Bible Fillion

LE LIVRE DE SOPHONIE


INTRODUCTION

(pour les commentaires catholiques, voyez la liste de la p. 339, à laquelle nous n'avons à ajouter que L.Reinke, Der Prophet Zaphanja, Einleitung und Uebersetzung nebst einem vollstaendigen... Kommentare, Münster, 1868.)


La personne et l'époque du prophète. — Le nom de Şefanyâh était assez commun chez les Juifs (cf. 1 Par. 6, 36; Jer. 21, 1; Zach. 6, 10, 14, etc.). Il signifie : (Celui que) Jéhovah cache, c’est à dire, protège. Les Septante lui ont donné en grec la forme de Σοφονίας, que le traducteur latin a imitée.

Les prophètes qui nous ont laissé des écrits ne mentionnent habituellement que le nom de leur père (cf. Is. 1, 1; Jer. 1, 1; Ez. 1, 3, etc. Il en est qui ne le mentionnent pas du tout). Trois d'entre eux seulement, Baruch (cf. Bar. 1, 1), Zacharie (cf. Zach. 1, 1) et Sophonie (cf. Soph. 1, 1), fournissent des détails généalogiques plus complets; Sophonie remonte même jusqu’à la quatrième génération, jusqu’à son trisaïeul Ézéchias (l'orthographe Ezecias, au lieu de Ezechias, est propre à la Vulgate. L'hébreu emploie la forme accoutumée : Hizqîah). Ce fait exceptionnel rend vraisemblable l’opinion d’un assez grand nombre d’auteurs, d’après lesquels cet Ézéchias ne serait autre que le saint roi qui gouvernait Juda au temps d’Isaïe. Il est vrai que les livres historiques de la Bible ne signalent nommément qu’un seul fils du roi Ézéchias, l’indigne Manassès (cf. 4 Reg. 21, 1); mais ils donnent à supposer qu’il en eut d’autres (cf. 4 Reg. 20, 18).

Nous ne connaissons absolument rien de la vie de Sophonie, à part ce trait et celui de sa mission prophétique. Il semble avoir habité Jérusalem. Quant à l’époque où il exerça son ministère, il nous l’indique lui-même très clairement. Il vivait « aux jours de Josias, fils d’Amon, roi de Juda », par conséquent de 641 à 610 avant J.-C. Les détails contenus dans son livre cadrent fort bien avec cette date. Ils permettent même de la rendre plus précise, et de placer son activité prophétique entre la douzième et la dix-huitième année du règne de cet illustre prince, c’est-à-dire, avant qu’il eût achevé sa réforme religieuse, qui mit fin momentanément à l’idolâtrie (cf. 2 Par. 34, 3-35, 19). En effet, d’après Soph. 1, 4-6, 8-9, le culte des faux dieux n’avait pas été tout à fait extirpé du royaume. En outre, d’après Soph. 2, 13, Ninive existait encore, et nous savons qu’elle fut détruite postérieurement au règne de Josias (vers l'an 608).

Le sujet et la division du livre. — Le petit livre de Sophonie, sur l’authenticité duquel on n’a jamais émis de doute sérieux (c'est à peine si quelques rationalistes contemporains, de ceux qui ne peuvent laisser passer un seul écrit biblique sans essayer de le déprécier en quelque manière, ont attaqué çà et là l'intégrité du livre), est remarquable par son unité et par son caractère général. On voit qu’il a été composé d’un seul jet, et l’on a pu dire de lui en toute vérité : « Si quelqu’un désire avoir un abrégé très succinct de tous les oracles des prophètes, qu’il lise ces pages rapides. » Bien qu'il s'adresse directement à Jérusalem et à Juda (cf. 1, 4; 3, 1), et qu’il parle surtout des destinées de son peuple, il vise très évidemment la terre entière. Son thème est double : la menace et la promesse, avec un grave avertissement entre les deux.

Le livre se divise donc en trois sections. Dans la première, 1, 2-18, Sophonie parle au nom du Seigneur contre tous les hommes sans exception, les menaçant d’un jugement terrible. C'est vraiment le « Dies irae » de l’Ancien Testament que nous entendons retentir dans ce passage (cf. vers. 14 et ss.). Dans la seconde section (2, 1-3, 8), il passe de la menace à l’exhortation pressante, motivant cette exhortation par l'annonce réitérée des vengeances de Jéhovah, soit contre les peuples païens qui avaient maltraité les Juifs, soit contre ces derniers eux-mêmes. Enfin, dans la troisième section (3, 9-20), il proclame avec joie le salut futur: les Gentils se soumettent au Seigneur et l’adorent, Juda se convertit et sert fidèlement son Dieu; pour tous les hommes s’ouvre ainsi une ère de paix et de bonheur parfait, l'âge d’or messianique (pour une analyse plus complète, voyez le commentaire et notre Biblia sacra, p. 1027-1029).

Cette division est nettement marquée, non seulement par le sujet traité, mais aussi par une sorte de refrain, qui termine la première et la seconde section (cf. 1, 18 et 3, 8).

3° Sous le rapport du style, Sophonie n’a rien de remarquable. On ne trouve en lui ni la grâce, ni la beauté, ni la vie de la plupart des prophètes qui l’avaient précédé. Son langage est simple et peu orné, quoique correct; il ne manque cependant pas de fraîcheur, non plus que de vigueur (cf. 1, 12; 2, 1-2, 11, 13-15; 3, 14-17). Il est plus pathétique que poétique. Sophonie fait des emprunts assez fréquents au Deutéronome (comp. 1, 13, et Deut. 28, 38; 2, 7, et Deut. 30, 3; 3, 5; et Deut. 32, 1; 3, 17, et Deut. 28, 63) et aux écrits prophétiques (comp. Soph. 1, 7, avec Hab. 2, 20, Joel 1, 15, et Is. 13, 3: Soph. 1, 13, avec Am. 5, 11; Soph. 1, 14-15, avec Joel, 2, 12; Soph. 1, 16, avec Am. 2, 2; Soph. 1, 18, avec Is. 10, 23 et 28, 22; Soph. 2, 8, 10, avec Is. 15, 8 et Am. 1, 13; etc.)