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John A. McHugh, o.p. - Charles J. Callan, o.p.
THEOLOGIE MORALE un cours complet selon saint Thomas d'Aquin et les meilleurs auteurs modernes

Imprimatur Francis cardinal Spellman, Archbishop of New York, New York, May 24, 1958
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ARTICLE 6            LA LOI CIVILE

 542- Signification.  Comme l’Église a le droit et le devoir de faire des lois pour promouvoir le bien-être spirituel de ses membres, l’État a aussi le pouvoir et l’obligation de légiférer pour le bonheur temporel de ses citoyens. Il n’y a de pouvoir que celui qui vient de Dieu, et ceux qui existent sont ordonnés par Dieu.  Le chef d’état est le ministre de Dieu pour toi,  en vue du bien. (Rom. X111, 1-4)

 543- L’origine.  L’autorité voulue pour faire des lois réside dans la personne ou le corps à qui, selon la constitution de l’état, la fonction législative appartient.  Dans une monarchie absolue, l’autorité législative réside dans le roi.  Dans un état qui a une hiérarchie héréditaire ou élue, le pouvoir législatif peut être confié, en partie du moins, au corps des nobles. Dans une monarchie constitutionnelle ou dans une république, la fonction législative appartient au peuple qui l’exerce directement (comme à Athènes ou à Rome) ou, (comme c’est le cas dans nos états modernes)  indirectement, par l’intermédiaire de ses représentants élus.

 544- Il n’est pas nécessaire qu’une loi civile soit approuvée par le peuple  pour devenir obligatoire,  car l’obéissance aux autorités est commandée (Rom X111, 5).  Et si la loi ne possède pas d’autorité, c’est le bien commun qui en souffre.  Il faut, quand même, noter plusieurs points.  Le principe qui vient d’être énoncé doit être entendu de la loi en elle-même.  Car s’il est question de la forme de gouvernement ou de la personne qui exerce les pouvoirs souverains, on peut dire que l’acceptation par le peuple est nécessaire, dans le sens où la multitude peut mettre sur pied le système de règles qu’elle préfère, et peut désigner les individus qui détiendront l’autorité selon la constitution.   Le principe énoncé plus haut doit être accepté en règle générale, car il y peut y avoir des cas où l’acceptation par le peuple est requise par la loi elle-même.  Exemple. Dans les constitutions civiles précédentes, si, à un certain endroit, une coutume légale était en force, une loi contraire qui n’abolissait pas expressément la coutume n’obligeait pas, à moins qu’elle soit acceptée.   Mais cet exemple est purement théorique, car les codes civils modernes ne reconnaissent pas la force dérogatoire des coutumes.  Si la constitution de l’état demande un référendum ou un plébiscite,  la loi passée par l’assemblée législative manque de force aussi longtemps qu’elle n’est pas  acceptée.  Cela se rapporte à l’acceptation d’une loi proposée, mais l’acceptation doit être complétée par un acte ministériel.

 On doit comprendre le principe donné plus haut comme la prise d’effet d’une loi, car le maintien d’une loi peut dépendre de l’acceptation du peuple, au sens où une coutume populaire contraire est capable d’abroger la loi, si le supérieur donne son consentement (500 et suiv.)  Il y a très peu de codes des états modernes qui donnent une force légale à une coutume populaire.  Ils supposent que, si une loi ne plait pas au peuple, l’élection ouvre une voie suffisante  à son rejet.   Mais, sur le plan moral, il n’y a aucune obligation d’obéir à une loi tombée en désuétude.

 545- Les lois faites par ceux qui n’ont aucune autorité légale, sont, par elles-mêmes, sans force contraignante, puisque la loi est un acte d’autorité.   Il peut arriver pourtant que des circonstances pressantes les rendent obligatoires, si elles sont justes et si elles sont acceptées par la majorité.  Car y résister serait préjudiciable au bien commun.

 546- La matière.   Les objets ou les catégories de biens temporels à être régulés par la loi civile sont nombreux.   Les biens externes, ou de la fortune,  devraient bénéficier de la protection de l’état.  Les lois qui les concernent  doivent promouvoir l’agriculture, le commerce, l’industrie, les arts, etc.   Les biens du corps sont plus importants, et, en conséquence, la loi devrait favoriser la famille et la croissance de ses membres.  Elle devrait fournir tout ce qu’il faut pour la santé et le bien-être des citoyens par des règlementations sanitaires et  des mesures de soulagement pour les nécessiteux, les chômeurs, les orphelins et les ainés.  Les biens de l’esprit sont nécessaires pour le progrès et le bonheur.  La loi devrait donc fournir les moyens nécessaires pour  assurer l’instruction dans les arts séculiers et les sciences, et pour la diffusion générale de toute connaissance utile.   Les biens de la volonté (vertu, moralité) sont ce qu’il y a de plus important,  autant pour l’individu que pour la communauté.  En conséquence, la loi doit sauvegarder la décence publique et la sobriété, et punir les crimes opposés aux vices.  Les biens sociaux du peuple sont promus par une législation sage relative à la forme et à l’administration du gouvernement, les devoirs et les droits mutuels des citoyens, la protection de l’état et de ses membres.

 547- Les relations de la loi civile à la loi naturelle,  L’État ne possède pas le pouvoir de faire des lois qui sont opposées à la nature.   Car, puisque la loi est un ordre provenant de la  raison, tout commandement humain qui est contraire à la nature, et donc à la raison, n’est pas une loi, mais une corruption de la loi.  Pas un seul péché, pas même un péché véniel, ne peut être rendu obligatoire par la loi.    Exemple.   La loi de Sparte qui ordonnait de mettre à mort les enfants malades n’était pas une loi, mais un meurtre légalisé.   L’État a le pouvoir de déclarer et d’imposer par des sanctions convenables les conclusions qui dérivent des principes généraux de la nature.   Car, plusieurs pourraient être ignorants de ces conclusions, ou enclins à ne pas en faire cas, si elles n’étaient pas promulguées et confirmées par une loi humaine,   Exemple.  La loi naturelle requiert que les parents s’occupent de leurs enfants, et que les enfants aident leurs parents dans le besoin.  La loi civile adopte ces principes naturels, rend leur observance obligatoire, et punit les transgresseurs.

 La loi a le pouvoir de préciser et de déterminer les provisions de la loi naturelle qui sont abstraites ou générales.   La loi naturelle détermine qu’il faut instituer un gouvernement, que le peuple apporte sa contribution au soutien de ce gouvernement, que les crimes doivent être punis, qu’on pourvoie au bien commun.   La loi civile détermine la forme spéciale du gouvernement,  la façon dont les revenus doivent être obtenus, les pénalités spécifiques de chaque crime,  les mesures publiques les plus efficaces, ce qui convient le mieux aux circonstances, etc.

/ 548- La relation de la loi civile avec la loi divine et la loi ecclésiastique.   L’état n’a aucun pouvoir pour légiférer dans les affaires  purement spirituelles, puisque sa fin et son autorité sont confinées aux choses temporelles.  En conséquence, l’État ne peut  pas interférer dans la foi, le culte et le gouvernement de l’Église.   Mais puisque la moralité promeut la prospérité d’un État,  et puisque la fin d’un individu est  spirituelle, la loi civile devrait respecter et favoriser la religion.   Dans les matières qui sont partiellement temporaires, partiellement spirituelles,  l’État a le pouvoir de légiférer sur ces aspects qui sont temporels, mais sans porter atteinte au droit divin ou ecclésiastique.   Exemples.  Les lois civiles sur l’éducation ont le droit de statuer sur des sujets non religieux, les cours, les normes etc… Mais elles n’ont pas le droit d’interdire l’éducation religieuse, ou d’imposer un enseignement purement séculier, ou l’immoralité.    Les lois de l’état sur le mariage peuvent requérir qu’il soit inscrit sur un registre civil, peuvent déterminer les effets civils du mariage, mais elles n’ont, en aucune façon, le droit d’intervenir dans l’indissolubilité  du mariage, ou la sainteté du lien matrimonial.

 549- L’État est pour la personne, et non la personne pour l’État.  En conséquence, la loi civile ne devrait pas interférer avec les libertés humaines, sauf au cas où cela s’avèrerait nécessaire pour la paix générale, le salut, ou un immense avantage pour le peuple entier.  En conséquence, les libertés humaines qui ne sont pas inaliénables peuvent être limitées par la loi, quand le bien commun ou le bien-être des individus le demande.  Exemples.  L’État a le droit de statuer sur les actes de ceux qui sont incapables de prendre soin d’eux-mêmes dans des matières d’importance, d’interdire ce qui est nuisible à l’intérêt  commun, (comme la chasse, la pêche en certaines saisons), de protéger le public quand il oublie de se protéger lui-même, etc.  Les interférences non nécessaires faites par le gouvernement avec les affaires personnelles et privées doivent, bien entendu, être évitées, car la restriction  de la liberté est quelque chose de désagréable, et on ne devrait pas y recourir sans nécessité.

  Les droit humains fondamentaux (comme le droit de vivre, de se marier, d’élever une famille, d’être libre, de poursuivre le bonheur) ne devraient pas être transgressés par la loi civile.   Ainsi, l’état n’a pas le droit d’interdire le mariage aux pauvres.   Il a, au contraire,  l’obligation d’éliminer les conditions qui engendrent la pauvreté.   Mais quand le bien commun exige un sacrifice,   l’état a le droit de demander aux citoyens d’exposer même leurs vies et leurs biens pour sa défense.

 550- Ceux qui sont les sujets de la loi civile.   La loi civile oblige tous ceux qui d’une façon ou d’une autre sont soumis à  son autorité.  Les citoyens qui sont liés aux lois de leur pays quand ils y sont,  sont liés par quelques lois quand ils sont à l’étranger, comme par celles qui règlent leur statut personnel et leur fonction, mais non pas par les autres, comme celles qui sont d’un caractère territorial.   Les étrangers sont soumis aux lois du pays qui les reçoit, comme celles qui règlent l’ordre public ou la façon de  faire des contrats.

 551- Les obligations de la loi civile.  Quand elle remplit toutes les conditions d’une loi valide, et même si le législateur est  areligieux  ou anti religieux, la loi civile est obligatoire non seulement devant l’état mais devant Dieu (c’est-à-dire en conscience).  Cela vient de la loi naturelle dont elle est une dérivation (Cf 319).  Cela vient aussi de la loi positive divine, car il est souvent déclaré dans l’Écriture, dans la pratique et dans l’enseignement de l’Église,  qu’une autorité légale représente Dieu, et doit être obéie en conscience. Rendez à César ce qui est à César. (Matt. X11, 21  Soyez soumis par nécessité, non à contre cœur,  mais en conscience. (Rom. X111, 5)
 
 

552- Les sujets sont-ils obligés de s’offrir d’eux-mêmes pour être punis par la loi ?  Si la faute commise est purement juridique (devant la loi),  la pénalité n’est surement pas obligatoire avant la sentence.   (Pierre tue un homme  par pur accident, sans négligence ou sans mauvaise intention.) Mêmes si l’emprisonnement est la peine d’un homicide involontaire,  Pierre n’est pas obligé de se livrer.  La loi communément reçue tient quelqu’un pour innocent tant qu’il n’a pas été trouvé coupable; et quelqu’un ne peut pas être reconnu coupable de n’importe lequel degré d’homicide sur sa seule confession.   Mais il peut plaider coupable d’offenses mineures.

Si la faute commise est  théologique, (devant Dieu), et si la peine est la perte d’un droit ou d’un privilège,  la peine est obligatoire en conscience.  Dans le droit canon, ces pénalités s’appliquent souvent à l’instant même, c’est-à-dire avant le prononcé de la sentence (suspension d’un clerc).  Mais la loi civile, semble-t-il, n’impose de pénalité qu’après le verdict du juge.  Pierre, pour motif de corruption, a perdu le droit de voter, mais il n’a pas encore été déclaré coupable par la cour.  Il peut donc continuer à utiliser son droit de vote.  Si la faute est théologique et la pénalité encourue  l’exil ou l’emprisonnement, la pénalité ne devient obligatoire qu’après la décision du juge.  Car, exiger que quelqu’un se condamne lui-même à l’exil, ce serait trop demander à la nature humaine.  C’est la police, non le coupable, qui a le devoir imposé par la loi d’écrouer quelqu’un.
553- La sorte de pénalité imposée dépend de la volonté du législateur. Il peut obliger sous peine de péché,  de nullité, ou de punition.   Il peut obliger sous peine de péché grave ou véniel.    554- En règle générale, on considère que le législateur  oblige sous peine de péché dans les cas suivants.  Quand la loi civile est une détermination juste de la loi naturelle (la loi de propriété);  quand la loi se rapporte directement et nécessairement au bien commun (lois de défense nationale en temps de guerre;  les lois qui imposent les taxes nécessaires. Cf  379).

555- On considère que le législateur n’oblige pas sous peine de péché dans les cas suivants.  Quand la loi est présentée comme pénale, ou est prudemment considérée comme telle,  comme c’est le cas des lois qui sont de peu d’importance, ou qui peuvent être imposées sans obligation morale.  Des lois utiles plutôt que nécessaires.  Quand la loi est purement irritante ou invalidante, le sujet n’est pas obligé d’omettre l’acte invalidé, mais seulement de souffrir des conséquences de la nullité devant la loi.

 Quel est le devoir d’un sujet s’il doute que la loi oblige ?  Si le doute porte sur sa justice, le sujet peut toujours l’observer avec une bonne conscience.  On peut obéir à une loi injuste jusqu’à ce qu’elle soit déclarée  juridiquement injuste, si elle n’est pas manifestement opposée aux droits divins ou humains. Si on doute si la loi oblige réellement sous peine de péché, on ne pêche pas directement en ne l’observant pas. (Cf 375, 376, 377, 561)

 557- Les sortes spéciales de lois.  Les lois qui déterminent la possession sont celles qui définissent dans des termes clairs et explicites les droits à la propriété qu’ont les citoyens, dans des domaines comme des biens perdus et trouvés, la prescription, les héritages, le droit d’auteur, la distribution de la propriété, les droits des veuves, la capacité des mineurs, les contrats, etc.  On considère communément que ces lois obligent sous peine de péché, même avant un jugement de la cour, parce qu’elles sont des déterminations de la loi naturelle faites par l’autorité  qui représente Dieu dans les choses temporelles; et parce qu’elles sont nécessaires à la paix sociale.

 558- Les lois irritantes ou invalidantes sont celles qui privent certains actes de leur valeur légale.  Le bien commun requiert que certains actes, même valides naturellement, soient invalidés par l’état (des contrats faits par des mineurs, des dons faits sous la contrainte, des testaments non authentiques).  En conséquence, on ne peut pas douter que l’effet de l’invalidation puisse être imposé sous peine de péché.  Cela vaut même avant la décision juridique s’il est clair que, dès le début, le législateur devait avoir l’intention et l’avait effectivement d’enlever à un acte sa validité morale.   Exemple.   Si un procès met quelqu’un (un mineur) en un grand désavantage, la loi peut invalider en conscience un contrat, et avant que le jugement ne soit rendu.

 Une loi irritante n’oblige pas en conscience avant la déclaration de nullité, s’il n’est pas clair que c’est ce que voulait le législateur. Car on peut présumer que l’état se contente des moyens externes aussi longtemps qu’ils sont suffisants pour l’obtention de la fin.  Et comme l’invalidation d’un acte déplait grandement, elle doit s’appuyer sur quelque chose qui indique qu’elle correspond à son intention.    Mais après le rendu de la sentence, ce qui est civilement nul est moralement nul.   En conséquence, si la cour déclare  qu’un testament est invalide, parce qu’il n’a pas été rédigé dans les formes, la décision s’impose en conscience.    559- Les législateurs civils, dans les temps modernes, ne se soucient guère de l’obligation morale ou naturelle.  Ils n’envisagent que les lois qui peuvent maintenir l’harmonie dans la société.   En conséquence, ce n’est pas d’après les mots mais d’après l’intention de la loi qu’on peut, en règle générale, décider si oui ou non une loi irritante oblige en conscience à l’instant même (avant la déclaration du juge).

 On devrait considérer comme obligatoire à l’instant même une loi irritante quand l’intention générale de la loi (le bien commun), ou son but spécifique, requiert l’existence d’une obligation en conscience, même avant la décision de la cour.  Exemple.  Des lois qui invalident des engagements à faire des choses illégales, ou dont le but est de protéger les mineurs, ou de diminuer le nombre des procès.  On doit considérer qu’une loi irritante n’oblige pas à l’instant même quand la fin de la loi n’exige pas clairement qu’elle soit obligatoire avant le prononcé de la justice.  Car, comme on l’a observé plus haut, l’invalidation est quelque chose qui répugne.  Elle ne doit donc pas être prise pour acquise.  Ainsi, les lois qui invalident un acte ou un contrat en raison d’un manque de formalités légales,  n’affectent pas, avant la sentence,  les droits naturels ou les obligations.  560- Bien que le législateur civil ait le droit d’annuler certains actes, et d’éteindre ainsi les droits moraux et les obligations qui autrement continueraient à exister, les lois soi disant irritantes ont souvent des intentions différentes.  Une loi qui fait une demande qui ne peut pas être accordée en cour ne détruit pas le droit naturel du demandeur.  Exemple.  La loi des limitations des états modernes n’accorde  généralement pas le droit de poursuivre un débiteur en cour après six ans.  Néanmoins, l’obligation morale du débiteur demeure.

 La loi qui invalide un acte ou un contrat ne l’annule pas.  Elle ne fait qu’accorder à la personne concernée le droit de l’attaquer validement devant un tribunal.  En conséquence, si les conditions requises par la loi naturelle pour la validité d’un contrat  (la connaissance, le consentement) sont présentes, les droits moraux et les obligations ne sont pas invalidés.   Exemple.  Selon la loi civile, les mineurs peuvent rétracter des contrats qu’ils ont faits.   Mais aussi longtemps que le contrait n’a pas été désavoué, l’autre partie a le droit moral d’insister pour qu’il soit exécuté.  S’il a été ratifié après la majorité, l’ex mineur n’a pas le droit de recourir au bénéfice de la loi pour rescinder le contrat.

 561- Du point de vue de la pénalité, on peut distinguer quatre sortes de lois. Les lois purement prescriptrices sont celles qui obligent sous peine de péché, mais non de punition.  Il y a des lois de l’Église de cette sorte (comme l’obligation d’assister à la messe le dimanche).  Il y a aussi des lois civiles qui n’obligent pas sous peine de punition (celles qui concernent l’âge d’un mariage légal.  Car si un couple faussait leur âge, ils pourraient être poursuivis pour fausse représentation, mais pas pour le fait de s’être mariés).   Les lois purement pénales sont celles qui obligent sous peine de faute juridique et de punition, mais non sous peine de péché (les lois qui punissent la négligence dans la conduite d’une voiture,)

 Les lois mixtes disjonctives sont celles qui obligent sous peine de péché à obéir à la loi ou à  souffrir une punition (une loi qui oblige à obtenir un permis de pêche ou de chasse,  ou de payer une amende. Les lois mixtes conjonctives sont celles qui obligent sous peine de péché et de punition.562-   Tous sont d’accord sur l’existence de la première et de la quatrième classes.  Mais certains s’opposent à l’existence des deux autres.  Ils  soutiennent qu’une loi qui n’oblige pas en conscience est une impossibilité.   Ils invoquent l’enseignement de l’Écriture et de l’Église qui supposent que toutes les lois justes obligent en conscience. Ils disent que, puisque le législateur tient la place de Dieu, on ne peut faire une offense au législateur humain sans en faire une à Dieu.  Ils disent aussi que les lois civiles ne sont que des déterminations de la loi naturelle, et qu’elles obligent donc en conscience comme elle; que les directives d’un supérieur qui n’engagent pas en conscience sont des conseils plutôt que des commandements.

 563- A ces arguments et à d’autres semblables, les défenseurs de l’existence  des  lois pénales  répliquent que ce genre de lois n’oblige pas en conscience, sous peine de péché et d’offense à Dieu,  de faire ou d’omettre ce que la loi prescrit, tout comme le vœu  de  s’abstenir de jouer aux cartes ou de faire à chaque manquement une aumône.  Ce voeu n’oblige pas en conscience de ne pas jouer aux cartes. L’Église reconnait les lois pénales (Cf 450), et il n’y a aucune raison qui empêcherait une loi civile d’être pénale.

 564- Même si la transgression d’une loi purement pénale n’est pas un péché pour la loi civile, sa répugnance à la loi de Dieu la rendra fréquemment et même habituellement peccamineuse. Ainsi la transgression d’une loi constituera un péché si l’intention est mauvaise (comme le mépris de la loi), ou si les circonstances le sont aussi (comme une négligence coupable envers une passion désordonnée). La transgression sera peccamineuse si quelqu’un en prévoit ou devrait en prévoir les conséquences mauvaises (comme le scandale).

 565- On admet généralement que quelques lois civiles sont purement pénales, puisqu’elles infligent des peines pour une faute, une négligence, ou une responsabilité qui ne sont souvent que juridiques.  Exemples.   Une loi qui impose une amende aux conducteurs qui dépassent la vitesse permise, même s’ils échappent à toute faute morale, ou même si le propriétaire de la voiture doit payer pour les dommages causés par son chauffeur.    566- Même ces lois obligent sous peine de péché d’une certaine façon.   Le transgresseur est responsable  moralement de la peine prescrite par la loi, après que la sentence a été rendue.  Ces peines sont justes, car le bien commun les requiert.  Exemples. Le chauffard doit payer une amende légale, quand elle a été imposée.  Il peut ne pas avoir commis de péché, mais l’amende le rendra plus circonspect à l’avenir.   Les officiers de la loi sont moralement obligés d’appréhender et de juger les transgresseurs.

 567- Un grand nombre de lois civiles sont considérées aujourd’hui par la majorité comme disjonctives, c’est-à-dire comme préceptrices ou pénales.   Et comme une coutume prudentielle fournit une bonne norme interprétative (Cf 484, 506), le point de vue du grand nombre est un guide sur.   Exemple.  Même des personnes consciencieuses  ne considèrent pas avoir commis un péché si, de temps à autre, elles conduisent une voiture sans licence, ou si elles pêchent dans une réserve gouvernementale sans le permis requis par la loi, quand cela ne cause aucun danger à personne.  568- Les législateurs modernes entendent-ils que soient purement pénales ou seulement préceptrices  la grande majorité de leurs lois qui ne sont ni des déclarations de la loi naturelle ni des décisions essentielles au bien commun ?  C’est une question disputée.

Voici les arguments de ceux qui sont contre.   L’obligation morale n’est pas nécessaire, parce que les policiers et les juges suffisent pour imposer la loi.  L’obligation morale serait nuisible car les lois existantes,  les projets de  loi et celles que l’on passe constamment sont si nombreuses que si elles obligeaient toutes en conscience, un fardeau insupportable serait mis sur les épaules du peuple.   Les législateurs dans leur ensemble  n’ont pas l’intention d’imposer une obligation morale, car quand ils rédigent des lois ils n’ont que du mépris ou de l’indifférence pour les motifs religieux.  Voilà pourquoi un si grand nombre de juristes estiment aujourd’hui que le danger d’encourir la pénalité prescrite par la loi est la seule obligation que le législateur entend imposer, ou que l’obligation morale doit venir de la conscience de l’individu (imposée par lui-même).  La coutume, le meilleur interprète de la loi, n’admet pas l’obligation morale. Or, la plupart des citoyens ne considèrent pas aujourd’hui que la loi civile oblige sous peine de péché.

569- Ceux qui défendent l’opinion contraire s’expriment ainsi. La prévalence du crime et l’inefficacité des cours démontrent le besoin que les lois civiles obligent moralement.  Et même si les lois sont en force, elles ne le demeureront pas longtemps, car on a perdu le respect des lois.  Même s’il y a un nombre excessif de lois, on ne peut pas vraiment dire que le citoyen est accablé par elles dans sa vie de tous les jours.  Les législateurs d’aujourd’hui ne sont pas plus antichrétiens que les empereurs païens d’autrefois à qui les Écritures  ordonnaient d’obéir.  Et même s’ils ne croient pas eux-mêmes à la religion ou à l’obligation en conscience, ils ont vraiment l’intention de donner à leurs lois toutes les sanctions que le bien commun réclame.  Ils imposent donc implicitement une obligation quand le contraire n’est pas indiqué.  L’objection à l’effet que la majorité des citoyens des états modernes considèrent que les lois civiles n’obligent pas en conscience peut-être facilement écartée, puisqu’on ne peut en fournir la preuve.  De plus, l’interprétation habituelle des citoyens ne rend pas pénales les lois préceptrices sans le consentement du législateur.

 570- Voici quels sont les signes que la loi n’est que pénale.  La déclaration expresse du législateur qu’elle n’oblige que sous punition.  Exemples.  Dans les constitutions des Dominicains, il est dit expressément qu’elles n’obligent pas sous peine de faute, mais de punition seulement. (Cf no 32).  La même chose est vraie pour celles des Franciscains, des Rédemptoristes, et de la plupart des congrégations récentes.  On dit que quelques lois civiles sont formulées ainsi : ou fais cela, ou subis ta peine si tu es condamné.   D’autres lois définissent une négligence coupable d’une façon  telle que, finalement, elle n’a rien à voir avec le péché.

 Un autre signe d’une loi pénale est la déclaration implicite du législateur.  Si une lourde pénalité est prescrite pour une transgression légère, le gouvernement déclare par le fait même qu’il n’impose aucune obligation supplémentaire.  Blackstone dans ses commentaires des lois de l’Angleterre, considère comme purement pénales toutes les lois dans lesquelles la pénalité infligée est une compensation adéquate pour l’inconvénient civil que l’offense est censée avoir causé.  Comme les lois de préservation du gibier, et celles qui interdisent d’exercer un métier sans avoir été un apprenti (Vol 1, sec. 58).   Un troisième signe est l’interprétation des autorités compétentes.  Exemple.  Pratiquement tous les moralistes catholiques et le peuple en général considèrent comme pénales des lois qui ne sont qu’utiles, mais non nécessaires (interdiction de fumer ou de cracher dans certains lieux publics; les lois sur les permis de pêche et de chasse etc.)

 571- En dépit de tout ce qu’on peut dire sur les assemblées législatives en général, on ne peut pas prétendre qu’aux Etats-Unis,  elles sont indifférentes aux obligations morales ou qu’elles s’en fichent. Les actes publics, les discours des sénateurs et les parlements des divers états montrent que les représentants élus du peuple respectent la religion, et ne désirent pas se passer de son aide  dans leurs délibérations et dans leurs décisions.   Néanmoins, l’opinion qui prévaut chez les législateurs est à l’effet qu’une loi américaine purement positive ne prétend pas obliger en conscience.

 572- Quoi qu’il en soit,  l’attitude d’un citoyen envers la loi civile devrait être empreinte de respect et de loyauté.  On devrait obéir à une loi qui est bonne, même si le législateur n’impose pas d’obligation morale, car la raison et l’expérience montrent que le mépris de la loi est une source de scandale et de plusieurs maux privés et publics.    Si une loi n’est pas bonne, il faudrait avoir recours à tous les moyens légaux pour qu’elle soit abolie le plus tôt possible.  Mais le principe qu’une loi mauvaise est toujours ce qu’il y a de mieux si elle est imposée avec vigueur,  est contredit par l’histoire.  Et il arrive parfois que le bien public demande de discréditer les commandements déraisonnables.   Les lois dites bleues en sont un exemple.

 573- D’autres questions concernant la loi civile que nous rencontrerons ailleurs sont l’obligation des coutumes, la taxation et le devoir militaire, et le pouvoir de l’état d’infliger la peine capitale.
 
 

                                     QUESTION 4

                          LA CONSCIENCE
 

 574- Pour que l’homme tende à sa fin dernière il ne suffit pas de tracer un chemin dans les grandes lignes (comme le font la loi naturelle et les lois positives).  Ces lois doivent être appliquées à chaque acte en particulier par la raison pratique ou la conscience, comme quand elle passe un jugement sur le bien ou le mal d’une action, en tenant compte de toutes les circonstances.

                           ARTICLE 1

               LA LOI DE CONSCIENCE
       (somme théologique 1. q. 79 aa. 11-13)
 

 575- Définition.  La conscience est un acte de jugement fait par la raison pratique qui, en se référant aux principes généraux,  décide que tel acte particulier est bon ou mauvais.  C’est un acte, et, comme tel, elle diffère de la connaissance morale et des vertus intellectuelles,  qui ne sont pas transitoires, mais durables. Elle diffère de la compréhension morale (syndérèse)  qui fait comprendre, par chacun, naturellement, la vérité des principes généraux et évidents de moralité.  Elle diffère aussi de la science morale qui fait connaître au théologien ou au moraliste l’ensemble des conclusions tirées des principes moraux.   Elle diffère enfin de la prudence qui permet à l’homme vertueux de faire des applications justes des règles morales dans des cas particuliers.   Ces choses, avec lesquelles ont la compare, sont toutes des états permanents, et elles sont une préparation de l’acte de conscience dans lequel quelqu’un se sert de sa connaissance à ui pour se prononcer sur la légalité ou l’illégalité d’une action concrète considérée avec toutes ses circonstances.

 La conscience est un acte de jugement.  Elle diffère ainsi des autres actes employés par la prudence : du conseil au sujet des moyens adéquats ou des voies d’accès, et du commandement.  Le conseil recherche ce qui est la meilleure chose à faire; la conscience prend la décision.  Le commandement moral, lui,  incite à l’action.    La conscience est dans la raison.  C’est-à-dire qu’elle est un guide subjectif.  Elle diffère ainsi de la loi qui est un guide objectif.    La conscience est dans la raison pratique.   A la différence des autres jugements qui sont spéculatifs et qui ne se rapportent pas à l’action,  mais aux seuls aspects théoriques de l’action, (le jugement que Dieu est parfait, que les facultés actives sont distinctes de l’âme etc.), la conscience s’intéresse à l’action du point de vue de son exercice moral.     La conscience est une déduction des principes généraux.  Elle diffère ainsi de la compréhension morale (syndérèse).  La dernière est un habitus par lequel quiconque est suffisamment développé mentalement est capable de percevoir sans équivoque que les propositions générales de la moralité  doivent être vraies, comme les axiomes de la loi naturelle (Cf 319 et suiv.)  La conscience tire des conclusions de ces axiomes.  La conscience se prononce sur la moralité d’un acte.  Il y a une différence entre la conscience morale et la conscience psychologique.   La conscience, au sens d’être conscient, est une faculté psychologique dont la fonction est de percevoir ses pensées, ses actes et ses états d’âme.  La conscience dont nous parlons maintenant est un jugement moral sur la légalité ou l’illégalité de ces pensées, de ces actes ou de ces états d’âme.  Ainsi, la conscience psychologique témoigne que quelqu’un est attentif au déroulement d’un certain acte, tandis que la conscience morale juge la moralité en condamnant, en approuvant ou en excusant ce qui se passe.

 La conscience juge un cas particulier, c’est-à-dire qu’elle se rapporte à un acte qui doit être fait à un certain moment, à un certain lieu par une certaine personne, en tenant compte de toutes les circonstances.   La conscience diffère donc de la science morale qui, bien qu’elle synthétise l’ensemble des conclusions tirées de la loi naturelle et des lois positives, est incapable d’en faire des applications aux nombreux cas particuliers qui se présentent.  Les livres de casuistique eux-mêmes, qui donnent des solutions à des cas particuliers, ne peuvent pas prendre la place de la conscience, car c’est l’individu, en dernier ressort, qui juge ces solutions ou leur applicabilité aux circonstances particulières.

 576- Division.  On divise la conscience de différentes façons.   Selon que l’acte jugé est passé ou futur, la conscience est antécédente ou consécutive.  La conscience antécédente est un moniteur qui décide que l’acte futur sera légal ou pas.  La conscience conséquente ou consécutive est un juge qui produit la paix ou le remords au sujet de ce qui a été fait.   D’après la sorte de direction ou de décision qu’elle donne, la conscience antécédente commande, interdit, permet ou conseille, tandis que la conscience conséquente approuve ou condamne (Rom. 11, 15).   577). Selon qu’elle est en accord ou en désaccord avec la loi humaine ou la loi divine externe, elle est vraie ou fausse.   Une conscience vraie juge  bon et commandé ce qui est réellement bon et commandé. Exemple. Selon la loi, quelqu’un peut se servir de l’argent qui est à sa disposition. Un montant d’argent devant Pierre est vraiment à sa disposition. Sa conscience est donc vraie s’il décide qu’il peut se servir de cet argent.  Une fausse conscience juge que ce qui illégal est légal, ou vice versa. L’heure viendra où quiconque vous tuera pensera rendre un culte à Dieu. (Jn XV1, 2).  Exemple.  Pierre aurait une fausse conscience s’il décidait qu’il n’a pas le droit de se servir de l’argent qui est devant lui.  Cela se produirait s’il se trompait au sujet du principe général, ou au sujet du fait que l’argent était  à sa disposition, ou s’il tirait une mauvaise conclusion des prémisses,

 578- Selon ce qui la qualifie pour être un guide de conduite, on peut considérer la conscience en relation ou à la volonté ou à l’intelligence.   En relation à la volonté la conscience est ou bonne (vraie) ou mauvaise (fausse) selon qu’elle procède ou ne procède pas d’une disposition droite par rapport à la fin et les moyens.   Exemple.  Si le Pierre ci-haut mentionné avait décidé que l’argent était à sa disposition parce qu’il avait désiré connaitre la vérité et qu’il avait enquêté autant qu’il l’avait pu, sa conscience serait bonne.  Mais s’il avait décidé de s’en emparer sans s’informer suffisamment, et s’il ne recherchait que ses propres intérêts, sa conscience serait mauvaise.

 En relation à l’intelligence, la conscience est certaine ou incertaine,  selon qu’elle décide avec ou sans la peur de se tromper.  Exemples.  Si Pierre décide qu’il a le droit d’utiliser l’argent, et s’il est si convaincu que son jugement est vrai qu’il ne redoute ni crainte  ni erreur, sa conscience est certaine.   Mais sa conscience est incertaine si, contre son jugement, demeurent de sérieuses difficultés auxquelles  il ne peut pas donner de réponse satisfaisante, de sorte qu’il  donne son assentiment tout en pensant qu’il pourrait se tromper.

 579- Une conscience peut avoir quelques-unes des qualités mentionnées ou elle peut ne pas les avoir.  La même conscience peut être vraie et mauvaise en même temps,  fausse et bonne en même temps, c’est-à-dire que le jugement de l’intelligence peut être en accord avec les faits objectif, mais il peut au même moment être dirigé par une volonté ou une intention mauvaise, ou vice versa.    Exemples. Paul est convaincu, sans faute de sa part, qu’il doit mentir pour venir en aide à Jean, parce que Jean l’avait aidé autrefois en mentant.    Sa conscience est fausse mais bonne.   Pierre n’est pas du tout obligé de payer une somme d’argent qu’on lui demande.  Mais les raisons qu’il invoque pour se persuader qu’il n’a pas à payer sont mauvaises parce qu’elles sont, il le sait très bien,  controuvées, tirées par les cheveux, sophistiques.  Sa conscience est vraie mais mauvaise.

 La même conscience peut être bonne et incertaine, ou mauvaise et certaine.  Exemples.  Si le Paul  dont nous avons déjà parlé croit qu’il est tenu de mentir, mais soupçonne que ce ne serait pas bien, sa conscience serait bonne puisqu’elle cherche à faire ce qui est bien, mais incertaine puisqu’elle n’est pas sure de ce qui est juste.  Si le Pierre dont nous avons parlé avait pris une si grande habitude de l’insincérité et des sophismes qu’il ne redoutait plus de se tromper, et s’il avait donné un assentiment complet et spontané à sa décision de ne pas être obligé de payer l’argent demandé, sa conscience serait mauvaise mais certaine subjectivement.

 580- L’obligation de la conscience. L’homme est tenu d’être guidé par sa conscience négativement et positivement, c’est-à-dire qu’il doit ne pas désobéir à ses commandements, ni refuser d’obéir à ce qu’elle commande.    Elle oblige par raison de commandement divin, puisqu’elle agit comme la voix ou un témoin de Dieu qui nous fait connaitre et promulgue pour nous la loi morale.   En conséquence, tout ce qui ne vient pas de la conscience est péché. (Rom. X1V, 23).   La conscience oblige de par la nature des choses, car, puisque la volonté est une faculté aveugle, elle doit être guidée par le jugement de la raison, et doit suivre l’éclairage inné qu’elle lui donne au sujet de la loi. En dehors de la révélation, il n’y aucune autre façon de savoir ce que Dieu veut que nous fassions à chaque instant.

 581- Néanmoins, l’autorité de la conscience n’est pas  illimitée.  La conscience n’est pas indépendante de la loi externe et de l’autorité.   Elle n’est pas une moralité autonome de la raison ou de la volonté, ni une inspiration ou une interprétation privée.  Car sa fonction n’est pas d’établir  ou de juger des lois, mais d’appliquer une loi à un cas particulier, de la façon même qu’elle est présentée par l’Église.   La conscience doit donc viser à être vraie, c’est-à-dire qu’elle doit être en accord avec une loi objective et elle doit l’exprimer.
 

La conscience n’est pas indépendante de la rectitude de la volonté.  Ce n’est pas un jugement spéculatif dont la valeur ne dépend que de l’accord entre l’esprit et les faits, comme dans le cas d’une conclusion de pure science.  C’est un jugement pratique qui doit guider toute la conduite de l’homme.  Sa valeur dépend donc de la relation à la fin qu’ont les moyens qu’elle choisit,  dans le but de l’atteindre.  En conséquence, la conscience doit être bonne, c’est-à-dire qu’elle doit être un jugement dicté par une volonté bien disposée envers la vraie fin de la vie.

La conscience n’est pas indépendante de la certitude de l’intelligence. C’est un jugement formé non par le sentiment, l’émotion ou par ses propres désirs, mais par une conviction évidente et forte.   Car son rôle est de donner à l’homme une sureté de conduite dans les affaires les plus importantes.   En conséquence, la conscience doit être certaine, c’est-à-dire qu’elle doit être un jugement auquel l’intelligence donne, sans hésitation,  son assentiment.      582- Pour être la règle véritable et le modérateur de la vie morale de l’homme,  la conscience doit avoir les qualités suivantes.   Elle doit être bonne et pragmatiquement vraie, c’est-à-dire en accord avec la dernière fin de l’homme, en autant que les efforts d’un individu peuvent parvenir à concorder avec la loi objective.  Car la norme du bien moral n’est pas l’opinion ou le désir de chacun, mais Dieu comme fin dernière, et la loi naturelle et positive comme moyens pour l’atteindre.   Elle doit être certaine, c’est-à-dire, qu’elle ne doit pas craindre de se tromper.  Elle doit avoir au moins ce degré de certitude atteignable dans les matières morales.   Car, agir avec la peur de commettre un péché c’est vouloir faire ce qui peut être un péché.  C’est donc un consentement au péché.

583- Puisque la conscience qui a les qualités requises est notre guide immédiat dans les matières morales, il s’ensuit qu’on doit suivre une conscience qui est objectivement bonne, vraie et certaine dans tout ce qu’elle commande ou interdit; et même une conscience qui se trompe invinciblement (Cf 3-), mais qui parait vraie et certaine.  Exemples. Si un enfant croit, comme on le lui a enseigné, qu’il faut dire un mensonge pour prévenir un malheur, il est tenu de mentir.  Si une personne mange ce qu’elle croit être à tort une nourriture défendue, elle est coupable de violation de la loi.
584- Exception.  Si une invincible erreur résulte du manque de l’intelligence nécessaire pour commettre un péché (Cf  249, 387), l’incapacité de suivre sa conscience, en ce cas, ne rend pas quelqu’un coupable.  Exemple. Si on parvenait à persuader quelqu’un qui ne peut pas marcher qu’il est quand même obligé de marcher jusqu’à l’Église pour assister à la messe, sa conscience ne rendrait pas l’omission peccamineuse.  La conscience suppose un jugement sain, mais le jugement en question n’est pas sain.

585-- Une conscience qui n’a pas les conditions requises n’est pas un guide sur. On ne peut donc pas la suivre.    On ne doit pas suivre une conscience erronée si l’erreur est vincible, et s’il y a danger de péché.   On ne peut pas non plus agir contre elle,  s’il y a danger de pécher.   Suivre une telle conscience serait faire ce qui est mauvais, et agir de mauvaise foi, (avoir une conscience mauvaise et erronée). Ne pas la suivre serait aller contre son propre jugement, tout mauvais qu’il soit, et faire ce qui est juste sans sincérité (avoir une conscience mauvaise et vraie).  Exemple.  Une personne qui s’est persuadée que la malhonnêteté est nécessaire en affaires, mais qui se rend compte que ses raisons ne sont pas convaincantes, pêche contre la sincérité si elle suit son opinion. Elle pêche contre ses convictions si elle ne suit pas son opinion.  Mais ce dilemme ne vient que de ses sophismes et de sa mauvaise volonté.  Elle ne peut s’en sortir qu’en étant assez honnête avec elle-même pour s’enquérir de la vérité.

On ne doit pas suivre une conscience douteuse, si le doute est tel qu’il empêche quelqu’un d’être sûr que  tel acte est permis.  Exemple. Si quelqu’un ne sait pas si tel remède sera utile ou nuisible à un malade, sa conscience est douteuse puisqu’elle doute qu’il soit permis d’administrer le remède.  Il ne doit donc pas la suivre.  S’il fait, malgré cela, usage du remède, il est responsable du tort qu’il a prévu, même s’il ne se produit  pas.

586- Exception. Il est permis de suivre une conscience vinciblement erronée, dans les cas où il n’y a pas de danger de pécher.   Exemple.  Si une personne a négligé de s’informer au sujet des jours d’obligation, et si sa négligence l’entraîne à penser que le vendredi saint est un jour de congé, il ne pêche pas en n’assistant pas à la cérémonie.
587- Voici quels sont les signes d’une conscience vinciblement erronée.  Si, dans le passé, quelqu’un n’a pas eu la même diligence à s’enquérir de ses devoirs religieux que celle qu’ont les personnes consciencieuses; si quelqu’un a des craintes, des doutes ou des soupçons au sujet de la sincérité de son jugement.

588- Les conséquences d’une conscience erronée.  Voici ce qui résulte de la foi mise dans une conscience erronée. Celui qui suit une conscience erronée qui commande, ordonne ou permet, n’est pas coupable de péché si son ignorance est invincible. Exemple. Un enfant qui pense être obligé de mentir parce que c’est ce qu’on lui a enseigné, est exempt de toute faute à cause de son ignorance. Celui qui suit une conscience erronée qui commande, ordonne ou permet, est coupable si son ignorance est vincible.  Exemple.  Un adulte qui s’est persuadé que l’arnaque  est légale, obligatoire ou permise, ou que la sincérité est déplacée, mais qui devrait être mieux renseigné, ne peut pas se servir de sa conscience comme excuse (Cf. 97)

589- Voici quelles sont les conséquences de la désobéissance à une conscience erronée.  Est coupable celui qui désobéit à une conscience invinciblement erronée. Exemple. Est coupable de désobéissance un enfant qui refuse de dire un mensonge quand il pense qu’il devrait mentir selon l’enseignement qu’il a reçu. Est aussi coupable celui qui désobéit à une conscience vinciblement erronée.  Exemple. Pierre promet de dire un mensonge pour aider quelqu’un. Mais il se met à douter si c’est légal ou non. Il ne prend pas la peine d’y réfléchir suffisamment, et il décide impulsivement qu’une promesse doit être tenue. Quand vient le temps d’agir, il se trouble et ne tient pas sa promesse pour ne pas avoir de souci. Il est coupable.
590- Si une conscience qui était vinciblement erronée à l’origine devient par la suite invinciblement erronée, on doit juger de la façon suivante les actes qui proviennent d’une telle conscience.   Ils sont matériellement mauvais en eux-mêmes, et formellement mauvais dans leur cause. Exemple.  Pierre qui veut devenir un conseiller prévoit qu’il pourra faire des erreurs qui coûteront cher aux autres, à cause d’une formation insuffisante.  Il devient quand même conseiller, et essaie de rattraper les études perdues, mais il lui arrive une fois de faire du tort à un patron par un mauvais avis qu’il n’aurait jamais donné s’il avait été un étudiant plus studieux. Le mauvais avis est objectivement en lui-même un péché dans la mesure où il a causé du tort.  Il est subjectivement peccamineux dans sa cause, en tant qu’il est le résultat d’une négligence qui faisait prévoir ce qui est arrivé.   Les actes en question ne sont pas formellement mauvais en eux-mêmes.   Exemple.  Pierre a été formellement coupable du tort causé à autrui au moment où il a prévu ce que sa négligence causerait.  Il n’était pas formellement coupable au moment où il a fait du tort à autrui, parce qu’il s’était efforcé entre temps de réparer sa négligence, et il n’était pas conscient de son ignorance.

591- Voici les sortes de péchés commis suite à une conscience erronée.   Le péché commis en suivant une conscience vinciblement erronée est de la même gravité et de la même espèce que l’acte dont la conscience est responsable. Mais l’ignorance est une circonstance atténuante.  Exemple.  Celui qui aveugle sa conscience pour pouvoir décider en faveur d’une calomnie grave est coupable d’un péché mortel contre la justice, mais il est moins coupable que s’il avait péché sans la permission de sa conscience.   Le péché commis en désobéissant à une conscience invinciblement erronée est de la gravité et de l’espèce jugées par la conscience.    Une personne qui dit un petit mensonge en pensant que c’est un péché mortel contre la charité est coupable de la malice qu’il a vue dans l’acte.  Exemple.  Pierre qui n’a pas rempli sa promesse de dire un mensonge, après avoir décidé que la meilleure chose à faire était de tenir sa promesse,  a été coupable d’un bris de promesse.    La gravité d’un péché contre une conscience vinciblement erronée est toujours la même que celle que la conscience a perçue, à moins que ce qui est sérieusement mauvais soit fautivement confondu avec ce qui est légèrement mauvais.  Exemples.  Si le Pierre dont nous venons de parler a pensé que l’abandon d’un ami causerait une grave injustice, il est coupable d’un péché grave.    Une personne qui s’est persuadée elle-même par un vain raisonnement qu’une intoxication sérieuse ne diffère pas en gravité d’une légère intoxication, est quand même coupable d’une malice plus grande si elle agit selon sa persuasion.  Son opinion mauvaise ne peut pas, en effet, changer le fait, et elle ne peut pas s’en servir comme excuse de sa coupable ignorance.
592-  Une conscience erronée peut considérer comme mauvais ce qui ne l’est pas, mais d’une façon indéterminée.

Si la spécificité du mal n’est pas déterminée devant la conscience, et si un acte indifférent est considéré peccamineux sans qu’on lui ait attribué  de gravité spéciale, celui qui agit contre cette sorte de  conscience  semble commettre un crime de désobéissance. Exemple.  Une personne qui pense que fumer est un péché, mais sans savoir de quelle sorte,  doit avoir au moins une opinion vague que c’est un acte défendu par la loi divine.  En conséquence, s’il fume, il est coupable de désobéissance.

Si la gravité d’un acte que l’on croit peccamineux n’est pas déterminée devant le tribunal de  la conscience, ou si un acte est considéré comme peccamineux sans qu’on en connaisse le moindrement le degré de gravité, celui qui agit contre une telle conscience commet un péché mortel ou véniel, d’après sa propre disposition envers le péché.  Si le péché, grand ou petit,  le séduit au point qu’il veuille le commettre, il est coupable de péché mortel, dans la mesure, à tout le moins,  où il s’expose à le commettre.  Mais s’il est dans la résolution habituelle de ne pas commettre de péché mortel, on peut présumer qu’il ne ferait pas ce qu’il considère comme un péché, s’il croyait avoir à faire à un péché mortel.   Exemple. Si une personne pense erronément que c’est un péché de lire tel livre  et le lit ensuite, sans chercher à se faire une idée de  la gravité du péché, c’est son caractère qui permettra de juger de la grandeur ou de la petitesse de la faute.  S’il était consciencieux au point de cesser immédiatement la lecture au cas où il penserait qu’il est vraiment nuisible,  il ne pêcherait que véniellement. Mais s’il sait qu’il est laxiste, et veut quand même lire le livre coûte que coûte, il semble bien qu’il soit coupable de péché grave.

ARTICLE 2
UNE BONNE CONSCIENCE
 (somme théologique 1-11 q.19, aa 5,6)
593- Comme nous l’avons expliqué dans l’article précédent, la conscience n’est un guide idoine que quand elle est bonne.  Nous allons, dans cet article, parler de la bonne conscience, et de son opposé : les différentes sortes de mauvaise conscience.

 594- Définition.  La distinction entre bonne et mauvaise conscience s’applique aussi bien à la conscience antécédente qu’à la  conséquente. La conscience conséquente est bonne, et l’on dit que quelqu’un a une bonne conscience.  si elle atteste que les actes précédents ont été accomplis correctement, que les péchés passés ont été pardonnés, que quelqu’un est en état de grâce. La fin du commandement est la charité provenant d’une bonne conscience. (1 Tim. 1, 5) Combats le bon combat avec la foi et une bonne conscience. (ibid. 19)  La conscience  conséquente est mauvaise si elle atteste le contraire.  Approchons-nous avec un cœur sincère, après avoir, par l’aspersion, rejeté de nos cœurs la mauvaise conscience. (Heb X, 22).  La conscience antécédente, qui nous intéresse maintenant, porte un jugement sur la moralité d’un acte à être accompli dans un lieu et à un moment précis, ou dans le futur.   L’acte est appelé bon s’il est fait par quelqu’un qui est de bonne foi, c’est-à-dire par quelqu’un qui aime sincèrement ce qui est bon et qui prend ses décisions en tenant compte de la vérité, en autant qu’il peut la connaitre.   On l’appelle mauvais si c’est le jugement de quelqu’un qui est de mauvaise foi, c’est-à-dire de quelqu’un qui se trompe par sa propre faute, ou qui découvre la vérité par le moyen de raisonnements qui ne sont pas honnêtes, ou mal compris par lui.  Exemple.  En parlant de ceux qui, tout en sachant que les viandes immolées aux idoles étaient interdites, en mangeaient quand même parce qu’ils en voyaient d’autres en manger, saint Paul dit :  Tous n’ont pas la connaissance, car il y en a, jusqu’à présent, qui, sachant que c’est une viande consacrée aux idoles, la mangent comme telle. Et comme leur conscience est faible, elle est souillée. (1 Cor V111, 7).

 595- Les divisions.  En en prenant soin et en l’entraînant, une bonne conscience se développe et devient meilleure.   Une conscience vigilante est une conscience qui s’affirme rapidement et dans toutes les circonstances.  Une conscience délicate c’est celle qui tend vers une observance fidèle  de tous les commandements, et à la pureté d’intention.  On appelle consciencieux celui qui possède cette sorte de conscience.  Une conscience zélée et généreuse  est poussée par la crainte filiale et l’amour filial  à fuir les péchés les plus légers et les imperfections, à se servir de tous les moyens prudents pour éviter les occasions et les dangers de péché.  Le détenteur de cette conscience s’appelle celui qui craint d’offenser le Dieu qui est la Sainteté et l’Amour.

 596- On divise, d’après ses effets,  une conscience mauvaise qui est dans une erreur vincible, en conscience scrupuleuse et laxiste.  La conscience laxiste se trompe au sujet de la liberté.   Des raisons triviales l’incitent à juger légal ce qui est illégal, péché véniel ce qui est péché mortel,  simplement conseillé ce qui est commandé, etc.   La conscience scrupuleuse se trompe au sujet de l’obligation.   Des raisons non f ondées la poussent à considérer comme mauvais ce qui est permis, grave ce qui n’est que véniel, obligatoire ce qui n’est que conseillé.  Elle voit une incapacité ou un défaut là où il n’y en a pas.

 597- La conscience laxiste.  Selon la plus ou moins grande emprise qu’elle a sur quelqu’un, on peut diviser la conscience laxiste en commençante ou enracinée.   Elle est commençante quand quelqu’un se plait aux décisions inconsidérées, et commence à ressentir moins de remords pour le mal qu’il a fait.  On dit que, dans cet état, la conscience est en sommeil.   Elle est enracinée quand, par une coutume longuement  entretenue, elle est devenue partisane d’une conception mondaine et frivole de la vie, et ne ressent que rarement de la componction.  Dans son état le plus grave, quand il ne reste que peut d’espoir de guérison, on l’appelle une conscience marquée au fer rouge ou  cautérisée. (1 Tim 1V, 2).   598- Selon la plus ou moins grande responsabilité de celui qui est dans l’erreur, une conscience laxiste est malicieuse ou ne l’est pas.   Elle est malicieuse quand elle nourrit un manque d’intérêt ou de respect  envers la vérité religieuse, comme dans le cas des païens qui n’avaient cure de connaître Dieu, et qui étaient en conséquence conduits à des conceptions perverses de la moralité.  Saint Paul appelle ces consciences, des consciences réprouvées (Rom 1, 28).  Elle n’est pas malicieuse quand elle provient d’une raison moins blâmable, comme dans le cas des Corinthiens qui pensaient que c’était un péché de manger des viandes consacrées aux idoles, mais qui estimaient devoir suivre l’exemple de ceux qui en mangeaient.  Saint Paul appelle cette conscience une conscience faible. (1 Cor V111,10)

 599- Le laxisme d’une conscience est partiel ou entier.  Une conscience complètement laxiste regarde tout avec indifférence et d’un œil complaisant.   Elle est insouciante dans ce qui est peu ou très important, dans la conduite de sa vie et de celle des autres. Une conscience partiellement laxiste est trop  libérale dans certains cas, mais pas dans tous les cas.  Exemples.  Pierre est très exigeant envers ses filles, et il veut qu’elles soient des modèles de vertu, mais il se permet trop de choses à lui-même, à lui,  et à ses garçons.  Paul est très loyal envers ses amis,  mais il n’a aucun sens de la justice envers ceux qui ne partagent pas ses idées.  Luc essaie de servir Dieu et Mammon en même temps.  Il ne manque pas la messe, mais il commet des escroqueries en affaire.   600- Une conscience partiellement laxiste peut même faire cohabiter le laxisme avec la scrupulosité, devenant comme un miroir déformant  qui grossit les petits objets ou rapetisse les gros, ou comme l’œil d’un daltoniste.   Malheur à vous qui appelez bien le mal et mal le bien, ténèbres la lumière, et lumière les ténèbres.  (Is V, 20)  On appelle cette conscience une conscience pharisaïque.

 Quelqu’un peut être à la fois laxiste et scrupuleux au sujet de la même sorte de chose.  Exemples.  Pierre regarde une grande désobéissance comme une paille dont il n’a pas à se soucier. Mais la moindre désobéissance envers lui-même  de la part de ses enfants lui apparait comme une poutre qu’il faut absolument extraire.  Paul  rechigne à donner l’aumône  à ceux de qui  il n’espère aucun profit.  Mais il tient scrupuleusement à donner à ceux dont il espère des faveurs en retour.   On peut être à la fois laxiste et scrupuleux en plusieurs choses, filtrer les moucherons et avaler des chameaux. Exemples.  Les pharisiens étaient scrupuleux au sujet des observances mineures de la loi, mais étaient laxistes par rapport à la justice interne et les commandements les plus importants de la loi, le jugement, la miséricorde, la foi (Matt. XX111, 13-31)

 601- Les causes d’une conscience laxiste. Si le laxisme est habituel mais non coupable,  il est causé généralement par un manque de formation dans l’enfance, et par l’influence qu’ont les mauvais principes et les pratiques largement répandues.  Dans des cas particuliers, une décision laxiste de conscience peut provenir de l’absence d’une réflexion suffisante ou d’une bourrasque passionnelle subite, qui obscurcit la raison et ne donne pas le temps de penser.  Alors, il n’y a pas de faute.   Si le laxisme est coupable, ses causes habituelles sont une conception approximative ou tendancieuse de la loi de Dieu et de son caractère obligatoire, ou un amour désordonné de soi, qui  fait voir de la vertu dans les vices de quelqu’un ou d’aimables faiblesses;  ou une longue complaisance dans le péché,  qui finit par enlever à la conscience sa lucidité.

 602- Les dangers spéciaux de la conscience laxiste.   Si le laxisme n’est pas coupable, il est, pour autrui, une occasion de démoralisation et, pour le laxiste,  une préparation à un péché formel.  Si le laxisme est coupable, il est la cause d’un péché formel,  et s’il n’est pas amendé, il mène naturellement à un aveuglement moral, à un durcissement du cœur,  et à l’impénitence. Il y a un chemin qui semble droit à  l’homme, mais son terme mène à la mort. (Prov. XV1, 25). 603-  Comme la conscience laxiste est une sorte de conscience erronée,  les règes données plus haut sur la sorte de péchés commis par une conscience erronée s’appliquent aussi à une conscience laxiste. (Cf. 588)    En ce qui a trait à l’existence du péché dans le cas du laxisme, c’est-à-dire d’une conscience qui prend pour permis ce qui est interdit,  celui qui suit une pareille conscience est coupable ou non coupable selon que l’ignorance est coupable ou non coupable (selon qu’il agit avec une mauvaise ou une bonne conscience).   Exemples.  Un homme qui se livre  à la malhonnêteté parce qu’il a déréglé sa conscience avec des sophismes qui lui ont fait croire que la malhonnêteté est permise; l’enfant qui, sans savoir que c’est péché,  emploie un langage obcène ou blasphématoire, parce qu’il entend des adultes autour de lui parler de la sorte.  Mais si la conscience laxiste impose comme un devoir ce qui est mal, celui qui y désobéit est coupable de péché.  Exemple.  Une personne qui refuse de dire un mensonge quand elle pense qu’elle devrait mentir à cause d’une promesse qu’elle a faite.

Quand la laxité a une incidence sur la gravité d’un péché, comme quand la conscience prend ce qui est mortel pour du véniel,  celui qui désobéit à une pareille conscience est coupable de péché mortel ou véniel selon que son ignorance est coupable ou non coupable (selon qu’il agit avec une bonne ou une mauvaise conscience).   Exemples. Un enfant qui pense que calomnier ou manquer à la messe le dimanche n’est qu’un péché véniel, parce qu’il voit des adultes traiter ces choses avec beaucoup de légèreté; une personne qui, pour soulager sa conscience, prend comme conseillers des laxistes qui approuvent toujours ce qu’elle désire ou ce qu’elle fait. 604-  Celui qui sait que sa conscience est laxiste, ou qui a de bonnes raisons de le penser, devrait se laisser conduire par les règles suivantes,   En ce qui a trait au passé, s’il doute qu’il a, oui ou non, donné son consentement à un péché, ou que le péché était grave, la présomption ne joue pas en sa faveur, car un laxisme volontairement contracté rend quelqu’un responsable des conséquences qui en résultent.  En ce qui a trait au futur, une personne doit employer les moyens prescrits pour quelqu’un qui est danger de péché (258).   Car une conscience élastique met quelqu’un en danger de péché.

605- Les remèdes recommandés pour une conscience laxiste.  On devrait corriger le défaut de volonté ou de caractère.  Exemple.  Le présomptueux devrait réfléchir sur la justice de Dieu, et se rappeler que le chemin large mène à la perdition.  Ceux chez qui le désir engendre un jugement laxiste devraient livrer une guerre sans merci  aux passions qui les détournent du droit chemin.  Ceux que de mauvaises habitudes ont rendus laxistes, devraient prendre la décision d’acquérir de bonnes habitudes, comme celle de fréquenter régulièrement les sacrements.  On devrait corriger l’erreur de l’intelligence.   Exemple.  Si la formation d’une personne religieuse a été insuffisante, cette personne devrait se donner comme devoir de passer au crible les informations et les avis qu’on lui a donnés.   Si quelqu’un a subi l’influence d’idées ou de conduites mauvaises, il devrait choisir d’autres lectures ou d’autres cercles d’amis.

 606-   Un laxiste est-il responsable s’il ne sait pas qu’il est laxiste ?  Si sa conscience est invinciblement erronée, il ne peut pas savoir qu’il est laxiste, et n’est donc pas responsable.   Exemples.  Le garçon Pierre garde tout ce qu’il trouve, parce qu’il pense que ce qu’il trouve lui appartient.   Paul n’aime pas tricher, mais il triche régulièrement parce qu’il pense qu’il a, autant que les autres, le droit de le faire.  L’enfant et l’adulte sont laxistes tous les deux, mais aucun d’eux ne se croit laxiste. La différence entre les deux est que Paul, l’adulte, peut et devrait savoir qu’il est laxiste.

 607- La conscience scrupuleuse.  C’est une espèce de jugement erroné qui voit le péché où il n’est pas, ou un péché mortel dans un péché véniel, et dont les raisons sont inconsistantes ou absurdes.   Il diffère donc d’une conscience exigeante ou délicate  qui, sans voir le péché partout, estime qu’on doit éviter les péchés les plus minimes et les imperfections.  Cette conscience-là  est le milieu doré entre une conscience laxiste et une conscience scrupuleuse.   On donne  souvent à tort le nom de scrupuleuse à cette sorte de conscience, parce qu’elle exige davantage que les consciences ordinaires.  On doit plutôt dire que ce sont des consciences ferventes, qui craignent d’offenser en Dieu sa sainteté ou son amour.    La conscience scrupuleuse diffère aussi de la scrupulosité  qui est un état d’âme dans lequel quelqu’un, dont le jugement n’est pas erroné, est quand même tourmenté par des peurs et des doutes portant sur sa condition morale.  608- Les règles données plus haut pour la conscience erronée s’appliquent aussi à la conscience scrupuleuse.  Celui qui suit une conscience scrupuleuse ne pêche pas à cause de cela, même s’il est vinciblement en erreur, car il n’y a pas de danger de péché en faisant plus qu’il n’est requis.  Exemple.  Pierre est trop paresseux pour s’informer de ses devoirs religieux,  mais il tient mordicus que l’action de grâces après le repas oblige sous peine de péché grave.  Il ne pêche pas en suivant sa conscience, car l’action de grâce après le repas est recommandée à tous.  Mais celui qui désobéit à une conscience scrupuleuse commet le péché que sa conscience redoute.  Exemple.   Si Pierre omet de rendre grâce après le repas, il commet un péché grave.

 609- Les dangers propres à la conscience scrupuleuse.   La conscience scrupuleuse fait souffrir quelqu’un. Elle le rend coupable de péché là où il n’y a pas de péché.   Et son rigorisme extrême le conduit souvent à l’autre extrême du laxisme.  La personne scrupuleuse déplait et indispose,  surtout quand elle tente d’imposer sa conscience aux autres.  Elle donne une mauvaise réputation à la vertu.

 610- Il est possible à une conscience d’être laxiste et scrupuleuse en même temps, trop indulgente en certains cas, et trop sévère en d’autres (Cf 600).   Quelqu’un peut être scrupuleux à l’endroit des autres, et indulgent à son égard, ou vice versa. Exemples.  Les parents se permettent souvent toutes sortes de choses, mais ils sont très sévères envers leurs enfants.  En d’autres circonstances, ils observent méticuleusement leurs devoirs, mais permettent tout à leurs enfants.  Une conscience peut être scrupuleuse dans les choses de peu d’importance et laxiste dans les matières sérieuses.   Exemple.  Les chefs des Juifs se sont faits un scrupule de reprendre l’argent donné à Judas, et d’entrer dans la maison du païen Pilate.  Mais ils n’ont pas hésité à condamner injustement notre Seigneur.   Une conscience peut être scrupuleuse dans les choses externes, mais laxiste dans les internes.   Exemple. Les Pharisiens faisaient grand cas des purifications du corps.  Mais ils se souciaient fort peu de purifier leur esprit et leur cœur.

 611- La conscience perplexe.  La conscience perplexe ressemble à la conscience scrupuleuse,  Elle juge que dans une situation particulière, qu’il agisse ou qu’il n’agisse pas,  quelqu’un ne peut pas échapper au péché.   Exemple. Pierre craint de pécher s’il met   en danger sa santé fragile, en allant à la messe ; et de désobéir à la loi, s’il n’y va pas.  Cela semble avoir été le cas d’Hérode qui se croyait enfermé  dans le dilemme de  se parjurer ou de commettre un meurtre,  quand on lui demanda la tête de Jean le Baptiste.(Matt. X1V, 9)   612- Saint Alphonse donne les conseils suivants à ceux qui ont une conscience perplexe.

Si on pouvait,  sans inconvénient majeur,  remettre à plus tard la décision,  le confesseur aurait le temps de donner un avis éclairant.  Si on ne peut pas la retarder,  on peut choisir ce qui semble le moindre mal.   Exemple. La loi naturelle demande que Pierre n’expose pas sa vie sans nécessité; la loi positive de l’Église demande qu’il aille à la messe le dimanche.  Il devrait donc décider qu’il n’est pas obligé en conscience d’aller à la messe le dimanche.  Si la décision ne peut pas être reportée à plus tard, et s’il n’est pas possible de découvrir où se trouve le moindre mal, on peut choisir une partie ou l’autre de l’alternative,  car à l’impossible nul n’est tenu.

 613- Si, dans le cas qui nous concerne, la personne perplexe agit avec le sentiment qu’elle est forcée de commettre un péché,  est-elle coupable ou pas ?  Si  par le sentiment de péché on entend non un jugement de l’esprit, mais un scrupule ou un doute, la personne en question n’est pas coupable, comme nous le verrons bientôt en parlant de la scrupulosité.  Si par sentiment de faute on entend un jugement de l’esprit obligeant quelqu’un à  pécher, et une intention de favoriser une occasion de péché, la dite personne est coupable.  Mais on considère que l’erreur et les circonstances difficiles atténuent sa faute.   Exemple. Pierre pense qu’il pêche s’il obéit ou désobéit à un ordre de prendre une bonne dose de whiskey.  Il commence à ingurgiter sa dose,  et il se réjouit à la pensée qu’il va se saouler.
Si par sentiment de faute on entend un jugement qui ordonne de pécher, accompagné de la tristesse que provoque cette obligation, il n’y a pas de faute si, avant d’agir, on réfléchit à la chose le mieux que l’on peut.  Il y a une certaine faute si la perplexité provient d’une négligence antérieure coupable, et si on n’a rien tenté pour y remédier avant d’agir.  Exemple.  Marie demande à sa mère la permission de conduire la voiture.  La mère craint que sa fille  fasse une crise  de nerfs si elle le lui refuse;  et si elle accepte,  que sa fille rencontre des compagnons peu convenables.  Si la perplexité de la mère vient du fait qu’elle ne s’est jamais vraiment intéressée à sa fille, elle est responsable si elle prend une décision sans réflexion suffisante. Mais si la perplexité provient du caractère difficile de sa fille, la mère n’est pas responsable.

614- La scrupulosité.  L’état de scrupulosité est semblable à la conscience scrupuleuse.  Il se manifeste dans les matières morales, surtout comme une peur vaine ou une anxiété portant sur la présence ou la grandeur du péché dans une action donnée.  C’est un état psychopathique.  On range habituellement la scrupulosité parmi les formes de psychasténie, laquelle est caractérisée par une anémie de l’âme, l’incapacité de faire face à des soucis, et un manque d’énergie psychique.   L’examen clinique révèle dans le psychasténique les caractéristiques suivantes.  Physiquement, il est sans énergie et toujours fatigué.  Intellectuellement, il ne peut, à cause de sa fatigue, se concentrer longtemps sur quelque chose. Psychologiquement, il est un intraverti, et sa propre personne est le centre de ses intérêts et de ses activités.  Les manifestations les plus ordinaires des difficultés du psychasténique sont le manque de confiance en soi, l’incertitude, l’hésitation, les obsessions et les scrupules.  En tant qu’espèce de la psychasténie, la scrupulosité peut être décrite comme  une préoccupation désordonnée des choses morales et religieuses, un type spécial d’inquiétude au sujet de la moralité des actions.

 On doit cependant distinguer la scrupulosité de la conscience scrupuleuse, d’autant plus que la scrupulosité n’est pas un jugement,  mais une peur accompagnant un jugement.  Une personne scrupuleuse sait très bien que ne pas rendre grâce après le repas n’est pas un péché;  que ce n’est pas un péché de prier avec des distractions volontaires,  Mais ces choses l’inquiètent comme si elles étaient de vrais péchés.  Il faut distinguer la scrupulosité de la conscience délicate, d’autant plus que la scrupulosité est une sollicitude exagérée et morbide.  Une personne qui a une conscience délicate observe avec soin les plus petites obligations, mais dans la paix et la sérénité, tandis que celle qui est scrupuleuse est troublée et angoissée.  On doit distinguer la scrupulosité de la conscience douteuse ou coupable, d’autant plus que la scrupulosité est une peur sans fondement et une phobie.  Exemples.  Une personne qui a péché contre la justice pendant plusieurs années a de bonnes raisons de ressentir de l’anxiété, quand elle se rend compte qu’il n’y a pas de pardon sans restitution ou réparation. Mais une mère, qui a fait tout ce qu’elle pouvait pour bien éduquer ses enfants, devient scrupuleuse si elle se reproche sans cesse de ne pas avoir fait mieux. Agit avec une conscience douteuse une personne qui signe un contrat en redoutant qu’il soit illégal, parce que de hautes autorités le déclarent sans valeur.  Mais si elle craint qu’il soit illégal en dépit du fait que les légistes le déclarent valide,  et si la seule raison qu’elle a pour douter est qu’ils pourraient se tromper, elle est scrupuleuse.  Au temps des plaies d’Égypte, les Egyptiens, à cause de leur méchanceté,  pouvaient raisonnablement prévoir de graves châtiments. Mais elle est scrupuleuse une bonne personne qui vit constamment dans la crainte d’être damnée.

 615- On peut diviser les scrupules de différentes façons, mais la division la plus simple semble se faire d’après l’objet, l’extension et la durée.   Du point de vue de l’objet, le scrupule peut se centrer sur une seule activité morale ou sur quelques-unes-- comme les devoirs de charité, les péchés contre la chasteté--  ou il peut s’étendre sur toute la vie morale d’un individu.   Du point de vue de l’extension,  certains scrupules se limitent aux actions internes, d’autres se rendent  jusqu’aux  manifestations externes.  Du point de vue de la durée, on peut classifier les scrupules comme intermittents ou temporaires, et quasi-permanents. La quasi permanence caractérise une personne constitutionnellement scrupuleuse, c’est-à-dire qui est incitée au scrupule par sa constitution psychique et psychologique.

 Les signes de la manifestation externe de la scrupulosité ont été divisés de différentes façons.  Mais pour notre propos, suffira largement une division entre les catégories intellectuelle, cognitive, affective ou volontaire et compulsive. Intellectuelle.  L’aboulie intellectuelle habituelle ou l’incapacité de prendre une décision  associée avec un doute constant.   Affective.  Étroitement lié à l’état intellectuel est le sentiment d’incapacité qui s’étend aux actions, à la personnalité de l’individu, à son désir des biens les plus élevés, et  à tout ce qu’il peut faire.  Ce sentiment augmente et renforcit l’incapacité de décider.  Des peurs irraisonnées, l’anxiété et la tristesse contribuent à la genèse et à la croissance du sentiment d’inadaptation.  Compulsive.  De nombreux facteurs de compulsion sont présents dans les cas les plus sérieux de scrupulosité, comme les obsessions, les phobies et les compulsions proprement dites, qui se rapportent aux actes ou aux rituels externes.   Les obsessions comportent des idées irrationnelles, persistantes et irrésistibles, accompagnées d’une sensation de tension et de peur.  Ces idées qui s’acharnent sur l’individu sont discordantes, c’est-à-dire non en harmonie  avec son attitude habituelle. Et elles sont impulsives, car elles cherchent à se traduire spontanément en action.  La personne scrupuleuse est effrayée et troublée à la pensée de faire une chose qui lui inspire de l’horreur, et par son incapacité de chasser ces idées de sa pensée.

 Les phobies se rapportent aux peurs irrationnelles habituelles d’une chose particulière, associées à un haut degré d’anxiété, et en conflit avec la réalité objective.  Ce sont des peurs très intenses, sans aucune proportion avec leurs causes ou les objets.  Finalement, les compulsions proprement dites peuvent se définir comme des besoins irraisonnables irrésistibles d’accomplir des actions, pour libérer un individu de son idée obsédante.  La tension et l’anxiété sont associées à l’acte, car autrement le rituel externe n’est pas accompli.  Ce n’est pas une chose difficile pour un confesseur de reconnaître une personne scrupuleuse.  Les difficultés propres au pénitent présentent des signes qu’on voit d’abord et qui sont des  plus évidents, comme les doutes déraisonnables au sujet du consentement donné à la tentation, ou de la gravité du péché.

 616-  Les signes concomitants qui confirment le jugement que telle personne est scrupuleuse sont les suivants.  L’entêtement. Même si une personne scrupuleuse demande l’avis de beaucoup de confesseurs, elle tend à suivre son jugement propre.   Elle est portée à penser que le confesseur ne l’a pas comprise, qu’il n’a pas donné une description complète de son état d’âme. L’inconstance dans l’action.  Elle provient de l’incapacité de juger sainement, et des changements de jugement fréquents pour des raisons légères.  Une énumération d’une foule de circonstances qui tendent à faire perdre de vue le péché, comme une aiguille dans un tas de foin.   Les mouvements extérieurs par lesquels un individu essaye de se débarrasser de la peur, ou d’une autre difficulté.

 617- Les causes de la conscience scrupuleuse.  Bien que les signes de la scrupulosité soient faciles à reconnaitre, les causes ne sont pas clairement décrites, et les auteurs ne sont pas tous d’accord sur ce sujet.   Une liste des causes probables devrait comprendre des causes internes. Les causes physiques sont pratiquement inconnues.  La plupart des auteurs admettent une prédisposition physique à la scrupulosité, comme il en existe une pour celle qui lui ressemble,  la psychasténie.   En résumé, cette cause provoquerait  des désordres du système nerveux et du système neuro-endocrinien. On attribue une cause psychique à une tension trop basse.  L’incapacité de faire face aux obsessions et aux crises de phobie a pour effet d’épuiser l’individu. Une cause morale.  Un caractère soupçonneux et mélancolique, une disposition d’âme impressionnable et changeable, ou une nature entêtée, ou qui souffre d’excès de confiance en soi.

618- Les causes externes de la scrupulosité sont.  Le démon, qui suscite de vaines peurs pour affaiblir la dévotion, détourner de la prière et des sacrements, conduire à la tiédeur et au désespoir.   Les paroles et l’exemple d’un voisin incitant à la scrupulosité,   la fréquentation de personnes scrupuleuses, la lecture de livres spirituels à tendance rigoriste,  l’audition par des gens timides de sermons terrifiants sur la justice divine, une éducation en serre chaude  et trop sévère. 619-  Dieu  ne peut pas être une cause de la scrupulosité à la manière des démons, qui s’en servent pour détruire l’homme, ou à la manière des intervenants humains, qui sont incapables de tirer du bien à partir du mal qu’ils causent.   Mais, dans des cas exceptionnels, il permet que même des saints soient tourmentés par  la scrupulosité,  pour expier les péchés, développer les vertus d’humilité et de patience, ou les sortir de la torpeur spirituelle.   La scrupulosité d’origine surnaturelle est beaucoup plus rare que celle qui a une source naturelle.  On peut habituellement la reconnaître par certains signes, comme les suivants.  Quand on ne peut pas l’expliquer par des causes naturelles, et qu’elle dure peu de temps.  Si elle vient des esprits mauvais, elle laisse l’âme agitée, inquiète et troublée;  si elle vient de Dieu, elle est suivie de la paix et de la lumière.

620- Les dangers de la scrupulosité. Les résultats mauvais d’une scrupulosité dans laquelle on se complait sont les suivants.   Les mots temporels.  Les peurs constantes et les angoisses du scrupuleux affectent le cerveau et les nerfs, viennent à bout de la vigueur physique, et conduisent à la neurasthénie, l’hystérie, la folie ou la monomanie.  Les mots spirituels.  Le scrupuleux perd son temps dans des regrets inutiles et des anxiétés; la prière devient une torture, la confiance en Dieu s’amenuise.  Constatant qu’il ne trouve aucune consolation dans la vertu, le scrupuleux finit souvent dans le vice ou le désespoir.

621- Les règles que doivent observer les  scrupuleux. Ils ne doivent pas céder à leurs scrupules. Comme nous l’avons déjà dit,  la scrupulosité n’est pas une conscience,  mais seulement une contrefaçon de la conscience.  Elle n’est pas une aide pour l’âme, mais un inconvénient et un danger. Les scrupuleux doivent donc apprendre à mépriser leurs peurs idiotes et leurs affabulations.  Ils doivent suivent aveuglément les conseils d’un directeur spirituel avisé.   Essayer de prendre des décisions par eux-mêmes est une expérience angoissante et périlleuse  pour des personnes scrupuleuses. Elles doivent donc assurer leur protection  en suivant les décisions faites à point pour elles par un guide expérimenté.  Mais, si leur condition s’améliore, elles doivent graduellement apprendre à prendre des initiatives par elles-mêmes, pour se préparer à agir en personnes responsables et découvrir par elles-mêmes ce qui est bien.
 

622- Voici ce que signifie ne pas s’abandonner à  leurs scrupules. Les personnes scrupuleuses devraient reconnaitre  les scrupules  pour ce qu’ils sont réellement, c’est-à-dire, pour un désordre spirituel; et elles devraient être fermement décidées à prendre les moyens nécessaires pour s’en défaire.  Elles empêcheront les scrupules de surgir en elles en se maintenant constamment occupées par des choses externes, ou en s’intéressant à de saines activités qui leur apporteront de la détente ou du contentement.  Elles devront bannir immédiatement  les scrupules de leur esprit, tout comme s’il s’agissait d’une tentation.  Ces moyens conseillés  visent à combattre l’introversion par une activité sociale plus grande, et en redisciplinant les facultés  pour en avoir un contrôle constant.

 623- Bien que les scrupuleux aient l’obligation de ne pas céder à leurs scrupules, il arrive rarement qu’ils pèchent en y cédant, parce que leur condition les rend irresponsables. Car, comme nous l’avons dit plus haut (40 et suiv.),  des passions amoindrissent ou enlèvent la délibération et le caractère volontaire des actes. 624-  Obéir en tout au directeur spirituel signifie que les scrupuleux devraient reconnaître que c’est mauvais pour eux de dépendre de leur prudence, et qu’ils sont en sécurité totale s’ils suivent les avis et les préceptes d’un directeur spirituel qui tient la place de Dieu. Ils devraient éviter d’aller d’un directeur à l’autre,  mais ils devraient plutôt s’efforcer de mettre en pratique les règles de vie qu’on leur impose.

 625- Voici les qualités requises pour la direction fructueuse d’un scrupuleux.  La connaissance.  Le physicien spirituel doit être capable de distinguer la scrupulosité des maladies spirituelles ou de contions similaires, de peur de prescrire un remède inopérant.  Exemple. Une personne à la conscience délicate devrait continuer d’agir comme elle agit.  Un scrupuleux a besoin d’instruction pour dissiper ses vues erronées. Un scrupuleux a besoin d’être guidé d’une façon spéciale.  Il doit aussi reconnaître que la scrupulosité est une maladie mentale qui peut parfois exiger  la cure d’un psychanaliste.  Sachant ses propres limites et reconnaissant le besoin d’une thérapie professionnelle, un directeur ne devrait pas hésiter à envoyer son pénitent à un docteur compétent.

 La prudence.  Il y a des personnes qui prétendent être scrupuleuses pour se donner un aura de sainteté, ou pour faire une bonne impression.  Il est inutile de dire qu’il ne faut pas tomber dans leur panneau, surtout quand elles se montrent dénuées de scrupule.  Quand il s’agit d’une personne qui est vraiment scrupuleuse, le directeur spirituel doit recueillir toute la connaissance nécessaire pour établir son réel état d’âme, l’amener prudemment à admettre qu’elle est malade,  l’aider à retrouver la confiance en elle-même, en son confesseur et en Dieu.   La patience.  Les scrupuleux sont autant difficiles à supporter par le directeur qu’ils ont de difficultés à se supporter eux-mêmes.  La charité s’impose donc.   Ils ont le même droit à un traitement charitable que les malades, les infirmes et les nécessiteux.  La fermeté.  La désobéissance va contrer tous les efforts que tente un directeur pour aider un scrupuleux.  Sur ce point, il ne doit y avoir aucune tolérance.  Les règlements établis doivent être suivis. On n’a pas à justifier les raisons.  On ne doit permettre ni critique ni remise en question.  Le directeur devrait parler avec assurance et autorité.  Il devrait être bref, et s’il doit répéter, il devra utiliser les mêmes mots.   Un bon jugement.  Après s’être rendu compte qu’une personne est vraiment scrupuleuse,  le directeur doit découvrir  la forme particulière de scrupulosité, pour pouvoir appliquer les remèdes adaptés.

 626- Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet des confessions passées.  Le confesseur peut permettre, au début, une confession générale portant sur toute la vie passée, si le pénitent scrupuleux nourrit des craintes au sujet de ses confessions antérieures,  et n’a jamais fait d’autre confession générale.  Permettez-lui de raconter toute son histoire avec tous ses détails et tous ses méandres.  Cela pourra peut-être prendre plusieurs confessions.  Mais il faut prendre le temps d’écouter patiemment, car il est nécessaire que le pénitent raconte absolument tout pour avoir la certitude que le directeur le comprend.  Après cette confession générale, il ne doit pas permettre qu’on revienne sur les péchés passés, à moins que le pénitent soit prêt à jurer sur sa tête qu’il a commis un péché mortel autrefois, qu’il n’avait pas déclaré comme il l’aurait du.

 627 Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet des confessions présentes.   Avant la confession,  le pénitent doit se satisfaire d’un bref espace de temps alloué par le confesseur pour faire son examen de conscience et dire son acte de contrition.  Une période plus grande de temps consacrée à  la préparation à la confession pourrait être utile à d’autres pénitents, mais  elle est néfaste au scrupuleux.  Au cours de la confession,  les seuls péchés qu’il importe de mentionner sont ceux qu’un bref examen a fait connaître comme graves et certains;  et il faut s’en tenir aux circonstances absolument essentielles.  Si le pénitent scrupuleux  se met à parler de péchés douteux ou s’il s’enfonce dans des digressions,  le confesseur doit l’empêcher de continuer dans cette veine.  Car, bien que la confession doive être complète, les doutes et les détails ne doivent pas être permis à un scrupuleux.  Après la confession, si le confesseur juge qu’il n’y  pas de matière suffisante pour l’absolution, il ne doit pas céder aux anxiétés du pénitent, mais doit le persuader qu’il n’a pas besoin d’absolution, et qu’il peut aller communier sans l’avoir reçue.

 628- Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet de l’accomplissement de leurs devoirs.   On devrait enseigner au scrupuleux que les lois positives, humaines et divines,  n’obligent pas en cas d’impossibilité morale (quand leur observance est trop lourde);  que la matière au sujet de laquelle il a des scrupules est devenue trop difficile pour lui, et ne l’oblige donc pas comme elle oblige les autres. Il n’est donc pas tenu de faire ce que les autres font. On devrait commander à une personne scrupuleuse de laisser inachevé un travail que sa scrupulosité lui impose.  Et si cela ne suffit pas, il faudrait lui dire qu’elle n’est pas obligée d’observer un devoir qui la met dans tous ses états.   Pierre se fait des scrupules au sujet de prières obligatoires, et cela d’une façon telle qu’il n’est content qu’après les avoir récitées plusieurs fois, de peur d’avoir sauté certaines syllabes ou escamoté certains mots, d’avoir bredouillé, d’avoir eu des distractions, de ne pas avoir prié  toujours à genoux , ou toujours sur un prie dieu. Si Pierre ne peut pas apprendre à dire ses prières sans faire ces répétitions dépourvues de sens,  on devrait lui faire comprendre qu’il n’est plus tenu de dire ces prières qui le torturent lui et les autres.

 629- Bien entendu, si un tort est causé à quelqu’un par l’observance incomplète d’un devoir, une personne scrupuleuse elle-même ne peut être dispensée des répétitions. Exemple. Si un prêtre n’a pas prononcé une formule sacramentelle correctement, le fait d’être scrupuleux ne le dispense pas de répéter la formule.

 630- Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet des péchés commis ou à commettre. On doit dire à une personne scrupuleuse qu’elle est scrupuleuse; que sa scrupulosité n’est pas une conscience qu’il est obligé de suivre, mais une peur sans fondement qu’il doit combattre en acceptant les directives qu’on lui donne.  On devrait l’encourager à ne pas trop longtemps peser le pour et le contre avant d’agir, mais à faire ce qui lui parait bon du premier coup d’œil;  à  ne pas s’empresser de conclure après chaque action qu’un péché a été commis,  à moins que la chose ne paraisse certaine et évidente.
 
 

 618- Les causes externes de la scrupulosité sont.  Le démon, qui suscite de vaines peurs pour affaiblir la dévotion, détourner de la prière et des sacrements, conduire à la tiédeur et au désespoir.   Les paroles et l’exemple d’un voisin incitant à la scrupulosité,   la fréquentation de personnes scrupuleuses, la lecture de livres spirituels à tendance rigoriste,  l’audition par des gens timides de sermons terrifiants sur la justice divine, une éducation en serre chaude  et trop sévère. 619-  Dieu  ne peut pas être une cause de la scrupulosité à la manière des démons, qui s’en servent pour détruire l’homme, ou à la manière des intervenants humains, qui sont incapables de tirer du bien à partir du mal qu’ils causent.   Mais, dans des cas exceptionnels, il permet que même des saints soient tourmentés par  la scrupulosité,  pour expier les péchés, développer les vertus d’humilité et de patience, ou les sortir de la torpeur spirituelle.   La scrupulosité d’origine surnaturelle est beaucoup plus rare que celle qui a une source naturelle.  On peut habituellement la reconnaître par certains signes, comme les suivants.  Quand on ne peut pas l’expliquer par des causes naturelles, et qu’elle dure peu de temps.  Si elle vient des esprits mauvais, elle laisse l’âme agitée, inquiète et troublée;  si elle vient de Dieu, elle est suivie de la paix et de la lumière.

 620- Les dangers de la scrupulosité. Les résultats mauvais d’une scrupulosité dans laquelle on se complait sont les suivants.   Les mots temporels.  Les peurs constantes et les angoisses du scrupuleux affectent le cerveau et les nerfs, viennent à bout de la vigueur physique, et conduisent à la neurasthénie, l’hystérie, la folie ou la monomanie.  Les mots spirituels.  Le scrupuleux perd son temps dans des regrets inutiles et des anxiétés; la prière devient une torture, la confiance en Dieu s’amenuise.  Constatant qu’il ne trouve aucune consolation dans la vertu, le scrupuleux finit souvent dans le vice ou le désespoir.

 621- Les règles que doivent observer les  scrupuleux. Ils ne doivent pas céder à leurs scrupules. Comme nous l’avons déjà dit,  la scrupulosité n’est pas une conscience,  mais seulement une contrefaçon de la conscience.  Elle n’est pas une aide pour l’âme, mais un inconvénient et un danger. Les scrupuleux doivent donc apprendre à mépriser leurs peurs idiotes et leurs affabulations.  Ils doivent suivent aveuglément les conseils d’un directeur spirituel avisé.   Essayer de prendre des décisions par eux-mêmes est une expérience angoissante et périlleuse  pour des personnes scrupuleuses. Elles doivent donc assurer leur protection  en suivant les décisions faites à point pour elles par un guide expérimenté.  Mais, si leur condition s’améliore, elles doivent graduellement apprendre à prendre des initiatives par elles-mêmes, pour se préparer à agir en personnes responsables et découvrir par elles-mêmes ce qui est bien.

 622- Voici ce que signifie ne pas s’abandonner à  leurs scrupules. Les personnes scrupuleuses devraient reconnaitre  les scrupules  pour ce qu’ils sont réellement, c’est-à-dire, pour un désordre spirituel; et elles devraient être fermement décidées à prendre les moyens nécessaires pour s’en défaire.  Elles empêcheront les scrupules de surgir en elles en se maintenant constamment occupées par des choses externes, ou en s’intéressant à de saines activités qui leur apporteront de la détente ou du contentement.  Elles devront bannir immédiatement  les scrupules de leur esprit, tout comme s’il s’agissait d’une tentation.  Ces moyens conseillés  visent à combattre l’introversion par une activité sociale plus grande, et en redisciplinant les facultés  pour en avoir un contrôle constant.

 623- Bien que les scrupuleux aient l’obligation de ne pas céder à leurs scrupules, il arrive rarement qu’ils pèchent en y cédant, parce que leur condition les rend irresponsables. Car, comme nous l’avons dit plus haut (40 et suiv.),  des passions amoindrissent ou enlèvent la délibération et le caractère volontaire des actes. 624-  Obéir en tout au directeur spirituel signifie que les scrupuleux devraient reconnaître que c’est mauvais pour eux de dépendre de leur prudence, et qu’ils sont en sécurité totale s’ils suivent les avis et les préceptes d’un directeur spirituel qui tient la place de Dieu. Ils devraient éviter d’aller d’un directeur à l’autre,  mais ils devraient plutôt s’efforcer de mettre en pratique les règles de vie qu’on leur impose.

 625- Voici les qualités requises pour la direction fructueuse d’un scrupuleux.  La connaissance.  Le physicien spirituel doit être capable de distinguer la scrupulosité des maladies spirituelles ou de contions similaires, de peur de prescrire un remède inopérant.  Exemple. Une personne à la conscience délicate devrait continuer d’agir comme elle agit.  Un scrupuleux a besoin d’instruction pour dissiper ses vues erronées. Un scrupuleux a besoin d’être guidé d’une façon spéciale.  Il doit aussi reconnaître que la scrupulosité est une maladie mentale qui peut parfois exiger  la cure d’un psychanaliste.  Sachant ses propres limites et reconnaissant le besoin d’une thérapie professionnelle, un directeur ne devrait pas hésiter à envoyer son pénitent à un docteur compétent.

 La prudence.  Il y a des personnes qui prétendent être scrupuleuses pour se donner un aura de sainteté, ou pour faire une bonne impression.  Il est inutile de dire qu’il ne faut pas tomber dans leur panneau, surtout quand elles se montrent dénuées de scrupule.  Quand il s’agit d’une personne qui est vraiment scrupuleuse, le directeur spirituel doit recueillir toute la connaissance nécessaire pour établir son réel état d’âme, l’amener prudemment à admettre qu’elle est malade,  l’aider à retrouver la confiance en elle-même, en son confesseur et en Dieu.   La patience.  Les scrupuleux sont autant difficiles à supporter par le directeur qu’ils ont de difficultés à se supporter eux-mêmes.  La charité s’impose donc.   Ils ont le même droit à un traitement charitable que les malades, les infirmes et les nécessiteux.  La fermeté.  La désobéissance va contrer tous les efforts que tente un directeur pour aider un scrupuleux.  Sur ce point, il ne doit y avoir aucune tolérance.  Les règlements établis doivent être suivis. On n’a pas à justifier les raisons.  On ne doit permettre ni critique ni remise en question.  Le directeur devrait parler avec assurance et autorité.  Il devrait être bref, et s’il doit répéter, il devra utiliser les mêmes mots.   Un bon jugement.  Après s’être rendu compte qu’une personne est vraiment scrupuleuse,  le directeur doit découvrir  la forme particulière de scrupulosité, pour pouvoir appliquer les remèdes adaptés.

 626- Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet des confessions passées.  Le confesseur peut permettre, au début, une confession générale portant sur toute la vie passée, si le pénitent scrupuleux nourrit des craintes au sujet de ses confessions antérieures,  et n’a jamais fait d’autre confession générale.  Permettez-lui de raconter toute son histoire avec tous ses détails et tous ses méandres.  Cela pourra peut-être prendre plusieurs confessions.  Mais il faut prendre le temps d’écouter patiemment, car il est nécessaire que le pénitent raconte absolument tout pour avoir la certitude que le directeur le comprend.  Après cette confession générale, il ne doit pas permettre qu’on revienne sur les péchés passés, à moins que le pénitent soit prêt à jurer sur sa tête qu’il a commis un péché mortel autrefois, qu’il n’avait pas déclaré comme il l’aurait du.

 627 Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet des confessions présentes.   Avant la confession,  le pénitent doit se satisfaire d’un bref espace de temps alloué par le confesseur pour faire son examen de conscience et dire son acte de contrition.  Une période plus grande de temps consacrée à  la préparation à la confession pourrait être utile à d’autres pénitents, mais  elle est néfaste au scrupuleux.  Au cours de la confession,  les seuls péchés qu’il importe de mentionner sont ceux qu’un bref examen a fait connaître comme graves et certains;  et il faut s’en tenir aux circonstances absolument essentielles.  Si le pénitent scrupuleux  se met à parler de péchés douteux ou s’il s’enfonce dans des digressions,  le confesseur doit l’empêcher de continuer dans cette veine.  Car, bien que la confession doive être complète, les doutes et les détails ne doivent pas être permis à un scrupuleux.  Après la confession, si le confesseur juge qu’il n’y  pas de matière suffisante pour l’absolution, il ne doit pas céder aux anxiétés du pénitent, mais doit le persuader qu’il n’a pas besoin d’absolution, et qu’il peut aller communier sans l’avoir reçue.

 628- Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet de l’accomplissement de leurs devoirs.   On devrait enseigner au scrupuleux que les lois positives, humaines et divines,  n’obligent pas en cas d’impossibilité morale (quand leur observance est trop lourde);  que la matière au sujet de laquelle il a des scrupules est devenue trop difficile pour lui, et ne l’oblige donc pas comme elle oblige les autres. Il n’est donc pas tenu de faire ce que les autres font. On devrait commander à une personne scrupuleuse de laisser inachevé un travail que sa scrupulosité lui impose.  Et si cela ne suffit pas, il faudrait lui dire qu’elle n’est pas obligée d’observer un devoir qui la met dans tous ses états.   Pierre se fait des scrupules au sujet de prières obligatoires, et cela d’une façon telle qu’il n’est content qu’après les avoir récitées plusieurs fois, de peur d’avoir sauté certaines syllabes ou escamoté certains mots, d’avoir bredouillé, d’avoir eu des distractions, de ne pas avoir prié  toujours à genoux , ou toujours sur un prie dieu. Si Pierre ne peut pas apprendre à dire ses prières sans faire ces répétitions dépourvues de sens,  on devrait lui faire comprendre qu’il n’est plus tenu de dire ces prières qui le torturent lui et les autres.

 629- Bien entendu, si un tort est causé à quelqu’un par l’observance incomplète d’un devoir, une personne scrupuleuse elle-même ne peut être dispensée des répétitions. Exemple. Si un prêtre n’a pas prononcé une formule sacramentelle correctement, le fait d’être scrupuleux ne le dispense pas de répéter la formule.

 630- Les règles concernant les personnes scrupuleuses au sujet des péchés commis ou à commettre. On doit dire à une personne scrupuleuse qu’elle est scrupuleuse; que sa scrupulosité n’est pas une conscience qu’il est obligé de suivre, mais une peur sans fondement qu’il doit combattre en acceptant les directives qu’on lui donne.  On devrait l’encourager à ne pas trop longtemps peser le pour et le contre avant d’agir, mais à faire ce qui lui parait bon du premier coup d’œil;  à  ne pas s’empresser de conclure après chaque action qu’un péché a été commis,  à moins que la chose ne paraisse certaine et évidente.  Puisque les scrupuleux prennent tout à cœur,  la présomption joue en leur faveur. Le moyen pour eux de juger et d’agir prudemment consiste à mettre de côté leurs peurs et leurs doutes. Si, en décidant à l’aveuglette,  il leur arrive parfois de pécher ou de reconnaître un péché dans une action qu’ils ont faite, cela viendra d’une ignorance invincible, et ils n’auront pas à en porter la responsabilité.

 631- Comme la meilleure façon de guérir une maladie est de supprimer sa cause, le confesseur, après avoir diagnostiqué un cas de scrupulosité, devrait prescrire des antidotes.  Si l’on découvre que la srupulosité vient de Dieu, on devrait encourager le pénitent à l’envisager comme un moyen de satisfaction pour des négligences passées, et une occasion de vertu et de progrès. On devrait lui conseiller de prier constamment pour recevoir de la lumière et du réconfort, et de suivre les directives du représentant de Dieu.  Si on réalise que la scrupulosité est le résultat d’une obsession diabolique, et qu’un exorcisme semble s’imposer, on ne doit pas le dire à celui qui en souffre.   Si la scrupulosité vient des personnes qu’il fréquente, ou des livres qu’il lit, le scrupuleux devrait fuir ces occasions et sélectionner des amis optimistes ou des lectures encourageantes, qui lui apprendront à regarder d’un œil serein le devoir et le destin.

 632- Remèdes pour la scrupulosité dont la cause est d’ordre mental.  Ceux qui souffrent d’idées fixes, de phobie, de dépression, on ne devrait pas les rabrouer, ni leur rabâcher que leurs peurs sont insensées.  On devrait les traiter avec bonté et fermeté.   La meilleure façon de procéder avec ces âmes troublées, c’est de les persuader gentiment qu’elles n’ont rien à craindre; qu’elles feraient bien d’imiter le grand nombre, d’éviter les singularités,  de ne parler de leurs anxiétés qu’avec leur directeur spirituel, et de toujours vaquer à un travail qui saura les distraire.    Ceux dont l’esprit est agité, et pour qui tout est matière à objection et critique, doivent se garder de l’introspection et de l’étude de questions morales hors de leur portée.  Ils doivent s’accorder un temps raisonnable de détente, chercher à porter secours à ceux qui ont besoin d’aide, et éviter la fainéantise.

 633- Remèdes pour la scrupulosité dont la cause est d’ordre moral.  Si les scrupules proviennent de l’obstination, on doit faire comprendre au pénitent que le directeur est mieux placé que lui pour juger, et que c’est, pour un scrupuleux,  le comble de l’opiniâtreté et de la présomption  de faire passer ses idées avant celles de son directeur.  Si la mélancolie ou la timidité jouent un rôle dans le développement des scrupules, on doit inculquer la confiance et la jovialité.  On devrait inciter le pénitent à méditer souvent sur la bonté de Dieu, et à se souvenir que Dieu n’est pas un contremaître inexorable, mais un tendre Père.  Ceux qui sont scrupuleux parce qu’ils sont des girouettes qui tournent à tous les vents, doivent s’adonner aux choses sérieuses, s’en tenir fermement à ce qu’ils ont une fois jugé bon,   L’obéissance au directeur leur apportera à eux et aux autres scrupuleux psychiques  un bénéfice plus durable  que des traitements psychiatriques par le biais de l’hypnotisme, de la suggestion mentale, ou de la psychanalyse.  L’observance des règles prescrites est un excellent moyen de former sa volonté, laquelle est soutenue par les motivations, et par tous les secours que la religion peut offrir.

 634- Remèdes pour la scrupulosité dont la cause est d’ordre physique.  C’est le médecin qui est la personne chargée de soigner les malades,   En conséquence, un scrupuleux qui souffre de maux de tête, de vertige, d’insomnie, de perte d’appétit, de nervosité, d’hallucinations, etc, doit aller consulter un médecin qui s’y connait en ces matières.  Évacuer les causes du stress, adopter une diète suffisante mais modérée,  prendre le grand air et faire des exercices physiques, s’entourer d’amis compréhensifs et  affectueux, et se tenir occupé, voilà quelles sont les meilleures cures naturelles.   Si le confesseur se rend compte que c’est la maladie qui est la cause de la scrupulosité, il devrait interdire toute pratique spirituelle qui serait de nature à causer ou à aggraver cette maladie.  Exemple.  On ne devrait pas permettre aux scrupuleux le genre de mortification qui les prive d’un sommeil nécessaire, d’une nourriture suffisante, d’exercices physiques obligatoires,  d’air frais, ni de se livrer à des mortifications ascétiques qui ne sont pas faites pour eux.

 635- Les personnes qui sont scrupuleuses et laxistes en même temps ont besoin d’être dirigées pour remporter la victoire sur ces deux maladies spirituelles.   Si elles sont plus scrupuleuses que laxistes, le cas est moins difficile, puisqu’elles penchent plutôt du côté le plus sur. Il suffira d’appliquer les remèdes indiqués plus haut pour la scrupulosité et le laxisme, selon qu’on en sentira le besoin.  Exemple. Pierre, à cause de sa scrupulosité, consacre trop de temps à la prière, et néglige ainsi les exercices physiques et les récréations qui sont nécessaires à sa santé et à son équilibre.   On devrait l’inciter à limiter ses prières, à leur assigner un temps déterminé,  et lui faire comprendre qu’il a le devoir de s’occuper de sa santé.  Si les personnes sont plus laxistes que scrupuleuses,  la chose est plus difficile, parce qu’elles penchent plus du côté du mal que du bien.   S’il s’agit du phasisaïsme, la maladie est incurable, à cause de l’orgueil et de l’aveuglement qui apportent des obstacles insurmontables à toute cure.  On doit traiter ces personnes-là avec sévérité, puisqu’il n’y a rien d’autre qui puisse  faire impression sur elles.  On devrait  leur expliquer de but en blanc leur état, sans prendre de gants blancs, et leur montrer ce qui les attend si elles ne se repentent pas.  Exemple.  Pierre se croit un saint parce qu’il s’en tient à la lettre de la loi quand il juge les autres.  Mais  il ne se soucie pas de son âme.  Il est très indulgent envers lui-même, mais il se comporte comme un tyran envers les autres.  On doit expliquer à Pierre que, loin d’être un saint, il est une mauvaise personne; que loin d’être en sécurité, il est en grand danger. S’ils sont insensibles à tous les reproches, il faudra leur remettre en mémoire les tourments qui attendent ceux qui s’aveuglent volontairement. (Matt. XX111, 13 et suiv.)

 636- Conclusion pratique. On dit qu’un instrument est bon quand il produit avec une exactitude suffisante les effets qu’on attend de lui. Il est mauvais s’il ne les produit pas.  Ainsi, une trêve, un compas, un thermomètre sont bons s’ils sont précis et exacts, et mauvais s’ils ne le sont pas.  Il sera dangereux et risqué  de se guider à l’aide d’un instrument déréglé.  D’après tout ce que nous avons dit jusqu’ici, il apparait clairement que la conscience peut être un indicateur trompeur, et que l’on peut améliorer son acuité.  D’où le besoin de corriger une mauvaise conscience, et de cultiver une bonne conscience, de la façon suivante.  637- Les remèdes pour une mauvaise conscience sont dans la volonté.   Quelqu’un juge incorrectement souvent  parce qu’il est mauvais lui-même, mauvais dans ses intentions et ses buts concernant la vie dans sa totalité,  mauvais dans son attitude face à un devoir particulier, mauvais dans son manque de sincérité envers lui-même.  Ce qui pourrait le guérir serait un amour sincère de Dieu et de la vertu, le courage de désirer la vérité, et un examen honnête de ses mobiles et de ses actions. L’homme charnel ne perçoit pas les choses qui sont de l’Esprit de Dieu, mais l’homme spirituel juge toutes choses. (1 Cor. 11, 14, 15)

 Les causes immédiates d’une mauvaise conscience sont dans l’intelligence.  Quelqu’un juge mal parce que, au moment du doute, il s’en tient à des principes ou des idées erronés.   Le remède est donc de rechercher avec soin un éclairage par la prière, l’étude, la lecture des vies de saints, de consulter ceux qui sont prudents et consciencieux.  La mauvaise conscience dit à Dieu :  Va t’en,  Nous ne désirons pas la connaissance de tes voies, (Job XX1, 14), mais la bonne dit : Enseigne-moi ta justification. Tes témoignages sont mes délices, et  ta justification mon conseil. (Ps CXV111, 12, 24)

 638- Les signes d’une bonne conscience.  Une sainteté extraordinaire n’est pas requise pour que quelqu’un comprenne ce que c’est qu’une bonne conscience, car il y a des degrés dans la bonté.   Si donc la vie externe d’une personne est conduite d’après les devoirs de son état; et si sa vie interne, en autant qu’elle peut en juger, est affranchie de toute faute grave, est guidée par l’amour de Dieu et la haine du péché, cette personne  peut considérer que sa volonté est bonne.  S’il lui arrive parfois de pécher véniellement, ce n’est pas parce qu’elle n’a pas une bonne conscience, mais c’est parce qu’elle ne la suit pas toujours.

 Un zèle extraordinaire à étudier ses devoirs n’est pas nécessaire pour que quelqu’un considère que sa conscience est bonne, car autrement il faudrait porter un fardeau plus lourd que celui que Dieu veut vraisemblablement nous imposer.  Une personne qui, pour son instruction religieuse, se sert de tous les moyens qu’utilisent les personnes consciencieuses qui sont dans sa condition, peut en toute certitude se regarder comme à l’abri de toute erreur volontaire,  S’il lui arrive parfois de faire un mauvais jugement, la faute sera involontaire;  elle ne sera pas due à une mauvaise conscience.  Bien entendu, quelqu’un dont la conscience n’est pas dans une erreur vincible peut même pécher mortellement, non parce que sa conscience est mauvaise, mais parce qu’il ne la suit pas.

 639- Voici des moyens pour maintenir et préserver une bonne conscience.   Nous devrions fréquemment tester nos motifs avec la sévérité avec laquelle nous jugeons les intentions des autres, et en nous plaçant devant Dieu.   Nous devrions mesurer nos actions non d’après les normes du monde, ses maximes et ses exemples,  mais d’après ceux du Christ.

ARTICLE 3
UNE CONSCIENCE CERTAINE
(somme théologique, 1-11 q. 57 a. 5, 11-11 q. 47, a. 9)
 640- Comme nous l’avons dit plus haut, la seule conscience qui soit un guide sûr est celle qui est non seulement bonne –qui est, autant que possible,  en accord avec la loi externe,--mais certaine.  Une conscience certaine est celle qui, sans crainte raisonnable de se tromper, juge qu’un acte particulier est obligatoire ou illégal, et conclut qu’il doit donc être accompli ou omis.

 641- Nécessité de la certitude.  Nous devons être surs d’être dans le vrai avant d’agir.  Autrement, nous nous exposons au danger de pécher et donc de commettre le péché (Cf 582)  En conséquence, il est nécessaire d’agir avec une conscience certaine, et il est interdit d’agir avec une conscience incertaine. Si la trompette donne un son incertain, qui se préparera pour la bataille ? (1 Cor. X1V, 8) On peut entendre le mot trompette ici  au sens de conscience.  Dans Rom. X1V, 22, 23, l’Apôtre déclare qu’est béni celui qui agit avec conviction, tandis que celui qui agit dans le doute est condamné.   Exemples.  Marie se demande si c’est un péché de coudre le dimanche. Elle n’en est pas certaine, mais elle a de forts doutes que la couture est un travail servile. Si elle coud quand même, elle sera coupable d’avoir violé la loi, puisqu’en voulant en prendre le risque, elle en a pris aussi la responsabilité.  Jacques offre à Jean un verre sans savoir vraiment s’il est empoisonné ou non.  Il est coupable, car il n’a pas le droit de s’exposer au danger de pécher, ni de mettre son prochain en danger de mort.    642- Les personnes qui agissent avec une conscience douteuse, et qui découvrent après coup  que ce qu’elles craignaient être mauvais ne l’était pas, ou n’est pas aussi mauvais qu’elles le craignaient, doivent se souvenir de ceci.  Que leur conduite passée ne peut pas être jugée d’après leur connaissance nouvellement acquise, mais par celle qu’elles avaient alors.    Exemple. Marie fait un travail le dimanche en se demandant si elle fait un péché grave ou véniel.  Elle découvre plus tard que ce n’était qu’un péché véniel, et se félicite de n’avoir pas commis de péché grave.  Son jugement est incorrect, car elle ne savait pas alors que ce n’était pas un péché grave.  Les personnes dont nous parlons  doivent se guider ensuite dans le futur avec leur connaissance nouvellement acquise.

 643- Les sortes de certitude.  Les jugements peuvent être  plus ou moins certains.  Ils sont métaphysiquement certains quand une erreur est absolument impossible, le contraire étant une contradiction dans les termes que le Tout-Puissant lui-même ne pourrait pas rendre vrai. Les jugements déclarant que le même et identique acte ne peut pas être à la fois bon et mauvais,  qu’on doit faire le bien et éviter le mal,  et que Dieu doit être honoré sont métaphysiquement certains, puisqu’ils proviennent directement des concepts eux-mêmes de l’être,  du bien et de Dieu.   Les jugements sont physiquement certains quand, d’après les lois de la nature, une erreur, le contraire de ce que l’esprit soutient, ne peut pas se produire  sans l’intervention d’une autre cause.   Exemple. Les jugements déclarant que celui qui avale du poison se donne la mort,  que celui qui met le feu à une maison la détruit,  sont physiquement certains parce que des agents naturels comme le poison et le feu produisent infailliblement leurs effets, quand ils sont appliqués aux matières convenables et dans les conditions voulues, et continuent d’agir tant qu’ils ne sont pas freinés par une force supérieure.

 Les jugements sont certains moralement  quand l’erreur est impossible d’après ce qui se passe habituellement dans l’humanité,  le contraire étant si invraisemblable qu’il serait imprudent de se laisser déterminer par lui.  Exemples.  Quelqu’un est moralement certain que la conclusion à laquelle il est parvenu dans un cas particulier est correcte, s’il peut se rendre le témoignage d’avoir pris tous les moyens pour découvrir la vérité. Des témoignages et des déductions peuvent induire en erreur,  puisqu’ils proviennent d’agents libres et faillibles.  Mais quand ils semblent avoir les qualités qui indiquent la vérité, ils sont la plus part du temps  fiables, et doivent être considérés comme tels dans la vie de tous les jours.

  644- Quant à la certitude requise dans les jugements de conscience, on doit noter les points suivants.  La certitude métaphysique n’est pas requise, puisque la conscience n’a pas à faire avec les principes premiers, mais avec des déductions qui portent sur des actes particuliers.  Les premiers principes moraux qui sont l’objet de la syndérèse, et au moins certaines conclusions générales, qui sont l’objet de la science morale, sont métaphysiquement certains (Cf 145, 300), puisqu’ils sont basés sur des relations nécessaires.  Mais les conclusions particulières, qui sont l’objet de la conscience, (cf 145, 300), portent sur le contingent et sur l’individu.   La certitude physique n’est pas requise pour le jugement de conscience, puisque la conscience n’a pas trait aux activités des agents naturels, mais aux actes des agents moraux qui se conduisent avec liberté et responsabilité.     En conséquence, la certitude morale est suffisante pour les conclusions que tire la conscience.  Que le plus haut niveau de certitude ne soit  pas nécessaire ne devrait pas nous surprendre outre mesure, car il serait déraisonnable de l’exiger pour des jugements qui portent sur le contingent et le particulier.

 645- La certitude morale est de deux sortes. La certitude au sens strict du terme qui exclut non seulement la crainte et l’erreur, mais aussi tous les doutes, qu’ils soient prudents ou imprudents, grands ou petits.   Exemple.  Pierre pense à une façon de faire de l’argent facilement, mais de façon malhonnête.   Sa conscience s’aperçoit tout de suite  que la chose est manifestement mauvaise, et elle décide sans la moindre crainte ou hésitation qu’il ne faut pas mettre le plan à exécution.   La certitude au sens large, exclut toute crainte d’erreur, et tout doute sérieux ou prudent, mais pas un doute léger ou imprudent.   Exemple. Pierre a été baptisé par un prêtre excellent, mais la date du baptême n’a pas été inscrite dans le registre.  Il se demande si quelque chose d’essentiel n’a pas aussi été oublié.  Il en vient même à se demander s’il ne devrait pas se faire rebaptiser. Son doute est déraisonnable.

 646- La certitude morale au sens large suffit pour qu’on puisse parler de conscience sure, même dans les matières de grande importance, puisque c’est souvent la seule sorte de certitude qu’on puisse avoir.   Et celui qui voudrait être à l’abri du moindre doute, de la plus légère hésitation, se trouverait bientôt empêtré dans les scrupules et les perplexités.  Exemple.  Si le Pierre ci-haut mentionné cédait à ses doutes et se faisait rebaptiser, un doute semblable au sujet de son nouveau baptême pourrait surgir dans son esprit, et il ne se sentirait pas mieux qu’avant.

 647- Du point de vue de son objet, la certitude est de deux sortes. La certitude spéculative se rapporte à un jugement considéré comme une loi générale, abstraction faite des circonstances particulières.   Exemple. Il est spéculativement certain qu’un travail agricole est interdit les jours d’obligation, et que les clercs sont tenus de dire le bréviaire.  La certitude pratique se rapporte à un jugement qui est une application d’une loi générale à un cas particulier, en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes.  Exemple.  Il est pratiquement certain que Pierre doit faire les foins un jour d’obligation, si sa moisson est mise en danger. Un clerc est exempt du bréviaire à cause de sa santé, si le médecin lui déconseille de le lire.   648- La certitude spéculative ne suffit pas pour la conscience.  C’et la certitude pratique qui est requise, puisque la conscience ne regarde pas les lois abstraites mais les cas particuliers.  Ce qui est juste  ne suffit pas non plus si on ne considère que l’objet de l’acte.  Il faut y ajouter les mobiles et les circonstances.

 649- Du point de vue des arguments sur lesquels elle est basée, la certitude est de deux sortes : démonstrative ou probable.  La certitude démonstrative est l’assentiment donné à une conclusion logiquement tirée de prémisses qui sont certainement vraies.   Exemple.  Pierre conclut qu’il est obligé d’aller à la messe le dimanche parce que la loi est certaine, et qu’il est certain qu’elle s’applique à lui aussi.    La certitude probable est l’assentiment donné à une conclusion dont les prémisses incertaines semblent être vraies, et qui n’entraînent aucune conclusion contraire ou facilement réfutable. (Cf 703).   Exemple.  Pierre est presque certain qu’il est gravement malade, car il constate un certain nombre de symptômes alarmants.  La possibilité qu’ils soient dus à son imagination est exclue par le fait qu’ils sont nouveaux et récents.   Il conclut donc qu’il est dispensé de l’assistance à la messe le dimanche.

 650- La certitude probable est suffisante pour la conscience, parce que dans les matières morales, il est impossible d’avoir, en toutes circonstances, des raisons qui ont valeur de démonstration.  En conséquence, une personne agit prudemment en suivant une décision qui est solidement probable, et qui n’est combattue par aucune probabilité contraire sérieuse.  Ce qu’on appelle ici conscience probable est très différent de l’opinion probable, dont nous parlerons plus loin (662)

 651- Du point de vue de la manière dont elle est obtenue de principes qui sont intrinsèques au cas,  en appliquant à la matière la loi qui la concerne.  Exemples.  Un juge qui décide, d’après les arguments et les preuves présentés en cours, qu’un accusé est coupable, et un fils qui conclut d’après le quatrième commandement qu’il est tenu d’aider ses parents en difficulté, ont une certitude directe dans leurs jugements, parce qu’ils se sont basés sur des principes pertinents.

 La certitude indirecte est celle qui est obtenue de principes qui sont extrinsèques au cas, en appliquant à la question en cause  des principes réflexes (des règles qui indiquent comment on doit agir dans le doute), ou le principe d’autorité (un argument tiré de ceux qui sont considérés comme compétents pour prendre une décision).  Exemples.   Si un juge n’est pas capable de formuler un jugement sur un accusé à partir de raisons intrinsèques, parce que de forts arguments ont été présentés pour et contre, il doit avoir recours aux principes qui se rapportent à sa situation et qui enseignent qu’en cas de doute, il doit acquitter un accusé.  Si quelqu’un n’est pas capable de décider si le quatrième commandement  l’oblige de garder ses parents ou sa belle-mère chez lui, parce qu’ils sont capables de tenir maison,   et qu’ils seraient une cause de soucis pour la famille, il peut avoir recours au  principe externe d’autorité, en consultant son confesseur.

 652-659 le probabilisme (non traduit)

660- Voici les principes qu’on peut utiliser,  comme des réflexes, pour mettre fin à des doutes négatifs et invincibles sur la loi ou l’obligation.  Si on ne peut trouver aucune raison sérieuse pour prouver ou démentir l’existence d’une loi, ou sa gravité, ou son application à un certain cas, on peut faire usage du principe : une ignorance invincible de la loi excuse du péché.  Exemple.  Pierre consulte toutes les sources disponibles pour savoir si le mercredi des cendres est un jour d’obligation.  Tout ce qu’il apprend se résume à l’existence de certaines vigiles qui sont des jours de jeûne.  Si on ne peut trouver aucune raison pour prouver ou démentir que telle loi a tel sens, on peut recourir à ce principe : une loi n’oblige que dans la mesure où elle est connaissable. On peut interpréter une loi contrairement à un législateur qui aurait pu s’exprimer plus clairement. Les choses qui accablent les sujets d’une loi devraient être interprétées de façon restrictive; celles qui lui sont favorables, au sens large.  Exemple.  Pierre supervise des travailleurs, mais il n’a aucune idée du sens qu’a ce mot dans un indult portant sur le jeûne, à savoir s’il s’applique seulement aux travailleurs manuels ou aussi aux superviseurs.

Si on ne peut trouver aucune raison sérieuse pour prouver ou démentir que telle loi a cessé ou a été abrogée, il faut suivre le principe suivant : dans le doute décide en faveur de ce qui semble le plus vrai.  Dans ce cas, la présomption est à l’effet que la loi continue, parce qu’il est certain qu’elle a été faite, et qu’il n’est pas probable qu’elle ait cessé.   Exemple.  Pierre apprend que certains adoucissements ont été faits à la loi du jeûne ecclésiastique, et se demande si la même chose existe au sujet de l’abstinence.  Mais il n’a aucune raison de penser que des changements ont été faits sur ce dernier point.   661- Dans les cas dont nous venons de parler, le doute négatif a été généralement résolu en faveur de la non-obligation, d’après la règle : dans le doute, suivre ce qui est sur.

On doit résoudre les doutes  négatifs en faveur de l’obligation quand le doute porte sur une matière si importante qu’elle ne permet de prendre aucun risque pour son accomplissement, comme quand il est question des lois qui portent sur les droits suprêmes de l’homme, ou de lois qui déterminent ce qui doit être obligatoirement utilisé dans l’administration des sacrements.  Exemple.  Pierre adopte un enfant nouveau-né abandonné, déposé à sa porte.  Comme rien ne permet de penser que l’enfant a été baptisé, Pierre opte pour le plus sur, et fait baptiser l’enfant.  On peut résoudre un doute négatif en faveur de l’obligation  quand il persiste, du fait qu’aucun principe réflexe n’est trouvé, ou aucun qui se rapporte au cas.  Exemple.  Paul ne voit que des incertitudes au sujet de l’existence d’une loi.  Il ne peut trouver aucune raison pour ou contre, et il ne connait aucun principe ou aucune présomption pour le guider dans sa perplexité.  Il ne sait pas qu’il peut  agir ou penser comme si la loi n’existait pas.  Il doit donc s’informer davantage, ou bien agir comme si la loi existait.

662- L’opinion.  Voici quel est le devoir de quelqu’un dont le jugement  prend
la forme d’une opinion.  S’il est capable d’éliminer  les  objections contraires à son jugement, ou de diminuer l’importance de celles-ci et de toutes les autres qui restent, son opinion est devenue une certitude morale (Cf 644 et suiv.), et il peut la suivre comme un guide sur.  Exemple. Pierre promet d’épouser Juliette, mais ses parents s’opposent au mariage.  Pierre incline à penser qu’il devrait accomplir sa promesse, mais, pour être certain, il consulte son curé.  Ce dernier lui fait voir que l’opposition au mariage n’est pas raisonnable, et met ainsi fin aux difficultés de Pierre.   Si une personne n’est pas capable d’éliminer une ou plusieurs objections contraires à son jugement, son opinion n’est pas devenue une certitude morale, et elle ne peut pas la suivre comme un guide sur.  Exemple. Si le curé de Pierre  soutient que les parents ont raison et que Pierre a tort,  et si, en voulant toujours accomplir sa promesse il a de sérieuses craintes de faire un faux pas,  le jeune homme ne devrait pas faire à sa tête.

663- Ceux qui agissent quand leur conscience est sous l’emprise  du doute, de la suspicion, ou d’une opinion incertaine, sont coupables de péché, parce qu’ils n’agissent pas de bonne foi. (Rom. X1V, 22, 23) Ils sont imprudents, et aiment le danger. (Eccl. 111, 27)  Ils sont coupables de l’espèce et de la gravité du péché dont ils redoutaient la présence dans leur action. Car ils désirent  ce à quoi  ils s’exposent.   Exemple.  Si Pierre fait un serment  en pensant qu’il commet un parjure, il est coupable de parjure devant Dieu, même si ce qu’il dit est vrai.     664-  Les peurs ou les objections contraires à une opinion sont sans importance si elles n’ont qu’une probabilité légère. (Pierre  estime qu’il n’est pas obligé de dire les deuxièmes leçons parce qu’il sait qu’il a commencé à les lire, et qu’il les a donc terminées.  Mais il se croit obligé de les lire parce qu’il ne se souvient pas des détails des leçons, et ne doit donc pas les avoir lues.) Si elles sont improbables. (Pierre craint d’avoir omis sexte, bien qu’il se souvienne d’être allé régulièrement au chœur pour chanter les heures.)

665- Les peurs contraires à une opinion sont importantes quand elles ne sont pas simplement possibles, mais quand elles  ont une telle ressemblance avec la vérité que même un homme prudent s’y méprendrait.   Les signes intrinsèques de cette solide probabilité sont les bons arguments sur lesquels s’appuient la crainte ou le contraire de l’opinion.  Exemple.  Après un examen sérieux de sa conscience, Pierre décide qu’il n’est pas tenu de mentionner un vol en confession, parce qu’il est arrivé juste avant sa dernière confession.  Il craint pourtant d’être obligé de l’accuser, car il ne se souvient pas d’avoir eu la moindre idée de restitution.   Les signes extrinsèques d’une probabilité solide sont les bonnes autorités qui défendent le contraire de l’opinion.  Exemple. Pierre estime qu’il n’est pas obligé de confesser une calomnie, parce qu’il n’est pas certain de l’avoir déjà confessée. Il croit d’y être obligé,  parce que saint Alphonse de Ligori, dont l’autorité est grande en théologie morale, enseigne qu’on doit confesser un péché mortel à moins qu’on soit certain de l’avoir déjà confessé.  666- Celui qui est troublé par des peurs ou des difficultés de peu d’importance est scrupuleux, mais il ne l’est pas s’il hésite en face d’une difficulté majeure.   Exemples.  Pierre craint d’être coupable de meurtre parce qu’il a laissé seule pendant un instant une personne malade qui mourut sans qu’on puisse s’y attendre, en son absence (conscience scrupuleuse).  Paul craint d’avoir à restituer parce qu’après s’être moqué de Paul il lui a fait perdre ses moyens de survie.

667- Que doit faire quelqu’un qui a une opinion arrêtée sur ce qu’il doit faire maintenant, mais qui craint qu’elle soit mauvaise.  Si une peur sérieuse persiste  après avoir pris les moyens nécessaires pour s’en défaire, il devrait, si possible,  remettre  la chose  à plus tard, ou suivre la voie la plus sure,  Exemple.  Pierre doit aller se confesser maintenant, mais il ne peut pas se souvenir s’il a avoué ou non un vol passé.  Il croit qu’il ne devrait pas en parler,  mais il est loin d’en être certain, et il conserve un doute dont il ne peut pas se défaire.   Il devrait le confesser comme un péché déjà pardonné.

Si on parvient à enlever la crainte ou à la rendre inopérante par des moyens directs (comme un argument théologique fondé sur des principes moraux) ou par des moyens indirects (comme une consultation), on peut suivre son opinion.  Exemple.  Si le Pierre ci-haut mentionné apprend de son confesseur ou déduit de principes réflexes surs qu’il n’est pas obligé de confesser son vol, il peut agir avec une conscience sure en suivant cet avis.   668- L’autorité qui peut être suivie  en toute sécurité par un laïc qui soutient une opinion tout en craignant que le contraire ne soit vrai, est celle de toute personne qu’il juge pieuse, instruite et prudente.  Quand il lui est impossible et  de trouver une solution et de demeurer dans une incertitude perpétuelle, il doit en ce cas comme en toutes circonstances parvenir à la certitude en consultant ceux qui sont compétents et fiables.  Si la conscience n’émet qu’une opinion, il faut donc consulter une personne versée en la matière pour qu’elle devienne certaine.   Dans le cas d’une conscience qui excuse ou qui accuse, il est au moins souhaitable que le péché douteux soit mentionné en confession, surtout par ceux qui ne sont pas très exigeants envers eux-mêmes, et qui sont portés à juger leurs actes et leurs pensées avec une grande indulgence.

Dans le cas d’une conscience qui interdit ou permet, il est nécessaire de rechercher des informations fiables quant la chose est possible, auprès de ses parents ou des professeurs, d’un curé ou d’un confesseur.  Exemple. Pierre pense qu’il a le droit de boire un verre de rhum de temps en temps pour se montrer sociable,  mais il craint de ne pas avoir le droit de le faire, parce que le rhum l’excite,  provoque chez lui  des remarques déplacées, et l’empêche parfois de retourner chez lui en toute sécurité.   669- Voici l’autorité qu’un confesseur ou tout prêtre peut suivre en toute sécurité  pour résoudre d’importants doutes contraires à un jugement moral.   Si une opinion est considérée comme moralement certaine par tous ou par presque tous les traités de théologie morale, on peut la suivre. Car il n’y aurait certainement pas une telle unanimité si les objections étaient vraiment formidables.

On peut suivre une opinion qui  est considérée comme moralement certaine par un bon nombre (six ou sept) de ceux qui font autorité en théologie morale,  et qui sont arrivés indépendamment à la même conclusion.  Car le jugement d’un grand nombre est préférable au jugement d’une seule personne. La certitude qu’apportent les autorités devrait donc prévaloir sur le doute d’une personne qui n’a pas le même poids. Si une opinion a le suffrage  d’un seul théologien, on peut la suivre sans tergiverser, s’il est reconnu par l’Église comme une autorité et un guide sur.   C’est ainsi que le Saint-Siège a expressément déclaré que les confesseurs peuvent suivre avec assurance la doctrine morale de saint Alphonse de Liguori.  Et l’approbation qu’elle a donnée à saint Thomas d’Aquin rend sa parole plus convaincante qu’un argument contraire basé sur le raisonnement d’un autre théologien.  Évidemment, cela ne veut pas dire que ces docteurs ou d’autres semblables sont infaillibles dans leurs jugements, ou qu’on ne doit pas prendre ses distances avec un enseignement particulier quand l’Eglise a décidé en sens contraire, ou quand leur erreur saute aux yeux.  Cela signifie seulement qu’ils sont si éminents parmi les moralistes pour la justesse de leur doctrine que celui qui est dans le doute peut les suivre en toute sécurité, à moins qu’il sache ne pas pouvoir le faire.

670- Mais il peut arriver que quelqu’un soit incapable de solutionner un cas en faisant appel à une autorité.  Par exemple, quand le cas à solutionner ne figure pas dans les manuels, ou n’est pas considéré avec ses circonstances propres.  Quand une autorité traite d’une question avec hésitation, et déclare qu’elle est tout au mieux une opinion probable.   Quand les autorités sont divisées en deux parties égales, comme quand un petit nombre de grands noms est en opposition avec un grand nombre de petits noms, ou quand ceux qui sont égaux en savoir diffèrent entre eux de façon à ce qu’une moitié soit d’une opinion et l’autre moitié de l’autre.  Quand on fait le compte des autorités, il n’est pas toujours facile de savoir qui elles sont, car un auteur peut se servir des arguments d’une autorité ou d’une école, et il n’est donc pas un témoin indépendant de l’enseignement qu’il prône.
 
 

671- Quand un prêtre ou une personne suffisamment instruite en théologie ne peut pas, en recourant à une autorité, changer une conscience hypothétique ou douteuse en une conscience certaine, elle peut parvenir à  la certitude  directement,  en réexaminant la question soigneusement, avec une impartialité totale, jusqu’à ce qu’elle ait découvert des raisons assez fortes pour trancher une fois pour toutes dans un sens ou dans l’autre. (b) Indirectement, en soumettant la question à l’arbitrage d’un principe réflexe qui lui semble réellement vrai, et en le laissant faire la distinction entre l’opinion et les objections, ou entre les doutes conflictuels.

672- les systèmes moraux, the moral systems
672-742 n'ont pas encore été traduits, si une personne veut bien s'en charger merci de contacter Alexis avec l'email que l'on trouve en page d'accueil du site sitejesusmarie(arobase)gmail.com

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Traduction originale française par JesusMarie.com, 7 octobre 2016 : autorisation est donnée à tout catholique de reproduire sur tous supports cette traduction à condition de mentionner JesusMarie.com comme auteur de la traduction

Titre Original : Moral Theology A Complete Course Based on St. Thomas Aquinas and the Best Modern Authorities. Révision par le père Edward P. Farrel, o.p. New York City Joseph F. Wagner, Inc. London : B. Herder. All Rights Reserved by Joseph F. Wagner, Inc., New York, printed in the United States of America Note : Nous avons contacté le frère dominicain américain responsable des droits littéraires des frères de cette province de l'Ordre des Frères Prêcheurs, celui-ci affirme que cette THEOLOGIE MORALE, dans sa version originale anglaise, est maintenant dans le domaine public, c'est pourquoi nous la publions et la proposons en téléchargement. Si nos informations étaient fausses, merci de nous contacter par l'email figurant en première page du site pour que nous puissions immédiatement retirer tout ce qui serait litigieux. JesusMarie.com attache la plus grande importance au respect des droits des ayants droits et au respect des lois. Tout ce qui est publié, l'est avec autorisation, relève du domaine public ou est le fruit de notre propre esprit.

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