BIBLE FILLION
La Sainte Bible Commentée d'après la Vulgate et les textes originaux
LE LIVRE D’AGGÉE
INTRODUCTION
1° La personne et l'époque du prophète. -—- Son vrai nom était Haggaï (de la racine hag, fête), « festivus. » La forme latine ’Aggœus a été calquée sur ’Aγγαίος des Septante. Aggée ne nous fournit pas le moindre détail sur sa famille. Nous ne savons pas même d’une manière certaine s’il était né avant ou pendant l’exil, en Judée ou à Babylone, quoique cette dernière hypothèse soit plus probable. Il nous apprend
seulement qu’il exerça le rôle de prophète à Jérusalem, pendant la seconde année
du règne de Darius, fils d’Hystaspe (520 avant J.-C.) (les évènements racontés dans ce livre se passèrent durant le court intervalle de trois mois et vingt-quatre jours. Cf. 1, 1 et 2, 11, 21). Aggée ouvre donc la série des trois prophètes postérieurs à l’exil. Zacharie fut son contemporain;
Malachie exerça son ministère environ quatre-vingt-dix ans plus tard. Comme nous l'apprennent les six premiers chapitres d’Esdras, l’époque d’Aggée et
de Zacharie était pénible, douloureuse même, car la théocratie rencontrait, du côté des hommes, de nombreux obstacles pour sortir de ses ruines; le découragement avait même atteint les Juifs au point de vue religieux: c’est pré
cisément pour ranimer leur énergie que Dieu leur envoya ses messagers, qui
réussirent dans leur noble mission.
2° Le sujet et la division du livre. — Deux fois de suite Esdras mentionne la part très grande que les prophètes Aggée et Zacharie prirent à la reconstruction du temple de Jérusalem (cf. Esdr. 5, 1-2, et 6, 14-15); or, ce qui caractérise précisément le livre d’Aggée,
c’est que tout y est rattaché à cette reconstruction, qui en forme même le centre et le thème principal (ce fait est si frappant, qu'on n'a pas songé à attaquer l'authenticité des oracles d'Aggée). « La nécessité de la restauration du temple ressortait, pour le prophète, de la place considérable qu’occupait le sanctuaire dans la
vie de la nation privilégiée. C’était, en effet, le signe autorisé de l’alliance
conclue au Sinaï entre Jéhovah et Israël, le symbole de l'habitation de Dieu au sein
de son peuple. Le temple renversé devait donc représenter sous une forme
visible la rupture de cette alliance, la cessation plus ou moins complète des rap
ports qui unissaient le Seigneur à la nation tout entière; et la reconstruction du
sanctuaire devenait dès lors, aux yeux du prophète, une obligation sacrée entre toutes, qui devait s’imposer à la conscience des contemporains. »
Les introductions historiques et chronologiques, très nettes dans leur concision, qu’Aggée lui même a placées en avant de chacune de ses prédictions (cf. 1, 1; 2, 2, 11, 21), divisent son livre en quatre petits discours, prononcés en autant d’occasions distinctes, mais poursuivant tous le même but et ayant entre eux les relations les plus intimes. Le premier (1, 2-2, 1) blâme sévèrement les Juifs de leur lenteur
à reconstruire le temple, et attribue à cette grave négligence la sécheresse qui
avait détruit une partie notable des récoltes. Le second (2, 2-10) annonce que le nouveau temple, si humble dans ses débuts, aura une gloire bien supérieure à
celle du premier, bâti par Salomon et renversé par les Chaldéens. Le troisième (2, 11-20) encourage, par la promesse d’une grande fertilité, les travaux du
peuple, qui poussait avec zèle la restauration de l’édifice sacré; il blâme toutefois l’accomplissement purement extérieur de la loi. Le quatrième (2, 21-24) prédit le rétablissement glorieux du royaume de David (pour une analyse plus complète, voyez le commentaire et notre Biblia sacra, p. 1030-1031).
Deux de ces discours, le second et le quatrième, sont messianiques, car ils prédisent clairement, d’une part, la venue relativement prochaine du Messie, qui devait honorer de sa présence le nouveau sanctuaire, et, d’autre part, la splendeur magnifique de son règne.
3° Le genre d’Aggée comme écrivain. - Son langage ne s’élève guère au-dessus de la simple prose. Il a des sentiments ardents, élevés; mais il ne s’inquiète pas de les revêtir d’un beau style. Néanmoins, il réussit par moments à
donner plus de vie à ses discours par l’emploi du rythme, par des répétitions (cf. 1, 6, 9-11; 2, 5, 23, etc) et des interrogations (cf. 1, 4, 9; 2, 3, 12, 13, 19) qui accentuent la pensée. On remarque aussi des passages d’une vigoureuse concision, faisant suite à une entrée en matière un peu diffuse (cf. 1, 2b; 12b; 2, 5b, 19b):
ce qui a fait dire de lui qu’il cache sous une écorce un peu épaisse un noyau petit, mais plein d'intensité. « Ajoutons, note un autre critique, qu’Aggée a précisément dans sa simplicité, qui émane d’une situation saisissante et d’un cœur profondément ému, quelque chose d’extraordinairement attrayant et d’extraordinairement touchant » (pour les commentaires catholiques, voyez la page 339, note 1).