Jusqu'à l'âge de 37 ans, rien ne laissait supposer qu'Angèle de Foligno, bourgeoise particulièrement frivole, deviendrait une figure emblématique de la mystique du XIIIème siècle.
Profondément
tourmentée par une vie d'adultère, Angèle se confesse
à saint François d'Assise. Mais l'apparition du saint lui
accordant sa miséricorde n'apaise pas pour autant son âme.
Angèle ressent alors le besoin de diriger sa vie sur le chemin de
la purification.
A la fugacité
des plaisirs de ce monde, elle tente douloureusement d'opposer une vie
de continence et de pauvreté. Après la mort soudaine de son
mari et de ses fils, qu'elle avait demandée « selon la volonté
de Dieu », sachant au plus profond d'elle-même que leurs âmes
refusaient de la suivre dans sa conversion et préféraient
« partir », elle entre dans le tiers ordre franciscain, accablée
par le poids de la souffrance. Dès lors, secouée par les
épreuves-faveurs que Dieu lui envoie, Angèle ne cessera de
communiquer et de communier avec le ciel.
Devenue libre par la mort de son mari, elle entra dans le Tiers-Ordre de Saint-François. Sa vie dès lors fut remplie de sacrifices et d'austérités. Un jour qu'elle était tentée de découragement: "Quand il serait vrai, Seigneur, dit-elle, que Vous m'auriez condamnée à l'enfer que je mérite, je ne cesserais de faire pénitence et de demeurer, s'il Vous plaît, à Votre service." Une fois, après avoir lavé les pieds d'un lépreux, elle proposa à sa compagne de boire l'eau qui leur avait servi. Surmontant toute délicatesse, elle avala toute cette eau fétide: "Je n'ai jamais, disait-elle, trouvé meilleur goût à aucune liqueur, et cependant j'avais bien senti dans ma bouche les écailles qui étaient tombées des mains de ce pauvre."
Sa grande grâce
fut l'amour de Jésus crucifié. La contemplation des souffrances
du Sauveur lui devint si familière, que la vue d'un crucifix provoquait
spontanément chez elle des torrents de larmes: "Quand je méditais
sur la Passion, dit-elle, je souffrais le supplice de la Compassion; j'éprouvais
dans les os et les jointures une douleur épouvantable et une sensation
comme si j'avais été transpercée corps et âme."
Cette grande pénitente ne fut pas moins admirable par ses visions,
ses écrits et ses extases que par ses vertus.
Lorsque le Christ en
croix lui apparaît pour l'inviter à contempler ses plaies,
elle en éprouve une telle souffrance qu'elle demande de partager
sa Passion. Saint Jean lui fera alors éprouver un peu de sa souffrance
devant la croix. Elle boira ensuite le sang du Christ s'écoulant
de ses plaies et c'est d'ailleurs dans ce même esprit de communion
qu'elle absorbera la lavure des mains d'un lépreux.
Alors qu'elle se retrouve
dans les bras du Christ dans le saint sépulcre, c'est toute l'humanité
qu'Angèle semble incarner et que le Seigneur étreint de son
Amour : « j'ai voulu naître pour toi, pour toi, m'abaisser
à un tel degré d'indignité et d'abjection qu'en retour,
tu dois naître à Dieu et mourir à tes vices».
« Je veux que tu sois utile à tous les hommes
» continue le Christ l'exhortant à répandre l'Amour
qu'elle porte en elle.
C'est à présent
l'Esprit Saint qui vient la visiter sous l'apparence d'une « forme
pleine », source d'une indicible suavité. Mais voulant s'assurer
de la véracité de ses visions, elle demande un signe à
l'Esprit qui lui dit : « Tu auras l'expérience de
Dieu et tu seras toujours brûlante d'Amour pour lui, tu connaîtras
dans ton intériorité que nul ne peut opérer cela sinon
moi ».
Au sommet de son ascension,
Angèle connaît alors la « certitude de Dieu ».
« Mon âme ne voit rien, et elle voit absolument tout »
dit-elle, nous faisant ainsi goûter à l'expérience
parfaite de Dieu dans les suprêmes ténèbres. «
Trouves-tu en moi autre chose que de l'Amour ? » lui dit le Seigneur...
« Pleine de la jouissance de Dieu », Angèle connaît
enfin l'oraison suprême où le Je et le Tu se confondent dans
la délectation de l'Amour. « Tu es moi, je suis toi »
lui dit le Christ. « Je suis devenue Dieu » s'écrie
Angèle démontrant que « la vertu de l'Amour transforme
l'Amant en l'Aimé et l'Aimé en l'Amant ».
« O mon épouse, ô toi que j'ai aimée d'Amour… je viendrai à toi en personne » lui dit le Christ.