Mgr Norbert Brunner, évêque de Sion (Suisse), diocèse
dans lequel sont situés, à
Ecône, le séminaire
et la Fraternité Saint-Pie X créés par Mgr Marcel
Lefebvre, s'est adressé
à la Congrégation
des Évêques pour obtenir une réponse autorisée
sur la situation
canonique de ces organismes et des
chrétiens qui se réclament des positions de Mgr
Lefebvre. (Textes français
du Secrétariat de l'évêché de Sion. Les réponses
des dicastères
romains, rédigées
en italien, ont été traduites en français par ce même
évêché.)
(Vous pouvez trouver ces textes dans « la documentation catholique » , 1997, revue bimensuelle, N° 2163 page 621 à 623)
Présentation rédigée par Mgr Norbert Brunner, évêque de Sion = évêque d'Ecône, notamment:
« La Fraternité sacerdotale Saint-Pie X est-elle schismatique
? Excommuniée ? Depuis
les ordinations épiscopales
illicites accomplies par Mgr Lefebvre en juin 1988, ces
questions refont surface périodiquement.
Et d'aucuns y répondent : non ! Témoins, entre
autres, un article du 27 juin 1996
dans la Gazette de Maytigny (« Juste pour dire… »,) ou
encore celui du Bulletin des amis
de saint François de Sales de mars/avril 1997.
Les cercles amis de la « Fraternité
sacerdotale Saint-Pie X » prétendent s'appuyer sur des
déclarations de cardinaux
ou de canonistes. Il s'agit fondamentalement de trois questions.
l. Est-ce que Mgr Marcel Lefebvre,
son évêque co-consécrateur et les évêques
consacrés par
eux sont excommuniés ?
2. Est-ce que les fidèles
qui appartiennent à la Fraternité et y adhèrent sont
eux aussi
excommuniés ?
3. La célébration
de la messe selon le rite tridentin est-elle autorisée ?
Face à ces questions répétées, il m'est paru
nécessaire de recourir à une réponse
autorisée en sollicitant
une prise de position authentique des Autorités ecclésiastiques
compétentes. Je me suis donc
adressé au Préfet de la Congrégation pour les Évêques
dont
j'ai reçu la réponse
suivante en date du 31 octobre 1996.
La réponse du Saint-Siège comprend deux parties : la première
émane de la
Congrégation pour les évêques
elle-même. La seconde du Conseil pontifical pour
l'interprétation des textes
législatifs.
Sion, le 16 mai 1997
Norbert BRUNNER, Évêque
de Sion
Réponse de la Congrégation pour les Evêques
"... Cette Congrégation, saisie plusieurs fois des problèmes
soulevés par les documents
cités, est d'avis que feu
Mgr Lefebvre est frappé d'excommunication prévue par le canon
1382 du Code de droit canonique
(CIC), pour avoir ordonné des évêques sans mandat
pontifical.
Les évêques ordonnés le 30 juin 1988 par Mgr Lefebvre
sont validement ordonnés
mais frappés de la peine
d'excommunication selon le même canon 1382 pour avoir reçu
l'ordination épiscopale sans
mandat pontifical. Cette peine fut déjà déclarée
par le décret de
notre Congrégation du 1er
juillet 1988 (Docu Catho 1988 p.798) dans lequel est contenue
également l'excommunication
de Mgr de Castro Mayer, qui avait participé à cette cérémonie
comme évêque co-consécrateur.
Quant aux prêtres ordonnés par Mgr Lefebvre lorsqu'il était
seulement «suspens a
divinis », ils n'encourent
pas la peine d'excommunication. Par contre, ils sont rattachés aux
prêtres acéphales selon
le canon 265, et sont interdits de tout « munus vel aliud sacrum
ministerium » (« …de
toute charge ou autre exercice du saint ministère ») aussi
longtemps
qu'ils ne sont pas incardinés.
Les sacrements (baptême, Eucharistie, onction des malades) administrés
par ces prêtres
illicitement ordonnés sont
valides, quoique illicites.
La participation à leurs célébrations est objectivement
illicite parce qu'elles ne sont
pas faites en communion totale avec
l'Église et qu'elles sont source de grave scandale
et de division de la communauté
ecclésiale.
L'assistance des fidèles n'est autorisée que dans des cas
de vraie nécessité.
Ceux qui y participent occasionnellement et sans l'intention d'adhérer
formellement aux
positions de la communauté
lefebvrienne envers le Saint-Père n'encourent pas la peine
d'excommunication.
Mise au point
du Conseil pontifical pour l'interprétation des
textes législatifs
1. Tout d'abord, il ressort clairement du Motu proprio Ecclesia Dei
du 2 juillet 1988
et du décret Dominus Marcellus
Lefebvre de la Congrégation pour les Évêques, du 1er
juillet 1988, que le schisme de
M. Lefebvre fut déclaré en relation immédiate avec
les
ordinations d'évêques
du 30 juin 1988, données sans mandat pontifical (canon 1382);
ensuite, il ressort également
de manière claire des mêmes documents que cet acte de très
grave désobéissance
a constitué la consommation d'une situation de caractère
schismatique
progressif.
2. En effet, le numéro 4 du Motu proprio démontre la racine
doctrinale de cet acte
schismatique, et le numéro
5c qu'une adhésion formelle au schisme (il faut entendre ici «
le
mouvement de l'archevêque
Lefebvre ») aurait comme conséquence l'excommunication
prévue par le droit canonique
(canon 1364, §1). De même, le décret de la Congrégation
pour les Évêques se
réfère explicitement à la nature schismatique des
ordinations
épiscopales et rappelle les
très graves peines d'excommunication pour ceux qui adhéreraient
au schisme de Mgr Lefebvre.
3. Malheureusement, l'acte schismatique qui a provoqué le Motu proprio
et le décret
n'a pas eu d'autre effet que de
conduire jusqu'à son terme, d'une manière particulièrement
visible et indiscutable - par un
acte de désobéissance très grave envers le Pontife
romain - un
processus d'éloignement de
la communion hiérarchique.
Aussi longtemps qu'il n'y aura pas eu de changements conduisant vers une
restitution
de cette « communion indispensable
», tout le mouvement lefebvrien doit être considéré
comme schismatique à la suite
de la déclaration formelle de l'Autorité suprême.
4. Il est impossible d'émettre un jugement en qui ce qui concerne
la thèse « Murray »
(Allusion à une thèse
sur « l'affaire Lefebvre », soutenue dans une université
pontificale de
Rome par M. Murray), parce qu'elle
n'est pas publiée, et les deux articles parus dans la
presse qui y font allusion sont
confus. De toute façon, on ne peut raisonnablement mettre en
doute la validité de l'excommunication
des évêques, déclarée par le Motu proprio et
le
décret. En particulier, il
ne semble pas admissible de trouver des circonstances atténuantes
ou dirimantes quant à l'imputabilité
du délit (canons 1323-1324).
Quant à l'état de nécessité dans lequel se
serait trouvé M. Lefebvre, il faut se rappeler
qu'un tel état doit exister
objectivement et que la nécessité d'ordonner des évêques
contre la
volonté du Pontife romain,
Chef du Collège des évêques, ne se présente
jamais. Car cela
signifierait qu'il est possible
de «servir » l'Eglise tout en portant atteinte à son
unité en
matière étroitement
liée aux fondements mêmes de cette unité.
5. D'après le numéro 5c du Motu proprio, l'excommunication
latae sententiae
(= encourue automatiquement) frappe
ceux qui « adhèrent formellement » à ce mouvement
schismatique. Selon ce Conseil pontifical,
une telle adhésion doit impliquer deux éléments
complémentaires :
a) Le premier est de nature intérieure : il consiste à partager
librement et
consciemment l'essentiel du schisme,
à savoir opter pour les disciples de Lefebvre de façon
telle que ce choix prenne le pas
sur l'obéissance au Pape (habituellement, une telle attitude
s'enracine dans des prises de position
contraires au Magistère de l'Église) ;
b) La deuxième est de nature extérieure : c'est l'extériorisation
de cette option. Le
signe le plus évident en
sera la participation exclusive aux fonctions ecclésiastiques
lefebvriennes, sans prendre part
aux fonctions de l'Église catholique (il s'agit de toute façon
d'un signe non équivoque,
puisqu'il est possible que quelque fidèle prenne part aux
célébrations liturgiques
des disciples de Lefebvre sans pourtant partager leur esprit
schismatique).
6. Quant aux diacres et prêtres lefebvriens, il semble être
indubitable que leur activité
ministérielle à l'intérieur
du mouvement schismatique constitue un signe plus qu'évident
que les deux conditions (cf. n°
5) se réalisent et qu'il s'agit donc d'une adhésion formelle.
7. En ce qui concerne les autres fidèles, il est clair que pour
pouvoir parler d'adhésion
formelle au mouvement, il ne suffit
pas qu'il y ait participation occasionnelle à des
célébrations liturgiques
ou à des activités du mouvement lefebvrien si l'on ne fait
pas sienne
l'attitude de désunion doctrinale
et disciplinaire de ce mouvement.
Dans la pratique pastorale, il ne sera pas toujours aisé de juger
leur situation. Il faudra
avant tout tenir compte de l'intention
de la personne et de la mise en pratique de cette
disposition intérieure. On
jugera les différentes situations une à une par des personnes
compétentes au for intérieur
et extérieur.
8. De toute manière, on distinguera toujours entre la question morale
de l'existence ou
non d'un péché de
schisme d'une part, et, d'autre part, la question juridico-pénale
du délit de
schisme lié à la sanction
correspondante. En ce qui concerne cette dernière, seront
appliquées les dispositions
du Livre VI du Code de droit canonique (et les canons
1323-1324).
9. Il ne semble pas utile de formaliser davantage les conditions requises
pour le délit de
schisme. Un rigorisme dans les normes
pénales risquerait de créer d'autres problèmes, car
on
n'arrivera jamais à saisir
la totalité des cas, oubliant des cas de schisme substantiel ou
s'occupant de comportements extérieurs
qui subjectivement ne sont pas toujours
schismatiques.
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