et utilis ad salutem, stat
cum notitia solum probabili revela-tionis : imo cum formidine, qua quis
formidet, ne non sit locutus Deus.
» 22. Non nisi fides unius Dei necessaria videtur necessitate
medii} non autem explicita Rèniuriera* toris»
INSTRUCTION PRATIQUE
i 23. Fides late dicta ex testimonio creaturarum sjmilive motivo, ad
justificationem sufficit.
» 24. Vocare Deum in testem mendacii levis non est tanta irreverentia,
propter quam velit, aut pos-sit damnare hominem.
25. Cum causa licitum est jurare sine animo jurandi, sive res sit levis,
sive gravis.
» 26. Si quis vel solus, vel coram aliis, sive in-terrogatus
, sive propria sponte, sive recreationis causa, sive quocumque alio fine
juret, se non fe-cisse aliquid, quod revera fec^t, intelligendo intra se
aliquid aliud, quod non fecit, vel aliam viam ab ea, in qua fecit, vel
quodvis aliud additum ve-rum, revera non mentitur, nec est perjurus.
» 27. Causa justa utendi his amphibologiis, est quoties id necessarium
aut utile est ad salutem cor-poris , honorem, res familiares tuendas, vel
ad quemlibet alium virtutis actum, ita ut veritatis oc-çultatio
censeatur tunc expediens et studiosa.
» 28. Qui mediante commendatione vel munere ad magistratum vel
officium publicum promotus est, poterit cum restrictione mentali praestare
juramen-tum, quod de mandato regis a similibus solet exigi, non habito
respectu ad intentionem exigentis, quia non tenetur fateri crimen occultum.
» 29. Urgens metus gravis est causa justa sacra-mentorum administrationem
simulandi.
» 3o. Fas est viro honorato occidere invasorem, qui nititur calumniam
inferre, si aliter haec igno-minia vitari nequit : idem quoque dicendum,
si quis impingat alapam, vel fuste percutiat, ei post impactam alapam vel
ictum fustis fugiat.
» 3i. Regulariter occidere possum furem pro conservatione unius
aurei.
POUR LES CONFESSEURS.
231
» 5a. Non solum licitum est defendere defen-sione occisiva, quae
actu possidemus, sed etiam ad quœ jus inchoatum habemus, et quae nos possessu-rus
speramus.
» 33. Licitum est tam haeredi, quam legatario contra injuste
impedientem, ne vel haereditas adea-tur, vel legata solvantur, se taliter
defendere; sicut et jus habendi in cathedram, vel praebendam contra earum
possessionem injuste impedientem.
» 34· Licet procurare abortum ante animatiqnem fœtus,
ne puella deprehensa gravida occidatur, aut infametur.
» 34· Videtur probabile, omnem fretum, quam-diu in utero
est, carere anima rationali, et tunc primum incipere eamdem habere, cum
paritur; ac consequentur dicendum erit, in nullo abortu ho-micidium committi.
» 36. Permissum est furari, non solum in ex-trema necessitate,
sed etiam in gravi.
» 37. Famuli et famulae domesticae possunt OC' culte heris suis
surripere ad compensandam operam suam, quam majorem judicent salario quod
reci-piunt.
» 38. Non tenetur quis sub poena peccati mor-talis restituere
quod ablatum est per pauca furta, quantumcumque sit magna summa totalis.
» 5g. Qui alium movet, aut inducit ad inferen-dura grave damnum
tertio, non tenetur ad restitu-tionem istius damni illati.
» 4o. Contractus mohatra licitus est, etiam re-spectu ejusdem
personse, et cum contractu retro-venditionis praevie inito cum intentione
lucri.
» 41· Cum numerata pecunia pretiosior sit nu-meranda,
et nullus sit qui non majoris faciat pecu-
INSTRUCTION PRATIQUE
niam praesentem, quam futuram, potest creditor aliquid ultra sortem
a mutuatario exigere, et eo ti-tulo ab usura excusari.
» 4a. Usura non est, dum ultra sortem aliquid exigitur, tanquam
ex benevolentia et gratitudine debitum, sed solum si exigatur tanquam ex
justitia debitum.
» 43. Quidni, non nisi veniale sit, detrahentis auctoritatem
magnam sibi noxiam falso crimine eli-dere ?
» 44- Probabile est, non peccare mortaliter qui imponit falsum
crimen alicui, ut suam justitiam et honorem defendat. Et si hoc non sit
probabile, vix ulla erit opinio probabilis in theologia.
» 45. Dare temporale pro spirituali non est si-monia, quando
temporale non datur tanquam pre-tium, sed duntaxat tanquam motivum conferendi
vel efficiendi spirituale, vel etiam quando tempo-rale sit solum gratuita
compensatio pro spirituali, aut e contra.
» 46. Et id quoque locum habet, etiamsi tempo-rale sit principale
motivum dandi spirituale, imo etiamsi sit finis ipsius rei spiritualis,
sic ut illud pluris aestimetur, quam res spiritualis.
j> 4j' Cum dixit concilium Tridentinum, eos alie-nis peccatis communicantes
mortaliter peccare, qui nisi quos digniores et ecclesiae magis utiles ipsi
ju-dicaverint, ad ecclesias promovent, concilium vel primo videtur per
hoc digniores non aliud signifi-care velle, nisi dignitatem eligendorum,
sumpto comparativo pro positivo; vel secundo locutione minus propria ponit
digniore^, tit excludat indignos, non Vero dignos} vel tatidérri
loquitur1 tertio » quaftdd fit etftìeursuSi
POUR LES CONFESSEURS.
255
» 48. Tam clarum videtur, fornicationem secun-dum se nullam involvere
malitiam, et solum esse nialam, quia interdicta, ut contrarium omnino ra-tioni
dissonum videatur.
» 49· Mollities jure naturae prohibita non est. Unde si
Deus eam non interdixisset, saepe esset bona , et aliquando obligatoria
sub mortali.
» 5o. Copula cum conjugate, consentiente marito, non est adulterium
, adeoque sufficit in confessione dicere, se esse fornicatum.
» 51. Famulus qui, submissis humeris, scienter adjuvat herum
suum ascendere per fenestras ad stu-prandam virginem, et multoties eidem
subservit, deferendo scalam, aperiendo januam, aut quid si-mile cooperando,
non peccat mortaliter, si id faciat metu notabilis detrimenti, puta ne
a domino male tradetur, ne torvis oculis aspiciatur, ne domo ex-pellatur.
» 52. Praeceptum servandi festa non obligat sub mortali, seposito
scandalo, si absit contemptus.
» 63. Satisfacit praecepto Ecclesiae de audiendo sacro, qui duas
ejus partes, imo quatuor simul a diversis celebrantibus, audit.
» 54· Qui non potest recitare matutinum et lau-des , potest
autem reliquas horas, ad nihil tenetur, quia major pars trahit ad se minorem.
» 65. Praecepto communionis annuae satisfit per sacrilegam Domini
manducationem.
» 56. Frequens confessio, et communio, etiam in his qui gentiliter
vivunt, est nota praedestina-tionis.
» 57. Probabile est, sufficere âttritionem natu* ràtern
> modo honestam»
234
INSTRUCTION PRATIQUE , ETC.
» 58. Non tenetur confessario interroganti fateri peccati alicujus
consuetudinem.
» 5g. Licet sacramentaliter absolvere dimidiate tantum confessos,
ratione magni concursus poeni-tentium , qualis, v. g., potest contingere
in die magnae alicujus festivitatis, aut indulgentiae.
» 6o. Poenitenti habenti consuetudinem peccandi contra legem
Dei, naturae, aut Ecclesia?, etsi emen-dationis spes nulla appareat, nec
est neganda, nec differenda absolutio, dummodo ore proferat, se dolere,
et proponere emendationem.
» 6i. Potest aliquando absolvi, qui in proxima occasione peccandi
versatur, quam potest, et non vult omittere, quin imo directe, et ex proposito
quaerit, aut ei se ingerit.
» 62. Proxima occasio peccandi non estfugienda, quando causa
utilis aut honesta non fugiendi pc-currit.
» ^5. Licitum est quaerere directe occasionem proximam peccandi
pro bono spirituali, vel tempo-rali nostro, vel proximi.
» 64. Absolutionis capax est homo, quantumvis laboret ignorantia
mysteriorum fidei, et etiamsi per negligentiam etiam culpabilem nesciat
mysterium sanctissimae Trinitatis, et Incarnationis Domini nostri Jesu
Chisti.
» 65. Sufficit illa mysteria semel credidis?e. 9
TABLE
DES CHAPITRES.
CHAPITRE XX.
Des privilèges.
Premier point. Des privilèges en commun.
?
Deuxième point. Des privilèges ecclésiastiques.
17
Avertissement.
37
Troisième point. Des privilèges des évéques.
98
Quatrième point. Des privilèges des réguliers.
j5
§ I. Det privilèges qui appartiennent à tous les
réguliers
en commun.
Ib.
§ II. Des privilèges des réguliers en particulier.
98
CHAPITRE XXI.
De ta charité et de la prudence du confesseur.
198
CHAPITRE DERNIER.
Comment doit se conduire le confesseur envers les différentes
sortes de pécheurs.
13G
$ ?. Comment doivent se comporter tes confesseurs avec ceux qui se
trouvent dans l'occasion prochaine de pé-cher.
137 § H. Conduite du confesseur à l'égard de ceux qui
ont des
habitudes et de ceux qui retombent dans le péché.
i4g
§ III. De quelques interrogations spéciales que le confes-seur
doit faire aux pénitents touchant les péchés qu'ifs
ont commis.
166
I. Des demandes à faire aux ignorants.
lb.
II. Des demandes que le confesseur doit faire aux per-sonnes
de divers états ou de diverses conditions qui
ont négligé l'état de leur conscience.
180
5s>6
TABLE DES CHAPITRES.
S IV. Conduite que doit tenir le confesseur envers les en-fants, les
jeunes gens et les jeunes filles.
190
§ V. Comment doit se comporter le confesseur avec les personnes
dévotes.
197
§ VI. Conduite des confesseurs ? l'égard des sourds-et·
muets.
200
§ VII. Conduite du confesseur envers les moribonds.
201
§ VIII. Conduite du confesseur envers ceux qui sont con-damnés
? mort.
20 3
§ IX. Conduite du confesseur envers les possédés
du dé-mon.
207
§ X. Conduite du confesseur envers les femmes.
21g
PROPOSITIONES DAMNAT*.
Propositiones damnato ab Alexandro papa VII.
Feria 4 die 24 septembris i665.
222
Feria 5 die 18 martii 1666.
226
Propositiones damnatas ab Innocentio papa XI. Feriaft die. 2 martii
1679.
327