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originale par JesusMarie.com, 2007 avril 17
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les 13 livres de Soeur Marie Lataste
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 1 – Des fins dernières.
Gloire et louange, amour et reconnaissance soient à jamais rendus à Jésus au saint sacrement de l’autel, au Père et au Saint-Esprit dans tous les siècles des siècles, Amen.
Le Sauveur Jésus m’a dit un
jour : « Ma fille, la vie c'est Dieu, la vie c'est moi; je me nomme
la vie, je suis la vie, je donne la vie à tout ce qui la possède;
je l’ai donnée à tout ce qui l’a possédée dans
le temps; je la donnerai à tout ce qui la possédera dans
les siècles à venir. Ma vie ne ressemble point à la
vie des créatures. Les créatures n’ont qu’une participation
de la vie, tandis que je possède la vie dans toute sa réalité,
dans toute sa plénitude. Ma vie est éternelle; elle n’a jamais
eu de commencement, elle n’aura jamais de fin. La vie de l'homme est finie,
bornée, elle a un terme; mais cette vie n'est pas la véritable
vie; elle n'est qu'une ébauche de la vie qu'il doit recevoir après
qu'il aura perdu cette première vie.
« La vie de l'homme
après sa résurrection n’aura jamais de fin; elle durera à
jamais, et je lui donnerai cette participation immense de la vie qui le
rendra Fils de Dieu, comme je me suis donné la participation à
la vie de l'homme qui m’a rendu Fils de l'homme. C'est par l’humiliation
de ma divinité que j’ai pris part à la vie de l'homme, et
que je suis devenu Fils de l'homme. C'est par l’humiliation de ma divinité
que j’ai pris part à la vie de l'homme, et que je suis devenu Fils
de l'homme. C'est par l’exaltation de son humanité que l'homme prendra
part à la vie de Dieu, et qu'il lui deviendra semblable par cette
participation.
« Voilà pourquoi
j’ai créé l'homme, pour le rendre participant de ma vie;
voilà pourquoi je l’ai racheté, pour le rendre participant
de ma vie; voilà pourquoi je lui donne mes grâces, pour le
rendre participant de ma vie.
« Il y a donc trois
vies en l'homme : l’une pour le temps, la vie naturelle ou de la création;
la vie pour le temps et pour l’éternité, la vie surnaturelle
ou de la rédemption; la vie de l’éternité ou de la
gloire.
« C'est trois vies
sont données à l'homme; il n’y a aucun droit, il les tient
de Dieu. Tous doivent recevoir de Dieu ces trois vies, c'est la volonté
et le désir de Dieu, et cependant tous ne les reçoivent pas.
Les deux premières mènent à la troisième, mais
seulement quand on les emploie selon les lois données à l'homme
par son Dieu. S’il viole ces lois, l'homme ne reçoit point la vie
éternelle de la gloire, il reçoit pourtant la vie éternelle,
mais dans la malédiction et la séparation de Dieu.
« Je vous ai parlé,
ma fille, de la vie surnaturelle que je donne à l'homme par ma grâce,
vie admirable qui élève l'homme à la dignité
de Fils de Dieu, et qui rend ses actions méritoires pour le ciel.
Cette vie est à la fois dans la vie du temps et celle de l’éternité.
Elle est dans la vie du temps par la vie naturelle de l'homme; elle est
dans la vie de l’éternité par la vie de la gloire. C'est
pourquoi, en vous parlant de la vie naturelle et de la vie glorieuse, je
ne séparerai point de ces deux vies l’idée de vie surnaturelle,
puisqu’elle se trouve dans l’une et l’autre vie.
« La vie de l'homme
dans le temps est le travail d’un être intelligent et raisonnable,
méritant ou la vie de la gloire ou celle de l'éternité
malheureuse.
« Cette vie est un
travail, donc une peine, une tribulation, une souffrance continuelle. Les
pleurs, les larmes et les gémissements conviennent à cette
vie. C'est un exil, un lieu de passage et de transition, c'est une tente
dressée dans un désert qu'il faut lever le lendemain. Elle
passe comme une ombre dissipée par le vent; elle passe comme un
rêve, et la vie la plus longue, quand elle est au moment de finir,
qu’est-elle pour celui qui la perd?
« Aussi ne devez-vous
point vous attacher à cette vie, ma fille, ni y arrêter votre
cœur et vous laisser captiver par elle. Tout ce qu'il y a d’heureux en
elle, si vous l’examinez bien, ne vous paraîtra que misère;
mais tous ses maux, toutes ses afflictions, tous ses tourments seront des
biens inappréciables, si vous savez les recevoir comme je vous l’ai
enseigné.
« Pourquoi donc, ma
fille, avez-vous reçu cette vie du temps? Pour connaître Dieu,
pour l’aimer, pour le servir, et par cette connaissance, par ce service,
par cet amour, obtenir la vie de la gloire dans l’éternité.
« Voilà pourquoi
vous avez reçu la vie. Si vous employez ainsi votre vie dans le
temps, elle sera bonne, car elle vous engendrera à la seule vie
véritable, à la vie qui ne passera jamais. Si vous employez
ainsi votre vie, vous ne vous attacherez point à cette vie pour
elle-même, mais pour Dieu qui vous l’a donnée; vous ne vous
attacherez point à cette vie pour gagner les biens qu’elle possède,
mais les biens que possède Dieu qui vous l’a donnée; vous
vivrez de la vie du temps, sans regarder le temps, mais l’éternité.
« Vous vivrez de la
vie du temps, non pour vivre, mais pour désirer la mort et l'union
avec Dieu, pour opérer votre salut, pour mériter la miséricorde
de Dieu, pour rendre sa justice favorable, pour entendre un jour le Seigneur
vous dire : Courage, ma fille, et venez participer à la récompense
que j’ai promise à mes élus.
« Si vous n’employez
point votre vie du temps à conquérir la vie de la gloire,
vous tomberez nécessairement dans la vie de la malédiction
et de la damnation.
« Fuyez ce malheur,
ma fille; ayez toujours sous les yeux la vie éternelle de la gloire;
ayez en toujours le désir dans le cœur. La vie éternelle
de la gloire est celle qui vous est destinée; celle après
laquelle seule vous devez soupirer; celle qui ne passera jamais; celle
qui vous donnera le seul bien véritable, Dieu. La vie éternelle,
c'est Dieu et la connaissance de Dieu. La vie éternelle, c'est Dieu
et l’amour de Dieu. La vie éternelle, c'est Dieu et la possession
de Dieu. La vie éternelle, c'est Dieu et l’union intime avec Dieu.
La vie éternelle, c'est l’œuvre de la charité de Dieu sur
l'homme et de la charité de l'homme pour Dieu dans les siècles
des siècles. O vie heureuse! ô vie sans laquelle il n'y a
point de bonheur véritable! ô vie inépuisable et communiquée
pour l’éternité à tous les élus! Vie de la
louange éternelle de Dieu! vie de l’éternelle paix de l'homme!
vie du triomphe de Dieu en l'homme! vie du triomphe de l'homme en Dieu!
O vie de l’éternité! vie de l'homme en Dieu! vie de l'homme
avec Dieu! vie de l'homme pour Dieu! Demeurez unie à moi par la
grâce et les sentiments de votre cœur, et vous aurez part à
cette vie à jamais. »
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 2
Un jour où j’avais
eu le bonheur de faire la sainte communion, j’entrai dans mon cœur, je
me mis à genoux aux pieds de Jésus qui me parla ainsi : «
Ma fille, détachez-vous du monde, de ses possessions, de ses richesses;
détachez-vous de vous-même, éloignez les pensées
d’ambition, de vaine gloire et d’orgueil; ne pensez qu’à vivre selon
Dieu et pour Dieu; ne pensez qu’à accomplir sa sainte volonté;
ne pensez qu’à lui appartenir; ne pensez qu’à gagner le ciel,
à sauver votre âme. Que ce soit là la pensée
continuelle de votre esprit. Cette pensée est celle qui vous fortifiera
le plus, qui vous sera la plus utile, et dont les résultats dureront
pendant l’éternité.
« De quoi vous servirait,
ma fille, de gagner l’univers, si vous veniez à perdre votre âme?
Que vous importe de perdre tout le reste, si vous gagnez le ciel? Que vous
importe de vivre malheureuse, de vivre dans la tribulation, dans les peines,
la souffrance sur la terre, si vous devez vivre à jamais heureuse
dans le ciel?
« Vous êtes destinée
au bonheur de l’éternité. Cette participation de la gloire,
Dieu vous la réserve de toute éternité. Cette pensée
l’a occupé de toute éternité, même avant la
création du monde. Cette pensée l’occupe encore à
cette heure, puisqu’il vous accorde ses grâces, ses faveurs les plus
précieuses, pour vous faciliter les moyens d’arriver au ciel.
« Or, Dieu, ma fille,
n’agit pas ainsi vis-à-vis de vous par intérêt personnel.
Dieu se suffit à lui-même; il n’a besoin de personne. Correspondez
donc à ces desseins de Dieu sur vous, et que la pensée qui
est en Dieu soit aussi celle de votre âme.
« Vous mourrez un jour,
c’est-à-dire que votre âme se séparera de votre corps.
Votre corps rentrera en poussière, mais votre âme s’élèvera
vers Dieu pour recevoir sa récompense ou sa peine, récompense
ou peine pour l’éternité. Votre corps ne demeurera pas toujours
en terre, il ressuscitera au dernier jour, afin de partager à jamais
le sort de votre âme. il est donc important pour vous, ma fille,
d’aviser à votre avenir éternel et d'y aviser plus qu’à
vos possessions, plus qu’à vos richesses, plus qu’à une position
dans la vie, plus qu’à une contradiction, à une épreuve,
à une souffrance, à la santé. Dieu ne vous demandera
point si vous avez acquis de grandes richesses, si vous avez eu une heureuse
position dans le monde, si vous avez joui de la santé; il vous demandera
si vous avez opéré votre salut.
« Dieu vous donne tout
ce qui vous est nécessaire pour vous sauver; mettez tout à
profit, agissez toujours comme vous voudriez avoir agi à l’heure
de votre mort, ou au tribunal de Dieu. Pensez plus à votre âme
qu’à votre corps, soignez plus votre âme que votre corps,
sauvez votre âme et n’avisez point au salut de votre corps pour la
vie présente, si pour le sauver vous devez perdre votre âme.
« Pensez plus à
Dieu qu’à toute autre chose, plus qu’à vous-même. Pensez
à Dieu pour lui rendre vos devoirs, suivre ses commandements et
observer ses lois. Pensez à Dieu partout, quand vous êtes
seule, quand vous êtes en compagnie, quand vous êtes dans le
monde, partout, et vous ne l’offenserez point; car vous direz à
vous-même : Dieu veut mon salut, je dois l’opérer en faisant
le bien, en évitant le mal, en correspondant à ses grâces.
« O ma fille ! n’imitez
point cette jeunesse qui oublie entièrement qu’elle a une âme
à sauver pour une éternité; n’imitez point ces ouvriers
que Dieu appelle pour venir travailler à sa vigne, et qui, demeurant
sourds à sa voix, restent oisifs. Ah! ceux-là, ma fille,
ne recevront point le denier qui est promis à tous ceux qui sont
appelés par le Père de famille. Ils ne recevront point ce
denier qui est la possession du ciel; ils seront jetés dans les
ténèbres extérieures, c’est-à-dire loin de
Dieu, dans les flammes de l’enfer.
« Consacrez à
Dieu votre jeunesse, consacrez-lui tous les moments de votre vie, afin
d’opérer votre salut. »
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 3
Le Sauveur Jésus m’a
dit un jour : « Ma fille, vous n’ignorez pas ce qui est dit dans
l’Évangile, qu'il est aussi difficile à un riche d’entrer
dans le royaume des cieux qu’à un chameau de passer par le trou
d’une aiguille. Je dis plus encore, les riches n’entreront jamais dans
le ciel. J’entends par les riches, ceux qui sont attachés aux richesses
et ceux qui les désirent. On peut être pauvre par conséquent
et riche néanmoins en son esprit, en ses pensées, en ses
désirs. Un homme abrité sous un toit de chaume, dénué
de tout, réduit à la mendicité, malgré sa misère
peut être riche par le désir qu'il a des richesses. Il s’attache
au peu qu'il a, il fait tous ses efforts pour l'accroître et l'augmenter,
au moins dans son imagination, s’il ne peut le faire en réalité.
Il pense à ce qu'il ferait s'il était riche, et puis reconnaissant
que malgré ses désirs il n'est pas plus avancé, il
porte un œil d’envie aux riches et ambitionne de pouvoir agir comme ils
agissent. Pauvre en réalité, cet homme est riche par les
désirs de son cœur; il ne pense qu’aux richesses, il ne convoite
que les richesses, il ne vit que pour les richesses. Cet homme n’entrera
jamais dans le ciel.
« Le riche qui s’attache
à ce qu'il possède, à sa fortune, à ses propriétés,
à ses domaines, qui en a l’esprit constamment occupé, qui
se procure par ses richesses toutes sortes de satisfactions, tous les plaisirs,
toutes les commodités, toutes les aides, tout ce qui peut rendre
la vie douce et agréable, qui ne craint pas la prodigalité
pour lui-même et qui jamais ne donne un secours au pauvre, celui-là
aura part aussi à la malédiction portée contre les
riches.
« Mais de même
qu'il y a des pauvres qui sont riches, de même je connais des riches
qui sont pauvres. Voyez cet homme, il a des richesses immenses; il est
comblé d’honneurs, environné de gloire, il peut jouir de
toutes les commodités de la vie. Que se passe-t-il au-dedans de
son cœur? Il pense que la véritable richesse c'est Dieu, et il n’est
nullement attaché à ses possessions; il regarde la gloire
qui environne son nom comme une vaine fumée, et loin de se laisser
éblouir par les flatteries ou les louanges des hommes, il renvoie
à Dieu tous les honneurs qu’on lui rend. Parce qu'il sent bien qu'il
n’est que néant, et que la louange est due à Dieu seul. Il
aime les pauvres, il agit à leur égard avec la plus grande
charité; il les assiste dans leurs nécessités, il
est le fidèle économe et dépositaire des biens que
Dieu lui a donnés; il ne craint pas de s’appauvrir par ses largesses
envers les pauvres; il est même prêt à devenir pauvre
lui-même, si telle est la volonté du ciel. Il aime les pauvres,
il aime aussi la pauvreté, il se prive de toute satisfaction, il
supporte les incommodités qui se présentent à lui,
attachant son cœur, ses pensées et ses désirs uniquement
à Dieu. En vérité, en vérité, je vous
le dis, ce riche est véritablement pauvre, et il partagera les bénédictions
promises aux pauvres.
« Le ciel est pour
lui comme pour ce pauvre qui, malgré son dénuement, son indigence,
est content de son sort et ne profère jamais une plainte. Le ciel
est pour lui comme pour ce pauvre qui méprise les richesses pour
ne s’attacher qu’aux biens fermes et impérissables de l’éternité,
qui plaint les riches, à cause des dangers où ils sont exposés,
et qui, loin de leur porter envie, prie au contraire pour eux, afin que
Dieu leur accorde la grâce de se sauver. Le ciel est pour lui comme
pour ce pauvre qui aime sa pauvreté et se dépouille même
de ce qu'il a pour ceux qui sont encore plus pauvres que lui.
« Le ciel est pour
ce riche comme pour ce pauvre; car ils ont les mêmes sentiments :
ils sont détachés tous les deux des richesses, des plaisirs,
des satisfactions de la terre. Ils pratiquent tous les deux la pauvreté
avec gaieté d’âme, l’un par nécessité et l’autre
volontairement. Ils assistent les pauvres chacun selon leurs facultés.
Ils n’ont qu’un seul bien, un seul trésor, une seule pensée,
Dieu. O heureux et mille fois heureux ces deux pauvres, le royaume des
cieux est pour eux!
« O riches! Entrez
dans les vues de la Providence. Quand elle vous a donné les biens
que vous possédez, elle ne vous les a point livrés pour que
vous preniez vos plaisirs, vos commodités, vos aises; elle vous
les a livrés pour que vous en soyez les économes, et les
instruments de sa sollicitude envers ceux qui n’en ont point. Auriez-vous
le cœur assez dur, quand vous êtes dans l’abondance, de refuser assistance
aux malheureux, qui frappent à votre porte, quelquefois dans les
plus pressants besoins, dénués de tout ou dévorés
par la faim? Quelles excuses apporteriez-vous? Les dépenses de vos
maisons, l’éducation et l’établissement de vos enfants et
mille autres raisons? Vous dites vrai, les dépenses de vos maisons
sont considérables; mais ne pouvez-vous pas supprimer une grande
partie de ces dépenses dans vos festins, dans vos réunions,
dans vos soirées, dans vos parures, dans votre suite? Supprimez
ces dépenses inutiles, versez alors le superflu dans les mains des
pauvres; vous n’enlèverez rien à l’éclat de votre
rang, loin de là; vous lui donnerez un éclat qui ne frappera
pas seulement les yeux des hommes, mais qui pénétrera les
cieux. Privez-vous de toutes ces satisfactions inutiles de chaque jour,
et vous aurez suffisamment pour secourir les pauvres, et ces pauvres prieront
pour vous. vous pourrez encore élever vos enfants, leur donner une
éducation plus ferme et plus solide, en leur apprenant à
marcher sur vos traces dans la simplicité, dans l’amour des pauvres,
dans la pratique des vertus. Dieu vous bénira et bénira vos
enfants, et il vous facilitera l’établissement de votre famille,
et vous la verrez grandir et se multiplier portant avec elle les heureux
résultats des bénédictions divines.
« Sachez que Dieu ne
vous a donné vos richesses que pour secourir les pauvres. Il leur
commande de vous tendre la main, il vous commande de leur venir en aide.
C'est là, pour vous, un devoir de justice. En faisant cela, vous
ne mériterez pas de récompense; si Dieu veut vous récompenser
pourtant, ce n'est que parce qu'il a pris engagement de le faire.
« Voilà donc
les devoirs du chrétien : il ne doit point s’attacher aux richesses,
il ne doit point les désirer. S'il est riche il doit secourir les
pauvres; s’il est pauvre, il doit ne point ambitionner le bien des riches,
mais espérer sur la miséricorde et la providence de Celui
qui nourrit les oiseaux des champs. Dieu a bien disposé toutes choses
par sa sagesse. Il demandera au riche compte de l’administration de ses
biens, il demandera au pauvre compte de sa soumission.
« Ne l’oubliez pas,
ma fille, les richesses sont l’occasion de la ruine d'un grand nombre.
Heureux qui ne succombe pas à la tentation de désirer les
richesses! Heureux qui ne s’y attache pas quand il les possède!
Heureux qui ne veut, ne désire, ne cherche, ne convoite d’autres
biens que ceux de l’éternité.
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 4
J’avais assisté un
jour à l’enterrement d'une femme. Pendant que je priais pour elle
et que je demandais à Dieu de lui faire miséricorde, j’entendis
le Sauveur Jésus qui me parla ainsi :
« Ma fille, il y a
trois sortes de mort : la mort naturelle, la mort spirituelle et la mort
éternelle. La mort naturelle est la séparation de l’âme
et du corps; la mort spirituelle est la séparation de l'âme
et de la grâce par le péché; la mort éternelle
est la séparation de l'âme et de Dieu par la punition éternelle
du péché.
« La mort naturelle,
ma fille, est la séparation de l’âme et du corps; cette mort
est la première punition portée contre le péché.
Le péché a été la cause de la mort. l'homme
n’était point destiné à mourir, mais, parce qu'il
s'est révolté contre Dieu, il a été condamné
à la mort.
« Tous les hommes sont
condamnés à la mort naturelle parce qu'ils ont tous péché
en Adam. Les grands et les petits, les savants et les ignorants, les riches
et les pauvres, les potentats et leurs sujets, tous sont marqués
du signe de la mort et pas un ne lui échappe. Chacun disparaît
tour à tour, et chaque jour est un pas de plus vers la mort.
« Tous les hommes sont
condamnés à la mort naturelle, l’arrêt est porté
contre tous; mais nul ne connaît, à moins d’une révélation
spéciale, ni le jour, ni l’heure, ni la manière, ni le lieu
de sa mort. la mort arrive comme un voleur; elle surprend, quand on y pense
le moins, le plus souvent alors qu’on se promet quelquefois encore une
longue existence. La mort arrive et ruine tous les plaisirs de la vie,
les richesses de la vie, les honneurs de la vie, la force et la vigueur
de la vie; elle ne laisse rien de l'homme qu'un cadavre; elle ne laisse
qu'une vile pâture pour les vers du tombeau.
« La mort spirituelle
est la séparation de l'âme et de la grâce de Dieu. votre
âme, ma fille, est immortelle; elle n’a pas besoin comme votre corps
d’être vivifiée par un principe supérieur à
elle-même; elle ne se crée pas elle-même, elle vient
de Dieu; mais Dieu crée l'âme pleine de vie, et la vie que
Dieu donne à l'âme est une vie immortelle. Cette vie de l’âme
n'est pas pourtant sa vie véritable; il y a une vie préférable
à cette vie, une vie plus élevée, plus précieuse,
qui lui est communiquée et qui devient sa propre vie, que l'âme
peut posséder et perdre une fois qu'elle l’a reçue. Cette
vie lui est donnée par la grâce sanctifiante dont je vous
ai déjà entretenue.
« La grâce sanctifiante
est la vie spirituelle et surnaturelle de l'âme. Elle lui est donnée
par le baptême et les autres sacrements; elle lui est enlevée
par le péché mortel. Toute âme qui est en état
de péché mortel a perdu la vie de la grâce. Il y a
incompatibilité radicale entre la vie de la grâce et le péché
mortel. Aussi toute âme qui est en état de péché
mortel est morte à la vie de la grâce, bien qu'elle conserve
sa vie naturelle, qui lui a été donnée au moment de
sa création.
« Cette mort est terrible
et souverainement déplorable, parce qu'elle peut fixer l'âme
dans la mort éternelle.
« La mort éternelle,
ma fille, est la séparation éternelle de l'âme d’avec
Dieu par la punition que Dieu inflige à l'âme en état
de péché.
« Quand une âme
est séparée du corps qu'elle vivifiait et qu'elle apparaît
devant Dieu, son sort est immédiatement fixé et pour l’éternité.
Si elle est unie à Dieu par la grâce sanctifiante, elle sera
éternellement heureuse et jouira éternellement de la vue
de Dieu; si elle est séparée de Dieu, non par le péché
mortel, mais par la peine due à ce péché qu'elle n’a
point expié ou par le péché véniel, cette séparation
ne sera que temporaire, elle est unie à Dieu par la grâce
sanctifiante; Dieu, après lui avoir fait expier ce qu'elle doit
à la justice divine, l’appellera dans ses tabernacles éternels;
si cette âme, au contraire, est séparée de Dieu par
le péché mortel et qu'elle soit trouvée dans cet état
au moment où il lui demandera compte de sa vie dans le temps, elle
sera éternellement damnée. La vie de la grâce a fui
de cette âme, la mort du péché l’a pénétrée
tout entière; elle restera éternellement dans cette mort,
et cette mort éternelle sera punie par une peine qui n’aura jamais
de fin.
« Tous doivent mourir,
mais seulement de la mort naturelle. Nul n’y peut échapper, mais
tous doivent fuir les deux autres. Or, pour cela, le meilleur moyen, c'est
de penser souvent à la première, à la séparation
de l'âme et du corps. La pensée de la mort détache
en effet du monde, de ses pompes, de ses plaisirs et de ses joies, qui
sont causes de péché, de mort spirituelle et éternelle.
« La pensée
de la mort ferme l’oreille aux tentations de Satan, arrête les mouvements
de la concupiscence, résiste au péché, cause de la
mort spirituelle et de la mort éternelle.
« La pensée
de la mort est une arme contre l’orgueil, l’avarice, la luxure, l’envie,
la gourmandise, la colère et la paresse, qui causent la mort spirituelle
et la mort éternelle.
« Tout péché
vient de ce qu’on oublie la mort. Celui qui y pense ne pèche point,
parce que l'homme aime la vie, chérit la vie, désire la vie,
et qu’en péchant il perd la seule vie véritable, la vie de
l'âme et la vie de la gloire.
« Quand on a sous les
yeux la pensée de la mort, on voit la vanité du monde, la
vanité de ses plaisirs, la vanité de ses richesses, la vanité
de tout ce qui est en lui; on fuit le monde et tout ce qui est du monde
pour s’attacher à Dieu.
« Quand on a sous les
yeux la pensée de la mort, on voit son néant, le néant
des richesses, le néant de l’amour-propre, le néant des plaisirs
charnels, le néant des satisfactions de l’esprit et du cœur; on
fuit le tout pour s’attacher à Dieu.
« De quelle utilité
ne sera donc pas pour vous, ma fille, la pensée de la mort, puisqu’elle
vous fera fuir le péché et toutes sortes de péché?
« En quelque position
que vous vous trouviez, la pensée de la mort vous sera salutaire.
« Si vous êtes
dans la peine, vous vous direz à vous-même en pensant à
la mort : Courage, mon âme, la mort viendra bientôt; si nous
supportons bien ces peines elle y mettra fin pour toujours.
« Si vous êtes
dans la joie, vous vous direz à vous-même en pensant à
la mort : O mon âme ! la joie que nous avons sur cette terre passera
bientôt; ne nous y attachons point, mais faisons le bien pour avoir
une joie qui ne passera jamais.
« Si vous êtes
dans l’accablement et le dégoût, vous vous direz à
vous-même en pensant à la mort : Allons, mon âme, travaillons
avec ferveur afin que la mort, à son arrivée, ne nous trouve
point les mains vides.
« Si vous êtes
dans le péché, vous vous direz à vous-même en
pensant à la mort : O mon âme! sortons de cet état,
revenons à la vie de la grâce pour ne point tomber dans l’éternelle
mort, et demeurer unie à Dieu pour jamais.
« Si vous commencez
à marcher dans la voie du salut, si vous combattez depuis peu les
combats du Seigneur, vous vous direz à vous-même : O mon âme!
courage contre nos passions, courage contre Satan et le monde, courage
contre nos faiblesses; luttons et marchons toujours, selon le désir
de Dieu, dans le bien et la vertu pour acquérir la vie de l’éternité.
« Si vous êtes
déjà avancée dans la voie du bien et de la sagesse,
vous vous direz à vous-même en pensant à la mort :
O mon âme! acquérons toutes sortes de vertus, faisons-nous
des trésors que la rouille et les voleurs ne feront point disparaître;
la mort peut arriver sans tarder, ne perdons pas de temps.
« Si vous marchez à
grands pas dans le chemin de la perfection, vous vous direz à vous-même
en pensant à la mort : O mon âme, qu'il est doux d’être
uni à Dieu! redoublons d’efforts pour mériter de le posséder
à jamais, donnons-lui tout ce que nous avons, ne disposons de rien
que pour lui, vivons pour lui, pour mourir en lui et vivre à jamais
avec lui.
« Ainsi, ma fille,
la pensée de la mort ne fait pas seulement éviter le péché,
elle fait encore pratiquer le bien, elle fait acquérir toues sortes
de vertus et mène, par conséquent, droit à la vie
éternelle par la conservation et l’augmentation de la vie spirituelle
par la grâce sanctifiante.
« Pensez ainsi à
la mort, ma fille, et quand l'heure de votre trépas viendra, vous
ne tremblerez point comme les pécheurs, mais vous espérerez
comme les justes ; vous ne serez point troublée comme les pécheurs,
vous serez calme comme les justes.
« À l'heure
de la mort, quels regrets pour le pécheur qui a fait un si mauvais
usage de la vie, qui a abusé de mes grâces, qui a commis plus
de péchés qu'il ne porte de cheveux sur sa tête! Quelle
consolation pour le juste qui a consacré à Dieu tout son
temps, son enfance, sa jeunesse, son âge mûr et sa vieillesse,
qui a correspondu aux grâces de Dieu et qui a embelli son âme
de toutes sortes de vertus!
« À l'heure
de la mort, quelle peine horrible pour le pécheur qui souffre dans
tout son corps les douleurs de sa maladie; dans son esprit les douleurs
du remords de son iniquité; qui doit se séparer pour toujours
de ses parents, de sa famille, de ses biens, de tout ce qui lui est cher,
et qui désespère d’obtenir son pardon et sa grâce!
Quelles douces consolations pour le juste qui voit dans ses souffrances
une source de nouveaux mérites, qui jouit de la paix de l'âme
et qui met toute sa confiance en Dieu, qu'il aime de toutes ses forces!
« À l’heure
de la mort, quel effroi pour le pécheur qui entend déjà
le jugement que Dieu prononce contre lui, qui entrevoit l’enfer entr’ouvert
sous ses pas pour une éternité.
« À l’heure
de la mort, quelle fête pour le juste! Il sait que Dieu est juste,
bon et miséricordieux; il sait que Dieu aime les âmes de bonne
volonté, qu'il a promis la récompense de l’éternité
au serviteur fidèle; il s’abandonne à lui, remet son esprit
entre ses mains divines et meurt en paix.
« Oui, ma fille, autant
la mort est terrible pour le pécheur, autant elle est douce pour
le juste, qui, bien loin de la redouter, la désire de tout son cœur
et avec raison.
« La mort, en effet,
délivre le juste des tentations et du danger de perdre son salut
: voilà pourquoi il la désire comme un bien et le plus précieux
des biens.
« La mort le délivre
des souffrances du corps, de l’esprit et du cœur : voilà pourquoi
il la désire comme un bien et le plus précieux de tous les
biens.
« La mort le délivre
de sa misère, de sa pauvreté, de son dénuement. Il
ne possède pas Dieu tant qu'il possède la vie, la mort va
le lui donner; voilà pourquoi il la désire comme un bien
et le plus précieux des biens, puisqu’elle va lui donner Dieu, le
seul bien véritable.
« Vivez dans la justice,
ma fille, et vous désirerez mourir; vivez dans la justice, et la
mort sera pour vous pleine de douceur; vivez dans la justice, la mort vous
unira à Dieu pour toujours. »
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 5
Le Sauveur Jésus m’a
dit un jour : « Ma fille, tout homme est jugé par moi après
sa mort et reçoit la récompense ou la peine qu'il a méritée.
« Un autre jugement
viendra après ce premier jugement. Il aura lieu à la fin
des temps, et ne sera que la confirmation de mon premier jugement sur chaque
âme en particulier. Il sera en tout semblable au premier; seulement,
il sera prononcé sur tous les hommes et devant tous les hommes à
la fois, condamnant les uns à la peine éternelle de l’enfer,
appelant les autres à la félicité suprême du
ciel. Ce jugement sera prononcé aussi sur les anges et devant tous
les anges de l’enfer et du ciel, pour assurer aux uns la possession éternelle
du paradis et lancer les autres dans les flammes éternelles de ma
justice.
« Mon Père,
ma fille, ne juge personne, mais il m’a donné l’autorité
pour juger toutes choses, et je les jugerai dans ma sagesse et ma justice.
« L'homme livré
à sa liberté commet le mal ou opère le bien. Or, ma
fille, ma sainteté doit éloigner d’elle à jamais tout
ce qui est mal et s'unir au contraire tout ce qui est bien. L'homme livré
à sa liberté opère le bien ou fait le mal. Or, ma
fille, il faut que l'homme sache ce qui a été bien et ce
qui a été mal en lui; par lui-même il ne peut le savoir,
il faut que je le lui apprenne. L'homme livré à sa liberté
opère le bien ou le mal; il faut que le bien soit récompensé
et le mal puni. C'est moi qui lui donnerai en le jugeant sa récompense
ou sa punition. L'homme livré à sa liberté opère
le bien et tend vers Dieu, son principe; opère le mal et s’éloigne
de Dieu. C'est moi qui l’établirai à jamais, non dans la
possession de la gloire de Dieu, mais dans la malédiction de la
justice, s'il a fait le mal.
« Ce jugement sera
infaillible. Ma lumière éternelle brillera sur toutes les
âmes, et j’en pénétrerai les plis les plus secrets.
Je commanderai à ma lumière, et elle montrera à mes
yeux tous les crimes ou les vertus des hommes, toutes mes grâces
reçues avec piété ou repoussées et devenues
inutiles. Je verrai toutes les actions des hommes et je les jugerai.
« Ce jugement, ma fille,
sera sévère. Car je ne jugerai pas seulement en mon nom,
mais au nom de Dieu, mon Père, qui m’a donné son jugement.
Il sera dicté par la justice. Je dirai aux justes : Venez, les bénis
de mon Père, jouir de la récompense qui vous a été
destinée dès l’éternité. Je dirai aux pécheurs
: Allez, maudits, au feu éternel.
« Le ciel s’ouvrira
pour tous mes élus, et les abîmes engloutiront Satan et les
damnés.
« En ce jour, ma fille,
les pécheurs ne pourront plus implorer ma miséricorde; je
serai inexorable et laisserai ma justice suivre son cours.
« En ce jour, les plaies
de ma passion brilleront d'un éclat si grand, que les astres des
cieux pâliront devant leur clarté; ma croix sera le sceptre
puissant que je porterai dans mes mains il abritera les justes et renversera
les pécheurs.
« En ce jour, je dévoilerai
toutes les turpitudes, tous les crimes, tous les péchés des
damnés, toutes les vertus, toute la perfection et toute la justice
des élus.
« En ce jour je détruirai
le temps, et l’éternité poursuivra son cours.
« Vivez, ma fille,
de telle sorte que le jour du jugement ne soit point pour vous un jour
d’éternelle confusion. »
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 6
Il dit un autre jour : «
Ma fille, rien de souillé n’entrera jamais dans le royaume du ciel.
Or, l'âme est souillé non-seulement par le péché
mortel, mais encore par le péché véniel et les imperfections.
Savez-vous, ma fille, ce que devient une âme quand elle est séparée
de son corps et qu'elle est souillée par des péchés
véniels ou des imperfections? Elle ne va point en enfer, parce que
l'enfer est réservé pour celles qui ont commis le péché
mortel et qui sont mortes en cet état. Elle va dans le purgatoire,
c’est-à-dire là où Dieu la place pour expier ses souillures
et les faire disparaître toutes. C'est là encore que Dieu
retient les âmes qui n'ont point encore satisfait à sa justice
pour leurs péchés mortels, mais qui en ont reçu le
pardon par l'absolution du prêtre ou un acte de contrition parfaite
avant de mourir. Ainsi, ma fille, toutes les âmes des justes en état
de péché véniel ou coupables de quelque imperfection,
toutes les âmes justes qui n'ont point entièrement satisfait
à la justice de Dieu vont au purgatoire expier leurs péchés
et rendre satisfaction à Dieu.
« Toutes les âmes
du purgatoire sont en état de justice : elles ont la vie de la grâce,
elles sont confirmées en grâce, elles ne peuvent ni pécher
ni commettre aucune sorte de mal. Elles aiment Dieu par-dessus tout et
de l’amour le plus pur, et ne peuvent point ne pas l’aimer. Elles tendent
vers Dieu, elles soupirent vers lui, mais ne peuvent encore aller à
lui. Elles doivent expier, et elles expient au purgatoire.
« La peine de ces âmes
est double : elles souffrent la peine de la privation de Dieu; elles souffrent
aussi la peine du feu.
« La peine qu’elles
éprouvent de la privation de la vue de Dieu est au-dessus de tout
ce que vous pouvez vous figurer, ma fille. Ces âmes, en effet, comprennent
en ces lieux quel est le prix de la possession de Dieu; elles ne tiennent
à rien, si ce n'est à Dieu; elles n’aiment rien, si ce n'est
Dieu; elles voudraient le posséder, et sont retenues captives loin
de lui. Leur amour pour Dieu est si grand, qu'elles souffrent infiniment
d'être séparées de lui. Sur la terre, elles n’ont point
avisé à ces petites fautes qui offensent Dieu; dans le purgatoire,
elles les expient par une séparation temporaire de Dieu.
« À cette peine
tout intérieure se joint la peine du feu, qui leur cause des tourments
affreux. Le feu du purgatoire, ma fille, est au-dessus de tous les feux
de la terre; le feu du purgatoire fait plus souffrir ces âmes que
tous les martyres, toutes les maladies, tous les maux de la terre réunis
sur un seul homme pour l'accabler et le torturer.
« O ma fille! Que cette
pensée du purgatoire vous porte à fuir, non-seulement le
péché véniel, mais encore les plus petites imperfections.
Qu’elle vous fasse expier aussi toutes les fautes de votre vie, afin qu’à
l’heure de votre mort vous puissiez entrer dans le ciel sans souffrir les
tourments du purgatoire.
« Méritez cette
grâce par la perfection de votre conduite. Dans le purgatoire, vous
ne pourriez point mériter par vous-même la diminution de vos
peines; mais sur la terre, vous pouvez entièrement satisfaire à
Dieu pour ne point satisfaire dans l’éternité; vous pouvez
satisfaire aussi pour les âmes du purgatoire en offrant à
Dieu vos actions, vos bonnes œuvres, vos communions, en gagnant des indulgences
et les appliquant à ces âmes. Priez pour ces pauvres âmes,
soulagez-les au milieu de leurs tourments. Vous ne sauriez rien faire qui
pût m’être plus agréable, car j’aime ces âmes,
et je désire leur donner au plus tôt la gloire du paradis.
Vous ne sauriez rien faire de plus avantageux pour vous, car ces âmes
s’en souviendront au ciel et ne cesseront de prier pour vous, afin de vous
obtenir toutes les grâces de Dieu qui vous seront nécessaires
pour marcher constamment dans le bien. »
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 7
Le jour de la Toussaint, je
m’étais réveillée de grand matin. Je me rendis près
du Sauveur Jésus. Je méditai sur le mystère du jour.
Dieu me laissa entrevoir combien il est admirable dans ses saints et quelle
grande récompense il leur donne dans le ciel. J’entendis ensuite
la voix du Sauveur Jésus. Il me dit : « Dieu, ma fille, fait
paraître sa miséricorde sur la terre et dans le ciel. Elle
paraît sur la terre, car il a donné à l'homme un Sauveur
qui a réparé sa faute. Ce Sauveur, c'est moi, Fils de Dieu,
Dieu comme mon Père, égal en tout à mon Père.
J’ai pris la nature de l'homme, le corps de l'homme, l'âme de l'homme.
J’ai souffert, je suis mort pour l'homme. À cause de ma mort, Dieu
a pardonné à l'homme; à cause de ma mort, il a rendu
à l'homme sa première dignité; à cause de ma
mort, il a augmenté la grandeur de l'homme à ce point qu'il
a adopté l'homme pour son Fils, et a voulu que l'homme le nommât
son Père. Voilà ce que Dieu fait pour tout homme sur la terre,
voilà l’œuvre par excellence de la miséricorde de Dieu.
« La miséricorde
de Dieu paraît aussi dans le ciel, où il comble les saints
de gloire et de bonheur, il leur accorde ce qu'il leur avait promis pour
récompenser leur fidélité. Dans le ciel, y a divers
degrés dans la félicité des élus. Dieu les
glorifie selon qu'ils l’ont eux-mêmes glorifié sur la terre.
La sainte Vierge tient la première place dans le ciel, après
la sainte Trinité. Au-dessous de Marie viennent les patriarches,
les prophètes, les Apôtres, les vierges, les martyrs et tous
les autres saints du paradis. Parmi eux, chacun occupe un trône que
Dieu a rapproché de lui, selon la grandeur de leur sainteté
respective, et tous, malgré cette diversité de gloire, sont
parfaitement heureux et ne désirent rien de plus. Ils voient Dieu
face à face, ils le possèdent, et cette vue, et cette possession
font leur félicité, félicité parfaite, félicité
sans peine d’aucune sorte, félicité sans douleur, félicité
inaltérable, félicité perpétuelle et permanente,
félicité éternelle, félicité toujours
égale et toujours nouvelle. Ah! si les hommes savaient combien est
grande la félicité au ciel, ils feraient tous leurs efforts
pour la mériter. Toutes les peines, tous les sacrifices, toutes
les tribulations de la vie ne sont rien pour la possession de la félicité
du ciel; c'est moins qu'une obole avec laquelle on acquerrait l’empire
du monde entier. Ayez toujours les yeux tournés vers le ciel, ma
fille; pensez au bonheur qui vous attend; soyez à Dieu dans le temps,
il sera à vous dans l’éternité.
En ce moment le prêtre
montait à l’autel pour offrir le saint sacrifice. Je ne dirai point
dans quel état m’avait mise la parole du Sauveur Jésus. Je
ne pus ni ouvrir mon livre ni faire de prière, je dus m’abandonner
à l’attrait du moment qui m’absorbait tout entière. Je me
sentis pénétrée, non par les sentiments venus de mon
âme, mais par une force intérieure que je n’avais jamais ressentie
encore, et qui devait venir d’en haut; je me sentis pénétrée
de vifs sentiments de componction, et mon cœur en souffrit à ce
point que je crus qu'il allait se briser. Je fus ensuite saisie du plus
profond respect pour la présence de Dieu, pour sa grandeur et sa
majesté; j’aurais voulu m’anéantir devant lui. À la
consécration, je vis Jésus descendre sur l’autel couvert
de gloire et les mains pleines de grâces. Un ange les prit des mains
du Sauveur et les répandit sur les fidèles, puis il s’avança
vers moi et me présenta une coupe en disant : Voici les grâces
privilégiées que le Sauveur Jésus vous envoie. J’approchai
mes mains de cette coupe et je sentis, non d'une manière sensible
mais spirituelle, ces grâces inonder mon âme et la remplir
presque au-delà de ce qu'elle pouvait en contenir. Après
cela, l’ange mit sa main sur ma bouche, comme pour montrer que toutes ces
grâces devaient rester en moi. Combien je me trouvai heureuse alors.
Toute mon âme, tout mon cœur, tout mon être me sembla transformé.
Mon âme était pleine de Dieu, mon cœur plein de Dieu, tout
mon être plein de Dieu. Je ne pouvais tirer mes regards de la personne
de Jésus, tant il y avait en lui de bonté, de douceur, d’amabilité.
Je ne pouvais parler, je fis pourtant un effort, et au moment de la communion
du prêtre, je dis à Jésus : Seigneur, répandez
aussi vos grâces sur votre serviteur : je voulais dire mon pasteur.
Il écouta ma prière. Je le vis prendre la coupe que l'ange
tenait dans ses mains, lever les yeux au ciel, bénir cette coupe
et la présenter lui-même à son ministre, sur la bouche
duquel il posa lui-même sa main, comme l’ange l’avait posée
sur la mienne.
Je m’avançai ensuite
vers la table sainte pour recevoir Jésus en communion. Il descendit
dans mon cœur et s'y plaça sur un trône, comme il était
avant placé sur l’autel. Là, je reposai près de Jésus
et m’endormis comme un enfant près de sa mère, cependant
ce sommeil n’était pas un sommeil véritable. Je dormais et
je voyais, j’entendais, je comprenais toutes choses; cela n’était,
par conséquent, pas un sommeil. Ce n’était pas le réveil
non plus. Qu’était-ce? Je ne sais. Ce n’était ni vie, ni
sommeil, ni mort, et je ne puis dire autre chose sinon que Jésus
était dans mon cœur et que mon bonheur était au-delà
de tout ce que peut exprimer la langue des hommes.
J’entendis alors des voix
qui criaient bien fort : Ayez pitié de nous, ayez pitié de
nous, vous qui nous aimez. Ces paroles firent sur moi une profonde impression,
et je priai le Sauveur pour les âmes qui imploraient ma pitié.
Je le priai, mais ma prière était trop fondée sur
moi; je priai comme si j’avais droit d’être exaucée. Jésus
ne m’écouta point. Je craignais alors de l’avoir offensé
et lui demandai si je m’étais rendue coupable. Jésus me regarda
doucement et me dit : « Non, ma fille. » Mais, ne sachant comment
expliquer le refus de ma prière, je lui demandai une seconde, une
troisième fois, si je m’étais rendue coupable. Il me répondit
avec la même douceur : « Non, ma fille. — Pourquoi donc, Seigneur,
ne m’avez-vous point écoutée? — C’est uniquement pour vous
montrer que quand bien même je me plais à vous combler de
mes plus grandes faveurs, il ne vous est rien dû. Restez toujours
dans les sentiments de la plus profonde humilité. »
Puis il ajouta : «
Pour qui me prenez-vous, ma fille? » Je lui répondis : Pour
mon Dieu. » — Pourquoi, pour votre Dieu? — Parce que vous êtes
tout-puissant. — Où reconnaissez-vous ma toute-puissance? — En ce
que vous pouvez tout ce que vous voulez. — Pourquoi me priez-vous? — Parce
que vous êtes mon Dieu, parce que vous êtes tout-puissant,
parce que vous pouvez m’accorder tout ce que je vous demande. — Que me
demandez-vous? — Seigneur, je vous demande la délivrance de toutes
les âmes du purgatoire. — Puis-je vous accorder cela, ma fille? —
Oui, Seigneur, si vous appliquez vos mérites à ces âmes.
— Ne voulez-vous donc que des jugements de miséricorde? Et la justice
de Dieu? — Seigneur, vos mérites ont plus que suffisamment donné
satisfaction à la justice de Dieu. — Un grand pécheur qui
se sera converti à l’heure de la mort, après avoir commis
de nombreuses fautes, peut-il donc être admis immédiatement
dans le ciel, sans donner lui-même satisfaction! — Non, Seigneur,
mais en vue de vos mérites, que je vous prie de lui appliquer, Dieu
peut le délivrer de sa peine et lui ouvrir le ciel.
En ce moment, je vis la figure
du Sauveur devenir grave et sérieuse. « Ah! ma fille, me dit-il,
combien sont nombreuses les âmes qui retardent la gloire qu’elles
rendraient à Dieu, et qui négligent de profiter des moyens
de sanctification que je leur donne pour expier tout ce qu'elles doivent
à la justice divine. Elles paraissent au tribunal de Dieu chargées
de dettes envers lui. Mais voyez quelle est la charité de Dieu pour
ces âmes, de permettre que d’autres prient pour elles et hâtent
ainsi leur délivrance. »
Jésus resta dans mon
cœur. Un ange me prit par la main et me conduisit je ne sais où.
Nous gravîmes d’abord une hauteur fort élevée; au milieu
de la plaine qui s’étendait sur cette hauteur, je vis un immense
précipice taillé en forme de tour. Il en sortait une fumée
abondante. J’examinai cela avec effroi. Mon effroi redoubla quand je vis
Jésus sortir de mon cœur pour gagner l’extrémité opposée
du précipice, où une multitude de jeunes hommes, tête
nue, et revêtus de robes blanches vinrent l’entourer. Ne craignez
rien, me dit l’ange qui me guidait, venez, suivez-moi. L’ange descendit
un escalier taillé le long du mur qui entourait l’abîme; je
descendis avec lui à une très-grande profondeur. Là,
nous trouvâmes une porte fermée, l'ange l’ouvrit et je vis
un grand feu comme je n’en avais jamais vu, et, au milieu de ces flammes,
des personnes sans nombre affreusement torturées. Leur état
me toucha à ce point que je versai des larmes, ce que je ne fais
pas facilement, et je m’écriai : Ah! mes frères, combien
vos tourments sont grands! Que Dieu vous fasse miséricorde. L'ange
referma la porte; nous remontâmes du côté opposé
à celui par lequel nous étions descendus, et nous arrivâmes
près du Sauveur Jésus, qui était encore entouré
des jeunes hommes que j’avais aperçus.
Ils étaient venus
là pour offrir à Jésus toutes les prières de
l’Église en faveur des âmes du purgatoire.
« Apportez la grande
balance de la justice, dit le Sauveur Jésus. » Deux anges,
suivis de la sainte Vierge Marie, apportèrent la balance de la justice.
Les jeunes hommes vêtus de blanc, qui étaient des anges aussi,
je pense, mirent d'un côté les prières des fidèles.
Les anges de la justice placèrent du côté opposé
une immense quantité de papiers écrits qui étaient
l’inscription des dettes qu’avaient encore à payer les âmes
du purgatoire, et les prières des fidèles se trouvèrent
plus légères que les écrits déposés
par les deux anges.
Mais Marie, se plaçant
en face de son Fils, posa la main du côté des prières
des fidèles, et leur valeur surpassa de beaucoup le poids des papiers
écrits.
Jésus regardant avec
bonté sa mère lui dit : « Soyez toujours la Mère
de la miséricorde. »
Les jeunes hommes se précipitèrent
dans l’abîme plusieurs fois et en ramenèrent toujours une
victime, qu'ils revêtaient d'une robe blanche comme la leur et qu'ils
présentaient ensuite à Marie. Marie l'embrassait avec amour,
mettaient entre ses mains un papier blanc, et puis demandait pour elle
à son Fils une bénédiction éternelle.
Ce spectacle n’était
point du temps, mais de l'éternité. Sa vue me combla de satisfaction
et augmenta la paix de mon âme.
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 8
Je priais un jour devant le
Saint-Sacrement et demandais à Dieu de me tenir toujours unie à
lui par la charité. Le Sauveur Jésus me fit entendre sa parole
dans mon cœur : « Ma fille, me dit-il, vous avez bien raison de demander
la charité. C'est le bien le plus précieux de l'âme
sur la terre et dans l’éternité; au ciel elle n’aura rien
que la charité, mais cela lui suffira pour la rendre heureuse pendant
les siècles des siècles.
« Celui qui n’a pas
la charité est le plus malheureux des hommes sur la terre; celui
qui meurt et n’a point la charité sera malheureux dans l’éternité.
Dieu le séparera de lui et le plongera pour toujours dans l’abîme
de l’enfer. L’enfer, ma fille, est un lieu de supplices que Dieu a créé
dans sa justice pour les anges révoltés contre lui. C'est
là qu'il punit aussi les pécheurs qui meurent sans s’être
réconciliés avec lui. L’enfer diffère du purgatoire
en ce que sa peine est éternelle, sans consolation ni espérance.
« Les peines de l'enfer
consistent aussi dans la privation de la vue de Dieu et dans la souffrance
du feu. Les âmes qui sont en enfer sont privées de la vue
de Dieu; elles en sont privées pour toujours, et cette privation
les accable de son poids éternel; car il n’y a plus pour elles espoir
de le posséder jamais, mais certitude du contraire. Être éternellement
séparé de Dieu, le maudire éternellement, éprouver
éternellement la répulsion de Dieu, se voir éternellement
au milieu des abîmes, victime éternelle de la haine et de
la malédiction de Dieu, c'est là, ma fille, le plus grand
supplice des damnés. Ici-bas, l'âme ne comprend point ce que
c'est que la possession de Dieu; son corps lui voile les yeux et l’attache
à la terre; mais dans l’enfer il n'y a plus de voile pour cette
âme, et malgré les ténèbres impénétrables
de ces lieux, elle voit, elle comprend qu’être séparé
de Dieu, être privé de sa vue pour jamais, c'est le plus grand
des malheurs.
« Les damnés
sont encore soumis à la peine du feu. Ce feu, ma fille, a été
allumé au souffle de la colère de mon Père. Il n'est
point de feu qui lui puisse être comparé. Ce feu ne brûle
point seulement par sa substance, mais il agit encore comme un instrument
vivant et intelligent de la colère divine, pour torturer les âmes
qu'il entoure et qu'il pénètre en tous sens. Si le feu de
la terre vous parait si terrible que vous ne pourriez point supporter son
action sur une partie de votre chair pendant une heure, que doit-ce être
de ce feu bien plus actif et agissant sur toutes les parties des damnés?
À ce feu se joindront tous les tourments, toutes les douleurs, toutes
les afflictions qui peuvent être éprouvées par les
damnés dans le corps et dans l’âme.
« La vue, l’ouïe,
l’odorat, le goût, le toucher des damnés seront atteints et
pénétrés par toutes les souffrances les plus cruelles
et les plus atroces.
« L’intelligence, la
volonté, la mémoire seront livrées comme une vile
pâture à la crainte, à la tristesse, aux regrets, à
la haine, au désespoir. L’intelligence sera entourée de ténèbres
épaisses, la volonté brisée par des contradictions
perpétuelles, et la mémoire tourmentée par le souvenir
perpétuel des plaisirs de la vie du temps, qui sont causes d'un
éternel malheur.
« Tout reprochera aux
damnés les actes de leur vie, le mépris de mes grâces,
leur révolte contre mes lois.
« O souffrances affreuses
du damné, et souffrances sans consolations! Sur la terre, quel que
soit le malheur qui vous afflige, quelle que soit la douleur qui vous torture,
vous avez au moins pour consolation l’espérance de voir vos peines
finir; vous avez mes grâces qui vous aident à les supporter
et qui tombent sur vous comme une rosée bienfaisante pour vous redonner
force et courage; vous avez pour consolation l'attente du ciel, et vous
supportez patiemment toutes vos afflictions.
« Dans le purgatoire,
c'est une grande consolation pour les âmes qui y sont retenues d’avoir
la certitude du ciel, de penser que leurs peines finiront; mais dans l’enfer,
point de consolations. Dieu ne visite les damnés que dans ses fureurs,
ses malédictions et ses vengeances, et les âmes qui sont séparées
de lui, loin de pouvoir espérer un terme à leurs supplices,
ont la certitude qu'ils ne finiront jamais.
« Être damné
pour une éternité, pour une éternité être
séparé de Dieu, pour une éternité être
supplicié dans les flammes de l'enfer, quel désespoir!
« Combien de pécheurs
qui pensent peu à cette éternité qui les attend. Ils
seront surpris dans leurs péchés et leurs turpitudes, et
ils se réveilleront dans la justice et les flammes de l'enfer. Quel
réveil et quel désespoir!
« O ma fille! Pensez
toujours à l’éternité. Unissez-vous toujours de plus
en plus à Dieu; augmentez en vous la charité, fuyez l’enfer
et préférez sur la terre la souffrance, la tribulation, la
douleur, la croix; le chemin de la croix mène au ciel. »
LIVRE DOUXIÈME, chapitre 9
Le Sauveur m’a dit un autre
jour : « Ma fille, j’ouvrirai ma bouche et je ferai entendre ma voix
à celle que j’ai choisie pour augmenter et accroître l'étendue
de mon royaume, et qui m’est devenue plus chère que l’or le plus
pur, les diamants les plus fins et les pierres les plus précieuses.
Mes paroles seront plus douces à son cœur que le miel le plus exquis.
« Je vous ai parlé,
ma fille, des vérités révélées par la
religion catholique, religion seule véritable et seule capable d’encourager,
de consoler, de soutenir et de fortifier les hommes. Aujourd'hui, je veux
vous parler de la vérité la plus consolante de toutes, de
la récompense promise aux justes et aux saints.
« Vous ne pouvez comprendre
ni vous figurer qu’imparfaitement le bonheur du ciel, la gloire du paradis,
l’étendue et l'immensité de la récompense que Dieu
donne à ceux qui le servent fidèlement. C'est dans le ciel
que Dieu habite particulièrement, encore qu'il soit en tous lieux,
car c'est là qu'il déploie la magnificence et les grandeurs
de sa divinité. C'est là qu'il se révèle et
qu'il se montre tel qu'il est, et face à face, à ses élus.
L'âme, entièrement dégagée de ses liens, s’unit
à Dieu, son principe et sa fin, pour ne faire qu'un avec lui, être
couverte de l’éclat de la majesté divine par l'efficacité
de cette union admirable.
« L'âme, dans
cette vue qu'elle a de Dieu, vue intelligente et non-seulement sensible,
trouve son bonheur parce qu'au ciel, voir, aimer et posséder Dieu,
ou être heureux, jouir du souverain bonheur et de la suprême
béatitude, c'est une seule et même chose.
« Elle se perd dans
l’immensité de la divinité, où elle trouve son éternel
repos. Elle se perd dans l’immensité du Saint-Esprit pour aimer
Dieu le Père et Dieu le Fils, et trouve dans cet amour son éternel
repos. Elle se perd dans la réparation de l'éternel sacrifice
que j’offre à Dieu mon Père et trouve dans mes plaies son
éternel repos.
« Elle regarde ma Mère
que j’ai élevée sur le trône de ma divinité,
elle regarde les patriarches et tous les saints de l’ancienne et de la
nouvelle loi; elle écoute la voix des martyrs, des confesseurs et
des vierges qui chantent la gloire de Dieu; elle regarde l’accord, l’harmonie
et la paix dont jouissent tous les habitants du ciel et s’écrie
: Mon Dieu, vous êtes trois fois saint! Mon Dieu, que votre bonté
et votre miséricorde sont immenses! Mon Dieu, ma vie et mon bonheur
éternel seront de vous voir, de vous aimer, de vous louer à
jamais!
« Dans le ciel, ma
fille, l'âme goûtera toutes sortes de biens et ne sera jamais
soumise à aucune peine, à aucune douleur, à aucune
contradiction. Le ciel, c'est Dieu, sa possession et sa vue. Or, Dieu est
souverainement bon, il se donne tel qu'il est : à l’intelligence
comme l’éternel objet de sa connaissance, à la volonté
comme l’éternel objet de son amour.
« Ma fille, le ciel
est le lieu de la récompense éternelle. Méritez-la
par votre soumission à ma volonté, par votre amour envers
mon Père, par votre correspondance à tous les dons du Saint-Esprit.
Abandonnez-vous tout entière à Dieu mon Père; vivez
pour lui sur la terre, afin de vivre avec lui dans l’éternité.
Abandonnez-vous tout entière à moi qui suis votre Sauveur;
je vous donnerai le mouvement sûr qui vous portera dans le sein de
mon Père. Attachez-vous à moi; vous vous élèverez
avec moi vers mon Père, et il vous révélera sa gloire
et sa magnificence, parce que je vous présenterai à lui et
que je lui rendrai témoignage en votre faveur. Abandonnez-vous tout
entière au Saint-Esprit; le souffle de sa grâce brisera le
souffle du monde, le souffle de Satan, et vous atteindrez le port de l’éternelle
patrie.
« Courage, ma fille,
combattez sans relâche les pénibles combats de la vie présente,
et levez vos yeux et votre cœur vers les montagnes saintes d’où
vous viendra le secours. Ne regrettez point les sacrifices que vous devrez
vous imposer, les peines que vous devrez supporter, les contradictions
de la vie; tout cela aura un terme, et vous trouverez en Dieu votre félicité
sans bornes. »
Amour et reconnaissance à
jamais à Jésus dans le sacrement de son amour. Amen.