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17 août 2009, publication de
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L’équité la plus élémentaire
exige que l’on fasse toujours la distinction entre les erreurs et ceux
qui les commettent, même s’il s’agit d’hommes retenus
dans les filets d’erreurs portant sur la vérité ou
sur une connaissance inadéquate des choses qui se rapportent
au culte ou à ce qu’il y a de meilleur dans la morale.
Car l’homme tombé dans l’erreur ne cesse pas d’être
guidé par sa nature humaine, et ne perd jamais la dignité
de sa personne, dignité dont il faut toujours tenir compte.
(page 7)
De plus, que l’on observe
attentivement que le texte approuvé affirme un droit dont
l’objet est l’immunité contre toute coercition, et non
le contenu d’une religion quelconque. Une immunité de cette
sorte est exigée par la dignité elle-même de
la personne humaine. A aucun endroit n’est-il affirmé
ou enseigné (ce qui est l’évidence même)
qu’il est reconnu un droit à la diffusion de l’erreur.
Mais s’il arrive que des gens fassent la diffusion de l’erreur,
cela ne constituera pas une mise en application du droit, mais
un abus. Cet abus peut et doit être empêché
si l’ordre public en est gravement troublé, comme le texte
l’affirme et l’explique en plusieurs endroits. (page 9)
On ne se demande pas
dans la question si la conscience vraie possède
un droit d’agir que ne possèderait pas la conscience erronée.
La question porte sur un droit de l’homme pris dans le
sens d’un droit qui affirme l’immunité contre
toute forme de coercition. Pour parler plus précisément,
la question est la suivante : est-ce qu’ un droit est
donné à autrui, et notamment au pouvoir public,
d’empêcher quelqu’un d’agir publiquement contre sa conscience
? Car, à dire vrai, le fait que la conscience
d’un agent soit erronée n’entraîne pas chez autrui
le droit d’empêcher son action. Dans la question
qui nous concerne, c’est en vain qu’on a recours
au principe énonçant que les droits fondés
sur la vérité ont des fondements différents
de ceux fondés sur l’erreur. Ce qui est tout à
fait juste si l’on veut dire que l’erreur ne peut pas être
le fondement d’une loi, mais la vérité seule.
Il faut de nouveau se rappeler que la question de droit dont
nous traitons est l’immunité contre la coercition. Il
est bien entendu que bénéficie de cette immunité
l’homme dont la conscience est vraie. En jouit
également l’homme à la conscience erronée, jusqu’à
ce qu’on fasse la démonstration qu’une personne, notamment
les détenteurs du pouvoir public, possède éventuellement
le droit d’empêcher un acte public quelconque de
religion. (page 10)
Il convient de noter
que le schéma sur la déclaration n’affirme pas
être donné un droit à répandre les erreurs
religieuses dans la société. Car,
prise en elle-même et surtout dans l’état de la question
présente, une affirmation de cette sorte est vide de tout
sens. On poserait la question avec beaucoup plus de justesse
en procédant ainsi : est-ce que le pouvoir public possède
un droit ---et de quelle nature est-il-- d’exercer de
la coercition envers un homme qui professe publiquement ses convictions
religieuses ? (11)
Que l’on se souvienne
que le texte du schéma ne reconnaît pas le droit d’enseigner
en public des choses fausses, mais affirme le droit à
l’immunité contre la coercition. (11)
Bien que la déclaration
n’entende pas énoncer des applications particulières
des principes, surtout si elles impliquent des questions complexes.
(page 13).
On lit : fondés
sur l’ordre moral objectif. C’est une addition d’un grand poids.
Elle a été introduite conformément à
la pensée des Pères qui demandent
que pour déterminer en quoi consiste l’ordre public, on ne
doit pas seulement tenir compte des situations historiques,
mais de ce que requiert l’ordre moral objectif (page
13)
Leon X111 a déjà
entamé le début de l’évolution doctrinale
en distinguant très clairement entre l’Eglise qui est le peuple
de Dieu et la société civile qui est le peuple
temporel et terrestre. (Dans Immortale Dei, il a au moins six
fois développé la même doctrine). Il a ainsi
ouvert la voie à la nouvelle affirmation de l’autonomie
légitime et licite qui revient à l’autorité
civile et au pouvoir judiciaire. Il s’en est suivi
qu’un pas plus avant a pu être franchi, celui de porter un
nouveau jugement sur ce qu’on appelle les libertés modernes.
Ces libertés peuvent être tolérées . (Immortale
Dei, Libertas prestantissimum). Pour dire la vérité,
on se contentait alors de dire qu’on pouvait les tolérer.
La raison en était évidente. Car les gouvernements
européens de l’époque qui proclamaient les libertés
modernes --la liberté religieuse incluse- tiraient
très consciemment leur inspiration du laïcisme.
Il existait donc le danger --pressenti par Léon X111--- que
de telles institutions républicaines, pétries de laïcité,
ne conduisent à des abus qui ne pouvaient ne pas être
nocifs à la dignité de la personne humaine et
à son authentique liberté. La sauvegarde la personne
humain tenait particulièrement à cœur à Léon
X111 comme elle a toujours d’ailleurs tenu à cœur
à l’Eglise. (page 15)
C’est ici surtout qu’il faut
se rappeler la doctrine de Pie X11 sur les limites qui s’imposent
aux gouvernements civils, touchant la répression des erreurs
par la dite société. « Peut-il arriver
que dans des circonstances particulières, Dieu ne donne
aux hommes aucun mandat, n’impose aucun devoir, ne donne en
somme à personne le droit d’empêcher ou de réprimer
ce qui est erroné ou faux ? Un simple coup d’œil à
ce qui se passe donne une réponse affirmative à la
question ». Ensuite, après avoir donné
en exemple la divine Providence, il poursuit : « De plus,
l’affirmation : les déviations religieuses et morales doivent
toujours être empêchées, autant que faire se peut,
parce qu’il est en soi immoral de les tolérer,
cette affirmation, dis-je, ne peut pas avoir une valeur absolue
et inconditionnelle. D’autre part, Dieu n’a pas même
donné à l’autorité humaine un précepte
absolu et universel de ce genre, ni dans le champ de la foi
ni dans celui de la morale. Ne connaissent un tel précepte
ni les convictions qui sont communes à tous les hommes, ni
la conscience chrétienne, ni les sources de la révélation,
ni la pratique de l’Eglise . » Cette déclaration
(la règle du progrès) est d’une importance majeure
pour notre sujet présent, surtout si on a toujours sous
les yeux ce qui a été dit autrefois sur
la mission de l’état. » (page 16)
Allocution de Pie X11
aux prélats auditeurs et aux autres administrateurs
du tribunal de la rote romaine : « Les contacts toujours plus fréquents
et le rapprochement des diverses confessions religieuses à
l’intérieur des limites d’un même peuple ont amené
les juges civils à suivre le principe de la tolérance
et de la liberté de conscience. En conséquence,
il existe une tolérance politique, civile et sociale
envers les adeptes des autres confessions religieuses qui,
dans les circonstances, est aussi pour les catholiques un devoir
moral ». De plus, ce qui se rapporte à la
communauté internationale : « Les intérêts religieux
et moraux exigeront pour toute l’étendue de la communauté
des peuples un règlement bien défini, valant
pour tout le territoire des états singuliers, membres
souverains d’une telle communauté des nations.
Selon les probabilités et les circonstances, il est
prévisible qu’un tel code de droit positif soit
énoncé ainsi : A l’intérieur de son territoire
et pour tous ses citoyens, chaque état régulera
les affaires religieuses et morales avec une loi qui lui sera propre.
Néanmoins, dans tout le territoire de la communauté
des états, sera permis aux citoyens de chaque
état membre la profession de leur propres fois, ainsi que
les pratiques éthiques et religieuses dans la mesure où
ces choses ne contreviennent pas aux lois pénales de l’état
où ils séjournent ». Selon le Pontife
Romain, les citoyens catholiques et les dirigeants d’un état
catholique peuvent en conscience consentir à ce genre de loi.
(pages l7 et 18).
Il y en a qui nourrissent des doutes sur la valeur de la formule liberté religieuse, et croient que nous ne devrions parler que de tolérance religieuse. Ne faut-il pas constater que la liberté religieuse est un terme qui a conquis une signification moderne précise dans le vocabulaire contemporain ? Dans ce concile pastoral, l’Eglise entend dire ce qu’elle pense de cette chose que les communions ecclésiales, les gouvernements, les institutions, les médias, les juristes contemporains désignent par ce mot. Si notre discours d’adresse à la société moderne, nous devons parler son langage. Nous considérons donc la liberté religieuse comme une notion strictement juridique, qui énonce un droit qui est fondé dans la nature humaine, droit que tous doivent observer, et qui doit être ainsi reconnu comme une loi fondamentale (constitutions des états avec garanties juridiques), afin qu’elle devienne le droit civil commun. Sa reconnaissance, sa promotion et sa protection doivent être défendues par la société en général et par les gouvernements en particulier. (pages 18-19)
« Le Concile, en aucune
façon, ne fonde ce droit (à la liberté
religieuse) sur le fait que toutes les religions et toutes
les doctrines (même erronées), qui se rattachent à
ce sujet, auraient une valeur plus ou moins égale.
Il le fonde, au contraire, sur la dignité de la
personne humaine, laquelle exige de ne pas être soumise
à des contraintes extérieures qui tendent
à opprimer la conscience dans la recherche de la vraie religion
et dans l’adhésion à y donner ». (pages 21 et 22)
Le compte-rendu du texte
amendé : « En affirmant que la liberté religieuse est
un vrai droit de l’homme, on n’affirme en aucune façon que
toutes les religions ont la même autorité positive, reçue
de Dieu, un droit d’exister et de se propager. Loin de nous
une telle idée ! Cela sentirait son indifférentisme
à plein nez, le pire indifférentisme religieux !
Le concile n’affirme pas non plus qu’il est permis à l’autorité
publique de donner un droit positif à toutes les religions,
de façon à ce qu’elles jouissent d’un droit égal dans
la société. Loin de nous encore cette pensée
! Cela ressemblerait trop au pire des despotismes,
qui était le propre du laïcisme. » (page 23)
Le droit peut être entendu
de deux façons. Dans l e premier sens, le droit
se définit une capacité morale de faire quelque chose,
faculté par laquelle quelqu’un reçoit de l’intérieur
le pouvoir d’agir. Dans la déclaration,
on ne prend pas le droit dans ce sens, afin d’éviter
les questions hors de propos, ou plus précisément
la question spéculative des droits de la conscience erronée
, lesquels droits se situent en dehors du statut juridique
de la liberté religieuse, tels que les traite la déclaration.
Dans le deuxième sens, le droit se définit une
faculté morale d’exiger que personne ne soit contraint ou
empêché d’agir . Dans ce sens, le
droit signifie l’immunité dans l’action, et exclut
la coercition, autant celle qui contraint de faire que celle qui
empêche de faire. C’est dans ce deuxième sens qu’est
pris le droit dans la déclaration. (pages 23-24)
Sous l’appellation de liberté
religieuse, le droit public ne fait que reconnaître que
personne ne peut être contraint à agir ou empêché
d’agir selon sa conscience. Bien que nous reconnaissions la valeur
d’un exposé sur la différence des droits possédés
par la vérité et l’erreur, ce n’est pas
de cela qu’il est question ici. (page 24)
Un assez grand nombre de pères
ont proposé des amendements pour que le texte
ne donne pas l’impression d’affirmer que les pouvoirs publics
peuvent verser dans le laïcisme, comme s’ils n’étaient
pas obligés de pourvoir au bien public, dont l’exercice de
la religion par les citoyens constitue une partie. Nous vous
proposons que soient admis des amendements qui sont d’une grande
importance pour la compréhension exacte de la doctrine : a) le pouvoir
civil dont la fin propre est de procurer le bien commun temporel,
doit reconnaître et favoriser la vie religieuse des citoyens,
mais il faut dire qu’il outrepasse ses limites s’il a la présomption
d’imposer ou d’empêcher des actes religieux. (page 27)
Dieu a réparti la charge
du genre humain à deux pouvoirs différents, l’un,
ecclésiastique, l’autre, civil, l’un préposé
aux choses divines, l’autre aux choses humaines.
Chacun des deux est suprême dans son genre. Ils sont délimités
tous les deux, selon leur nature propre et leur cause prochaine,
par des frontières bien déterminées. . Chacun
est donc circonscrit à la façon d’un cercle,
d’une sphère, dans laquelle chacun déroule son
action de plein droit. (page 28)
L’Eglise de Jésus-Christ
n’a jamais contesté les droits et les devoirs de l’état
envers l’éducation des citoyens….droits et devoirs incontestables,
tant qu’il demeure dans les limites des compétences propres
de l’état, compétences qui sont à leur tour
clairement fixées par les finalités propres de l’état,
finalités, bien entendu, non seulement corporelles et
matérielles, mais qui sont par elles-mêmes nécessairement
contenues dans les limites du naturel, di terrestre, du passager…Le
mandat de l’Eglise, à l’opposé, s’applique à
l’éternel, au céleste, au surnaturel. (
page 28, 29)
Ce problème qui est le nôtre doit être absolument distingué des questions connexes :
a) premier problème connexe : de l’obligation dans l’ordre moral. Selon l’ordre moral, tous les hommes, toutes les sociétés , tous ceux qui exercent l’autorité civile, doivent objectivement et subjectivement (i.e. sont obligés moralement) rechercher la vérité et, moralement parlant, il ne leur est pas permis de propager ce qui est faux.
b) deuxième problème moral connexe : du devoir et des droits d e l’église et du devoir moral des hommes envers l’église catholique, sa doctrine et ses commandements. L’Eglise a le devoir et le droit de prêcher Jésus-Christ. Aucune instance humaine est objectivement moralement libre d’accepter ou de rejeter l’Evangile et la vraie église. Et cette obligation doit être envisagée aussi subjectivement. Les fidèles, et plus encore, tous les hommes sont moralement obligés de former droitement leurs consciences et de vivre selon elle.
De ses questions morales connexes,
il faut distinguer avec soin notre nouvelle question. On se demande
maintenant si l’on peut reconnaître à toute
personne humaine vivant en société le droit d’être
libre de toute coercition de la part des autres hommes formant
la société et le pouvoir public. (pages 29 et 30)
Suivent le désir
de certains pères, une nouvelle rédaction a distingué
avec plus de précision les droits qui reviennent à
l’église. D’une part, à l’Eglise doit être
reconnu un droit provenant d’un mandat divin. En
tant qu’elle est une autorité spirituelle et une société
d’hommes vivant selon les préceptes de la foi, l’Eglise possède
un droit d’origine divine de vivre dans la société
en toute liberté et de remplir sa propre mission.
Mais il lui incombe aussi l’obligation de reconnaître le droit naturel.
Car les membres de l’Eglise, en tant qu’ils sont des êtres
humains, possèdent un droit semblable aux autres hommes
de ne pas être empêchés de vivre selon les exigences
de leurs consciences. Entre l’un et l’autre doit, le
divin et le naturel, il n’y a pas d’opposition. L’un et l’autre
est conservé dans son intégrité si la société
accorde la liberté sociale et civile en matière religieuse.
(page 32)
Là où il
est question de la reconnaissance civile spéciale
qui doit être accordée à une religion déterminée,
la commission a admis une formulation hypothétique demandée
par plusieurs pères. Il est aussi également vrai que
d’autres pères ont demandé que l’on ne traite
de cette reconnaissance spéciale d’aucune façon.
Mais comme une telle reconnaissance spéciale existe
de fait dans beaucoup de régions, il est à
observer que la commission ne traite pas dans cet article de tous
les droits qui doivent être reconnus à l’Eglise.
Notre déclaration n’a pas pour but la revendication
de tous les droits de l’Eglise, mais seulement la revendication
et l’engagement de toujours respecter le droit à la
liberté, tant en ce qui à trait aux catholiques qu’aux
autres. (32-33)
Si la chose est bien comprise,
la doctrine de la liberté religieuse ne se trouve pas en contradiction
avec le concept historique qui porte le nom de statut confessionnel.
Car la législation de la liberté religieuse prohibe
l’intolérance légale selon laquelle quelques
citoyens ou quelques communautés religieuses seraient réduits
à une condition inférieure en ce qui a trait au droit
civil en matière religieuse. Elle n’interdit cependant
pas que la religion catholique soit reconnue par le droit humain
public comme la religion de l’ensemble des citoyens d’un pays, ou
même comme religion d’état. Dans ce cas, cependant,
il faut prendre garde que l’institution d’une religion d’état
n’entraîne des conséquences juridiques ou sociales
qui porteraient préjudice à l’égalité
religieuse de tous les citoyens, sanctionnée par le
droit public. En un mot, le régime d’une religion d’état
doit cohabiter avec un régime de liberté religieuse.
(33-34)
Tout ce qui dans les choses
humaines est d’une façon ou d’une autre considéré
comme sacré, tout ce qui relève du salut
des âmes ou du culte divin, soit qu’il soit tel selon
sa nature ou qu’ils soit considéré tel en raison
de la cause à laquelle il se réfère, est
complètement du domaine et du contrôle de l’église.
Les autres choses qui embrassent le domaine civil et politique
sont soumises en toute rectitude à l’autorité civile. (page
36)
Une fois bien compris tout
ce qui a été dit plus haut, l’argument en faveur de
la liberté religieuse tire son origine de la raison.
Pour développer cet argument, la raison fait appel
à la conscience accrue chez l’homme moderne de la dignité
de la personne humaine et à l’exigence d’une liberté
civile qui en découle. Il faut pourtant noter que
l’argument n’est pas fondé sur le fait nu de la prise de conscience,
ni sur le fait nu de l’exigence d’une liberté civile,
au quel cas l’Eglise cèderait aux pressions de l’opinion publique
ou pècherait par juridisme positif. Loin de nous
cette idée ! Tout au contraire, l’argument est
fondé sur la vérité de la dignité de la personne
humaine qui est manifestée par la conscience contemporaine,
et donc, sur la justice elle-même qui réclame,
comme un du, la liberté de la personne. (38)
Pour la liberté de l’église
catholique elle-même et l’accomplissement de son mandat
divin, cette affirmation d’un droit qui ne serait que positif
représenterait pour elle un grand danger. Le droit positif
civil a pout auteur le législateur civil. Si l’on
dit que la liberté de l’église dépend de la volonté
du législateur, qu’arrivera-t-il dans les sociétés
civiles où le législateur est hostile à l’église,
ou là où on ne fait pas la distinction entre les religions
(non-chrétiennes) et l’état ? La liberté et
la sainte indépendance de l’église du Crist n’y sont-elles
pas entre les mains d’un pouvoir séculier ?
La déclaration conciliaire pourvoit au bien de l’église
dans son ensemble.
Si nous disons cela, il ne faut pourtant pas en conclure que
ce Synode admet la liberté religieuse pour la seule
utilité de l’église catholique. Notre déclaration
affirme explicitement que l’immunité contre
toute coercition externe est exigée par la vérité
elle-même, i.e. la nature elle-même de l’homme.
Elle est fondée sur la dignité de la personne
humaine faite par Dieu à son image et dotée d’un
libre arbitre et d’une responsabilité personnelle. (39)
Les exemples et les paroles
allégués contre le texte tirés du nouveau testament
(et un grand nombre de l’ancien) se rapportent ou à la vie
interne de la communauté religieuse d’Israël dans laquelle
Jésus et les apôtres vécurent, ou à
la vie ecclésiale de la communauté chrétienne
primitive. (page 40)
Après « qu’il
confirme », on a ajouté : « De plus,
l’Eglise a non seulement un droit mais un
devoir d’imposer à ceux qui lui sont librement soumis
sa doctrine et sa discipline par la force de l’autorité et
par le moyen de sanctions. Cette répression
ne s’oppose en aucune façon à la liberté authentique.
Elle la favorise plutôt . Le Christ agissait ainsi
quand souvent il réprimandait durement les Juifs de ne pas
croire, eux qui avaient le devoir de reconnaître la vérité
. « Celui qui ne croira pas sera condamné ».
Réponse : Ce développement n’est pas ici à
sa place, car ici on ne parle pas du devoir de l’Eglise, mais
du droit de l’église , ni de la question de la liberté à
l’intérieur de l’église. De plus, l’action
de l’Eglise ci-haut décrite ne doit pas porter le nom
de répression. (page 40)
Note en italien de la page
41 : « Le pouvoir de coercition trouve son fondement lui aussi dans
l’expérience de l’Eglise primitive et saint Paul en a déjà
fait usage dans la communauté chrétienne de Corinthe
». (Enseignements de Paul V1)
Cette façon de voir est fort utile à l’intellection droite de nombreux documents pontificaux du l9ième siècle qui, traitant de la liberté religieuse, se servaient de mots qui semblaient condamner celle dont nous traitons. L’exemple le plus typique est à trouver dans l’encyclique quanta cura de Pie 1X, où on lit ; « De cette idée complètement fausse d’un régime social (i.e. naturalisme), on ne craint pas de fomenter une opinion erronée de l’église catholique et extrêmement dommageable au salut des âmes, appelée délire d par notre prédécesseur de pieuse mémoire, à savoir que la liberté de conscience et des cultes est un droit que possède chaque homme , droit qui doit être proclamé et protégé par la loi dans toute société droitement constituée ».
Comme il est facile de voir, le Souverain Pontife condamne cette liberté de conscience à cause de l’idéologie prônée par les rationalistes, qui s’appuyaient sur ce principe que la conscience individuelle est hors la loi, de sorte qu’elle n’est brimée par aucune norme divinement transmise. Le Pape condamne donc cette liberté du culte dont le principe est l’indifférentisme religieux , selon lequel l’Eglise elle-même doit être incorporée dans cet organisme moniste qu’est l’état, et soumise au pouvoir suprême de l’état.
Pour une exacte interprétation
de ces condamnations, il faut chercher à y découvrir
la doctrine de l’Eglise, la sollicitude constante de l’Eglise
envers la vraie dignité de la nature humaine et de sa
vraie liberté. Car le fondement ultime de la dignité
humaine consiste dans le fait que l’homme est la créature
de Dieu. Il n’est pas Dieu mais l’image de Dieu.
De cette dépendance absolue de l’homme envers Dieu,
découle tout droit et tout devoir de réclamer
pour lui et pour autrui la liberté religieuse au véritable
nom. C’est pourquoi tout homme est subjectivement tenu à
l’adoration de Dieu selon la norme droite de sa conscience,
parce que dans la réalité des choses il dépend totalement
de Dieu. C’est pourquoi personne -- ni même les
pouvoirs publics (civils ou religieux)-- ne possède
le pouvoir d’interdire à quelqu’un le libre exercice
de sa religion, pour que , sous aucun prétexte, on ne
vienne rompre sa dépendance de Dieu (ou d’avec Dieu)
. En menant un combat contre les postulats philosophiques
et politiques du laïcisme, l’Eglise combattait avec les
armes de la raison, en faveur de la dignité de la personne
humaine et pour sa véritable liberté. Il
s’ensuit donc que l’Eglise, selon sa règle de continuité
d’hier avec aujourd’hui, en dépit des conditions changeantes
des choses, demeure toujours d’accord avec elle-même . (page
44)
Dans l’Ecriture sainte
elle-même, on peut trouver des exemples de ce type.
Les paroles du Seigneur : « Moi et le Père nous sommes
un », peuvent paraître à qui ne lit pas l’écriture
dans le sein de l’Eglise, incompatibles avec l’affirmation : «
Le Père est plus grand que moi ». (p.45)
Ce principe affirme que
la raison humaine, sans tenir compte en aucune façon
de Dieu, est l’unique arbitre du vrai et du faux, du bien et du mal,
est à elle-même sa propre loi, et suffit par ses seules
forces naturelles, à procurer le bonheur des individus
et des collectivités. Elle affirme aussi que
toutes les vérités religieuses ont pour origine la
vigueur native de la raison humaine. Cette raison est la norme
royale qui peut et doit procurer à l’homme la connaissance
de toutes et de chacune des vérités. (page 45)
Ainsi, la liberté
de conscience et de culte condamnée par Pie 1X signifie-t-elle
qu’il est permis à chacun ou de professer la religion qui
lui plaît ou de n’en professer aucune ? » (page
46)
Et l’église a coutume
de prendre garde avec le plus grand soin à ce que personne
ne soit contraint, contre sa propre volonté, à embrasser
la foi catholique, parce que, comme nous l’enseigne avec sagesse
saint Augustin, personne ne peut croire à moins
de le vouloir. (page 47)
L’encyclique quanta cura
condamne ceux qui osent dire que l’autorité suprême
de l’Eglise et de son siège apostolique, à elle attribuée
par le Christ Jésus lui-même, est soumise au pouvoir
arbitraire de l’autorité civile. (page 48)
C’est-à-dire
de chercher des raisons qui expliquent comment ce que
l’Eglise enseigne aujourd’hui est compatible avec ce qu’elle enseignait
hier, au lieu d’en chercher pour démontrer leur incompatibilité.
(50)