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BIBLE FILLION

LE LIVRE D’ABDIAS


INTRODUCTION

1° La personne du prophète nous est à peu près totalement inconnue, faute de documents historiques. Son nom hébreu, ‘Obadyah, dérive de deux mots (‘ébed Yah) qui signifient : Serviteur de Jéhovah. La forme latine la plus habituelle est celle que nous lisons dans la Vulgate; mais on trouve aussi, dans les anciens écrits, les formes « Obdia, Obadia, Obdias, Obedia ». On lit de même, dans les manuscrits des Septante, tantôt Οβδίας, tantôt ’Aβδίας. Ce nom était relativement commun chez les Juifs, sans doute à cause de sa belle signification (pour un motif semblable, de nombreux mahométans sont nommés Abdallah, serviteur de Dieu). On le trouve au moins onze fois dans les listes généalogiques de la Bible, aux époques les plus diverses de l’histoire juive (cf. 1 Par. 3, 21; 7, 3; 8, 38; 9, 16, 44; 27, 19; 2 Par. 17, 7; 34, 12; Esdr. 8, 9; Neh. 10, 5 et 12, 25), sans parler du pieux intendant d’Achab , qui sauva la vie à cent prophètes que ce prince impie voulait mettre à mort (3 Reg. 18, 3-4. Voyez aussi 4 Reg. 1, 13-16). Les tentatives que l’on a faites parfois, dans les temps anciens et de nos jours, pour identifier notre petit prophète à tel ou tel de ses homonymes, sont sans fondement sérieux. On peut tout au plus supposer qu’il appartenait au royaume de Juda, parce qu’il s’occupe surtout de Jérusalem.

L’époque à laquelle il vivait a occasionné des discussions sans fin. Elle est « très difficile à déterminer. Les uns regardent Abdias comme le plus ancien des petits prophètes, les autres le font vivre du temps de la captivité. La brièveté de sa prophétie, qui non seulement n’a point de titre (à part les deux mots « Visio Abdiae », mais ne renferme aucune allusion assez précise, explique ces divergences si considérables entre les savants. On peut néanmoins, sans affirmer le fait comme certain, regarder le prophète Abdias comme le plus ancien de tous ceux dont les écrits nous ont été conservés. — 1. Il existe entre sa prophétie et celle de Jérémie contre l’Idumée (cf. Jer. 49, 7-22) une très grande ressemblance; elle est poussée à un tel point, qu’on est obligé d’admettre que l’un des deux a eu sous les yeux l’œuvre de l’autre, et tout porte à croire que c’est Jérémie qui a imité Abdias (ce fait est aujourd'hui presque unanimement admis par les critiques. Voyez le Man. Bibl., t.2, n. 1085, note 2). Le petit prophète a donc prophétisé avant le grand. Mais combien de temps auparavant? Il est impossible de donner à cette question une réponse certaine. Abdias reproche aux Iduméens d’avoir applaudi aux malheurs de Juda, lors de la prise de Jérusalem par des étrangers (Abd. 11-14); seulement, il ne nous dit pas quels étaient ces étrangers. De là la difficulté. Jérusalem, avant d’être détruite par Nabuchodonosor, avait été prise et pillée cinq fois depuis qu’elle était devenue capitale: 1° par le roi d'Égypte, Sésac, sous Roboam (cf. 3 Reg. 14, 25); 2° par les Philistins et les Arabes, sous Joram (2 Par. 21, 16); 3° par le roi Joas d’Israël, sous Amasias (4 Reg. 14, 13); 4° par les Chaldéens, sous Joakim (4 Reg. 24, 1); et 5° sous Jéchonias (4 Reg. 24, 10). Abdias ne peut parler de la première prise de Jérusalem, par Sésac, car les Iduméens étaient alors soumis au royaume de Juda. Il ne peut pas davantage faire allusion à la quatrième et à la cinquième, qui sont contemporaines de Jérémie; non plus qu’à la troisième, puisqu’il dit expressément que la capitale de la Judée fut alors ravagée par des étrangers, ce qui ne saurait s’appliquer aux Israélites du nord, mais convient parfaitement aux Arabes, et surtout aux Philistins, dont les Septante traduisent généralement le nom par άλλοφύλοι, étrangers (comp. Abd. 11 et 19, dans cette version). C’est donc du temps de Joram (entre les années 889 et 885 avant J.-C.) qu’a vécu et qu’a prophétisé Abdias, à l’époque où les Iduméens secouèrent le joug du roi de Juda (cf. 4 Reg. 8, 20-22; 2 Par. 21, 8-10), et où ils applaudirent aux ravages des Philistins et des Arabes de l’Arabie Pétrée (cf. 2 Par. 21, 17). — 2. Nous arrivons à la même conclusion en comparant la prophétie d’Abdias avec celle de Joël. Les rapports entre ces deux écrivains sacrés sont généralement admis. Joël, malgré son originalité incontestable, a imité Abdias (cf. Joel, 2, 32, et Abd. 17. Comp. aussi Joel, 3, 3, et Abd. 11; Joel, 3, 4-7; et Abd. 15; Joel, 3, 14, et Abd. 15; Joel, 3, 17, et Abd. 17; Joel, 3, 10, et Abd. 10), de même qu’Abdias a imité les prophéties de Balaam en quelques points (cf. Num. 24, 18, 21, et Abd. 4, 18 et ss.)... Abdias doit donc dater de la fin du règne de Joram (Man. Bibl., t. 2, n. 1085).

3° Le style d’Abdias accuse aussi une assez haute antiquité. « Il est vigoureux, serré, presque dur; on n’y trouve pas un seul mot qui fasse penser à une époque récente (Dr Schegg). » « Le langage du prophète retentit comme s’il sortait des fentes d’un rocher; sa parole est pleine d’âpreté; nous ne trouvons en lui aucune fleur d’expression, aucun ornement d’exposition. On dirait qu’il a taillé ses prédictions dans les pierres de Séla (la capitale de l'Idumée). » Il est néanmoins très poétique, très vivant.

Le sujet et la division du livre. — Ce livre, le plus petit de tous ceux de l’Ancien Testament, a pour objet direct et immédiat les relations de l’Idumée avec le peuple de Dieu. Il commence par la proclamation de la ruine prochaine des Iduméens, que Jéhovah saura bien atteindre, malgré la force de leurs citadelles bâties sur les rochers. Il indique ensuite la cause de ce sort rigoureux: c’est l’indigne conduite des descendants d’Esaü à l’égard des Israélites leurs frères, tandis que ceux-ci étaient outragés par de cruels vainqueurs; bien loin de venir alors en aide aux Hébreux, les Iduméens s’étaient lâchement associés à leurs ennemis pour piller Jérusalem. Mais, continue Abdias, le jour du Seigneur est proche; Dieu se vengera lui-même et vengera Israël, en frappant soit les Iduméens, soit les autres nations païennes. Les Israélites, au contraire, seront bénis; ils s’empareront du territoire de leurs oppresseurs, puis Jéhovah régnera glorieusement et à jamais dans Sion.

Ainsi donc, trois parties dans cet oracle: 1° le décret terrible et immuable de Jéhovah contre l’Idumée, vers. 1-9; 2° le motif de ce décret, vers. 10-16; 3° la merveilleuse délivrance de Sion, vers. 17-21.

Si l’Idumée est, comme nous l’avons dit, l‘objet direct de la prophétie d’Abdias, elle n’en est pas l’objet total, qui épuise à lui seul la pensée. Après l’avoir prise pour point de départ, Abdias s’élance sur les ailes de l'inspiration, et gagne les hauteurs de l’ère messianique, qui est évidemment décrite dans les derniers versets. Pour lui, la ruine d’Édom n’est pas seulement un fait spécial, isolé; ce jugement de Dieu contre une nation coupable est, à ses yeux, comme un acte préliminaire du jugement général de tous les peuples (comp. Les vers. 15-16). La ruine des Iduméens représente donc pour lui celle de tous les ennemis de la vraie religion, de même que le rétablissement des Israélites en Palestine, après leur défaite, est le type de l'installation finale du royaume de Jéhovah sur toute la terre (Pour les commentateurs catholiques, voyez la p. 339, n. 1. Deux ouvrages spéciaux sont à signaler : Ad. Johannes, Kommentar zu der Weissagung des Propheten Obadja (Wurtzbourg, 1886); N. Peters, die Prophetie Obadjahs untersucht und erklaert (Paderborn, 1892)).