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BIBLE FILLION

La Sainte Bible Commentée d'après la Vulgate et les textes originaux

LIVRE D'HABACUC

LA PHOPHÉTIE D’HABACUC


INTRODUCTION


La personne et l'époque du prophète. - Son nom, Habaqquq, dérivé de la racine hâbaq, embrasser, signifie « embrassement», ou, selon d’autres, « celui qui embrasse «  (la forme 'Αμβαχούμ, que lui donnent les Septante, est inexacte. Saint Jérôme et Abarbanel le traduisent par « lutteur » ; mais cette interprétation n'est pas confirmée par l'usage). Cette dénomination semble avoir été rare chez les Hébreux, puisqu’on ne la trouve qu’ici et Dan. 14, 32 et ss.

Nous manquons presque absolument de détails authentiques sur l’origine et la vie du prophète Habacuc (ceux qu'on lit dans quelques anciens auteurs juifs et chrétiens sur sa biographie, sa mort, son tombeau, etc., sont à peu près de nulle valeur). Le titre de son livre nous fait simplement connaître son rôle de nâbi, « propheta » (cf. 1,1). Peut-être les deux dernières lignes de son beau cantique, telles qu’on les lit dans le texte hébreu (3, 19; voyez le commentaire), nous donnent-elles le droit de conclure qu’il était prêtre, ou tout au moins lévite, puisqu’elles paraissent supposer qu’il s’occupait de chants sacrés et de la musique du temple. Il n’est guère vraisemblable qu’il faille le confondre avec son homonyme mentionné par Daniel, car ce dernier appartient à une époque plus récente.

Un point seulement est certain relativement à la chronologie de la vie d’Habacuc: c’est qu’il composa son écrit prophétique avant l’invasion de la Judée par les Chaldéens (605 avant J.-C.). En effet, nous dirons bientôt que cette invasion forme précisément le thème principal de son oracle. Ajoutons que son ministère ne doit pas remonter beaucoup au delà de cette date, puisqu’il nous annonce clairement que le malheur en question aura lieu du vivant de la génération à laquelle il s’adresse (1, 5: « in diebus vestris »). D’après quelques interprètes, il aurait prophétisé sous le roi Manassès (698-643 avant J.-C.); selon d’autres, sous Josias (641-610), ou seulement sous Joakim (610-599). Il est difficile de déterminer ce point avec certitude, faute de données suffisantes (fait important à remarquer : si Habacuc a de sérieux reproches à adresser à ses compatriotes (cf. 1, 3-4), ces reproches ne supposent point une situation morale extraordinairement mauvaise et ne signalent pas l'idolâtrie; d'où l'on peut conclure qu'il a écrit son livre soit après la réforme religieuse du roi Manassès (vers la fin de son règne), soit après celle de Josias (vers 630)).

Le sujet et la division du livre. - De même que celui de Nahum, l’oracle d’Habacuc se donne, dès sa première ligne, comme étant gros de menaces. Il annonce en effet, sous une forme très dramatique, l'invasion du royaume de Juda par les Chaldéens, peuple puissant, cruel, irrésistible; puis la ruine future de ces ennemis du peuple de Dieu.

Il se divise en deux parties très distinctes, écrites, l’une en prose, l’autre en vers. La première, qui correspond aux deux premiers chapitres (1, 2-2, 20), prédit, dans un touchant dialogue qui a lieu entre le Seigneur et le prophète, d’abord le châtiment que Dieu infligera par l'intermédiaire des Chaldéens à son peuple dégénéré (c'est le premier paragraphe de cette partie (1, 2-17)); puis la punition des Chaldéens eux-mêmes, devenus comme idolâtres de leur propre puissance (c'est le second paragraphe (2, 1-20)). La seconde partie (3, 1-19) consiste en un psaume lyrique d’une grande beauté, dans lequel Habacuc, après avoir prédit l’arrivée terrible de Jéhovah, qui s’élance de sa demeure du ciel pour anéantir les pécheurs et pour sauver les justes (3, 1-15), expose les sentiments produits dans l’âme des bons par l’exécution des célestes décrets (3, 16-19. Pour une analyse plus complète, voyez le commentaire, et notre Biblia sacra, p. 1024-1026).

Il règne une parfaite unité dans cette composition, et l'on n’a aucun motif d’affirmer, comme le font quelques critiques contemporains, qu’il dut s’écouler un certain intervalle entre la composition de la première partie et celle de la seconde, ou même, d’après d’autres auteurs, que le 3ème chapitre n’est pas l’œuvre du prophète Habacuc (on a aussi attaqué de nos jours l'authenticité de 2, 9-20). « La connexion intime des pensées, les rapports mutuels et perpétuels qui existent entre les divers groupes de versets, l’identité du style, ne laissent en réalité aucune place pour un doute raisonnable » (un interprète protestant).

Comme écrivain, Habacuc est classique à la façon de Joël, de Michée et de Nahum. Son livre est vraiment un chef-d’œuvre de bon goût; il sait allier l’abondance et la vigueur à une haute sublimité du fond et de la forme. Il peint et expose d’une manière incomparable. Il emploie un certain nombre d’expressions ou de formules rares, distinguées, qui lui appartiennent en propre, et qui produisent un effet saisissant. L’hymne de la fin est, dans la littérature sacrée, l’un des morceaux les plus admirés « pour la hardiesse de la conception, la sublimité de la pensée et la majesté de la diction ». (F. Vigouroux.)

Sous le rapport de la doctrine, « Habacuc est le prophète de la foi. Désolé à la vue des souffrances que son peuple aurait bientôt à endurer de la part d’ennemis cruels, sensuels, idolâtres, il demeure fermement convaincu que la foi triomphera finalement et qu’elle produira la délivrance (comparez sa célèbre parole, 2, 4b : « Justus … in fide sua vivet »). ll nous peint deux royaumes en conflit: le royaume de ce monde, gouverné par le roi de Chaldée, et le royaume de Dieu, gouverné par l’oint du Seigneur (cf... 3, 13). Jéhovah aidera son oint à remporter la victoire; d’où il suit que le royaume de Dieu ne périra pas. On voit par là que, si le début du livre est menaçant pour les Juifs, la suite est très consolante à leur endroit, puisqu’elle annonce la ruine de ceux qui voulaient les détruire (pour les commentaires catholiques de la prophétie d'Habacuc, voyez la p. 339. Nous n'avons à ajouter à cette liste, comme ouvrage spécial, que Der Prophet Habakuk; Einleitung, Grundtext und Uebersetzung nebst einem philolog. - kritischen une historischen Kommentar, par L. Reinke, Brixen, 1870).