La Fraternité saint Pie X est désignée par la pape
Benoit XVI comme
un groupe ecclésial impliqué
dans un processus de séparation
elle n'a pas de position canonique dans l’Église
Le fait que la Fraternité Saint-Pie X n’ait pas de position
canonique dans l’Église, ne se base pas en fin de comptes sur des
raisons disciplinaires mais doctrinales.
Les prêtres de la Fraternité saint Pie X n'exercent pas de ministères légitimes dans l'Eglise
Devons-nous impassiblement [...] laisser [la FSPX] aller à la dérive loin de l’Église ?
Divers reproches de Benoit XVI à la FSPX :
On ne peut geler l’autorité magistérielle
de l’Église à l’année 1962
Début du texte de la lettre Lettre de sa Sainteté Benoint
XVI aux évêques de l'Eglise Catholique au sujet de la levée
de l’excommunication des quatre Évêques consacrés par
Mgr Lefebvre :
[les sous-titres de couleur bleu sont des ajouts JesusMarie.com]
Chers Confrères dans le ministère épiscopal,
La levée de l’excommunication des quatre Évêques, consacrés en 1988 par Mgr Lefebvre sans mandat du Saint-Siège, a suscité, pour de multiples raisons, au sein et en dehors de l’Église catholique une discussion d’une véhémence telle qu’on n’en avait plus connue depuis très longtemps.
Cet événement, survenu à l’improviste et difficile à situer positivement dans les questions et dans les tâches de l’Église d’aujourd’hui, a laissé perplexes de nombreux Évêques. Même si beaucoup d’Évêques et de fidèles étaient disposés, à priori, à considérer positivement la disposition du Pape à la réconciliation, néanmoins la question de l’opportunité d’un tel geste face aux vraies urgences d’une vie de foi à notre époque s’y opposait.
Inversement, certains groupes accusaient ouvertement le Pape de vouloir revenir en arrière, au temps d’avant le Concile : d’où le déchaînement d’un flot de protestations, dont l’amertume révélait des blessures remontant au-delà de l’instant présent.
C’est pourquoi je suis amené, chers Confrères, à
vous fournir quelques éclaircissements, qui doivent aider à
comprendre les intentions qui m’ont guidé moi-même
ainsi que les organes compétents du Saint-Siège à
faire ce pas. J’espère contribuer ainsi à la paix dans l’Église.
La réconciliation entre juifs et chrétiens
Le fait que le cas Williamson se soit superposé à la
levée de l’excommunication a été pour moi un incident
fâcheux imprévisible. Le geste discret de miséricorde
envers quatre Évêques, ordonnés validement mais
non légitimement [note de JM.com : cette formulation passe
sous silence le fait que les sacres furent réalisés en bafouant
de manière nomminative 4 interdictions pour chacun des quatres candidats],
est apparu tout à coup comme totalement différent : comme
le démenti de la réconciliation entre chrétiens et
juifs, et donc comme la révocation de ce que le Concile avait clarifié
en cette matière pour le cheminement de l’Église.
Une invitation à la réconciliation avec un groupe ecclésial impliqué dans un processus de séparation se transforma ainsi en son contraire : un apparent retour en arrière par rapport à tous les pas de réconciliation entre chrétiens et juifs faits à partir du Concile – pas dont le partage et la promotion avaient été dès le début un objectif de mon travail théologique personnel.
Que cette superposition de deux processus opposés soit advenue
et qu’elle ait troublé un moment la paix entre chrétiens
et juifs ainsi que la paix à l’intérieur de l’Église,
est une chose que je ne peux que déplorer profondément. Il
m’a été dit que suivre avec attention les informations auxquelles
on peut accéder par internet aurait permis d’avoir rapidement connaissance
du problème. J’en tire la leçon qu’à l’avenir au Saint-Siège
nous devrons prêter davantage attention à cette source d’informations.
Soutien par les juifs - haine par certains
catholiques.
J’ai été peiné du fait que même des catholiques,
qui au fond auraient pu mieux savoir ce qu’il en était, aient pensé
devoir m’offenser avec une hostilité prête à se manifester.
C’est justement pour cela que je remercie d’autant plus les amis juifs
qui ont aidé à dissiper rapidement le malentendu et à
rétablir l’atmosphère d’amitié et de confiance, qui
– comme du temps du Pape Jean-Paul II – comme aussi durant toute la période
de mon pontificat a existé et, grâce à Dieu, continue
à exister.
Une autre erreur, qui m’attriste sincèrement, réside dans le fait que la portée et les limites de la mesure du 21 janvier 2009 n’ont pas été commentées de façon suffisamment claire au moment de sa publication. L’excommunication touche des personnes, non des institutions. Une ordination épiscopale sans le mandat pontifical signifie le danger d’un schisme, parce qu’elle remet en question l’unité du collège épiscopal avec le Pape. C’est pourquoi l’Église doit réagir par la punition la plus dure, l’excommunication, dans le but d’appeler les personnes punies de cette façon au repentir et au retour à l’unité.
Vingt ans après les ordinations, cet objectif n’a malheureusement pas encore été atteint. La levée de l’excommunication vise le même but auquel sert la punition : inviter encore une fois les quatre Évêques au retour. Ce geste était possible une fois que les intéressés avaient exprimé leur reconnaissance de principe du Pape et de son autorité de Pasteur, bien qu’avec des réserves en matière d’obéissance à son autorité doctrinale et à celle du Concile.
Je reviens par là à la distinction entre personne et institution. La levée de l’excommunication était une mesure dans le domaine de la discipline ecclésiastique : les personnes étaient libérées du poids de conscience que constitue la punition ecclésiastique la plus grave. Il faut distinguer ce niveau disciplinaire du domaine doctrinal.
la Fraternité Saint-Pie X n'a pas de
position canonique dans l’Église Catholique
Le fait que la Fraternité Saint-Pie
X n’ait pas de position canonique dans l’Église, ne se base pas
en fin de comptes sur des raisons disciplinaires mais doctrinales.
Tant que la Fraternité n’a pas une position canonique dans l’Église, ses
ministres non plus n’exercent pas de ministères légitimes
dans l’Église.
Les prêtres de la FSPX n’exercent de
façon légitime aucun ministère dans l’Église.
Il faut ensuite distinguer entre le niveau disciplinaire, qui concerne
les personnes en tant que telles, et le niveau doctrinal où sont
en question le ministère et l’institution. Pour le préciser
encore une fois : tant que les questions concernant la doctrine ne sont
pas éclaircies, la Fraternité n’a aucun statut canonique
dans l’Église, et ses ministres – même s’ils ont été
libérés de la punition ecclésiastique – n’exercent
de façon légitime aucun ministère dans l’Église.
Rattacher la Commission Ecclesia Dei
à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi
À la lumière de cette situation, j’ai l’intention de
rattacher à l’avenir la Commission pontificale " Ecclesia Dei "
– institution compétente, depuis 1988, pour les communautés
et les personnes qui, provenant de la Fraternité Saint-Pie X ou
de regroupements semblables, veulent revenir à la pleine communion
avec le Pape – à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
Il devient clair ainsi que les problèmes qui doivent être traités à présent sont de nature essentiellement doctrinale et regardent surtout l’acceptation du Concile Vatican II et du magistère post-conciliaire des Papes. Les organismes collégiaux avec lesquels la Congrégation étudie les questions qui se présentent (spécialement la réunion habituelle des Cardinaux le mercredi et l’Assemblé plénière annuelle ou biennale) garantissent l’engagement des Préfets des diverses Congrégations romaines et des représentants de l’Épiscopat mondial dans les décisions à prendre.
On ne peut geler l’autorité magistérielle de l’Église
à l’année 1962 – ceci doit être bien clair pour
la Fraternité. Cependant, à certains de ceux qui se proclament
comme de grands défenseurs du Concile, il doit aussi être
rappelé que Vatican II renferme l’entière histoire doctrinale
de l’Église. Celui qui veut obéir au Concile, doit accepter
la foi professée au cours des siècles et il ne peut couper
les racines dont l’arbre vit.
J’espère, chers Confrères, qu’ainsi a été éclaircie la signification positive ainsi que les limites de la mesure du 21 janvier 2009.
Cependant demeure à présent la question : cette mesure
était-elle nécessaire ?
Constituait-elle vraiment une priorité ?
N’y a-t-il pas des choses beaucoup plus importantes ?
Il y a certainement des choses plus importantes et plus urgentes.
Je pense avoir souligné les priorités de mon Pontificat
dans les discours que j’ai prononcés à son début.
Ce que j’ai dit alors demeure de façon inaltérée ma
ligne directive. La première priorité pour le Successeur
de Pierre a été fixée sans équivoque par le
Seigneur au Cénacle : « Toi… affermis tes frères »
(Lc 22, 32). Pierre lui-même a formulé de façon nouvelle
cette priorité dans sa première Lettre : « Vous devez
toujours être prêts à vous expliquer devant tous ceux
qui vous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en vous
» (I P 3, 15).
À notre époque où dans de vastes régions de la terre la foi risque de s’éteindre comme une flamme qui ne trouve plus à s’alimenter, la priorité qui prédomine est de rendre Dieu présent dans ce monde et d’ouvrir aux hommes l’accès à Dieu. Non pas à un dieu quelconque, mais à ce Dieu qui a parlé sur le Sinaï ; à ce Dieu dont nous reconnaissons le visage dans l’amour poussé jusqu’au bout (cf. Jn 13, 1) – en Jésus Christ crucifié et ressuscité.
En ce moment de notre histoire, le vrai problème est que Dieu
disparaît de l’horizon des hommes et que tandis que s’éteint
la lumière provenant de Dieu, l’humanité manque d’orientation,
et les effets destructeurs s’en manifestent toujours plus en son sein.
Benoit XVI rattache son action envers la FSPX
à la démarche oecuménique
Conduire les hommes vers Dieu, vers le Dieu qui parle dans la Bible
: c’est la priorité suprême et fondamentale de l’Église
et du Successeur de Pierre aujourd’hui. D’où découle,
comme conséquence logique, que nous devons avoir à cœur l’unité
des croyants. En effet, leur discorde, leur opposition interne met en doute
la crédibilité de ce qu’ils disent de Dieu. C’est pourquoi
l’effort en vue du témoignage commun de foi des chrétiens
– par l’œcuménisme – est inclus dans la priorité suprême.
À cela s’ajoute la nécessité que tous ceux qui croient
en Dieu recherchent ensemble la paix, tentent de se rapprocher les uns
des autres, pour aller ensemble, même si leurs images de Dieu sont
diverses, vers la source de la Lumière – c’est là le dialogue
interreligieux.
Qui annonce Dieu comme Amour "jusqu’au bout" doit donner le témoignage de l’amour : se consacrer avec amour à ceux qui souffrent, repousser la haine et l’inimitié – c’est la dimension sociale de la foi chrétienne, dont j’ai parlé dans l’encyclique Deus caritas est.
Si donc l’engagement ardu pour la foi, pour l’espérance et pour l’amour dans le monde constitue en ce moment (et, dans des formes diverses, toujours) la vraie priorité pour l’Église, alors les réconciliations petites et grandes en font aussi partie.
Que l’humble geste d’une main tendue soit à l’origine d’un grand tapage, devenant ainsi le contraire d’une réconciliation, est un fait dont nous devons prendre acte.
Mais maintenant je demande : Était-il et est-il vraiment erroné
d’aller dans ce cas aussi à la rencontre du frère qui "a
quelque chose contre toi" (cf. Mt 5, 23 s.) et de chercher la réconciliation
? La société civile aussi ne doit-elle pas tenter de prévenir
les radicalisations et de réintégrer – autant que possible
– leurs éventuels adhérents dans les grandes forces qui façonnent
la vie sociale, pour en éviter la ségrégation avec
toutes ses conséquences ? Le fait de s’engager à réduire
les durcissements et les rétrécissements, pour donner ainsi
une place à ce qu’il y a de positif et de récupérable
pour l’ensemble, peut-il être totalement erroné ?
Moi-même j’ai vu, dans les années
qui ont suivi 1988, que, grâce au retour de communautés auparavant
séparées de Rome, leur climat interne a changé
; que le retour dans la grande et vaste Église commune a fait dépasser
des positions unilatérales et a atténué des durcissements
de sorte qu’ensuite en ont émergé des forces positives pour
l’ensemble.
Une communauté dans laquelle se trouvent 491 prêtres,
215 séminaristes, 6 séminaires, 88 écoles, 2 instituts
universitaires, 117 frères, 164 sœurs et des milliers de fidèles
peut-elle nous laisser totalement indifférents ? Devons-nous
impassiblement les laisser aller à la dérive loin de l’Église
?
Je pense par exemple aux 491 prêtres. Nous ne pouvons pas connaître l’enchevêtrement de leurs motivations. Je pense toutefois qu’ils ne se seraient pas décidés pour le sacerdoce si, à côté de différents éléments déformés et malades, il n’y avait pas eu l’amour pour le Christ et la volonté de L’annoncer et avec lui le Dieu vivant. Pouvons-nous simplement les exclure, comme représentants d’un groupe marginal radical, de la recherche de la réconciliation et de l’unité ? Qu’en sera-t-il ensuite ?
Benoit XVI veut dépasser les agressions
provenant de la FSPX
Certainement, depuis longtemps, et puis à
nouveau en cette occasion concrète, nous avons entendu de la part
de représentants de cette communauté beaucoup de choses
discordantes – suffisance et présomption, fixation sur des unilatéralismes
etc. Par amour de la vérité je dois ajouter que j’ai
reçu aussi une série de témoignages émouvants
de gratitude, dans lesquels était perceptible une ouverture des
cœurs. Mais la grande Église ne devrait-elle pas se permettre d’être
aussi généreuse, consciente de la grande envergure qu’elle
possède ; consciente de la promesse qui lui a été
faite ? Ne devrions-nous pas, comme de bons éducateurs, être
aussi capables de ne pas prêter attention à différentes
choses qui ne sont pas bonnes et nous préoccuper de sortir des étroitesses
? Et ne devrions-nous pas admettre que dans le milieu ecclésial
aussi sont ressorties quelques discordances ?
Refus que la FSPX soit un bouc émissaire
Parfois on a l’impression que notre société a besoin
d’un groupe au moins, auquel ne réserver aucune tolérance
; contre lequel pouvoir tranquillement se lancer avec haine. Et si quelqu’un
ose s’en rapprocher – dans le cas présent le Pape – il perd lui
aussi le droit à la tolérance et peut lui aussi être
traité avec haine sans crainte ni réserve.
Chers Confrères, durant les jours où il m’est venu à
l’esprit d’écrire cette lettre, par hasard, au Séminaire
romain, j’ai dû interpréter et commenter le passage de Ga
5, 13-15. J’ai noté avec surprise la rapidité avec laquelle
ces phrases nous parlent du moment présent : "Que cette liberté
ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme
; au contraire mettez-vous, par amour, au service les uns des autres. Car
toute la Loi atteint sa perfection dans un seul commandement, et le voici
: Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Si vous vous mordez et
vous dévorez les uns les autres, prenez garde : vous allez vous
détruire les uns les autres !" J’ai toujours été
porté à considérer cette phrase comme une des exagérations
rhétoriques qui parfois se trouvent chez saint Paul. Sous certains
aspects, il peut en être ainsi. Mais malheureusement ce "mordre
et dévorer" existe aussi aujourd’hui dans l’Église comme
expression d’une liberté mal interprétée. Est-ce une
surprise que nous aussi nous ne soyons pas meilleurs que les Galates ?
Que tout au moins nous soyons menacés par les mêmes tentations
? Que nous devions toujours apprendre de nouveau le juste usage de la liberté
? Et que toujours de nouveau nous devions apprendre la priorité
suprême : l’amour ?
Le jour où j’en ai parlé au grand Séminaire, à
Rome, on célébrait la fête de la Vierge de la Confiance.
De fait : Marie nous enseigne la confiance. Elle nous conduit à
son Fils, auquel nous pouvons tous nous fier. Il nous guidera – même
en des temps agités.
Je voudrais ainsi remercier de tout cœur tous ces nombreux Évêques, qui en cette période m’ont donné des signes émouvants de confiance et d’affection et surtout m’ont assuré de leur prière.
Ce remerciement vaut aussi pour tous les fidèles qui ces jours-ci m’ont donné un témoignage de leur fidélité immuable envers le Successeur de saint Pierre.
Que le Seigneur nous protège tous et nous conduise sur le chemin
de la paix ! C’est un souhait qui jaillit spontanément du cœur en
ce début du Carême, qui est un temps liturgique particulièrement
favorable à la purification intérieure et qui nous invite
tous à regarder avec une espérance renouvelée vers
l’objectif lumineux de Pâques.
Avec une particulière Bénédiction Apostolique,
je me redis
Vôtre dans le Seigneur
BENEDICTUS PP. XVI
Du Vatican, le 10 mars 2009.
source : vatican.va