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BIBLE FILLION

La Sainte Bible Commentée d'après la Vulgate et les textes originaux

LIVRE DE BARUCH

LA PROPHÉTIE DE BARUCH



Le prophète. — En hébreu, le mot Baruch signifie « béni ». Le premier verset du livre cite la généalogie de notre prophète jusqu’à la cinquième génération, et l’on voit par là que l’auteur de cet écrit ne diffère pas du personnage de même nom, également « fils de Néri, fils de Maasias », qui fut le secrétaire et l’ami fidèle de Jérémie (cf. Jer. 32, 12, 16; 36, 4 et ss.; 45, 1 et ss.). Telle a toujours été l’opinion traditionnelle, que confirme la place attribuée au livre de Baruch dans les anciennes versions : on a tout naturellement rapproché ses oracles de ceux de son maître. La famille de Baruch était très distinguée (cf. Jer. 51, 59; Josèphe, Ant., 10, 9, 1). Ce que nous savons de sa vie est raconté aux passages du livre de Jérémie qui viennent d’être cités en note. Il accompagne son maître en Égypte, lorsque celui-ci fut contraint d’y suivre ceux de leurs compatriotes qui s’y exilèrent volontairement après l'assassinat de Godolias, et il partagea son impopularité (cf. Jer. 43, 1-7). 1, 2, nous apprenons qu’il composa son livre à Babylone, environ cinq ans après la ruine de Jérusalem. C'est encore à Babylone qu’il serait mort sept ans plus tard, d’après les rabbins; et il est très vraisemblable, en effet, qu’il y ait rejoint ses compatriotes déportés, lorsqu’il eut recueilli le dernier soupir de Jérémie en Égypte (saint Jérôme, adv. Jovin., 2, 5, signale une autre tradition, en vertu de laquelle Baruch serait mort en Égypte. En tout cas, rien ne s'oppose à ce que le prophète ait fait en Chaldée un voyage durant lequel il aurait mis ses oracles par écrit).

Le sujet et la division du livre. — Tel qu’il a été inséré dans notre Bible latine, le livre qui porte le nom de Baruch se compose de deux écrits très distincts : 1° les pages qui appartiennent en propre à Baruch lui-même (chap. 1-5) ; 2° une lettre que Jérémie adressa, aussitôt après la destruction de Jérusalem, à ses coreligionnaires qui allaient prendre le chemin de l’exil (chap. 6).

L’œuvre personnelle de Baruch se compose de deux parties ou sections : la première contient une exhortation à la pénitence, que Baruch adressa aux Juifs demeurés à Jérusalem après la ruine du pays (1, l-3, 8); la seconde (3, 9- 5, 9) renferme un discours prophétique très consolant, qui promet aux débris du peuple théocratique, dans l'hypothèse d'une conversion sincère, la fin de la captivité et le rétablissement de la nation sur de nouvelles bases. Le but de la première section est de porter le peuple à s’humilier sous la main de Jéhovah et à implorer sa délivrance; le but de la seconde est de l'encourager parmi ses souffrances, en lui montrant les radieuses perspectives de l’avenir.

La lettre de Jérémie décrit longuement, sous tous les aspects, le néant complet des idoles et le caractère insensé de l’idolâtrie (pour une analyse plus détaillée, voyez le commentaire, et notre Biblia sacra, p. 916-923).

L'authenticité et la canonicité soit de l’œuvre de Baruch, soit de la lettre de Jérémie, sont universellement niées aujourd’hui par les Juifs, les protestants et les rationalistes, qui rangent ce double écrit parmi les livres apocryphes. Les catholiques les admettent, au contraire, unanimement, et ils ont pour le démontrer d’excellentes preuves extrinsèques et intrinsèques (l'authenticité et la canonicité sont d'ordinaire deux questions très distinctes; nous les réunissons ici parce que, de fait, elles n'ont guère été séparées par nos adversaires).

1. En ce qui concerne l'écrit propre à Baruch, il est certain que les anciens Juifs l'admettaient comme authentique et comme canonique. Les Septante, en le traduisant et en l’insérant dans la Bible immédiatement après le livre de Jérémie (avant les Thrènes), ont montré qu’ils voyaient en lui une partie intégrante des saintes Écritures. Théodotion, cet autre traducteur juif, en donna aussi une version grecque. Au 3ème siècle de l’ère chrétienne, on le lisait encore dans les synagogues juives, au jour de l’Expiation ou du Grand Pardon (cf. Constit. Apost., 5, 20). Saint Épiphane (Haer., 8, 6) le mentionne expressément au nombre des écrits canoniques reçus par les Juifs après la captivité de Babylone (le onzième des Psaumes dits de Salomon, qui sont l'œuvre d'un Juif, et qui datent, d'après les meilleurs critiques, du 1er siècle avant J.-C., cite des paroles de Baruch). Quant à l’Église chrétienne, elle l’a admis parmi les saints Livres dès les temps les plus reculés. Le pape saint Clément (Paedag., 2, 3, 36) cite Bar. 3, 16-19, comme « une écriture divine »; Athénagore (Legat., 9) dit, à propos de Bar. 3, 35, que c’est la parole d’un « prophète ». Et il en est de même de saint Irénée, de saint Cyprien, d’Origène, etc. (voyez Cornely, Introd., t. 2, p. 11, p. 426-427). Les anciens docteurs aiment surtout à citer, pour l’appliquer à l'incarnation du Verbe, le texte célèbre, Bar. 3, 37. Si parfois leurs citations sont faites sous le nom de Jérémie, c’est, comme le dit saint Augustin (De civit. Dei., 18, 33), à cause de l’union intime qui existait entre les deux livres; mais ils savaient très bien distinguer, à l’occasion, entre les deux écrivains.

Nous l’avons vu plus haut, dès sa première ligne (1, 1) l’écrit se donne comme l'œuvre de Baruch, or tout, dans le fond et dans la forme, vient confirmer cette assertion. Les évènements historiques qu’il signale directement, ou auxquels il fait allusion, cadrent fort bien avec l’époque de Baruch (cf. 1, 2; 2, 3; 4, 15, etc. Le commentaire réfutera quelques objections de nos adversaires, basées sur de fausses suppositions). Dans un livre composé par l’ami et le secrétaire de Jérémie, on doit s’attendre à retrouver les pensées dominantes et le genre du maître, et c’est ce qui a lieu réellement : mêmes reproches aux Juifs coupables, mêmes menaces, même espoir de pardon. A la façon de Jérémie, Baruch entremêle volontiers à ses propres idées celles des écrivains sacrés qui l'avaient précédé, et il cite tour à tour le Deutéronome, Job, Isaïe, etc. (voyez le commentaire).

2. On prouve de la même manière l'authenticité et la canonicité de la lettre de Jérémie. La synagogue l’a autrefois reçue comme faisant partie des écrits inspirés, et l’a transmise à l’Église; le style (notamment, le manque de concision et les répétitions) et les idées, rappellent constamment Jérémie; les intéressants détails que donne l’auteur au sujet de l’idolâtrie des Chaldéens concordent merveilleusement avec tout ce que nous en savons par ailleurs.

La langue primitive fut certainement l’hébreu; mais le texte original s’est perdu de bonne heure (il avait déjà disparu au temps de saint Épiphane et de saint Jérôme. Un exégète allemand, M.Kneucker, a essayé avec assez d'habileté de le reconstituer (Das Buch Baruch, Leipzig, 1879), et le livre ne nous est parvenu que par la version grecque des Septante; version toute hérissée d'hébraïsmes (voyez la liste des principaux dans Knabenbauer, Comment. In Danielem... et Baruch, p. 438), qui atteste à tout moment, surtout dans les trois premiers chapitres, très servilement traduits, l’origine première du double écrit.

Saint Jérôme nous apprend lui-même qu’il n’a pas touché au livre de Baruch, qui, tel que nous le possédons dans la Vulgate, est un reste de l’ancienne Itala : ainsi s’expliquent les expressions empruntées au latin populaire, les provincialismes, les constructions plus grecques que latines qu’on y rencontre très souvent. Par exemple: subjectibiles, 1, 18; eramus incredibiles, 1, 19; a foris, 2, 22; sine vestigio ab inhabitantibus, 2, 23; minorare, 2, 34; superducere, 4, 10; gaudimonium, 4, 34, etc. ; la préposition in construite avec l'ablatif, là où il faudrait régulièrement l'accusatif (cf. 2, 4, 12, 27; 3, 7, 8, 32, etc.); l’article grec traduit par les pronoms ille (cf. 2, 27; 3, 26, etc. ), ipse (cf. 3, 4.) (il existe une autre recension du livre de Baruch d'après l'Itala (voyez Sabatier, Bibliorum sacrorum latinae versiones antiquae, t. 2, p. 734 et ss.); le latin en est plus correct, mais elle est moins littérale. On la nomme Itala B)

Commentateurs catholiques. - Les meilleurs sont, parmi les anciens, Théodoret de Cyr, Sanchez, Maldonat, Corneille de la Pierre, Calmet ; parmi les contemporains, Reusch (Erklœrung des Buches Baruch, Fribourg-en-Brisgau, 1853) et Knabenbauer (Commentarius in Danielem prophetam, Lamentationes et Bœruch, Paris, 1891).