Bible Fillion
LA PROPHETIE D’ISAÏE
1° Le nom et l'histoire du prophète. - Le nom hébreu d’Isaïe est Yeša'yâhu, par abréviation Yeša'yâh. Les Septante l’ont rendu par Ήσαίας, l’Itala par Hesaias ou Esaias, la Vulgate par Isaias. Il signifie : « Jéhovah sauve (de la racine Yâhu, forme abrégée de Yehôvah, et yâša, il a sauvé. Selon d'autres, la racine serait le substantif yeša, salut, et le sens « salut de Jéhovah »). » Dénomination vraiment providentielle, puisque Isaïe fut plus que tout autre prophète le héros du salut opéré par le Seigneur. On dirait qu’il l'a senti lui-même, tant il emploie fréquemment les mots yeša et yešû‘ah, « salut. »
Nous ne connaissons presque rien de sa vie. Il nous apprend lui-même brièvement, 1, 1, que son père se nommait Amos (en hébreu ’Amôş , avec un tsadé final, tandis que le nom du prophète Amos se termine par un samech :’Amôs ). D’après une antique tradition des rabbins, ce dernier aurait été le frère du roi Amasias, père et prédécesseur d’Ozias, de sorte qu’Isaïe aurait appartenu de très près à la race royale. Cette tradition est pleine de sens, quoiqu’elle soit probablement fausse. La nature et l’aspect d’Isaïe produisent une impression tout à fait royale. Il parle avec les rois comme un roi; il se présente avec majesté devant les princes de son peuple et les puissants du monde. Dans son livre, il est parmi les prophètes ce que Salomon est entre les rois. Dans toutes les situations, il est maître de ses matières, maître des expressions, grandiose avec simplicité, sublime sans affectation. » Mais ce caractère royal avait sa source ailleurs que dans le sang.
Ses écrits nous le montrent résidant à Jérusalem (cf. 7, 1 et ss.; 22, 15 et ss.; 37-39), marié et père de deux enfants (7, 3, et 8, 3). Il nous dit aussi lui-même, dès le début de sa prophétie, 1, 1 , qu’il exerça son ministère sous les règnes d’Ozias (809-758 avant J .-C.), de Joatham (758-741), d’Achaz (741-729) et d’Ézéchias (729-698); mais il ajoute plus loin (6, 1) qu’il ne reçut sa mission prophétique que l’année de la mort d’Ozias. On admet assez généralement qu’elle se prolongea au moins jusqu’à la fin du règne d’Ezéchias, c.-à-d. pendant environ soixante ans. On conçoit aisément, d’après ce fait, qu’Isaïe ait joui d’une grande considération et d’une grande influence soit auprès des rois de Juda, auxquels il parlait comme un égal et souvent comme un maître, soit auprès de ses concitoyens, dont il relevait et anathématisait les crimes avec une sainte liberté (cf 7, 1 et ss. ; 36-39; 4 Reg. 18, 13-20; 2 Par. 32). Suivant 2 Par. 26 , 22, il composa, indépendamment du livre de ses prophéties, un récit complet du règne d’Ozias, ouvrage malheureusement perdu.
Une ancienne tradition juive, mentionnée et admise comme authentique par plusieurs des premiers Pères de l’Église (Entre autres saint Justin M., Contra Tryph., 120; Origène, ad Afric., 9; saint Athanase, Or. De Incarn. Verbi, 37; Tertullien, de Just., 14; Lactance, Instit. Div., 4, 2 etc. Saint Jérôme, in Is. 57, 1, la regarde comme « certissima »), lui attribue la mort cruelle mais glorieuse d’un martyr: l’impie Manassès l’aurait fait scier par 1e milieu du corps avec une scie de bois. Et c’est à cette circonstance, croit-on, que saint Paul fait allusion dans l’épître aux Hébreux, 11, 37, par le trait « secti sunt », lorsqu’il énumère les souffrances endurées par les héros de l’Ancien Testament.
L’époque pendant laquelle Isaïe joua son noble rôle fut généralement mauvaise et très troublée. Sous Ozias et Joatham, autant la situation extérieure était prospère, autant la misère morale était grande (cf. Is. 3-5, etc). Cette misère s’accrut encore sous le règne d’Achaz, 1'un des monarques les plus antithéocratiques de Juda : l’idolâtrie fît alors d’effrayants ravages parmi le peuple, et la corruption devint de plus en plus profonde. Le pays fut alors envahi et ravagé par les rois de Syrie et d'Israël, ligues contre Achaz, et ce prince acheta à des conditions ruineuses l’alliance du monarque assyrien Téglath-Phalasar. L’Assyrie commençait à disputer à l'Égypte l’hégémonie dans l’Asie occidentale, et au temps d’Isaïe, la Palestine, située entre les deux peuples belligérants, eut énormément à souffrir du passage de leurs troupes. Il est vrai que, durant le règne du saint roi Ézéchias, la condition morale du peuple fut améliorée par d’excellentes réformes; mais des tendances profanes, qui obtinrent par moments la prépondérance à la cour, opérèrent un rapprochement entre le royaume théocratique et l'Égypte, et Isaïe dut fulminer contre elles; d’ailleurs c’est à cette époque qu’eut lieu l'invasion terrible de Sennachérib dans les provinces juives, et que Jérusalem même faillit succomber. Du moins le grand prophète fut constamment à la hauteur de sa tâche délicate, et rien n’ébranla son courage.
2° L’organisme du livre d’Israël. - Ce magnifique écrit, qui ouvre à bon droit la série des livres prophétiques, se divise en deux parties fort distinctes, dont la première correspond aux chap. 1-39, et la seconde aux chap. 40-66. Saint Thomas (In Is., 1, 2) détermine très bien le sujet : «Dans la première partie, on expose la menace de la justice divine pour détruire les pécheurs (ch. 1-39); Dans la seconde partie, la consolation de la miséricorde divine pour la résurrection des justes : consolez-vous (ch. 40-66)» En effet, c’est la menace des châtiments divins qui domine dans la première moitié, et la consolation dans la seconde.
La première partie, plus variée et plus mouvementée, se compose d'oracles qui concernent tour à tour le peuple théocratique et les nations païennes. Au fond, elle renferme trois variations sur cette même et unique pensée : « Une nuit affreuse de souffrances précède l’aurore d’un nouveau jour que l’on attend impatiemment. Pendant cette nuit, l’espoir de la lumière future soutient et console les bons; quant aux méchants, ils sont précipités dans le tombeau sans voir la splendide lumière. » Par conséquent, trois groupes de prophéties, comprenant chacun deux sections. 1° Le premier groupe, 1, 1-12 , 6, est relatif aux Juifs et leur annonce, de la part du Seigneur, des châtiments exemplaires. Section I : la masse, qui est tout à fait corrompue, périra, puisqu’elle ne veut pas abandonner ses voies criminelles (chap. 1-6). Section II: les bons auront, pour les encourager au milieu des malheurs du pays, la promesse du divin Emmanuel, dont le règne fleurira lorsque la justice céleste aura été satisfaite (chap. 7-12). 2° Le second groupe, 13, 1-27, 13 , contient des prédictions contre les peuples païens. Section 1 : ils seront enveloppés, eux aussi, dans les châtiments d’en haut, car le monde entier devant participer à la rédemption d’Emmanuel, il faut que ses éléments mauvais disparaissent, en vue de l’avènement du règne messianique (chap. 13-23). Section 2 : sublime description, qui embrasse ce règne de grâce dans le temps et dans l’éternité (chap. 24-27). 3° Le troisième groupe, 28, 1 -39, 8, expose dans sa première section (chap. 28-35) de nouveaux oracles contre tout ce qu’il y avait de pervers dans les deux royaumes juifs, en même temps que des promesses de salut pour les bons; dans la seconde (chap. 36-39X), un récit presque entièrement historique, qui sert de trait d’union entre les deux parties du livre.
La deuxième moitié de la prophétie développe, comme la première, dans une sorte de trilogie, cette pensée unique: Les bons seront rachetés; les méchants qui s’endurciront dans le mal périront. Nous trouvons donc, ici encore, trois groupes de prédictions, qui sont séparés non seulement par la différence des sujets traités, mais encore par le petit refrain « Il n'y a pas de paix pour les impies », placé à la fin des chap. 48 et 57. 1° Premier groupe, 40, 1-48, 22 : délivrance de 1’exil babylonien, qui avait été prédit à la fin de la première partie (cf. 39, 5-7). Second groupe, 49, 1-57, 21 : expiation des péchés des hommes par l’oblation volontaire du serviteur de Jéhovah, ou du Messie. Troisième groupe, 58, 1-66, 24 : splendeur du peuple de Dieu aux jours messianiques et dans le ciel. Chaque groupe se subdivise en neuf discours (pour l'analyse plus détaillée des livres, voyez le commentaire, et aussi notre Biblia sacra, p. 798-847).
On voit par ce sommaire qu’il existe, entre les divers membres de la prophétie d’Isaïe, une unité aussi parfaite qu’on puisse l'attendre dans un recueil de ce genre. La collection forme réellement « un tout qui est partagé avec beaucoup de sens » (quelques rationalistes se sont ridiculisés en prétendant ne découvrir que des traces de désordre dans ce livre si bien équilibré). Bien entendu, c’est au prophète lui-même qu’est dû cet arrangement. Quant au principe régulateur qui l’a guidé dans son plan, c’est en partie la chronologie et en partie l’ordre logique. On peut dire d’une manière générale que les oracles sont cités, dans l’ensemble et pour un grand nombre de détails, d’après leur suite historique et réelle. Ainsi les chapitres 1-6 racontent les débuts du ministère d’Isaïe sous les rois Ozias et Joatham; les suivants, jusqu’à la fin de la première partie, nous montrent le prophète déployant son activité sous Achaz et Ézéchias; les chapitres 40-56 sont assurément les plus récents (les dates marquées çà et là indiquent une progression réelle sous le rapport du temps. Cf. 6, 1; 7, 1; 14, 28; 20, 1; 36, 1). Néanmoins l’ordre chronologique n’est pas toujours rigoureusement suivi, et il n’est pas rare qu’il fasse place à celui des sujets. Cela a même lieu dès 1’ouverture du livre, puisque la consécration prophétique d’Isaïe n’est racontée qu’au chapitre 6. Les oracles dirigés contre les nations païennes (chap. 13 et ss.) ont été groupés d’après ce principe.
3° La question d’authenticité. — Les interprètes rationalistes ont soulevé depuis la fin du dernier siècle, d’abord timidement et avec une modération relative, puis avec une hardiesse toujours croissante, un débat très vif au sujet de l’authenticité du livre d’Isaïe (pour l'histoire des objections et pour leur réfutation assez détaillée, voyez Cornely, Introductio..., t.2, pars 2, p. 339 et ss.; le Manuel biblique, t.2, nn. 913 et 914). Ils admettent pour la plupart que le prophète a réellement composé les chapitres 1-12, 15-20X, 22-23, 28-33; mais rejettent en bloc toute la seconde partie, et les autres passages (13-14, 21, 1-10; 24-27, 34-35, 36-39) morceau par morceau. Les chapitres 40 66 proviendraient d’un auteur postérieur à1’exil, que l’on nomme Pseudo-Isaïe, Deutéro-Isaïe, Isaïe II ou le « Grand Inconnu (on a même récemment inventé un Isaïe III, et trois autres rédacteurs successifs) ». Bref, les passages apocryphes formeraient la plus grande partie du livre. Ces « critiques », comme ils s’intitulent eux-mêmes, ne sont nullement embarrassés pour indiquer, parfois ligne par ligne, les différentes phases de la prétendue interpolation et de la rédaction définitive du livre.
Par quels arguments essayent-ils de justifier leurs assertions étranges? En réalité, « la règle... qui les a guidés... est celle-ci: toutes les prophéties qui racontent des événements précis ont été écrites après coup, ce sont des vaticinia post eventum. Puisque les faits auxquels elles font allusion sont postérieurs à Isaïe, il s’ensuit, d’après eux, qu’Isaïe n’a pu en parler. Ils ne nient donc l’authenticité des prophéties d’Isaïe que parce qu’ils rejettent la révélation, le surnaturel et le miracle. Ils cherchent des raisons accessoires pour essayer de justifier leurs prétendus arrêts, mais c’est à priori qu’ils se prononcent, qu’i1s en fassent ou non l’aveu (Man. Biblique, t. 2, n. 914, note. « Une prophétie où Cyrus est nommé par son nom, écrit l'un d'eux, une autre où les Mèdes et les Perses sont appelés pour la destruction de Babylone..., ne sont naturellement pas l'œuvre d'Isaïe, qui ne pouvait connaître d'avance ni l'exil du peuple juif à Babylone, ni la délivrance de cet exil par Cyrus. »). »
Parmi ces raisons accessoires, les deux principales sont tirées des différences de fond et de forme qui existeraient entre les passages incriminés et ceux dont personne n’a osé contester encore l'authenticité. Mais ces différences ou n’existent nullement et sont inventées pour le service de la cause, ou ne sont autres que celles que l’on rencontre dans tout écrivain dont les œuvres datent de diverses époques de sa vie et roulent sur des sujets multiples (par exemple, « il va de soi qu'un livre de consolation se meut dans un autre ordre d'idées qu'un livre de malédictions; et les deux parties de la prophétie d'Isaïe ont été assez bien caractérisées par ces deux noms. »). Pour ce qui concerne en particulier le style, on rencontre à travers tout le livre certaines expressions ou images assez rares, que nos adversaires prétendent n’appartenir qu’au faux Isaïe. D’ailleurs la diction est partout trop pure, trop magnifique, pour ne pas remonter à l’âge d’or de la langue hébraïque; rien n’y accuse les imperfections et la décadence du langage de l’exil.
De plus, à ces arguments subjectifs et arbitraires nous pouvons opposer la tradition unanime de la synagogue et de l'Église, le témoignage de Notre-Seigneur Jésus-Christ et des apôtres (le Nouveau Testament cite Isaïe environ cent fois, dont à peu près cinquante en propres termes, et quarante d'une manière plus libre. Son nom est allégué quarante fois, dont huit à propos de passages contestés par les rationalistes. « Allegationes... ex omnibus libri partibus eadem ratione ita sunt desumptae, ut integer liber testimoniis Novi Testamenti probari merito dicatur. » Cornely, l. c., p. 339), celui du fils de Sirach dans l’Ecclésiastique (Eccli. 45, 25 et ss. « Isaias... spiritu magno vidit ultima (τά έσχατα, dit plus clairement le grec, à la fin des temps), et consolatus est lugentes in Israel, usque in sempiternum... » Ces traits se rapportent surtout aux chap. 40-66; leur authenticité était donc universellement admise chez les Juifs lorsque fut composé le livre de l'Ecclésiastique) celui de plusieurs prophètes plus récents qu’Isaïe qui citent ses oracles (Comp. Jer. 10, 1-6 et Is. 40, 19-20; 41, 7; 46, 7; Jer. 25, 15 et ss. , et Is. 51, 17; Jer. 31, 35 et Is. 51, 15; Nah. 1, 15 et Is. 52, 7; Nah. 2, 1 et Is. 52, 1; Nah. 3, 7 et Is. 51, 19; Soph. 3, 10 et Is. 18, 1; 40, 20; Soph. 2, 14-15 et Is. 34, 13-15; 47, 8, 10; Zach. 7, 4-7 et Is. 58, 5, etc.); ; or ces divers témoignages ne portent pas moins sur la seconde partie du livre que sur la première, sur les pages attaquées que sur les autres. Ajoutons qu’en général comme pour les détails, « l’histoire contemporaine se reflète trop bien dans le livre (entier) d’Isaïe, pour qu’un écrivain plus récent ait pu le composer ».
4° Le caractère du livre d'Isaïe. — Sur ce point tout le monde est d’accord, et les exégètes incrédules aussi bien que les commentateurs catholiques s’accordent à combler d’éloges le livre qui porte le nom d’Isaïe. Les Pères accumulent, pour le vanter, le plus belles épithètes: « Isaïe, le plus grand des prophètes » (Eusèbe, Dem. Evang., 5, 4), « l'admirable prophète » (ibid., 2, 4), « le prophète divin, tout à fait divin » (Theodoret, In Is. Proaem), « le plus éloquent des prophètes » (S. Grégoire de Nazianze, Or. 4, 2. Cf. Josèphe, Ant., 10, 3, 2) etc.
Ce qui le caractérise avant tout sous le rapport des pensées, c’est la richesse. Richesse au point de vue du temps : le passé, le présent, l‘avenir, sont décrits tour à tour avec une netteté admirable. Richesse au point de vue des contrées ; Isaïe ne s’occupe pas seulement d’Israël et de la théocratie, mais de tous les peuples circonvoisins, de l'Égypte, de l’Assyrie, de la Chaldée, de l’Europe. Richesse au point de vue des sujets; son livre est une véritable encyclopédie où tout est mentionné en son lieu : la religion et la politique, la paix et la guerre, les joies et les tristesses, les animaux et les plantes, les vêtements et les parures. Richesse surtout au point de vue de l’idée messianique, qui reçoit dans le livre d’Isaïe un développement admirable : aucun autre prophète n’a décrit d’une manière plus complète et plus sublime la personne et l’œuvre du Messie; ses oracles relatifs à Notre-Seigneur Jésus-Christ forment véritablement un fil d’or qui relie tout le reste et qu’on voit étinceler partout (Cf. 1, 25-27; 2, 2-4; 4, 2-6; 6, 1 et ss.; 7, 14; 8, 14-15, 23; 9, 5-6; 11, 1-2; 12, 3; 16, 1, 5; 22, 22; 28, 16; 29, 18-19, etc.). Aussi les Pères aimaient-ils à l’appeler « l'évangéliste de l’Ancien Testament ». « Non tam propheta dicendus est quam evangelista; ita enim universa Christi Ecclesiæque mysteria ad liquidum prosecutus est, ut non putes eum de futuris vaticinari, sed de præteritis historiam texere » (S. Jérôme, Præf. Ad Paulam et Eustoch. Cf. Prol. In Is. ) ... « Isaias, inter illa, quæ... prædixit, etiam de Christo et Ecclesia multo plura quam ceteri prophetavit; ita ut a quibusdam evangelista quam propheta potius diceretur. » (S. Augustin, de Civit. Dei, 18, 29, 1. Cf. S. Cyrille d'Alex., In Is Proœm)
La beauté de son style correspond parfaitement à celle des pensées. Il est limpide, noble, énergique, riche en images, souvent sublime et hautement poétique. La variété de son coloris est étonnante. Tel prophète sera surtout lyrique; tel autre, surtout élégiaque ou surtout orateur : Isaïe est successivement tout cela, selon que le demandent les idées qu’il veut exprimer. Il a à sa disposition toutes les splendeurs et toutes les forces du langage prophétique : c’est ainsi qu’il est concis et grave quand il menace, doux et brillant lorsqu’il annonce le salut messianique. Il met en œuvre toutes les ressources que lui offrait sa langue, même l’antithèse piquante, les jeux de mots spirituels, les allitérations et les paronomases frappantes. En un mot, son style est celui d’un tel maître consommé dans l’art d’écrire, et sous sa plume 1’hébreu devient un instrument de musique qu’il manie comme un artiste du premier ordre (voyez le Man. Biblique, t. 2, nn. 910 et 911).
5° Commentateurs catholiques. —- Les principaux sont, à l’époque des Pères, Eusèbe de Césarée, saint Basile (mais seulement sur les seize premiers chapitres), saint Cyrille d’Alexandrie, Théodoret de Cyr, saint Jérôme surtout au moyen âge et dans les temps modernes, saint Thomas d’Aquin (In Esaiam prophetam expositio); Foreiro (mort en 1581; Commentarium in Isaiam), Sanchez (Lyon, 1615), Maldonat (1656), Cornelius a Lapide (son commentaire d'Isaïe est un des meilleurs qu'il ait composés), Malvenda et Calmet; de nos jours, P. Schegg (der Prophet Isaias übersetzt und erklært, Munich, 1850), A. Rohling (der Prophet Jesaja übersetzt und erklært, Munster, 1872), B. Neteler (das Buch Isaias aus dem Urtext übersetzt und mit Berücksichtigung seiner Gliederung... erklært, Munster, 1876), Le Hir (Les trois grands Prophètes Isaïe, Jérémie, Ézéchiel; analyses et commentaires, Paris, 1877), Knabenbauer (Erklærung des Propheten Isaias, Fribourg-en-Brisgau, 1881, et Commentarius in Isaiam prophetam, Paris, 1887 (deux ouvrages vraiment remarquables et très complets).