JesusMarie.comBible Vigouroux

Bible Catholique Vigouroux

Introduction au livre de L’ECCLESIASTE





L’Ecclésiaste occupe le second rang dans nos Bibles parmi les livres sapientiaux.

Le titre qu’il porte est tiré du nom qu’y prend l’auteur, Kohéleth, traduit en grec par Ecclesiastês. La version latine a conservé le nom grec ; il signifie « celui qui parle à l’assemblée. » Il faut donc rejeter le sens de collectionneur qu’on a voulu donner aussi au mot Kohéleth : l’Ecclésiaste n’est pas un recueil, une collection de sentences comme les Proverbes, mais forme un tout suivi.

Le nom hébreu de Kohéleth est un titre de dignité, appliqué à la personne qui en est revêtue. Il est employé ici symboliquement (comme Isaïe, 29, 1-2 ; Jérémie, 25, 26) pour exprimer la fonction que remplit Salomon dans ce livre en instruisant l’assemblée. Il en est qui pensent cependant que Salomon a pu réunir le peuple, à la fin de sa vie, comme il l’avait fait lors de la Dédicace du temple, voir 3 Rois, 8, 55-61, et lui adresser le discours contenu dans ce livre.

Le nom de Salomon ne se lit pas en toutes lettres dans ce livre ; mais celui qui prend le nom symbolique d’Ecclésiaste se dit fils de David et déclare qu’il est roi de Jérusalem, ce qui ne peut convenir qu’à Salomon. Tous les commentateurs juifs et chrétiens ont été unanimes à attribuer à ce prince la composition de l’Ecclésiaste, jusqu’au XVIIe siècle, où Grotius, le premier, en 1 644, a prétendu qu’il n’était pas de lui (Depuis le commencement de ce siècle, la plupart des auteurs protestants et même quelques catholiques comme Jahn, Herbst, Movers, ont adopté l’opinion de Grotius. Ils font le livre moins ancien que Salomon, mais sont très divisés sur sa date.). Aucune raison concluante n’oblige d’abandonner la croyance traditionnelle, et de refuser à Salomon la composition de l’Ecclésiaste. L’origine salomonienne de ce livre n’est pas de foi, mais elle a en sa faveur le seul argument véritablement décisif en pareille matière : l’autorité du témoignage, 1° du titre du livre, voir Ecclésiaste, 1, 1 ; 2° de toute la tradition juive et chrétienne qui est unanime, comme tout le monde le reconnaît. Les objections qu’on a faites contre la croyance traditionnelle sont loin d’être irréfutables.

On croit généralement, avec la tradition juive, que Salomon composa l’Ecclésiaste dans sa vieillesse, comme il avait écrit le Cantique des cantiques dans sa jeunesse et les Proverbes dans l’âge mûr. Cette tradition est confirmée par plusieurs passages du livre qui constatent que l’auteur avait fait de l’expérience personnelle des choses dont il parle. D’après le Talmud, le texte de l’Ecclésiaste fut définitivement fixé du temps d’Ezéchias par les savants dont parlent les Proverbes, 25, 1.

La canonicité et par conséquent l’inspiration de l’Ecclésiaste est de foi. Théodore de Mopsueste, qui en contestait l’inspiration, fut condamné à ce sujet par le Ve concile œcuménique. Les Juifs l’avaient placé dans leur canon. On parle de discussions qui auraient au lieu à ce sujet dans la synagogue, entre l’école de Hillel et l’école de Schammaï. Celle-ci, qui avait des tendances hétérodoxes, l’attaquait surtout à cause de son obscurité. Le synode de Jabné (Jamnia) se prononça en 90 contre l’école de Schammaï. Mais il était déjà à cette époque dans le canon reçu par les Juifs. On le lit encore officiellement tous les ans dans les synagogues israélites. Il a toujours fait partie du canon de toutes les Eglises chrétiennes.

Quant à la forme littéraire de l’Ecclésiaste, elle est poétique, au moins en partie, et on le range généralement parmi les poèmes didactiques. Cependant la plupart des passages sont écrits en prose, et l’on n’y remarque point la symétrie du parallélisme hébreu. Dans quelques endroits, la forme poétique est très sensible. Le parallélisme est très bien réussi, voir Ecclésiaste, 5, 5 ; 8, 8 ; 9, 11. Nous lisons, voir Ecclésiaste, 7, vv. 7, 9 ; 9, 8, des maximes qui ressemblent, pour la forme comme pour le fond, à celles des Proverbes. Quand Salomon parle de son expérience personnelle et communique à l’assemblée à laquelle il s’adresse ses propres réflexions, il s’exprime en prose, mais en une prose oratoire, jusqu’à un certain point mesurée et cadencée ; quand il fait des exhortations, son style devient tout à fait poétique et conforme à toutes les lois de la poésie hébraïque, surtout à la fin du livre, dans le chapitre 12.

Il y a, d’ailleurs, de l’art dans l’Ecclésiaste, malgré quelques négligences et un peu de diffusion. Les répétitions et pléonasmes, voir Ecclésiaste, 8, 14 ; 9, 9, sont certainement voulus et cherchés, et ils produisent leur effet. « L’Ecclésiaste se manifeste comme un maître de la parole quand, voir Ecclésiaste, 1, 4-11 et 12, 2-7, il représente, là, l’éternel va-et-vient des choses, et quand il peint, ici, la vie humaine qui touche à son terme et enfin se brise. » (F. DELITZCH.)

L’absence d’uniformité dans la forme et dans la marche de la pensée, l’absence même d’un enchaînement rigoureux dans les idées, ne sert qu’à faire mieux ressortir la vérité qu’il veut faire pénétrer dans l’esprit de l’homme : le néant de la vie en dehors de Dieu. Il a tout essayé, rien n’a pu le satisfaire ; il passe d’un sujet un autre, parce que rien n’est capable de le fixer et de le retenir. Son style est en parfait accord avec sa manière de voir les choses. Il tient ferme à la crainte de Dieu et au jugement final, mais il n’en sent pas moins douloureusement le dégoût de la vie et ses déceptions amères, et il exprime ses sentiments d’une manière si saisissante qu’il nous les fait partager. Avec quelle force éclate sa douleur dans la première partie de son livre : Vanitas vanitatum, dixit Ecclesiastes, vanitas vanitatum et omnia vanitas ! On ne saurait imaginer une entrée en matière plus brusque ni plus énergique. Salomon a longtemps contenu au fond de son cœur le chagrin qui le ronge, mais enfin il éclate soudainement, il répète sa pensée, et ses pléonasmes mêmes sont éloquents. C’est un coup de tonnerre qui retentit et que l’écho répercute sourdement et longuement comme pour le rendre plus terrible. Jamais écrivain n’a trouvé une formule plus concise et plus forte pour exprimer sa pensée. Qui a pu jamais oublier le vanitas vanitatum, après l’avoir une fois entendu ?

L’Ecclésiaste est d’ailleurs un discours qui n’a pas toute la rigueur et toute la suite d’une dissertation ; mais il est impossible d’y méconnaître un ordre et un plan. Il se compose d’un prologue, chapitre 1, versets 2 à 11, de quatre sections ou parties, du chapitre 1, verset 12 au chapitre 12, verset 7, et d’un épilogue, chapitre 12, versets 8 à 14.

La suite des pensées n’est pas toujours rigoureuse, la liaison des idées surtout n’est pas partout apparente, et l’enchaînement n’est pas très méthodique ; il y a des oscillations dans l’exposition, quelques répétitions et quelques parenthèses, mais néanmoins l’idée dominante de chacune des parties se dégage clairement : 1° la vanité des plaisirs de ce monde dans la première section, du chapitre 1, verset 12 au chapitre 2 ; 2° l’impuissance de l’homme contre la volonté de la Providence dans la seconde, du chapitre 3 au chapitre 5 ; 3° la vanité des richesses et de la réputation dans la troisième, du chapitre 6 au chapitre 8, verset 15 ; 4° le résumé de tout ce qui précède dans la quatrième, du chapitre 8, verset 16 au chapitre 12, verset 7, et enfin la conclusion que le but de la vie doit être, non de chercher un bonheur parfait, qu’il est impossible d’atteindre, mais de s’assurer une sentence favorable au tribunal de Dieu.

L’Ecclésiaste



Tout ce qui est ici-bas n’est que vanité.

Rien de nouveau sous le soleil.

La sagesse même est la science sont des sources de peines et d’afflictions.


1Paroles de l’Ecclésiaste, fils de David, roi de Jérusalem. 2Vanité des vanités, (a) dit l’Ecclésiaste ; vanité des vanités, et tout est vanité. 3Quel profit revient-il à l’homme de tout le travail qui l’occupe sous le soleil ? 4Une génération passe, et une génération vient ; mais la terre subsiste à jamais. 5Le soleil se lève et se couche, et il revient à son point de départ ; et là, renaissant, 6il tourne vers le midi, et se dirige vers le nord. Parcourant tous les lieux (toutes choses), le vent s’élance en tournant, et il revient sur ses circuits. 7Tous les fleuves entrent dans la mer, et la mer ne déborde pas ; les fleuves retournent (au lieu d’où ils étaient sortis), pour couler de nouveau. 8Toutes choses sont difficiles ; l’homme ne peut les expliquer par la parole. L’œil ne se rassasie pas de voir, et l’oreille ne se lasse pas d’entendre. 9Qu’est-ce qui a été ? C’est ce qui sera plus tard. Qu’est-ce qui s’est fait ? C’est ce qui doit se faire encore. 10Il n’y a rien de nouveau sous le soleil, et nul ne peut dire : Voici une chose nouvelle ; car elle a déjà existé dans les siècles qui étaient avant nous. 11On ne se souvient pas des choses anciennes (antérieures), et ce qui arrivera dans la suite ne laissera pas non plus de souvenir chez ceux qui vivront plus tard (en dernier lieu). 12Moi l’Ecclésiaste, j’ai été roi d’Israël à Jérusalem ; 13et je résolus en moi-même de chercher et d’examiner avec sagesse tout ce qui se passe sous le soleil. Dieu a donné aux fils des hommes cette fâcheuse occupation (très pénible), afin qu’ils s’y exercent. 14J’ai vu tout ce qui se fait sous le soleil, et voici que tout est vanité et affliction d’esprit. 15Les pervers se corrigent difficilement, et le nombre des insensés est infini. 16J’ai dit dans mon cœur : Voici que je suis devenu grand, et j’ai surpassé en sagesse tous ceux qui ont été avant moi à Jérusalem, et mon esprit a contemplé beaucoup de choses avec sagesse, et je me suis instruit (j’ai beaucoup appris). 17Et j’ai appliqué mon cœur à connaître la prudence et la doctrine, les erreurs et la folie, et j’ai reconnu qu’en cela aussi il y a peine (un travail) et affliction d’esprit, 18car avec beaucoup de sagesse il y a beaucoup d’indignation, et celui qui augmente sa science augmente aussi sa peine.


Vanité des plaisirs, des richesses, des bâtiments.

Avantages de la sagesse.

Vanité d’amasser des richesses pour un héritier inconnu.


2J’ai dit en mon cœur : J’irai, et je regorgerai de (nagerai dans les) délices, et je jouirai des biens ; et j’ai vu que cela aussi était une vanité. 2J’ai regardé le rire comme une folie (erreur), et j’ai dit à la joie : Pourquoi te trompes-tu (séduis-tu) vainement ? 3Je résolus en mon cœur de retirer ma chair du vin, pour porter mon esprit à la sagesse, et pour éviter la folie, jusqu’à ce que je visse ce qui est utile aux fils des hommes, et ce qu’ils doivent faire sous le soleil pendant les jours de leur vie. 4J’exécutai (J’ai fait) de grands ouvrages, je me (suis) bâti(s) des maisons, et je plantai (j’ai planté) des vignes ; 5je fis des jardins et des vergers, et j’y plantai toutes sortes d’arbres, 6et je me construisis des réservoirs d’eaux, pour arroser la forêt où croissaient les arbres (qui étaient en pleine végétation) ; 7j’achetai des serviteurs et des servantes, et j’eus de nombreux esclaves nés à la maison (une nombreuse famille), et des troupeaux de bœufs, et de grands troupeaux de brebis, plus que tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem. 8Je m’amassai de l’argent et de l’or, et les richesses des rois et des provinces ; je me procurai des chanteurs et des chanteuses, et (tout ce qui fait) les délices des fils des hommes, et des coupes pour servir à verser le vin ; 9et je surpassai en richesses tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem ; la sagesse aussi demeura avec moi. 10Je n’ai rien refusé à mes yeux de tout ce qu’ils ont désiré, et j’ai permis à mon cœur de jouir de tous les plaisirs (toutes sortes de voluptés), et de prendre ses délices dans tout ce que j’avais préparé, et j’ai cru que mon partage était de jouir de mes travaux. 11Puis, m’étant retourné vers tous les ouvrages que mes mains avaient faits, et vers les travaux où j’avais pris une peine inutile, j’ai vu en tout vanité et affliction d’esprit, et j’ai reconnu que rien n’est stable sous le soleil. 12J’ai passé à la contemplation de la sagesse, et des erreurs, et de la folie. Qu’est l’homme, dis-je, pour qu’il puisse suivre le roi qui l’a créé ? 13Et j’ai vu que la sagesse a autant d’avantage sur (surpasse autant) la folie que la lumière diffère des ténèbres. 14Les yeux du sage sont à sa tête ; l’insensé marche dans les ténèbres ; et j’ai reconnu (appris) qu’ils meurent tous deux l’un comme l’autre. 15Et j’ai dit en mon cœur : Si moi et l’insensé devons mourir également, que me sert de m’être appliqué davantage à la sagesse ? Et me parlant à moi-même, j’ai reconnu que cela aussi était vanité. 16Car la mémoire du sage n’est pas plus éternelle que celle de l’insensé, et les temps à venir enseveliront tout pareillement dans l’oubli ; le savant meurt aussi bien que l’ignorant. 17C’est pourquoi j’ai été las de la vie, en voyant que tout est mauvais (tous les maux qui sont) sous le soleil, et que tout est vanité et affliction d’esprit. 18J’ai ensuite (de nouveau) détesté toute l’application si grande avec laquelle j’avais tant travaillé sous le soleil, devant laisser après moi un héritier, 19au sujet duquel j’ignore s’il sera sage ou insensé, et pourtant il sera maître de tous mes travaux auxquels je me suis appliqué avec tant de peine ; et y a-t-il rien de si vain ? 20C’est pourquoi j’ai cessé (d’agir), et mon cœur a renoncé à travailler davantage sous le soleil. 21Car après qu’un homme a travaillé avec sagesse, et avec science et sollicitude, il laisse ce qu’il a acquis à un être (homme) oisif. Cela aussi est donc (une) vanité et un grand mal. 22Car quel profit aura l’homme de tout son travail, et de l’affliction d’esprit dont il a été tourmenté sous le soleil ? 23Tous ses jours sont pleins de douleurs et de misères (chagrins), et son âme n’a pas même de repos pendant la nuit. Et n’est-ce pas là une vanité ? 24Ne vaut-il pas mieux manger et boire, et montrer le bonheur à son âme du fruit de ses travaux ? Et cela vient de la main de Dieu. 25Qui se rassasiera et jouira de toutes sortes de délices autant que moi ? 26A l’homme qui lui est agréable, Dieu a donné la sagesse, et la science, et la joie ; mais au pécheur il a donné l’affliction et les soins inutiles, afin qu’il amasse et accumule, et qu’il laisse ses biens à celui qui est agréable à Dieu. Mais cela aussi est (une) vanité et un stérile tourment d’esprit.


Toutes choses ont leur temps.

Tout est dans une vicissitude continuelle.

Inquiétude partout.

L’homme et les bêtes meurent également.


3Toutes choses ont leur temps, et tout passe sous le ciel dans les délais qui lui ont été fixés (leurs limites). 2Il y a un temps pour naître, et un temps pour mourir ; un temps pour planter, et un temps pour arracher ce qui a été planté. 3Il y a un temps pour tuer, et un temps pour guérir ; un temps pour abattre, et un temps pour bâtir. 4Il y a un temps pour pleurer, et un temps pour rire ; un temps pour s’affliger, et un temps pour danser (sauter de joie). 5Il y a un temps pour jeter des (disperser les) pierres, et un temps pour les ramasser ; un temps pour embrasser, et un temps pour s’éloigner des embrassements. 6Il y a un temps pour acquérir, et un temps pour perdre ; un temps pour conserver, et un temps pour rejeter. 7Il y a un temps pour déchirer, et un temps pour coudre ; un temps pour se taire, et un temps pour parler. 8Il y a un temps pour aimer, et un temps pour haïr ; un temps pour la guerre, et un temps pour la paix. 9Quel profit l’homme a-t-il de (tout) son travail ? 10J’ai vu l’affliction que Dieu a donnée aux fils des hommes, pour qu’ils soient tourmentés par elle. 11Il a fait toutes choses bonnes en leur temps, et il a livré le monde à leurs disputes, sans que l’homme puisse découvrir l’œuvre que Dieu a faite depuis le commencement jusqu’à la fin. 12Et j’ai reconnu qu’il n’y a rien de meilleur que de se réjouir et de bien faire (le bien) pendant sa vie ; 13car tout homme qui mange et qui boit, et qui retire du (voit le) bien de son travail, a cela par un don de Dieu. 14J’ai appris que toutes les œuvres que Dieu a créées demeurent à perpétuité ; nous ne pouvons rien y ajouter, ni rien retrancher à ce que Dieu a fait afin qu’on le craigne. 15Ce qui a été subsiste encore ; ce qui doit être a déjà été, et Dieu ramène (rétablit) ce qui est passé. 16J’ai vu sous le soleil l’impiété dans le lieu établi pour le jugement, et l’iniquité dans le lieu de la justice ; 17et j’ai dit en mon cœur : Dieu jugera le juste et l’injuste (impie) ; et alors ce sera le temps de toute chose. 18J’ai dit en mon cœur touchant les fils des hommes, que Dieu les éprouve, et qu’il montre qu’ils sont semblables aux (à des) bêtes. 19C’est pourquoi les hommes meurent comme les bêtes, et ils ont les uns et les autres un même sort. Comme l’homme meurt, ainsi meurent les bêtes. Ils (Elles) respirent tou(te)s de la même manière, et l’homme n’a rien de plus que la bête ; tout(es choses sont) est soumis(es) à la vanité, 20et tout(es) va (vont) dans un même lieu. Ils (Elles) ont été tiré(e)s de la terre, et ils (elles) retournent tou(te)s dans (à) la terre. 21Qui sait si le souffle (l’esprit) des fils de l’homme (d’Adam) monte en haut, et si le souffle (l’esprit) des bêtes descend en bas ? 22Et j’ai reconnu qu’il n’y a rien de meilleur pour l’homme que de se réjouir dans ses (son) œuvre(s), et que c’est là sa part. Car qui le mettra en état de connaître ce qui doit arriver après lui ?


Violence et jalousie des hommes.

Oisiveté des insensés.

Folie des avares.

Avantage de la société.

Vanité de la souveraine puissance.

Obéissance préférable aux sacrifices.


4Je me suis tourné vers d’autres choses, et j’ai vu les oppressions qui se font sous le soleil, et les larmes des innocents, qui n’ont pas de consolateur, et qui ne peuvent résister à la violence (des oppresseurs), abandonnés qu’ils sont de tout secours ; 2et j’ai félicité (loué) les morts plus que les vivants ; 3et j’ai estimé plus heureux que les uns et les autres celui qui n’est pas encore né, et qui n’a pas vu les maux qui se font sous le soleil. 4J’ai aussi (de nouveau) contemplé tous les travaux des hommes, et j’ai reconnu que leur (l’) industrie est exposée à l’envie des autres ; cela aussi est donc (une) vanité et (une) inquiétude inutile (soin superflu). 5L’insensé se croise les mains, et il mange sa propre chair, en disant : 6Mieux vaut une main pleine avec du repos, que plein les deux mains avec travail et affliction d’esprit. 7En considérant, j’ai trouvé encore une autre vanité sous le soleil. 8Tel est seul et n’a personne avec lui, ni fils, ni frère, et cependant il ne cesse pas de travailler, et ses yeux ne sont jamais rassasiés de richesses ; et il ne réfléchit pas, en disant : Pour qui est-ce que je travaille, et que je prive mon âme de biens ? C’est là encore (une) vanité, et une affliction très fâcheuse (malheureuse). 9Il vaut donc mieux être deux ensemble que d’être seul, car ils retirent du profit de leur société. 10Si l’un tombe, l’autre le soutient. Malheur à celui qui est seul ; car lorsqu’il sera tombé, il n’a personne pour le relever. 11Et si deux dorment ensemble, ils s’échauffent l’un l’autre ; mais comment un seul s’échauffera-t-il ? 12Et si quelqu’un est plus fort qu’un seul, les deux lui résistent ; un triple cordon se rompt difficilement. 13Mieux vaut un enfant pauvre et sage, qu’un roi vieux et insensé, qui ne sait prévoir (pour) l’avenir. 14Car parfois tel sort de la prison et des chaînes pour régner, et tel est né roi qui tombe dans une extrême pauvreté. 15J’ai vu tous les vivants qui marchent sous le soleil avec le second jeune homme qui doit se lever à la place de l’autre. 16Tous ceux qui ont été avant lui sont un peuple infini en nombre, et ceux qui viendront après ne se réjouiront point en lui ; mais cela aussi est (une) vanité et (une) affliction d’esprit. 17Prends garde à ton pied, lorsque tu entres dans la maison de Dieu, et approche-toi pour écouter. Car l’obéissance vaut beaucoup mieux que les victimes des insensés, qui ne savent pas le mal qu’ils font.


Etre circonspect dans ses paroles.

S’acquitter de ses vœux.

Ne point se scandaliser du renversement de la justice.

L’avare est insatiable.

Riche malheureux au milieu de ses richesses.


5Ne dis rien à la légère, et que ton cœur ne se hâte pas de proférer des paroles devant Dieu. Car Dieu est au ciel, et toi sur la terre ; c’est pourquoi, que tes paroles soient peu nombreuses. 2La multitude des soucis (soins) produit les songes (rêves), et la folie se trouve dans l’abondance des paroles. 3Si tu as fait un vœu à Dieu, ne tarde pas à l’accomplir ; car la promesse infidèle et insensée lui déplaît ; mais accomplis tous les vœux que tu as faits. 4Il vaut beaucoup mieux ne pas faire de vœux, que d’en faire et de ne pas les accomplir. 5Ne permets pas à ta bouche de faire pécher ta chair, et ne dis pas devant l’ange : Il n’y a point de providence ; de peur que Dieu, irrité contre tes paroles, ne détruise toutes les œuvres de tes mains. 6Où il y a beaucoup de songes (rêves), il y a aussi beaucoup de vanités et de discours sans fin ; mais toi, crains Dieu. 7Si tu vois l’oppression des pauvres, et la violence dans les jugements, et le renversement de la justice dans une province, que cela ne t’étonne pas ; car celui qui est élevé en a un autre au-dessus de lui ; et il y en a encore d’autres qui sont élevés au-dessus d’eux ; 8et de plus, le (il y a un) roi (qui) commande à tout le pays qui lui est assujetti. 9L’avare n’est point rassasié par l’argent, et celui qui aime les richesses n’en recueillera pas de fruit ; c’est donc là encore une vanité. 10Quand le(s) bien(s) abonde(nt), il y a aussi beaucoup de gens pour le(s) manger. De quoi donc sert-il à celui qui le(s) possède(nt), sinon qu’il voit de ses yeux ses richesses ? 11Le sommeil est doux au travailleur, soit qu’il ait peu ou beaucoup mangé ; mais le rassasiement du riche ne le laisse pas dormir. 12Il est encore un autre mal (maladie) très fâcheux(se) que j’ai vu(e) sous le soleil : des richesses conservées pour le malheur de celui qui les possède. 13Car il les voit périr avec une extrême affliction ; il a engendré un fils qui sera réduit à la dernière indigence. 14Comme il est sorti nu du sein de sa mère, il retournera de même, et il n’emportera rien avec lui de son travail. 15C’est là un mal tout à fait digne de compassion (Maladie tout à fait misérable) : il (elle) s’en retournera comme il (elle) est venu(e). De quoi lui sert-il donc d’avoir travaillé pour le vent ? 16Tous les jours de sa vie il a mangé dans les ténèbres, et parmi des soucis nombreux (soins multipliés), dans la misère (tristesse) et le chagrin. 17Il m’a donc semblé qu’il est bon pour l’homme de manger et de boire, et de se réjouir du fruit de son travail qu’il a fait sous le soleil, pendant le nombre des jours de sa vie que Dieu lui a donnés ; et (car) c’est là sa part. 18Et quand Dieu a donné à un homme des richesses et des biens, et le pouvoir d’en manger, et de jouir de sa part, et de trouver sa joie dans son travail, c’est là un don de Dieu. 19Car il ne se souviendra pas beaucoup des jours de sa vie, parce que Dieu occupe son cœur de délices.


Malheureuse condition de l’avare.

Il a du bien, et il n’ose pas en jouir.


6Il y a encore un autre mal que j’ai vu sous le soleil, et qui est (même) fréquent parmi les hommes : 2Un homme à qui Dieu a donné des richesses, et des biens, et de l’honneur, et qui ne manque pour son âme d’aucune de toutes les choses qu’il désire ; et Dieu ne lui a pas donné le pouvoir d’en manger, mais c’est un étranger qui dévorera tout : c’est là (une) vanité et (une) grande misère. 3Quand un homme aurait eu cent fils, qu’il aurait vécu beaucoup d’années, et qu’il aurait de nombreux jours de vie, si son âme n’use point des biens qu’il possède, et s’il est même privé de la sépulture, (moi) j’affirme (hardiment) de cet homme qu’un avorton vaut mieux que lui. 4Car il est venu au monde en vain, et il s’en va dans les ténèbres, et son nom sera effacé par l’oubli. 5Il n’a pas vu le soleil, et il n’a pas connu la différence (distance) du bien et du mal. 6Quand il aurait vécu deux mille ans, s’il n’a pas joui de ses biens, tou(te)s (choses) ne vont-ils (ne se hâtent-elles) pas dans un même (vers un seul) lieu ? 7Tout le travail de l’homme est pour sa bouche ; mais son âme ne sera pas rassasiée (remplie). 8Qu’a le sage de plus que l’insensé ? et qu’a le pauvre, sinon qu’il va au lieu (là) où est la vie ? 9Il vaut mieux voir ce qu’on désire, que de souhaiter ce qu’on ignore. Mais cela même est (une) vanité et (une) présomption d’esprit. 10Celui qui doit être a déjà été appelé par son nom ; et l’on sait qu’il est homme, et qu’il ne peut disputer en jugement contre un plus puissant que lui. 11On se répand en beaucoup de paroles de discussion, et (, dans la dispute) il y a là une grande vanité.


Vaine curiosité.

Bonne réputation.

Utilité des corrections.

Avantage de la sagesse.

Point de juste qui ne pèche.

Négliger les discours des hommes.

La femme dangereuse.


7Qu’est-il nécessaire à l’homme de rechercher ce qui est au-dessus de lui, puisqu’il ignore ce qui lui est avantageux en sa vie, pendant le nombre des jours de sa pérégrination (son pèlerinage), et durant le temps qui passe comme une ombre ? Ou qui pourra lui indiquer ce qui doit être après lui sous le soleil ? 2La bonne réputation vaut mieux que les parfums précieux, et le jour de la mort que le jour de la naissance. 3Il vaut mieux aller à une maison de deuil qu’à une maison de festin ; car dans celle-là on est averti de la fin de tous les hommes, et celui qui vit pense à ce qui doit lui arriver. 4La colère vaut mieux que le rire, car le cœur de celui qui pèche est corrigé par le visage triste. 5Le cœur des sages est où se trouve la tristesse, et le cœur des insensés où se trouve la joie. 6Mieux vaut être repris par un sage, que d’être trompé par la (les) flatterie(s) des insensés ; 7car comme le bruit des épines qui brûlent sous une chaudière (marmite), ainsi est le rire de l’insensé ; mais cela aussi (même) est (une) vanité. 8La calomnie (L’oppression) trouble le sage, et elle abat(tra) la force de son cœur. 9Mieux vaut la fin d’un discours que le commencement. Mieux vaut l’homme patient que l’arrogant. 10Ne sois pas prompt à t’irriter, car la colère repose dans le sein de l’insensé. 11Ne dis point : D’où vient que les temps passés ont été meilleurs que ceux d’aujourd’hui ? car cette demande est insensée. 12La sagesse est plus utile avec les richesses, et elle sert davantage à ceux qui voient le soleil. 13Car comme la sagesse protège, l’argent protège aussi ; mais la science et la sagesse ont cela de plus, qu’elles donnent la vie à celui qui les possède. 14Considère les œuvres de Dieu, et que personne ne peut corriger celui qu’il méprise. 15Jouis des biens au jour heureux, et tiens-toi prêt pour le mauvais jour ; car Dieu (il) a fait l’un comme l’autre, afin (sans) que l’homme (ne) trouve (pas) de justes plaintes contre lui. 16J’ai vu encore ceci aux jours de ma vanité : Le juste périt dans sa justice, et l’impie vit longtemps dans sa malice. 17Ne sois pas trop juste, et ne sois pas plus sage qu’il n’est nécessaire, de peur que tu ne perdes la raison (deviennes insensible). 18N’agis point avec trop d’impiété, et ne sois pas insensé, de peur que tu ne meures avant le (dans un) temps (qui ne soit pas le tien). 19Il est bon que tu soutiennes le juste ; mais (même) ne retire pas (de celui-là) ta main (de celui qui ne l’est point), car celui qui craint Dieu ne néglige rien. 20La sagesse rend le sage plus fort que dix princes d’une ville ; 21car il n’y a pas d’homme juste sur la terre qui fasse le bien et ne pèche point. 22Que ton cœur ne fasse pas attention à toutes les paroles qui se disent, de peur que tu n’entendes ton serviteur te maudire ; 23car ta conscience sait que toi aussi tu as souvent maudit les autres. 24J’ai tout tenté avec sagesse. J’ai dit : Je deviendrai sage ; et la sagesse s’est retirée (bien) loin de moi, 25beaucoup plus qu’elle n’était auparavant. Sa profondeur est grande ; qui la trouvera ? 26J’ai examiné toutes choses dans mon esprit, pour savoir, et pour considérer, et pour chercher la sagesse et la raison de(s) tout (choses), et pour connaître la malice des insensés et l’erreur des imprudents ; 27et j’ai trouvé plus amère que la mort la femme, qui est un filet de chasseurs, et dont le cœur est un rets, et dont les mains sont des liens (chaînes). Celui qui est agréable à Dieu lui échappe(ra) ; mais le pécheur sera pris par elle. 28Voici ce que j’ai trouvé, dit l’Ecclésiaste, après avoir comparé les choses une à une pour en trouver la (une) raison, 29que mon âme cherche encore sans l’avoir découverte. J’ai trouvé un homme entre mille ; mais parmi toutes les femmes je n’en ai pas trouvé une seule. 30J’ai trouvé seulement cela, c’est que Dieu a créé l’homme droit, et qu’il s’est lui-même embarrassé dans des questions sans fin. Qui est comme le sage ? et qui connaît l’explication des choses (la solution de la parole) ?


Ne point s’éloigner des commandements de Dieu.

Patience de Dieu.

Affliction des justes.

Prospérité des méchants.


8La sagesse de l’homme luit sur son visage, et le Tout-Puissant le lui change a son gré. 2Pour moi j’observe la bouche du roi et les préceptes(, à cause) du serment fait à Dieu. 3Ne te hâte pas de te retirer d’auprès de lui, et ne persiste pas dans une œuvre mauvaise, car il fera tout ce qu’il voudra. 4Sa parole est pleine de puissance, et nul ne peut lui dire : Pourquoi faites-vous ainsi ? 5Celui qui garde le précepte ne ressentira aucun mal. Le cœur du sage connaît (comprend) le temps et la réponse. 6Pour toute chose il y a un temps et un moment favorable, et c’est une grande affliction pour l’homme 7d’ignorer le passé, et d’être dans l’impuissance de recevoir aucune nouvelle de l’avenir. 8Il n’est pas au pouvoir de l’homme de retenir son souffle vital, et il n’a pas de puissance sur le jour de la mort ; il ne lui est pas permis de se reposer quand la guerre le menace, et l’impiété ne sauvera pas l’impie. 9J’ai considéré toutes ces choses, et j’ai appliqué mon cœur à toutes les choses qui se font sous le soleil. Quelquefois un homme en domine un autre pour son propre malheur. 10J’ai vu porter au sépulcre des impies, qui, lorsqu’ils vivaient encore, étaient dans le lieu saint, et qu’on louait dans la cité, comme si leurs œuvres eussent été justes. Mais cela aussi est (une) vanité. 11Car parce qu’une sentence n’est pas immédiatement prononcée contre les méchants, les fils des hommes commettent le crime sans aucune crainte. 12Cependant, quoique le pécheur fasse cent fois le mal, et qu’il soit supporté avec patience, j’ai reconnu qu’il y aura du bonheur (le bien sera) pour ceux qui craignent Dieu et qui révèrent sa face. 13Puisse-t-il ne pas y avoir de bonheur pour l’impie, et que ses jours ne soient pas prolongés, et que ceux qui ne craignent point la face du Seigneur passent comme l’ombre ! 14Il est encore une autre vanité sur la terre. Il y a des justes à qui des malheurs (maux) arrivent, comme s’ils avaient fait les actions des impies ; et il y a des impies qui vivent dans l’assurance comme s’ils avaient fait les œuvres des justes. Mais j’affirme que c’est encore là une très grande vanité. 15J’ai donc loué la joie, parce qu’il n’y a de bonheur pour l’homme sous le soleil qu’à manger, et à boire, et à se réjouir, et qu’il n’emporte que cela avec lui de son travail, pendant les jours de sa vie que Dieu lui a donnés sous le soleil. 16J’ai aussi appliqué mon cœur à connaître la sagesse, et à considérer les occupations (la tension d’esprit) qui ont lieu (règne) sur la terre. Il est des hommes dont les yeux ne goûtent le sommeil ni jour ni nuit. 17Et j’ai compris que l’homme ne peut trouver aucune raison de toutes les œuvres de Dieu qui se font sous le soleil ; et que plus il se fatigue à chercher, moins il trouve ; et même quand le sage dit qu’il a cette connaissance, il ne peut pas la trouver.


Nul ne sait s’il est digne d’amour ou de haine.

Egale condition des bons et des méchants en ce monde.

Faire le bien tandis qu’on le peut.

Sagesse du pauvre méprisée.


9J’ai agité toutes ces choses dans mon cœur, pour en chercher avec soin l’intelligence (tacher de les comprendre). Il y a des justes et des sages, et leurs œuvres sont dans la main de Dieu, et néanmoins l’homme ne sait s’il est digne d’amour ou de haine. 2Mais tout est réservé pour l’avenir et demeure incertain, parce que tout arrive également au juste et à l’impie, au bon et au méchant, au pur et à l’impur, à celui qui immole des victimes et à celui qui méprise les sacrifices. L’innocent (Le bon) est traité comme le pécheur, et le parjure comme celui qui jure dans la vérité. 3C’est là ce qu’il y a de pire (plus fâcheux) parmi tout ce qui se fait sous le soleil ; les mêmes choses arrivent à tous. Aussi les cœurs des fils des hommes sont-ils remplis de malice et de mépris pendant leur vie, et après cela ils sont conduits au séjour des morts (aux enfers). 4Il n’y a personne qui vive toujours, ni qui ait cette espérance. Un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort. 5Les vivants, en effet, savent qu’ils mourront ; mais les morts ne connaissent plus rien, et il n’y a plus pour eux de récompense, car leur mémoire est livrée à l’oubli. 6Et l’amour, et la haine, et l’envie ont péri avec eux, et ils n’ont plus de part à ce siècle, ni à tout ce (dans l’œuvre) qui se fait sous le soleil. 7Va donc, et mange ton pain avec joie, et bois ton vin avec allégresse, car tes œuvres sont agréables à Dieu. 8Qu’en tout temps tes vêtements soient blancs, et que l’huile ne manque point sur (cesse pas de parfumer) ta tête. 9Jouis (complètement) de la vie avec la femme (l’épouse) que tu aimes, pendant tous les jours de ta vie passagère, qui t’ont été donnés sous le soleil pendant tout le temps de ta vanité ; car c’est là ta part dans la vie et dans le travail que tu fais sous le soleil. 10Tout ce que ta main peut faire, fais-le promptement, car il n’y a ni œuvre, ni raison, ni sagesse, ni science dans le séjour des morts (aux enfers) où tu te précipites. 11J’ai tourné mes pensées ailleurs, et j’ai vu que, sous le soleil, la course n’est point aux agiles (pour les prompts), ni la guerre aux (pour les) vaillants, ni le pain aux (pour les) sages, ni les richesses aux (pour les) habiles (savants), ni la faveur aux (pour les) meilleurs artisans (ouvriers habiles) ; mais que tout dépend du temps et des circonstances (du hasard). 12L’homme ignore quelle sera sa fin : mais, (et) comme les poissons sont pris à l’hameçon, et comme les oiseaux sont pris au filet, ainsi les hommes sont saisis au temps du malheur (par un temps mauvais), lorsque tout d’un coup il fond sur eux. 13J’ai vu aussi sous le soleil une action qui m’a paru d’une très grande sagesse : 14Il y avait une petite ville, et peu d’hommes dans ses murs ; un grand roi vint contre elle, et l’investit, et dressa des forts tout autour, et l’assiégea de tous côtés. 15Or il s’y trouvait un homme pauvre et sage, qui délivra la ville par sa sagesse, et ensuite personne ne s’est souvenu de cet homme pauvre. 16Et j’ai dit que la sagesse vaut mieux que la force. Comment donc la sagesse du pauvre a-t-elle été méprisée, et comment ses paroles n’ont-elles pas été écoutées ? 17Les paroles des sages s’entendent dans le calme (silence), plus que les cris du prince parmi les insensés. 18La sagesse vaut mieux que les armes de guerre, et celui qui pèche en une seul(e) chose (point) perdra de grands biens.


Suites funestes de l’imprudence.

Imprudents et esclaves élevés en dignité.

Caractère du médisant.

Roi enfant.

Prince débauché.

Ne point médire du roi.


10Les mouches mortes (mourant) gâtent la bonne odeur (suavité) du (d’un) parfum ; une folie légère et de peu de durée l’emporte sur la sagesse et sur la gloire. 2Le cœur du sage est dans sa (main) droite, et le cœur de l’insensé dans sa (main) gauche. 3Quand l’insensé marche dans un chemin, (comme il est lui-même dépourvu de sagesse) il croit que tous les autres sont fous comme il l’est lui-même. 4Si l’esprit de celui qui a la puissance s’élève contre toi, ne quitte pas ta place, car cette précaution arrêtera (le remède fera cesser) de très grands péchés. 5Il est un mal que j’ai vu sous le soleil, et qui semble provenir de l’erreur (de la face) du prince : 6l’insensé élevé à une sublime dignité et les riches assis en bas. 7J’ai vu des esclaves à cheval, et des princes marcher à pied comme des esclaves. 8Celui qui creuse une fosse y tombera, et celui qui renverse (détruit) une haie sera mordu par le (un) serpent. 9Celui qui transporte des pierres en sera meurtri, et celui qui fend du bois en sera blessé. 10Si le fer s’est émoussé et n’a plus son premier mordant, on aura beaucoup de peine à l’aiguiser ; ainsi la sagesse ne s’acquiert que par un long travail. 11Comme (Si) un serpent qui mord sans bruit, tel est celui qui médit en secret (n’a rien de moins que ce serpent). 12Les paroles de la bouche du sage sont pleines de grâce, mais les lèvres de l’insensé le feront tomber dans le précipice(ront) ; 13le commencement de ses paroles est folie, et la fin de son discours est une erreur très maligne (funeste). 14L’insensé multiplie les paroles. L’homme ignore ce qui a été avant lui, et qui pourra lui indiquer ce qui doit arriver après lui ? 15Le travail des insensés les accablera, eux qui ne savent pas aller à la ville. 16Malheur à toi, terre dont le roi est un enfant, et dont les princes mangent dès le matin. 17(Bien)Heureuse est la terre dont le roi est de race illustre, et dont les princes mangent au temps convenable, pour se nourrir, et non pour se livrer à la débauche (sensualité). 18Par la paresse la charpente s’affaissera, et à cause (de la faiblesse) des mains lâches la maison aura des gouttières. 19Les hommes (vivants) emploient le pain et le vin (à se divertir et à faire des) (pour leur) festins, et tout obéit à l’argent. 20Ne médis pas du roi, même dans ta pensée, et ne maudis pas le riche dans le secret de ta chambre ; car (même) les oiseaux du ciel emporteront ta voix, et ceux qui ont des ailes publieront tes paroles (ton sentiment).


Faire l’aumône.

Œuvres de Dieu inconnues.

Avoir sans cesse devant les yeux le jugement de Dieu.

Vanité de la jeunesse.


11Jette (Répands) ton pain sur les eaux qui passent, car après un long temps tu le retrouveras. 2Donnes-en une part à sept et même à huit (personnes), car tu ignores quel mal(heur) peut arriver sur la terre. 3Lorsque (Si) les nuées se seront remplies (sont pleines), elles répandront la pluie sur la terre. Si l’arbre tombe au midi ou au nord, en quelque lieu qu’il sera tombé il y demeurera (sera). 4Celui qui observe le vent ne sème pas, et celui qui considère les nuages (nuées) ne moissonnera jamais. 5Comme tu ignores quel est le chemin du vent, et de quelle manière les os se lient dans le sein d’une femme grosse (enceinte), tu ne connais pas non plus les œuvres de Dieu, qui est le créateur de toutes choses. 6Dès le matin sème ton grain, et que le soir ta main ne cesse pas (de semer) ; car tu ne sais pas lequel des deux lèvera, celui-ci ou celui-là ; que si l’un et l’autre lèvent, ce sera mieux (encore). 7La lumière est douce, et il est délicieux (délectable) pour les yeux de voir le soleil. 8Si un homme vit beaucoup d’années, et qu’il se réjouisse pendant toutes ces années, il doit se souvenir du temps de ténèbres, et des jours nombreux qui, lorsqu’ils seront venus, convaincront de vanité tout le passé. 9Réjouis-toi donc, jeune homme, dans ta jeunesse (ton adolescence), et que ton cœur soit dans la joie pendant les jours de ta jeunesse ; marche dans les voies de ton cœur et selon (dans) les regards de tes yeux, et (mais) sache que pour tout cela (ces choses) Dieu t’amènera en jugement. 10Bannis la colère de ton cœur, et éloigne le mal (la malice) de ta chair ; car la jeunesse (l’adolescence) et le plaisir (la volupté) sont vanité(s).


Ne pas attendre la vieillesse pour servir le Seigneur.

Enigme de la vieillesse.

Vanité des choses du monde.

Craindre Dieu et observer ses commandements.


12Souviens-toi de ton Créateur pendant les jours de ta jeunesse, avant que vienne le temps de l’affliction, et que s’approchent les années dont tu diras : Elles ne me plaisent pas ; 2avant que s’obscurcissent le soleil, la lumière, la lune et les étoiles, et que les nuages (nuées) reviennent après la pluie ; 3lorsque les gardiens de la maison commenceront à trembler, que les hommes forts chancelleront, que celles qui moulent (son accoutumées de moudre) seront oisives et en petit nombre, et que ceux qui regardent par les ouvertures (trous) seront dans les ténèbres ; 4quand on fermera les portes sur la rue, quand la voix de celle qui moud sera faible, et qu’on se lèvera au chant de l’oiseau, et que les filles de l’harmonie (du chant) deviendront sourdes. 5On redoutera aussi les lieux élevés, et l’on aura des terreurs en chemin. L’amandier fleurira, la sauterelle s’engraissera, et la câpre n’aura plus d’effet (le câprier se dissipera) ; car l’homme s’en ira dans la maison de son éternité, et on parcourra les rues (places publiques) en pleurant. 6(Souviens-toi de ton Créateur) Avant que la chaîne (le cordon) d’argent soit rompue, que la bandelette d’or se retire, que la cruche se brise sur la fontaine, et que la roue se casse sur la citerne, 7et que la poussière retourne à (dans) la terre d’où elle a été tirée, et que l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné. 8Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste, et tout est vanité. 9L’Ecclésiaste, étant très sage, enseigna le peuple, et raconta ce qu’il avait fait ; et après un mûr examen (dans ses recherches) il composa de nombreuses paraboles. 10Il rechercha des paroles utiles, et il écrivit des discours pleins de droiture et de vérité. 11Les paroles des sages sont comme des aiguillons, et comme des clous enfoncés profondément, que le pasteur unique a donnés par le conseil des maîtres. 12Ne recherche rien de plus, mon fils. Il n’y a point de fin à multiplier les livres, et la (une) fréquente méditation est une fatigue pour le corps. 13Ecoutons tous ensemble la fin de ce discours : Crains Dieu et observe ses commandements ; car c’est là tout l’homme. 14Et Dieu amènera en jugement tout ce qui se fait, au sujet de toute faute, soit le bien soit le mal (pour tout ce qui aura été commis).

Notes


1.1 Le prologue, chapitre 1, versets 2 à 11, expose le sujet du livre. Il commence par une sentence qui le résume tout entier : Vanité des vanités et tout est vanité, voir Ecclésiaste, 1, 2. Cette sentence est répétée au commencement de l’épilogue. Une sentence termine aussi le prologue : Il n’est pas mémoire des choses antérieures, voir Ecclésiaste, 1, 11, de même que l’épilogue : Quant à toutes les choses qui se font, Dieu les appellera en jugement, voir Ecclésiaste, 12, 14 ; mais elle est fort différente dans les deux cas, parce que la conclusion nous fait connaître la sanction divine de la vie, tandis que le prologue ne nous fait connaître que la vanité de la vie considérée en elle-même, indépendamment de Dieu. Tout en elle est changement et oubli. C’est cette peinture des misères de la vie qui donne au livre de l’Ecclésiaste un charme douloureux auquel personne ne peut se soustraire.

1.4 Pour toujours (in æternum) ne signifie pas éternellement. L’auteur veut dire simplement que tout dans ce monde paraît, passe et disparaît, tandis que la terre est stable, et, par sa stabilité, plus à l’abri que les autres êtres de perpétuelles révolutions. Ainsi il est évident que l’auteur n’enseigne pas l’éternité du monde, comme l’ont prétendu les incrédules.

1.8 Il n’y a pas de scepticisme dans ce verset ; nous y apprenons seulement que l’homme ne peut prétendre à approfondir et à expliquer entièrement les choses de ce monde, à cause des bornes trop étroites de son esprit.

1.12 Avec ce verset commence la 1re section, du chapitre 1, verset 12, au chapitre 2. Elle montre quelle est la vanité de la vie, en traçant le tableau de la vanité de la sagesse humaine, voir Ecclésiaste, 1, 12-18, et celui de la jouissance des plaisirs et des bien terrestres, voir Ecclésiaste, 2, 1-11, alors même qu’on cherche à n’en jouir qu’avec modération, voir Ecclésiaste, 2, 12-26. Ainsi la sagesse, la science et le plaisir, qui paraissent les plus grands biens de l’homme sur la terre, ne sont que vanité. Cette 1re section a généralement la forme d’une confession de Salomon ; il raconte les expériences qu’il a faites pour trouver le bonheur sans tenir compte de Dieu.

1.13 Les fils de l’homme ou des hommes, se met souvent dans la Bible pour les hommes mêmes, les humains.

1.17 La doctrine ; c’est-à-dire la science, les connaissances.

1.18 Dans une grande sagesse, etc. Plus quelqu’un acquiert de sagesse, dit saint Jérôme en expliquant ce passage, et plus il s’indigne de se voir exposé aux vices et éloigné des vertus qu’elle demande.

2.3 MA chair ; hébraïsme, pour mon corps ; c’est-à-dire moi, ma personne ; c’est la partie pour le tout, figure très usitée dans le style biblique.

2.5 Le Jardin fermé. D’après la tradition, le Jardin fermé se trouvait au sud de Bethléhem, au fond d’une vallée étroite et profonde appelée Ouadi Ourtas. « La chaleur concentrée et l’abondance des eaux rendent ce terrain si prodigieusement fertile qu’on y avoir cinq récoltes de pommes de terre par an. » (LIEVIN.)

2.6 Des réservoirs d’eaux. Une tradition, dont il est d’ailleurs impossible de vérifier l’exactitude, attribue à l’auteur de l’Ecclésiaste les trois grands réservoirs situés au-dessous du Jardin fermé et qu’on appelle Etangs ou Vasques de Salomon.

2.7 Des serviteurs et des servantes ; c’est-à-dire des esclaves hommes et femmes. ― Une nombreuse famille ; dans l’hébreu, des fils de maison ; ce qui signifie les fils des esclaves, nés dans la maison du maître.

2.14 Voir Proverbes, 17, 24 ; Ecclésiaste, 8, 1.

2.24 Est-ce qu’il, etc. Le but de l’auteur dans ce verset est de nous prémunir contre une avarice sordide et la passion de rechercher les richesses, en disant qu’il vaut mieux passer sa vie à jouir avec modération des fruits de ses travaux, comme d’autant de dons du Créateur, que de s’en priver pour se consumer dans des soucis immodérés et dans une vaine poursuite des faux biens de ce monde. Ainsi rien ne prouve que cet auteur se montre épicurien, comme le veulent quelques incrédules.

3.1 Avec ce chapitre commence la 2e section, chapitres 3 à 5. Elle établit que l’homme n’est pas le maître de son sort, mais qu’il est tout entier entre les mains de Dieu et sous la dépendance de sa Providence. Tous les événements de la vie sont fixés et réglés. L’homme doit donc s’y soumettre et tâcher de tirer le meilleur parti possible de la vie présente. Quelques que soient les maux et les injustices qui règnent sur la terre, si l’homme a la crainte de Dieu, s’il remplit ses devoirs, s’il se confie en la Providence, s’il estime à leur juste valeur les biens de ce monde, s’il se contente de jouir des biens qui lui sont donnés, il aura agi sagement. Cette 2e section nous montre donc l’impuissance des efforts humains pour atteindre le bonheur, parce que nous ne pouvons lutter contre les événements et contre la Providence. La conclusion est qu’il faut se résigner à supporter les maux qu’on ne peut éviter et à jouir des biens que Dieu nous donne.

3.12 Rien de mieux que de se réjouir ; que d’être joyeux, mais d’une joie sage et modérée, opposée aux soucis immodérés dont il est question dans la note précédente.

3.13 Voit le bien ; hébraïsme, pour éprouver le bien, jouir du bien. C’est encore faussement que quelques incrédules prétendent trouver la morale d’Epicure dans ce verset, dont le sens tout naturel est que celui-là agit sagement qui, après avoir amassé quelques biens par son travail, en jouit modérément, comme d’autant de présents du ciel. Or, il n’y a rien là qui ressemble le moins du monde à l’épicurisme. Comparer à Proverbes, 2, 24.

3.18-20 C’est à tort que les incrédules ont prétendu trouver du matérialisme dans ces passages. L’auteur ne veut parler que du corps, qui est matériel, et de la décomposition que la mort fait subir aux parties qui le composent, puisqu’à Ecclésiaste, 12, 7, il déclare formellement que l’âme survit au corps.

3.21 Qui sait, etc. Il n’y a pas plus de matérialisme dans ce verset que dans les précédents. Salomon y dit seulement, ce qui est incontestable, que la raison humaine ne saurait voir clairement, par ses seules forces, quel peut être le sort réservé à l’homme après sa mort.

4.1 Les oppressions ; littéralement les calomnies. Voir Proverbes, 14, 31. ― Des oppresseurs ; littéralement d’eux (eorum), c’est-à-dire de ceux qui sont les auteurs des oppressions et des larmes dont il vient d’être fait mention.

4.2 Et j’ai loué, etc. ; c’est-à-dire j’ai trouvé l’état des morts préférable à celui des vivants. Saint Jérôme remarque que le sage ne considère dans cette expression que la souffrance dans l’état des vivants, et que le repos dans celui des morts. C’est ainsi que plusieurs saints personnages ont trouvé, dans certaines circonstances, la mort préférable à la vie. Voir 3 Rois, 19, 4 ; Tobie, 3, 1 ; 1 Machabée, 3, 50.

4.15 Le second ; l’héritier d’un roi, lequel doit régner en sa place, a souvent beaucoup plus de partisans que le roi régnant lui-même ; tout le peuple porte sur lui ses espérances. ― Pro eo. Le pronom eo tient lieu de primo ou rege, sous-entendu, et que suppose évidemment l’adjectif secundo. Plusieurs pensent que l’auteur fait ici allusion au roi vieux et insensé, et à l’enfant pauvre et sage du verset 13.

4.16 Du peuple ; c’est-à-dire de la multitude.

4.17 Garde, etc. Considère où tu mets le pied, quand tu entres dans le temple ; c’est-à-dire songe à la conduite que tu dois y tenir ; et approche-toi de ceux qui annoncent sa parole, pour écouter et pratiquer les vérités qu’ils t’enseigneront. Cette docilité te rendra agréable au Seigneur. ― Car l’obéissance, etc. Voir 1 Rois, 15, 22 ; Osée, 6, 6.

5.5 Ne permets pas que ta bouche fasse pécher ta chair. Cette phrase est susceptible de plusieurs sens ; le plus simple et le plus naturel, comme se liant parfaitement à ce qui précède, nous a paru être : Ne permets pas de prononcer aucun vœu témérairement ; parce que, en ne l’acquittant pas, tu te rendras coupable de péché. ― Ta chair, pour te, toi. Voir Ecclésiaste, 2, 3. ― L’ange ; probablement le prêtre à qui il appartenait de prononcer sur les vœux (voir Lévitique, 5, 4-8), et de la bouche duquel on recueillait l’explication de la loi, car le prophète Malachie (2, 7), l’appelle formellement l’ange du Seigneur. Saint Jean désigne aussi sous le nom d’anges les évêques (voir Apocalypse, 1, 20, etc.)

5.12 Voir Job, 20, 20.

5.14 Voir Job, 1, 21 ; 1 Timothée, 6, 7.

5.15 Pour le vent. Les Hébreux employaient le mot vent pour exprimer ce qu’il y a de plus léger, de plus vain.

5.19 Pas beaucoup ; c’est le sens donné par les Septante ; c’est aussi celui du non satis ou pas assez de la Vulgate, expliqué par l’hébreu. Ainsi l’auteur veut dire qu’en usant avec modération du fruit de ses travaux, l’homme dont il est question au verset précédent trouvera sa vie courte, parce que Dieu remplit son cœur de délices qui la lui font passer agréablement.

6.1 La 3e section embrasse les chapitres 6 à 8, verset 15. Elle montre que le bonheur n’est pas dans la recherche des richesses ni de la réputation. La sagesse pratique consiste à prendre les choses comme Dieu les envoie, à être patient, à ne pas se livrer aux récriminations, à obéir aux supérieurs.

6.2 A son âme ; hébraïsme, pour à sa personne, à lui.

6.10 Celui qui doit être, etc. Les hommes ont toujours été hommes, naissant toujours de la même manière, faibles, malheureux, etc. Ainsi celui qui doit naître un jour à venir est déjà connu ; son nom d’homme, connu par avance, indique déjà ce qu’il sera.

7.2 Voir Proverbes, 22, 1.

7.4 Mieux vaut la colère ; c’est-à-dire le ton sévère, d’un homme juste, par exemple, que le rire ou l’approbation du méchant, parce qu’en effet le regard sévère du premier et la tristesse de son visage peuvent faire sur le pécheur une impression salutaire, et le porter à se corriger.

7.8 L’oppression (calumnia). Voir Proverbes, 14, 31.

7.17 A l’excès ; c’est le sens qu’a ici, comme dans bien d’autres passages, le multum de la Vulgate. D’ailleurs le contexte, dans ce verset, suffirait seul pour le justifier.

7.18 N’agis pas, etc. Si le sage conseille, comme on vient de le voir, de ne pas excéder dans la justice et la sagesse, à plus forte raison fera-t-il la même recommandation, quand il s’agira du mal et de l’impiété. Ainsi, en défendant d’être trop impie, il ne permet pas pour cela de l’être un peu ; il veut dire seulement que puisque la vie de l’homme ne peut être sans défaut et sans péché, il faut au moins éviter les grands désordres, les chutes trop fréquentes, les mauvaises habitudes. ― Qui n’est pas le tien ; prématuré, avant ton temps.

7.19 De celui-là ; c’est-à-dire de l’impie, nommé au verset 16. ― Ne néglige rien ; aucune occasion de faire le bien.

7.21 Voir 3 Rois, 8, 46 ; 2 Paralipomènes, 6, 36 ; Proverbes, 20, 9 ; 1 Jean, 1, 8.

7.30 Qui est tel que le sage ? qui est semblable au sage ? ― Qui connaît, etc. ; qui est assez éclairé pour comprendre ce qui vient d’être dit, et pouvoir donner la solution complète des grandes questions relatives à la condition présente des hommes, au penchant qui les entraîne au mal, à leur aveuglement et à leur état de misère ? ― Dans le texte hébreu, les mots : Qui est… parole, forment el commencement du chapitre 8, et le sens de ce texte paraît être : Qui sait l’explication des choses ? D’autant que l’hébreu dâbâr signifie chose aussi bien que parole (la Vulgate elle-même l’a rendu, voir Ecclésiaste, 8, 3, par opus), et qu’il s’emploie souvent pour le pluriel.

8.1 Voir Ecclésiaste, 2, 14. ― La sagesse luit, se fait remarquer sur le visage du sage, et le Tout-Puissant change son visage, selon les circonstances ; par exemple, il lui donnera un air triste ou joyeux, selon que le sage se trouvera avec des gens qui seront dans la tristesse ou dans la joie.

8.2 La bouche ; c’est-à-dire ce qui sort de la bouche, les paroles, les ordres. On a déjà remarqué que cette sorte de métonymie était très usitée dans la Bible. ― Les préceptes, etc., pour les préceptes que Dieu a donnés avec serment.

8.10 Comme si leurs œuvres eussent été justes ; littéralement comme de justes œuvres (quasi justorum operum) ; ce génitif est gouverné par le mot hommes (viri) sous-entendu.

8.15 Le but de l’auteur dans ce verset n’est nullement de recommander une vie molle et voluptueuse. Voir Ecclésiaste, 2, 24.

8.16 La 4e et dernière section du livre de l’Ecclésiaste commence ici au verset et elle s’étend jusqu’au chapitre 12, verset 7. Elle donne le résumé des recherches et des expériences des trois sections précédentes et la conclusion finale. Il est impossible à la sagesse humaine d’approfondir l’œuvre de Dieu, voir Ecclésiaste, 8, 16-17 ; les bons, comme les méchants, sont soumis à la Providence dont la volonté est inscrutable, voir Ecclésiaste, 9, 1-2 ; ils doivent mourir et être oubliés, voir Ecclésiaste, 9, 3-6 ; nous devons donc jouir de la vie en attendant la mort, voir Ecclésiaste, 9, 7-10 ; le succès ne récompense pas toujours les efforts de l’habile et du sage, voir Ecclésiaste, 9, 11-12 ; la sagesse, quoique avantageuse en bien des cas, est souvent un objet de mépris pour la folie, voir Ecclésiaste, du chapitre 9, verset 13 au chapitre 10, verset 3. Nous devons être patients et obéir à ceux qui gouvernent, même quand ils sont injustes, parce que la résistance ne ferait qu’accroître nos maux, voir Ecclésiaste, 10, 4-11 ; la prudence dans les choses de la vie vaut mieux que la folie, voir Ecclésiaste, 10, 12-26. Il faut être charitable, dussions-nous faire des ingrats, car ceux à qui nous faisons du bien peuvent après tout nous en être reconnaissants, voir Ecclésiaste, 11, 1-2. Nous devons toujours travailler, puisque nous ignorons lesquels de nos efforts seront couronnés de succès, et rendre par ce travail la vie agréable, voir Ecclésiaste, 11, 3-8. Néanmoins, comme tout cela ne satisfait point l’âme, l’Ecclésiaste conclut en définitive que la pensée du jugement dernier doit être la règne de notre vie, voir Ecclésiaste, 11, 9-10, et que nous devons vivre depuis notre jeunesse jusqu’à la vieillesse dans la crainte de Dieu et du jugement final, dans lequel tout sera expliqué, voir Ecclésiaste, 12, 1-7.

9.1 Afin de tâcher de les comprendre ; littéralement afin de les comprendre avec soin, avec empressement de savoir (curiose).

9.5 Ils n’ont plus de récompense ; c’est-à-dire ils n’ont plus aucun moyen de mériter la récompense qui leur était promise, et qu’ils ont négligée.

9.7 Va donc, etc. Voir, pour le vrai sens de ces paroles, Ecclésiaste, 2, 24.

10.1 Les mouches qui meurent dans un parfum en font perdre la bonne odeur. ― Une folie, etc. Il y a une certaine folie qui l’emporte sur la sagesse et la gloire. Pour être véritablement sage, il faut devenir insensé aux yeux du monde. Or, cette folie, suivant saint Paul, vaut mieux que toute la prétendue sagesse humaine, qui, en effet, selon le même apôtre, n’est que folie devant Dieu. Voir 1 Corinthiens, 1, 25 ; 3, 18.

10.4 Si l’esprit, etc. Le sens le plus naturel de ce verset est : Si un grand, un homme puissant est irrité contre toi, ne quitte pas ta place ; c’est-à-dire ne te décourage pas, mais sois modéré et doux ; car, par ce moyen, tu éviteras et tu feras éviter les plus grandes fautes. Remarquons que le terme hébreu rendu dans la Vulgate par remède (curatio) signifie aussi modération, douceur, soit dans les paroles, soit dans la manière d’agir ; signification qui convient parfaitement dans ce passage.

10.5 Sortant, etc. ; c’est-à-dire qu’on ne peut considérer que comme une faute d’ignorance du prince, comme un manque de sagesse ou d’attention de sa part.

10.8 Voir Proverbes, 26, 27 ; Ecclésiastique, 27, 29.

10.11 N’a rien de moins, etc. ; le médisant ne diffère en rien du serpent ; il n’est pas moins dangereux.

10.15 Le travail, etc. L’insensé est si paresseux, que tout travail le lasse et l’accable ; il est en même temps si ignorant et si stupide, qu’il ignore jusqu’au chemin de la ville.

11.1 Répands ton pain, etc. Le vrai sens de ce verset paraît être : Jette ton pain dans l’eau qui passe, comme si tu n’espérais pas de le revoir ; c’est-à-dire fais du bien même aux ingrats ou aux malheureux, de qui tu n’as rien à attendre, parce que, plus tard, tu en recevras la récompense. Cette interprétation semble être autorisée par un passage de l’Evangile de saint Luc (14, 12-14).

11.3 Il y sera ; c’est-à-dire il y restera.

11.9 Qu’heureux soit ; littéralement et par hébraïsme, dans le bien, le bonheur soit.

11.10 Ta chair ; hébraïsme, pour ton corps, ta personne, toi.

12.1 Avant que vienne, etc. Cette phrase et les suivantes, jusqu’à la fin du verset 4, sont sous la dépendance de la proposition Souviens-toi de ton Créateur, dont elles forment l’apodose. ― Le temps de l’affliction ; c’est-à-dire de la vieillesse.

12.2 Le soleil, la lumière et les étoiles ; c’est-à-dire l’entendement, la mémoire, le raisonnement (volonté ?) ; en un mot, les différentes facultés de l’esprit humain. ― Avant que les nuées, etc. ; ces paroles marquent une suite de maux qui se succèdent les uns aux autres.

12.3 Les gardes de la maison, etc. Le corps de l’homme est comparé ici à une maison, de même que dans Job, 4, 19, et dans saint Paul (voir 2 Corinthiens, 5, 1). Or, les gardes sont les bras et les mains. ― Celles qui, etc. ; signifient les dents qui, chez les vieillards, sont ordinairement en petit nombre, et ne peuvent plus mâcher, ni mordre les aliments, et sont, par conséquent, oisives. ― Ceux qui regardaient ; c’est-à-dire les yeux. L’hébreu et les Septante portent celles qui regardaient : ce qui se conçoit d’autant plus aisément que, dans la langue hébraïque, le mot yeux est au féminin. ― Par les trous ; par les orbites, les cavités du crâne où les yeux sont placés.

12.4 Et qu’on fermera, etc. Ces portes sont apparemment les lèvres que les vieillards ferment en mangeant, étant obligés de serrer leurs mâchoires et leurs gencives, pour mâcher avec elles, défaut de leurs dents. ― La rue ou la place publique (platea) désigne vraisemblablement ici le creux de la bouche. ― A la faible voix ; littéralement et par hébraïsme, à la faiblesse de la voix. ― Celle qui moud, peut s’entendre de la bouche elle-même, ou d’une des dents molaires. Comparer au verset précédent. ― Qu’on se lèvera, etc. Le sommeil des vieillards est court et souvent interrompu ; le moindre chant d’un petit oiseau les réveille. ― Les filles du chant, sont proprement les organes de la voix, tels que les poumons, l’épiglotte, les dents les lèvres, etc., comme aussi les oreilles, qui, dans la vieillesse, n’entendent plus et, par conséquent, sont entièrement insensibles à toute espèce de chant et d’harmonie. L’Ecriture nous en offre un exemple dans la personne du vieillard octogénaire Berzellaï (voir 2 Rois, 19, 35). Nous ferons observer, à cette occasion, qu’en hébreu l’expression fils ou fille d’une chose se donne à tout ce qui dépend de cette chose, à tout ce qui lui appartient, à tout ce qui a un rapport avec elle. ― L’image tirée de la faible voix de celle qui moud est très naturelle en Palestine. Le bruit de la meule qui écrase le pain caractérise les lieux habités en Orient, comme le bruit des voitures caractérise les grandes villes de l’Occident. On l’entend encore aujourd’hui quand on passe dans les rues des villes et des villages et près des campements arabes. ― Les figures et les métaphores employées dans cette description de la vieillesse peuvent nous paraître bien recherchées, mais sont tout à fait dans le goût des Orientaux. A la fin d’un manuscrit syriaque de la Sainte Ecriture, le copiste a écrit cette prière : « Daigne, Seigneur, ne pas nous priver de la récompense des cinq sœurs jumelles qui se sont fatiguées à travailler, et des (deux oublié ?) autres sœurs qui leur ont prêté le secours du regard pour semer, avec la vertu de l’Esprit-Saint et les ailes d’un oiseau, leur semence dans un champ paisible. » Les cinq sœurs jumelles sont les cinq doigts de la main qui a écrit ; les deux autres sœurs jumelles sont les deux yeux ont lu le manuscrit copié ; les ailes de l’oiseau ont fourni leurs plumes pour écrire, le champ est le papier ou le parchemin et la semence, ce sont les pensées.

12.5 On craindra aussi, etc. Les vieillards craindront de monter, parce que leurs jambes ne seront plus flexibles, ni leur poitrine et leur respiration libres et dégagées ; et dans le chemin même, ils marcheront avec peine, et toujours dans l’appréhension de trébucher, de rencontrer un sentier raboteux et inégal. ― L’amandier fleurira ; c’est-à-dire que les cheveux des vieillards paraîtront comme la fleur de l’amandier, qui fleurit blanc. ― La sauterelle engraissera ; c’est-à-dire, comme porte l’hébreu, deviendra lourde et pesante ; en sorte qu’elle ne pourra plus ni voler, ni sauter ; autre image de l’homme parvenu à la vieillesse. ― Le câprier se dissipera. Cet arbrisseau, s’entrouvrant, produit une fleur blanche qui tombe bientôt, et qui découvre une espèce de gland oblong. Or, cette fleur représente assez naturellement les cheveux blancs qui tombent de la tête des vieillards, et qui la leur laissent toute pelée et toute chauve. ― La maison de son éternité ; c’est-à-dire le tombeau, où il demeurera jusqu’à la fin du monde.

12.6 Souviens-toi de ton Créateur. Ces mots du 1er verset sont évidemment sous-entendus ; sans eux, le sens des versets 6 et 7 resterait suspendu et serait incomplet. ― Le cordon d’argent et la bandelette d’or figurent probablement les liens qui attachent à la vie. ― La cruche qui se brise sur la fontaine peut signifier le cœur qui se brise à la source de la vie, et la roue qui se rompt sur la citerne, les poumons qui n’aspirent plus l’air.

12.7 Ce verset suffit pour venger l’auteur de l’Ecclésiaste du reproche de matérialisme ; il est impossible de s’exprimer d’une manière plus claire sur le dogme de la survivance de l’âme au corps.

12.8 L’épilogue, chapitre 12, versets 8 à 14, contient la solution du problème énoncé dans le prologue. Tous les efforts de l’homme pour obtenir la félicité complète sur la terre sont vains, voir Ecclésiaste, 12, 8 ; l’expérience de Salomon, le plus sage des hommes, qui a essayé de tout, en est la preuve, voir Ecclésiaste, 12, 9-10. Les livres sacrés, qui nous apprennent la vraie sagesse, conduisent à la vraie félicité, voir Ecclésiaste, 12, 11-12 ; ils nous apprennent qu’il y a un juge équitable qui, au grand jour du jugement, nous rendra selon nos œuvres. La règle de la vie, c’est donc de le craindre et de garder ses commandements, c’est-à-dire de pratiquer fidèlement la religion, voir Ecclésiaste, 12, 13-14. C’est par conséquent Dieu, la pensée de Dieu, qui résout le problème de la destinée de l’âme que s’est posé l’Ecclésiaste. Si Dieu n’intervient pas personnellement dans ce livre, comme dans celui de Job, avec lequel il a tant de ressemblance par le sujet, c’est lui du moins qui donne la solution comme dans Job. Dieu est toujours présent à Salomon ; il ne nomme pas moins de 37 fois dans douze chapitres ; c’est bien le crains Dieu qui est le devoir de l’homme, voir Ecclésiaste, 5, 6 ; 12, 13, d’où dépend sa félicité, voir Ecclésiaste, 8, 12, et son sort définitif, voir Ecclésiaste, 7, 18 (Vulgate, 7, 19) ; 11, 9 ; 12, 14. Telle est la pensée dominante de l’Ecclésiaste et l’explication du livre.

JesusMarie.comBible Vigouroux