JesusMarie.com--Retour au plan de la Théologie Morale
John A. McHugh, o.p. - Charles J. Callan, o.p.
THEOLOGIE MORALE un cours complet selon saint Thomas d'Aquin et les meilleurs auteurs modernes

Imprimatur Francis cardinal Spellman, Archbishop of New York, New York, May 24, 1958
Télécharger toute la Théologie Morale de Mchugh et Callan, prêtres dominicains

PREFACE

 Le but du présent travail est de présenter un traité complet et exhaustif sur la Théologie Morale Catholique, c’est-à-dire sur cette branche des sciences sacrées qui porte sur la régulation de la conduite humaine à la lumière de la raison et de la vérité révélée. Ce nouveau travail s’efforce de traiter la matière comme un tout systématique et ordonné. Il est basé en son entier sur les principes, l’enseignement et la méthode de saint Thomas d’Aquin, tout en complétant sa doctrine avec  l’apport des meilleurs auteurs modernes. Il va sans dire qu’il y a plusieurs questions et problèmes liés à la vie moderne qui n’existaient pas quand ses œuvres classiques de théologie morale ont été écrites. Nous avons donc, dans la rédaction de cet ouvrage, apporté à ces questions une attention toute particulière.

 Un nouveau code de lois vient de faire son apparition, et beaucoup de travaux spécialisés en droit canon ont vu le jour. Ce serait une erreur d’encombrer un livre comme celui-ci avec des questions juridiques qui n’intéressent que les spécialistes, et qui sont d’ailleurs traitées abondamment et judicieusement dans les commentaires du code déjà disponibles. Ce serait aussi une erreur de traiter de questions qui se rapportent à l’histoire de la théologie dogmatique.  Toutes les digressions dans des domaines étrangers ont donc été délibérément  écartées de ce travail,  avec l’heureuse conséquence qu’un plus grand nombre de questions morales utiles ont pu être envisagées.
 Non seulement il est nécessaire d’éviter des sujets qui ne sont pas pertinents,  mais il faut à tout prix ne pas faire passer l’accidentel [ce qui relève du détail] avant l’essentiel. Le défaut d’un trop grand nombre de traités de théologie morale, en effet, est d’insister sur les controverses, de citer des auteurs, d’énumérer les opinions diverses aux dépends des principes et des raisons qui permettent de comprendre l’enseignement donné. Ce travail s’inscrit en faux contre cette approche, et cherchera partout, d’abord et avant tout, à poser les fondements  sur lesquels  la superstructure doit être érigée, c’est-à-dire les définitions et les règles qui sous tendent les jugements moraux et les conclusions. C’est certainement en tout cas une façon plus logique de procéder. Elle rend, en effet,  l’étudiant capable de comprendre avec plus d’aisance et de retenir plus facilement la matière enseignée, car il est à même d’expliquer le pourquoi de chaque chose.  Un autre avantage de cette méthode est la brièveté.  Elle permet, comme nous l’avons déjà dit, de traiter un plus grand nombre de questions.   Elle peut aussi condenser plusieurs pages de livres plus volumineux et moins accessibles en  paragraphes brefs et concis.  Ce que je dis là pourrait donner l’impression que je me propose de présenter la théologie morale sèchement, de façon purement scientifique.  Au contraire,  nous nous sommes efforcés de traiter la matière d’une façon qui soit à la fois claire, solide, accessible et intéressante.  Comme le général et l’abstrait ne font pas autant d’impression que le particulier et le concret, les lois et les axiomes sont illustrés par des exemples pratiques et  appropriés, qui prennent souvent la forme d’un cas de conscience.  C’est ainsi que nous unissons la théorie et la pratique de la théologie morale.

 Ce serait une erreur de penser que, parce que  la théologie morale est un traité technique et scientifique sur la conduite humaine, elle traite exclusivement ou principalement des vices et des péchés, et qu’elle n’a pour but que de permettre au prêtre d’administrer correctement le sacrement de pénitence, de distinguer  les différentes classes de péchés,  et ce qui en résulte.  Elle fait cela, bien sûr, mais elle fait bien plus : elle se propose un but plus élevé.   Elle veut rendre l’homme capable non seulement de savoir ce qui est défendu, comment il peut échapper aux maladies morales et à la mort [éternelle],  mais de comprendre quels sont ses devoirs, et comment il peut vivre une vie vertueuse qui le maintienne toujours en état de grâce.   La morale se veut plus positive que négative, et elle doit être approchée en conséquence.  Donc, bien loin de n’être utile qu’aux confesseurs afin de leur permettre de distinguer entre péché mortel et véniel, et entre les différents degrés de culpabilité, la théologie morale, au sens le plus noble, devrait rendre le service aussi aux individus de former des habitudes vertueuses et un caractère trempé, surtout à ceux qui ont la charge d’autrui, dans ou en dehors du confessionnal comme les pasteurs,  les prédicateurs et les professeurs.  On peut donc dire que le présent travail a été écrit pour les fonctions homilétiques et pastorales du prêtre, et aussi pour ceux qui ne font qu’administrer les sacrements.

 Jusqu’à présent, les traités de théologie morale rédigés en anglais ont été trop peu nombreux et trop peu développés.  Mais dans les langues vernaculaires de l’Europe continentale, l’allemand, le français, l’espagnol, l’italien, ils ont en assez grand nombre.  Cela ne veut pas dire que le présent livre prétend remplacer les manuels en langue latine utilisés dans les séminaires.  Il ne veut que faciliter aux prêtres et aux étudiants l’apprentissage rapide et  complet d’un sujet de grande importance, facilement adaptable aux différents besoins du ministère.  La section de ce travail qui traite de la loi a été révisée par deux éminents avocats.

   Les auteurs John A. McHugh, Charles J. Callan.
 mai 10, 1929

                 INTRODUCTION

 1- Définition: a) étymologique : [la théologie morale est] l’étude de Dieu considéré comme le commencement et la fin de la vie morale de l’homme, c’est-à-dire des actes procédant de la raison et de la volonté; b) scientifique : cette partie de la théologie sacrée qui traite de Dieu en tant qu’il est notre fin, et des moyens par lesquels nous tendons vers lui.

 2- En conséquence, la théologie morale diffère des différentes sciences ou habitus.   Elle diffère (a) de l’éthique qui est la science de la conduite humaine dirigée par la raison vers la fin naturelle de l’homme.  Car la théologie morale utilise la foi autant que la raison, et est centrée sur la fin surnaturelle de l’homme. Elle diffère (b) de la foi parce qu’elle n’inclut pas seulement les principes révélés par Dieu, mais les conclusions aussi qui en dérivent.  Elle diffère aussi (c) de la syndérèse, ou de l’habitus qui perçoit les principes naturels de moralité qui sont évidents par eux-mêmes à l’esprit, car la théologie morale a recours également à des vérités surnaturelles qui ne sont pas évidentes par elles-mêmes. Elle diffère enfin (d) de l’étude des cas de conscience, la casuistique, qui tire des conclusions pour les cas particuliers, car la théologie morale s’en tient aux conclusions générales.

3- Relation  entre la théologie morale et la théologie dogmatique.

 Elles ne diffèrent pas entre elles comme deux sciences distinctes, car l’objet principal,  dans la lumière duquel  tout le reste est étudié, est le même dans les deux cas : Dieu.  Elles diffèrent comme deux parties intégrantes ou branches d’une même science, le dogme relevant plus de la spéculation, et la morale des aspects pratiques de la théologie.  Dans le dogme, Dieu lui-même est considéré dans sa nature propre, et les créatures en tant que procédant de lui comme d’une cause exemplaire et efficiente, c’est-à-dire, comme Créateur.  La théologie morale continue la recherche de la connaissance de Dieu, et le regarde comme la cause finale des êtres.  Les créatures émanent de Dieu par le moyen de la création. Et ceci est en partie le sujet et la matière du dogme.  Mais les créatures retournent vers lui, chacune par son propre chemin, en vertu de sa nature créée par Dieu, et dirigée par sa providence et son gouvernement.  C’est ce retour des créatures à Dieu qui constitue le sujet de la théologie morale. Comme la providence et le gouvernement divin continuent la création, la théologie morale continue  à étudier et à dévoiler les implications du dogme du Dieu créateur.  On sait que Dieu a créé comme un être intelligent, destinant sa création à lui-même comme à sa fin.   Son chef-d’œuvre spécial, l’homme, spécial parce qu’il est fait à son image, retourne à Dieu d’une façon toute particulière, qui lui est propre en tant qu’image, c’est-à-dire, par des actes de son intelligence et de sa volonté guidés et mus par la divine providence et la prédestination.  C’est de cette façon spéciale qu’a l’homme de retourner à Dieu que traite la théologie morale. Elle ajoute ainsi à la théologie dogmatique et la perfectionne; elle enrichit la connaissance de Dieu en rendant explicites les implications de la création divine et de la providence relativement à son image, l’homme.

 4- Les objets de la théologie morale.  Le thème central ou l’objet de la théologie morale qui est considéré pour lui-même et auquel tout le reste se rattache,  c’est Dieu en tant que fin surnaturelle ou destinée de l’homme.  L’objet secondaire est constitué par les moyens qui font avancer quelqu’un vers sa fin dernière (comme les actes humains, la vertu, la grâce, les sacrements), ou les obstacles qui empêchent quelqu’un d’atteindre cette fin (comme les vices, les tentations…) Le moyen par lequel ces objets sont connus est la lumière de la raison naturelle illuminée par la foi.  Elle étudie les sources de la divine révélation, et déduit des conclusions des doctrines révélées par Dieu.

 5- La théologie morale inclut donc : a) les doctrines révélées qui se rapportent à la destinée et aux devoirs de l’homme contenus dans la parole écrite ou orale, et interprétés par leur gardien, l’Eglise catholique; b) les conclusions qui sont contenues dans la révélation; c) les obligations de l’homme envers les lois humaines qui sont basées sur la loi naturelle ou la loi positive; d) les opinions des théologiens sur les matières disputées, comme la controverse portant sur les systèmes de conscience.

 6- Les sources de la morale théologique sont donc : a) la sainte Ecriture; b) la tradition; c) les décisions des papes, des conciles et des congrégations, les lois etc.; d) l’autorité des docteurs et des théologiens; e) la raison naturelle.

 7- La sainte Ecriture.  « Toute écriture inspirée par Dieu est utile pour enseigner, réprouver, corriger et instruire dans la justice. » (2 Tim 3,16)
 (a) Ainsi, les actions racontées dans l’Ecriture contiennent des leçons pour
notre instruction.  Mais toutes, même celles des saints, ne sont pas présentées à notre imitation. (b) Les lois cérémoniales de l’ancien  testament, comme le rite de la circoncision,  et les lois judiciaires comme l’interdiction du prêt à intérêt,  n’obligent plus en conscience. Mais les préceptes moraux comme ceux du décalogue sont toujours en vigueur.  (c) Les ordonnances du nouveau testament sont de trois sortes : les conseils,  qui ne sont pas des lois mais des invitations à une pratique de la vertu plus haute que celle qui est nécessaire au salut (comme par exemple l’incitation à vendre tous ses biens et à les donner aux pauvres); les lois du nouveau testament qui sont des commandements valant pour tous les temps, comme l’obligation de croire au message de l’évangile, de recevoir le baptême, d’écouter l’Eglise; les préceptes passagers, qui étaient des décisions faites en vue de circonstances changeantes, comme la prohibition faite par le concile de Jérusalem de manger des viandes suffoquées.

 8- La tradition.   La tradition comprend des doctrines concernant la foi et la morale qui ne se trouvent pas dans l’Ecriture, qui ont été données oralement par le Christ ou inspirées par l’Esprit saint, et qui ont été transmises de génération en génération dans l’Eglise catholique. La tradition nous est connue par l’enseignement de l’Eglise exprimé dans son magistère solennel ou ordinaire; par les écrits des Pères de l’Église; par la pratique de l’Eglise exprimée dans ses coutumes et ses lois universelles; par le culte de l’Eglise dans ses formes universelles de prière et sa liturgie.

 9- Les décisions.  En plus de la divine tradition dont nous venons de parler, la théologie morale utilise la tradition apostolique venant des apôtres, qui porte sur un enseignement qui ne leur a pas été révélé, mais sur des lois qu’ils ont décrétées eux-mêmes en tant que chefs de l’Eglise, comme la loi voulant que le dimanche soit sanctifié comme jour du Seigneur; la tradition ecclésiastique qui contient des prescriptions faites par les autorités de l’Eglise, et transmises aux siècles postérieurs, comme l’introduction de certains jours de fête ou de jeûne.

 10- L’autorité des docteurs et des théologiens.  Saint Thomas d’Aquin a été reconnu par l’Eglise comme la plus haute autorité théologique; et le code de droit canon (canons 589 et 1366) ordonne que tous les séminaires et toutes les maisons religieuses enseignant la théologie l’enseignent selon la méthode, l’enseignement et les principes de saint Thomas. Quand les théologiens sont d’accord à l’unanimité que telle  doctrine se rapportant à la foi et à la morale est divinement révélée, ce serait frôler l’hérésie que soutenir le contraire. S’ils s’entendent pour dire que telle doctrine est certaine, il serait téméraire de les contredire, à moins que soient présentées de nouvelles objections à eux inconnues. S’ils sont divisés entre écoles et systèmes, il est permis aux théologiens compétents d’utiliser leur propre jugement, et de pencher du côté de ceux qui semblent avoir de meilleurs arguments.

 11- La raison. Voici à quoi sert la raison naturelle en théologie morale.  Elle démontre certaines vérités préalables à l’enseignement de la morale, comme l’existence de Dieu, son omniscience et sa véracité. Elle corrobore un grand  nombre d’enseignements révélés, par exemple : que la fin de l’homme n’est pas dans les choses finies, qu’il a des devoirs envers Dieu, la société et lui-même.  Elle offre des analogies dans l’ordre naturel qui permettent d’illustrer la fin et les devoirs de l’homme dans l’ordre surnaturel. Elle fournit les moyens de tirer des enseignements moraux les conséquences qui y sont présentes à l’état latent, afin de réfuter victorieusement les objections fallacieuses des adversaires, et d’arranger scientifiquement le tout en un corps de doctrine.

 12- Les sciences naturelles. La théologie morale a à son service non seulement les branches variées de la philosophie (comme l’éthique, la théodicée, la logique) mais aussi plusieurs sciences naturelles. La médecine et la physiologie sont utiles pour comprendre la moralité et l’imputabilité des actes. La sociologie et les sciences économiques peuvent jeter de la lumière sur les questions de justice. La jurisprudence est, bien sûr, étroitement reliée à la question des droits provenant des lois humaines. L’histoire confirme les enseignements de la morale chrétienne par les écrits et la vie des anciens.

 13- La méthode à suivre en théologie morale. La méthode positive est une simple déclaration d’enseignements moraux par le moyen de la définition de termes, de la coordination systématique des parties, de l’argumentation précise et de la polémique, de l’attention prêtée aux controverses, du recours à la philosophie et à d’autres connaissances naturelles. La méthode casuistique, ou le système des cas, est l’application de principes moraux à la solution de problèmes concrets, pour en déterminer la légalité ou l’illégalité.

 14- La méthode scolastique est celle qui sied le mieux à l’étude de la théologie morale, parce qu’elle est plus scientifique. Mieux que toutes les autres elle aide à apprendre, à retenir et à mettre en application ce qui a été appris. Mais elle n’exclut pas les autres méthodes puisqu’elle parfait la méthode positive, et qu’elle fournit les matériaux à la casuistique. Chaque méthode est efficace pour certaines choses. Par exemple, la méthode positive est très utile à la prédication, et était très apprécie par les Pères de l’Eglise, comme on peut le voir par leurs homélies morales et leurs traités. La méthode scolastique est la meilleure pour l’étude, l’enseignement, l’apologétique, et a été pratiquée par les grands auteurs des œuvres classiques du Moyen-Âge et de plus tard.  La casuistique est très utile au séminariste et au prêtre dans l’exercice du ministère du confessionnal.

 15- L’histoire de la théologie morale.  Il y a trois périodes de l’histoire de la théologie morale : la patristique, la médiévale et la moderne.

 La patristique (du premier siècle au douzième siècle). Les écrits moraux des Pères sont des exhortations populaires inspirées par les circonstances du moment. Nous ne rencontrons pas avant le Moyen-Âge de travaux qui traitent systématiquement de la morale. Voici quels sont les écrits moraux les plus notables des Pères : Le Pédagogue de Clément d’Alexandrie (mort autour de 217), qui explique ce que devrait être la vie quotidienne de tout chrétien;  Des Devoirs des Ministres de saint Ambroise (397), inspiré du des devoirs de Cicéron; la cité de Dieu de saint Augustin (mort en 430) qui met en opposition l’amour de soi et de Dieu; l’exposition sur Job de saint Grégoire le Grand (mort en 604), qui donne des instructions morales basées sur le livre de Job. Les plus célèbres des écrits ascétiques et mystiques sont l’échelle du paradis de Jean Climaque (6ième siècle), les conférences de Jean Cassien, (autour de 416), le cinquième livre du de la considération de saint Bernard (mort en 1153), et le &&souci pastoral de saint Grégoire le grand, qui traite systématiquement de la théologie pastorale, et qui est considéré comme un classique.

 La période médiévale. (12ième au 16ième s.)  La méthode des moralistes de cette période diffère de celle des Pères en ce qu’elle est systématique et philosophique, et plus adaptée aux besoins des confesseurs.  Le chef-d’œuvre de la théologie morale scientifique se trouve, bien entendu, dans la somme théologique de saint Thomas d’Aquin (mort en 1274). Des écrits de casuistique ont été composés par saint Raymond de Pennafort (environ 1235), par Jean de Freiburg (mort en 1314), par Jean d’Assise (environ 1317), par Angelus de Chiavasso, (environ 1476), par Sylvestre Prierias, (mort en 1523). La somme théologique de saint Antonin de Florence, (mort en 1459) a été une source inépuisable pour les casuistes. Nous trouvons parmi les écrivains ascétiques : saint Bonaventure, le docteur séraphique, (mort en 1274), Jean Gerson (mort en 1429), Jean Tauler (mort en 1361), le bienheureux Henri Suso (mort en 1366), et Denis le Chartreux (mort en 1471).

 La période moderne (l6ième siècle à nos jours). Ce qui caractérise cette période ce sont des commentaires de l’œuvre de saint Thomas,  des controverses sur différentes façons d’entendre la conscience, l’apparition de nombreux manuels et de traités spécialisés, et l’attention portée aux conditions changeantes de la société, et à la discipline ecclésiastique. Les travaux les plus importants de cette période sont : les commentaires des œuvres de saint Thomas d’Aquin par Cajetan (mort en 1534),  les écrits de Bartholomée de Medina (mort en 1581), appelé le Père du probabilisme modéré; le de la pénitence de Lugo (mort en 1660), un manuel qui associe la théologie spéculative avec la casuistique; le catéchisme romain  qui avait été édité au nom du concile de Trente en 1566;  la théologie morale de saint Alphonse de Liguori (mort en 1787), une œuvre dont la valeur est universellement reconnue; le célèbre traité des vertus par Lessius (mort en 1623); le livre classique de Suarez (mort en 1617) de la religion; la somme des cas de conscience de Toletus (mort en 1596); les commentaires de François de Victor (mort en 1546) qui sont des écrits d’un mérite extraordinaire. Les travaux les plus récents sont tellement nombreux qu’il est même impossible de les énumérer.

 16- Parmi les nombreux travaux modernes sur la théologie morale publiés à l’étranger, quelques-uns sont en langue vernaculaire : allemand, français, italien, espagnol.  Ils ne se proposent pas de remplacer les manuels latins utilisés dans les séminaires. Ils sont néanmoins très utiles pour procurer une connaissance plus complète de la matière traitée, et pour dépanner le prêtre dans l’exercice de son ministère. Jusqu’à présent, il y a eu une pénurie de traités de morale en anglais, et c’est ce manque qui occasionne le présent travail. Il vise à présenter la théologie morale non seulement dans ce qu’elle a d’essentiel, mais dans son entièreté et dans tous ses détails, ce que ne font  pas les traités actuellement en usage. Et tout en poursuivant ce but, les auteurs de cette nouvelle œuvre se sont efforcés d’être aussi brefs et concis que possible. Ils se sont particulièrement appliqués à ne pas envahir les domaines qui ne sont pas de leur compétence, et de tout traiter de la façon la plus claire et la plus simple possible.

 17- Les divisions et l’ordre des parties en théologie morale. La répartition de la matière faite par saint Thomas dans la somme théologique, est insurpassée et insurpassable. Elle a toutes les qualités qu’une bonne mise en ordre devrait avoir : la clarté, le lien entre les parties, la complétude. Nous ne pouvons donc pas faire autrement que suivre l’ordre qu’il a imposé au traitement des sujets moraux. Son plan est le suivant :

 La fin dernière de l’homme. Les actes tirent leur moralité de la fin dernière. Ceux qui sont bons font avancer l’homme dans le chemin qui lui permet de l’atteindre. Ceux qui sont mauvais le détournent de sa possession. De la fin dernière on considère son existence, sa nature, et ce qui la constitue.

 Les moyens généraux pour tendre à la fin dernière. On ne se rapproche pas de Dieu avec les pieds du corps, mais par les opérations de l’âme. Ce sont donc les actes humains qui conduisent l’homme à la fin dernière. Ces actes sont considérés comme ils sont en eux-mêmes, et selon la double division des actes propres à l’homme et des actes propres à l’homme et à la bête (les passions), et les habitus internes d’où ils procèdent (vertus ou vices), ainsi que les facteurs externes qui les influencent. La cause externe du mal est le démon qui pousse l’homme au péché. Le principe externe du bien est Dieu qui nous instruit par sa loi et la voix de la conscience, et nous assiste par sa grâce.

 Les moyens spéciaux de tendre à la fin dernière. Ce sont nos bonnes œuvres. En conséquence, nous présentons ici les vertus qui s’appliquent à toutes les classes d’homme : les vertus théologiques et morales.

 18- Quelques-uns des sujets que nous venons de mentionner (comme la grâce divine) sont traités à fond dans les livres de théologie dogmatique, et peuvent donc être passés sous silence. Et comme les traités de théologie dogmatique sur l’eschatologie parlent abondamment de la fin dernière, nous ne voyons pas la nécessité de nous étendre là-dessus. Il convient de diviser cette œuvre en deux parties : la théologie morale générale qui traite des principes éloignés du devoir, comme la fin dernière, les actes humains, les bonnes et mauvaises habitudes, les lois, la conscience et la grâce; la théologie morale spéciale qui traite des règles immédiates qui régissent le devoir : les obligations de l’homme en ce qui a trait aux vertus et aux commandements.

PREMIÈRE PARTIE
THÉOLOGIE MORALE GÉNÉRALE

QUESTION 1   La fin dernière de l’homme et les moyens pour y parvenir

Article 1
LA FIN DERNIÈRE DE L’HOMME
      (somme théologigue Ia-IIae, qq. 1-5; Somme contre les Gentils 4, chap. 1-63)

 19- L’existence de la fin dernière. Chaque acte délibéré procède de la volonté, et puisque la volonté a le bien pour fin, il s’ensuit que chaque acte délibéré est fait en vue d’un bien ou d’une fin. Mais si cette fin est un bien imparfait, elle est désirée non pour elle-même mais en tant que conduisant à un bien parfait, c’est-à-dire à celui dont la possession ne laissera plus rien à désirer. En d’autres termes, le bien intermédiaire est voulu à cause du bien ultime. En conséquence, tout ce qu’un homme veut il le veut directement ou indirectement dans le désir de la fin dernière. Tous les hommes désirent leur bonheur et leur perfection, mais tous ne comprennent pas en quoi consiste la béatitude, puisque quelques-uns aspirent à des biens finis comme à des fins dernières.

 20- La nature de la fin dernière. La fin dernière est cet objet qui rendra l’homme parfaitement heureux. Il ne peut donc pas consister dans des biens externes comme la richesse, les honneurs, la renommée, la gloire et le pouvoir, car quelqu’un peut jouir de toutes ces choses et être profondément malheureux. Elle ne se trouve pas non plus dans les biens du corps comme la santé, la beauté, le plaisir et la force physique, puisque toutes ces choses sont transitoires, et ne peuvent satisfaire que la plus basse partie de l’homme. Ni même dans les biens de l’âme comme la sagesse ou la vertu, puisque l’intelligence de l’homme ne peut se satisfaire d’une vérité particulière, et sa volonté d’un bien particulier. Car l’intelligence est toujours à la recherche de la plus haute vérité, et la volonté du plus grand bien. Voilà pourquoi la fin dernière de l’homme est le bien infini, ou Dieu qui satisfait ton désir.  &&(Ps. 102, 5)

 21- L’obtention de la fin dernière.  Dieu étant inaccessible aux sens, l’acte par lequel on l’atteint ne peut pas être une opération quelconque des sens. Ce doit être un acte des puissances les plus élevées. L’homme accède à la fin dernière par la vision de Dieu, qui produit l’amour béatifiant et toute sorte de biens compatibles avec l’état de gloire. Car nous voyons maintenant comme dans un miroir et dans l’obscurité, mais nous le verrons alors face à face. (1 Cor. 13, 2); et il y aura gloire, honneur et paix pour tous ceux qui font le bien.  (Rom. 11, 10)

  ARTICLE 2 : LES ACTES HUMAINS
   (somme théologique 1-11 qq. 6-17)

 22- Les actes humains sont des moyens pour atteindre la fin ultime de l’homme en autant qu’ils sont méritoires, c’est-à-dire des travaux qui appellent une récompense (1 Cor 111, 8) des combats auxquels est due une couronne (11 Tim 11, 5).  Mais les actes ne sont méritoires que s’ils sont vraiment humains et moralement bons.  Et puisque la récompense est surnaturelle, ils doivent être aussi des fruits de la grâce. Nous parlerons donc des actes dans l’ordre suivant : les actes humains et libres, les actes moralement bons, les actes surnaturellement méritoires.

 23- Définition.  Les actes qu’on appelle humains sont ceux dont l’homme est le maître.  Ce sont la raison et la volonté qui le rendent maître de ses actions.  Ces facultés le rendent supérieur aux agents non humains qui agissent sans raison et sans liberté.  En conséquence, les actes qui suivent ne portent pas le nom d’humains : ceux qui ne sont pas sous le contrôle de la raison, parce que quelqu’un est de façon temporaire ou permanente privé de l’usage de sa raison, ou sans connaissance (  les actions faites par un fou, par ceux qui sont inconscients ou qui délirent, qui sont hypnotisés ou drogués, qui sont mis hors d’eux-mêmes par une peur panique ou une colère noire; par les enfants ou les illettrés); ceux que la volonté ne contrôlent pas (comme les actes automatiques, comme ceux des pouvoirs végétatifs, la croissance, la circulation du sang, les actes pathologiques comme les convulsions; les actes faits sous la violence externe).

 24- La connaissance requise pour qu’un acte soit humain.   Un acte est humain ou volontaire quand il est désiré délibérément.  Et comme rien ne peut être désiré délibérément à moins d’être connu, un acte fait sans connaissance n’est ni humain ni volontaire.  Ainsi, un patient qui délire n’a pas la volonté de dire ce qu’il dit, car son esprit est confus, et il ne  comprend pas ce qu’il dit.

 25- La condition d’une personne dénuée de connaissance est l’ignorance. On la définit comme une absence de connaissance dans une personne capable de connaissance.  Il y a plusieurs sortes d’ignorance. Du point de vue de ce qui n’est pas connu (l’objet de l’ignorance), il y a l’ignorance de la substance d’un acte, et l’ignorance de la qualité d’un acte.  Par exemple, Pierre roulant  à toute vitesse, frappe et tue un animal de compagnie de son voisin, mais n’a aucune idée de ce qui s’est produit. C’est une ignorance dite de la substance de l’acte. L’enfant Jacques tire avec un pistolet sur son compagnon de jeu, ne sachant pas qu’un coup de feu cause la mort (une ignorance de la qualité physique d’un acte); ne sachant pas non plus que le meurtre est un péché mortel (ignorance de la qualité morale d’un acte.)

 26- En relation avec la volonté de celui qui est ignorant,  on peut distinguer trois sortes d’ignorance.  L’ignorance est concomitante (simultanément avec l’acte de la volonté) quand elle n’est pas volontaire, et quand elle n’est donc pas la raison de l’acte qui suit, puisque cet acte aurait été fait même s’il y avait eu de la connaissance. L’exemple suivant le fera comprendre.  Un chasseur a l’intention de tuer un ennemi, mais le tue en tirant sur un animal.  L’ignorance est conséquente (après l’acte de volonté) quand elle est volontaire.  Ce qui peut arriver de différentes façons. Premièrement, quand l’ignorance est recherchée pour elle-même, c’est-à-dire quand quelqu’un désire expressément ne pas connaitre ses devoirs,  pour avoir une excuse à présenter pour ses péchés, ou pour pouvoir vivre sans remords dans sa vie de péché.  Deuxièmement, quand il néglige d’acquérir la connaissance qu’il doit posséder, comme quand un chasseur tue un homme en pensant tuer un animal, sans s’être assuré de ce qu’il faisait avant de tirer. L’ignorance est antécédente (avant l’acte de volonté) quand elle n’est pas volontaire, et quand elle est la cause de l’acte qui suit, puisque l’acte n’aurait pas eu lieu s’il y avait eu de la connaissance.  Par exemple, un chasseur prend toutes les précautions suffisantes pour éviter un accident, mais tue un homme qu’il prend pour un chevreuil.

 27- En relation à la responsabilité  de la personne qui est ignorante,  il y a deux sortes d’ignorance.   L’ignorance est invincible quand elle ne peut pas être enlevée, même en se comportant comme les personnes prudentes et consciencieuses feraient dans les circonstances.  Ainsi, une personne qui n’a aucune idée de son ignorance, ou qui a essayé vainement de se renseigner sur ses devoirs est invinciblement ignorante.  L’ignorance est vincible quand elle peut être enlevée par un effort ordinaire.  Il y a plusieurs degrés de cette espèce d’ignorance.  Premièrement, elle peut être vaincue, car un certain effort a été tenté, mais qui n’était  pas suffisant. Deuxièment, l’ignorance est dite crasse ou coupable quand aucun effort valable n’a été déployé.  Troisièmement, elle est délibérée quand une personne s’applique volontairement à rester dans l’ignorance.

 28- L’influence des différentes sortes d’ignorance sur le caractère volontaire des actes.  L’ignorance d’un acte, qu’elle porte sur la substance ou sur la qualité, rend un acte involontaire, quand l’ignorance elle-même est involontaire, comme on l’expliquera au paragraphe 29.  Quand donc on se réfère à l’ignorance qui n’est pas blâmable et à la faute de violation de la loi, nous pouvons dire : l’ignorance excuse. L’ignorance ne rend pas un acte involontaire devant la loi humaine, à moins que la loi elle-même présume que l’ignorance ou la non ignorance est démontrée, comme on l’expliquera dans la question portant sur la loi (489 et suivants). Car quand une loi est suffisamment promulguée, ou quand un fait est volontaire, la présomption est à l’effet que l’ignorance n’existe pas, et qu’on  est coupable.  D’où la règle générale commune à toutes les formes de jurisprudence : l’ignorance n’excuse pas. (cf canon 16 du code de droit canon)

 29- Les effets de l’ignorance concomitante, conséquente et antécédente.  L’ignorance concomitante ne rend pas un acte involontaire, car elle ne cause rien qui soit contraire à ce que veut la volonté.  Mais elle rend l’acte non volontaire, puisque ce qui est inconnu ne peut pas être désiré.   L’ignorance conséquente ne peut pas rendre un acte complètement involontaire, puisqu’il s’agit d’une ignorance volontaire.  Mais, à un certain point de vue, elle rend l’acte involontaire dans la mesure où l’acte n’aurait pas été accompli sans l’ignorance.  L’ignorance antécédente rend un acte complètement involontaire.

 30- Les effets de l’ignorance invincible et vincible.  L’ignorance invincible, même celle qui porte sur la loi naturelle, rend un acte involontaire, puisqu’on ne veut que ce que l’on comprend.  Donc, quelque mauvais qu’un acte puisse être en lui-même, son auteur n’est pas coupable de péché proprement dit (cf 249) s’il est invinciblement ignorant de la malice inhérente.  L’ignorance vincible ne rend pas un acte involontaire, puisque l’ignorance elle-même est volontaire. Elle n’apporte donc pas d’excuse au péché.   Elle ne rend même pas l’acte moins volontaire ou moins peccamineux, si l’ignorance est recherchée pour se donner en excuse. Il n’est que trop évident que la personne agirait de la même façon si elle savait. 31- L’ignorance vincible rend un acte moins volontaire et moins peccamineux, quand l’ignorance n’est pas délibérée, car le rôle que joue la volonté est mesuré par la connaissance, et la connaissance ici fait défaut;  quand l’ignorance, même délibérée, est nourrie de la crainte que la connaissance obligerait à un mode de vie plus sévère,  car un tel état d’esprit semble montrer que la personne n’agirait pas de la même façon si elle savait.

 32- Les choses qui suivent sont semblables à l’ignorance. L’erreur, qui est un jugement qui ne correspond pas aux faits.  Par exemple, Jean pense que le vol est légal parce qu’il voit des adultes voler dans les films.  L’oubli,  qui consiste à ignorer ce que l’on sait. Exemple.  Jean, quand il était jeune, a appris ses devoirs de catholique.  Mais maintenant, il y a beaucoup de ces devoirs dont il ne se souvient plus.  L’inadvertance,  qui est un manque d’attention à ce qui se fait. Exemple. Paul, qui est distrait, ne paie pas après s’être fait couper les cheveux, ou prend de l’argent qui ne lui appartient pas.

 33- Les principes et les conclusions donnés plus haut au sujet de l’ignorance s’appliquent à l’erreur, à l’oubli et à la distraction, car, dans chacun de ces cas,  l’absence actuelle de connaissance au moment où l’on fait l’acte est ou voulue ou non voulue,  et l’acte est, selon le cas, volontaire ou non volontaire.  Dans les exemples mentionnés plus haut, Jean ne veut pas le péché du vol, puisqu’il ne sait pas ce qu’est le vol.  Mais les adultes (qu’il voit à la télévision) le veulent, car ils doivent savoir. Jacques est responsable de négliger ses devoirs s’il les a oubliés par insouciance ou pour toute autre raison non valable.  Autrement, il n’est pas responsable.  L’inattention de Pierre est involontaire, si elle est causée par une concentration mentale ou la distraction, et s’il ne l’a pas désirée.  Elle est volontaire s’il en est conscient et l’entretient, ou s’il ne fait aucun effort pour être plus attentif à ses devoirs.

 34- Le consentement requis pour un acte humain.  Pour être humain, un acte doit procéder non seulement de la connaissance, mais de l’inclination. Il doit être volontaire.   Trois choses sont nécessaires pour qu’un acte soit volontaire.  Il doit plaire à un principe interne, c’est-à-dire, dans la plupart des matières morales, à la volonté.  Un acte qui est fait contre la volonté de quelqu’un, sous l’influence d’une violence externe, n’est pas volontaire.  Pour être volontaire, il faut qu’il soit causé par la volonté.  Par exemple, une averse plait au jardinier, mais n’est pas volontaire,  puisque sa volonté n’a rien à y voir.   Pour être volontaire, une action doit être accomplie avec un but précis.  En conséquence, les actes naturels, comme le sommeil, ou spontanés, comme se frotter la barbe, ne sont pas des actes volontaires.

 35- Les sortes d’actes volontaires.  Un acte volontaire est libre et nécessaire, selon que quelqu’un peut ou ne peut pas s’en abstenir. La vision de Dieu dans le ciel est volontaire aux bienheureux, puisqu’ils le regardent sciemment  et joyeusement, mais elle n’est pas libre, puisqu’ils ne peuvent pas détourner leur regard de ce qui les rend heureux.  L’amour de Dieu sur la terre est volontaire puisqu’il est choisi.  Mais il est aussi libre puisque l’homme peut se détourner de Dieu. Un acte est parfaitement ou involontairement volontaire selon que la délibération et le consentement qui précèdent sont partiels ou entiers.  On dit qu’un acte est pleinement volontaire quand il est désiré dans des circonstances qui existent ici et maintenant, même s’il n’est pas désiré pour lui-même en dehors de ces circonstances.  Exemple.   S’il faut amputer un bras pour sauver une vie, l’amputation est pleinement volontaire, et la conservation du bras est volontaire à un point de vue seulement. Un acte est donc pleinement volontaire quand on fait un choix après mûre réflexion.  Il demeure cependant involontaire à un certain point de vue, dans la mesure où le choix est fait à contre cœur.

 Un acte est volontaire en lui-même ou directement quand il est désiré pour lui-même, comme une fin, ou pour l’obtention d’autre chose, comme moyen.  Il est volontaire dans sa cause ou indirectement quand il n’est pas désiré pour lui-même, ni comme fin, ni comme moyen, mais est prévu comme le résultat de quelque chose d’autre qui est désiré.  Exemples. Pierre se querelle avec ses voisins pour le plaisir de se quereller, ou parce qu’il veut leur inspirer de la crainte.  Ses querelles sont donc volontaires. Jean est un homme paisible qui hait la chicane, mais il lui arrive de s’enivrer quand il boit, même s’il sait qu’il se querelle toujours avec ses voisins quand il prend de l’alcool.   Ses querelles sont donc indirectement volontaires.

 36- Un acte est volontaire dans sa cause de deux façons.  En approuvant.  Quand quelqu’un peut et doit s’abstenir d’un acte qui en cause un autre. Les querelles de Jean mentionnées plus haut ont son approbation implicite puisqu’il pouvait et devait prévenir la saoulerie qui en était la cause. En permettant. Quand quelqu’un n’a ni la possibilité ni l’obligation d’omettre un acte qui en cause un autre. Exemple. Pour pouvoir gagner sa vie, Pierre doit s’associer avec des personnes querelleuses, et entend donc souvent des disputes désagréables.  Jacques, un général de l’armée donne l’ordre qu’une forteresse ennemie soit bombardée, même s’il sait que cela entraînera la destruction d’autres propriétés, et la mort inévitable de civils.  Matthieu écrit un livre  dans le but d’édifier, mais il prévoit que des gens mal intentionnés  vont l’interpréter de travers, et provoquer un scandale.

 37- Les omissions, aussi bien que les actes, peuvent être volontaires.  Elles sont pleinement volontaires quand elles sont voulues comme une fin ou un moyen à une fin. Exemple. Marc refuse de réprimer le désordre de ceux dont il est chargé parce qu’il aime le désordre, ou pour mettre en application sa théorie voulant que chacun, dans son évolution, doit passer de l’étape de la barbarie à celle du raffinement de la civilisation.  Elles sont indirectement volontaires quand leur cause est voulue et approuvée, ou permises mais désavouées.  Exemple.  Luc n’aime pas manquer la messe, mais il ne parvient pas à se lever quand il entend la cloche sonner, et ne se rend donc pas à l’église.  Si c’est la paresse qui l’a empêché de se lever, l’omission de la messe a  reçu son approbation. Si c’est la maladie, l’abstention n’était que permise.

 38- L’effet causé par une omission peut être aussi volontaire.  Il est directement volontaire si l’omission est choisie comme un moyen menant à un effet.  Exemple. Pierre apprend que Paul va faire une transaction financière qui va lui faire perdre beaucoup d’argent, mais il désire que Paul perde de l’argent et ne l’avertit pas du danger.  Il est indirectement volontaire si quelqu’un prévoit un effet, l’approuve ou le permet.  Exemples. Jacques voit Jude attaqué par un adepte du karaté.  Il réalise que, sans aide, il va recevoir toute une raclée.  Mais comme il est un admirateur du pugilat, il décide de ne pas intervenir en dépit de la peine qu’il ressent.  Luc voit son ami s’enfoncer dans les eaux, mais il ne plonge pas pour lui porter secours,  car il ne sait pas nager.

 39- L’effet d’une omission est indirectement volontaire  et approuvé par la volonté quand quelqu’un peut et doit faire ce qu’il omet.  Exemple.  Jacques reçoit des documents confidentiels afin de les conserver comme la prunelle de ses yeux. Mais, craignant de perdre les bonnes grâces de François, qui est curieux et bavard, il omet de mettre les papiers en sécurité comme promis.  François les trouve et les lit.

 40- Obstacles au consentement.  Les obstacles au consentement sont les facteurs qui enlèvent ou diminuent l’aspect volontaire de l’acte.  Les obstacles actuels qui affectent l’intelligence se réduisent à l’ignorance, dont nous avons déjà parlé. Ceux qui affectent la volonté sont la passion et la peur. On appelle coercition ce qui affecte les puissances externes.   Les obstacles habituels sont les habitudes et les états mentaux anormaux.

 41- La peur est un trouble de l’esprit causé par l’appréhension d’un futur danger.  Elle apporte un obstacle au consentement de plusieurs façons.  Elle enlève ou diminue la liberté du jugement, dans la mesure où elle affaiblit ou suspend la capacité de raisonner.  Elle diminue le caractère volontaire du choix  dans la mesure où elle entraîne quelqu’un à opter pour quelque chose qui ne convient pas. 42-  Un acte fait sous la contrainte d’une peur qui paralyse la liberté de jugement est involontaire, si la peur est telle qu’elle met quelqu’un hors de lui.  Exemple.  Pierre panique tellement à la pensée qu’un animal sauvage le poursuit qu’il fait feu dans toutes les directions.  Il est moins volontaire si la peur empêche quelqu’un de penser avec calme et pondération.  Exemple. Jean subit le test d’un fonctionnaire sévère qui exige une réponse immédiate.  Ayant peur de paraître hésitant, il donne une réponse qu’il sait ne pas être exacte.

 43- Les actes de ceux qui agissent sous la contrainte de la peur sont de plusieurs sortes.   Les actes sont faits avec la peur quand la peur est concomitante, c’est-à-dire  quand elle n’est pas voulue et qu’elle ne cause pas l’acte, ou quand elle n’en est que l’occasion,  ou quand elle le préviendrait plutôt. Exemples.  Jules reçoit l’ordre, sous peine de mort, de boire un verre de vin, ce qu’il se proposait de faire et qu’il aurait fait de toute façon sans les menaces.  Pierre marche sur un chemin solitaire pour retourner à la maison, mais il frissonne en pensant aux voleurs.   Siméon, un voleur de grand chemin, force Pierre, à la pointe du pistolet,   de lui remettre sa bourse, mais la peur de l’arrivée de la police l’empêche de subtiliser l’argent.  Roger, un homme d’affaire, voyage par avion parce qu’il doit sans retard se rendre à une autre ville.  Mais il a quelque souci au sujet de sa sécurité.  Toutes ces personnes agissent non à cause de la peur, mais indépendamment de la peur ou malgré la peur.

 Les actes dépendent de la peur quand la peur est la cause d’un acte qui sans elle n’aurait pas lieu.  La peur peut être antécédente (non volontaire) ou conséquente (voulue).  Exemples.  Pierre, dans le cas mentionné plus haut,  rendit sa bourse à cause d’une peur involontaire causée par le pistolet du voleur.  Claude fait un acte de contrition pour son péché à cause d’une peur volontaire qu’il engendre lui-même,  en pensant aux peines de l’enfer.

 44- Les effets de la crainte qui n’enlèvent pas l’usage de la raison ou le caractère volontaire des actes sont les suivants. Les actes faits avec la peur ne sont pas réellement involontaires,  même si la peur les accompagne,  car ils sont faits pour eux-mêmes, non à cause de la peur, ou comme une conséquence de la peur.  On peut dire qu’ils sont relativement involontaires parce que la peur les rend désagréables, à moins que quelqu’un trouve du plaisir à s’exposer au danger. Les personnages mentionnés plus haut ont agi en toute liberté.   Qu’ils se soient plus ou non dans ce qui leur est arrivé dépend de leur goût de l’aventure ou de leur besoin d’éprouver de nouvelles sensations.

 Les actes faits sous l’impulsion de la peur sont volontaires purement et simplement, car l’acte fait sous l’impulsion de la peur est ce que l’agent considère, à ce moment,  le plus désirable.  Exemples.  La remise de la bourse de l’un et l’acte de contrition de l’autre sont ce que ces deux hommes ont considéré être le meilleur parti à prendre dans les circonstances données.  Les actes faits sous la contrainte de la peur sont involontaires à un certain point de vue, si l’agent peut encore conserver un penchant vers ce qui est  contraire, et éviter ce qu’il craint.  Autrement, ils ne sont en aucune façon involontaires.   Exemples.  Pierre garde son attachement à l’argent qu’on lui a enlevé par force.  En conséquence, la remise qu’il en fait au voleur de grand chemin, toute volontaire qu’elle soit,  est pourtant involontaire, si on ne tient compte que de l’argent. L’autre, au contraire, ne garde aucun attachement à ses péchés,  car il sait que, s’il le fait,  il va aller à l’encontre de son remords qui le soustrait aux peines de l’enfer.  Sa contrition, bien que causée par la peur, n’est en aucune façon involontaire.

 45- La passion est un mouvement de la partie sensitive tendant vers son objet par l’amour, le désir, l’espoir, ou le repos de la possession accompagné de joie. Elle tend vers le bien comme la peur redoute le mal. (cf 117 et suiv.)   La passion est un obstacle au consentement de façon suivante.   Elle enlève le caractère volontaire de l’acte quand elle est suffisamment intense pour enlever la connaissance de l’acte.  Elle diminue la liberté même quand elle n’empêche pas la connaissance.

 46- Les appétits spirituels fortifient la raison, mais pour les appétits sensibles c’est le contraire qui est vrai.  Car ces derniers attirent toute l’attention aux choses les plus basses, et la détournent des plus hautes.  Elles empêchent le libre exercice de l’imagination et de tous les sens qui sont au service de la raison. Dans des cas extrêmes et rarissimes, la passion peut même être si intense qu’elle rend impossible l’usage de la raison,  ou va jusqu’à causer la folie.  Il nous arrive, de temps en temps, d’entendre parler de personnes qui ont perdu l’esprit par amour de l’argent, ou qui ont fait des choses irrationnelles sous le coup d’une joie subite.

 47- En relation à la volonté, la passion est de deux sortes.   Elle est antécédente  quand elle précède l’acte de la volonté et le cause.   Dans ce cas, la passion ne vient pas de la volonté, mais d’une autre cause, comme de l’état de santé quand un malade soupire après un mets qui lui est défendu.   La passion est conséquente quand elle suit l’acte de volonté et en résulte.  Cela peut arriver sans que la volonté choisisse la passion (comme quand la véhémence avec laquelle la volonté désire quelque objet éveille une émotion sensible correspondante), ou parce que la volonté a délibérément provoqué l’émotion pour pouvoir mieux, avec son aide, accomplir son dessein.
48- La passion antécédente rend un acte plus volontaire, puisqu’elle fait en sorte que la volonté tende avec plus de force vers son action.  Mais elle rend en même temps l’action moins libre,  parce qu’elle empêche la réflexion et trouble la capacité de choisir.  Exemple.  Un homme qui tire un immense plaisir de la pratique d’un sport joue volontairement, mais il serait plus libre s’il n’était pas poussé aussi passionnément à jouer.

49- La passion conséquente qui résulte naturellement d’un acte intense de la volonté ne rend pas l’acte plus volontaire puisqu’elle ne le cause pas.  Mais elle montre que l’acte de volonté est intense, car il n’y a que ce qui est voulu avec véhémence qui affecte les émotions. 50- La passion conséquente qui résulte d’un choix délibéré de la volonté augmente le caractère volontaire de l’acte,  parce que l’acte est accompli avec une plus grande intensité, en raison même de cette passion qui a été délibérément excitée.

51- Ce qui a été dit des passions qui tendent vers un bien sensible vaut aussi pour les passions qui se rapportent aux maux sensibles comme la haine, la tristesse, l’aversion, l’orgueil, la colère.  Si elles sont antécédentes, elles augmentent le caractère volontaire de l’acte, mais en diminuent la liberté.  Et si elles causent un accès de folie ou un délire passager, elles enlèvent toute responsabilité.  Si elles sont conséquentes, elles n’augmentent pas le caractère volontaire de l’acte, et elles  ne sont pas de bons indicatifs d’une grande intensité.

52- La violence ou la coercition.   La violence ou la coercition est l’usage de la force par un agent externe pour forcer quelqu’un à faire ce qu’il ne veut pas faire. Ses effets sur le caractère volontaire de l’acte sont les suivants.  Elle ne peut pas affecter l’acte interne de la volonté.  Nous serions autrement devant ce paradoxe qu’un acte de la volonté est à la fois volontaire, en tant que procédant de la volonté, et involontaire en tant que procédant d’une coercition externe.  Elle peut affecter les actes externes comme la marche, et les rendre involontaires.  Si un enfant est traîné à l’école, la violence rend sa démarche involontaire, mais elle ne rend pas involontaire sa volonté de ne pas aller à l’école.

53- Les habitudes.  Ce qui caractérise les habitudes c’est une inclination constante, résultant d’actes répétés, à accomplir des actes semblables.  Ses effets sur le caractère volontaire d’un acte sont les suivants.  Si l’habitude est, dans un certain sens, involontaire, c’est-à-dire qu’elle est causée par des actes libres, mais rétractés par un sincère désir de pénitence, elle diminue ou enlève le caractère volontaire de l’acte.  Si on est imparfaitement conscient de ce qu’on fait, l’acte est moins volontaire. Si on n’est pas du tout conscient, rien n’est plus volontaire.  Ainsi un ivrogne qui rejette son habitude et fait un acte de vraie contrition peut retomber dans le péché à cause de l’habitude acquise.  Les péchés sont alors moins volontaires, ou, à certains moments, en raison de l’absence totale d’attention, ils peuvent n’être considérés que comme des péchés matériels.

Si l’habitude est volontaire, c’est-à-dire, si elle est acquise par des actes libres et non rétractés, elle augmente le caractère volontaire de l’acte,  en raison du penchant à l’acte.  Si toute réflexion et toute délibération sont enlevées, ce qui est rare, elle diminue la liberté de l’acte, et en conséquence sa dimension morale comme acte bon ou mauvais.  Elle n’est pas toutefois non voulue, car l’habitude elle-même a été librement acquise, et les actes qui en découlent sont volontaires dans leur cause (cf 35). Si une attention suffisante demeure, l’habitude diminue la liberté de l’acte,  en raison de la difficulté de réfléchir.  Mais cette diminution de liberté est en accord avec la volonté de l’individu qui a contracté et conserve librement son habitude.  En conséquence, absolument parlant, un acte volontaire augmente le caractère volontaire des actes causé par l’habitude, et augmente donc leur bonté ou leur malice.  Ainsi, saint Thomas affirme que quelqu’un qui pêche par habitude  pèche par une malice certaine, c’est-à-dire, non par ignorance ou par passion, mais par le choix de sa volonté.

54- Les propensions naturelles ou les tendances qui viennent de la constitution physique,  comme les dispositions héréditaires à la tempérance ou à l’intempérance.  Les propensions naturelles ont la même sorte d’influence sur le caractère volontaire d’un acte que les habitudes involontaires. (cf 53)

55- Les états pathologiques sont des maladies du cerveau ou des nerfs qui réagissent sur l’intelligence ou la volonté,  comme les différentes sortes de névrose ou de psychose, d’hystérie ou d’épilepsie.  L’influence des états pathologiques sur l’aspect volontaire des actes est, à toutes fins pratiques, semblable à celle attribuée à la passion antécédente (cf 48). Le  discernement est requis  quand on veut appliquer ces principes à toutes les sortes particulières de maladies mentales.  Quand on doute si un acte associé à un état pathologique est libre ou non, on doit se montrer indulgent.  Quand l’acte est peccamineux, il n’est pas considéré comme un péché mortel, car un homme est innocent tant qu’il n’a pas été déclaré coupable.  Si l’acte est bon,  il est tenu pour volontaire et libre, et par conséquent, méritoire. Cf Prummer O.P. manuale thelogiae moralis  (Barcelona : Herder, 1946) 1 no 93.

56- Deux sortes d’acte volontaire.  Après avoir  discuté des actes humains ou volontaires en général, nous allons indiquer maintenant en particulier quels sont les actes qui sont de cette catégorie.  Il y a deux classes d’acte volontaire : ceux qui ont été suscités par la volonté ; ceux qui ont été commandés par la volonté.

57- Les actes élicités par la volonté.  La première classe d’actes qui sont sous le contrôle de la volonté est formée d’actes qui sont accomplis par la volonté elle-même, c’est-à-dire qui sont commencés et terminés dans cette puissance de l’âme.  58- Il y a trois actes de la volonté qui sont dirigés vers la fin que  la volonté a en vue : le désir, l’intention, et la fruition.  Le désir est l’amour ou l’inclination de la volonté vers une fin,  sans référence aux moyens qui permettent de l’obtenir. Voilà quel est le premier acte de la volonté. L’intention est la direction de la volonté vers l’obtention d’un but par certains moyens.  La fruition est la jouissance qu’apporte la possession de la fin poursuivie.   C’est le dernier acte de la volonté.

59- Il y a trois actes de la volonté qui sont dirigés vers les moyens, et qui viennent après l’intention : le consentement, l’élection, l’usage. Le consentement suit le conseil donné par l’intelligence, et est un acte de la volonté qui accepte différents moyens convenables à l’obtention d’une fin. L’élection vient après le jugement pratique de l’intelligence portant sur les moyens auxquels on a donné son assentiment.  C’est un acte de la volonté qui choisit un des moyens de préférence à d’autres, comme étant plus approprié à l’obtention de la fin poursuivie.  L’usage est l’acte par lequel la volonté dirige et meut les autres puissances pour qu’elles emploient les meilleurs moyens choisis.

60- Les actes commandés par la volonté.  La seconde classe d’actes qui sont sous le contrôle de la volonté sont ces actes qui ne procèdent pas directement de la volonté mais des autres puissances sous son contrôle.
61- Les actes commandés par la volonté sont de différentes sortes : des actes intellectuels, comme le jugement, le raisonnement, accomplis sous la direction de la volonté ;  des actes sensibles comme la vue, l’audition, l’imagination, les passions de l’amour et de la haine… ; les actes corporels externes, comme la marche, l’écriture.  Aucun de ces actes ne requiert un ordre de la volonté, puisqu’ils peuvent être non délibérés.

62- Les actes qui suivent ne sont pas sujets au contrôle de la volonté : les actes intellectuels comme l’assentiment de la raison aux  vérités évidentes par elles-mêmes ; les actes sensibles comme les passions,  en tant qu’elles jaillissent de dispositions physiques qui en préviennent la prise de conscience ; les actes de la vie végétative comme la digestion et la croissance ; les mouvements du corps comme la circulation du sang et le battement du cœur.
 

Retour au plan de la Théologie Morale

Traduction originale française par JesusMarie.com, 7 octobre 2016 : autorisation est donnée à tout catholique de reproduire sur tous supports cette traduction à condition de mentionner JesusMarie.com comme auteur de la traduction

Titre Original : Moral Theology A Complete Course Based on St. Thomas Aquinas and the Best Modern Authorities. Révision par le père Edward P. Farrel, o.p. New York City Joseph F. Wagner, Inc. London : B. Herder. All Rights Reserved by Joseph F. Wagner, Inc., New York, printed in the United States of America Note : Nous avons contacté le frère dominicain américain responsable des droits littéraires des frères de cette province de l'Ordre des Frères Prêcheurs, celui-ci affirme que cette THEOLOGIE MORALE, dans sa version originale anglaise, est maintenant dans le domaine public, c'est pourquoi nous la publions et la proposons en téléchargement. Si nos informations étaient fausses, merci de nous contacter par l'email figurant en première page du site pour que nous puissions immédiatement retirer tout ce qui serait litigieux. JesusMarie.com attache la plus grande importance au respect des droits des ayants droits et au respect des lois. Tout ce qui est publié, l'est avec autorisation, relève du domaine public ou est le fruit de notre propre esprit.

JesusMarie.com