DEUXIEME PARTIE.
PRINCIPES DE LA JUSTICE CHRETIENNE.
SECTION I.
DU MAL QU’IL S’AGIT D’EVITER.
Article III. - DES PECHES D’AUTRUI QUI PEUVENT NOUS ETRE IMPUTES.
Question I
Quels sont les péchés appelés spécialement péchés d’autrui ?
On appelle particulièrement de ce nom les péchés qui, quoique commis par d'autres que nous, nous sont cependant imputés à juste titre, et nous feraient encourir notre condamnation au tribunal de Dieu. C'est pourquoi on peut entendre de cette sorte de péchés cet avis de l'Apôtre : Ne vous rendez point complice des péchés d'autrui ; aussi bien que cette parole du Roi-prophète : Purifiez-moi de mes péchés cachés, et pardonnez à votre serviteur les péchés d'autrui. Saint Basile-le-Grand applique encore à cette espèce de péché ce que saint Paul écrit aux Ephésiens : Ne prenez point de part aux œuvres infructueuses des ténèbres, mais au contraire condamnez-les ; et ces autres paroles du même Apôtre : Nous vous ordonnons de vous séparer de tous ceux d'entre vos frères qui se conduisent d'une manière déréglée, et non selon la tradition et la forme de vie qu'ils ont reçue de nous.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
I Tim., V, 22 ; Psaume XVIII, 13 ; Ephésiens,
V, 11, et II Thessalon., III, 6. Voir pour tous ces textes le
corps de la réponse.
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. BASILE-LE-GRAND, Lib., de verâ virginitate : " De même que Paul, cet admirable apôtre, a été dès son vivant précédé en partie par ses œuvres, c’est-à-dire par ceux qui, sanctifiés par ses leçons et ses exemples, sont entrés avant lui dans la vie éternelle, et lui ont préparé auprès du juste juge la récompense des sueurs qu'il avait essuyées pour leur salut ; et qu'en partie aussi il a été suivi par ses œuvres depuis même qu'il a terminé sa vie mortelle et qu'il est avec Jésus-Christ, ceux qu'il n'a cessé jusqu’à ce jour d'instruire par la doctrine contenue dans ses épîtres appelant sur lui de siècle en siècle les louanges et les bénédictions du divin maître : ainsi par la raison contraire il y a des péchés qui précèdent ceux qui en portent la responsabilité, savoir, ceux par lesquels ils ont causé la perte de quelques-uns morts avant eux, et dont à leur tour ils auront à subir le châtiment dans l'enfer ; d'autres aussi qui les suivent, savoir, les péchés dont ils sont la cause même depuis leur mort par la perversité qu'ils ont semée de leur vivant dans le monde. Ainsi jusqu’à nos jours le saint roi David ne cesse de porter les hommes à la connaissance et au service de Dieu, et ceux qui profitent des instructions contenues dans ses psaumes sont par la sainteté de leur vie un éloge permanent qui s'attache à sa mémoire ; tandis que dans le sens opposé Marcion et les autres hérésiarques ne cessent de faire du mal par leurs erreurs, et par un juste retour doivent subir dans l'enfer des châtiments plus rigoureux, à proportion des maux dont, quoique morts depuis longtemps, ils continuent à être la cause. Car si celui qui, pour me servir des paroles de l’Evangile (MATTH., XVIII, 6), scandalise un seul petit enfant, mérite dès-lors le feu de l'enfer, celui qui scandalise des milliers de personnes, soit par le dérèglement de ses mœurs,
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soit par la perversité de sa doctrine, devient justement responsable, non-seulement de la mort qu'il se cause à lui-même, mais encore de la perte éternelle de tous ceux qu'il aura entraînés dans sa ruine, de sorte que, autant il y aura d'âmes qu'il aura perdues, autant de fois il méritera d'être condamné à la mort éternelle dans le siècle à venir. Si donc il y a des actions qui nous précèdent, et d'autres qui nous suivent ; et si, de même que les péchés dont un premier a été la cause doivent ajouter au châtiment, de même les vertus que l'exemple ou l'instruction fait éclore doivent ajouter à la récompense, une vierge, soit vertueuse soit vicieuse, peut avoir aussi quelques-unes de ses œuvres qui la précèdent et d'autres qui la suivent ; et autant sera malheureuse dans l'éternité celle qui, outre le châtiment que lui auront mérité ses propres fautes, aura encore à subir celui que méritent les fautes qu'elle aura fait commettre à d'autres par l'exemple de ses désordres, autant sera bienheureuse au contraire la vierge qui, outre la couronne que lui auront méritée ses propres vertus, aura de plus à en recevoir autant d'autres dans le ciel, qu'elle aura engagé de ses compagnes à marcher à sa suite (Cf. S. Basili opera omnia, t. III, p. 619-620, Paris, 1730). "
2. EUTHYME, in Ps. XVIII : " Pardonnez-moi les péchés d'autrui, puisqu'il est, hélas trop certain que les rois, les pontifes, les pères de famille, les maîtres, tous les supérieurs enfin, sont responsables des péchés de leurs sujets ou de leurs peuples, de leurs enfants ou de leurs serviteurs, toutes les fois que ces péchés ont l'effet de leur propre négligence. "
3. S. AUGUSTIN, Lib. III de libero arbitrio, c. 10 : " Il y a deux principes de tous les péchés : nous les commettons, ou par un dessein volontaire et libre, ou à la persuasion d'autrui. C'est cela, je pense, que se rapporte ce qu'a dit le Prophète : Seigneur, purifiez-moi de mes péchés cachés, et pardonnez à votre serviteur ceux des autres. L'un et l'autre à la vérité est volontaire : car, comme en péchant par sa propre détermination, on ne pèche point malgré soi, ainsi quand nous consentons au mal qu'un autre nous suggère, c'est toujours volontairement que nous y consentons. Il y a néanmoins plus d'énormité à pécher non-seulement sans que personne nous y porte, mais en persuadant encore par envie et par artifice à d'autres de le faire, que de n'être porté à pécher que par la suggestion d'autrui (Cf. Les livres de saint Augustin sur le libre arbitre, p. 228). "
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4. S. BASILE, Lib. II de Baptismo, c. 9 : " Instruits maintenant de ce qui ferait que nos œuvres seraient infructueuses, gardons-nous bien de rien omettre de ce que Dieu demande de nous dans le combat engagé à son service, mais faisons au contraire tous nos efforts pour nous montrer en tout ses dignes ministres. Et non contents de nous conserver nous-même purs, prenons garde aussi de participer à l'impureté d'autrui, et conformons-nous à cet avis que nous donne l’Apôtre, de nous abstenir de toute participation aux œuvres infructueuses de ce siècle ténébreux (Ephes., V, 44). En ajoutant ensuite, " condamnez-les plutôt, " MAGIS AUTEM REDARGUITE, l’Apôtre nous fait voir jusqu'où nous devons porter notre attention à ne pas nous rendre complices ou responsables de ces sortes d'œuvres. "
" Mais qu'est-ce que participer aux œuvres de ténèbres et de combien de manières peut-on y participer ? C'est ce qu'il nous reste à dire maintenant. Me remettant donc à la pensée ces paroles des Proverbes (I, 11) : Venez avec nous, faites-vous complice de la mort de notre ennemi ; ces autres paroles de l’Apôtre (Philip., I, 7) : Vous êtes tous associés aux grâces que j'ai reçues de Dieu ; ces autres encore (Philip., IV, 14) : Participant à mes tribulations ; ces autres aussi (Gal., VI, 6) : Que celui qui reçoit l'instruction fasse part de ses biens à celui qui la lui donne ; ces autres du Psalmiste (Ps. XLIX, 18) : Si tu voyais un voleur, tu courais avec lui, et tu te faisais complice des adultères ; ces autres du Lévitique (XIX, 17) : Vous reprendrez votre frère quand vous le verrez pécher pour ne pas vous faire complice de sa faute ; ces autres enfin du Psalmiste (XLIX, 21) : Voila ce que tu as fait, et je me suis tu ; tu as pensé que je te ressemblerais ; je te citerai à mon tribunal, et je te mettrai en face de toi-même : en me rappelant ces passages et d'autres semblables, je dis qu'il y a participation dans les œuvres, quand on agit de concert pour atteindre un même but, et participation dans la volonté, quand celui même qui n'agit pas consent et applaudit à celui qui agit. Il est une autre sorte de participation, qui ne semble pas participation à plusieurs, mais à laquelle l’Ecriture sainte bien comprise donne ce caractère : c'est celle qui a lieu lorsque, sans coopération effective ni même consentement positif de la volonté on se tait sur le mal qu'on voit faire, au lieu de le condamner ouvertement ; c'est ce que font bien voir plusieurs des passages que je viens de citer, et de plus ce que l’Apôtre disait aux Corinthiens ( I Cor., V, 6 ) : Vous n'avez pas demandé avec larmes qu'on ôtât
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du milieu de vous celui qui a fait cette action ; et ces autres paroles ajoutées à ces dernières : Un peu de levain suffit pour aigrir toute une masse de pâte. Soyons donc saisis de crainte, et obéissons à celui qui a dit : Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une pâte toute nouvelle (ibid., 7). Mais si quelqu'un coopère à une action bonne en elle-même, et qu'il ignore l'intention mauvaise de celui qui fait cette action, il ne sera pas coupable de participation au mal, mais il recevra sa récompense pour ce qu'il aura fait, parce que, sans partager en rien la mauvaise disposition de l'autre, il se sera conservé lui-même dans l'amour de Dieu, comme Notre-Seigneur Jésus-Christ nous le déclare de ceux qui seront sauvés, quoique travaillant au même moulin ou couchant dans le même là avec ceux qui périront. Or, la distinction à faire entre ceux qui sont confiés à ma charge et ceux qui ne me sont pas confiés, consiste dans les soins que je dois donner aux premiers, mais non dans la participation que je pourrais apporter aux péchés, soit des uns, soit des autres. Car je ne dois un soin particulier qu’à ceux dont je me trouve spécialement chargé ; au lieu qu'il m'est défendu indistinctement à l'égard de tous de participer aux œuvres infructueuses des ténèbres. "
5. S. AUGUSTIN, Serm. XVIII de verbis Domini : " Soyez toujours séparé de cœur des méchants quand même vous pourriez, en usant de précaution, vous mêler de corps momentanément avec eux ; toutefois ne soyez pas négligent à reprendre ceux qui sont soumis à votre conduite, et n'épargne à leur égard ni les avis, ni les conseils, ni les exhortations, ni les menaces. Usez de tous vos moyens pour cela, et que les exemples que vous pouvez trouver dans l'Ecriture et dans l'histoire des saints qui ont vécu, soit avant, soit depuis Notre-Seigneur, et qui semblent prouver que les bons peuvent vivre au milieu des méchants sans en contracter de contagion, ne vous rendent pas négligent à reprendre les méchants. Pour n'être pas souillé par le contact de ces derniers, il faut deux choses : ne pas consentir au mal qu'ils font, et de plus les en reprendre, c’est-à-dire en deux mots, n'y apporter ni participation ni consentement. Il y a participation, lorsque la volonté est complice et qu'elle approuve le mal ; et c'est contre ce vice que nous prémunit l’Apôtre lorsqu'il dit : Ne participez point aux œuvres infructueuses des ténèbres, mais plutôt condamnez-les (Ephés., V, 11). Comme ce ne serait pas assez de ne pas consentir, si l'on négligeait la correction, c'est pour cela que l’Apôtre ajoute : Mais plutôt con-
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damnez-les. Voyez comme il joint ensemble ces deux
devoirs : Ne participez point, mais plutôt condamnez. Que
veulent dire ces mots : Ne participez point ? Cela veut dire : Ne
consentez pas, ne louez pas, n'approuvez pas. Que veulent dire ces autres
paroles : Mais plutôt condamnez ? Elles signifient : Reprenez, corrigez,
réprimez. Vous ne devez donc ni consentir au mal en l'approuvant,
ni négliger de reprendre ceux qui s'y livrent, ni cependant exercer
cette correction avec orgueil, ou d'une manière insultante pour
ceux qui la subissent. "
Question II
Combien compte-t-on de ces péchés dits d’autrui ?
On en compte neuf, comme il y a à peu près
le même nombre de manières de commettre ces péchés
eux-mêmes, savoir : par conseil, par injonction, par consentement,
par provocation, par adulation ou flatterie, par réticence, par
connivence ou indulgence, par participation au crime, et enfin par protection
donnée au mal.
Question III
Quand est-ce qu’on participe par conseil aux péchés d’autrui ?
C'est lorsqu'on se fait l'auteur ou l'instrument d'un mauvais conseil que d'autres ensuite mettent ou pourraient mettre à exécution. Nous en trouvons un exemple dans Caïphe (JEAN, XI,
47-53), qui, par le conseil qu'il donna aux sénateurs juifs, les détermina à voter la mort de Jésus-Christ. L'exemple opposé nous est fourni par Joseph d'Arimathie, que l'Ecriture appelle bon et juste, pour n'avoir pas consenti à ce conseil et aux actes des princes des prêtres et des pharisiens, quand ceux-ci conspirèrent la mort, de Jésus-Christ. Tel fui aussi le péché de ce Démétrius qui, mû par un vil motif d'intérêt, et de concert avec les autres ouvriers, souleva presque toute la ville d'Ephèse contre saint Paul et contre la doctrine que prêchait cet apôtre. Tel fut encore le crime de l'infâme Hérodiade avec laquelle le roi Hérode vivait dans l'adultère. Car ce fut par son conseil et
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sa persuasion que sa fille la danseuse demanda et obtint
la tête de saint Jean-Baptiste.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Ecclésiastique, XXVII, 28-30 : " Si un homme jette une pierre en haut, elle retombera sur sa tête ; et la blessure que fait le traitre, rouvrira les siennes propres. - Celui qui creuse une fosse y tombera ; celui qui met une pierre dans le chemin pour y faire heurter son prochain s'y heurtera, et celui qui tend un filet à un autre s'y prendra lui-même. - L'entreprise concertée avec malice retombera sur celui qui l'aura formée, sans qu'il sache d'où ce malheur lui sera venu. "
2. Ibidem, VI, 6-10 : " Ayez beaucoup d'amis qui vivent en paix avec vous, mais choisissez pour conseiller un homme entre mille. - Si vous cherchez un ami, ne le prenez qu'après l'avoir éprouvé et ne vous fiez pas sitôt à lui. - Car tel ami ne l'est que tant qu'il y trouve son avantage, et il cessera de l'être au jour de la tribulation. - Il y a tel ami qui se change en ennemi, et tel autre qui tout-à-coup manifeste sa haine, et se répand en injures et en outrages. - Tel est ami, qui ne l'est que pour la table, et qui ne le sera plus au jour de l'affliction. "
3. Ibidem, VIII, 20-22 : " Ne délibérez point au sujet de vos affaires avec des fous ; car ils ne peuvent aimer que ce qui leur plaît. - Ne traitez rien de secret devant un étranger ; car vous ne savez ce qu'il enfantera un jour. - Ne découvrez point votre cœur à toutes sortes de personnes, de peur que celui à qui vous vous fiez ne soit un faux ami, et qu'il ne médise ensuite de vous. "
4. Ibidem, XXXVII, 7-17 : " Ne prenez point conseil de celui qui vous tend un piège et cachez vos desseins à ceux qui vous portent envie. - Tout homme que l'on consulte donne son conseil ; mais il y en a qui ne regardent qu'eux-mêmes dans ce
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qu'ils conseillent. - En demandant conseil à un homme, veillez à la garde de votre âme. Sachez auparavant quels sont ses intérêts ; car il vous donnera conseil selon ce qui lui sera le plus utile. - Craignez qu'il ne plante un pieu dans votre chemin, et qu'il ne vous dise : Votre voie est bonne, pendant qu'il se tiendra à l'écart pour voir ce qui vous arrivera. Allez, consultez un homme sans religion sur les choses saintes, un homme injuste sur la justice, une femme sur une autre dont elle est jalouse, un poltron sur la guerre, un marchand sur le trafic de vos marchandises, un acheteur sur ce qui est à vendre, un envieux sur les bienfaits que vous avez reçus, un impie sur la piété, un homme sans honneur sur l'honnêteté, celui qui travaille aux champs sur tout autre travail, - un ouvrier à l'année sur ce qu'il doit faire pendant un an, et un serviteur paresseux sur l'assiduité au travail : vous ne devez point attendre de bons conseils de ces personnes sur toutes ces choses. Mais tenez-vous sans cesse auprès d'un homme saint, lorsque vous en aurez connu quelqu'un qui craigne véritablement Dieu, - dont l'âme ait du rapport avec la vôtre, et qui, lorsque vous aurez fait un faux pas dans les ténèbres, en gémisse avec vous.- Affermissez votre cœur dans la droiture d'une bonne conscience ; car vous n'aurez point de plus fidèle conseiller. "
5. JOB, V, 13 : " (Dieu) qui surprend les sages dans leur propre finesse, et qui renverse les desseins des hommes injustes. "
6. Ibid., XVIII, 5, 7-10 : " La lumière de l'impie ne s'éteindra-t-elle pas, etc.? - Avec toute sa force il ne marchera qu’à l’étroit, et ses conseils le feront tomber dans le précipice - Car il a engagé ses pieds dans les rets, et il marche au milieu des pièges. - Son pied sera pris dans ce filet, et la soif le dévorera. - Le piège qu'on lui a préparé est caché sous terre, et on lui tend un appât le long du sentier. "
7. Ibid., XII, 16-17 : " Près de lui (Dieu) sont la force et la sagesse, il connaît, et celui qui trompe, et celui qui est trompé. - Il fait tomber ceux qui donnent conseil en des pensées extravagantes, dont la fin est malheureuse, et il frappe d'étourdissement les juges. "
8. ISAIE, XIX, 11-14 : " Les princes de Tanis ont perdu le sens ; ces sages conseillers de Pharaon ont donné un conseil plein de folie. Comment osez-vous dire à Pharaon : Nous sommes les fils des sages, les descendants des anciens rois ? - Où sont maintenant ces sages, ô Pharaon ? Qu'ils vous apprennent les desseins
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du Dieu des années sur l'Egypte. - Les princes de Tanis sont dans le délire ; les princes de Memphis, dans l'abattement ; ils ont séduit l’Egypte, et perdu la force de ses peuples. - Dieu a répandu sur elle un esprit de vertige, et ses chefs ont laissé les peuples errer dans leurs œuvres comme un homme ivre qui ne va qu'en chancelant, et qui rejette ce qu'il a pris. "
9. Psaume VII, 13-14 : " Il a ouvert une fosse, et l'a creusée, mais il tombera lui-même dans son propre piège - Ses noirs projets se tourneront contre lui, et son iniquité retombera sur sa tête. "
40. Ps. IX, 14-15 : " Les nations sont tombées dans la fosse qu'elles avaient creusée - leurs pieds se sont engagés dans les lacs qu'elles avaient tendus. "
11. Proverbes, XXVI, 27 : " Celui qui creuse une fosse y tombera, et la pierre retournera contre celui qui l'aura roulée. "
12. Ecclésiaste, X, 8-9 : " Celui qui creuse une fosse y tombera, et celui qui renverse un mur en ruine sera mordu par les serpents. - Celui qui roule des pierres en sera meurtri, et celui qui fend le bois en sera blessé. "
13. JEAN, XI, 47, 49, 50, 53 : " Les princes des prêtres et les pharisiens tinrent donc -conseil, et ils disaient : Que faisons-nous ? Cet homme opère beaucoup de miracles. - Mais l'un d'eux, nommé Caïphe, qui était grand-prêtre cette année-là leur dit : Vous n'y entendez rien, - et vous ne considérez pas qu'il est de votre intérêt qu'un seul homme meure pour le peuple, et que toute la nation ne périsse point, etc. - Ils ne pensèrent donc plus depuis ce jour-là qu’à le faire mourir. "
14. LUC, XXIII, 50, 51-52 : " Cependant, voici qu'un sénateur, appelé Joseph, homme vertueux et juste, - qui n'avait point consenti au dessein des autres, et à ce qu'ils avaient fait, qui était d'Arimathie, ville de Judée et attendait aussi le royaume de Dieu, vint trouver Pilate, et lui demanda le corps de Jésus. "
15. Psaume I, 1 : " Heureux l'homme qui ne suit pas les conseils de l'impie, etc. "
16. Genèse, XLIX, 5-6 : " Siméon et Lévi tous les deux frères ; la fraude les a faits des instruments de violence. - Mon âme n'est point entrée dans leurs conseils, mon cœur ne s'est point uni à leur troupe, quand dans leur fureur ils ont tué des hommes, quand dans leur vengeance ils ont renversé une ville. "
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17. JOB, XXI, 46 : " N'ont-ils pas les biens en leur puissance ? Néanmoins, que le conseil de ces pervers soit loin de moi. "
18. JEAN, XI, 33 : " Ils ne pensèrent plus depuis ce jour-là qu’à le faire mourir. "
19. MATTHIEU, XXVI, 3-4 : " En ce même temps, les princes des prêtres et les anciens du peuple s'assemblèrent dans la salle du grand-prêtre, appelé Caïphe - et tinrent conseil ensemble pour se saisir de Jésus par ruse et le faire mourir. "
20. Actes, XIX, 24, 26, 28, 29 : " Un orfèvre nommé Démétrius qui faisait en argent de petits temples de Diane, donnait par-là beaucoup à gagner aux ouvriers de sa profession. - Les ayant donc assemblés avec d'autres qui travaillaient aux mêmes ouvrages il leur dit : Mes amis, vous savez que c'est de ce genre d'ouvrages que vient notre gain ; - cependant vous voyez vous-mêmes, etc. - Ayant entendu ces choses, ils furent transportés de colère, et s'écrièrent : La grande Diane des Ephésiens ! - Et toute la ville fut aussitôt remplie de confusion ; et ces gens-là coururent en foule au théâtre, etc. "
21. II Rois, X, 2, 3, 4, 6, 7, 18, 19 : " Alors David dit : Je veux témoigne ma bienveillance à Hanon, fils de Haas, comme son père m'a témoigné la sienne. Il lui envoya donc des ambassadeurs, pour le consoler de la mort de son père. Mais lorsqu'ils furent arrivés sur les terres des enfants d'Ammon, - les plus puissants du pays dirent à Hanon, leur maître : Croyez-vous que ce soit pour honorer votre père et pour vous consoler, que David vous a envoyé ici des ambassadeurs, et ne voyez-vous pas qu'il l'a fait pour reconnaître l'état de la ville, et pour la détruire ? - C'est pourquoi Hanon fit saisir les serviteurs de David, leur rasa la moitié de la barbe, et coupa la moitié de leurs vêtement jusqu'au haut des cuisses, et puis les renvoya. Or les Ammonites, voyant qu'ils avaient offensé David, envoyèrent une députation aux Syriens de Rohob et de Soba, et levèrent chez ces peuples, à leurs propres dépens, vingt mille hommes de pied ; ils prirent aussi mille hommes du roi de Maacha et douze milles d'Istob. - David en ayant été averti, envoya Joab avec toutes ses troupes. . . . . - Israël les mit en fuite, et David leur enleva sept cents chariots et leur tua quarante mille cavaliers, et il fit à Sobach, général de l'armée ennemie, une telle blessure, que celui-ci en mourut sur-le-champ. - Tous les rois qui étaient venus au secours d'Adarezer, se voyant vaincus par les Israélites, furent saisis de frayeur et s'enfuirent
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devant eux avec cinquante-huit mille hommes. Ils firent ensuite la paix avec les Israélites et leur restèrent soumis ; et depuis ce temps-là, les Syriens n'osèrent plus donner des secours aux enfants d'Ammon. "
22. II Samuel, XVI, 20-23 : " Absalom dit alors à Achitophel : Délibérez sur ce que nous avons à faire. - Achitophel dit à Absalom : - Entrez chez les femmes de votre père qu'il a laissées pour garder son palais, afin que, lorsque tout Israël saura que vous aurez déshonoré votre père, il s'attache plus fortement à vous. - On dressa donc une tente pour Absalom sur la terrasse du palais, et il abusa des femmes de son père devant tout Israël. - Or, les conseils que donnait Achitophel étaient regardés en ces jours-là comme les conseils de Dieu ; on les considéra toujours ainsi, et du temps qu'il était avec David, et quand il fut avec Absalom. "
23. II Samuel, XXVII, 1-8, 14-23 : " Achitophel dit donc à Absalom : Si vous l'avez pour agréable je m'en vais prendre avec moi douze mille hommes d'élite et me mettre à la poursuite de David dès cette nuit ; - et fondant sur lui et sur ses gens qui sont tout harassés et hors de défense, je les battrai sans peine, tout le monde fuira, et le roi se trouvant seul, je m'en déferai ; - et je ramènerai tout le peuple comme si ce n'était qu'un seul homme, car vous n'en voulez qu'à un seul, et après cela, tout sera en paix. - Cet avis plut à Absalom et à tous les anciens d'Israël. - Absalom dit néanmoins : Faites venir Chusaï d'Arach, afin que nous sachions aussi son avis. - Chusaï étant venu devant Absalom, Absalom lui dit : Voici le conseil qu’Achitophel vient de nous donner ; devons-nous le suivre ? Que nous conseillez-vous ? Chusaï répondit à Absalom : - Cette fois, le conseil qu'a donné Achitophel n'est pas bon. - Vous n'ignorez pas, ajouta-t-il, quelle est la valeur de votre père. . . - Alors Absalom et tous les principaux d'Israël dirent : L'avis de Chusaï d'Arach est meilleur que celui d'Achitophel. Or, ce fut par la volonté du Seigneur, que le conseil d'Achitophel, qui était utile, fut ainsi rejeté, afin que le Seigneur fît peser la ruine sur Absalom. - Alors Chusaï dit aux grands-prêtres Sadoc et Abiathar : Voici l'avis qu’Achitophel a donné à Absalom et aux enfants d'Israël et voici celui que je lui ai donné. - Envoyez donc en diligence quelque exprès à David pour lui en donner nouvelle, et faites-lui dire qu'il ne demeure point cette nuit dans les plaines du désert, mais qu'il passe au plus tôt le
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Jourdain, de peur qu'il ne périsse, lui et tous ses gens. - Jonathas et Achimaas étaient près de la fontaine de Rogel, n'osant se montrer ni entrer dans la ville ; mais une servante vint les trouver, et les avertir de tout cela. Ils partirent en même temps, pour porter ce message au roi David. - Il arriva néanmoins qu'un enfant les vit, et en donna avis à Absalom. Mais hâtant le pas, ils entrèrent chez un homme de Bahurim, qui avait un puits à l'entrée de sa maison, et ils y descendirent. - Et la femme de cet homme étendit une couverture sur la bouche du puits, comme pour faire sécher de l'orge mondé. Ainsi la chose demeura cachée. - Et quand les gens d’Absalom furent venus dans cette maison, ils dirent à la femme : Où sont Achimaas et Jonathas ? Elle leur répondit : Ils ont pris un peu d'eau, et s'en sont allés. Ainsi ceux qui les cherchaient ne les ayant point trouvés, s'en revinrent à Jérusalem. - Après qu'ils s'en furent retournés, Achimaas et Jonathas sortirent du puits, continuèrent leur chemin, et vinrent dire à David : Décampez et passez le fleuve au plus tôt, parce qu’Achitophel a donné tel conseil contre vous. - David se mit donc aussitôt en marche avec toute sa troupe, et ils passèrent le Jourdain avant la pointe du jour, en sorte qu'il n'en resta pas un seul en-deçà du fleuve. - Achitophel, voyant que son conseil n'avait point été suivi, fit seller son âne, s'en alla à la maison qu'il avait en sa ville, et après avoir mis ordre à toutes ses affaires, il se pendit. "
24. I Rois, XII, 12-19 : " Jéroboam vint donc avec tout le peuple trouver Roboam le troisième jour, - de même que Roboam leur avait dit : Revenez me trouver dans trois jours. - Et le roi répondit durement au peuple, et abandonnant le conseil que les vieillards lui avaient donné, - il leur parla selon que les jeunes gens lui avaient conseillé de le faire, et leur dit : Mon père vous a impose un joug pesant, mais moi je le rendrai encore plus pesant ; mon père vous a châtiés avec des verges, mais moi je vous châtierai avec des verges de fer. - Et le roi ne se rendit point à la volonté du peuple, parce que le Seigneur s'était détourné de lui dans sa colère, pour mettre à effet la parole qu'il avait dite à Jéroboam, fils de Nabath, par Ahias Silonite. - Le peuple voyant donc que le roi n'avait point voulu lés écouter, commença à dire : Qu'avons-nous de commun avec David ? Quel héritage avons-nous à partager avec le fils d'Isaï ? Israël, retire-toi dans tes tentes ; et toi, David, pourvois maintenant à ta maison. Et Israël se retira dans ses tentes. - Cependant Roboam
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continua de régner sur tous les enfants d'Israël qui demeuraient dans les villes de Juda. - Le roi Roboam envoya ensuite Aduram, qui avait la surintendance des tribus ; mais tout le peuple le lapida, et il mourut. Le roi Roboam monta aussitôt sur son char, et s'enfuit à Jérusalem. - Et Israël se sépara de la maison de David, et il en est resté séparé jusqu’à ce jour. "
23. I Rois, XXI, 25-26 : " Achab n'eut donc point son semblable en méchanceté, vendu qu'il était pour faire le mal aux yeux du Seigneur : car il y était encore excité par Jézabel sa femme. - Et il devint tellement abominable, qu'il adorait les idoles des Amorrhéens que le Seigneur avait exterminé à l'entrée des enfants d'Israël. "
26. II Chroniques, XXII, 2-5 : " Il (Ochosias) avait [quarante-deux] ans quand il commença à régner et il ne régna qu'un an à Jérusalem. - Sa mère se nommait Athalie, petite-fille d'Amri. - Ce prince suivit aussi les voies de la maison d'Achab : car sa mère le porta à l'impiété. - Il fit donc le mal en présence du Seigneur, comme la maison d'Achab où il choisit ses conseillers après la mort de son père, et ce fut là la cause de sa perte. - Il se conduisit selon leurs conseils, et il alla à Ramoth de Galaad avec Joram fils d'Achab, roi d'Israël, faire la guerre à Hazaël roi de Syrie. "
27. II Chroniques, XXV, 14-18, 19-24 : " Et Amasias, après avoir frappé du glaive les Iduméens et avoir emporté les dieux des enfants de Séïr, en fit ses propres dieux, les adora et leur offrit de l'encens. - Cette action irrita le Seigneur contre Amasias, et il lui envoya un prophète lui dire : Pourquoi avez-vous adoré des dieux qui n'ont pu délivrer leur peuple de vos mains ? - Le prophète ayant ainsi parlé, Amasias répondit : Est- ce à vous à donner conseil au roi ? Taisez-vous, de peur qu'il ne vous en coûte la vie. Alors le prophète se retira en lui disant : Je sais que Dieu a résolu de vous perdre, parce que vous avez commis un si grand crime, et que, de plus, vous n'avez pas voulu vous rendre à mes avis. - Amasias, roi de Juda, prit donc une funeste résolution, et envoya des ambassadeurs à Joas fils de Joachas, fils de Jéhu, roi d'Israël et lui fit dire : Venez, et voyons-nous l'un l'autre. Sur quoi Joas lui fit cette réponse par ses ambassadeurs : Le chardon qui est sur le mont Liban, envoya vers le cèdre du Liban, et lui dit : Donnez votre fille en mariage à mon fils. Et voilà que les animaux de la forêt du Liban passèrent et foulèrent aux pieds le chardon. - Vous avez
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dit : J'ai défait Edom ; et votre cœur s'est enflé d'orgueil de ce succès. - Demeurez en paix chez vous : pourquoi cherchez-vous votre malheur pour périr, vous et tout Juda avec vous ? - Amasias ne voulut point l'écouter, parce que la volonté du Seigneur était de le livrer entre les mains de ses ennemis, à cause des dieux d'Edom. - Joas, roi d'Israël, s'avança donc, et les deux armées se mirent en présence. Amasias, roi de Juda, était campé à Bethsamès, en Juda. - Et Juda plia devant Israël, et s'enfuit dans ses tentes. - Or Joas, roi d'Israël, prit Amasias, roi de Juda, fils de Joas, fils de Joachas, à Bethsamès, et l'emmena à Jérusalem ; et il fit abattre quatre cents coudée des murailles de cette ville, depuis la porte d'Ephraïm jusqu’à la porte de l'Angle. - Il emporta même à Samarie tout l'or et l'argent, et tous les vases qu'il trouva dans la maison de Dieu, chez les descendants d’Obédédom, et dans les trésors du palais royal. - Il emmena aussi à Samarie les fils de ceux qui étaient en otage. "
28. Esdras, IV, 4-5 : " Ainsi tout le peuple du pays arrêtait autant qu'il le pouvait les travaux du peuple de Juda, et l'inquiétait pendant qu'il bâtissait. - Ils gagnèrent aussi par argent des ministres du roi, pour renverser le dessein du peuple de Juda pendant tout le règne de Cyrus, roi des Perses, et jusqu'au règne de Darius, roi des Perses. "
29. Esther, V, 10-14 : " Et dissimulant sa colère, il retourna chez lui et fit assembler ses amis, avec sa femme Zarès. - Et après leur avoir représenté quelle était la grandeur de ses richesses, le grand nombre de ses enfants, et cette haute gloire où le roi l'avait élevé au-dessus de tous les grands de sa cour et de tous ses officiers, - il ajouta : La reine Esther n'en a point aussi invité d'autres que moi pour être du festin qu'elle a fait au roi, et je dois encore demain dîner chez elle avec le roi. - Mais, malgré tout cela, je croirai ne rien avoir, tant que je verrai le juif Mardochée assis devant la porte du palais du roi. - Zarès sa femme et tous ses amis lui répondirent : Commandez qu'on dresse une potence fort élevée qui ait cinquante coudées de haut, et dites au roi qu'il y fasse pendre Mardochée, et vous irez ainsi plein de joie au festin avec le roi. - Ce conseil lui plut, et il commanda qu'on préparât cette haute potence. "
30. Esther, VII, 9-10 : " Alors Harbona, l'un des eunuques qui servaient d'ordinaire le roi, lui dit : Il y a une potence de cinquante coudées de haut dans la maison d'Aman, préparé par
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ses ordres pour Mardochée celui-là même qui a donné un avis très-salutaire au roi. Le roi dit : Qu'Aman y soit attaché. - Aman fut donc pendu à la potence qu'il avait préparée pour Mardochée et la colère du roi s'apaisa. "
31. DANIEL, VI, 5, 12, 16, 23, 24 : " Ils dirent donc entre eux : Nous ne trouverons point d'occasion d'accuser Daniel, si nous ne la faisons naître de la loi de son Dieu. - Alors les princes et les satrapes surprirent le roi en cette manière et lui dirent : O roi ! vivez éternellement. - Tous les princes de votre royaume, les principaux officiers, les sénateurs, les juges, sont d'avis qu'il soit porté par votre autorité souveraine un édit qui ordonne que tout homme qui, d'ici à trente jours, demandera quoi que ce soit, à quelque dieu ou à quelque homme que ce puisse être, sinon à vous seul, ô roi, sera jeté dans la fosse aux lions. - Confirmez donc maintenant, ô roi, cet avis, et faites publier le décret, afin qu'il demeure stable, comme ayant été établi par les Mèdes et par les Perses, sans qu'il soit permis à personne de le violer. - Le roi Darius fit donc publier cet édit et cette défense. - Lorsque Daniel eut appris que cette loi avait été portée, il entra dans sa maison, et ouvrant les fenêtres de sa chambre du côté de Jérusalem, il fléchissait les genoux chaque jour à trois heures différentes, adorait son Dieu et lui rendait ses actions de grâces. - Ces hommes donc, qui épiaient soigneusement sa conduite, le trouvèrent qui priait et adorait son Dieu. - Et ils vinrent aussitôt trouver le roi pour lui représenter son édit et lui dirent : O roi, n'avez-vous pas ordonné, etc. - Alors Daniel fut emmené par le commandement du roi, et ils le jetèrent dans la fosse aux lions. . . . . Alors le roi fut transporté de joie, et il commanda qu'on fit sortir Daniel de la fosse aux lions, et quand il en eut été tiré, on ne trouva sur son corps aucune blessure, parce qu'il s'était confié en son Dieu. - En même temps, le roi commanda qu'on fît venir ceux qui avaient accusé Daniel, et ils furent jetés dans la fosse aux lions avec leurs femmes et leurs enfants, et ils n'étaient pas encore au bas de la fosse, que les lions les saisirent et brisèrent leurs os. "
32. I Machabées I, 12-16 : " En ce temps-là, il sortit d'Israël des enfants d'iniquité qui donnèrent ce conseil à plusieurs : Allons, et faisons alliance avec les nations qui nous environnent, parce que, depuis que nous nous sommes séparés d'elles, une multitude de maux sont tombés sur nous. - Et ce conseil parut bon à leurs yeux. - Quelques-uns d'entre le
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peuple furent donc choisis pour aller trouver le roi, et Antiochus leur accorda l'autorisation de vivre selon les coutumes des gentils. - Et ils bâtirent dans Jérusalem un gymnase à la manière des nations. Ils cachèrent dans leurs personnes les marques de la circoncision ; ils se séparèrent de l'alliance sainte, et ils s'unirent aux nations, et se vendirent pour faire le mal. "
33. II Machabées, I, 11-17 : " Nous que Dieu a délivrés de très-grands périls, nous lui rendons aussi de très-grandes actions de grâces, pour la force qu'il nous a donnée de combattre contre un tel roi. - Car c'est lui qui a fait sortir de Perse cette multitude qui combattit contre nous et contre la ville sainte. - Mais ce chef de nos ennemis, étant lui-même en Perse avec une armée innombrable, a péri dans le temple de Nanée, trompé par le conseil perfide des prêtres de cette idole. - Car Antiochus étant venu avec ses amis au temple de cette déesse pour l'épouser et pour y recevoir de grandes sommes d'argent à titre de dot, - les prêtres de Nanée lui montrèrent tout cet argent, et après qu’Antiochus fut entré dans le temple avec une faible escorte, ils le refermèrent sur lui ; - et ouvrant une porte secrète qui donnait dans le temple, ils l'assommèrent à coups de pierres, lui et ceux qui l'accompagnaient, et mettant leurs corps en pièces, ils leur coupèrent la tête, et les jetèrent dehors. - Que Dieu soit béni en toutes choses, lui qui a livré ainsi les impies. "
34. Ibidem, IV, 52-30 : " Ménélaüs, croyant que cette occasion lui était favorable, déroba du temple quelques vases d'or, et en donna une partie à Andronique, après avoir vendu les autres dans Tyr et dans les villes voisines. - Onias l'ayant su, adressa des reproches à Ménélaüs d'Antioche, où il était dans un lieu sûr près de Daphné. C'est pourquoi Ménélaüs alla trouver Andronique, et le pria de tuer Onias. Andronique étant donc venu au lieu où était Onias, et lui ayant donné la main droite avec serment de ne point lui faire de mal, Onias, quoiqu'il le tint pour suspect, sortit de l'asile où il était et Andronique le tua aussitôt, au mépris de toute justice. Aussi non-seulement les Juifs, mais même les autres nations en furent indignées, et elles ne pouvaient supporter l'iniquité de la mort d'un si grand homme. - C'est pourquoi, le roi étant revenu de Cilicie, les Juifs et les Grecs à la fois allèrent le trouver à Antioche, et lui firent leurs plaintes de ce meurtre si injuste d'Onias. - Antiochus fut contristé de cette mort au fond de son cœur et touché de compassion, il répandit des larmes, en se souvenant de la
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sagesse et de la modération d'Onias. - Et plein de colère contre Andronique, il commanda que, dépouillé de la pourpre, il fût conduit à travers toute la ville, et que cet homme pervers fut tué au même lieu ou il avait commis cette impiété contre Onias, le Seigneur rendant ainsi à ce misérable la punition qu'il avait méritée. - Or, Lysimaque ayant commis plusieurs sacrilèges dans le temple par le conseil de Ménélaüs et le bruit s'en étant répandu lorsqu'il en avait déjà emporté une grande quantité d'or, le peuple s'assembla contre Lysimaque. - Comme ceux de la ville se soulevaient, et se montraient animés d'une grande colère, Lysimaque arma environ trois mille hommes, qu'il mit sous les ordres d'un certain Tyran, homme avancé en âge et consommé en malice, et commença à employer la violence. - Mais quand le peuple vit que Lysimaque recourait à ces moyens, les uns prirent des pierres, les autres de gros bâtons, et quelques-uns jetèrent de la cendre contre lui. - Il y eut beaucoup de ses gens blessés, quelques-uns tués, et tous furent mis en fuite, et le sacrilège lui-même fut tué près du trésor. - On commença aussitôt à accuser Ménélaüs de tous ces désordres. - Et le roi étant venu à Tyr, trois députés envoyés par les anciens de la ville vinrent se plaindre à lui. - Ménélaüs, voyant qu'il succombait sous cette accusation, promit à Ptolémée une grande somme d'argent, s'il voulait parler au roi en sa faveur. - C'est pourquoi Ptolémée alla parler au roi, qu'il trouva retiré dans un vestibule comme pour prendre le frais, et lui fit changer sa résolution. - Et ce prince déclara Ménélaüs innocent, quelque coupable qu'il fût de toutes sortes de crimes, et condamna en même temps à la mort ces pauvres députés qui auraient été jugés innocents par des Scythes mêmes, s'ils avaient plaidé leur cause devant ces barbares. - Ainsi furent punis d'une manière inique ceux qui avaient soutenu les intérêts de la ville et du peuple, et le respect dû aux vases sacrés. - C'est pourquoi les Tyriens mêmes, touchés d'indignation, se montrèrent fort généreux pour leur sépulture. - Cependant Ménélaüs conservait l'autorité, à cause de l'avarice de ceux qui étaient puissants auprès du roi, et il croissait en malice, ne s'occupant qu’à tendre des pièges à ses concitoyens. "
35. Actes, XIV, 18 : " Il survint alors quelques Juifs d'Antioche et d'Icône, qui gagnèrent le peuple, et ayant lapidé Paul, ils l’entraînèrent hors de la ville, persuadés qu'il était mort. "
36. MARC, VI, 23-28 : " Je vous donnerai tout ce que vous
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me demanderez, quand ce serait la moitié de mon royaume. - Elle, étant sortie, dit à sa mère : Que demanderai-je ? Sa mère lui répondit : La tête de Jean-Baptiste. - Et étant rentrée aussitôt en grande hâte là où était le roi, elle lui fit sa demande, en disant : Je demande que vous me donniez à l'instant même dans un bassin, la tête de Jean-Baptiste. - Le roi en fut contristé ; cependant, à cause du serment qu'il avait fait, et de ceux qui étaient à table avec lui, il ne voulut pas la refuser. - Et ayant envoyé un de ses gardes, il commanda qu'on apportât la tête de Jean dans un bassin. Et le garde coupa la tête à Jean dans la prison. - Et il l'apporta dans un bassin, et la donna à la jeune fille, et la fille la remit à sa mère. "
37. MATTHIEU, XIV, 8 : " Or celle-ci, instruite auparavant
par sa mère, lui dit : Donnez-moi, à l'instant même,
dans un bassin, la tête de Jean-Baptiste, etc. "
Question IV
Quand est-ce qu’on participe par injonction aux péchés d’autrui ?
On participe par injonction aux péchés d'autrui, lorsqu'une injustice se commet, ou qu'un mal quelconque se fait en conséquence d'un ordre qu'on a donné de le faire. C'est ainsi que le roi David fut cause de la mort du vertueux Urie, non qu'il ait trempé ses mains ou celles de ses officiers dans son sang, mais parce que les lettres qu'il envoya à son sujet devaient avoir pour effet, comme elles avaient pour but, de le faire périr au milieu du combat. De même Pilate, ce gouverneur de la Judée pour les Romains, se rendit coupable de la mort de Jésus-Christ, parce que, pour complaire aux Juifs, il employa son autorité quoique en quelque sorte malgré lui, à le faire mettre en croix. De même encore Pharaon, et plus tard Hérode, se rendirent coupables de crimes énormes en ordonnant par des lois tyranniques le meurtre des enfants des Hébreux. Or, malheur à ceux qui font des lois injustes.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. II Rois, XXII, 16-19 : " Le roi Saül lui dit : Vous allez mourir, Achimélech, vous et toute la maison de votre père. - Il dit ensuite aux archers qui l'environnaient: Tournez-vous contre les prêtres du Seigneur, et mettez-les à mort ; car ils sont d'intelligence avec David : ils savaient bien qu'ils s'enfuyaient, et ils ne me l'ont pas dit. Mais les officiers du roi ne voulurent point porter leurs mains sur les prêtres du Seigneur. - Alors le roi dit à Doëg : Vous, allez, et jetez-vous sur ces prêtres. Et Doëg l'Iduméen alla, et se jeta sur eux, et mit à mort en ce jour-là quatre-vingt-cinq hommes vêtus de l'éphod de lin. - Il alla ensuite à Nobé qui était la ville des prêtres et fit passer au fil de l'épée les hommes et les femmes, et les enfants, et ceux qui étaient encore à la mamelle, et les bœufs et les ânes et les brebis. "
2. Judith, II, 1-6 : " Dans la treizième année du règne de Nabuchodonosor, le vingt-deuxième jour du premier mois, on tint conseil dans le palais de Nabuchodonosor, roi des Assyriens, sur le dessein qu'il avait de se venger. - Il appela les plus anciens, tous ses généraux et ses officiers de guerre, et leur communiqua le secret de son dessein. - Il leur dit que sa pensée était d'assujettir toute la terre à son empire. - Et comme cette parole plut à tous, le roi Nabuchodonosor fit venir Holopherne, général de ses troupes, - et lui dit : Allez faire la guerre à tous les royaumes d'occident, et surtout à ceux qui ont méprisé mon empire. - Votre œil n'épargnera aucun royaume, et vous me soumettrez toutes les villes fortifiées. "
3. Esther, III, 8-15 : " Alors Aman dit au roi Assuérus : Il est un peuple dispersé dans toutes les provinces de votre royaume, divisé en lui-même, soumis à de nouvelles lois et à des cérémonies nouvelles, et qui méprise les ordonnances du roi ; et vous savez très-bien qu'il est de l'intérêt de votre royaume que la licence ne le rende pas plus insolent. - Ordonnez donc, s'il vous plaît, que ce peuple périsse et je payerai aux trésoriers de votre épargne dix mille talents. - Alors le roi tira de son doigt l'anneau dont il se servait, et le donna à Aman, fils d’Amadath, de la race d'Agag, ennemi des Juifs, - et lui dit : Gardez pour vous l'argent que vous m'offrez, et pour ce qui est de ce peuple, faites-en ce que vous voudrez. - Au premier mois appelé Nisan, le troisième jour du même mois, on fit venir les secrétaires du
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roi, et l'on écrivit des lettres au nom du roi Assuérus, ainsi qu’Aman l'avait ordonné, à tous les satrapes du roi, aux juges des provinces et des diverses nations, en autant de langues différentes qu'il était nécessaire pour qu'elles pussent être lues et entendues de chaque peuple : et les lettres furent scellées de l'anneau du roi, - et envoyées par les courriers du roi dans toutes les provinces, afin qu'on tuât et qu'on exterminât tous les Juifs, depuis l'enfant jusqu'au vieillard, et jusqu'aux femmes et aux plus petits enfants, en un seul jour, c'est-à-dire le treizième jour du douzième mois appelé Adar, et qu'on pillât tous leurs biens. - Et ces lettres enjoignaient aux provinces de se préparer pour ce même jour. - Les courriers envoyés par le roi allaient en grande hâte de tous côtés, pour exécuter ses ordres. Aussitôt cet édit fut affiché dans Suze, dans le même temps que le roi et Amant faisaient festin ; et tous les Juifs qui étaient dans la ville fondaient en larmes. "
4. DANIEL, III, 4-8 : " Et un héraut criait à haute voix : Peuples, tribus, et gens de toute langue, on vous ordonne, - qu'au moment où vous entendrez le son de la trompette, de la flûte de la harpe, du hautbois, de la lyre, et des concerts de toutes sortes de musiciens, vous vous prosterniez en terre, et que vous adoriez la statue d'or qu'a dressée le roi Nabuchodonosor. - Si quelqu'un ne se prosterne, et n'adore pas cette statue, il sera jeté sur l'heure au milieu des flammes de la fournaise ardente. - Aussitôt donc que tous les peuples eurent entendu le son de la trompette, de la flûte de la harpe, du hautbois, de la lyre, et des concerts de toutes sortes de musiciens, tous les hommes, de quelque nation, de quelque tribu, et de quelque langue qu'ils fussent, adorèrent la statue d'or qu'avait dressée Nabuchodonosor. - Aussitôt, et dans le même moment, les Chaldéens s'approchèrent et accusèrent es Juifs. "
5. DANIEL, VI, 11-16 : " Ces hommes donc, qui épiaient avec grand soin toutes les actions de Daniel, le trouvèrent qui priait et adorait son Dieu. - Et ils vinrent aussitôt trouver le roi pour lui représenter son édit, et lui dirent : O Roi ! n'avez-vous pas ordonné que, pendant l'espace de trente jours, tout homme qui ferait quelque prière à quelqu'un des dieux ou des hommes, sinon vous seul, ô Roi ! serait jeté dans la fosse des lions ? Le roi leur répondit : Ce que vous dites est vrai, et c'est une ordonnance des Perses et des Mèdes qu'il n'est permis à personne de violer. - Alors ils dirent au roi : Daniel, un des
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captifs d'entre les enfants de Juda, sans avoir égard à votre loi, ni à l'édit que vous avez porté, prie son Dieu chaque jour à trois heures différentes. - Quand le roi eut entendu cette parole, il fut extrêmement affligé ; il prit en lui-même la résolution de délivrer Daniel, et, jusqu'au coucher du soleil, il fit ce qu'il put pour le sauver. - Mais ces hommes, voyant bien quelle était l'intention du roi, lui dirent : O Roi! sachez que c'est une loi des Mèdes et des Perses, qu'il n'est permis de rien changer à tous les édits que le roi a portés. - Alors Daniel fut emmené par le commandement du roi, et ils le jetèrent dans la fosse aux lions ; et le roi dit à Daniel : Votre Dieu que vous adorez toujours vous délivrera. "
6. I Machabées, I, 43-67 : " Alors le roi Antiochus écrivit des lettres à tout son royaume, afin que tous les peuples n'en fissent plus qu'un, et que chaque peuple abandonnât sa loi particulière. - Toutes les nations obéirent à cette ordonnance du roi Antiochus. - Et plusieurs des Israélites consentirent à cette servitude qu'il leur imposait ; ils sacrifièrent aux idoles, et violèrent le sabbat. - Et le roi envoya des lettres par des exprès à Jérusalem et à toutes les villes de Juda, afin que partout on suivît les lois des nations de la terre, - et pour empêcher que les holocaustes, les sacrifices et les oblations pour l'expiation du péché ne fussent offerts dans le temple de Dieu, - et qu'on n'observât le sabbat et les fêtes solennelles. - Et il commanda qu'on souillât les lieux saints et le peuple saint d'Israël,- qu'on bâtit des autels et des temples, qu'on dressât des idoles, qu'on fit des sacrifices de pourceaux et d'autres bêtes immondes ; - qu'ils laissassent leurs enfants mâles incirconcis, et qu'ils souillassent leurs âmes par toute sorte de viandes impures et d'abominations, en sorte qu'ils oubliassent la loi de Dieu, et qu'ils fissent le contraire de toutes ses ordonnances ; - et que si qui que ce fût n'obéissait à cet ordre du roi Antiochus, il fût aussitôt puni de mort. - Il écrivit en ces mêmes termes dans tout son royaume, et il établit des officiers pour contraindre le peuple d'obéir à cet édit. - Ils commandèrent donc aux villes de Juda de sacrifier. - Et plusieurs du peuple vinrent se joindre à ceux qui avaient abandonné la loi du Seigneur, et ils firent beaucoup de mal dans le pays. Ils contraignirent le peuple d'Israël de s'enfuir dans des lieux écartés et de chercher des retraites où ils pussent se cacher dans leur fuite. - Le quinzième jour du mois de Casleu, en la cent quarante-cinquième année, le roi Antiochus dressa l'abomi-
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nable idole de désolation (la statue de Jupiter Olympien) sur l'autel de Dieu, et on bâtit des autels de tous côtés dans toutes les villes de Juda. - Et ils brûlaient de l'encens, et ils sacrifiaient devant les portes des maisons et au milieu des rues. - Ils déchirèrent les livres de la loi de Dieu, et les jetèrent au feu. - Et si l'on trouvait chez quelqu'un des livres de l'alliance du Seigneur, ou que quelqu'un observât sa loi, il était tué aussitôt, selon l'édit du roi. - C'est ainsi qu'ils traitaient avec violence tout le peuple d'Israël qui s'assemblait chaque mois dans toutes les villes. Et le vingt-cinquième de chaque mois, ils sacrifiaient sur l'autel qui était placé vis-à-vis de l'autel de Dieu. Les femmes qui avaient circoncis leurs enfants étaient mises à mort, selon le commandement du roi Antiochus. - Ils pendaient les enfants au cou de leurs mères dans toutes les maisons où ils pouvaient les trouver, et ils tuaient ceux qui les avaient circoncis. - Alors plusieurs du peuple d'Israël résolurent en eux-mêmes de ne rien manger de ce qui serait impur, et ils aimèrent mieux mourir, que de se souiller par des viandes impures. Ils ne voulurent point violer la loi sainte de Dieu, et ils furent tués. - Et une grande colère tomba alors sur le peuple. "
7. Livre II des Machabées, VI, 1-9 : " Peu de temps après, le roi envoya un certain vieillard d'Antioche pour forcer les Juifs à abandonner les lois de Dieu et de leur pays, pour profaner le temple de Jérusalem en le consacrant à Jupiter Olympien, et pour donner au temple de Garizim le nom de temple de Jupiter Hospitalier, à cause de la qualité d'étranger des habitants de ce lieu. - Ainsi se répandit tout d'un coup sur tout le peuple comme un déluge terrible de maux. - Car le temple était rempli de dissolutions et de festins des gentils, d'hommes impudiques mêlés avec des courtisanes, et de femmes qui entraient insolemment dans ces lieux sacrés, y portant des choses qu'il était défendu d'y porter. - L'autel était plein de viandes impures et interdites par nos lois. - On ne gardait point les jours de sabbat, on n'observait plus les fêtes solennelles du pays, et nul n'osait plus même avouer qu'il était juif. - Ils étaient obligés sous peine de mort, de se rendre aux sacrifices profanes le jour de la naissance du roi ; et lorsqu'on célébrait la fête de Bacchus, on les faisait aller par les rues couronnés de lierre en l'honneur de ce faux dieu. - Les Ptoléméens suggérèrent aussi et furent cause qu'on publiât un édit dans les villes voisines des gentils, pour les obliger d'agir de la même sorte contre les Juifs,
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et de les contraindre à sacrifier, - ou de tuer ceux qui ne voudraient point embrasser les coutumes des gentils : ainsi on ne voyait partout qu'affliction. "
8. MARC, VI, 27 : " Hérode ayant envoyé un de ses gardes, commanda qu'on apportât la tête de Jean-Baptiste dans un bassin. Et le garde coupa la tête à Jean dans la prison. "
9. Actes, XXIII, 2-3 : " En même temps Ananie, grand-prêtre commanda à ceux qui étaient près de lui de frapper Paul au visage. - Alors Paul lui dit, etc. "
10. II Samuel, XI, 14-17 : " Le lendemain matin David envoya à Joab, par Urie même une lettre conçu en ces termes : - Mettez Urie à la tête d'un bataillon, à l'endroit où le combat sera le plus rude, et faites en sorte qu'il soit abandonné et qu'il y périsse. - Joab continuant donc le siège de la ville, mit Urie vis-à-vis du lieu où il savait qu'étaient les plus vaillants hommes. - Les ennemis ayant fait une sortie, chargèrent Joab, et tuèrent quelques-uns des gens de David, entre lesquels Urie Héthéen demeura mort sur la place. "
11. JEAN, XIX, 16 : " Alors il leur livra Jésus pour être crucifié. "
12. LUC, XXIII, 23 : " Ainsi il accorda à leur demande la délivrance de celui qui avait été mis en prison pour crime de sédition et de meurtre, et il abandonna Jésus leur volonté. "
13. Exode, I, 15-17, 22 : " Le roi d'Egypte parla aux sages-femmes des Hébreux, dont l'une se nommait Séphora, et l'autre Phua, - et leur fit ce commandement : Quand vous recevrez les enfants des femmes des Hébreux au moment de l'enfantement, si c'est un enfant mâle, tuez-le ; si c'est une fille, laissez-la vivre. - Mais les sages-femmes furent touchées de la crainte de Dieu, etc. - Alors Pharaon fit ce commandement à tout son peuple : Jetez dans le fleuve tous les enfants mâles qui naîtront et ne préservez que les filles. "
14. MATTHIEU, II, 16 : " Alors Hérode, voyant, qu'il avait été joué par les mages, entra dans une grande colère, et envoya tuer tous les enfants âgés de deux ans et au-dessous, qui étaient dans Bethléem et dans tout le pays d'alentour, selon le temps qui lui avait été indiqué par les mages. "
15. ISAIE, X, 1-4 : " Malheur à ceux qui établissent des lois d'iniquité, et qui font des ordonnances injustes, - pour faire succomber les œuvres dans les jugements, pour opprimer par la violence les plus faibles de mon peuple, pour dévorer la veuve
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comme leur proie, et pour mettre au pillage le bien des orphelins ! - Que ferez-vous au jour où Dieu vous visitera, au jour des calamités venues des régions lointaines ? A qui aurez-vous recours ? A qui recommanderez-vous le soin de votre gloire, - pour n'être point accablés sous le poids des chaînes, pour ne pas tomber parmi un monceau de corps morts ? - Après tous ces maux, la colère du Seigneur n'est point encore apaisée et son bras est toujours levé. "
16. MATTHIEU, XV, 3-6 : " Mais Jésus leur répondit : Pourquoi vous-mêmes violez-vous le commandement de Dieu pour votre tradition ? Car Dieu a dit : - Honorez votre père et votre mère, et : Que celui qui dira des paroles outrageuses à son père ou sa mère soit puni de mort. - Et vous, au contraire, vous dites : Quiconque dira à son père ou à sa mère : " Tout don que je fais à Dieu, vous est utile, " satisfait à la loi, encore qu'après cela il n'honore et n'assiste point son père ou sa mère : et ainsi vous avez rendu vain le commandement de Dieu par votre tradition. "
17. MARC, VII, 9-13 : " Et il leur disait : Ainsi donc
vous rendez vain le commandement de Dieu pour garder votre tradition. -
Car Moïse a dit : Honorez votre père et votre mère,
et : Que celui qui dira des paroles outrageuses à son père
ou à sa mère, soit puni de mort. - Vous, au contraire, vous
dites : Si un homme dit à son père ou à sa mère
: Tout don que je fais à Dieu, vous est utile, il satisfait à
la loi, et vous lui permettrez de ne rien faire de plus pour assister
son père ou sa mère - et ainsi vous rendez inutile le commandement
de Dieu par une tradition que vous-mêmes avez établie. "
Question V
Quand est-ce que nous participons par consentement aux péchés d’autrui ?
Nous participons par consentement aux péchés d'autrui toutes les fois que nous donnons notre suffrage au mal que font les autres, ou que nous l'approuvons au moins par notre silence. C'est le péché que commit Saul, lorsqu'il consentit au supplice du premier martyr saint Etienne. C'est aussi le péché que commirent ces Juifs, au nombre de plus de quarante, qui se lièrent par un vœu et s'armèrent dans le dessein de mettre saint Paul à mort. Enfin, c'est le péché que commirent les habitants de Jéru-
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salem, lorsqu'ils appuyèrent de leurs suffrages
la demande que firent leurs magistrats de la mort de Jésus- Christ,
comme saint Pierre leur en fit le reproche par ces paroles : Vous avez
mis à mort l’auteur de la vie. C'est pourquoi il est bon de
retenir cette maxime de saint Paul, que ce ne sont pas seulement ceux
qui font le mal qui sont dignes de mort, mais que ceux-là en sont
dignes aussi, qui donnent leur consentement à ceux qui le font
: et on peut encore rapporter à ce sujet ce que nous lisons dans
saint Cyprien, " qu'ordonner le crime c'est y participer, et que le lâche
a beau dire qu'il n'a pas prévariqué en personne ; il est
apostat, dès qu'il a autorisé la lecture publique de son
apostasie. "
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Lévitique, XX, 4-5 : " Que si le peuple du pays, faisant paraître de la négligence et comme du mépris pour mon commandement, laisse aller cet homme qui aura donné quelqu'un de ses enfants à Moloch, et ne veut pas le tuer ; - j'arrêterai l'œil de ma colère sur cet homme et sur sa famille, et je le retrancherai du milieu de son peuple, lui et tous ceux qui auront consenti à la fornication par laquelle il se sera prostitué à Moloch. "
2. Nombres, XVI, 20-35 : " Le Seigneur parla à Moïse et à Aaron, et leur dit : - Séparez-vous du milieu de cette assemblée, afin que je les détruise en un moment - Moïse et Aaron se jetèrent la face contre terre, et dirent : O Dieu tout-puissant des esprits, qui animez toute chair, votre colère éclatera-t-elle contre tous pour le péché d'un seul homme ? - Le Seigneur dit à Moïse : - Commandez à tout le peuple qu'il se sépare des tentes de Coré de Dathan et d’Abiron. - Moïse se leva donc, et s'en alla aux tentes de Dathan et d'Abiron, et les anciens d'Israël le suivirent ; - et il dit au peuple : Retirez-vous des tentes de ces
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hommes impies, et ne touchez à rien de ce qui est à eux, de peur que vous ne soyez enveloppés dans le châtiment de leurs péchés. - Lorsque tout le monde se fut retiré de leurs tentes, Dathan et Abiron sortirent, et parurent à l'entrée de leurs pavillons, avec leurs femmes et leurs enfants et toute leur troupe. - Alors Moïse dit : Vous reconnaîtrez à ceci que c'est le Seigneur qui m'a envoyé pour faire tout ce que vous voyez, et que je ne le fais point de mon propre chef. - Si ces gens-ci meurent d'une mort ordinaire aux hommes, et qu'ils soient frappés d'une plaie dont les autres ont coutume d’être aussi frappés ce ne sera point le Seigneur qui m'aura envoyé - mais si le Seigneur fait par un prodige nouveau que la terre ouvrant ses abîmes les engloutisse avec tout ce qui est à eux, et qu'ils descendent tout vivants en enfer, vous saurez alors qu'ils ont blasphémé contre le Seigneur. - Aussitôt qu'il eut cessé de parler, la terre se fendit sous leurs pieds ; - et ouvrant ses abîmes elle les engloutit avec leurs tentes et tout ce qui leur appartenait. - Et ils descendirent tout vivants dans l'enfer, la terre les ayant recouverts aussitôt, et ils disparurent du milieu du peuple. - Tout Israël qui était là autour, s'enfuit au cri des mourants, en disant : Prenons garde que la terre ne nous engloutisse aussi. - En même temps le Seigneur fit sortir un feu qui fit périr les deux cent cinquante hommes occupés à offrir l'encens. "
3. Judith, VIII, 9-14 : " Judith ayant donc appris qu’Osias avait promis de livrer la ville dans cinq jours, fit demander à Chabri et Charmi, anciens du peuple, - qui vinrent la trouver, et elle leur dit : Quel est ce bruit qui court qu'Ozias a consenti à livrer la ville aux Assyriens, si dans cinq jours il ne vous vient aucun secours ? - Et qui êtes-vous, vous autres, pour tenter le Seigneur ? - Ce n'est pas là le moyen d'attirer sa miséricorde mais plutôt d'exciter sa colère et d'allumer sa fureur. - Vous avez fixé un terme à la miséricorde du Seigneur, et vous lui avez marqué un jour selon votre volonté. - Mais comme le Seigneur est patient, faisons pénitence de cette faute même, etc. "
4. Esther, XIV, 3, 15-19 : " Esther fit ensuite cette prière au Seigneur Dieu d'Israël : Mon Seigneur, qui seul êtes notre roi, etc. - Vous savez que je hais la gloire des méchants et que je déteste l'alliance des incirconcis et des étrangers. - Vous n'ignorez pas la nécessité où je me trouve, et combien aux jours où je parais dans la magnificence et dans l'éclat, j'ai en horreur le signe brillant de ma gloire que je porte sur ma tête, mais que
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je déteste comme un linge souillé, et que je me garde bien de porter dans les jours de mon silence. - Vous savez que je ne mange point à la table d'Aman, et que je ne prends aucun plaisir aux festins du roi ; que je ne bois point du vin offert sur l'autel des idoles, - et que, depuis le temps que j'ai été amenée en ce palais jusqu'aujourd'hui, jamais votre servante ne s'est réjouie qu'en vous seul, ô Seigneur Dieu d'Abraham, ô Dieu tout-puissant et au-dessus de tous, etc. "
5. Lue, XI, 47-48 : " Malheur à vous qui bâtissez des tombeaux aux prophètes après que vos pères les ont fait mourir. - Vous témoignez par-là que vous consentez à ce qu'ont fait vos pères, puisque, si ce sont eux qui ont tué les prophètes, c'est vous qui avez creusé leurs tombeaux. "
6. Actes, VII, 59 : " Or, Saul avait consenti à la mort d'Etienne. "
7. Ibid., XXIII, 12-13 : " Le jour étant venu, quelques Juifs s'assemblèrent et firent serment, avec imprécation contre eux-mêmes de ne boire et de manger qu'ils n'eussent tué Paul. - Ils étaient plus de quarante qui étaient entrés dans cette conjuration. "
8. MATTHIEU, XXVII, 20 : " Mais les princes des prêtres et les sénateurs persuadèrent au peuple de demander Barabbas, et de faire périr Jésus. "
9. MARC, XV, 11, 18 : " Mais les prêtres excitèrent le peuple à demander qu'il leur délivre plutôt Barabbas, etc. - Et Pilate, voulant contenter le peuple, leur délivra Barabbas, et ayant fait fouetter Jésus, il le leur livra pour être crucifié. "
10. Actes, III, 13-15 : " Dieu a glorifié son fils Jésus que vous avez livré et renié devant Pilate, qui avait jugé qu'il devait être renvoyé absous. - Mais vous, vous avez renié le Saint et le Juste, vous avez demandé qu'on vous accordât la grâce d'un homicide, - et vous avez fait mourir l'auteur de la vie. "
11. Ibid., II, 22-23 : " O Israélites, écoutez les paroles que je vais vous dire : Vous savez que Jésus de Nazareth a été un homme que Dieu a rendu célèbre parmi vous par les prodiges, les merveilles et les miracles qu'il a faits par lui au milieu de vous. - Ce Jésus vous ayant été livré dans la profondeur des desseins de Dieu, et dans l'ordre de sa prescience, vous l’avez fait mourir, et vous l'avez crucifié par les mains des méchants. "
12. Romains, I, 28-32 : " Comme ils n'ont pas fait usage de la connaissance qu'ils avaient de Dieu, Dieu aussi les a livrés à
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un sens dépravé, en sorte qu'ils ont fait
des actions indignes. - Remplis de toute sorte d'injustice, de méchanceté,
de fornication, d'avarice, de malignité, ils ont été
envieux, meurtriers, querelleurs, trompeurs ; ils ont été
pleins de malignité, semeurs de faux rapports, - calomniateurs,
ennemis de Dieu, outrageux, superbes, altiers, inventeurs de crimes, désobéissants
à leurs parents, - sans prudence, sans modestie, sans affection,
sans foi, sans miséricorde - et quoiqu'ils connussent bien la justice
de Dieu, ils n'ont pas compris que ceux qui font ces choses sont dignes
de mort, et non-seulement ceux qui les font, mais aussi ceux qui approuvent
ceux qui les font. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. IRENEE, Lib. IV adversùs hæreses, c. 46 (al. 27) : " De même que sous l'ancienne loi ceux qui se livraient à l'iniquité et au meurtre de leurs frères étaient châtiés et retranchés de la société du peuple, ainsi maintenant l'œil, le pied ou la main, quand ils sont un objet de scandale, doivent être retranchés, de peur qu'ils n'entraînent la perte du reste du corps. D'ailleurs l’Apôtre nous l'enseigne, quand il nous dit : Mais quand je vous ai écrit que vous n'ayez point de commerce avec eux, j'ai entendu que s'il y a parmi vos frères quelqu'un qui soit impudique, ou avare, ou idolâtre, ou médisant, ou ivrogne, ou ravisseur du bien d’autrui, vous ne mangiez pas même avec celui-là (I Cor., V, 11). Et il dit encore dans un autre endroit : Que personne ne vous séduise par de vains discours ; car c'est là ce qui attire la colère de Dieu sur les incrédules. N'ayez donc rien de commun avec eux (Ephés., V, 6). L'état de damnation où sont ceux qui pèchent se communique à ceux qui les fréquentent, parce que cet état même finit par leur plaire ; c'est pour cela que saint Paul disait aux Corinthiens : Ne savez-vous pas qu'un peu de levain suffit pour aigrir toute une masse de pâte (I Cor., V, 6) (Cf. Les Pères de l’Eglise, trad. Genoude, t. III, p. 423) ? "
2. Le clergé de Rome écrivant à saint Cyprien, inter Epistolas S. Cypriani 31 (al. 30) : " Nous nous sommes déclarés dans nos lettres précédentes, non-seulement contre ceux qui ont apostasié publiquement par des billets criminels. . . . . , mais aussi contre les autres qui, pour n'avoir pas comparu quand le parjure se consommait, n'en sont pas moins coupables de ce parjure même puisque la demande faite par eux d'inscrire leur apostasie équi-
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valait à leur présence. Ordonner le crime,
c'est y participer. Le lâche a beau nous dire qu'il n'a pas prévariqué
en personne ; il est apostat, dès qu'il a autorisé la lecture
publique de son apostasie. "
Question VI
Quand est-ce qu’on participe par provocation au péché d’autrui ?
C'est ce qui a lieu toutes les fois que, soit par paroles,
soit par actions ou de toute autre manière nous poussons sciemment
quelqu'un à se mettre en colère, à se venger, à
proférer des blasphèmes, à user de violence, ou à
quelque autre chose semblable. Comme quand la femme de Job, en insultant
à la patience de son mari, le portait autant qu'il était
en elle à blasphémer contre Dieu. De même la femme
de Tobie, non moins agaçante que celle de Job, par les reproches
irritants dont elle ne se lassait pas de harceler son époux, forçait
en quelque sorte celui-ci de déplorer devant Dieu les maux de sa
maison en mêlant ses prières de soupirs et de larmes. L'Ecclésiastique
nous donne au contraire cet avertissement : Evitez les disputes, et
vous diminuerez les péchés. Car l'homme colère allume
les querelles ; le pécheur jettera le trouble parmi les amis, et
il sèmera l'iniquité au milieu de ceux qui vivaient en paix.
Salomon a dit de même : Le méchant cherche toujours des querelles
; le ministre de la vengeance sera envoyé contre lui.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. I Samuel, I, 6-7 : " Phenenna jalouse affligeait Anne et la tourmentait, jusqu’à lui faire reproche avec insulte de ce que le Seigneur l'avait rendue stérile. - Elle en usait de même tous les ans, lorsque le temps était venu de monter au temple du Seigneur. "
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2. Psaume CV, 15-16 : " Le Seigneur leur accorda leur demande, et les rassasia jusqu’à l'excès. - Leur envie éclata contre Moïse dans le camp, et contre Aaron, pontife du Seigneur. "
3. II Machabées, XIV, 23-27 : " Nicanor demeura ensuite à Jérusalem où il ne fit rien contre l’équité et il congédia les grandes troupes qu'il avait levées. - Il aimait toujours Judas d'un amour sincère et il sentait une inclination particulière pour sa personne. Il le pria même de se marier, et de songer à avoir des enfants. Ainsi Judas se maria, et continua de vivre en paix et en amitié avec lui. - Mais Alcime voyant la bonne intelligence qui était entre eux, vint trouver Démétrius et lui dit que Nicanor favorisait les intérêts de ses ennemis, et qu'il lui avait destiné pour successeur Judas, qui trahissait le roi et son royaume. - C'est pourquoi le roi, irrité par le rapport criminel de ce méchant homme, écrivit à Nicanor qu'il trouvait fort mauvais qu'il eût fait ainsi amitié avec Machabée et qu'il voulait qu'aussitôt Machabée fût amené prisonnier à Antioche. "
4. Galates, V, 26 : " Ne nous laissons point aller à la vaine gloire, nous piquant les uns les autres, et nous portant envie les uns aux autres. "
5. Ephésiens, VI, 4 : " Et vous, pères, n'irritez point vos enfants, mais ayez soin de les bien élever en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur. "
6. Colossiens, III, 21 : " Pères, n'irritez point vos enfants, de peur qu'ils ne tombent dans l'abattement. "
7. JOB, II, 9 : " Alors sa femme lui dit : Quoi ! vous demeurez encore dans votre simplicité ? Maudissez Dieu et mourez. "
8. Tobie, II, 15-23 : " Comme des rois insultaient au bienheureux Job, ainsi ses parents et ses alliés se raillaient de son genre de vie, en lui disant : - Où est votre espérance pour laquelle vous faisiez tant d'aumônes et ensevelissiez les morts ? - Mais Tobie les reprenant, leur disait : Ne parlez pas ainsi : - Car nous sommes enfants des saints, et nous attendons cette vie que Dieu doit donner à ceux qui ne violent point la fidélité qu'ils lui ont promise. - Pour ce qui est d'Anne, sa femme, elle faisait tous les jours de la toile, et elle apportait du travail de ses mains ce qu'elle pouvait gagner pour vivre. - Il arriva donc qu'ayant reçu un jour un chevreau, elle l'apporta à la maison. - Son mari ayant entendu ce chevreau crier, dit à sa femme : Prenez garde que ce chevreau n'ait été dérobé ; rendez-le à ceux à qui il est : car il ne nous est pas permis de rien manger ou
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toucher de ce qui est dérobé. - Alors sa femme lui répondit en colère : Il est aisé de voir combien toutes vos espérances étaient vaines, et à quoi ont abouti toutes vos aumônes. C'est par ces discours et d'autres semblables que sa femme l'insultait journellement. "
9. Tobie, III, 1-2, 7-11 : " Alors Tobie jetant un profond soupir, commença à prier avec larmes, en disant : - Seigneur, vous êtes juste ; tous vos jugements sont pleins d'équité et toutes vos voies ne sont que miséricorde, vérité et justice, etc. - En ce même jour, il arriva que Sara, fille de Raguel, à Rages, ville des Mèdes fut ému d'un reproche que lui fit une des servantes de son père. - Elle avait épousé sept hommes l'un après l'autre, et un démon nommé Asmodée les avait tués aussitôt qu'ils s'étaient approchés d'elle. - Comme elle reprenait cette servante pour une faute qu'elle avait commise, celle-ci lui répondit : Que jamais nous ne voyions de toi ni fils, ni fille sur la terre, meurtrière de tes maris ! - Ne veux-tu pas me tuer aussi, comme tu as déjà tué sept maris ? A cette parole, Sara monta dans une chambre haute de la maison, et y demeura trois jours et trois nuits sans boire ni manger ; - et persévérant dans la prière, elle demandait à Dieu avec larmes qu'il la délivrât de cet opprobre. "
10. Ecclésiastique, XXVIII, 10,12-19 : " Evitez les disputes, et vous diminuerez les péchés, etc. - Le feu s'embrase dans la forêt selon le bois qui s'y trouve, et la colère de l'homme s'allume à l'égard de son pouvoir, et il la porte plus haut à proportion qu'il a plus de richesses. - La promptitude à disputer allume le feu ; la querelle précipitée répand le sang, et la langue qui rend un faux témoignage cause la mort. - Si vous soufflez sur l'étincelle, il en sortira un feu ardent ; si vous crachez dessus, elle s'éteindra et c'est la bouche qui fait l'un et l'autre. - Celui qui médit en secret et l'homme à deux langues sera maudit, parce qu'il jettera le trouble parmi plusieurs qui vivaient en paix. - La langue d'un tiers en a renversé plusieurs, et elle les a dispersés de peuple en peuple. - Elle a détruit les villes fortes et opulentes, et elle a fait tomber les maisons des grands. - Elle a taillé en pièce les armées des nations, et elle a défait les peuples les plus vaillants. - La langue d'un tiers a fait expulser les femmes fortes, etc. "
11. Proverbes, XV, 18 : " L'homme colère éveille les querelles ; celui qui est patient apaise celles qui étaient déjà allumées. "
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12. Ibid., XVIII, 6 : " Les lèvres de l'insensé s'embarrassent dans des disputes, et sa bouche s'attire des querelles. "
13. Ibid., XXII, 10 : " Chassez le railleur, et les disputes s'en iront avec lui ; alors les plaintes et les outrages cesseront. "
14. Ibid., XXVI, 17-22 : " Celui qui, en passant par un endroit, se mêle dans une querelle qui ne le regarde point, est comme celui qui saisit les oreilles à un chien furieux. - Comme celui qui lance des flèches et des dards pour en tuer un autre est coupable de sa mort, - ainsi l'est celui qui use d'artifices pour nuire à son ami, et qui dit, lorsqu'il est surpris : Je ne l'ai fait qu'en jouant. - Quand le bois est consumé le feu s'éteint ; et les querelles s'apaisent, quand il n'y a plus de semeurs de rapports. - Le feu rallume le charbon, la flamme le bois ; l'homme querelleur allume de même les disputes. - Les paroles du semeur de rapports paraissent simples et innocentes ; mais elles pénètrent jusqu'au fond des entrailles. "
15. Ibid., XXIX, 22 : " L'homme colère provoque les querelles, et celui qui se fâche aisément sera plus enclin à pécher. "
16. Proverbes, XXX, 33 : " Celui qui presse trop la mamelle, en fait sortir un lait épais ; celui qui se mouche trop fort tire le sang ; et celui qui excite la colère amène les querelles. "
17. Proverbes, XVII, 11 : " Le méchant cherche toujours querelle, etc. "
18. Ibid., III, 30-35 : " Ne faites point de procès à un homme sans sujet, et lorsqu'il ne vous fait aucun tort. - Ne portez point envie à l'homme injuste, et ne marchez point dans ses voies : - Car le Seigneur déteste les pervers, et il communique ses secrets aux simples. - Le Seigneur frappera d'indigence la maison de l'impie ; au lieu qu'il bénira les maisons des justes. - Il se moquera des moqueurs, et il répandra ses faveurs sur ceux qui sont doux. - Les sages posséderont la gloire ; l'élévation des insensés sera leur confusion. "
19. ISAIE, XXIII, 1 : " Malheur à vous qui pillez ; ne serez-vous pas aussi pillé ? Malheur à vous qui méprisez ; ne serez-vous pas aussi méprisé ? Lorsque vous aurez achevé de dépouiller, vous serez dépouillé ; lorsque vous serez las de mépriser, vous tomberez dans le mépris. "
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Question VII
Quand est-ce qu’on participe par flatterie au péché d’autrui ?
C'est ce qui a lieu, toutes les fois que nous louons quelqu'un
du mal qu'il a fait, ou du mauvais caractère qu'il a déployé
et que, le voyant engagé dans une voie criminelle, nous l’encourageons
par nos éloges à y avancer de plus en plus. Mais malheur,
comme dit le Prophète, à ceux qui préparent des coussinets
pour les mettre sous tous les coudes, et qui font des oreillers pour y
appuyer la tête des personnes de tout âge, afin de surprendre
ainsi les âmes. C'est dans ce défaut que tombent certains
prédicateurs et ces magistrats qui flattent inconsidérément
les passions populaires, et fomentent par une lâche complaisance
les désordres publics. Que de sagesse dans ces paroles d'Isaïe
: O mon peuple, ceux qui vous disent heureux vous séduisent et
ils pervertissent la voie où vous devez marcher ! C'est pourquoi
saint Paul exhorte les fidèles à se mettre en garde contre
ces faux docteurs qui, par des paroles flatteuses, séduisent les
âmes simples. Car le pécheur est loué dans les désirs
de son âme et le méchant est béni ; mais en cela
même le pécheur irritera le Seigneur, comme l'atteste
le Prophète royal.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Proverbes, XXIV, 24-28 : " Ceux qui disent au méchant : Vous êtes juste, seront maudits des peuples et détestés des nations. - Ceux qui le reprennent en seront loués ; et la bénédiction descendra sur eux. - Répondre avec droiture, c'est donner un baiser à la bouche. - Préparez votre ouvrage au dehors, et remuez votre champ avec grand soin, pour bâtir ensuite votre
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maison. - Ne soyez point un faux témoin contre votre prochain, et que vos âmes ne séduisent personne. "
2. Ibid., XXVII, 2, 5, 6 : " Qu'un autre vous loue, et non votre bouche ; que ce soit un étranger, et non vos propres lèvres. - Une réprimande ouverte vaut mieux qu'une amitié qui se cache. - Les blessures que fait un ami sont la preuve de son amitié ; Dieu nous garde des baisers d'un ennemi ! "
3. Ibid., XXVIII, 23 : " Celui qui reprend un homme trouvera grâce ensuite auprès de lui, plutôt que celui qui le trompe par des paroles flatteuses. "
4. Psaume CXL, 5 : " Que le juste me frappe, et qu'il me châtie ; mais que les parfums du péché ne coulent jamais sur ma tête. "
3. ISAIE, V, 20 : " Malheur A vous qui appelez mal ce qui est bien, et bien ce qui est mal ; qui donnez aux ténèbres le nom de lumière et à la lumière le nom de ténèbres ; qui faites passer pour doux ce qui est amer, et pour amer ce qui est doux. "
6. EZECHIEL, XIII, 1-23 : " Le Seigneur me parla encore en ces termes et me dit : - Fils de l'homme, adresse tes prophéties aux prophètes d'Israël qui se mêlent de prophétiser et tu diras à ces hommes qui prophétisent, de leur chef : Ecoutez la parole du Seigneur. - Voici ce que dit le Seigneur Dieu : Malheur aux prophètes insensés qui suivent leur propre esprit, et ne voient rien. - Vos prophètes, ô Israël, ont été parmi vous comme des renards dans des lieux ruinés. - Vous n'êtes point allés à la rencontre de l'ennemi, et vous ne vous êtes point opposés comme un mur pour la maison d'Israël, pour tenir ferme dans le combat, au jour du Seigneur. - Ils n'ont que des visions vaines, et ils ne prophétisent que le mensonge, en disant : Le Seigneur a dit ceci, quoique le Seigneur ne les ait point envoyés ; et ils persistent à assurer ce qu'ils ont dit une fois. - Les visions que vous avez eues ne sont-elles pas vaines, et les prophéties que vous publiez ne sont-elles pas pleines de mensonges ? Et après cela vous dites : C'est le Seigneur qui a parlé, quoique ce ne soit point moi qui aie parlé. - C'est pourquoi voici ce que dit le Seigneur Dieu : Parce que vous avez publié des choses vaines, et que vous avez eu des visions de mensonge, je viens à vous, dit le Seigneur Dieu. - Ma main s'appesantira sur les prophètes qui ont des visions vaines, qui prophétisent le mensonge. Ils ne se trouveront point dans l'assemblée de mon peuple ; ils ne seront point écrits dans le livre de la maison d'Israël ; ils n'en-
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treront point dans la terre d'Israël : et vous saurez que c'est moi qui suis le Seigneur Dieu. - Parce qu'ils ont séduit mon peuple, en lui annonçant la paix, et il n'y avait point de paix ; et comme mon peuple bâtissait une muraille, ils l'ont enduite de boue sans y mêler de paille. - Dis à ceux qui enduisent une muraille sans y rien mêler, qu'elle tombera : car voici que j'enverrai une forte pluie, de grosses pierres tomberont du ciel, et un vent de tempête la jettera par terre. - Et en voyant la muraille tombée, ne vous dira-t-on pas : Où est l'enduit dont vous l'avez enduite ? - C'est pourquoi, voici ce que dit le Seigneur Dieu : Je ferai souffler dans mon indignation un vent de tempête ; une pluie inondante se débordera dans ma fureur, et des pierres énormes tomberont dans ma colère pour renverser tout ce qui se rencontrera. - Et je détruirai la muraille que vous avez enduite de boue sans mélange de paille ; je la réduirai au niveau du sol, et ses fondements seront mis à nu ; elle s'écroulera, et vous serez enveloppés dans sa ruine ; et vous saurez que c'est moi qui suis le Seigneur. - Mon indignation s'assouvira sur cette muraille, et sur ceux qui l'enduisent sans y mêler ce qui l'aurait affermie. Je vous dirai alors : La muraille n'est plus, et ceux qui l'avaient enduite ne sont plus ; - Ils ne sont plus, ces prophète d'Israël qui se mêlaient de prophétiser à Jérusalem et qui avaient pour elle des visions de paix ; et il n'y avait point de paix, dit le Seigneur Dieu. - Et toi, fils de l'homme, tourne-toi contre les filles de mon peuple, qui se mêlent de prophétiser de leur propre chef, et prophétise contre elles, - et dis : Voici ce que dit le Seigneur Dieu : Malheur à celles qui préparent des coussinets pour les mettre sous tous les coudes, et qui font des oreillers pour en appuyer la tête des personnes de tout âge, afin de surprendre les âmes ; et lorsqu'elles ont surpris les âmes de mon peuple, elles assurent de ces âmes qu'elles sont pleines de vie. - Elles m'ont déshonoré dans l'esprit de mon peuple pour un peu d'orge et pour un morceau de pain, en annonçant la mort aux âmes qui ne devaient point mourir, et la vie à celles qui ne devaient point vivre, et abusant par leurs mensonges de la crédulité de mon peuple. - C'est pourquoi voici ce que dit le Seigneur Dieu : Je détruirai ces coussinets au moyen desquels vous surprenez les âmes, comme des oiseaux qu'on prend dans leur vol ; je les enlèverai de dessous vos bras, et je délivrerai les âmes que vous avez prises, ces âmes faites pour être libres. - Et je renverserai à terre vos oreillers, et je
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délivrerai mon peuple d'entre vos mains, et ils ne seront plus à l'avenir en vos mains comme une proie, et vous saurez que c'est moi qui suis le Seigneur. - Parce que vous avez attristé par vos mensonges le cœur du juste, que je n'avais point attristé moi-même et que vous avez fortifié le bras de l'impie pour l'empêcher de revenir de sa voie inique et de trouver la vie ; - c'est pourquoi vous ne raconterez plus vos visions vaines, et vous ne débiterez plus vos oracles trompeurs, parce que je délivrerai mon peuple d'entre vos mains, et vous saurez que c'est moi qui suis le Seigneur. "
7. JEREMIE, XIV, 13-17 : " Les prophètes leur disent : Vous ne verrez point le glaive ; la guerre et la famine ne seront point parmi vous ; mais le Seigneur vous donnera en ce lieu une véritable paix. - Le Seigneur m'a répondu : Ces prophètes prophétisent faussement en mon nom ; je ne les ai point envoyés ; je ne leur ai rien ordonné de ce qu'ils disent, et je ne leur ai point parlé. Les prophéties qu'ils vous débitent ne sont que des visions de mensonges, des divinations pleines d'impostures, de vaines illusions de leur propre esprit. - C'est pourquoi voici ce que dit le Seigneur : Quant à ces prophètes qui prophétisent en mon nom, quoique je ne les aie point envoyés, et qui disent : Le glaive et la famine ne visiteront point cette terre ; par le glaive et par la famine ces prophètes eux-mêmes seront consumés. - Et les cadavres de ceux à qui ils prophétisent, consumés par la famine et par le glaive, seront jetés sur les places de Jérusalem sans qu'il y ait personne pour les ensevelir ; ils y seront jetés, eux et leurs femmes, leurs fils et leurs filles, et je ferai déborder sur eux les maux dont ils sont les auteurs. "
8. JEREMIE, XXIII, 13, 40 : " Je n'ai vu que folie parmi les prophètes de Samarie : ils prophétisaient au nom de Baal, et séduisaient mon peuple d'Israël - J'ai vu les prophètes de Jérusalem semblables à des adultères. Je les ai vus marcher dans la voie du mensonge ; ils ont affermi le bras des méchants pour que personne ne se convertisse du dérèglement de sa vie ; ils sont tous devenus pour moi comme Sodome, et le peuple de cette ville comme Gomorrhe. - C'est pourquoi, voici ce que dit aux prophètes le Seigneur des armées : Je les nourrirai d'absinthe, et je les abreuverai de fiel, parce que c'est des prophètes de Jérusalem que la corruption s'est répandue sur la terre. - Voici ce que dit le Seigneur des armées : N’écoutez pas les paroles de ces prophètes qui vous prophétisent et qui vous trompent ; ils
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publient les visions de leur cœur et non ce qu'ils ont appris de la bouche de Jéhovah. - Ils disent à ceux qui me blasphèment : Le Seigneur l'a dit, vous aurez la paix ; et à tous ceux qui suivent la corruption de leur cœur : Il ne vous arrivera point de mal. - Mais qui d'entre eux a assisté au conseil de Dieu, et l'a vu, et a entendu ce qu'il a dit ? - Voici que le tourbillon de la colère du Seigneur va éclater, et la tempête, après avoir rompu la nue, va se décharger avec fracas sur la tête des méchants. - La fureur du Seigneur ne retournera point en arrière jusqu’à ce qu'elle ait réalisé et accompli les pensées de son cœur. Vous comprendrez plus tard quels auront été ses desseins sur vous. - Je n'envoyais point ces prophètes et ils couraient ; je ne leur parlais point, et ils prophétisaient. - S'ils eussent assisté à mon conseil, ils auraient fait entendre mes paroles à mon peuple, et ils l'auraient retiré de sa voie perverse et du dérèglement de ses pensées. - Ne suis-je Dieu que de près ? dit le Seigneur ; ne le suis-je pas aussi de loin ? N'est- ce pas moi qui remplis le ciel et la terre ? dit le Seigneur. - J’ai entendu ce qu'ont dit ces prophètes qui prophétisent le mensonge en mon nom, en disant : J'ai eu un songe, j'ai eu un songe. - Jusqu’à quand cette imagination sera-t-elle dans le cœur des prophètes qui prophétisent le mensonge, et donnent pour des vérités les séductions de leur cœur - qui veulent faire oublier mon nom à mon peuple par les songes qu'ils débitent à qui les consulte, comme leurs pères ont oublié mon nom pour celui de Baal. - Que le prophète qui a eu un songe raconte le songe qu'il a eu, et que celui qui a entendu ma parole annonce ma parole dans la vérité ; car, qu'y a-t-il de commun entre la paille et le blé ? dit le Seigneur. - Mes paroles ne sont-elles pas comme le feu, dit le Seigneur, et comme le marteau qui brise la pierre ? C'est pourquoi me voici, dit le Seigneur, tout prêt à éclater contre ces prophète qui dérobent mes paroles chacun à leurs frères ; - contre ces prophètes, dit le Seigneur, qui aiguisent leurs langues et qui disent : Voici ce que dit le Seigneur ; contre ces prophètes, dit le Seigneur, qui ont des visions de mensonge et les racontent à mon peuple, et le séduisent par leurs mensonges et leurs prestiges, quoique je ne les aie point envoyés et que je ne les aie chargés de rien. Aussi ces faux prophètes n'ont nullement servi à ce peuple, dit le Seigneur. - Si donc ce peuple, ou un prophète ou un prêtre t'interroge et te dit : Quel est le fardeau du Seigneur ? tu lui diras : C'est vous-même qui êtes ce fardeau ; aussi vous re-
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jetterai-je, dit le Seigneur. - Chacun de vous dira désormais à son prochain et à son frère : Qu'a répondu le Seigneur ? Qu'est- ce que le Seigneur a dit ? - Et on ne parlera plus de fardeau du Seigneur ; car la parole de chacun sera son propre fardeau, parce que vous avez perverti les paroles du Dieu vivant, du Seigneur des armées, notre Dieu. - Tu diras aux prophètes : Que vous a répondu le Seigneur ? Qu'est-ce que le Seigneur a dit ? - Que si vous dites encore : La parole du Seigneur est pesante, je vous déclare, dit le Seigneur, que, parce que vous avez dit : La parole du Seigneur est pesante, quoique je vous eusse envoyé dire : Ne dites point que la parole du Seigneur soit pesante ; - je vous prendrai moi-même, et je vous emporterai comme un fardeau, et je vous abandonnerai, et je vous rejetterai loin de ma face, vous et la ville que j'ai donnée à vos pères et à vous. - Je vous couvrirai d'un opprobre éternel, et s'une ignominie dont la mémoire ne s'effacera jamais. "
9. JEREMIE, XXVII, 9-10, 14-15 : " Vous donc, n'écoutez pas vos prophètes ni vos devins, ni vos inventeurs de songes, ni vos augures, ni vos magiciens, qui vous disent : Vous ne serez point assujettis au roi de Babylone. - Car ils vous prophétisent le mensonge, pour vous envoyer bien loin de votre terre, pour vous perdre et vous faire périr. - N'écoutez point les paroles des prophètes qui vous disent : Vous ne serez point assujettis au roi de Babylone ; car ce qu'ils vous disent n'est que mensonge. - Je ne les ai point envoyés, dit le Seigneur, et ils prophétisent faussement en mon nom, pour vous chasser de votre terre et vous faire périr, vous et vos prophètes qui vous annoncent l'avenir. "
10. Id., XXVIII, 15-17 : " Et le prophète Jérémie dit au prophète Hananias : Ecoute, Hananias, le Seigneur ne t'a point envoyé et tu as fait que ce peuple a mis sa confiance dans le mensonge. C'est pourquoi, voici ce que dit le Seigneur : Je t'exterminerai de dessus la terre, et tu mourras cette année même pour avoir parlé contre le Seigneur. - Et le prophète Hananias mourut cette année-là même, au septième mois. "
11. JEREMIE, XXIX, 8-10 : " Voici ce que dit le Seigneur des armées, le Dieu d'Israël : Ne vous laissez point séduire par vos prophètes, ni par vos devins qui sont au milieu de vous, et ne faites point attention aux songes que vous avez songés ; - parce qu'ils vous prophétisent faussement en mon nom ; ce n'est point moi qui les ai envoyé, dit le Seigneur. - Car voici ce que dit
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le Seigneur : Lorsque les soixante-dix ans, que vous devez passer à Babylone seront accomplis, etc. "
12. Lamentations de Jérémie, II, 14, 18 : " Vos prophètes ont eu pour vous des visions fausses et extravagantes, et ils ne vous découvraient point votre iniquité pour vous exciter à la pénitence ; mais ils ont eu pour vous des rêveries pleines de mensonges, ils ont rêvé la fuite de vos ennemis. - Tous ceux qui passaient par le chemin ont frappé des mains en vous voyant. Ils ont sifflé, et secoué leurs têtes sur la fille de Jérusalem. "
13. MICHEE, III, 5-7, 11-12 : " Voici ce que dit le Seigneur contre les prophètes qui séduisent mon peuple, qui le déchirent à belles dents, et qui ne laissent pas de prêcher la paix ; et si quelqu'un ne satisfait pas à leur avidité, ils mettent leur piété à lui déclarer la guerre. - C'est pourquoi vous n'aurez pour vision que la nuit, et pour révélation que des ténèbres, le soleil sera sans lumière pour ces prophètes et le jour deviendra pour eux d'une profonde obscurité. - Ceux qui ont des visions seront confondus. - Leurs princes rendent des arrêts pour des présents ; les prêtres enseignent pour un vil salaire ; leurs prophètes prophétisent pour de l'argent ; et après cela ils se reposent sur le Seigneur, en disant : Le Seigneur n'est-il pas au milieu de nous ? Nous serons à couvert de tous maux. - C'est pour cela même que vous serez cause que Sion sera labourée comme un champ, que Jérusalem sera réduite en un monceau de pierres, et que la montagne où le temple est bâti deviendra une forêt. "
44. I Rois, XXII, 4-30, 34-38 : " Et le roi d'Israël dit à Josaphat : Viendrez-vous avec moi à la guerre que je vais porter a Ramoth en Galaad ? - Josaphat répondit au roi d'Israël : Vous et moi ne sommes qu'un ; mon peuple et votre peuple ne sont qu'un même peuple ; ma cavalerie et la vôtre sont une même cavalerie. Et il ajouta, en parlant au roi d'Israël : Consultez aujourd'hui, je vous prie, quelle est la volonté du Seigneur. - Le roi d'Israël assembla donc ses prophètes au nombre d'environ quatre cents, et leur dit : Dois- je aller combattre à Ramoth en Galaad, ou me tenir en paix ? Ils lui répondirent : Allez, et le Seigneur livrera la ville entre les mains du roi. Mais Josaphat dit : N'y a-t-il point ici quelque prophète du Seigneur, afin que par lui nous consultions le Seigneur ? - Le roi d'Israël répondit à Josaphat : Il y a encore un homme par qui nous pouvons consulter le Seigneur ; mais je hais cet homme-là, parce qu'il ne me
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prophétise jamais rien de bon, et qu'il ne me prédit que du mal : c'est Michée fils de Jemla. Josaphat lui répondit : O roi ! ne parlez pas ainsi. - Le roi d'Israël appela donc un eunuque et lui dit : Faites venir tout de suite Michée, fils de Jemla. - Le roi d’Israël et Josaphat, roi des Juifs, étaient dans la cour, près de la porte de Samarie, assis chacun sur leurs trônes avec des habits d’une magnificence royale, et tous les prophètes prophétisaient devant eux. - Sédécias, fils de Chanaana, s'était fait faire des cornes de fer, et il dit : Voici ce que dit le Seigneur : Avec ces cornes vous frapperez la Syrie, jusqu’à ce que vous l'ayez toute détruite - Tous les prophètes prophétisaient de même et disaient : Allez contre Ramoth en Galaad, et marchez avec confiance, et le Seigneur la livrera entre les mains du roi. - Celui qu'on avait envoyé pour faire venir Michée lui dit : Voilà tous les prophètes qui, dans leurs réponses, prédisent un bon succès au roi ; que vos paroles soient donc semblables aux leurs, et dites-lui des choses heureuses. - Michée lui répondit : Vive le Seigneur, je ne dirai que ce que le Seigneur m'aura dit. - Michée se présenta donc devant le roi, et le roi lui dit : Michée, devons-nous porter la guerre à Ramoth en Galaad, ou demeurer en paix ? Michée lui répondit : Allez, marchez avec confiance, et le Seigneur livrera cette ville entre les mains du roi. - Le roi ajouta : Je vous conjure au nom du Seigneur de ne me parler que selon la vérité. -Michée lui dit : J'ai vu tout Israël dispersé dans les montagnes, comme des brebis qui n'ont point de pasteur. Et le Seigneur a dit : Ils n'ont point de chef ; que chacun retourne en paix dans sa maison. - Aussitôt le roi d’Israël dit à Josaphat : Ne vous avais- je pas bien dit que cet homme ne me prophétise jamais rien de bon, mais qu'il me prédit toujours du mal ? - Et Michée ajouta : Ecoutez la parole du Seigneur. J'ai vu le Seigneur assis sur son trône, et toute l'armée du ciel autour de lui, à droite et à gauche. - Et le Seigneur a dit : Qui séduira Achab, roi d'Israël, afin qu'il marche contre Ramoth en Galaad, et qu'il y périsse ? Et l'un dit une chose, et l'autre une autre. - Mais l'esprit s'avança, et se présenta devant le Seigneur, et dit : C'est moi qui séduirai Achab. Le Seigneur lui dit : Et comment ? - Il répondit : J'irai, et je serai un esprit menteur dans la bouche de tous ses prophètes. Le Seigneur lui dit : Tu le séduiras et tu en seras le maître ; va et fais comme tu le dis. - Maintenant donc le Seigneur a mis un esprit de mensonge en la bouche de tous vos prophètes qui sont ici, et le Seigneur a prononcé votre
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arrêt. - En même temps, Sédécias de Chanaana, s'approcha de Michée, et lui donna un soufflet sur la joue, et lui dit : L'esprit du Seigneur m'a-t-il donc quitté et n'a-t-il parlé qu’à toi ? Michée lui dit : Tu le verras au jour où tu passeras de chambre en chambre pour te cacher. - Alors le roi d'Israël dit : Prenez Michée et qu'on le conduise chez Amon, gouverneur de la ville, et chez Joas, fils d’Amélech, - et dites-leur : Voici ce que dit le roi : Renfermez cet homme dans la prison, et qu'on le nourrisse du pain de la tribulation et de l'eau de l'angoisse jusqu’à ce que je revienne en paix. - Miché lui dit : Si vous revenez en paix, le Seigneur n'a point parlé par moi. Et il ajouta : Peuples, tous tant que vous êtes, soyez-en témoins. - Le roi d'Israël et Josaphat, roi de Juda, se mirent donc en marche sur Ramoth en Galaad. - Cependant le roi d'Israël dit à Josaphat : Prenez vos armes, et combattez avec vos habits ordinaires. Mais lui-même changea ses vêtement avant de donner la bataille. . . - Il arriva cependant qu'un homme ayant tendu son arc, tira une flèche au hasard, et elle vint percer le roi d'Israël entre le poumon et l'estomac. Il dit aussitôt à son cocher : Tourne bride, et retire-moi du milieu de l'armée, parce que je suis grièvement blessé. - Le combat dura tout le jour, et le roi d'Israël demeura dans son char en face des Syriens. Le sang coulait de sa plaie sur tout son char, et il mourut vers le soir. - Et avant que le soleil fût couché, un héraut sonna de la trompette dans toute l'armée et dit : Que chacun s'en retourne dans sa ville et dans son pays. - Et le roi mourut, et il fut porté à Samarie, où il fut enseveli. - On lava son char et les rênes de ses chevaux dans la piscine de Samarie ; et les chiens léchèrent son sang, selon la parole que le Seigneur avait prononcée. "
15. ISAIE, III, 12 : " Mon peuple, ceux qui vous disent bienheureux, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
16. Id., IX, 15-17 : " Le vieillard, l'homme en dignité sont les premiers que Dieu menace, les prophètes menteurs sont les derniers. - Alors ceux qui appellent ce peuple heureux seront reconnus pour des séducteurs et le peuple qu'ils appelaient heureux tombera dans le précipice. - C'est pour cela que, etc. "
17. Id., XXX. 9-14 : " Ce peuple provoque sans cesse ma colère ce sont des enfants menteurs, des enfants qui ne veulent point écouter la loi de Dieu. - Ils disent à ceux qui voient : Ne voyez point, et à ceux qui prophétisent : Ne prophétise point pour nous ce qui est droit et juste ; dites-nous des choses qui
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nous séduisent ; prophétisez-nous des choses qui nous amusent. Eloignez-nous de la voie, détournez-nous du sentier, faites disparaître de devant nous le Saint d'Israël - C'est pourquoi voici ce que dit le Saint d'Israël : Parce que vous avez rejeté la parole du Seigneur, et que vous avez mis votre confiance et votre appui dans le désordre et la violence, - cette iniquité retombera sur vous comme une haute muraille qui s'entrouvre et tombe tout-à- coup, - et qui se brise comme un vase de terre qu'on casse avec effort en mille morceaux, sans qu'il en reste seulement un têt pour y mettre un charbon de feu, ou pour puiser un peu d'eau dans un fosse. "
18. Romains, XVI, 17-18 : " Je vous prie, mes frères de prendre garde à ceux qui causent parmi vous des divisions et des scandales en s'éloignant de la doctrine que vous avez apprise : ayez soin d’éviter leur compagnie. - Car de tels hommes ne servent point Jésus-Christ Notre- Seigneur, mais leurs appétits grossiers ; et par des paroles douces et flatteuses ils séduisent les âmes simples. "
19. II PIERRE, II, 1-3, 12, 14, 17, 18, 19 : " Or, comme il y a eu de faux prophètes parmi le peuple, il y aura aussi parmi vous de faux docteurs qui introduiront de pernicieuses hérésies et qui renonçant au Seigneur qui les a rachetés, attireront sur eux-mêmes une prompte ruine. - Leurs débauches et leurs impuretés seront imitées par plusieurs, qui seront cause que la voie de la voie sera blasphémée parmi les peuples. - En vous séduisant par des paroles artificieuses, ils trafiqueront de vos âmes pour satisfaire leur cupidité ; mais le jugement qui les menace depuis longtemps approche à grands pas, et la main qui doit les perdre n'est pas endormie. . . . . - Mais ceux- ci, comme des animaux sans raison, etc. - Ils attirent eux par des amorces trompeuses les âmes légères et inconstantes, etc. - Ce sont des fontaines sans eau, des nuées agitées par des tourbillons de vent ; de noires et profondes ténèbres leur sont réservées. - Car, tenant des discours d'insolence et de folie, ils amorcent par les passions de la chair et par les voluptés sensuelles ceux qui naguère s'étaient séparés des hommes infectés d'erreur. - Ils leur promettent la liberté, tandis qu'ils sont eux-mêmes esclaves de la corruption, puisque quiconque est vaincu devient esclave de son vainqueur. "
20. Psaume IX, 24 : " Parce que le pécheur est loué, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
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21. Id., LIV, 23 : " Leurs paroles coulent comme l'huile, mais ce sont des glaives perçants. "
22. Proverbes, I, 10-14 : " Mon fils, si les pécheurs cherchent à te séduire, fuis leurs caresses. - S'ils disent : Viens avec nous, dressons des embûches pour répandre le sang ; tendons en secret des pièges à l'innocent, encore qu'il ne nous ait fait aucun mal ; - engloutissons-le tout vivant, comme ferait l'enfer, et tout entier, comme on enfouit celui qui descend dans la fosse ; - nous trouverons dans sa perte toutes sortes de biens et de richesses, nous remplirons nos maisons de ses dépouilles. - Entre en société avec nous ; n'ayons tous qu'une même bourse. "
23. Ibid., XVI, 29-30 : " L'homme injuste attire son ami par ses flatteries, et le conduit par une voie qui n'est pas bonne. - Le voilà fermant à moitié les yeux pour méditer des bouleversements, et se mordant les lèvres pour consommer l'iniquité. "
24. Proverbes, XVII, 15 : " Celui qui justifie le méchant et celui qui condamne le juste, sont tous deux abominables devant Dieu. "
25. Ibid., XXIX, 5-6 : " L'homme qui tient à son ami un langage flatteur, tend un filet à ses pieds ; - le filet enveloppera le méchant qui pèche et le juste louera Dieu et se réjouira. "
26. Ecclésiaste, VII, 6 : " Il vaut mieux être repris par un homme sage, que d'être séduit par les flatteries des insensés. "
27. JEREMIE, XI, 3-9 ; " Ils ont préparé leur langue comme un arc de mensonge, et non de vérité, ils se sont fortifiés sur la terre, parce qu'ils ne font que passer d'un crime à un autre, et qu'ils ne me connaissent pas, dit le Seigneur. - Que chacun se garde de son prochain, et que nul ne se fie son frère, parce que le frère ne pense qu’à perdre son frère et que l'ami use de tromperie contre son ami. - Chacun se rit de son prochain, et ils ne disent point entre eux la vérité, car ils ont instruit leurs langues à débiter le mensonge, et ils se sont étudiés à commettre l'injustice. - Votre demeure est au milieu d'un peuple tout rempli de fourberie ; ce sont des trompeurs, et ils ont refusé de me connaître dit le Seigneur. - Voici donc ce que dit le Seigneur des armées : Je vais les faire passer par le feu, et les éprouver. Car puis- je faire autre chose à l'égard de la fille de mon peuple ? - Leur langue est comme une flèche qui perce ; elle n'articule des mots que pour tromper ; ils ont la paix sur les lèvres en parlant à leurs amis, et en secret ils leur tendent des
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pièges. - Ne punirai-je point ces excès,
dit le Seigneur, et ne me vengerai- je point d'une nation si criminelle
? "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. CHRYSOSTOME, Homélie II sur David et Saül (Cf. Opera S. Joann. Chrysost., tome IV, pag. 759-760, édit. du Montfaucon ; pag. 879, édit. de Gaume ; Homélies, etc., de saint Jean Chrysostôme, trad. par l'abbé Auger, tome III, pag. 213-214) : " Ce n'est pas seulement la pratique de la vertu, mais ce sont aussi les éloges et les hommages déférés à la vertu qui méritent récompense, comme ce n'est pas seulement le parti qu'on prendrait d'embrasser le vice, mais encore les louanges qu'on donnerait aux gens vicieux qui feraient encourir une punition sévère, et je dirai même, quelque singulier que cela puisse paraître, plus sévère que si l'on vivait soi-même dans le désordre. C'est une vérité qui nous est confirmée par saint Paul. Cet apôtre, après avoir énuméré tous les genres de malice, et s'être élevé avec force contre les hommes qui foulent aux pieds les lois divines, ajoute en parlant de leurs approbateurs (Rom., I, 32 ; II, 1) : Quoiqu'ils sachent fort bien que, d'après les règle de la justice de Dieu, ceux qui font ces actions sont dignes de mort (C’est le sens du texte grec), non-seulement ils se portent à faire ces même actions, mais encore ils applaudissent à ceux qui les commettent. C'est pour cela, ô homme, que vous êtes sans excuse. Vous voyez que saint Paul parle de manière à faire entendre que le désordre où l'on tombe en approuvant le mal est plus grave que ne l'est ce mal lui-même. Oui, approuver le crime est plus punissable que de le commettre ; et cela est d'autant plus vrai, que cette approbation donnée au crime est la marque d'une âme perverse et incorrigible. Celui qui fait le mal, mais le condamne en même temps, peut changer un jour et se corriger ; au lieu que celui qui approuve le vice se prive lui-même du remède qu'offre le repentir. Je conclus que c'est avec beaucoup de raison que saint Paul déclare qu'approuver le mal est quelque chose de pire que de le commettre. Comme donc celui qui loue les méchants mérite une punition égale ou même plus rigoureuse, ainsi celui qui admire les bons participe aux couronnes qui leur sont réservées. C'est ce qu'on peut voir encore dans les saintes Ecritures. Dieu, parlant à Abraham, lui dit : Je bénirai ceux qui vous béniront, et je maudirai ceux qui vous maudiront (Gen., XII, 3). "
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2. S. CYPRIEN, Serm. de lapsis : " Puisqu'il est écrit : O mon peuple, ceux qui t'appellent heureux te trompent ; ils dérobent à tes yeux le sentier où tu dois marcher ; caresser et endormir le pécheur par de trompeuses complaisances, c'est fomenter sa malice, et nourrir son mal au lieu de le guérir, tandis qu'en reprenant et en instruisant son frère par des conseils généreux, on le relève et on le conduit au salut. Je reprends et je châtie ceux que j’aime, dit le Seigneur. Ainsi le prêtre du Seigneur ne doit point tromper le pécheur par des ménagements perfides, mais il doit recourir pour le guérir aux remèdes qui sauvent. C'est un médecin malhabile, que celui qui se borne à palper d'une main légère des plaies envenimées et qui, au lieu d'extirper l'humeur maligne infiltrée dans les entrailles du malade, en accroît l'intensité par de vains palliatifs. Imprudent ! ouvrez la plaie, enfoncez le fer, et guérissez le mal par un remède énergique en retranchant les parties viciées. Le malade frémit et se débat sous la douleur ; qu'importe ? Dans quelques jours, lorsque la santé lui sera rendue, aux plaintes succèderont les actions de grâces. "
3. S. BASILE- LE-GRANHD, Homélie sur le psaume LXI : " Ils bénissaient de bouche, et maudissaient de cœur. Beaucoup en effet s'attachent à faire l'apologie du mal, appellent facétieux le bouffon, de bonne compagnie celui qui tient des discours orduriers, veulent qu'on n'ait que de l'estime pour l'homme emporté et colère, vantent l'esprit d'économie de l'homme parcimonieux et avare, la libéralité au contraire de l'homme prodigue, les mœurs faciles de l'impudique et de l'adultère : en un mot, ils pallient tous les vices sous le couvert des vertus qui les avoisinent. Les gens de ce caractère bénissent de bouche, et maudissent de cœur. Car leurs paroles laudatives sont au fond la condamnation de ceux qu'ils louent, et l'approbation qu'ils leur donnent ne fait autre chose que sceller leur condamnation aux supplices étemels. "
4. S. AUGUSTIN, in Ps. LXXXIV, Enarrat. I : " Dans tout ce que vous louez, vous ne louez les choses que parce qu'elles sont bonnes. Il faudrait avoir perdu l'esprit pour louer ce qui n'est pas bon. Si vous vouliez louer un homme injuste de son injustice même, ne seriez-vous pas injuste ? Si vous vouliez louer un voleur en cela même qu'il est voleur, ne seriez-vous pas par cela seul coupable du même vice ? Si au contraire vous louez un juste parce qu'il est juste, en louant sa justice n'avez-vous pas vous-même part à sa justice ? Vous ne loueriez pas un juste, si vous ne sentiez que vous l'aimez ; vous ne l'aimeriez
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pas, s'il ne se trouvait déjà en vous quelque sentiment de justice (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. VII, pag. 68). "
5. S. JEROME, Lib. I adversùs Pelagianos : " Si un serviteur de Dieu doit ne laisser sortir de sa bouche aucune parole amère et n'avoir rien que de doux et d'attrayant dans son langage, ou les prêtres et les docteurs ne sont pas des serviteurs de Dieu, eux qui doivent reprendre hardiment les pécheurs, et adresser leurs réprimandes indistinctement à tous, sans flatter personne, ou, s'ils sont non-seulement dos serviteurs de Dieu, mais même au premier rang de ses serviteurs, c'est sans raison que vous avez donné aux serviteurs de Dieu pour partage les paroles doucereuses et miellées ; tandis que c'est au contraire le propre des hérétiques et de ceux qui s’étudient à séduire leurs auditeurs, selon ce que dit saint Paul : Ces hommes ne servent point Jésus-Christ Notre-Seigneur, mais leur ventre, et par des paroles flatteuses ils séduisent les âmes simples. L'adulation est toujours insidieuse, adroite, caressante. Et c'est avec esprit que les philosophes ont défini le flatteur un ennemi qui cherche à enjôler. La vérité au contraire est amère, a l'air triste, porte un front ridé et déplaît à ceux qu'elle reprend. C'est ce qui a fait dire à l’Apôtre : Vous suis-je devenu odieux, pour vous avoir dit la vérité ? Le Poète comique a dit de son côté : La complaisance nous fait des amis, et la franchise nous fait des ennemis. C'est pourquoi Dieu ordonnait de manger l'agneau pascal avec des laitues amères, et le vase d'élection nous exhorte à célébrer la pâque dans la vérité et la sincérité. Que la vérité et la sincérité soient en nous, et l'amertume ne tardera pas à se faire sentir. "
6. Le même, Lib. II adversùs Jovinianum, c. 19 (al. 6) : " Il nous reste maintenant à aborder notre Epicure, qui s'embrase du feu de la volupté dans ses jardins, parmi des jeunes gens et des femmelettes. - Des hommes bien repus, bien propres et bien blancs se déclarent pour toi. Ajoute, si tu veux, une raillerie socratique ; tous les porcs, tous les chiens en font autant ; et, comme tu aimes la viande, ajoute aussi les vautours, les aigles, les éperviers et les hiboux. La multitude qui environne Aristippe ne nous effacera jamais. Tous ceux que je verrai beaux, que je verrai frisés et bouclés, leurs cheveux artistement rangés, leurs lèvres colorées, tous ceux-là sont de ton troupeau, ils grognent parmi les tiens. Ceux de notre bande sont tristes, pâles,
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incultes, comme étrangers dans ce siècle et, bien qu'ils se taisent de bouche, ils disent néanmoins d'allure et de geste (Ps. CXIX, 5) : Infortuné que je suis ! mon exil n'a point de terme. Je suis relégué parmi les tentes de Cédar, c'est-à-dire dans les ténèbres de ce monde (C’est le sens étymologique du mot hébreu) ; car la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont point comprise (JEAN, I, 5). Ne te glorifie pas de ce que tu as de nombreux disciples ; le Fils de Dieu enseigna dans la Judée et il n'était suivi que de douze apôtres. J’ai foulé seul le pressoir, dit-il (Is., LXIII, 3), et aucun d'entre les peuples n'est venu se joindre à moi. Il resta seul dans sa passion, et la constance de Pierre à le suivre se laissa effrayer, tandis que le peuple entier applaudissait la doctrine des pharisiens, et disait : Crucifiez, crucifiez cet homme : nous n'avons d'autre roi que César (JEAN, XIX, 15), c’est-à-dire, nous suivons les vices, et non les vertus ; Epicure, et non pas le Christ ; Jovinien, et non l'apôtre Paul. Si plusieurs acquiescent à ton sentiment, ce n'est en eux qu'un indice de volupté car ils approuvent ton langage bien moins encore qu'ils ne plaident en cela la cause de leurs vices. Dans les places publiques, chaque jour un devin mensonger frappe au nez les sots (qui s'arrêtent le regarder), et en tordant son bâton, leur en fracasse les dents, après le leur avoir présenté à mordre ; et malgré cela, il ne manque pas de gens qu'il réussit à amorcer. Et toi, tu te targues d'une grande sagesse, parce que tu vois courir après toi de nombreux pourceaux, que tu nourris pour qu'ils servent de pâture à l'enfer ? Après ta prédication et ces bains ou se lavent également les hommes et les femmes, toute cette ardeur de volupté, qui auparavant couvrait d'un voile de pudeur ses turpitudes, se trouve à nu et exposé à la vue ; ce qui se passait auparavant dans le secret, parait maintenant en public. Tu as mis en évidence de tels disciples, tu ne les as pas faits. Ce qu'a produit ta doctrine, c'est que les péchés ne sont pas même suivis de repentir. Tes vierges, à qui, en travestissant les paroles de l’Apôtre, tu as enseigné ce que jamais personne n'avait lu ni entendu, qu'il vaut mieux se marier que de brûler, ont changé en maris ostensibles des époux secrètement adultères. Non, l’Apôtre, ce vase d’élection, n'a point donné ce conseil. Mais c'est le conseil dont parle Virgile (Enéid., IV, 172. Sa faute dans son cœur prend le nom d'hyménée) :
Conjugium vocat, hoc præetexit nomine culpam. "
" Il y a environ quatre cents ans que la prédication du Christ
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promène son flambeau dans le monde. Depuis lors, d'innombrables hérésies ont déchiré sa tunique. Presque toute erreur était venue de la nation chaldéenne, de la syriaque et de la grecque. Après tant d'années, Basilides, maître en fait de luxure et d'impudiques embrassements, se retrouve transformé en un Jovinien, Euphorbe d'un nouveau genre, afin que le peuple latin ait aussi son hérésie. N'y a-t-il eu dans tout l'univers aucune autre province qui ait reçu la prédication de la volupté et dans laquelle se soit glissé le serpent tortueux ; n'y en a-t-il eu aucune autre que celle qui, par les enseignements de Pierre, avait été fondée sur le Christ, cette pierre principale ? L'étendard de la croix et l'austérité de la prédication avaient détruit les temples des idoles ; mais la luxure, mais les passions des basses régions du corps de l'homme s'efforcent au contraire de renverser la puissance de la croix. Voilà pourquoi le Seigneur dit par Isaïe (III, 12) : Mon peuple, ceux qui vous béatifient vous séduisent et troublent les sentiers de vos pieds ; puis encore par Jérémie (LI, 6) : Fuyez du milieu de Babylone, et sauvez chacun votre âme, et (VI, 14) gardez-vous de croire aux faux prophètes qui disent : La paix, la paix, et il n'est pas de paix ; qui (VII, 4) ne cessent de crier : Temple du Seigneur, temple du Seigneur. Les visions de tes prophètes (Lament., II, 14) ne sont que mensonge et folie ; ils n'ont point dévoilé ton iniquité pour te rappeler à la pénitence ; eux (Ps. XIII, 4-5) qui dévorent le peuple de Dieu comme on dévore un aliment, ils n'ont point invoqué l'Eternel. Jérémie, qui annonce la captivité est lapidé par le peuple ; Ananias, fils d'Azur brisait pour le moment présent des colliers de bois, et en préparait de fer pour l'avenir. Toujours les faux prophètes promettent de douces choses, et plaisent un moment. La vérité est amère, et ceux qui la prêchent sont remplis d'âpreté : car c'est dans les azymes de vérité et de sincérité que se célèbre la pâque du Seigneur, et dans les amertumes qu'elle se mange. Une parole excellente, assurément, et bien digne d'être entendue de l'épouse du Christ, parmi les vierges, les veuves et les célibataires (nom qui leur vient de ce qu'ils sont dignes du ciel), c'est la sentence suivante : " Jeûnez rarement, mariez-vous souvent " ; car vous ne pouvez bien remplir l'œuvre du mariage, si vous ne prenez du vin, et des viandes, et des noyaux. Il faut des forces pour la volupté. La chair consumée par la diète maigrit bien vite. Gardez-vous de craindre la fornication. Celui qui une fois a été baptisé dans le Christ ne peut tomber ; car, pour satisfaire les passions, il a la ressource du mariage. Que si vous
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tombez, la pénitence vous réintégrera, après avoir été hypocrites dans le baptême, vous serez d'une solide foi dans la pénitence. Ne vous troublez pas, en vous imaginant qu'entre le juste et le pénitent il y ait quelque différence, et que le pardon ménage, il est vrai, une petite place dans la maison de Dieu, mais qu'il ôte la couronne. Il n'y a qu'une même rétribution pour tous. Celui qui sera à la droite, entrera dans le royaume des cieux. "
" C'est par de tels conseils que vos porchers sont plus riches que nos pasteurs, et que les boucs entraînent avec eux nombre de chèvres. Ils sont devenus comme des chevaux qui hennissent après leurs cavales (JEREM., V, 8) ; sitôt qu'ils ont vu des femmes, une ardeur furieuse les dévore et l'impatience de leur passion, (ô horreur !) ils cherchent à la justifier par des exemples pris dans l'Ecriture. Mais les femmelettes mêmes, ces piteuses créatures tout indignes qu'elles sont de pitié, chantent par manière de refrain ces paroles de leur précepteur : " Eh ! qu'est-ce que Dieu demande, si ce n'est la multiplication du genre humain ? " Et elles ont perdu non-seulement la pudicité mais encore la honte, en plaidant pour la volupté avec encore plus de lubricité qu'elles ne l'exercent. Tu as de plus dans ton armée plus d'un lieutenant ; tu as des gardes et des vélites gras et dodus, proprets, sémillants, tapageurs, qui te défendent avec les poings et les pieds. Les nobles te cèdent le haut des rues, les riches te baisent le front ; car, si tu n'étais venu, les riches ne pourraient entrer dans le paradis. Grandis donc en vertu, ou plutôt en vices. Tu as même dans tes camps des amazones à la mamelle découverte, au bras et aux genoux dénudés, et qui provoquent au combat des voluptés les hommes qui vont à leur rencontre. Puis, comme tu es un riche père de famille, tu nourris dans tes volières, non pas des tourterelles, mais des huppes, qui volent par tous les égouts des fétides voluptés. Harcèle-moi, renverse -moi, reproche-moi quels crimes tu voudras, accuse-moi de vivre dans la luxure et les délices, tu ne m'en aimeras que davantage, si tel je suis, car je serai de ton bétail. "
" Mais je te parlerai, à toi qui, en confessant le Christ, as détruit le blasphème écrit sur ton front, Cité puissante, Cité maîtresse du monde, Cité louée par la voix de l’Apôtre (Rom., I, 8), interprète ton nom. Rome est un nom de force chez les Grecs, un nom de sublimité chez les Hébreux. conserve ton nom : que ta force te rende sublime, et que la volupté ne vienne pas t’abaisser. La malédiction dont le Sauveur te menace dans l'Apo-
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calypse, tu peux t'y dérober par la pénitence
; car tu as l'exemple des Ninivites. Prends garde au nom de Jovinien, nom
dérivé des idoles. Le Capitole n'a plus son autel ; les cérémonies
et les temples de Jupiter sont tombés. Pourquoi son nom et ses vices
seraient-ils en honneur chez toi ? Encore sous les rois et sous Numa Pompilius,
tes ancêtres adoptèrent avec moins de peine la continence
de Pythagore, que sous les consuls la luxure d'Epicure. "
Question VIII
Quand est-ce que, par réticence de notre part, nous devenons cause du péché d’autrui ?
C'est lorsqu'en gardant le silence mal à propos, nous causons un dommage, soit à quelqu'un de nos subordonnés soit à tout autre de nos semblables. Par exemple, c'est ce qui arrive, si, chargé d'enseigner, d'avertir ou de reprendre un individu ou une communauté nous cessons sans un juste sujet de remplir cette fonction dans un moment où par-là nous nous serions rendus utiles. C'est pourquoi le Seigneur dans Isaïe adresse cet avis à tout prédicateur de l’Evangile : Criez sans cesse, faites retentir votre voix comme une trompette ; annoncez à mon peuple les crimes qu'il a commis, et à la maison de Jacob ses prévarications. Apprenons d'un autre côté le péril que courent ceux qui, n'ayant pas la force d'aboyer, sont appelés non sans raison des chiens muets : Si, lorsque je dirai a l’impie : Vous serez puni de mort, vous ne lui annoncez pas ce que je vous dis, et si vous ne lui parlez pas afin qu’il se détourne de la voie de son impiété et qu'il vive, l’impie mourra dans son iniquité, mais je vous redemanderai son sang. Tant il est nécessaire d'observer ce que saint Paul recommande avec de si fortes instances : Annoncez la parole aux hommes ; pressez-les à temps, à contretemps ; reprenez, suppliez, menacez, sans vous lasser jamais de les supporter et de les instruire ; comme ce qu'il dit ailleurs : Reprenez devant tout le monde ceux qui se rendent coupables de quelque crime, afin que les autres aient de la crainte.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. ISAIE, LVIII, 1 : " Criez sans cesse, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
2. JEREMIE, XXIII, 21-22 : " Je n'envoyais pas ces prophètes et ils couraient ; je ne leur parlais point et ils prophétisaient - s'ils eussent assisté à mon conseil, ils auraient fait entendre mes paroles à mon peuple, et l'auraient détourné de ses voies perverses et de l'iniquité de ses pensées. "
3. Id., XXVI, 1-3 : " Au commencement du règne de Joachim, fils de Josias, roi de Juda, le Seigneur me dit ces paroles. - Voici ce que dit le Seigneur : Tiens-toi sur le seuil de la maison du Seigneur, et tu feras entendre à tous les habitants des villes de Juda, qui viennent adorer dans la maison du Seigneur, tout ce que je t'ai ordonné de leur dire. N'en retranche pas une parole. - Peut-être écouteront-ils et reviendront-ils de leur mauvaise voie ; et je me repentirai du mal que j'ai résolu de leur faire à cause de la malice de leur cœur. "
4. Id., L, 1-2 : " Paroles du Seigneur contre Babylone, et contre le pays des Chaldéens par la bouche de Jérémie prophète. - Annoncez ceci parmi les nations, et faites-le entendre ; levez l'étendard, publiez, ne cachez rien, dites : Babylone est prise, Bel est confondu, Mérodach est vaincu ; leurs statues sont brisées et leurs idoles sont renversées. "
5. JONAS, I, 1-4 : " Le Seigneur adressa sa parole à Jonas, fils d’Amathi, et lui dit : - Lève-toi, et va dans Ninive la grande ville ; là, élève la voix, parce que sa malice est montée jusqu'à moi. - Et Jonas se leva pour fuir à Tharsis, de devant la face du Seigneur. Il descendit à Joppé, et ayant trouvé un vaisseau qui faisait voile pour Tharsis, il y entra avec les autres, et paya son passage pour aller à Tharsis et fuir de devant la face du Seigneur. - Mais le Seigneur envoya sur la mer un vent furieux, etc. "
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6. I Corinthiens, IX, 16-17 : " Car si je prêche l’Evangile, ce n'est point pour moi un sujet de gloire, puisque je suis obligé nécessairement à ce ministère ; et malheur à moi, si je ne prêche pas l’Evangile ! Si je le prêche de bon cœur, j'en aurai la récompense ; mais si je ne le fais qu’à regret, je m'acquitte seulement de l'emploi qui m'a été confié. "
7. ISAIE, LVI, 10 : " Les gardiens d'Israël sont aveugles et sans intelligence ; ce sont des chiens muets qui ne sauraient aboyer, qui ne voient que de vains fantômes qui dorment et qui se plaisent dans leurs songes. "
8. EZECHIEL, III, 17-21 : " Fils de l'homme, je t'ai établi sentinelle dans la maison d'Israël, tu écouteras la parole de ma bouche, et tu leur annonceras ce que tu auras appris de moi. - Si, quand je dis à l'impie : Tu mourras, tu négliges de le lui annoncer, et que tu ne lui parles pas, pour qu'il se détourne de sa voie impie, et qu'il vive, l'impie mourra dans son iniquité mais je te redemanderai son sang. - Si au contraire tu annonces à l'impie la vérité, et qu'il ne se convertisse pas de son impiété, et ne quitte pas sa voie criminelle, il mourra dans son iniquité mais toi, tu auras délivré ton âme. - Que si le juste abandonne sa justice, et commet l'iniquité, je mettrai devant lui une pierre d'achoppement ; il mourra, parce que tu ne l'auras pas averti, il mourra dans son péché et le souvenir de toutes les actions de justice qu'il avait faites sera effacé ; mais je te redemanderai son sang. - Que si au contraire tu avertis le juste de ne pas pécher et qu'il ne pèche pas, il vivra certainement parce que tu l'auras averti, et tu auras délivré ton âme. "
9. Id., XXXIII, 1-9 : " Le Seigneur me dit encore ces paroles : - Fils de l'homme, parle aux enfants de ton peuple, et dis-leur : lorsque j'aurai amené le glaive sur une terre, et que le peuple de cette terre prenant l'un des derniers des siens l'aura établi pour lui servir de sentinelle, , - et que cet homme ensuite, voyant le glaive s'avancer sur cette terre, aura sonné de la trompette et averti le peuple ; - si celui qui a entendu le son de la trompette ne se tient pas sur ses gardes, et que l'épée survenant l'emporte et le tue, quel que puisse être cet homme, son sang retombera sur sa propre tête : - car il a entendu le son de la trompette, et il ne s'est pas tenu sur ses gardes ; il sera responsable de son sang versé ; mais s'il se tient sur ses gardes, il sauvera sa propre vie. - Si au contraire la sentinelle, voyant le glaive s'avancer, ne sonne point de la trom-
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pette, et que le peuple ne se tenant point sur ses gardes, le glaive survienne et leur ôte la vie, ils seront surpris dans leur iniquité ; mais je redemanderai leur sang à la sentinelle infidèle. Maintenant, fils de l'homme, tu es celui que j'ai établi pour servir de sentinelle à la maison d'Israël ; tu écouteras donc les paroles de ma bouche, et tu leur annonceras ce que je t’aurai dit. - Si, lorsque je dirai à l'impie : Impie, tu mourras très certainement, tu ne parles pas à l'impie pour qu'il se retire de sa mauvaise voie, s'il meurt ensuite dans son iniquité, je te redemanderai son sang à toi-même - Mais si tu avertis l'impie de se convertir, et de quitter s avoie, et que néanmoins il ne se convertisse point, ni ne quitte sa voie, il mourra dans son iniquité et tu auras délivré ton âme. "
10. Actes, XX, 17-21, 26-27 : " Etant à Milet, Paul envoya à Ephèse pour faire venir les prêtres de cette Eglise ; - Et quand ils se furent rendus et assemblés auprès de lui, il leur dit : Vous savez de quelle manière je me suis conduit pendant tout le temps que j'ai été avec vous, depuis le premier jour où je suis entré en Asie ; - servant le Seigneur en toute humilité et avec larmes, parmi les traverses qui m'ont été suscité par les Juifs. - Et je ne vous ai rien caché de tout ce qui pouvait vous être utile, rien ne m'ayant empêché de vous l'annoncer, et de vous en instruire et en public et en particulier, - prêchant aux juifs aussi bien qu'aux gentils de revenir à Dieu par la pénitence et de croire en Notre-Seigneur Jésus-Christ - Je vous déclare donc aujourd'hui que je suis innocent du sang de vous tous. - Car je n'ai point hésité à vous annoncer toutes les volontés de Dieu. "
11. ISAIE, VI, 5 : " Malheur à moi, parce que je me suis tu. "
12. Esther, IV, 13-14 : " Mardochée envoya dire à Esther : Ne croyez pas que, parce que vous êtes dans la maison du roi, vous puissiez seule sauver votre vie, si tous les juifs viennent à périr : - car si vous demeurez maintenant dans le silence, Dieu trouvera quelque autre moyen pour délivrer son peuple, et vous périrez, vous et la maison de votre père. Et qui sait si ce n'est point pour cela même que vous avez été élevé à la dignité royale, afin d'être en état d'agir dans une occasion comme celle-ci ? "
13. II Timothée, IV, 2 : " Annoncez ma parole, etc. (comme dans le corps de la réponse.) "
14. Tite, I, 7, 9, 12, 13 : " Il faut que l'évêque etc. -
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Qu'il soit fortement attaché aux vérités de la foi, telles qu'on les lui a enseignées, afin qu'il soit capable d'exhorter selon la saine doctrine, et de convaincre ceux qui s'y opposent, etc. Un de leurs compatriotes, dont ils se font un prophète a dit d'eux : les Crétois sont toujours menteurs : ce sont de méchantes bêtes qui n'aiment qu’à manger et à ne rien faire. - Ce témoignage qu'il rend d'eux est véritable. C'est pourquoi reprenez-les fortement, afin qu'ils conservent la pureté de la foi. "
15. Ibid., II, 15 : " Prêchez ces vérités : exhortez et reprenez avec une pleine autorité. Que personne ne vous méprise. "
16. I Timothée, V, 20 : " Reprenez devant tout le monde les pécheurs, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
17. Lévitique, XXIX, 17 : " Vous ne haïrez
point votre frère en votre cœur, mais vous le reprendrez publiquement,
de peur que vous ne péchiez vous-même à son sujet.
"
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. BERNARD, Serm. de Nativitate S. Joannis Baptistæ : " Que personne parmi vous, mes frères, ne flatte les vices ; que personne ne dissimule les péchés. Que personne ne dise : Est-ce que je suis le gardien de mon frère ? Que personne ne voie d'un œil indifférent l'ordre s'altérer, la discipline s'affaiblir. Car c'est consentir au mal, que de garder le silence quand on peut élever la voix, et nous savons que le même châtiment est réservé à ceux qui font le mal et à ceux qui y consentent. "
2. S. GREGOIRE-LE-GRAND, Pastoral, 2e partie, chapitre IV (On trouvera ce même passage répété dans la lettre de saint Jean de Constantinople (Lib. I, Epist. 24)) : " Les évêques doivent savoir garder le silence avec discrétion et ne parler que pour dire des choses utiles, de telle sorte qu'ils ne fassent jamais connaître ce qui doit être ignoré et qu'ils ne s'obstinent point à taire ce qu'il serait utile de divulguer ; car de même qu'une parole imprudente peut induire les hommes en erreur, de même aussi un silence gardé mal à propos entretient dans l'ignorance ceux qu'on pourrait instruire par un mot. Il arrive souvent que des évêques imprévoyants, dans la crainte de perdre la bienveillance des hommes, n'osent leur donner avec franchise des avertissements utiles ; ils n'ont pas le courage de dire la vérité, ils ne gouvernent pas leur troupeau comme de vrais pasteurs ; ils ressemblent à des mercenaires ; en se cachant
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ainsi dans leur silence, c'est comme s'ils fuyaient quand le loup approche. C'est à ces pasteurs que Dieu adresse ces paroles par l'organe d'un prophète (Is., LVI, 40) : Ce sont des chiens muets qui ne sauraient aboyer. Il s'en plaint encore par ces paroles d'un autre prophète (EZECH., XIII, 5) : Vous ne vous êtes point présentés sur la brèche et vous n'avez point élevé de rempart devant la maison d'Israël afin de tenir ferme dans le combat au jour du Seigneur. Monter sur la brèche c'est parler librement contre les puissances du siècle pour la défense du troupeau ; et tenir ferme dans le combat au jour du Seigneur, c'est résister aux efforts des méchants, en soutenant avec ardeur les intérêts de la justice. En effet, ne peut-on pas dire qu'un pasteur abandonne son poste, quand il garde le silence et qu'il craint de faire entendre des paroles sages et utiles ? Mais celui qui a le courage d'exposer sa vie pour la défense de son troupeau, s'oppose comme une muraille aux ennemis de la maison d'Israël. C'est de ces pasteurs lâches, qui abandonnent leur peuple, que le Seigneur a dit encore (THREN., II, 9) : Ces prophètes n'ont eu que des visions folles et mensongères ; ils ne t’ont pas ouvert les yeux sur tes iniquités pour te porter au repentir. Les docteurs de la loi sont souvent appelés prophètes dans l'Ecriture sainte, parce qu'en enseignant combien sont fragiles les biens de ce monde, ils découvrent la solidité des biens futurs. Dieu dit qu'ils ont eu des visions mensongères parce que, n'osant blâmer la conduite du pécheur, ils l'entretiennent dans ses vices par une fausse sécurité qui le trompe, et ils n'osent lui ouvrir les yeux sur ses iniquités, en gardant le silence tandis qu'ils devraient l'exciter à la pénitence. Les réprimandes du pasteur sont semblables à une clef qui ouvre ; car de justes reproches font reconnaître des fautes que celui qui les a commises ignore souvent lui-même. C'est pourquoi Paul a dit (Tite, I, 9) : Qu'il soit fortement attaché aux maximes qui sont conformes à la foi et à la doctrine de Jésus- Christ afin qu'il soit en état d'enseigner la saine doctrine et de convaincre ceux qui la contredisent. C'est aussi ce qui a fait dire au prophète Malachie (II, 7) : Les lèvres du prêtre seront les dépositaires de la science, et on recherchera de sa bouche la connaissance de la loi, parce qu'il est l'ange du Seigneur des armées. Et le prophète Isaïe donnait cet avertissement de la part de Dieu à tous les pasteurs (LVIII, 1) : Crie, crie sans cesse, que ta voix retentisse comme la trompette. En effet, quiconque se charge du sacerdoce, prend les fonctions de héraut ; il marche pour ainsi dire devant le juge terrible qui
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doit le suivre, et il annonce son arrivée. Si donc un prêtre ne fait point annoncer la parole divine, héraut muet, comment pourra-t-il s'acquitter de ses fonctions ? Le Saint-Esprit descendit en forme de langues sur les premiers pasteurs de l'Eglise, pour montrer que ceux qu'il remplit de ses dons doivent s'empresser de les communiquer. Dieu ordonna à Moïse d'attacher des sonnettes à la robe dont le prêtre devait être revêtu lorsqu'il entrait dans le tabernacle, pour lui rappeler qu'il devait annoncer la vérité et ne point provoquer par son silence la colère du souverain juge, qui a les yeux fixés sur lui ; car il est écrit (Exode, XXVIII, 35) : Et on entendra le bruit qu'il fera avec ses sonnettes, soit lorsqu'il entrera dans le lieu saint en la présence du Seigneur, soit lorsqu'il en sortira, et à cette condition, il ne mourra point. Un prêtre qui sort et qui entre sans qu'on l'entende, c'est-à-dire qui poursuit son chemin sans prêcher la vérité, sera puni de mort, parce que son silence allume la colère du juge invisible. "
3. S. AUGUSTIN, Epist. CIX (al. 211), ad Monachas : " Si vous remarquez dans quelqu'une d'entre vous de ces regards effrontés, avertissez-la sans délai pour empêcher le mal d'empirer, et l'étouffer dès sa naissance. Que si, quoiqu’avertie, elle retombe, soit sur-le-champ, soit dans quelque autre occasion, celle qui s'en aperçoit doit en faire le rapport, afin qu'on puisse y apporter remède. Mais il faut pour cela qu'elle fasse préalablement remarquer ce qui se passe à une ou deux de ses sœurs pour que, se trouvant convaincue par la bouche de deux ou trois témoins, la coupable puisse être punie comme elle le mérite. Et ne pensez pas qu'on puisse vous accuser de malignité lorsque vous ferez de ces sortes de rapports : vous seriez coupables au contraire, si, pouvant guérir vos sœurs en les déférant, vous les laissiez périr faute de rompre le silence à leur sujet. Si une de vos sœurs avait sur son corps une plaie qu'elle voudrait tenir cachée de peur qu'on n'y portât le scalpel, ne serait-ce pas une cruauté à vous de n'en rien dire, et n'y aurait-il pas au contraire de la charité à la faire connaître ? A combien plus forte saison ne devez-vous pas découvrir les plaies de leurs âmes, qu'il est incomparablement plus dangereux de laisser s'envenimer que celles du corps ?. . . "
" Ce que je viens de dire de cette espèce de fautes, doit s'observer exactement pour toutes les autres, et il faut garder le même ordre pour les découvrir et les arrêter dès leur naissance, c'est-à-dire, déférer, convaincre et punir les coupables, ce qui doit se
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faire avec beaucoup de haine pour le mal lui-même mais toujours avec beaucoup de charité pour les personnes (Cf. Lettres de saint Augustin, t. VI, p. 46-48). "
4. Le même, Lib. L, Homiliarum, Hom. 7 : " Si vous voulez bien y faire attention, vous verrez, mes frères, que non-seulement les évêques, mais encore tous les prêtres et tous les ministres de l'Eglise, occupent des postes fort critiques pour leur salut. Car, c'est à eux que l'Esprit-Saint adresse cette injonction : Criez sans cesse, faites retentir votre voix comme une trompette ; annoncez au peuple les crimes qu'il a commis, et à la maison de Jacob ses prévarications (Is., LVIII, 1). Et cette autre encore : Si vous ne reprochez pas au pécheur son iniquité, je vous redemanderai son sang (EZECH., III, 18). C'est d'eux aussi que l'Apôtre disait aux fidèles : Obéissez à vos conducteurs, et soyez soumis à leur autorité, car ce sont eux qui veillent pour le bien de vos âmes, comme devant en rendre compte (Hébr., XIII, 7). Si chacun de vous, mes frères, peut à peine soutenir le compte qu'il aura à rendre de sa propre conduite au jour du jugement, que sera- ce des prêtres à qui le souverain juge redemandera les âmes de tous ceux qu'ils auront eus à gouverner ? A la vue donc du péril où nous sommes, priez pour nous, afin que par notre attention à procurer l'aliment spirituel au troupeau qui nous est confié, nous méritions pour le dernier jour un témoignage favorable. Observez avec attention ce que j'ai la volonté de vous dire, si je puis, avec le concours de vos prières, trouver mon appui dans celui dont la pensée seule m'inspire de la crainte. Entre autres instructions qui s'adressent aux évêques, l'Apôtre dit qu'ils doivent être capables d'exhorter selon la saine doctrine, et de convaincre ceux qui s'y opposent (Tite, I, 9). C'est là un grand honneur, mais en même temps un grand fardeau. J'espérerai toutefois de la miséricorde de Dieu que, touché des prières que vous lui ferez pour nous, il nous délivrera du piège des chasseurs, et de la parole âpre et piquante (Ps. XC, 3). Car il n'y a rien qui ralentisse plus le zèle des ministres de Dieu à reprendre les contradicteurs, que la crainte d'en être repris soi-même ou d'essuyer leur critique. En redoutant outre mesure les détractions, les railleries, les insultes des hommes superbes, en appréhendant de leur part quelque atteinte à notre bonheur d'ici-bas et à nos biens temporels, il peut arriver que nous prêchions avec moins de force qu'il ne faut les vérités éternelles. Et c'est ainsi que la peur de nous voir dépouillé par le crédit
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des méchants de quelque avantage de la vie présente, peut nous faire négliger le soin d'appliquer des remèdes convenables à leurs maux spirituels. Il est donc à craindre que nous n'ayons à rendre au jour du jugement un compte sévère, tant pour nous que pour ceux à qui nous n'aurons pas osé parler durement par un effet de notre affection pour les biens terrestres. "
5. S. PROSPER (Ou plutôt Julien Pomère, auteur de l’ouvrage cité ici), Lib. 1 de vitâ contemplativâ, c. 20 : " Quant à ce que dit l'Apôtre, que nous devons servir de modèle aux fidèles, qu'en sera-t-il, si celui qui est chargé d'encourager les bons et de reprendre les méchants, en même temps qu'il présente aux bons des exemples à imiter dans la régularité de sa vie, n'ose pas élever la voix pour réprimer les méchants ? Car si le prêtre est particulièrement obligé de bien vivre, c'est, si je ne me trompe, pour qu'il n'anéantisse pas l'effet de ses paroles par une conduite toute opposée en faisant le contraire de ce qu'il recommande publiquement, ou en osant prêcher une doctrine différente de celle qu'il pratique. S'il agit autrement, il n'aura aucun succès auprès de ceux qui connaîtront sa manière de vivre, parce qu'il est préposé à l’Eglise de Dieu non-seulement pour servir d'exemple aux autres par une vie régulière, mais encore pour représenter avec courage aux pécheurs leur triste état, leur montrer le châtiment qui leur est réservé s'ils s'endurcissent, la gloire qui les attend s'ils se convertissent ; ne désespérer du salut d'aucun, n'en rebuter aucun, pleurer sur ceux qui refusent de s'amender, à l'exemple de l'Apôtre qui disait : Je crains d'être obligé d'en pleurer plusieurs, qui étant déjà tombés en plusieurs dérèglements, n'en ont point fait pénitence (II Cor., XII, 21) ; comme il disait encore : Qui est faible, sans que je m'affaiblisse avec lui ? Qui est scandalisé sans que je sois embrasé de zèle ? (II Cor., XI, 29) ? Persuadé donc que, s'il a de la partialité pour les riches et les puissants, de la complaisance enfin pour ceux qui vivent dans le désordre, il les perdra et se perdra lui-même avec eux, il ne doit négliger, ni de mener une vie sainte pour le bon exemple, ni d'instruire les fidèles pour l'acquit de la charge qui lui est confiée dans la certitude où il est qu'il ne lui servira de rien de mener lui-même une vie irréprochable s'il n'en a pas moins à répondre de la perte des âmes, tandis qu'un autre qui ne serait point obligé d'enseigner à ses semblables la voie du salut, n'aurait du moins en se perdant à être puni que
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pour le mal qu'il aurait fait lui-même. Mais celui à qui la prédication de l’Evangile a été confiée aurait beau vivre saintement ; s'il rougit ou s'il craint de reprendre ceux qui mènent une vie criminelle, il périra avec ceux que son silence aura laissé se perdre. Et de quoi lui servira-t-il de n'avoir pas de péchés personnels à expier, s'il doit porter la peine des péchés des autres ? Ou je me trompe fort, ou c'est là ce que le Seigneur a voulu dire par ces paroles adressées figurément au prophète Ezéchiel : Fils de l'homme, je vous ai établi comme sentinelle sur toute la maison d'Israël (EZECH., III, 17; XXXV, 2-7). Et nous ne devons pas regarder comme une expression indifférente qu'il appelle le prêtre du nom de sentinelle ; car de même qu'une sentinelle doit se placer dans un lieu élevé pour que sa vue puisse embrasser plus d'objets, de même le prêtre doit se proposer ce qu'il y a de plus sublime, et s'élève au-dessus de tous les autres par sa sainteté et par sa science, pour pouvoir instruire avec fruit ceux qu'il a sous sa conduite. Voyons maintenant ce que Dieu va dire au Prophète : Vous écouterez la parole de ma bouche, et vous leur annoncerez ce que vous aurez appris de moi (EZECH, III, 17). Car le prêtre ne doit dire que ce qu'il a appris dans les livres saints, que ce que Dieu peut lui avoir inspiré et non ce qu'il aurait découvert par des moyens purement naturels. Vous leur annoncerez de ma part, lui dit-il. De ma part, et non de la vôtre ; ce sommes paroles que vous répéterez. Vous n'aurez point à vous glorifier de ce que vous aurez dit comme du produit de votre propre génie, c’est de ma part que vous l'aurez annoncé. Mais écoutons ce qu'il va annoncer. Si, lorsque je dirai à l’impie, Vous serez puni de mort, vous ne lui annoncez pas ce que je vous aurai dit, et si vous ne lui parlez pas afin qu'il se détourne de la voie de son iniquité et qu'il vive, l'impie mourra dans son impiété, mais je vous redemanderai son sang (EZECH., III, 18). Quoi de plus explicite, de plus clair que ces paroles ? Si vous ne parlez pas à l'impie pour qu'il se garde de son impiété et qu'ainsi il vienne à périr, je vous redemanderai son sang ; c'est-à-dire, si vous ne lui représentez pas ses péchés, si vous ne l'en reprenez pas, afin qu'il se convertisse de son impiété et qu'il vive, je livrerai aux flammes éternelles, et vous-même qui ne l'aurez pas repris, et lui que vous aurez autorisé à pécher par votre silence. Quel est le cœur de bronze ou de rocher qui ne s'effraierait à cette pensée ? Quel est l'esprit si incrédule que cette pensée ne rendrait croyant ? "
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6. S. ISIDORE, Lib. III de summo bono, c. 44 : " Tous les temps ne conviennent pas à l'instruction, selon cette maxime de Salomon, qu'il y a temps de se taire comme il y a temps de parler (Eccles., III, 7). Sans se laisser dominer par la crainte, mais par une discrétion que leur commandent les dispositions perverses des méchants, les bons doivent quelquefois s'abstenir d'enseigner à ces premiers les prescriptions de la loi. Quelquefois les docteurs de l'Eglise, malgré l'ardeur de la charité dont ils sont embrasés, s'imposent à eux-mêmes le silence, parce qu'ils ne voient personne qui les écoutent ainsi que le déclare le Prophète par ces paroles (JEREM., XIII, 19) : Les villes du Midi sont fermées, et il n'y a personne qui les ouvre. Que celui qui est chargé de l'instruction des autres sache au besoin dissimuler les fautes qu'il voit commettre, lorsqu'il ne croit pas pouvoir obtenir sur-le-champ qu'on s'en corrige. Car s'il peut faire cesser le mal et qu'il le dissimule néanmoins, il devient coupable comme s'il y donnait son consentement. "
7. Ibidem, c. 45 : " Ceux à qui est confiée la mission d'enseigner remplissent une fonction périlleuse, lorsqu'il s'agit pour eux de s'élever contre des contradicteurs de la vérité et c'est à ceux-là que s'adressent ces paroles du Prophète, qui nous font envisager l'accomplissement d'un tel devoir comme le plus haut degré de la justice chrétienne : Montez sur une haute montagne, vous qui annoncez l’Evangile à Sion (Is., XL, 9) ; c'est-à-dire que le prédicateur de l'Evangile doit autant surpasser les autres par son mérite qu'il les surpasse par son rang. En conséquence, pour que la crainte ne lui fasse pas négliger l'office de l'enseignement, qu'il fasse attention à ces paroles : Vous donc, ceignez vos reins, allez promptement, et dites-leur tout ce que je vous commande. N'appréhendez point de paraître devant eux, parce que je ferai que vous n'en aurez aucune crainte (JEREM., I, 17). Ces mêmes paroles nous font voir que c'est un don de Dieu que d’être exempt de crainte. Celui qui fait acception des personnes, et qui craint de dire la vérité à celui qui a la puissance en main, se rend gravement coupable devant Dieu. Trop de prêtres en effet tiennent la vérité cachée dans la crainte de s'attirer l’animadversion des hommes puissants. Et c'est se rendre criminel, que de se laisser détourner de son devoir, comme de celui d'enseigner la vérité par la crainte ou par les menaces. Mais le principe, hélas, de cette crainte, c'est ou que l'on est dominé par l'amour des commodités du siècle, ou qu'on est soi-
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même impliqué dans quelque honteux désordre. Beaucoup de pasteurs des églises, dans la crainte de perdre les bonnes grâces de la puissance séculière ou de s'attirer de fâcheuses inimitiés, ne reprennent point les pécheurs et déclinent le devoir de s’élever contre les oppresseurs des pauvres, et ils oublient qu'ils auront à rendre compte du dépôt de la vérité qui leur est confié et de ce silence qu'ils gardent devant un peuple qu'ils sont obligés d'instruire. Lorsque les pauvres sont opprimés par les hommes puissants, les bons prêtres prennent hautement la cause des premiers, et sans craindre de se faire des ennemis, ils reprennent ouvertement les oppresseurs des pauvres, réprouvent leurs actes, les séparent de la communion des fidèles, et se mettent peu en peine du mal qu'ils peuvent en essuyer : car le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis (JEAN, X, 11). De même qu'un pasteur vigilant défend ses brebis contre les bêtes féroces, ainsi le ministre de Dieu doit être plein de sollicitude pour le troupeau de Jésus- Christ et empêcher que l'ennemi n'y porte ses ravages, que la persécution n'y jette le désordre et que les pauvres ne soient mis en danger par la cupidité des hommes puissants. Les mauvais pasteurs au contraire ne se mettent pas en peine de leurs brebis, mais ils font comme ces mercenaires dont parle l’Evangile, et qui prennent la fuite quand ils voient le loup approcher. Car c'est comme s'ils fuyaient, que de se taire devant la force, et de n'oser résister aux méchants. "
8. Ibidem, c. 46 : " Les prêtre porteront la peine de l'iniquité de leurs peuples, s'ils négligent, soit de les guérir de leur ignorance, soit de les corriger de leurs vices, ainsi que le Seigneur le déclare par son prophète : Je vous ai donné pour sentinelle à la maison d'Israël. . . Si vous ne parlez pas à l'impie afin qu'il se détourne de son impiété, il mourra dans son iniquité, mais je vous redemanderai son sang (EZECH., XXXIII, 17, 18). C'est ainsi que le grand-prêtre Héli a été condamné à cause des désordres de ses fils, qu'il reprenait cependant, mais moins sévèrement qu'il ne devait. Les prêtres doivent faire attention aux désordres de leurs peuples, et examiner la conduite de chacun avec une prudente sollicitude, conformément à cet avertissement que le Seigneur donnait à Jérémie (VI, 27) : Je vous ai établi sur ce peuple pour le mettre à la dernière épreuve, pour sonder leurs voies et leurs désirs et pour les connaître. Les prêtres doivent discuter avec soin la conduite de ceux qui leur sont soumis, pour les corriger de leurs vices et faire la conquête de leurs âmes. Mais autant il convient
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de reprendre ceux qui pèchent, autant il importe de ne pas blesser ceux qui remplissent leurs devoirs. Les prêtres doivent exercer leur sollicitude sur ceux qu'ils voient se perdre, afin de les ramener au bien s'il est possible, ou s'ils les trouvent incorrigibles, de les séparer à temps du reste des fidèles. Ceux-là surtout encourent un reproche sévère qui, prenant à tâche en quelque sorte d'abuser les pécheurs, non-seulement ne leur font pas de réprimandes, mais les flattent encore dans leurs désordres, selon ce que dit le Prophète (Is., IX, 16) : Alors ceux qui appellent ce peuple heureux se trouveront être des séducteurs et ceux qu'on flatte de ce bonheur se trouveront avoir été conduits dans le précipice. Le pécheur qui ne profite pas de l'avertissement qui lui a été donné en secret, doit être repris publiquement, afin que sa plaie, que n'a pu guérir un palliatif discret, puisse être cautérisée par ce violent remède. Une réprimande secrète n'est pas ce qui convient pour la répression d'un désordre public. Ceux qui font le mal en plein jour doivent être repris de même afin que cela serve à corriger avec eux ceux qui déjà se seraient portés à les imiter. Et c'est ainsi que la correction exercée à l'égard d'un seul peut profiter à l'amendement d'un grand nombre. Car il vaut beaucoup mieux qu'un seul soit condamné pour que tous les autres soient sauvés, que d'exposer par de timides ménagements pour un seul le salut de tous. La sévérité de la réprimande doit être mesurée sur le besoin spirituel des délinquants. S'il est besoin d'assaisonner la correction de quelques paroles amères, il faut au moins que la charité règne toujours au fond du cœur. On peut reprendre durement ceux qu'on est chargé d'instruire, sans se dépouiller pour cela de l'affection qu'on a pour eux. Ceux qui ne peuvent supporter la correction taxent d'orgueil ceux qui l'exercent, et ce qui n'est qu'exactitude dans les pasteurs fidèle paraît aspérité aux méchants, dont l'esprit mal disposé ne sait qu'interpréter en mal les intentions les plus pures. "
9. S. JEROME, in Ezechielis caput III, sur ces paroles, Si dicente me ad impium, etc. : " On s'expose à un grand danger, quand on retient dans le silence les oracles de Dieu par l'un de ces trois motifs : la crainte, la nonchalance et l'adulation. C'est ce qui a fait dire a Isaïe (VI, 5) : Malheur à moi, parce que je me suis tu. Les paroles qui suivent d'Ezéchiel : Pour vous, vous aurez délivré votre âme, ont quelque rapport avec celles-ci de l'Apôtre : Si l'ouvrage de quelqu'un est brûlé, il en souffrira la perte, il ne laissera pas néanmoins d'être sauvé, mais ce sera comme en passant
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le feu (I Cor., III, 15), qui éprouvera la sentinelle placée pour avertir, soit qu'elle se trouve innocente de la mort de l'impie qui se sera perdu, soit qu'elle s'en trouve coupable. Car l'ouvrage qui appartient proprement au maître, c'est le salut de son disciple. Et il est bon d'observer qu'un juste peut tomber, et qu'un pécheur au contraire, qu'instruit un maitre habile, peut rentrer dans la bonne voie. Les bonnes actions ont donc toujours besoin d'un maître qui les encourage, de peur que celui qui s'y est d'abord porté ne vienne à tomber, et à se retirer du sentier de la vertu. "
10. Le même, in caput XXXIII, sur ces paroles, Terra cùm induxero, etc. : " Nous apprenons de là qu'un homme, quelque pécheur et quelque impie qu'il soit, s'il consent à écoute les paroles d'un maître et qu'il fasse pénitence, peut être guéri de son impiété et qu'un maître au contraire peut se perdre s'il manque au devoir qui lui est imposé d'instruire, soit par la crainte qu'il aurait d'encourir une disgrâce, soit par le désespoir qu'il concevrait du salut du pécheur ; car alors il serait coupable de la perte de celui qui aurait pu être délivré et échapper à la mort, s'il avait été averti de se relever de sa chute ; qu'ainsi l'un et l'autre reste toujours libre, l'un de se taire ou de parler, l'autre d’écouter la voix du maitre et de se sauver en faisant ce qui lui est prescrit, ou de mépriser l’avertissement qui lui est donné et de consommer sa perte par suite de ce mépris dont il se rend coupable. "
" Par cette sentinelle du pays de la Judée, on peut entendre ou un roi, ou un prophète. Par une sentinelle de l’Eglise, il faut entendre ou un évêque ou un prêtre, parce que l'un et l'autre est élu par le peuple, et que connaissant les Ecritures, et par elles les choses à venir, ils peuvent avertir le peuple et reprendre ceux qui font mal. Il est donc fort à craindre que nous n'entrions dans cette charge sans avoir les vertus nécessaires, et qu'après avoir été élevé en dignité par le peuple, nous ne nous abandonnions à la négligence et à la paresse, ou ce qui serait encore pire, que nous attachant à mener une vie sensuelle et voluptueuse, nous ne semblions avoir recherché des honneurs plutôt qu'accepter un ministère. Car le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir, et il a lavé les pieds de ses disciples, pour montrer que le devoir des maîtres est de purifier les disciples de leurs souillures et de les corriger de leurs vices. Et ne nous pressons pas trop d'objecter : A quoi servira
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d'enseigner, si celui qu'on enseigne refuse de faire ce qu'on lui dit ? Car chacun sera jugé d'après ses propres dispositions ou d'après la manière dont il aura rempli ou négligé son devoir : vous, si vous ne parlez pas ; lui, s'il dédaigne de vous écouter. C’est au sujet des maitres négligents que Salomon a énoncé cette maxime : Si la sagesse demeure cachée et que le trésor ne soit pas visible, quel fruit tirera-t-on de l'un et de l'autre (Ecclé., XX, 32). L'Evangile nous fait entendre quelque chose de semblable, lorsqu'il nous enseigne que, si quelqu'un est un sujet de scandale pour le moindre de ceux qui croient en Jésus- Christ, il vaudrait mieux pour lui qu'on lui attache au cou une de ces meules qu'un âne tourne, et qu'on le jetât dans la mer (MARC, IX, 41), au lieu d'être nuisible à d'autant plus de fidèles qu'il peut occuper dans l'Eglise une place plus élevé. "
11. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Hom. XI super Ezechielem : " Si, lorsque je dirai à l’impie, Vous serez puni de mort, vous ne lui annoncez pas ce que je vous dis, et si vous ne lui parlez pas, afin qu'il se détourne de la voie de son impiété et qu'il vive ; l'impie mourra dans son iniquité mais je vous demanderai son sang (Ezech., III, 18). Que faut-il remarquer, que faut il penser sur ces paroles, sinon que ni l'inférieur ne doit imputer sa perte à son supérieur, ni celui-ci se croire innocent, lorsque l'inférieur, faute d'entendre ou d'écouter la parole de vie, se perd lui-même par sa propre faute ? Car l'impie, par cela même qu'il est impie, mérite la mort. D'un autre côté, la sentinelle doit lui indiquer le chemin de la vie, et le reprendre de son impiété. Que s'il se tait au contraire, l'impie mourra bien dans sa propre iniquité parce que c'est son impiété même qui lui aura mérité d'être privé du bienfait des avertissements que la sentinelle lui avait donnés, mais Dieu redemandera son sang à la sentinelle elle-même, parce que celui-ci aura été son meurtrier, en l'abandonnant par son silence à son funeste sort. On voit par-là combien la liaison est étroite entre les péchés des inférieurs et ceux de leurs supérieurs, puisque, lors même que l'inférieur pèche par sa propre faute, le supérieur n’en est pas moins, par le seul fait de son silence, jugé digne de mort. Faites donc réflexion et considérez attentivement, mes frères, que si vos pasteurs ne sont pas ce qu'ils doivent être, ce sera votre condamnation à vous-mêmes, qui n'aurez pas mérité d'en avoir de plus dignes. Et si de votre côté vous ne remplissez pas vos devoirs, ce sera notre condamnation à notre tour, pour ne nous être pas opposés
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suffisamment vos désirs aveugles. Ainsi donc, en vous abstenant de faire le mal, vous nous rendez service autant qu’à vous-même ; comme de notre côté nous vous rendons service en même temps qu’à nous-même, quand nous blâmons sans détour ce qui nous déplaît en vous. Oh ! qu'il remplissait bien le devoir de la correction envers les peuples qui lui étaient confiés celui qui pouvait dire : Je suis pur et innocent du sang de vous tous, parce que je n'ai point reculé devant le devoir de vous annoncer toutes les volontés de Dieu (Act., XX, 28) ! C'est que, s'il ne les leur eût pas annoncées, il n'eût pas été pur de leur sang ; au lieu qu'il en est resté pur, parce qu'il a pris à cœur de leur annoncer toutes les volontés divines. Cette parole même de l'Apôtre est ce qui nous accuse, nous confond et nous condamne, nous qui, en vertu même de notre qualité de prêtres, ajoutons, prêtres indignes que nous sommes, à nos fautes personnelles la responsabilité de celles des autres, et nous rendons coupables d'autant de meurtres spirituels, que nous laissons mourir de nos ouailles par notre indifférence et notre silence. Si par ces paroles, Je vous redemanderai son sang, le Prophète entend parler de la mort corporelle, cela même doit augmenter nos craintes pour le cas ou nous garderions un silence coupable ; car si l'on doit être si sévèrement puni pour n'avoir pas empêché la mort d'un homme qui tôt ou tard doit mourir, que sera-ce de n'avoir pas empêché la mort d'une âme qui aurait pu vivre éternellement, pour peu que des paroles de correction lui eussent été adressées ? Mais il est encore mieux d'entendre sous ce nom de sang les pécheurs eux-mêmes. C'est ainsi qu'un illustre pénitent disait en gémissant sur certains péchés de la chair dont sa conscience lui faisait le reproche : O Dieu de mon salut, délivrez-moi du sang que j'ai répandu (Ps. L, 16). Dieu redemandera donc le sang de celui qui meurt à la sentinelle négligente, parce que le péché de l'inférieur devient le crime du supérieur, si ce dernier en est la cause par son silence. Il doit donc faire en sorte, lors même que son subordonné viendrait à mourir, de s’ôter la responsabilité de sa mort. Qu'il soit vigilant, qu'il ne prenne pas de repos, qu'il fasse au mal qui se commet une guerre de tous les instants, qu'il se conforme en tout point à ces paroles de l'Ecriture : Courez de tous côtés, hâtez-vous et réveillez votre ami : ne laissez point aller vos yeux au sommeil, et que vos paupières ne s'assoupissent point (Prov., VI, 3-4). De là vient qu'il est encore ajouté dans cet endroit de la prophétie : Que si vous annoncez la vérité à l'impie, et qu'il ne se convertisse point de
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son impiété et ne quitte point sa voie impie, il mourra dans son iniquité ; mais pour vous, vous aurez délivré votre âme (EZECH., III, 19). Car alors celui que vous avez sous votre conduite meurt sans responsabilité de votre part, puisque vous vous serez opposé à tout ce qui l'aura fait mourir. Il faut aussi observer avec attention quelles sont les choses que doit prêcher le pasteur obligé de remplir la fonction de sentinelle. Elles se réduisent à deux, la foi et les œuvres. Car il est dit ici : Si vous annoncez la vérité à l'impie, et qu'il ne se convertisse point de son impiété et ne quitte point sa voie impie, l'impiété est ici la même chose que l'incrédulité, et la voie impie la même chose que les mauvaises actions. Un pasteur doit donc prendre à tâche, premièrement d'inspirer la foi, secondement de persuader la pratique des bonnes œuvres. Mais puisque nous en sommes venus à parler du devoir d'exhorter dans les pasteurs, disons en peu de mots dans quel ordre et avec quelle prudence ils doivent parler aux peuples confiés à leurs soins. Ils doivent examiner ce qu'ils ont à dire, à qui ils ont à le dire, pourquoi, comment et avec quelle étendue ils ont à parler. Un discours qui pécherait par quelqu'un de ces endroits, manquerait d'à-propos par cela seul. Car il est écrit : Si votre offrande est régulière mais que le partage que vous en ferez ne le soit pas, vous serez tenu pour coupable (Lévit., II, 4. et suiv.). Or, pour que l'offrande soit régulière il faut que la chose qu'on fait soit bonne, et qu'elle soit faite avec une bonne intention. Mais le partage que nous en ferons ne serait pas régulier, si nous n'apportions pas dans la bonne action que nous ferions la discrétion nécessaire. Souvent les mêmes paroles qui rappellent un pécheur à son salut, font à un autre une blessure mortelle. De là vient que le même apôtre qui donne à Tite ce sévère avertissement : Reprenez avec une pleine autorité (Tite, II, 15), dit en termes plus doux à Timothée : Reprenez, suppliez, menacez, sans vous lasser jamais de les supporter et de les instruire (II Tim., IV, 2). D'où vient cette différence de langage à l’égard de ces deux disciples, sinon de ce que l’Apôtre connaissait l'un d'un caractère plus modéré, l'autre d'un zèle plus ardent ? c'est pourquoi l'Apôtre recommande au premier le zèle, et au second au contraire la patience, de peur qu'en s'emportant au-delà des justes bornes, il ne blessât plutôt que de guérir les âmes qui lui étaient confiées. "
12. S. CHRYSOSTOME, Hom. VI in epistolam ad Philippenses : " Je voudrais n'avoir à vous parler que du royaume céleste, du
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repos qu'on y goûte, de la félicité dont on y jouit, des verts pâturages qui y récréent la vue. Car c'est là que se vérifient ces paroles du Psalmiste (Ps. XXII, 2) : Il m'a conduit le long d'une onde calme et pure, et a fixé ma tenté au milieu de verts pâturages. Je voudrais vous parler de ce lieu fortuné où il n'est plus question ni de deuil, ni de douleur, ni de gémissements ; je voudrais vous faire part du plaisir d’être avec Jésus-Christ, si toutefois on peut trouver quelque expression qui puisse en donner une idée, si même ce bonheur n'est pas au-dessus de toute idée comme de toute expression. N'importe, je voudrais vous en parler de la manière dont j'en suis capable. Mais que ferais-je en cela? Ce n'est pas à celui que consume une fièvre brillante qu'il est à propos de parler d'un royaume à conquérir ; il faut avant tout lui indiquer les moyens de recouvrer la santé. Comment parler d'honneurs à celui qui est sous le coup d'une sentence infamante, ou de récompenses à celui qui n'attend que son dernier supplice ? Ce qu'il lui faut avant tout, c'est la révocation de la sentence qui le condamne, c'est la remise de la peine dont il est menacé. S'il n'obtient pas cela, à quoi lui servira le reste ? Si j'insiste sur ce point, c'est afin de vous amener plus vite à passer plus avant. Car Dieu nous menace de l'enfer, afin que personne de nous n'y tombe, et que tous nous parvenions au royaume des cieux. Nous de même, nous vous rappelons sans relâche les supplices éternels, pour vous engager à mériter plutôt l'éternelle récompense, pour pénétrer vos cœurs de crainte et les disposer ainsi à se tourner vers le bien. Ne vous offensez donc pas de la gravité de mes paroles. Car ces paroles graves que je vous adresse devront avoir pour effet de rendre vos âmes agiles à fuir le péché. Le fer est un métal pesant, un marteau est un outil fort lourd ; et néanmoins ils servent à faire des vases précieux d'or ou d'argent, et les redresser quand ils sont faussés en quelque manière : si ce marteau n'avait pas cette pesanteur, il ne pourrait pas non plus avoir cette vertu. C'est ainsi que la gravité de nos paroles a pour but de régler vos esprits. Ne cherchons donc point à en détourner l’effet, et ne redoutons pas les blessures qu'elles peuvent nous faire. De telles blessures sont faites à dessein, non de meurtrir et de déchirer, mais de redresser et de guérir. Nous savons, grâce à Dieu, la manière de mesurer nos coups pour ne pas briser le vase, mais simplement pour le polir, pour le rendre droit, pour le mettre en état de servir au souverain maître et de paraître brillant et parfait dans ses proportions au dernier jour, afin qu'il n'ait pas
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alors à être jeté dans l'étang de feu. Car si nous n'avons soin de vous purifier dans la vie présente, il faudra de toute nécessité que vous soyez purifiés dans le feu éternel, puisqu'il est vrai que le jour du Seigneur se révélera par le feu (I Cor., III, 13). Il vaut mieux sans doute pour vous souffrir quelques instants de l'amertume de nos paroles, que de ressentir pendant toute l'éternité l'ardeur de ces flammes (Cf. S. Joann. Chrys. opera, t. XI, p. 243, édit. de Montfaucon). "
13. S. AUGUSTIN, Serm. XV de verbis Domini : " Ces enfants indisciplinés qui redoutent le châtiment, me supplient en disant : Pardonnez-moi, j'ai péché. Je pardonne, et cet enfant pèche encore, Pardonnez, me dit-il de nouveau ; je lui pardonne encore. Il pèche une troisième fois : Pardonnez-moi, me dit-il. Je lui pardonne une troisième fois. Il pèche une quatrième fois : qu'il subisse donc enfin son châtiment. Mais quoi, me dit-il, est-ce soixante-dix fois que je vous ai fatigué de mes offenses ? Mais si le châtiment ne doit se montrer qu'après un si grand nombre de fautes, c'en est fait de la discipline, et le mal restant impuni règnera en toute sécurité. Que faire donc? User de remontrances, et châtier même au besoin, mais pardonner la faute, et n'en pas garder de ressentiment dans le cœur. C'est pourquoi le Seigneur a ajouté : Du fond de vos cœurs (MATTH., XVIII, 15-21), afin que, si la charité même fait un devoir d'user de sévérité, la douceur soit toujours le sentiment qui domine dans le cœur. Car quelle bonté plus grande que celle du médecin qui applique le fer et le feu sur une plaie ? Le malade pleure au moment de se voir opérer, et il se laisse opérer : on le taille, on le brûle ; il en frémit, mais il laisse faire. Ce n'est pas de la cruauté, tant s'en faut, que cette fermeté du médecin. Il sévit contre le mal, mais pour guérir le malade, puisqu'il le perdrait au contraire, s'il gardait des ménagements. Je vous donne cette instruction, mes frères pour nous exciter les uns les autres à aimer du fond du cœur ceux-mêmes de nos frères qui ont le malheur de pécher. Ne nous dépouillons point à leur égard des sentiments de charité et reprenons-les selon leur besoin, de crainte que le relâchement de la discipline n'accroisse celui des mœurs et que nous ne devenions coupables devant Dieu, pour n'avoir pas obéit à cet avis de l'Apôtre. Ce principe est incontestable, pourvu que dans son application nous sachions distinguer les temps. Si le péché est secret, exercez la correction en secret.
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Si le péché est public et notoire, reprenez en public, pour que celui qui est repris s'améliore et que tous les autres soient remplis de crainte. "
14. Le même, Serm. 16 : " Si votre frère
a péché contre vous, reprenez-le en lui parlant seul à
seul (MATTH., XVIII, 15). Si vous négligez de le faire, vous
en devenez pire. En vous offensant, il s'est blessé lui-même
; il est votre frère et vous ne soignez pas sa blessure ? Vous le
voyez périr, et vous ne vous en mettez pas en peine ? Vous vous
rendez plus coupable en gardant le silence, que lui en vous accablant d'injures.
Lorsqu'il arrive à quelqu'un de pécher contre nous, soyons
en peine moins de nous que de lui-même. Il est glorieux d'oublier
une injure ; mais en oubliant l'injure qui vous a été faite,
n'oubliez pas la blessure que votre frère s'est faite à lui-même.
Reprenez-le donc en lui parlant seul à seul, en ayant en vue sa
correction, et en lui épargnant la honte. Car peut-être la
honte le porterait-elle à vouloir justifier sa faute, et alors en
voulant le corriger, vous le rendriez pire. Reprenez-le donc en lui parlant
seul à seul. S'il vous écoute, vous aurez gagné votre
frère, puisqu'il se serait perdu si vous ne l'aviez fait. Etudiez
bien ces paroles : Si votre frère a péché contre
vous, reprenez-le en lui parlant seul à seul. Pourquoi ? Parce
qu'il a péché contre vous. Que signifie, il a péché
contre vous ? Vous savez qu'il a péché, mais comme c'est
en secret qu'il a péché contre vous, cherchez aussi le secret
pour le reprendre. Car si vous êtes le seul qui sachiez qu'il a péché
contre vous, et que vous vouliez le reprendre devant tout le monde, vous
ne le corrigez pas alors, mais vous le trahissez. Il faut donc reprendre
devant tout le monde les péchés commis devant tout le monde,
et en secret ceux qui l'ont été en secret. Distinguez les
temps, et dans l’Ecriture tout s'accorde. Voilà comment il faut
agir, et non-seulement lorsqu'il s'agit d'offenses commises contre nous-mêmes
mais encore quand il s'agit de toute autre faute commise en secret, et
dont nous sommes les seuls qui en ayons connaissance ; nous devons ne les
reprendre ou ne les relever qu'en secret, de peur qu'en rendant cette correction
publique, nous ne manquions à celui qui en est l'objet. "
Question IX
Quand est-ce que nous nous rendons coupables par connivence du péché d’autrui ?
Cela nous arrive toutes les fois que nous laissons se commettre
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impunément ou même s’aggraver un mal que nous pourrions et devrions réprimer ou punir, en usant de nos moyens ou de notre autorité.
C'est le péché que commettent les magistrats qui portent le glaive sans en faire usage, et qui ne sont ministres de Dieu que de nom, ne se mettant point en peine de réprimer ceux qui commettent le crime ou excitent des séditions. Tel fut le péché du roi Saül dans l'acte de clémence dont il usa contre la volonté de Dieu, en épargnant les Amalécites ennemis de son peuple. Ce fut aussi le péché du roi Achab, qui en faisant grâce à Bénadad, roi de Syrie, s'attira cette terrible menace du prophète : Voici ce que dit le Seigneur : Parce que vous avez laissé échapper de vos mains un homme digne de mort, votre vie répondra pour la sienne, et votre peuple pour son peuple. A ce péché peut s'appliquer encore cet avis que l'Apôtre donnait aux Corinthiens : Retranchez ce méchant du milieu de vous. Ne savez-vous pas qu'un peu de levain suffit pour aigrir toute une masse de pâte ? Purifiez-vous du vieux levain. En second lieu, ce même péché est celui que commettent les pères et mères de famille, les maîtres et les précepteurs, lorsqu'ils gâtent par des ménagements pusillanimes ceux qu'ils sont chargés d’instruire et de former, et que par leur négligence et leur mollesse ils les laissent se jeter dans un péril évident de perdre leurs âmes. C'est ainsi que nous lisons que les deux fils d'Héli achevèrent de se pervertir par l'effet de l'excessive indulgence de leur père qui porta en conséquence le terrible châtiment de sa faiblesse.
On peut encore rapporter à cet objet le péché qu'on a coutume d'appeler omission de la correction fraternelle, et qui consiste à ne pas avertir ou à ne pas reprendre quand on le doit. Car Jésus-Christ veut que nous reprenions une fois, deux fois ou même trois celui que nous voyons pécher autant de fois, afin de gagner notre frère s'il consent à nous écouter. D'autres, il est vrai, distinguent ce péché d’omission de celui de connivence, et font de l'un et de l'autre deux espèces particulières.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Romains, XIII, 3-5 : " Voulez-vous ne point craindre les puissances ? Faites le bien, et alors elles vous en loueront. - Car le prince est le ministre de Dieu pour vous pousser au bien ; mais si vous faites le mal, vous avez raison de craindre, parce que ce n'est pas en vain qu'il porte l'épée ; car il est le ministre de Dieu pour exécuter sa vengeance, en punissant celui qui fait de mauvaises actions. - Il est donc nécessaire de vous soumettre à elles, non-seulement par la crainte du châtiment, mais aussi par un devoir de conscience. "
2. Sagesse, VI, 1-11 : " La sagesse est plus estimable que la force, et l'homme prudent vaut mieux que le courageux. - Ecoutez donc, ô rois, et comprenez ; instruisez-vous, vous qui jugez la terre. - Prêtez l'oreille, vous qui gouvernez les peuples, et qui vous complaisez dans la multitude de vos sujets. - La puissance vous a été donnée par le Seigneur et la force par le Très-Haut, qui interrogera vos œuvres, et scrutera vos pensées. - Car étant les ministres de son royaume, vous n'avez pas jugé équitablement ; vous n'avez pas gardé la loi de la justice, et vous n'avez pas marché selon la volonté de Dieu. - Il vous apparaîtra soudain et dans un appareil effrayant ; car un jugement très-rigoureux est réservé à ceux qui règnent. - On fait miséricorde aux petits ; mais les puissants seront puissamment tourmentés. - Celui qui est le maître de tous ne fera acception de personne, et ne respectera la grandeur de qui que ce soit, parce qu'il a fait les grands comme les petits, et qu'il a également soin de tous. - Mais les plus puissants doivent s'attendre à subir le compte le plus rigoureux. - C'est donc à vous, ô roi, que j'adresse ces paroles, afin que vous appreniez la sagesse,
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et que l'ayant apprise, vous vous gardiez d'en déchoir. Ceux-là seront justifiés qui auront fait justement les actions de justice ; et ceux qui auront écouté mes leçons auront répondre. "
3. Psaume II, 10-13 : " Vous donc, ô rois ! comprenez maintenant ; instruisez-vous, vous qui jugez la terre. - Servez le Seigneur avec crainte, et réjouissez-vous en lui avec une sainte frayeur. - Embrassez la pure doctrine, de peur que le Seigneur ne s'irrite, et que vous ne perdiez pour toujours la véritable voie. - Dans peu sa colère s'allumera, etc. "
4. I Samuel, XV, 9-11, 20-24 : " Mais Saül, et le peuple avec lui, épargna Agag ; il réserva ce qu'il y avait de meilleur dans les troupeaux de brebis et de bœufs dans les béliers dans les meubles, les habits ; et généralement tout ce qui avait quelque valeur, ils ne voulurent point le détruire mais ils détruisirent ce qui était de vil prix. - Le Seigneur adressa alors sa parole à Samuel, et lui dit : - Je me repens d'avoir fait roi Saül, parce qu'il m'a délaissé et qu'il n'a pas exécuté mes ordres. . . - Et Saul dit à Samuel : Au contraire, j'ai écouté la voix du Seigneur ; j'ai marché dans la voie dans laquelle il m'avait envoyé, j’ai amené prisonnier Agag, roi d'Amalec, et j'ai porté le ravage dans Amalec. - Mais le peuple a pris dans le butin des brebis et des bœufs comme prémices de l'anathème pour les immoler au Seigneur votre Dieu à Galgala. - Samuel lui répondit : Sont- ce des holocaustes et des victimes que le Seigneur demande, et ne demande-t-il pas plutôt qu'on obéisse à sa voix ? L'obéissance vaut mieux qu'une offrande de victimes, et la docilité a plus de prix que la graisse des béliers. - Car la résistance et la prévarication est comme un péché de magie, et l'attache à sa propre opinion est une idolâtrie. Parce que vous avez rejeté la parole du Seigneur, le Seigneur vous rejette du poste de roi que vous occupez. - Saül à Samuel : J'ai péché en transgressant les ordres du Seigneur et vos propres instructions, pour avoir craint le peuple et obéi à ses clameurs. "
5. Juges, XX, 11-20, 43-48 : " Ainsi tout ce qu'il y avait d'Israélites en état de porter les armes s'assemblèrent contre cette ville comme un seul homme, n'ayant tous qu'un même esprit et une même résolution. - Et ils envoyèrent des ambassadeurs vers toute la tribu de Benjamin, pour leur dire : Pourquoi une action si détestable s'est-elle commise parmi vous ? - Donnez-nous les hommes de Gabaa qui se sont rendus coupables de ce crime infâme, afin qu'ils meurent et que le mal soit banni
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d’Israël. Les Benjamites ne voulurent point écouter la voix de leurs frères, les enfants d'Israël. - Et les enfants de Benjamin vinrent de toutes les villes s'assembler à Gabaa pour aller combattre contre les enfants d'Israël. - Et ils se comptèrent vingt-cinq mille hommes (26 000 selon l'hébreu) de la tribu de Benjamin, portant les armes, outre ceux de Gabaa, - qui étaient sept cents hommes, très-vaillant, sachant se battre de la main gauche comme de la droite, et si habiles à lancer des pierres avec la fronde, qu'ils auraient pu atteindre même un cheveu, sans que la pierre jetée se fût tant soit peu détournée de son but. - Les enfants d'Israël autres que ceux de Benjamin, se comptèrent de leur côté au nombre de quatre cent mille hommes, sachant tirer l'épée et tous hommes de guerre. - Et s'étant mis en marche, ils vinrent à la maison de Dieu (à Silo), où ils consultèrent le Seigneur, et lui dirent : Qui marchera à la tête de notre armée pour combattre les enfants de Benjamin ? Le Seigneur leur répondit : Que Juda marche à la tête de vous tous. - Et les enfants d'Israël se levèrent dès le point du jour, et vinrent asseoir leur camp près de Gabaa. - Et s'avançant de là pour combattre les enfants de Benjamin, ils commencèrent à assiéger la ville. . . - Il arriva que les Benjamites, ayant leurs ennemis en tête et en queue, furent taillés en pièces sans que rien arrêtât un si grand carnage, et jonchèrent toute la route de leurs cadavres jusque près de la ville de Gabaa, du côté qui regarde l'orient. - Dix-huit mille hommes furent tués en ce même lieu, tous hommes de guerre et très-vaillants. - Ce qui restait des Benjamites, voyant la défaite de leurs frères s'enfuirent dans le désert pour gagner le rocher appelé Remmon. - Mais comme ils étaient tous dispersés dans cette fuite, l'un d'un côté et l'autre d'un autre, ceux d'Israël en tuèrent cinq mille de plus. - Et s'étant avancé plus loin, ils en tuèrent encore deux mille. - Ainsi vingt-cinq mille hommes de la tribu de Benjamin furent tués en cette journée en divers endroits, tous gens de guerre et très-vaillants. De sorte que tous ceux de cette tribu qui purent s'échapper ne montaient plus qu’à six cents hommes, et ils se tinrent retranchés sur le rocher de Remmon pendant quatre mois. - Les enfants d'Israël, à la suite du combat, firent passer au fil de l'épée tout ce qui se trouva de reste dans la ville, depuis les hommes jusqu'aux bêtes et livrèrent aux flammes toutes les villes et les villages de Benjamin. "
6. Nombres, XXV, 1-8 : " Israël stationna à Sétim, et voilà
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que le peuple se mit à commettre la fornication avec les filles de Moab. - Elles appelèrent les Israélites à leurs sacrifices, et ils mangèrent de la chair des victimes qui y avaient été immolées et ils adorèrent leurs dieux. - Et Israël épousa le culte de Béelphégor ; et la colère du Seigneur s'enflamma contre Israël. - Et le Seigneur dit Moïse : Prends tous les chefs du peuple, et pends-les à des potences à la face du soleil, et la colère du Seigneur se détournera de dessus le peuple même. - Moïse dit alors aux juges d'Israël : Que chacun de vous tue ceux de ses proches qui ont épousé le culte de Béelphégor. - Et voilà qu'un des enfants d'Israël entra dans la tente, etc., - Et Phinées, fils d'Eléazar, fils lui-même du grand-prêtre Aaron, vit cela ; et il se leva du milieu de la foule, et ayant saisi un glaive, etc. ; - Et la plaie qui s'étendait sur les enfants d'Israël cessa aussitôt. "
7. I Rois, XX, 35-39, 42 : " Alors un des enfants des prophètes dit de la part du Seigneur à un de ses compagnons : Frappez-moi, etc. - Et lorsque le roi fut passé, il cria après lui et lui dit : Votre serviteur est sorti pour combattre, etc. . . - Voici ce que dit le Seigneur : Parce que vous avez laissé échapper, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
8. I Corinthiens, V, 6-13 : " Ne savez-vous pas qu'un peu de levain suffit pour aigrir toute une masse de pâte ? . . . - Mais pour vous, retranchez ce méchant du milieu de vous. "
9. Exode, XXII, 18 : " Vous ne souffrirez point ceux qui usent de sortilèges et d'enchantements. "
10. Deutéronome, XIII, 1-18 : " S'il s'élève au milieu de vous un prophète ou quelqu'un qui dise qu'il a eu une vision, et qui vous prédise quelque chose d'extraordinaire et de prodigieux, - et que ce qu'il aura prédit arrive en effet ; s'il vous dit en même temps : Allons, suivons les dieux étrangers que vous n'avez point connus jusqu’à ce jour, et servons-les ; - vous n'écouterez point les paroles de ce prophète ou de ce débiteur de songes, parce que le Seigneur votre Dieu vous éprouvera alors, pour qu'on sache si vous l'aimez de tout votre cœur et de toute votre âme. - Mettez-vous à la suite du Seigneur votre Dieu ; craignez-le, gardez ses commandements, écoutez sa voix, servez-le et attachez-vous à lui seul. - Mais que ce prophète ou cet inventeur de songes soit puni de mort, parce qu'il vous aura parlé pour vous faire déserter le culte du Seigneur votre Dieu, qui vous a tirés de l'Egypte et rachetés de la maison de servitude, et pour vous détourner de la voie que le Seigneur votre Dieu vous a
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ordonné de suivre ; et vous exterminerez ainsi le mal du milieu de vous. - Si votre frère, le fils de votre mère, ou votre fils ou votre fille, ou la femme même qui reçoit vos embrassements, ou votre ami que vous aimez comme votre vie, vous donne clandestinement ce conseil : Allons et servons les dieux étrangers que vous ignoriez, vous et vos pères, - de ces dieux de toutes les nations qui vous environnent, soit de près soit de loin, depuis un bout de la terre jusqu’à l'autre bout de la terre ; - ne vous laissez point aller à ses discours et n'y prêtez point l'oreille, et que la compassion ne vous porte point à l'épargner ou à lui donner retraite ; - mais tuez-le aussitôt, que votre main lui donne le premier coup de mort, et que votre exemple soit suivi de tout le peuple. - Qu'il périsse accablé de pierres, pour avoir cherché à vous faire déserter le culte du Seigneur votre Dieu, qui vous a tiré de l'Egypte, de ce séjour de servitude, afin que tout Israël, au bruit de ce châtiment, soit saisi de crainte, et qu'il n'y ait plus personne qui entreprenne rien de semblable. - Si dans quelqu'une des villes que le Seigneur votre Dieu vous aura donnée pour demeures, vous entendez dire à quelques-uns, - que des enfants de Bélial sont sortis du milieu de vous et ont perverti les habitants de leur ville, en leur disant : Allons, et servons les dieux étrangers que vous avez ignorés jusqu'ici ; - recherchez avec soin la vérité de la chose ; et après l'avoir connue, si vous trouvez que ce qu'on vous a dit soit certain et que cette abomination ait été commise, - vous ferez passer aussitôt au fil de l'épée les habitants de cette ville, et vous la détruirez avec tout ce qui se trouvera, jusqu'aux animaux. - Vous amasserez aussi au milieu des places publiques tous les meubles qui pourront s'y trouver, et vous les brûlerez avec la ville ; vous consumerez tout en l'honneur du Seigneur votre Dieu, en sorte que cette ville demeure éternellement ensevelie sous ses ruines, et qu'elle ne soit jamais relevée. - Et il ne demeurera rien dans vos mains de cet anathème afin que le Seigneur votre Dieu détourne de dessus vous sa colère, qu'il ait pitié de vous, et qu'il vous multiplie, comme il l'a juré à vos pères, - tant que vous écouterez la voix du Seigneur votre Dieu, et que vous observerez tous les commandements que je vous impose aujourd'hui, en faisant tout ce qui est agréable aux yeux du Seigneur votre Dieu. "
11. Ibid., XVII, 12-13 : " Mais celui qui s'enflant d'orgueil ne voudra pas obéir au commandement du pontife qui en ce
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temps-là sera le ministre du Seigneur votre Dieu, ou bien à la sentence du juge, sera puni de mort, et vous exterminerez le mal du milieu d'Israël ; - afin que tout le peuple entendant ce jugement soit saisi de crainte, et qu’à l'avenir nul ne s'enfle d'orgueil. "
12. Ibid., XVIII, 20-22 : " Si un prophète corrompu par son orgueil entreprend de parler en mon nom, et de dire des choses que je ne lui aie point ordonné de dire ; ou s'il parle au nom de dieux étrangers, il sera puni de mort. - Que si vous dites secrètement en vous-mêmes : Comment pourrai-je discerner les paroles que le Seigneur n'aura point dites ? - Voici le signe qui vous sera donné : si ce que ce prophète aura prédit au nom du Seigneur n'arrive point, ce ne sera point le Seigneur qui lui aura parlé, mais ce prophète qui l'aura inventé dans l'orgueil de son cœur, et vous ne craindrez point les menaces de ce prophète. "
13. I Rois, XVIII, 19-24, 38-40 : " Elie dit à Achab : envoyez maintenant vers Israël ; faites assembler autour de moi tout le peuple sur le Mont-Carmel les quatre cent cinquante prophètes de Baal s'y trouvent, ainsi que les quatre cents prophètes du bois sacré, que Jésabel nourrit des mets de sa table. - Achab envoya donc quérir tous les enfants d'Israël et il assembla les prophètes sur la montagne du Carmel. - Elie s'approchant de tout le peuple, lui dit : Jusqu’à quand boiterez-vous des deux côtés ? Si le Seigneur est Dieu, suivez-le ; ou si c'est Baal, suivez-le lui seul : et le peuple ne lui répondit pas un seul mot. - Elie dit encore au peuple : Je suis demeuré tout seul d'entre les prophètes du Seigneur, au lieu que les prophètes de Baal sont au nombre de quatre cent cinquante. - Qu'on nous donne deux bœufs ; qu'ils en choisissent un pour eux, et que l'ayant coupé par morceaux, ils le placent sur du bois sans mettre de feu en dessous ; et moi je prendrai l'autre bœuf, et le plaçant aussi sur du bois, je ne mettrai pas non plus de feu en dessous. - Invoquez le nom de vos dieux, et moi j'invoquerai le nom de mon Seigneur ; et que le Dieu qui déclarera par le feu qu'il aura exécuté les vœux qu'on lui aura faits soit reconnu pour le véritable Dieu. Tout le peuple répondit : Cette proposition est juste, etc. . . . . - Et le feu du Seigneur tomba, et dévora l'holocauste, le bois et les pierres, la poussière même et l'eau qui était dans la rigole autour de l'autel. - Et tout le peuple le vit, et tous se prosternèrent le visage contre terre, et dirent : C'est
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Jéhovah qui est le Dieu suprême, c'est Jéhovah qui est le véritable Dieu. - Alors Elie leur dit : Prenez les prophètes de Baal, et qu'il n'en échappe pas un seul. Et le peuple s'étant saisi d'eux, Elie les mena au torrent de Cison, où ils furent mis à mort. "
14. Ephésiens, VI, 4 : " Et vous, pères, ne provoquez point l'indignation de vos enfants contre vous ; mais ayez soin de bien les élever en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur. "
15. Hébreux, XII, 7-8 : " Car quel est l'enfant qui ne soit point châtié par son père ? - Ou si vous n'étiez point châtiés tandis que tous les autres l’ont été, vous seriez donc des bâtards, et non des enfants légitimes. "
16. Proverbes, XIII, 18-21 : " Misère et ignominie à celui qui repousse la correction ; celui au contraire qui se soumet à la réprimande sera élevé en gloire. - C'est haïr son fils que de lui épargner les verges ; celui qui aime son enfant, s'applique à le corriger. "
17. Ibid., XXII, 15, 6 : " La folie est comme liée au cœur de l'enfant ; la verge de la discipline, voila ce qui l'en détachera. - On dit d'ordinaire : Le jeune homme suit la voie qu'on lui a d'abord tracée ; dans sa vieillesse même il ne la quittera point. "
18. Ibid., XXIII, 13-14 : " N'épargnez point la correction à l'enfant ; car si vous le frappez avec la verge, il ne mourra point. - Vous le frapperez avec la verge, et vous délivrerez son âme de l'enfer. "
19. Ibid., XXIX, 15, 17, 21 : " La verge et la correction impriment la sagesse, au lieu que l'enfant abandonné à ses caprices couvrira sa mère de confusion. - Elevez bien votre fils, et il vous consolera, et il deviendra les délices de votre âme. - Celui qui nourrit délicatement son serviteur dès son enfance, le verra ensuite se révolter contre lui. "
20. Ecclésiastique, VII, 25-26 : " Avez-vous des fils ? - Elevez-les avec soin, et accoutumez-les au joug dès leur enfance. - Avez-vous des filles ? - Veillez à ce que leurs corps restent chastes, et ne leur montrez point un visage trop riant. "
21. Ibid., XXII, 3-5 : " Le fils mal instruit est la honte de son père ; la fille immodeste jettera la déconsidération sur sa personne. - La fille prudente sera un héritage pour son mari ; mais celle dont la conduite fait rougir sera le déshonneur de son père. - La femme hardie couvre de honte son père et son mari ;
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(elle ne cédera point aux scélérats), elle sera méprisée de l'un et de l'autre. "
22. Ibid., XXXI, 13 : " Celui qui aime son fils le châtie souvent, afin que celui-ci ait à s'en féliciter dans ses derniers jours, au lieu d'aller mendier aux portes des autres. Celui qui instruit son fils y trouvera son propre avantage, et il se glorifiera en lui parmi ses proches. - Celui qui enseigne son fils rendra son ennemi jaloux de son bonheur, et ses amis les heureux témoins de sa gloire. - Alors un père vient à mourir, et il semble qu'il soit encore-vivant, parce qu'il a laissé après lui un autre lui-même. - Il a vu son fils pendant sa vie, et la vue de ce fils l'a comblé de joie à sa mort : il n'a point été contristé et n'a point eu à rougir devant ses ennemis. - Car il a laissé à sa maison un fils pour la défendre contre ceux qui trameraient sa perte, et pour rendre à ses amis la reconnaissance qu'il leur doit. - Un père qui veut le bien de ses enfants pansera leurs plaies, et au moindre de leurs cris ses entrailles seront émues. - Un cheval indompté devient intraitable, et l'enfant abandonné à lui-même tombera dans tous les excès. - Soyez aux petits soins pour votre fils, et il sera pour vous un sujet d'épouvante ; jouez avec lui, et il fera votre douleur. - Ne vous amusez point à rire avec lui, de peur que vous n'ayez à en gémir, et qu’à la fin vous n'en grinciez les dents. - Ne le laissez point le maître de lui-même dans sa jeunesse, et ne l'abandonnez point à ses pensées. - Courbez sa tête sous le joug pendant qu'il est jeune, et châtiez-le avec la verge pendant qu'il est encore enfant, de peur qu'il ne s'endurcisse et ne veuille plus vous obéir, et que votre âme n'en soit percée de douleur. - Instruisez votre fils ; travaillez à le former, de peur qu'il ne vous déshonore par la turpitude de sa conduite. "
23. I Samuel, III, 11-14 : " Et le Seigneur dit à Samuel : Voilà que je vais faire dans Israël une chose dont personne ne pourra entendre parler sans que les oreilles en soient toutes étourdies. - En ce jour-là, j'effectuerai contre Héli tout ce que j'ai dit au sujet de sa maison ; je commencerai et j'achèverai. - Car je lui ai prédit que je porterais sur sa maison un jugement irrévocable à cause de son iniquité, parce qu'il a su que ses fils se conduisaient indignement, et qu'il ne les a point punis. - C'est pourquoi j'ai juré au sujet de la maison d'Héli que son iniquité ne sera jamais expié ni par des victimes, ni par des offrandes. "
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24. Ibid., IV, 16-18 : " Qu'est-il arrivé, mon fils ? - Cet homme qui lui avait apporté la nouvelle lui répondit : Israël a fui devant les Philistins ; une grande plaie s'est étendue sur le peuple ; vos deux fils Ophni et Phinées sont morts, et l'arche de Dieu a été prise. - Dès qu'il eut nommé l'arche de Dieu, Héli tomba de son siège à la renverse près de la porte, et s'étant brisé le crâne, il mourut. Au reste, il était vieux et cassé par les années et il avait jugé Israël pendant quarante ans. "
25. I Rois, I, 5-6 : " Cependant Adonias fils d'Haggith s'insurgea en disant : Ce sera moi qui règnera ; et il se fit faire des chariots, équipa des cavaliers, et cinquante hommes couraient devant lui. - Jamais son père ne l'en reprit, en lui disant : Pourquoi agis-tu ainsi ? "
26. Proverbes, IX, 7-9 : " Celui qui donne des leçons à un moqueur s'en fait mépriser et celui qui adresse ses réprimandes à un impie s'imprime une tache à lui-même ; - Ne reprenez point l'homme qui se moque de vos leçons de peur qu'il ne vous haïsse ; reprenez le sage, et il vous aimera. - Mettez le sage à l'épreuve et il deviendra encore plus sage ; enseignez le juste, et il recevra vos instructions avec avidité. "
27. Ibid., XV, 5, 10, 12 : " L'insensé se moque des avertissements de son père ; celui au contraire qui se soumet à la réprimande deviendra plus expérimenté. - L'intimation de la loi soulève les répugnances de celui qui abandonne la voie de la vie ; celui qui hait les réprimandes mourra. - L'homme corrompu n'aime point celui qui le reprend, et il ne va point consulter les sages. "
28. Proverbes, XXIV, 24-28 : " Ceux qui disent à l'impie : Tu es juste, seront maudits des peuples et détestés des tribus. - Ceux qui le reprennent en seront loués et la bénédiction descendra sur eux. "
29. Ibid., XXV, 8, 11, 12 : " Ne découvrez pas sitôt dans la querelle ce que vous avez vu de vos propres yeux, de peur qu'après avoir ôté l'honneur à votre ami, vous ne puissiez plus le réparer. - Les paroles dites à propos sont comme des pommes d'or sur un là d'argent. - La réprimande faite au sage et l'oreille docile est comme une boucle d'or et une perle brillante. "
30. Ibid., XXVII, 5-6 : " Une réprimande ouverte vaut mieux qu'une amitié qui n'ose se déclarer. - Les blessures que fait un ami valent mieux que les baisers perfides d'un ennemi. "
31. Ibid., XXVIII, 23 : " Celui qui reprend un homme trou-
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vera grâce dans la suite à ses yeux, plutôt que celui qui le trompe par des paroles flatteuses. "
32. Ibid., XXIX, 1 : " L'homme qui méprise avec une tête obstinée les avis qu'on lui donne, sera brisé tout-à-coup, et rien ne pourra le guérir. "
33. Ecclésiaste, VII, 6 : " Il vaut mieux être repris par un homme sage, que de se laisser séduire par les louanges des insensés. "
34. Ecclésiastique, VII, 23 : " Avez-vous des fils ? Elevez-les avec soin, et accoutumez-les au joug dès leur enfance. "
35. Ibid., X, 28 : " Un esclave doué de sagesse verra des hommes libres se mettre sous ses ordres ; un homme prudent et réglé ne murmurera point quand il sera repris ; celui qui manque d'instruction ne sera point considéré. "
36. Ibid., XI, 7 : " Ne blâmez personne avant de vous être bien informé ; et quand vous l'aurez fait, reprenez-le avec équité. "
37. Ibid., XIX, 13-15, 17 : " Reprenez votre ami sur ce qu'on l'accuse d’avoir fait, de peur qu'il ne soit calomnié à son insu, et qu'il ne vous dise : Je ne l'ai point fait ; ou s'il l'a fait, afin qu'il ne le fasse plus à l'avenir. - Reprenez votre ami sur ce qu'on l'accuse d'avoir dit, parce que peut-être il ne l'a point dit ; ou s'il l'a dit, afin qu'il ne le dise plus. - Reprenez votre ami, parce qu'on fait souvent de faux rapports. - Reprenez votre ami, avant de lui faire aucune menace. "
38. Ibid., XX, 1, 4 : " Ne vaut-il pas beaucoup mieux reprendre un homme, et lui donner lieu par-là d'avouer sa faute, que de garder sa colère contre lui ? - Qu'il est bon, lorsqu'on est repris, de témoigner son repentir ! Vous éviterez ainsi un péché volontaire. "
39. Psaume CXL, 5 : " Que le juste me reprenne dans sa bonté et qu'il me châtie ; mais que les parfums du pécheur ne coulent jamais sur ma tête. "
40. Colossiens, I, 28 : " C'est Jésus- Christ que nous annonçons, reprenant tous les hommes suivant leur besoin, et instruisant tous les hommes en tout genre de sagesse, afin de les rendre tous parfaits en Jésus- Christ. "
41. I Thessaloniciens, V, 12-14 : " Nous vous supplions, mes frères, de reconnaître les soins de ceux qui travaillent parmi vous, qui vous gouvernent selon le Seigneur, et qui vous avertissent de votre devoir ; et d'avoir pour eux une charité plus
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abondante à cause de l’œuvre à laquelle ils travaillent. conservez toujours la paix avec eux (entre vous, selon le grec). - Je vous prie encore, mes frères, reprenez ceux qui sont déréglés, consolez ceux qui ont l'esprit abattu, supportez les faibles, soyez patients envers tous. "
42. II Thessaloniciens, III, 14-15 : " Si quelqu'un n'obéit pas à ce que nous ordonnons par notre lettre, notez-le, et n'ayez point de commerce avec lui, afin qu'il en ait de la confusion. - Ne le traitez pas néanmoins comme un ennemi ; mais avertissez-le comme l'un de vos frères. "
43. I Timothée, V, 20 : " Reprenez devant tout le monde ceux qui pèchent, afin que les autres en conçoivent de la crainte. "
44. II Timothée, II, 24-26 : " Il ne faut pas qu'un serviteur du Seigneur s'amuse à contester ; mais il doit être modéré envers tout le monde, doué du talent d'instruire, patient, - sachant reprendre avec douceur ceux qui résistent à la vérité dans l’espérance que Dieu, pour la leur faire connaître, leur donnera un jour l'esprit de pénitence, - et que, revenant de leur égarement ils sortiront des piège du démon, qui les tient captifs pour en faire ce qu'il lui plaît. "
45. Ibid., IV, 2 : " Annoncez la parole ; pressez les hommes à temps et à contretemps ; reprenez, suppliez, menacez, sans vous lasser jamais de les tolérer et de les instruire. "
46. Tite, I, 3, 7, 9-14 : " Je vous ai laissé en Crète, afin que vous mettiez ordre de tout ce qui y reste à régler et que vous établissiez des prêtres en chaque ville, selon l'ordre que je vous en ai donné- Il faut que l'évêque, etc. - Qu'il se tienne attaché aux vérités de la foi, telles qu'on les lui a enseignées, afin qu'il soit capable d'exhorter selon la saine doctrine, et de convaincre d'erreur ceux qui la contredisent. - Car il y en a plusieurs, surtout parmi les circoncis, qui ne veulent point se soumettre, qui s'occupent à conter des fables et à séduire les âmes. - Il faut fermer la bouche à ces hommes, qui pervertissent des familles entières en enseignant, par un intérêt sordide, ce qu'on ne doit point enseigner. "
47. Ibid., II, 15 : " Prêchez ces vérités ; exhortez et reprenez avec une pleine autorité : que personne ne vous méprise. "
48. MATTHIEU, XVIII, 15-17 : " Si votre frère a péché contre vous, allez, et reprenez-le entre vous et lui seul ; s'il vous écoute, vous aurez gagné votre frère. - Mais s'il ne vous écoute point, prenez avec vous une ou deux personnes, afin que
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tout soit confirmé par l'autorité de deux
ou trois témoins. - Que s'il ne les écoute pas, dites-le
à l’Eglise ; et s'il n'écoute pas l'Eglise, qu'il soit pour
vous comme un païen et un publicain. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AMBROISE, Serm. VIII in Psalmum CXVIII, v. 2 : " Il y a une compassion qui est juste, et une autre qui ne l'est pas. Une preuve de cette vérité, c'est qu'il est écrit dans la loi au sujet d'un certain coupable : Vous n'aurez pas compassion de lui (Deut., XIX, 15, 21). Et nous lisons de même dans les livres des Rois, que Saül se rendit coupable en épargnant Agag, roi de l'armée ennemie, malgré la défense que Dieu avait faite de lui conserver la vie. Si quelqu'un faisait grâce à un brigand, en se laissant toucher par les supplications de ses enfants et par les larmes de son épouse quoiqu'il le vît disposé à reprendre le cours de ses brigandages, ne serait- ce pas livrer à la mort une foule d'innocents, que de mettre ainsi en liberté celui qui méditerait une foule d'assassinats ? S'il répugne à verser son sang ou à le tenir enchaîné, au moins pourquoi lui rendre sa pleine liberté ? Pourquoi, s'il ne peut lui ôter la volonté d’exercer ses brigandages, ne lui en ôte-t-il pas du moins la faculté, en recourant pour le faire aux moyens les plus doux ? Enfin, que placé entre un accusateur et un accusé, qui tous les deux mettent leur vie également en péril : l'accusateur, s'il ne prouve pas son accusation ; l'accusé s'il se trouve convaincu par son accusateur ; un juge, au lieu de juger selon la justice, condamne l'accusateur, malgré les preuves qu'il a fournies, par compassion pour l'accusé coupable, ou condamne l'innocent, malgré la fausseté de l'accusation, par compassion pour l'accusateur, on ne saurait appeler juste une compassion de ce genre. Car la facilité du pardon est une amorce qui invite le pécheur à pécher encore. Je dis cela, pour qu'on sache qu'il faut régler les actes de miséricorde sur la parole de Dieu et sur la raison. Si un médecin, ayant à traiter une plaie gangrenée, et obligé par les règles de son art de retrancher les parties gâtées pour conserver les parties saines, cède aux larmes du malade, et se borne à lui appliquer des palliatifs là où il devrait employer le fer, n'est-ce pas là une compassion funeste, que celle qui, pour épargner une douleur d'un instant ou une incision légère perd le corps tout entier et tarit les sources de la vie ? "
2. ORIGENE, Hom. IX in Jeremiam : " Un juge doit avoir en
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vue de procurer la tranquillité à la ville et la paix au peuple dont il a le gouvernement. Si l'on présente à son tribunal un brigand d'une taille avantageuse, parvenu à toute la force de son âge, et qu'en même temps se présentent aussi sa mère, les cheveux épars, pour supplier qu'on ait pitié de sa vieillesse, et son épouse, les yeux en larmes, pour demander qu'on lui conserve la vie de son époux et ses jeunes enfants à la veille de devenir orphelins, que fera le juge ? Aura-t-il, ou non, pitié du brigand ? Que réclame en ce cas l'intérêt commun ? Si le juge se laisse toucher, le meurtrier se couvrira bientôt de nouveaux forfaits ; si au contraire il se montre inflexible, un homme mourra, mais tout le peuple sera sauvé. De même, si Dieu épargnait toujours les pécheurs, et que par compassion pour eux il ne les punît pas, comme leurs péchés le mériteraient, qui ne s'en autoriserait pour pécher davantage ? Quel est le méchant qui, n'étant plus retenu comme on l'est présentement par la crainte des supplices, ne profiterait de toutes les occasions qui se présenteraient à lui pour assouvir ses passions et se précipiter dans le vice ? Nous pouvons en acquérir la preuve par ce qui se passe dans l’Eglise. Que quelqu'un vienne à pécher et qu'après cela il demande la communion ; si on lui accorde ce qu'il demande, cette indulgence tourne au détriment de tous les autres, et la barrière est ouverte à tous les désordres. Si au contraire le juge, consultant la prudence, et ne se laissant point amollir par la pitié, pas plus qu'il n'obéit à une dureté impitoyable, mais agissant dans l'intérêt de tous sans animosité contre aucun, voit la ruine du peuple entier dans le pardon qu'il accorderait à un seul, il n'est pas douteux qu'il ne mette hors de l’Eglise ce seul coupable, pour procurer le salut de tous les autres. Observez maintenant un médecin : s'il s'abstient de couper dans une plaie ce qui a besoin d'être coupée, ou d'y brûler ce qui a besoin d'être brûlé pour épargner les douleurs qui sont la suite de semblables opérations, n’est-il pas vrai que le mal augmentera, et que la contagion gagnera de plus en plus ? Si au contraire le médecin ne craint pas de porter le fer et le feu dans la plaie, il prendra en cela les intérêts de son malade, tout en ayant l'air de le traiter sans pitié. De même que l'aveuglement du peuple juif a profité au salut de tous les gentils, ainsi le châtiment infligé à quelques-uns sert au salut de tous les autres. "
3. S. JEROME, Epist. ad Riparium adversùs Vigilantium : " Je m'étonne que le saint évêque, dans le diocèse duquel on dit qu'il
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(Vigilance) exerce les fonctions de prêtre, souffre ses emportements, qu'il ne se serve pas de la verge apostolique, et de la verge de fer, pour briser ce vase inutile, et qu'il ne livre pas cet homme à la mort de la chair, afin de sauver son âme (I Cor., V, 6). Qu'il se rappelle cette parole : Quand tu voyais un larron, tu courais avec lui, et tu te mettais de part avec les adultères (Ps. XLIX, 18) ; et ces autres : Dès le matin, j'exterminais tous les pécheurs de la terre, afin de bannir de la cité du Seigneur tous ceux qui commettent l'iniquité (C, 8) ; et ces autres encore : N'ai- je pas haï, Seigneur, ceux qui vous haïssaient, et n'ai- je pas séché de douleur à la vue de vos ennemis ? Je les haïssais d'une haine parfaite (Ps. CXXXVIII, 20). "
" Je vous confesserai ma douleur : je ne puis de sang-froid entendre un tel sacrilège. Car j'ai lu tout ce qui est dit du poignard de Phinées et de l'austérité d’Elie, du zèle de Simon le Chananéen de la sévérité de Pierre faisant tomber morts à ses pieds Ananie et Saphire, et de la fermeté de Paul qui frappa de cécité à tout jamais le magicien Elymas, parce qu'il résistait aux desseins du Seigneur. Ce n'est pas être cruel que de prendre les intérêts de Dieu. De là vient qu'il est dit dans la loi : Si ton frère ou ton ami, ou ta femme qui repose sur ton sein, voulait te détourner de la vérité, que ta main soit sur eux, et tu ôteras le mal du milieu d'Israël (Deut., XIII, 6-8). "
4. S. AUGUSTIN, in Ps. L : " Pour vous, mes frères, tâchez dans ce déluge de maux, et dans cette détestable corruption de mœurs de régler chrétiennement vos familles : élever bien vos enfants ; conduisez sagement vos maisons. Comme il est de notre devoir de vous instruire ici dans l'église, il est du vôtre aussi de veiller sur vos familles, pour qu'un jour vous puissiez rendre un bon compte à Dieu de ceux qui vous sont assujettis. Dieu aime la règle, il aime l'ordre. C'est une indulgence bien fausse et bien criminelle, que celle qui consiste à lâcher la bride aux péchés. C’est bien sans avantage véritable, c’est bien à son grand malheur qu'un fils libertin trouve de la douceur dans son père pour trouver plus tard en Dieu une juste sévérité. Et alors ce ne sera pas seulement ce fils déréglé qui en éprouvera les effets ; ce sera aussi ce père trop indulgent qui l'aura perdu par sa mollesse. Car de quoi lui aura-t-il servi de n'avoir pas péché par lui-même, de n'être pas tombé dans les mêmes crimes que son fils, s'il n'a pas eu soin en même temps d'arrêter son fils, et de réprimer ses désordre ? Veut-il par cette douceur faire croire à son fils qu'il
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ferait les mêmes choses que lui-même si sa vieillesse ne lui en ôtait la force ? Si le péché ne vous déplaît pas dans votre fils, c'est qu'il vous plairait dans vous-même et ce n'est que la vigueur de l'âge qui vous manque, et non pas le goût du crime. Mais surtout, mes frères, veillez sur ceux de vos enfants qui sont fidèles, et que votre foi a amené aux eaux sacrées du baptême. Peut -être que votre fils déréglé méprisera vos avis, ou vos réprimandes ou vos châtiments ; pour vous, remplissez le devoir de votre état, Dieu lui fera rendre compte du sien (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. II, p. 678-679). "
5. Le même, Serm. XV de verbis Domini, comme plus haut, question VIII, témoignage 13, page 68.
6. S. CHRYSOSTOME, Orat. I (al. 2) contra Judæo : " De même que nous reprochons aux Juifs d'être violateurs de la loi, de même et à bien plus forte raison nous devons vous trouver coupables, si vous faites société avec les violateurs de la loi, ou si, pouvant vous opposer à ce qu'elle soit violée vous ne vous y opposez pas cependant. Car ne me dites pas : Qu'ai- je de commun avec cette personne ? C'est un étranger et un inconnu. Du moment où c'est un fidèle, un homme qui participe avec vous aux mêmes mystères, qui se réunit avec vous dans la même église, il doit vous être plus cher qu'un frère ou que tout autre parent. De même donc que non-seulement les voleurs, mais aussi ceux qui peuvent empêcher le vol et qui ne l’empêchent pas, sont condamnés à subir le même châtiment, ainsi non-seulement ceux qui commettent l'impiété, mais encore ceux qui peuvent la réprimer et qui, soit par faiblesse, soit par lâcheté, ne la réprime pas, doivent être également punis. Celui qui enfouit son talent, le rendit assurément tout entier à son maître ; il n'en fut pas moins puni, pour ne l'avoir pas fait valoir (MATTH., XXV, 28). Vous de même, quand vous vous conserveriez pur de tout vice, si vous ne faites pas en outre valoir votre talent, si vous ne rappelez pas dans la voie du salut ceux de vos frères qui se perdent, vous vous perdrez avec eux (Cf. D. Joan. Chrysost. contra Judæos, homil. VI, græcè nunc primùm editæ, Augustæ, 1602, p. 70-71). "
7. S. AUGUSTIN, Lib. II Retractat., c. 5 : " J'ai composé deux livres qui ont pour titre commun : Contre le parti de Donat. J'ai dit dans le premier de ces livres, que je n'aimais pas à voir
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ramener les schismatiques à l'unité par des moyens violents et avec l'aide de la puissance séculière. Tel était en effet mon sentiment à cette époque, parce que je n'avais pas encore l'expérience des excès auxquels se portent ces fanatiques quand on les laisse impunis, ni des heureux changements que peut opérer en eux l'exact maintien de la discipline. "
8. Le même, Epist. 48 (al. 93) ad Vincentium : " On ne trouve point dans l’Evangile, dites-vous, ni dans les écrits des apôtres, qu'ils aient jamais eu recours aux rois de la terre contre les ennemis de l’Eglise. Il est vrai ; mais c'est parce que cette prophétie : Ecoutez, rois de la terre, instruisez-vous, vous qui jugez les peuples, et servez le Seigneur avec crainte (Ps. II, 10-11), n'était pas encore accomplie. C'était encore le temps de ce qui est marqué au commencement de ce même psaume : Pourquoi les nations frémissent-elles ? Pourquoi les peuples forment-ils de vains desseins ? Les rois et les princes de la terre se sont assemblés, et ont comploté contre le Seigneur et contre son Christ (Ps. II, 1-2). Mais si, comme nous n'en saurions douter, les événements que nous rapportent les prophètes sont des figures des choses à venir, nous voyons dans un même roi la figure de l'état où se trouvait l'Eglise au temps des apôtres, et de celui ou elle est présentement. Quand Nabuchodonosor forçait les saints et les justes d'adorer son idole, sous peine d’être jeté dans la fournaise, il figurait ce qui s'est passé au temps des apôtres et des martyrs ; et quand, après avoir reconnu le vrai Dieu, il ordonna que tous ceux à qui il arriverait, dans toute l'étendue de son royaume, de blasphémer le Dieu de Sidrach, de Misach et d’Abdenago, seraient punis à proportion de la grandeur de ce crime, il figurait ce qui se passe aujourd'hui. Ainsi les premiers temps de ce roi représentaient les temps de ces rois infidèles, sous qui les chrétiens ont souffert ce que les impies seuls peuvent mériter et la fin de son règne représente le temps des princes devenus chrétiens sous qui les impies souffrent ce qu'on faisait autrefois souffrir aux chrétiens. . . "
" Nous pouvons vous produire non-seulement des particuliers, mais des villes entières, qui, de donatistes qu'elles étaient autrefois, sont catholiques aujourd'hui, et détestent le crime diabolique de leur ancienne séparation. Or, elles ne seraient point catholiques sans ces lois qui vous irritent, et qui ont été portées par les empereurs, à commencer par Constantin devant qui les auteurs de votre schisme avaient accusé Cécilien, jusqu’à ses
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derniers successeurs aujourd'hui sur le trône, qui ont confirmé le jugement de celui que vous aviez vous-mêmes pris pour juge, en préférant son tribunal à celui des évêques. "
" C'est par ces exemples que mes collègues m'ont fait revenir à leur sentiment. Car ma pensée était autrefois qu'on ne devait forcer personne à revenir à l'unité de Jésus- Christ ; qu'il ne fallait point employer pour cela d'autres armes que les discours et les raisons, et qu'autrement, de ceux que nous connaissions jusque-là pour hérétiques déclarés, nous ne réussirions à faire que de faux catholiques. Mais après avoir résisté à leurs raisonnements, je me suis enfin rendu à l'expérience : on m'a représenté l'exemple de la ville où je suis, qui était autrefois toute donatiste, et que la crainte des lois des empereurs a fait revenir à l'unité catholique ; de sorte qu’à voir la manière dont elle déteste actuellement votre opiniâtreté, on ne croirait pas qu'elle eût jamais partagé le même entêtement. On m'a cité beaucoup d'autres villes ou a été tenu le même résultat. . . "
" Pourquoi les rois de la terre qui servent Jésus-Christ ne feraient-ils pas des lois pour Jésus- Christ ? "
Saint Augustin avait dit dès le début de cette lettre à Vincent : " Les donatistes étant aussi turbulents qu'ils le sont, je suis persuadé qu'il est fort à propos de les réprimer par l'autorité des puissances établies de Dieu. Car nous avons la joie d'en voir plusieurs revenir par ce moyen à l'unité catholique. . . . . "
" Si un homme voyait son ennemi prêt à se précipiter, par le transport d'une fièvre chaude, ne serait-ce pas lui rendre le mal pour le mal, que de le laisser faire, plutôt que de l'en empêcher en le liant au besoin ? Pourtant ce frénétique ne prendrait cet office de bonté et de charité que pour un outrage et pour l'effet de la haine ; mais s'il revenait en santé, il verrait bien que plus ce prétendu ennemi lui aurait fait violence, plus il lui aurait rendu service. . . . . "
" En mettant en usage tout à la fois la terreur et l'instruction, afin que l'une rompe les chaîne de l'habitude, tandis que l'autre dissipe les ténèbres de l'erreur, on a la consolation que nous éprouvons présentement d’en voir un grand nombre rentrer dans la voie du salut, et rendre grâces à Dieu en le bénissant avec nous, de ce qu'ayant, selon sa promesse, fait plier les rois de la terre sous le joug de Jésus-Christ, il se sert d'eux pour guérir les malades, et faire marcher les faibles et les boiteux. "
" Tous ceux qui nous épargnent ne sont pas pour cela nos
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amis, pas plus que tous ceux qui nous châtient ne sont nos ennemis. Les blessures que nous fait un ami valent mieux que les caresses affectées d’un ennemi (Prov., XXVII, 6). La sévérité de ceux qui nous aiment nous est plus salutaire que la douceur de ceux qui nous trompent (Cf. Les Lettres de saint Augustin, t. II, pag. 311, etc.). "
9. Le même, Epist. L (al. 185) ad Bonifacium : " Le médecin paraît importun au frénétique qu'il lie, et le père à un enfant indocile qu'il châtie. Ce n'est néanmoins que l'amour qui fait agir l'un et l'autre ; et ce serait une fausse douceur et une véritable cruauté à l'un et à l'autre, que de laisser périr l’un son malade, et l'autre son fils, plutôt que de leur faire de la peine. . . "
" Comme les lois que les princes font contre la vérité pour le mensonge servent à éprouver les gens de bien, et à leur faire mériter des couronnes, quand ces derniers soutiennent la bonne cause jusqu'au bout ; de même, celles que les princes font pour la vérité contre le mensonge servent à réprimer les entreprises de ceux qui sont dans l'erreur, et à ramener ceux d'entre eux qui ont encore quelque reste de sens et de droiture. Ainsi, tandis que ceux qui refusent d'obéir aux lois que les puissances font contre la vérité de Dieu acquièrent une grande récompense, ceux qui refusent d'obéir à celles qu'elles font pour cette même vérité, s'attirent de terribles supplices. Aussi voyons-nous que l’Ecriture blâme les princes qui ont laissé subsister les institutions contraires à la loi de Dieu, et qu'elle loue au contraire ceux qui ont fait servir leur autorité à les prohiber et à les abolir. "
" Ceux qui refusèrent d'obéir aux lois sacrilèges par lesquelles Nabuchodonosor, encore idolâtre, ordonna qu'on adorât l'idole qu'il avait fait dresser, signalèrent leur piété et leur foi. Mais ensuite ce même roi, converti par un miracle de la toute-puissance de Dieu, ordonna, par une loi louable et sainte, que quiconque blasphémerait le vrai Dieu, c'est-à-dire le Dieu de Sidrach, de Misach et d'Abdenago, périrait avec toute sa maison. . . "
" Les vrais martyrs sont ceux dont Jésus-Christ parle quand il dit : Heureux ceux qui souffrent persécution pour la justice. Ceux donc qui souffrent persécution pour l'iniquité, et pour un schisme sacrilège qui divise l'unité de Jésus-Christ, n'ont point de part à cette gloire, mais ceux-là seulement qui souffrent pour la justice. Car Agar n'a-t-elle pas été persécutée par Sara ? Cependant celle qui persécutait était sainte, et celle qui souffrait
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persécution était méchante. . . . Quand ces gens-là, pour nous empêcher de recourir aux justes lois des puissances contre les attentats de leur impiété, viennent nous dire que les apôtres n'ont jamais rien demandé de semblable aux rois de la terre, ils ne prennent pas garde que l'état de l'Eglise était bien différent de ce qu'il est aujourd'hui, et que chaque chose vient en son temps. Car, où étaient alors les princes qui crussent en Jésus-Christ, et qui fussent en état de faire des lois pour son service et en faveur de la piété contre l'impiété ? On en était encore à l'accomplissement de ce qui est exprimé par cette parole du Prophète : Pourquoi les nations se soulèvent-elles en frémissant ? Pourquoi forment-elles de vains complots ? Pourquoi les rois de la terre se sont-ils levés et délibèrent-ils ensemble contre l’Eternel et contre son Christ ? Et le temps de ce qui suit un peu plus bas dans le même psaume : Comprenez, rois de la terre ; ouvrez les yeux, vous qui jugez le monde ; servez le Seigneur avec crainte, et réjouissez-vous en lui avec tremblement, n'était pas encore arrivé. Or, comment est-ce que les rois servent le Seigneur avec crainte, sinon en défendant et en punissant avec une sainte sévérité ce qui se fait contre ses lois ? Car autre est le service qu'ils rendent à Dieu comme hommes, et autre celui qu'ils lui rendent comme rois. En tant qu'hommes, ils le servent en vivant en vrais fidèles mais en tant que rois, ils ne le servent qu'en établissant et en faisant observer avec fermeté des lois justes, qui tendent à faire accomplir le bien, et à empêcher le mal. C'est ainsi qu’Ezéchiel servit Dieu en abattant les temples des idoles et les bois qui leur étaient consacrés et en démolissant les autels qu'on leur avait bâti sur des montagnes contre la défense de Dieu. C'est ainsi que Josias l'a servi, en se conduisant de même. C'est ainsi que le roi de Ninive l'a servi, en forçant tout son peuple à se mettre en devoir de l'apaiser. C'est ainsi que Darius l'a servi, en autorisant Daniel à briser les idoles, et en faisant jeter aux lions les ennemis de ce saint prophète. C'est ainsi que Nabuchodonosor l'a servi, en défendant, comme nous l'avons vu, et sous des peines terribles, de blasphémer le Dieu de Daniel. Les rois ne servent donc Dieu, en tant que rois, que lorsqu'ils font pour son service, ce qu'il n'y a que des rois qui puissent faire. "
" Comme donc, au temps des apôtres, les rois, bien loin de servir le Seigneur, formaient encore de vains projets contre lui et contre son Christ, afin que tout ce qui avait été prédit par les prophètes fût accompli, leurs lois, au lieu de défendre l’impiété
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ne pouvaient que porter les hommes à la commettre. Car ainsi le demandait l'ordre des temps, et que les Juifs, en croyant rendre service à Dieu, missent à mort ceux qui prêchaient Jésus-Christ, selon la prédiction de Jésus-Christ même, et que les nations se soulevassent contre les chrétiens et que la patience des martyrs triomphât des uns et des autres. Mais présentement que cette prédiction du Prophète : Tous les rois de la terre adoreront, et toutes les nations le serviront, a commencé à s'accomplir, ne faudrait-il pas avoir perdu le sens pour dire aux princes : " Ne vous mettez pas en peine si l'on attaque ou si l'on révère dans votre royaume l’Eglise de celui que vous adorez ? Quoi ! ils auront soin de faire vivre les hommes selon les lois de l’honnêteté et de la pudeur, sans que personne ose leur dire que cela ne les regarde pas, et on osera leur dire que ce n'est pas eux à prendre connaissance si dans leurs états on suit les lois de la véritable religion, ou si l'on s'abandonne à l'impiété et au sacrilège ? Eh ! si, dès là que Dieu a donné à l'homme le libre arbitre, le sacrilège doit lui être permis, pourquoi punira-t-on l'adultère ? L'âme qui viole la fidélité qu’elle doit à son Dieu est-elle donc moins criminelle que la femme qui viole celle qu'elle doit à son mari ? Et, quoiqu'on doive punir moins sévèrement les hommes des péchés qu'ils commettent par ignorance contre la religion, faut-il pour cela la leur laisser renverser impunément ? "
" Il vaut mieux sans doute porter les hommes au culte de Dieu par des instructions et des remontrances, que de les y contraindre par le châtiment ou par la crainte. Mais, bien que ceux qui se laissent mener par ces voies de douceur vaillent mieux que les autres à qui ces moyens ne suffisent pas, on ne doit pas pour cela abandonner ces derniers à eux-mêmes, car l'expérience nous a appris et nous fait voir encore tous les jours qu'il a été utile et salutaire à plusieurs d'être forcés par la crainte et même par le châtiment, et que c'est ce qui les a poussés à s'instruire, ou même à suivre et à pratiquer ce que la parole de vérité leur avait déjà appris. "
Puis donc que Jésus-Christ même a fait violence à saint Paul pour le forcer à croire, que ces gens-ci ne disent plus, comme ils font : Il est libre à chacun de croire ou de ne pas croire ; qu'ils considèrent ce qui s'est passe dans ce grand apôtre, que Jésus-Christ n’a instruit qu'après l'avoir forcé et qu'il n'a consolé qu'après l'avoir frappé. Il est même remarquable que ce même apôtre, qu’un châtiment sensible et corporel a forcé d'em-
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brasser et de suivre l'Evangile, a plus fait lui seul, pour ce même Evangile, que tous ceux qui n'avaient été appelés que par l'attrait des paroles de Jésus-Christ et que sa charité est devenue d'autant plus parfaite, et a d'autant mieux chassé la crainte, que la crainte qui l'avait forcé et qui avait servi d'entrée à la charité, avait été plus vive et plus forte. "
" Pourquoi donc l’Eglise n'emploierait-elle pas la force pour faire rentrer dans son sein les enfants qu'elle a perdus, puisque ces malheureux enfants ne craignent point de l'employer pour faire périr les autres ? "
" Maximien, évêque catholique de Bagaye, demanda justice et protection à l'empereur, non tant pour se venger, que pour mettre son église à l'abri de pareilles insultes ; et s'il y avait manqué, on aurait eu plutôt sujet de l'accuser de négligence que de le louer d'une patience semblable. Et ne voyons-nous pas que saint Paul pour l'intérêt de l'Eglise, plutôt que pour la conservation de sa propre vie, fit savoir au tribun le complot que les Juifs avaient formé de l'assassiner, ce qui obligea le tribun de le conduire avec bonne escorte, de crainte qu'ils ne lui eussent dressé des embûches dans le chemin ? Ne voyons-nous pas que le même apôtre dans une autre occasion, eut recours aux lois romaines qui défendaient de mettre à la question et de flageller un citoyen romain, et qu'en déclarant qu'il l'était, il se garantit de l'outrage qu'on voulait lui faire ? Ne voyons-nous pas enfin que, pour éviter d’être remis entre les mains des Juifs, qui voulaient le faire mourir, il implora la protection de l'empereur, tout infidèle qu'il était celui-ci : montrant assez par-là aux ministres de Jésus-Christ ce qu'ils auraient à faire dans les besoins de l'Eglise, lorsqu'ils auraient des empereurs chrétiens ? "
" Qu'ils se souviennent qu’Absalom ayant été tué malgré tout le soin que David avait pris de recommander aux siens de lui sauver la vie, afin d'avoir lieu d'exercer envers lui sa clémence paternelle, s'il fût venu à résipiscence et la maison de David n'ayant pu avoir la paix que par la mort de ce fils ingrat qui lui faisait la guerre, ce prince si débonnaire ne pouvait plus faire autrement que de pleurer la perte de son fils, et d'adoucir néanmoins sa douleur en voyant la paix rétablie dans son royaume. Il en est de même de l'Eglise catholique. "
" La multiplication des maux oblige à multiplier les remèdes (Cf. GUILLON, t. XXII, p. 315)
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10. Le même, Epist. CCIV (al. 173) ad Donatum presbyterum Donatistam : " Vous trouvez mauvais qu'on vous fasse violence pour vous faire rentrer dans la voie du salut ; mais avez-vous oublié avec quelle violence vous avez entraîné un grand nombre des nôtres dans l'erreur ? "
" On sait bien que, comme ce n'est que la mauvaise volonté qui damne les hommes, il n'y a que la bonne volonté qui puisse les sauver ; mais l'amour que nous devons avoir pour eux nous permet-il de les abandonner à leur mauvaise volonté ? N'est- ce pas une cruauté que de la laisser sans frein, et ne doit-on pas, autant qu'on peut, empêche les hommes de faire le mal, et les forcer à faire le bien ? "
" S'il faut toujours abandonner la mauvaise volonté à sa liberté naturelle, pourquoi tant de fléau et tant d'aiguillons si sensibles pour forcer les Israélites, malgré leurs murmures et leur opiniâtreté, à pousser leur marche jusqu’à la terre promise ? "
" Vous ne prenez pas garde qu'autrefois l'Eglise était comme une plante qui ne fait encore que de sortir de terre, et qu'on ne voyait pas en elle jusque-là l'accomplissement de cette prophétie : Tous les rois de la terre l'adoreront, et toutes les nations le serviront. C'est ce qui s'accomplit de jour en jour à vos yeux, et à mesure que l'Eglise va croissant, elle agit toujours avec plus d'autorité ; elle ne se contente pas de convier à bien faire, elle y force. Voilà ce que Jésus-Christ a voulu nous faire entendre dans un temps ou, sans que sa puissance lui fît défaut, il a voulu d'abord signaler son humilité. Et c'est ce qu'il nous fait voir clairement dans cette parabole (Lue, XIV) du festin, où après que les conviés eurent refusé de venir, le maître dit à un de ses serviteurs : Allez dans les rues et dans les places de la ville, et faites entrer ici les pauvres, les estropiés et les aveugles ; après quoi celui qui avait reçu cet ordre du maître étant revenu lui dire que tout était exécuté et qu'il y avait encore des places vides, le maître lui dit : Allez le long des haies et des grands chemins, et forcez à entrer tous ceux que vous rencontrerez, afin que ma maison se remplisse. Remarquez donc que, quand il n'est question que des premiers, Jésus-Christ ne dit pas, forcez-les d'entrer, mais, faites-les entrer ; parce que ceux-là marquent les commencements de l'Eglise, qui devait s'élever peu à peu, jusqu’à ce qu'elle en vint au point de pouvoir user de contrainte. Et c'est parce qu'après qu'elle se serait affermie, étendue et fortifiée, il serait temps de mettre la
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force même en usage pour faire entrer les hommes au festin de l'éternité, que l’Evangile dit que le père de famille, averti que ce qu'il avait commandé était fait, et qu'il y avait encore de la place de reste, ordonna qu'on allât le long des haies et des grands chemins, et qu'on forçât d'entrer tous ceux qu'on rencontrerait. "
" Comme donc vous êtes tout hérissés d’épines pour ainsi dire, par les cruauté et les violences que vous exercez contre les nôtres, vous êtes de ceux que l'on trouve dans les haies, et qu'on force d'entrer (Cf. Les Lettres de saint Augustin, t. V, p. 5-18). "
11. Le même, Tract. XI in Evangelium Joannis : " Quand il plaît à Dieu d'exciter le zèle des puissances contre les hérétiques et les schismatiques qui déchirent l'Eglise, qui blasphèment contre le baptême de Jésus-Christ et l'anéantissent en le réitérant, cette conduite ne doit surprendre personne : c’est Agar que Dieu livra à Sara pour en être châtié (Gen., XVI, 8-9). Qu'Agar rentre donc en elle-même et que, suivant le conseil que l'ange lui donna lorsqu'elle se plaignit à lui dans le désert, elle s'humilie et retourne à sa maîtresse car Dieu ne lui fait infliger des châtiments que pour la faire revenir. Et plaise à Dieu qu'elle prenne ce parti ! Car si elle le prend, ses enfants seront dans le cas de ceux que Jacob eut de ses servantes, et ils partageront l'héritage de leur père avec leurs autres frères, comme firent les enfants de Jacob. "
" Y a-t-il de quoi s'étonner que les puissances temporelles qui font profession de reconnaître Jésus- Christ s’élèvent contre ces brouillons détestables qui voudraient détruire l’Eglise après s'en être séparé ? N'y aurait-il pas au contraire sujet de craindre à ceux qui sont dépositaire ici-bas du pouvoir de Dieu, pour le jour où ils auront à lui en rendre compte, s'ils n'en faisaient pas un semblable usage, puisque le devoir des princes chrétiens est de s'appliquer à maintenir en paix pendant leur règne l'Eglise leur mère, qui les a engendrés selon l'esprit ? Nous lisons dans les prophéties de Daniel (III, 91), que Nabuchodonosor ayant vu les trois jeunes hébreux dans la fournaise chanter les louanges de Dieu du milieu des flammes, sans qu'elles leur fissent de mal, s'en étonna d’abord ; et que bientôt, frappé de la grandeur de ce prodige, et y découvrant la majesté de Dieu qui les protégeait, il dit en lui-même : Je ferai un édit par lequel je défendrai à
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toutes les nations assujetties à mon empire de blasphémer contre le Dieu de Sidrach, de Misach et d’Abdenago, sous peine pour ceux qui y contreviendront de la perte de leur vie, et de la destruction entière de leurs maisons (DAN., III, 9). Que si ce roi, qui n'était ni juif, ni circoncis, et qui était assez impie pour se faire adorer, a fait une loi si sévère pour empêcher qu'on ne blasphémât contre le Dieu d'Israël, parce qu'il avait été assez puissant pour protéger ces trois jeunes hébreux dans la fournaise, peut-on trouver mauvais que des rois chrétiens fassent des lois sévères pour empêcher qu'on n'anéantisse le baptême de Jésus-Christ, qui non-seulement a garanti les trois jeunes hébreux du feu de la fournaise, mais les a délivré des flammes éternelles aussi bien que les rois et les peuples qu'il a rachetés. Car c'est par lui, mes frères, que ces trois jeunes hébreux ont été délivrés du feu de la fournaise. D'où vient donc qu'il a laissé périr les enfants Machabées ? Est-ce qu'il n'était pas leur Dieu et leur protecteur, aussi bien que celui de ces trois jeunes hommes ? Il l'était sans doute ; aussi les a-t-il délivrés par une protection moins visible, mais non moins puissante, en leur donnant la force de se laisser brûler, plutôt que de rien faire contre les prescriptions de la loi judaïque. Et s'il a délivré les trois jeunes hommes par un miracle évident, il a couronné invisiblement les Machabées. Autre miracle qui marque d'autant mieux la puissance de celui qui l'opère, que le bonheur d'être soustrait aux flammes éternelles l’emporte sur celui d’échapper aux bûchers qu'allument des tyrans. Si donc, parce que Dieu avait délivré des flammes ces trois jeunes hébreux, le roi Nabuchodonosor s'est cru obligé de lui rendre gloire, en publiant un édit dans son empire, qui condamnait à mort tous ceux qui oseraient blasphémer contre le Dieu de Sidrach, de Misach et d'Abdenago, et à la destruction leurs maisons entières ; comment des rois chrétiens, qui, sans avoir besoin d'exemples étrangers, reconnaissent avoir été eux-mêmes délivrés par Jésus-Christ des flammes éternelles, bien plus à redouter que celles qui épargnèrent les trois hébreux, verraient-ils sans s'émouvoir l'outrage que font à leur Dieu ces rebaptisants, lorsque le chassant, pour ainsi dire, des cœurs dont il est le maître, ils contraignent des chrétiens à dire qu'ils ne sont pas chrétiens ? Il leur plaît de persécuter leurs frères, et ils trouvent mauvais qu'on leur fasse essuyer le même traitement. Et cependant, notez la différence du mal qu'ils font aux catholiques, d'avec celui qu'on leur fait si justement souffrir. Ils tuent les
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âmes, et la peine qu'on leur inflige n'affecte que leurs corps ; ils donnent la mort éternelle à ceux qu'ils séduisent et ils n'ont à se plaindre eux-mêmes que de supplices temporels dont on les menace (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, tome Ier, p. 386-390). "
12. S. BERNARD, Serm. LXVI super Cantica canticorum : " Il vaut assurément beaucoup mieux que les hérétiques soient réprimés par le glaive, je veux dire par celui qui a droit de le porter, plutôt que de leur laisser répandre au loin leur erreur. Car le prince est le ministre de Dieu pour exécuter ses vengeances, en punissant celui qui fait de mauvaises actions (Rom, XII, 4). Quelques-uns s'étonnaient de voir (les hérétiques condamnés) marcher à la mort, non-seulement sans résistance, mais même avec joie ; ceux qui s'en étonnent ne considèrent pas assez quelle est la puissance du démon non-seulement sur les corps, mais même sur les âmes dont il s'est une fois emparé. Ne faut-il pas plus de résolution pour se donner la mort à soi-même que pour la recevoir d'un autre sans murmure ? Or, une expérience assez fréquente nous fait voir que le démon a pu inspirer cette résolution à plusieurs, qui ont mis fin à leurs jours, ou en se jetant à l'eau, ou en s'étranglant eux-mêmes. Enfin, qui ne sait que Judas s'est pendu, sans doute parce que le démon lui avait inspiré de le faire ? Je regarde cependant comme un acte plus forcené et plus étonnant celui qu'il lui avait inspiré de livrer son divin maître que celui dont il s'agit ici de s'être pendu lui-même. Il n'y a donc point à établir de similitude entre la constance des martyrs et l'obstination de ces hérétiques, parce que le mépris de la mort était l’effet de la piété dans les premiers, et de l'endurcissement dans les seconds. "
13. S. JEREMIE, in caput V Epistolæ ad Galatas : " Une étincelle est quelque chose de bien faible et de presque imperceptible ; mais quelque faible qu'elle soit, si elle trouve un foyer et tant soit peu d'aliment, elle pourra incendier des villes et des forêts entières. Le levain aussi, dont l'Evangile s'est servi dans un autre sens comme d'un sujet de parabole, paraît une chose de rien ; et cependant mêlez-le avec de la farine, il communiquera sa vertu à la masse entière. Ainsi encore les mauvaises doctrines commencent par un seul, puis infectent deux ou trois premiers, puis insensiblement la gangrène se répand dans
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tout le corps de la société, et comme dit le proverbe, une seule brebis galeuse suffit pour gâter tout le troupeau. C'est pourquoi il faut éteindre l'étincelle dès qu'elle commence à paraître, écarter sur-le-champ le levain du reste de la pâte, retrancher les chairs putréfiés, séquestrer du reste du troupeau la brebis galeuse, si l'on veut prévenir soit l'incendie d'une maison, soit la fermentation d'une masse de pâte, soit la gangrène pour le corps entier, soit la corruption et la perte de tout un troupeau. Arius n'était à Alexandrie qu'une étincelle ; mais cette étincelle, pour n'avoir pas été tout de suite étouffée, embrasa l'univers entier de sa flamme. "
14. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Lib. XII, Epist. XXXI, ad Felicem episcopum Siciliæ : " Il vaut mieux en condamner un seul pour mettre tous les autres en sûreté que d'exposer par ménagement pour un seul le salut de tous. On ne s'étonnera pas que cette règle soit observée parmi les hommes, lorsqu'on réfléchira qu'on la pratique même à l'égard des animaux, parmi lesquels on a soin de mettre ceux qui sont atteints de quelque maladie à part de ceux qui sont sains, de crainte que la maladie des premiers ne soit contractée par les seconds. "
15. S. AUGUSTIN, in Ps. L ; voir plus haut, témoignage 4, p. 84 et 85.
16. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Lib. IV Dialogorum, c. 18 : " Quoique nous devions croire que tous les enfants baptisés entrent dans le royaume du ciel s'ils viennent à mourir à cet âge de première enfance, nous ne devons pas croire pour cela que tous ceux d'entre eux qui peuvent déjà parler entrent dans le royaume céleste, parce qu'il y a de ces enfants à qui l'entrée de ce royaume est fermée par leurs parents, ou par la mauvaise éducation qu'ils en reçoivent. Citons pour exemple un petit enfant de cette ville, âgé, je crois, pour l'époque dont je parlerai tout-à-l'heure, d'environ cinq ans : son père fort connu ici, avait pour lui une affection trop tendre qui l'empêchait de le reprendre quand il faisait mal ; de sorte que cet entant, dès qu'il se trouvait contrarié en quelque chose, avait pris l'habitude de blasphémer le saint nom de Dieu. Cet enfant donc fut atteint, il y a trois ans, d'une maladie mortelle, et bientôt il toucha sa fin. Et comme son père le tenait dans ses bras, l'enfant voyant venir à lui les esprits malins, comme me l'ont attesté ceux qui étaient présents, se mit à s’écrier en jetant des regards d'effroi : Mon père, défendez-moi ; mon père défendez-moi. Après avoir crié de
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même, il détourna le visage, pour se soustraire, s'il l'eût pu, aux esprits malins en se réfugiant entre les bras de son père. Son père lui demandant alors ce qu'il voyait qui lui causait tant de frayeur, l'enfant ajouta : Ce sont des Mores qui sont venus, et qui veulent m'enlever. Puis aussitôt il blasphéma le saint nom de Dieu, et ensuite rendit l'âme. Dieu en effet, voulant faire voir pour quel crime, dont son père avait négligé de le corriger pendant sa vie, il le livrait à de tels bourreaux, permit que cet enfant retombât dans ce même crime au moment où il allait mourir, et qu'après avoir exercé la patience divine par ses blasphèmes proférés dans l'état de santé, il servît désormais d'exemple de la justice divine par la mort qui lui arriva, le dernier blasphème qu'il proféra dans ce moment indiquant suffisamment à son père la faute que ce dernier avait commise en négligeant le soin de l'âme de son enfant, pour le livrer, devenu déjà grand pécheur malgré la faiblesse de son âge, aux feux de l'enfer. "
17. S. CHRYSOSTOME, Hom. IX in I Epistolam ad Timotheum : " Ce n'est pas une œuvré d'un léger mérite, que de consacrer à Dieu les enfants qu'on a reçu de Dieu. Car une grande récompense est réservée aux parents assez heureux pour fonder l'éducation de leurs enfants sur des bases solides, comme ils doivent s'attendre à un châtiment sévère s'ils négligent ce devoir. Nous voyons en effet que le grand-prêtre Héli n'a dû qu’à ses enfants le malheur dont il fut frappé. Il devait les reprendre, et il les reprit en effet, mais sans employer la sévérité nécessaire ; et pour avoir craint de leur faire de la peine, il les perdit et se perdit avec eux. Faites attention à ceci, père qui êtes ici pour m'entendre : élevez vos enfants avec beaucoup de soin dans l'observation des préceptes et des enseignements du Seigneur. Un jeune homme est comme un animal indompté : il a besoin d'être entouré de précepteurs, d’instituteurs, de maîtres et de gouverneurs sans nombre. Et Dieu veuille qu'au moyen de toutes ces précautions vous réussissiez à le contenir ! Car il est comme un coursier qui ne connaît pas le frein, ou plutôt comme un animal sauvage. Si donc nous lui traçons dès le premier âge les limites qu'il ne devra jamais dépasser, nous n'aurons pas besoin après cela de beaucoup de peine pour l'engager à s'y tenir ; car l'habitude toute seule lui tiendra dès lors lieu de loi. Ne permettons à ceux de cet âge aucun plaisir qui puisse leur être funeste ; n'ayons point pour eux
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de molle indulgence ; mais attachons-nous surtout à les conserver dans la modestie : car rien ne nuit à cet âme comme le défaut contraire. . . Ne leur épargnons ni les exhortations, ni les avertissements, ni les réprimandes, ni les menaces, et quand un de ces moyens se trouvera us&, passons à un autre. Considérons la jeunesse comme un dépôt de prix qui nous est confié. Qu'elle soit donc l'objet de notre sollicitude, et faisons tous nos efforts pour qu'elle ne nous soit pas enlevée par l'ennemi des hommes. Mais, hélas, notre conduite à cet égard est précisément le contre-pied de ce qu'elle devrait être. Pour rendre un champ fertile, nous nous résignons à tous les sacrifices : nous avons soin de le mettre entre les mains d'un homme fidèle, nous usons de discernement pour faire choix d'un bon muletier, d'un sage économe, d’un homme d'affaires qui soit entendu ; et ce que nous avons de plus précieux, un fils, nous ne nous occupons pas de lui trouver un maître qui sache le conserver dans l'innocence. Et pourtant ce fils est ce que nous pouvons posséder de plus précieux, et tous nos autres biens n'ont de prix pour nous que par rapport à celui-là. C'est pour nos fils que nous amassons du bien ; quant à nos fils eux-mêmes, nous mettons en eux en quelque sorte notre fin dernière. Ne soyez donc plus si inconséquent : formez avant tout l'esprit et le cœur de votre fils, et ne songez qu'après cela à lui procurer le reste. Car si son âme est esclave du vice, à quoi lui serviront toutes ses richesses ? Qu'elle soit au contraire douée de vertu, elle n'aura rien à redouter même de la pauvreté. Voulez-vous le laisser riche après votre mort ? Apprenez-lui à être homme de bien. Car il pourra de cette manière amasser des richesses ; ou s'il n'y réussit pas, il ne sera pas plus à plaindre pour cela que ceux qui en auront amassé. Si au contraire il se conduit mal, vous auriez beau lui laisser des millions en héritage, vous ne lui laisseriez pas pour cela un gardien qui le préserverait de ses excès, mais vous auriez rendu sa condition pire que celle de ceux qu'on voit réduits à la plus extrême indigence. Car là pauvreté est plus avantageuse que les richesses pour tous les enfants dont l'éducation est vicieuse. En effet, elle les retient même malgré eux dans le sentier de la vertu ; au lieu que les richesses ne laissent pas même à ceux qui le voudraient la faculté de rester vertueux, mais elles les séduisent, les aveuglent, leur causent des égarements et des maux sans nombre. Mères qui m'écoutez, prenez un soin particulier de vos filles : cette occupation sera pour vous un travail facile.
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Veillez attentivement à ce qu'elles gardent la
maison. Avant tout, formez-les à la piété, la modestie,
au mépris des richesses et des pompes frivoles. Alors vous pourrez
songer à leur procurer d'honnêtes mariages. Car en leur donnant
cette éducation vertueuse, vous ne les sauverez pas seulement elles-mêmes,
mais vous sauverez aussi les hommes assez heureux pour les épouser
et non-seulement leurs époux, mais aussi leurs enfants ; et non
seulement leurs enfants, mais encore leurs petits- enfants. Car la racine
étant bonne, tous les rejetons en seront prospères, et vous
recevrez la récompense de tout ce bien à la fois. En faisant
l’éducation d'une seule âme, persuadons-nous donc que nous
travaillons en même temps pour plusieurs. Car une vierge qui quitte
la maison paternelle pour prendre le là nuptial, est comme un athlète
qui sort de l'enceinte où il s'est exercé pour descendre
dans l'arène ; elle doit posséder d'avance l'art de gouverner
une maison, pour devenir comme un bon levain qui communiquera sa vertu
à toute la masse. Que les jeunes hommes aussi se fassent remarquer
par leur pudeur, leur modestie et leur chasteté, afin de mériter
les louanges et de Dieu et des hommes. Qu'ils apprennent à réprimer
leurs convoitises, à pratiquer la frugalité, à être
économes, officieux et soumis. Ainsi seront-ils pour leurs parents
une source d'avantages sans nombre ; ainsi tout se rapportera-t-il à
la gloire de Dieu et à notre salut (Cf. Opera S. Joann. Chrysost.,
tome XI, pag. 897-898, édit. de Montfaucon). "
Question X
Qu’est-ce que se rendre complice par participation du péché d’autrui ?
On se rend complice par participation du péché d'autrui, lorsqu'on consent à partager le profit avec des voleurs ou des ravisseurs ; lorsque, de complicité avec d'autres, on revendique ou on retient une part dans un bien qu'on sait être injustement acquis ou du moins ne pas nous appartenir ; enfin, lorsqu'on ne craint pas de s'enrichir des dépouillés d’autrui. Ce péché est aussi celui qui semble être désigné par ces expressions du Psalmiste, courir avec les voleurs, prendre part aux crimes des adultères. C'est encore ce péché qu'Isaïe reprochait au peuple juif en ces termes : Vos princes sont des infidèles ; ils sont les compagnons des
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voleurs ; tous aiment les présents ils ne cherchent
que le gain et l'intérêt. C’est le même péché,
bien que plus criminel encore, que commettent ceux qui font commerce de
l'infamie d'autrui, tels que les maîtres de maisons de prostitution,
ou qui osent donner asile à des voleurs, ou d'autres gens mal noté
ou dangereux, pour mettre en sûreté leurs personnes ou leur
butin.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Tobie, II, 19-21 : " Pour ce qui est d'Anne, sa femme (de Tobie), elle allait tous les jours faire de la toile, et apportait pour vivre ce qu'elle pouvait gagner du travail de ses mains. - Il arriva donc qu'ayant reçu un jour un chevreau, elle l'apporta à la maison. - Et son mari l'ayant entendu crier, dit : Prenez garde que ce chevreau n'ait été dérobé, rendez-le à ceux à qui il est, parce qu'il ne nous est pas permis de manger ni même de toucher rien qui ait été dérobé. "
2. Proverbes, I, 10-11, 13-15 : " Mon fils, si les pécheurs cherchent à vous séduire, ne vous laissez point prendre à leurs caresses. - S'ils vous disent : Venez avec nous, dressons des embûches pour répandre le sang, etc.; - nous trouverons toutes sortes de biens et de choses précieuses ; nous remplirons nos maisons de riches dépouilles - entrez en société avec nous ; n'ayons tous qu'une même bourse : - Mon fils, n'allez point avec eux, détournez vos pas de leurs sentiers. "
3. Ibid., XXIX, 24 : " Celui qui s'associe avec un voleur est ennemi de sa propre vie ; il entend qu'on le prend à serment, et il ne le décèle point. "
4. Nombres, XVI, 25-30 : " Moïse se leva donc et se dirigea vers Dathan et Abiron, et les anciens d'Israël le suivirent ; - et il dit au peuple : Retirez-vous des tentes de ces hommes impies, et ne touchez rien qui soit à eux, de peur que vous ne soyez
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enveloppés dans la peine de leurs péchés. - Lorsque tous se furent retirés des environs de leurs tentes, Dathan et Abiron en sortirent aussi, et se tinrent à l'entrée de leurs pavillons, avec leurs femmes, leurs enfants et toute leur troupe. - Alors Moïse dit : Vous reconnaîtrez à ceci que c'est le Seigneur qui m'a envoyé pour faire tout ce que vous voyez, et que ce n'est point moi qui l'ai imaginé de mon propre chef. - Si ces gens-ci meurent d'une mort ordinaire aux hommes, et qu'ils soient visités comme les autres ont coutume de l'être, ce n'est point, j'y consens, le Seigneur qui m'a envoyé ; - mais si le Seigneur fait par un prodige nouveau que la terre, ouvrant ses abîmes les engloutisse, etc. "
5. Ecclésiastique, V, 1 : " Ne vous appuyez pas sur des richesses iniques, et ne dites point : J'ai tout ce qu'il me faut pour vivre ; car tout cela ne vous servira de rien au temps de la vengeance et des profondes ténèbres. "
6. II Chroniques, XX, 35-37 : " Après cela, Josaphat, roi de Juda, fit alliance avec Ochosias, roi d'Israël dont les œuvres étaient très-impies. - Et ils convinrent ensemble d'envoyer une flotte à Tharsis, et ils firent construire des vaisseaux à Asiongaber. - Et Eliézer fils de Dodaü de Maréa, prophétisa à Josaphat, et lui dit : Parce que vous avez fait alliance avec Ochosias, Dieu a renversé vos desseins, et vos vaisseaux ont été brisés, de sorte qu'ils n'ont pu aller à Tharsis. "
7. JOSUE, VII, 20-26 : " Et Achan répondit à Josué et lui dit : Il est vrai que j'ai péché contre le Seigneur Dieu d'Israël, et voici ce que j'ai fait : - J'ai vu parmi les dépouilles un manteau d'écarlate de bonne qualité et deux cents sicles d'argent, avec une règle d'or de cinquante sicles, et je me suis passionné pour ces objets, et je les ai pris, et les voilà cachés en terre au milieu de ma tente, comme aussi l'argent dans une fosse que j'y ai faite. - Et Josué envoya des exprès qui coururent à la tente d'Achan, et voilà qu'ils trouvèrent tout ce qui y était caché, avec l'argent au même lieu qu'il avait dit. - Et ayant tiré toutes ces choses hors de sa tente, ils les portèrent à Josué, et à tous les enfants d'Israël, et les jetèrent devant le Seigneur. - Or, Josué et tout Israël qui était avec lui ayant pris Achan, fils de Zaré, et l'argent, et le manteau et la règle d'or, avec ses fils et ses filles, ses bœufs, ses ânes, ses brebis, sa tente même et tout ce qui était à lui, les conduisirent en la vallée d’Achor. - Et Josué lui dit : Parce que tu nous as jetés dans le trouble, que le Seigneur te jette
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aussi dans le trouble en ce jour-ci. Et tout Israël le lapida ; et tout ce qui avait été à lui fut consumé par le feu. - Et ils amassèrent sur lui un grand monceau de pierres, qui se voit encore aujourd'hui. Ainsi la fureur du Seigneur se calma ; et ce lieu fut appelé et s'appelle encore aujourd'hui la vallée d'Achor. "
8. DANIEL, V, 1-7, 17, 20-28, 30-31 : " Le roi Balthasar donna un grand festin à mille de ses grands, et chacun y buvait selon sa force. - Le roi étant donc déjà plein de vin, commanda qu'on apportât les vases d'or et d'argent que Nabuchodonosor, son père, avait enlevés du temple de Jérusalem, pour boire dedans, lui et ses femmes et ses concubines, et les grands de sa cour. - On apporta donc aussitôt les vases d'or et d'argent qui avaient été enlevés du temple de Jérusalem, et le roi but dedans avec ses femmes et ses concubines et les grands de sa cour. - Ils étaient tout occupés à boire et à chanter les louanges de leurs dieux d'or et d'argent, d'airain et de fer, de bois et de pierre. - En ce moment même on vit paraître des doigts, et comme la main d'un homme qui écrivait vis-à-vis du candélabre, sur la muraille de la salle du roi : et le roi voyait le mouvement des doigts de la main qui écrivait. - Et le visage du roi fut tout changé et son esprit fut saisi d'un trouble violent ; ses reins perdirent toute leur force, ses genoux s'entre - choquaient. - Le roi poussa donc un grand cri, pour qu'on fît venir les mages . . . . . - Daniel, répondant, dit au roi : Que vos dons soient pour vous, et que d'autres reçoivent de vos mains les présents de votre maison : je ne laisserai pas de vous lire cette écriture et de vous dire ce qu'elle signifie. . . - Quand le cœur de Nabuchodonosor, votre père, se fut enflé, et que son esprit se fut endurci dans son orgueil, il fut expulsé du trône, et destitué de sa royauté et sa gloire lui fut ôté. - Il fut mis à part des enfants des hommes ; son cœur devint semblable à celui des bêtes ; sa demeure fut avec les ânes des forêts ; et il mangea l'herbe des champs comme les bœufs, et son corps fut trempé de la rosée du ciel, jusqu’à ce qu'il reconnût que le Très-Haut a un souverain pouvoir sur les royaumes des hommes, et qu'il les donne à qui il lui plaît. - Et vous, Balthasar, qui êtes son fils, vous-même n'avez point humilié votre cœur, quoique vous sussiez toutes ces choses ; - mais vous vous êtes élevé contre le maître du ciel ; vous avez fait apporter devant vous les vases d'or de sa maison sainte, et vous avez bu dedans, vous, vos femmes et vos concubines, avec
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les grands de votre cour ; vous avez en même temps décerné vos louanges à vos dieux d'argent, d'or, d'airain, de fer, de bois et de pierre, qui ne voient point, qui n'entendent et ne sentent point ; et vous n'avez point rendu gloire au Dieu qui tient en sa main le souffle de votre vie et toutes vos voies. C'est pourquoi Dieu a envoyé de son trône le doigt de la main qui a gravé ces caractères. - Or, voici ce qui est écrit : Mané, Thécel, Pharès ; - en voici l'explication : Mané, Dieu a compté votre règne et il en a marqué la fin. - Thécel, vous avez été pesé dans la balance, et on vous a trouve trop léger. - Pharès, votre royaume a été divisé et donne aux Mèdes et aux Perses. - La même nuit Balthasar, roi des Chaldéens, fut tué : - et Darius, qui était Mède, lui succéda dans la royauté à l'âge de soixante-deux ans. "
9. II Machabées, III, 5-15, 23-31, 35-40 : " Simon, qui avait l'intendance du temple, voyant qu'il ne pouvait vaincre Onias, alla trouver Apollonius, fils de Tharsée, qui commandait en ce temps-là dans la Célésyrie et dans la Phénicie. - Il lui rapporta que les richesses du temple de Jérusalem étaient immenses et ramassées dans un trésor ; que cet argent était destiné pour les besoins de l'Etat, et non pour la dépense des sacrifices, et qu'il était facile de le faire passer entre les mains du roi. - Apollonius ayant donné en conséquence avis au roi des grandes sommes d'argent déposés dans le temple, le monarque fit venir Héliodore, qui était son premier ministre, et l'envoya avec ordre de faire enlever tout cet argent. - Héliodore partit aussitôt, en apparence pour visiter les villes de Célésyrie de Phénicie, mais dans la réalité pour exécuter le projet du roi. - Et lorsqu'il fut arrivé à Jérusalem, après avoir été reçu dans la ville par le grand-prêtre avec toutes sortes d'égards, il lui déclara l'avis qu'on avait donné au roi au sujet de cet argent, et le véritable objet de son voyage, et il demanda si ce qu'on lui avait dit était véritable. - Alors le grand-prêtre lui représenta que cet argent était déposé dans le temple pour la subsistance des veuves et des orphelins ; - qu'une partie même de cet arpent, dont l'impie Simon lui avait parlé, appartenait à Hircan-Tobie, homme qui jouissait d'une très-grande considération ; et que toute cette somme consistait en quatre cents talents d'argent et en deux cents talents d'or ; - qu'au reste il était absolument impossible de tromper ceux qui avaient cru ne pouvoir mieux assurer leur argent qu'en le mettant en dépôt dans un temple vénéré de toute
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la terre pour sa sainteté. - Mais Héliodore insistant sur les ordres qu'il avait reçu du roi, répondit qu'il fallait, à quelque prix que ce fût, que cet argent fût porté au roi. - Il entra donc dans le temple au jour marqué pour mettre son dessein à exécution, et toute la ville était remplie d'une vive crainte. - Les prêtres, avec leurs robes sacerdotales, se prosternaient au pied de l'autel, et, les yeux élevés vers le ciel, ils invoquaient celui qui a fait une loi de garder fidèlement les dépôts confiés, etc. - Héliodore poursuivait son dessein, debout avec ses gardes à la porte du trésor. - Mais l’esprit du Dieu tout-puissant se manifesta alors d'une manière éclatante, en sorte que tous ceux qui avaient osé obéir à Héliodore, renversé par une vertu divine, furent tout d'un coup saisis d'une frayeur qui les mit tout hors d'eux-mêmes. - Car ils virent paraître un cheval, sur lequel était monté un homme terrible, habillé magnifiquement, et qui fondant avec impétuosité sur Héliodore, le frappa de plusieurs coups avec ses deux pieds de devant ; et celui qui était monté dessus semblait avoir des armes d'or. - Deux autres jeunes hommes parurent en même temps, pleins de force et de beauté, brillants de gloire et richement vêtus, et se tenant aux deux côtés d’Héliodore, ils le fouettaient chacun de son côté et le frappaient sans relâche. - Héliodore tomba donc tout d'un coup par terre, enveloppé d'obscurité et de ténèbres ; alors on le mit dans une litière et on l'emporta hors du temple. - Ainsi cet homme qui était entré dans le temple, précédé d'un grand nombre d'archers et de gardes, était emporté sans que personne pût le secourir, tant la vertu de Dieu s'était fait connaître manifestement. - Cette vertu divine le réduisit à demeurer couché par terre, sans voix et sans aucune espérance de vie. - Les Juifs au contraire bénissaient le Seigneur de ce qu'il relevait la gloire de sa maison ; et le temple qui ne présentait auparavant que frayeur et tumulte, retentit alors de chants d'allégresse et de cris de joie, en reconnaissance de cette manifestation de la toute-puissance divine. - Bientôt quelques-uns des amis d'Héliodore se mirent à supplier Onias de vouloir bien invoquer le Très-Haut pour qu'il donnât la vie à cet homme qui allait rendre le dernier soupir. . . . - Héliodore ayant offert à Dieu un sacrifice, et fait des vœux et de grandes promesses à celui qui lui avait accordé la vie, rendit grâces à Onias, alla rejoindre ses troupes, et retourna vers le roi. - Et il rendait témoignage à tout le monde de ces œuvres du grand Dieu, qu'il avait vues de ses
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yeux. - Et comme le roi lui demanda qui il croyait qu'il lui convînt d’envoyer encore à Jérusalem, il lui répondit : Si vous avez quelque ennemi, ou quelqu'un qui ait formé des desseins sur votre royaume, envoyez-le en ce lieu, et vous le verrez revenir déchiré de coups, si toutefois il en échappe ; car il y a vraiment dans ce temple une vertu divine. - Celui qui habite dans le ciel y est lui-même présent et en est le protecteur, et il frappe et perd ceux qui s'y introduisent pour faire du mal. - Voilà le traitement que subit Héliodore et la manière dont le trésor fut conservé ".
10. II Machabées, V, 13-21 : " Antiochus osa même entrer dans le temple, ce lieu le plus saint de toute la terre, ayant pour guide Ménélaüs, l'ennemi des lois et de sa patrie. - Et prenant dans ses mains criminelles les vases sacrés que les autres rois et les villes avaient placés en ce lieu saint pour en être l'ornement et la gloire, il les maniait indignement et les profanait. - Ainsi Antiochus s'égarait-il dans ses vaines pensées, et il ne considérait pas que si Dieu faisait éclater pour un peu de temps sa colère contre les habitants de cette ville, c'était à cause de leurs péchés et que c'était pour cela qu'un lieu si saint avait été exposé à cette profanation. - Car autrement, s'ils n'avaient été coupables de plusieurs crimes, ce prince, à l'exemple d'Héliodore qui avait été envoyé par le roi Séleucus pour piller le trésor, aurait été fouetté comme lui au moment de son arrivée, et puni efficacement de son audace. - Mais Dieu n'a pas choisi le peuple à cause du temple ; il a choisi au contraire le temple à cause du peuple. - Voila pourquoi ce lieu a été associé au peuple dans ses maux, comme il lui sera aussi associé dans ses succès ; et après avoir été quelque temps abandonné à cause de la colère du Dieu tout-puissant, il sera de nouveau élevé à la plus haute gloire, lorsque le Dieu souverain se réconciliera avec son peuple. - Antiochus ayant donc emporté du temple dix-huit cents talents, s'en retourna promptement à Antioche. "
11. Ibid., IX, 4-16 : " Antiochus, transporté de colère, s'imaginait qu'il pourrait se venger sur les Juifs de l'outrage que lui avaient fait ceux qui l'avaient mis en fuite. - C'est pourquoi il commanda à celui qui conduisait son char de presser ses chevaux, et de hâter son voyage, poursuivi qu'il étai lui-même par la vengeance du ciel pour cette parole insolente qu'il avait dite, qu'arrivé à Jérusalem il ferait de cette ville le tombeau commun de tous les Juifs. - Mais le Seigneur, le Dieu d'Israël
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qui voit tout, frappa ce prince d'une plaie incurable et invisible : car il n'eut pas plus tôt proféré cette parole, qu'une douleur cruelle et d'affreux tourments déchirèrent ses entrailles. - Et ce fut avec justice, puisqu'il avait lui-même déchiré les entrailles des autres par un grand nombre de tourments nouveaux, bien que cela même ne le fît pas encore renoncer à sa malice. - Plein d'orgueil, et ne respirant que feu et flammes contre les Juifs, il commanda qu'on précipitât son voyage ; mais dans l'impétuosité de sa course, il tomba de son char, et tout son corps fut froissé et ses membres meurtris. - Ainsi, celui qui tout-à-l’heure croyait, dans son orgueil satanique, pouvoir commander même aux flots de la mer, et peser dans sa balance les montagnes les plus hautes, se trouva à l'instant humilié jusqu’à terre, porté mourant dans une litière, et manifestant à tous dans sa personne la toute-puissance de Dieu par ce spectacle même. - Car on voyait des vers sortir du corps de cet impie, comme d'une source ; et tout en conservant la vie au milieu de tant de douleurs, ses chairs lui tombaient par pièces en répandant dans toute l'armée une infection que personne ne pouvait supporter. - Et celui qui naguère s'imaginait qu'il pourrait atteindre jusqu'aux étoiles du ciel ne pouvait plus trouver de serviteurs à cause de l’odeur insupportable qui s’exhalait de son corps. - Il commença donc alors à rabattre de cet orgueil dont il était possédé, et à reconnaître le peu qu'il était, ses douleurs redoublant à chaque moment sous le fouet inexorable de la vengeance divine. Ainsi ne pouvant plus lui-même souffrir la puanteur de ses plaies, il dit : Il est juste que l'homme soit soumis à Dieu, et que celui qui est mortel ne s'égale pas au Dieu souverain. - Mais en parlant ainsi, c’était en vain qu'il priait le Seigneur, de qui il ne devait point obtenir miséricorde. - Et celui qui se hâtait auparavant d'aller à Jérusalem pour la raser jusqu'au niveau du sol, et pour n'en faire qu'un vaste charnier de corps morts entassés les uns sur les autres, promettait maintenant de la rendre libre, - et d’égaler aux Athéniens ces même Juifs qu'il avait jugés indignes de la sépulture, et de qui il avait dit qu'il donnerait leurs corps en proie aux oiseaux du ciel et aux bêtes farouches, et qu'il exterminerait jusqu’à leurs plus petits enfants. - Il s'engageait aussi à orner de dons précieux le saint temple qu'il avait pillé depuis peu, à y augmenter le nombre des vases sacrés, etc. "
12. I Machabées, VI, 10-13 : " Il appela donc tous ses amis
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et leur dit : Le sommeil s'est éloigné de mes yeux, mon cœur est tout abattu, et je me sens défailli par le chagrin que j'éprouve. - Et j'ai dit dans mon cœur : A quelle affliction suis-je maintenant réduit et en quel abîme de tristesse me vois-je plongé, moi qui étais auparavant si heureux et si aimé au milieu de la puissance qui m'environnait ! - Je me souviens à présent des maux que j'ai faits dans Jérusalem d'ou j'ai emporté tous les vases d'or et d'argent qui s'y trouvaient, et fait enlever sous des prétextes frivoles ceux qui habitaient la Judée. - Je reconnais donc que c'est pour cela que tous ces maux sont tombés sur moi ; et voilà qu'affligé d'un horrible mal, je meurs misérablement dans une terre étrangère. "
13. Psaume XLIX, 16-48 : " Mais Dieu a dit au pécheur, etc. - Si tu voyais un voleur, tu courais t'associer avec lui, et tu prenais part aux crimes des adultères. "
14. ISAIE, I, 23-25 : " Vos princes sont des infidèles et les compagnons des brigands. Ils aiment les présents, tous tant qu'ils sont, et ils ne cherchent que le gain et l'intérêt. Ils ne font point justice à l'orphelin, et la cause de la veuve n'a point d'accès auprès d'eux. - C'est pourquoi le Seigneur, le Dieu des armées, le fort d'Israël a dit : Hélas ! je déchargerai ma colère sur ces rebelles, et je me vengerai de mes ennemis. - Et j'étendrai ma main sur toi, Jérusalem, etc. "
15. Deutéronome, XXIII, 18 : " Vous n'offrirez
point dans la maison du Seigneur votre Dieu la récompense de la
prostituée, ni le prix du chien, quelque vœu que vous ayez fait,
parce que l'un et l'autre est abominable devant le Seigneur votre Dieu.
"
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. GREGOIRE DE TOURS, Lib. de gloriâ confessorum, c. 63 : " La fille de Léon, empereur des Romains, étant tourmentée de l'esprit impur et conduite pour cela dans les lieux saints, laissait échapper continuellement ce cri que lui inspirait l'esprit mauvais qui la possédait : Je ne sortirai de ce corps, qu’à la présence de l'archidiacre de Lyon ; il n'y aura que lui qui puisse m'expulser de ce lieu. L'empereur ayant entendu ces mots, dépêcha sans tarder des exprès vers les Gaules. Ceux-ci ayant trouvé l'archidiacre, se mirent à le supplier de se rendre avec eux à Rome pour visiter la fille du prince. L'archidiacre s'y refusa d'abord, en se déclarant indigne d'être l'instrument de Dieu pour les merveilles qu'il lui plairait d'opérer ; mais enfin, cédant aux exhor-
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talions de son évêque, il se mit en route avec les envoyés. Arrivé auprès de l'empereur, il en fut reçu avec des honneurs extraordinaires. Une fois instruit de ce que souffrait la jeune princesse, il se dirigea vers la basilique de l'apôtre saint Pierre, et là, après avoir observé un jeûne de trois jours de suite accompagné de veilles et de prières, il chassa l’esprit impur du corps de la jeune fille, en invoquant sur elle le nom de Jésus-Christ et en la marquant du signe de la croix. Pour le récompenser d'avoir opéré cette guérison, l’empereur lui offrit trois cents pièce d'or ; mais cette grande âme, regardant comme rien les biens périssables de la terre, répondit au prince : " Si vous désirez m'enrichir de vos présents, accordez-m'en un qui profite à tout le pays ; faites remise de l'impôt au peuple jusqu’à trois milles au-delà de l'enceinte des murs : ce bienfait sera avantageux à tout le monde à la fois. Mais pour votre or, il ne me servirait de rien ; distribuez-le aux pauvres pour votre bonheur et celui de votre famille. " Le prince accédant à cette proposition, fit aux pauvres la distribution de l'or, et accorda au peuple la remise de tribut qui lui était demandée. De là est venue la coutume qui dure encore dans ce pays de ne payer d'impôts qu’à trois milles en dehors de la ville. Après que le saint archidiacre se fut retiré, l'empereur dit à sa suite : " Si ce ministre aime Dieu plus que l'argent, l'église du moins à laquelle il est attaché mérité d’être honoré par nos présents. " Alors il fait faire un coffret pour renfermer le livre des saints Evangiles, avec une patène et un calice d'or pur orné de pierres précieuses. Il charge un de ses confidents de porter à l'église de Lyon cet ouvrage admirablement travaillé mais le commissionnaire, arrivé aux Alpes, s'arrêta dans la maison d'un orfèvre. Celui-ci l'ayant questionné sur le sujet de son voyage, il le lui fit connaître avec confiance et simplicité sur quoi l'orfèvre lui dit : " Si vous voulez suivre mon conseil, cette affaire va nous enrichir tous les deux. " Séduit sans doute par le malin esprit, et comme on dit parmi le peuple que, quand on a l'appétit de l'or, et qu'on cherche à tromper quelqu'un, les esprits n'ont pas de peine à s'unir, l'envoyé consentit sur-le-champ à tout ce que voulut l'orfèvre. Alors notre faussaire se mit à fondre des ouvrages d'argent tout semblables, et qu'on aurait pris pour les modèles fabriqués en or, et il fixa artistement avec des clous les pièces qui avaient auparavant pour agrafes des pierreries ou des filets d'or. Il ne toucha pas cependant au calice, à cause de la solidité avec laquelle les pièces y avaient
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été incrustées après cet échange frauduleux, le porteur poursuivit sa route et arriva à Lyon. Il fait son offrande à l'évêque qui le gratifie à son tour ; puis étant allé rejoindre l'auteur de l'imposture, il lui demande sa part dans l'or qui avait été soustrait de l'offrande ; l'orfèvre lui répond que tout n'est pas encore prêt mais il lui promet de le satisfaire quand la nuit sera venue. Après donc qu'ils eurent soupé, comme ils étaient ensemble dans la chambre où se fabriquaient les pièces voilà que tout-à-coup il se fait un tremblement de terre, et que la chambre secouée violemment tombe sur eux et les écrase. En même temps la terre s'entrouvre sous leurs pieds, et les engloutit avec leur argent, en sorte qu’après avoir poussé un cri lugubre ils descendirent tout vivants dans les enfers. Ainsi Dieu s'empressa-t-il de venger l'injure faite à son Eglise. J'ai vu moi-même bien des fois ces ouvrages dans l'église de Lyon. Que les peuples apprennent par cet exemple à ne pas envier à l'Eglise ses richesses, pas plus qu’à user de fraude dans les offrandes qu'on lui fait. Autrement, le coupable ne tarderait pas à voir éclater sur lui la justice de Dieu. "
2. Ibidem, c. 71 : " Il fut donné à la ville d'Aix un excellent athlète dans la personne de Métrias, homme d'une sainteté éminente, si l'on en croit l'histoire. Quoique de condition servile, il se montra noble par l'élévation de ses sentiments : au rapport de ceux qui ont lu le récit de son combat, quand il eut achevé ici-bas le cours de ses bonnes œuvres il se retira victorieux de l'arène, l'éclat de ses vertus ne laissant aucun doute sur la gloire et le bonheur dont il jouit dans le ciel. Du temps donc que Francon était évêque de cette église (Francon est compté pour le huitième évêque de la ville d'Aix, et n'est connu que par ce passage de saint Grégoire. Il vivait l'an 561, sous le règne de Sigebert), Childéric (Il ne faut pas confondre ce Childéric avec le roi Childéric, frère du roi Sigebert), qui était alors le premier en crédit auprès du roi Sigebert, voulut avoir sa ferme, disant qu'elle était injustement retenue par l'église d’Aix, et l’évêque fut aussitôt appelé à comparaître. Il vint en la présence du roi après avoir donné des cautions, et conjura le roi de ne pas l'obliger à se trouver à cette audience, de peur qu'il ne subît lui-même la rigueur du jugement divin. " Car je sais, dit-il, quelle est la vertu de saint Métrias qui tire promptement vengeance de quiconque entreprend d'usurper ce qui lui appartient. "
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Enfin les avocats plaident de part et d'autre la cause des parties. Childéric se lève lui-même, et reproche à l'évêque déjà fatigué de ses incriminations de retenir injustement les redevances attachées aux domaines du roi ; puis il le fait enlever par force du milieu de l'audience, oblige les juges restés présent à rendre contre lui une sentence qui l'exproprie de sa ferme, et le fait condamner en outre à payer une amende de trois cents écus d’or, tout le monde s’était mis pour lui, et personne n'osait rien dire contre sa volonté, ni résister à la puissance de son crédit. Enfin l'évêque condamné et dépouillé revint à sa ville, et prosterné en oraison devant le tombeau du saint, il dit après avoir récité le capitule du psaume : " On n'allumera point ici de lumières et on ne chantera plus de psaumes, que vous n'ayez, ô glorieux Saint, vengé vos serviteurs des injures qu'ils ont reçue de leurs ennemis, et que vous n'ayez fait rendre à la sainte église les choses qui lui ont été ôtées par violence. " Cela dit, il jeta en fondant en larmes des ronces et des épines aigües sur le tombeau. Et quand il fut sorti de ce lieu-là, il en ferma la porte, et sema d'autres épines à l'entrée. Tout-à-coup le ravisseur est envahi par une fièvre violente ; il se met au lit, ne veut plus prendre ni nourriture ni boisson, et sa respiration devient de plus en plus agitée. Si l'ardeur de la fièvre lui faisait sentir la soif, il ne buvait que de l'eau, et rien davantage. Que dirai- je de plus ? Il passa une année entière dans cet état d’agitation fiévreuse ; mais sa méchante âme ne se convertit pas pour cela. Cependant il perdait de jour en jour ses cheveux et les poils de sa barbe, et bientôt il devint tout chauve, en sorte qu'on eût cru voir un cadavre exhumé du tombeau où ses poils auraient été consumés. Abattu par tous ces maux et par d'autres encore de ce genre, ce misérable se rappelle trop tard, hélas, le mal qu'il a fait, et se dit à lui-même : " J'ai péché en dépouillant l’Eglise de Dieu et en faisant outrage à un saint évêque. Allez donc, dit-il à ses gens, allez maintenant le plus vite que vous pourrez ; et après que vous aurez restitué le domaine, remettez ces six cents écus d’or sur le tombeau du saint : car j'ai une ferme espérance que, cette restitution une fois faite, la santé me sera rendue. " Ceux à qui il donnait cet ordre n'eurent pas plus tôt l'argent entre les mains, qu'ils se hâtèrent d’exécuter la commission. Ils restituèrent le domaine, et déposèrent l'argent sur le tombeau du serviteur de Dieu ; mais ils n'eurent pas plus tôt accompli ce devoir, que le malade expira à la place où il était, et ne gagna que la perte de
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sa vie à se faire le suppôt d'une acquisition injuste. L'évêque au contraire se trouva vengé de l'ennemi de l’Eglise, comme il s'était tenu assuré de l'être par la vertu de l'athlète de Dieu (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1668, t. II, p. 312-314). "
3. Le même, Lib. 1 de gloriâ martyrum, c. 58 : " Comme le cœur humain ne cesse de battre pour des jouissances dont on doit rougir, un sous-diacre ayant aperçu à travers la fenêtre les vases d'argent (renfermés dans les tombeaux des martyrs Chrysanthe et Darie), songea en lui-même comment il pourrait accomplir ce que son avarice lui suggérait. La nuit étant donc venue el déjà avancée, il se leva de son lit, entra dans l'église des saints, et de l'église passa par la fenêtre dans le caveau, où en tâtant des mains au milieu de l'obscurité, il prit quelques aiguières d'argent, puis voulut se retirer avec son butin ; mais il ne fit que tourner toute la nuit, et ne put jamais retrouver l'entré par où il avait pénétré. Enfin le jour étant venu, comme la conscience qu'il avait de son crime le portait à faire tous ses efforts pour se cacher, suivant cette parole de Notre-Seigneur : Quiconque fait le mal hait la lumière, et ne paraît point à la lumière de peur que ses œuvres ne soient manifestées (JEAN, III, 20), il se cacha tout le jour dans un coin du caveau, de peur d'être aperçu. La nuit suivante, il chercha encore l'issue pour sortir, mais jamais il ne put la trouver, et il fit de même trois nuits de suite. Enfin, le troisième jour, comme il était tourmenté de la faim, il se présente à la fenêtre devant tout le peuple, et laissant l'argenterie qu'il avait enlevée, il confessa son crime, et sortit couvert de confusion, l'action qu'il avait faite ne pouvant plus échapper aux regards de toutes les personnes présentes (Cf. Ibidem, p. 60-61). "
4. Ibidem, c. 72 : " Saint Denis, évêque de Paris, a honoré sa ville de son martyre. A l'époque où le roi Sigebert vint sous les murs de cette ville avec son armée et mit en cendres la plus grande partie de ses faubourgs, un de ses principaux officiers accourut à la basilique (L'église actuelle de saint Denis n'a été bâtie que plus tard, et sous le règne de Dagobert. La basilique dont il s'agit ne pouvait donc être qu'une chapelle bâtie sur le même emplacement, ou quelque autre église de Paris bâtie sous le vocable du saint, telle que l'église de Saint- Denis-du-Pas, ou celle de Saint- Denis-de -la-Charte, etc.) de ce saint martyr, non pour y prier dévotement, mais uniquement pour y commettre quelque larcin.
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Comme il trouva les portes tout ouvertes, et le temple laissé sans gardiens, il prit audacieusement le poêle de soie enrichi d'or et de pierreries qui couvrait le tombeau du saint, et l'emporta avec lui. De retour au camp, il se trouva forcé de s'embarquer. Le valet qu'il avait loué à son service s'étant embarqué avec lui, en portant deux cents écu d’or suspendus à son cou, tomba tout-à-coup hors du navire sans que personne l'eût seulement touché, se noya bientôt, et ne put plus être retrouvé depuis. L'officier voyant la justice de Dieu s'exercer ainsi à son égard par la perte qu'il venait de faire de son valet et de son or, demanda sans tarder qu'on le remît à terre à l'endroit même d'où il s’était embarqué et sans perdre de temps, courut restituer le poêle qu'il avait dérobé. Mais quoiqu'il eût fait cette réparation il ne put pas voir l'anniversaire du jour où il avait commis le vol (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1668, t. II, p. 112-113). "
5. Ibidem, c. 79 : " L'église d'Agde, qui se glorifie de posséder des reliques de l'apôtre saint André a été plus d'une fois illustrée par d'éclatant miracles, qui sont venus confondre les usurpateurs de ses biens. En dernier lieu le comte Gomachaire envahit une terre de la dépendance de cette église. L’évêque Léon (Léon fut le quatrième des évêques d'Agde : il vivait vers l'an 540, et n'est connu que par ce passage de saint Grégoire. Baronius n'a pas oublié d'en faire mention dans ses Annales), contristé de cet attentat, vint trouver le comte et lui dit : " Laissez, mon fils, laissez le bien des pauvres, que le Seigneur a commis à mes soins, de peur qu'il ne vous porte malheur, et que les larmes des indigents, qui ont vécu jusqu’ici de son produit, n'obtiennent votre mort de la justice divine. " Mais le comte, qui était hérétique ne tenant nul compte de cet avertissement de l'évêque retient en sa possession ce bien sacrilègement enlevé. Cependant, il vint quelque temps après à être atteint de la fièvre ; et comme il ne se sentit pas seulement tourmenté par le malaise physique, mais aussi par les remords dont il était bourrelé, il députa de ses gens auprès de l'évêque pour lui faire cette prière : " Daigne le pontife adresser pour moi des prières au Seigneur, et je lui rendrai la terre qui lui appartient. " L'évêque aussitôt pria, et le malade recouvra la santé ; et une fois guéri, il dit à ses gens : " Que pensez-vous que disent maintenant ces romains (Expression remarquable dans la bouche d'un hérétique qui s'en sert ici pour désigner les catholiques) ? Ils s'imagineront sans doute que je n'aurai
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feu la fièvre, que parce que je leur avais enlevé leur domaine. Ce mal ne m'est pourtant arrivé que par une suite ordinaire de la condition humaine. Mais, quoi qu'ils fassent, ils n'auront point ce domaine de mon vivant. "
" En même temps il envoie un de ses officiers pour reprendre le bien qu'il avait rendu. L'évêque en ayant été informé, vint le trouver sur-le-champ et lui dit : " Est- ce que vous vous repentez du bien que vous avez fait, pour vouloir maintenant revenir là-dessus ? Ne faites point cela, je vous prie, de peur d'encourir la vengeance divine. " Le comte répondit à l'évêque : " Taisez-vous, taisez-vous, bon homme ; je vous ferai mettre à cru sur un âne, et traverser la ville dans cet équipage pour apprêter à rire à tous ceux qui vous verront dans cet état. " L'évêque, sans faire de réplique recourt à ses moyens accoutumés de défense. Il va se prosterner en oraison, passe la nuit sans se coucher, et s'occupe uniquement de gémir ou de chanter des psaumes. Le jour venu, il va aux lampes de l'église suspendues à la voûte et s'armant du bâton qu'il tenait à la main, il les met toutes en pièces en disant ces paroles : " On n'allumera point ici de cierges ni de lampes, jusqu’à ce que Dieu soit vengé de ses ennemis, et que les biens de sa maison lui aient été rendus. " Il n'eut pas plus tôt achevé ces mots, que l'hérétique ressentit de nouveau ses accès de fièvre. Et comme il se voyait à l'extrémité, il envoya dire à l'évêque : " Daigne le pontife supplier pour moi le Seigneur, et rendu à la santé je restituerai la terre usurpée et j'en donnerai encore une autre de même valeur. " L'évêque répliqua : " J'ai prié le Seigneur, et il m'a exaucé. " Le comte lui envoie une seconde députation, puis une troisième, pour le prier de se souvenir de lui dans ses prières ; mais l'évêque persiste dans sa réponse, et refuse de consentir à prier Dieu pour lui. L'hérétique voyant cela, se fait mettre sur un brancard, et porter vers l'évêque, pour le prier en sa propre personne et lui dire : Je vous rends votre domaine que je vous ai injustement ravi, et je vous en offre de plus une fois autant, ne demandant autre chose à votre sainteté sinon qu'elle prie pour moi. " Comme l'évêque ne voulait pas encore lui accorder ce qu'il lui demandait, il le contraignit de vive force d'entrer dans l'église où il n'eut pas plus tôt mis le pied, que le comte expira, et l'église recouvra le domaine qui lui avait été ravi (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1668, t. II, p. 123-125). "
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6. Le même, Lib. II de gloriâ martyrum, c. 13 : " Comme le roi Théodoric entrait dans l'Auvergne, comme un torrent impétueux, pour ravager tout le pays, une partie de son armée s'étant séparée du reste, se jeta du côté de Brioude, en ajoutant foi au bruit qui courait que les habitants s'étaient réfugiés dans l'église, où ils avaient ramassé tout ce qu'ils possédaient de plus précieux. Arrivés à l'endroit, ils trouvèrent en effet qu'une multitude de personnes des deux sexes s'étaient renfermée dans l'église avec leur mobilier. Et comme on leur en refusait l'entrée, un des soldats rompit les vitres d'une fenêtre du côté de l'autel, et pénétrât par cette ouverture comme un voleur ; car celui qui n'entre pas par la porte est un voleur et un larron, dit l'Evangile (JEAN, X, 1). Ensuite il ouvrit les portes du temple, et donna passage à l'armée. Alors faisant main basse sur tout le bien des pauvres, sur les ministres de l'église eux-mêmes et sur tout le peuple renfermé dans le temple, les soldats mirent tout dehors, et se partagèrent entre eux tout ce butin à quelques pas de la ville même. Tout cela ayant été rapporté au roi, ce prince fit saisir quelques-uns des coupables, qu'il condamna à divers genres de supplices. Celui qui avait été le premier auteur de tous ces forfaits en forçant comme il l'avait fait l'entrée du temple, voulut prendre la fuite ; mais le feu du ciel tomba sur lui et le frappa de mort. On voulut l'ensevelir sous un tas de pierres ; mais le tonnerre et l'orage remit son cadavre à découvert, de sorte qu'il resta sans sépulture. Quant aux autres complices de l'attentat qui réussirent à échapper à la vengeance du roi, quand ils furent rentrés dans leur pays, ils furent livrés au démon et périrent plus misérablement les uns que les autres. Frappé de ce châtiment exemplaire, le roi fit rendre tous les objets qui avaient été enlevés de ce lieu : car il avait défendu d'exercer aucune violence dans l'espace de sept milles tout autour de l'église (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1608, t. II, p. 190-191). "
7. Ibidem, c. 14 : " Siginald, qui était fort puissant auprès du roi, s'en alla en Auvergne, par ordre du prince, avec toute sa famille. Comme il ne craignait pas de faire de tous côtés des acquêts injustes, il envahit, sous prétexte d'échange, une ferme que Tétrade (Tétrade est marqué le quinzième dans le catalogue des évêques de Bourges. Il assista en 506 au concile d'Agde, et en 511 à celui d'Orléans où il prit la qualité de métropolitain), évêque de Bourges, d'heureuse mémoire, avait
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laissé à la basilique de Saint-Julien ; mais trois mois après cet attentat, la fièvre le prit, et perdant connaissance, il pencha la tête sur son lit. Sa femme étant inquiète de le voir en cet état fut avertie par un prêtre de le faire transporter hors de la ferme, si elle voulait sa guérison. Elle fit donc apprêter un équipage et son époux ayant été placé sur un brancard, ils n'eurent pas plus tôt franchi la limite de la ferme, qu'ils sentirent tous les deux les effets de la grâce de Dieu : l'un par la santé qu'il recouvra, l'autre par la joie qu'elle eut de le voir guéri (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1668, t. II, p. 191). "
8. Ibidem, c. 15 : " Un certain Pastor Ingenuus, nommé ainsi non pas pour sa vertu, mais parce que c'était son nom appellatif, entre autres injustes usurpations qu'il commit à l'égard de la basilique du saint martyr Julien, en vint à ce point de témérité que lui inspirait sans doute l'ennemi du salut des hommes, de vouloir s'approprier et d'envahir effectivement quelques métairies de cette église, voisines de ses propres terres. Le prêtre du lieu ayant député vers lui quelques-uns de ses clercs pour l'exhorter d’entendre raison, et à se désister de sa prétention injuste, cet homme violent, comme s'il eût eu des ennemis armés à combattre, se saisit aussitôt de son carquois, et ayant mis les clercs en fuite à coups de flèches, il retint en sa possession les domaines du saint. Or, il se trouva que bientôt après devait se célébrer la fête du glorieux martyr : l'usurpateur, ne se souvenant plus des envahissements qu'il avait commis, non plus que de l'outrage qu'il avait fait aux clercs, se rendit au bourg de Brioude cinq jours avant la fête pour la célébrer avec les autres. Comme il était à table d'amis tout entier livré à la joie, tout-à-coup on vit des éclairs qui furent suivis d'un tonnerre épouvantable et les éclairs ayant redoublé, un dard de feu s'échappant du ciel vint le frapper à mort, sans qu'aucun autre que lui fût atteint. Puis, pour servir d'exemple à tout le monde, on le vit brûler vivant comme un bûcher allumé. Le peuple réuni pour la solennité fut frappé d'admiration à la vue de ce prodige et saisi de crainte, et il n'en fallut pas davantage pour l'empêcher de toucher désormais à rien de ce qui appartenait à l'église du saint. Et pour qu'on ne croie pas que ce châtiment ait été l’effet du hasard, qu'on veuille bien remarquer qu'entre toutes les personnes présentes il n'y eut de frappé que le sacrilège (Cf. Ibidem, 192-193). "
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9. Ibidem, c. 16 : " Je dirai aussi de quelle manière le bienheureux martyr confondit l'orgueil du comte Beccon. Comme ce Seigneur commettait des exactions publiques, et que, tout fier de sa puissance, il opprimait une foule d'innocents, il lui arriva, un jour qu'il était à la chasse, de perdre un épervier à qui il avait donné l'essor. Dans le même temps un des serviteurs de la basilique de saint Julien, se trouvant en route, fit la rencontre d'un autre épervier qui semblait égaré ; cet homme était au reste le sommelier de la maison. Beccon ayant appris qu'il avait trouvé un épervier se mit à l'accuser en disant : " Cet épervier était à moi, et il me l'a dérobé. " Puis, la cupidité succédant au dépit, il fit lier et jeter cet homme en prison, avec le dessein de le faire pendre dès le lendemain. Alors le prêtre désolé se rendit en toute hâte au tombeau du saint, et lui ayant déclaré les causes de son affliction, il y prit dix écus d’or, qu'il envoya à Beccon par des amis affidés. Mais le comte, peu content de cette offre, fit serment de ne rendre au serviteur sa liberté qu’à condition qu'on lui remît trente écus d'or entre les mains. Le prêtre prit encore cette somme au tombeau du saint, et la fit passer à Beccon, qui voyant sa cupidité satisfaite, rendit enfin le serviteur. Mais le Dieu infiniment puissant, qui était avant le soleil, humilia l'oppresseur de l'innocence selon les richesses de sa bonté. Car, au bout de l'année, étant venu à la fête du saint, il entra dans le saint lieu, avec la troupe de ses gardes. Mais à peine le lecteur, qui s'était avancé pour lire l'histoire du saint martyr, eut-il ouvert le livre et prononcé dès les premières lignes le nom de saint Julien, que Beccon tomba à terre en poussant un cri effroyable, et d'une bouche émanant de sang lâcha encore plusieurs cris entrecoupés. Ses gens le prenant dans leurs bras, l'enlevèrent de la basilique et le rapporteront dans sa maison. Et ils ne doutaient pas que ce ne fût là la juste peine du traitement qu'il avait fait au serviteur de cette église. Le comte fit don au saint de tout ce qu'il avait sur lui de précieux, tant en or qu'en vêtements, et lui envoya encore beaucoup d'autres offrandes ; mais il n'en resta pas moins frappé de paralysie jusqu'au jour de sa mort (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1668, t. II, p. 193-194). "
10. Ibidem, c. 17 : " Il y eut aussi un certain diacre, qui ayant quitté le service de l'Eglise, se jeta dans les finances ; et se prévalant du pouvoir que lui donnaient ses protecteurs, il
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commettait tant de crimes, qu’à peine pouvait-il être supporté par ses voisins. Il arriva un jour, que se promenant autour des bois qui sont sur les montagnes, ou les moutons étaient menés paître par les grandes chaleurs de l’été, il songeait à reconnaître les pacages qui appartenaient au domaine public, pour en tirer les tributs accoutumés. Comme il avait déjà commis plusieurs spoliations à l'égard des particuliers, il découvrit tout-à-coup de loin des troupeaux, qui se gardaient en ce lieu-là sous le nom du martyr ; aussitôt il précipite sa marche, et comme un loup ravissant, disperse le troupeau. Les bergers effrayés et consternés avaient beau lui dire : " Ne touchez pas, s'il vous plait, à ces moutons, qui sont du domaine du saint martyr Julien ; " il leur répliquait avec moquerie : " Pensez-vous donc que Julien s'occupe à manger des béliers ? " Puis les ayant maltraités de coups, il emporta ce qu'il voulut, ne sachant pas apparemment, le misérable qu'il était, que quiconque enlève quoi que ce soit du domaine des saints, fait injure aux saints, ainsi que Notre-Seigneur l'a dit lui-même : Qui vous méprise me méprise, et qui reçoit le juste recevra la récompense du juste (LUC, X, 15 ; MATTH., X, 40). Il arriva qu’à quelque temps de là, étant allé à Brioude non par dévotion mais par cas fortuit, il fut renversé à terre devant le tombeau, et bientôt saisi de la fièvre, il se sentit oppressé d'une telle chaleur, qu'il ne pouvait ni se lever, ni appeler un valet pour le soutenir. Ses gens, voyant qu'il était plus long à revenir que de coutume, s'approchèrent de lui et lui dirent : " Comment êtes-vous si longtemps couché ici par terre ? Vous n'avez pas coutume d'être si long à vos prières, et votre dévotion était un peu plus courte. " Car on a dit de lui que, toutes les fois qu'il entrait dans une église, il s'y contentait de murmurer quelques paroles du bout des lèvres, puis en sortait sans même incliner la tête. Ses gens donc n'ayant pu tirer de lui aucune parole, on l'enleva à force de bras du lieu ou il était, et on le mit au là dans une chambre voisine. Mais comme sa fièvre augmentait toujours, il se mit à se désespérer et à crier qu'il était brûlé par le martyr. Alors, éclairé sur son état à la lumière des jugements de Dieu, il en vint à confesser les crimes que jusque-là il avait pris soin de cacher, et il priait en grâce qu'on jetât de l'eau sur lui. On lui apporta donc de l'eau dans une aiguière et on en jeta sur lui à plusieurs reprises ; à chaque fois une fumée épaisse s’éleva de son corps comme d'une fournaise. Son misérable corps devint noir comme du charbon,
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et il s'en exhalait une telle puanteur, qu’à peine pouvait-on le supporter. Bientôt, faisant signe de la main, il donna à connaître qu'il était allégé (Indicat se esse leviorem. Cela veut-il dire qu'il était allégé et non pas plutôt qu'il avait été trouvé trop léger dans la balance ?) ; puis, comme on se retirait, il rendit l'esprit, et nous pouvons dire sans crainte quel lieu occupe maintenant un homme qui est sorti de ce monde sous le poids d'un jugement si sévère (Cf. La seconde partie des Histoires de saint Grégoire, évêque de Tours, de la trad. de M. de Marolles ; Paris, 1668, t. II, p. 195-196). "
11. Ibidem., c. 20 : " C'était la fête de saint Julien, et voilà qu'un homme du peuple voyant l'église du saint parée de ses plus beaux ornements, conçu le désir coupable d'en enlever ce qu'ensuite il ne lui serait pas possible de tenir caché. Sur la fin donc de la journée comme le peuple se retirait de l’église après les vêpres, il se blottit dans un coin, et la nuit venue, comme tout le monde était couché et que tout était enveloppé dans les ténèbres, il sortit de sa retraite, et sans rien craindre, ayant le démon pour satellite et pour instigateur de son action abominable, il se jeta d'un bond sur les balustrades du sépulcre du saint, et ayant arraché du haut une des pierres précieuses qui brillait d'un vif éclat, il fit tomber la croix par terre, puis fit un paquet des tavaïoles et des petits tapis qui pendaient tout autour de l’église contre les murailles, et le mettant sur ses épaules avec la croix qu'il tenait sa main, il se retira au même lieu d'où il était sorti : là, il déposa le paquet qu'il mit sous sa tête, et assoupi par son péché même il s'endormit. Mais sur le minuit ceux qui avaient les clefs de l'église étant venus faire leur ronde, virent scintiller dans un coin, comme une étoile, une des pierres précieuse qui ornaient la croix. Saisis d'étonnement, ils s'approchèrent avec défiance, et ayant allumé un cierge ils trouvèrent le voleur étendu avec les objets qu'il avait pris, mais qu'il n'avait pu emporter. Toute la nuit ils le tinrent sous bonne garde, et quand le matin fut venu, il leur confessa tout ce qu'il avait fait, en leur assurant qu'il s'était endormi de lassitude, parce qu'après avoir longtemps tourné dans l’église avec son fardeau, il n'avait jamais pu en trouver la porte pour en sortir (Cf. Ibidem, p. 198-199) "
12. THEODORET, Ecclesiast. Histor., Lib. III, c. 11 (al. 8) : " Les impies idolâtres, quoique certainement instruits de ces
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laits, levèrent l'étendard de la guerre contre le souverain maître de l'univers. Le tyran (Julien) de son côté fit jeter dans son trésor les vases sacrés et condamner en même temps les portes de l’église qu'avait élevée Constantin, afin que tout accès en fût fermé à ceux qui ont coutume de s'y assembler. Cette église était occupée alors par les ariens. On vit en même temps entrer dans ce saint temple, pour en enlever les vases sacrés, et Julien préfet de l’orient, et Félix questeur du trésor royal, et Elpide intendant de la fortune privée de l'empereur, ou son comes privatus, comme disent les Romains. On dit que Félix et Elpide, qui étaient chrétiens avaient apostasié pour complaire au prince impie. Quand Julien lut dans le temple, on dit qu'il répandit de son urine contre la table sainte, et qu'il souffleta Euzoïus qui voulait l'en empêcher en lui répliquant que la Divinité ne prenait aucun souci des affaires des chrétiens. Félix frappé de la magnificence des vases sacrés que l'église devait à la libéralité de Constantin et de Constance : Voilà, s'écria-t-il avec quels vases somptueux se fait le service du fils de Marie. "
13. Ibidem, c. 12 (8 et 9) : " Mais ces monstres ne tardèrent pas à porter la peine de leurs attentats aussi insensés que criminels. Car Julien ayant été subitement atteint d'une maladie mortelle, qui lui rongeait et faisait pourrir les entrailles, périt misérablement après avoir rendu ses excréments non par les conduits naturels, mais par sa bouche même qui avait été l'instrument de ses blasphèmes On rapporte que son épouse, que recommandait la pureté de sa foi, lui dit : Cher époux vous devez bien des actions de grâces à Jésus-Christ notre Sauveur, de ce qu'il vous a montré sa puissance par ce châtiment si visible. Car vous seriez resté sans reconnaître celui à qui vous aviez la témérité de vous attaquer, si, usant de sa patience accoutumée, il ne vous avait frappé de ces maux. " Ces paroles, jointes à l'excès de son mal, lui faisant comprendre la cause de sa maladie, il supplia l'empereur de restituer à l'église les vases et les ornements qui lui avaient été enlevés ; mais il mourut sans avoir pu l'obtenir. Félix à son tour, atteint tout-à- coup d'un mal miraculeux, mourut après avoir rendu tout son sang par la bouche pendant plusieurs jours et plusieurs nuits de suite, et passa ainsi d'une mort affreuse à la mort éternelle plus affreuse encore. Voilà comment ces hommes portèrent la peine de leur impiété. "
14. VICTOR, évêque de Vite ou d'Utique, Lib. I persecutionis Wandalicæ : " Genseric, irrité contre l'Eglise de Dieu, envoie
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un certain Proculus dans la province Zeugitane, pour forcer tous les prêtres du Seigneur à lui livrer les livres et le reste qui servait au service divin, afin de les dépouiller ainsi habilement de leurs armes, et une fois désarmés, de se les assujettir avec moins de peine. Et comme ils déclarèrent ne pouvoir faire cette tradition, il se mit à enlever tous ces objets à force ouverte, et pour comble de sacrilège, il se faisait des chemises et des caleçons des linges dont il avait dépouillé les autels. Proculus exécuteur de ces ordres impies ne tarda pas à porter la peine de ses attentats : il mourut bientôt de la manière la plus misérable, en se mangeant la langue qu'il se coupait par morceaux avec les dents. " .
15. S. AUGUSTIN, In Ps. CXXIX : " Lorsque vous supportez les péchés de votre frère, ils ne sont point un fardeau qui vous accable. Mais si vous leur donniez votre consentement, ce ne seraient plus les péchés des autres qui vous écraseraient de leur poids ; ce seraient vos péchés à vous-même. Car tout homme qui consent aux désirs d'un pécheur, n'est plus sous le fardeau des péchés d'autrui, mais sous le poids de ses propres péchés. Le consentement que vous donnez au péché de votre frère devient le vôtre à vous-même. Et alors ne vous plaignez pas des autres comme si leurs péchés vous accablaient ; car on vous répondrait que ce ne sont pas les péchés des autres qui vous accablent, mais les vôtres. "
" Vous avez vu un voleur, dit l’Ecriture, et vous
avez couru avec lui (Ps. XLIX, 18). Cela veut-il dire que vous
ayez couru effectivement avec ce voleur ? Nullement. Mais cela fait entendre
que vous vous êtes uni de cœur et d'affection avec lui. Ce qui n'était
que son crime est devenu aussi le vôtre, parce qu'il vous a plu et
que vous y avez trouvé du plaisir (Cf. Sermons de saint Augustin,
etc., t. VI, p. 603-604). "
Question XI
Comment se rend-on coupable du péché d’autrui en prenant sa défense ?
C'est lorsqu'on prend des malfaiteurs sous sa protection, ou qu'on ne craint pas de soutenir et de répandre une doctrine perverse ou impie dont un autre est l'auteur, ou qu'on emploie ses moyens ou son industrie à procurer le succès d'une entreprise injuste. C'est contre ces sortes de crimes que s'élève l'Esprit-
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Saint par ces paroles foudroyantes : Malheur à vous, qui dites que le mal est bien, et que le bien est mal ; qui donnez aux ténèbres le nom de lumière et à la lumière le nom de ténèbres qui faites passer pour doux ce qui est amer, et pour amer ce qui est doux ; et quand Dieu dit encore : Vous ne vous laisserez point aller au torrent de la multitude pour faire le mal, et dans le jugement vous ne vous rendrez point à l'avis du plus grand nombre pour vous détourner de la vérité.
En voilà assez sur les péchés appelés péchés d'autrui dont on peut se rendre soi-même coupable, péchés aujourd'hui très-répandu, et commis sans scrupule par une foule de personnes, surtout parmi les grands. Et telle est la licence avec laquelle on se porte à les commettre, que la plupart de ceux qui s'y livrent ne les regardent pas même comme des péchés et n'en conçoivent aucun remords, quoiqu'ils se rendent par-là dignes devant Dieu de châtiments éternels, et non-seulement eux-mêmes mais aussi les autres qu'ils entraînent avec eux dans une perte commune. Or, toutes ces espèces de péchés peuvent être réduites comme le montre saint Basile-le-Grand, à trois principales, qui les comprennent sommairement. Car nous pouvons nous rendre complices de l'erreur ou du péché d'autrui, soit par la complicité même de nos œuvres soit seulement par la disposition de notre volonté, soit enfin par une négligence coupable, si nous manquons au devoir qui peut nous être imposé d'avertir et de corriger notre prochain.
Mais de tous les péchés le plus affreux sans contredit est celui qui se commet contre l'Esprit-Saint.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. ISAIE, V, 20 : " Malheur à vous qui dites, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
2. Id., X, 1-2 : " Malheur à ceux qui établissent des lois d'iniquité, et qui font des ordonnances injustes, - pour ne point faire justice aux faibles, pour opprimer dans les jugements les pauvres de mon peuple, pour dévorer les veuves comme leur proie, et pour gaspiller le bien des orphelins. "
3. Exode, XXIII, 2 : " Vous ne vous laisserez point
entraîner à la suite de la multitude pour faire le mal, etc.
(comme dans le corps de la réponse). "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. BASILE, Lib. II de Baptismo, q. 9 : Voir plus
haut, question I, des péchés d’autrui, témoignage
4, page 4.
Article IV. - DES PECHES CONTRE LE SAINT-ESPRIT.
Question I
Qu’est-ce qu’un péché contre le Saint-Esprit ?
Pécher contre le Saint-Esprit, c'est rejeter avec mépris et par malice les dons et les grâces que Dieu nous offre, et qu'on a coutume d'attribuer particulièrement au Saint-Esprit, comme à la source des biens. Ce péché est si grand et de telle nature, qu'il est inexpiable, en sorte que, selon la parole de Jésus-Christ, on n'en obtient la rémission ni dans le siècle présent, ni dans le siècle à venir. Telle est en effet la loi de la conduite de Dieu envers nous, qu'il n'accorde sa grâce ici-bas, et sa gloire dans le ciel, qu’à ceux qui détestent le péché une fois connu pour tel, et qui de plus se proposent le bien et font choix d'un état de vie honnête et selon Dieu. Or, dans ces sortes de péchés on ne sait ni ce que c'est que détester le péché, ni ce que c'est que s'attacher au bien auquel on est obligé en même temps qu'on rejette les grâces, ou les secours au moyen desquels l’Esprit-Saint a coutume de ramener les hommes à la vertu. De là vient que ceux qui sont dans de telles habitudes, ou ne répondent jamais aux grâces de Dieu, ou n'y répondent
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que rarement et avec bien de la peine. Car on pèche
alors non par une suite de la faiblesse ou de la fragilité humaine,
ce qui s'appellerait pécher contre le Père et la puissance
du Père, comme fit l'apôtre saint Pierre lorsqu'il renia Notre-Seigneur,
ni par ignorance, ce qui s'appelle pécher contre le Fils et la sagesse
du Fils, comme faisait Saul dans le temps où il persécutait
l’Eglise ; mais par pure méchanceté et de dessein prémédité,
ce qui est bien plus criminel, comme nous en trouvons un triste exemple
dans la perversité et l'obstination des pharisiens.
Question II
Combien y a-t-il de péchés contre le Saint-Esprit ?
On en compte six, dont voici les noms, comme on a coutume de les désigner : la présomption de la miséricorde de Dieu ou de l'impunité du péché commis, le désespoir, l’entêtement à combattre la vérité connue, l'envie qui a pour objet les avantages spirituels du prochain, l'obstination et l'impénitence. Ce qui se comprendra encore mieux, si on l'exprime de la manière suivante :
1. Abuser par trop de confiance de la miséricorde de Dieu ;
2. Désespérer entièrement de la grâce de Dieu ou de son propre salut ;
3. Combattre la vérité de la religion malgré les lumières de sa propre conscience ;
4. Garder du dépit de voir ses frères faire leur salut ou avancer dans les vertus chrétiennes ;
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5. Persister sciemment et obstinément dans le crime ;
6. Persévérer dans le désordre sans
songer seulement à en faire pénitence.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. MATTHIEU, XII, 31-32 : " C'est pourquoi je vous dis : Tout péché et tout blasphème sera remis aux hommes ; mais le blasphème contre le Saint-Esprit ne leur sera point remis. - Et quiconque aura parlé contre le fils de l'homme, son péché lui sera remis ; mais si quelqu'un parle contre le Saint-Esprit, son péché ne lui sera remis ni dans le siècle présent ni dans le siècle à venir. "
2. MARC, III, 28-30 : " Je vous dis en vérité que tous les péchés que les enfants des hommes auront commis, et tous les blasphèmes qu'ils auront proférés, leur seront remis ; - mais si quelqu'un blasphème contre le Saint-Esprit, il n'en recevra jamais le pardon, et il sera coupable d'un péché éternel. - Il leur dit cela, sur ce qu'ils l'accusaient d'être possédé de l'esprit impur. "
3. LUC, XII, 10 : " Si quelqu'un parle contre le fils de l'homme, son péché lui sera remis ; mais si quelqu'un blasphème contre le Saint-Esprit, cet autre péché ne lui sera point remis. "
4. MATTHIEU, XXVI, 73-74 : " Peu après ceux qui étaient là s'avancèrent et dirent à Pierre : Assurément vous êtes aussi de ces gens-là, car votre langage même vous décèle.- Alors il se mit à faire des imprécations et à jurer qu'il ne connaissait point cet homme. "
5. I Timothée, I, 13 : " Moi qui était auparavant un blasphémateur un persécuteur et un outrageux ennemi de Jésus-Christ ; mais j'ai obtenu miséricorde de Dieu, parce que j'ai fait tous ces maux par ignorance, n'ayant point encore la foi. "
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6. Actes, IX, 1-2 : " Saul ne respirant encore que menaces
et qu'exécution sanguinaires contre les disciples du Seigneur, vint
trouver le grand-prêtre, - et lui demanda des lettres pour les synagogues
de Damas, afin que, s'il trouvait quelques personnes de cette religion,
hommes ou femmes, il les amenât prisonniers à Jérusalem.
"
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. THOMAS d'Aquin, Summ. theol., 2a 2æ, q. 14, art. 1 : " A l'égard du péché ou blasphème contre l'Esprit-Saint, il y a trois sentiments. En effet, plusieurs anciens docteurs, savoir, saint Athanase, saint Hilaire, saint Ambroise, saint Jérôme et saint Chrysostôme (S. Athanase, Tract. partic. super illud Matth., XII, Qui dixerit verbum contra Filium hominis ; S. Hilaire, can. 12 in Matth.; S. Ambroise, in Lucam, super illud cap. XII : Qui verbum in Spiritum Sanctum dixerit ; S. Chrysostôme, Hom. XLII in Matth. ; S. Jérôme, in Matth. XII), disent qu'on pèche contre l'Esprit-Saint quand on prononce un blasphème dans lequel l'Esprit-Saint est nommé, soit qu'on entende par l'Esprit-Saint Dieu lui-même pris dans son essence, ou la Trinité entière dont chaque personne est esprit et sainteté, soit qu'on prenne ce même nom pour le nom propre de l'une des trois personnes. Et de cette manière s'explique la distinction établie dans saint Matthieu (XII, 32) entre le blasphème contre l'Esprit-Saint le blasphème contre le fils de l'homme. Car parmi les actions de Jésus-Christ, il y en avait de naturelles à l'homme, telles que celles de manger, de boire, et autres semblables, et d'autres qui requéraient la puissance d'un Dieu, comme de chasser les démons, de ressusciter les morts, et de faire d'autres prodiges, qu'il opérait par la vertu de sa divinité et par l'opération de l'Esprit-Saint, dont il étai rempli quant à son humanité. Or, les Juifs avaient premièrement blasphémé contre le fils de l'homme, en l’appelant un mangeur et un buveur, un ami des publicains et des gens de mauvaise vie (MATTH., XI, 19). Mais ensuite ils en vinrent à blasphémer contre le Saint-Esprit, en attribuant au prince des démons les prodiges que Jésus- Christ opérait par la vertu de sa propre divinité et par l'opération de l'Esprit-Saint. Et c'est pour ce dernier fait qu'ils sont trouvés coupables d'avoir blasphémé contre le Saint-Esprit. Autre est l'interprétation de saint Augustin, qui dit dans son livre de verbis Dom., Serm. XI, c. 14,15 et 21, que le blasphème ou
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péché contre l'Esprit-Saint est l’impénitence
finale, ce qui a lieu quand on persévère jusqu’à la
mort dans le péché mortel. Or, cette sorte de blasphème
ne se commet pas seulement par les paroles que profère la bouche,
mais aussi par celles, ou que le cœur se dit à lui-même, ou
que l'action fait entendre ; et elle se commet non par un simple acte,
mais par des actes multipliés. Entendue de cette manière,
la parole contre le Saint-Esprit est appelée de ce nom, parce qu'elle
s'inscrit en faux contre la rémission des péchés qui
s'effectue par l'Esprit-Saint, qui est l'amour du Père et du Fils.
En cet autre sens, Notre-Seigneur ne faisait pas aux Juifs le reproche
de pécher eux-mêmes contre l'Esprit-Saint ; car ils n'étaient
pas encore réduits à l’état d'impénitence finale
; mais il les avertissait de prendre garde qu'en parlant comme ils le faisaient,
ils n'en vinssent à pécher contre l'Esprit-Saint. Et c'est
ainsi qu'il faut entendre ce qui est dit dans saint Marc (III, 29 et 30),
où après avoir rapporté ces paroles : Quiconque
aura blasphémé contre l'Esprit-Saint n'en recevra jamais
le pardon, etc., l’Evangéliste ajoute : Il parlait ainsi,
parce qu'ils disaient : Il est possédé de l'esprit impur.
D'autres enfin (Ce sentiment était celui de Pierre Lombard) entendent
encore différemment la chose, et disent qu'on pèche ou qu'on
blasphème contre l'Esprit-Saint, quand on pèche contre ce
qui lui est approprié ; or, ce qui est approprié à
l'Esprit-Saint, c'est la bonté, comme la puissance est appropriée
au Père, et la sagesse au Fils. Ils prétendent en conséquence
que pécher par faiblesse, c'est pécher contre le Père,
que pécher par ignorance, c'est pécher contre le Fils ; enfin,
que pécher par malice, en faisant le mal par choix, de la manière
que nous avons expliquée (1a 2æ, q.
78, art. 1 et 3), c'est pécher contre le Saint-Esprit. Et c'est
ce qui a lieu de deux façons différentes : 1° quand on
cède au penchant de l'habitude vicieuse appelée malice ;
et en ce premier sens, pécher par malice ce n'est pas la même
chose que pécher contre l'Esprit-Saint ; 2° quand on repousse
et qu'on écarte par mépris ce qui aurait pu empêcher
la volonté de faire choix du mal, comme quand on repousse l'espérance
par le désespoir, la crainte par la présomption, et ainsi
du reste, comme nous le dirons plus bas (art. suiv., et q. XX et XXI).
Or les choses, quelles qu'elles soient, qui nous empêchent de faire
choix du péché, sont encore des effets de l'Esprit-Saint
; et par conséquent pécher de la sorte par malice, c'est
pécher contre le Saint-Esprit. "
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2. Le même, ibidem, art. 2 : " Suivant la troisième acception donnée tout-à-l'heure au péché contre l'Esprit-Saint, il convient de distinguer six péchés de cette espèce, savoir : le désespoir, la présomption, l’impénitence, l’obstination, la résistance à la vérité connue, et l'envie des grâces que Dieu accorde à nos frères : péchés qu'on distingue entre eux d'après le mode de répulsion ou de mépris qu'ils supposent des choses qui peuvent empêcher l'homme de faire choix du péché. Et les choses de cette nature se rapportent, soit au jugement de Dieu, soit à ses dons, soit au péché lui-même. Car l'homme est détourné de faire choix du péché par la considération du jugement de Dieu, qui réunit la justice à la miséricorde, et par l'espérance, qui résulte de la considération de la miséricorde, dont l'office est de remettre les péchés et de récompenser les vertus. Or, l'espérance est détruite par le désespoir (Le désespoir nous persuade qu'il nous est impossible d'obtenir le pardon de nos péchés). L'homme est encore détourné du péché par la crainte qui naît de la considération de la justice divine, dont l'office à son tour est de punir les péchés ; or, la crainte est détruite par la présomption ; quand on présume par exemple, qu'on peut obtenir la gloire sans les mérites ou le pardon sans le repentir. Maintenant, les dons de Dieu qui nous retirent du péché sont au nombre de deux : l'un est l'adhésion à la vérité connue, et cette adhésion a pour contraire la résistance a la vérité connue, comme quand quelqu'un combat contre la vérité de la foi connue de lui comme telle, afin de pécher plus librement ; l'autre est le secours de la grâce intérieure qui a pour contraire l'envie portée aux grâces que reçoivent les autres ; comme quand on porte envie non-seulement à la personne de son prochain, mais encore au progrès que la grâce de Dieu fait dans le monde. Relativement au péché considéré en lui-même, il y a deux choses qui peuvent en retirer celui qui l'a commis : l'une est le désordre et la turpitude de l'acte dont il s'est rendu coupable, considération qui d'ordinaire nous porte à nous repentir de nos péchés. Et elle a pour contraire l’impénitence, non pas celle qui consiste à rester dans le péché jusqu’à la mort, comme on l'expliquait plus haut (D'après le sentiment de saint Augustin, dont on a parlé dans l'article précédent pages 125 et 126) ; car prise dans ce sens, ce ne serait pas un péché spécial mais une circonstance du péché en quelque sorte ; ce qu'on entend ici par impénitence, c’est la résolution où quelqu'un serait de ne pas se
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repentir. L'autre chose qui se trouve dans le péché et qui peut servir à en détourner, c’est le peu de valeur comme le peu de durée du bien qu'on y cherche, ainsi que le témoignent ces paroles de l'Apôtre (Rom., VI, 21) : Quel fruit avez-vous retiré alors des choses dont vous rougissez maintenant ? Cette dernière considération a pour effet ordinaire de nous engager à ne pas persister dans le péché ; mais cet effet même est détruit par l’obstination, qui existe dès-lors qu'on s'affermit dans la résolution de persévérer dans le mal. Le Prophète (JER., VIII, 6) parle de l'une et de l'autre de ces deux dispositions perverses, lorsqu'il dit : Il n'y a personne qui fasse pénitence de son péché en disant : Qu'ai-je fait ? voilà pour la première et lorsqu'il ajoute : Ils courent tous où leur passion les emporte, comme un cheval qui court avec impétuosité au combat : voilà pour la seconde. "
3. Ibidem, art. 3 : " Suivant les diverses acceptions qu'on donne au péché contre l'Esprit-Saint, les manières d'expliquer comment il est irrémissible sont différentes. En effet, si l'on entend par ce péché contre l'Esprit-Saint l'impénitence finale, on dit alors qu'il est irrémissible, parce que Dieu ne le remet en aucune manière. Car le péché mortel dans lequel l'homme persévère jusqu'à la mort n'étant pas remis en cette vie par la pénitence, ne le sera pas non plus dans l'autre. - Dans les deux autres acceptions, on le dit irrémissible non parce qu'il ne peut être remis d'aucune manière (On ne pourrait avancer, sans être hérétique, qu’il y a des fautes absolument irrémissibles. Ce serait l'erreur des novatiens, qui prétendaient que l’Eglise n'avait pas le pouvoir de remettre par l'absolution certains crimes), mais parce qu'en tant qu'on le considère en lui-même, il ne mérite aucunement d'être remis. Et cela sous deux rapports : 1° sous le rapport de la peine ; car celui qui pèche par ignorance ou par faiblesse mérite un châtiment moindre à proportion, au lieu que celui qui pèche par une malice réfléchie n'a pas d'excuse qui puisse engager son juge à diminuer son châtiment. De même, celui qui blasphémait contre le fils de l'homme dans un temps où sa divinité n'avait pas encore été révélée, pouvait avoir une sorte d'excuse à cause de l'infirmité de la chair qu'il voyait en lui, et méritait par-là même une peine moins sévère. Mais celui qui blasphémait la Divinité elle-même en attribuant au démon les œuvres de l'Esprit-Saint, n'avait pas d'excuse qui pût lui mériter quelque indulgence. C'est pourquoi, d'après l'explication qu'en donne saint Jean Chrysostôme (Hom. XLII in
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Matth.), ce péché n'a été remis aux Juifs ni en cette vie ni en l'autre ; car ils ont souffert pour l'expier les châtiments que les Romains leur ont infligés ici-bas, et les peines de l'enfer dans l'autre vie. Saint Athanase (Tract. super illud Matth. XII, Quicumque dixerit verbum) cite aussi pour exemple leurs ancêtres qui d'abord s'élevèrent contre Moïse à cause de la disette d'eau et de pain qu'ils éprouvaient, premiers murmures que Dieu supporta patiemment, parce qu'ils avaient pour excuse l'infirmité de la chair ; mais qui ensuite péchèrent plus grièvement en blasphémant contre l'Esprit-Saint, lorsqu'ils attribuèrent à une idole les bienfaits de Dieu qui les avait tirés de l’Egypte, et qu'ils dirent : Voila, Israël, vos dieux qui vous ont tirés de la terre d'Egypte. C'est pourquoi non-seulement le Seigneur les fit punir temporellement, en permettant que vingt-trois mille d'entre eux périssent dans ce même jour ; mais encore il les menaça des châtiments à venir par ces paroles : Au jour de la vengeance je visiterai ce péché qu'ils ont commis (Exode, XXXII). - 2° On peut entendre que ce péché est irrémissible quant à la faute, comme on dit d'une maladie qu'elle est incurable en elle-même, lorsqu'elle neutralise ce qui pourrait la guérir ; par exemple, si le mal ôte à la nature toute sa force, ou s'il produit le dégoût de toute espèce d'aliments et de remèdes, quoique Dieu après tout puisse toujours guéri celui qui en est atteint. De même on dit que le péché contre l'Esprit-Saint est irrémissible de sa nature, en tant qu'il repousse les moyens par lesquels s'obtient la rémission des péchés, quoiqu'il ne soit pas un obstacle invincible à la toute-puissance et à la miséricorde de Dieu, qui guérit quelquefois en quelque sorte miraculeusement ceux qui se trouvent atteints de cette maladie spirituelle. "
4. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Moralium in Job Lib. XXV, c. 16 : " Le péché se commet en trois manières, savoir par ignorance, ou par faiblesse, ou de propos délibéré. Le pèche commis par faiblesse est plus grand que celui qui se commet par ignorance ; mais celui qui se fait de propos délibéré est encore bien plus criminel. Saint Paul avait péché par ignorance quand il disait : Moi, qui étais auparavant un blasphémateur, un persécuteur et un outrageux ennemi de son Eglise ; mais j'ai trouvé miséricorde parce que j'ai fait tous ces maux dans l'ignorance, n'ayant point la foi (I Tim., I, 13). "
" Saint Pierre pécha par faiblesse, lorsque la voix d'une simple fille ébranla toute la vigueur de cette foi, qu'il avait si
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hautement confessée devant le Seigneur, et qu'il renia de bouche son Dieu, qu'il reconnaissait dans le fond de son cœur. Mais comme ces péchés d’ignorance et de faiblesse sont d'autant plus faciles à effacer que ce n'est pas d'une volonté pleine et entière qu'on les commet, saint Paul corrigea facilement par les lumières que la foi lui donna, le mal que son ignorance lui avait fait faire ; et saint Pierre raffermit bientôt par la vertu de ses larmes la racine de sa foi, devenue chancelante et comme toute desséchée par son péché. "
" Mais ceux-là péchèrent de propos délibéré, dont le Seigneur dit dans l'Evangile : Si je n'étais pas venu, et que je ne leur eusse pas parlé, ils n'auraient point de péché mais maintenant ils n'ont point d'excuse de leur péché (JEAN, XV, 22). Et un peu après : Mais maintenant ils les ont vues mes œuvres, et ils ont haï moi et mon père (JEAN, XV, 24). Or, il y a bien de la différence entre ne pas faire le bien, et haïr le docteur même qui l'enseigne ; comme il y en a aussi entre les péchés qui se font par précipitation, et ceux qui se commettent de propos délibéré. Car il arrive quelquefois qu'on commette un péché par précipitation et qu'on le condamne ensuite par le conseil et la réflexion de la volonté. Il peut se faire qu'aimant le bien, notre faiblesse nous empêche de l'accomplir ; mais pécher de propos délibéré c'est ne pas faire le bien, ni même l'aimer. Ainsi, comme c'est quelquefois un plus grand mal d'aimer le péché que de le commettre, c'est aussi un crime bien plus énorme de haïr la justice, que de manquer la pratiquer. "
" Or, il y en a dans l'Eglise, qui non-seulement ne font pas le bien, mais qui vont même jusqu’à cet excès de combattre et de détester dans les autres la vertu qu'ils négligent de pratiquer. Ces personnes ne pèchent pas seulement par ignorance ou par faiblesse, mais avec dessein et d'une volonté délibérée puisque, s'ils avaient la volonté de faire le bien, et que ce ne fût que par faiblesse ou par impuissance qu'ils manquassent de l'accomplir, ils aimeraient au moins dans les autres ce qu'ils ne font pas. Et si seulement ils s'y portaient de volonté et par leurs désirs, ils seraient bien éloignés de le haïr dans ceux qu'ils voient le pratiquer ; mais comme, malgré la connaissance qu'ils en ont reçue ils n'en tiennent nul compte dans leur conduite personnelle et le persécutent même dans les autres, l'Ecriture dit fort bien ici, en voulant désigner les gens de ce caractère : Ils se sont comme de propos délibéré retirés de lui (JOB, XXXIV, 27) ; et
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c'est encore pour cela qu'elle ajoute : Et ils n'ont
pas voulu comprendre toutes ses voies (ibidem). Elle ne dit
pas qu'ils n'ont pas la force de les entendre, mais qu'ils n'ont pas voulu
les entendre, parce qu'on dédaigne souvent d'apprendre ce qu'on
ne veut pas se mettre en peine de faire. Car, comme il est dit dans l’Evangile
que le serviteur qui aura su la volonté de son maître,
et qui néanmoins ne se sera pas tenu prêt, et n'aura pas fait
ce qu'il désirait de lui, sera battu rudement, mais que celui qui
n'aura pas su sa volonté et qui aura fait des choses dignes de châtiment,
sera moins sévèrement châtié, ces malheureux
s'imaginent trouver dans l'ignorance un prétexte pour pécher
impunément. Comme ils sont tout plongés dans le nuage épais
de l'orgueil, ils ne discernent pas la différence qu'il y a entre
ne pas savoir, et ne pas vouloir savoir. Ne savoir point, c'est ignorance
; mais ne pas vouloir savoir, c'est un pur orgueil. Et ils peuvent d'autant
moins alléguer pour excuse l'ignorance où ils sont de la
vérité qu’elle se présent à leurs yeux même
malgré eux sans qu'ils puissent éviter de la connaître.
"
Question III
Quelle est la sorte de présomption qui constitue le péché contre l’Esprit-Saint ?
C'est celle qui rend l'homme confiant dans la miséricorde de Dieu au point de lui faire oublier sa justice, et qui par conséquent lui ôte là crainte de Dieu en même temps qu'elle lui inspire la hardiesse de pécher.
C'est ici le péché de beaucoup de personnes de nos jours, qui, se contentant d'avoir en Jésus-Christ une foi stérile, croupissent comme de vils animaux dans l'ordure de leurs péchés et osent non-seulement s'assurer d’eux-mêmes le salut, mais l'assurer aussi aux autres, pourvu qu'on mette sa confiance dans les mérites de Jésus-Christ et dans la grâce de Dieu appréhendée par la foi, quelque peu de soin qu'on ait d'ailleurs de produire des fruits de pénitence. C’est aux gens de cette espèce que s'adresse l’apostrophe suivante de saint Paul, ce docteur des nations dans la foi et dans la vérité : Est- ce que vous méprisez les richesses de la bonté de Dieu, de sa patience et de sa longue tolérance ? Ignorez-vous que sa douceur vous invite à la pénitence ?
C'est pourquoi le même apôtre, bien loin de préconiser la foi comme suffisant toute seule pour le salut, ordonne dans un autre endroit à tous les fidèles de travailler à leur salut avec crainte et tremblement ; et si d'ailleurs il recommande la foi, ce
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n'est pas une foi oisive et morte, comme l'appelle saint Jacques, mais une foi vive et agissante, qui opère par la charité.
C'est contre cet énorme péché que
sont dirigées ces malédictions que nous lisons dans l'Ecclésiastique
: Ne soyez point sans crainte au sujet de l'offense qui vous a été
remise, et n'ajoutez pas péché sur péché. Ne
dites pas : La miséricorde de Dieu est grande ; il aura pitié
du grand nombre de mes péchés. Car son indignation est prompte,
aussi bien que sa miséricorde et il regarde les pécheurs
dans sa colère. C'est donc avec justice que le Prophète
dit à son tour : Je chanterai, Seigneur, devant vous votre miséricorde
et votre justice. Et ailleurs : La majesté du Roi éclate
dans son amour pour la justice.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. JOEL, 1, 17 : " Les grains sont pourris sous la gelée qui les couvre ; les greniers ont été détruits et les magasins ruinés, parce que le froment a été frappé de stérilité par la sécheresse. "
2. II PIERRE, II, 18-19 : " Car tenant des discours pleins d'insolence et de folie, ils amorcent par les passions de la chair et les voluptés sensuelles ceux qui peu de temps auparavant s'étaient séparés des personnes attachées à l'erreur, - leur promettant la liberté, tandis qu'ils sont eux-mêmes esclaves de la corruption. "
3. Ecclésiaste, VIII, 14 : " Il y a des impies qui vivent dans la sécurité, comme s'ils avaient fait des œuvres de justice. "
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4. LUC, III, 8-9 : " Faites donc de dignes fruits de pénitence et n'allez pas dire : Nous avons Abraham pour père ; car je vous déclare que Dieu peut faire naître de ces pierres mêmes des enfants Abraham. - La coignée est déjà à la racine des arbres ; tout arbre donc qui ne porte pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu. "
5. Id., XIII, à : " Si vous ne faites pénitence vous périrez tous de la même manière. "
6. MATTHIEU, III, 8-10 : " Faites donc de dignes fruits de pénitence, etc. - Tout arbre qui ne produit pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu. "
7. Actes, XXVI, 20 : " Mais j'annonçai d'abord à ceux de Damas et de Jérusalem et dans toute la Judée et ensuite aux gentils, qu'ils fissent pénitence et se convertissent en faisant de dignes œuvre de pénitence. "
8. Ecclésiastique, II, 22 : " Si nous ne faisons pénitence, nous tomberons dans les mains du Seigneur : chose tout autrement à craindre pour nous que de tomber dans les mains des hommes. "
9. Romains, II, 4-6 : " Est-ce que vous méprisez les richesses de sa bonté, de sa patience et de sa longue tolérance ? Ignorez-vous que la bonté de Dieu vous invite à la pénitence ? - Et cependant, par votre dureté et par l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, - qui rendra à chacun selon ses œuvres. "
10. Ecclésiaste, VIII, 11-13 : " Parce que la sentence de condamnation n'est pas immédiatement portée contre ceux qui font le mal, les enfants des hommes commettent le crime sans aucune crainte. - Mais cette patience même avec laquelle le pécheur est souffert après avoir cent fois prévariqué, m’a fait connaître que des biens sont réservés à ceux qui craignent Dieu et qui révère sa présence - Nul bien pour l'impie ; (Dieu) abrègera ses jours ; ceux qui ne craignent pas la face du Seigneur passeront comme l'ombre. "
11. Ecclésiastique, XV, 21-22 : " Il (Dieu) n'a commandé à personne de faire le mal, et il n'a donné à personne la licence de pécher ; - car il ne se plaît point à avoir un grand nombre d'enfants infidèles et inutiles. "
12. I Corinthiens, XIII, 1-3 : " Quand je parlerais toutes les langues des hommes et des anges mêmes, si je n'avais point la charité, je serais comme un airain sonnant ou une cymbale
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retentissante. - Et quand j'aurais le don de prophétie que je pénétrerais tous les mystères, et que je posséderai toutes les sciences, et quand j'aurais toute la foi possible, au point de transporter les montagnes, si je n'avais point la charité, je ne serais rien. - Et quand j'aurais distribué, etc. "
13. Philippiens, II, 12 : " Ainsi, mes très-cher frères, comme vous avez toujours été obéissants, ayez soin, non-seulement lorsque je suis présent parmi vous, mais encore plus tandis que je suis absent, de travailler à votre salut avec crainte et tremblement. "
14. Psaume II, 11 : " Servez le Seigneur avec crainte, et réjouissez-vous devant lui avec une sainte frayeur. "
15. Proverbes, XXVIII, 14 : " Heureux l'homme qui est toujours dans la crainte ; mais celui qui a le cœur endurci se précipitera dans le mal. "
16. Romains, XI, 20-21 : " Pour vous, vous demeurez fermes dans votre foi ; mais prenez garde de vous élever, tenez-vous plutôt dans la crainte. - Car si Dieu, etc. "
17. I Corinthiens, IV, 4 : " Car encore que ma conscience ne me reproche rien, je ne suis pas justifié pour cela. "
18. Ibid., X, 12 : " Que celui qui croit être debout, prenne bien garde de tomber. "
19. JACQUES, II, 14-26 : " Mes frères, que servira-t-il à un homme de dire qu'il a la foi, s'il n'a pas les œuvres ? La foi pourra-t-elle sauver ? - Si un de vos frères ou une de vos sœurs n'ont ni de quoi se vêtir, ni ce qui leur est nécessaire chaque jour pour vivre, - et que quelqu'un d'entre vous leur dise : Allez en paix, préservez-vous du froid et de la faim, sans leur donner cependant de quoi satisfaire à leurs besoins, à quoi serviront vos paroles ? - Ainsi la foi qui n'est pas accompagnée des œuvres est morte en elle-même - De sorte qu'on pourra dire : Vous avez la foi, et moi j'ai les œuvres ; montrez-moi votre foi que les œuvres n'accompagnent pas, et moi je vous montrerai ma foi par mes œuvres- Vous croyez qu'il n'y a qu'un Dieu ; vous faites bien ; mais les démons le croient aussi, et ils tremblent. - Or voulez-vous savoir, homme vain, que la foi sans les œuvres est morte ? - Votre père Abraham ne fut-il pas justifié par les œuvres lorsqu'il offrit son fils Isaac sur l'autel ? - Voyez-vous comme sa foi coopérait à ses œuvres et comme ce fut de ses œuvres qu'elle reçu sa perfection ? - Ainsi fut accomplie cette parole de l’Ecriture : Abraham crut ce que
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Dieu lui avait dit, et sa foi lui fut imputée à justice, et il fut appelé ami de Dieu. - Vous voyez donc que l'homme est justifié par les œuvres et non par la foi seule. - Rahab aussi, cette femme débauchée, ne fut-elle pas de même justifiée par ses œuvres en recevant chez elle les espions, et les renvoyant par un autre chemin ? Car comme le corps est mort lorsqu'il est sans âme, ainsi la foi sans les œuvres est morte en elle-même. "
20. Galates, V, 6 : " Car en Jésus-Christ, ni la circoncision ni l'incirconcision ne servent de rien, mais seulement la foi qui agit par la charité. "
21. Ecclésiastique, V, 4-9 : " Ne dites pas : J’ai péché, et que m'en est-il revenu de funeste ? Car le Très-Haut est lent à punir les crimes. - Ne soyez pas sans crainte au sujet de l'offense qui vous a été remise, et n'ajoutez pas péché sur péché. - Ne dites pas : La miséricorde de Dieu est grande ; il aura pitié de la multitude de mes péchés. - Car son indignation est prompte aussi bien que sa miséricorde, et il regarde les pécheurs dans sa colère. - Ne diffère point vous convertir au Seigneur, et ne remettez pas pour cela d'un jour à l'autre : - Car sa colère éclatera tout-à-coup, et il vous perdra au jour de la vengeance. "
22. Ecclésiaste, IX, 1-3 : " Les justes et les sages, et toutes leurs œuvres sont dans la main de Dieu ; et cependant l'homme ne sait s'il est digne d'amour ou de haine. - Toutes choses sont incertaines et réservées pour l'avenir ; tout arrive également au juste et à l'impie, au bon et au méchant, au pur et à l'impur, à celui qui immole des victimes et à celui qui méprise les sacrifices ; l'innocent est traité comme le pécheur et le parjure comme celui qui respecte les serments. - Ce qu'il y a de plus fâcheux dans tout ce qui se passe sous le soleil, c'est que les même choses arrivent à tous ; de là vient que les cœurs des enfants des hommes sont remplis de malice et d'une sotte présomption pendant toute leur vie, après quoi ils descendent parmi les morts. "
23. Psaume C, 1 : "Je chanterai, Seigneur, devant vous votre miséricorde et votre justice. "
24. Ps. XCVIII, 4 : " Ce roi puissant (l'Eternel) chérit la justice ; vous avez établi, Seigneur, des lois pleines de droiture ; vous avez rendu des jugements équitable parmi les enfants de Jacob. "
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TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. GREGOIRE- LE-GRAND, in caput tertium libri I Regum, sur ces paroles, Dominum est ; quod bonum est in oculis suis, faciat : " Il est le maître qu'il fasse ce qui est bon à ses yeux. Celui qui n'examinera que superficiellement cette réponse d’Héli, trouvera qu'il aura répondu avec autant de sagesse que d'humilité ; mais si on veut bien l'approfondir, on n'y trouvera qu'une humilité fausse. Héli aurait été véritablement humble, s'il s'était mis en devoir de réparer la faute qui lui était reprochée. Oh ! qu'Héli trouve d'imitateurs dans tous ces hommes, qui lisant tous les jours dans les saintes lettres les menaces que Dieu fait aux pécheurs et qu'ils sentent qu'ils ont encourues, ne craignent pas de les braver par la crainte qu'ils ont de déplaire aux hommes, ménagent les hommes de peur de les trouver implacables, et ne se gênent pas d'offenser Dieu, qu'ils comptent trouver toujours indulgent ! Mais une confiance aussi déraisonnable provoque les vengeances de Dieu, plutôt que d'attirer ses miséricordes. Car dans la bouche d'un pécheur impénitent et déterminé à ne pas changer de vie, que signifient ces paroles, Il est le maître, qu'il fasse ce qui est bon à ses yeux, sinon une confiance présomptueuse dans la miséricorde d'un Dieu qui n'ordonne rien qu'avec sagesse ? Or, pour que cette confiance n'ait pas un tel défaut, il faut qu'en même temps on répare par la pénitence et qu'on efface par ses larmes la faute dont on espère le pardon. Ainsi donc présumer, tout en continuant à pécher de la clémence de son Créateur, c’est s'exposer à être englouti dans l'abîme profond de la justice divine. Je le répète, présumer de la miséricorde de Dieu, sans se purifier par la pénitence des péchés commis, c'est courir les risques d'un jugement sévère et rigoureux. Lors donc que nous citons Héli comme exemple des prédicateurs coupables, nous ne faisons pas envisager uniquement la faute de sa molle indulgence, mais aussi la témérité de sa confiance après sa faute commise. Car, tandis qu'il aurait pu apaiser le courroux divin par l'humilité de son repentir, il encourut le châtiment que lui méritait sa faute, en négligeant de mettre à profit l'avertissement qu'il avait reçu. Si d'un côté Dieu est la justice et l'équité même, il est de l'autre, d'après la foi des peuples, surabondamment miséricordieux. C'est ce qui a fait dire au Prophète : Ses miséricordes sont au-dessus de ses ouvrages (Ps. CXLIV, 9). De là vient, qu'auprès avoir menacé par le prophète Jonas les
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Ninivites d'une ruine entière il accorda à leur repentir le salut de leur ville (JON., III, et suiv.). De là vient encore, qu'il prédit d'abord au roi Ezéchias par la bouche de son prophète la mort qui devait être la peine de la vanité de ce roi, et qu'ensuite ce roi, qu'effraya une semblable prédiction, ayant répandu devant le Seigneur les larmes d'un repentir sincère, eut le bonheur d'échapper par les moyens que la crainte lui fit prendre, à la mort qu'il avait mérité. Et le Seigneur n'avait-il pas promis d'abord à Héli que sa maison et celle de son père servirait toujours en sa présence ? Et cependant, ce même Dieu qui avait assuré la maison de ce pontife de sa protection tant qu'elle lui avait été fidèle la réprouva à la fin au point de dire à son sujet : Mais maintenant je suis bien éloigné de cette pensée (I Samuel, II, 30). Si donc Dieu peut révoquer ses promesses à l'égard de ceux qui, en se pervertissant, s'en rendent indignes, à combien plus forte raison arrêtera-t-il les effets de ses menaces, lorsque se montreront convertis à ses yeux ceux à qui leurs précédentes iniquités auront attiré d'abord l'annonce de ses vengeances ? Que pourrons-nous donc alléguer pour notre excuse, nous, qui commettons tous les jours de nouveaux crimes, et n'en sommes pas moins tranquilles sur notre sort à venir ? Cette sécurité même dans laquelle nous nous entretenons par rapport la sévérité des jugements de Dieu, est ce qui doit nous inspirer le plus de crainte, puisque nous voyons une sécurité semblable dans ce malheureux pontife, après même que sa négligence l'eut rendu l'objet de l'anathème céleste. "
2. Le même, Moralium in Job lib. XXXIII, c. 15 (al. 7) : " Notre. Rédempteur est bon et juste ; mais il ne faut pas dire, pour pécher plus librement : Puisqu'il est bon, il me pardonnera si je pèche ; ni après avoir péché : Puisqu'il est juste, je n'ai pas lieu d'espérer qu'il me pardonnera. Car Dieu pardonne les crimes lorsqu'on les pleure ; mais on doit craindre de commettre ce qu'on n'est pas assuré de pouvoir pleurer assez dignement. Il faut redouter la justice de Dieu avant de pécher mais après qu'on a péché, il faut prendre confiance en sa bonté. Et on ne doit ni tellement craindre sa justice, qu'on ne puisse être fortifié par la consolation de l'espérance, ni se confier tellement en sa miséricorde, qu'on néglige d’appliquer à ses blessures le remède d'une digne pénitence. "
" Mais on doit considérer que celui dont on présume qu'il pardonnera avec bonté sait aussi juger avec une sévérité très-rigou-
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reuse. Si donc l’espérance que le pécheur a dans la bonté de Dieu lui cause beaucoup de joie, il faut que le pénitent qui travaille à se corriger tremble de crainte à la pensée de sa justice. Ainsi l'espoir de notre confiance doit être mêlé d'appréhension, en sorte que, comme d'une part la justice de ce juge si sévère nous épouvante pour nous obliger à nous corriger de nos péchés, de l'autre la grâce de ce Sauveur qui nous délivre avec tant de miséricorde, nous invite à en espérer le pardon avec confiance. "
" C'est pour cela qu'un ancien sage dit dans 1’Ecriture (Ecclé., V, 7) : Ne dites pas, les miséricordes du Seigneur sont grandes, il ne se souviendra pas de mes péchés. Car il joint aussitôt la miséricorde à la justice, lorsqu'il ajoute : Car la miséricorde et la colère viennent également de lui (Cf. Morales de saint Grégoire, t. IV. S. Grégoire lisait ainsi les paroles de l'Ecclésiastique rapportée ici en dernier lieu : Misericordia enim et ira ab illo). "
3. Le même, Lib. VI epistolarum, Epist. 22 ad Gregoriam cubiculariam Augustæ : " Quant à ce que vous m'avez fait l'honneur d'ajouter dans vos lettres, que vous ne me laisseriez pas de repos, tant que je ne vous aurais pas écrit en vertu d'une révélation que vos péchés sont pardonnés, c’est là une question difficile et inutile tout à la fois : difficile, parce que je suis indigne d'être favorisé d'une révélation semblable ; inutile, parce que vous ne devez cesser de craindre pour vos péchés, que lorsque parvenue au terme de votre vie, vous ne pourrez plus en faire pénitence. Jusqu’à ce que ce jour-là soit arrivé, c'est pour vous un devoir de vous alarmer et de vous inquiéter au sujet de vos fautes, et de vous en purifier par des larmes journalières. L'apôtre saint Paul avait bien été transporté jusqu'au troisième ciel, jusque dans le paradis même, où il avait entendu des paroles mystérieuses qu'il n'est permis à aucun homme de répéter et pourtant il disait saisi de crainte - : Je châtie mon corps et le réduit en servitude, de peur qu'après avoir prêché aux autres, je ne sois réprouvé moi-même (I Cor., IX, 27). Il craint encore, quoique déjà introduit dans le ciel ; et nous voudrions ne plus craindre, nous qui sommes toujours sur cette terre ? Considérez attentivement, ma chère fille, que la sécurité est ordinairement la mère de la négligence. Vous ne devez donc point aspirer à obtenir dans la vie présente une sécurité qui vous rendrait négligente dans l'accomplissement de vos devoirs. Car il est écrit : Heureux l'homme qui est toujours dans la crainte (Prov., XXVIII, 14). Et encore :
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Servez le Seigneur dans la crainte, et réjouissez-vous en lui avec tremblement (Ps. II, 11). Il est donc indispensable que votre âme soit retenue par la crainte pendant la courte durée de cette vie, pour pouvoir ensuite se réjouir sans fin dans une paix inaltérable. "
4. S. AUGUSTIN, ou selon d'autres saint Fulgence, évêque de Ruspe, de fide ad Petrum diaconum, c. 3 : " En quelque jour que ce soit qu'un homme aura fait une vraie pénitence de ses péchés, et qu'éclairé de la lumière d'en-haut, il aura amendé ses mœurs, il recevra sans aucun doute le bienfait du pardon, parce que Dieu, comme il le dit par son prophète (EZECH., XXXIII, 11), ne veut pas la mort du pécheur ou du mourant, mais plutôt qu'il sorte de ses voies mauvaises et qu'il .revienne à la vie. Personne cependant ne doit, sous prétexte qu'il a tout à espérer de la miséricorde divine, persévère dans l'habitude du péché, puisque, lors même qu'il ne s'agit que de maladies corporelles, personne ne veut demeurer dans cet état malgré l'espérance qu'il conçoit de sa future guérison. Car il pourrait arriver à ceux qui négligent ainsi de se retirer des sentiers du vice, en se flattant d'être toujours assuré que Dieu leur pardonnera, d'être surpris tout-à-coup par la divine justice, sans avoir le temps de se convertir, ni pouvoir par conséquent obtenir le bienfait du pardon. C'est pourquoi la sainte Ecriture donne à chacun de nous cet avis paternel : Ne différez point à vous convertir au Seigneur, et ne remettez pas pour cela d'un jour à l'autre ; car sa colère éclatera tout d’un coup, et il vous perdra au jour de la vengeance (Eccles., V, 8-9). Le saint roi David dit aussi : Si vous entendez aujourd'hui sa voix, gardez-vous bien d'endurcir vos cœurs (Ps. XCIV, 8). Les paroles suivantes de saint Paul n'ont pas un autre sens : Prenez donc garde, mes frères, que quelqu'un ne tombe dans un dérèglement de cœur et dans une incrédulité qui le sépare du Dieu vivant,- mais plutôt exhortez-vous chaque jour les uns les autres, pendant que dure ce temps que l'Ecriture appelle Aujourd'hui, de peur que quelqu'un de vous, étant séduit par le péché, ne tombe dans l’endurcissement (Hébr., III, 12-13). On vit donc dans l'endurcissement, soit que, désespérant d'obtenir le pardon de ses fautes, on perde le courage de s'en convertir, soit qu'on présume tellement de la miséricorde de Dieu, qu'on reste par ce motif dans l'état de péché jusqu’à la fin de sa vie. C'est pourquoi nous devons nous pénétrer en même temps, et de l'amour de la miséricorde de Dieu, et de la crainte de sa justice, afin que ni le désespoir ne nous fasse
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renoncer à obtenir le pardon de nos fautes, ni la présomption ne nous empêche de nous en corriger, étant bien assuré que la justice du souverain juge exigera de nous l'acquittement rigoureux de toutes les dettes qui ne nous auront pas été remises par la clémence de notre divin Rédempteur. Car autant la miséricorde est disposée à recevoir en grâce ceux qui se convertissent, autant la justice est résolue à punir inexorablement ceux qui restent endurcis. Ce sont ces derniers qui, coupables du péché contre l'Esprit-Saint, n'obtiendront leur pardon, ni dans le siècle présent, ni dans le siècle à venir. "
5. S. BERNARD, Serm. XXXVIII ex parvis sermonibus : " Après que leurs infirmités se sont multipliées, ils ont couru avec vitesse (Ps. XV, 4). Pourquoi les hommes sont-ils si lâches à faire pénitence durant leur vie, et s'en reposent-ils sur la confession qu'ils songeront à faire quand ils se verront réduits à l'extrémité ? Comment pensent-ils pouvoir dans l'espace d'une heure recueillir toutes les pensées de leur âme, après l'avoir laissée se prendre à tous les objets répandus dans le monde, et s'emporter à tous les désirs ? Je ne dis pas, c'est le Seigneur qui parle, que je ne sauve personne de ceux qui s'entretiennent dans ces dispositions ; car je puis en un moment remettre tout dans l'ordre ; mais je ne réunirai point à moi ceux qui restent dans leurs souillures (Saint Bernard donne ici aux paroles, non congregabo conventicula corum de sanguinibus, du verset 11 du psaume XV, un sens différent de celui que lui attribuent les autres interprètes), jusqu’à ce que, leurs infirmités s'étant multipliées, leurs péchés les abandonnent avant qu'ils aient eux-mêmes abandonné leurs péchés. Si ma mémoire n’est pas en défaut, vous ne trouverez dans tout le canon des Ecritures que le bon larron qui soit sauvé entre tous les pécheurs de cette espèce. Gardez-vous donc bien de courir les risques d'une situation aussi périlleuse. Sans doute que l'Esprit souffle non-seulement où il veut, mais encore quand il veut, et qu'il ne lui en coûte rien d'inspirer tout-à-coup à quelques-uns les sentiments d'une contrition parfaite, dont d'autres sont à peine capables après de longs efforts ; mais qui vous a dit qu'il doive venir ainsi à votre secours à votre dernière heure, après que vous l'aurez constamment repoussé ? L'esprit de sagesse est plein de bonté (Sag., I, 6), j'en conviens, mais il ne laissera pas impunies les lèvres du maudit (Maledictum. Le texte de la Vulgate porte maledicum, médisant). Voulez-vous savoir quel est cet homme ? Maudit est celui dont l'espérance même est un péché. "
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6. S. AUGUSTIN, Lib. de fide et operibus, c. 14 : " Passons maintenant à l'examen d'une erreur dont doivent se désabuser toutes les âmes religieuses, de crainte qu'une fausse sécurité ne les perde, si elles viennent à croire que la foi seule leur suffit pour se sauver, et que sous ce prétexte elles négligent de mener une bonne vie et de se maintenir dans les voies de Dieu en faisant le bien. Car il s'en trouvait quelques-uns du temps même des apôtres, qui ne comprenant pas certains passages obscurs de saint Paul, s'imaginaient qu'il leur disait : Faisons le mal parce qu'il en revienne du bien, parce qu'il avait dit (Rom., V, 20) : La loi est survenue pour donner lieu à l'abondance du péché ; mais, où il y a une abondance de péché, Dieu a répandu une surabondance de grâce. Ce qui est vrai en ce sens, que les hommes qui avaient reçu la loi en présumant avec orgueil de leurs propres forces, et sans avoir cette humilité de la foi qui leur eût fait obtenir le secours divin pour corriger leurs inclinations vicieuses, s'étaient rendus coupables de péchés plus énormes en même temps que plus nombreux en manquant de fidélité à cette loi même. Et ainsi forcés par la conscience de leurs crimes, ils se réfugiaient dans la foi qui leur était prêchée comme dans un asile, où ils se tenaient assuré d'obtenir grâce et secours du Dieu miséricordieux qui a fait le ciel et la terre, afin que la charité se répandant dans leurs cœurs par la vertu de l'Esprit-Saint, ils fissent avec amour ce qui leur était ordonné malgré les désirs contraires du siècle, selon ce qui est écrit dans les Psaumes : Après que leurs infirmités se sont multipliées ils ont couru avec vitesse (Ps. XV, 4). Quand donc nous entendons saint Paul nous dire qu'il reconnaît que l'homme est justifié par la foi sans les œuvres de la loi (Rom., III, 28), ce n'est pas pour nous engager à ne plus nous mettre en peine d'accomplir les œuvres de justice en nous contentant de professer la foi dont il nous fait un précepte, mais pour que personne n'ignore qu'on peut être justifié par la foi, quand même on n'aurait pas pour recommandation les œuvres de la foi. Car ces œuvres doivent suivre le bienfait de la justification, plutôt que le précéder. Ainsi je n'ai point à m'étendre davantage sur cette question dans le présent ouvrage, d'autant plus que je l'ai traité au long dans un autre ouvrage composé exprès, et intitulé : De litterâ et spiritu. Cette opinion ayant donc pris naissance à cette époque, les épîtres des autres apôtres, c’est-à-dire de saint Pierre, de saint Jean, de saint Jacques et de saint Jude ont eu particulièrement pour but de la combattre, et d’établir au con-
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traire que la foi ne sert de rien sans les œuvres comme saint Paul lui-même en vantant le mérite de la foi, n'entendait pas parler d'une foi telle quelle, qui se borne à croire en Dieu, mais d'une foi vraiment évangélique ou féconde en bonnes œuvres qui aient pour principe la charité : La foi, dit-il, animé de la charité (Gal., V, 6). Saint Paul est si loin de croire, comme quelques-uns, qu'une foi quelconque suffit pour le salut, qu'il va jusqu'à dire : Quand j'aurais toute la foi possible, jusqu’à transporter les montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien (I Cor, XIII, 2). Mais que la foi soit au contraire animée de la charité, dès-lors on est assuré de mener une bonne vie ; car l'amour est l'accomplissement de la loi (Rom., XIII, 10). C'est évidemment pour cette raison que saint Pierre, dans sa seconde épître, ayant à exhorter les fidèles à qui il écrivait à mener une vie sainte et pure, après avoir dit que ce monde passera tôt ou tard pour faire place à de nouveaux cieux et à une nouvelle terre, où les justes auront désormais leur demeure, pour nous faire comprendre par-là quelle doit être notre sainteté de vie, si nous voulons partager un jour la même demeure ; sachant que quelques esprits mal disposés s’autorisaient de quelques expressions obscures de l'apôtre saint Paul pour se croire assurés de leur salut en se bornant à avoir la foi sans se mettre en peine de bien vivre, dit expressément qu'il y a dans les écrits de cet apôtre certains passages difficiles à entendre, que quelques-uns détournaient, ainsi que les autres Ecritures, de mauvais sens pour leur propre ruine (II PIERRE, III, 16), bien que cet apôtre n'eût pas une autre doctrine que tous ses collègues sur la nécessité des bonnes œuvres pour pouvoir parvenir au salut éternel. Saint Jacques de son côté s'élève avec force contre ceux qui prétendent que la foi sans les œuvres peut suffire pour le salut, et il les compare aux démons par ces paroles remarquables : Vous croyez qu'il n'y a qu'un Dieu ; vous faites bien, mais les démons le croient aussi, et la pensée qu'ils en ont les fait trembler. Que pouvait dire cet apôtre qui fut à la fois plus véritable, plus fort et plus précis, puisque nous lisons dans l’Evangile que les démons, en confessant Jésus-Christ pour le fils de Dieu, s'attirèrent pour cela une réprimande de sa part, quoique cette confession fût au fond la même que celle que fit saint Pierre et qui lui mérité des éloges. Mes frères, dit saint Jacques, que servira-t-il a quelqu'un de dire qu'il a la foi, s'il n’a point les œuvres ? La foi pourra-t-elle le sauver (JAC., II, 14) ? Il dit encore que la foi sans les œuvres est morte. Combien se
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trompent donc ceux qui n'ont que cette foi morte, et qui néanmoins se promettent de vivre éternellement. "
7. Ibidem, c. 22 : " Qu'on ne soit donc pas assez imprudent pour oser se persuader à soi-même qu'on connaît Dieu, si on ne le confesse qu’à la manière des démons, c’est-à-dire avec une foi morte ou sans bonnes œuvres et pour se croire par conséquent assuré de parvenir à la vie éternelle, d’après cette parole de Notre-Seigneur : La vie éternelle consiste à vous connaître pour le seul vrai Dieu, et Jésus-Christ que vous avez envoyé (JEAN, XVII, 5). Car on doit se remettre aussi devant les yeux cette autre parole : Nous sommes assurés que nous le connaissons véritablement si nous gardons ses commandements. Celui qui dit qu'il le connaît et qui ne garde pas ses commandements, est un menteur, et la vérité n’est point en lui (I JEAN., II, 3-4). Et pour qu'on ne pense pas que ses commandements se réduisent à la foi seule, quoique personne n'ait osé dire pareille chose, surtout comme il parle de commandements qui, pour ne pas effrayer par leur multitude, se réduisent à deux dans lesquels sont renfermés la loi et les prophètes ; quoiqu'on puisse fort bien dire que les commandements de Dieu se rapportent à la foi seule, si par cette foi on entend non une foi morte, mais la foi vive qui est animée de la charité ; quoi qu'il en soit, saint Jean lui-même a expliqué plus loin sa pensée quand il a dit : Le commandement qu'il nous fait est de croire au nom de son fils Jésus-Christ et de nous aimer les uns les autres (I JEAN, III, 23). L'utilité de la foi qui nous fait croire en Dieu, qui nous le fait adorer, qui nous le lait connaître consiste donc en ce qu'elle nous porte à lui demander les grâces nécessaires pour bien vivre, et à nous faire obtenir notre pardon de lui quand il nous arrive de pécher, à ne point nous endormir dans une fausse paix tout en faisant les actions qu'il réprouve, mais à désavouer au contraire toutes ces actions mauvaises, et à lui dire : Pour moi, j'ai dit : Seigneur, ayez pitié de moi ; guérissez mon âme car j'ai péché contre vous (Ps. XL, 5) : paroles que ne savent à qui adresser ceux qui ne croient pas en lui, et que prononcent inutilement ceux qui sont tellement éloignés de lui, qu'ils sont étrangers à la grâce du Médiateur. De là ces paroles que nous lisons dans le livre de la Sagesse (XV, 2), et que je ne sais comment pourront entendre ceux qui s'endorment dans une funeste sécurité : Quand nous aurions péché nous ne laisserions pas d'être à vous, nous qui savons quelle est votre grandeur, c'est-à-dire que nous appartenons à un Dieu qui a la vo-
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lonté et en même temps le pouvoir de guérir de leurs péchés ; ceux qui s'en repentent, mais qui d'un autre côté ne craint pas de prononcer la condamnation de ceux qui persévèrent dans leur malice. Enfin, après avoir dit : Nous ne laisserions pas d'être à vous, l'Ecrivain sacré ajoute : Nous qui savons quelle est votre puissance, puissance en effet à laquelle le pécheur ne saurait échapper ou se soustraire. C'est pourquoi il dit encore à la suite de ces paroles : Si nous ne péchons pas, nous savons que vous nous comptez au rang de ceux qui vous appartiennent. Car quel est l'homme qui, pensant comme il le doit à cette demeure préparée auprès de Dieu même à ceux qu'il a prédestinés à ce bonheur et qu'il compte à ce titre, ne fera pas tous ses efforts pour vivre de manière à se trouver un jour digne d'y être admis ? Ainsi ce que dit saint Jean : Je vous ai écrit ces choses afin que vous ne péchiez point ; si cependant quelqu’un pèche, nous avons pour avocat auprès du père Jésus-Christ, le juste par excellence, qui intercédera pour nos péchés ; ces paroles, dis- je, ne doivent pas avoir pour effet de nous enhardir à pécher encore, mais plutôt de nous faire renoncer aux péchés que nous aurions commis, assuré que nous sommes d'en obtenir le pardon, grâce à cet avocat puissant que ne savent point invoquer les infidèles. "
8. S. AUGUSTIN, Enchirid. ad Laurentium, c. 67 (al. 23 et 18) : " Il y a des personnes qui croient que tous ceux qui ne renoncent pas à la foi chrétienne et qui, après avoir été baptisés dans le sein de l'Eglise catholique, ne s'en séparent ni par l'hérésie ni par le schisme, seront sauvés en passant par le feu, quand même ils auraient persévérés jusqu’à la mort dans les plus grands crimes, sans les effacer par la pénitence ni les racheter par des aumônes. Ces personnes avouent bien que ces mauvais chrétiens seront punis longtemps à proportion de la grandeur de leurs crimes ; mais elles prétendent que le feu qui les brûlera ne sera pas éternel. Pour moi, le jugement le plus favorable que je puisse porter de ceux qui, étant d'ailleurs catholiques, ont une pareille pensée, c'est qu'ils se laissent tromper par un certain sentiment d'humanité et de compassion toute naturelle. Car assurément, si nous consultons là-dessus l’Ecriture sainte, nous y trouverons une doctrine bien différente. J'ai composé sur cette question un traité qui a pour titre : De la foi et des œuvres. J'y ai prouvé autant que j'ai pu le faire avec l'aide de Dieu, par l'autorité des saintes Ecritures, que la foi qui sauve est celle-là seulement que saint Paul a caractérisée assez clairement quand
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il a dit : En Jésus-Christ, ni la circoncision, ni l'incirconcision ne servent de rien, nais la foi seulement qui opère par l'amour (Gal., V, 6). Si donc un chrétien fait de mauvaises actions sans en faire de bonnes qui les corrigent, sa foi, selon l'apôtre saint Jacques, est alors très-certainement une foi morte en elle-même (JAC., II, 17). Cet apôtre dit encore : Si quelqu'un dit qu'il a la foi, et qu'il n'ait pas de bonnes œuvres, sa foi pourra-t-elle le sauver (JAC., II, 14) ? Or, si un homme qui vit dans le crime doit, par cela seul qu'il a la foi, être sauvé en passant par le feu, et si c'est ainsi qu'il faut entendre ce passage de saint Paul, Il sera sauvé, mais en passant toutefois comme par le feu (I Cor., III, 15), il s'ensuivra que la foi peut sauver sans les œuvres et que ce qu'enseigne saint Jacques, apôtre comme saint Paul, sera faux. Saint Paul lui-même aura parlé faussement, lorsqu'il a dit : Ne vous y trompez pas, ni les fornicateurs, ni les idolâtres ni les adultères, ni les efféminés, ni les abominables, ni les voleurs, ni les avares ; ni les ivrognes, ni les médisants, ni les ravisseurs du bien d'autrui ne posséderont le royaume de Dieu (I Cor., VI, 9). Car enfin, si les chrétiens qui persévèrent dans ces crimes n'en doivent pas moins être sauvés en considération de leur foi en Jésus-Christ, comment l’apôtre aura-t-il pu dire qu'ils n'entreront pas dans le royaume de Dieu (Cf. Le Manuel de saint Augustin, parmi les Traités choisis, tome II, p. 394-396) ? "
9. Le même, Lib. de Hæresibus ad Quodvultdéum, hær. 54 : " Les aétiens tirent leur nom d’Aétius et sont les mêmes que les eunomiens, appelé ainsi d'Eunomius disciple d'Aétius, et c'est sous ce dernier nom qu'ils sont le plus connus. Car comme Eunomius excellait dans la dialectique, il soutint cette hérésie avec plus de subtilité et d'éclat, affirmant sans détour que le Fils est dissemblable en tout au Père et que le Saint-Esprit est également dissemblable au Fils. On dit de plus qu'il était tellement ennemi des bonnes mœurs qu'il ne rougissait pas de dire qu'on pouvait indifféremment commettre les plus énormes péchés et y persévérer même pourvu qu'on gardât la foi dont il se faisait l'apôtre. "
10. S. JEROME, In caput IV Oseæ : " Ces paroles du Prophète s'entendent sans aucune peine des hérétiques qui, à mesure qu'ils deviennent nombreux, élèvent une tête de plus en plus altière contre Dieu même, se faisant gloire du nombre de leurs secta-
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teurs, ne devenant par cela même que plus séduisants, se nourrissant ainsi des péchés du peuple, et dévorant les maisons des veuves par des paroles douces et flatteuses. Car, pour rassurer ceux qu'ils voient tomber dans quelque faute, ils ne manquent pas de leur dire : Dieu ne demande de vous que la pureté de la foi ; conservez-la seulement, et il ne se mettra pas en peine de ce que vous pourrez faire. Par ces sortes de discours, ils flattent les âmes des pécheurs, et les entretiennent dans leurs iniquités, en sorte que ceux-ci, bien loin de faire pénitence et de s'humilier de leurs fautes, s'applaudissent de leur perversité même, et marchent tête levée dans la voie du crime. C'est pourquoi le peuple comme le prêtre, et ceux qui enseignent comme ceux qui sont enseignés, encourront un jugement également sévère. "
11. Le concile de Trente, session VI, c. 9 : " Quoiqu'il y ait obligation de croire que les péchés n'ont été remis à aucune époque pas plus qu'ils ne le sont maintenant, autrement qu'en vue de Jésus-Christ par une miséricorde le Dieu toute gratuite, il ne s'ensuit pas qu'on doive dire à qui que ce soit que ses péchés sont remis, ou qu'ils l'ont été, par cela seul qu'il se dit avoir la foi et être assuré d'en avoir obtenu la rémission puisqu'une confiance toute semblable, qui n'a rien que de téméraire et d'opposée à la piété, peut se rencontrer de même dans des hérétiques et des schismatiques, comme cela se voit en effet de nos jours, où, sous un tel prétexte, une grande guerre est déclarée contre l’Eglise catholique. . . Il faut bien se garder aussi de dire que ceux qui sont réellement justifiés doivent se croire eux-mêmes fermement être en état de grâce, ou qu'on ne peut être absous de ses péchés et justifié devant Dieu, qu'autant qu'on se croit certainement absous et justifié, en sorte qu'une telle foi soit indispensable pour obtenir la grâce de l'absolution ou de la justification, comme si celui qui n'aurait pas cette assurance, doutait par-là même des promesses que Dieu nous a faites, ou de l'efficacité de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ. Car si, d'une part, aucune âme pieuse ne doit douter de la miséricorde de Dieu, des mérites de Jésus-Christ, de la vertu et de l'efficacité des sacrements ; de l'autre, quiconque rentre en soi-même, et considère sa propre faiblesse et l'imperfection de ses dispositions, peut fort bien avoir des doutes ou des inquiétudes sur son état de grâce, puisque personne ne saurait être assuré avec la certitude de la foi et sans possibilité d'erreur, d’être véritablement dans la grâce de Dieu. "
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12. Ibidem, canon 12 : " Si quelqu'un dit que la foi justifiante n'est autre chose que la confiance en la divine miséricorde, qui remet les péchés en vue de Jésus-Christ ou que cette confiance est la seule qui nous justifie ; qu'il soit anathème. "
13. Ibidem, canon 13 : " Si quelqu'un dit que tout homme a besoin, pour obtenir la rémission de ses péchés de croire sans hésitation et avec une entière certitude que ses péchés lui sont remis, quelle que puisse être d'ailleurs sa faiblesse ou l'imperfection de ses dispositions ; qu'il soit anathème. "
14. Ibidem, canon 14 : " Si quelqu'un dit qu'un homme est absous de ses péchés et établi en état de grâce par cela seul qu'il se croit certainement absous et justifié ou qu'il n'y a de vraiment justifié que ceux qui croient l’être et que la foi qui absout et justifie n'est autre chose que cette sorte d'assurance ; qu'il soit anathème. "
15. S. JEROME, in caput IV Danielis, sur ces paroles, Forsan ignoscet Deus delictis tuis, etc. : " Puisque Daniel lui-même, malgré la connaissance qu'il avait de l'avenir, ne s'exprimait qu'en termes dubitatifs sur les dispositions de Dieu (à l'égard de Nabuchodonosor,) ceux-là sont bien téméraires qui promettent hardiment le pardon aux pécheurs. Et cependant il faut remarquer que, si le pardon est promis à Nabuchodonosor en considération des bonnes œuvres conseillées à ce roi, il doit l'être bien plus certainement encore à ceux qui ne seraient pas aussi coupables. " .
16. S. AUGUSTIN, Tract. XXXIII in Joannem : " Que ceux qui aiment la douceur dans le Seigneur, craignent en même temps sa vérité : car il est doux, mais il est équitable aussi, selon l'expression du Prophète (Ps. XXIV, 8). Vous l'aimez parce qu'il est doux ; craignez-le donc aussi parce qu'il est équitable et juste. Sa douceur lui a fait dire : J'ai gardé le silence (Is., XLII, 14). Mais sa justice lui a fait ajouter aussitôt : Est-ce que je le garderai toujours ? Le Seigneur, dit le Prophète roi, est clément et miséricordieux. Ajoutez encore avec lui qu'il est patient ; ajoutez même qu'il est tout rempli de miséricorde mais tremblez à ce dernier mot du même Prophète : VERAX, il est véritable dans ses promesses et ses menaces ; car il jugera avec une souveraine équité les pécheurs qui auront méprisé sa patience. Est-ce que vous méprisez, dit l'Apôtre, les richesses de ma bonté, de sa patience et de sa longue tolérance ? Ignorez-vous que la bonté de Dieu vous invite à la pénitence ? Mais vous, par votre endur-
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cissement et par l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, qui rendra à chacun selon ses œuvres (Rom., II, 4 et suiv.). Le Seigneur est doux, il est lent à punir, il est plein de miséricorde ; mais il est juste aussi, et véritable dans toutes ses paroles. Il vous donne du temps pour vous corriger ; mais plutôt que de vous corriger, vous aimez mieux remettre d'un jour à l'autre. Vous étiez mauvais hier ? Soyez bon aujourd'hui. Vous restez mauvais encore aujourd'hui ? Au moins, soyez bon demain. Mais vous attendez toujours, et vous vous promettez beaucoup de la miséricorde de Dieu ; comme si celui qui vous a promis le pardon si vous vous repentez à la fin, vous avait également promis une longue vie. Qui vous a fait connaître ce que vous serez demain ? C'est avec raison que vous dites dans votre cœur : Quand je me serai corrigé, le Seigneur me pardonnera tous mes péchés. Nous ne pouvons nier en effet que Dieu ait promis le pardon à ceux qui se corrigent et se convertissent. Mais si vous lisez dans les prophètes que Dieu a promis le pardon aux pécheurs qui changent de vie, vous ne sauriez y lire de même qu'il vous ait promis une longue vie. "
" Il y a donc un égal danger, quoique par des raisons et des dispositions contraires, à trop espérer et à ne pas assez espérer. Quels sont ceux qui se trompent en espérant trop ? Ce sont ceux qui disent : Dieu est bon, Dieu est miséricordieux : je n'ai qu’à faire ce qu'il me plaira, qu’à agir à ma fantaisie, qu’à lâcher la bride à mes passions, qu’à contenter tous mes caprices. Pourquoi ? Parce que Dieu est miséricordieux, qu'il est bon, qu'il est doux. Voilà quels sont ceux qui courent risque de se perdre par un excès d’espérance. Ceux au contraire qui se perdent par un défaut d’espérance ou par désespoir, ce sont ceux qui, croyant leurs péchés trop énormes pour pouvoir être pardonnés même à leur repentir, et se regardant déjà comme damnés sans ressource, se disent à eux-mêmes : Je dois être damné ; pourquoi dès-lors ne pas faire tout ce qu'il me plaît ? Ainsi se conduisent en effet des gladiateurs destinés à périr dans le cirque. Leur désespoir même fait leur force ; parvenus à l'excès de leurs maux, ils n'en sont que plus à redouter pour leurs adversaires. De telles gens se perdent par le désespoir, comme les autres par la présomption. Le bon parti est donc de tenir le milieu entre les deux. On doit craindre de se perdre par présomption et d'encourir la damnation en espérant avec excès de la miséricorde divine ;
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mais on doit craindre également de se perdre par désespoir ou de renoncer à faire pénitence en se persuadant qu'elle serait inutile, et d'encourir ainsi cette juste sentence de la divine sagesse : Je me rirai de vous au jour de votre ruine (Prov., I, 26). Que fait donc le Seigneur pour guérir les pécheurs de l'une comme de l'autre de ces deux maladies ? A ceux qui présument, il dit : Ne tardez pas à vous convertir au Seigneur, et ne remettez pas pour cela d'un jour à l'autre (Ecclé., V, 8). Et à ceux qui se désespèrent, que dit-il ? En quelque jour que se convertisse le pécheur, j'oublierai toutes ses iniquités. "
" Dieu a donc offert le port de son indulgence à ceux qui sont en péril d’être submergé par la tempête du désespoir, comme il a laissé dans l'incertitude de la mort ceux qu'un trop facile espoir de salut met en péril, et qui se laissent tromper par l'attente d'une conversion qu'ils diffèrent d'un jour à l'autre. Vous ne savez pas quand viendra votre dernier jour (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, tome II, pag. 324-328). "
17. Le même, Lib. L homiliarum, hom. 50, c. 10 : " Sur quoi donc se fondent ces hommes vains qui se promettent un salut chimérique tout en persévérant dans leurs désordres, puisqu'ils entendent l'Apôtre leur dire que ceux qui font ces choses ne posséderont pas le royaume de Dieu ? Ils osent se promettre le salut en dehors de ce royaume même de Dieu, et voici le langage qu'ils se tiennent à eux-mêmes, pour s'enhardir à ne pas faire pénitence et à ne rien changer dans leur genre de vie. Je ne veux pas régner c'est assez pour moi d’être sauvé. Et c'est en quoi ils se trompent, premièrement parce qu'il n'y a point de salut pour ceux qui persévèrent dans le mal. Car lorsque Notre-Seigneur a dit : Parce que l’iniquité se sera accrue, la charité de plusieurs se refroidira, mais celui-là sera sauvé qui persévère jusqu’à la fin (MATTH., XXIV, 12) ; c'est à ceux qui persévère dans la charité qu'il a promis le salut, et non à ceux qui persévèrent dans l'iniquité. . . Qui donc osera se croire sauvé par cela seul qu'il porte le nom de chrétien au lieu d'écouter avec soumission et frayeur ces paroles de l'Apôtre : Car sachez que nul fornicateur, nul impudique, nul avare, ce qui est le même qu'un idolâtre, ne sera héritier du royaume de Jésus-Christ et de Dieu. Que personne ne vous séduise par de vains discours. Car c'est pour ces choses que la colère de Dieu tombe sur les hommes rebelles à l’en-
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seignement de la vérité. N’ayez donc rien de commun avec eux (Eph., V, 5-7). Il s'explique encore davantage sur cet article dans sa première épître aux Corinthiens : Ne vous y trompez pas, leur écrit-il ; ni les fornicateurs, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les impudiques, ni les abominables, ni les voleurs, ni les avares, ni les ivrognes, ni les médisants, ni les ravisseurs du bien d'autrui, ne seront héritiers du royaume de Dieu (I Cor., VI, 9-10). Mais voyez aussi comme l'Apôtre a soin de rendre la confiance et l’espérance du salut à ceux qui dans leur vie antérieure s’étaient rendus coupables de ces crimes : C'est, continue cet apôtre, ce que quelques-uns de vous ont été autrefois ; mais vous avez été lavés, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés au nom de Notre- Seigneur Jésus-Christ, et par l'esprit de notre Dieu. Quiconque donc après son baptême reste toujours esclave de criminelles habitudes, est ennemi de lui-même s'il hésite encore à changer de vie, tandis qu'il lui en reste encore le temps, puisque, s'il lui arrive de pécher, c'est qu'il est encore vivant. Car en persévérant d'une part, comme il le fait, dans son état de péché, il s'amasse un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu (Rom., II, 5). Et de l'autre, comme il est encore vivant, la patience de Dieu l'invite à la pénitence. Ainsi embarrassé dans les funestes liens de ses péchés, il refuse, ou il diffère, ou il hésite à recourir à l'Eglise et aux clefs dont elle a le maniement pour être absous dans le ciel en même temps qu'il le sera sur la terre, et il ose se promettre le salut après cette vie, en s'appuyant uniquement sur sa qualité de chrétien, sans paraître s'effrayer de cet oracle redoutable sorti de là bouche de Jésus-Christ : Tous ceux qui me disent, Seigneur, Seigneur, n'entreront pas pour cela dans le royaume des cieux, etc. (MATTH., VII, 21). Que dit aux Galates le même apôtre ? En faisant la même énumération des crimes qui excluent du royaume des cieux, ne les soumet-il pas à la même conclusion ? Il est aisé, dit-il, de connaître les œuvres de la chair, qui sont la fornication, l'impureté, l’impudicité, la dissolution, l'idolâtrie, les empoisonnements, les inimités, les dissensions, les jalousies, les animosités, les querelles, les divisions, les hérésies, les envies, les meurtres, les ivrogneries, les débauches et autres choses semblables, dont je vous déclare, comme je vous l'ai déjà dit, que ceux qui commettent ces crimes ne seront point héritiers du royaume de Dieu (Gal. , V, 19-21). "
48. S. ISIDORE, De summo bono, lib. II, c. 13 : " Quelque pécheur et impie qu'on puisse être, on doit croire qu'on pourra
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obtenir son pardon, si l'on revient à pénitence. Car personne ne saurait douter de la bonté de Dieu ; mais c'est la perversité de ceux qui auraient d’en recueillir le bienfait, qui seule met obstacle à l'indulgence divine. Ce n'est que dans cette vie qu'on est libre de faire pénitence ; après la mort, au contraire, tout moyen de se convertir sera ôté. C'est pour cela que Jésus-Christ a dit : Il faut que je fasse les œuvres de celui qui m'a envoyé pendant qu'il est jour : la nuit vient, et ce n'est pas dans la nuit qu'on peut agir (JEAN, IX, 4). De là vient aussi ce qu'a dit le Prophète : Rendez gloire au Seigneur votre Dieu avant que les ténèbres vous surprennent (JEREM., XIII, 10), c'est-à-dire, avant que la mort éternelle ne vienne vous engloutir. Tandis que vous êtes en cette vie, rendez gloire à Dieu par votre vie pénitente. Tant que nous sommes en ce monde, la miséricorde de Dieu nous accueille du moment où elle nous voit faire des œuvres de pénitence. Au lieu que dans le siècle à venir nous n'aurons plus à travailler, mais seulement à rendre compte de nos œuvres Ce qui consomme pour l'ordinaire la perversion des méchants, c’est le temps même que la patience de Dieu leur accorde pour se corriger, parce qu'au lieu de s'en servir pour faire pénitence, ils en abusent pour pécher avec plus d'audace. Or, c'est aller de mal en pis, que d'employer à faire le mal, le temps qui n'a été accordé que pour revenir à la pratique du bien. Chacun doit, tandis qu'il le peut, se hâter de revenir à Dieu en réparant ses fautes passées, de peur que, si on refuse de le faire tandis qu'on le peut, on ne le puisse plus lorsqu'on le voudra plus tard. C'est ce qui a fait dire au Prophète : Cherchez le Seigneur, tandis qu'il peut être trouvé ; invoquez-le, tandis qu'il est proche de vous (Is., LV, 6). Et où peut-on le trouver, si ce n'est dans cette vie, comme c'est dans cette vie qu'il est tout proche de tous ceux qui l'invoquent (Ps. CXLIV, 18) ? Car il sera loin un jour de ceux à qui il aura fait entendre ces paroles : Allez au feu éternel (MATTH., XXV, 41). Maintenant au contraire il est près de nous, sans être vu de nous ; plus lard il n'en sera plus de même, mais il ne pourra plus ni être vu, ni être trouvé. Si, lorsque quelqu'un a péché, il prend le parti de faire pénitence, et de rétracter tandis qu'il vit encore, toutes ses habitudes criminelles, il est indubitable qu’à sa mort il pourra passer à l'éternel repos. Quant à celui qui, après toute une vie de désordres, fait pénitence quand enfin il se voit en danger de mort, autant sa réprobation est douteuse, autant sa réconciliation avec Dieu
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est incertaine. Que celui donc qui voudrait obtenir à la mort la certitude du pardon de ses péchés fasse pénitence tandis qu'il est en santé et qu'il expie ses péchés avant que la mort le surprenne. Il y en a qui se hâtent de promettre aux pénitents l'assurance de leur salut, et qui méritent par là qu'on leur applique ces paroles du Prophète : Ils guérissaient les plaies de mon peuple d'une manière honteuse, en disant : La paix, la paix, lorsqu'il n'y avait point de paix (JEREM., VI, 14). C'est donc guérir les plaies d'une manière honteuse, que de promettre la paix de la conscience au pécheur dont la pénitence est défectueuse. C'est pourquoi le Prophète dit ensuite (ibidem, 15) : Ils ont été confus, parce qu’ils ont fait des choses abominables ; confus, dis-je, non en faisant pénitence, mais en portant la peine de leur iniquité. Car autre est la confusion qu'éprouve devant son juge le coupable qui subit son châtiment, autre est celle de celui qui rougit de ses mauvaises actions et cherche à s'en corriger. Car le premier est confus, parce qu'il subit la réprimande ; le second l'est, parce que sa conscience lui reproche d'avoir mal fait. Quoique la pénitence assure le pardon des péchés, on ne doit pas cependant être sans crainte, parce que la satisfaction du pénitent a pour juge des valeurs Dieu, et non les hommes. Comme donc la miséricorde de Dieu est pour nous un abîme impénétrable, le seul parti prudent pour un pécheur est de ne point mettre de bornes à sa pénitence. Car un pénitent ne doit jamais être tout-à-fait tranquille au sujet des péchés qu'il a commis. Autrement, la sécurité engendre la négligence et la négligence, si l'on n'y prend garde, fait retomber dans les fautes qu'on a d'abord désavouées. Si, après qu'on s'est relevé par la pénitence, une imprudente sécurité occasionne de nouvelles chutes, on soupire bientôt avec une nouvelle ardeur après les plaisirs illicites qu'on s'était autrefois procurés, on retombe ainsi avec un danger nouveau dans ses perverses habitudes, et le dernier état de l'homme devient pire que le premier. "
19. S. AUGUSTIN, De perfectione justitios contra Cœlestium, resp. 19 : " Pour répondre à notre adversaire, nous disons que la sentence de l’Ecrivain sacré (Prov., XX, 8-9) finit par ces mots : Qui se glorifiera d'avoir un cœur chaste ? parce qu'elle commence par ceux-ci : Lorsqu'un roi juste sera assis sur son trône. Car quelque juste ou quelque saint que soit un homme, il doit craindre qu'il ne se trouve en lui, à son insu, quelque chose à reprendre, lorsque le roi juste sera assis sur son trône, ce roi à la connaissance
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duquel aucun péché n’échappe, pas même ceux dont il est dit : Qui est celui qui connaît ses péchés (Ps. XVIII, 13) ? Lors donc que le roi juste sera sur son trône, qui est- ce qui se glorifiera d'avoir un cœur chaste ? Ou en d'autres termes : Qui se glorifiera d'être pur de tout péché ? A moins que ce ne soient ces hommes qui tiennent à se glorifier de leur propre justice, au lieu de le faire de la miséricorde le Dieu. "
20. Le même, Lib. de correptione et gratiâ, c. 13 (al. 40) : " Y a-t-il quelqu'un dans la grande multitude des fidèles qui, tant qu'il est sur la terre, soit assuré d’être du nombre des prédestinés ? Aussi est-il à propos que cela nous demeure caché dans cette vie, où l'enflure de l'orgueil est tant à craindre, qu'un saint Paul même recevait des soufflets d'un ange de Satan pour en être préservé (II Cor., XII, 7). C'est pour la même raison que Jésus-Christ disait à ses apôtres : Si vous demeurez fidèles à ma parole, etc. (JEAN, XV, 7), quoiqu'il fût assuré qu'ils lui demeureraient fidèles. Dieu dit de même par un prophète : Si vous voulez m'écouter et me croire, etc. (Is., I, 19), quoiqu'il sût parfaitement qui étaient ceux en qui il produirait lui-même ce bon vouloir (Philip., II, 13). L'Ecriture est pleine de textes semblables ; et il faut croire que c'est qu'il est utile aux élus d’ignorer ce secret, afin que personne ne s’élève, mais que tous ceux-là mêmes qui courent avec ardeur dans la bonne voie soient toujours dans la crainte, par l'incertitude où ils sont de parvenir au but. "
21. Le même, Lib. L homiliarum, hom. 41 (Voici le jugement que Noël-Alexandre porte de cette homélie. Le commencement n'est à ses yeux qu'un fragment de quelque homélie du saint docteur. A partir ensuite de ces mots : Sed dicat aliquis (mais on dira, etc.), jusqu’à ces autres : Viste dubío liberare (voulez-vous vous tirer d’incertitude, etc.), ce serait une interpolation de quelque main maladroite, qui, en faisant l'énumération de l'ivrognerie, de la convoitise, du larcin, des paroles mauvaises, du rire immodéré, des paroles oiseuses, comme d'autant de péchés légers, les compte immédiatement après comme péchés graves : Ecce quàm levia dixi, ommia tamen gravia et pestifera. V. NAT. ALEX., Eccl. hist. sæc. V, p. 104, édit. de Venise) : " Celui qui aura fait une sincère pénitence et aura été délivré des liens dans lesquels il était auparavant détenu captif, en même temps que séparé du corps de Jésus-Christ, s'il vit à la suite de sa pénitence comme il aurait dû toujours vivre, et qu'il vienne à mourir après avoir été réconcilié avec Dieu, sera admis à voir Dieu, à jouir du repos éternel, à entrer en possession du
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royaume céleste, et sera à jamais séparé de la société des démons. Mais si quelqu'un attend pour faire pénitence qu'il se voie au lit de la mort, s'il meurt ensuite après avoir été réconcilié, j'avoue que nous ne lui refusons pas ce congé qu'il nous demande, mais nous ne présumons pas pour cela qu'il fasse une bonne mort. Non, je ne présume point cela, je le confesse ; j'aurais plutôt une présomption toute différente. Le fidèle qui remplit ses devoirs dans l’état de santé quitte ce monde assuré de son bonheur. Celui qui meurt aussitôt après son baptême, est de même assuré de son salut. Celui qui fait pénitence, et qui réconcilié avec Dieu quand il est encore en santé, continue ensuite à bien vivre, est encore assuré de son bonheur. Celui qui ne fait pénitence qu’à la fin de sa vie, et qui ne se réconcilie qu'alors avec Dieu, peut se croire assuré de son salut ; pour moi, je ne l'en tiens pas assuré. Si j'en étais assuré moi-même, je le dirais, et en le disant, je donnerais la sécurité aux autres ; mais ne pouvant l'être, je puis bien donner la pénitence, mais je ne puis pas donner la sécurité. Quelqu'un me dira peut-être : Bon prêtre, tu nous dis que tu n’es pas assuré et que tu ne peux pas nous assurer nous-mêmes, si celui qui a été impénitent pendant qu'il était en santé et à qui tu donnes la pénitence au moment de sa mort, obtiendra le salut et méritera d'aller avec Jésus-Christ : Enseigne-nous donc de grâce ce que nous devons faire pour bien vivre après avoir été admis à la pénitence. Le voici, mes frères : Abstenez-vous de l'ivrognerie, de la convoitise, du larcin, du rire immodéré, du bavardage et des paroles inutiles, dont il faudra que les hommes rendent compte au jour du jugement. Que de péchés en apparence légers, et tous cependant assez graves pour donner la mort à l'âme ! Je dis de plus : Ce n'est pas seulement après la pénitence que chacun doit s'abstenir de tous ces vices, mais c'est aussi avant la pénitence et tandis qu'on se porte bien, parce que, si l'on attend jusqu’à la fin de sa vie, on ignore si l'on pourra recevoir la pénitence elle-même, et confesser ses péchés à Dieu et à son ministre. C'est pourquoi j'ai dit qu'il fallait vivre bien avant la pénitence, et mieux encore après l'avoir reçue. Faites bien attention à mes paroles : je vais les expliquer encore davantage, de peur que l'on ne prête quelque sentiment erroné. Est-ce à dire qu'un homme dans ces conditions sera damné ? Ce n'est pas là ce que je dis. Est-ce donc à dire qu'il sera sauvé ? Je ne le dis pas non plus. Qu'est-ce donc à dire ? C’est-à-dire que je n'en sais rien ; je ne présume
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rien, je ne puis rien promettre, je n'en puis rien savoir. Voulez-vous sortir de cette incertitude ? Voulez-vous échapper à tout danger ? Faites pénitence tandis que vous êtes en santé. Car si vous faites une sincère pénitence dans votre état de santé, vous vous trouverez également bien disposé à votre dernier jour. Hâtez-vous de vous réconcilier, si vous le faites, vous n'avez rien à craindre. Pourquoi ? parce que vous aurez fait pénitence dans un temps où vous auriez pu pécher. Si au contraire vous ne voulez faire pénitence que lorsque vous ne pourrez plus pécher ce ne sera pas vous qui aurez quitté le péché, mais ce sera le péché qui vous aura quitté. Mais qui vous a dit, m'objecterez-vous, que Dieu ne me pardonnera pas ? Vous dites vrai : je n'en sais rien. La seule chose que je sache, c'est que je n'en sais rien. C'est parce que je n'en sais rien, que je vous accorde la pénitence. Je vous la refuserais, si je savais qu'elle devrait vous être inutile. D'un autre côté, si je savais qu'elle vous servirait, je ne prendrais point tant la peine de vous avertir et de vous effrayer. De deux choses l'une : ou vous obtiendrez votre pardon, ou vous ne l'obtiendrez pas. Je ne sais laquelle de ces deux choses sera votre partage : tenez-vous-en donc à ce qui est certain, et laissez l'incertain. "
22. Le même, Serm. III de Innocentibus (c'est le 10e de Sanctis) : " Si l'on voulait ne pas perdre la pensée du jour de sa mort, on saurait se tenir en garde contre tout péché et contre toute convoitise. Mais, parce qu'on repousse actuellement cette pensée salutaire, on rend irrémédiable pour la suite ce mal qu'on ne saurait éviter. Car le dernier jour, le jour du jugement, viendra alors quand on ne pourra plus ni faire pénitence, ni pratiquer de bonnes œuvres pour échapper à la mort éternelle, parce que telle est la peine infligée au pécheur qu'il s'oublie soi-même à la mort, pour avoir oublié Dieu pendant la vie. "
23. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Lib. XVI Moralium in Job, c. 31 (al. 20), sur ces paroles, Usque ad inferos peccatum illius : " Que son péché aille jusqu'aux enfers, c'est-à-dire qu'il ne s'en corrige point par la pénitence avant la fin de la vie présente. Et c'est de ce péché que parle l'apôtre saint Jean, quand il dit : Il y a un péché qui va à la mort ; et ce n'est pas pour ce péché-là que je vous dis de prier (I JEAN, V, 16). Car c'est en vain qu'on demande à Dieu le pardon d'un péché, dont le coupable ne s'est point corrigé avant sa mort. C'est encore de ce pécheur que Job dit ensuite : Que la miséricorde ne se souvienne pas de lui. La miséricorde de Dieu oublie celui qui a oublié sa justice, parce
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que le pécheur qui ne craint pas Dieu présentement comme un juste juge, ne le trouvera pas un jour miséricordieux et indulgent. Cela doit s'entendre non-seulement de ceux qui abandonnent la vraie foi, mais aussi de ceux qui l'ayant embrassée ne laissent pas de mener une vie charnelle, puisqu'il est impossible d'éviter la damnation, soit qu'on pèche dans la foi, soit qu'on pèche dans les œuvres ; car, bien qu'il y ait quelque différence dans la qualité et la mesure de la peine, il n'en est pas moins certain qu'il ne reste aucune espérance de pardon pour les péchés qui n'ont pas été effacés dans cette vie par la pénitence (Cf. Les Morales de saint Grégoire, t. II, p. 692). "
24. S. BERNARD, in parvis sermonibus, Serm. 52 : " Je compte trois baisers : le baiser des pieds, celui des mains et celui du visage. Dans le premier moment de notre conversion, ce sont les pieds de Notre-Seigneur que nous baisons. Or, les pieds de Notre-Seigneur sont, le premier la miséricorde, et le second la vérité. Dieu imprime l'un et l'autre sur le cœur de ceux qui se convertissent, et tout pécheur vraiment pénitent les baise tous les deux. Car, s'il n'acceptait que la miséricorde sans accepter la vérité, il tomberait, par présomption. Si au contraire il acceptait la vérité sans accepter la miséricorde, il périrait par le désespoir. Si donc il veut être sauvé, qu'il se prosterne humblement au pied de la miséricorde comme au pied de la vérité, afin que celle-ci lui fasse condamner ses péchés et que celle-là lui fasse espérer son pardon. "
23. Le même, Serm. VI in Cantica : " Heureuse est l'âme, à qui le Seigneur Jésus a fait la faveur d'imprimer sur elle ses deux pieds. Vous reconnaitrez cette âme à deux signes ; car il est nécessaire qu'elle retienne l'impression des pieds divins. Ces deux signes sont la crainte et l’espérance ; celle-là lui retrace l'image des jugements de Dieu, celle-ci l'image de sa miséricorde. Le Psalmiste a dit avec raison que le Seigneur met son plaisir en ceux qui le craignent, et qui espèrent en sa miséricorde (Ps. CXLVI, 11), puisque la crainte est le commencement de la sagesse, et, que l'espérance en est le progrès. Car quant à la perfection de la sagesse, c'est le privilège de la charité. Les choses étant ainsi, ce n'est pas un médiocre avantage, que celui qu'on retire du premier baiser, ou de celui qui s'imprime sur les pieds. Ayez soin seulement de baiser également les deux. Car si vous vous bornez à ressentir la douleur de vos péchés et la
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crainte des jugements de Dieu, vous ne baisez encore qu'un pied, celui de la vérité et de la justice. Mais si vous savez tempérer ce sentiment de crainte et de douleur par la considération de la bonté divine, alors vous embrassez aussi le pied de la miséricorde. Au lieu qu'il ne serait pas avantageux pour vous de baiser l'un sans l'autre, parce que la pensée de la justice toute seule jette dans le gouffre du désespoir et qu'une appréciation exagérée de la miséricorde engendre une sécurité funeste. Il m'a été donné plus d'une fois à moi-même, quelque indigne que j'en fusse, de m'asseoir aux pieds du Seigneur Jésus et d'embrasser avec une vive ferveur tantôt l'un, tantôt l'autre, autant que sa bonté daignait m'en faire la faveur. Si quelquefois, le souvenir de mes péchés, me faisant perdre de vue la miséricorde, je m'arrêtais trop longtemps à me représenter la justice divine, bientôt saisi d'un sentiment indicible de frayeur en même temps que de confusion, et plongé dans d'horribles ténèbres, j'avais à peine la force, tant j'étais abattu, de m'écrier comme du fond de cet abime : Qui peut comprendre, Seigneur, l’étendue de votre colère et combien votre indignation est redoutable (Ps. LXXXIX, 11) ? D’autres fois, si me détournant du pied de la justice je m'attachais de préférence à celui de la miséricorde, je tombais tout-à-coup au contraire dans une telle négligence et une telle incurie, que mon oraison en devenait plus tiède, mon action plus lente, mon penchant à rire plus effréné, ma conversation plus indiscrète, ma conduite entière plus ennemie de la retenue. Instruit donc par ma propre expérience, je chanterai, Seigneur, devant vous, non votre seule justice ou votre seule miséricorde, mais votre miséricorde et votre justice à la fois (Ps. C, 1). Je n'oublierai jamais la justice de vos ordonnances (CXVIII, 93). Vos ordonnances, pleines à la fois de justice et de miséricorde, me tiendront lieu de cantique dans le lieu de mon exil (ibid., 54), jusqu’à ce que, la miséricorde s'élevant au-dessus de la justice, ma misère disparaisse devant ma gloire, et que je ne chante plus que vos louanges, sans ressentir désormais les pointes de la tristesse (Ps. XXIX, 13). "
26. S. AUGUSTIN, Tract. de utilitate pœnitentiæ, c. ult. : " De même que celui qui tombe dans le désespoir augmente la somme de ses péchés, de même celui qui espère son pardon peut aussi en augmenter la somme, s'il se dit, par exemple : Je ferai ce que je voudrai ; Dieu est bon ; quand je me convertirai, il me pardonnera. Dites-vous à vous-même, j'y consens : Quand je me
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convertirai, il me pardonnera ; si vous êtes assuré
de votre lendemain. L'Ecriture ne vous donne-t-elle pas cet avertissement
: Ne tardez pas à vous convertir au Seigneur, et ne remettez
pas pour cela d'un jour à l'autre ; car sa colère éclatera
tout d'un coup, et il vous perdra au jour de la vengeance (Eccles.,
V, 8-9). La providence de Dieu nous a fourni les moyens d'éviter
ces deux écueils : pour que nous n'augmentions pas la somme de nos
péchés par le désespoir, elle nous offre le port de
la pénitence ; et pour que nous ne les augmentions pas non plus
par une espérance mal réglée, elle nous a rendu incertain
le jour de notre mort. "
Question IV
Comment pèche-t-on contre le Saint-Esprit par désespoir ?
C'est en tombant dans le défaut opposé à la présomption dont nous venons de parler, c’est-à-dire en perdant toute espérance, soit d'obtenir notre pardon de Dieu, soit de parvenir au salut éternel.
C'est ainsi que Caïn pécha par désespoir
comme le témoignent assez ces paroles que l'Ecriture lui met à
la bouche : Mon iniquité est trop grande, pour que j'en obtienne
le pardon (Gen., IV, 10-14). Judas qui trahit Jésus-Christ
pécha de même par désespoir, lorsque, perdant toute
espérance de son salut, il mit fin à ses jours en s’étranglant
avec un lacet. Or, il n'est jamais trop tard pour que nous fassions pénitence,
comme le prouve l'exemple du bon larron, qui déjà sur la
croix, et n'ayant plus qu'un souffle de vie, obtint de Jésus-Christ
le pardon complet de ses crimes et l'assurance de la gloire céleste.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Genèse, IV, 10-14 : " Le Seigneur dit à Caïn : Qu'as-tu fait ? La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi. - Maintenant donc tu seras maudit sur cette terre, qui a ouvert
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sa bouche pour recevoir le sang de ton frère, versé par ta main. Après même que tu l'auras cultivé, elle ne te donnera pas ses fruits : tu seras fugitif et errant sur la terre. - Caïn répondit au Seigneur : Mon iniquité est trop grande pour que je puisse en obtenir le pardon. - Voilà que vous me chassez de dessus la terre, et je me cacherai de devant votre face, et je serai fugitif et errant sur la terre ; et le premier qui me trouvera me tuera. "
2. MATTHIEU, XXVII, 3-5 : " Cependant Judas qui l'avait livré, voyant qu'il était condamné, en conçut du remords, et rapporta aux princes des prêtres et aux anciens du peuple les trente pièces d'argent, - en disant : J'ai péché en livrant le sang innocent. Mais ils lui répondirent : Que nous importe ? C'est ton affaire. - Alors Judas ayant jeté cet argent dans le temple, se retira, et alla se pendre. "
3. Actes, I, 16-19 : " Il faut que ce que le Saint-Esprit a prédit dans l’Ecriture par la bouche de David, au sujet de Judas, - qui s’est fait le guide de ceux qui ont pris Jésus, soit accompli. - Il était compté comme l’un des nôtres, et il partageait notre ministère. - Et il a acheté un champ du salaire de son crime ; et bientôt s'étant pendu, il a crevé par le milieu du ventre ; et toutes ses entrailles se sont répandues. - Et cela a été connu de tous les habitants de Jérusalem en sorte que ce champ a été appelé en leur langue hacel-dama, c'est-à-dire le champ du sang. "
4. Ephésiens, VI, 17-20 : " Je vous avertis donc, et je vous conjure par le Seigneur, de ne plus vivre comme les gentils, qui suivent dans leur conduite la vanité de leurs pensées ; qui ont l'esprit plein de ténèbres, qui sont éloignés de la vie de Dieu, à cause de l'ignorance où ils sont et de l'aveuglement de leur cœur ; - qui, ayant perdu tout espoir de salut, s'abandonnent à la dissolution, et se plongent avec une ardeur insatiable dans toutes sortes d'impuretés. - Mais vous, ce n'est pas ainsi que vous avez été instruits à l'école de Jésus-Christ. "
5. II Samuel, II, 26 : " Alors Abner cria à Joab : Ignores-tu qu'il est dangereux de jeter son ennemi dans le désespoir ? "
6. EZECHIEL, XVIII, 21-25, 27-28, 30-32 : " Si l'impie fait pénitence de tous ses péchés, s'il garde tous mes préceptes, et s'il agit selon l'équité et la justice, il vivra certainement ; non, il ne mourra point. - Je ne me souviendrai plus de toutes les iniquités qu'il aura précédemment commises ; il vivra dans les œuvres de justice qu'il aura faites. - Est-ce que je veux la mort
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de l'impie, dit le Seigneur Dieu, et non pas plutôt qu'il se retire de sa mauvaise voie, et qu'il vive. . . ? - Lorsque l'impie se sera détourné de l'impiété où il aura été jusque-là et qu'il agira selon l'équité et la justice, il rendra par ce moyen la vie à son âme. - Comme il sera rentré en lui-même et qu'il se sera détourné de toutes ses œuvres d’iniquité il vivra certainement ; non, il ne mourra point. . . - Convertissez-vous et faites pénitence de toutes vos iniquités et l'iniquité ne sera plus pour vous un sujet de ruine. - Rejetez loin de vous toutes les prévarications dont vous vous êtes rendus coupables, et faites-vous un cœur nouveau et un esprit nouveau. Eh ! pourquoi mourrez-vous, maison d'Israël ? - Je ne veux point la mort de celui qui meurt, dit le Seigneur Dieu. Revenez à moi, et vivez. "
7. Id., XXXIII, 12, 14-16 : " En quelque jour que l'impie se convertisse, son impiété ne lui nuira point. . . , - si, après que j'aurai dit l'impie : Tu mourras certainement, il fait pénitence de son péché et qu'il se conduise selon l'équité et la justice ; - si cet impie rend le gage qu'on lui avait confié, s’il restitue le bien qu'il avait ravi, s'il marche dans la voie des commandements qui donnent la vie, s'il ne fait rien d'injuste, il vivra certainement ; non, il ne mourra point. - Tous les péchés qu'il aura pu commettre ne lui seront point imputés : il aura fait ce qui est droit et juste, et ainsi il vivra très-certainement. "
8. I JEAN, II, 11- 12 : " Si quelqu'un pèche nous avons pour avocat auprès du Père Jésus-Christ, qui est juste ; - car c'est lui qui est la victime de propitiation pour nos péchés et non-seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux de tout le monde. "
9. Id., I, 7-9 : " Le sang de Jésus-Christ son Fils nous purifie de tout péché. . . - Si nous confessons nos péchés, il est trop fidèle et trop juste pour ne pas nous les remettre, et ne pas nous purifier de toute iniquité. "
10. JEREMIE, III, 1 : " On dit ordinairement : Si une femme, après avoir été répudiée par son mari et l'avoir quitté en épouse un autre, son mari la prendra-t-il encore ? Et n'est-elle pas à ses yeux une terre impure et souillée ? Et toi, tu t'es attachée à une multitude d'amants ; cependant, reviens-moi, dit le Seigneur, et je te recevrai. "
11. ISAIE, I, 16-18 : " Lavez-vous, purifiez-vous, ôtez de devant mes yeux la malignité de vos pensées, cessez de faire le mal, - apprenez à faire le bien, recherchez ce qui est juste,
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assistez l'opprimé, faites droit à l'orphelin, défendez la veuve. - Et venez, et accusez-moi, dit le Seigneur. Quand vos péchés seraient comme l'écarlate ils deviendront blancs comme la neige ; et quand ils seraient rouges comme du vermillon, ils deviendront semblables à la laine la plus blanche. "
12. Psaume CXLIV, 8-9 : " Le Seigneur est bon et compatissant ; il est lent à s'irriter et riche en miséricorde. - Sa bonté se fait sentir à tous, et ses miséricordes s'étendent à toutes les œuvres de ses mains. "
13. Ecclésiastique, X VII, 20-23, 26-28 : " Dieu ouvre la voie de la justice au repentir. . . - Convertissez-vous au Seigneur, quittez vos péchés ; - offrez-lui vos prières et éloignez-vous de plus en plus de ce qui est pour vous un sujet de chute. - Revenez au Seigneur, détournez-vous de l’injustice et ayez en horreur ce que Dieu déteste, etc. - Ne demeurez point dans l'erreur des méchants ; louez Dieu avant la mort. La louange n'est plus rien pour les morts, parce qu'ils sont comme s'ils n'étaient plus. - Louez-le tant que vous vivrez ; louez-le pendant que vous jouissez de la vie et de la santé ; louez Dieu, glorifiez-vous dans ses miséricordes. - Qu'elle est grande la miséricorde du Seigneur, et sa clémence pour ceux qui se convertissent lui ! "
14. LUC, XXIII, 39-43 : " Or, l'un des deux voleurs qui
étaient crucifiés avec lui, blasphémait contre lui
en disant : Si tu es le Christ, sauve-toi toi-même, et nous avec
toi. - Mais l'autre le reprenait en disant : N'as-tu donc aucune crainte
de Dieu parce que tu es condamné au même supplice ? - Encore
est-ce avec justice que nous le sommes, puisque nous portons en cela la
peine de nos crimes ; mais lui, il n'a fait aucun mal. - Puis il dit à
Jésus : Seigneur, souvenez-vous de moi, lorsque vous serez entré
en possession de votre royaume. - Jésus lui répondit : Je
te le dis en vérité, aujourd'hui tu seras avec moi dans le
paradis. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN (Ou plutôt saint Césaire, au jugement de Noël-Alexandre et d'autres critiques. V. NAT. ALEX., Eccl. hist. sæc. V, p. 108, édit de Venise ; Sermons de saint Césaire, t. II; p. 46-49), Serm. LVIII de tempore : " Ce n'est pas celui qui aura péché, mais bien celui qui aura persévéré dans ses
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péchés qui sera odieux et abominable aux yeux de Dieu. C'est le Seigneur lui-même qui a la bonté de nous exhorter par son prophète comme le plus tendre de tous les pères, à ne pas nous défier de sa miséricorde : Je ne veux pas la mort du pécheur, dit-il, mais qu'il se convertisse et qu'il vive (EZECHX., XXIII, 12) ; et encore : En quelque jour que t'impie se convertisse, son impiété ne lui nuira point (ibid.). Quelle bonté ! quel excès de miséricorde ! Quelque grande cependant que soit cette bonté, mes frères, elle ne nous sera avantageuse, qu'autant que nous ne différerons pas de nous convertir au Seigneur, et que nous n'ajouterons pas crimes sur crimes. Nous pouvons apprendre à connaître la conduite à tenir dans les infirmités de nos âmes, par celle que nous observons en cas de blessures ou de fractures qui nous atteindraient dans nos corps. Que quelqu'un se rompe le pied ou la main, ce n'est qu'avec bien de la peine qu'on le rétabli dans son premier état ; mais s'il lui arrive de se rompre encore ce pied ou cette main au même endroit une seconde et une troisième fois, ou même plus souvent, votre charité conçoit aisément quelles douleurs il lui faudra endurer pour se guérir de ces dernières blessures : à peine, après des soins bien longs et bien multipliés, pourra-t-on réussir à rétablir ces membres dans leur premier état. Il faut raisonner de même des blessures et des fractures des âmes. Que quelqu'un pèche une première ou une seconde fois, s'il ne diffère pas, s'il n’hésite pas à recourir aux remèdes de la pénitence, il recouvrera bientôt sa première santé ; mais s'il ajoute péchés sur péchés, s’il aime mieux laisser vieillir les blessures de son âme en les couvrant et les entretenant, plutôt que de travailler à les guérir en les confessant et en faisant pénitence, il est bien à craindre qu'il n'éprouve ce qu'a dit l'Apôtre : Ignorez-vous que la bonté de Dieu vous invite à la pénitence ? Et cependant, par la dureté et l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu
(Rom., II, 4-5). "
" Mais peut-être que quelqu'un, entendant ceci, pense en lui-même qu'il a commis des péchés si considérables qu’il ne peut plus mériter la miséricorde de Dieu. A Dieu ne plaise qu'aucun pécheur ait de telles pensées ! Vous faites attention, mon frère, qui que vous soyez, à la multitude de vos péchés ; eh ! que ne faites-vous aussi attention à la toute-puissance du médecin céleste ? Pensez-y donc. Dieu veut bien avoir pitié de nous,
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puisqu'il est bon ; il le peut, puisqu'il est tout puissant : c'est donc se fermer à soi-même la porte de la miséricorde, que de croire, ou que Dieu ne veut pas, ou qu'il ne peut pas avoir pitié de nous : c'est se méfier ou de sa bonté ou de sa toute -puissance. Que personne donc, après cent péchés, après mille crimes même, ne désespère de la miséricorde de Dieu. Non, je le répète, qu'il n'en désespère pas ; qu'il se hâte cependant de se rendre Dieu favorable, qu'il ne tarde pas un instant, de crainte que, s'il s'engageait dans l'habitude de pécher, il ne puisse plus se délivrer des filets du démon, quand même il le voudrait. "
2. Le même, in PS. L : " Si quelqu'un est déjà tombé, si sa conscience lui reproche quelque crime, qu'il pèse attentivement les paroles de ce psaume ; qu'il voie, d'un côté, la grandeur de sa plaie ; mais que, de l'autre, il ne désespère pas du pouvoir du médecin. Le péché joint au désespoir est une mort assurée (Peccatum cum desperatione, certa mors). Que personne ne dise donc : Puisque j'ai fait ce mal, Dieu me condamnera infailliblement. Il ne pardonne point de si énormes crimes : pourquoi n'ajouterais- je pas péchés sur péchés ? Je m'en vais jouir de tous les plaisirs de ce monde, et me livrer à toute sorte de débauche ? Puisque j'ai perdu toute espérance de me relever, que je jouisse du moins, quant à présent, de ce que j'ai sous les yeux, si je ne puis plus espérer pour l'avenir cet autre bonheur dont je n'ai que la foi. "
" Ce psaume donc (le cinquantième) servira de remède à un si grand mal ; et comme, d'un côté, il est pour ceux qui ne sont pas tombés un avertissement de veiller sur eux-mêmes, il empêchera de l'autre, ceux qui sont déjà tombés d’entrer dans le désespoir (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. II, p. 650). "
3. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Lib. VIII Moralium in Job, c. 14 (al. 13) : " On peut entendre par ce mot d'enfer le désespoir du pécheur, dont parle David quand il dit : Qui, dans l’enfer, célébrera vos louanges (Ps. VI, 6) ? et dont il est écrit ailleurs : Lorsque le méchant est parvenu au plus profond abîme du péché, il méprise tout (Prov., XVIII, 3). Or, quiconque se laisse aller au péché donne la mort à son âme en abandonnant la vie de la justice ; mais celui qui après le péché est accablé de plus sous le poids du désespoir, n’est-il pas, déjà mort qu'il est, enseveli pour ainsi dire dans l'enfer ? C'est donc avec beaucoup de raison qu'il
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est dit ici : Comme les nuées se dissipent et passent, de même celui qui descend aux enfers n'en remonte plus. Parce que, quand le désespoir accompagne le péché, il ne reste plus aucune voie de retour à la justice. Et le cœur de chacun de ceux qui s'abandonnent au désespoir est fort justement comparé à une nuée puisqu'il est obscurci par les ténèbres de l'erreur, et comme condensé sous la multitude de ses péchés ; mais ce sont des nuées qui se dissipent et passent, puisqu'elles s’évanouiront infailliblement au grand jour du jugement dernier (Cf. Les Morales de saint Grégoire, t. 1er, p. 752). "
4. S. ISIDORE, Lib. II de summo bono, c. 14 : " On s'approche de Dieu ou l'on s'éloigné de lui, non par la distance des lieux, mais par la nature bonne ou mauvaise de ses affections. Car ce n'est pas par le mouvement des pieds, mais par la direction morale des actes que peut s'effectuer ce rapprochement ou cet éloignement. Commettre une action criminelle quelconque, c'est la mort de l'âme ; dédaigner de faire pénitence et rester dans l’état de péché, c’est descendre dans l'enfer après qu'on est mort. Pécher donc, c'est mourir ; désespérer de son salut, c'est descendre en enfer. C'est pourquoi l’Ecrivain sacré a dit : Lorsque le méchant est parvenu, au plus profond abîme du péché il méprise tout (Prov., XVIII, 5). Souvent le démon tente de désespoir ceux qu'il voit disposés à faire pénitence en les frappant vivement de l'énormité de leurs crimes, afin que, perdant tout espoir d'en obtenir le pardon, ils se découragent dans le bien, après n'avoir pu être amené à persévérer dans le mal. Mais le pénitent doit se mettre en garde contre les pièges que lui tend son astucieux ennemi, et, tout en craignant la justice de Dieu pour les crimes dont il se sent coupable, conserver la confiance en sa miséricorde. Dieu se réjouit plus de la conversion d'une âme dont le salut paraissait désespéré, que d'une autre qui n'aurait jamais été perdue, de même que le retour de l'enfant prodigue, qui était mort et puis revenu la vie, qui avait été perdu et puis retrouvé fut pour son père le sujet d'une grande joie. C'est ainsi que Dieu et ses anges se réjouissent beaucoup plus au sujet de celui qui sort d'un grand péril que courait son âme, que pour un autre qui n'a jamais fait l'expérience du péché. Car, autant on est affligé d’une perte qu'on a subie, autant on se réjouit d’avoir retrouvé la chose perdue, comme nous voyons dans l'Evangile le berger transporté de joie, quand il peut rapporter dans son ber-
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cail, en la chargeant sur ses épaules, la brebis qu'il a enfin retrouvée. Personne ne doit désespérer de son pardon, quand même il ne se convertirait qu'à la fin de sa vie. Car Dieu juge chacun de nous d'après l'état où nous nous trouvons à la fin, et non d'après un passé qui n'est plus. Cette vérité nous est signifiée par cet article de la loi (Exode, XXXIV, 20), qui prescrivait d'offrir une brebis pour le premier-né d'une ânesse, ce qui voulait dire qu'il fallait faire succéder au dérèglement de la vie antérieure l'innocence au moins des derniers jours. De là vient aussi que la loi ordonne d'offrir la queue de la victime, c'est-à-dire la fin de sa vie qu'on doit consacrer à la pénitence. Plusieurs, soutenus de la grâce d'en haut, reviennent à Dieu par la pénitence dans leurs derniers jours, s'appliquant à expier par des larmes continuelles tout le mal qu'ils ont commis, et faire oublier à force de bonnes œuvre les mauvaises qu'ils ont pu faire : or, c'est avec justice que Dieu leur pardonne les péchés de leur vie passée parce qu'ils se gardent bien de se les pardonner à eux-mêmes. C'est donc surtout la fin qu'il faut considérer dans la vie de l'homme, parce que Dieu n'a pas égard à ce que nous avons pu être autrefois, mais à ce que nous serons à notre dernier jour. "
5. S. CHRYSOSTOME, Hom. II in Ps. L (Cette homélie, au jugement de D. Montfaucon comme de Fronton-le-Duc, n'est pas de saint Chrysostôme. Cf. S. Chrys. opera, tome V, pag. 585-587, édit. de Montfaucon ; pag. 711-713, édit de Gaume) : " Chose étonnante et tout-à-fait nouvelle ! Ceux qui tenaient pour ainsi dire le sceptre de l'impiété deviennent les prémices des nouveaux fidèles. Comme l'univers était tout entier livré à l'égarement, que les uns étaient sous l'empire de l'infidélité, les autres dans le judaïsme et sous la loi du péché ; le Sauveur a inauguré sa venue en appelant à lui les prémices de tous ces pécheurs, afin que personne désormais n'ait à désespérer de son salut. Etes-vous infidèle ? Rappelez-vous les mages. Etes-vous ravisseur du bien d'autrui ? Rappelez-vous le publicain. Etes-vous impur ? Rappelez-vous la femme pécheresse. Etes-vous coupable de quelque meurtre ? Rappelez-vous le bon larron. Etes-vous prévaricateur ? Rappelez-vous Paul, qui de blasphémateur est devenu apôtre ; qui de persécuteur est devenu évangéliste, qui d'adultère est devenu ami de l'époux ; qui d'ivraie est devenu froment ; qui de loup est devenu pasteur ; qui d'un plomb vil est devenu de l'or ; qui de pirate est
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devenu pilote ; qui de dévastateur de l’Eglise est devenu ministre de l'Eglise ; qui, après avoir porté le ravage dans la vigne du Seigneur, a été chargé de sa plantation et de sa culture, et après avoir fait ses efforts pour renverser le temple, a été appelé à travailler à sa construction. Voyez donc, d'un côté cet excès de malice, de l'autre, cette perfection de vertu ; d'un côté, cette méchanceté du serviteur, de l'autre, cette bonté du maître. Ne me dites pas : Je suis un blasphémateur, ne me dites pas : Je suis un persécuteur, ne me dites pas : Je suis souillé d'impuretés. Je vous ai mis sous les yeux l'exemple d'un homme qui a été tout cela. Vous pouvez chercher votre asile dans tel port qu'il vous plaira. Choisissez le Nouveau-Testament, choisissez l'Ancien ; dans le Nouveau vous avez saint Paul, dans l'Ancien vous avez David. Ne m'alléguez ni prétextes, ni subterfuges. Avez-vous péché, faites pénitence. Auriez-vous péché mille fois, faites pénitence autant de fois. Voilà le remède que je ne cesserai de vous offrir, et qui suffira seul pour vous guérir de tous vos maux. Je n'ignore pas dans quel découragement, quel désespoir, la conscience de leurs crimes jette les pécheurs. Ils ont à côté d'eux le démon qui leur dit en aiguisant ses armes : Toute la jeunesse est maintenant déshonorée, c’en est fait de ta vie entière. Tu as commencé par devenir impudique, puis tu t'es souillé de brigandages et de larcins, de parjures et de blasphèmes. Quelle espérance peux-tu avoir encore d'être sauvé ? Tu es perdu, sans ressource. Ne songe donc plus qu’à jouir au moins des avantages de la vie présente. Voilà ce que vous dit le démon ; mais moi, je vous dirai tout le contraire. Vous êtes perdu, dites-vous ; mais vous pouvez encore vous sauver. Vous vous êtes couvert d'impuretés ; mais vous pouvez reprendre la pratique de la continence. Vous êtes devenu adultère ; mais vous pouvez vous convertir. Vous êtes tombé mais vous pouvez vous relever. Votre repentir est faible ; mais l'indulgence de Dieu est grande. Vous êtes coupable de meurtre ; faites-en pénitence. Vous avez convoité le bien d'autrui ; dites à Dieu : J'ai péché. Vous vous êtes blessé ; recourez aux remèdes. Tant qu'il vous reste un souffle de vie, fussiez-vous arrivé à votre dernier jour, étendu sur votre lit de mort, poussant le râle de l'agonie, sur le point de quitter la scène de ce monde, témoignez à Dieu votre repentir. Les moments, si courts qu'ils soient, qui vous restent laissent toujours une libre carrière à la bonté divine. . . Qu'est-ce que le péché si on le compare à la bonté de Dieu ? Ce n'est qu'une toile
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d'araignée. Le vent n'a qu’à souffler, pour que cette toile soit emportée. Que Dieu veuille seulement, et il ne restera du péché aucune trace. Si je parle ainsi, ce n'est pas pour vous autoriser dans votre lâcheté, mais pour vous inspirer de l'ardeur et relever votre espérance. Ne désespérez jamais, ô homme ; mais désespérez de celui qui désespère de lui-même. "
6. S. BERNARD, Serm. 5 in Natali Domini : " C'est à bon droit que Dieu est appelé le père des miséricordes (II Cor., I, 3), lui qui a pour attribut de compatir et de pardonner. Quelqu'un dira peut-être : Comment la miséricorde est-elle son attribut, si ses jugements sont un abîme sans fond ? Aussi ne disons-nous pas que toutes ses voies ne soient que miséricorde ; mais elles sont en même temps miséricorde et vérité. Il n'est pas moins juste que miséricordieux, celui dont la justice et la miséricorde sont à la fois l'objet des chants du Psalmiste (Ps. C, 1). Il est bien vrai qu'il fait miséricorde à qui il veut, et qu'il endurcit qui il veut (Rom., IX, 18) ; mais quand il fait miséricorde, il prend sa miséricorde dans son propre fonds, au lieu que, lorsqu'il juge et qu'il condamne, c'est nous qui l'y forçons en quelque sorte, si bien que sa miséricorde semble lui naître du cœur tout autrement que sa sévérité. Ecoutez-le vous dire : Est-ce que je veux la mort de l’impie, et non pas plutôt qu'il se convertisse et qu'il vive (EZECH., XVIII, 17) ? C'est donc bien à propos que nous l'appelons, non le père des condamnations et des vengeances, mais le père des miséricordes, non-seulement parce qu'il est plus naturel a un père de faire miséricorde que de se livrer à son courroux, et que Dieu a pitié de ceux qui le craignent comme un père de ses enfants ; mais surtout parce qu'il trouve en lui-même la cause et le principe de sa bonté et en nous au contraire le principe et la cause de ses jugements et de ses vengeances. "
7. Le même, Serm. II super Cantica : " Si Caïn avait été retenu par ce frein, jamais le désespoir ne l'eût porté à dire : Mon péché est trop grand pour que j'en obtienne le pardon (Gen., IV, 13). A Dieu ne plaise ! car la bonté de Dieu est plus grande que la malice du plus grand pécheur. "
8. S. AUGUSTIN, Lib. I Retractationum, c. 19 : " Il ne faut désespérer d’aucun pécheur tant qu'il est en cette vie ; et du moment où il n'y a pas à désespérer de quelqu'un, il y a de la prudence à prier pour lui. "
9. Le même, Lib. de correptione et gratiâ, c. 15 (al. 46) : " Il faut donc que les supérieurs fassent des réprimandes charitables
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aux frères soumis à leur conduite, en variant la correction selon la diversité des fautes, de sorte qu'elles soient plus ou moins sévères, selon que les fautes sont plus ou moins considérables.
Car l'excommunication même prononcée par un jugement épiscopal, et autrement appelée condamnation, anathème, qui est la plus grande des peines que l'Eglise puisse imposer, peut, si Dieu le veut, devenir un moyen très-salutaire pour la conversion de celui qui en est atteint. Nous ne savons aujourd'hui ce qui arrivera demain ; il ne faut donc jamais désespérer de personne, tant que la mort ne l'a pas enlevé. On ne peut pas non plus s'opposer à Dieu, et empêcher qu'il ne regarde un excommunié dans sa miséricorde, qu’il ne lui donne des sentiments de pénitence, qu’il n'accepte de sa part le sacrifice d'un esprit humilié et d'un cœur brisé de douleur, qu'il ne le délie des liens de l'excommunication, quoique justement prononcé et qu'il ne fasse grâce à celui que les hommes ont condamné (Cf. Livre de la correction et de la grâce, dans les Traités choisis de saint Augustin, t. Ier, p. 395-396). "
10. Le même, Serm. CLXXXI de tempore, c. 16 (Ce sermon, au jugement de Noël- Alexandre et des docteurs de Louvain, ne paraît pas être de saint Augustin. V. NAT. ALEX., Hist. eccl., sæc V, p. 108, édit de Venise) : " Jamais Dieu ne rebute le repentir, si ce repentir est humble et sincère ; il l'accueille au contraire avec joie et empressement, et il n'a rien plus à cœur que de réintégrer le pécheur repentant dans son premier état ; et ce qui surpasse tout le reste, si ce pécheur ne peut accomplir toute la pénitence que sembleraient exiger ses crimes, il se contente d'obtenir de sa part une satisfaction légère et de courte durée, et non-seulement il l'accepte, mais encore il ne la laisse pas sans récompense. C’est ce que me semble indiquer Isaïe par ces paroles qu'il met dans la bouche de Dieu parlant au peuple juif : Tes péchés ont été la cause que je t’ai quelque peu affligé et que j’ai que j'ai un moment détourné ma face de toi, et tu t'en es affligé et tu as marché l'air abattu, et aussitôt je t’ai consolé (Is., LIV, 7-8). Avec ces exemples de pénitence sous les yeux, gardons-nous bien de persévérer dans le mal, ou de désespérer d'obtenir le bienfait de notre réconciliation avec Dieu, mais disons plutôt : Nous aussi, retournons à notre Père, et approchons-nous de Dieu. Croyez-moi, jamais il ne détournera son visage de celui qui reviendra à lui. Car il a dit lui-même : Je suis un Dieu qui se tient proche de ses créatures et non un Dieu qui ne
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se tienne que de loin (Deus appropians ego sum, et non Deus de longè. Nous n'avons pu trouver ces mots dans Isaïe dont il est dit ici qu'ils sont extraits. On trouve, il est vrai, presque ces mêmes paroles dans Jérémie (XXIII, 23) ; mais elles y présentent dans cet endroit un sens tout différent). Il a dit encore par le même prophète : Vos iniquités ont fait une séparation entre vous et Dieu (Is., LIX, 2). Si donc ce sont les péchés qui nous séparent de Dieu, faisons disparaître cet obstacle, pour que rien ne nous empêcher de nous unir à lui. Car Dieu nous a créés, ou tirés du néant, pour nous conférer les biens éternels et nous rendre héritiers du royaume des cieux. Non, ce n'est pas pour nous dévouer aux feux éternels de l'enfer qu'il nous a mis dans ce monde. Le royaume des cieux a été fait pour nous ; l'enfer l'a été pour le démon. Montrons par l'Evangile qu'il en est ainsi : Notre Seigneur dira à ceux qui seront à sa droite : Venez, les bénis de mon père, entrez en possession du royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde (MATTH., XXV, 54). Il dira au contraire à ceux qui seront à sa gauche : Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel qui a été préparé au diable et à ses anges. Si donc l'enfer a été préparé pour le diable, et le royaume des cieux pour l'homme dès le commencement du monde, tout ce que nous avons à craindre, c'est de nous exclure nous-mêmes des biens éternels en persistant obstinément dans le mal. Car tant que nous sommes en cette vie, quelques péchés que nous ayons le malheur de commettre, nous pouvons tout effacer par la pénitence. Mais quand nous serons une fois sortis de ce monde, nous aurons beau nous repentir alors, nous ne retirerons aucun avantage de notre repentir, et en vain grincerons-nous les dents, en vain verserons-nous des pleurs et ferons-nous éclater nos gémissements, en vain nous répandrons-nous en supplications et en prières, personne ne nous écoutera, personne ne viendra à notre secours, personne n'approchera seulement son doigt pour étendre une goutte d'eau sur notre langue altérée (LUC, XVI, 24), et nous ne recevrons d'autre réponse que celle-ci que le mauvais riche reçu d'Abraham : Un grand abîme est creusé pour jamais entre vous et nous, de sorte que ceux qui voudraient passer d'ici vers vous ne le peuvent, comme on ne peut passer ici du lieu où vous êtes. "
11. S. LEON- LE-GRAND, Epist. XCI ad Theodorum Forojuliensem : " Il est de toute importance et de toute nécessité qu'on obtienne par les prières des prêtres le pardon de ses péchés avant le dernier jour. Quant à ceux qui implorent la grâce de la
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pénitence et aussitôt après celle de la réconciliation dans une nécessité urgente et lorsqu'ils sont surpris par le danger, il ne faut ni leur interdire la pénitence ni leur refuser la réconciliation, parce que nous ne pouvons assigner ni bornes ni limites à la miséricorde divine, qui ne fait jamais attendre le pardon au repentir véritable, comme Dieu lui-même nous l'atteste par ces paroles de son Prophète (Cùm conversus ingemueris, salvus eris. Ces paroles ne se trouvent ni dans l'endroit cité ici d'Ezéchiel, ni quelque part ailleurs que ce soit dans la Vulgate ; mais elles n'ont pas d'autre sens que le passage indiqué du Prophète. On pourrait peut-être encore mieux y voir le sens de ces paroles d'Isaïe (XXX, 15) d'après la Vulgate : Si vous revenez à moi, et si vous demeurez en paix, vous serez sauvés) : Du moment où vous serez revenu à moi par un repentir sincère vous serez sauvés (EZECH., XXXIII, 12). Et ailleurs : Soyez le premier à vous accuser de vos iniquités, et Dieu vous les pardonnera (Is., XLIII, 26, d'après les Septante). Et encore : Le Seigneur est plein de miséricorde, et on trouve en lui une rédemption abondante (Ps. CXXIX, 7). Nous ne devons donc pas nous montrer difficiles dans la dispensation des dons de Dieu, ni être insensibles aux larmes et aux gémissements de ceux qui s'accusent eux-mêmes, puisque nous faisons profession de croire que ce sentiment même de repentir vient de l'inspiration de Dieu, suivant ce que dit l'Apôtre : Dans l'espérance que Dieu pourra leur donner un jour (à ceux qui résistent à la vérité) l'esprit de pénitence, pour la leur faire connaître, et qu'ainsi ils sortiront des pièges du diable, qui les tient captifs pour en faire ce qu'il lui plait. "
12. Le concile de Trente, session XIV, chapitre 7 : " Il entre dans la nature même des droits de Dieu que la réserve des péché n'ait pas lieu seulement pour la police extérieure, mais qu'elle ait son effet dans le for même de la conscience. Cependant, pour que cette discipline ne soit l'occasion de la perte d'aucun pécheur, l'Eglise a toujours observé le pieux usage de lever toute réserve de péchés à l'article de la mort ; et par conséquent tous les prêtres indistinctement peuvent absoudre dans cette circonstance toute espèce de pénitents, de quelques péchés et de quelques censures que ceux-ci puissent être liés. Mais, hors de là, tout ce qu'ont à faire les prêtres qui n'ont pas le pouvoir d'absoudre des cas réservés, c’est d'engager les pénitents à s'adresser aux légitimes supérieurs pour que ceux-ci puissent leur en accorder l'absolution. "
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Question V
Quand est-ce que l’on pèche contre le Saint-Esprit en résistant à la vérité ?
C'est quand on combat la vérité en matière de foi ou de piété, non par ignorance, mais de dessein formé et par malice, pour porter atteinte par-là à la croyance catholique.
Ce péché a été celui des pharisiens, que l’Evangile nous montre tout occupés à décrier, en dépit de la vérité et de leur propre conscience, tant la personne de Jésus-Christ que sa doctrine, et d'étouffer le témoignage que lui rendaient les apôtres, sans autre mobile pour agir de la sorte qu'une haine forcenée et aveugle. On peut ranger dans la même catégorie ceux dont le Prophète dit qu'ils sont assis dans la chaire de pestilence ; ceux que saint Pierre appelle de faux docteurs qui introduisent de pernicieuses hérésies, ceux enfin que saint Paul nous désigne sous les noms d'hérétiques, d'hommes corrompus dans l'esprit et pervertis dans la foi, qui suivent des esprits d'erreur et des doctrines diaboliques, qui sont hors de la voie du salut et se condamnent eux-mêmes par leur propre jugement. On peut encore compter comme de ce nombre l'imposteur Elymas, à qui saint Paul adressa publiquement, et avec une vigueur vraiment digne d'un apôtre, ce reproche mérité : O homme, plein de toute sorte de tromperie et de malice, enfant du diable, ennemi de toute justice, ne cesserez-vous jamais de pervertir les voies droites du Seigneur ?
C'est à cette même classe qu'il faut rapporter le blasphème contre l'Esprit-Saint, péché que Notre-Seigneur Jésus-Christ reproche sévèrement aux Juifs, et qu'il représente comme le plus condamnable de tous. Et plût à Dieu que ce péché ne se commît plus de nos jours ! Car ceux-là aussi blasphèment contre l'Esprit-Saint, qui profitent de toute occasion pour enfreindre insolemment les canons dictés par l'esprit de Dieu, ou pour en faire la critique, ou pour applaudir à ceux qui les critiquent ou les enfreignent. Une présomption aussi coupable est vraiment une sorte de blasphème contre l'Esprit-Saint.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. MATTHIEU, XII, 24 : " Les pharisiens, entendant cela dirent : Cet homme ne chasse les démons que par Béelzébuth, prince des démons. "
2. Id., XV, 4-5 : " Alors des scribes et des pharisiens de Jérusalem s'approchèrent de Jésus et lui dirent : - Pourquoi vos disciples violent-ils la tradition des anciens ? Car ils ne lavent pas leurs mains lorsqu'ils prennent leurs repas. - Mais Jésus leur répondit : Pourquoi vous-mêmes violez-vous le commandement de Dieu ? etc. "
3. Id., XXI, 37-41, 43-46 : " Enfin il leur envoya son fils, en disant : Au moins respecteront-ils mon fils. - Mais les vignerons, voyant le fils, dirent entre eux : C'est ici l'héritier ; venez, tuons-le, et nous aurons son héritage. - Et s'étant saisis de lui, ils le jetèrent hors de la vigne, et le tuèrent. - Lors donc que le maître de la vigne sera venu, comment traitera-t-il ces vignerons ? - Ils lui répondirent : Il fera périr misérablement ces misérables et il louera sa vigne à d'autres vignerons, etc. . . - Les princes des prêtres et les pharisiens, ayant entendu ces paraboles de Jésus virent bien que c'était d'eux qu'il parlait. - Et voulant se saisir de lui, ils craignirent le peuple, parce que celui-ci regardait Jésus comme un prophète. "
4. Id., XXII, 15-16, 18-19 : " Après cela, les pharisiens s'étant retirés, tinrent conseil entre eux sur la manière dont ils pourraient surprendre Jésus dans ses paroles. - Et ils envoyèrent leurs disciples avec des hérodiens lui dire : Maître, nous savons que vous êtes vrai dans tout ce que vous faites, et que vous enseignez la voie du Dieu dans la vérité, sans avoir égard à qui que ce soit, etc. -
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Jésus connaissant leur malice, leur dit : Hypocrites, pourquoi me tentez-vous ? - Montrez-moi la pièce d'argent du tribut, etc. "
5. JEAN, VII, 41-43, 47-52 : " Quelques autres disaient : C'est le Christ. Mais d'autres disaient : Est-ce que le Christ viendra de Galilée ? - L'Ecriture ne dit-elle pas que le Christ viendra de la race de David, et de la petite ville de Bethléem d'où était David ? - Et ainsi le peuple était divisé à son sujet, etc. - Les Pharisiens répliquèrent aux archers : Etes-vous donc séduits vous aussi ? - Y a-t-il un seul des sénateurs et des pharisiens qui ait cru en lui ? - Car pour cette populace qui ne sait ce que c'est que la loi, ce sont des gens maudits. - Nicodème, l'un d'entre eux, et le même qui était venu trouver Jésus pendant une nuit, leur dit : - Notre loi permet-elle de condamner un homme sans l'avoir auparavant entendu, et s'être informé de ce qu'il a fait ? - Ils répondirent et lui dirent : Est-ce que vous êtes aussi galiléen ? Lisez les Ecritures, et apprenez que nul prophète n'a été suscité de Galilée. "
6. Id., XII, 10-14, 19 : " Cependant les princes des prêtres délibérèrent s’ils ne feraient pas mourir aussi Lazare, - parce qu'un grand nombre de juifs les quittaient à cause de lui, et croyaient en Jésus. - Les pharisiens se dirent donc les uns aux autres : Vous voyez que nous n'obtenons rien ? voilà tout le monde qui le suit. "
7. Actes, IV, 16-17 : " Que ferons-nous à ces gens-ci ? Car ils ont fait un miracle qui est connu de tous les habitants de Jérusalem, cela est évident et nous ne pouvons le nier. - Mais pour empêcher que le bruit ne s'en répande davantage parmi le peuple, défendons-leur avec menaces de prononcer désormais ce nom devant qui que ce soit. "
8. Ibid., V, 18 : " Ils arrêtèrent les apôtres, et les mirent dans la prison publique. "
9. Psaume I, 1 : " Heureux l'homme qui ne suit point les conseils des impies, qui ne se fixe point dans la route des pécheurs et qui ne s'assied point dans la chaire de pestilence. "
40. II Pierre, II, 1-3 : " Or, comme il y a eu de faux prophètes parmi le peuple, il y aura aussi parmi vous de faux docteurs qui introduiront de pernicieuses hérésies, et qui, renonçant au Seigneur qui les a rachetés attireront sur eux-mêmes une prompte ruine. - Plusieurs les suivront dans leurs principes pervers, et à cause d'eux la voie de la vérité sera exposée au blasphème. - Leur avarice, en vous séduisant par des discours
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artificieux, fera un trafic de vos âmes ; mais le jugement qui les menace depuis longtemps s'avance à grand pas, et la main qui doit les frapper n'est pas endormie. "
11. Tite, III, 10-11 : " Fuyez celui qui est hérétique, après lui avoir donné un ou deux avertissements, - sachant qu'un tel homme est perverti, et qu'il pèche, étant condamné par son propre jugement. "
12. II Timothée, III, 8-9, 13 : " Comme Jannès et Mambrès résistèrent à Moïse, ceux-ci de même résistent à la vérité. Ce sont des hommes corrompus dans leur esprit, et pervertis dans la foi. - Mais le progrès qu'ils feront aura ses bornes ; car leur folie sera reconnue de tout le monde, comme le fut alors celle de ces magiciens. . . - Mais les hommes méchants et les imposteurs se fortifieront de plus en plus dans le mal, étant dans l'erreur, et y faisant tomber les autres. "
13. I Timothée, IV, 1-2 : " Or, l'Esprit dit ouvertement, que dans la suite des temps quelques-uns abandonneront la foi, en suivant des esprits d'erreur et des doctrines diaboliques, -enseignées par des imposteurs pleins d'hypocrisie, dont la conscience sera noircie de crimes, etc. "
14. Actes, XIII, 10 : " O homme plein de toute sorte de tromperie et de malice, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
15. MATTHIEU, XII, 31 : " Je vous déclare que tout
autre péché et tout autre blasphème
sera remis aux hommes ; mais le blasphème contre le Saint-Esprit
ne leur sera point remis. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. LEON, Epist. X ad Flavianum, c. 1, dit en parlant d'Eutychès : " N'est-ce pas le comble de l'injustice, que de se complaire dans l'impiété au mépris des conseils des sages et des docteurs ? Ils se rendent coupables de ce péché ceux qui, ne pouvant franchir les obstacles qui les empêchent de parvenir à la connaissance de la vérité, ne s'empressent pas de recourir aux écrits des prophètes, aux épîtres des apôtres et à l'autorité de l’Evangile, mais ne consultent qu'eux-mêmes. Ils enseignent l’erreur, parce qu'ils ne se sont pas faits disciples de la vérité. En effet, quelle étude peut-il avoir faite des pages sacrées de l'Ancien et du Nouveau-Testament, celui qui ne comprend pas même les premières lignes du symbole ? Ce vieillard ne sait
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point encore par cœur ces vérités que les chants des hommes régénérés font retentir par tout l'univers (Cf. Chefs-d’œuvre des Pères de l'Eglise, t. XIV, p. 232-233.). "
2. S. AUGUSTIN, de Genesi ad litteram, lib. VII, c. 9 : " Les hérétiques lisent les Ecritures comme nous, et ils ne sont hérétiques, que parce que, faute de les entendre dans leur vrai sens, opposent avec opiniâtreté leur fausse manière de les entendre à l'Eglise catholique qui seule en a l'exacte intelligence. "
3. Le même, Tract. XVIII in Joannem : " Car toutes les hérésies et tous les dogmes erronés qui sont comme des pièges où les âmes se prennent et tombent de là dans l'abîme ont pour cause ordinaire l’Ecriture mal entendue, et la téméraire audace avec laquelle on soutient sa fausse interprétation. De sorte, mes frères, qu'il faut douter avec beaucoup de précaution et de prudence ce que notre faiblesse d'intelligence nous rend incapables de comprendre, et avoir toujours cette règle sûre devant les yeux, de nous nourrir avec action de grâces des vérités que nous trouvons dans les livres saints conformes à ce que la foi nous en enseigne, et d'attendre l'intelligence des autres où nous n'apercevons pas la même conformité, sans suspendre pour cela notre foi sur ces vérités mêmes c'est-à-dire, de croire toujours fermement que cela est bon et vrai, en attendant que Dieu nous fasse la grâce de le comprendre mieux (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, tome Ier, pag. 585-586). "
4. Le même, De utilitate credendi, c. 1 : " Si je regardais comme une même chose, cher Honorat, d'être hérétique et d'ajouter foi aux hérétiques, je n’aurais qu’à laisser en repos sur cette question et ma langue et ma plume. Mais comme ce sont là deux choses fort différentes, puisqu'un hérétique est à mon sens celui qui invente ou adopte des opinions fausses et nouvelles, en vue de quelque intérêt temporel, et particulièrement en vue de se faire un nom ou d'acquérir de l'autorité et que celui qui ajoute simplement foi aux hérétiques est un homme qui se laisse séduire par certaines apparences de vérité ou de piété. "
5. Le même, Cité de Dieu, liv, XVIII, c. 54 : Ceux donc qui, au sein de l'Eglise de Jésus-Christ, débitent quelque doctrine malsaine et contagieuse, s'ils opposent à l'autorité qui veut les redresser et les guérir une résistance obstinée ; si, loin de se rétracter de leurs dogmes pernicieux et mortels, ils persistent à les défendre, ils deviennent hérétiques, sortis de l'Eglise, ils
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sont rangés par elle parmi les ennemis qui servent à l’éprouver. Ils sont un mal, et ils servent néanmoins aux vrais catholiques, membres de Jésus-Christ, Dieu tirant le bien même des méchants et toutes choses contribuant au bien de ceux qui l'aiment. "
6. Ibidem, liv. XXI, c, 25 : " (Ceux qui promettent le salut éternel aux chrétiens apostats ou séparés de l'unité) ne voient-ils pas combien il est intolérable et contraire à la saine doctrine d'assurer que ces apostats de l’Eglise catholique, auteurs d’hérésies détestables, devenus hérésiarques, sont dans de meilleures conditions que ceux qui, n'ayant jamais été catholiques, se sont laissés prendre à leurs pièges. Hérésiarques, ce qui leur épargne l'éternité dé supplices, c'est le baptême reçu dans l'Eglise catholique, c'est le sacrement du corps de Jésus-Christ reçu jadis dans le vrai corps de Jésus-Christ. Eh quoi ! un déserteur de la foi, de transfuge devenu persécuteur n’est-il pas plus odieux que celui qui ne saurait trahir ce qu'il n'a jamais professé (Cf. La Cité de Dieu, traduct. nouvelle par L. Moreau, tom. III, pag. 176-177 et 437-438) ? "
7. S. DAMASE (Cette décrétale n'est pas
authentique. V. LABBE, Conc., t. II, col. 862 et 863, édit.
de Paris), cité par Gratien, causà XXV, q. 1, c.
Violatores : " Ceux qui violent les canons de propos délibérés
sont jugés sévèrement par les saints Pères,
et condamnés par l’Esprit-Saint qui a dicté ces saintes règles.
Car ceux-là blasphèment contre l’Esprit-Saint, qui profitent
de toute occasion, etc. " Le reste comme à la fin du corps de la
réponse.
Question VI
En quels cas l’envie que l’on porte aux grâces que d’autres reçoivent est-elle un péché contre l’Esprit-Saint ?
C'est lorsque l’on conçoit un profond sentiment de chagrin et de tristesse de voir quelqu'un de nos frères comblés des dons de Dieu, ou faire des progrès dans la pratique des vertus.
Un péché de cette nature semble tenir moins encore de la malice de l'homme que de celle de Satan, qui ne saurait souffrir dans les hommes l'acquisition et surtout le progrès des grâces de Dieu, et qui, à cause de cela, non-seulement se fait l'accusateur de ses frères mais encore est l'implacable ennemi de Dieu et de tous les gens de bien, cherchant sans relâche à faire des victimes, comme un lion rugissant qui ne se donne pas de repos.
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Aussi était-ce de vrais fils de Satan que ces juifs,
qui enviaient aux gentils la grâce de l'Evangile dont ceux-ci à
leur tour commençaient à être favorisés, comme
nous le lisons dans les Actes des apôtres.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Sagesse, II, 24-25 : " La mort est entré dans le monde par l'effet de l'envie du diable ; - et ceux qui se rangent de son parti deviennent ses imitateurs. "
2. Apocalypse, XII, 10 : " L'accusateur de nos frères, qu'il accusait jour et nuit devant notre Dieu, a été précipité. "
3. I PIERRE, V, 8 : " Soyez sobres, et veillez ; car le démon votre ennemi tourne autour de vous, comme un lion rugissant, cherchant qui il pourra dévorer. "
4. Actes, XI, 2-3 : " Lorsque Pierre fut de retour à Jérusalem, les fidèles circoncis disputaient contre lui, - et lui disaient : Pourquoi êtes-vous entré chez des hommes incirconcis ? et pourquoi avez-vous mangé avec eux ? "
5. Ibid., XIII, 44-46 : " Le sabbat suivant, presque toute la ville s'assembla pour écouter la parole de Dieu. - Mais les Juifs, voyant ce concours de peuple, furent remplis de colère, et ils contredisaient avec blasphème toutes les paroles de Paul. - Alors Paul et Barnabé leur dirent hardiment, etc. "
6. Genèse, IV, 4-5 : " Le Seigneur regarda
favorablement Abel et ses présents ; - mais il ne regarda point
Caïn, ni ce que celui-ci avait offert. C'est pourquoi Caïn entra
dans une très-grande colère, et son visage en fut tout abattu.
"
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Lib. I de Serm. Domini in monte, c. 43 : " C'est, à mon avis, un péché qui va jusqu’à la mort, que de se faire l'ennemi de ses frères après avoir été instruit de la vérité de Dieu par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ et d'être jaloux de la grâce qui les a réconciliés avec Dieu. Au lieu que
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le péché ne va pas à la mort, si, sans cesser d'aimer son frère, on lui refuse par quelque faiblesse d'esprit un service qu'on devrait lui rendre. C'est pour cela que Notre-Seigneur a dit sur la croix : Mon Père pardonnez-leur, parce qu'ils ne savent ce qu'ils font (LUC, XXII, 54) ; car la grâce de l'Esprit n'avait pas été communiquée à ces misérables pour leur faire contracter avec Notre-Seigneur les liens d’une fraternité sainte ; et nous voyons dans les Actes des apôtres saint Etienne prier pour ceux qui le lapidaient, parce que ceux qui le lapidaient n'avaient jamais été jusque -là disciples de Jésus-Christ et ne résistaient pas par conséquent à une grâce qui leur eût été communiquée. D’un autre côté, saint Paul ne prie pas pour Alexandre, sans doute parce que ce dernier étant déjà au nombre des fidèles, avait péché mortellement en se laissant aller à l'envie contre celui dont il était le frère. Quant à ceux qui, sans manquer mortellement à la charité, n’avaient fait que succomber à une crainte pusillanime, il prie pour qu'ils en obtiennent le pardon. Car voici ses paroles : Alexandre l’ouvrier en cuivre m’a fait essuyer bien des maux : le Seigneur lui rendra selon ses œuvres : gardez-vous de lui, parce qu'il a fortement combattu la doctrine que nous enseignons. L'Apôtre dit ensuite quels sont ceux pour qui il prie : La première fois, ajoute-t-il, que j'ai défendu ma cause, personne ne m'a assisté, et tous m'ont abandonné : je prie Dieu de ne pas le leur imputer (II Tim., IV, 14-16). "
2. Ibidem, c. 44 : "Pécher contre le Saint-Esprit, c'est peut-être se rendre par malice et par envie l'ennemi de la charité fraternelle après qu'on a reçu la grâce de l'Esprit-Saint, péché que
Notre-Seigneur déclare n’être pardonné ni dans ce monde ni dans l'autre. On demandera peut-être à cette occasion si les Juifs ont péché contre le Saint-Esprit, quand ils ont dit que Notre-Seigneur chassait les démons au nom de Béelzébuth prince des démons, ou si ces paroles n'ont pas plutôt offensé Notre-Seigneur lui-même, puisque Jésus-Christ dit ailleurs à leur sujet et en voulant parler de lui-même : S'ils ont appelé le père de famille Béelzébuth, combien plutôt traiteront-ils de même ses domestiques (MATTH., X, 25) ? Ou bien dira-t-on que, comme ils ne pouvaient parler de cette manière que par le principe d'une envie des plus violentes, en même temps qu'ils commettaient une énorme ingratitude pour les bienfaits qui leur étaient accordés dans ce moment-là même, cette envie seule dont ils brûlaient suffisait, quoiqu'ils n'eussent jamais été disciples de
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Jésus-Christ, pour les rendre coupables du péché contre l'Esprit-Saint ? Les paroles de Notre-Seigneur, en effet, ne décident pas cette question. Car quoiqu'il ait dit dans ce même endroit :
Quiconque aura parlé contre le fils de l'homme en obtiendra le pardon, mais si quelqu'un vient à parler contre le Saint-Esprit, ce péché ne lui sera pardonné ni dans ce monde ni dans l’autre (MATTH., XII, 32), on peut croire qu'il a voulu inviter par-là ceux qui l'écoutaient à recevoir la grâce, et quand ils l’auraient reçue, à ne plus pécher de la même manière qu'ils l'avaient fait jusque-là. Car tant qu'ils ne l'avaient pas reçue, s'ils parlaient mal du Fils de l'homme, ce péché pouvait leur être pardonné, pourvu qu'ils se convertissent, qu'ils embrassassent la foi, et qu’ils reçussent le Saint-Esprit ; mais si, après avoir reçu cette grâce, ils portaient envie à quelqu'un de leurs frères et résistaient à la grâce même qu'ils avaient reçue, ce péché ne pouvait plus leur être pardonné ni dans ce monde ni dans l'autre. Car, s'il les avait regardé comme condamné sans espoir de pardon, il n'aurait pas pris la peine de les avertir comme il le fit en ajoutant : Ou dites que l'arbre est bon, et que le fruit est bon aussi ; ou dites que, l'arbre était mauvais, le fruit aussi en est mauvais (ibidem, 35). Ces paroles donc, Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour ceux qui vous persécutent, doivent s'entendre de manière qu'on admette néanmoins qu'il y a certains péchés de nos frères pour lesquels l'obligation de prier n'existe plus, si nous ne voulons pas, par un effet de notre ignorance et contre la nature de la chose, mettre les divines Ecritures en contradiction avec elles-mêmes. "
3. Le même, Lib. I Retractationum, c. 49 : "Ailleurs (savoir Lib. 1 de serm. Domini in monte, c. 43), j’ai défini de la manière suivante le péché à la mort, dont saint Jean a dit que ce n'était pas pour ce péché-là qu’il engagerait à prier : " C'est, à mon avis, un péché qui va jusqu’à la mort, que de se faire l'ennemi de ses frères après avoir été instruit de la vérité de Dieu par la grâce de Jésus-Christ et d'être jaloux de la grâce qui les a réconciliés avec Dieu. " En disant que c'était là mon avis, j'ai marqué suffisamment que je ne l’assurais pas ; mais j'aurais dû ajouter que cela ne peut être vrai que pour le cas où l'on mourrait dans cette perverse disposition d'esprit, puisqu'il ne faut désespérer d'aucun pécheur tant qu'il est en cette vie, et que, du moment où il n'y a pas à désespérer de quelqu'un, il y a de la prudence à prier pour lui. "
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Question VII
Quelle est l’espèce d’obstination qui constitue un péché contre l’Esprit-Saint ?
C'est celle qui oppose une résistance inflexible aux sages avertissements qu'on lui adresse, sans qu'aucune raison puisse l'amener à modifier en rien ses dispositions criminelles.
Ce fut bien là le péché du roi Pharaon, qui, tant de fois averti par Moïse et successivement atteint de si terribles fléaux où se montrait visiblement le doigt de Dieu, n'en persista pas moins dans ses desseins tyranniques, et mourut victime de son obstination. L'obstination des Juifs n'est pas moins connue, et saint Etienne l'a dépeint sous ses vraies couleurs dans ce reproche qu'il leur en a fait : Têtes dures, hommes incirconcis de cœur et d'oreilles vous résistez toujours au Saint-Esprit. Ceux-là leur ressemblent aujourd'hui, qui, s'attachent à des sectes nouvelles, ne veulent ni entendre ni consentir à lire les enseignements catholiques, comme ces aspics dont l'oreille se ferme à une douce mélodie, et semblent dire à quiconque leur propose la saine doctrine de l’Eglise : Retirez-vous de nous, nous ne voulons pas connaître vos voies. Ce qui n'est autre chose, que de s'amasser, comme dit saint Paul, un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu. Car, comme Salomon l'enseigne aussi, l’homme qui méprise avec une tête endurcie celui qui le reprend, sera tout-à-coup atteint d'un mal dont personne ne pourra le guérir.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. JEREMIE, V, 2-5 : " S'il en est qui jurent par moi, en disant : Vive le Seigneur, ils me prennent faussement à témoin. - Seigneur, vos yeux regardent la vérité, vous les avez frappés et ils n'ont point gémi : vous les avez brisé de coups, et ils n'ont point voulu se soumettre au châtiment ; ils ont rendu leur front plus dur que la pierre, et ils n'ont pas voulu revenir à vous. - Et moi, je disais : Il n'y a peut-être que les pauvres qui sont sans sagesse, qui ignorent la voie du Seigneur et les ordonnances de leur Dieu. - J'irai donc trouver les princes du peuple, et je leur parlerai ; car ceux-là sans doute connaissent la voie du Seigneur et les ordonnances de leur Dieu. Et voila qu'eux aussi ont brisé tous ensembles le joug du Seigneur et ont rompu ses liens. "
2. Id., VIII, 4-6 : " Tu leur diras : Voici ce que dit le Seigneur : Est-ce que celui qui tombe, ne se relèvera pas, et que celui qui s'est détourné du droit chemin, n'y rentrera jamais ? - Pourquoi donc ce peuple de Jérusalem s'est-il détourné de moi avec une aversion si opiniâtre ? Ils se sont attachés au mensonge, et n'ont pas voulu revenir. - Je les ai considérés et je les ai observés ; il n'y en a pas un qui parle selon la justice, qui fasse pénitence de son péché en disant : Qu'ai- je fait ? Tous s'enfoncent dans leurs voies, comme un cheval impétueux court au combat. "
3. ISAIE, XLVIII, 4 : " Je sais que vous êtes intraitable, que votre cœur est comme une barre de fer, et que vous avez un front d'airain. "
4. ZACHARIE, VII, 9-12 : " Voici ce que dit le Seigneur des armées : Jugez selon la vérité et que chacun exerce la miséricorde et la charité envers son frère - N'opprimez ni la veuve, ni l'orphelin, ni l'étranger ni le pauvre, et que nul ne forme dans son cœur de mauvais desseins contre son frère. Mais ils n'ont pas voulu se rendre attentifs à ma voix ; ils m'ont tourné le dos, et ils ont endurci leurs oreilles pour ne pas m'entendre. - Ils ont rendu leur cœur dur comme le diamant, pour ne point écouter la loi, ni les paroles que le Seigneur des armées leur avait adressée par son Esprit et par la voix des prophètes des premiers temps. C'est pourquoi une grande colère, allumée au souffle du Seigneur Dieu des armées a éclaté contre eux. "
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5. Genèse, XLIX, 5-7 : " Simon et Lévi tous les deux frères ; la fraude les a faits des instruments de violence. - Mon âme n'est point entrée dans leurs conseils, mon cœur ne s'est point uni à leur troupe, quand dans leur fureur ils ont tué des hommes, quand dans leur vengeance, ils ont renversé une ville. Maudite soit leur colère parce qu'elle a été persévérante, maudite soit leur colère parce qu'elle a été cruelle ; je les diviserai dans Jacob, et je les disperserai au milieu d'Israël. "
6. Actes, VII, 51 : " Têtes dures, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
7. Psaume LVII, 5-7 : " Leur fureur est semblable à celle d’un serpent irrité, à celle de l'aspic qui ferme l'oreille, - et qui n'écoute plus la voix de celui qui veut le charmer, ni les accents de l'enchanteur le plus habile. - Dieu brisera dans leurs bouches leurs dents meurtrières ; il brisera les mâchoires de ces lions féroces. "
8. JOB, XXI, 7, 12-15 : " Pourquoi donc les impies vivent-ils ? Pourquoi sont-ils élevés et affermis dans l'abondance ? . . . - Ils ont la harpe et les timbales à la main, et ils dansent au son des instruments. - Ils passent leurs jours dans les plaisirs ; et en un moment ils descendent dans les enfers. - Ils ont dit à Dieu : Retirez-vous de nous, nous ne voulons point connaître vos voies. - Qu'est-ce que le Tout-puissant, pour nous obliger à le servir ? Et que nous reviendra-t-il de le prier ? "
9. Romains, II, 4-6 : " Est-ce que vous méprisez les richesses de sa bonté, de sa patience, et de sa longue tolérance ? Ignorez-vous que la bonté de Dieu vous invite la pénitence ? - Et cependant, par votre dureté et par l'impénitence de votre cœur vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, - qui rendra à chacun selon ses œuvres. "
10. Proverbes, XXIX, 1 : " L'homme qui méprise
avec une tête dure, etc. (comme dans le corps de la réponse).
"
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Enchrid. ad Laurentium, c. 83 : " Quant à ceux qui, ne croyant pas que l’Eglise ait le pouvoir de remettre les péchés, méprisent une si grande faveur de la bonté de Dieu, et terminent leur vie dans le refus opiniâtre de faire pénitence, ils se rendent coupables du péché que Jésus-Christ déclare irré-
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missible, et qui outrage l'Esprit-Saint par la vertu duquel Jésus-Christ remet les péchés (Cf. Le Manuel de saint Augustin, parmi ses Traités choisis, t. II pag. 421-422). "
2. Le même, in Ps. LVIII, Conc. 1 : " N'ayez point de compassion de ceux qui commettent l'iniquité. Ceci peut s'entendre de deux manières, ou en ce sens que Dieu ne laisse aucun péché impuni, ou en cet autre qu'il y a une sorte de péché pour lesquels les coupables ne trouvent en Dieu aucune miséricorde. Disons un mot de chacune de ces deux manières d’expliquer le Psalmiste. "
" Il faut nécessairement que tout péché, petit ou grand, soit puni, ou par Dieu qui s'en venge, ou par l'homme qui s'en repent : car on peut dire d'un homme qui se repent, qu'il se punit lui-même. Si nous voulons trouver grâce auprès de Dieu, punissons nous-mêmes nos péchés. Il est impossible que Dieu ait compassion de ceux qui commettent l'iniquité en flattant leurs vices, ou en ne faisant rien pour les détruire. Il faut de deux choses l’une : ou qu'il vous en punisse, ou que vous vous en punissiez vous-même. Voulez-vous que Dieu ne vous punisse pas ? Punissez-vous vous-même. "
" Ce qui est constant, c'est que vous avez fait une chose qui ne peut demeurer impunie. Punissez-vous donc plutôt vous-même, afin de faire ainsi ce qui est marqué dans le psaume (XCIV, 2) : Prévenons par une humble confession de nos fautes le regard de notre juge. Que veulent dire ces paroles : Prévenons son regard ? Cela veut dire : Avant qu'il s'arrête lui-même à considérer vos péchés pour les punir, prévenez-le en les confessant et en vous en punissant vous-mêmes. Qu'il ne trouve rien en vous qu'il soit obligé de punir ; car en vous punissant vous-mêmes d'un acte d'injustice, vous faites un acte de justice. Et Dieu aura pitié de vous, parce qu'il vous trouvera occupé à faire ce qui est juste, c'est-à-dire, qu'il verra que vous haïssez en vous ce qu'il peut y haït lui-même : et ainsi vous commencerez à plaire à Dieu, en punissant en vous ce qui lui déplaît. Car enfin le péché ne saurait demeurer impuni, et cette parole aura toujours son accomplissement : N'ayez point de compassion de ceux qui commettent l'iniquité. "
" Passons maintenant à l'autre sens que l’on peut donner à ce langage du Prophète. Il est une sorte d’iniquités pour laquelle on ne saurait trouver miséricorde auprès de Dieu. Vous deman-
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derez quelle est cette iniquité ? C'est la prétention qu'on aurait de prendre la défense de ses propres péchés. Quand quelqu'un soutient ses péchés, il commet une iniquité énorme, puisqu'il soutient alors et défend ce que Dieu déteste. Et voyez combien cela est déraisonnable combien cela est injuste. Si l’homme fait quelque chose de bon, il veut qu'on le lui attribue ; s'il fait quelque chose de mauvais, il le rejette sur Dieu. Car ce qu'il y a de pire, c'est que les hommes, pour se justifier de leurs excès, osent en accuser Dieu même. "
" Que voulons-nous dire par-là ? C'est qu'il n'y a personne assez hardi pour oser dire que l'adultère, par exemple, soit une bonne chose, que l'homicide soit une bonne chose, que le mensonge, que le parjure soient des choses louables ; non, il n'y a personne qui ose dire cela. Car ceux-mêmes qui commettent ces crimes sont les premiers à les détester quand les autres s'en rendent coupables à leur égard. Ainsi vous ne trouverez point d'âme si corrompue, si étrangère à l'humanité ou aux sentiments gravés dans le cœur de tous les enfants d'Adam, qui puisse, comme je l'ai dit, approuver l'adultère, la tromperie, les rapines et le parjure. "
" Que font donc ces personnes pour se défendre de ces crimes ? Elles disent : Si Dieu l'avait voulu, je n'aurais pas commis ce péché. Comment voulez-vous que je m'oppose à ma destinée (Cf. Sermons de saint Augustin, t. III, p. 263-266) ? "
3. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Hom. XI super Ezechielem : " Les jugements du Tout-Puissant sont sévères. Après avoir longtemps attendu le pécheur à revenir à lui, il le punit de ses délais et de ses refus en lui donnant lieu de faire de nouvelles chutes encore plus funestes que les premières. Car tout péché qui n'est pas promptement effacé par la pénitence est, ou péché simplement dit, ou cause de péché, ou peine du péché. En effet, le péché le premier commis est ce que j'appelle le péché simplement dit. S'il n'est pas promptement réparé par le repentir, Dieu par un juste jugement permet que l'âme pécheresse tombe encore dans quelque péché nouveau, et qu'ainsi, pour ne s'être pas purifié par les larmes de la pénitence, elle entasse malheureusement faute sur faute. Le péché donc qui n'est pas effacé par la pénitence est tout à la fois péché et cause de péché, puisqu'il en résulte que le pécheur s’engage de plus en plus profondément dans l'abîme du vice. Mais ce nouveau péché qui est la suite d'un
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premier non réparé est donc tout à la fois péché et peine du péché, puisqu'il est l'effet d'un aveuglement de plus en plus grand, punition d'une faute précédente, en sorte que le seul progrès dans le mal est déjà un supplice pour le pécheur. Or, il arrive quelquefois qu'un seul et même péché soit en même temps péché, cause de péché et peine du péché. . . "
" Considérons avec crainte la manière dont un Dieu tout-puissant et souverainement juste, lorsqu'on a provoqué sa colère par de premiers crimes, permet qu'on s'aveugle jusqu’à en commettre de nouveaux. C'est en ce sens que Moïse a dit : La mesure des iniquités des Amorrhéens n'est pas encore remplie (Gen., XV, 16). David a dit de même : Laissez-les amasser iniquité sur iniquité et qu'ils n'entrent point dans votre justice (Ps. LXVIII, 28). Un autre prophète a dit encore : Les outrages, le mensonge, l'homicide, le larcin et l'adultère se sont Répandus comme un déluge et on a commis meurtre sur meurtre (Os, IV, 2), mot à mot, le sang a touché le sang. Car le sang touche le sang, quand un péché vient s'ajouter à un autre péché de telle manière qu'aux yeux de Dieu, l'âme est comme ensanglantée par cet amas d'iniquités dont elle se couvre. L'apôtre saint Paul a dit de même : Qu'ils comblent la mesure de leurs péchés (I Thess., II, 16). Dieu dit à saint Jean par le ministère de l’Ange : Que celui qui fait l'injustice la fasse encore, que celui qui est souillé se souille encore (Apoc., XXII, 11). C'est encore pour cela que le Seigneur dit dans le passage même que nous expliquons : Si le juste abandonne sa justice et qu'il commette l'iniquité, je mettrai devant lui une pierre d'achoppement (EZECHI., III, 20). C'est comme s'il disait en termes plus explicites : Parce qu'il n'a pas voulu voir, en se laissant toucher par le repentir, l'abîme où il est tombé, je lui donnerai lieu, en l'abandonnant par un juste jugement, de tomber encore dans un autre abîme. Quand Dieu dit qu'il mettra une pierre d'achoppement devant celui qui abandonne sa justice, cela ne veut pas dire qu'il le pousse au péché, mais seulement qu'il n'a pas la volonté de l'en délivrer, de même qu'il avait dit de Pharaon : J'endurcirai son cœur (Exode, IV, 24, et VII, 3). Car Dieu n'endurcit pas à proprement parler le cœur de celui qui pèche mais c'est pour dire qu'il ne le délivre pas de son endurcissement. Dieu, en effet, dans sa miséricorde nous laisse le temps de faire pénitence ; mais lorsque nous abusons de cette patience qu'il nous montre pour ajouter à nos fautes anciennes des fautes nouvelles, lui à son tour emploie
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à nous frapper le temps qu'il avait ménagé paternellement pour nous pardonner, afin que, pour n'avoir pas voulu se convertir en temps favorable, le pécheur aggrave ses maux avec ses crimes à l'occasion même de ce qui lui en aurait procuré la délivrance, s'il avait voulu se convertir. De là vient qu'il est écrit : Ignorez-vous que la bonté de Dieu vous invite à la pénitence ? Et cependant par votre dureté et par l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu (Rom., II, 4-5). C'est donc en abusant de la bonté de Dieu que le réprouvé s'amasse un trésor de colère pour le jour de la colère, parce qu'en employant à pécher le temps qui lui est donné pour faire pénitence, il fait du remède qui lui est offert un moyen d'augmenter son mal. Dieu voyant ainsi la chose même destinée à la guérison du pécheur ne servir qu’à accroître sa maladie, change à son tour sa bonté en sévérité et frappe d'autant plus fort, que sa patience a attendu plus longtemps. Et puisque l'homme refuse de s'éloigner du mal pour vivre de la véritable vie, il croîtra dans le mal, mais cessera pour y trouver la mort. "
4. S. BERNARD, Lib. I de Consideratione ad Eugenium Pontificem maximum : " Ne cherchez pas à savoir ce que c'est qu'un cœur endurci ; car si vous n'en êtes pas effrayé, je vous dirai que c'est le vôtre. Il est tel, celui qui n'a pas horreur de lui-même parce, qu'il est insensible. Ne vous arrêtez pas à mes paroles ; interrogez Pharaon : il vous apprendra qu'un homme au cœur endurci n'a jamais fait son salut, à moins que Dieu, dans sa miséricorde " ne lui ait, suivant les paroles du Prophète (EZECH., XXXVI, 26), arraché son cœur de pierre pour lui en donner un de chair. " - Qu'est-ce donc qu'un cœur endurci ? C'est celui qui n'est point brisé par la componction, touché par la pitié, ému par la prière ; qui ne cède point aux menaces et résiste aux châtiments ; celui qui est ingrat envers ses bienfaiteurs, perfide dans ses conseils, cruel dans ses jugements, effronté dans le péché, téméraire dans le danger, inhumain pour ses frères, audacieux à l'égard des choses divines, oubliant le passé, négligeant le présent et sans prévoyance pour l'avenir ; c'est celui qui ne conserve du passé que le souvenir de ses injures ; qui ne profite point du présent et ne s'occupe de l'avenir que pour préparer sa vengeance ; et pour comprendre en peu de mots toutes les mauvaises qualités de cet horrible monstre, c'est celui qui n'a ni crainte de Dieu ni considération pour les hommes. "
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5. Le même, in Serm. de conversione ad Clericos, c. 4 : " Quelqu'un s'étonnera peut-être de ces paroles du Psalmiste : Celui qui aime l'iniquité hait son âme (Ps. X, 6). Et moi, je dis qu'il hait de plus son propre corps. Car n'est-ce pas le haïr que de travailler d'un jour à l'autre à le précipiter dans l'enfer, et de lui amasser un trésor de colère dans la dureté et l'impénitence de son cœur pour le jour de la colère ? Au surplus, cette haine du pécheur pour son corps et son âme est plutôt dans les effets que dans le sentiment. C'est dans le même sens qu'un frénétique hait son propre corps, lorsque, tout hors de lui-même il cherche à s’ôter la vie. Or, y a-t-il frénésie plus forcenée que l'impénitence du cœur et que la volonté obstinée de pécher ? C'est bien là s'arracher la vie de ses propres mains, et se ronger la chair de ses propres dents, au moins dans le sens spirituel. "
6. S. AUGUSTIN, Quæst. XVIII super Exodum : " Pharaon ne pouvait imputer qu’à lui-même cette disposition de son cœur qui le portait à abuser de la patience de Dieu pour se montrer de plus en plus impie envers lui, au lieu de s'en servir pour se corriger. Quant aux événements qui se sont succédés et qui ont mis en évidence l'opposition de son cœur pervers à tous les ordres de Dieu ; qui ont donné à l'écrivain sacré l'occasion de dire que son cœur s'était endurci, c'est-à-dire, qu'au lieu de céder docilement, il résistait à outrance ; on doit les attribuer à la Providence divine, qui disposait les choses de manière à faire subir a ce cœur endurci son juste châtiment, et à en faire pour les autres une leçon salutaire. Si l'acquisition de quelques richesses est offerte en perspective comme le fruit d'un meurtre, n'est-il pas vrai qu'une considération semblable affectera un avare autrement qu'un autre pour qui l'argent aurait peu d'attrait ; que le premier sera engagé par-là à commettre le crime, et le second à l'éviter ? Cependant, l'un pas plus que l'autre n'aura été le maître d’avoir ou de n'avoir pas cette perspective. C'est ainsi que les occasions se présentent aux hommes méchants indépendamment de leur volonté et n'en sont pas moins exploitées par eux au profit d'une perversité qui est l'effet de leur dérèglement volontaire. Il est bon d'examiner si ce mot, J'endurcirai, ne pourrait pas aussi s'expliquer de cette manière : Je montrerai combien il est endurci. "
7. Ibidem, Quæst. XXIV : " Et Pharaon vit que le fléau s'était ralenti, et son cœur s'appesantit, et il ne les exauça point, ainsi que le Seigneur l'avait ordonné. Nous voyons ici que ce qui endurcit le
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cœur de Pharaon, ce ne fut pas seulement que ses magiciens faisaient des prodiges semblables à ceux de Moïse, mais aussi qu'il était épargné par la patience de Dieu. Car, selon que les cœurs des hommes sont bien ou mal disposés, la patience de Dieu présente aux uns la facilité de faire pénitence et aux autres celle de résister à Dieu et de persévérer dans le mal : toutefois ce n'est pas par elle-même qu'elle n'a pas de bon résultat dans ce dernier cas, mais, comme nous l'avons déjà dit, par l'effet de la perversité du cœur humain. C'est ce que l'Apôtre nous fait entendre par ces paroles : Ignorez-vous que la patience de Dieu vous invite à la pénitence ? Et cependant, par votre endurcissement et par l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, qui rendra à chacun selon ses œuvres (Rom., II, 4-5). Ailleurs encore, après avoir dit : Nous sommes en tout lieu la bonne odeur de Jésus-Christ (II Cor., II, 15), il ajoute : Soit à l'égard de ceux qui se sauvent, soit à l'égard de ceux qui se perdent. Il ne dit pas qu'il soit la bonne odeur de Jésus-Christ pour ceux qui se sauvent, et une mauvaise odeur pour ceux qui se perdent, mais seulement qu'il est la bonne odeur de Jésus-Christ. Ceux qui se perdent, se perdent donc en respirant cette bonne odeur même, à cause, comme nous l'avons dit, de la disposition particulière de leur cœur qui a besoin de la grâce pour être purifié par le changement de la volonté en bien, et ce ne sera qu'alors que les jugements de Dieu leur seront aussi désirables qu'ils leur sont maintenant à craindre. "
8. Le même, Serm. LXXXVIII (Ce sermon ne paraît pas à Noël-Alexandre être digne de saint Augustin, ni s'accorder pour la doctrine avec la manière dont nous avons vu plus haut, témoignage 6, que cet habile docteur a cherché d’expliquer l'endurcissement de Pharaon. Mais il faut se rappeler ici que Noël-Alexandre était thomiste outré, et opposant à la bulle Unigenitus. Cf. Hist. eccles. sæc. V, p. 106, édit de Venise) de tempore : " Avant tout, croyez fermement que Dieu n'abandonne jamais personne, que celui-ci ne l'abandonne le premier. Car, que quelqu'un ait péché grièvement une fois, deux fois, trois fois, Dieu l'attendra encore, comme il le dit lui-même par le Prophète que sa volonté est que le pécheur se convertisse et revienne à la vie (EZECH., XXXIII, 11). Mais si l'homme persiste dans ses péchés, alors de la multitude de ses péchés naît le désespoir, et du désespoir l’endurcissement. On commence par se mettre peu en peine des péchés qu'on a
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commis d'abord, parce qu'ils sont légers ; mais, à mesure qu'on en augmente le nombre, on s'habitue à en commettre de plus grands, et ceux-ci, à force de s'accumuler, vous entraînent au fond de l'abîme. Alors s'accomplit cette parole de l'Ecriture : Lorsque le méchant est parvenu au plus profond abîme du péché, il méprise tout (Prov., XVIII, 3). C'est à cette sorte de personnes que l’Apôtre adresse ce reproche : Ignorez-vous que la patience de Dieu vous invite à la pénitence ? Et cependant, par votre endurcissement et par l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère (Rom., II, 4-5). C'est au sujet d'un endurcissement de cette espèce que nous lisons dans un autre endroit : Un cheval indompté devient intraitable, et l'enfant abandonné à sa volonté devient insolent (Ecclé., XXX, 8). L'Ecriture, parlant du soin que les parents doivent prendre de corriger leurs enfants, dit encore : Châtiez votre fils avec la verge pendant qu’il est enfant, de peur qu'il ne s'endurcisse, qu'il ne veuille plus vous obéir, et que votre âme ne soit percée de douleur (Ecclé., XXX, 12). Je vous ai rapporté ces témoignages des Ecritures, afin de vous faire comprendre que l'endurcissement n'est pas l'effet de la puissance de Dieu qui y pousserait le pécheur mais plutôt un abus de son indulgence : et ainsi Pharaon s'est endurci, non par quelque effet de la puissance de Dieu, mais par une suite de sa patience. Enfin, n'est-il pas vrai qu’à chaque fois que Dieu le frappa de quelque nouvelle plaie, il témoigne du regret et du repentir ? Chaque fois au contraire que Dieu suspendit ses coups à son égard et lui pardonna, il se laissa de nouveau emporter par l'orgueil. Croyez donc fermement, et gravez bien cette vérité dans vos cœurs que toutes les fois que Dieu disait : J'endurcirai le cœur de Pharaon, il ne voulait faire entendre autre chose, sinon qu'il suspendait par rapport à lui ses plaies et ses fléaux et qu'il lui donnait lieu de s'endurcir par l'indulgence dont il usait à son égard. Mais quelqu'un dira peut-être : Pourquoi Dieu l'a-t-il endurci en l'épargnant comme il l’a fait ? Pourquoi écartait-il ses fléaux de lui ? A cette question, voici ce que je répondrai avec confiance : Dieu a fait cesser tant de fois les fléaux qu'il envoyait à Pharaon, parce que ce roi, à cause du nombre et de l'énormité de ses péchés ne méritait pas d'être corrigé comme un enfant l'est par son père mais plutôt d’être endurci comme un étranger ou un ennemi. Car tels étaient ses crimes commis jusque -là, tel avait été son mépris sacrilège pour le vrai Dieu, qu'on voyait en lui l'accomplissement de ce que dit l'Esprit-Saint de tous les gens de ce caractère : Ils sont
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exempts des peines des humains, et à l'abri des coups qui frappent les autres hommes. Aussi, ils se parent de leur orgueil comme d'un collier ; l'iniquité les enveloppe comme un vêtement ; leur criminelle arrogance naît de l’excès de leur embonpoint (Ps. LXXII, 5-7). Voilà comment s'endurcissent ceux qui ne méritent pas que Dieu les châtie pour leur amendement. L'Ecriture dit au contraire de ceux dont la miséricorde divine prévient l'endurcissement : Dieu frappe de verges tous ceux qu'il reçoit au nombre de ses enfants (Hébr., XII, 6). Et de même : Je reprends et châtie ceux que j’aime (Apoc., III, 49). Et encore : Le Seigneur châtie celui qu'il aime (Prov., III, 42). C'est aussi de cet endurcissement que parle le prophète lorsqu'il dit à Dieu, en représentant dans sa personne le peuple entier : Pourquoi avez-vous endurci notre cœur au point que nous avons perdu votre crainte (Is., LXIII, 17) ? Ce qui veut dire sans doute que Dieu les avait abandonnés en sorte qu'ils ne songeaient plus à se convertir à lui. Prophétie dont nous voyons l'accomplissement dans le peuple juif, en punition de tant de sacrilèges dont ce peuple s'est rendu coupable. Que personne donc ne soit assez téméraire pour blâmer ou inculper la justice divine à l'exemple des païens ou des manichéens, mais que chacun croie sans hésiter que, si Pharaon s'est endurci, ce n'est pas que Dieu ait forcé en cela sa volonté, mais que ç’a été l'effet de sa propre perversité et de cet orgueil indomptable qui lui a fait mépriser à tant de reprises différentes les préceptes divins. Que signifient ces paroles, J’endurcirai son cœur, sinon : Ma grâce s’éloignera de lui, et dès-lors sa propre méchanceté l'endurcira ? Et pour rendre la chose plus évidente, empruntons une similitude aux choses matérielles. De même que dans les jours d'hiver la glace se fond à la chaleur du soleil, et se reforme aussitôt que le soleil s'est retiré, ainsi la charité de plusieurs se refroidit par l’effet du péché et se ranime à la chaleur de la miséricorde divine, à cette chaleur dont il est écrit : Il n'y a personne qui puisse se soustraire à sa chaleur (Ps. XVIII, 7). Ce que nous voyons s'être encore accompli dans la personne de Pharaon, qui s'endurcissait et se révoltait contre Dieu toutes les fois que les fléaux cessaient de le frapper, et qui recourait aux supplications et aux prières, toutes les fois que la main de Dieu s'appesantissait sur lui de nouveau. "
9. S. GREGOIRE- LE-GRAND, Moralium lib. XXXI, c. 11 (al. 7) : " Il est dit dans l’Ecriture que Dieu avait endurci le cœur de Pharaon ; non qu'il eût lui-même produit cet endurcissement
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dans le cœur de ce roi impie ; mais parce qu'en punition de ces crimes, il n'avait pas jugé à propos d'amollir sa dureté en lui inspirant le sentiment de sa crainte (Cf. Les Morales de saint Grégoire, t. IV, p. 388). "
10. Ibidem, Lib. XI, c. 5 (al. 4) : " Dieu dit à Moïse, en parlant de Pharaon : J'endurcirai son cœur (Exode, VI et XII) Il est dit de Dieu, qu'il endurcit par sa justice les cœurs des réprouvés, puisqu'il ne les amollit pas par sa grâce ; et il enferme un homme comme dans une étroite prison, lorsqu'il le laisse dans les ténèbres de ses péchés (Cf. Ibid., t. II, p. 235). "
11. S. BERNARD, Serm. XLII super Cantica : " Si j'use de correction et que je fasse pour cela ce qui est en moi, mais que la correction elle-même frustre de son effet, ne fasse pas ce qui est en elle ou ce que je me suis proposé en la faisant, et qu'au lieu de toucher ceux à qui elle s'adresse, elle revienne vers moi comme une flèche qui retourne à celui qui l'a jetée, quels pensez-vous que doivent être alors les sentiments de mon âme ? Ne dois-je pas être alors chagrin, attristé ? Et pour employer ici les expressions du Maître qui suppléeront à la stérilité de mon propre langage, je me trouve alors pressé des deux côtés, sans savoir que choisir (Philip., I, 22-23), ou de me complaire en ce que j'aurai dit, puisqu'après tout je n'aurai fait que mon devoir, ou de me repentir de l'avoir dit, puisque je n'aurai pas obtenu l’effet que j'aurais voulu. Car j'aurais voulu abattre l’ennemi de mon frère, arracher celui-ci à son esclavage, et bien loin d'obtenir ce succès, je lui aurai occasionné tout le contraire. J'aurai blessé son âme, je l'aurai rendu plus coupable, puisque à ses péchés antérieurs il aura ajouté le mépris de la correction. Ils ne veulent pas t'écouter, me dit Dieu par son prophète (EZECH., III, 7), parce qu'ils ne veulent pas m’écouter moi-même. Voyez donc quelle est la majesté qui aura été offensé en telle circonstance. Ne pensez pas, ô vous qui aurez méprisé ma remontrance, que ce soit moi seul que vous ayez méprisé ; car c'est le Seigneur qui vous parlait par ma bouche. Et ce que Dieu a dit au Prophète, il l'a dit aux Apôtres : Qui vous méprise me méprise (LUC, XI, 16). Je ne suis ni prophète ni apôtre et pourtant, j'ose le dire, je remplis la fonction des prophètes et des apôtres, et quelque loin que je sois de les égaler en mérites, je partage leur sollicitude. Je me trouve, bien qu'à ma grande
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confusion et avec bien du danger pour mon âme, assis sur la chaire de Moïse, tout en reconnaissant que je n'ai rien de ses vertus, et que je ne suis point favorisé des mêmes grâces. Mais quoi ? cette chaire n'a-t-elle plus droit au respect, parce qu'elle est occupée par un indigne ? Eh ! quand même ce seraient des scribes et des pharisiens qui y seraient assis, faites toujours ce qu'ils disent, c'est Jésus-Christ qui vous l'ordonne. Souvent même l'impatience se joint au mépris tellement que non-seulement la personne réprimandée ne se met nullement en peine de se corriger, mais qu'elle s'indigne même contre celui qui la reprend, comme le ferait un frénétique qui repousserait la main da qui repousserait la main du médecin. Prodigieux degré de malice ! On s’irrite contre la main qui guérit, et on ne s’indigne pas contre la main qui blesse. Vous n'ignorez pas quelle est cette main qui tire des flèches dans l’obscurité contre ceux qui ont le cœur droit (Ps. X, 3), qui a décoché contre vous-même un trait mortel ; et vous ne vous indignez pas contre cette main ennemie ! et vous vous emportez contre moi, qui ne désire que votre guérison ! Mettez-vous en colère vous, dit le Psalmiste, et ne péchez pas (Ps. IV, 5). Si c'est contre le péché que vous vous mettiez en colère, non-seulement vous ne péchez pas en cela, mais vous effacez même vos fautes passées. Mais au lieu d'agir de la sorte, vous entretenez votre péché en repoussant ce qui en serait le remède, vous y en ajoutez un nouveau en vous livrant à une colère coupable, et vous entassez sans mesure péché sur péché. Quelquefois encore l'impudeur vient se joindre au reste, en sorte que non-seulement on repousse impatiemment la correction, mais qu'on cherche de plus à justifier effrontément la faute qui en fait le sujet. Parvenu à ce degré, le mal est irrémédiable. Vous avez pris le front d’une femme débauchée, disait un jour Dieu à son peuple ; vous n'avez point voulu rougir (JEREM., III, 5). Il ajoutait : J’ai retiré de dessus vous le zèle que j'avais de votre salut ; je me tiendrai en paix, et je ne me mettrai plus en colère contre vous (EZECH., XVI, 42). Ces seules paroles me font trembler. Comprenez-vous combien il est dangereux, combien c'est un mal effrayant, que de chercher à justifier ses fautes commises ? Dieu a dit encore : Je reprends et châtie ceux que j'aime (Apoc., III, 19). Si donc on renonce à vous reprendre, c'est qu'on aura cessé de vous aimer. Vous ne serez plus digne d’être aimé du moment où vous serez jugé indigne d'être repris. Jamais, croyez-moi, Dieu n'est plus en colère contre nous, que lorsqu'il cesse de nous témoigner sa colère. Faisons
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grâce à l'impie, dit-il encore, et il n'apprendra point à être juste (Is., XXVI, 10). Non, je ne veux point d'une grâce semblable. Une miséricorde de ce genre est plus à craindre pour moi que la colère la plus terrible ; car elle a tous les caractères d'une justice inexorable. Il vaut beaucoup mieux pour moi suivre le conseil du Prophète, et songer à me corriger, de peur qu'enfin le Seigneur ne se mette en colère et que je ne périsse hors de la voie de la justice (Ps. II, 12). Mettez-vous, je vous prie, en colère contre moi, ô vous le Père des miséricordes ; mais que ce soit de cette colère qui remette dans la voie celui qui s'en est écarté et non de cette autre colère qui l'en éloigne pour toujours. La première est celle qui nous parle un langage sévère mais paternel ; la seconde se tait et dissimule, mais n'en est que plus à redouter. Car ce n'est pas lorsque j'ignore, mais bien plutôt lorsque je sens que vous êtes irrité contre moi, que je me dis à moi-même que vous me pardonnerez ; car lorsque vous serez en colère vous vous souviendrez de votre miséricorde (HABAC., III, 2). O Dieu, disait le Psalmiste, vous avez usé envers eux de miséricorde, lors même que vous punissiez en eux tout ce qui pouvait vous déplaire (Ps. XCVIII, 8). C’est de Moïse, d’Aaron et de Samuel qu'il dit ces paroles, et il appelle miséricorde en Dieu la sévérité avec laquelle il reprenait en eux ce qui pouvait lui déplaire. Allez donc maintenant, et bannissez toute espérance d'obtenir miséricorde de Dieu, vous qui voudriez justifier vos désordres et qui vous plaignez de la correction. N'est-ce pas là appeler mal ce qui est bien, et bien ce qui est mal ? Que peut-il naître cette damnable impudeur autre chose que l'impénitence, mère du désespoir ? Car qui se repentira jamais de ce qu'il croit être une bonne action ? Malheur à ceux-là, dit le Prophète (Ecclé., XXXI, 7). Oui, malheur, et malheur éternel ! Ce sont deux choses bien différentes, que quelqu'un soit tenté par sa propre concupiscence qui l’emporte et qui l'attire dans le mal (JAC., I, 14), ou qu'il se porte de lui-même à faire le mal qu'il envisage comme un bien, et que, dupe volontaire d'une sécurité trompeuse, il coure à la mort comme il courrait il la vie (Cf. Sermons de saint Bernard sur le Cantique des cantiques, p.5-7). "
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Question VIII
Quand y a-t-il péché d’impénitence ?
C'est lorsqu'au lieu d'expier ses péchés, comme on le devrait, par une pénitence salutaire, on ne cesse d'en commettre de nouveaux, avec le dessein formé de ne jamais en faire pénitence.
Nous pouvons dire des pécheurs de cette espèce, qui non contents de l'être actuellement, veulent encore le rester toujours, que leur vie et leur mort sont également affreuses, puisqu'ils semblent dire, sinon par leurs paroles, au moins par toute leur conduite : Nous avons fait pacte avec la mort, nous avons contracté alliance avec l'enfer. C'est d’eux encore que nous pouvons appliquer ces paroles de saint Jean : Il y a un péché qui va à la mort, et ce n'est pas pour ce péché-là que je dis que vous devez prier.
Voilà ce que nous avions à dire au sujet des péchés contre l'Esprit-Saint, péché des plus graves, et que Dieu ne remet jamais à celui qui les commet, ou qu'il ne remet du moins qu'avec beaucoup de peine. C'est pourquoi nous devons multiplier nos efforts pour nous en préserver nous et notre prochain, conformément à ces avertissements de nos écrivains sacrés : Prenez garde de contrister ou d’éteindre l'esprit de Dieu : Si vous entendez aujourd'hui sa voix, n'endurcissez pas vos cœur : Que personne de vous ne tombe dans l'endurcissement en se laissant séduire par le péché : Le cœur sera accablé de maux à la fin de sa vie. Passons maintenant à ces péchés qui, comme on dit, crient jusqu'au ciel, et qui ne le cèdent guère en énormité à ceux que nous venons de passer en revue.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Psaume XX XII, 22 : " Une mort funeste sera le fruit des crimes de l'impie. "
2. ISAIE, XXVIII, 14-18 : " Ecoutez donc la parole du Seigneur, hommes railleurs, qui dominez sur mon peuple à Jérusalem. - Nous avons fait, dites-vous, un pacte avec la mort ; nous avons contracté une alliance avec l'enfer ; lorsque les maux se déborderont comme des torrents, ils ne viendront point jusqu’à nous, parce que nous avons mis notre confiance dans le mensonge, et le mensonge sera notre asile. "
3. Id., III, 8-9 : " Car Jérusalem touche à sa ruine, et Judas est déchu de sa grandeur, parce que leurs paroles et leurs œuvres se sont élevées contre le Seigneur, et ont offensé les yeux du Très-Haut. - L'impudence même de leur visage rend témoignage contre eux ; ils ont publié hautement leur péché comme Sodome, au lieu de l'ensevelir dans le silence. Malheur à eux, parce que leurs maux sont la juste peine de leurs crimes. "
4. Psaume LI, 1, 7 : " Pourquoi te glorifies-tu dans le mal, toi qui par l'abus de ta force, déshonore le Tout-puissant ? . . . Aussi le Tout-Puissant consommera pour jamais ta ruine ; il te saisira, et t'arrachera de ta demeure, il extirpera ta race de la terre des vivants. "
5. Proverbes, II, 11-15 : " Le bon conseil vous gardera, et la prudence vous conservera, - en vous garantissant des pièges tendus dans le chemin, et de la perfidie des hommes à double langage ; - qui abandonnent le droit sentier, pour s'enfoncer dans des voies ténébreuses ; - qui se réjouissent quand ils trouvent l'occasion de faire le mal, et qui tressaillent de joie à la vue des succès du crime ; - qui suivent des voies détournées et marchent dans des chemins tortueux. "
6. I JEAN, V, 16 : " Si quelqu'un voit son frère commettre un de ces péchés qui ne vont point à la mort, qu'il prie, et Dieu donnera la vie à ce pécheur, si son péché ne va point à la mort.
Le péché commis va-t-il à la mort ? ce n'est pas pour ce péché-là que je dis que vous devez prier. "
7. Ephésiens, IV, 30 : " Ne contristez point l'Esprit de Dieu, cet Esprit-Saint par lequel vous avez été marqué comme d'un sceau pour le jour de la rédemption. "
8. Thessaloniciens, V, 19 : " N'éteignez pas l'esprit. "
9. Psaume XCIV, 8-9 : " Aujourd'hui, si vous écoutez sa
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voix, il vous dit : N'endurcissez point vos cœurs - comme firent vos pères à Mériba, comme ils firent au jour des murmures dans le désert. "
10. Hébreux, III, 7-14 : " Aujourd'hui donc, comme le dit le Saint-Esprit, si vous écoutez sa voix, - n'endurcissez pas vos cœurs, comme autrefois vos pères à Mériba, au jour des murmures dans le désert, - lorsqu'ils me mirent à l'épreuve, qu'ils me tentèrent, et furent témoins de mes œuvres. - Pendant quarante années cette race a provoqué mon dégoût. Le cœur de ce peuple, disais- je, est toujours dans l'égarement ; ils n'ont point connu mes voies. Aussi leur ai- je juré dans mon courroux, que jamais ils n'entreraient dans le lieu de repos que je leur avais destiné. - Prenez garde, mes frères, que quelqu'un de vous ne tombe dans un dérèglement de cœur et dans une incrédulité qui le sépare du Dieu vivant. - Mais exhortez-vous chaque jour les uns les autres, pendant que dure ce temps appelé aujourd'hui, de peur que quelqu'un de vous, séduit par le péché, ne tombe dans l'endurcissement. - Car nous sommes devenus participants de Jésus-Christ pourvu que nous conservions inviolablement jusqu’à la fin le principe du nouvel être qu'il a mis en nous. "
11. Ecclésiastique, III, 27-29 : " Le cœur
dur aura une fin malheureuse, et celui qui aime le péril y périra-
Le cœur qui s'engage dans deux voies différentes ne réussira
point, et l'âme corrompue y trouvera un sujet de chute. - Le cœur
rebelle sera accablé par les douleurs, et le pécheur ajoutera
péché sur péché. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Serm. XI de verbis Domini : " C'est contre ce don gratuit (celui de la rémission des péchés), contre cette grâce de Dieu que s'élève le cœur impénitent. L’impénitence est donc un blasphème contre le Saint-Esprit, un péché qui ne sera remis ni dans le siècle présent ni dans le siècle futur. C'est contre l'Esprit-Saint en effet contre cet Esprit qui confère au baptême la vertu d’effacer tous les péchés, et qui a été communiqué à l’Eglise afin que les péchés qu'elle pardonne soient pardonnés de Dieu même ; c'est contre cet Esprit que profère ce blasphème, ou qu'entretient en lui-même cette pensée impie un homme que la patience de Dieu invite à la pénitence et qui ne s'en amasse pas moins dans la dureté et l'impénitence de son
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cœur un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, qui rendra à chacun selon ses œuvres. Cette impénitence donc, car nous pouvons appeler de ce même nom et le blasphème et les paroles dites contre le Saint-Esprit, qui ne seront jamais pardonnées, cette impénitence, dis- je, contre laquelle se sont élevés et le Précurseur et le Messie lui-même, en disant l'un et l'autre : Faites pénitence car le royaume des cieux approche (MATTH., III, 2 ; IV, 17) ; contre laquelle enfin Notre-Seigneur non-seulement a prêché dès le début de sa mission, mais encore a prédit à ses disciples qu'ils prêcheraient eux-mêmes dans tout l'univers, lorsqu'il leur a dit après sa résurrection : Il fallait que le Christ souffrît, et qu'il ressuscitât le troisième jour d'entre les morts, et qu'on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés dans toutes les nations en commençant par Jérusalem (LUC, XXIV, 26, 46-47) : cette impénitence ne sera remise ni dans le siècle présent ni dans le siècle à venir, parce que la pénitence au contraire obtient dans ce monde une rémission qui aura toute sa valeur dans le monde à venir. Mais on ne peut assurer de personne qu'il soit impénitent à ce point, tant qu'il vit sur la terre. Car on ne doit pas désespérer celui que la patience de Dieu invite à la pénitence, et qu'il laisse encore en cette vie, ne voulant pas, comme il le dit lui-même la mort de l'impie, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. Cet homme est aujourd'hui païen ; que savez-vous s'il ne sera pas demain chrétien ? Il est aujourd'hui un juif infidèle ; que savez-vous s'il ne croira pas demain en Jésus-Christ ? Il est hérétique aujourd'hui ; que savez-vous s'il ne sera pas catholique demain ? Aujourd'hui il est schismatique ; demain ne sera-t-il pas en communion avec son évêque ? Et ces hommes que vous voyez s'attacher à des opinions perverses, et que vous croyez perdus à jamais, ne viendront-ils point faire pénitence avant de mourir, et par-là même à obtenir la vie éternelle ? Mettez donc à profit cet avertissement de l’Apôtre : Ne jugez de rien avant le temps (I Cor., IV, 5). Car ce blasphème irrémissible contre l'Esprit-Saint, et par lequel nous entendons non toutes sortes de blasphèmes, mais seulement l'endurcissement d'un cœur impénitent ainsi que nous avons essayé de le démontrer, on ne peut affirmer de personne dans cette vie qu'il en soit coupable. . . "
" Si une parole dite contre le Fils de l'homme obtient son pardon, et qu'une autre dite contre l'Esprit-Saint n'obtienne pas
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le sien, ce n'est pas à dire que dans la Trinité le Saint-Esprit soit plus grand que le Fils, ce qu'aucun hérétique même n'a jamais osé prétendre, mais c'est que celui qui résiste à la vérité et qui blasphème contre la vérité qui est Jésus-Christ après que cette vérité, c'est-à-dire le Verbe fait chair et qui a conversé parmi nous, qui n'est autre que le Fils de l'homme ou Jésus-Christ lui-même a été prêché partout avec tant d'éclat, s'il ne dit pas cette parole d'un cœur impénitent contre l'Esprit-Saint, au sujet duquel il a été dit : Celui qui ne renaît pas de l’eau et de l'Esprit, et encore : Recevez l'Esprit-Saint, les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, je veux dire, si cet homme vient à se repentir, il recevra des-lors rémission de tous ses péchés, et par-là même de celui qu'il a commis en parlant contre le Fils de l'homme, parce qu'à son péché d'ignorance, ou de révolte ou de blasphème, il n'a pas ajouté le péché d’impénitence contre le don de Dieu et contre la grâce de régénération ou de réconciliation qui se confère dans l'Eglise par la vertu de l'Esprit-Saint. "
2. Le même, Epist. L (al. CLXXXV), ad Bonifacium comitem : " Qu'ils comprennent donc que tout péché commis contre le Saint-Esprit n'est pas irrémissible, mais seulement quelques-uns de ceux qu'on peut commettre contre lui. Car de même que, quand Jésus-Christ a dit que, s'il ne fût pas venu, les Juifs auraient été sans péché, il n'a pas voulu faire entendre qu'ils auraient été absolument exempts de tout péché, eux qui étaient coupables de tant de péchés énormes mais qu'ils auraient été purs d'un certain péché sans lequel tous les autres auraient pu leur être remis, et qui consistait à n'avoir pas cru en lui, quoiqu'il fût venu dans le monde et qu'il eût vécu au milieu d'eux (puisque s'il ne fût pas venu, il est certain que les Juifs n'auraient pas eu ce péché) ; de même quand il a dit qu'il n'y avait pas de pardon pour celui qui aurait péché ou parlé contre le Saint-Esprit, il n'a pas voulu faire entendre que tout péché contre le Saint-Esprit fût irrémissible, mais seulement un certain péché entre ceux-là. Et quel est ce péché ? Un endurcissement de la volonté qui subsiste jusqu’à la mort, et qui fait qu'on s'obstine à ne pas vouloir chercher la rémission des péchés dans l'unité du corps de Jésus-Christ qui seul est vivifié par l'Esprit-Saint. Car il y a une connexité nécessaire entre ces deux choses ; et de là vient qu'après que Jésus-Christ eût dit à ses apôtres, Recevez le Saint-Esprit, il ajouta tout de suite : Les péchés seront remis à
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à qui vous les remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez (JEAN, XX, 22-23).
" C'est donc pour ceux qui jusqu’à leur dernier moment auront repoussé le don de la grâce ; qui se seront obstinés à lui résister et de manière ou d'autre s'en seront éloignés sans retour ; c'est pour ceux-là, dis- je, qu'il n'y aura de pardon ni dans ce monde ni dans l'autre. Car ce péché est si grand, qu'il empêche à lui seul le pardon de tout le reste. Mais aussi, pour assurer qu'un homme en est coupable, faut-il attendre qu'il ne soit plus du nombre des vivants ; puisque, tant qu'il nous reste un souffle de vie, la patience de Dieu, comme dit l’Apôtre (Rom., II, 4), nous invite à la pénitence. Que si, malgré toutes ces industries de la grâce, un homme persiste à demeurer dans le mal, et que, comme saint Paul ajoute ici même, il s'amasse par la dureté et l'impénitence de son cœur un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, il n'y aura plus de pardon pour lui, ni dans ce monde, ni dans l'autre. Il ne faut donc pas désespérer de ceux dont nous parlons, puisqu'ils sont encore en vie ; mais eux de leur côté qu'ils se gardent bien de chercher l'Esprit-Saint hors de l'unité du corps de Jésus-Christ (Cf. Lettres de saint Augustin, t. V, p. 103-105). "
3. Le pape GELASE I, in Tomo de anathematis vinculo : " Le Seigneur a dit que ceux qui pècheraient contre l'Esprit-Saint n'obtiendraient la rémission de leur péché ni dans ce siècle ni dans le siècle à venir. Combien ne connaissons-nous pas de ces pécheurs, comme sont tous les hérétiques, de quelque secte qu'ils soient, ariens, ou eunomiens, ou macédoniens qui en revenant à la foi catholique, ont obtenu en ce monde le pardon de leur blasphème et l'espérance pour l'autre qu'il leur sera également pardonné. Ce qui n'empêche pas d'être vraie la sentence de Notre-Seigneur, et ce qui n'en atténue aucunement la force, puisqu'elle ne doit s'appliquer qu’à ceux qui persévèrent dans leur disposition criminelle, et non à ceux qui la rétractent et s'en corrigent. On doit expliquer de même ce passage de l'apôtre saint Jean : Il y a un péché qui va à la mort, ce n'est pas pour ceux-là que je dis que vous devez prier. Ce péché va à la mort pour ceux qui y persévèrent mais non pour ceux qui en quittent la malheureuse habitude. Car il n'est aucun péché pour lequel l’Eglise n'interpose ses prières ou dont elle n'ait
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reçu du ciel le pouvoir d'absoudre ceux qui y renoncent et en font pénitence, puisqu'il lui a été dit : Tout ce que vous remettrez sur la terre sera remis dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel. Qui dit tout, n'excepte rien ; pourvu toutefois qu'on prenne ces mots dans leur vrai sens, en ne leur donnant d'autre étendue que celle qu'ils doivent avoir. . . "
" Observons que ceux mêmes qui blasphèment contre le Saint-Esprit, de quelque manière que ce puisse être, s'ils reviennent à résipiscence et s'en corrigent, obtiendront leur pardon, et dans ce siècle, et dans le siècle à venir, et que cela n'empêche pas la vérité de ce qu'a dit Jésus-Christ et qu'il faut entendre du cas seulement où ceux qui pèchent de cette manière persévèrent dans leur funeste habitude, mais non de celui où ils prendraient le parti de s'en corriger. Mais tant qu'ils y persévèrent, ils n'ont point à attendre de pardon, ainsi que l'a déclare le Sauveur. S'ils changent au contraire, alors ils ne sont plus ces hommes à qui leur péché ne sera jamais remis, et par conséquent ils pourront en obtenir la rémission, tant dans ce siècle que dans l'autre. Autrement, ce serait donc en vain, ce qu’à Dieu ne plaise, que l'Eglise leur accorderait le bienfait de la réconciliation. Mais comme ce n'est pas une vaine autorité que celle de l’Eglise, il faut bien entendre la chose de cette manière tout en conservant leur vérité aux paroles de Notre-Seigneur. "
4. S. AUGUSTIN, Lib. de correptione et gratiâ, c. 12 : " Il y a un péché qui va à la mort, et ce n'est pas pour ce péché que je vous dis de prier (I JEAN, V, 16). Il est vrai que saint Jean n'ayant pas expliqué ce qu'il entend par ce péché, on peut donner à ses paroles beaucoup d'interprétation différentes Pour moi, je pense et j'ose dire que ce péché qui va la mort consiste à abandonner sans retour et jusqu'à la mort la foi qui opère par l'amour (Cf. Traités choisis de saint Augustin, t. Ier, p. 375). "
5. Le même, Lib. I Retractationum, c. 19 ; comme plus haut, q. VI, témoignage 3, page 179.
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Article V. - DES PECHES QUI CRIENT JUSQU’AU CIEL.
Question I
Quels sont les péchés dont on dit qu’ils crient jusqu’au ciel ?
Ce sont ceux qui présentent par-dessus tous les autres une malice notable et manifeste, et qui attirent particulièrement la colère et les vengeances de Dieu sur ceux qui les commettent.
On en compte quatre de cette espèce d'après
l’Ecriture, savoir : l'homicide volontaire, la sodomie, l'oppression des
pauvres et le refus du salaire dû aux ouvriers.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Genèse, IV, 9-11 : " Le Seigneur dit à Caïn : Où est ton frère Abel ? Il lui répondit : Je n'en sais rien. Suis- je donc le gardien de mon frère ? - Le Seigneur lui répartit : Qu'as-tu fait ?
La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi. - Tu seras donc désormais maudit sur cette terre, qui a ouvert sa bouche pour recevoir le sang de ton frère versé par ta main. "
2. Ibid., XVIII, 20-21 : " Le Seigneur ajouta ensuite : Le cri qui s'élève de Sodome et de Gomorrhe devient de plus en plus fort, et l’iniquité de ces villes s'est aggravée à l'excès. - Je descendrai, et je verrai si leurs œuvres répondent à ce cri qui est venu jusqu’à moi ; je saurai s'il en est ainsi, ou si cela n'est pas. "
3. Exode, XXII, 21-27 : " Vous n'attristerez et n'affligerez point l'étranger, parce que vous avez été étrangers vous-mêmes dans le pays d'Egypte. - Vous ne ferez aucun tort, soit à la veuve, soit à l'orphelin. - Si vous les offensez en quelque chose, ils crieront vers moi, et j'écouterai leurs cris. - Et ma fureur s'allumera contre vous, et je vous ferai périr par l'épée et vos femmes deviendront veuves et vos enfants orphelins. - Si vous prêtez de l'argent à ceux de mon peuple qui sont pauvres parmi vous, vous ne les presserez point comme ferait un exacteur impitoyable, et vous ne les accablerez point d'usures. - Si votre prochain vous a donné son habit pour gage, vous le lui
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rendrez avant le coucher du soleil. - Car c'est le seul habit qu'il ait pour couvrir son corps, et il n'en a point d'autre pour mettre sur lui quand il dort : s'il crie vers moi, je l'exaucerai, car je suis miséricordieux. "
4. Deutéronome, XXIV, 40-45 : " Lorsque vous redemanderez à votre prochain quelque chose qu'il vous doit, vous n'entrerez point dans sa maison pour en emporter quelque gage ; - mais vous vous tiendrez dehors, et il vous donnera lui-même ce qu'il aura. - S'il est pauvre, le gage qu'il vous aura donné ne passera pas la nuit chez vous ; mais vous le lui rendrez aussitôt avant le coucher du soleil, afin que, dormant dans son vêtement il vous bénisse et que vous soyez trouves justes devant le Seigneur votre Dieu. - Vous ne refuserez point à l'indigent et au pauvre ce que vous lui devez, n'importe qu'il soit votre frère, ou que sorti d'un pays étranger il demeure avec vous dans votre pays et dans votre ville ; - mais vous lui rendrez le même jour le prix de son travail avant le coucher du soleil, parce qu'il est pauvre, et qu'il n'a que cela pour tous moyens de vivre, de peur qu'il ne crie contre vous vers le Seigneur, et que cela ne vous soit imputé à péché. "
5. JACQUES, V, 14 : " Mais vous, riches, etc. - Sachez
que le salaire que vous dérobez aux ouvriers qui ont fait la récolte
de vos champs crie contre vous, et que leur cri est monté
jusqu'aux oreilles du Dieu des armées. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Enchirid. ad Laurentium, c. 80 (al. 24 et 21) : " Des péchés très-grands et très-énormes de leur nature ne sont plus regardés que comme légers, ou même comme exempts de tout mal, dès qu'une fois ils sont tournés en coutume et devenus communs ; jusque-là même que, loin de les cacher, on ne rougit pas de les publier et de s'en faire gloire. C'est cet excès d'aveuglement qu'indique l'Ecriture, lorsqu’elle dit : On loue le pécheur et on lui applaudit dans les convoitises auxquelles il s'abandonne, et on comble de bénédictions celui qui commet des injustices (Ps. IX, 24). Ces sortes de péchés autorisées par la coutume sont appelés un cri dans les livres saints : c'est l'expression dont Dieu se sert dans le prophète Isaïe en parlant aux Juifs figurés par une vigne ingrate et infidèle : J’ai attendu qu'elle fit des actions d’équité, et elle n'a fait que des iniquités ; au lieu de pratiquer la justice, sa conduite n’est qu'un cri, c’est-à-dire qu'elle était criante
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(Is., V, 7). C'est encore ainsi que le Seigneur s'exprime au livre de la Genèse : Le cri de Sodome et de Gomorrhe s'augmente de plus en plus. Ce qui signifie que non-seulement les actions qui se commettaient dans ces villes infâmes n'y étaient pas punies ; mais de plus, qu'elles étaient presque générales, et avaient pour ainsi dire passé en loi. Nous voyons de même de notre temps plusieurs désordres, quoique moins énorme que ceux-là, tellement passés en usage, que nous n'oserions pas excommunier un laïque ni même dégrader un clerc, qui en serait coupable. C'est pourquoi expliquant, il y a quelques années l’épître aux Galates, quand je fus arrivé à cet endroit où l'Apôtre dit : Je crains pour vous que mes travaux parmi vous n'aient été infructueux (Gal., IV, 11), je ne pus m'empêcher de m'écrier : " Malheur aux péchés des hommes ! Nous n'avons plus horreur que de ceux qui sont rares et monstrueux. Mais pour les péchés communs et ordinaires, ces péchés pour l'expiation desquels Jésus-Christ a versé son sang, quoiqu'ils soient assez énormes pour fermer les portes du royaume de Dieu à ceux qui s'en rendent coupables, nous nous familiarisons en quelque sorte avec eux, à force de les voir se commettre. Nous sommes comme contraints de les tolérer tous ; et, à force de les tolérer, nous nous trouvons en danger de les commettre nous-mêmes. Et Dieu veuille encore que nous ne fassions pas tous ceux que nous ne pourrons pas empêcher ! " Mais c'est à moi à voir si l'excès de ma douleur m'a fait dire en cette occasion quelque parole de trop (Cf. Manuel de saint Augustin, dans ses Traités choisis). "
2. Le même, Lib. Annotationum in Job, super caput XXX : " Les voleurs m'ont assailli. Ceux qui sont parvenus, au moyen d'obscures intrigues, à des honneurs qu'ils ne méritaient pas, et que les justes seuls devraient posséder, qui avaient pour demeure les trous des rochers, c'est-à-dire qui cherchaient à justifier leurs dispositions perverses, et en couvraient la malice à l'aide de certains passages obscurs de nos livres saints : ils criaient entre les arbres, leurs péchés étaient rendus manifestes, malgré les efforts qu'ils faisaient pour les cacher au moyen de cette obscurité des Ecritures représentée par l'ombrage que forment des branches d'arbres. De là cette manière de parler de l’Ecriture : Le cri de Sodome s'est élevé jusqu’à moi (Gen., XVIII, 20-21). Il en est de même de plusieurs autres endroits de nos livres saints, ou ce mot de cri est mis pour signifier des péchés notoires, de sorte
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qu'un péché simplement conçu dans l'esprit y est désigné sous le nom de parole, verbum, comme il l'est sous celui de cri, clamor, quand il se produit au dehors par quelque acte réel. "
3. Le même, Lib. I locutionis de Genesi, c. 60 : " Le Seigneur dit : Le cri de Sodome et de Gomorrhe est monté à son comble, et leurs crimes sont parvenus au dernier degré d'énormité. L’Ecriture a coutume d'appeler cri les crimes commis avec tant d'impudeur et de licence, que ni la honte ni la crainte n'empêche plus celui qui les commet de les rendre publics. "
4. Le même, Quæst V super Exodum : " Et maintenant voici que le cri des enfants d'Israël s'est élevé vers moi ; non sans doute comme le cri de Sodome, expression qui dans ce dernier passage signifiait des crimes commis sans crainte et sans pudeur. "
5. S. GREGOIRE- LEGRAND, Pastoral, 3e partie, 32e conseil : " Celui qui fait parade de ses désordres commet le crime avec d'autant plus d'audace, qu'il le croit chose permise, et cet aveuglement le plonge chaque jour plus profondément dans l'abîme. C'est là ce qui faisait dire au prophète Isaïe : Ils ont rendu comme Sodome leur péché public, et ils n'ont pas eu soin de le cacher (Is., III, 9). Sodome aurait en effet caché ses crimes, si elle eût eu en péchant quelque reste de crainte ; mais, comme elle n'était plus retenue par aucun frein, et qu'elle s'abandonnait à ses désordres sans remords et sans honte, elle ne se mettait plus en peine de chercher les ténèbres pour les cacher. Aussi est-il marqué dans la Genèse, que le cri de Sodome et de Gomorrhe s’était multiplié. C’est-à-dire, que l'action du péché est comme une voix qui se fait entendre ; mais quand on en vient à commettre le crime avec une audace qui ne garde plus de mesure, alors ce n'est plus une simple voix, c'est un cri et une sorte de clameur (Cf. Pastoral de saint Grégoire, trad. par P. - Ant. de Marsilly, page .320-321). "
6. Le même, in Psalmum secundum pænitentialem : " Que par ce mot cri il faille entendre un certain péché, c’est ce que fait voir l’Ecriture lorsqu’elle dit : Le cri de Sodome et de Gomorrhe s'est élevé vers moi. Et encore : Je descendrai, et je verrai si leurs œuvres répondent à ce cri qui est venu jusqu'a moi. Car le péché dont la voix seulement se fait entendre, c'est le péché simplement en action ; au lieu que celui dont le cri se fait entendre en outre, c'est le péché qui se commet avec une liberté effrénée.
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Question II
De quelles vengeances l’Ecriture nous dit-elle que Dieu poursuit l’homicide volontaire ?
Des vengeances les plus terribles, comme Dieu le fait
voir par ce vif reproche qu'il adresse à Caïn, le premier de
tous les homicides : Qu'as-tu fait ? lui dit-il (Gen., IV,
10-11). La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à
moi. Maintenant donc tu seras maudit sur la terre. Et ailleurs, Dieu
prononce cette sentence sévère : Quiconque aura répandu
le sang de l'homme, sera puni par l'effusion de son propre sang ; car l’homme
a été créé à l’image de Dieu. Cela
s'accorde avec ce que dit de son côté le Prophète-royal
: Les hommes sanguinaires et trompeurs n'arriveront point jusqu’à
la moitié de leurs jours (Ps. LIV, 24). Car ce crime
est des plus grands, en même temps qu'il fait au prochain le plus
grave de tous les torts, en lui ôtant la vie sans avoir pour le faire
aucune légitime autorité. C'est pourquoi Notre-Seigneur Jésus-Christ
a dit aussi : Tous ceux qui s'armeront de l'épée périront
par l'épée.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Genèse, IV, 8-16 : " Or, Caïn dit à son frère Abel : Allons dehors. Et lorsqu'ils furent dans les champs, Caïn se jeta sur son frère Abel et le tua. - Et le Seigneur dit à Caïn : Où est ton frère Abel ? Il lui répondit : Je n'en sais rien : suis- je le gardien de mon frère ? - Le Seigneur lui répartit : Qu'as-tu fait ? La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi. - Maintenant donc tu seras maudit sur cette terre, qui a ouvert sa bouche pour recevoir le sang de ton frère versé par ta main. - Après même que tu l'auras cultivée, elle te refusera ses fruits, tu seras fugitif et errant sur la terre. - Caïn répondit au Seigneur : Mon iniquité est trop grande pour que je puisse en obtenir le pardon. - Voilà que vous me rejetez de dessus la face de la terre,
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et je fuirai de votre présence et je serai fugitif et errant sur la terre ; - et le premier qui me trouvera, me tuera. - Le Seigneur lui répondit : Il n'en sera pas ainsi ; mais quiconque tuera Caïn sera puni sept fois davantage. Et le Seigneur mit un signe sur Caïn, afin que ceux qui le trouveraient s'abstinssent de le tuer. - Caïn s’étant retiré de devant la face du Seigneur, s'enfuit et s'en alla habiter la terre située à l'orient d'Eden. "
2. Id., IX, 5-6 : " Je vengerai votre sang, cet aliment de votre vie, de toutes les bêtes comme de tous les hommes qui l'auront versé ; je redemanderai au frère le sang de son frère ; et quiconque aura répandu le sang d'un homme, son sang à lui-même sera répandu, car l'homme a été créé à l'image de Dieu. "
3. Exode, XXI, 12-15 : " Si quelqu'un frappe un homme dans le dessein de le tuer, qu'il soit puni de mort. - Quant à celui qui ne lui aura point dresse d’embûches mais entre les mains duquel Dieu l'aura fait tomber, je vous marquerai un lieu où il pourra se réfugier. - Si quelqu'un tue son prochain de dessein prémédité dans des embûches qu'il lui aura dressées, vous l'arracherez de mon autel pour le faire mourir. - Celui qui aura frappé son père ou sa mère sera puni de mort. "
4. Lévitique, XXIV, 17 : " Que celui qui aura frappé et tué un homme, soit puni de mort. "
5. Nombres, XXXV, 16-34 : " Si quelqu'un frappe avec le fer, et que celui qui aura été frappé meure de sa blessure, il sera tenu pour coupable d'homicide, et puni de mort. - S'il jette une pierre, et que celui qui l'aura frappé vienne à mourir, il sera puni de la même manière. - Si celui qui aura été frappé avec du bois meurt des suites du coup qu'il aura reçu, sa mort sera vengée par l'effusion du sang de celui qui l'aura frappé. - Le parent de la victime tuera l'homicide ; il le tuera aussitôt qu'il l'aura rencontré. - Si un homme pousse celui qu'il hait, ou jette quelque chose contre lui par un mauvais dessein, ou si étant son ennemi, il le frappe de la main, et que ce dernier en meure, il sera coupable d'homicide ; et le parent du mort pourra tuer le meurtrier dès qu'il l'aura rencontré. - Mais si c'est par hasard, sans haine, - et sans aucun mouvement d'inimitié, qu'il ait fait quelqu'une de ces choses, - et que cela ait été prouvé devant le peuple, après que la cause du meurtre aura été débattu entre lui et le parent du mort, - il sera délivré comme innocent d'entre les mains de celui qui demanderait vengeance, et il sera ramené par sentence dans la ville ou il se
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serait réfugié et il y demeurera jusqu’à la mort du grand-prêtre qui, à cette époque, aura été sacré de l'huile sainte. - Si le meurtrier est trouvé hors des limites des villes destinées pour les bannis, et qu'il soit tué à cette occasion par celui qui poursuit la vengeance du sang répandu, celui-ci ne sera point censé coupable ; - car le fugitif devait se tenir dans la ville jusqu’à la mort du pontife. Mais quand le grand-prêtre sera mort, le meurtrier pourra s'en retourner dans son pays. - Ceci sera observé comme une loi constante dans tous les lieux où vous pourrez habiter. - On ne punira l'homicide, qu'après avoir entendu les témoins. Nul ne sera condamné sur le témoignage d'un seul. - Vous ne recevrez point d'argent de celui qui se trouvera coupable de sang répandu ; mais il mourra irrémissiblement. - Les bannis et les fugitifs ne pourront rentrer d'aucune manière dans leur ville avant la mort du grand-prêtre, - de peur que vous ne souilliez la terre où vous habiterez, et qu'elle ne demeure impure par l'effusion du sang innocent : car elle ne peut être purifié que par le sang de celui qui aura versé le sang de l'autre. - C'est ainsi que votre terre ne sera point souillée et que je continuerai de demeurer avec vous ; car c'est moi le Tout-Puissant, qui veux habiter au milieu des enfants d'Israël. "
6. Deutéronome, XIX, 4-13 : " Voici la loi sur l'homicide fugitif à qui on devra conserver la vie : Si quelqu'un vient à frapper ton prochain par mégarde et qu'il soit prouvé qu'il n'avait aucune haine contre lui quelques jours auparavant, - mais qu'il s'en était allé avec lui dans une forêt simplement pour couper du bois, et que le fer de sa coignée, comme il s'en servait pour couper du bois, s'est échappé de ses mains, et en se détachant du manche a frappé son ami et l'a tué, il se retirera dans l'une de ces trois villes, et sa vie y sera en sûreté ; - de peur que le plus proche parent de celui dont le sang aura été répandu, se laissant emporter par la douleur, ne le poursuive et ne l'atteigne en mettant à profit la longueur du chemin, et qu'il ne le tue sans qu'il ait mérité la mort, puisqu'il ne paraît pas que ce dernier aurait eu jusque-là aucune haine contre la victime de l'accident. - C'est pourquoi je vous ordonne de choisir ces trois villes à des distances égales de l'une à l'autre. - Mais lorsque le Seigneur votre Dieu aura étendu vos limites, comme il l'a promis à vos pères avec serment, et qu'il vous aura donné toute la terre qu'il leur a promise, - si toutefois vous gardez ses ordonnances, et que vous fassiez ce que
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je vous prescris aujourd'hui, qui est d'aimer le Seigneur votre Dieu, et de marcher dans ses voies en tout temps, vous ajouterez trois autres villes à ces premières et vous en doublerez ainsi le nombre, de peur qu'on ne répande le sang innocent dans le pays que le Seigneur votre Dieu vous donnera à posséder, et que cette tache ne retombe sur vous. - Mais si quelqu'un, haïssant son prochain, cherche l'occasion de le surprendre et de lui ôter la vie, et que se jetant sur lui il le frappe et le tue, si ensuite il s'enfuit, dans l'une de ces villes, - les anciens de cette ville l'enverront prendre, et l'ayant tiré du lieu où il aura cherché un asile, ils le livreront entre les mains du parent de celui dont le sang aura été répandu et il sera puni de mort. - Vous n'aurez point pitié de lui, et vous ôterez du milieu d'Israël le crime commis par l'effusion du sang innocent, et ce sera pour vous un bien. "
7. I JEAN, III 15 : " Tout homme qui hait son frère, est homicide. Or, vous savez que nul homicide ne possède en soi le principe de la vie éternelle. "
8. Psaume LIV, 25 : " Les hommes sanguinaires et trompeurs ne fourniront point la moitié de leur carrière. "
9. MATTHIEU, XXVI, 82 : " Alors Jésus lui dit : Remettez votre épée dans le fourreau ; car tous ceux qui se serviront de l'épée périront par l'épée. "
10. Apocalypse, XIII, 10 : " Celui qui aura réduit
les autres en captivité y sera réduit lui-même ; celui
qui aura tué avec le glaive, périra par le glaive. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. Le concile d'Ancyre, c. 22 : " Ceux qui se seront rendus volontairement coupables de meurtre, devront se soumettre à la pénitence pour le reste de leurs jours. On les admettra néanmoins à la communion à la fin de leur vie. Quant à ceux qui seront devenus homicides par l'effet du hasard, et non de leur volonté, l'ancienne règle ne les recevait, il est vrai, à la communion qu'après sept années de pénitence, en suivant les degrés établis. Le concile, aujourd'hui plus indulgent, réduit la durée de cette pénitence à cinq années. "
2. Le concile d'Epaône, tenu sous le pontificat de Gelase I (C'est une erreur : le concile d’Epaône s'est tenu l'an 517 sous le pontificat d'Hormisdas. Voyez LABBE, Conc., t. IV, col. 1573), can. 31 : " Par rapport à la pénitence à laquelle doivent être
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soumis les homicides qui ont pu échapper aux tribunaux séculiers, le concile a été d'avis de se conformer religieusement aux règlements établis à Ancyre. "
3. Le concile de Tribur, canon 84 : " Au sujet de ceux qui se seraient volontairement rendus coupables d'homicide, le saint concile d'Ancyre a réglé, canon 21 (ou 22, d'après la supputation actuelle), qu'ils se soumettent à la pénitence pour le reste de leurs jours ; qu'ils soient admis cependant à l'achèvement de leur pénitence, c’est-à-dire au bienfait de la communion, sur la fin de leur vie ; que les observances canoniques et les décrets des saints Pères soient gardés inviolablement, suivant notre désir et celui de tous les orthodoxes. Quant à nous, pasteurs que nous sommes des brebis de Jésus-Christ, ayant égard au malheur des temps et à la faiblesse humaine, nous croyons bon et utile de modérer, en vertu de l'autorité qui nous appartient à nous tous assemblés, la pénitence de ceux qui se seraient rendus coupables d'homicide volontaire, et de marquer un terme à cette pénitence, de peur que, si elle était trop prolongée, elle ne finirait par le découragement ou l'insouciance, au lieu que, si on la borne à un temps déterminé, l'œuvre du salut fera d'heureux progrès. "
4. Ibidem, c. 55 : " Si quelqu'un se rend volontairement coupable de meurtre, l'entrée de l'église lui sera interdite les quarante premiers jours. Pendant ces quarante jours il ne mangera que du pain et du sel, et ne boira que de l'eau. Il marchera nu-pieds, ne portera point de linge, si ce n'est des caleçons, n'usera ni d'armes, ni de voitures, vivra dans la continence pendant tous ces jours-là, même par rapport à sa propre femme, n'aura aucun commerce avec les autres chrétiens ni même avec les autres pénitents. Si ses ennemis en veulent à sa vie, et que la nécessité d'éviter leurs pièges l'empêche d'accomplir sa pénitence, on la lui différera jusqu’à ce que l'évêque l’ait réconcilié avec eux. De même, si quelque infirmité corporelle le réduit à l'impuissance de jeûner comme il faut ; on usera d'indulgence envers lui, et on attendra, pour le soumettre à la pénitence que sa guérison soit achevée. Que si son infirmité est de longue durée, ce sera à l'évêque d’examiner dans sa prudence quelles règles il conviendra de lui prescrire, attendu que, comme l'observe saint Grégoire dans son Pastoral, les plaies spirituelles sont plus cachées que les plaies corporelles, et que le gouvernement des âmes est le plus difficile comme le plus important de tous les arts. "
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5. Ibidem, can. 56 : " Les quarante jours écoulés l’entrée de l'église lui sera encore interdite pendant une année. Il s'abstiendra de chair, de fromage, de vin et de toute boisson emmiellée excepté les jours de dimanches et de fêtes célébrés publiquement dans tout le diocèse. En maladie ou en voyage, ou s'il doit passer beaucoup de temps à la cour du prince, il pourra racheter le mardi, le jeudi et le samedi en donnant un denier, ou la valeur d'un denier, ou en se chargeant de nourrir trois pauvres pour l'amour de Notre-Seigneur, avec cette réserve toutefois qu'il pourra alors se permettre l'usage, soit de la viande, soit du vin, soit de l'hydromel seulement, mais non de ces trois choses à la fois. Une fois revenu de voyage ou guéri de sa maladie, il ne lui sera plus loisible de racheter ces jours-là, mais il devra faire exactement la pénitence prescrite. Cette année finie, l’église lui sera ouverte comme aux autres pénitents. "
6. Ibidem, can. 57 : " Il passera la seconde et la troisième année dans les mêmes exercices de pénitences, si ce n'est qu'il sera le maître de racheter les trois jours de la semaine, en quelque lieu qu'il se trouve, soit à la maison, soit en voyage. Il observera tout le reste, comme à la première année. "
7. Ibidem, can. 58 : " Pendant chacune des quatre autres années, il jeûnera trois carêmes ; un avant Pâques, pendant lequel il s'abstiendra de fromage, de poissons succulents, de vin et d'hydromel ou d'autre boisson apprêtée ; un second avant la Nativité de saint Jean-Baptiste, et si les quarante jours ne peuvent se trouver entiers avant cette fête, il y suppléera après la fête ; le troisième enfin avant la Nativité de Notre-Seigneur, et il s'abstiendra pendant ce temps de l'usage de la viande et des autres choses ci-dessus désignées. Pendant ces quatre années, il mangera et boira de tout ce qu'il voudra le mardi, le jeudi et le samedi de chaque semaine. Il sera en droit de racheter le lundi et le mercredi avec un denier, ou avec la valeur de cette pièce de monnaie ; mais il observera exactement le jeûne du vendredi. Les sept années de sa pénitence accomplies, il sera réconcilié à la manière des autres pénitents et admis à la sainte communion (Cf. LABBE, Conc., t. IX, col. 464-466, (ad annum 895)). "
8. S. AMBROISE, Lib. II de Caïn et Abel, c. 9 : " Que de justesse dans ces expressions : La voix du sang de ton frère crie ! Ce n'est pas son frère même qui crie : même dans la mort, il ne s'est dépouillé ni de sa douceur, ni de sa piété fraternelle. Il
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n'accuse point le frère qui l'a tué, car il ne veut pas paraître lui-même fratricide. Caïn, ce n'est ni la voix d'Abel, ni son cœur qui t'accuse, mais c'est la voix du sang que tu as versé. Ce n'est donc point ton frère mais c'est ton propre crime qui t'accuse. Par-là toute récrimination est rendue impossible au meurtrier. Il ne peut pas se plaindre d'être accusé par la voix d'autrui, puisqu'il trouve dans son crime son propre accusateur. Les paroles sont moins éloquente que les faits ; mais de plus, la terre aussi rend témoignage elle qui a bu le sang de la victime. Que de justesse donc dans cette expression : La voix du sang de ton frère crie de la terre ! Dieu ne dit pas : La voix du sang de ton frère crie du corps de ton frère, mais cette voix crie de la terre. Ton frère a beau te pardonner ; la terre ne te pardonne pas. Ton frère a beau se taire ; la terre te condamne. Elle est tout à la fois témoin et juge de ton crime : témoin d'autant plus redoutable, qu'elle est encore toute trempée du sang que tu as versé, juge d'autant plus implacable, que ce crime l'a souillé au point qu'elle a ouvert sa bouche pour recueillir le sang de ton frère versé par ta main. "
9. S. AUGUSTIN, Lib. XXII contra Faustum Manichæum,
c. 70 : " Parmi les actes irréguliers il faut ranger l'action de
Pierre, qui, tirant son glaive pour défendre son divin Maître,
coupa une oreille à un de ceux qui venaient de se saisir de lui,
et s'attira de sa part pour cette action ce reproche sévère
et menaçant : Rengainez votre glaive ; car celui qui se sert
de l'épée périra par l’épée (M ATTH.,
XXVI, 82). Or, celui-là se sert de l'épée qui s'arme
d'un glaive pour verser le sang d'un autre, sans en avoir reçu l'ordre
ou la permission de son légitime supérieur. Car il est vrai
sans doute que Notre-Seigneur avait ordonné à ses disciples
de porter des armes avec eux ; mais il ne leur avait pas ordonné
de s'en servir pour frapper. "
Question III
Que nous enseigne l’écriture au sujet du péché de sodomie et de sa punition ?
Les habitants de Sodome, dit l'Ecriture, étaient devant le Seigneur des hommes perdus de vices, et leur corruption était montée à son comble. Ce péché infâme et exécrable se trouve condamné dans les épîtres de saint Pierre et de saint Paul ; et d'ailleurs, la nature elle-même le réprouve. L’Ecriture nous déclare dans le
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termes suivants combien ce crime est énorme : Le cri qui s'élève de Sodome et de Gomorrhe est devenu de plus en plus fort, et leur péché est monté à son comble. C'est ce qui fit que les anges dirent à Lot, qui s'était conservé pur au milieu de ce peuple, et qui avait en horreur ces infâmes désordres : Nous allons détruire ce lieu, parce que le cri des abominations de ces peuples s'est élevé de plus en plus devant le Seigneur, et il nous a envoyés pour les perdre. . . Alors le Seigneur fit descendre du ciel sur Sodome et Gomorrhe une pluie de soufre et de feu, et il perdit ces villes avec tous leurs habitants, et tout le pays d'alentour avec ceux qui l’habitaient. L'Ecriture ne passe pas non plus sous silence les causes qui ont amené les habitants de Sodome à tomber dans cet énorme péché et qui pourraient également faire tomber d'autres personnes à leur exemple. Car voici ce que nous lisons dans Ezéchiel : Voici quelle a été l'iniquité de Sodome, votre sœur : c'a a été l'orgueil, l'excès des viandes, l'abondance de toutes choses, et l'oisiveté où elle était, elle et ses filles : elles ne tendaient point la main au pauvre et à l'indigent.
Ceux-là sont exposés à tomber dans cet affreux péché qui ne craignent pas de violer la loi divine, ou pour mieux dire, la loi naturelle écrit dans le Lévitique. Voici comme cette loi s'y trouve exprimée : Vous ne commettrez point cette abomination qui consiste à se servir d'un homme comme si c'était une femme. Vous ne vous approcherez d'aucune bête, et vous ne vous souillerez point avec elles. Si l'on a le malheur de le faire, la terre elle-même s'en trouvera souillée, la colère divine s'allumera au plus haut degré contre le peuple, et ce crime ne pourra être expié que par la mort du coupable : tel est l'avertissement que donnent encore à ce sujet les livres saints. De là vient que saint Paul revient plus d'une fois sur l'énormité de ce crime, qu'il condamne à diverses reprises les impudiques et les efféminés. C'est de ce crime aussi que se rendit coupable Onan, fils de Juda, que la vengeance divine atteignit bientôt, pour avoir empêché par d'impudiques moyens sa femme de devenir mère, et avoir outragé la nature, aussi bien que les lois de l'honnêteté, par des turpitudes dont sont incapables les animaux mêmes les plus lubriques.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Genèse, XIII, 13 : " Or, les habitants de Sodome, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
2. II PIERRE, II, 6-9 : " S'il a puni les villes de Sodome et de Gomorrhe, en les ruinant de fond en comble, et les réduisant en cendres, pour les faire servir d'exemple à ceux qui vivraient dans l'iniquité, - et s'il a délivré le juste Lot, que ces impies affligeaient et persécutaient par leur vie infâme, - ce juste qui demeurait parmi eux, étant tous les jours tourmenté dans son âme, amie de la justice, par tout ce qu'il voyait et entendait de leurs actes illégitimes : - le Seigneur sait délivrer ceux qui le craignent des maux par lesquels ils sont éprouvés et réserver les pécheurs pour la peine qu'ils subiront au jour du jugement, etc. "
3. Romains, I, 25-29 : " Et ils ont transféré à des images qui ne leur représentaient que des hommes mortels, et à des figures d'oiseaux, de quadrupèdes et de reptiles, l'honneur qui n'est dû qu'au Dieu immortel. - C'est pourquoi Dieu les a livrés aux désirs de leurs cœur et à l'impureté en sorte qu'ils ont déshonoré eux-mêmes leurs propres corps, - eux qui avaient mis le mensonge à la place de la vérité de Dieu, et rendu à la créature l'adoration et le culte souverain, au lieu de ne le rendre qu'au Créateur qui est béni dans tous les siècles. Amen. - C'est pourquoi Dieu les a livrés à des passions honteuses ; car les femmes parmi eux ont changé l'usage qui est selon la nature en un autre qui est contre la nature ; - les hommes de même,
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rejetant l'union des deux sexes, qui est selon la nature, ont été embrasés de désirs impudiques les uns pour les autres, l'homme commettant avec l'homme des crimes infâmes, et subissant ainsi en eux-mêmes la juste peine de leur égarement. - Et comme ils n'ont pas fait usage de la connaissance qu'ils avaient de Dieu, Dieu aussi les a livrés à un sens dépravé, en sorte qu'ils ont fait des actions indignes de l'homme : - remplis de toutes sortes d'injustice, de méchanceté, d’impureté etc. "
4. I Timothée, I, 9-10 : " La loi n'est pas établie pour le juste, mais pour les méchants et les esprits rebelles, pour les impies et les pécheurs, pour les scélérats et les profanes, etc., pour les fornicateurs, les abominables, etc., pour toute autre chose enfin qui peut être opposé à la saine doctrine. "
5. Ephésiens, V, 5-6, 12 : " Nul fornicateur, nul impudique, nul avare, dont le vice est une idolâtrie, ne sera héritier du royaume de Jésus-Christ notre Dieu. - Que personne ne vous séduise par de vains discours ; car c'est là ce qui attire la colère de Dieu sur les hommes rebelles à la vérité. - La pudeur ne permet pas même de dire ce que ces personnes font en secret. "
6. Juges, XIX, 22-25 : " Pendant qu'ils étaient à table, et que fatigués du chemin ils mangeaient et buvaient pour reprendre leurs forces, il vint des hommes de cette ville, qui étaient des enfants de Bélial, c'est-à-dire rebelles au joug de la loi, et environnant la maison du vieillard, ils commencèrent à frapper à la porte, en criant au maître de la maison, et lui disant : Faites sortir cet homme qui est entré chez vous, afin que nous abusions de lui. - Le vieillard sortit pour leur parler, et leur dit : Gardez-vous, mes frères, gardez-vous bien de faire un si grand mal ; car j'ai offert à cet homme l'hospitalité : cessez de songer à une telle folie. - J'ai une fille vierge, et cet homme a sa femme ; je vous les amènerai, et vous assouvirez sur elles votre passion. Je vous prie seulement de ne pas commettre à l'égard d'un homme ce crime contre nature. - Mais ils ne voulaient point se rendre à ses paroles, etc. "
7. Juges, XX, 46-48 : " Ainsi vingt-cinq mille hommes de la tribu de Benjamin furent tués en cette journée en divers endroits, tous gens de guerre et très-vaillants ; - de sorte que tous ceux de cette tribu qui purent s'échapper et s'enfuir dans le désert ne montaient qu'au nombre de six cents, et ils se tinrent campés au rocher de Remmon pendant quatre mois. - Les enfants d'Israël, étant revenus du combat, firent passer au fil de l'épée tout ce
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restait dans la ville, depuis les hommes jusqu'aux bêtes, et toutes les villes et les villages de Benjamin furent consumés par les flammes. "
8. Genèse, XVIII, 20 : " Le cri qui s'élève de Sodome et de Gomorrhe, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
9. II PIERRE, II, (comme ci-dessus, témoignage 2).
10. Genèse, XIX, 13 : " Nous allons détruire ce lieu, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
11. Sagesse, X, 6-8 : " C'est la sagesse qui délivra le juste, lorsqu'il fuyait du milieu des méchants qui périrent par le feu tombé sur les cinq villes, - dont la corruption est attestée par cette terre qui fume encore et qui est demeurée toute déserte, où les arbres portent des fruits qui ne mûrissent point, et où une statue de sel reste toujours debout, en souvenir de la punition infligée à une âme qui refusa de croire. - Car ceux qui ne se sont pas mis en peine d'acquérir la sagesse, non-seulement sont tombés dans l'ignorance du bien, mais encore ont laissé aux hommes des témoignages de leur folie, sans que leurs fautes aient pu demeurer cachées. "
12. Deutéronome, XXIX, 22-23 : " La postérité qui viendra après nous, les enfants qui naîtront dans la suite d'âge en âge, et les étrangers qui seront venus de loin, voyant les plaies de ce pays et les maux dont le Seigneur l'aura affligé. - voyant qu'il l'aura consumé par le soufre et par un sel brûlant, de sorte qu'on n'y jettera plus de semence et que rien n'y verdira, qu'il y aura renouvelé enfin une image de la ruine de Sodome et de Gomorrhe, d'Adama et de Séboïm, que le Seigneur a détruite dans sa colère et sa fureur. . . "
13. Epître catholique de saint Jude, 7-8 : " De même Sodome et Gomorrhe, et les villes voisines qui s'étaient livrées comme elles aux excès de l'impureté en se souillant d'une manière abominable, sont devenues un exemple en subissant la peine d'un feu éternel. - Et cependant ces hommes souillent encore leur chair par de semblables désordres. "
14. Genèse, XIII, 10 : " Lot levant donc les yeux, considéra tout le pays situé le long du Jourdain, qui s'étendait de ce lieu-là jusqu’à Ségor, et qui, avant que Dieu détruisit Sodome et
Gomorrhe, était tout arrosé d'eau, comme un jardin de Dieu et comme l’Egypte. "
15. EZECHIEL, XVI, 49 : " Voici quelle a été l'iniquité, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
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16. Lévitique, XVIII, 22-25 : " Vous ne commettrez point cette abomination, etc. (comme dans le corps de la réponse.) La femme ne se prostituera point non plus de cette manière à un animal, parce que c'est un crime. - Vous ne vous souillerez par aucune de ces infamies dont se sont souillés tous les peuples que je chasserai devant vous, - et qui ont déshonoré ce pays-là ; et je punirai moi-même les crimes détestables commis sur cette terre, en sorte qu'elle rejettera avec horreur ses habitants de son sein. "
17. Deutéronome, XXVII, 21 : " Maudit celui qui dort avec des bêtes, quelle qu'en soit l'espèce et tout le peuple répondra : Amen. "
18. Lévitique, XX, 13, 15-16,23 : " Si quelqu'un abuse d'un homme comme si c'était une femme, qu'ils soient tous deux punis de mort, comme ayant commis un crime exécrable ; leur sang retombera sur eux. - Celui qui se sera corrompu avec une bête, quelle qu'en soit l'espèce, sera puni de mort, et vous ferez aussi mourir la bête elle-même. - La femme qui se sera corrompue avec une bête, quelle qu'en soit l'espèce, sera punie de mort avec la bête, et leur sang retombera sur elles. - Ne vous conduisez point selon les lois des nations que je dois chasser de la terre où je veux vous établir ; car elles ont fait toutes ces choses, et je les ai en abomination. "
19. Exode, XXII, 19 : " Celui qui aura commis un crime abominable avec une bête sera puni de mort. "
20. JOEL, III, 2-3 : " J'assemblerai tous les peuples, et je les amènerai dans la vallée de Josaphat ; et là j'entrerai en jugement avec eux au sujet d'Israël mon peuple et mon héritage, qu'ils ont dispersé parmi les nations, et de ma terre qu'ils se sont partagée. - Ils ont tiré mon peuple au sort ; ils ont exposé des enfants dans des lieux de prostitution, et ils ont vendu les jeunes filles pour avoir du vin et s'enivrer. "
21. I Corinthiens, VI, 9-10 : " Ne savez-vous pas que ceux qui commettent l'injustice ne seront point héritiers du royaume de Dieu ? Ne vous y trompez pas : ni les fornicateurs, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les impudiques, ni les abominables, ni les voleurs, ni les ivrognes, etc., ne seront héritiers du royaume de Dieu. "
22. Romains, I, et I Timothée, I (comme ci-dessus, témoignage 3 et 4).
23. Galates, V, 19-21 : " Or, il est aisé de connaître les
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œuvres de la chair, qui sont la fornication, l'impureté l'impudicité, la dissolution, etc., - et autres semblables, au sujet desquelles je vous déclare comme je vous l'ai déjà dit, que ceux qui commettent ces crimes n'obtiendront point le royaume de Dieu. "
24. Genèse, XXXVIII, 8-10 : " Juda dit à
Onan, son second fils : Epousez la femme de votre frère et vivez
avec elle, afin que vous suscitiez des enfants à votre frère.
- Onan voyant la femme de son frère aîné et sachant
que les enfants qui naîtraient d'elle ne seraient pas à lui,
empêchait qu'elle ne devînt mère et qu'on n'en vît
naître des enfants qui seraient censé être nés
de son frère. - C'est pourquoi le Seigneur le frappa de mort, parce
qu'il faisait en cela une chose détestable. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. GREGOIRE, Lib. XIV Moralium in Job, c. 10 (al. 5) : " L'Ecriture nous enseigne bien clairement que le soufre est la figure de la corruption de la chair, lorsqu'elle rapporte que Dieu fit tomber sur Sodome une pluie de feu et de soufre (Gen., XIX). Car, comme il avait résolu d punir les péchés de ce peuple abominable, il a voulu indiquer par le genre de la punition celui du crime. En effet, la puanteur est dans le soufre, et l'ardeur est dans le feu. En conséquence, ces hommes dont les infâmes désirs s'allumaient au foyer d'un cœur corrompu, méritaient bien d'avoir l'infection du soufre et les ardeurs du feu pour châtiment, afin qu'une peine si justement assortie leur fît comprendre à quels crimes épouvantables ils s'étaient abandonnés (Cf. Les Morales de saint Grégoire, t. II, p. 445). "
2. S. AUGUSTIN, Cité de Dieu, liv. XVI, c. 30 (Cf. La Cité de Dieu, trad. nouv. par L. Moreau, t. II, p. 505-506) : " Après cette promesse, Lot étant sorti de Sodome, une pluie de feu tombée du ciel réduisit en cendres cette ville et cette contrée impie, où les abominations de l'amour contre nature étaient devenues aussi communes que les actions permises par les lois ; mais la vengeance de ces crimes est une image du jugement de Dieu à venir. En effet, quand les anges défendent à ceux qu'ils sauvent de regarder en arrière, qu'est-ce à dire, sinon que, dépouillés du vieil homme par la grâce de la renaissance spirituelle, nous ne devons pas retourner de cœur à notre ancienne vie, si nous voulons conjurer les rigueurs suprêmes de la justice
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divine ? Enfin, là où elle s'est retournée, la femme de Lot demeure changée en statue de sel : vive leçon qui réveille le goût trop souvent blasé des fidèles. "
3. TERTULLIEN, Apologétique, c. 40 : " La Palestine n'avait pas encore reçu de l'Egypte l'essaim des Juifs, le berceau du christianisme ne s'y était pas encore formé, quand une pluie de feu consuma, sur les frontière de cette contrée, Sodome et Gomorrhe. Cette terre ravagée exhale encore l'odeur de l'incendie. Si quelques fruits croissent péniblement sur ses arbres, végétation trompeuse à l'œil, ils tombent en cendres sous la main qui les touche (Cf. Les Pères de l'Eglise, etc., tract. par M. de Genoude ; t. VIII, pag. 773. Voir sur ce sujet les Réponses de Bullet aux difficultés des incrédules). "
4. Le même, ou plutôt l'auteur inconnu du poème sur Sodome qui lui est attribué chapitre IV : " Nulle part je ne vois plus Sodome, nulle part ne se montrent plus ses édifices impies.
Nulle part on ne trouvera habitation plus désolée, habitants plus dénués de ressources. Toute cette contrée n'est qu'un bûcher, qu'un amas de cendres, dont la sombre couleur rappelle un antique incendie. Elle n'est plus, cette fertilité que Lot admirait autrefois. . . Personne n'est tenté de labourer une terre que le feu du ciel a rendue à jamais stérile. Si quelques sillons à demi tracés essaient d'offrir les dons de l'automne, les yeux peuvent un instant être enchantés à la vue de poires, de pêches ou de pommes qui invitent à les cueillir ; mais à peine touchés, ces mêmes fruits tombent réduits en cendres, et l'on ne trouve plus dans ses mains qu'une poudre vaine. Ainsi le ciel et la terre à la fois n'offrant de toutes parts qu'un vaste tombeau, la mer elle-même y est sans vie ; son calme est celui de la mort ; les chaudes haleines des zéphyrs n'y animent point ses flots ; les autans n'y font pas même bruir ses vagues, et ses abîmes ne recèlent aucun poisson, aucun coquillage, aucun monstre marin qui ait vie. . . . . "
" Voici un autre prodige que présente cette mer attristée. Tout ce qu'on y jette y surnage ; il semble que les corps y soient dépouillés de leur pesanteur ; si au contraire une légère étoupe, flottant sur sa surface dans une écaille comme dans une nacelle, y est allumé au contact de la flamme, et qu'ensuite cette flamme vienne à s'éteindre, les débris de l'embrasement iront
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au fond de l'abîme. C’est ainsi que Sodome et Gomorrhe rappelleront de siècle en siècle le châtiment infligé à ces hommes injustes, qui dans leur endurcissement avaient perdu la crainte de Dieu, et seront un perpétuel avertissement du soin avec lequel Dieu veille du haut du ciel au maintien de ses lois, et étend ses regards sur tout l'univers. "
5. S. CHRYSOSTOME, Hom. IV in Epistolam ad Romanos, de masculorum concubitoribus loquens : " Je ne crains pas d'affirmer que de pareils coupables sont pires que des homicides ; car il vaut mieux mourir, que de vivre en subissant un tel outrage. L'homicide, en effet, ne fait que sépare l'âme du corps, au lieu que cet impudique cause la perte de l'une comme de l'autre. Bref, quelque crime que vous imaginiez, vous ne le trouverez pas comparable à celui-là ; et si ceux qui consentent à en être les victimes sentaient bien leur malheur, ils préféreraient mille morts, plutôt que d'endurer cette ignominie. "
" Rien de plus contraire à la raison, rien de plus incompatible avec le devoir, que cet outrage fait à la nature. Car si saint Paul a dit au sujet de la fornication : Quelque autre péché que l'homme commette, c'est hors de son corps qu'il le commet, mais celui qui commet une fornication pèche contre son propre corps (I Cor., IV, 18) ; que dirons-nous de cette criminelle folie, qui surpasse la fornication en perversité au-delà de tout ce qu'on peut exprimer par le langage humain ? Car je ne dis pas seulement qu'en vous y laissant aller vous devenez femme, d'homme que vous étiez, mais je dis qu'en perdant votre dignité d'homme, vous n'acquérez pour cela rien des attributs de l'autre sexe, qu'ainsi vous déshonorez également les deux, et méritez la répulsion et les rebuts de l'un comme de l'autre. Et pour vous rendre la chose sensible, si quelqu'un vous offrait de vous métamorphose en cet animal dont le cynisme athénien a emprunté le nom, bien loin de l'écouter, ne le fuiriez-vous pas comme la peste ? Mais par ce crime que vous consentez à commettre, vous ne passez pas sans doute à l'espèce canine, mais vous devenez quelque chose de bien plus vil que cet animal ; car un chien est après tout utile à quelque chose, au lieu qu'un pédéraste n'est bon à rien. Que dirai-je en effet ? Si quelqu'un se vantait à nous de pouvoir rendre les hommes susceptibles d'enfanter comme les femmes, ne serions-nous pas indigné de sa proposition ? Mais ceux qui sont possédés de la rage dont nous parlons font de leur corps quelque chose de bien pire ; car il vaudrait mieux pour eux être tout-à-
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fait femmes, que de se faire femmes sans cesser d’être hommes, ou plutôt, d'abjurer, comme ils font, les deux sexes à la fois. Voulez-vous vous convaincre encore d'une autre manière de l’énormité de cette action ? Demandez pourquoi les lois punissent ceux qui font eunuque qui que ce soit de leurs semblables, et on vous dira que c'est uniquement parce que ceux qui le font portent atteinte à l’intégrité du sexe le plus noble. Pourtant, ceux qui se portent à cet acte dénaturé outragent moins la nature que les autres dont nous parlons ici ; car enfin les eunuques, même après avoir subi leur cruelle mutilation peuvent encore être employés à quelque service, au lieu qu'il n'y a pas d'êtres plus inutiles au monde qu'un homme perdu ainsi par la débauche : son corps et son âme ne sont plus que de la boue, que l'on ne peut plus même fouler aux pieds sans danger d'en contracter la souillure. Quels feux de l'enfer pourront être assez ardents pour expier d'aussi énormes crimes ? Que si vous souriez à ce nom d'enfer, si vous faites difficulté de croire à son existence, rappelez-vous le feu qui consuma Sodome : car voilà, oui, voilà même pour la vie présente une image de ce feu à venir. Comme Dieu prévoyait que beaucoup de gens voudraient douter de ce qui suivra la résurrection, il a fait tomber un jour ce feu dévastateur, pour engager les hommes à se former leur foi d'après les choses mêmes qu'il a mises sous leurs yeux. Tel est en effet cet incendie de Sodome ; et j'en prends témoin ceux qui se sont transportés sur les lieux, et qui ont vu de leurs yeux ces effroyables effets de la vengeance divine, ces traces ineffaçables des foudres célestes. Tâchez de concevoir combien ce péché doit être énorme, puisqu'il a comme contraint l'enfer à faire sur la terre cette irruption prématurée. Comme beaucoup de gens se moquaient de ce qu'ils en entendaient dire, Dieu a voulu, par ce prodige extraordinaire, leur rendre la chose plus croyable en faisant parler les faits. Si la pluie tombée sur Sodome n'était pas naturelle, c'est que les crimes de ses habitants ne l'étaient pas non plus ; et elle a inondé leur ville et leur contrée, comme une passion funeste inondait leurs âmes. C'est pour cela que cette pluie a produit des effets tout contraires à ceux que la pluie produit naturellement, puisqu'au lieu de fertiliser la terre et de lui faire produire des fruits abondants, elle l'a rendue inféconde et tout-à-fait stérile. Tel était aussi l'infâme commerce que pratiquaient entre eux les habitants de Sodome : il frappait les deux sexes à la fois d'impuissance et de stérilité. Y a-t-il rien de plus
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abominable qu'un homme qui s'est fait victime de cette monstrueuse passion ? Y a-t-il rien qui mérité mieux l'exécration du ciel et de la terre ? O fureur ! O aveuglement ! D'où est venue cette passion maudite et ennemie du salut des hommes ; d'autant plus leur ennemie, qu'elle fait périr leurs âmes et leurs corps à la fois ? O hommes indignes de ce nom, plus déraisonnables que les animaux sans raison, plus étrangers à la pudeur que les chiens qui courent nos rues ! Car ceux-ci reconnaissent du moins certaines lois dans leurs accouplements ; au lieu que vous y vous déshonorez tellement votre espèce, que vous la faites descendre au-dessous des plus vils animaux. Quel est le principe de ces vices monstrueux ? L'amour du plaisir et l'ignorance où l'on est de Dieu ; car du moment où l'on perd sa crainte, on devient ennemi de toute vertu (Cf. S. Chrysostomi opera, t. IX, p. 457-458, édit. de Montfaucon ; pag. 498-499, édit. Gaume). "
6. TERTULLIEN, de la Pudicité, c. 5 (al. 4) : " Quant aux autres emportements des passions qui attentent aux corps, aux sexes et aux lois de la nature, nous leur interdisons non-seulement le sanctuaire, mais même tout accès de l'église, parce que ce sont, je ne dis pas des péchés, mais des monstruosités (Cf. Les Pères de l’Eglise, etc., trad. par M. de Genoude, t. VII,
pag. 737). "
7. S. AUGUSTIN, Confessions, liv. III, c. 8 : " Les crimes contre nature, tels que ceux de Sodome, appellent partout et toujours l'horreur et le châtiment. Que si tous les peuples imitaient
Sodome, ils seraient tenus de la même culpabilité devant la loi divine, qui n'a pas fait les hommes pour user ainsi d'eux-mêmes. Car c'est violer l'alliance qui doit être entre Dieu et nous, que de profaner par de vils appétits de débauche l’ordre naturel dont il est l'auteur (Cf. Les Confessions, etc., trad. par L. Moreau, pag. 77). "
8. Le même, Epist. CIX (al. 211) ad Sanctimoniales : " L'amour que vous devez vous porter les unes aux autres n'est pas un amour charnel, mais une affection purement spirituelle, Car ces amusements immodestes, ces jeux indécents que se permettent, même entre personnes de leur sexe, des femmes qui ont mis en oubli les lois de la pudeur, doivent rester inconnus, non-seulement aux veuves et aux vierges consacrées à Jésus-Christ, mais même à toute femme et à toute vierge chrétienne. "
9. Le Code de Justinien, Lib. IX, tit. 9, ad legem Juliam de
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adulteris et stupro, lege XXXI Constantii et Constantis imperatorum : " Lorsque l'homme fait l'office de la femme, qu'attendre de ce commerce contre nature, où les sexes sont pris à rebours ; ou ce qui se pratique est tellement monstrueux, que c'est un crime même d'en parler ; où l'amour revêt une forme incompatible avec lui-même ; où il se dépouille de son attribut distinctif, qui est la fécondité ? Nous voulons que la loi s'arme de son glaive vengeur pour sévir exemplairement contre les enfants les qui se rendent ou se rendront coupables de ce crime monstrueux. "
10. S. JEROME, In cap. V Epistolæ ad Ephesios
; voir ce passage rapporté déjà à la question
V des péché capitaux, témoignage 9, tome III, page
451.
Question IV
Que nous dit l’Ecriture du crime de l’oppression exercée à l’égard des pauvres ?
Vous n'attristerez et n’affligerez point l'étranger, dit le Seigneur, parce que vous avez été étrangers vous-mêmes dans le pays d’Egypte. Vous ne ferez aucun tort à la veuve et à l'orphelin. Si vous les offensez en quelque chose, ils crieront vers moi, et j'écouterai leurs cris : et ma fureur s'allumera contre vous ; je vous ferai périr par l’épée et vos femmes deviendront veuves, et vos enfants orphelins. C'est pour cela, je veux dire, par la cruelle oppression qu'elle faisait peser sur les Israélites, que l’Egypte fut frappée de tant de plaies, et que l’armée entière des Egyptiens finit par être engloutie dans la mer avec son roi Pharaon, cet implacable tyran qui avait porté la cruauté jusqu’à ordonner le meurtre de tous les enfants mâles du peuple hébreu. J’ai vu, dit le Seigneur, l'affliction de mon peuple qui est en Egypte ; j'ai entendu le cri qu'il jette à cause de la dureté de ceux qui ont l'intendance des travaux ; et sachant quelle est sa douleur, je suis descendu pour le délivrer des mains des Egyptiens. De là aussi cette menace que Dieu fait entendre par la bouche d’Isaïe : Malheur à ceux qui établissent des lois d'iniquité et qui font des ordonnances injustes pour opprimer les pauvres dans le jugement, pour accabler par la violence, malgré la justice de leur cause, les plus faibles de mon peuple, pour dévorer la veuve comme leur proie, et pour mettre au pillage le bien des pupilles. On lit dans le même prophète ce reproche adressé à l'injustice et à l'inhumanité des magistrats : Vos princes sont des infidèles ; ils sont les compagnons des voleurs ;
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tous aiment les présents, ils ne cherchent que
le gain et l’intérêt. Ils ne font point justice aux pupilles,
et la cause de la veuve n’a point d'accès auprès d’eux.
On y lit encore ces autres paroles : Mon peuple a été
dépouillé par ses exacteurs. Et il n'est pas douteux
que souvent des villes et des provinces entières sont menacées
des plus grands malheurs pour ce crime détestable que commettent
sans scrupule leurs magistrats.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Exode, XXII, 24, 25-27 : "Vous ne contristerez ni n'affligerez l'étranger etc. (comme dans le corps de la réponse). - Si vous prêtez de l’argent à ceux de mon peuple qui sont pauvres parmi vous, vous ne les presserez point comme ferait un exacteur impitoyable, et vous ne les accablerez point d'usures. - Si votre prochain vous a donné son habit pour gage, vous le lui rendrez avant le coucher du soleil. - Car c'est le seul habit qu'il ait pour se vêtir, c'est la seule couverture qu'il ait pour mettre sur lui quand il dort ; s'il crie vers moi, je l'exaucerai : car je suis bon et compatissant. "
2. Deutéronome, XV, 7-11 : " Si, dans le pays que le Seigneur votre Dieu doit vous donner, quelqu'un de ceux de vos frères qui demeureront dans votre ville tombe dans la pauvreté, vous n'endurcirez point votre cœur et vous ne fermerez point votre main ; - mais vous l'ouvrirez au pauvre, et vous lui prêterez ce dont
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vous verrez qu'il aura besoin. - Gardez-vous de vous laisser surprendre à cette pensée impie, et de dire dans votre cœur : La septième année, qui est l'année de la rémission, approche ; et de détourner ainsi vos yeux de dessus votre frère qui est pauvre, sans vouloir lui prêter ce qu'il vous demande, de peur qu'il ne crie contre vous vers le Seigneur, et que cela ne vous soit imputé à péché. - Mais vous lui donnerez, et vous ne montrerez point un mauvais cœur lorsqu'il s'agira pour vous de soulager sa misère afin que le Seigneur votre Dieu vous bénisse en tout temps et dans toutes les choses que vous entreprendrez. - Il y aura toujours des pauvres dans le pays où vous habiterez. C’est pourquoi je vous ordonne d'ouvrir votre main à votre frère pauvre et sans secours, qui se trouvera demeurer avec vous dans votre pays. "
3. Ibid., XXIV, 10-13, 17 : " Lorsque vous redemanderez à votre prochain quelque chose qu'il vous devra, vous n'entrerez point dans sa maison pour en emporter quelque gage ; - mais vous vous tiendrez dehors, et il vous donnera lui-même ce qu'il aura. - S'il est pauvre, le gage qu'il vous aura donné ne passera pas la nuit dans votre maison ; mais vous le lui rendrez aussitôt avant le coucher du soleil, afin que, dormant dans son vêtement, il vous bénisse, et que vous soyez trouvé juste devant le Seigneur votre Dieu. Vous ne violerez point la justice dans la cause de l’étranger et de l'orphelin, et vous n’ôterez point à la veuve son vêtement pour qu'il vous tienne lieu de gage. "
4. Ecclésiastique, XXXV, 16-19 : " Le Seigneur ne fera point acception de personnes contre le pauvre, et il exaucera la prière de l'opprimé. - Il ne méprisera point la prière de l'orphelin, ni les gémissements que la veuve répandra devant lui. - Les larmes de la veuve ne descendent-elles pas sur son visage, et ne crient-elles pas vengeance contre celui qui les fait couler ? - Du visage de la veuve, elles montent jusqu'au ciel ; et le Seigneur, qui l’exauce, ne se plaira point à la voir pleurer. "
5. JEREMIE, XXI, 12 : " Maison de David, voici ce que dit le Seigneur : Rendez la justice dès le matin, et délivrez l'opprimé des mains de son persécuteur, de peur que mon indignation ne s'allume comme un feu, et qu'elle ne s’embrase sans que personne puisse l’éteindre, à cause de la perversité de vos pensées. "
6. Id., XXII, 3-5 : " Voici ce que dit le Seigneur : Agissez selon l'équité et la justice ; délivrez l'opprimé des mains de son persécuteur ; ne contristez ni l’étranger, ni l'orphelin, ni la veuve ;
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ne les opprimez pas injustement, et ne répandez pas le sang innocent en ce lieu. - Si vous observez avec soin cette ordonnance, il passera par les portes de ce palais des rois de la race de David, qui s'assiéront sur son trône, et qui monteront, eux et leurs serviteurs et leurs peuples, sur des chariots et sur des chevaux. - Que si vous n'écoutez point mes paroles, je jure par moi-même, dit le Seigneur, que ce palais sera réduit en une solitude. "
7. MALACHIE, III, 5 : " Je me hâterai de venir, pour être moi-même juge et témoin contre les empoisonneurs, contre les adultères et les parjures, contre ceux qui retiennent le salaire de l'ouvrier, qui oppriment les veuves, les orphelins et les étrangers, sans être retenus par ma crainte, dit le Seigneur des armées. "
8. II Samuel, XII, 1-6 : " Le Seigneur envoya donc Nathan vers David ; et Nathan étant venu le trouver, lui dit : Il y avait dans une ville deux hommes, dont l'un était riche, et l'autre pauvre. - Le riche avait un grand nombre de brebis et de bœufs ; - au lieu que le pauvre n'avait en tout qu'une petite brebis, qu'il avait achetée et nourrie, qui avait été élevé dans sa maison parmi ses enfants, mangeant de son pain, buvant dans sa coupe, et dormant sur son sein ; et il la chérissait comme sa fille. - Un étranger étant venu voir le riche, celui-ci ne voulut point toucher à ses brebis ni à ses bœuf pour lui faire festin ; mais il prit au pauvre sa brebis, qu'il donna à manger à son hôte. - David, indigné, dit à Nathan : Vive le Seigneur ! L'homme qui a fait cette action est un enfant de la mort. - Il rendra quatre fois le prix de la brebis, pour avoir agi de la sorte, et pour n'avoir point épargné le pauvre. "
9. Exode, VII, VIII, IX, X, XII et XIV, où sont rapportées les diverses plaies dont l'Egypte fut frappée en punition de l'oppression que Pharaon faisait peser sur le peuple hébreu. "
10. Exode, I, 8-16, 22 : " Cependant il s'éleva en Egypte un roi nouveau, à qui Joseph était inconnu. - Et il dit à son peuple : Vous voyez que le peuple d'Israël est devenu très-nombreux et plus fort que nous. - Venez, opprimons-le habilement, de peur qu'il ne se multiplie de plus en plus, et que s'il s'élève quelque guerre, il ne se joigne à nos ennemis, et qu'après nous avoir vaincus, il ne sorte de l’Egypte. - Il établit donc sur eux des intendants pour les accabler de travaux ; et les Israélites bâtirent à Pharaon des villes pour servir de magasins, Phithom et Ra-
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messès. - Mais plus on les opprimait, plus leur nombre se multipliait et s'élevait. - Les Egyptiens haïssaient les enfants d'Israël, et les affligeaient en les insultant ; - et ils leur rendaient la vie à charge, en les condamnant à des ouvrages de mortier et de briques, et aux travaux de la terre et au plus dur esclavage. - Et le roi d'Egypte parla aux sages-femmes des Hébreux, dont l'une se nommait Séphora et l'autre Phua, - et il leur fit ce commandement: Quand vous recevrez les enfants que viendront enfanter les femmes des Hébreux, et au moment de l'enfantement, si c'est un enfant mâle, tuez-le ; si c'est une fille, laissez-la vivre. . . - Alors Pharaon fit ce commandement à tout son peuple : Jetez dans le fleuve tous les enfants mâles qui viendront à naître et ne réservez que les filles. "
11. Ibid., XIV, 27-28 : " Moise étendit donc la main sur la mer, et dès la pointe du jour elle retourna au même lieu qu'elle avait auparavant occupé. Et les eaux vinrent à la rencontre des Egyptiens qui s'enfuyaient, et le Seigneur les enveloppa au milieu des flots. - Et les eaux se retournèrent et couvrirent les chars et les cavaliers de toute l'armée de Pharaon qui était entré dans la mer en poursuivant Israël, et il n'en échappa pas un seul. "
12. Ibid., III, 7 : " J'ai vu l'affliction de mon peuple, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
13. ISAIE, X, 1, 3-4 : " Malheur à ceux qui établissent, etc. (comme dans le corps de la réponse). - Que ferez-vous au jour où Dieu vous visitera, au jour des calamités qui viendront fondre sur vous des régions lointaines ? A qui aurez-vous recours ? A qui confierez-vous le soin de votre gloire, - pour n’être point accablés sous le poids des chaînes, pour ne pas tomber sous un monceau de corps morts ? Après tous ces maux, sa fureur n'est point encore apaisée, et son bras est toujours levé. "
14. Deutéronome, XXVII, 19 : " Maudit celui qui viole la justice dans la cause de l'étranger de l'orphelin et de la veuve. Et tout le peuple répondra : Amen. "
15. JOB, XXIV, 1-4,9-13 : " Les temps ne sont point cachés au Tout-Puissant ; ceux qui le connaissent ignorent ses jours. - Les uns outrepassent les limites de leurs terres, ravissent les troupeaux et les emmènent dans leurs pâturages. - Ils enlèvent à l'orphelin l'âne qui est toute sa richesse, et ils prennent à titre de gage le bœuf de la veuve. - Ils détournent le pauvre de la voie qu'il voudrait tenir, et les affligés de la terre se cachent à leur approche. - Ils
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ravissent le bien de l'orphelin, et ils dépouillent l’indigent. - Ils arrachent à ceux qui sont nus leurs derniers vêtements, et à ceux qui ont faim leurs dernières gerbes. - Ils se reposent sur le midi au milieu des tas de ceux qui, après avoir foulé le vin dans leurs pressoirs, sont épuisés par la soif. - Ils font gémir les hommes dans les villes, et les âmes blessées poussent leurs cris ; et Dieu ne tirera pas de tout cela une éclatante vengeance ? - Ils ont été rebelles à la lumière ; ils n'ont point connu les voies de Dieu, et ils ne sont point revenus dans ses sentiers. "
16. MATTHIEU, XXIII, 14 : " Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites, qui, sous prétexte de vos longues prières, dévorez les maisons des veuves ; c'est pour cela que vous subirez une condamnation plus rigoureuse. "
17. ISAIE, I, 23 : " Vos princes, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
18. JEREMIE, V, 28-29 : " Ils sont gras, ils sont vigoureux ; et ils violent ma loi par les actions les plus criminelles : ils ne prennent point la défense de la veuve ; ils ne soutiennent point le droit du pupille, et ne font point justice aux pauvres. - Ne punirai- je point ces excès, dit le Seigneur, et ne me vengerai-je point d'une nation si criminelle ? "
19. ZACHARIE, VII, 8-11 : " Le Seigneur parla ensuite à Zacharie, et lui dit : - Jugez selon la vérité et que chacun exerce la miséricorde et la charité envers son frère - N'opprimez ni la veuve, ni le pupille, ni l'étranger ni le pauvre, et que nul ne forme dans son cœur de mauvais desseins contre son frère. - Mais ils n'ont pas voulu m'écouter ils m'ont tourné le dos, et ont appesanti leurs oreilles pour ne pas m'entendre. "
20. Psaume XCIII, 3-9 : " Jusqu’à quand, Seigneur, jusqu’à quand les pécheurs se glorifieront-ils ? - Jusqu’à quand leur bouche vomira-t-elle l'outrage ? Jusqu’à quand parleront-ils avec jactance, tous ces artisans d'iniquité ? - Ils ont, Seigneur, humilié votre peuple, ils ont opprimé votre héritage. - Ils ont mis à mort la veuve et l'étranger ; ils ont immolé l'orphelin. - Ils ont dit : Le Seigneur ne voit point, le Dieu de Jacob n'entend point. - Détrompez-vous, ô les plus insensés du peuple, hommes stupides, ayez enfin de la raison. - Quoi ! celui qui a construit l'oreille n'entendrait pas ? celui qui a formé l'œil ne verrait pas ? "
21. AMOS, V, 11-12 : " Parce que vous avez foulé aux pieds le pauvre, et que vous lui avez enlevé son froment, vous bâtirez des maisons, et vous ne les habiterez point, vous
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planterez des vignes délicieuses, et vous n'en boirez point le vin. - Car je connais vos crimes qui sont en grand nombre ; je sais que vous êtes puissants à faire le mal, que vous êtes les ennemis du juste, que vous recevez des présents, et que vous opprimez le pauvre à la porte des villes. "
22. ISAIE, III, 12, 14-15 : " Mon peuple a été
dépouillé par ses exacteurs. - Le Seigneur entrera en jugement
avec les anciens et les princes de son peuple, parce que vous avez dévoré
la vigne, et rempli vos maisons de la dépouille du pauvre. - Pourquoi
foulez-vous aux pieds mon peuple ? pourquoi meurtrissez-vous de coups le
visage des pauvres, dit le Seigneur Dieu des armées. "
Question V
Quel crime enfin y a-t-il, d’après l’Ecriture, à retenir ou à diminuer le salaire des ouvriers ?
Nous lisons dans l’épître de saint Jacques le reproche véhément que cet apôtre fait aux riches au sujet de leur avarice inhumaine, et de l'extrême injustice dont ils se rendent coupables en frustrant les ouvriers de leur salaire. Sachez, leur disait-il, que le salaire que vous faites perdre aux ouvriers qui ont fait la récolte de vos champs, crie contre vous, et que leurs cris sont montés jusqu'aux oreilles du Dieu des armées. L’Ecclésiastique contient sur ce même sujet les maximes suivantes : Un peu de pain, voilà la vie des pauvres ; celui qui le leur ôte est un homme de sang. Celui qui arrache à un homme le pain de ses sueurs, est comme celui qui assassine son prochain. Celui qui répand le sang et celui qui prive le mercenaire de sa récompense sont frères.
Voilà donc ce qui a été prescrit sur cet article par la loi de Dieu : Vous ne refuserez point à celui qui est indigent et pauvre ce que vous lui devez, n'importe qu'il soit votre frère ou qu'étant venu de dehors il demeure avec vous dans votre pays et dans votre ville ; mais vous lui rendrez le même jour le prix de son travail avant le coucher du soleil, parce qu'il est pauvre et qu'il n'a que cela pour vivre, de peur qu'il ne crie contre vous vers le Seigneur, et que le sujet de ses cris ne vous soit imputé à péché.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. JACQUES, V, 4 : " Sachez que le salaire, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
2. Ecclésiastique, XXXIV, 23 : " Un peu de pain, voilà la vie des pauvres, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
3. Ibid., VII, 22-23 : " Ne maltraitez point le serviteur qui travaille avec fidélité, ni le mercenaire qui vous prodigue sa vie. - Que le serviteur intelligent vous soit cher comme votre âme ; ne lui refusez pas la liberté qu'il mérite et ne le laissez pas tomber dans l'indigence. "
4. Deutéronome, XXIV, 14 : " Vous ne refuserez point à l'indigent, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
5. Lévitique, XIX, 13 : " Vous n'opprimerez point votre prochain, et vous n'usurperez point son bien ; le prix du mercenaire qui vous donne son travail ne demeurera point chez vous jusqu'au matin. "
6. Tobie, IV, 15 : " Lorsqu'un homme aura travaillé pour vous, payez-lui aussitôt son salaire, et que la récompense du mercenaire ne demeure jamais chez vous. "
7. MALACHIE, III, 5 : " Alors je me hâterai de venir,
pour être moi-même juge et témoin contre les empoisonneurs,
contre les adultères et les parjures, contre ceux qui retiennent
le salaire de l'ouvrier, qui oppriment les veuves, les orphelins et les
étrangers, sans être retenus par ma crainte, dit le Seigneur
des armées. "
Question VI
A quelle partie de la doctrine chrétienne convient-il de rapporter toute cette étude sur les péchés et à quoi peut-elle être utile ?
Cette étude se rapporte à la première partie de la justice chrétienne, qui consiste à discerner et à éviter le mal. Le fruit doit en être de faire un sage discernement de ce qui est mal, ou con-
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traire à la loi de Dieu, et par-là même au salut des hommes, afin de s'en préserver, ou de l'expier par une prompte pénitente, si l'on ne s'en est pas suffisamment garanti.
Cette étude nous fait connaître en même temps en quoi le sage diffère de l'insensé et le juste de l'impie : car, comme nous le dit l'écrivain sacré, le sage craint et se détourne du mal ; l’insensé passe outre, et se croit en sûreté. En effet, l'insensé ne reçoit point les paroles de prudence, si vous ne lui parlez selon ce qu'il a dans le cœur, comme l'atteste Salomon, qui a dit encore ces paroles : Le sentier des justes est comme la rivière qui va toujours croissant jusqu’à ce qu'elle illumine tout l'espace. La voie des méchants n’est que ténèbres ; ils ne savent où ils tombent. La plupart des hommes, avouons-le, vivent dans une ignorance honteuse relativement aux péchés dont nous venons de faire le détail et qui perdent les âmes en tant de manières ; d'autres, quoiqu'ils en aient la connaissance distincte, ne prennent pas soin de les éviter ou ne les détestent pas comme ils le doivent. Mais les plus coupables de tous sont ceux qui s'endurcissent dans l'habitude du péché et auxquels s'applique cette maxime du Sage : Lorsque le méchant est descendu au plus profond des péchés, il méprise tout ; mais l'ignominie et l'opprobre le suivent. Ce que le méchant dont veut parler le Sage méprise en particulier, ce sont les règles de la justice chrétienne qui ont pour objet non-seulement la connaissance et le discernement des péchés mais les mesures à prendre pour s'en garantir ou pour les expier.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
Proverbes, XIV, 16 ; XVIII, 2 ; IV,
18, 19 ; XVIII, 3 (comme dans le corps de la réponse).
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, De gratiâ et libero arbitrio, c. 3 : " Ceux-là mêmes qui ne connaissent pas la loi de Dieu ne seront pas pour cela exempts de punition ; car tous ceux qui ont péché sans être sous la loi, périront sans être jugés par la loi ; et ceux qui ont péché étant sous la loi, seront jugés par la loi (Rom., II, 12). Je ne crois pas que la pensée de l'Apôtre, lorsqu'il parlait ainsi, ait été de faire entendre que ceux qui pèchent sans connaître la loi seront jugés plus sévèrement que ceux qui la connaissent. Car, quoiqu’il semble que le mot périr dont il se sert à l'égard des premiers, soit plus dur que celui d’être jugé qu'il emploie à l'égard des seconds, il faut faire attention à la suite de son discours. Il parle en cet endroit des gentils et des juifs, dont les premiers n'étaient pas sous la loi, au lieu que les seconds y étaient assujettis. Or, qui oserait prétendre que les juifs qui pèchent sous la loi ne périront pas pour n'avoir pas cru en Jésus-Christ, parce que saint Paul dit d'eux qu’ils seront jugés parla loi ? C'est une vérité constante, que personne ne peut être sauvé sans la foi en Jésus-Christ. Ces juifs subiront donc un jugement qui les condamnera à périr éternellement. En effet, si la condition de ceux qui ignorent la loi de Dieu était pire que celle de ceux qui la connaissent, comment serait vraie cette parole de Jésus-Christ dans l’Evangile : Le serviteur qui n'a pas connu la volonté de son maître et qui fait des choses dignes de punition, sera battu plus légèrement ; mais celui qui connaît la volonté de son maître et qui fait des actions punissables, sera battu plus rudement ? Ce passage fait voir qu'un homme qui connaît la loi pèche plus grièvement que celui qui ne la connaît pas ; et il fait voir en même temps qu'il ne faut pas pour cela chercher une ressource dans les ténèbres de l'ignorance, pour y trouver une excuse. Car il y a bien de la différence entre ne pas savoir, et ne pas vouloir savoir. C'est une volonté très-condamnable dans un homme, que celle dont il est dit : Il n'a pas voulu s'instruire pour faire le bien (Ps. XXXV, 4). Pour ceux qui ne sont pas du nombre de ces personnes qui ne veulent pas savoir, mais qui sont simplement dans l'ignorance, leur ignorance ne les excuse pas de ma-
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nière à les exempter d'être punis par le feu éternel, quoique leur supplice puisse être moins rigoureux. Tel sera le sort de tous ceux qui n'ont pas la foi, quand même ce défaut de foi viendrait de ce que la foi ne leur aurait pas été prêchée. Car ce n'est pas sans fondement que David dit à Dieu : Répandez votre colère sur les nations qui ne vous connaissent pas (Ps. LXXVIII, 6), et que saint Paul nous apprend que le Seigneur viendra au milieu des flammes exercer sa vengeance sur ceux qui ne connaissent pas Dieu (II Thess., I, 8). Cependant cette ignorance même n'est pas pleinement involontaire. L'Ecriture nous en fournit une preuve, lorsqu'elle invite la volonté de l'homme à acquérir la science du salut, en nous disant : Ne soyez pas comme le cheval et le mulet qui n'ont pas d'intelligence (Ps. XXXI, 9). Et par-là elle enlève à l'homme le prétexte de dire : Je n'ai pas su, personne ne m'a instruit, j'ai manqué d'intelligence ; et de se croire pour cela innocent. Il est pourtant vrai qu'un tel homme, quoique coupable, l'est beaucoup moins que celui dont l'Ecriture fait ce portrait : Le mauvais serviteur ne sera pas corrigé par des paroles, parce qu'encore qu'il entende bien, il n'obéira pas (Prov., XXIX, 19). Enfin il y a une autre espèce de pécheurs. Ce sont Ceux qui disent avec sincérité : Je ne puis faire le bien qui m'est ordonné parce que je suis maîtrisé par ma convoitise. Ce pécheur ne s'excuse pas sur son ignorance ; il ne rejette pas non plus son péché sur Dieu ; il reconnaît le mal qui est en lui, et il en est affligé, et cependant saint Paul dit à ce même homme : Ne vous laissez pas vaincre par le mal, mais surmontez le mal par le bien (Rom., XII, 21). C'est à la volonté même que s'adresse ce précepte de ne pas se laisser vaincre : il l'avertit qu'elle n'est vaincue que parce qu'elle le veut. Car vouloir et ne pas vouloir, sont des actes propres de la volonté. "
2. Le même, Lib. III de libero arbitrio, c. 22 : " On ne fait point un crime à l'âme de ce qu'elle ignore naturellement, et de ce qui lui est naturellement impossible ; mais de ce qu'elle ne s'est pas appliquée à connaître ce qui est bien, et de ce qu'elle a négligé les moyens d'acquérir la facilité de le mettre en pratique (Cf. Les livres de saint Augustin sur le libre arbitre, pag. 286). "
3. S. BERNARD, Epist LXXVII ad Hugonem de sancto Victore : " Que ceux qui prétendent qu'on ne peut jamais pécher par ignorance, n'implorent donc jamais le pardon de Dieu pour leurs
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propres ignorances, mais qu'ils se moquent plutôt du Prophète, qui dit à Dieu : Ne vous souvenez, ni des fautes de ma jeunesse, ni de mes ignorances (Ps. XXIV, 7). Peut-être même trouveront-ils mauvais que Dieu ait prescrit des sacrifices pour le péché d'ignorance (Lev., IV, 2 et suiv.) Car voici ce que nous lisons dans le Lévitique que Dieu dit à Moïse : Si un homme pèche par ignorance en faisant quelqu'une des choses qui sont défendues par la loi du Seigneur, et qu'étant coupable de cette faute, il reconnaisse ensuite son iniquité, il prendra du milieu des troupeaux un bélier sans tache, qu'il offrira au prêtre selon la mesure et l’estimation de son péché (ibid., V, 47-48). Et encore : Le prêtre priera pour lui, parce qu'il a fait cette faute sans la connaître, et elle lui sera pardonnée (ibid., XVIII). Si l'ignorance n'est jamais péché pourquoi est-il dit dans l'Epître aux Hébreux, qu'il n'y avait que le seul pontife qui entrât dans le second tabernacle, et seulement une fois l’année, non sans y porter du sang, qu'il offrait pour ses propres ignorances, et pour celles du peuple (Hebr., IX, 7) ? S'il n'y a point de péchés d’ignorance, Saul n'a donc pas péché pour avoir persécuté l’Eglise de Dieu, puisqu'il l'avait fait dans l'ignorance, n'ayant pas la foi (I Tim, I, 13). Il faisait donc bien d'être blasphémateur, persécuteur, ennemi outrageux, plein de menaces, et ne respirant que le sang des disciples du Seigneur, ayant un zèle démesuré pour les traditions de ses pères ? Il ne devait donc pas dire : J'ai obtenu miséricorde (I Tim., I, 15) ; mais : J'ai reçu ma récompense puisque son ignorance l’excusait de péché et que de plus son zèle lui valait une récompense ? Si, dis-je, on ne pèche jamais par ignorance, qu'avons-nous donc à reprocher aux meurtriers des apôtres, puisque non-seulement ils ne savaient pas qu'ils fissent mal en les mettant à mort, mais qu'en outre ils croyaient faire en cela une chose agréable à Dieu (JEAN, XVI, 2) ? Enfin, ce serait vainement que le Sauveur sur la croix aurait prié pour ses bourreaux, puisqu'il a témoigné lui-même qu'ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient, et qu'ainsi ils n'auraient pas péché du tout. Car ce serait une impiété que de soupçonner le Seigneur Jésus de mensonge, dans ce témoignage qu'il a rendu de ses bourreaux qu'ils ignoraient ce qu'ils faisaient ; ou bien il serait à plus forte raison permis d'en soupçonner l’Apôtre, qui, jaloux sans doute de l’honneur de ses frères selon la chair, aurait dit pour les justifier : S'ils eussent connu la sagesse de Dieu, ils n'eussent jamais crucifié le Seigneur de la gloire (I Cor., II, 7). N’est-il pas assez clair par tous ces exemples, que celui-là est
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enseveli dans les plus épaisses ténèbres de l'ignorance, qui ignore qu'on puisse quelquefois pécher par ignorance ? "
4. S. CHRYSOSTOME, Hom. XXVI in Epist. ad Romanos : " La vie présente est une carrière où chacun de nous est obligé de lutter, et d'avoir continuellement les yeux ouverts, et ouverts de tous côtés, bien persuadé que l'ignorance serait une excuse insuffisante. Car il y a, n'en doutez pas, des châtiments réservés aussi à l'ignorance, lorsqu'elle n'a rien pour se faire pardonner. Telle était celle des Juifs, telle était aussi celle des gentils. Il est vrai que, lorsqu'on est dans l'impuissance de savoir certaines choses, on n'est pas coupable de les ignorer ; mais lorsqu'au contraire on peut aisément s’en instruire, et qu'on refuse de s'en donner la peine, l'ignorance est alors très-punissable. Si, au lieu de nous endormir dans une coupable nonchalance, nous faisons ce qui est en notre pouvoir, Dieu sans doute nous tendra la main pour nous aider à connaître les choses que nous ignorons encore ; et c'est ce que saint Paul faisait entendre aux Philippiens, lorsqu'il leur disait : Si vous avez quelque sentiment qui ne soit pas conforme à la vérité, Dieu vous découvrira ce que vous devez en croire. Mais si nous ne voulons pas faire même ce qui dépend de nous, nous n'avons point à espérer ce secours divin. "
5. S. AUGUSTIN, Enchirid. ad Laurent., c. 80 (al. XXIV, 21) : " Des péchés énormes et des plus détestables sont regardés comme légers ou même nuls, dès qu'une fois ils sont passés en coutume ; jusque-là que, loin de s'en cacher, on les publie et on s'en fait gloire. Alors se vérifie ce que dit l'Ecriture (Ps. LX, Hébr., X, 3), que l'impie se glorifie de ses désirs déréglés et que l'avare s'applaudit à lui-même. Ces sortes de péchés autorisés par coutume sont appelés dans les livres saints un cri. C'est l'expression dont se sert le prophète Isaïe en représentant les Juifs sous la figure d'une vigne ingrate et stérile : J'ai attendu, fait-il dire à Dieu (V, 7), qu'elle portât des fruits de justice, et je ne vois qu'iniquité en elle ; des actions d'équité, et à la place ce n’est qu'un cri. C'est encore ainsi que le Seigneur s'exprime dans la Genèse (XVIII, 20) : Le cri de Sodome et de Gomorrhe devient de plus en plus fort. Ce qui signifie que les abominations qui se commettaient dans ces villes infâmes, non-seulement n'y étaient pas punies, mais y étaient même autorisées et pour ainsi dire érigées en loi. Nous voyons de même de notre temps plusieurs désordres, moins graves il est vrai,
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tellement passés en usage, que nous n'oserions
pas excommunier un laïc, ni même dégrader un clerc qui
en serait coupable. C'est pourquoi expliquant, il y a quelques années,
l’Epitre aux Galates, et étant arrivé à cet endroit
(IV, 11) où l'Apôtre dit : Je crains d’avoir travaillé
en vain parmi vous, je ne puis m'empêcher de m'écrier
: " Malheur à nous, pécheurs que nous sommes, et à
qui les péchés sans exemples sont les seuls qui inspirent
de l'horreur. Quant aux péchés devenus ordinaires, quoique
ce soit pour les expier que Jésus-Christ a versé son sang,
quoiqu'ils soient si grands qu'ils ferment le royaume de Dieu à
ceux qui les commettent, nous sommes comme forcés de les tolérer
à force de les voir se multiplier, et même d'en commettre
de semblables à force de les tolérer dans nos frères.
Et Dieu veuille encore que nous ne nous portions pas à faire tous
ceux que nous ne saurions empêcher les autres de commettre ! "
Article VI. - DE L’EPIATION DES PECHES.
Question I
Comment nos péchés peuvent-ils être expiés ?
Il est incontestable avant tout, que Jésus-Christ est la victime de propitiation offerte pour nos péchés, qu’il est cet agneau de Dieu qui efface les péchés du monde, et que lui seul a pu nous en mériter le pardon, comme c'est lui aussi qui seul peut nous en purifier.
Il est certain, ensuite, que c'est par la foi, comme l'a dit saint Pierre, que Dieu purifie nos cœurs, attendu que la foi est la porte du salut pour tous les hommes, qu'elle en est le fondement, et que sans elle personne ne saurait obtenir ou espérer le pardon ou l'expiation de ses péchés. Or, ceux-là n'ont pas la foi, qui contredisent en quelque point que ce soit la foi de l’Eglise, quand même, par une confiance présomptueuse, ils se promettraient, à eux-mêmes ou aux autres, la rémission de leurs
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péchés et la grâce de la justification en vertu des mérites de Jésus-Christ.
Pour ceux au contraire qui demeurent attachés à la foi de l’Eglise et vivent dans son unité, ils ont pour expier leurs péchés plusieurs moyens qui leur sont proposés dans l'Ecriture, mais principalement le sacrement de Pénitence, qu'ils ne pourraient négliger, sans se rendre par-là même tout le reste inutiles. Car c'est là le remède nécessaire autant qu'efficace, que Jésus-Christ, ce divin médecin de nos âmes, a établi pour nous guérir de tous nos maux spirituels, et qu'il nous a recommandé par ces paroles adressées aux apôtres, et dans leurs personnes aux prêtres : Les péchés seront remis à ceux a qui vous les remettrez.
En second lieu, les péchés sont effacés et expiés par les aumônes ; car il est écrit : L'aumône délivre de tout péché et de la mort, et elle ne laissera point tomber l’âme dans les ténèbres. Le Prophète a donné en conséquence cet avertissement : Rachetez vos péchés par des aumônes et vos iniquités par des œuvres de miséricorde envers les pauvres.
En troisième lieu, nos péchés nous sont remis lorsque nous pardonnons à nos frères, quelque offense que nous en ayons reçue puisque Notre-Seigneur a dit : Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera vos péchés à vous-mêmes.
En quatrième lieu, nous obtiendrons le même avantage, si nous exerçons la correction fraternelle envers quelqu'un de nos frères que nous verrons tomber en faute, et que nous le gagnons à Dieu par ce moyen, puisqu'il est écrit : Celui qui convertira un pécheur et le retirera de son égarement, sauvera une âme de la mort, et couvrira la multitude de ses péchés.
Cinquièmement, c'est encore ce que nous méritera la pratique sincère de la vertu de charité, cette vertu si puissante pour obtenir et accomplir toute espèce de bien, puisque Notre - Seigneur a dit au sujet de Magdeleine : Beaucoup de péchés lui sont remis, parce qu'elle a beaucoup aimé. Il est dit encore : La charité couvre la multitude des péchés.
Sixièmement, le sacrifice d'un cœur contrit, que Dieu ne méprise jamais, une humble connaissance de nous-mêmes accompagnée de la confession de nos péchés nous procurera aussi cet avantage. Car Dieu regarde la prière de ceux qui sont dans l’humiliation, et il ne méprise point leurs demandes. De là
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encore ce témoignage que rend David au sujet de lui-même : J’ai dit : Je déclarerai au Seigneur et confesserai contre moi-même mon injustice ; et vous m'avez aussitôt remis l'impiété de mon péché. Saint Jean aussi promet la même grâce à tous ceux sans exception qui confessent sincèrement leurs péchés. Si nous confessons nos péchés, écrivait cet apôtre, Dieu est fidèle et juste, et c'est assez pour qu’il nous les remette, et qu'il nous purifie de toute iniquité. Aussi les Ninivites, pour s’être empressés de s'humilier et de faire pénitence, réussirent-ils à apaiser la colère de Dieu toute prêt à les frapper, et à détourner de dessus leur ville et de leur patrie les fléaux dont elle était menacée. C’est ce qui a fait dire à l'écrivain sacré : Dieu considéra leurs œuvres il vit qu'ils s'étaient convertis en quittant leur mauvaise voie ; et la compassion qu'il eut d’eux l’empêcha de leur envoyer les maux qu'il avait résolu de leur faire.
Enfin, nous apprenons de même par le témoignage de l'Ecriture, que tout acte de piété vraie et sincère, comme ceux que nous venons de rapporter et autres semblables, quand ils ont pour principe la grâce de Jésus-Christ expient les péchés de ceux qui les pratiquent en esprit de pénitence, pourvu, comme nous l'avons observé, qu'ils n'aient pas d'autre croyance que celle de l’Eglise et qu'ils soient dans sa communion. C'est cette vérité que l'Apôtre avait en vue, lorsqu'il donnait l'avis suivant aux Corinthiens : Ayant reçu de Dieu de telles promesses, mes chers frères, purifions-nous de tout ce qui souille le corps ou l'esprit, achevant l'œuvre de notre sanctification dans la crainte de Dieu. Les paroles suivantes de saint Jacques ne sont pas moins solennelles : Lavez vos mains, pécheurs et purifiez vos cœurs vous qui avez l’âme partagée, affligez-vous vous-mêmes ; soyez dans le deuil et dans les larmes ; que vos cris se changent en pleurs, et votre joie en tristesse. Humiliez-vous en la présence du Seigneur, et il vous délivrera.
Car comme le dit saint Augustin, dont nous répétons encore une fois les paroles, ce n'est pas assez d'amender ses mœurs et de quitter ses perverses habitudes, si l'on ne satisfait en même temps à Dieu pour les péchés qu'on a commis, par la douleur du repentir, par le sacrifice d'un cœur contrit et humilié, et par une pénitence accompagnée d'aumônes.
Quiconque au contraire, c'est encore saint Augustin qui parle, sachant qu'il est engagé dans quelque péché mortel, ne prend pas soin de s'en corriger, et d'en faire une longue pénitence, s'il en a le temps, en y joignant d'abondantes aumônes,
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et en prenant garde de faire de nouvelles chutes, il ne suffira pas, pour l'en purifier, de ce feu passager dont parle l'Apôtre écrivant aux Corinthiens, mais il sera irrémissiblement condamné au feu éternel. Car ce ne sont pas les péchés mortels, mais seulement les véniels qui pourront être effacé ou expiés après cette vie.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Romains, III, 24-28 : " Etant justifiés gratuitement par sa grâce, au moyen de la rançon offerte par Jésus-Christ, - que Dieu a proposé pour victime de propitiation à tous ceux qui auront foi en son sang, afin de manifester sa justice, en remettant à ce prix les péchés commis depuis l'origine du monde ; - péchés qu'il a soufferts avec tant de patience, pour faire paraître en nos temps avec plus d'éclat et qu'il est juste lui-même et qu'il sait justifier tous ceux qui ont une vraie foi en Jésus-Christ : - quel sujet vous reste-t-il donc de vous glorifier ? Tout sujet semblable vous est enlevé. Et par quelle loi ? Est-ce par la loi des œuvres. Non, mais par la loi de la foi. - Car nous devons reconnaître que l'homme est justifié par la foi, sans qu'il soit besoin des œuvres de la loi. "
2. I JEAN, II, 1-2 : " Si quelqu'un pèche nous avons pour avocat auprès du Père Jésus- Christ qui est juste. - Et lui-même est la victime de propitiation pour nos péchés ; et non-seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux de tout le monde. "
3. Id., IV, 10 : " Cet amour consiste en ce que ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais que c'est lui qui nous a aimé le premier, et qui a envoyé son Fils comme victime de propitiation pour nos péchés. "
4. Id., I, 7 : " Mais si nous marchons dans la lumière, comme il est lui-même dans la lumière nous formons ensemble une même société ; et le sang de Jésus-Christ son Fils nous purifie de tout péché. "
5. JEAN, I, 29 : " Le lendemain, Jean vit Jésus qui venait à lui, et il dit : Voici l'Agneau de Dieu, voici celui qui efface les péchés du monde. "
6. MATTHIEU, I, 21 : " Elle enfantera un Fils, et vous lui
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donnerez le nom de Jésus car ce sera lui qui sauvera son peuple de ses péchés. "
7. I Corinthiens, I, 30-31 : " C'est par cette voie que vous êtes établi en Jésus-Christ, qui nous a été donné de Dieu pour être notre sagesse, notre justice, notre sanctification et notre rédemption ; - afin que, selon qu'il est écrit celui qui se glorifie ne se glorifie que dans le Seigneur. "
8. I Timothée, II, 5-6 : " Il n'y a qu'un Dieu et un médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme, - qui s'est livré lui-même pour être le prix de la rédemption de tous, et pour rendre témoignage dans le temps marqué. "
9. Hébreux, I, 3 : " Comme il est la splendeur de sa gloire et le caractère de sa substance, et qu'il soutient tout par la puissance de sa parole, après nous avoir purifié de nos péchés, il est assis au plus haut des cieux à la droite de la souveraine majesté. "
10. Ibid., IX, 11-14 : " Mais Jésus-Christ, le pontife des biens futurs, étant venu dans le monde, est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire par un tabernacle plus grand et plus parfait, qui n'a point été fait de main d'homme, c'est-à-dire, qui n'a point été formé par la voie commune et ordinaire ; - et il y est entré non avec le sang des veaux et des boucs, mais avec son propre sang, au moyen duquel il nous a acquis une rédemption éternelle - Car si le sang des boucs et des taureaux, et l'aspersion de l'eau mêlée à la cendre d'une génisse sanctifie ceux qui ont été souillé, en leur donnant une pureté chamelle, - combien plus le sang de Jésus-Christ, qui par l'Esprit-Saint s'est offert lui-même à Dieu comme une victime sans tache, purifiera-t-il notre conscience des œuvres mortes, pour que désormais nous rendions un culte agréable au Dieu vivant ? "
11. Actes, IV, 11-12 : " C'est cette pierre que vous autres architectes, avez rejeté, et qui est devenue la principale pierre de l'angle. - Et il n'y a de salut par aucun autre que par lui, car aucun autre nom sous le ciel n'a été donné aux hommes, auquel soit attaché notre salut. "
12. Ibid., XV, 7-9 : " Après qu'ils en eurent longuement conféré ensemble, Pierre se leva, et leur dit : Mes frères, vous savez qu'il y a longtemps que Dieu m'a choisi du milieu de vous, afin que les gentils entendissent par ma bouche la parole de l'Evangile, et qu'ils reçussent la grâce de la foi. - Et Dieu, qui connaît les cœurs en a rendu témoignage en leur donnant le
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Saint-Esprit aussi bien qu'à nous. - Et il n'a point fait de différence entre eux et nous, en purifiant leurs cœurs par la foi. "
13. Hébreux, XI, 1, 6 : " La foi est le fondement des choses que l'on doit espérer, et une pleine conviction des biens invisibles. - Or, sans la foi il est impossible de plaire à Dieu. "
14. Galates, II, 16 : " Sachant cependant que l'on n'est point justifié par les œuvres de la loi, mais par la foi en Jésus-Christ, nous avons cru nous-mêmes en Jésus-Christ afin d'être justifiés par la foi que nous aurions en lui, et non par les œuvres de la loi, parce que nul homme ne sera justifié par les œuvres de la loi. "
15. Id., III, 8 : " Aussi Dieu, dans l'Ecriture, prévoyant qu'il justifierait les nations par la foi, l'a annoncé par avance à Abraham en lui disant : Toutes les nations de la terre seront bénies en vous. "
16. Romains, III, 24 (comme ci-dessus, témoignage 1).
17. LUC, VII, 80 : " Or, il dit à la femme : Votre foi vous a sauvé ; allez en paix. "
18. Ephésiens, II, 8-10 : " Car c'est par la grâce que vous êtes sauvé en vertu de la foi ; et cela ne vient pas de vous, puisque c'est un don de Dieu : - cela ne vient point de vos œuvres afin que personne ne se glorifie. - Car nous sommes son ouvrage, ayant reçu un nouvel être en Jésus-Christ pour vivre dans la pratique des bonnes œuvres que Dieu a d'avance marquées à chacun de nous. "
19. JEAN, XX, 22 : " Ayant dit ces mots, il souffla sur eux, et leur dit : Recevez le Saint-Esprit ; - les péchés seront remis, etc. "
20. Tobie, IV, 9-12 : " Si vous avez beaucoup, donnez beaucoup ; si vous avez peu, ayez soin de donner de bon cœur de ce peu même que vous aurez. - Car vous amasserez ainsi un grand trésor et une grande récompense pour le jour de la nécessité ; - puisque l'aumône délivre de tout péché et de la mort, et qu'elle ne laissera point l'âme s'enfoncer dans les ténèbres. - L'aumône sera un sujet de grande confiance devant le Très-Haut pour tous ceux qui l'auront faite. "
21. Ibid., XII, 8-9 : " La prière accompagné du jeûne et de l'aumône, vaut mieux que tous les trésors et tout l'or qu'on peut amasser. - Car l'aumône délivre de la mort ; et c'est elle qui efface les péchés et qui fait trouver miséricorde et obtenir la vie éternelle. "
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22. Ecclésiastique, III, 14-17, 33-34 : "Mon fils, soulagez votre père dans sa vieillesse, et ne l'attristez point durant sa vie. - Si son esprit s'affaiblit, supportez-le, et ne le méprisez pas à cause de l'avantage que vous aurez sur lui ; car la charité dont vous aurez usé envers votre père ne sera point mise en oubli. - Dieu vous récompensera aussi pour avoir supporté les défauts de votre mère - Il vous établira dans la justice ; il se souviendra de vous au jour de l'affliction, et vos péchés se fondront comme la glace en un jour serein. - L'eau éteint le feu même le plus ardent, et l'aumône résiste au péché. - Dieu qui doit récompenser les bonnes œuvres la considère. "
23. Proverbes, XIII, 8 : " Les biens de l'homme riche lui servent à racheter son âme. "
24. Ibid., XV, 27 : " On se purifie de ses péché par l'aumône et par la foi. "
25. Ibid., XVI, 6 : " La miséricorde et la vérité rachètent le crime. "
26. LUC, XI, 41 : " Donnez l'aumône de ce que vous avez, et toutes choses seront pures pour vous. "
27. DANIEL, IV, 24 : " C'est pourquoi, ô roi ! suivez le conseil que je vous donne : rachetez vos péchés par les aumônes, et vos iniquités par des œuvres de miséricorde envers les pauvres. Peut-être que le Seigneur vous pardonnera vos offenses. "
28. ISAIE, I, 17-18 : " Apprenez à faire le bien, examinez tout avant de juger, relevez l'opprimé, protégez l'orphelin, défendez la veuve. - Et venez, et accusez-moi, dit le Seigneur, si vos péchés, quand même ils seraient rouges comme l'écarlate et le vermillon, ne deviennent comme la neige et comme la toison la plus blanche. "
29. Hébreux, XIII, 16 : " Souvenez-vous d'exercer la charité, et de faire part de vos biens aux autres ; car c'est par de tels sacrifices qu'on se rend Dieu favorable. "
30. MATTHIEU, VI, 14-15 : " Si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi les vôtres. - Mais si vous ne pardonnez point aux hommes, votre Père ne vous pardonnera point non plus. "
31. LUC, VI, 37-38 : " Ne jugez point, et vous ne serez point jugés, ne condamnez point, et vous ne serez point condamné ; remettez, et on vous remettra ; - donnez, et on vous donnera ; et on versera dans votre sein une mesure pleine et pressée qui débordera. "
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32. MARC, XI, 25-26 : " Lorsque vous vous présentez pour prier, si vous avez quelque chose contre quelqu'un, pardonnez-lui, afin que votre Père qui est dans le ciel vous pardonne aussi vos offenses. - Que si vous ne pardonnez point, votre Père qui est dans le ciel ne vous pardonnera point non plus vos fautes. "
33. Ecclésiastique, XXVIII, 2 : " Pardonnez à votre prochain le mal qu'il vous a fait, et vos péchés vous seront remis quand vous en demanderez le pardon. "
34. JACQUES, V, 19-20 : " Mes frères, si quelqu'un d'entre vous s'éloigne du chemin de la vérité et que quelqu'un l'y fasse rentrer, - qu'il sache que celui qui convertira un pécheur et le retirera de son égarement sauvera son âme de la mort et couvrira la multitude de ses péchés. "
35. LUC, VII, 44-48 : " Et se tournant vers la femme, il dit à Simon : Voyez-vous cette femme ? Je suis entré dans votre maison : vous ne m'avez point donné d'eau pour laver mes pieds ; et elle au contraire a arrosé mes pieds de ses larmes, et les a essuyé de ses cheveux. - Vous ne m'avez point donné de baiser ; mais elle, depuis que je suis entré, n'a cessé de coller sa bouche sur mes pieds. - Vous n'avez point répandu d'huile sur ma tête, et elle a répandu ses parfums sur mes pieds. - C'est pourquoi je vous déclare que beaucoup de péchés lui sont remis, parce qu'elle a beaucoup aimé mais celui à qui on remet moins, aime moins. - Alors il dit à cette femme : Vos péchés vous sont remis. "
36. Proverbes, X, 12 : " La haine excite les querelles, et la charité au contraire couvre toutes les fautes. "
37. I PIERRE, IV, 8 : " Avant tout, ayez une charité persévérante les uns pour les autres ; car la charité couvre la multitude des péchés. "
38. Psaume L, 19 : " Le sacrifice qui plaît à Dieu, c'est un cœur touché de repentir ; vous ne rejetterez pas, ô mon Dieu ! un cœur contrit et humilié. "
39. LUC, XVIII, 13-14 : " Le publicain, au contraire, se tenant éloigné n'osait pas même lever les yeux au ciel ; mais il se frappait la poitrine, en disant : Mon Dieu, ayez pitié de moi qui suis un pécheur. - Je vous déclare que celui-ci s'en retourna justifié chez lui, et non pas l'autre. "
40. MATTHIEU, XVIII, 32 : " Alors son maitre l'ayant fait venir, lui dit : Méchant serviteur, je vous avais remis tout ce que vous me deviez, parce que vous m'en aviez prié. "
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41. Ecclésiastique, XXI, 1 : " Mon fils, avez-vous péché, ne péchez plus à l'avenir ; mais priez pour vos fautes passées, afin qu'elles vous soient pardonnés. "
42. Psaume CI, 18 : " Il a accueilli les vœux du pauvre abandonné, et il n'il pas rejeté son humble prière. "
43. Ibid., XXXI, 6 : " J'ai dit, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
44. I JEAN, I : " Si nous confessons nos péchés, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
45. JONAS, III, 5-9 : " Les Ninivites crurent à Dieu ; ils ordonnèrent un jeûne public, et se couvrirent de cilices depuis le plus grand jusqu'au plus petit. - Cette nouvelle ayant été portée au roi de Ninive, il se leva de son trône, quitta ses habits, se couvrit d'un sac et s'assit sur la cendre. - Ensuite il fit crier partout et publier dans Ninive cet ordre : Que les hommes et les bêtes, les bœufs et les brebis, ne mangent rien : qu'on ne les mène point aux pâturages, et qu'ils ne boivent point d'eau. - Que les hommes soient couverts de sacs, ainsi que les animaux, et qu'ils crient vers Dieu de toute leur force ; que chacun se convertisse ; que chacun quitte sa mauvaise voie et l'iniquité dont ses mains sont souillées. - Qui sait si Dieu ne reviendra point à nous pour nous pardonner, s'il n'apaisera point sa fureur, et s'il ne révoquera pas l'arrêt de notre perte, qu'il a prononcé dans sa colère ? "
46. MATTHIEU, XII, 41 : " Les Ninivites s'élèveront au jour du jugement contre cette race, et la condamneront ; car ils ont fait pénitence à la prédication de Jonas, et il y a ici plus que Jonas. "
47. LUC, XI, 32 : " Les Ninivites s'élèveront au jour du jugement contre ce peuple, et le condamneront ; car ils ont fait pénitence à la prédication de Jonas, et cependant il y a ici plus que Jonas. "
48. I Rois, XXI, 25-29 : " Achab n'eut donc point son semblable en méchanceté, étant comme vendu pour faire le mal aux yeux du Seigneur ; car il y était excité encore par Jézabel sa femme. - Et il devint tellement abominable, qu'il suivait le culte des idoles des Amorrhéens, que le Seigneur avait exterminés à l'entrée des enfants d'Israël dans le pays. - Achab ayant entendu ces paroles déchira ses vêtements, couvrit sa chair d'un cilice, jeûna, et dormit enveloppé d'un sac, et il ne marchait plus que la tête baissée. Alors le Seigneur adressa sa parole à Elie de Thesbé et lui dit : - N'avez-vous pas vu Achab
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humilié devant moi ? Puis donc qu'il s'est humilié à cause de moi, je ne ferai point tomber sur lui, pendant qu'il vivra, les maux dont je l'ai menacé ; mais, sous le règne de son fils, je les ferai tomber sur sa maison. "
49. Sagesse, XI, 24 : " Vous avez compassion de tous les hommes, parce que vous pouvez tout ; et vous dissimulez leurs péchés afin qu'ils fassent pénitence. "
50. JONAS, III, 10: " Il vit, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
51. Nombres, XXV, 11-13 : " Phinées, fils d’Eléazar, fils du prêtre Aaron, a détourné ma colère de dessus les enfants d'Israël, parce qu'il a été animé de mon zèle contre eux, pour m'empêcher moi-même d'exterminer les enfants d'Israël dans ma fureur. - C'est pourquoi dites-lui que je lui donne la paix de mon alliance, - et que le sacerdoce lui sera assuré à lui et à sa race, par un pacte éternel parce qu'il a été zélé pour son Dieu, et qu'il a expié le crime des enfants d'Israël. "
52. Psaume CV, 30-34 : " Mais Phinées se leva, et il répara l'injure, et le fléau cessa ses ravages. - Et ce zèle lui valut le prix dû à la justice, comme il a été payé à sa race de génération en génération. "
53. Proverbes, X, 2 : " Les trésor de l'iniquité ne serviront de rien, mais la justice délivrera de la mort. "
54. Actes, VIII, 22-25 : " Faites donc pénitence d'un si grand péché et priez Dieu qu'il vous pardonne, s'il est possible, cette pensée de votre cœur ; - car je vois que vous êtes rempli d'un fiel amer, et engagé dans les liens de l'iniquité (dit saint Pierre à Simon le magicien). "
55. II Corinthiens, VII, 10 : " Car la tristesse qui est selon Dieu produit pour le salut une pénitence stable ; mais la tristesse de ce monde produit au contraire la mort. "
56. II Corinthiens, VII, 1 (comme dans le corps de la réponse).
57. II Timothée, II, 19-21 : " Le Seigneur connaît ceux qui sont à lui, et, quiconque invoque le nom du Seigneur, qu'il s’éloigne de l'iniquité. - Au reste, dans une grande maison, il n'y a pas seulement des vases d'or et d'argent, mais il y en a aussi de bois et de terre ; et tandis que les uns servent à des usages honorables, les autres sont réservés à des usages honteux. - Celui donc qui se conservera pur en s'abstenant de ces choses dont j’ai parlé sera un vase d'honneur, un vase saint,
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propre au service du Seigneur et prêt pour toutes sortes de bonnes œuvres. "
58. JACQUES, IV, 8 : " Lavez vos mains, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
59. EZECHIEL, XVIII, 27 : " Et lorsque l'impie se sera détourné de l'impiété dans laquelle il aura été jusque -là, et qu'il agira selon l'équité et la justice, il rendra ainsi la vie à son âme. "
60. I Corinthiens, III, 12-15 : " Si ensuite on
élève sur ce fondement un édifice d’or, d'argent,
ou de pierres précieuses ou si l'on en élève un de
bois, de foin, de paille, - l'ouvrage de chacun paraîtra enfin, et
le jour du Seigneur le fera connaître tel qu'il est ; car c'est par
le feu qu'il se manifestera ; et ce feu mettra à l'épreuve
l'ouvrage de chacun. - Celui qui aura bâti sur ce fondement un ouvrage
qui résiste à une telle épreuve en recevra la récompense.
- Celui dont l'ouvrage aura été consumé par le feu,
en souffrira de la perte : il ne laissera pas néanmoins d’être
sauvé, mais ce ne sera que comme en passant par le feu. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. Le concile de Trente, session V, canon 3 : " Si quelqu'un ose dire que le péché d'Adam, qui est un dans sa source, et qui étant transmis à tous par voie de propagation, et non d'imitation, devient propre à chacun, peut être effacé ou par les forces de la nature humaine, ou par quelque autre remède que par les mérites de Jésus-Christ Notre-Seigneur, l'unique médiateur, qui nous a réconcilié à Dieu par l'effusion de son sang, en se faisant ainsi notre justice, notre justification et notre rédemption ; ou si quelqu'un nie que ces mêmes mérites de Notre-Seigneur Jésus-Christ soient appliqués tant aux enfants qu'aux adultes, par le sacrement de Baptême quand il est conféré dans la forme prescrite par l’Eglise : qu'il soit anathème puisqu'il n'y a point d'autre nom sous le ciel, donné aux hommes, par lequel nous puissions être sauvés (Act., IV, 42) ; ce qui a donné lieu à cette parole : Voici l'agneau de Dieu, voici celui qui efface les péchés du monde (JEAN, I, 5) , et à cette autre : Vous tous qui avez été baptisés, vous avez été revêtus de Jésus-Christ (Gal., III, 27). "
2. Le même concile, session VI, chapitre 2 : " De là il est arrivé que le Père céleste, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui, tant avant la loi que sous la loi avait annoncé et promis Jésus-Christ son Fils à plusieurs saints
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patriarches, l'a envoyé aux hommes lorsque les temps ont été heureusement accomplis, pour racheter les Juifs qui étaient sous la loi, et faire embrasser la justice aux gentils qui ne la cherchaient pas, pour faire enfin de tous les hommes les enfants adoptifs de Dieu. C'est ce même Jésus-Christ que Dieu a proposé pour être, par la foi que nous aurions dans la vertu de son sang, la victime de propitiation pour nos péchés, et non-seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux du monde entier. "
3. Même session, chapitre 7 : " La cause méritoire de notre justification, c'est le Fils unique et bien-aimé de Dieu, Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui, lorsque nous étions ses ennemis, nous l'a mérité en souffrant pour nous sur la croix par un effet de l'amour extrême dont il nous a aimés et a satisfait pour nous à Dieu le Père. "
4. Ibidem, chapitre 8 : " Quand nous entendons dire à l’Apôtre que l'homme est justifié par la foi, et d'une manière gratuite (Rom., V, 22), nous devons prendre ces paroles dans le sens que l'Eglise catholique s'est toujours accordée à leur attacher, et dans lequel elle les a toujours expliquées aux fidèles, savoir, qu'il est dit de nous que nous sommes justifiés par la foi, parce qu'en effet la foi est le commencement de notre salut, qu'elle en est le fondement, qu'elle est la racine de toute justification, et que sans elle il nous est impossible de plaire à Dieu (Hébr., XI, 6) et d’être rangé au nombre de ses enfants ; ensuite, que c'est gratuitement que nous sommes justifiés, parce que rien de ce qui précède la justification, soit la foi, soit les œuvres ne peut nous mériter la grâce de la justification elle-même : car, si c'est une grâce, elle n'est donc pas l'effet de nos œuvres autrement, comme le dit le même apôtre (Rom., XI, 6), et cette grâce n'en serait plus une. "
5. S. AUGUSTIN, Tract. LXVII in Evangelium Joannis : " On ne saurait rejeter avec trop de force ceux qui, abusant de ce passage de l’Ecriture (In domo Patris mei mansiones multæ sunt, JEAN, XIV, 2), veulent s'en servir pour établir un lieu mitoyen, hors du royaume des cieux, qui ne soit ni le paradis ni l'enfer, pour y placer les enfants morts sans baptême qui sans ce sacrement ne peuvent prétendre à ce royaume céleste. Une foi semblable n'est point la vraie foi ; car ce n'est point là la véritable foi catholique (Cf. Traité de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, tome III, pag. 273-274). "
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6. S. LEON- LE-GRAND, Serm. IV de nativitate Domini : " Une foi véritable et sincère est le meilleur rempart qu'on puisse opposer (aux faux docteurs) ; cette foi incapable de changement, et à laquelle on ne peut rien ajouter, pas plus qu'on n'en peut rien retrancher. Si la foi n'est simple, dit l'Apôtre, ce n'est plus une véritable foi. Il n'y a qu'un Seigneur, qu'une foi et qu'un baptême. Il n'y a qu'un Dieu père de tous, qui est au-dessus de tous, qui étend sa providence sur tous, et qui réside en nous tous (Eph., IV, 5). Attachez-vous, mes frères à cette unité avec une fermeté inébranlable, afin de conserver la sainteté : que la foi vous aide à remplir tous les commandements du Seigneur : car sans la foi il est impossible de plaire à Dieu ; sans la foi il n'y a rien de saint, rien de chaste, rien qui ait vie. Le juste vit par la foi : celui qui la perd, en se laissant séduire par les artifices du diable, est mort, quoiqu'il paraisse vivant. Comme la foi est le principe de la justice, elle est aussi le principe de la vie éternelle, selon cette parole du Sauveur du monde : Or, la vie éternelle consiste à vous connaître vous qui êtes le seul Dieu véritable, et Jésus-Christ que vous avez envoyé (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, pag. 119-120). "
7. ORIGENE, Hom., lib. II in Leviticum : " Vous venez de voir combien il y a dans la loi de sacrifices pour les péchés ; voyez maintenant combien il y a de moyens institués dans l’Evangile pour les remettre. L'Evangile nous montre le premier de tous dans le baptême que nous recevons pour la rémission de nos péchés, le second, dans le martyre souffert pour Jésus-Christ ; le troisième, dans l'aumône. Car le Sauveur a dit lui-même : Donnez l’aumône de ce que vous avez et tout sera pur pour vous (LUC, XI, 41). Le quatrième moyen d'obtenir la rémission de nos péchés, c'est de pardonner à nos frères les offenses dont ils se seraient rendus coupables envers nous. Car voici à ce sujet les paroles de Notre-Seigneur : Si vous remettez du fond du cœur à vos frères ce qu'ils vous doivent, votre Père vous remettra à vous-mêmes vos péchés ; si au contraire vous ne leur pardonnez pas du fond du cœur, votre Père ne vous pardonnera pas non plus. Lui-même nous a appris à dire dans nos prières : Remettez-nous nos dettes, comme nous remettons les leurs à ceux qui nous doivent (MATTH., VI, 12). Le cinquième moyen d'obtenir la rémission de nos péchés, c'est de convertir quelque pécheur et de le retirer de son égarement. Car voici comme s'en explique
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la sainte Ecriture : Celui qui convertira un pécheur et le retirera de son égarement, sauvera une âme de la mort, et couvrira une multitude de péchés (JAC., V, 20). Le sixième, c'est un amour ardent pour Dieu, ainsi que Notre-Seigneur l'a dit lui-même : Je vous le dis en vérité, beaucoup de péchés lui sont remis, parce qu’elle a beaucoup aimé (LUC, VII, 47). L'Apôtre a dit aussi : La charité couvre la multitude des péchés (I PIERRE, IV, 8). Il est encore un septième moyen, quoique pénible autant que laborieux : c'est la pénitence, qui consiste en ce que le pécheur lave son lit de ses larmes, s'en repaisse la nuit et le jour, et ne rougisse pas de déclarer son péché au prêtre du Seigneur, et de lui en demander le remède, à l'exemple de celui qui a écrit ces paroles : J'ai dit : Je confesserai contre moi mon péché et vous m’avez pardonné le crime dont je m'étais rendu coupable (Ps. XXXI, 5). Par là on se conforme aussi à cet avertissement de l’apôtre saint Jacques : Quelqu'un est-il malade, qu'il appelle près de lui les prêtres de l’Eglise, et que ceux-ci lui imposent les mains et lui fassent des onctions avec de l'huile au nom du Seigneur, et la prière de la foi sauvera le malade, et s'il a des péchés ils lui seront remis. Vous donc, lorsque vous vous présentez pour recevoir le baptême, c'est comme si vous offriez un veau en sacrifice, car c'est dans la mort de Jésus-Christ que vous êtes baptisé. Etes-vous conduits au martyre, c'est un bouc que vous offrez alors, en portant un coup mortel au démon, auteur du péché. Lorsque vous faites l'aumône, et que vous vous laissez toucher de pitié pour les indigents, c'est la graisse des chevreaux dont vous chargez l'autel sacré. Si vous pardonnez du fond du cœur à votre frère l'offense dont il serait coupable envers vous, et qu'étouffant tout ressentiment contre lui, vous ne lui témoigniez que douceur, simplicité et franchise, soyez persuadé que vous avez immolé dans ce moment un bélier ou un agneau en sacrifice. Si, docile aux divines leçons et occupé nuit et jour à méditer comme une colombe et à étudier la loi du Seigneur, vous retirez quelque pécheur de son égarement qu'après lui avoir fait quitter les voies tortueuses du vice, vous le rappeliez à la simplicité de la colombe ; si vous le faites entrer dans la société des saints, et le portez ainsi à imiter la fidélité de la tourterelle ; sachez bien que vous avez offert en cela au Seigneur un couple de tourterelles ou deux petits de colombes. Si la charité, cette vertu plus grande que la foi et que l’espérance, vient à abonder dans votre cœur, en sorte que vous aimiez votre prochain, non-
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seulement comme vous-même, mais comme nous a appris à le faire celui qui a dit : Le plus grand amour qu'on puisse témoigner, c'est de donner sa vie pour ceux qu'on aime (JEAN, XV, 13) ; sachez alors que vous avez offert des pains de la plus fine fleur de farine, détrempés dans l'huile de la charité, dégagés de tout levain de malice et de corruption, purs azymes enfin de sincérité de vérité. Etes-vous dans les larmes et dans le deuil, plongez dans l'amertume de l'affliction, mortifiez-vous votre chair, travaillez-vous à la dompter par le jeûne et l'abstinence, pouvez-vous dire de vous-même que vous êtes dans la tribulation comme le métal dans la fournaise ; c'est un gâteau de pure farine, frite dans la poêle ou sur le gril, que vous aurez offert. De toutes ces manières, vous aurez offert, en suivant l'Evangile, des sacrifices plus véritables et plus parfaits, que tous ceux qu'Israël pouvait offrir en obéissant à la loi. "
8. S. AUGUSTIN, Lib. II contra Cresconium grammaticum, c. 12 : " Ceux qui vous quittent pour revenir à nous, ne font rien, pensez-vous, pour se purifier des actes de leur vie passés parce qu'ils ne se font pas baptiser de nouveau ; comme si les hommes ne pouvaient être purifiés de leurs erreurs qu'au moyen du baptême, tandis que (ce sacrement), qui est un, ne peut pas être réitéré. Mais on peut aussi être purifié par la parole de vérité et par celui qui a dit : Maintenant vous êtes purs à cause de la parole que je vous ai fait entendre (JEAN, XV, 5). On peut l’être encore par le sacrifice d'un cœur contrit et humilié et par celui dont il a été dit : Le sacrifice que Dieu demande est un cœur brisé par la douleur ; Dieu ne méprise point le cœur contrit et humilié (Ps. L, 19). On peut l'être de plus par les aumônes, et par celui qui a dit : Donnez l'aumône, et toutes choses seront pures pour vous (LUC, XI, /il). On peut être purifié enfin par la charité, qui surpasse tout le reste en excellence, et par celui qui a dit par l'organe de l'apôtre Pierre : La charité couvre une multitude de péchés (I PIERRE, IV, 8). Car avec la charité, tout se fait dans l'ordre ; sans la charité, tout se fait en pure perte. "
9. S. CHRYSOSTOME, Concione IV de Lazaro : " Si nous voulons échapper à ces châtiments terribles (du siècle à venir), à ce compte sévère que nous aurions à rendre alors, que chacun de nous rentre dans sa propre conscience, et que, déroulant à ses propres yeux sa vie entière, et entrant dans un détail circonstancié de toutes ses fautes, il se condamne lui-même, se punisse et se châtie lui-même, se demande compte lui-même
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de ses infidélités et que pour cela il s'excite, et à la componction, et au repentir, et aux larmes, et à la confession, et au jeûne, et à l'aumône, et à la continence, et à la charité, afin que par tous ces moyens nous puissions nous décharger ici-bas du poids accablant de nos péchés et passer avec confiance à une vie meilleure (Cf. S. Chrysostomi opera, t. Ier, p. 761-762, édit. de Montfaucon, page 953, édit. de Gaume). "
10. Le même, Hom. VII (al. 6) in Joannem : " Quittant donc cette vaine curiosité (qu'ont les hérétiques de scruter la foi), brisons nos cœurs par le repentir, pleurons nos fautes passées ainsi que le Christ nous l'a ordonné, pénétrons-nous de douleur au souvenir de nos crimes, demandons-nous à nous-mêmes un compte rigoureux de toutes nos infidélités passées, appliquons-nous à nous en purifier par la pénitence. Dieu a mis pour cela mille moyens à notre choix. Soyez, nous dit-il par son prophète, le premier à confesser vos fautes, et vous serez justifié (Is., XLIII, 26). Nous lisons de même dans les Psaumes : J'ai dit : Je confesserai contre moi-même mon injustice au Seigneur, et vous m'avez pardonné mon iniquité (Ps. XXXI, 5). Car rien n'est plus propre à atténuer nos fautes, que de nous les reprocher à nous-même et de les avoir sans cesse présentes à la mémoire. Il est cependant un autre moyen encore plus efficace que celui-là : c'est de n'avoir de ressentiment contre aucun de ceux qui nous ont offensé, et de leur pardonner à tous leurs offenses. Voulez-vous en apprendre un troisième ? Ecoutez Daniel vous dire : Rachetez vos péchés par des aumônes, et vos iniquités par la compassion exercée envers les pauvres (DAN., IV, 24). Disons encore un autre moyen, savoir, le recours fréquent à la prière, la persévérant dans les demandes que nous adressons au Seigneur. Nous trouverons aussi une puissante consolation avec l'expiation de nos péchés dans la pratique du jeûne pourvu que cette pratique ne nous fasse pas négliger le devoir de la charité fraternelle : soyons assurés que par-là nous éteindrons les foudres vengeurs de la colère de Dieu. Car, comme dit le Sage, l’eau éteint le feu le plus ardent, et l’aumône aussi résiste aux péchés (Ecclé., III, 33). Faisons-nous un devoir de mettre en pratique tous ces moyens. Si nous y sommes fidèles, si nous y sommes persévérants, si nous faisons de ces exercices l'occupation de toute notre vie, non-seulement nous effacerons nos fautes passées, mais encore nous nous assurerons
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les plus grands biens pour l'avenir. Car, par-là nous ôterons au démon toute occasion de nous assaillir et de nous faire succomber, soit à des tentations de volupté et de mollesse, soit à une fatale curiosité (Cf. S. Chrysostomi opera, t. VIII, p. 47, édit de Montfaucon ; page 54, édit. de Gaume). "
11. S. CYPRIEN, Lettre au peuple de Carthage, à l'occasion de cinq prêtres schismatiques du parti de Félicissime, Epist. XL (al. 59) : " Aujourd'hui ils méditent avec une astuce empoisonnée la ruine de ceux qui sont tombés, ils détournent des voies où se trouve la guérison tous ces combattants mutilés découragés par la tempête, et incapables dans leur faiblesse de prendre une résolution énergique qui les sauve ; ils suppriment les veilles, les prières, et toutes les œuvres de Dieu par lesquelles il faut fléchir assidûment le Seigneur, et invitent les coupables à une précipitation funeste par l'appât séducteur d'une paix perfide. Mêmes calculs, mêmes projets de ruine dans Félicissime et partisans. Ce qu'ils veulent, c'est que Dieu ne soit plus prié ; c'est que le parjure, après avoir renié Jésus-Christ, ne sollicite plus la miséricorde de celui qu'il a renié ; c'est que la pénitence ne succède plus à la faute ; c'est que l'évêque et le prêtre ne soient plus les ministres de la satisfaction ; c'est que, sur les ruines de l'autorité avilie de ceux-ci, on élève dans l’Eglise une doctrine nouvelle, sacrilège, contraire à la discipline de l'Evangile (Cf. Les Pères de l'Eglise, etc., trad. par M. de Genoude, t. V bis, pag. 112-113). "
12. Le même, lettre VIII (al. 7) au clergé et au peuple : " Je ne l'ignore pas, mes frères bien-aimés, pénétrés comme vous l'êtes de la crainte du Seigneur, vous lui adressez assidûment les plus ferventes prières. Néanmoins je viens faire un appel à votre religieuse sollicitude, et vous conjurer de désarmer le Seigneur, non plus seulement par des supplications, mais par des jeûnes, par des larmes, par des gémissements et par tous les moyens propres à le fléchir. . . "
" Les verges, les fléaux nous ont frappés parce que nous n'avons à présenter à Dieu ni bonnes œuvres pour lui plaire, ni satisfaction pour expier nos péchés. Implorons donc du fond du cœur et avec toute l'énergie dont nous sommes capables, la miséricorde de Dieu (Cf. Ibidem, pag. 42-43). "
13. Le même, Lett. XXVI (al. 28), Réponse des prêtres à Moïse,
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Maxime, etc., à saint Cyprien (Cf. Les Pères de l'Eglise, etc., trad. par M. de Genoude, t. V bis, pag. 84-85) : " Que devient la terreur des châtiments divins, si l'on accorde aux pécheurs un pardon si facile ? Au lieu de cela, il faut réchauffer doucement leur foi, la nourrir jusqu'au temps de sa maturité et leur apprendre à connaître, l’Evangile à la main, toute la gravité de leur faute. Loin de se prévaloir de leur nombre, qu'ils y trouvent plutôt un motif d plus pour nous de les réprimer Ce n'est pas la multitude insolente des coupables qui atténue la faute, mais plutôt la modération, la réserve, la patience, la discipline, l'humilité, la soumission qui attend et accepte le jugement à prononcer sur elle. Voilà quels sont les témoignages de la pénitence; voilà ce qui cicatrise les blessures ; voila ce qui relève les ruines d'un cœur qui s'est laissé abattre, ce qui étouffe les vapeurs encore brûlantes de nos péchés. Un médecin donne-t-il à un malade le même aliment qu’à un homme en bonne santé ? Non, sans doute ; au lieu de calmer les accès de la fièvre, une nourriture inopportune les exciterait davantage : le mal que la diète eût guéri en quelques jours, se prolonge par l'intempérance qui n'a pas su attendre. "
" Il faut donc que ces mains souillées par des sacrifices impies, se purifient par les bonnes œuvres : que ces bouches infectées par des viandes criminelles, soient lavées par les paroles d'un sincère repentir, et que le sanctuaire de l’âme se renouvelle dans le changement d'un cœur nouveau. Qu'on entende les gémissements multipliés du repentir. Que les larmes de la foi coulent incessamment de tous les yeux, afin que ces mêmes yeux qui ont contemplé criminellement les idoles, expient par des pleurs expiatoires la faute qu'ils ont commise. "
14. S. AUGUSTIN, Lib. L homiliarum, hom. L, c. 5, sive in libro de pænitentiæ medicinâ, c. 5 : " Ce n'est pas assez d'amender les mœurs, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
15. S. AUGUSTIN, Enchirid. ad Laurentium, c. 7 (al. 24 et 19) : " On ne doit pas se figurer qu'on puisse tomber tous les jours dans ces crimes qui excluent du royaume de Dieu ceux qui les commettent, pourvu qu'on les rachète tous les jours par des aumônes. Il faut commencer par changer de vie, et employer ensuite les aumônes pour obtenir de Dieu le pardon des péchés passés. Ce serait faire injure à Dieu, que de s'imaginer qu'on puisse acheter en quelque sorte de lui la liberté de pécher impunément. Dieu est assez miséricordieux pour effacer les péchés passés dans ceux
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qui s'efforcent de satisfaire comme il faut à sa justice ; mais il n'a accordé à personne la permission de pécher (Ecclé., XV, 21) (Cf. Traités choisis de saint Augustin, t. II, p. 401). "
16. S. CYPRIEN, De lapsis : " Il vous faut le prier sans relâche, passer tous vos jours dans le deuil, prolonger vos nuits dans les veilles et les larmes, consacrer tout le reste de votre vie aux gémissements de la pénitence, vous prosterner dans la poussière, vous rouler sur la cendre et le cilice. Après avoir perdu Jésus-Christ, ce riche et précieux vêtement de l'âme, il faut que vous fuyiez les vains ornements du siècle. Après avoir touché aux viandes du démon, il ne faut plus aimer que le jeûne. Il faut que vous vaquiez aux œuvres de justice qui ont pour effet de nous purifier de nos péchés et que vous fassiez de fréquentes aumônes, parce que l'aumône rachète les âmes de la mort. Rendez à Jésus-Christ ce que le démon lui a enlevé. Comment garder, et surtout comment chérir un patrimoine qui n'a servi qu’à vous séduire et à vous vaincre ? Il faut fuir les biens que vous possédez comme on fuirait un ennemi, un poignard ou un poison qui donne la mort. S'ils restent entre vos mains, qu'ils servent du moins à la rançon de vos crimes. Faites-en d'amples aumônes, employez-les toutes entières à guérir les plaies de vos âmes, placez-les à intérêt entre les mains de Dieu qui nous jugera. Voilà comment était vive la foi sous les Apôtres ; ainsi les premiers chrétiens accomplissaient-ils les préceptes de Jésus-Christ. Ardents, prodigues de leurs biens, ils les abandonnaient tout entiers aux Apôtres pour être distribué aux indigents, et cependant ils n'avaient pas à expier de semblables crimes. Je le déclare : si vous priez de tout votre cœur, si vous versez des larmes, si vous poussez les gémissements d'une sincère pénitence, si vous sollicitez le pardon de votre faute par les œuvres non interrompues de la miséricorde, vous pourrez trouver grâce devant celui qui a dit avec bonté (EZECH., XVIII et XXXIII) : Quand, vous tournant vers moi, vous gémirez alors vous serez sauvé et vous saurez en quel abîme vous étiez. Et encore (EZECH., XXXIII, 11) : Je ne veux pas la mort de celui qui meurt, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. Et le prophète Joël inspiré par le Seigneur lui-même, ne proclame-t-il pas ainsi la puissante bonté du Seigneur (JOEL, II, 13) : Revenez au Seigneur votre Dieu ; car il est doux, clément, patient, et prodigue de pardon, et il sait révoquer les arrêts de sa justice.
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Oui, le Seigneur peut faire grâce aux coupables et révoquer ses arrêts. Il peut pardonner miséricordieusement au repentir sincère qui se manifeste par la prière et par les œuvres. Il peut sanctionner ce que les martyrs ont demandé et ce que les prêtres ont fait en faveur de pareils suppliants. Il y a plus : si la colère divine est entièrement apaisée, l'outrage réparé et l'expiation surabondante, il peut se faire que le Seigneur, renouvelant les forces du vaincu, confie de nouveau à ses mains les armes de la foi. Je le vois déjà, cet athlète, instruit par la douleur, aguerri par la défaite, provoquer l'ennemi, et recommencer les combats du Seigneur. Le chrétien déchu qui satisfera ainsi à la justice de Dieu, et qui, puisant dans le repentir et la honte de sa chute même un nouvel accroissement de courage et de foi, se relèvera ainsi avec honneur par le secours divin, réjouira l’Eglise autant qu'il l'avait attristée et méritera non plus seulement le pardon, mais la couronne (Cf. Les Père de l’Eglise, etc., trad. par M. de Genoude, t. V bis). "
17. S. AUGUSTIN, Serm. XLI de Sanctis, qui est sermo quartus de animabus fidelium defunctorum : " Quiconque, sachant qu'il est engagé dans quelque péché mortel, etc. (comme dans le corps de la réponse). " Voir ce même passage cité plus au long au chapitre du sacrement de Pénitence, question IX, témoignage 15, tome III, page 113.
18. Le même, Lib. L homiliarum, hom. XVI, comme plus haut, du sacrement de pénitence question IX, témoignage 15, tome III, page 113.
19. Le même, Enchirid. ad Laurentium, c. 23 (al. LXVII, n. 18) : " Il y a des personnes qui croient que tous ceux qui ne renoncent pas à la foi en Jésus-Christ et qui, ayant été baptisé dans l’Eglise catholique, ne s'en séparent ni par le schisme ni par l'hérésie, seront sauvés en passant par le feu, quand même ils auraient persévérés jusqu’à la mort dans les plus grands crimes, sans les effacer par la pénitence ni les racheter par des aumônes. Ces personnes avouent bien que ces mauvais chrétiens seront punis longtemps à proportion de la grandeur de leurs crimes ; mais elles prétendent que le feu qui les brûlera ne sera pas éternel Pour moi, le jugement le plus favorable que je puisse porter de ceux qui, étant d’ailleurs catholiques, ont une pareille pensée c'est qu'ils se laissent tromper par un certain sentiment d'humanité et de compassion toute naturelle. Car
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assurément, si nous consultons sur ce point l’Ecriture sainte, nous y trouverons une doctrine bien différente. J’ai composé sur cette question un traité qui a pour titre : De la foi et des œuvres. J’ai prouvé comme je l'ai pu, avec l'aide du Seigneur, par l’autorité des saintes Ecritures, que la foi qui sauve n'est autre que celle que saint Paul a caractérisée très-clairement, quand il a dit qu'en Jésus-Christ ni la circoncision ni l'incirconcision ne servent de rien, mais que ce qui sert beaucoup c'est la foi qui opère par l’amour (Gal., V, 6). Si donc un chrétien fait de mauvaises actions au lieu de bonnes, sa foi alors, selon l'apôtre saint Jacques, est certainement une foi morte en elle-même (JAC, II, 17). Cet apôtre dit encore : Si quelqu'un dit qu'il a la foi, et qu'il n'ait pas de bonnes œuvres, sa foi pourra-t-elle le sauver (JAC., II, 14) ? Or, si un homme qui vit dans le crime devait, par cela seul qu'il a encore la foi, être sauvé en passant par le feu, et si c'était ainsi qu'il faudrait entendre ce mot de saint Paul : Il sera sauvé mais pourtant comme à travers le feu (I Cor., III, 15), il s'ensuivrait que la foi sans les œuvres pourrait sauver, et que ce qu'enseigne saint Jacques, apôtre comme saint Paul, serait faux. Saint Paul lui-même aurait parlé faussement, quand il a dit : Ne vous y trompez pas : ni les fornicateurs, ni les idolâtres ni les adultères ni les efféminés, ni les abominables, ni les voleurs, ni les avares, ni les ivrognes, ni les médisants, ni les ravisseurs du bien d'autrui, ne posséderont le royaume de Dieu (I Cor., VI, 9 et suiv.). Car enfin, si les chrétiens qui persévèrent dans ces crimes ne laissent pas d'être sauvés en considération de leur foi en Jésus-Christ, comment l’Apôtre aurait-il pu dire qu'ils n'entreront pas dans le royaume de Dieu (Cf. Traités choisis de saint Augustin, t. II, p. 394-396) ? "
20. Le même, Lib. de fide et operibus, c. 16, comme plus haut, chapitre du sacrement de Pénitence, question IX, témoignage 6, tome III, p. 107.
21. Le même, Lib. de octo quæstionibus
Dulcitii, quæstione I, ut ibidem.
Question II
Que doit-on penser au sujet des péchés légers ?
Ce qu'il faut en penser, c'est que ces sortes de péchés légers tels que les distractions, les paroles oiseuses, le rire immodéré
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et autres semblables, qu'on a coutume d'appeler fautes journalières ou vénielles et dont on ne peut être entièrement exempt dans cette vie, car, comme dit l'Apôtre nous manquons tous en bien des choses, quoiqu'ils ne donnent pas la mort à l'âme, et qu'ils semblent peu considérables, ne doivent pas cependant être commis sans scrupule, ainsi que nous l'avons déjà observé. Car tous ces péchés déplaisent à Dieu, ou, comme dit saint Paul, contristent le Saint-Esprit, troublent la conscience, refroidissent la charité, arrêtent le progrès des vertus, et conduisent à d'autres péchés plus graves ou à des tentations plus dangereuses. De là ces maximes du Sage : Celui qui ne tient pas compte des petites choses, tombera peu a peu : Celui qui aime le danger, périra dans le danger : Tel fait une seule faute, a qui il en coûte la perte de grands biens.
Préservons-nous donc, autant que possible, de ces taches qui ternissent toujours plus ou moins la beauté de l'âme, puisqu'il est écrit que rien de souillé n'entrera dans la Jérusalem céleste. Et si nous ne prenons soin de nous en purifier dans cette vie, elles feront notre tourment après notre mort, et ne pourront plus être expiée que par les flammes si à craindre du purgatoire. Car, bien que ces flammes ne doivent pas toujours durer, elles seront cependant, si nous voulons en croire saint Augustin, un supplice plus terrible que tout ce que les hommes peuvent endurer de maux ici-bas.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. JACQUEIS, II, 2 : " Nous faisons tous beaucoup de fautes. Si quelqu'un ne fait point de fautes en parlant, c'est un homme parfait. "
2. I JEAN, I, 8 : " Si nous disons que nous sommes sans péchés, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous. "
3. Ecclésiaste, VII, 21 : " Il n'y a point d'homme juste sur la terre, qui fasse le bien et qui ne pèche point. "
4. Proverbes, XXIV, 10 : " Le juste tombera sept fois et se relèvera mais les méchants seront précipités dans le mal. "
5. Psaume XXXI, 5-7 : " Je vous ai fait connaître mon péché et je n'ai point caché mon injustice. - J'ai dit : Je confesserai contre moi-même mon injustice au Seigneur, et vous m'avez remis l'impiété de mon péché. - C'est pour cette raison que tout homme fidèle vous priera dans le temps favorable. "
6. Ephésiens, IV, 30 : " N'attristez point le saint esprit de Dieu, dont vous avez été marqué comme d'un sceau pour le jour de la rédemption. "
7. Ecclésiastique, XIX et III ; Ecclésiaste, IX (comme dans le corps de la réponse).
8. Apocalypse, XXI, 27 : " Il n'y entrera rien de souillé, ni aucun de ceux qui commettent l'abomination ou le mensonge ; mais ceux-là seulement qui sont écrits dans le livre de vie de l'Agneau. "
9. Psaume XIV, 1-3 : " Seigneur, qui demeurera dans votre tabernacle ? ou qui reposera sur votre sainte montagne ? - Celui qui vit sans tache, et qui pratique la justice, - qui parle selon la vérité qu'il a dans le cœur qui n'a point usé de tromperies dans ses paroles. "
10. Ps. XXIII, 3-4 : " Qui est-ce qui montera sur
la montagne du Seigneur ? ou qui est-ce qui s'arrêter dans son lieu
saint ? - Celui dont les mains sont innocentes et dont le cœur est pur
; qui n'a point pris son âme en vain, ni fait un serment trompeur
à son prochain. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Enchirid. ad Laurentium, c. 78 : " Quant à ce qui fait la différence entre les péchés légers et les péchés graves, ce n'est pas d'après le jugement des hommes qu'il faut en juger.
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mais par celui de Dieu lui-même. Car nous voyons que les apôtres n'ont permis certaines choses que par indulgence. Tel est ce conseil que saint Paul donne aux personnes mariées : " Ne vous privez pas l'un l'autre de ce que vous vous devez, si ce n'est à concert et pour un temps, afin de vous appliquer plus librement à la prière et ensuite vivez ensemble comme auparavant, de peur que Satan ne prenne occasion de votre incontinence pour vous tenter. On pourrait croire en lisant ces paroles, que ce n'est pas un péché d'user du mariage sans avoir pour motif la génération des enfants, ce qui est la fin naturelle du mariage, et pour le seul plaisir charnel, ou en vue d'éviter par ce moyen le danger de pécher mortellement par la fornication, par l'adultère ou par quelque autre impureté qu'on ne saurait nommer sans honte, et où pourrait entraîner la passion que le démon excite en nous. On pourrait, dis-je, penser que l'usage du mariage dans de telles conditions serait entièrement exempt de pécher, si le même apôtre n'avait ajouté tout de suite aux paroles que je viens de citer : Je vous dis cela comme une chose qu'on vous pardonne, et non comme une chose qu'on vous commande (I Cor., VII, 5). Or, peut-on nier qu'il y ait du péché dans une chose pour laquelle un apôtre déclare que ceux qui la font ont besoin de pardon ? Il en est de même de ce que saint Paul dit encore dans cette épître : Il y en a parmi vous qui, ayant quelque affaire contre un autre, ne craignent point d'aller la plaider devant les infidèles au lieu de la faire juger par les saints (I Cor., VI, 1, etc.). Et un peu après : Si donc vous avez des contestations entre vous pour des intérêts temporels, prenez pour juges ceux qui sont les moindres dans l’Eglise. Je le dis à votre honte. Ne se trouve-t-il donc parmi vous aucun homme sage qui puisse juger entre des frères ? Faut-il qu'un frère ait des procès avec son frère ? Et faut-il qu'il porte sa cause devant des infidèles ? On pourrait encore penser que le mal que saint Paul reprend n'est pas d'avoir des procès avec quelqu'un, mais seulement d'en porter la discussion hors de l’assemblée des fidèles. Mais ce que l’Apôtre ajoute nous oblige à en juger autrement : C'est déjà assurément une faute, dit-il, que vous ayez des procès les uns avec les autres (I Cor., VI, 7). Et afin que ceux qui étaient dans ce cas ne s'excusassent pas sur la justice de leur cause, sur l'injustice qu'ils avaient à souffrir et qu'ils voulaient uniquement faire cesser par la sentence des juges, l'Apôtre prévient ces sortes de réflexion ou d'excuses en disant : Que ne souffrez-vous plutôt l'injustice ? Que ne vous laissez-
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vous plutôt enlever ce qui vous appartient ? Et par conséquent il en revient à ce que Notre-Seigneur nous dit lui-même : Si quelqu’un veut vous enlever votre robe, et vous intenter sur cela un procès, abandonnez-lui encore votre manteau (MATTH., V, 40). Et dans un autre endroit : Ne redemandez pas votre bien à celui qui l’a pris (LUC, VI, 30). Jésus-Christ a donc défendu ses serviteurs d'avoir des procès avec d'autres pour des choses temporelles (Selon les commentateurs tant anciens que modernes, le sens de ces paroles du Sauveur et de son apôtre se réduit à ce principe constant et invariable, qu'il faut toujours être prêt du fond du cœur à tout souffrir, à tout céder, à tout perdre, pour conserver la charité, qui est le plus grand de tous les biens, et que la plus juste défense cesse même d’être permise, dès qu'elle est enlevée de l'esprit de vengeance, de colère de haine ou d'avarice. On ne peut attribuer d'autres sentiments au saint docteur dans le texte dont il s'agit) ; et c'est en suivant cette doctrine, que l’Apôtre déclare qu'il y a du péché. En permettant cependant que ces procès entre des frères se terminent dans l’Eglise par le jugement des autres frères et en défendant au contraire très-sévèrement de les porter aux tribunaux des infidèles, il est évident que la permission qu'il donne est encore ici un pardon accordé aux faibles. C'est à cause de ces sortes de péchés et d'autres semblables, ou même moindres, dans lesquels on tombe, ou par paroles, ou par pensées, que l'apôtre saint Jacques reconnaît et déclare que nous péchons tous en bien des choses (JAC., III, 1). De là vient la nécessité où nous sommes de prier tous les jours, et de répéter souvent à Dieu : Pardonnez-nous nos offenses ; mais n'oublions pas avec quelle sincérité et quelle vérité nous devons ajouter aussi : Comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensé (Cf. Le Manuel de saint Augustin, dans l'ouvrage cité, tome II, pag. 412-416). "
2. Ibidem, c. 79 (al. 24 et 21) : " Il faut encore remarquer qu'il y a des péchés qu'on croirait fort légers, si l'autorité des saintes Ecritures ne nous apprenait qu'ils sont plus considérables qu'on ne pense. Qui croirait, par exemple, qu'on se rende digne de l'enfer en appelant son frère fou, si la Vérité elle-même ne l'avait déclaré ? Mais en même temps, elle nous présente un remède bien puissant pour guérir la plaie que ce péché fait à l'âme, en ajoutant, immédiatement après le précepte de la réconciliation fraternelle : Si vous présentez, dit Jésus-Christ, une offrande a l'autel, et que la vous vous souvenez que votre frère a quelque chose contre vous (MATTH., V, 23), et le reste que
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tout le monde sait. De même qui se persuaderait que c'est un si grand péché d'observer les jours, les mois, les années et les temps, comme le font ceux qui veulent commencer quelque ouvrage à certains jours, à certains mois, à certaines années et ne le veulent pas à d'autres, parce qu'ils s'imaginent, suivant des préjugés pleins de vanité et de fausseté, que ces temps-là sont heureux ou malheureux, si saint Paul ne nous faisait sentir la grandeur de ce mal par l'idée qu'il en avait lui-même ? Il tremble pour ceux qui se livraient à ces vaines observances : Je crains bien pour vous, leur dit-il, que ce ne soit en vain que j’aie travaillé au milieu de vous (Cf. Le Manuel de saint Augustin, dans l'ouvrage cité, tome II, pag. 416-417). "
3. Le même, Cité de Dieu, liv. XXI, c. 27 : " Mais quel est cet ordre de vie, quels sont ces péchés qui ferment les portes du royaume, sans toutefois qu'elles demeurent inflexibles aux prières des saints amis ? Il est très-difficile de le découvrir et très périlleux de le décider. Quant à moi, malgré tous les efforts que j’ai pu faire jusqu’à ce jour, je n'ai pas su parvenir à sonder ce mystère. Et peut-être nous demeure-t-il caché de peur que notre zèle à éviter tout péché ne se ralentisse. Car, si l'on savait quelles sont ces vicieuses habitudes qui, malgré leur persévérance fortifiée par l'oubli de tout amendement moral, permettent cependant de rechercher et d'espérer l'intercession des saints, la paresse humaine, s'enveloppant sans souci dans le tombeau de ses vices, ne demanderait à aucune vertu de l'en dégager en se reposant du soin de sa délivrance sur les mérites de ces amis obtenus au prix des aumônes du trésor d'iniquités Mais comme nous ignorons aujourd'hui quelle est la mesure d'iniquité qui obtient pardon malgré qu'on y persévère, le zèle de notre réforme intérieure redouble dans cette incertitude la vigilante assiduité de nos prières, et empêche notre ardeur de se ralentir dans le soin de nous faire de saints amis avec l'argent d'iniquité (Cf. La Cité de Dieu, etc., trad. par L. Moreau, t. III, p. 455). "
4. S. ISIDORE, Lib. II de summo bono, c. 18 : " Beaucoup peuvent passer leur vie sans commettre de crimes, mais ils ne le peuvent pourtant pas sans commettre de péché. Car de quelques vertus qu'on puisse être orné ici-bas, on ne saurait parvenir cependant à se rendre exempt de tout péché, ainsi que nous le déclare l'apôtre saint Jean par ces paroles : Si nous disons que
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nous sommes sans péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n'est point en nous (I JEAN, I, 8). Certaines actions semblent être des péchés qui n'en sont pas si elles se font avec une intention droite : tels sont les supplices infligés aux malfaiteurs par l'autorité publique, si l'on s'y propose non de satisfaire ses ressentiments, mais d'exercer la correction. Il y a en outre certains péchés légers que commettent tous les jours, tout en prenant soin de s'en corriger, ceux qui ne font encore que commencer à entrer dans la voie de la perfection, et dont se préservent comme de crimes ceux qui sont plus avancés dans cette même voie. Que ne doit-on donc pas faire pour se préservé des crimes énormes, puisque les hommes jaloux de leur perfection déplorent comme des fautes graves les fautes légères où il leur arrive encore de tomber ? Appliquons-nous à nous garantir non-seulement des péché considérables, mais encore des fautes légères. Car beaucoup de péchés légers en font un considérable comme des gouttes d’eau en se multipliant deviennent des fleuves immenses. Entassez des grains de sable, et vous aurez des montagnes. Des péchés qui ne sont rien dans un homme du peuple, sont des crimes dans un autre qui se trouve voué à un état de perfection. Car le péché est d'autant plus considérable que celui qui le commet est plus élevé au-dessus des autres. L'énormité de la faute croît en effet à proportion des mérites du coupable, et souvent ce qui se pardonne aux petits ne se pardonne pas aux grands. "
5. S. AUGUSTIN, De decem chordis, c. 11 : " Si les voluptés du siècle s'offrent à vous pour vous séduire, appliquez-vous aux œuvres de miséricorde, à la pratique de l’aumône, du jeûne et de la prière Car tels sont les moyens de vous purifier de vos péchés journaliers, péchés dont on ne saurait entièrement se préserver, à cause de la fragilité humaine. Ne vous rassurez pas sur ce que ce sont des péchés légers, mais craignez-les à cause de leur nombre. Faites-y attention, mes frères ce sont des péchés légers, ce ne sont pas de grands péchés : c'est-à-dire, que ce n'est pas ici un lion, dont une seule morsure suffirait pour donner la mort ; mais de simples insectes qui, quand ils sont nombreux, peuvent également la donner. Quelqu'un qu'on jetterait dans un nid de guêpes n'y perdrait-il pas la vie ? Ce ne sont pas là des animaux bien forts, sans doute ; mais notre nature est faible, et des cirons suffiraient pour nous donner la mort. Faites donc de même attention aux péchés légers, précisément parce qu'ils sont
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peu considérables en eux-mêmes et craignez-les parce qu'ils sont nombreux. Qui ne mépriserait un grain de sable ? Et cependant laissez beaucoup de ces grains entrer dans un navire, et ce navire sera submergé. Qu'est-ce qu'une goutte de pluie ? Et pourtant ce sont les pluies qui alimentent les fleuves, et qui dégradent les édifices. Gardez-vous donc bien de rien mépriser de tout cela. Mais vous direz peut-être : Eh ! qui peut vivre sans commettre de ces péchés ? Pour vous ôter cette excuse, Dieu qui connaît notre fragilité, nous a, dans sa miséricorde, fournit des remèdes dont il ne tient qu’à nous de nous servir. Quels sont ces remèdes ? Ils sont au nombre de trois : les aumônes, les jeûnes et les prières. Mais pour que vos prières elles-mêmes ne soient pas menteuses, il faut qu'il ne manque rien à vos aumônes. En quoi consiste la perfection de l'aumône ? En ce que vous donniez votre superflu à celui qui manque du nécessaire et que vous pardonniez à votre ennemi le tort qu'il vous fait. . . . . "
" J'appelle fautes journalières celles qui se commettent avec la langue presque sans qu'on s'en aperçoive, comme serait une parole dure, ou bien un rire immodéré ou toute autre peccadille de ce genre. On peut pécher même dans les choses permises. Le mari qui se donne des licences avec sa légitime épouse, pèche si exceditur concumbendi modus procreandis liberis debitus. Car le but du mariage, c'est la procréation des enfants ; les lois mêmes civiles le déclarent formellement, lorsqu'elles traitent de cet objet : du moment où l'acte conjugal dépasse ce but légitime, il y a péché mais ce péché pourra être expié par l'aumône. Il vous est bien permis de prendre des aliments ; mais si vous en prenez au-delà du besoin, vous péchez par-là même. Les péchés que je viens de dire sont de ces péchés qui se commettent tous les jours ; et ils cessent d'être légers dès-là qu'ils sont nombreux. Ils peuvent triompher de nous par leur nombre, s'ils ne le peuvent pas par leur grandeur. Nous disons que des péchés de cette nature peuvent être expiés par des aumônes journalières. Ne laissez donc passer aucun jour sans faire l'aumône. Faites attention que tous les jours aussi vous commettez mille péchés, je parle de ces péchés légers. "
6. Le même, In Ps. CXXIX : " Si vous vous mettez peu en peine de tel péché parce qu'il vous semble petit, qu'au moins la grandeur de la peine vous épouvante. Mais ce sont des fautes légères, dites-vous ; ce sont des fautes peu importantes : on ne peut s'empêcher d'y tomber dans cette vie. Rassemblez toutes
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ces fautes que vous appelez légères : vous verrez qu'elles feront une masse énorme. Chaque grain de blé est quelque chose de fort menu ; mais tous ces grains menus, pris à part, ne laissent pas de faire, mis ensemble, un tas considérable. Qu'est-ce qu'une goutte d'eau ? Cependant ces gouttes réunies suffisent pour remplir les fleuves et pour rompre toutes les digues (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. VI, p. 608). "
7. Le même, Serm. CCXLIV de tempore (Ce sermon, au jugement de Noël- Alexandre, ne saurait être de saint Augustin. V. Eccl. hist. sæc. V, p. 100) : " Vous direz peut-être : C’est bien là un péché, mais ce péché est léger. Nous ne disons pas non plus que ce soit un péché mortel ; mais cependant si on le commet fréquemment et qu'on ne le rachète pas par des jeûnes ou par des aumônes, l'âme ne s'en trouvera que trop souillée. Gardez-vous bien de vous tranquilliser sur vos péchés sur ce prétexte que ce sont des péchés légers. Car des gouttes de pluie amoncelées suffisent, et pour remplir les fleuves, et pour renverser des édifices et pour déraciner des arbres. Vous qui dites que ce sont des péchés légers, je voudrais bien savoir si vous consentiriez à ce qu'on fit à votre corps autant de petites plaies, ou à vos vêtements autant de déchirures ou de petites taches qu'il vous arriverait de fois de les commettre. Quoi ! vous ne pourriez souffrir qu'on fit à votre corps ces plaies, ou à vos vêtements ces déchirures ou ces taches, et vous ne craignez pas de les faire à votre âme ? "
8. Le même, Tract. XII in Joannem : " Les péchés qui paraissent petits en comparaison d'autres plus considérables ne laissent pas de donner la mort, si on les laisse se multiplier ; semblables en cela aux gouttes d'eau qui, quoique peu de chose en elles-mêmes, parviennent par leur multitude à former des fleuves entiers, ou aux grains de sable qui, en s'amoncelant, finissent par écraser ce qui les supporte. Notre âme ressemble encore à un vaisseau que sa sentine mal vidée ne ferait pas moins couler à fond qu'une vague impétueuse qui viendrait tout-à-coup le renverser. L'eau n'entre à la vérité que goutte à goutte dans la sentine ; mais à force d'entrer sans qu'on se donne la peine d'en vider le navire, elle finit par le submerger. Or, qu'est-ce que vider la sentine de notre âme, sinon empêcher au moyen des bonnes œuvres des gémissements et des jeûnes, des aumônes, du pardon des ennemis, que les péchés de chaque jour
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ne s'amassent dans notre âme en assez grand nombre pour l'accabler (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, tome Ier, pag. 421) ? "
9. S. CHRYSOSTOME, Hom. LXXXVII (al. 86) in Matthæum : " Il faut donc résister au mal dès ses premières approches ; car quand même le péché dont nous sommes tentés ne devrait en entraîner aucun autre après lui, nous ne devrions pas être pour cela sans inquiétude ; combien donc ne devons-nous pas en être plus occupés, assurés que nous sommes que ce péché négligé sera bientôt suivi de plusieurs autres ? Faisons donc tout au monde pour le détruire dès ses commencements. Car il faut considérer, non pas si ce péché est léger en lui-même mais si, pour peu qu'on le néglige, il ne deviendra pas le principe et comme la racine d'autres péchés plus considérables. "
" Vous allez être étonnés sans doute de ce que je vais dire : c'est que nous n'avons pas si grand besoin d'user de précaution contre les grands crimes, que contre ces fautes qui nous paraissent légères. Car nous sommes garantis contre les premiers par l'horreur même qu'ils nous inspirent, au lieu que la petitesse des autres est précisément ce qui fait que nous négligions de nous en défendre, et que nous soyons sans ardeur pour les combattre et les vaincre ; aussi, dès que nous sommeillons à leur égard, ne tardent-elles pas à s'aggraver. . . "
" Personne ne passe tout d'un coup de la vertu à l'extrême perversité. Car il y a au fond de l'âme une certaine pudeur naturelle, une certaine honte de commettre le mal, qui ne permet pas qu'on s'y livre sans remords dès le premier instant, et qu'on ne peut éteindre ou étouffer que par degrés. . . Voyez, en effet : que quelqu'un s'emporte à rire sans sujet, et qu'un autre l'en reprenne, un troisième viendra qui n'y trouvera point de mal, et qui dira que c'est une chose tout-à-fait innocente. Car qu'est-ce qu'un éclat de rire ? et quel mal peut-il s'ensuivre ? Et pourtant c'est de là que naissent les paroles bouffonnes, comme des paroles bouffonnes naissent les paroles déshonnêtes et de celles-ci les actions honteuses (Cf. Homélies de saint Jean Chrysostôme sur saint Matthieu, t. III). "
10. Le même, In epistolam I ad Corinthios, hom. VIII : " Pour donner la mort, il suffit d'un coup d'épée, pour perdre tout un édifice, il suffit d'une fente ouverte dans la muraille ; pour
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frapper un rameau de stérilité, il n'y a qu'a le détacher de sa racine. Ainsi les plus petites choses ne sont pas de petite conséquence, puisque les plus grandes en dépendent. Lors donc qu'il nous arrive de commettre une petite faute ou de tomber dans une légère négligence, que la légèreté de la faute ne nous porte pas à la négliger, puisque, négligée, elle deviendrait bientôt grande, de même qu'un vêtement qui commence à se rompre, s'il n'est pas promptement réparé, n’est bientôt plus susceptible de l’être ou comme un toit qui n'est pas entretenu avec soin, devient par son délabrement la cause de la ruine de toute une maison. Pénétrés de ces vérités, ne nous permettons donc jamais facilement des fautes même légères, de crainte que nous ne tombions dans de plus grandes (Cf. S. Joannis Chrysostomi opera, t. X, p. 70, édit. de Montfaucon ; pag. 82-83, édit. de Gaume). "
11. Le même, Serm. de levium peccatorum periculis : " N’appelons pas léger un mal qui, quand on le néglige, peut être mortel, ou tromper cruellement celui qui s'en fait un jeu, puisqu'il est écrit : Celui qui ne tient pas compte des petites choses, tombe peu à peu (Ecclé., XIX, 1). "
12. S. BERNARD, Serm. I de conversione S. Pauli : " Saint Paul a obtenu miséricorde parce qu'il a péché par ignorance, n'ayant pas encore la foi. Apprenez de là, mes frères, que Dieu, comme un juste juge, ne considère pas seulement ce que font les hommes, mais encore dans quelle disposition d'esprit ils le font, et prenez garde en conséquence de croire légères les fautes même les plus légères, dès-lors que vous les commettriez sciemment. Que personne ne dise en son cœur : Ce ne sont que des peccadilles, je ne me mettrai pas en peine de m'en corriger ; je puis sans conséquence fâcheuse rester dans l'habitude de ces péchés véniels. Un tel langage, mes frères serait celui de l'impénitence ; ce serait lé le blasphème contre l'Esprit-Saint, blasphème irrémissible. "
13. Le même, Tract. de præcepto et dispensatione : " Soit, appelons crime ce qui doit être puni du feu de l'enfer ; quel nom donnerons-nous à ce que la Vérité même nous déclare ne devoir être condamné que par le jugement (MATTH., V, 22) ? Nous ne disconviendrons pas qu'il ne s'agisse encore là de quelque chose de condamnable, puisque celui qui le fait mérite d'être condamné au moins de cette manière. Si c'est quelque chose de
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condamnable, c'est donc aussi un péché. Or, tout péché est un attentat commis contre quelque commandement divin. Mais contrevenir à un commandement, c'est ce qui s'appelle désobéir. Concluons de là que celui qui se met en colère contre son frère commet une désobéissance sans commettre pour cela de crimes. Voila donc un péché léger ou véniel même pour un religieux, et qui le constitue transgresseur, non d'un commandement humain, mais d'un commandement divin. A ce genre de transgression appartiennent les paroles vaines et frivoles, et en général toute parole, toute action et toute pensée oiseuses. Car rien de tout cela n'a lieu sans transgression de quelque commandement, et d'un commandement divin. Toutes ces choses en effet sont des péchés, et Dieu défend toute espèce de péchés ; et cependant on ne les considère pas comme des crimes, mais seulement comme des péchés véniels, à moins que, le mépris s’y joignant, on ne s'en fasse un jeu et une habitude, et alors ce n'est pas l'espèce du péché, mais la disposition de celui qui le commet, que l'on considère. Car l'orgueil que suppose le mépris ou l'obstination que renferme l'impénitence donne de la grièveté à la violation d'une prescription légère et convertit en crime de révolte ce qui ne serait qu'une simple transgression. "
14. S. AUGUSTIN, in Psalmum XXXVII, comme à l'article du sacrement de Pénitence question IX, témoignage 4, tome III, page 106.
15. Le même, Serm. XLI de Sanctis ; voir ibidem, témoignage 16, page 114.
16. S. GREGOIRE, in Psalmum III pænitentialem
; voir ibidem, témoignage 56, page 128.
Question III
Quels moyens avons-nous de nous purifier des péchés légers ?
Voici ceux que recommandait à cet effet, et que mettait en pratique l’Eglise des premiers siècles : s'accuser humblement de ses fautes, réciter l'oraison dominicale, se frapper la poitrine, et autres actes de cette espèce qui témoignent de notre piété envers Dieu, ou même qui peuvent avoir pour objet d'édifier le prochain, enfin les macérations corporelles pratiquées volontairement par motif de religion. Les personnes sages recourent à ces divers remèdes d'autant plus volontiers et avec d'autant plus d'ardeur, qu'elles ont une connaissance plus éclairée et plus approfondie
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de la sévérité avec laquelle la justice
divine punit les péchés des hommes. C'est ce que l'on comprendra,
si l'on médite seulement cette terrible sentence de Notre-Seigneur
: Je vous déclare que les hommes rendront compte, au jour du
jugement, de toute parole inutile qu'ils auront dite ; ou bien cette
parole de l'apôtre saint Pierre : C'est à peine si le juste
sera sauvé. C'est ce qui faisait dire à Job, malgré
la justice de ses œuvres et l'innocence de sa vie : Je tremblais à
chaque action que je faisais, sachant que vous ne pardonnez pas à
celui qui pèche. Et à l'apôtre Paul : C'est une
chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant. Si nous
nous jugions nous-mêmes, disait ailleurs le même apôtre,
assurément nous ne serions pas jugés. Heureux,
dit le Sage, l'homme qui est toujours dans la crainte ; mais celui qui
a le cœur dur tombera dans le mal.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. JOB, XXIV, 12 : " Ils (les hommes dont il est parlé dans les versets qui précèdent) font gémir les hommes dans les villes, et ceux qu'ils ont maltraités poussent leurs cris vers le ciel, et
Dieu ne laissera point ces désordres impunis. "
2. MATTHIEU, XII ; I PIERRE, IV ; JOB, IX ; Hébreux,
X ; I Corinthiens, XI, Proverbes, XXXVIII (comme dans
le corps de la réponse).
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Epist. CVIII (al. 265) ad Seleucianam : " Il y a encore la pénitence journalière de ceux-là même des fidèles qui vivent dans la piété et l'humilité. C'est celle qui nous fait
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dire tous les jours en frappant notre poitrine : Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés (MATTH., VI, 42). Car le pardon que nous demandons par-là n'est pas le pardon des péchés commis avant le baptême, puisque nous ne doutons point que Dieu ne nous les ait remis quand nous avons reçu ce sacrement ; c'est le pardon de ces péchés légers, à la vérité, mais fréquents, où la fragilité humaine nous fait tomber, et que nous devons avoir soin d'expier sans cesse, de peur que leur multitude ne nous accable, comme pourrait le faire quelque grand péché. Car qu'un vaisseau soit enfoncé ou par ces montagnes d'eau que forment les tempêtes, ou par ce qui y pénètre peu à peu au travers des fentes, et qu'on aura négligé de vider, c'est également faire naufrage. Voilà ce qui fait que nous devons recourir sans cesse aux remèdes que nous présentent le jeûne, l’aumône et la prière ; et lorsque dans ces saints exercices nous disons, Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons, nous faisons voir qu'il y a toujours quelque chose en nous qui a besoin de pardon ; nous humilions nos âmes par cet aveu de nos péchés et nous faisons en quelque manière une pénitence perpétuelle (Cf. Lettres de saint Augustin, t. VI, p. 590-591)
2. Le même, Enchirid. ad Laurentium, c. 71 (al. 24,19) : " A l'égard des fautes légères et de surprise, dont la vie d'ici-bas n'est jamais entièrement exempte, la prière journalière des fidèles en est le remède et l'expiation. J’appelle prière des fidèles l'oraison dominicale, parce qu'il n'appartient qu’à ceux qui, régénérés par l'eau et par l'esprit, sont devenus les enfants de Dieu, de s'adresser à lui en cette qualité et de lui dire : Notre Père qui êtes aux cieux. Je dis donc que cette prière, qui nous a été enseignée par Jésus-Christ, a la vertu d'effacer les fautes légères et journalières. Elle contribue même à effacer dans les fidèles les péchés les plus considérables, pourvu qu'ils y aient renoncés par une véritable pénitence et un sincère changement de vie. Mais pour que l'oraison dominicale ait un si précieux effet, il faut que, comme c'est avec vérité que nous disons : Pardonnez-nous nos offenses, parce qu'il y a toujours en nous des péchés à pardonner, ce soit aussi avec vérité que nous ajoutions : Comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ; c'est-à-dire, qu'il faut que nous fassions effectivement ce que nous disons, et que nous accordions du fond du cœur à ceux qui nous ont offensés
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le pardon qu'ils nous demandent, et qui est une sorte d'aumône (Cf. Le Manuel de saint Augustin, dans l'ouvrage cité, tome II, pag. 401-402). "
3. Ibidem, c. 72 : " Il y a plusieurs sortes d'aumônes dont la pratique nous aide à obtenir la rémission de nos péchés (Cf. Ibidem, p. 404). "
4. Le même, Tract. XII in Joannem, comme plus haut, question précédente, témoignage 8, page 263.
5. Le même, Serm. XLI de Sanctis, comme plus haut, chapitre du sacrement de Pénitence, question IX, témoignage 16, tome III, page 144.
6. Le même, Lib. XXI de Civitate Dei, c. 27 ; voir à la question précédente, témoignage 3, page 260.
7. Le même, Lib. L homiliarum, hom. 50, c. 8, et Lib. de pænitentiæ medicina, c. 2 : " Je n'en finirais pas, si je voulais faire l’énumération de toutes les fautes que chacun aperçoit et reprend en soi-même, s'il se regarde avec quelque attention dans le miroir des divines Ecritures. Bien que chacune de ces fautes ne porte pas un coup mortel à l'âme comme le feraient l'homicide, l'adultère et d'autres crimes énormes, toutes ensemble cependant, quand elles sont trop multipliées, sonnent la mort de l'âme, ou ternissent tellement sa beauté, qu'elle n'est plus digne des chastes embrassements du divin époux de cet époux que le Psalmiste contemplait en esprit comme le plus beau d'entre les enfants des hommes (Ps. XLIV, 3), si l'on ne prend soin de s'en purifier par une pénitence journalière. Si ce que je dis ici est faux, pourquoi nous frappons-nous tous les jours la poitrine ? Nous-mêmes, tout pontifes que nous sommes, lorsque nous officions à l'autel, nous nous frappons la poitrine comme les autres ; et de là vient aussi que nous y disons la prière qui nous est prescrite de même pour tous les jours de la vie : Remettez-nous nos dettes comme nous faisons à l’égard de ceux qui nous doivent. Car nous ne demandons pas à Dieu par ces paroles qu'il nous remette les péchés qui nous ont déjà été remis par le baptême, et que nous devons croire être effacés, si nous ne voulons pas remettre notre foi même en question ; mais ces paroles s'appliquent à nos fautes journalières pour lesquelles chaque fidèle ne cesse d'offrir en sacrifice, autant qu'il en a la faculté, ses aumônes, ses jeûnes et ses prières mêmes. "
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8. Le quatrième concile de Tolède, c. 9 : " Voici ce qu'a dit saint augustin : A l'égard des fautes légères, etc. " C'est le passage cité plus haut, témoignage 2, page 268.
9. S. PROSPER, in Sententiis Augustini, Sent. vel capite 210 : " Les péchés, soit petits, soit grands, ne peuvent rester impunis : car ils sont punis nécessairement ou par la pénitence que l'homme peut accomplir, ou par le jugement que Dieu prononcera tôt ou tard. Mais la colère de Dieu s'arrête si elle est prévenue par la conversion de l'homme. Car Dieu aime à pardonner ceux qui mettent leur confiance en lui, et à ne pas juger ceux qui se jugent eux-mêmes. "
10. S. AUGUSTIN, in Ps. LVIII ; voir plus haut,
article des péchés contre l'Esprit-Saint, question VII, témoignage
2, page 183.
Question IV
Suffit-il de s’abstenir du péché ?
La justice chrétienne qui fait actuellement l'objet de notre étude, présente deux parties, qu'elle nous recommande toutes deux comme également nécessaires par ces paroles : Evitez le mal, et faites le bien ; ou comme dit saint Paul : Ayez le mal en horreur et attachez-vous fortement au bien. Ce n'est donc pas assez, comme l'enseigne saint Augustin, de s'abstenir du mal, si l'on ne fait en outre ce qui est bien, et ce serait faire trop peu que de ne nuire à personne, si l'on ne s'appliquait de plus à se rendre utile.
C'est pourquoi, maintenant que nous avons terminé selon nos forces cette première partie de la justice, qui consiste à interdire le mal, il est à propos qu'avec l'aide de Dieu, nous traitions de même la seconde, qui a pour objet de nous guider dans la pratique du bien.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Psaume XXXVI et XXXIII ; Romains, XII ; I PIERRE, III : TOBIE, IV ; ISAIE I, Ecclésiastique, III ; Colossiens, III ; Ephésiens, IV (comme ci-dessus, question 1).
2. JACQUES, IV, 17 : " Celui-là est coupable de péché qui sachant le bien qu'il doit faire ne le fait pas. "
3. MATTHIEU, III, 10 : " La coignée est déjà placée à la racine des arbres ; tout arbre donc qui ne porte pas de bons fruits, sera coupé et jeté au feu. "
4. Id., VII, 19 : " Tout arbre qui ne porte pas
de bons fruits sera coupé et jeté au feu. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. BERNARD, Serm. XXXIV ex parvis sermonibus : " La perfection de la vie morale de l'homme se réduit tout entière à ces deux choses, s'éloigner du vice et s'adonner à la pratique de la vertu ; car il ne suffit pas de s'abstenir du mal, si en outre on ne fait le bien. De là ce que dit le Psalmiste : Evitez le mal, et faites le bien. Fuyons donc le vice, et embrassons avec ardeur le parti de la vertu. "
2. S. CHRYSOSTOME, in Psalmum IV, et hom. XVI in epistolam ad Ephesios ; S. AUGUSTIN, Serm. LIX de tempore. Voir ces passages rapportés plus haut, article des péchés, question I, témoignages 1, 2 et 3, pages 353 et 354.
3. S. AUGUSTIN, in Ps. XXXVI, Conc. III, sur ce verset, Declina à malo et fac bonum : " N'allez pas croire qu'il vous suffise de ne pas dépouiller un homme de l'habit qu'il porte. En ne lui ôtant pas son habit, vous accomplissez ce qui est dit : Détournez-vous du mal ; mais ne vous en tenez pas là, comme un arbre stérile ou desséché dans sa racine. Abstenez-vous d'enlever les vêtements à ceux qui les possèdent à la bonne heure ; mais donnez-en aussi à ceux qui en sont dépourvus. C’est là ce qui s'appelle éviter le mal et faire le bien. Mais quelle en sera ma récompense ? direz-vous. Celui à qui vous prêtez avec usure vous l’a déjà dit. Il vous donnera la vie éternelle, donnez-lui avec assurance. Ecoutez ce qui suit : Détournez-vous du mal, et faites le bien, et vous habiterez la terre dans toute la suite des siècles (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. II, p. 186). "
4. Le même, In Ps. XXXIII, sur ce verset, Diverte à malo et
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fac bonum : " C'est peu que vous ne nuisiez à personne, que vous ne donniez la mort à personne, que vous ne dérobiez point, que vous ne commettiez point d'adultères, que vous ne fassiez point de fraudes, que vous ne portiez point de faux témoignages : Détournez-vous du mal. Lorsque vous vous en êtes détourné, vous dites : Je suis en assurance ; j'ai fait tout ce qui était à faire ; je posséderai la vie ; je verrai mes jours heureux. Mais le Prophète ne dit pas seulement : Détournez-vous du mal ; il dit de plus : Faites le bien. Ce n'est pas assez pour vous de ne dépouiller personne ; revêtez encore celui qui est nu. En ne dépouillant personne, vous vous détournez du mal ; mais vous ne faites point le bien, si vous ne recevez aussi chez vous les étrangers restés sans asile. Abstenez-vous donc du mal de telle sorte, qu'en même temps vous fassiez le bien. "
5. S. PROSPER, Sententia LXXXVI, ex sententiis decerptis ex Augustino : " Il ne suffit pas, etc. (comme dans le corps de la réponse).
6. S. AUGUSTIN, Cité de Dieu, liv. XIX, c. 44 : " L'ordre à garder dans la concorde qu'on doit entretenir avec les autres hommes consiste premièrement à ne nuire a personne, ensuite à se rendre utile à qui on peut l'être à. "
SECTION II.
DU BIEN QU’IL S’AGIT DE FAIRE.
CHAPITRE I.
DES TROIS PRINCIPALE ESPECES DE BONNES ŒUVRES.
Article I. - DES BONNES ŒUVRES EN GENERAL.
Question I
Quels biens sont l’objet de la justice chrétienne ?
Telle est l’étendue de la justice chrétienne qu'elle comprend dans sa notion tout ce qui se fait conformément aux lois de l'honnêteté de la justice et de la piété dont elle nous inspire l'amour et la pratique. De là ces instructions que donnait l'Apôtre aux fidèles à qui il écrivait : Conduisez-vous d'une manière digne de Dieu, tâchant de lui plaire en toutes choses, portant les fruits de
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toutes sortes de bonnes œuvres : Ayez soin de faire le bien, non-seulement devant Dieu, mais aussi devant les hommes. Car tels sont les salutaires effets de notre vocation à la foi ; tels sont les heureux fruits que produit en nous la justice chrétienne, quand une fois elle nous a été acquise par les mérites de Jésus-Christ, comme l'atteste saint Pierre par ces paroles : Afin qu’étant morts au péché, nous vivions dans la justice. C'est-à-dire, et cette explication est de saint Paul : Afin que renonçant à l'impiété et aux désirs du siècle, nous vivions dans le monde présent avec tempérance, justice et piété. C'est aussi le sens de ces paroles de l’Evangile : Afin qu'étant délivrés des mains de nos ennemis, nous le servions sans crainte dans la sainteté et dans la justice, nous tenant en sa présence tous les jours de notre vie. Jésus-Christ, en effet, nous a rachetés de toute iniquité, et nous en a purifiés, pour se faire un peuple particulièrement consacré à son service, et fervent dans les bonnes œuvres. Car nous sommes son ouvrage, ayant reçu un nouvel être en Jésus-Christ pour croître dans la pratique des bonnes œuvres que Dieu a d'avance marquées à chacun de nous.
Telle est la doctrine constante de saint Paul ; tels sont les avis qu'il adresse à tous par rapport à l'observation et à la pratique de la justice chrétienne. Saint Jean n'est pas moins formel dans ces sages avertissements qu'il donnait aux fidèles de son temps : Mes petits enfants, que personne ne vous séduise : celui qui fait les œuvres de justice, c'est celui-là qui est juste, comme Jésus-Christ est juste. Celui qui commet le péché est enfant du diable. Ce sont aussi les enseignements de saint Jacques : L'homme est justifié par les œuvres, et non pas seulement par la foi. Car comme le corps est mort lorsqu'il est sans âme, ainsi la foi est morte lorsqu'elle est sans œuvres. Le même apôtre a dit encore : Celui qui considère exactement la loi parfaite, qui est celle de la liberté, et qui s'y rend attentif, celui-là, n'écoutant pas seulement pour oublier aussitôt, mais mettant en pratique ce qu'il écoute, trouvera son bonheur dans ce qu'il aura fait. Et certes, la pensée de saint Paul n'était pas différente, quand il écrivait : Ce ne sont pas ceux qui écoulent la loi qui sont justes devant Dieu, mais ce sont ceux qui gardent la loi qui seront justes.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Colossiens, I, 9-12 : " C'est pourquoi, depuis le jour où nous avons su ces choses, nous ne cessons de prier pour vous, et de demander à Dieu qu'il vous remplisse de la connaissance de sa volonté en vous donnant toute sagesse et toute intelligence spirituelle ; - afin que vous vous conduisiez d'une manière digne de Dieu, tâchant de lui plaire en toutes choses, portant des fruits de toutes sortes de bonnes œuvres et croissant dans la connaissance de Dieu ; - que vous soyez remplis de force par sa puissance à laquelle toute gloire appartient, et que vous ayez en toutes rencontres une patience et une douceur inaltérables, accompagnées de joie, - rendant grâces à Dieu le Père. "
2. Romains, XII (comme dans le corps de la réponse).
3. II Corinthiens, VIII, 21 : " Car nous tâchons de faire le bien avec tant de circonspection, qu'il soit approuvé non-seulement de Dieu, mais aussi des hommes. "
4. MATTHIEU, V, 16 : " Qu'ainsi luise votre lumière devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes œuvres et qu'ils glorifient votre Père qui est dans le ciel "
5. I PIERRE, II, 12, 15, 19-24 : " Conduisez-vous parmi les gentils d'une manière pure et sainte, afin qu'au lieu qu'ils médisent de vous comme si vous étiez des méchants, les bonnes œuvres qu'ils vous verront faire les portent à rendre gloire à Dieu, au jour où il daignera les visiter. Car la volonté de Dieu est que par votre bonne vie vous fermiez la bouche aux hommes
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ignorants et insensés. Car ce qui est agréable à Dieu, c'est qu'en vue de lui plaire, nous endurions les peines qu'on nous fait souffrir avec injustice. - Aussi quel sujet de gloire aurez-vous, si c'est pour vos fautes que vous enduriez les soufflets ? Mais si, en faisant du bien, vous souffrez avec patience, c'est là ce qui est agréable à Dieu. Car c'est à quoi vous avez été appelé, puisque Jésus-Christ même a souffert pour nous, vous laissant son exemple, afin que vous marchiez sur ses pas ; - lui, qui n'avait commis aucun péché et de la bouche duquel nulle parole trompeuse n'est jamais sortie. - Quand on l'a chargé d'injures, il n'a point répondu par des injures : quand on l'a maltraité, il n'a point fait de menaces ; mais il s'est livré entre les mains de celui qui le jugeait injustement. C'est lui qui a porté nos péchés en son corps sur la croix, afin qu'étant morts au péché nous vivions pour la justice : c'est par ses meurtrissures que vous avez été guéris. "
6. Tite, II, 11-14 : " Car la grâce de Dieu notre Sauveur s'est manifestée à tous les hommes, et elle nous a appris à renoncer à l'impiété et aux désirs du siècle, et vivre dans le monde présent avec tempérance, justice et piété. Etant toujours dans l'attente de la béatitude que nous espérons, et de l'avènement glorieux du grand Dieu, notre Sauveur Jésus-Christ, - qui s'est livré lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité et de nous purifier, pour se faire de nous tous un peuple particulièrement consacré à son service, et fervent dans les bonnes œuvres. "
7. LUC, I, 70-75 : " Selon qu'il avait promis par la bouche de ses saints prophètes, qui ont été dans les siècles passés - de nous délivrer de nos ennemis, et des mains de tous ceux qui nous haïssent - pour accomplir ses desseins de miséricorde envers nos pères, et montrer qu'il se souvient de son alliance sainte ; - de ce serment par lequel il a juré à Abraham notre père de nous accorder cette grâce, - qu'étant délivrés des mains de nos ennemis, nous le servirions sans crainte - dans la sainteté et la justice, marchant en sa présence tous les jours de notre vie. "
8. Ephésiens, II, 10 (comme dans le corps de la réponse).
9. I JEAN, III ; JACQUES I et II, et Romains, II (comme dans le corps de la réponse).
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TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. CHRYSOSTOME, in Psalmum IV, passage rapporté plus haut, article Péchés, question 1, témoignage 2, tome III, page 353.
2. Le même, in Psalmum XIV: " La justice suppose la réunion d'un grand nombre de vertus, et une seule de ces vertus ne peut pas plus constituer la justice, qu'une seule planche ne peut faire un navire, et une seule pierre une maison. "
3. Le même, Hom. XXIII in Genesim, sur ces paroles : Noe homo justus : " Voici un autre titre d'éloge encore plus relevé que tous les autres : Noé était juste. Sous ce nom de juste, l'écrivain sacré comprend l'assemblage de toutes les vertus. Car nous avons coutume de qualifier ainsi ceux à qui il ne manque aucune des qualités qui font l'homme vertueux. "
4. S. BERNARD, Serm. II de Resurrectione Domini : " Vivons avec sobriété, dit l’Apôtre, avec justice et avec piété. Ces trois points sont indispensables à une bonne conduite. Nous devons le premier à nous-mêmes, nous devons le second au prochain, et le troisième à Dieu. Celui qui se rend coupable de fornication pèche en effet contre son propre corps, le dépouille de sa gloire et le couvre de honte et d'infamie ; il dégrade un membre de Jésus-Christ et en fait un suppôt de prostitution. Encore n'est-ce pas seulement ce vice que je vous dis d'éviter ; il inspire assez d'horreur par lui-même mais je vous recommande de vous abstenir de tout plaisir de la chair. Cherchez donc avant tout cette continence que vous vous devez à vous-même car personne ne vous touche de plus près que vous ; ajoutez-y la miséricorde que vous devez au prochain, parce que vous devez être sauvé avec lui ; enfin la persévérance que vous devez à Dieu, puisque c'est par lui seul que vous pouvez être sauvés. " Tous ceux, dit saint Paul, qui veulent vivre saintement en Jésus-Christ souffriront la persécution. " Et ailleurs : C'est à travers des tribulations sans nombre qu'il nous faut arriver au royaume des cieux. Craignez donc de périr par l'impatience, ne reculez devant aucune souffrance, pour l'amour de celui qui le premier a enduré d'indicibles tourments à cause de vous, et qui vous tiendra compte de votre patience, comme l'assure le Prophète en disant : La patience des affligés ne sera pas frustrée pour toujours. "
5. S. AUGUSTIN, Præfat. in Ps. XXXI : " Que dit l’Ecriture ? C'est-à-dire, pour quelle cause l'Ecriture dit-elle qu'Abraham a
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été justifié ? Abraham crut en Dieu, et sa foi lui fut imputée à justice. C'est donc à cause de sa foi qu’Abraham a été justifié. "
" Mais que celui qui entend ici que ce n'est pas pour ses œuvres qu'Abraham a été justifié, et qu'il ne l'a été qu'à cause de sa foi, se garde bien de tomber dans un autre abîme. Vous voyez, dira quelqu'un, que c'est par sa foi, et non par ses œuvres qu'Abraham a été justifié. Je n'ai donc qu'à vivre comme il me plaira, puisque, quand même je ne ferais aucune bonne œuvre, il me suffit que je croie en Dieu, et que ma foi toute seule me sera imputée à justice. Si un homme a formé cette pensée et qu'il ait résolu de s'y tenir, il est tombé, il est plongé dans l'abîme. Que s'il ne fait encore que de commencer à l’avoir, et qu'il soit dans l'irrésolution sans être déterminé à la suivre, il est dans un grand péril. Mais la sainte Ecriture et sa véritable intelligence non-seulement préserve celui qui est dans ce danger de tomber dans le précipice, mais peut encore en retirer celui qui y serait déjà tombé. Je réponds donc, comme pour contrebalancer ce que dit l'Apôtre, et je soutiens d’Abraham lui-même ce que nous trouvons aussi écrit dans l'épître d'un autre apôtre, dans le dessein qu'a eu ce dernier de corriger l'erreur de quelques personnes qui entendaient mal ces paroles de notre apôtre. "
" Saint Jacques, en effet, parlant dans son épître contre ceux qui s'exemptaient eux-mêmes de faire aucunes bonnes œuvre en s'appuyant uniquement sur le mérite de leur foi, relève les œuvres d'Abraham comme saint Paul avait relevé sa foi, sans que pour cela ces deux apôtres soient contraires l'un à l'autre. Saint Jacques rapporte de cet illustre patriarche une action qui est connue de tout le monde : Abraham, dit-il, offrit son fils à Dieu en sacrifice. C'était une action admirable ; mais aussi avait-elle la foi pour principe. J'admire l'œuvre qui est comme un édifice superbe ; mais j'aperçois la foi, qui en est le fondement. J'admire ce fruit d'une si grande beauté, qui est la bonne action ; mais je ne puis pas méconnaître la foi, qui en est la racine. Si Abraham en se portant à cet acte n'avait pas eu une foi droite et sincère, quelque excellente qu'elle pût être en elle-même son action, elle ne lui aurait servi de rien. Si au contraire Abraham, content d'avoir la foi, avait dit en lui-même après l'ordre que Dieu lui avait donné d'immoler son fils : Je n'en ferai rien, et je n'en croirai pas moins que Dieu me sauvera malgré ce peu de compte que je tiens de ses Ordres, sa foi alors sans œuvres qui l'accom-
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pagnassent eut été une foi morte, et elle serait demeurée aride et stérile comme une racine sans fruit. "
" Que dirons-nous donc ? Qu'il faut que la foi précède toutes nos actions, c'est-à-dire qu'avant la foi on n'est capable d'aucune bonne œuvre (qui puisse être méritoire). Car tout ce que l'on fait même de bien avant d'avoir la foi, quelque louable que cela puisse être aux yeux des hommes, est sans mérite (devant Dieu). C'est, à mon sens, comme les mouvements qu'on se donnerait, comme une course rapide qu'on ferait hors de la voie qui seule pourrait conduire au but. Que personne donc ne compte pour quelque chose les bonnes œuvres qu'il aurait faites avant d'avoir la foi : la foi y manquait ; ce n'étaient donc pas de bonnes œuvres. Car c'est l'intention qui fait la bonté de l'œuvre, et c'est la foi qui rend l'intention droite (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. Ier, p. 469-471). "
6. Le même, Lib. de fide et operibus, c. 44 (comme plus haut, article des péchés contre le Saint-Esprit), question III, témoignage 6, page 141.
7. S. CHRYSOSTOME, Hom. II in Genesim : " Appliquez-vous
avec le plus grand soin à faire concorder la régularité
de votre vie avec la pureté de votre croyance. . . Car la foi
sans les œuvres est une foi morte, comme les œuvres sans la foi sont des
œuvres mortes. Nous aurons beau professer une doctrine saine : si notre
vie elle-même est désordonnée, la doctrine que nous
professerons ne nous servira de rien ; et d'un autre côté,
quand même notre vie serait régulière, si notre foi
était défectueuse, la régularité de notre vie
ne serait pas non plus pour nous une recommandation suffisante (Cf. S.
Joannis Chrysost. opera, t. IV, p. 15, édit. de Montfaucon ;
page 17, édit. de Gaume).
Question II
Quels sont les fruits que produisent les œuvres de la justice chrétienne ?
Les œuvres de la justice chrétienne produisent quantité de fruits admirables, tant pour la vie présente que pour la vie future. Car ici revient cette maxime de saint Paul : La piété est utile à tout, et c'est d’elle qu'ont été promis, et les biens de la vie présente, et ceux de la vie future. Nous lisons de même ailleurs : Le fruit des actes vertueux est plein de gloire.
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Car premièrement ces œuvres, lorsqu'elles ont pour principe une foi vive, c'est-à-dire, une foi animée par la charité, ne sont pas seulement des signes de notre vocation chrétienne, mais nous confirment de plus dans cette vocation, ou nous la rendent certaine. C'est ce qui a fait dire à l'apôtre saint Pierre, dont toutes les paroles d'ailleurs sont une continuelle exhortation aux bonnes œuvres : Efforcez-vous de plus en plus, mes frères, d’affermir votre vocation et votre élection par la pratique des bonnes œuvres ; car en agissant de cette sorte, vous ne pècherez jamais.
En second lieu, comme l'enseigne aussi le grand apôtre, ces œuvre augmentent la grâce en ceux qui ont déjà la foi, et achèvent leur sanctification : et saint Jacques de son côté ne craint pas d'affirmer que la foi, en même temps qu'elle relève le mérite des œuvres, est à son tour amenée à sa perfection par ces œuvre mêmes.
Troisièmement, elles produisent la sécurité de la bonne conscience, et encouragent à prier Dieu avec la juste confiance de tout obtenir de lui. Car il est écrit : L'aumône sera le sujet d'une grande confiance devant le Dieu suprême pour tous ceux qui l'auront faite. Il est encore écrit : Mes bien-aimés, si notre cœur ne nous condamne point, nous pouvons approcher de Dieu avec confiance. Et quoi que ce soit que nous lui demandions, nous le recevrons de lui, parce qu’alors nous gardons ses commandements, et que nous faisons ce qui lui est agréable. Nous en voyons un exemple dans le roi Ezéchias, qui, fort de sa bonne conscience, fit la prière suivante, qui fut accueillie et obtint l'assentiment de Dieu lui-même : Souvenez-vous, je vous prie, Seigneur, que j’ai marché devant vous dans la vérité et avec un cœur parfait, et que j'ai toujours fait ce qui était bon et agréable à vos yeux.
Enfin, ces œuvres ont pour résultat de nous faire obtenir à la fin de nos jours, pour avoir travaillé à la vigne du Seigneur, le denier promis par le père de famille, ou la vie éternelle et la couronne de justice, que nous sommes assurés de recevoir en récompense, grâce à Jésus-Christ, si nous gardons ses commandements dans l'unité de son Eglise. Car voici les paroles que nous lisons dans l’Evangile : Appelez les ouvriers, et payez à chacun son salaire. David avait dit d'avance : Votre serviteur les garde (les commandements de Dieu) avec soin, et on trouve en les gardant une grande récompense. Il disait encore : J'ai porté mon cœur à accomplir éternellement vos ordonnances pleines de justice, à cause de la récompense que vous me faites espérer. Saint Paul
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disait de même : J’ai bien combattu, j’ai achevé ma course, j'ai gardé la foi : il ne me reste qu’à attendre la couronne de justice qui m’est réservée, que le Seigneur, comme un juste juge, me rendra en ce grand jour, et non-seulement à ,moi, mais encore à tous ceux qui aiment son avènement. Enfin, voici les paroles de Jésus-Christ lui-même : Si vous voulez entrer dans la vie, gardez les commandements. . . Ceux qui auront fait le bien sortiront des tombeaux pour ressusciter à la vie ; mais ceux qui auront fait le mal en sortiront pour ressusciter à leur condamnation. . . Celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans le ciel, c’est celui-là qui entrera dans le royaume céleste. "
Tout cela fait bien voir combien il nous importe à tous, si nous désirons la vie éternelle, de nous rendre dociles à ces divins oracles : Que celui qui est juste, se justifie encore ; et que celui qui est saint, se sanctifie encore. Je m'en vais venir bientôt, et j'ai ma récompense avec moi pour rendre à chacun selon ses œuvres. . . Ne nous lassons donc point de faire le bien, puisque, si nous ne perdons point courage, nous en recueillerons le fruit en son temps.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. I Timothée, IV, 8 : " La piété, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
2. Proverbes, XI, 17-18 : " L'homme miséricordieux fait du bien à son âme ; mais celui qui est sans entrailles trouble l’économie de son corps même. - L’œuvre du méchant trompera ses espérances : la récompense est assurée, au contraire, à celui qui sème les œuvres de justice. "
3. II Chroniques, XV, 1-2, 7 : " Alors Azarias, fils d'Obed fut rempli de l'esprit de Dieu. - Il alla au-devant d'Asa, et lui dit : Ecoutez-moi Asa, et vous tous, Juda et Benjamin : le Seigneur vous a assistés, parce que vous vous êtes tenus attachés à lui. - Si vous le cherchez, vous le trouverez ; mais si vous le quittez, il vous abandonnera. Prenez donc courage ; que vos mains ne s’affaiblissent point, et votre persévérance sera récompensée. "
4. MATTHIEU, X, 41-42 : " Celui qui reçoit un prophète en qualité de prophète, recevra la récompense du prophète ; celui qui reçoit le juste en qualité de juste, recevra la récompense du juste. - Et quiconque donnera seulement un verre d'eau froide à boire à l'un de ccs plus petits en sa qualité de l'un de mes disciples, je vous le dis en vérité, il ne sera point privé de sa récompense. "
5. Id., XIX, 24, 29 : " Si vous voulez être parfait, allez, vendez ce que vous avez, et donnez-le aux pauvres, et vous aurez un trésor dans le ciel ; venez et suivez-moi. - Et quiconque aura quitté pour moi sa maison, ou ses frères ou ses sœurs, ou son père, ou sa mère, ou sa femme, ou ses enfants, ou ses terres, en recevra le centuple, et aura pour héritage la vie éternelle. "
6. Genèse, XII, 1-3 : " Le Seigneur dit ensuite à Abraham : Sors de ton pays, du milieu de ta parenté, et de la maison de ton père, et viens en la terre que je te montrerai. - Je ferai
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sortir de toi un grand peuple ; je te bénirai, je rendrai ton nom célèbre et tu seras béni. Je bénirai ceux qui te béniront et je maudirai ceux qui te maudiront ; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi. "
7. Ibid., XV, 4 : " Après cela, le Seigneur parla à Abraham dans une vision, et lui dit : Ne crains point, Abraham ; je suis ton protecteur, et je serai ta récompense infiniment grande
(autr. selon l’hébreu, ta récompense sera de plus en plus grande). "
8. Ecclésiastique, XII, 2 : " Faites du bien au juste, et vous en recevrez une grande récompense, sinon de lui, au moins du Seigneur. "
9. Id, XXXVI, 18 : " Donnez à ceux qui espèrent en vous la récompense qui leur est promise, afin que vos prophètes soient trouvés fidèles ; exaucez les prières de vos serviteurs. "
10. JEREMIE, XXXI, 6 : " Voici ce que dit le Seigneur : Que votre bouche étouffe ses plaintes, et que vos yeux cessent de verser des larmes, parce que vos œuvres auront leur récompense, dit le Seigneur, et que vos enfants reviendront en liberté à la terre ennemie. "
11. Sagesse, III, 15 : " Le fruit des actes vertueux, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
12. Ibid., X, 17 : " La sagesse a rendu aux justes la récompense de leurs travaux ; elle les a conduits par des voies admirables ; elle les a abrités pendant le jour, et a été pour eux une étoile brillante pendant la nuit. "
13. MALACHIE, III, 13-14, 17-18 : " Vos paroles s'élèvent contre moi de plus en plus, dit le Seigneur. - Et vous répondez : Qu'avons-nous dit contre vous ? Vous avez dit : Vanité c'est que de servir Dieu : qu'avons-nous gagné à garder ses commandements, et pour avoir marché dans l'attitude de la crainte devant le Seigneur des armées?. . . Et dans le jour où je dois agir, ils seront, dit le Seigneur des armées, le peuple que je me réserve ; et je les traiterai avec indulgence, comme un père traite son propre fils quand il le trouve obéissant à tous ses ordres. - Vous changerez alors de sentiment, et vous saurez faire le discernement entre le juste et l'injuste, entre celui qui sert Dieu et celui qui ne le sert point. "
14. I Corinthiens, XV, 58 : " Ainsi, mes chers frères, demeurez fermes et inébranlables, et travaillez toujours de plus en plus à l’œuvre de Dieu, sachant que votre travail ne restera pas sans récompense devant le Seigneur. "
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15. Hébreux, IV, 10-13 : " Car Dieu n'est pas injuste, pour qu'il puisse oublier vos œuvres et la charité que vous avez montré pour la gloire de son nom y en rendant aux saints des services pénibles, comme vous le faites encore aujourd'hui. Or, nous souhaitons que chacun de vous fasse paraître jusqu'à la fin le même zèle s'assurer les biens qui sont l'objet de notre espérance, - et que, bien loin de vous ralentir, vous vous rendiez les imitateurs de ceux qui par leur foi et leur patience sont devenus les héritiers des promesses. - Car Dieu, dans la promesse qu'il fit à Abraham, n'ayant personne de plus grand que lui par qui il pût jurer, jura par lui-même. "
16. Galates, V, 5 : " Mais nous, c'est par l'esprit et en vertu de la foi que nous espérons recevoir la justice. "
17. I PIERRE, I (comme dans le corps de la réponse).
18. II Corinthiens, IX, 10-14 : " Dieu donc, qui donne la semence à celui qui sème, vous donnera le pain dont vous avez besoin pour vivre, et il multipliera ce que vous avez semée, et il fera croître de plus en plus les fruits de votre justice, - qu'étant riches en tout, vous exerciez avec une charité sincère toutes sortes de bonnes œuvres, et que nous puissions en rendre à Dieu de continuelles actions de grâces. - Car ces offrandes que nous sommes chargés de recueillir non-seulement suppléent aux besoins des saints, mais contribuent encore beaucoup à la gloire de Dieu, par le grand nombre d’actions de grâces qu'elles nous portent à lui rendre : - puisque les saints, en recevant par notre ministère ces preuves de votre libéralité, glorifient Dieu de la soumission que vous témoignez à l'évangile de Jésus-Christ, et de la bonté avec laquelle vous faites part de vos biens, soit à eux, soit à tous les autres ; - et ils témoignent l'amour qu'ils vous portent, par les prières qu'ils font pour vous, et par le grand désir qu'ils ont de vous voir, à cause de la grâce singulière que vous avez reçu de Dieu. "
19. Colossiens, I, 10-11 : " Afin que vous vous conduisiez d'une manière digne de Dieu, tâchant de lui plaire en toutes choses, portant des fruits de toutes sortes de bonnes œuvres, et croissant dans la connaissance de Dieu ; - que vous soyez remplis de force par la puissance de sa gloire, et que vous montriez en toutes rencontres une patience et une douceur inaltérables accompagnées de joie. "
20. I PIERRE, II, 1-2 : " Vous, étant donc dépouillés de tout ce qui peut avoir forme de malice, de tromperie, de dissimula-
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tion, d'envie et de médisance, - comme des enfants nouvellement nés désirent ardemment le lait spirituel et pur, qui vous fera croître pour le salut. "
21. I Corinthiens, VII, 1 : " Ayant donc reçu de telles promesses, mes très-cher frères, purifions-nous de tout ce qui peut souiller le corps et l'esprit, menant à bonne fin l'œuvre de notre sanctification dans la crainte de Dieu. "
22. Romains, VI, 22 : " Mais maintenant que vous êtes affranchis du péché et devenus les serviteurs de Dieu, le fruit que vous en retirez est votre sanctification, et la fin qui en résultera pour vous sera la vie éternelle. "
23. Apocalypse, XXII, 11 : " Que celui qui commet l'injustice, la commette encore ; que celui qui est juste, se justifie encore ; et que celui est saint, se sanctifie encore. "
24. Ecclésiastique, XVIII, 22 : " Ne cessez point de croître dans la justice jusqu'à la mort, parce que la récompense de Dieu demeure éternellement. "
25. JACQUES, II, 20, 21, 22 : " Mais voulez-vous savoir, ô homme vain, que la foi sans les œuvres est morte ? -Notre père Abraham ne fut-il pas justifié pour ses œuvres lorsqu'il offrit son fils Isaac sur l'autel ? - Ne voyez-vous pas que sa foi concourait avec ses œuvres et qu'elle fut consommée par ses œuvres ? "
26. JEAN, III, 20-21 : " Car quiconque fait le mal hait la lumière, et ne se montre point à la lumière de peur que ses œuvres étant reconnues ne le condamnent. - Mais celui qui fait ce que la vérité prescrit, se montre à la lumière afin que ses œuvres soient manifestées, parce qu'elles sont faites en Dieu. "
27. I JEAN, IV, 17 : " L'amour que nous aurons pour Dieu sera parfait, si nous sommes tels en ce monde que l'a été Jésus-Christ, et c'est ainsi que nous aurons confiance au jour du jugement. "
28. JACQUES, II, 25 : " Rahab aussi, cette femme débauchée, ne fut-elle pas de même justifiée pour ses œuvres quand elle reçu chez elle les espions de Josué et qu'elle les renvoya par un autre chemin ? "
29. Galates, VI, 3-5 : " Si quelqu'un s'imagine être quelque chose, il se trompe lui-même puisqu'il n'est rien. - Que chacun examine donc bien ses propres actions, et alors il trouvera sa gloire seulement en lui-même, plutôt que de la chercher dans la comparaison qu'il voudrait établir entre lui et les autres. - Car chacun portera son propre fardeau. "
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30 et 31. TOBIE, IV, et JEAN, III (comme dans le corps de la réponse).
32. JEAN, XV, 7 : " Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez tout ce que vous voudrez, et cela vous sera accordé. "
33. ISAIE, XXXVIII, 1-8 : " En ces jours-là Ezéchias fût malade à mort ; et Isaïe, prophète, fils d'Amos, vint vers lui et lui dit : - Voici ce que dit le Seigneur : - Prince, mets ordre aux affaires de ta maison ; car tu vas mourir, et infailliblement. - Alors Ezéchias tourna son visage du côté de la muraille, et pria le Seigneur - en lui disant : Souvenez-vous, je vous prie, Seigneur, que j'ai marché devant vous dans la vérité et avec un cœur droit, et que j'ai fait ce qui est bon à vos yeux. - Et Ezéchias répandit beaucoup de larmes. - Alors le Seigneur parla à Isaïe et lui dit : Va, et dis à Ezéchias : Voici ce que dit le Seigneur, le Dieu de David ton père : J'ai entendu tes prières, et j'ai vu tes larmes ; et j'ajouterai encore quinze année à ta vie. - Et je vous délivrerai du roi des Assyriens, toi et cette ville, et je protégerai moi-même Jérusalem. - Or, voici le signe que le Seigneur te donnera, pour t'assurer de sa promesse et de son accomplissement. - Je ferai que l'ombre du soleil, qui est descendue de dix degrés sur le cadran d'Achaz, retourne de dix degrés en arrière. - Et le soleil remonta les dix degrés d'où il était déjà descendu. "
34. II Rois, XX, 1-3 : " En ce temps-là, Ezéchias fut malade à mort, etc. - Alors Ezéchias, tournant le visage du côté de la muraille, fit sa prière au Seigneur en ces termes : Seigneur, souvenez-vous, je vous prie, que j'ai marché devant vous dans la vérité et avec un cœur droit, et que j'ai fait ce qui était agréable à vos yeux. "
35. Psaume VII, 9 : " Daignez, Seigneur, me rendre justice, et me traiter selon mon innocence. "
36. Ps. XVI, 1, 15 : " Seigneur, écoutez la voix de ma justice : soyez attentif à mes cris. - Pour moi, conduit par la justice, je verrai votre face ; mes désirs seront comblés par l'éclat de votre aspect à mon réveil. "
37. Ps. XVII, 24-25 : " Et le Seigneur rétribuera ma justice ; - il me récompensera selon la pureté de mes mains ; - parce que j'ai gardé les voies du Seigneur, et que je n'ai point abandonné mon Dieu pour embrasser l'impiété. - Tous ses jugements ont été devant mes yeux, et je n'ai point rejeté ses lois. - Je
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m'efforcerai d'être sans tache devant lui, et je me tiendrai en garde contre l'iniquité. - Et il me traitera selon mon innocence, selon que mes mains seront pures à ses yeux. "
37. Ps. XXV, 1, 11-12 : " Jugez ma cause, Seigneur : car la voie où je marche est pure ; j'espère en vous, ne laissez point chanceler mes pas. - Pour moi, la voie que je suis est irréprochable ; venez me délivrer, ayez pitié de moi. - Mes pieds sont restés fermes dans la voie droite ; je vous bénirai, Seigneur, dans les assemblées. "
38. Ps. XXXIV, 23-24 : " Seigneur, prenez vos armes et votre bouclier ; levez-vous pour me secourir. - Mon Dieu et mon Seigneur, songez à la défense de ma cause. - Jugez-moi selon votre justice, Seigneur, Dieu que j'adore, et qu'ils n'aient point à se réjouir de ma perte. "
39. Ps. CXXXI, 1 : " Seigneur, souvenez-vous de David, et de sa douceur au milieu de ses afflictions. "
40. MATTHIEU, XX, 4-5, 8-10 : " Le royaume des cieux est semblable à un père de famille, qui sortit dès le point du jour afin de louer des ouvriers pour sa vigne. - Et étant convenu avec les ouvriers de leur donner un denier pour leur journée entière il les envoya à sa vigne. - Il sortit de même sur la troisième heure, et en ayant vu d'autres qui se tenaient sur la place sans rien faire, il leur dit : - Allez-vous-en aussi à ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera juste. - Et ils y allèrent. . . - Or, le soir étant venu, le maître de la vigne dit à son intendant : - Appelez les ouvriers, et payez-les en commençant par les derniers, jusqu'aux premiers. - Ceux qui avaient été loués les premiers, venant à leur tour, s'imaginèrent qu'on leur donnerait davantage ; mais ils ne reçurent eux aussi, que chacun un denier. "
41. II Timothée, IV, 8 : " Il ne me reste qu'à attendre la couronne de justice qui m'est réservée et que le Seigneur, comme un juste juge, me remettra en ce grand jour ; et non-seulement à moi, mais encore à tous ceux qui aiment son avènement. "
42. JACQUES, I, 12 : " Heureux celui qui endure patiemment les épreuves, parce que, lorsqu'il aura été éprouvé, il recevra la couronne de vie que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. "
43. MATTHIEU, XIX, 16-17 : " Et voici que quelqu'un s'approchant, lui dit : Bon maître, quel bien faut-il que je fasse pour gagner la vie éternelle ? - Jésus lui répondit : Pourquoi me demandez-vous ce qui est bon ? - Il n'y a que Dieu qui soit
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bon. - Au reste, si vous voulez entrer dans la vie, gardez les commandements. "
44. JEAN, III, 21 : " Mais celui qui fait ce que la vérité prescrit, se montre à la lumière, afin que ses œuvres soient manifestées, parce qu'elles sont faites en Dieu. "
45. Id., XV, 1-2, 5 : " Je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. - Il retranchera toutes les branches qui ne portent point de fruit en moi, et il taillera toutes celles qui portent du fruit, afin qu'elles en portent davantage. - Je suis le cep de la vigne, et vous en êtes les branches. - Celui qui demeure en moi, et en qui je demeure, porte beaucoup de fruit ; car sans moi vous ne pouvez rien faire. "
46. Ecclésiastique, XVI, 15 : " Toute action de miséricorde fera placer chacun en son rang selon le mérite de ses œuvres et selon la prudence avec laquelle il aura vécu comme étranger sur la terre. "
47. Hébreux, XIII, 16 : " Souvenez-vous d'exercer la charité et de faire part de vos biens aux autres : car c'est par de semblables sacrifices qu'on se rend Dieu favorable. "
48. Sagesse, III, 5-6 : " Leur affliction a été légère, et leur récompense sera grande, parce que Dieu les a éprouvées et qu'il les a trouvés dignes de lui. - Il les a éprouvés comme l'or dans la fournaise ; il les a reçus comme un holocauste, et il arrêtera sur eux son regard lorsque le temps en sera venu. "
49. II Thessaloniciens, I, 3-7 : " Nous devons, mes frères, rendre pour vous à Dieu de continuelles actions de grâces ; et il est bien juste que nous le fassions, puisque votre foi s'augmente de plus en plus, et que la charité que vous avez les uns pour les autres s'accroît tous les jours. - De sorte que nous nous glorifions en vous dans les Eglises de Dieu, à cause de la patience et de la foi avec laquelle vous demeurez fermes dans toutes les persécutions et les afflictions qui vous arrivent ; - afflictions qui sont des marques du juste jugement de Dieu, en même temps qu'elles servent à vous rendre dignes de son royaume, pour lequel aussi vous souffrez. - Car il est bien juste devant Dieu qu'il afflige à leur tour ceux qui vous affligent maintenant, - et que pour vous, qui êtes dans l'affliction, il vous fasse jouir du repos avec nous, lorsque le Seigneur Jésus descendra du ciel, et paraîtra avec les anges qui sont les ministres de sa puissance. "
50. Apocalypse, III, 4-5 : " Vous avez néanmoins dans Sardes quelque peu de personnes qui n'ont point souillé leurs vête-
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ments ; ceux-là marcheront avec moi vêtu de blanc, car ils en sont dignes. - Celui qui aura obtenu la victoire sera ainsi vêtu de blanc ; et je n'effacerai point son nom du livre de vie, et je confesserai son nom devant mon Père et devant ses anges. "
51. Sagesse, V, 16-17 : " Mais les justes vivront éternellement ; le Seigneur leur réserve leur récompense et le Très-Haut les a présents à sa pensée- C'est pourquoi ils recevront de la main du Seigneur un royaume (autr. selon les septante, un palais) de toute magnificence et un diadème de toute beauté. - Il les protégera de sa droite, et les défendra par la force de son bras saint. "
52. Psaume XVIII, 12 : " Votre serviteur, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
53. Hébreux, XI, 6, 24-26 : " Or, il est impossible de plaire à Dieu sans la foi ; car, pour s'approcher de Dieu, il faut croire premièrement qu'il existe, et qu'il récompense ceux qui le cherchent. - C'est par la foi que Moïse devenu grand, renonça à être appelé le fils de la fille de Pharaon, aimant mieux être affligé avec le peuple de Dieu, que de jouir du plaisir si court qui se trouve dans le péché ; - et jugeant que l'opprobre de Jésus- Christ était un plus grand trésor que toutes les richesses de l’Egypte, parce qu'il envisageait la récompense promise. "
54. LUC, XIV, 12-14 : " Il dit aussi à celui qui l'avait invité : Lorsque vous donnerez à dîner ou à souper, n'y conviez ni vos amis, ni vos frères ni vos parents, ni vos voisins qui seront riches, de peur qu'ils ne vous invitent aussi à leur tour, et qu'ainsi ils ne vous rendent ce qu'ils auraient reçu de vous. - Mais lorsque vous donnez un festin, conviez-y les pauvres, les estropiés, les boiteux et les aveugles ; - et ce sera pour vous un bonheur qu'ils n'aient pas le moyen de vous le rendre, puisque cela vous sera rendu au jour de la résurrection des justes. "
55. Colossiens, III, 23-24 : " Faites de bon cœur tout ce que vous faites, comme le faisant pour le Seigneur, et non pour les hommes, - sachant que vous recevrez du Seigneur l'héritage du ciel pour récompense. "
56. Ephésiens, VI, 7-8 : " Servez-les (vos maîtres) avec affection, regardant en eux le Seigneur, et non les hommes, - sachant que chacun recevra du Seigneur la récompense du bien qu'il aura fait, n'importe qu'il soit esclave, ou qu'il soit libre. "
57. II Corinthiens, IV, 17 : " Les afflictions si courtes et si légères que nous avons à endurer dans la vie présente nous amassent pour l'éternité une somme immense de gloire. "
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58. Psaume CXVIII, 112 : " J'ai porté mon cœur, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
59. MATTHIEU, XIX, 11-12 : " Il leur dit : Tous n'entendent pas cette parole, mais ceux-là seulement à qui il a été donné de l'entendre. - Car il y a des eunuques sortis tels du sein de leurs mères ; il y en a d'autres qui ont été faits eunuques par les hommes ; et il y en a qui se sont rendus eunuques eux-mêmes en vue du royaume des cieux. "
60. II Timothée, IV, 7 : " J'ai bien combattu, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
61. MATTHIEU, V, 11-12 : " Vous serez bienheureux, lorsque les hommes vous maudiront, qu'ils vous persécuteront et qu'à cause de moi ils diront faussement toute sorte de mal de vous. - Réjouissez-vous alors, et tressaillez de joie, parce que votre récompense est grande dans les cieux. "
62. Id., VI, 4, 6, 17, 18 : " Afin que votre aumône se fasse en secret, et votre Père, qui voit tout ce qui se fait en secret, vous en rendra la récompense. - Mais pour vous, lorsque vous voudrez prier, entrez dans votre chambre, et, la porte fermée, priez votre Père en secret, et votre Père qui voit tout ce qui se fait en secret, vous en fera toucher la récompense. - Mais pour vous, lorsque vous jeûnez, parfumez-vous la tête et lavez-vous le visage, - afin de ne pas faire paraître aux hommes que vous jeûnez, mais seulement à votre Père, qui est présent à ce qu'il y a de plus secret : et votre Père, qui voit tout ce qui se passe dans le secret, vous en rendra la récompense. "
63. Id., X, 41 : " Celui qui reçoit un prophète en qualité de prophète recevra la récompense du prophète, etc. "
64. Apocalypse, II, 7, 10, 26, 27, 28 : " Que celui qui a des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux églises : Je donnerai au vainqueur à manger du fruit de l'arbre de vie, qui est au milieu du paradis de mon Dieu. - Ne craignez rien de ce que vous aurez à souffrir : voilà que le démon va mettre quelques-uns de vous en prison, afin que vous soyez éprouvés et vous aurez à souffrir pendant dix jours. - Soyez fidèles jusqu'à la mort, et je vous donnerai la couronne de vie. - Et quiconque aura vaincu et aura persévéré jusqu'à la fin dans les œuvres que je lui ai commandées, je lui donnerai puissance sur les nations : - il les gouvernera avec un sceptre de fer, et elles seront brisées comme un vase d'argile, - selon que j'en ai reçu moi-même le pouvoir de mon Père, et je lui donnerai l’étoile du matin. "
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65. Id., III, 11-12, 21 : " Je viendrai bientôt : conservez ce que vous avez, de peur qu'un autre ne reçoive à votre place votre couronne. - Quiconque sera victorieux, je ferai de lui une colonne dans le temple de mon Dieu, et il n'en sortira plus ; et je graverai sur lui le nom de mon Dieu, et le nom de la ville de mon Dieu, de la nouvelle Jérusalem qui descend du ciel d'auprès de mon Dieu, et il portera pour signe mon nom nouveau. - Quiconque sera victorieux, je lui donnerai de s'asseoir avec moi sur mon trône, comme depuis ma victoire je suis assis moi-même avec mon père sur son trône. "
66. Ibid., XIV, 13 : " Alors j'entendis du ciel une voix qui me dit : Ecris : Heureux sont ceux qui meurent dans le Seigneur. Dès à présent, dit l'Esprit, ils se reposeront de leurs travaux : car leurs œuvres les suivent. "
67. MATTHIEU, XIX, et JEAN, V (comme dans le corps de la réponse).
68 MATTHIEU, XXV, 34-38 : " Alors le roi dira à ceux qui sont à sa droite : Venez, les bénis de mon Père posséder le royaume qui vous à été préparé dès le commencent du monde. Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger. "
69. Id., VII, 21 : " Tous ceux qui me disent, Seigneur, Seigneur, n'entreront pas pour cela dans le royaume des cieux ; mais celui-là seulement y entrera, qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. "
70. Apocalypse, XXII, 4 : " Que celui qui est juste, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
71. Ecclésiastique, XVIII, 22 : " Ne cessez point de croître dans les œuvres de justice jusqu’à la mort, parce que la récompense de Dieu demeure éternellement. "
72. Psaume LXI, 12 : " Dieu a parlé une fois, et j'ai entendu ces deux choses : que la puissance appartient à Dieu, et que vous êtes, Seigneur, rempli de miséricorde ; car vous rendrez à chacun selon ses œuvres. "
73. MATTHIEU, XVI, 27 : " Le Fils de l'homme doit venir dans la gloire de son Père avec ses anges, et alors il rendra à chacun selon ses œuvres. "
74. Romains, II, 6-13 : " Qui rendra à chacun selon ses œuvres, - en donnant la vie éternelle à ceux qui, par leur patience dans les bonnes œuvres, cherchent la gloire, l'honneur et l'immortalité, - et en faisant peser sa colère et son indignation sur ceux qui ont l'esprit contentieux, et qui ne se rendent
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point à la vérité, mais qui embrassent l'iniquité. - Tribulation et angoisse sur l'âme de tout homme qui fait le mal, du juif premièrement, et ensuite du gentil. - Mais gloire, honneur et paix à tout homme qui fait le bien, au juif premièrement et ensuite au gentil. - Car Dieu ne fait point acception des personnes. - Et, ainsi tous ceux qui ont péché sans la loi périront sans la loi, et tous ceux qui ont péché sous la loi seront jugés par la loi. - Car ce ne sont point ceux qui écoutent la loi qui sont justes devant Dieu ; mais ceux qui gardent la loi seront seuls justifiés. "
75. I Corinthiens, III, 8-9, 13, 14, 15 : " Celui donc qui plante et celui qui arrose ne sont qu'une même chose. Mais chacun recevra sa récompense particulière selon son travail ; parce que nous sommes les coopérateurs de Dieu, et vous êtes le champ que Dieu cultive. . . . . - L'ouvrage de chacun paraîtra enfin, et le jour du Seigneur fera voir quel il est, parce qu'il sera manifesté par le feu, et que ce feu mettra à l'épreuve l'ouvrage de chacun. - Si quelqu'un a bâti sur ce fondement un ouvrage qui demeure sans être brûlé, il en recevra la récompense. - Si l'ouvrage d'un autre est consumé par le feu, il en éprouvera de la perte : il ne laissera pas pour cela d'être sauvé, mais ce sera comme en passant par le feu. "
76. Galates, VI, 7-10 : " Ne vous y trompez pas : on ne se moque point de Dieu. - L'homme ne recueillera que ce qu'il aura semé ainsi, celui qui sème dans la chair, ne recueillera de la chair que la corruption, et celui qui sème dans l'esprit recueillera de l'esprit la vie éternelle. - Ne nous lassons donc point de faire le bien, puisque, si nous ne perdons point courage, nous en recueillerons le fruit en son temps. - C'est pourquoi, pendant que nous en avons le temps, faisons du bien à tous, mais principalement à ceux qui par la foi qu'ils professent ne font qu'une même famille avec nous. "
77. Ecclésiastique, LI, 38 : " Faites votre
œuvre avant que le temps se passe, et il vous en donnera la récompense
en son temps. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. CYPRIEN, Epist. I ad Cornelium Pontificem romanum : " Courage donc, frère bien-aimé. Puisque les avertissements d'une miséricordieuse providence nous crient que le jour de notre combat est proche, nous vous exhortons autant que nous en sommes
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capable, et au nom de la charité qui nous lie ensemble, à vaquer constamment avec tout le peuple aux veilles, aux jeûnes et aux prières Poussons des gémissements non interrompus, faisons entendre de continuelles supplications. Gémissements, supplications, voilà les armes célestes qui nous rendent forts et puissants contre l'ennemi ; voilà l'arsenal spirituel qui nous protège véritablement (Cf. Chefs-d'œuvre des Pères, trad. par M. de Genoude, t. V). "
2. Le concile de Trente, session VI, chapitre X : " Les hommes étant ainsi justifiés et devenus amis et comme les familiers de Dieu (Eph., II, 19 ; Ps. LXXXIII, 8), s'avancent de vertus en vertus, et se renouvellent de jour en jour, comme dit l’Apôtre (I Cor., IV, 16), c'est-à-dire qu'en mortifiant les membres de leur corps, et les faisant servir aux œuvres de justice (Col., III, 5), pour se sanctifier par l'observation des commandements de Dieu et de l'Eglise, ils croissent, par les bonnes œuvres que la foi leur donne la force de pratiquer, dans cet état de justice dont ils sont redevables à la grâce de Jésus- Christ et se justifient ainsi de plus en plus, suivant ce qui est écrit : Que celui qui est juste, se justifie encore. Il est écrit de même ailleurs : Ne craignez point de vous avancer dans la justice jusqu’à la mort. Et dans un autre endroit : Vous voyez que l'homme est justifié par ses œuvres et non pas seulement par sa foi. C'est là cet accroissement de justice que demande la sainte Eglise, lorsqu'elle dit dans ses prières : Donnez-nous, Seigneur, un accroissement de foi, d'espérance et de charité. "
3. S. AUGUSTIN, Præfat. in Ps. XXXI : " La fin de la loi, dit l'Apôtre (I Tim., I, 8), est la charité qui naît d'un cœur pur, d’une bonne conscience et d'une foi sincère. Il met la bonne conscience à la place de ce qu'il appelle ailleurs l'espérance : car celui-là à une bonne espérance qui à la conscience pure. Et celui qui se sent déchiré par les remords d'une mauvaise conscience n'espère plus, et n'attend que sa condamnation. Pour espérer le royaume, ayez la bonne conscience ; et pour avoir la bonne conscience, croyez et agissez ensuite. Ce qui fait que vous croyez, c'est la foi ; ce qui fait que vous agissez, c'est la charité. Dans un endroit, saint Paul nomme la foi la première : La foi, l'espérance et la charité (I Cor., XIII, 13). Dans cet autre, il commence par la charité : La charité qui naît d'un cœur pur, d'une bonne conscience et d'une foi sincère. Pour nous, nous venons
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de commencer par le milieu, c'est-à-dire par l'espérance et la bonne conscience. Je le répète : Que celui qui veut avoir une bonne espérance s'applique à se faire une bonne conscience. Mais pour avoir une bonne conscience, qu'il croie et qu'il agisse. Nous commençons par le milieu, d'où nous allons au commencement et à la fin, qu'il croie et qu'il agisse. Ce qui le fait croire, c'est la foi ; ce qui le fait agir, c'est la charité (Cf. Sermons de saint Augustin sur les Psaumes, t. Ier, p.474-475). "
4. Le même, Tract. LXVII in Evangelium Joannis : " Quand le Sauveur eut dit à ses apôtres : Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père ; si cela n'était, je vous l'aurais dit, car je m'en vais vous préparer le lieu ; leur trouble fut calmé dans la confiance où ils furent dès-lors d'obtenir très-certainement un jour, qu'après avoir essuyé les tentations et les dangers de la vie présente ils seraient reçus avec Jésus-Christ dans la maison du Père céleste, pour y demeurer éternellement avec lui ; parce que, bien que parmi eux-mêmes il y en eût de plus forts, de plus sages, de plus justes et de plus saints les uns que les autres, comme il y a plusieurs demeures dans la maison du Père, pas un de ceux qui suivaient le Fils ne devait en être rejeté, et que chacun d'eux devait y être placé suivant le rang dû à son mérite. Il est vrai que le père de famille (MATTH., XX, 9), en payant ceux qu'il avait envoyés à sa vigne, ne fit donner à chacun de ses ouvriers qu'un denier, comme ils en étaient convenus avec lui, sans avoir égard au plus ou moins de temps que chacun d'eux avait travaillé. Mais c'est parce que ce denier représentait la vie éternelle, qui sera en effet également éternelle pour tous ceux qui y seront admis. Car l'éternité n'ayant point de fin, la durée de la vie qu'on y possède ne peut être réglée par des mesures différentes. Ce n'est pas non plus ce que Jésus- Christ veut nous faire entendre par la diversité des demeures qu'il dit être dans la maison de son Père ; mais c’est la différence des degrés de gloire proportionnés aux mérites de chacun, dont ils jouiront dans cette éternité, d'ailleurs pour tous la même . Car le soleil a son éclat, la lune le sien, les étoiles le leur, et entre les étoiles l'une est plus éclatant que l'autre (I Cor., XV, 41). Il en sera de même dans la résurrection des morts. Comme donc les étoiles qui sont dans le ciel ont différents degrés de clarté, de même les saints qui seront dans le royaume de Dieu y auront différents degrés de gloire représentés par les différentes demeures dont
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parle ici Jésus- Christ. Mais, pour marquer que ces saints seraient tous reçus dans ce même royaume sans qu'un seul en fût exclu, le père de famille donne le même prix, qui est un denier, à tous ceux qui avaient travaillé à sa vigne. Et ainsi, comme Dieu qui est charité sera tout en tous, il arrivera par ce moyen que ce que chacun d'eux aura de propre deviendra commun à tous. Car il suffit d'être bien aise de voir dans les autres ce qui nous manque et de l'y estimer, pour pouvoir dire en quelque manière que nous l'avons. C'est ce qui aura lieu dans le ciel, l'inégalité de gloire ne fera naître dans les saints aucune jalousie, parce que la charité qui y règnera en eux les unira parfaitement (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l’Evangile de saint Jean, tome III, pag. 271-273). "
5. S. GREGOIRE-LE-GRAND, Lib. IV Dialogorum, c. 35 : " C'est en parlant des élus que Jésus- Christ lui-même a dit dans l'Evangile : Il y a plus d'une demeure dans la maison de mon Père (JEAN, XIV, 2). S'il n'y avait aucune différence dans la récompense accordée à ceux qui entreront un jour en possession de l'éternelle félicité, il n'y aurait pas plusieurs demeures, mais une seule et même pour eux tous. Il y a donc plusieurs demeures, en ce qu'il y a diverses classes parmi les bons, bien qu'ils reçoivent tous un même denier pour avoir travaillé à la même vigne, et que des mérites communs les fassent tous entrer en part d'une commune joie. S'il y a cependant pour eux distinction de demeures, c'est qu'en même temps que la félicité dont ils jouissent est de même nature pour tous, il y a des degrés dans cette félicité même qui est pour chacun la récompense de ses propres œuvres. "
6. Le concile de Trente, session VI, chapitre XVI : " Les hommes étant donc justifiés de cette manière, soit qu'ils aient toujours conservé la grâce une fois reçue, soit qu'après l'avoir perdue ils l'aient recouvrée, il faut leur mettre devant les yeux ces paroles de l'Apôtre : Employez-vous de plus en plus dans l’exercice des bonnes œuvres, étant bien assurés que Notre-Seigneur ne laisse pas votre travail sans récompense (I Cor., XV, 58). Car Dieu n'est pas injuste, pour oublier vos bonnes œuvres et la charité que vous avez témoignée en son nom (Hébr. VI, 10). Et encore ces paroles : Ne perdez donc pas la confiance que vous avez, et qui doit être récompensée d'un grand prix (Hébr. X, 53). Par conséquent il faut faire envisager la vie éternelle à ceux qui travaillent
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utilement jusqu’à la fin de leur carrière et qui espèrent en Dieu, et comme une grâce que Dieu promet miséricordieusement à ses enfants adoptifs en considération des mérites de Jésus-Christ, et comme une récompense qui, selon la promesse de Dieu même, doit être fidèlement décerné à leurs bonnes œuvres et à leurs mérites. C'est là cette couronne de justice, que l’Apôtre disait lui être réservé au terme de sa course et de ses combats, et qu'il attendait de son juste juge, comme promise non-seulement à lui, mais aussi à tous ceux qui aiment et désirent le dernier avènement (II Tim., IV, 8). Jésus-Christ en effet, répandant continuellement l'influence de sa vertu en ceux qui sont justifiés, comme le chef dans ses membres, comme le cep dans ses branches, et cette vertu précédant, accompagnant et suivant toujours leurs bonnes œuvres qui sans elle ne pourraient être ni méritoires, ni agréables à Dieu, il faut croire qu'il ne manque plus rien après cela à ceux qui sont justifiés pour qu'ils doivent être censés avoir pleinement satisfait à la loi divine, autant que le comporte l'état de la vie présente par ces œuvres faites en la vertu de Dieu, et avoir véritablement mérité la vie éternelle, pour l'obtenir en son temps, supposé qu'ils meurent en cet état de grâce, comme l'a dit à ce sujet Jésus-Christ notre Sauveur : Si quelqu'un boit de l’eau que je lui donnerai, il n'aura jamais soif ; mais cette eau deviendra en lui une fontaine d’eau, qui rejaillira jusque dans la vie éternelle (JEAN, IV, 13-14). Ainsi, ni nous ne prétendons que notre justice nous soit tellement propre qu'elle nous vienne de notre propre fonds, ni nous ne voulons méconnaître ou répudier celle de Dieu. Car cette justice que nous appelons notre justice, parce qu'elle est inhérente en nous du moment où nous sommes justifiés, est en même temps la justice de Dieu, parce que c'est Dieu qui la répand en nous par la communication qu'il nous fait des mérites de Jésus- Christ. Il ne faut pas non plus manquer d'observer, qu'encore que nos livres saints attribuent aux bonnes œuvres une telle valeur, que Jésus-Christ promet à celui qui aura donné au moindre des siens ne serait-ce qu'un verre d'eau froide, de ne pas le laisser sans récompense (MATTH., X, 42), et que l’Apôtre nous assure que le moment si court et si léger des afflictions que nous endurons en cette vie produit en nous une gloire incomparable d'une éternelle durée (II Cor., IV, 17), un chrétien cependant ne doit pas, ce qu'à Dieu ne plaise, se confier ou se glorifier en soi-même, mais se confier et se glorifier dans le Seigneur, dont la bonté pour les hommes est si grande,
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qu'il veut bien leur faire des mérites de ses propres dons. Et comme nous manquons tous en bien des choses (JAC., III, 2), chacun de nous doit avoir devant les yeux aussi bien la justice et la sévérité de Dieu, que sa miséricorde et sa bonté ; et quand même on ne se sentirait coupable de rien, on ne devrait pas pour cela se juger innocent, parce que notre vie entière doit être examinée et jugée, non au tribunal des hommes, mais à celui de Dieu, qui portera la lumière jusque dans les plus épaisses ténèbres, et produira au grand jour les secrets des cœurs les plus cachés ; et alors chacun recevra de Dieu la louange qu'il aura méritée (I Cor, IV, 5) ; car il rendra, comme il est encore écrit, à chacun selon ses œuvres (MATTH., XVI, 27; Rom., II, 6). "
7. S. CYPRIEN, Liv. de l'unité : " La justice nous est nécessaire pour nous rendre favorable le divin juge ; et sans la soumission à ses préceptes et à ses avertissements, point de récompense pour nos œuvres. "
8. S. AUGUSTIN, Epist. CV (al. 194) ad Sextum : " De quels mérites pourra donc se prévaloir l’homme justifié, lui qui, s'il eût été traité selon ses mérites, n’aurait pu attendre que sa condamnation ? Mais quoi ! les justes n'ont-ils dont point de mérites ? Certainement ils en ont, puisqu'ils sont justes ; mais ce ne sont pas leurs mérites qui les ont rendus tels. Car être rendu juste, c'est être justifié ; or, c'est gratuitement, comme nous le dit l'Apôtre, que nous avons été justifié par l'effet de la grâce de Jésus- Christ . . . "
" Quel mérite pouvons-nous donc trouver dans l'homme, qui précède la grâce, et qui la lui fasse obtenir, puisque c'est la grâce seule qui fait tout ce qu'il y a en nous de mérites, et que Dieu, en couronnant nos mérites, ne fait que couronner ses propres dons ? Car de même que dès les premiers pas de notre entrée dans la foi, nous avons reçu miséricorde, non parce que nous étions fidèles, mais afin que nous le devinssions ; ainsi, à la fin de notre course où commence la vie éternelle, Dieu nous couronnera, comme dit l'Ecriture, par une abondance de miséricordes (Ps. CII, 4). Ainsi c'est dans la plus exacte vérité que le Psalmiste bénit Dieu en disant : Sa miséricorde me préviendra (Ps. LVIII, 2) ; et : Sa miséricorde me suivra (Ps. XXII, 6). C'est pourquoi la vie éternelle que nous posséderons sans fin après la fin des siècles, et qui est par conséquent la récompense des mérites précédents, est elle-même appelé une grâce, parce que les mérites auxquels elle est accordée n'ont pas été produits
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en nous par nos seules forces, mais sont en nous l'œuvre de la grâce. Elle est, dis-je, appelée une grâce ; et pourquoi, sinon parce qu'elle est donné gratuitement ? Non qu'elle ne soit la récompense des mérites ; mais parce que les mérites mêmes, en vue desquels elle est accordée, nous ont été donnés. On demandera peut-être en quel endroit la vie éternelle est appelée grâce. Il ne faut pour le trouver qu'ouvrir les épîtres de saint Paul, ce grand défenseur de la grâce. La mort, dit-il, est le paiement et la solde du péché ; mais la vie éternelle est une grâce de Dieu en Jésus- Christ Notre-Seigneur (Rom., V, 23). "
" Remarquez, je vous prie, avec quelle attention l'Apôtre, dans une phrase si courte, pèse toutes ses paroles. Il suffit de les considérer avec soin pour éclaircir ce qu'il y a d'obscur dans cette question. Après avoir dit que la mort est le paiement ou la solde du péché, qui ne s'attendrait à l'entendre ajouter, par une conséquence naturelle et tout-à-fait convenable, que la vie éternelle est le paiement ou la solde de la justice ? En parlant ainsi, il n'aurait rien dit qui ne fut très-vrai. Car comme la mort est la solde qui est due au péché, et qu'il mérite, la vie éternelle est aussi comme la solde qui est due à la justice, et qu'elle mérite. . . . "
" Ce n'est qu'à la véritable justice que la vie éternelle est due. Mais sache aussi (ô homme), que ta justice, si elle est véritable, ne vient pas de toi, mais qu'elle vient d'en haut et descend du Père des lumières (JAC., I, 4). Si donc tu as cette justice véritable, tu l'as certainement reçue. Car enfin, qu'as-tu que tu n'aies pas reçu (I Cor., IV, 7) ? Qui que tu sois donc, ô homme, qui dois recevoir la vie éternelle, sache que, quoiqu'elle soit la récompense de la justice, elle est en même temps une grâce pour toi, puisque la justice même que tu as est une grâce. Afin que cette récompense te fût due à toi, il faudrait, que la justice, à laquelle seule elle est due, te vînt de toi. Mais il n'en est pas ainsi : nous n'avons rien de nous-mêmes. Nous avons reçu de lu plénitude de Jésus-Christ, non-seulement la grâce par laquelle nous vivons maintenant selon la justice au milieu des travaux dont cette vie est remplie, et qui ne finiront qu'avec elle ; mais encore celle que saint Jean appelle grâce pour grâce (JEAN, I, 46), une dernière grâce qui sera la suite de cette première grâce, et par laquelle nous vivrons sans fin dans un parfait repos. "
9. Le même, De moribus Ecclesiæ catholicæ, c. 25 : " Aimons donc Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout
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notre esprit, si nous nous sommes proposés d'acquérir la vie éternelle. Car la vie éternelle est toute la récompense qui nous est promise ; or, la récompense ne peut pas précéder le mérite et être donnée à l'homme avant qu'il en soit digne, puisque ce serait une injustice, tandis que Dieu est la justice même. Nous ne devons donc pas prétendre l'obtenir avant de l'avoir méritée (Cf. Les mœurs de l'Eglise catholique, p. 80). "
10. S. AUGUSTIN, in Ps. XCIII : " Vous considérez le travail que vous endurez ici ; mais considérez de même quel repos Dieu vous promet. Pouvez-vous seulement vous le figurer ? Si vous le pouviez, vous reconnaîtriez que ce que vous souffrez n'est rien en comparaison des biens que vous attendez. Ecoutez ce que disait saint Paul, qui voyait ces biens en partie : Le moment si court et si léger des afflictions que nous endurons en cette vie, produit en nous le poids éternel d'une souveraine et incomparable gloire. Quel est ce poids éternel d’une souveraine gloire ? A qui Dieu le prépare-t-il ? L’Apôtre le dit ensuite : A nous qui ne considérons point les choses visibles, mais les invisibles ; parce que les choses visibles sont temporelles, au lien que les invisibles sont éternelles. Ne soyez point lâche et paresseux dans un travail qui passe vite, et vous goûterez une joie qui ne passera jamais. Dieu vous promet une vie qui n'aura pas de fin. Jugez par quels travaux elle mérite d'être achetée. "
" Ecoutez ceci, mes frères Ce que je possède est à vendre, vous dit Dieu. Ce que j'ai est à vendre ; achetez-le. Qu'est-ce que Dieu a donc à vendre ? dites-vous. Il a un repos à vendre ; achetez-le par le travail. Ecoutez-moi, je vous prie, afin qu'au nom de Jésus-Christ nous devenions des chrétiens courageux. . . Ecoutez donc. "
" Dieu vous propose d'acheter en quelque sorte le royaume du ciel. Vous lui demandez combien il coûte. Il vous répond que c'est par le travail qu'on l'achète. S'il vous disait qu'on l'achète avec de l'or, vous lui en demanderiez plus particulièrement le prix : car un grain d'or est aussi bien de l'or qu'une livre d'or. Lors donc que, pour vous épargner la peine de chercher comment on pourrait acheter ce royaume, on vous dit tout d'abord que c'est par le travail, demandez de même quel doit être ce travail, et combien il doit durer. Dieu, avant de vous répondre, vous dit : Je veux vous faire voir avant tout quel est ce repos ineffable que je vous prépare, afin que vous jugiez vous-même par quel travail on doit l'acheter. "
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" Que Dieu nous dise donc combien ce repos doit avoir de charmes. Heureux ceux qui demeurent dans votre maison ; ils vous loueront dans les siècles des siècles (Ps. LXXXIII, 5). C'est là le repos éternel. Ce repos n'aura point de fin ; cette joie ne passera jamais, ne finira jamais ; cet état d’incorruptibilité durera éternellement. Vous aurez une vie éternelle, vous aurez un repos sans fin. De quel travail doit être acheté un repos qui sera éternel ? Si vous voulez être juste dans cette comparaison, si vous voulez être équitable dans cette estimation des choses, n'avouerez-vous pas que, pour acheter un repos éternel, il faudrait aussi un travail qui le fût également ? Cela est incontestable ; mais ne craignez pas, Dieu est plein de miséricorde. S'il vous fallait travailler éternellement, quand arriveriez-vous à ce repos qui mériterait qu'on l'achetât par un travail qui durât toujours ? Faites la balance égale : pour mériter un repos éternel, il faudrait un travail éternel. Mais si vous travailliez toujours, vous ne vous reposeriez jamais. Donc, pour que vous puissiez jouir de ce que vous achetez, il est nécessaire que votre travail ait une fin ; non qu'un repos éternel ne vaille bien un travail éternel, mais parce qu'autrement il vous serait impossible d'entrer jamais en jouissance de ce que vous achetez. "
" Ce repos donc mériterait d’être acheté par un travail éternel ; mais il faut de toute nécessité que ce travail soit temporel. La justice voulant donc que ce travail n'eût pas de fin, que serait-ce qu'un travail de dix millions d’années ? Car, après tout, dix millions d'années, quelques longues qu'elles soient, ont pourtant une fin ; et ce repos que je vous promets, nous dit Dieu, n'aura point de fin. O bonté, ô miséricorde de notre Dieu ! Il ne vous dit pas même : Travaillez pendant dix millions d'années, travaillez pendant mille ans, pendant cinq cents ans ; mais : Travaillez pendant le temps si court des années de votre vie. C'est par-là que vous achèterez le repos, et ce repos n'aura pas de fin (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. V, p. 155-156). "
11. Le même, in Ps. CXX : " Que veut dire cette parole : Que votre main gauche ne sache pas ce que fait votre main droite (MATTH., VI, 3) ? Elle veut dire : Quand vous faites une bonne œuvre, faites-la en vue de la vie éternelle. Car si vous ne la faites qu'en vue de jouir des biens de la terre, votre gauche sait alors ce que fait votre droite ; vous mêlez la main droite avec la
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main gauche. N'agissez qu'en vue de la vie éternelle, et vous agirez avec assurance : car c'est là ce que Dieu à commandé. "
" Si vous n'agissez qu'en vue de la terre, et seulement pour la vie présente, la gauche alors agit seule en vous. Si, au contraire, vous n'agissez qu'en vue de la vie éternelle, c’est votre droite seule qui travaille. Si vous avez en vue la vie éternelle, et qu'il se glisse en même temps en vous un désir secret de la vie temporelle, en sorte que vous y ayez quelque égard dans le bien que vous faites, en souhaitant que Dieu vous en récompense ici-bas, c'est alors la gauche qui se mêle avec votre droite, et c'est ce que Dieu défend (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. VI, p. 395). "
12. Le même, Lib. L Homiliarum, hom. XIV, c. 2 : " Ecoutons maintenant l'apôtre saint Paul nous dire aux approches de son martyre, et dans l'attente certaine de la couronne qui lui était préparée : J'ai bien combattu ; j'ai achevé ma course ; j'ai gardé ma foi. Il me reste à attendre la couronne de justice, que le Seigneur, comme un juste juge, me rendra dans ce dernier jour, et non-seulement à moi, nais aussi à tous ceux qui désirent son avènement. Le Seigneur, comme un juste juge, dit l'Apôtre, me rendra la couronne de justice : c'est donc que cette couronne sera due. Que rendra-t-il ? La couronne de justice : le juste juge ne pourra donc manquer de la rendre. Car en voyant achevé l'ouvrage commandé, il ne pourra, lui qui voit tout, en refuser le salaire. J'ai bien combattu ; voilà l'ouvrage commandé. J’ai achevé ma course ; voilà l'ouvrage achevé. J’ai gardé ma foi ; voilà encore l'ouvrage qu'il lui était ordonné de faire. Il me reste à attendre la couronne de justice ; voilà le salaire : mais pour le recevoir vous n'avez point à agir, et pour le gagner ou pour faire l'ouvrage, vous n'êtes pas réduit à agir seul. La couronne vous vient de lui ; l'ouvrage vient de vous, mais non sans qu'il vous prête pour cela son concours. "
13. Le même, in Ps. LXXXIII, sur ces paroles, Dieu aime la miséricorde et la vérité : " Il aime la miséricorde, parce qu'il m'a prévenu de sa grâce. Il aime la vérité, parce qu'il acquitte fidèlement à celui qui à foi en lui la promesse qu'il lui a faite. Voyons comme cette miséricorde et cette vérité se sont exercées sur la personne de saint Paul. Comme il était d'abord persécuteur de Jésus-Christ, et qu'il avait besoin de miséricorde, il reconnaît que Dieu la lui a faite, lorsqu'il dit : Moi qui étais auparavant un
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blasphémateur, un persécuteur et un outrageux ennemi de son Eglise, j’ai trouvé cependant miséricorde (I Cor., XV, 10), et c'est par la grâce de Dieu que je suis tout ce que je suis. Il dit dans un autre endroit, et aux approches de son martyre : J’ai bien combattu, j'ai achevé ma course, j'ai gardé la foi : il ne reste maintenant à attendre la couronne de justice (II Th., IV, 7). Celui qui m'a fait éprouver sa miséricorde me fera éprouver aussi sa vérité. Comment lui fera-t-il éprouver sa vérité ? Parce que le Seigneur, comme un juste juge, me rendra en ce jour-là cette couronne qu'il m'a promise. Il m'a accordé le pardon de mes crimes ; il me donnera maintenant la couronne. Il m'a pardonné gratuitement mes péchés ; il me doit maintenant la couronne par justice. Comment la doit-il ? Dieu peut-il nous être redevable ? De qui a-t-il reçu quelque chose qu'il doive ensuite lui rendre ? Cependant saint Paul déclare que Dieu est son débiteur. Il a déjà reçu sa miséricorde, et maintenant il exige sa vérité. Le Seigneur, comme un juste juge, me la rendra en ce jour. Que vous rendra-t-il sinon ce qu'il vous devait ? Et que put-il vous devoir ? Que lui avez-vous donné ? N'avez-vous pas dit vous-même (Rom., XI, 35) : Qui est-ce qui lui a donné quelque chose avant d'avoir lui-même rien reçu de lui, pour prétendre avoir droit à une récompense ? Non, répond-il, c'est Dieu lui-même qui se rend notre débiteur. Il nous doit, non qu'il ait reçu de nous, mais parce qu'il s'est engagé lui-même par ses promesses. On ne lui dit point : Rendez-nous ce que nous vous avons donné ; mais : Rendez-nous ce que vous nous avez promis (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. IV, p. 477-479). "
14. Le même, in Ps. C: " Saint Paul, après avoir obtenu de Dieu miséricorde, le regarde ensuite comme engagé à lui rendre la récompense qu'il lui a promise. Il le reconnaît comme son bienfaiteur au temps de la miséricorde ; mais il le regarde comme son débiteur au jour du jugement qu'il prononcera. Ma mort est proche, dit-il (II Tim., IV, 6), et le temps de consommer mon sacrifice n'est pas loin : J'ai bien combattu, j'ai achevé ma course, j'ai gardé la foi. C'est comme s'il disait : Voilà ce que j'ai fait, dans le temps de la miséricorde. Voyez comment il parle ensuite du temps où Dieu jugera. Il me reste à attendre la couronne de justice que le juste juge me rendra en ce jour. Il me la rendra, dit-il : il ne dit pas qu'il la lui donnera. Quand d'abord il lui donnait sa grâce, il était miséricordieux ; mais en lui ren-
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dant la couronne, il sera un juste juge : ce qui rappelle les premières paroles de ce psaume : Seigneur, je relèverai par mes cantiques votre miséricorde et votre justice. Il pardonne les péchés ; il donne ensuite la couronne en récompensant les bons, parce qu'il est un juste juge. Pourquoi est-il un juste juge lorsqu'il me récompense, et qu'il me rend la couronne de justice ? C'est parce que j'ai bien combattu, que j'ai achevé ma course, et que j'ai gardé la foi. Un juste juge ne trouve rien qu’à couronner en toutes ces choses (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. V, p. 338-339). "
15. Le même, Tract. III in Evangelium Joannis : " En vivant de la foi, vous mériterez de posséder Dieu ; vous aurez l'immortalité et la vie éternelle pour récompense. Mais cette récompense est encore une grâce. Car par où aurez-vous mérité d'avoir la vie éternelle, sinon par la grâce qui vous aura été donnée ? En effet, si la foi elle-même est une grâce, et si la vie éternelle est donnée pour récompense de la foi, Dieu semble, il est vrai, donner la vie éternelle comme acquittement d'une dette ; mais cette dette elle-même, envers qui l'a-t-il contractée ? Envers le fidèle qui se l'est acquise par sa foi. Mais comme la foi elle-même est une grâce, la vie éternelle est alors grâce pour grâce. "
" Ecoutez l'Apôtre reconnaître avant tout la grâce que Dieu lui a faite, et ne demander qu'en conséquence de cette grâce la récompense qui lui est due : J’étais auparavant, dit-il (I Tim., I, 13), un blasphémateur, un persécuteur, un outrageux ennemi de l'Eglise de Jésus- Christ ; mais j'ai obtenu miséricorde. Voilà comment il reconnaît la grâce qu'il à reçue. Il confesse qu'il était indigne de la recevoir, mais que, malgré son indignité, il l'a reçue cependant, non par un effet de ses mérites, mais par l'effet de la miséricorde de Dieu. Et voici comment, après avoir reçu cette grâce sans l'avoir méritée, il réclame comme due la récompense du bien qu'elle lui a fait faire : Je suis, dit-il (II Tim., IV, 6), comme une victime qui va être sacrifiée et le temps de ma mort approche. J’ai combattu le bon combat ; j'ai achevé ma course ; j'ai gardé ma foi. Il ne me reste plus qu'à attendre la couronne de justice qui m'est réservée. Il réclame une dette, il demande qu'elle lui soit acquittée. Car écoutez les paroles qui suivent : Que le Seigneur comme un juste juge me décernera dans ce dernier jour. Pour recevoir d'abord la grâce, il lui fallait un père plein de
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miséricorde pour obtenir la récompense qui est la suite de cette grâce, il s'adresse maintenant à la justice de son juge (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l’Evangile de saint Jean,
tome 1, pag. 275-276). "
16. Le second concile d'orange, canon 18 : " La récompense est due aux bonnes œuvres ; mais la grâce n’est due à personne, et elle précède nos bonnes œuvres puisqu'elle en est le principe. "
17. S. AUGUSTIN, in Ps. XLIX : " Rassemblez devant lui les justes. Quels sont ces justes, sinon ceux qui vivent de la foi et qui font des œuvres de miséricorde ? Car ces œuvres, selon l'Evangile, sont des œuvres de justice. Prenez garde, dit Jésus-Christ (M ATTH., VI, 1), de faire vos œuvres de justice devant les hommes dans l'intention d'en être regardés. Et comme si on lui eût demandé : De quelle justice parlez-vous ? il dit aussitôt après : Lors donc que vous faites l'aumône ; marquant par-là que les aumônes sont des œuvres de justice. Rassemblez devant lui les justes ; assemblez devant lui ceux qui ont eu compassion du pauvre, qui ont abaissé sur lui les yeux de leur cœur. Assemblez-les enfin, pour que le Seigneur les conserve, et qu'il leur donne la vie. Assemblez devant lui ses justes, qui ont scellé leur alliance avec lui par des sacrifices, c'est-à-dire, qui pensent à ses promesses dans toutes les œuvres qu'ils font. Car toutes ces œuvres sont des sacrifices, puisque Dieu à dit lui-même : J'aime mieux la miséricorde que le sacrifice (Os., VI, 6). Qui ont scellé leur alliance avec lui par des sacrifices. "
" Les cieux annonceront sa justice. Les cieux nous ont en effet annoncé la justice de Dieu. Les Evangélistes nous l'ont prédit : nous avons appris d'eux qu'il y en aurait que Dieu mettrait à sa droite, et à qui il dirait : Venez, les bénis de mon Père, recevez. . . Quoi ? Le royaume. Pourquoi ? Parce que j’ai eu faim, et que vous m'avez donné à manger. Qu'y a-t-il d'aussi bas et d'aussi terrestre, que de donner un morceau de pain à un pauvre ? Le royaume du ciel ne coûte pas davantage. Donnez de votre pain à celui qui a faim (Is., LVIII, 7) ; faites entrer chez vous le pauvre qui n’a point de logement ; lorsque vous verrez quelqu'un qui sera nu, donnez-lui de quoi se couvrir. Mais peut-être n'avez-vous pas de pain à lui donner, ni de logis pour l'abriter, ni d'habits pour le vêtir. Donnez-lui un verre d'eau froide, donnez, comme la veuve de l’Evangile, deux petites pièces d'argent. Cette veuve acheta autant valant avec ses deux petites pièces, que saint Pierre en
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quittant ses filets, et que Zachée en donnant la moitié de son patrimoine aux pauvres. Le royaume des cieux ne coûte qu'autant que vous avez pour l'acheter (Cf. Sermons de saint Augustin, t. II, p. 612-614). "
18. Le même, in Ps. CXI : " Sa race sera puissante sur la terre. Ce mot de race est remplacé dans l'original par celui de semence. Saint Paul dit que la semence qui nous prépare une moisson pour l'avenir, ce sont les œuvres de miséricorde. Ne nous lassons point, dit-il, de faire le bien, puisque, si nous ne perdons point courage, nous en recueillerons le fruit et la moisson en son temps (Gal., VI, 9). Et il dit ailleurs : Celui qui sème peu, recueillera peu (II Cor., IX, 6). Or, qu'y a-t-il de plus puissant, que de faire que le royaume de Dieu, qui à coûté à Zachée la moitié de tous ses biens, ne coûte à cette bonne veuve que deux petites pièce de monnaie, et que cette dernière possède dans le ciel autant que le premier ? Qu'y a-t-il de plus puissant, que de faire qu'un royaume que l'homme le plus riche n'achète pas trop cher de tous ses biens, soit acheté par le pauvre au prix d'un verre d'eau froide (Cf. Ibid., t. VI, p. 57-58) ? "
19. Le même, de octo Dulcitii quæstiombus,
q. IV ; c'est la répétition de ce que nous venons de citer
de sa paraphrase sur le psaume CXI.
Question III
Quelles sont les principales espèces de bonnes œuvres où se fait reconnaître et s’exerce particulièrement la justice chrétienne ?
L'Ecriture nous en marque trois, qui sont la prière, le jeûne et l'aumône. Car toutes les autres bonnes œuvres à peu près, qui ont pour principe une foi vive, et qui font briller, croître et grandir la justice du chrétien, peuvent se rapporter sans peine à ces trois sources. De là ce sublime oracle de l'ange Raphaël : La prière accompagnée du jeûne et de l’aumône, vaut mieux que tous les trésors et tout l'or qu'on peut amasser. Saint Augustin a dit de même : " La justice de l'homme en cette vie consiste dans le jeûne, l'aumône et la prière. "
Notre-Seigneur, dans l’Evangile de saint Matthieu, nous donne des instructions sur chacune de ces vertus, et il promet de plus la récompense céleste comme déjà toute préparée à ceux qui, faisant partie de son Eglise, pratiquent sans hypocrisie et de bon
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cœur le jeûne, la prière et l'aumône. De là cette assurance qu'il nous donne, et qu'il nous réitère tant de fois, que notre Père qui voit ce qui se passe dans le secret, nous en rendra la récompense. C'est en ces choses aussi qu'il veut que notre justice abonde pour que nous puissions un jour entrer dans le royaume des cieux ; c'est par-là qu'elle doit luire devant les hommes, afin que, voyant nos bonnes actions, ils en glorifient le Père céleste. C'est pour cela que nous avons été créés ou régénérés en Jésus- Christ ; ce sont là les œuvres que Dieu nous à préparées pour nous occuper toute notre vie. Ce sera, pour les avoir pratiquées par amour pour Dieu, que les justes seront admis dans le ciel où ils règneront éternellement, comme ce sera pour en avoir négligé la pratique, que les méchants seront précipités dans le feu éternel de l'enfer.
Or, autant c'est une chose vaine et pharisaïque de
vanter sa propre justice en méprisant les autres, et de mettre sa
confiance dans ses bonnes œuvres, autant il est raisonnable et digne d'un
chrétien de s'adonner aux bonnes œuvres dans des sentiments d'humilité,
ou, si l'on se glorifie, de se glorifier dans le Seigneur, qui opère
en nous le vouloir et le faire, comme le dit l'Apôtre.
TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. TOBIE, XII, 8 : " La prière, etc. (comme dans le corps de la réponse). "
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2. MATTHIEU, VI, 1-6, 16-18 : " Gardez-vous bien de faire vos bonnes œuvres devant les hommes pour attirer sur vous leurs regards ; autrement vous ne recevrez point de récompense de votre Père qui est dans les cieux. - Lors donc que vous faites l'aumône, ne sonnez pas de la trompette devant vous, comme font les hypocrites dans les rues et les synagogues pour se faire honorer des hommes. - Je vous le dis en vérité, ils ont reçu leur récompense. - Pour vous, quand vous faites l'aumône, que votre main gauche ne sache pas ce que fait la droite, - afin que votre aumône soit tenue dans le secret ; et votre Père, qui voit ce qui se passe dans le secret, vous en rendra la récompense. - Et quand vous priez, ne faites pas comme les hypocrites, qui aiment prier debout dans les synagogues et dans les carrefours pour être vus des hommes. - Je vous le dis en vérité, ils ont reçu leur récompense. - Pour vous, quand vous prierez, entrez dans votre chambre, et après en avoir fermé la porte, priez votre Père en secret, et votre Père qui voit ce qui se passe dans le secret, vous en rendra la récompense. "
" Quand vous jeûnez, ne soyez pas tristes comme les hypocrites ; car ils exténuent leur visage, pour que leur jeûne apparaisse aux yeux des hommes. - Je vous le dis en vérité, ils ont reçu leur récompense. - Pour vous, quand vous jeûnez, parfumez-vous la tête et lavez-vous la figure, - afin que les hommes ne voient pas que vous jeûnez mais seulement votre Père, qui est présent à ce qui se passe dans le secret ; et votre Père qui voit ce qui se passe dans le secret, vous en rendra la récompense. "
3. Ibidem, V, 20, 16 : " Je vous le dis, si votre justice n'abonde plus que celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux. "
" Que votre lumière luise devant les hommes, afin que, voyant vos bonnes œuvres, ils glorifient votre Père qui est dans les cieux. "
4. Ephésiens, II, 10 : à Nous sommes son ouvrage, étant créés en Jésus-Christ pour les bonnes œuvres que Dieu à préparées afin qu'elles soient l'occupation de toute notre vie. "
5. MATTHIEU, XXV, 34-36, 41-43, 46 : " Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite : Venez, les bénis de mon Père posséder le royaume préparé pour vous dès le commencement du
monde. - Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire ; j'étais sans asile, et vous m'avez recueilli ; - nu, et vous m'avez vêtu ; malade, et vous m'avez visité ; en prison, et vous êtes venus me voir.
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" Il dira ensuite à ceux qui seront à sa gauche : Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel, préparé pour le diable et ses anges. - Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger ; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire ; - j'étais sans asile, et vous ne m'avez pas recueilli ; nu, et vous ne m'avez pas vêtu ; malade, en prison, et vous ne m'avez pas visité. "
" Et ceux-ci iront au supplice éternel et les justes entreront en possession de la vie éternelle. "
6. JEAN, V, 28-29 : " Ne vous étonnez pas de ce que je vais vous dire : L'heure vient où tous ceux qui seront dans les sépulcres entendront la voix du Fils de Dieu. - Et ceux qui auront fait le bien sortiront des tombeaux pour ressusciter à la vie ; et ceux qui auront fait le mal en sortiront pour ressusciter à leur condamnation. "
7. LUC, XVIII, 10-14 : " Deux hommes montèrent au temple pour y faire leur prière ; l'un était pharisien, et l'autre publicain. - Le pharisien, debout, priait ainsi en lui-même : Mon Dieu, je vous rends grâces de ce que je ne suis pas comme les autres hommes, qui sont voleurs, injustes, adultères, ni non plus comme ce publicain, etc. - Je vous déclare que celui-ci s'en retourna justifié dans sa maison, et non pas l'autre ; car quiconque s'élève sera abaissé, et quiconque s'abaisse sera élevé. "
8. Romains, X, 2-3 : " Je puis leur rendre (aux Juifs) ce témoignage, qu'ils ont du zèle pour Dieu ; mais leur zèle n'est pas selon la science ; - parce que, ne connaissant pas la justice qui vient de Dieu, et cherchant à établir leur propre justice, ils ne se sont pas soumis à Dieu pour recevoir cette justice qui vient de lui. "
9. I Corinthiens, I, 30-31 : " Vous êtes établi en Jésus-Christ qui nous a été donné de Dieu pour être notre sagesse, notre justice, notre sanctification et notre rédemption, afin que, selon qu'il est écrit, celui qui se glorifie ne se glorifie que dans le Seigneur. "
10. II Corinthiens, X, 17-18 : " Que celui qui se glorifie se glorifie dans le Seigneur : - car ce n'est pas celui qui se rend témoignage à lui-même qui est vraiment estimable ; mais celui à qui Dieu rend témoignage. "
11. Philippiens, II, 15 : " C'est Dieu qui opère en vous et le vouloir et le faire, selon qu'il lui plaît. "
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TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. PIERRE CHRYSOLOGUE, évêque de Ravenne, Serm. XLIII : " Il est trois choses, mes frères, qui soutiennent la foi, conservent la dévotion, entretiennent la vertu : la prière, le jeûne et la miséricorde. Ce que la prière demande, le jeûne l'obtient, et la miséricorde le reçoit. Là prière, la miséricorde et le jeûne sont trois choses qui n'en font qu'une, et qui se donnent réciproquement la vie. Car le jeûne est l'âme de la prière et la miséricorde est la vie du jeûne. Que personne n'entreprenne de séparer ces trois choses : elles sont inséparables. Celui qui possède l'une des trois sans posséder en même temps les deux autres, est comme s'il n'en possédait aucune. Que celui donc qui prie n'omette pas de jeûner ; que celui qui jeûne n'oublie pas d'exercer la miséricorde ; qu'il exauce les supplications qui lui sont adressées, s'il désire être exaucé lui-même ; il engagera Dieu à lui prêter l'oreille, s'il prête lui-même l'oreille aux malheureux qui le supplient. Que celui qui jeûne par pénitence compatisse à celui qui jeûne par besoin ; qu'il comprenne la faim dont souffrent ses semblables, s'il veut que Dieu comprenne celle qu'il endure volontairement lui-même ; qu'il fasse miséricorde s'il espère obtenir lui-même miséricorde ; s'il réclame l'indulgence, qu'il soit lui-même indulgent ; s'il implore ta bonté de Dieu, qu'il soit bienfaisant lui-même. O homme, appliquez-vous à former en vous-même comme un échantillon de la miséricorde que vous voulez trouver en Dieu : que votre charité pour votre prochain soit aussi empressée, aussi abondante, aussi officieuse et bienveillante que celle que vous voulez que Dieu ait pour vous. Que la miséricorde, la prière et le jeûne fassent donc pour nous auprès de Dieu l'office d'un même avocat ou d'une même plaidoirie, ou que ce soit une même prière sous trois formes différentes. Voilà, mes frères, ce qui vous ouvrira l'entrée du ciel, ce qui vous gagnera le cœur de votre souverain juge, ce qui plaidera au tribunal de Jésus-Christ à cause du genre humain, ce qui obtiendra pardon pour les pécheurs, indulgence pour les coupables. Celui qui n'aura pas ce triple patronage dans le ciel, n'a qu'à se désespérer sur la terre ; car, en même temps que c'est là ce qui met à notre disposition tous les biens célestes, c’est là aussi ce qui règle les choses d'ici-bas, ce qui nous modère dans la prospérité, ce qui nous soutient contre l'adversité, ce qui donne la mort à tous les vices, la vie à toutes les vertus, ce qui
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rend nos corps chastes, nos cœur purs, ce qui met la tranquillité dans nos membres, la paix dans nos âmes, la subordination dans nos sens ; c'est là ce qui fait de la poitrine du chrétien comme un temple de Dieu, du chrétien lui-même un ange, de l'homme enfin, osons le dire, quelque chose de divin. C'est là en effet ce qui fit de Moïse le dieu de Pharaon (Exod., VII, 1 et suiv., XIV, 21), ce qui lui soumit tous les éléments devenus les instruments de ses victoires et de ses triomphes ; ce qui lui ouvrit la mer, en suspendit les eaux, en dessécha le lit, ce qui changea pour son peuple la rosée du ciel en un pain substantiel et nourrissant, ce qui obligea les vents à lui apporter des viandes succulentes, les nuits les plus profondes à resplendir pour son armée de tout l'éclat du jour, le soleil le plus brûlant à tempérer à son tour l'ardeur de ses rayons, les rochers les plus durs à se fondre pour son peuple altéré en sources d'eau vive : ainsi mérita-t-il d’être choisi pour révéler à la terre les lois du ciel, pour tracer le premier dans ses écrit la règle des mœurs, pour marquer les devoirs des rois et des peuples. C'est aussi par-là qu'Elie a su échapper à la mort, s'élever de la terre au ciel, devenir le concitoyen des anges, l'hôte familier de Dieu, et transporter dans les demeures céleste un corps formé de limon (II Rois, II, 11). C'est là ce qui a fait de Jean un ange revêtu de chair, un habitant du ciel vivant parmi les hommes, et lui a procuré le singulier avantage d'entendre, de voir, de toucher la Trinité entière (MARC, I, 2, 10). Nous donc aussi, mes frères, si nous voulons être associés à la gloire de Moïse, au triomphe d’Elie, aux vertus de Jean, aux mérites de tous les saints, appliquons-nous à la prière, pratiquons le jeûne, exerçons-nous aux œuvre de miséricorde ; celui qui se rendra ces pratiques familières, qui en fera ses armes de défense, n'aura rien à craindre, valeureux soldat du Christ, ni des amorces du péché, ni des traits enflammés du diable, ni des séductions du monde, ni de la tourbe des vices, ni des convoitises de la chair, ni des attraits de la volupté, ni de tout ce qui pourrait donner la mort à son âme. Mais nous qui tous les matins à notre réveil ne savons comment se passera la journée, qui vivons au milieu des périls pour qui la variété des saisons, l’inconstance du temps, une parole qui échappe, un mouvement de la pensée, tout enfin est occasion de péché, quelle raison avons-nous qui nous empêche d'aller à l'église offrir à Dieu tous les matins les prémices de la journée, de nous assurer par la prière du matin la protection de Dieu pour chaque jour,
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te faire au moins quelques instants la cour à notre Dieu, nous qui ne craignons pas la peine de la faire toute notre vie à des hommes ? Ce n'est pas là, mes frères consulter nos intérêts, mais c'est obéir aux suggestions de notre ennemi, qui s’apprête à nous tromper, et qui, pour mieux y réussir, nous inspire le dégoût de la prière. Quel droit a de se plaindre des adversités qui lui surviennent, celui qui dédaigne de faire des vœux pour son bonheur ? Ecoutons cet avertissement que Dieu nous donne : Priez, pour que vous ne tombiez point dans la tentation (MATTH., XXVI, 41). C'est se jeter dans la tentation, que de ne pas recourir à la prière. Le Prophète ne l'ignorait pas, quand il disait : Venez, adorons Dieu, prosternons-nous et pleurons devant le Seigneur qui nous a créés (Ps. XCIV, 6). Daigne-t-il, pensez-vous, répandre ses larmes devant le Seigneur, celui qui ne daigne pas même remuer ses lèvres pour une formule de prière ? Si l'amour de Dieu ne suffit pas pour nous porter à le prier chaque matin, que la crainte au moins nous en fournisse le motif, et si nous ne cédons pas à l'attrait des biens pour remplir ce devoir, cédons à la perspective des maux. Le malheur des temps est pour nous, croyez-moi, l'effet du mépris que nous faisons de Dieu, et non le résultat du cours naturel des choses. Ce que notre impiété nous a fait perdre, tâchons de le regagner par le jeûne ; que le jeûne soit le glaive avec lequel nous immolions nos âmes à Dieu ; car il n'y a point de sacrifice plus agréable à Dieu que celui-là, comme nous en assure le Prophète par ces paroles : Un esprit brisé de douleur est un sacrifice digne de Dieu ; Dieu ne méprise point un cœur contrit et humilié (Ps. L, 19). O homme, offrez à Dieu votre âme en sacrifice, et que ce sacrifice revête la forme du jeûne pour que l'hostie soit sans tache, le sacrifice saint, la victime vivante, vivante pour Dieu et vivifiante pour vous-même. Refuser à Dieu un sacrifice semblable, c'est s'enlever à soi-même toute excuse, puisqu'on ne s'appauvrit en rien, on ne se dépossède au fond de rien par une telle offrande. Mais pour qu'elle soit agréable, elle doit être accompagnée de la miséricorde, le jeûne est stérile si la miséricorde ne le féconde, la miséricorde est une rosée sans laquelle le jeûne ne germe pas ; la miséricorde est pour le jeûne ce que la pluie est pour la terre. En vain le jeûne purifierait-il l’âme et le corps, détruirait les vices, produirait-il des semences de vertus : ces vertus ne produiront de fruits qu'autant que la miséricorde, comme une douce rosée, en fera monter la sève. Jeûneur, croyez-moi, votre champ manque d'engrais quand la
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miséricorde y manque ; si vous voulez remplir vos greniers de vos récoltes, confiez la miséricorde à l’emploi de vos biens. Au lieu donc de tout perdre par vos épargnes, faites profit de tout par vos libéralités ; donnez à vous-même en donnant aux pauvres, au lieu que ces même biens que vous laisseriez à vos héritiers seraient perdus pour vous. "
2. S. LEON, Serm. I sur le jeûne du dixième mois : " Les principaux actes de la religion sont au nombre de trois, la prière, le jeûne et l'aumône ; tous les temps sont propres à la pratique de ces vertus, mais il faut redoubler de zèle à l'époque que leur a consacré la tradition apostolique. Selon cette loi antique, le dixième mois est cette époque où nous devons exercer avec le plus de piété ces trois vertus dont je viens de vous parler. La prière nous rend la Divinité propice, le jeûne amortit la concupiscence de la chair, les aumônes effacent nos péchés et ces trois vertus réunies nous rendent de nouveau semblables à Dieu, pourvu que nous soyons toujours prêts à chanter ses louanges, et que nous veillions sans cesse à être purs de tout péché et à secourir notre prochain dans son infortune. Ces trois vertus, bien observées, renferment à elles seules tous les mérites et toute l'efficacité des autres. Elles impriment en nous les traits de la Divinité et nous unissent inséparablement au Saint-Esprit. La prière conserve la rectitude de la foi, le jeûne contribue à rendre notre vie pure, et l'aumône accoutume notre cœur à la bienfaisance. Nous jeûnerons aussi la quatrième et la sixième férie et le samedi nous célébrerons les vigiles dans l’église du bienheureux apôtre Pierre, afin qu'il daigne par son intercession donner plus de crédit à nos prières, à nos jeûnes et à nos aumônes, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit dans les siècles des siècles. "
3. Le même, Serm. IV de jejunio decimi mensis ; voir ce passage rapporté plus bas, à la question qui suivra immédiatement celle-ci, témoignage 42.
4. S. BERNARD, in Sententiis, sect. 11 : " Il est trois choses dont doivent s'abstenir tous ceux qui ont besoin de la grâce de la justification, et qui désirent en être favorisés. La première, ce sont les œuvres de ténèbres, la seconde, ce sont les désirs de la chair ; la troisième ce sont les embarras du siècle. Il y a de même trois choses auxquelles ils doivent s'appliquer, et que Notre-Seigneur lui-même leur recommande dans son sermon de la montagne : ce sont l'aumône, le jeûne et la prière. Car l'œuvre de la justifi-
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cation s'accomplit en nous, lorsque nous nous interdisons ce qui nous est défendu, et que nous nous portons fidèlement à tout ce qui nous est commandé. Sachons donc opposer aux œuvres des ténèbres les œuvres de miséricorde, aux désirs de la chair la pratique du jeûne, et aux embarras du siècle l'amour de Dieu et l'exercice de la prière. "
5. S. AUGUSTIN, de perfectione justitiæ responsione XVII : " Après cette vie sera donnée la récompense céleste, mais à ceux-là seulement qui pendant la vie présente auront travaillé à la mériter. Car on ne pourra être rassasié dans l'autre monde par la possession de la justice souveraine, qu'autant que dans celui-ci on en aura été affamé et altéré. Bienheureux, nous dit Jésus-Christ, ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu'ils seront rassasiés (MATTH., V, 6). Tant que nous sommes éloignés du Seigneur et ainsi hors de notre patrie, nous ne marchons qu'éclairés par le flambeau de la foi, au lieu de l'être par la claire vision du soleil des esprits (II Cor., V, 6-7) ; de là ce mot du Prophète : Le juste vit de la foi (HABAC., II, 4). La perfection de notre justice dans ce lieu de pèlerinage consiste donc à tendre d'un pas droit et d'une marche résolue vers cette justice parfaite et souveraine, dont la beauté contemplée à découvert contentera tous nos désirs en châtiant notre corps et le réduisant en servitude, en faisant l'aumône avec joie et de bon cœur, soit par le sacrifice de nos biens en faveur des pauvres, soit par le pardon des offenses commises contre nous, en nous adonnant enfin à l'exercice assidu de la prière, en même temps que, fermement attachés à la saine doctrine, nous nourrirons et ferons croître en nous la foi, l'espérance et la charité. Voilà quelle peut être présentement notre justice, affamés et altérés que nous devons être dans notre course laborieuse, de cette justice parfaite et souveraine qui nous rassasiera un jour. Aussi lisons-nous dans l’Evangile, que Notre-Seigneur, après avoir dit : Ne faites pas vos bonnes œuvre devant les hommes en vue d'attirer sur vous leurs regards (MATTH., VI, 1), pour nous détourner de nous proposer la gloire humaine pour but de nos efforts, ne nous a pas enseigné d'autres moyens de bonnes œuvres que ces trois : le jeûne, l’aumône et la prière ; en entendant par le jeûne toute sorte de mortifications corporelles, par les aumônes tous les actes de bienfaisance ou de bienveillance, tels que l'aumône proprement dite et le pardon des injures, et par la prière tous les divers exercices de religion et de piété. "
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6. S. AUGUSTIN, in Ps. XLII : " Voici l'abrégé de toute la justice de l'homme en cette vie : le jeûne, l'aumône et la prière. Voulez-vous que votre prière vole et s'élève jusqu'à Dieu ? Donnez-lui pour ailes le jeûne et l'aumône (Cf. Sermons de saint Augustin, t. II, p. 386). "
7. Le même, Serm. LX de tempore : " Celui qui fait l'aumône en vue d'être loué des hommes, est comme s'il la faisait devant les hommes quand même il la ferait en secret, parce que c'est leur louange qu'il cherche en cela. Celui au contraire qui fait l'aumône uniquement par amour pour Dieu, afin que son exemple soit imité des autres à l'avantage commun, et pour que Dieu en soit loué et non lui-même fait son aumône en secret quand même il la ferait en public, parce qu'en faisant cette aumône il cherche à se procurer, non les biens qui se voient, mais ceux qui ne se voient pas, et qu'il ambitionne de recevoir non la louange des hommes, mais la récompense de Dieu même. Disons la même chose du jeûne. De ce que Notre-Seigneur a dit : Parfumez-vous la tête et lavez-vous la figure, pour que les hommes ne voient pas que vous jeûnez (MATTH., VI, 18), s'ensuit-il que nous allons contre son précepte lorsque nous ordonnons des jeûnes publics, ou que nous jeûnons à la vue du peuple et le peuple avec nous ? Il faut donc entendre par-là, qu'on ne doit pas jeûner en vue d'être loué des hommes, mais pour obtenir le pardon de nos péchés et nous concilier la miséricorde divine. Que chacun interroge là-dessus sa conscience, et si c'est pour l'amour de Dieu seulement qu'il fait l'aumône, qu'il ne craigne pas de la faire en public, afin que ceux qui le verront puissent l'imiter. Car ces paroles qu'a dites aussi Notre-Seigneur : Que votre main gauche ne sache pas ce que fait votre droite, doivent être entendues dans le même sens que ce que nous venons de dire. La main droite en effet signifie l'amour de Dieu, et la gauche la vanité ou la cupidité mondaine. Si vous faites l'aumône pour être loué des hommes, votre gauche alors fait tout, et votre droite ne fait rien. Mais si vous faites l'aumône pour que Dieu vous pardonne vos péchés et qu'il vous donne la vie éternelle, c’est alors votre main droite toute seule qui agit. Que veulent donc dire ces paroles : Que votre gauche ne sache pas ce que fait votre droite, sinon, que vous ne devez pas permettre à la vanité et à la cupidité mondaines de gâter et de perdre en vous ce que vous a fait faire l'amour de Dieu ?. . . "
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" Si dans vos prière vous demandez à Dieu quelqu'un des biens visibles, c'est comme si vous faisiez votre prière devant les hommes, parce que c'est ce que les hommes voient que vous demandez à Dieu. Mais si vous faites votre prière en vue d'obtenir le pardon de vos péchés et la vie éternelle, vous la faites dans le secret, quand même vous la feriez en public, parce que la chose que vous demandez à Dieu n'est pas ce que voient les hommes, mais ce qu'ils ne voient pas. Car ce qui se voit, ce sont les biens temporels ; ce qui ne se voit pas au contraire, ce sont les biens éternels (II Cor., IV, 18). "
8. Le concile de Trente, session VI, chapitre XVI : voir dans ce chapitre ce qui est dit des bonnes œuvres, passage rapporté plus haut, question II, témoignage 6, page 295.
Article II. - DU JEUNE.
Question I
Qu’est-ce que le jeûne ?
Ce mot présente plusieurs significations. Le grand jeûne, le jeûne commandé à tous, c'est, dit saint Augustin, de s'abstenir de toute iniquité et des coupables voluptés du siècle. On distingue ensuite le jeûne appelé philosophique, qui est la tempérance et la sobriété dans le boire et le manger, vertu qui n'était pas inconnue des païens eux-mêmes, du moment où ils écoutaient la voix de la droite raison. Enfin il y a le jeûne ecclésiastique, qui consiste à se retrancher l'usage de la viande et à se contenter d'un unique repas en certains jours, d'après l'usage et la loi de l’Eglise.
Rien de plus conforme à la piété et à l'esprit du christianisme, que le jeûne pris dans ce dernier sens, quand on s'y propose pour fin d'honorer Dieu, de dompter la chair et de la soumettre à l'esprit, de produire de dignes fruits de pénitences, de pratiquer l'obéissance ou enfin d'obtenir quelque grâce particulière de Dieu.
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TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Tract. XVIII in Joannem : " Le grand jeûne, le jeûne parfait et universel, consiste à s'abstenir de l'iniquité et des plaisirs criminels du siècle en sorte que, renonçant à l’impiété et aux passions mondaines, nous vivions dans le siècle présent avec tempérance, justice et piété. A quoi l'Apôtre ajoute, pour marquer quelle doit être la récompense d’un jeûne de cette nature : Dans l'attente de la béatitude que nous espérons, et de l’avènement glorieux du Dieu auteur de toute félicité de Jésus-Christ notre Sauveur (Tit., II, 12). Nous observons donc en cette vie comme un carême d'abstinence lorsque nous vivons bien, et que nous nous abstenons du péché et des plaisirs déréglés (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l’Evangile de saint Jean, tome Ier, pag. 559). "
2. Le même, Lib. II quæstionum evangelicarum, c. 18 : " L'Ecriture nous prescrit à tous un jeûne général qui ne consiste pas seulement à s'abstenir de certains mets, mais à réprimer
toute volupté ou tout désir sensuel. "
3. S. JEROME, liv. II contre Jovinien, c. 9 (al. 2) : " Dicéarque, dans ses livres d'antiquité et dans sa description de la Grèce, rapporte que, sous Saturne, c'est-à-dire au siècle d'or, quand la terre produisait tout d'elle-même, personne ne mangeait de viande, mais que tout le monde vivait des légumes et des fruits que la terre sans besoin de culture faisait sortir de son sein. Xénophon, dans ces huit volumes où il déroule la vie de Cyrus, roi des Perses, assure que ce peuple ne vivait que de farine d'orge, de cresson, de sel et de pain grossier. Le même Xénophon, Théophraste et presque tous les historiens de la Grèce nous vantent la modeste table et la frugalité des Lacédémoniens. "
" Le stoïcien Chérémon, personnage très-éloquent, raconte des anciens prêtres de l’Egypte, que, laissant de côté toutes les affaires, et tous les soins du monde, ils vivaient toujours dans le temple, contemplaient la nature des choses, la marche des astres et les causes de leurs révolutions ; n’avaient aucun commerce avec les personnes du sexe, ne voyaient, jamais leurs parents et
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leurs proches, ni même leurs propres enfants, et cela du jour où ils avaient commencé à se consacrer au culte divin ; qu'ils s'abstenaient constamment de viande et de vin, à cause de l'évaporation et du vertige que cela aurait pu leur occasionner, mais surtout à cause des appétits libidineux qui naissent de cette nourriture et de cette boisson. Ils mangeaient rarement du pain, de crainte de se charger l'estomac ; et si parfois ils en mangeaient, alors ils mêlaient à leur nourriture de l'hysope broyée afin de corriger par l'arôme de cette plante ce que le froment leur présentait de trop substantiel. Ils n'assaisonnaient leurs légumes que d'huile, et encore en petite quantités seulement pour éviter la nausée et adoucir l'âcreté du goût. Que dire des volatiles, ajoute l'écrivain, puisqu'ils ne voulaient pas même goûter aux œufs ni au lait, par la raison, disaient-ils, que, sous une couleur différente, les œufs ne sont autre chose que des viandes à l'état liquide, et le lait rien autre chose que du sang ? Leurs lits n'étaient que des tissus de feuilles de palmiers appelées baies ; pour oreiller, ils mettaient par terre sous leurs têtes un escabeau incliné et oblique d'un côté, et ils restaient jusqu’à deux et même jusqu’à trois jours sans prendre aucune nourriture. Les humeurs que le corps contracte dans l'inaction ou par un séjour trop prolongé dans un même lieu, ils les dissipaient en observant une diète extrêmement sévère. "
" Josèphe, au second livre de la Captivité judaïque, et au dix-huitième des Antiquités, et dans ses deux volumes contre Appion, fait le tableau de trois sectes répandues parmi les Juifs, savoir celles des pharisiens, des sadducéens et des esséniens. Il exalte ces derniers par de magnifiques louanges, parce qu'ils s'abstenaient toute leur vie de femmes, de vin et de viandes, et se faisaient comme une seconde nature d'un jeûne continuel. Philon, homme très-savant, à écrit aussi un volume sur leur genre de vie. Néanthès de Cyzique, et Asclépiade de Chypre, rapportent dans leurs écrits qu’à l'époque où Pygmalion régnait en Orient, l'usage des viandes y était inconnu. Eubule, qui à écrit en plusieurs livres l'histoire de Mithra, raconte que, chez les Perses, il y a trois classes de mages, et que la première qui se compose des plus doctes et des plus éloquents, ne fait sa nourriture que de farine et de légumes. A Eleusis, on ne mange habituellement ni volailles, ni poisson, ni certains fruits. Bardesanes, philosophe babylonien, partage en deux sectes les gymnosophistes de l'Inde, et appelle les uns bragmanes, et les autres
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samanéens. Or, ces derniers sont d'une telle continence, qu'ils ne vivent que des fruits que portent les arbres du Gange, ou du riz et de la farine qu'ils reçoivent du gouvernement, et que, quand le roi se rend auprès d'eux, il se prosterne à leurs pieds, en attribuant à la vertu de leurs prières la prospérité dont peuvent jouir ses Etats. Euripide rapporte que, dans la Crète, les prophètes de Jupiter s'abstenaient non-seulement de viande, mais encore de toutes sortes d'aliments cuits. Le philosophe Xénocrates écrit que des lois de Triptolème il n'y à d'inscrit à
Athènes dans le temple d’Eleusis que ces trois préceptes : Honorer ses parents, vénérer les dieux, ne pas manger de viande. Orphée dans son poème témoigne son horreur pour ce même aliment. A notre honte, je parlerais aussi de la frugalité de Pythagore, de Socrate et d'Antisthènes si cela ne devait m'entraîner trop loin et ne demandait un ouvrage spécial. "
4. S. CLEMENR, pape et martyr, ou l'auteur des Constitutions apostoliques, livre V, chapitre 12 : Après l'Epiphanie, vous aurez à observer le jeûne du carême, qui nous rappelle l'exemple et le précepte qu'en a donnés Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ce jeûne doit être célébré avant celui de Pâques qui commencera au second jour de la semaine, et finira le vendredi. Après ces jours, vous entrerez dans la sainte semaine de Pâques, et vous jeûnerez tous dans cette semaine avec crainte et tremblement, en vous occupant pendant ces jours à prier pour ceux qui se perdent. "
5. Ibidem, c. 14 : " Il nous a donc ordonné de jeûner ces six jours (qui précédent la fête de Pâques) à cause de l'impiété et de l'endurcissement des Juifs, et il nous a recommandé de
pleurer le malheur qu'ils ont eu de se perdre. Car lui aussi a pleuré sur eux, de ce qu'ils avaient ignoré le temps de sa visite. Il nous à prescrit le jeûne du mercredi et celui du vendredi : le premier, à cause du jour où il à été trahi ; le second, à cause de celui de sa mort ; il a voulu de plus que le jeûne finit le septième jour au chant du coq. Il nous a ordonné de jeûner le samedi même. "
6. Ibidem, c. 17 : " Vous jeûnerez dans les jours de la Pâques, depuis le deuxième jour de la semaine jusqu'au vendredi et au samedi, en vous contentant de pain, de sel et de légumes et d'eau pour boisson. Vous vous abstiendrez de vin et de viande pendant ces jours ; car ce sont des jours de deuil, et non de fête. Le vendredi et le samedi devront être tout entiers
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des jours de jeûne pour ceux qui en auront la force, et ils ne rompront le jeûne que dans la nuit suivante, au chant du coq. S'il y en a qui ne puissent passer deux jours de suite sans rien prendre, ils observeront au moins le jeune du samedi ; car Notre-Seigneur a dit quelque part en parlant de lui-même : Un jour viendra que l'époux leur sera enlevé, et ils jeûneront dans ces jours-là ; or, les jours dont nous parlons sont ceux où il à été arrêté par les juifs perfides, où il à été crucifié et mis au nombre des scélérats. "
7. Ibidem, c. 18 : " C'est pourquoi nous vous avertissons de jeûner pendant ces jours, comme nous aussi nous avons jeûné jusqu'au soir, lorsqu'il nous a été enlevé. Les autres jours avant le vendredi, vous jeûnerez jusqu’à la neuvième heure, ou jusqu'au soir, où vous pourrez prendre de la nourriture, et chacun fera là-dessus comme il pourra. "
8. Ibidem, c. 19 : " Après la Pentecôte, vous passerez dans la joie la première semaine ; mais vous jeûnerez la semaine suivante ; car il est juste de se réjouir du don de Dieu, et de jeûner après ces jours de joie. Moïse et Elie, en effet, ont jeûné quarante jours, et Daniel pendant trois semaines entières s'est abstenu de mets délicats, et de viande comme de vin. Et Anne, demandant Samuel, disait : Je n'ai bu ni vin ni rien qui puisse enivrer, et je répandrai mon âme devant le Seigneur (I Rois, I, 15). Les Ninivites, en jeûnant trois jours et trois nuits, détournèrent de dessus eux la colère de Dieu. Esther aussi, Mardochée, Judith, triomphèrent par le jeûne des insultes que leur faisaient les impies, c'est-à-dire Aman et Holopherne. David disait de son côté : Mes genoux se sont affaiblis par le jeûne, et faute d'huile ma chair à été toute changée (Ps. CVIII, 24). Vous aussi, donnez le jeûne pour appui à vos prières auprès de Dieu. Après la semaine consacrée tout entière au jeûne vous devrez jeûner encore tous les mercredis et tous les vendredis, et ce que vous vous retrancherez par le jeûne à vous-mêmes vous le donnerez aux pauvres. "
9. S. ISIDORE de Séville, Lib. I de ecclesiasticis officiis, c. 36 : " Les Ecritures sacrées nous marquent quatre temps pour les jeûnes, jours où l'on accompagnera d'abstinence et de larmes de componction les prières qu'on offrira au Seigneur ; et quoiqu'il convienne de prier tous les jours et de faire tous les jours pénitence, on devra cependant vaquer davantage au jeûne et à la pénitence dans les temps que nous venons de dire. Le premier
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de ces jeûnes est celui de la Quadragésime, qui a eu ses premiers modèles, comme nous l'apprennent les livres de l'Ancien-Testament, dans Moïse, dans Elie, et comme nous l'apprend l'Evangile, dans Notre-Seigneur, qui a jeûné le même nombre de jours, nous montrant par-là que L’Evangile n'est point en désaccord avec la loi et les prophètes. Car la loi a son représentant dans Moïse et les prophètes ont le leur dans Elie, et Notre-Seigneur a voulu se montrer placé entre les deux sur la montagne où eut lieu sa glorieuse transfiguration, pour nous rendre plus sensible à cette vérité exprimée par l'Apôtre, que la loi et les prophètes-lui ont rendu témoignage (Rom., III, 21). Mais à quel temps de l'année conviendrait-il mieux de fixer l'observance quadragésimale qu'à celui qui approche le plus de celui de la passion de Notre-Seigneur, puisqu'elle à pour objet de signifier l'état laborieux de cette vie, qui demande de notre part aussi la continence, ou le jeûne que nous devons observer par rapport aux plaisirs séduisants du monde, en nous contentant de la manne pour toute nourriture, c'est-à-dire des instructions spirituelles et célestes. D’un autre côté, ce nombre de quarante figure la vie à venir, en ce que le nombre dix, symbole de la perfection, indique par-là même notre parfaite félicité ; le nombre sept à son tour représente la créature qui s'attache à son Créateur et le nombre trois (complément de sept) indique la Trinité dans l'unité, prêchée aujourd'hui dans tout l'univers. Et comme le monde a ses quatre points cardinaux, qu'il résulte du mélange des quatre éléments (La chimie moderne à réformé ces idées), et que chaque année se partage en quatre saisons, le nombre dix se prend quatre fois et forme ainsi le nombre quarante, dont la signification symbolique est qu'il faut s'abstenir, par une sorte de jeûne spirituel, des séductions qu'offrent pour les sens les quatre saisons de l'année en vivant dans la continence et la chasteté. L’observance du jeûne des quarante jours fait encore allusion à un autre mystère. La loi de Moïse en effet prescrivait à tout le peuple d'offrir au Seigneur son Dieu la dîme et les prémices de tous les biens. Or, l'esprit de cette loi étant que nous rapportions à Dieu le commencement et la fin de toutes nos actions, le nombre quarante désignait admirablement l'acquittement complet de cette dîme spirituelle. Car une année entière se compose de trente-six jours répétés dix fois : retranchant donc des quarante jours les jours de dimanche
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où l'on ne jeûne pas, il nous reste trente-six jours (Il parlait par ce passage que l'usage de jeûner avant le premier dimanche de carême n'était pas encore établi en Espagne au septième siècle) où nous allons dans les églises offrir à Dieu la dîme de toute l'année par l'offrande que nous lui faisons avec joie des prémices de nos actions. Sans doute, comme l'observe Cassien (Collat ., XXI, c. 29), les parfaits ne se contentent pas d'observer cette loi de quarante jours de jeûne qui d'ailleurs n'est pas faite pour eux, et vont bien au-delà d'un nombre aussi restreint dans les jeûnes qu'ils s'imposent. Mais ce nombre à été déterminé par les chefs des Eglises, particulièrement pour ceux qui sont engagés tout le temps de l'année dans le tourbillon des plaisirs et des affaires du monde, afin que cette nécessité légale en quelque sorte les oblige à penser à Dieu au moins pendant ces jours, et à lui consacrer la dîme de toute l'année que sans cela ils seraient exposés à dissiper tout entière à leur propre usage. "
Ibidem, c. 37 : " Le second jeûne est celui qui commence après la Pentecôte, conformément à ce qu'a prescrit Moïse par ces paroles : Vous compterez sept semaines depuis le jour que vous aurez mis la faucille dans la moisson, etc. (Deut., XVI, 9 et suiv.).
Ibidem, c. 38, le saint docteur traite ici du jeûne du septième mois.
Ibidem, c. 39 et 40. Ces deux chapitres ont pour objet le jeûne des calendes de novembre et de février.
Ibidem, c. 41 : " Le jeûne de trois jours (comme apparemment celui des Quatre-Temps) a pour type celui des Ninivites, qui condamnant leurs propres désordres, s'adonnèrent tout entiers
pendant trois jours à la pratique du jeûne et de la pénitence et se couvrant de sacs comme des criminels, forcèrent Dieu en quelque sorte à leur faire miséricorde. "
Ibidem, c. 42 : " Outre ces temps marqué pour les jeûnes solennels, le sixième jour de chaque semaine est encore consacré au jeûne par quelques-uns en mémoire de la passion de Notre-Seigneur ; plusieurs même y ajoutent le samedi, parce que c'est le jour ou il à été enseveli, de peur qu'en se livrant ce jour-là à la joie, on ne paraisse accorder aux Juifs ce que Jésus-Christ leur a retiré par sa mort. On ne doit au contraire jamais jeûner le dimanche, pour montrer à tout le monde la joie que doit causer la résurrection de Notre-Seigneur, et surtout pour agir
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conformément à la règle suivie par le siège apostolique. Dans tout le temps qui s'écoule entre Pâques et la Pentecôte, quoique la tradition des Eglises soit de ne pas y pratiquer le jeûne on ne doit pas empêcher cependant les moines ou les clercs qui voudraient le faire, puisque nous lisons de saint Antoine, de saint Paul (ermite) et de plusieurs autres pères de ces temps-là, qu'ils jeûnaient même en ces jours, et ne rompaient le jeûne que le dimanche. Et comment blâmer cette ferveur de pénitence et ne pas plutôt en faire l'éloge ? Le jeûne est une chose sainte, une occupation céleste, la porte du royaume des cieux, le type de la vie future ; et en l'observant saintement, on s'unit à Dieu, on se sépare du monde, on devient tout spirituel. Le jeûne extermine les vices, humilie la chair, triomphe des pièges du démon. "
Ibidem, c. 43 : " De ces observances, comme de beaucoup d'autres encore, qui se pratiquent dans l'Eglise de Dieu, les unes nous sont recommandées dans les Ecritures canoniques, d'autres ne nous sont connues que par tradition ; avec cette différence que celles qui sont usitée dans le monde entier doivent avoir été instituées, soit par les apôtres eux-mêmes, soit par l'autorité péremptoire des conciles : telles sont les solennités de la passion de Notre-Seigneur, de sa résurrection et de son ascension au ciel, et de la descente du Saint-Esprit, qui se célèbre chaque année à leurs jours marqués, et les autres solennités qui peuvent être d'usage dans toute l'étendue de l’Eglise. Au lieu que les autres pratiques qui ne s'observent que dans certains pays à l'exclusion des autres, telles que le jeûne du samedi, la communion quotidienne, l'offrande journalière du saint sacrifice, qui dans d'autres pays ne se fait que le samedi et le dimanche, et dans d'autres le dimanche seulement, et autres semblables, ont pour auteurs les pasteurs particuliers de certaines Eglises, et la plus sage discipline à observer à cet égard est de se conformer l'usage établi dans l'Eglise particulière où l'on se trouve pour le moment. Car ce qui n'est ni contre la foi ni contre les mœurs doit être tenu pour indifférent et par-là même doit être observé par égard pour ceux avec qui on vit, de crainte que la diversité d'observances n'engendre des schismes. "
10. RABAN MAUR, de institutione clericorum, lib. II, c. 17 : " Le jeûne est une chose sainte, etc. " C'est le passage du chapitre 42 du livre 1 de saint Isidore de ecclesiasticis officiis, cité plus haut.
Ibidem, c. 18, le saint archevêque marque la distinction à établir
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entre un jeûne et ce qui s'appelait alors une station. " Quelques-uns, dit-il, distinguent entre un jeûne et une station. Car un jeûne est l'abstinence pratiquée un jour quelconque, non en vertu d'une loi, mais par notre seule volonté, une station au contraire est la même abstinence pratiquée dans les jours ou dans les temps fixés par une loi : dans les jours fixés par une loi, disons-nous, comme le jeûne de la quatrième et de la sixième férie prescrit d’après une loi ancienne, à laquelle font allusion ces paroles que l’Evangile met dans la bouche du pharisien : Je jeûne deux fois la semaine (JEAN, XVIII, 12) ; dans les temps fixés par une loi, comme les jeûnes du quatrième, du cinquième, du septième et du dixième mois ; ou comme ces jours dont parle l’Evangile, où l'époux a été enlevé du milieu de ses amis ; ou comme le jeûne quadragésimal qui s'observe en tous lieux, en vertu de l'institution apostolique, aux approches de la passion de Notre-Seigneur. "
Ibidem, c. 19, Raban Maur rapporte au sujet des jeûnes du quatrième du cinquième du septième et du dixième mois, les commentaires de saint Jérôme sur le prophète Zacharie. " Mais, ajoute-t-il, comme ces jeûnes ont été célébrés plutôt sous l'ancienne loi que sous la nouvelle, nous en parlerons seulement en passant, et pour ne pas paraître les omettre tout-à-fait, puisque le prophète Zacharie en a fait mention ; mais nous nous arrêterons principalement aux jeûnes institués dans la loi nouvelle. "
Ibidem, c. 20 : " Le premier de ces jeûnes est celui de la quadragésime, etc. " C'est la copie mot pour mot du chapitre 36 du livre 1 de ecclesiasticis officiis, rapporté précédemment, témoignage 9, page 319.
Ibidem, c. 21 et 22, le savant écrivain traite du jeûne de la Pentecôte et des jeûnes du neuvième et du dixième mois.
Ibidem, c. 23 : " Outre ces jeûnes il en est d'autres qui s'observent régulièrement, tels que celui de tous les vendredis, pratiqué par les fidèles en mémoire de la passion de Notre-Seigneur ; et celui du samedi, que plusieurs aussi observent en mémoire de sa sépulture et que nous trouvons établi dans les décrets du pape Innocent, de peur qu'en se livrant ce jour-là à la joie, on ne paraisse accorder aux Juifs ce que Jésus-Christ leur à retiré par sa mort. Il est d'ailleurs certain que les apôtres passèrent ces deux jours-la dans la tristesse, en se tenant cachés par la crainte qu'ils avaient des juifs, et par conséquent il n'est pas douteux qu'ils n'aient jeûné pendant ce temps : et cette règle
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doit être également observée toutes les semaines, parce que nous ne devons jamais nous lasser de célébrer la mémoire d’un si grand jour. Si l'on disait qu'il n'y a qu'un samedi dans toute l'année où l'on doive ainsi pratiquer le jeûne, on devrait donc dire aussi qu'il n'y a qu'un dimanche à célébrer dans toute l'année, savoir, celui de Pâques, et qu'un vendredi qui serait
celui qui précède immédiatement la fête de Pâques. "
Ibidem, c. 24 : " II y a de plus quatre samedis, en quatre mois différents, où sont établis des jeûnes particuliers, et les offices de ces jours se composent d'un plus grand nombre d'oraisons et de leçons. Ce sont les jeûnes du premier samedi du mois de mars ; du second samedi du quatrième mois, ou du mois de juin ; du troisième samedi du septième mois ou de septembre, et du quatrième samedi du dixième mois, c'est-à-dire de décembre. Le premier de ces jeûnes se célèbre à l'entrée du printemps concurremment avec celui du carême ; c'est le mois appelé par les Juifs celui des fruits nouveaux. Le second, ou celui de juin, a lieu après la Pentecôte et à l’entrée de l'été, temps marqué chez le peuple juif pour l'offrande des prémices qui consistaient en pains faits avec le froment nouvellement récolté, et ce jour-là était tout entier un jour de repos pour tout le monde. Le troisième est celui du septième mois ou de l'entrée de l'automne, mais qui dans la loi ancienne était tout entier consacré à Dieu par diverses solennités, telles que le jour des expiations, conformément à cet ordre que Dieu avait donné à Moïse : Le dixième jour de ce septième mois sera le jour des expiations : il sera très-célèbre et il s'appellera saint ; vous affligerez vos âmes en ce jour-là, et vous offrirez un holocauste au Seigneur. Vous ne ferez aucune œuvre servile dans tout ce jour, parce que c'est un jour de propitiation, afin que le Seigneur votre Dieu vous devienne favorable. Tout homme qui ne se sera point affligé en ce jour-là, périra du milieu de son peuple, etc. (Lévit., XXIII, 27 et suiv.). En ce même mois était la scénopégie ou la fête des tabernacles. Car c'était le quinzième jour de ce mois que les anciens célébraient cette solennité, qui durait sept jours. Le livre d'Esdras fait bien voir que les anciens jeûnaient en ces jours-là. Après que les enfants d'Israël, rapporte cet historien sacré, furent rentrés à Jérusalem et qu'ils eurent célébré avec une grande pompe la fête des tabernacles, ils s'assemblèrent, étant dans le jeûne, révolus de sacs et couverts de terre. . . , et ils se présentèrent devant le Seigneur, et ils confessèrent leurs péchés et les iniquités de leurs pères ; et se levant sur leurs
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pieds, ils lisaient dans le livre de la loi du Seigneur leur Dieu quatre fois le jour, et ils bénissaient et adoraient quatre fois la nuit le Seigneur leur Dieu (II ESD., IX, 1-3). Le quatrième jeûne, qui est celui de la quatrième semaine du dixième mois, précède la fête de la Nativité de Notre-Seigneur : on y annonce dans les leçons la prochaine venue du Sauveur, afin que les fidèles instruits par ce moyen, et saintement préparés par la prière en même temps que par le jeûne attendent avec une douce espérance la naissance du divin Rédempteur. Le mercredi et le vendredi qui précèdent chacun de ces quatre samedis dans la même semaine, doivent être également consacrés au jeûne, comme le prouvent assez les oraisons et les leçons marquées pour la messe à dire ces jours-là, ainsi que les exemples suivis de temps immémorial par nos pères. Les décrets du pape Gélase nous montrent aussi que c'est dans ces mêmes jours que doivent se faire les ordinations ; car voici le texte de ces décrets : " Les ordinations des prêtres et des diacres ne devront se faire qu'en certains temps et à certains jours, savoir, aux jours de jeûne du quatrième du septième et du dixième mois, ainsi que le samedi de la première semaine de carême et celui de la mi-carême, et non point avant le soir de chacun de ces jours. " Les offices de ces quatre samedis sont appelés vulgairement les douze leçons, parce que les leçons qu'on y lit et les psaumes qu'on y chante, réunis ensemble, font le nombre douze, et que ces psaumes peuvent fort bien être appelés leçons puisqu'ils sont comptés parmi les Ecritures canoniques. "
Ibidem, c. 25 : " Chacun peut en outre multiplier à son gré ses jeûnes ou prolonger son abstinence, pourvu qu'il s'attache avant tout à observer les jeûnes prescrits dont nous venons de parler, et que pratique religieusement en tous lieux la sainte Eglise apostolique. Chacun doit aussi observer scrupuleusement les jeûnes que l'évêque du lieu peut prescrire par une loi générale imposée à tous ses diocésains, soit dans un temps d'affliction, soit pour remercier Dieu de quelque grâce, parce qu'on pècherait en n'observant pas ces jeûnes ordonnés par des lois ; mais si à ces jeûnes obligatoires pour tous, on veut ensuite en ajouter de particuliers, on aura droit à une récompense particulière pour cette œuvre de surérogation. Nous lisons en effet de quelques saints qu'ils étendaient leurs jeûnes à deux et à trois jours de suite, et quelquefois à la semaine entière et de plusieurs qu'ils ne buvaient ni vin ni boisson, capable d'enivrer, on qu'ils se con-
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tentaient de pain sec et de légumes ; d'autres, qu'ils ne mangeaient jamais de viande ; d'autres, qu'ils ne mangeaient pas même de pain, mais qu'ils ne soutenaient leur corps qu'avec quelques figues sèches. On pourrait imaginer encore plusieurs autres sortes d'abstinence. Mais en s'abstenant d'un mets ou d'une boisson quelconque, on doit prendre garde avant tout de souiller son âme par la pensée secrète qu'on aurait de condamner, à l'exemple des Juifs, quelque chose que ce soit de ce que Dieu à créé, en disant : telle chose est bonne, telle autre est mauvaise ; tel animal est pur, tel autre est impur. Que celui qui serait tenté de penser ainsi, se rappelle cette parole de l'Apôtre : Tout ce que Dieu à créé est bon, et on ne doit rien rejeter de ce qui se mange avec action de grâce (I Tim., IV, 4) ; aussi bien que cette autre parole : Un homme fait mal de manger d'une viande, lorsqu'en le faisant il scandalise les autres (Rom., XIV, 20). "
11. IVES de Chartres (parte IV decretorum, c. 25) cite ces paroles extraites du décret du pape saint Télesphore, le septième après saint Pierre, adressé à tous les évêques (Ce prétendu décret est rejeté comme apocryphe ; mais il est ancien, et sert à constater les pratiques du temps où il à été produit pour la première fois. Il paraît du reste contredire cet autre décret, qui est le 24e du premier concile d’Orléans, tenu l'an 511 : Id à sacerdotibus omnibus decretum est, ut ante Paschæ solemnitatem, non quinquagesima, sed quadragesima teneatur : " Tous les évêques ont décidé d'un commun accord qu'il fallait observer, non une quinquagésime (ou cinquante jours de jeûne), mais la quadragésime avant la solennité de Pâques. " Cf. LABBE, Conc., t. IV, col. 1408) : " Sachez que nous et les autres évêques réunis autour de ce siège apostolique, avons ordonné qu'à partir de sept semaines avant Pâques, tous les clercs appelés à avoir Dieu pour partage devront s'abstenir de viande ; car leurs jeûnes doivent surpasser en austérité ceux des autres fidèles, autant qu'ils leur sont supérieurs eux-mêmes par leur vocation. Qu'en conséquence tant que dureront les sept semaines dont il s'agit, les clercs devront s'abstenir de viande comme de tout ce qui flatte la sensualité, et vaquer la nuit et le jour au chant des hymnes sacrés, aux veilles et aux prières. "
Ibidem, c. 26 : " Ives de Chartres cite la lettre (également apocryphe) de saint Calixte, pape et martyr, le quinzième après saint Pierre, à Benedictus, son frère dans l'épiscopat : " Le jeûne que vous savez qui s'observe chez nous trois fois l'année s’observera désormais quatre fois au lieu de trois, parce qu'il convient
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de le faire autant de fois que l'on compte de saisons dans chaque année. "
Ibidem, c. 28, se trouve cet extrait de la lettre (authentique) d'Innocent I à Decentius, évêque d'Eugubie, c. 4 : " Une raison prépondérante nous impose l'obligation de jeûner le samedi. Car si nous fêtons le dimanche, à cause de la résurrection de Notre-Seigneur, non-seulement le jour anniversaire de Pâques, mais encore toutes les semaines de l'année, et si nous jeûnons tous les vendredis en mémoire de la passion de Notre-Seigneur, nous ne devons pas négliger de faire de même le samedi, qui se trouve comme un intermédiaire placé entre un jour de tristesse et un jour de joie. Il est d'ailleurs indubitable que les apôtres ont été dans la tristesse pendant ces deux jours, où ils se sont tenus cachés à cause de la crainte qu'ils avaient des Juifs. Et il n'est pas douteux non plus qu'ils ont jeûne ces deux jours-là, puisque c'est encore une tradition de l’Eglise de ne pas célébrer les saints mystères pendant ce temps. Si l'on prétend après cela qu'il ne faut jeûner que ce seul samedi, il faudra donc aussi ne fêter le dimanche et ne jeûner le vendredi qu'une fois dans l'année. "
Ibidem, c. 29, se lit cet autre extrait d'une lettre de saint Grégoire-le-Grand à saint Augustin, évêque des Anglais : " Enfin, que les prêtres, les diacres et tous les autres ministres de l’Eglise, à quelque degré de dignité qu'ils soient élevés, se soumettent à jeûner à partir de la quinquagésime, pour faire quelque chose au-delà de ce qui est de stricte obligation pour tous les chrétiens, et paraître surpasser les laïques en piété, comme ils les surpassent par l'éminence de leur ordre. . . Or, c'est une conséquence naturelle, qu'en même temps que nous nous abstenons ces jours-la de manger de la chair des animaux, nous nous interdisions aussi tout ce qui provient des animaux, comme le lait, le fromage, les œufs. "
Ibidem, c. 31, nous lisons cet extrait du concile d'Elvire, c. 23 : " Le concile est d'avis que le jeûne ou l'abstinence soient observés chacun des mois de l'année, excepté les deux mois de
juillet et d'août à cause de la chaleur de la saison. "
Ibidem, c. 32, se trouvent citées ces paroles de saint Apollonius : " On ne doit pas manquer d'observer les jeûnes prescrits de la quatrième et de la sixième férie, à moins de quelque grande nécessité, parce que c'est à la quatrième férie que Judas forma le projet de livrer son maître, et à la sixième que le
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Sauveur a été mis en croix. . Celui donc qui sans nécessité manquerait au jeûne prescrit pour chacun de ces jours, paraîtrait ou livrer le Sauveur avec celui qui l'a trahi, ou le mettre en croix avec ceux qui l'ont crucifié. "
Ibidem, c. 33, extrait du concile de Sélingstadt rapporté plus haut à l'article des commandements de l'Eglise, question XIV, témoignage 16, tome II, page 108.
Ibidem, c. 34, autre extrait d'une lettre de saint Grégoire-le-Grand, ou du livre des XL homélies, homélie 16 : " On doit mettre tout le soin possible à bien garder le carême, et n'y rompre le jeûne à moins d'infirmité que le dimanche, parce que ces jours-là sont comme la dîme de l'année à partir donc du premier dimanche du carême jusqu'au dimanche de Pâques, on compte six semaines qui font quarante-deux jours. Mais comme il faut retrancher de ces jours les six dimanches, où l'on ne jeûne pas, il ne reste plus que trente-six jours de jeûne. Par conséquent, puisque l'année a trois cent soixante-cinq jours, et que nous jeûnons trente-six de ces jours-là, c'est la dime de l'année que nous offrons à Dieu ; mais pour faire de plus le nombre complet de quarante jours, que notre Sauveur à consacré par le saint jeûne auquel il s'est soumis lui-même, nous ajoutons quatre jours de supplément, savoir la quatrième férie (le mercredi des cendres) mise en tête de ces jours de jeûne puis la cinquième, la sixième et le samedi suivants. Sans l'addition de ces quatre jours, nous n'aurions pas quarante jours d'abstinence. Le Dieu Tout-puissant nous fait aussi un devoir de lui donner la dime de tous nos biens. Ainsi donc, pour acquitter exactement cette dîme, prenons aussi la dîme de l'année et pendant ces jours purifions-nous de nos péchés en les confessant, en exerçant sur nous-mêmes la correction, en jeûnant en passant les nuits en prière, en faisant, l'aumône, et décimons notre propre corps (par toutes ces pratiques de mortification), pour pouvoir célébrer la Pâque avec le calme d'une bonne conscience. "
Ibidem, c. 35 et 57, extraits du concile de Mayence, rapporté plus haut à l'article des commandements de l'Eglise, question XIV, témoignage 14 et 15, tome II, page 108.
Ibidem, c. 40, extrait d'un concile d'Orléans, c. 6 (Nous n'avons pu trouver ce canon dans les actes qui nous restent des divers conciles d'Orléans, à moins qu'il ne s'agisse du canon 27 du premier concile d’Orléans tenu l'an 511, qui ordonne à peu près la même chose, mais avec bien moins de détails et en des termes différents) :
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" Comme les peuples des Gaules, en punition de leurs péchés, se voyaient assaillis en tous lieux par des loups enragés, sans pouvoir trouver remède à ce redoutable fléau les évêques des Gaules se rassemblèrent, dit-on, dans la ville de Vienne l'an 474, et ordonnèrent en commun qu'on observât un jeûne de trois jours. Et alors le Seigneur ayant arrêté le fléau dans sa miséricorde, l'usage est passé en coutume pour les années suivantes de jeûner de même avant l'ascension par toute la Gaule. Sanctifions donc, nous aussi, ces jours avec zèle et piété, en nous interdisant l'usage de la viande, et en humiliant nos âmes, afin que non-seulement nous échappions à la rage des loups, mais que nous triomphions de plus des attaques des esprits immondes, espèce de loups invisibles plus redoutables encore que les premiers. Que personne pendant ces jours ne se couvre d'habits précieux puisque nous devons au contraire pleurer nos péchés dans le sac et sur la cendre. Qu'on interdise ces excès de bouche, si communs parmi le peuple. Que personne ne fasse de voyages à cheval pendant ces jours-là, mais que tous au contraire ne marchent que nu-pieds. Que les femmes ne se permettent pas de danser, mais qu'elles chantent plutôt en commun le Kyrie eleison, et qu'elles implorent d'un cœur contrit la miséricorde de Dieu pour leurs péchés, pour le maintien de la paix, pour la cessation des fléaux, pour la conservation des fruits de la terre, et pour les autres nécessité : car ces jours sont des jours d'abstinence et non de joie. " (Voir Greg. Turon., hist. Francorum, lib. II, c. 54).
Ibidem, c. 42, extrait d'un concile d'orange, c. 2 (Ce canon ne se trouve pas plus que le précédent) : " Le samedi saint, c'est-à-dire la veille de Pâques, personne, si ce n'est les enfants et les infirmes, ne rompra le jeûne avant l'entrée de la nuit. "
Ibidem, c. 45, extrait d'un concile de Châlon-sur-Saône, c. 5 (Ce canon ne se trouve pas plus que les 2 précédents) : " Plusieurs qui croient observer la loi du jeûne se mettent à manger en carême dès qu'ils ont entendu sonner la neuvième heure. Mais qu'ils sachent bien que ce n'est pas jeûner que de manger avant l'office de vêpres. On doit en effet se rendre à la messe avec empressement, et ne toucher à aucun mets qu'on ne l'ait entendue aussi bien que l'office de vêpres, et après avoir fait des aumônes. Que si la nécessité empêche quelqu'un d'assister à la messe, qu'il prie du moins en particulier,
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et ne rompe le jeûne qu'à l'heure où il peut penser que les vêpres sont achevées. " (Burchard de Worms, comme on le verra plus bas, attribue ce canon au pape saint Silvère).
Ibidem, c. 49, extraits des décrets du pape Eusèbe c. 3 (C'est une pièce sans autorité) : " Les jeûnes ordonnés dans L’Eglise par les pasteurs ne doivent pas être rompus sans une légitime nécessité. "
Ibidem, c. 50, autre extrait de ces décrets, c. 2 : " S'il survient une famine, ou quelque peste, ou quelque intempérie de l'air, ou toute autre calamité, on doit aussitôt recourir à la miséricorde de Dieu par des jeûnes des aumônes et des prières. "
12. Burchard, évêque de Worms, Decretorum lib. XIII, c. 1, cite comme Ives de Chartres le passage de saint Grégoire sur l’observance quadragésimale rapporté au témoignage précédent.
Ibidem, c. 2 et 4 ; c'est la même chose que les chapitres 35 et 37 d'Ives de Chartres.
Ibidem, c. 5, citation du concile de Gangres, comme au chapitre 58 d'Ives de Chartres : ce canon du concile de Gangres sera rapporté à la question qui va suivre celle-ci, témoignage 76.
Ibidem, c. 7, sur le jeûne des rogations, extrait du concile d'Orléans, c. 6, comme dans Ives de Chartres, c. 40.
Ibidem, c. 9, sur le samedi saint, citation du concile d'orange, c. 2, comme dans Ives de Chartres, c. 42.
Ibidem, c. 12, citation d'un décret du pape saint Silvère, c. 1; c'est le passage donné plus haut par Ives de Chartres pour être un canon du concile de Châlon.
Ibidem, c. 16, citation d'un concile d'Orléans, c. 1 (Ce canon ne se trouve pas dans les actes des conciles d'Orléans que nous avons pu consulter) : " Les prêtres, en faisant au peuple les annonces des fêtes, doivent en même temps les avertir d'observer religieusement le jeûne des vigiles. "
Ibidem, c. 17, citation d'un décret du pape Eusèbe ; c'est le même que le décret apocryphe cité par Ives de Chartres, et rapporté plus haut.
Ibidem, c. 18, citation d'un prétendu décret du pape Libère, c. 2 ; c'est le même que celui attribué au pape Silvère par Ives de Chartres, c. 50, et rapporté plus haut.
13. S. CYPRIEN, de jejuniis et tentationibus Christi (Ce sermon n'est pas de S. Cyprien, mais plutôt d'Arnold ou Arnould de Bonneval qui vivait du temps d’Adrien IV. v. Nat. Alex. hist. eccles. III sæc., p. 32, édit. de Venise) : " Au
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moyen du jeûne la sentine des vices est mise à sec, la pétulance est abattue, la concupiscence est affaiblie, les voluptés prennent la fuite, le volcan des passions s'éteint et ne porte plus le ravage et la désolation autour d'elles. Le jeûne employé avec discrétion suffit pour dompter toutes les révoltes de la chair, et nous délivre de la tyrannie des appétits grossiers. Le jeûne met aux entraves les mouvements désordonnés et réprime les désirs qui sans lui n'auraient pas de frein. Le jeûne quand l'humilité l'accompagne, inspire aux serviteurs de Dieu le mépris du monde. Le jeûne purifie, sanctifie la chair, et prévient à corruption que son trop d'embonpoint ne manquerait pas d'engendrer. Le jeûne trouve ses délices dans les Ecritures, son plaisir dans la contemplation, sa force dans les grâces qu'il obtient, son aliment dans le pain céleste. Ce fut le jeûne qui donna à Daniel la vertu d'interpréter les songes, et aux trois jeunes hommes la grâce de sortir sans aucun mal de la fournaise ardente. Moïse en conversant quarante jours sur la montagne avec Dieu, obtint, grâce au jeûne la familiarité de ses entretiens, et l'avantage d'être choisi pour promulgateur de sa loi. Elie, en jeûnant le même nombre de jours dans le désert, se vit récompensé d’égales faveurs. L'utilité du jeûne est devenue évident surtout dans le christianisme, et l'exemple qu'en ont donné les premiers a bientôt été suivi de la multitude. Nous ne connaissons dans l'histoire aucun homme à miracles, qui n'ait dû au jeûne ce don éminent, nous ne voyons pas que rien ait été fait de grand, sans que le jeûne en ait posé la base. Tous ceux qui ont voulu obtenir quelque faveur de Dieu, ont recouru au jeûne comme à la prière et c'est en passant les nuits dans les larmes et sous le cilice qu'ils ont imploré la bonté divine. Et le succès a été immanquable, du moment où prosternée aux pieds de Dieu, l'humilité des suppliants a pu lui offrir le sacrifice d'un cœur contrit ; Dieu s'est approchés de ceux qui l'invoquaient, a tendu sa main à ces misérable naufragés et les à secourus dans leur affliction. "
14. S. ATHANASE, Lib. de virginitate sive de meditatione : " Observons le jeûne avec amour : car le jeûne, la prière et l'aumône, nous formeront à eux trois un puissant rempart ; ils sauvent l'homme de la mort. Car au lieu que c'est pour avoir mangé malgré la défense que Dieu lui en avait faite, qu'Adam a été chassé du paradis, ce sera par le jeûne et par l'obéissance que pourra y rentrer quiconque le voudra. Faites de cette vertu l'ornement de votre personne, vierge de Jésus-Christ, et vous
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serez sûre de plaire à votre divin époux. Car les personnes de votre sexe qui s'attachent au monde, et qui pour plaire aux hommes se couvrent d'or et de pierres précieuses, et imbibent leurs vêtements de parfums et de senteurs, ne sauraient plaire à Dieu par de tels moyens. Jésus-Christ ne vous demande rien de semblable : un cœur pur, un corps chaste et maté par l'abstinence, voilà tout ce qu'il demande de vous. Si quelques-uns viennent vous dire de ne pas multiplier vos jeûnes de peur de vous affaiblir, ne suivez pas leur conseil, ne les écoutez même pas ; car c'est l'ennemi de votre âme qui les inspire. Rappelez-vous ce qui est écrit au sujet de Daniel et des trois jeunes hommes faits captifs par Nabuchodonosor, roi de Babylone, et des autres jeunes gens qui étaient avec eux ; de l'ordre que le roi leur donna de manger des mets de sa table et de boire de son vin ; du refus que firent Daniel et les trois jeunes hommes de se souiller en acceptant cette nourriture, et de la réponse qu'ils firent à l'eunuque chargé de les nourrir : Donnez-nous, lui dirent-ils, de ce que la terre produit, et nous en mangerons (DAN., I, 4 et 9). L'eunuque leur dit à cela : Je crains le roi mon Seigneur, qui a ordonné qu'on vous servît des viandes et du vin de sa table ; car s'il voit vos visages plus maigres que ceux des autres jeunes hommes de votre âge, vous serez cause que le roi me fera perdre la vie. Mais ils lui répliquèrent : Eprouvez, je vous prie, vos serviteurs pendant dix jours, et ne nous donnez pendant tout ce temps que de ce que nous vous avons demandé. Et il ne leur donna que des légumes à manger et que de l'eau à boire ; après quoi il les introduisit chez le roi, et leur visage parut meilleur et dans un embonpoint tout autre que celui de tous les jeunes hommes qui mangeaient des viandes du roi. "
" Vous voyez quels sont les effets du jeûne, comment il guérit les maladies, détruit les humeurs vicieuses, chasse les démons, éloigne les pensées mauvaises, fait que l'esprit est davantage à lui-même, purifie le cœur, sanctifie le corps, et met l'homme en état de s'approcher du trône de Dieu. Et de crainte que vous ne vous imaginiez que tout ce que je viens de dire se trouve dit au hasard, vous avez dans l’Evangile le témoignage de Jésus-Christ lui-même, à qui ses disciples avaient fait cette demande : Seigneur, dites-nous par quel moyen peuvent être chassés les esprits impurs ; et qui leur fit celle réponse : Cette sorte de démon ne peut être chassée que par la prière et par le jeûne (MATTH., XVII, 18-20). Ceux donc, quels qu'ils soient, qui sont tourmentés par l'esprit
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impur, n'ont qu'à se rappeler cette réponse, et qu'à employer ce remède c'est-à-dire, qu’à faire usage du jeûne, et aussitôt l'esprit impur, que le jeûne n'accommode pas, se trouvera trop à l'étroit et prendra la fuite. Car rien n'attire les démons comme la crapule, l'état d’ivresse et l'oisiveté. Grande au contraire est la vertu du jeûne : il engendre les plus grandes actions. Car d'où vient que la puissance des miracles est donnée aux hommes, que Dieu opère par leur ministère les plus étonnants prodiges, et la guérison de toutes sortes de maladies, sinon de la pratique de la mortification de l'humilité et de l'austérité de vie ? Le jeûne en effet est la vie des anges, et celui qui le pratique mérite une place parmi ces célestes esprits. Et ne pensez pas, ma sœur, que le jeûne consiste simplement dans une certaine abstinence : car il ne suffit pas pour jeûner véritablement, de se priver de nourriture ; pour avoir le mérite du jeûne devant Dieu, il faut s'abstenir en outre de toute action mauvaise (Cf. S. Athanasii opera, t. II, p. 113-114, édition des Bénédictins, Paris, 1698). "
15. S. CHRYSOSTOME, Hom. I in Genesim : " En voyant votre empressement à vous rendre en cette église, je sens s'augmenter aussi le mien, tant est vif le désir que j'éprouve d'entre moi-même en part de cette joie spirituelle, en même temps que de vous annoncer l'ouverture de la sainte quarantaine, remède si propre à guéri nos âmes de toutes leurs misères. Car notre maître à tous voulant, comme un père compatissant, nous laver des souillures contractées dans toute la suite de notre vie, en a trouvé le moyen dans le jeûne salutaire auquel il vous invite par ma bouche. Que personne donc n'affecte un air chagrin ; que personne ne tombe dans la tristesse, etc. . . Car ce temps sera vraiment pour nous un temps de fête qui procurera le salut à nos âmes, qui nous apportera la paix et la concorde, qui bannira toute image séductrice des plaisirs trompeurs de cette vie : plus de clameurs bruyantes, plus de rassemblements tumultueux, plus rien de cet appareil sanglant de chairs d'animaux étalées sur les boutiques ou dépecées dans les cuisines ; partout au contraire la tranquillité, le calme, la charité, la joie, la douceur, la paix et mille autres avantages précieux. . . "
" Je voudrais vous voir purifiés de tout ce qui a pu vous souiller jusqu'ici, et affranchis de toute affection pour les plaisirs grossiers de la table, embrasser de tout cœur cette chaste épouse
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que j'appelle l'abstinence, et, qui sera pour vous la mère de tous les biens, de la pudicité et de toutes les vertus : elle fera votre bonheur, en même temps qu'elle achèvera de vous guérir de
vos maux spirituels. Car si les médecins ont coutume de prescrire à ceux qui leur demandent de corriger en eux quelque humeur vicieuse, de commencer par s'imposer une diète absolue, pour que l'effet de leurs remèdes ne soit pas neutralisé par la nourriture qu'ils prendraient, mais qu'il ait toute sa vertu, en exerçant seul son action ; à combien plus forte raison, si nous voulons que ce remède spirituel, qui est le jeûne produise en nous ses heureux effets, devons-nous purifier nos dispositions, et ne pas nous charger de vin ou d'aliments quelconques qui nous feraient perdre tous les fruits que nous aurions à recueillir de cette observance ! "
" Tandis que l'excès du boire et du manger est pour le genre humain le principe de mille maux, le jeûne et la sobriété est une source intarissable d'ineffables biens. Aussi, dès le moment de la création de l'homme, Dieu qui savait que c'était là le remède le plus opportun pour le salut de nos âmes, donna avant tout le reste ce commandement à notre premier père : Mangez de tous les fruits des arbres du paradis ; nais ne mangez point du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal (Gen., XVI, 17). Dire : Mangez ceci, ne mangez pas cela, c'est déjà préfigurer le jeûne . . . "
" Après avoir cité les exemples de Moïse d'Elie, de Daniel, des Ninivites, et de Jésus-Christ lui-même, le grand orateur ajoute : " Après vous avoir démontré par l'exemple de Notre- Seigneur lui-même comme par celui de ses serviteurs les plus fidèles, combien est grande la vertu du jeûne et combien sont nombreux les avantages que vous pouvez en retirer ; maintenant donc que vous en êtes instruits, je supplie votre charité de ne pas vous y refuser par une lâcheté inexcusable, ni de vous attrister non plus de vous y voir obligés, mais de vous en réjouir plutôt et de tressaillir même de joie en vous rappelant ces paroles de l'Apôtre : Encore que dans nous l'homme extérieur se détruise, l'homme intérieur néanmoins se renouvelle de jour en jour (II Cor., IV, 16). Car soyez convaincus que le jeûne est la nourriture de l'âme, et de même que la nourriture matérielle soutient et fortifie le corps, de même aussi le jeûne accroit les forces de l'âme, lui prête l'agilité, et comme des ailes, pour s'élever vers le ciel, pour ne plus s’occuper que des choses d'en haut, et n'avoir
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désormais que du mépris pour tous les plaisirs d'ici-bas. Et de même que les navires les plus légers sont ceux qui parcourent avec le plus de rapidité la vaste étendue des mers, et que ceux au contraire qu'on charge d'une trop forte cargaison sont le plus exposés à faire naufrage ; ainsi le jeûne en nous spiritualisant de plus en plus, nous met plus en état de traverser rapidement la mer de ce monde, de porter toutes nos pensées vers le ciel et vers les biens qui nous y sont réservés, de regarder comme rien les choses présentes et de ne pas plus nous y attacher qu'à des ombres ou à de simples rêves (Cf. S. Joannis Chrysost. opera, t. IV, p. 1-5, édit. de Montfaucon ; pag. 3-9, édit de Gaume). "
16. Le même, Hom. II in Genesim : " Le jeûne est ce qui procure le calme à nos âmes, ce qui honore la vieillesse, ce qui forme la jeunesse, ce qui affermit l'âge mûr, le plus bel ornement en un mot de tous les âges et de toutes les conditions. Voyez en effet : aujourd'hui plus de clameurs ni de tumultes, plus rien de tout cet attirail de cuisiniers et de bouchers ; plus rien, dis-je, de tout cela, et cette ville entière présente l'aspect d'une vierge décente et réglée dans ses démarches (Cf. Ibidem, pag. 8, édit. de Montfaucon ; pag. 11, édit. de Gaume). "
17. Le même, Serm. I de jejunio (Nous n'avons pu trouver ce discours dans les œuvres complètes de S. Chrysostôme, édit. de Gaume) : " Voici le temps de propitiation, sachons le mettre à profit ; c'est le temps de nous décharger du fardeau de nos péchés, ne négligeons pas cette grâce ; mais avant de jeûner par rapport aux aliments, commençons à le faire par rapport aux péchés. Le jeûne présente des avantages sans nombre pour ceux qui aiment à se les approprier. N'envisagez pas uniquement la peine ; envisagez aussi la récompense. Si le cultivateur n'avait pas en vue la récolte que doivent lui rapporter ses semailles, il ne sèmerait jamais ; autrement, quelle serait sa folie de dissiper à travers les champs les grains recueillis dans ses greniers ! Mais c'est l'espérance de récolte plus qu'il ne sème qui lui donne le courage de semer. Le jeûne afflige la chair, il est vrai, mais il fait les délices de l'âme. De ces deux parties qui composent notre être, laquelle donnerez-vous la préférence ? Si l'âme accepte le jeûne, c’est qu'elle l'aime mieux que d'être malheureuse dans l'éternité, et d'ailleurs elle trouve dans le jeûne un aliment plus convenable à sa dignité, plus approprié à sa nature. Ne refusons donc pas de nous sou-
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mettre à la loi du jeûne ; d'autant plus que, bien loin de nuire au corps lui-même, le jeûne lui sert de remède. Car, en jeûnant on arrête le flux d'humeurs dont le corps est incommodé, et on le débarrasse de son excès d'embonpoint, en même temps qu'on présente à l'âme défaillante l’aliment qui réparera ses forces. Ne pensez pas que le jeûne ne puisse offrir que de modiques avantages. Si Adam s'était abstenu seulement de manger d'un fruit, s'il avait jeûné par rapport à ce fruit, la mort aurait reçu son coup mortel, ou pour mieux dire, elle n'eut jamais paru, étant ignorée jusque-là. Voyez donc, si Adam avait usé de cet antidote, le genre humain ne serait composé que d'êtes immortels. Oh ! qu'il a fallu que la grâce fût puissante, pour réparer comme elle l'a fait les maux que l'intempérance d'Adam avait causés à sa race ! En voyant combien cette abstinence nous a été funeste, vous pouvez juger combien son contraire, qui est le jeûne ou l'abstinence par rapport aux choses d'ailleurs permises ; doit nous être utile. "
L'auteur de ce discours cite ensuite les exemples de Moïse, de Jésus- Christ et de Daniel ; puis, venant à parler du prophète qui, pour s'être arrêté à manger malgré la défense que Dieu lui en avait faite, fut dévoré par un lion, il fait cette remarque : " Trois prodiges se trouvaient là rassemblés. Le prophète étant mort trahissait par-là même la désobéissance dont il était coupable ; à côté de ce cadavre, le lion témoigna par ce qu'il venait de faire son obéissance à l'ordre de Dieu ; et près de là l'ânesse du prophète qui restait sans rien craindre de la part du lion, et sans recevoir non plus aucun mal de lui, faisait bien voir que le lion n'était pas accouru pour assouvir sa faim, mais pour punir le coupable de n'avoir pas jeûné conformément à l'ordre qu'il en avait reçu. "
" Le jeûne est une imitation de la vie des anges autant que le comporte notre nature, un acte de mépris des choses d'ici-bas, une école de prières, un aliment pour l'âme, un frein pour la bouche, un calmant pour la fièvre de la concupiscence. Ceux qui jeûnent le savent bien, et ceux qui ont seulement essayé de le faire ne l'ignorent pas non plus. Le jeûne réprime les voluptés, apaise la fureur, calme la colère tempère les mouvements naturels, aiguise la raison, purifie le cœur, allège le poids de la chair, met en fuite les illusions de la nuit, corrige de l'ivresse, délivre des maux de tête, donne au visage un teint ravissant et des traits célestes. Quand on jeûne, on a naturellement le geste
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composé, la langue libre, la raison saine ; on ne connait point ce rire dissolu si commun dans l'ivresse ; les passions sont contenues, et l'âme maîtresse d’elle-même goûte la joie de son bien-être. L'homme extérieur n’est plus rien, l'homme intérieur est tout. L'ivresse nous ôte le sentiment des maux qu'elle nous cause ; le jeûne nous donne la conscience de ceux dont il nous délivre. Car celui qui est en état de jeûne en même temps qu'il se connaît lui-même connaît ce qui peut lui être contraire ; tandis que celui qui est en état d’ivresse ignore, et ce qu'il est lui-même, et quels sont les avantages dont le jeûne serait pour lui la source. Pourquoi des prêtres, fils d'Aaron, furent-ils mis à mort ? N'est-ce pas pour avoir goûté au vin dans l’exercice de leur ministère (Lévit., X, 9) ? A quoi s'obligeaient les Nazaréens ? N'était-ce pas à s'abstenir du vin et de toute boisson capable d'enivrer (Nomb., VI, 3-20) ? Daniel et ses jeunes compagnons de captivité préféraient de simples légumes à la table somptueuse du roi Nabuchodonosor (DAN., I, 8). Daniel jeûne six semaines entières et c'est pour avoir réprimé en lui la sensualité qu'il mérite d’être surnommé l'homme de désir (DAN., X, 3). Et comment jeûna-t-il, non, comme faisaient ses compatriotes, pendant la courte durée d'un seul jour, mais pendant trente-six semaines ? C'est qu'il préfigurait la discipline actuelle de l’Eglise. Il a dit de lui-même : Je ne mangeais pas de pain délicatement préparé. D'autres boivent quelquefois pour leur plaisir. Le vin et la viande, poursuit Daniel, n'entrèrent pas dans ma bouche. L'Eglise ne pratique pas un autre jeûne que celui-là. Admirez dans cet homme de l'ancienne loi ces mœurs toutes chrétiennes. C'est que si, parmi les hommes d'alors, les imparfaits pouvaient tout au plus figurer les saints de la loi nouvelle, les forts du moins, tels que les prophètes, devaient les représenter en réalité. Le jeûne a obligé Dieu à révoquer quelques-uns de ses arrêts. Car Dieu avait dit : Ninive sera détruite ; et cependant cette ville ne fut pas détruite. C'est que les Ninivites jeûnèrent et échappèrent par ce moyen à leur ruine. "
" Jeûnez, parce que vous avez péché, jeûnez pour ne plus pécher ; jeûnez pour recevoir, jeûnez pour conserver les dons que vous avez reçus. Car telles sont les diverses classes dans lesquelles le jeûne peut être réparti. L’un qui sait qu'il a péché jeûne pour échapper, en se châtiant lui-même, au châtiment qu'il lui faudrait subir ailleurs. Jeûnons, nous, pour prévenir les révoltes de la concupiscence. Vous voyez dans cet exemple comment le
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jeûne est provoqué par le péché, c’est parce qu'on à péché qu'on a recours au jeûne pour y trouver sa conversion en même temps que l'expiation de ses fautes. D'autres jeûnent sans avoir péché, non pas, par conséquent, pour se délivrer de péchés commis, mais pour s'empêcher d'en commettre. Un autre jeûne pour obtenir une grâce ; et c'est ainsi que Moise jeûne pour recevoir la loi. Un autre enfin jeûne pour ne pas perdre les grâces qu'il a reçues. L'Eglise, par exemple, jeûne par ce motif, en reconnaissant tout ce qu'elle doit à Jésus- Christ ; et elle jeûne afin que, crucifiée avec lui, souffrant avec lui, elle soit aussi glorifiée avec son Sauveur. Nous jeûnons alors, non pour pleurer sur le sort de notre Dieu, car il vit éternellement avec son Père mais pour reconnaître tout ce que nous devons à sa grâce, ou si nous pleurons à cause que les Juifs l'ont crucifié, ce n'est pas sa mort que nous déplorons, mais le crime des Juifs qui l'ont fait mourir : car pour lui, il est ressuscité d'entre les morts, il est dans la gloire dont il était d’avance en possession avec son Père. Engendré par son Père de toute éternité, il est aussi avec lui de toute éternité. Nos larmes insulteraient la victoire que Jésus a remportée mais nous devons néanmoins jeûner en songeant à nos propres besoins, et en faisant nos efforts pour prendre part à ses souffrances. "
18. Le même, Serm. II de jejunio : " Puis donc que le jeûne est pour nous un rempart contre nos ennemis, et nous aide à repousser le joug de la servitude qu'ils nous feraient subir, qu'il assure en un mot notre liberté, comment douteriez-vous encore que le jeûne ne soit pour nous la condition préalable de tous les biens ? Et si le jeûne à été commandé dans le paradis même à cause des avantages sans nombre qu'il renferme, il doit être encore bien plus nécessaire hors de ce lieu qu'habitait l'innocence. Si, avant que nous eussions été blessés, s’était déjà pour nous un utile remède, nous devons nous empresser bien davantage d'y recourir maintenant que nous sommes blessés, pour nous guérir de nos blessures. Enfin, si ce bouclier nous était nécessaire même avant le combat pour résister aux plaisirs sensuels, nous devons nous en armer avec bien plus de soin maintenant que nous y sommes engagés. "
19. S. BASILE-LE-GRAND, Hom. I de laudibus jejunii : " Les vers qui se multiplient dans les intestins des enfants ne peuvent en être chassés que par d'amers médicaments : ainsi le jeûne, quand il est vraiment digne de ce nom, attaque le péché jusque
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dans le fond de notre cœur et lui donne la mort. . . . . Tout ce qui porte le caractère de l'antiquité a droit à notre respect. Respectez la vieillesse du jeûne. Il est si ancien qu'il a commencé avec le premier homme : c'est dans le paradis terrestre qu'il à été établi. Le premier précepte donné à Adam fut celui-ci : Vous ne mangerez point du fruit de l'arbre de la science du bien et mal. Ces paroles, vous ne mangerez pas, sont une loi de jeûne et d'abstinence. Si Eve l'eût observé fidèlement nous ne serions pas aujourd'hui obligés de nous y soumettre. Car ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais bien ceux qui sont malades. Nous avons été blessés par le péché : c'est à la pénitence à guérir nos blessures. Or, sans le jeûne, la pénitence est vaine et stérile. La terre maudite ne produira pour vous que des ronces et des épines. Vous êtes condamné à vivre dans la tristesse, et non destinés à vous livrer aux plaisirs. Il faut satisfaire à Dieu par le jeûne. La vie même du paradis terrestre était une image du jeûne, non-seulement en ce que l'homme, qui était semblable aux anges et partageait en quelque sorte leur nature, n'avait que peu de besoins, mais aussi parce qu'il n'avait point encore imaginé dans cet heureux séjour tout ce qu'il inventa par la suite pour satisfaire ses appétits déréglés aux dépens de la raison, tel que l'usage du vin et de la chair des animaux. - Puisque c'est notre infidélité à la loi du jeûne qui nous à bannis du paradis, jeûnons donc pour y rentrer. "
Un peu plus loin, saint Basile, appelant les Ecritures en témoignage de la vertu du jeûne : " C'est le jeûne dit-il, qui enfante les prophètes, qui nourrit les forts, qui donne la sagesse aux législateurs ; c'est le jeûne qui est le rempart de l'âme, la sauvegarde du corps, l'armure du guerrier, l'exercice de l'athlète : il éloigne la tentation, consacre la piété, accompagne la sobriété, produit la chasteté. Dans les combats il enflamme le courage, dans la paix il conserve le repos. Il sanctifie le nazaréen, il perfectionne le prêtre, qui ne peut sans témérité s'approcher du saint ministère, s'il ne s'est préparé par le jeûne, non-seulement dans la loi nouvelle, où il s'agit de célébrer de si redoutables mystères, mais encore dans la loi ancienne, où les sacrifices n'étaient que des figures. . . Enfin, tous les saints de tous les siècles, comme vous pourrez vous en convaincre, se sont affermis par le jeûne dans la voie qui conduit à Dieu. . . Le jeûne éteignit les flammes de la fournaise et brisa la dent des lions. Le jeûne
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ouvre à la prière l’entée du ciel, et lui prête des ailes pour s’élever jusqu’à Dieu. Le jeûne est le soutien des familles, le père de la santé, le maître de la jeunesse, l'ornement des vieillards, l'ami des voyageurs, le gardien de la foi conjugale. . . Le jeûne n'est pas seulement utile pour l'avenir ; il est avantageux pour notre corps même dans la vie présente. . . Voulez-vous fortifier votre âme ? domptez la chair par le jeûne. C'est le sens de ce passage où l'Apôtre nous dit : Qu'à mesure que l'homme extérieur se corrompt, l'homme intérieur se renouvelle. Et de cet autre : Plus je m'affaiblis, plus je me fortifie. . . Le jeûne est notre armure dans les combats contre les démons ; car ce genre d'ennemis ne peut être chassé que par la prière et le jeûne. Tels sont les nombreux avantages que le jeûne nous procure. La satiété au contraire est un premier pas dans la voie de l'impudicité. La bonne chère, l’excès du vin, la délicatesse exquise et la variété des aliments, ne tardent pas à provoquer le réveil de toutes les passions brutales. Alors l'homme dans son délire ressemble à un coursier qui court et qui hennit après les cavales. L'ivresse confond les sexes, et intervertit l'ordre établi par la nature ; tandis que le jeûne entretient, même dans le mariage, une sage et chaste modération, prévient l'excès des plaisirs permis, et conseille aux époux de s'en interdire momentanément l’usage, pour se livrer sans trouble à la prière. - Gardez-vous cependant de faire consister le jeûne dans la seule abstinence des viandes ; le jeûne véritable consiste à s'abstenir du vice. Rompez tous les liens qui vous attachent à l'iniquité. Pardonnez au prochain tout le mal qu'il vous fait ; remettez-lui sa dette. Ne jeûnez pas pour lui susciter des procès et des querelles. Vous ne mangez pas de chair, il est vrai, mais vous dévorez votre frère ; vous vous abstenez de vin, mais vous vous permettez de lui faire tort. Vous attendez le soir pour prendre de la nourriture, mais vous passez tout le jour devant les tribunaux. Malheur à ceux qui sont ivres, non de vin, mais de colère. Car la colère est l'ivresse de l'âme ; comme le vin, elle rend l'homme insensé. "
20. Le même, homélie 2 : " Si l'huile rend les athlètes plus souples, le jeûne fortifie celui qui s'exerce la piété. Ainsi donc, tout ce que vous ôtez au corps tourne à l'avantage de l'âme et l'affermit dans la vie de la grâce ; car ce n'est pas la vigueur du corps, mais la force de l'âme et la patience dans les afflictions, qui nous assurent la victoire contre les ennemis invisibles. Le jeûne est utile en tout temps à ceux qui se l'imposent volon-
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tairement, puisque les démons n'osent tenter aucun effort contre celui qui l'observe, et que les anges préposés à notre garde protègent surtout ceux dont il a purifié l'âme ; mais son utilité
est plus incontestable encore dans ces jours où il est annoncé par tout l'univers. Il n'est point de pays, ni sur le continent, ni au milieu des mers, point de ville, point de peuple, même aux extrémités du monde, où la loi du jeûne n'ait été proclamée. Les soldats, les voyageurs, les navigateurs, les marchands, tous l’ont entendu publier avec la joie la plus vive. Que nul d'entre vous ne s'exclue donc lui-même du nombre de ceux qui jeûnent, c'est-à-dire de tout le genre humain, de tous les âges, de toutes les conditions. Chaque église a ses anges chargés d’en faire le recensement. . . "
" Le jeûne conserve la santé de l'enfance, inspire la modestie aux jeunes gens, et attire le respect à la vieillesse. Un vieillard parait plus vénérable quand il honore ses cheveux blancs par l’abstinence. Le jeûne est l'ornement qui convient le mieux aux femmes, et le frein le plus puissant contre la fougue de l'âge et l’excès de la santé ; le jeûne est le protecteur de la fidélité conjugale et le gardien de la virginité. Tels sont les avantages particuliers que le jeûne apporte aux familles qui l'observent. Voyons maintenant quelle est son influence sur la société. En un moment il fait régner le calme dans le sein d'une ville, d'une nation tout entière, il impose silence à toutes les clameurs, assoupit les querelles, bannit les procès. . . Pauvres, recevez le jeûne comme un ami et un commensal. Esclaves, recevez-le comme une trêve passagère aux travaux perpétuels de votre servitude. Riches, recevez-le comme un remède au mal que l'abondance vous a fait, comme un moyen de ranimer en vous, par le changement de régime le goût des aliments que l'habitude vous fait paraitre maintenant insipides. Que votre santé soit florissante ou ruinée, recevez-le comme le gardien ou le père de la santé. Interrogez les médecins, ils vous diront que rien n'est plus dangereux pour le corps que l'excès même du bien- être. Aussi les plus habiles s'attachent-ils à remédier à cet excès par le jeûne de peur que la nature épuisée ne succombe sous le poids de l'embonpoint. . . Mais pour que le jeûne soit méritoire, il ne suffit pas de s'abstenir de l'usage des viandes ; il est une autre sorte de jeûne plus agréable à Dieu. Le véritable jeûne consiste à s'abstenir du vice, à contenir sa langue, à réprimer sa colère, à dompter ses passions, à s'interdire la médisance, le
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mensonge, le parjure. Voilà les privations qui constituent le jeûne véritable. "
21. S. AUGUSTIN, Tract. de utilitate jejunii : " Si la chair, que son propre poids entraîne vers la terre, est un fardeau pour l'âme et un bagage qui l'arrête dans son vol, plus on aura d'attrait pour la vie angélique, plus on consentira volontiers à se décharger de ce fardeau embarrassant. Or, ce qui nous aidera à nous en décharger, c'est le jeûne. "
" Gardez-vous donc bien de penser que ce soit là une pratique frivole ou inutile, de peur que, si vous vous en acquittiez simplement pour vous conformer à l'usage de l'Eglise, vous ne veniez à penser ou à vous dire en vous-mêmes ou d’écouter le tentateur qui cherche secrètement à vous le suggérer : Pourquoi jeûnes-tu ? Tu imposes à ton âme des privations, tu lui refuses ce qui la rendrait heureuse ; tu prends le soin absurde de te punir toi-même, d’être à toi-même ton bourreau. Est-ce que c'est la volonté de Dieu que tu te rendes toi-même malheureux ? Dire qu'il se réjoui de tes souffrances, c'est le supposer cruel. Mais répondez à ce tentateur : Si je me punis moi-même, c'est afin que Dieu ne me punisse pas ; j'étale devant lui ma misère, afin qu'il vienne à mon secours, que je me rende agréable à ses yeux et que j'aie à bénir sa bonté. Pour mettre une victime sur l'autel, il faut bien la faire souffrir. Mon corps pèsera moins à mon âme. Répondez encore à ce mauvais conseiller, à cet avocat des instincts gloutons, par la comparaison suivante : Si vous aviez pour monture un cheval fougueux qui pourrait vous occasionner quelque chute funeste, n'est-il pas vrai que pour voyager avec plus de sécurité, vous retireriez à cet animal une partie de sa nourriture, pour dompter par la diète celui que vous ne pourriez dompter avec le frein ? Mon corps, voilà ma monture ; le but de mon voyage, c'est Jérusalem ; mais au lieu de me diriger vers ce but, le plus souvent il m'emporte au hasard, et voudrait me faire sortir de la voie ; ma voie, c'est Jésus-Christ et celui qui voudrait m'emporter hors de cette voie, je craindrais de le mater par le jeûne ? Si quelqu'un pense ainsi, il prouve par sa propre expérience l'utilité du jeûne. Est-ce que ce corps, aujourd'hui dompté par le jeûne aura toujours besoin de l’être ? Maintenant qu'il est comme incertain de sa course, qu'il subit les conditions de sa mortalité, il a ses emportements, ses écarts qui pourraient mettre l'âme en péril. C'est un corps corruptible jusqu'ici : mais vienne la résurrection ! Car il ne sera pas toujours
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dans cet état ; il ne revêt pas encore les conditions d'une céleste substance ; nous ne sommes pas encore devenus semblables aux anges de Dieu (Cf. S. Augustini opera, t. VI, col. 615, édition des Bénédictins ; col. 1034, édit de Gaume). "
22. S. AMBROISE, Lib. de Eliâ et jejunio, c. 2 : " La vertu du jeûne est grande. C'est une milice si honorable, que Jésus-Christ lui-même a bien voulu s'y enrôler ; si puissante en même temps, qu'elle a élevé de simples hommes jusqu'au ciel. Et pour chercher mes exemples plutôt dans nos semblables que dans les actes divins, Elie, pour avoir jeûné put d'un seul mot rendre le ciel d'airain pour le peuple sacrilège de la Palestine. Que dirai-je de ses autres miracles ? C'est pour avoir jeûné qu'il put rappeler du sein de la mort le fils de la veuve. C'est à jeun qu'il fit d'un seul mot descendre la pluie sur la terre ; c'est à jeun qu'il fit tomber le feu du ciel ; c'est à jeun qu'il fut emporté au ciel dans un char de feu ; c'est par un jeûne de quarante jours qu'il obtint d'être favorisé du commerce de Dieu même. Ses mérites croissaient avec ses jeûnes. C'est par la vertu de ses jeûnes qu'il arrêta le cours de l'eau du Jourdain, et qu'il put en passer à pied sec le lit desséché en un instant. Dieu dans sa sagesse le jugea digne d'être enlevé dans le ciel avec son corps même puisque, tout revêtu qu'il était de son corps, il menait une vie céleste, et présentait à la terre l'image d'un habitant des cieux. "
Ibidem, c. 3 : " Qu'est-ce que le jeûne sinon une chose céleste, l'image du ciel même ? Le jeûne est la force, l'aliment de l’âme. Le jeûne est la vie des anges ; le jeûne est la mort du péché, l’abolition des crimes, le remède qui nous rend la santé, le principe de la grâce, le fondement de la chasteté. C'est le degré ménagé à notre faiblesse pour nous faire monter jusqu'à Dieu. "
Ibidem, c. 4 : " La gourmandise nous ôte le vêtement de l'innocence ; le jeûne nous le rend. C'est ce que Dieu nous a fait entendre par ces paroles du Psalmiste : J'ai revêtu mon âme par le jeûne (Ps. LXVIII, 4). Précieux vêtement, qui couvre l'âme, pour qu'elle ne soit pas surprise par le tentateur, et dépouillé par lui. Précieux voile, qui couvre le péché, qui le fait disparaître sous l'abstinence, qui le fait disparaître devant la grâce. Heureux ceux à qui leurs iniquité ont été pardonnées et dont les péchés sont couverts (Ps. XXXI, 1). La grâce couvre les péchés
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en les pardonnant, en les effaçant. L'abstinence les couvre en nous en purifiant, en les enveloppant d'un voile de tristesse, en les rendant pardonnables par le repentir. Car le jeûne et l'aumône se prêtent une force mutuelle pour nous procurer la délivrance de nos péchés. "
Ibidem, c. 7 : " Le jeûne arrête l'impétuosité des flammes, musèle les lions, rend solides les vagues de la mer, fait fondre les rochers en sources abondantes d'eau vive. Le jeûne a pu changer la nature des éléments, rendre solide l'eau des fleuves, et liquide la pierre des rochers. "
Ibidem, c. 8 : " Le jeûne est une école de continence, une leçon de pudicité ; il humilie l'esprit, mortifie la chair, enseigne la sobriété, exerce à la vertu, purifie le cœur, incline à la miséricorde, inspire la douceur, donne des attraits à la charité ; il honore la vieillesse et protège la jeunesse. Le jeûne est le soutien donné à notre faiblesse, l'aliment qui entretiendra en nous la santé de l’âme. "
Ibidem, c. 9 : " Le jeûne est donc un sacrifice de propitiation, un moyen d'augmenter la grâce en nous : témoins les femmes fortes que le jeûne à élevées par une augmentation de grâce au-dessus de la faiblesse de leur sexe. "
Ibidem, c. 10 : " Le jeûne nous apprête un festin mystique, ce festin dont le Prophète royal à dit ces paroles : Vous avez préparé une table devant moi contre ceux qui me persécutent (Ps. XXII, 3). Celle table ou ce festin n'est acquis qu'à ceux qui ont faim, et ce calice enivrant n'est donné qu'aux sobres, ou à ceux qui ont soif des grâces célestes. Si donc c'est au jeûne à nous introduire à cet auguste festin, s'il nous est nécessaire d'éprouver cette faim pour nous procurer les biens éternels, comment pourrions-nous douter que le jeune exerce sa douce influence même sur les choses qui se rapportent au bonheur d'ici-bas ? Gardons-nous cependant de penser que toute faim dont on éprouve le tourment soit un jeûne agréable à Dieu ; pour lui être agréable, il faut qu'elle ait sa crainte pour principe. Que personne ne prétende pouvoir
jeûner et pécher en même temps, ou croie innocenter ses péchés par le jeûne. Car le jeûne est au contraire l'exterminateur des péchés. "
Ibidem, c. 11 : " Que personne ne mette ce qui flatte la volupté au-dessus de ce qui est grand. La volupté semble une chose douce ; le jeûne au contraire est amer à notre goût délicat. Sachons sacrifier cette douceur à cette amertume. Le corps lui-
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même se trouve bien de ce qui est amer. Car de même que les vers qu'une trop grande abondance de nourriture engendre dans les intestins des enfants, ne peuvent être expulsés qu'au moyen de breuvages amers, ou de médecines dont l'odeur insupportable les fasse mourir, ainsi le péché qui se cache dans les plus profonds replis de l'âme ne peut être détruit que par la vertu du jeûne. "
23. Le même, Epist. LXXXII ad Ecclesiam Vercellensem, dit en réfutant l'erreur de quelques disciples de Jovinien : " J'apprends que vous avez dans votre ville (Verceil) Sarmation et Barbatien (C'étaient, apparemment des disciples de Jovinien, dont saint Ambroise avait découvert les erreurs, comme il le dit dans sa lettre XLII au pape Sirice), hommes grands parleurs, qui disent qu'on n'a aucun mérite à garder l'abstinence et la frugalité, que la virginité ne nous attire aucune grâce ; que tous dans les divers états sont également estimables ; que c'est une folie de châtier sa chair par les jeûnes pour l'assujettir à l'esprit. Mais si l'apôtre saint Paul avait regardé cela comme une folie, il ne l'aurait jamais pratiqué, il ne l'aurait jamais écrit pour l'instruction des autres. Et cependant il s'en glorifie en disant : Je châtie mon corps, et je le réduis en servitude, de peur qu'après avoir prêché aux autres, je ne sois réprouvé moi-même (I Cor., IX, 27). Quiconque donc ne châtie pas son corps, et veut prêche aux autres, est au nombre des réprouvés. "
Ibid., n° 8 : " Quoi en effet de plus capable de nous imprimer ce caractère que ce qui nous excite à la débauche, à la corruption, à la mollesse ; que ce qui nous plonge dans l'impureté, nous entretient dans l'incontinence, allume en nous le feu des passions ? De quelle nouvelle école vous sont envoyés ces épicuriens, soi-disant philosophes, mais au fond pauvres ignorants, qui prêchent l'amour du plaisir, conseillent à chacun de prendre ses aises, et n'attachent aucun mérite à la chasteté. Ils ont été avec nous, mais ils n'étaient pas des nôtres. Car je ne rougis pas de dire la même chose après saint Jean l'Evangéliste (I JEAN, II, 20). Etant ici, ils jeûnaient, ils gardaient la continence dans leur monastère : ils n'y trouvaient pas moyen de faire bonne chère, toute dispute licencieuse leur était interdite. "
Ibid., n° 9 : " Ces hommes délicats n'ont pu souffrir cette régularité : ils sont sortis du monastère ; puis, voulant y rentrer, ils n'ont pas été reçus. J'avais appris bien des choses sur leur
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compte, qui m'avertissaient de me tenir en garde. Je les avais avertis, mais sans rien gagner. Pleins de colère, ils ont commencé à semer une doctrine qui, grâce à leurs efforts pour la répandre est devenue la source de tous les vices. Ainsi ont-ils, hélas ! perdu tout le mérite de leurs jeûnes d'autrefois, comme de la continence qu'ils ont gardé pendant un temps. Maintenant, par une malice diabolique, ils envient aux autres leurs bonnes œuvres parce qu'ils ont perdu tout le fruit des leurs propres. . . "
Ibid., n° 14 : " . . . Comment donc la volupté, qui seule nous a exclus du paradis, pourrait-elle nous y rappeler ? "
Ibid., n° 15 : " Aussi Jésus-Christ Notre-Seigneur, voulant nous fortifier contre les tentations du démon, s’est-il préparé au combat par le jeûne afin que nous sussions que nous n'avons point d'autre moyen pour vaincre les attraits du péché. Enfin, le démon s'arma dans la première de ses tentations des traits de la volupté, lorsqu'il dit au Sauveur : Si vous êtes Fils de Dieu, faites que ces pierres se changent en pain. C'est pourquoi Jésus-Christ lui répondit : L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole de Dieu ; n'ayant pas voulu faire, quoiqu'il le pût, ce changement miraculeux, afin de nous apprendre par cette salutaire maxime à nous attacher bien plus à la lecture des Ecritures qu'à la recherche des voluptés. Et puisque ces hommes soutiennent qu'il ne faut pas jeûner, qu'ils nous disent pourquoi Jésus-Christ a jeûné, si ce n'est pas pour nous donner l'exemple de jeûner nous-mêmes. Enfin, il nous a enseigné encore dans la suite qu'on ne surmonte pas facilement le péché si l'on ne jeûne : Cette espèce de démons, a-t-il dit, ne peuvent être chassés que par la prière et par le jeûne. "
Ibidem, n° 16 : " D'où vient aussi que l’Ecriture rapporte de Pierre qu'il a jeûné (Act., X, 10), et que durant son jeûne et sa prière, Dieu lui révéla le mystère de la vocation des gentils à la grâce du baptême, sinon de ce qu'elle a voulu nous faire voir que le jeûne rend les saints eux-mêmes plus éminents en sainteté. Enfin, c'est en jeûnant que Moïse obtint les tables de la loi ; et c'est aussi en jeûnant que Pierre mérita de connaître toute l'étendue du bienfait de la nouvelle alliance. Ce fut de même par le mérite de ses jeûnes que Daniel ferma la gueule des lions, et prédit les évènements des temps futurs. Quel moyen nous reste-t-il d'ailleurs de nous sauver, si nous n'expions nos péchés par le jeûne, puisque 1'Ecriture nous déclare que le moyen de nous affranchir du péché, c'est le jeûne et l’aumône (TOB., XII, 8) ? "
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Ibidem, n° 17 : " Quels sont donc ces nouveaux docteurs, qui viennent nous assurer que le jeûne n'est nullement méritoire ? Le langage qu'ils tiennent n'est-il pas le langage de ces gentils qui disaient : Mangeons et buvons, nous mourrons demain ? De ces gentils, dont saint Paul faisait si bonne justice, lorsqu'il disait : Si, pour parler à la manière des hommes, j’ai combattu à Ephèse contre des bêtes farouches, quel avantage en tirerai-je, si les morts ne ressuscitent pas ? Mangeons et buvons, nous mourrons demain (I Cor., XV, 32). "
Ibidem, n° 30 : " Oh! qu’Elisée n'avait guère d'esprit de nourrir les prophètes ses disciples avec des fruits sauvages et des herbes amères Oh ! qu'Esdras, qui rétablit de mémoire les saintes Ecritures, n'en avait guère gardé le souvenir ! Oh! que saint Paul était imprudent de se glorifier de ses jeûnes, si les jeûnes ne servent à rien ! "
Ibidem. n° 31 : " Mais comment ne serviraient-ils à rien, s'ils servent à effacer les péchés ? Si vous les joignez à l'humilité et à la miséricorde, vos os, comme parle Isaïe, cet organe de l'Esprit-Saint, s'engraisseront, et vous deviendrez comme un jardin pleinement
arrosé. Votre âme donc et les vertus dont elle est ornée s’engraissent spirituellement par le jeûne, et votre esprit devenant plus fécond multiplie les fruits de sa justice, de sorte qu'il se
passe en vous une de ces ivresses sobres que célèbre le prophète lorsqu'il dit : Que mon calice qui cause l'ivresse est admirable (Cf. Les Lettres de saint Ambroise, etc., trad. par le P. Duranti de Bonrecueil, t. III, p. 126-149) ! "
24. S. LEON-LE-GRAND, Serm. I de jejunio septimi mensis : " Je connais par expérience, mes frères, votre soumission et votre zèle ; vous ne vous contentez pas seulement d'observer les jeûnes d'obligation ; vous en pratiquez même de volontaires. Cela n'empêchera pas que je ne seconde votre piété par mes exhortations, afin que s'il s'en rencontre dont la dévotion soit plus languissante, ils suivent dans ces jours-ci l'exemple des autres, et se soumettent à une pénitence qui est observée de tout le monde. Il faut avoir égard par-dessus toutes choses à une coutume si saintement établie, afin que nous méritions le secours de Dieu contre nos ennemis par l'humiliation qui est attaché au jeûne. Je regarde cette abstinence comme une chose de la dernière conséquence, et je l'ordonne par l'autorité que Dieu m'a confiée ; mais
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qu'on l'observe par un motif de charité, en sorte qu'en mortifiant son propre corps, en le privant d'une partie de ses aliments ordinaires, on songe à soulager les pauvres. . . "
" Puisqu'il est à propos que nous célébrions le jeûne du septième mois, je vous exhorte à jeûner la quatrième et la sixième férie, et à passer le samedi en prière dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui nous délivrera de nos tribulations par ses prières, et par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p.548-549). "
Ibidem, Serm. II : " Il faut que l'homme intérieur se prévale de l'empire qu'il a sur l'homme extérieur, et que l'esprit soumis à la volonté de Dieu fasse un bon usage des choses temporelles. Les secours d'un Dieu miséricordieux ne nous manqueront jamais pour entretenir ce bon ordre ; c'est pour cela qu'il nous a ordonne de jeûner dans de certains temps, afin d'augmenter les forces de l'âme en affaiblissant celles du corps. "
" Le septième mois où nous sommes, mes frères, est destiné à cette sainte abstinence, et il faut nous acquitter avec joie de ce devoir ; et sans parler des jeûnes que chacun s'impose en particulier, selon sa dévotion et selon ses forces, il faut redoubler de zèle pour observer celui-ci auquel tout le monde est obligé. Dans les combats que l'ennemi du nom chrétien nous livre, l'abstinence est d'un grand secours pour repousser ses efforts ; les démons qu'on ne pouvait chasser des corps qu'ils obsédaient, quelque commandement que leur en fissent ceux qui les exorcisaient, en ont été chassés par la vertu du jeûne et de la prière, comme le Sauveur du monde nous en assure par ces paroles : Cette sorte de démon ne se chasse que par la prière et par le jeûne (MATTH., XVII, 20). La prière de ceux qui jeûnent est donc agréable à Dieu et terrible aux démons, et on ne peut douter de l'avantage qu'on peut en retirer pour son propre salut, puisqu'elle est si avantageuse au salut des autres. "
" Quoique nous devions tous être animés du même zèle pour pratiquer de concert cette abstinence, mes frères, s'il se rencontre cependant quelqu'un qui ait moins de force que de bonne volonté, il faut qu'il supplée par les aumônes au mérite du jeûne qui ne peut s'accorder avec sa faiblesse physique (Cf. Ibidem, p.551-552). "
Ibidem, Serm. III : " Les oracles des prophètes nous ont
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appris, mes frères quelle est l'efficacité des jeûnes qui se font par de pieux motifs, et combien ils ont de force pour fléchir la miséricorde de Dieu, et pour soutenir la faiblesse humaine. Les prophètes protestent souvent que le peuple d'Israël, qui avait tant de fois irrité la justice divine, ne se servit point d'autre remède que du jeûne pour l'apaiser. Voilà pourquoi le prophète Joël exhortait les Israélites à jeûner : Le Seigneur votre Dieu a dit : Convertissez-vous à moi de tout votre cœur, employez le jeûne, les pleurs, les gémissements ; brisez vos cœurs et ne vous contentez pas de déchirer vos vêtements ; convertissez-vous au Seigneur votre Dieu, parce qu'il est miséricordieux et patient. . . Faites retentir la trompette en Sion, ordonnez un jeûne saint, publiez une assemblée solennelle, faites venir tout le peuple, avertissez-le qu'il se purifie (JOEL, II, 12-13, 15). Suivons, mes frères, les conseils du prophète, et servons-nous en ce temps-ci d'un remède si salutaire, et d'une pratique dont les anciens se sont si bien trouvés, afin que les chrétiens acquièrent par leur dévotion ce que les Juifs ont perdu par leur prévarication. "
" Les œuvre de piété qui sont publiques et qui se pratiquent à toute la communauté des fidèles, sont plus saintes et d'un plus grand mérite que celles que chacun s'impose en son particulier. L'abstinence que chaque fidèle observe en secret, est pour son utilité et pour sa sanctification personnelle ; mais le jeûne que toute l’Eglise impose au corps des fidèles n'exclut personne de cette sanctification générale : la force du peuple de Dieu se redouble, lorsque tous les cœurs des fidèles se réunissent par le nœud d'une sainte obéissance, et que toute cette milice chrétienne est également prête à bien faire, et fortifiée de tous côtés. "
" Nous jeûnerons donc la quatrième férie et la sixième ; nous ferons la vigile samedi dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre ; et nous espérons que ses mérites et son intercession nous obtiendront la miséricorde de Dieu, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, etc. (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 555-556, 560). "
Ibidem, Serm. IV: " L'habitude que vous avez de m'entendre, mes frères, fait que vous supportez plus aisément mes discours. Le temps où nous sommes m'excite à remplir tous mes devoirs de pontife, et votre ferveur empêche que vous ne trouviez difficile ce qu'on exige de vous. Toutes ces circonstances se trouvent
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rassemblées par la grâce de Dieu : Ce n'est plus la lettre qui tue, c'est l'esprit qui vivifie ; où est l'esprit de Dieu, là est la liberté (II Cor., III, 6, 17), qui n'accomplit point la loi par un esprit de crainte, mais par un motif de charité : l'obéissance adoucit le commandement ; on n'obéit pas par une dure nécessité quand on aime ce qui est commandé. Lorsque nous vous exhortons, mes frères, à pratiquer certaines vertus, qui étaient commandées même dans l'Ancien-Testament, nous ne vous imposons pas le joug de l'obéissance judaïque et nous ne vous exhortons pas à suivre les traces d'un peuple charnel : l'abstinence chrétienne est bien plus parfaite que celles des Juifs ; si nous avons quelque chose de commun avec eux pour le temps, nos meurs sont bien différentes des leurs. Leurs mortifications extérieures et l'abattement de leurs visages étaient les accompagnements de leurs jeûnes infructueux ; mais pour nous, nous n'affectons aucun changement dans notre extérieur, nous ne nous abstenons point des actions justes et légitimes nous mortifions par une abstinence raisonnable le désir que nous avons de manger ; et sans condamner les créatures de Dieu, nous gardons de la modération dans l'usage des viandes qui nous sont permises. "
" Quoiqu'il nous soit libre de châtier notre corps par des mortifications volontaires, et d'employer les efforts que nous jugeons à propos pour dompter les mouvements de la chair, qui combattent les désirs de l'esprit, il est néanmoins nécessaire que tous les fidèles aient des temps marqués pour jeûner tous ensemble. La dévotion est plus efficace et plus agréable à Dieu, lorsque tous les fidèles sont unis par les mêmes sentiments et par les mêmes affections dans la pratique des œuvres de piété ; les bonnes œuvres publiques sont préférables aux particulières, et on retire de plus grands avantages des actions qui se font par toute la communauté. Que chaque particulier soit exact et diligent à observer ce qui lui est commandé ; après avoir imploré la protection de Dieu, qu'on prenne les armes spirituelles pour résister aux efforts des puissances infernales. Quoiqu'un chrétien puisse combattre seul en particulier ses ennemis, il est plus expédient pour lui de le faire en public, et de ne pas se produire avec ses forces isolées : il vaut mieux qu'il se fortifie du secours de ses frères, et qu'il se mérite sous l'étendard d'un roi invincible, pour soutenir de part avec les autres une guerre générale. Quand plusieurs combattent ensemble un ennemi commun, ils courent moins de danger, que quand on combat seul à seul ; celui qui se
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pare du bouclier de la foi est moins exposé aux blessures, parce qu'il est défendu non-seulement par ses propres armes, mais aussi par les armes de ses frères : comme ils soutiennent une cause commune, ils remportent aussi une commune victoire. . . "
" Nous sommes obligés en tout temps d'aimer et de pratiquer la vertu : il y a cependant certains jours consacrés à l'abstinence et à la mortification du corps, afin que l’âme qui est encore embarrassée des désirs de la terre, ait quelque intervalle pour vaquer aux choses divines, et pour produire des fruits dignes du ciel, parce qu'elle est une portion du champ de Dieu : quand on à semé avec soin, on doit espérer de faire une bonne récolte. . . "
" Nous jeûnerons la quatrième férie et la sixième et nous ferons la vigile le samedi dans l'église de l'apôtre saint Pierre ; nous espérons par ses prières que Dieu nous fera miséricorde, et qu'il agréera le sacrifice de notre jeûne par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 561-563, 565, 566). "
Ibidem, Serm. V : " Je vous exhorte vivement, mes frères, à la pratique du jeûne du septième mois, et j’espère que mes exhortations paternelles vous porteront à observer par des motifs chrétiens la même abstinence que les Juifs pratiquaient autrefois. C'est un usage salutaire, et que les deux Testaments, l'Ancien et le Nouveau, ont également approuvé, de travailler à fléchir la justice de Dieu par la mortification du corps et de l'esprit : rien ne touche Dieu plus efficacement, que quand on se juge soi-même et qu'on s'humilie perpétuellement pour demander pardon de ses fautes, parce qu'on y tombe perpétuellement aussi. . . "
" Voilà pourquoi, pour sanctifier nos corps et nos âmes, nous jeûnerons la quatrième férie et la sixième, et nous ferons le samedi la vigile dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, espérant obtenir l'accomplissement de nos désirs par ses prières et par la grâce de Jésus-Christ (Cf. Ibidem, p. 567-568, 572). "
Ibidem, Serm. VII : " Les apôtres, qui savaient bien que Jésus- Christ n'étai pas venu détruire la loi, mais l'accomplir, ont tellement distingué entre les préceptes de l'Ancien-Testament, qu'ils en ont laissé quelques-uns, sans y rien changer de ce qu'ils ont cru conforme à la doctrine évangélique, de sorte
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que les maximes de la morale judaïque sont devenues les maximes de la morale chrétienne. Les différentes victimes, les purifications, le repos du sabbat, tout cela a été aboli avec la circoncision ; mais nous avons tiré des livres de l'Ancien-Testament plusieurs préceptes moraux, qui ont la même force parmi nous, que celle qu'ils avaient parmi les Juifs. . . "
" Si nous avons adopté, mes chers frères, la doctrine de l'ancienne loi touchant le jeûne du septième mois, qui a été institué pour purifier nos corps et nos âmes, ce n'est pas pour nous soumettre au joug de la loi, mais c'est pour nous sanctifier par l'abstinence, qui nous est recommandée dans l’Evangile de Jésus-Christ. La vertu des chrétiens est plus pleine et plus parfaite que celle des pharisiens et des scribes ; non que pour cela elle détruise la loi, mais en ce sens qu'elle rejette ce qu'il y a de charnel et de grossier dans la loi. Nos jeûnes ne doivent point se faire par les mêmes motifs que les jeûnes des Juifs, dont le Saint-Esprit disait, par l'organe du prophète Isaïe : Je ne puis supporter vos néoménies, vos sabbats et vos fêtes ; mon âme a de l'aversion pour vos jeûnes et vos assemblées (Is., I, 13). Le Sauveur du monde, prescrivant à ses disciples la manière dont ils devaient jeûner leur disait : Quand vous jeûnez, ne soyez pas tristes comme font les hypocrites, qui affectent d'avoir le visage pâle et défiguré, afin que les hommes sachent qu'ils jeûnent : je vous le dis en vérité, ils ont reçu leur récompense (MATTH., VI, 16). . . "
" Nous jeûnerons solennellement la quatrième férie et la sixième et nous ferons samedi la vigile dans l’église du bienheureux apôtre saint Pierre, espérant qu'il nous protégera par ses mérites et par son intercession, afin que les fidèles aient autant de pouvoir que de bonne volonté, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, etc. (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 577-578, 579, 581). "
Ibidem, Serm. VIII : " La tempérance et une frugalité honnête est plus heureuse qu'une luxure effrénée ; les humbles jouissent d'une plus douce gloire que les orgueilleux, et il y a plus d'élévation d'esprit à se conduire avec une telle modération entre les choses permises et défendues, qu'on attache toutes ses espérances aux biens célestes, sans se borner aux choses de la terre. Or, pour que l'âme du chrétien s'élève à cette hauteur de vues, et obtienne sur le corps l'empire qui lui appartient, il faut avoir recours au jeûne qui domptera ce dernier par ses salutaires
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rigueurs. Quoique sous ce nom de jeûne on puisse comprendre en général toute sorte de mortification ou de privation, le jeûne proprement dit consiste en particulier à se retrancher des aliments, en se refusant par le choix actuel de sa volonté, et pour le bien de son âme, ce qu'il a été si pernicieux à nos premiers parents de s'accorder malgré la défense qu'ils en avaient reçue, afin que si la concupiscence nous a fait alors des blessures mortelles, l'abstinence en devienne maintenant pour nous la guérison. "
" Quoique tous les temps soient propres à ces remèdes, le temps où nous sommes, mes frères, y est particulièrement destiné : il à été choisi pour cela par Moïse et par les apôtres. Appliquons-nous donc pendant ce septième mois à nous purifier avec un soin particulier. Nous obtiendrons de la miséricorde de Dieu, si nous faisons concourir ensemble le jeûne, l'aumône et la prière, que nos passions soient réprimées, que nos prières soient exaucées et que nos péchés nous soient pardonnés par les mérites de Notre-Seigneur Jésus-Christ, etc. (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 584-585). "
Ibidem, Sem. IX : " Vous êtes suffisamment instruits au sujet de ces pratiques religieuses dont la tradition nous fait une loi, et que la coutume a depuis longtemps consacrées, et votre piété ne vous permettra pas de vous en dispenser. Mais comme le ministère sacerdotal oblige un pontife à étendre ses soins sur tous les enfants de l'Eglise, et à se rendre utile aux savants et aux ignorants, nous vous exhortons à pratiquer exactement et avec joie le jeûne du septième mois, en mortifiant à la fois l'esprit et le corps. . . "
" C'est pour cela qu'on à ordonné des jeûnes dans les Quatre-Temps de l'année pour nous faire souvenir que nous avons besoin de nous purifier en tout temps, et de faire tous nos efforts, tandis que nous sommes dans l'agitation de cette vie mortelle, pour effacer par les jeûnes et par les aumônes les péchés que nous avons commis par la fragilité de la chair, et par la corruption de la concupiscence. . . "
" Jeûnons donc la quatrième férie et la sixième et samedi, nous ferons la vigile dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui nous aidera par son intercession à obtenir de la miséricorde de Dieu, que nos jeûnes et nos œuvres de piété lui soient agréables par la grâce de Jésus-Christ notre Sauveur (Cf. Ibidem, p. 586, 589-890.)
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25. Le même, De jejunio decimi mensis, serm I : " Les principaux actes, etc. " Voir à la question précédente, témoignage 2, page 312.
Ibidem, Serm. II : " Qu'y a-t-il de plus propre à nous sanctifier que le jeûne qui nous approche de Dieu en quelque manière ? Il nous donne la force de résister au démon et de dompter les vices qui flattent la concupiscence. Le jeûne est l'aliment de la vertu : c'est l'abstinence qui enfante les pensée chastes, les désirs raisonnables, les conseils salutaires. Les mortifications volontaires ralentissent la concupiscence de la chair, et donnent à l'esprit des forces nouvelles. Mais comme le jeûne n'est pas l'unique instrument de notre salut, il faut y joindre la charité envers les pauvres. . . "
" Il faut donc que nous jeûnions la quatrième férie et la sixième, et que nous passions le samedi en prière dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui nous aidera par son intercession à obtenir l'accomplissement de nos vœux par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, etc. (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 52-53). "
Ibidem, Serm. III : " Si nous nous laissons aller à une lâche oisiveté et à une nonchalance criminelle, notre cœur demeurera stérile et sans vertu, semblable à une terre inculte, toute hérissée de ronces et d'épines, qui ne produit que de mauvaises herbes, propres à être jetées au feu, au lieu du bon grain qu'on ramasserait dans les greniers. Ce cœur pénétré de la grâce de Dieu, comme d'une rosée, est conservé par la foi : les jeûnes l’exercent, les aumônes le préparent, les prières le rendent fertile et empêchent que des plantes amère et sauvages n'y prennent racine. C'est à quoi nous devons travailler en tout temps ; mais c'est surtout dans les jours où nous sommes, qui sont principalement destinés à ce saint exercice, qu'il nous faut redoubler de soins et de zèle C'est le propre de la piété de faire le bien même qui n'est commandé par aucune loi ; comme c'est une impiété au contraire, de ne pas se mettre en peine de faire celui que la loi nous prescrit. "
" Je vous exhorte de tout mon pouvoir à la pratique du jeûne du dixième mois. Je sais que vous êtes tous disposés à observer cette abstinence avec beaucoup de ferveur : que chacun fasse des aumônes selon ses facultés et selon les biens qu'il a reçus de Dieu. Les ennemis de notre salut, qui sont au désespoir quand
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ils voient que nous nous appliquons nous sanctifier, redoublent leurs efforts et leurs artifices pour nous traverser dans la pratique de la vertu ; ils font craindre la disette à ceux qui auraient le plus de penchant à donner l'aumône ; la rigueur du jeûne abat le courage des autres, de sorte que plusieurs se relâchent là-dessus, et ne l'observent pas avec toute l'exactitude qu'ils devraient (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 53-55). "
Ibidem, Serm. IV : " Ceux qui sont obligés de combattre des ennemis aussi dangereux (que le sont le démon, le monde et la chair), peuvent se servir de trois principaux remèdes pour se guérir des blessures qu'ils reçoivent dans leurs combats, savoir une prière persévérante, des jeûnes rigoureux et d'abondantes aumônes. Ces trois moyens employés concurremment nous rendent Dieu propice, effacent nos péchés, affaiblissent les forces et déconcertent les efforts du tentateur. Une âme fidèle doit toujours être revêtue de cette triple armure ; mais sa ferveur doit redoubler surtout dans les temps particulièrement destinés à la pratique des œuvres de piété. "
" Mettons dans ce rang le jeûne solennel du dixième mois : il ne faut pas le négliger sous prétexte que c'est une pratique tirée de l'ancienne loi, et comme si l'on se faisait, à l'imitation des Juifs, un scrupule de manger de certaines viandes : cette coutume n'est pas du nombre des anciennes purifications, et n'a rien de commun avec le choix qui se faisait alors de certains bestiaux et de certains oiseaux pour les immoler. Toutes ces choses, qui n'étaient que des figures, ont cessé, quand les vérités qu'elles signifiaient ont été accomplies ; la grâce du Nouveau-Testament n'a point aboli le jeûne qui est d'un grand secours pour conserver la pureté du corps et la ferveur de l'esprit. Comme le christianisme observe les préceptes du décalogue et qu'on lit dans l’Evangile : Vous adorerez le Seigneur votre Dieu, et vous le servirez lui seul ; vous aimerez votre prochain comme vous-même (MATTH., IV, 40 ; XXII, 57) ; ainsi les préceptes qui regardent le jeûne n'ont point été abolis par la loi nouvelle. Aujourd'hui, comme autrefois, le jeûne nous fortifie contre le péché, amollit en nous le feu de la concupiscence, repousse les tentations, abat l'orgueil, réprime les saillies de la colère et conduit jusqu'à une vertu consommée les bons désirs que le cœur enfante. Il faut cependant que le jeûne soit secondé par le mérite
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de la charité, et par un usage prudent de l’aumône. Le jeûne dénué du secours de cette vertu ne contribue pas tant à purifier l'âme, qu'à affaiblir le corps ; c'est plutôt souvent un effet de l'avarice, que celui d'une véritable pénitence, quand on se contente simplement de s'abstenir de l'usage des viandes, sans exercer d'autres œuvres de piété. "
" Il faut donc, mes frères, nous disposer à ces bonnes œuvres avec la grâce de Dieu, par le jeûne de la quatrième et de la sixième férie, et par les prières que nous ferons le samedi dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, afin qu'aidés par son intercession, nous puissions mériter la miséricorde de Dieu (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 56-59). "
Ibidem, Serm. V : " Tous les temps, mes frères, sont propres à l'exercice de ces bonnes œuvres (à la pratique de l’aumône) ; mais surtout le temps où nous sommes doit redoubler notre ferveur, puisque les saints Pères inspirés par le Saint-Esprit, ont consacré le dixième mois au jeûne afin que, la récolte, étant faite, on remercie Dieu par une abstinence volontaire des biens qu'il nous à donnés, et qu'on se souvienne de faire de l'abondance des biens un tel usage qu'on soit plus libéral envers les pauvres, à mesure qu'on devient plus sobre et plus austère par rapport à soi-même. La prière accompagnée du jeûne et de l’aumône est très-efficace pour obtenir le pardon des péchés qu’on a commis : de tels suffrages la rendent fort agréable à Dieu. . . "
" Nous jeûnerons donc la quatrième férie et la sixième. Nous passerons le samedi à prier Dieu dans l’église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui veille incessamment sur le troupeau que Dieu lui a confié, comme nous le croyons et comme nous en faisons tous les jours l'heureuse expérience. Il obtiendra de Dieu, par ses prières, que l'Eglise qu'il a édifiée par ses prédications apostoliques soit jusqu'à la fin affranchie de toute erreur (Cf. Ibidem, p. 161-167). "
Ibidem, Serm VI : " Les pratiques de l'Ancien-Testament donnent beaucoup de poids et d'autorité aux préceptes évangéliques, lorsque ce qui a été d'usage dans l'ancienne loi s'observe encore dans la nouvelle. Le Sauveur du monde disait en parlant de lui-même : Ne pensez pas que je sois venu détruire la loi ou les prophètes ; je ne suis pas venu les détruire, mais les accomplir (MATTH., V, 17). Toutes les prophéties et les figures qui annonçaient la venue de Jésus-Christ ont cessé par l'accomplissement
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de la vérité ; mais les maximes qui regardent le règlement des mœurs, la piété, le culte de Dieu, ont toujours la même force : tout ce qui convient aux deux Testaments subsiste encore, et n'est point sujet au changement. Le jeûne des Quatre-Temps est imité des pratiques de l'ancienne loi, et nous l'observons tous les ans par tradition. La justice et la piété exigent de nous des actions de grâces pour les fruits que Dieu nous donne avec tant de bonté. . . "
" Jeûnons la quatrième férie et la sixième ; employons le samedi à la prière dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, afin que l'intercession de cet apôtre nous obtienne le secours et la protection de Dieu par les mérites de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Cf. Sermons de saint Lion-le-Grand, p. 68-69, 73). "
Ibidem, Serm. VII : " La continence a triomphé de la luxure ; .l'humilité a banni l'orgueil ; ceux qui étaient plongés dans l'ordure de l'impudicité sont tous brillants de l'éclat de la chasteté. La divine Providence, mes frères, a ajouté à ces grands changements le mérite du jeûne qu'on observe à certains jours par toute l'Eglise. Quoique ce soit une chose louable que tous les membres de Jésus-Christ se rendent recommandables par leurs fonctions particulières, le mérite est encore plus grand lorsque tous les fidèles s'appliquent de concert à la pratique des mêmes vertus, afin que nos ennemis invisibles, qui regardent notre sanctification comme le plus cruel de leurs supplices, soient vaincus par chaque fidèle en particulier et par tout le corps en commun. Le dixième mois où nous sommes, mes frères, nous avertit de redoubler notre ferveur, et d'allumer de plus en plus dans nos cœurs le zèle de la charité, après en avoir banni la tiédeur et l'infidélité. "
" Jeûnons la quatrième férie et la sixième, et passons le samedi en prière dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre (Cf. Ibidem, p. 75-77). "
Ibidem, Serm. VIII : " L'utilité du jeûne parait principalement, mes frères, dans les jeûne que l’Eglise nous prescrit, et qu'elle a assigné aux diverses saisons de l'année par l'inspiration
du Saint-Esprit, afin que les fidèles se souviennent qu'ils doivent pratiquer l'abstinence en tout temps. Le jeûne du printemps s'observe pendant le carême celui d'été à la Pentecôte ; le jeûne de l'automne est dans le septième mois, et enfin celui
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d'hiver s'observe dans le mois ou nous sommes, qui est le dixième : cette distribution nous fait entendre qu'il faut observer les préceptes divins dans toutes les saisons, et que Dieu nous instruit dans tous les temps de l'année, afin que nous n'ignorions aucun de nos devoirs, et que nous sachions précisément ce que nous devons dire et ce que nous devons faire. . . "
" L'abstinence est un moyen très-propre à détruire les vices : l'efficacité de cette vertu tempère la soif de l'avarice, arrête les saillies de l'ambition, ralentit le feu de la luxure. Des effets si merveilleux doivent nous en faire sentir l'utilité ; mais il ne suffit pas de s'interdire l'usage des viandes ; il faut encore étouffer tous les désirs charnels. . . "
" Nous jeûnerons les jours de la quatrième et de la sixième férie et nous passerons le samedi en prière dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui obtiendra par son intercession que nos jeûnes, nos prière et nos aumônes soient agréables à Dieu, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus- Christ qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit dans les siècles des siècles (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 79-83). "
26. Ibidem, de jejunio Pentecostes, serm. I : " La fête que nous célébrons aujourd'hui, mes frères, et qui est consacrée par la descente du Saint-Esprit, est suivie, comme vous le savez, d'un jeûne solennel, institué pour guérir les maux de l'âme et du corps, et que nous devons observer avec toute l'exactitude et toute la ferveur dont nous sommes capables. Depuis que les apôtres ont été remplis de la vertu d'en haut, et que l'Esprit de vérité est descendu sur eux, nous ne pouvons plus douter que l'institution du jeûne aussi bien que les autres points de la doctrine céleste que nous professons, ait été suggérés par le Saint-Esprit, afin que les âmes sanctifiées par le jeûne soient plus en état de recevoir l'onction de ses grâces. Les disciples de Jésus-Christ étaient sous la protection du Tout-puissant ; la divinité du Père, du Fils et du Saint-Esprit soutenait les chefs de l'Eglise naissante. Ce n'étaient point les forces du corps, ni les secours naturels, qu'il leur fallait employer pour combattre leurs persécuteurs ou pour résister aux efforts et aux mauvais desseins des méchants : la bonne chère et les délices altèrent la vertu des hommes, ce qui plaît aux sens corrompt le cœur ; l'âme raisonnable devient plus épurée, à mesure que le corps est dompté et mortifié. "
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" Les docteurs qui ont illustré l'Eglise naissante par leurs exemples et par leurs traditions, ont fondé sur le jeûne les premiers éléments de la milice chrétienne afin que ceux qui se préparaient à combattre les puissances infernales prissent les armes de l'abstinence pour réprimer l'impétuosité des vices. . . "
" Nous jeûnerons la quatrième férie, et de même la sixième et nous prierons le samedi dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, dont l'intercession nous obtiendra, comme nous en avons la ferme confiance, d'être délivrés de nos ennemis visibles et invisibles, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 518-519, 521). "
Ibidem, Serm. II : " Il ne faut pas douter, mes frères, que toutes nos saintes pratiques soient d'institution divine, et que nous tenions de la tradition apostolique les coutumes établies dans 1'Eglise. C'est le Saint-Esprit qui agit encore sur le cœur des fidèles pour les encourager à l'observation des divins commandements. Le Saint-Esprit, qui avait été promis de Dieu, descendit sur les apôtres le jour de la Pentecôte qui est le cinquantième depuis la Pâque, et les combla par sa présence de lumières plus éclatantes et de grâces plus abondantes ; et nous devons être persuadés que le jeûne qui suit immédiatement la fête de la Pentecôte doit être compté entre les autres dons du Saint-Esprit. Comme la concupiscence à ouvert la porte à tous les péchés, ainsi la continence est l'origine et la source de toutes les vertus (Cf. Ibidem, p. 522-523). "
Ibidem, Serm. VI : " Nous ne devons point douter, mes frères, que les apôtres inspirés par le Saint-Esprit aient été les premiers instituteurs du jeûne et qu'ils se soient préparés par l'abstinence à la pratique des autres vertus. Les fidèles qui se sanctifient par la mortification, et qui se servent du jeûne pour amortir le feu de la concupiscence, sont plus en état d’accomplir les préceptes de la loi de Dieu. "
" Voilà pourquoi je vous exhorte, mes frères, si vous voulez effacer les taches de vos péchés par la mortification et par les œuvres de piété, à jeûner la quatrième férie ainsi que la sixième, et à passer le samedi en prière dans l’église du bienheureux apôtre saint Pierre, afin que ses mérites et son intercession rendent nos vœux et nos jeûnes agréables à Dieu, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Cf. Ibidem, p. 526-529). "
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27. Le même, De Quadragesimâ, Serm. I : " Nous sommes parvenus au saint temps de carême, où nous devons nous punir de notre lâcheté et de notre négligence passées, pour en effacer le crime ; mais c'est aussi en cette sainte saison que la malignité des démons est plus envenimée et qu'ils font de plus grands efforts afin que ceux qui doivent célébrer la Pâque soient coupables et impurs en quelque chose, et que ce mystère qui devrait être pour eux une source de bénédictions, les replongent dans de nouveaux crimes, s'ils s'en approchent indignement. "
" Le saint temps de carême approche, mes frères, où nous devons redoubler notre zèle et notre application au service de Dieu : comme nous entrons dans une espèce de combat, il faut nous préparer à soutenir les tentations de nos ennemis ; car nous devons être persuadés que, plus nous nous appliquerons à l'affaire de notre salut, plus nos ennemis redoubleront leurs attaques avec violence. Mais celui qui habite en nous est plus fort que celui qui est contre nous ; nous sommes fortifiés par la force même de celui en qui nous avons mis notre confiance. Le Sauveur a permis au démon de le tenter, afin que nous soyons instruits par l'exemple de celui qui nous protège (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 231-232). "
Ibidem, Serm. II : " Un homme n'a qu'une piété suspecte même dans les autres temps de l'année, si sa piété n'est pas plus ardente dans celui du carême. C'est fort à propos qu'on nous à répété cette maxime de l'Apôtre : Voici maintenant le temps favorable, voici le jour du salut (II Cor., VI, 2). En effet, peut-on trouver un temps plus favorable à la vertu, et des jours plus salutaires, puisque c'est dans ces temps qu'on déclare une guerre ouverte aux vices, et qu'on s'applique plus particulièrement à la vertu (Cf. Ibidem, p. 258) ? "
Ibidem, Serm. III : " Tant que nous sommes revêtus d'une chair mortelle, notre ancien ennemi ne cesse de nous tendre des pièges pour nous faire tomber dans le péché ; et sa fureur est plus ardente contre les membres de Jésus-Christ lorsqu'ils sont sur le point de célébrer les plus augustes mystères. Le Saint-Esprit à eu soin de nous enseigner cette vérité, afin que nous
nous préparions par un jeûne de quarante jours à la fête de Pâques. Voici le temps de nous purifier par cette sainte abstinence, et de nous imposer une pénitence si utile ; nous serons
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plus en état d’honorer la Pâque de Jésus-Christ et de la célébrer dignement, si nous vivons saintement pendant le carême et si nous observons avec fidélité le jeûne qui nous est prescrit. - Dans ces jours de jeûne livrons-nous avec plus de zèle que jamais à la pratique des bonnes œuvres, et quoique nous soyons obligés de les pratiquer en tout temps, cette sainte saison demande un redoublement de ferveur (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p.). "
Ibidem, Serm. IV : " Mes frères, dans l'intention où je suis de vous parler du saint jeûne de carême, puis-je mieux commencer ce sermon que par les paroles de l'Apôtre qui était l'interprète de Jésus-Christ et qu'en répétant ces paroles que nous venons de lire : Voici maintenant le temps le plus favorable, voici maintenant le jour du salut. Quoique le Seigneur nous comble de ses grâces en tout temps, et que sa divine miséricorde vienne sans cesse à notre secours, il faut cependant que l'âme s'applique avec plus de zèle à faire des progrès dans la vertu, et qu'elle conçoive de plus vives espérances dans ces temps où l'accomplissement des mystères de notre rédemption nous invite spécialement à exercer de nombreux actes de piétés afin que nous puissions célébrer avec une grande pureté de cœur et d'esprit le saint et incomparable mystère de la passion de Notre-Seigneur. Nous devrions toujours adorer ces divins mystères avec la même piété, avec le même amour, et rester toujours devant Dieu aussi purs que nous devons l'être pendant la fête de Pâques. Mais peu de personnes possèdent assez de ferveur pour cela ; la fragilité de la chair nous empêche de persister dans la stricte observance des divins préceptes ; et les embarras et les inquiétudes de cette vie causent de si grandes distractions, que les âmes les plus vertueuses elles-mêmes ne peuvent se garder d'être souillées par la poussière du monde. Aussi Dieu dans sa sagesse nous à donné le carême pour purifier nos âmes, pour racheter par de bonnes œuvres et le jeûne de la piété les fautes que nous avons pu commettre dans le cours de l'année. Puisque nous sommes sur le point d'entrer dans ces saints jours où les lois divines nous prescrivent de purifier notre âme et notre corps, ayons soin d'obéie à ce précepte de l’Apôtre : Purifions-nous de tout ce qui souille le corps ou l'esprit. . . "
" Nous jeûnerons ainsi les jours de la deuxième, quatrième et sixième férie, et nous célébrerons les vigiles dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui ne cesse de veiller sur le
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troupeau qui lui à été confié, et qui obtiendra notre salut par la grâce de Dieu tout-puissant (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 250-251, 258). "
Ibidem, Serm. V : " Pouvons-nous, mes frères, trouver un temps plus favorable pour recourir aux remèdes divins, qu’à l'époque de ces fêtes où nous célébrons les divins mystères de notre rédemption ? Préparons-nous par le jeûne du carême à bien nous acquitter de ce devoir. Non-seulement ceux qui doivent recevoir une vie nouvelle dans le baptême par le mérite de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ, mais encore tous les fidèles d'avance régénérés peuvent se servir utilement de ce divin remède pour se sanctifier : les premiers, afin de se rendre dignes de la grâce qu'ils n'ont point encore reçue, les seconds, afin de conserver celle qu'ils ont reçue autrefois. Car l'Apôtre a dit : Que celui donc qui croit être ferme, prenne bien garde de tomber (I Cor., X, 12). Personne n'est tellement solide dans sa vertu, qu'il puisse être sûr de sa persévérance. Profitons donc, mes frères, des avantages que peut nous procurer un temps si salutaire, et employons tous nos efforts à purifier notre conscience (Cf. Ibidem, p. 262-263). "
Ibidem, Serm. VI : " Si les chrétiens sont obligés en tout temps d'être réguliers et vertueux, il est juste qu'ils redoublent de ferveur en ce temps-ci, et qu'ils satisfassent à l'obligation de jeûne que les apôtres nous ont imposée, non-seulement en se privant de nourriture, mais surtout en s'abstenant des vices (Cf. Ibidem, p. 268).
Ibidem, Serm. IX : " Nous n'ignorons pas, mes frères que la fête de Pâques est la plus grande de toutes les solennités du christianisme ; et pour célébrer dignement cette fête, l'année entière, dans les vues de l’Eglise, doit y servir de préparation. Mais le temps où nous sommes demande de nous à cet égard une dévotion et une piété toute particulière, parce que nous approchons tous les jours de plus en plus de ce mystère sublime de miséricorde. Les apôtres inspirés du Saint-Esprit ont ordonné le jeûne du carême, afin que nous nous conformions par la mortification de la croix et aux souffrances de Jésus- Christ, pour avoir part à ses récompenses, selon cette maxime de l'Apôtre : Si nous souffrons avec lui, nous serons glorifiés avec lui (Rom., VIII, 17). Nous devons
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avoir une ferme espérance d'obtenir la béatitude qui nous est promise, si nous avons part à la passion de Jésus-Christ (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 287-288). "
Ibidem, Serm. X : " Si nous considérons attentivement les grâces que la croix du Sauveur a procurées à l’Eglise universelle, nous n'aurons pas de peine à reconnaître que le jeûne du carême a été sagement institué pour nous préparer à la fête de Pâques, afin que nous puissions assister dignement à un si grand mystère (Cf. Ibidem, p. 294). "
Ibidem, Serm. XI : " Le grand mystère de la Pâque approche : pour le célébrer dignement, nous nous préparons par un jeûne de quarante jours ; tous les fidèles sans exception sont obligés à cette abstinence, parce qu'il n'y a personne de si saint ou de si pieux, qu'il ne doive croître toujours en sainteté et en piété (Cf. Ibidem, p. 302). "
Ibidem, Serm. XII : " Il faut nous disposer par les jeûnes selon la coutume, à la solennité pascale qui approche, et sanctifier le corps et l'âme par une abstinence de quarante jours. Puisque c'est la plus grande et la plus auguste de toutes les fêtes, il faut apporter tous nos soins pour nous en rendre dignes ; et comme nous sommes ressuscites avec Jésus-Christ il faut aussi mourir avec lui. . . "
" L'abstinence conserve, nourrit, augmente les bonnes
dispositions de l'âme et du corps. De là concluez combien
le jeûne, dont l'institution remonte à Dieu même, est
utile dans l'intention de l’Eglise, qui en prescrit la pratique par ses
sages règlements. Du moment où l'appétit charnel est
soumis aux lois de l'abstinence, les tentations intérieures ne sont
plus si violentes, et en même temps que le corps se prive des viandes,
l'âme s'abstient des vices (Cf. Ibidem, p. 312-313). "
Question II
Que faut-il répondre à ceux qui décrient et méprisent la loi du jeûne ecclésiastique ?
Il faut les avertir premièrement de ne pas attribuer injustement aux catholiques ce que l'Apôtre réprouve, et ce que l’Eglise a toujours condamné dans les juifs, dans les manichéens et dans les priscillianistes, et qui consiste à s'abstenir de certains aliments par superstition, ou pour obéir à la loi de Moïse. Car pour
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reproduire ici la réponse que fit saint Augustin à Fauste le Manichéen " si les catholiques s'abstiennent de manger de la viande, c'est pour réprimer les révoltes de la chair et punir l'âme elle-même du consentement qu'elle à pu y donner, et non parce qu'ils regarderaient peut-être la chair des animaux comme quelque chose d'impur. Et ce n'est pas seulement de la viande qu'ils s'abstiennent ainsi ; mais ils usent de la même réserve par rapport à certaines productions de la terre, presque tous au moins pendant le carême, et quelques-uns même dans tous les temps de l’année. " Voilà ce qu'écrivait saint Augustin. Avant lui saint Epiphane exprimait la même doctrine dans la réfutation qu'il a donnée de l'hérésie d'Aérius, qui prétendait abandonner à la libre volonté de chacun les jeûnes prescrits par l'Eglise, et refusait à celle-ci le droit d'en faire une obligation aux fidèles.
Quant à cet usage où est l’Eglise de marquer des époques particulières pour les jeûnes publics, aussi bien que pour ses prières solennelles et pour ses fêtes, cet usage a pour but de cimenter, de mettre en relief et d'accroître l'union qui doit exister entre tous les membres de l'Eglise. Beaucoup de gens d'ailleurs ne songeraient guère à s'imposer à eux-mêmes des jeûnes particuliers, pour lesquels l'amour naturel que chacun a de ses aises et de son bien-être corporel ne manquerait pas de leur créer des répugnances.
Qu'il soit important pour le salut de notre âme, et que ce soit pour nous une source certaine de mérites d’accepter avec respect et soumission les lois de l'Eglise sur cette matière et de les observer avec exactitude, c'est ce que saint Jérôme démontre si clairement dans ses livres contre Jovinien, que personne ne peut plus, après cela le révoquer en doute. Ajoutons aux raisons données par saint Jérôme ce que nous avons dit plus haut de l'obligation d'observer les préceptes de l’Eglise, tant pour éviter le scandale que pour ne pas nuire au maintien de la discipline ; et non pas seulement par la crainte du châtiment, mais encore, comme le dit saint Paul, par un devoir de conscience.
Or, il est constant, comme le prouvent les témoignages unanimes des écrivains de tous les siècles que la discipline de l’Eglise, ses coutumes, ses traditions, ses lois ont de tout temps conspiré, et cela dès l'époque de son établissement, à procurer l'observation de ce jeûne ecclésiastique marqué pour certains jours, et particulièrement pour le carême. Les Canons
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apostoliques et les conciles les plus anciens témoignent de la vérité que nous exposons ici. Le concile de Gangres en particulier frappe d'anathème ceux qui méprisent les jeûnes ordonnés dans toute l'Eglise, et un concile de Tolède impose l'obligation aux évêques de priver de la communion ceux qui font gras en carême sans y être forcés par la maladie ou par quelque autre nécessité évidente.
Les Pères, de leur côté, ont appliqué leur zèle à recommander le jeûne, surtout celui du carême, qui leur paraît d'institution apostolique, et à le présenter comme de stricte obligation pour les fidèles. Ceux-là donc sont animés d’un tout autre esprit que de celui des Pères qui se dispensent, eux et les autres, de la loi du jeûne et se font les patrons de la prétendue réhabilitation (Je hasarde ici cette expression, devenue si fort à la mode dans les écrits des philosophes humanitaires, au lieu de traduire plus littéralement celle de l'auteur, carnis licentiæ, que j'aurais pu rendre par ces mots : la licence des appétits charnels) de la chair, plutôt que de la liberté évangélique. En s'opposant, comme ils le font, à ce que la chair soit crucifiée avec ses vices et ses convoitises, ils font bien voir qu'ils ne comprennent rien aux inspirations de l'esprit de Dieu : et que loin d'avoir cet esprit, ils l'éteignent au contraire et en eux-mêmes et dans les autres, suivant l'expression de l'Apôtre. Outre qu'ils résistent ouvertement à l'Eglise leur mère ou pour mieux dire, à Jésus-Christ lui-même qui leur parle et leur commande par la bouche de l’Eglise son épouse, et qu'ils s'assurent leur damnation, en abolissant, autant qu'il est en eux, la sainte loi du jeûne, cette loi si salutaire, et que l’Eglise de tout temps nous a si puissamment recommandée.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. I Tim, IV, 1-5 : " Or, l'Esprit dit expressément que dans les temps à venir quelques-uns abandonneront la foi, en suivant des esprits d'erreur et des doctrines diaboliques, - enseignées par des imposteurs pleins d'hypocrisie, dont la conscience sera noircie de crimes ; - qui interdiront le mariage, et l'usage des viandes que Dieu à créées pour être reçues avec action de grâces par les fidèles, et par ceux qui connaissent la vérité. - Car tout ce que Dieu à créé est bon, et on ne doit rien rejeter de ce qui peut se manger avec action de grâces ; parce que cela est sanctifié par la parole de Dieu et par la prière. "
2. Colossiens, II, 16-17, 20-23 : " Que personne donc ne vous condamne pour le manger et pour le boire, ou au sujet des jours de fêtes, des nouvelles lunes, et des jours de sabbat, - puisque toutes ces choses n'ont été que l'ombre de celles qui devaient arriver, et que Jésus-Christ en est le corps et la vérité. - Si donc vous êtes morts avec Jésus- Christ à ces éléments du monde, comment vous en faites-vous encore des lois, comme si vous viviez dans ce premier état du monde ? - Ne mangez pas, vous dit-on, d'une telle chose ; ne goûtez pas de ceci, ne touchez
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pas à cela. - Cependant ce ne sont là que des choses qui se consument par l'usage qu'on en fait ; et vous les interdire, c'est vous attacher à des prescriptions et à des opinions humaines, - qui n'ont que l'apparence d'une certaine sagesse par une affection de piété et d’humilité, et par les privations qu'elles imposent au corps, en refusant à la chair ce qui pourrait la contenter. "
3. Deutéronome, IV, 3-21 : " Ne mangez point de ce qui est impur. - Voici les animaux dont vous devez manger : le bœuf, la brebis, la chèvre, - le cerf, la chèvre sauvage, le buffle, l'onagre, le chevreuil, l'oryx, la girafe. - Vous mangerez de tous les animaux qui ont la corne divisé en deux, et qui ruminent. - Mais vous ne devez point manger de ceux qui ruminent, et dont la corne n'est point fendue, comme du chameau, du lièvre, du chœrogrille. Ces animaux, seront impurs à vos yeux, parce qu'encore qu'ils ruminent, ils n'ont point la corne fendue. - Le pourceau aussi sera impur pour vous, parce que, bien qu'il ait la corne fendue, il ne rumine point. Vous ne mangerez point de la chair de ces animaux, et vous n'y toucherez point lorsqu'ils seront morts. - Entre tous les animaux. qui vivent dans les eaux, vous mangerez de ceux qui ont des nageoires et des écailles. - Vous ne mangerez point de ceux qui n'ont point de nageoires ni d'écailles, parce qu'ils sont impurs. - Mangez de tous les oiseaux qui sont purs ; - mais ne mangez point de ceux qui sont impurs, tels que l'aigle, le griffon, l'aigle de mer, - l’ixion, le vautour et le milan, dans toutes leurs espèces ; - les corbeaux, et tout ce qui est de la même espèce ; - l'autruche, la chouette, le larus, avec l'épervier et tout ce qui est de la même espèce ; - le héron, le cygne, l'ibis, - le plongeon, le porphyrion, le hibou, - l'onocratalus, le charadrius, chacun selon son espèce ; la huppe et la chauve-souris. - Tout ce qui rampe sur la terre et a des ailes sera impur, et on n'en mangera point. - Mangez de tout ce qui est pur. - Ne mangez d'aucune bête qui sera morte d'elle-même. "
4. Genèse, I, 29 : " Dieu dit encore : Voilà que je vous ai donné toutes les plantes répandues sur la surface de la terre et qui portent leur semence, et tous les arbres fruitiers qui ont leur germe en eux-mêmes, chacun selon son espèce, pour servir à votre nourriture. "
5. Ibid., II, 16-17 : " Et le Seigneur fit à l'homme un commandement, et lui dit : Tu peux manger de tous les fruits des autres arbres du paradis ; mais tu ne mangeras du fruit de
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l'arbre de la science du bien et du mal ; car au jour où tu en mangeras, tu mourras irrémissiblement. "
6. Ibid., IX, 3-4 : " Vous pourrez prendre pour votre nourriture tout ce qui a mouvement et vie ; je vous ai abandonné toutes ces choses, de même que les légumes et les herbes de la campagne. - Seulement, vous ne mangerez la chair d'aucun animal mêlée avec son sang. "
7. Lévitique, X, 8-11 : " Le Seigneur dit aussi à Aaron : - Vous ne boirez, vous et vos enfants, ni vin, ni rien de ce qui peut enivrer, quand vous entrerez dans le tabernacle du témoignage, de peur que vous ne soyez punis de mort ; parce que c'est là une ordonnance établie à jamais pour toute votre postérité : - afin que vous sachiez discerner ce qui est saint ou profane, ce qui est pur ou impur, - et que vous appreniez aux enfants d'Israël toutes les lois et les ordonnances que je leur ai prescrites par le ministère de Moïse. "
8. Nombres, VI, 2-4 : " Parle aux enfants d'Israël et dis-leur : Lorsqu'un homme ou une femme aura fait vœu de se sanctifier, et aura voulu se consacrer au Seigneur, - il s'abstiendra de vin, et de tout ce qui peut enivrer : il ne boira point de vinaigre, ni d'aucun autre breuvage, ni rien de ce qui se tire du raisin. Il ne mangera point de grappes fraîches ou sèches. - Tant que durera le temps de sa consécration au Seigneur, d'après le vœu qu'il aura fait, il ne mangera rien de ce qui vient de la vigne, depuis la grappe jusqu'au moindre grain. "
9. Juges, XIII, 2-4, 13-14 : " Or, il y avait un homme de Saraa, de la tribu de Dan, nommé Manué, dont la femme était stérile. - Et l'ange du Seigneur apparut à sa femme, et lui dit: Tu es stérile et sans enfants ; mais tu concevras, et tu enfanteras un fils. - Prends donc bien garde de boire du vin, ou de ce qui peut enivrer, et de manger quoi que ce soit d'impur. - L'ange du Seigneur dit à Manué : Qu'elle s'abstienne de tout ce que je lui ai marqué. - Qu'elle ne mange rien de ce qui naît de la vigne ; qu'elle ne boive ni vin, ni rien de ce qui peut enivrer ; qu'elle ne mange rien d'impur, et qu'elle accomplisse et garde avec soin ce que je lui ai ordonné. "
10. JEREMIE, XXXV, 1-10, 18-19 : " Voici la parole que le Seigneur adressa à Jérémie dans les jours de Joachim, fils de Josias, roi de Juda : - Rends-toi à la maison des Réchabites et parle-leur ; tu les introduiras dans la maison du Seigneur, dans l'une des chambres du trésor et tu leur donneras du vin à boire.
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Alors je pris Jozonias, fils de Jérémie, fils de Habassanias, ses frères et tous ses fils, et toute la maison des Réchabites. - Et je les introduisis dans la maison du Seigneur, dans la chambre du trésor occupé par les enfants de Hanan, fils d'Igédalias, homme de Dieu, près du trésor des princes, au-dessus de celle de Maasias, fils de Sellum, qui était le gardien du vestibule. - Et je mis devant les enfants de la maison des Réchabites des tasses et des coupes pleines de vin, et je leur dis : Buvez du vin. - Et ils me répondirent : Nous ne boirons point de vin, parce que Jonadab, notre père, fils de Réchab, nous à fait ce commandement : Vous ne boirez jamais de vin, ni vous, ni vos enfants ; - et vous ne bâtirez point de maisons, et vous ne sèmerez point de grains, et vous ne planterez point de vignes, et vous n'en aurez point à vous ; mais vous habiterez sous des tentes tous les jours de votre vie, afin que vous viviez longtemps sur la terre, ou vous êtes étrangers.- Nous avons donc obéi à la voix de Jonadab, notre père, fils de Réchab, en tout ce qu'il nous a prescrit ; et nous n'avons point bu de vin tous les jours de notre vie, ni nous, ni nos femmes, ni nos fils, ni nos filles ; - et nous n'avons point bâti de maisons pour y habiter, et nous n'avons eu ni vignes, ni champs, ni blé. - Mais nous avons habité sous des tentes, et nous nous sommes conformés en tout à ce que Jonadab, notre père, nous a prescrit. - Or, Jérémie dit à la maison des Réchabites : Voici ce que dit le Seigneur des armées, le Dieu d'Israël : Puisque vous avez obéi au précepte de Jonadab, votre père que vous avez gardé tous ses commandements, et que vous avez fait tout ce qu'il vous a prescrit ; - voici ce que dit le Seigneur des armées, le Dieu d'Israël : La race de Jonadab, fils de Réchab, subsistera toujours en ma présence. "
11. DANIEL, I, 8-17 : " Or, Daniel résolu dans son cœur de ne point se souiller en mangeant de ce qui venait de la table du roi, ou en buvant du vin dont il buvait ; et il pria le chef des eunuques de ne point l'obliger à se rendre impur. - Dieu donna en même temps à Daniel grâce et faveur auprès du chef des eunuques. - Alors le chef des eunuques dit à Daniel : Je crains le roi mon seigneur, qui a ordonné qu'on vous serve des viandes et du vin de sa table : s'il voit vos visages plus maigres que ceux des autres jeunes gens de votre âge, vous serez cause que le roi me fera trancher la tête. - Daniel répondit à Malasar, à qui le chef des eunuques avait ordonné de prendre soin de
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Daniel, d'Anasias, de Misaël et d'Azarias : - Eprouvez, je vous prie, vos serviteurs pendant dix jours, et qu'on ne nous donne que des légumes à manger et de l'eau à boire ; - et après cela regardez nos visages, et les visages des jeunes gens qui se nourrissent des viandes de la table du roi ; et vous traiterez vos serviteurs selon ce que vous aurez jugé vous-même. - Ayant entendu ces paroles, il les éprouva l'espace de dix jours. - Et après les dix jours, leur visage parut plus vermeil et doué de plus d'embonpoint que celui de tous les autres jeunes hommes qui mangeaient des viandes de la table du roi. - Malasar prenait donc pour lui les viandes et le vin qu'on leur donnait pour leur manger et pour leur boire, et à la place il leur apportait des légumes. - Or, Dieu donna à ces jeunes hommes la science et la connaissance de tous les livres et de toute la sagesse ; et il communiqua en particulier à Daniel l'intelligence de toutes les visions et de tous les songes. "
12. Id., X, 2-3 : " En ces jours-là, moi, Daniel, je pleurais tous les jours l'espace de trois semaines. - Je ne mangeais pas de pain, et ni viande, ni vin n'entra dans ma bouche ; et je ne répandis sur moi aucun parfum, jusqu’à ce que les jours de ces trois semaines fussent accomplis. "
13. MATTHIEU, III, 4 : " Or, Jean avait un vêtement de poil de chameau et une ceinture de cuir autour des reins ; et sa nourriture n'était que de sauterelles et de miel sauvage. "
14. MARC, I, 6 : " Et Jean était vêtu de poil de chameau, et il ceignait ses reins d'une ceinture de cuir, et il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage. "
15. LUC, I, 13-45 : " Mais l'ange lui dit : Ne craignez point, Zacharie, car votre prière à été exaucée et Elisabeth, votre femme, vous enfantera un fils, et vous lui donnerez le nom de Jean. - Vous en serez dans la joie et dans le ravissement ; et plusieurs se réjouiront de sa naissance. - Car il sera grand devant le Seigneur, il ne boira ni vin, ni rien de ce qui peut enivrer, et il sera rempli du Saint-Esprit dès le sein de sa mère. "
16. Actes, XV, 19-20, 28-29 : " C'est pourquoi je suis d'avis (dit Jacques) qu'il ne faut point inquiéter ceux d'entre les gentils qui se convertissent à Dieu, - mais leur écrire qu'ils s'abstiennent des choses immolées aux idoles, de la fornication, de la chair d'animaux étouffés et du sang. - Car il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous, de ne point vous imposer d'autres charges que
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celles-ci qui sont nécessaires, savoir, de vous abstenir de ce qui aura été sacrifié aux idoles, ainsi que du sang et de la chair d'animaux étouffés et de la fornication enfin : abstenez-vous de ces choses, et vous ferez bien. Adieu. "
17. Romains, XIV, 19-21 : " Recherchons donc ce qui peut entretenir la paix parmi nous, et portons-nous à tout ce qui peut nous édifier les uns et les autres. - Que le manger ne devienne pas pour vous une occasion de détruire l'ouvrage de Dieu. Ce n'est pas que toutes les viandes ne soient pures ; mais un homme fait mal d'en manger lorsqu'il sait qu'en cela il scandalisera les autres. - Et il vaut mieux ne point manger de viande, et ne point boire de vin, plutôt que de rien faire qui puisse choquer votre frère ou le scandaliser, ou l'affaiblir dans sa foi. "
18. I Corinthiens, VIII, 9-1 3 : " Mais prenez garde que cette liberté que vous prenez ne soit pour les faibles une occasion de chute. - Car si l'un d'entre eux vous voit, sous prétexte que vous êtes plus éclairés que lui, vous mettre à table dans un lieu prostitué aux idoles, ne sera-t-il pas porté, lui, dont la conscience est encore faible, à manger aussi de ces viandes immolées ? - Ainsi, parce que vous êtes plus éclairés, vous perdrez votre frère qui le sera moins que vous, mais pour qui cependant Jésus-Christ est mort aussi bien que pour vous. Or, pécher de la sorte contre vos frères en blessant leur conscience à cause de sa faiblesse, c'est pécher contre Jésus-Christ même. - C'est pourquoi, si ce que je mange peut scandaliser mon frère, je n'en mangerai jamais, plutôt que de le scandaliser. "
19. I Timothée, V, 23 : " Ne continuez pas à ne boire que de l'eau, mais usez d'un peu de vin à cause de la faiblesse de votre estomac, et de vos maladies si fréquentes. "
20. Romains, XIII, 1-8: " Que toute âme soit soumise aux puissances supérieures, car il n'y a point de puissance qui ne vienne de Dieu, et toutes celles qui sont sur la terre sont dans l'ordre de sa providence. - Celui donc qui résiste aux puissances, résiste à l'ordre de Dieu ; et ceux qui y résistent attirent la condamnation sur eux-mêmes. - Car les princes ne sont point à craindre lorsqu'on fait de bonnes actions, mais lorsqu'on en fait de mauvaises. - Voulez-vous donc n'avoir point à craindre les puissances ; faites ce qui est bien, et vous en recevrez des louanges. - Car le prince est le ministre de Dieu pour votre bien ; mais si vous faites ce qui est mal, vous avez raison de craindre, parce que ce n'est pas en vain qu'il porte le glaive :
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car il est le ministre de Dieu pour exécuter ses vengeances, en punissant celui qui fait le mal. - Il est donc nécessaire de vous y soumettre, non-seulement par la crainte que vous auriez du châtiment, mais aussi par un devoir de conscience. "
21. Galates, V, 24 : " Or, ceux qui sont à Jésus- Christ ont crucifié leur chair avec ses passions et ses désirs déréglés. "
22. I Corinthiens, II, 14 : " Or, l'homme animal ne conçoit point les choses qui sont de l'esprit de Dieu ; elles lui paraissent une folie, et il ne peut les comprendre, parce que c'est par une lumière spirituelle qu'on doit en juger. "
23. I Thessaloniciens, V, 19 : " N'éteignez point la ferveur de l'esprit. "
24. LUC, X, 16 : " Celui qui vous écoute m’écoute, celui qui vous méprise me méprise, et celui qui me méprise, méprise celui qui m'a envoyé. "
25. MATTHIEU, XVIII, 17-18 : " Que s'il ne les écoute pas, dites-le à l’Eglise ; et s'il n'écoute pas l'Eglise, qu'il soit pour vous ce que serait un païen et un publicain. - En vérité, je vous le dis, tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel. "
26. I Corinthiens, XIV, 37 : " Si quelqu'un croit être prophète ou spirituel, qu'il reconnaisse que les choses que je vous écrit sont des ordres du Seigneur. "
27. I Thessaloniciens, II, 13 : " C'est pourquoi aussi nous rendons à Dieu de continuelles actions de grâces, de ce qu'ayant reçu la parole de Dieu que nous vous avons prêchée, vous l'avez reçue non comme la parole des hommes, mais comme la parole de Dieu. ainsi qu'elle l'est en effet, déployant en vous sa vertu à cause de la foi que vous avez en elle. "
28. Actes, XV, 28 : " Car il à semblé bon au Saint-Esprit et à nous de ne point vous imposer d'autres charges que celles-ci, qui sont nécessaires, etc. "
29. JEREMIE, XXXV (comme ci-dessus, témoignage 10).
30. II Machabées, VI, 18-28 : " Eléazar, l'un des premiers d'entre les docteurs de la loi, homme avancé en âge et d'un visage vénérable fut pressé de manger de la chair de porc, et on voulait l'y contraindre en lui ouvrant la bouche de vive force. - Mais lui, préférant une mort glorieuse à une vie criminelle, alla de lui-même au supplice. - Considérant ce qu'il lui faudrait souffrir en cette rencontre, et s'armant d'une patience invincible, il résolut de ne point se laisser entrainer par l'amour de la vie à
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faire rien contre la loi. - Ceux qui étaient présents, touchés d'une compassion déraisonnable à cause de l'ancienne amitié qu'ils avaient pour lui, le prirent à part et le supplièrent de se laisser apporter des viandes de l'espèce de celles dont il pouvait manger, afin de pouvoir feindre qu'il avait mangé des viandes du sacrifice, selon l'ordre du roi, - et de se sauver de la mort par ce moyen. Ils usaient envers lui de cette espèce d'humanité à cause de l'affection qu'ils lui gardaient. - Mais lui, considérant ce que demandaient de sa part un âge et une vieillesse si vénérable, ces cheveux blancs qui attestaient la noblesse de sa vie entière, cette vie enfin qu'il avait conservé innocente et sans tache depuis son enfance ; il répondit aussitôt, conformément aux prescriptions de la loi sainte établie de Dieu, qu'il préférait descendre dans le tombeau. - Car il n'est pas digne de l'âge où je suis, ajouta-t-il, d'user de cette fiction, qui serait cause que plus d'un jeune homme, s'imaginant qu'Eléazar à l'âge de quatre-vingt-dix ans, aurait passé de la vie des juifs à celle des païens, - seraient eux-mêmes trompés par cette dissimulation qui, en me conservant un faible reste de cette vie corruptible, me couvrirait d'une tache honteuse, et attirerait sur ma vieillesse l'exécration des hommes. - Hé ! quand j'échapperais maintenant aux supplices qu'infligent les hommes, je n'en pourrais pas plus me soustraire à la main du Tout-Puissant, soit pendant ma vie, soit après ma mort. - En mourant donc avec courage, je me montrerai digne de ma vieillesse, - et je laisserai aux jeunes gens un exemple de fermeté, par la constance et la joie avec laquelle j'aurai souffert une mort glorieuse pour le maintien nécessaire de nos lois saintes. "
31. Id., VII, 1-4 : " Or, il arriva que l'on prit aussi sept frères avec leur mère et que le roi voulut les contraindre à manger, contre la défense de la loi, de la chair de porc, en les faisant déchirer à coups de fouets et de lanières. - Mais l'un d'eux, qui était l’aîné, lui dit : Que demandes-tu et que veux-tu apprendre de nous ? Nous sommes prêts à mourir, plutôt que de violer les lois de Dieu que nous avons reçues de nos pères. - C'est pourquoi le roi irrité ordonna qu'on fit rougir sur le feu des poêles et des chaudières d'airain ; et lorsqu'elles furent toutes brûlantes - il ordonna qu'on arrachât la langue à celui qui avait parlé le premier, qu'on lui enlevât la peau de la tête et qu'on lui coupât les extrémités des mains et des pieds sous les yeux de ses frères et de sa mère, etc. . . "
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32. Romains, XIII (comme ci-dessus, témoignage 20).
33. Lévitique, XXIII, 27-30 : " Le dixième jour de ce septième mois sera le jour des expiations ; il sera très-solennel et on l'appellera saint. Vous affligerez vos âmes en ce jour-là, et vous offrirez un holocauste au Seigneur. - Vous ne ferez aucune œuvre servile dans toute la durée de ce jour, parce que c'est un jour de propitiation, afin que le Seigneur votre Dieu vous soit en effet propice. - Tout homme qui ne se sera point affligé en ce jour-là, sera exterminé du milieu de son peuple. - Je retrancherai encore du milieu du peuple celui qui, en ce jour-là, aura fait quelque ouvrage que ce soit. "
34. I Samuel, XIV, 24-27, 37-45 : " Alors les Israélites se réunirent, et Saül fit avec serment la protestation suivante devant tout le peuple : Maudit soit celui qui mangera avant le soir, jusqu'à ce que je me sois vengé de mes ennemis. Et tout le peuple en conséquence s'abstint de manger. - En même temps ils vinrent dans un bois où la terre était couverte de miel. - Le peuple y étant entré vit ce miel qui coulait sous ses yeux, et personne n'osa en prendre pour le porter à sa bouche, parce qu'ils craignaient tous l'effet du serment qu'avait fait le roi. - Or, Jonathas n'avait pas entendu cette protestation appuyée de serment que son père avait faite devant le peuple : c'est pourquoi, pendant la baguette qu'il avait à la main, il en trempa le bout dans un rayon de miel, et en ayant ensuite porté à sa bouche avec sa main, il sentit ses yeux reprendre une nouvelle vigueur, etc. - Saül consulta le Seigneur en ces termes : Poursuivrai-je les Philistins, et les livrerez-vous entre les mains d'Israël ? Et pour cette fois le Seigneur ne lui répondit rien. - Et Saül dit : Qu'on rassemble ici tous les principaux du peuple ; qu'on cherche, partout, et que l'on connaisse celui dont le péché retombe aujourd'hui sur nous. - Je jure par le Seigneur, qui est le sauveur d'Israël, que le coupable, fût-il mon fils Jonathas, sera irrémissiblement puni de mort. Et nul d'entre le peuple n'osa le contredire. - Saül dit donc à tout Israël : Mettez-vous tous d'un côté et mon fils Jonathas et moi nous nous tiendrons de l'autre. Le peuple répondit à Saül : Faites tout ce qui sera bon à vos yeux. - Et Saül dit au Seigneur, Dieu d'Israël : Seigneur, Dieu d'Israël, faites-nous connaître d'où vient que vous n'avez point répondu aujourd'hui à votre serviteur. Montrez si cette iniquité est en moi, ou en mon fils Jonathas, ou si elle est plutôt en votre peuple, et que nous redevenions purs à vos yeux. Et le sort
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tomba sur Jonathas et sur Saül et le peuple se trouva dès lors hors de péril. - Saül dit ensuite : Jetez le sort entre moi et mon fils Jonathas. Et le sort tomba sur Jonathas. - Saül dit donc à Jonathas : Découvre-moi ce que tu as fait. Jonathas avoua tout, et dit : J'ai pris un peu de miel au bout de la baguette que j'avais à la main, et j'en ai porté à ma bouche, et pour cela voilà que je meurs. - Saül lui dit : Que Dieu m'envoie mille et mille maux, si tu ne meurs, Jonathas. - Et le peuple dit à Saül : Quoi donc ! Jonathas mourra-t-il, lui qui vient de sauver Israël avec tant de gloire ? Ce serait là commettre un crime, etc. "
35. I Rois, XIII, 15-24 : " Et le prophète qui demeurait à Béthel dit à l'homme de Dieu : Viens avec moi en ma maison pour manger du pain. - L'homme de Dieu lui répondit : Je ne puis revenir sur mes pas ni aller avec toi, et je ne mangerai point de pain ni ne boirai d'eau en ce lieu-ci ; - car c'est le Seigneur qui, en me parlant comme il a coutume de parler, m'a dit : Tu ne mangeras point de pain et tu ne boiras point d'eau en ce lieu-là, et tu ne retourneras point par le chemin par lequel tu es allé. - Cet homme lui répondit : Je suis moi-même prophète comme toi, et un ange est venu me dire de la part du Seigneur : Ramène-le avec toi en ta maison, afin qu'il mange du pain et qu'il boive de l'eau. Il le trompa ainsi, - et le ramena avec lui. L'homme de Dieu mangea donc du pain dans sa maison, et but de même de l'eau. - Et lorsqu'ils étaient à table, le Seigneur fit entendre sa parole au prophète qui l'avait ramené. Et ce prophète cria à l'homme de Dieu qui était venu de Juda, et lui dit : Voici ce que dit le Seigneur : Parce que tu n'as pas obéi à la parole du Seigneur, et que tu n'as point gardé le commandement du Seigneur ton Dieu, - et que tu es retourné et que tu as mangé du pain et bu de l'eau dans le lieu où il t'avait fait défense de manger du pain et de boire de l'eau, ton corps, frappé de mort, ne sera point porté au sépulcre de tes pères. - Après donc que l'homme de Dieu eut bu et mangé, le vieux prophète sella son âne pour le prophète qu'il avait ramené. - Et comme l'homme de Dieu était en chemin pour s'en retourner, un lion vint à sa rencontre et le tua, et son cadavre demeura étendu sur le chemin. L'âne se tint auprès de lui, et le lion resta auprès du cadavre. "
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TEMOIGNAGES DES PERES.
1. Les canons dits des apôtres, canon 80 : " Si un évêque, un prêtre ou un diacre, ou tout autre ministre, s'abstient du mariage, de la chair des animaux ou de l'usage du vin non par mortification, mais par horreur pour la chose même, en oubliant que tout ce que Dieu à fait est bon, et que c'est lui qui a établi dans le genre humain la différence des sexes, en calomniant en conséquence par un affreux blasphème l'ouvrage du Créateur, qu'il rétracte sa conduite passée ou qu'il soit déposé et expulsé de l'église. Qu'il en soit de même du laïque qu'on trouvera dans le même cas. "
2. Ibidem, canon 82 : " Si un évêque, un prêtre ou un diacre, s'abstient un jour de fête de manger de la viande par horreur pour cet usage, et non simplement par mortification, qu'il soit déposé comme ayant une conscience souillée et comme étant pour le grand nombre un sujet de scandale. "
3. Le concile de Gangres, canon 2 : " Si quelqu'un condamne comme un homme dont le salut serait désespéré celui qui mange de la viande avec foi et piété, tout en s'abstenant du sang et des viandes étouffées ou immolées, qu'il soit anathème. "
4. Le concile I de Tolède, in assertione fidei : " Si quelqu'un ose dire ou est dans cette croyance, qu'on doit avoir en exécration la chair des oiseaux ou des bestiaux, qui a été donnée en nourriture à l'homme, et s'en abstenir par ce motif, et non pas simplement par motif de pénitence, qu'il soit anathème. Si quelqu'un s'associe à l'erreur de Priscillien, ou prend à tâche d'agir dans l'administration du saint baptême autrement que ne le fait le siège de saint Pierre, qu'il soit anathème. "
5. Le concile I de Brague, canon 14 : " Si quelqu'un, partageant la doctrine de Manichée et de Priscillien, regarde comme impures les viandes que Dieu a créées pour notre nourriture, et qu'ainsi il n'ose goûter des légumes mêmes cuits avec de la viande, qu'il soit anathème. "
6. Ibidem, canon 32 (al. 31) : " Les clercs qui ne mangent point de viande mangeront au moins des herbes cuites avec de la viande, pour éviter tout soupçon d'être priscillianistes. S'ils refusent de le faire, qu'on les tienne pour excommuniés, comme suspects de cette hérésie et qu'on les dépose sur-le-champ, conformément à ce que les saints Pères ont ordonné anciennement sur ces sortes de personnes. "
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7. S. AUGUSTIN, Lib. XXX contra Faustum manichæum, c. 5 (Cf. S. Augustini opera, t. VIII, col. 447, édit. des Bénédictins ; col. 685-686, édit. de Gaume) : " Apprenez donc ce que vous avouez ne pas voir, quelle est notre pensée lorsque nous vous intentons ce reproche. Ce n'est pas que nous trouvions mauvais que vous vous absteniez de la chair des animaux, puisque cela a été pratiqué par l'ancien peuple, au moins par rapport à certaines viandes, comme vous ne vous faites pas faute de me le rappeler ; mais si les justes de l'ancienne loi en usaient ainsi, ce n'est pas qu'ils condamnassent l'usage des viandes, mais c'était en vue de quelque signification mystérieuse comme je l'ai déjà suffisamment expliqué dans les précédentes parties de cet ouvrage. Et si les chrétiens aussi, j'entends les catholiques et non les hérétiques, s’abstiennent de manger de la viande, c'est pour réprimer les révoltes de la chair et punir l'âme elle-même du consentement qu'elle a pu y donner, et non parce qu'ils regarderaient peut-être la chair des animaux comme quelque chose d'impur. Et ce n'est pas seulement de la viande qu'ils s'abstiennent ainsi ; mais ils usent de la même réserve par rapport à certaines productions de la terre, presque tous au moins pendant le carême, et quelques-uns même dans tous les temps de l'année, plus ou moins, selon ce que chacun peut ou veut en cela. Vous, au contraire, vous niez de l'ouvrage même de Dieu qu'il soit bon, et vous le déclarez impur, sous prétexte que c'est le démon qui forme la chair avec les parties les plus grossières de la matière, ouvrage, selon vous, du principe mauvais ; et partant de ce faux principe, vous avez la chair en horreur et vous la rejetez comme quelque chose d'immonde, comme un lien cruel qui retient votre Dieu enchaîné. "
" L'Apôtre, après avoir dit qu'il y aurait des hommes qui interdiraient l'usage des viandes, que Dieu à créées pour être reçues avec action de grâces par les fidèles et par ceux qui ont reçu la connaissance de la vérité, ajoute : Car tout ce que Dieu a créé est bon, et on ne doit rien rejeter de ce qui se mange avec action de grâces parce que cela est sanctifié par la parole de Dieu et par la prière (I Tim., IV, 3-5). Voila les vérités que vous niez ; voilà dans quelle pensée vous vous abstenez d'aliments de cette espèce : vous les regardez comme mauvais et impurs par leur nature même, et non pas simplement par la signification qu'on peut leur donner. En cela, vous blasphémez sans aucun doute celui
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qui les a créés, et c'est bien là suivre, comme le dit l'Apôtre, des doctrines diaboliques. Ne soyez donc point étonnés que l'Esprit-Saint ait prophétisé cela de vous si longtemps avant que vous parussiez dans le monde. "
8. Le même, Lib. de moribus manichæorum, c. 13 : " A moins peut-être que vous ne considériez comme sceau de la bouche, et en même temps comme chose digne d'admiration et de louange, la loi que vous vous êtes faite de ne pas manger de viande et de ne pas boire de vin. Mais je vous demanderai quelle est la fin que vous vous proposez dans cette pratique. Car si la fin à laquelle nous rapportons ce que nous faisons, ou en vue de laquelle nous le faisons, est non-seulement innocente, mais encore digne d'éloge, l'action même que nous ferons le sera également ; si au contraire la chose que nous avons en vue dans ce que nous entreprenons mérite le blâme, nous aurons sans aucun doute le même jugement à porter de l’entreprise elle-même. L'histoire rapporte de Catilina qu'il endurait avec courage le froid, la soif et la faim. Ainsi donc cet homme impur et sacrilège avait cela de commun avec nos apôtres. Par où donc le distinguer de ces derniers, sinon par la fin si différente de la leur qu'il se proposait ? Car s'il consentait à endurer ces tourments, c'était pour pouvoir assouvir ses passions immodérées et monstrueuses, tandis que les apôtres ne se proposaient au contraire que de les réprimer et de les assujettir à l'empire de la raison. Vous aussi, lorsque quelqu'un vante devant vous le grand nombre de vierges que l'Eglise catholique renferme dans son sein, vous avez coutume de répliquer : Quoi d’étonnant ? une mule n'est-elle pas vierge ? Langage téméraire sans doute, et qui prouve bien l’ignorance où vous êtes de la discipline de notre Eglise ; mais qui prouve en même temps que, de votre aveu, la pratique de la continence que vous garderiez vous-mêmes est chose tout-à-fait vaine, si vous ne vous proposez pas en la gardant une fin louable. Les catholiques à leur tour pourraient à bon droit comparer l'abstinence que vous pratiquez par rapport à la viande et au vin, à celle qu'observent dans le même genre quantité de quadrupèdes et d'oiseaux, de vermisseaux enfin. Mais je ne veux pas m'attirer le reproche d'imiter la témérité de votre langage. Examinons plutôt, et avant tout, quelle fin vous vous proposez en cela. Car je pense que vous convenez maintenant, que c'est à ce point de vue qu'on doit envisager ces usages. Si donc vous pratiquez cette abstinence par motif d'économie, ou pour réprimer
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les mouvements de la concupiscence qu'ont coutume d'exciter ces sortes d'aliments et de boissons, je ne pourrai alors que vous décerner des éloges. Mais la fin que vous vous proposez est bien différente. "
9. Ibidem, c. 14 : " On doit voir maintenant quelle fin peut justifier l'abstinence de la viande et du vin. Cette fin doit être ou de réprimer le plaisir qu'on ressent particulièrement à manger de ces sortes d'aliments, et qui peut aller jusqu'à l'ivresse lorsqu'il s'agit de boissons telles que le vin ; ou en second lieu, de s'épargner des scrupules de conscience, à cause des viandes qui peuvent avoir été immolées à des idoles, ou du vin qui peut leur avoir été offert en libation ; ou en troisième lieu, par motif de charité, motif le plus louable des trois, à savoir pour ménager les scrupules des faibles qui s'abstiennent de ces aliments ou de ces boissons. Vous, au contraire, vous réputez ces choses impures, malgré ce qu'a dit l'Apôtre, que toutes choses sont pures pour ceux qui sont purs (Rom, XIV, 20), mais qu'un homme fait mal de manger de quoi que ce soit, lorsqu'en le faisant il scandalise les autres. Aussi suis-je bien persuadé que vous vous rendez coupables en usant de ces mêmes aliments, par cela même que vous les croyez impurs. Car voici ce que le même apôtre dit encore : Je sais et je suis persuadé, selon la doctrine du Seigneur Jésus, que rien n’est commun de soi-même et n'est tel que pour celui qui le croit tel (ibib., v. 20). Car qui peut douter que ce mot, commun, est mis pour signifier quelque chose d'impur et de souillé ? "
10. Le même, in Libro contra Adimantum Manichæi discipulum, c. 14 : " Si l'Apôtre a recommandé quelquefois de ne pas manger de viande ni de boire de vin, ce n'est pas qu'il ait tenu ces choses pour impures, comme ceux-ci voudraient se le persuader, et réussissent à le faire croire à quelques gens simples qu'ils entraînent avec eux dans la même erreur ; mais comme il a pris la peine d'expliquer lui-même sa pensée, ce n'est pas à nous qu'il convient de l’interpréter ou de l'expliquer. Nous n'avons besoin que de rapporter ici tout ce passage de l'épître de l’Apôtre, pour rendre évident la raison qui l'a porté à tenir ce langage, et tout à la fois la perfidie de ces hommes qui prennent à dessein quelques passages détachés des saintes Ecritures pour tromper les simples, en leur laissant ignorer et ce qui précède ces passages et ce qui vient à leur suite dans le texte sacré et qui peut servir à déterminer la pensée de l'écrivain. Voici donc
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ce qu'écrivait l'Apôtre : Recevez avec charité celui qui est encore faible dans la foi, sans vous amuser à contester, etc. Qu'est-il besoin d'expliquer ces paroles pour faire comprendre quelle a été la pensée de l’Apôtre quand il écrivait ces lignes, et quelle est la malice de ceux qui prennent perfidement quelques paroles éparses dans les Ecritures, afin de s'en servir pour circonvenir les simples ? Car ce que dit l'Apôtre, c'est que tout est pur lorsqu'on le croit tel, et que tout peut devenir impur pour celui qui croit impure telle et telle chose, et qu'il faut s'abstenir d'en manger lorsqu'on ne pourrait le faire sans scandale, c'est-à-dire lorsqu'on se trouve en présence de gens assez simples pour se croire obligés de s'abstenir de toutes sortes de viandes, dans la crainte de tomber sur des viandes immolées aux idoles, et pour s'imaginer que celui qui en mange le fait en l'honneur des idoles, pour en être par conséquent tout scandalisés, bien que la viande même immolée aux idoles ne souille nullement celui qui en mange de bonne foi sans savoir qu'elle à été effectivement immolée. Voilà pourquoi l’Apôtre défend ailleurs de faire aucune question lorsqu'on est pour acheter de la viande, ou lorsqu’étant invité par quelque infidèle on voit servies sur sa table de ces viandes que nos adversaires appellent impures, non parce qu'elles ont pu être immolées aux idoles, mais parce que c'est de la chair de quelque animal, malgré ce que dit l’Apôtre que toutes choses sont pures, que toute créature de Dieu est bonne, que tout est sanctifié par la parole et par la prière et qu'on ne doit pas moins s'en abstenir, si cela doit scandaliser quelque esprit faible. L'Apôtre, dans un autre endroit de ses épîtres, a désigné très-clairement ces esprits téméraires lorsqu'il a dit qu'il y aurait dans les derniers temps des hommes qui interdiraient le mariage, et l'usage des viandes que Dieu a créées (I Tim., IV, 1-3). Car il désigne par-là non ceux qui s'abstiennent de manger de la viande pour dompter leur concupiscence ou pour ménager la faiblesse de leurs frères, mais ceux qui regardent comme impure la viande elle-même, et qui nient que Dieu en soit le créateur. "
14. THEODORET, Epitome divinorum decretorum, c. de abstinentiâ : " L'Eglise n'entend pas de la même manière que les hérétiques l'abstinence du vin, de la viande et d'autres choses de cette nature. Car les hérétiques prétendent qu'on doit s'en abstenir comme de choses abominables. L'Eglise au contraire n'enseigne rien de semblable ; car elle ne défend point en
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général l'usage de ces choses, et c'est pour cela qu'elle n’inquiète pas ceux qui s'accordent la jouissance de ces biens et de ces plaisirs permis, pas plus que ceux qui se la refusent ; et ceux mêmes qui se refusent cette jouissance, si leur conscience est droite et éclairée, ne condamnent point ceux qui se la permettent. Car chacun est le maître ou de s'abstenir, ou de jouir du plaisir qu'il peut trouver à user de ces aliments. D'ailleurs la vie monastique n'est imposée à personne, et ceux qui l'embrassent ne font en cela qu'user de leur liberté. C'est ce que nous enseignent les apôtres eux-mêmes dans leurs écrits. Que celui qui mange de tout, dit saint Paul (Rom., XIV, 3), ne méprise pas celui qui ne mange pas de tout ; et que celui qui ne mange pas de tout, ne condamne pas celui qui mange de tout. Le même apôtre dit encore : Toutes les viandes sont pures ; mais un homme fait mal d’en manger, lorsqu’en le faisant il scandalise les autres (ibid., v. 20). C'est ce qui lui a fait écrire en prenant à partie les impies eux-mêmes, les paroles suivantes dans ses épîtres à Timothée : L’esprit dit expressément que, dans les temps à venir, quelques-uns abandonneront la foi, etc. (I Tim., IV, 1). Et dans celles aux Corinthiens, il va jusqu’à prescrire aux fidèles de cette Eglise naissante de manger indistinctement de tout ce qui se vendrait à la boucherie, sans s'enquérir d'où cela venait par un scrupule de conscience (I Cor., X, 25 et suiv.) ; et ceux que les infidèles inviteraient à manger chez eux, de manger sans scrupule de tout ce qu'on leur servirait, à moins que quelqu'un ne les avertisse que ces viandes avaient été immolées aux idoles. Tant cet homme divin était éloigné d’interdire l'usage de la viande. Enfin Notre-Seigneur lui-même a dit à son propre sujet : Le Fils de l’homme est venu mangeant et buvant, et ils disent : Voilà un homme qui aime à faire bonne chère et à boire du vin ; il est ami des publicains et des gens de mauvaise vie (MATTH., XI, 19). Et quand il célébra la Pâque, il mangea de l'agneau avec ses disciples ; invité à des noces, non-seulement il ne défendit pas l'usage du vin, mais encore il fit un miracle pour en procurer aux conviés. L’erreur des encratites ou des abstenants est donc clairement condamné par les enseignements divins. L'Eglise de Dieu au contraire ne fait que se conformer ces enseignements en répudiant les fables des hérétiques. "
12. S. BERNARD, Serm. LXVI in Cantica : " Il me reste à réfuter ces hommes par la doctrine de l'Apôtre. Ils s'abstiennent, comme il l'avait annoncé prophétiquement des viandes que Dieu
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a créées pour être reçues avec action de grâces ; et ainsi ils se montrent hérétiques, non en ce qu'ils s'en abstiennent, mais en ce qu'ils le font dans des dispositions hérétiques. Car moi aussi je m'abstiens assez souvent ; mais mon abstinence a pour but d'offrir une satisfaction pour mes péchés et non de mettre en pratique une doctrine impie autant que superstitieuse. Est-ce que nous faisons à saint Paul un reproche de ce qu'il châtiait son corps et le réduisait en servitude ? Je m'abstiens de boire du vin, parce que c'est une occasion de luxure ; ou, si je me trouve faible de santé, j'en prends modérément suivant le conseil qu'en a donné saint Paul. Je m'abstiens de manger de la viande, de crainte qu'en nourrissant ma chair, elle ne nourrisse aussi mes vices. J'userai d'une certaine mesure dans le pain même que je prendrai, de peur qu'ayant l'estomac trop chargé, je ne devienne paresseux pour la prière ou que je ne m'attire de la part du Prophète le reproche de manger mon pain jusqu'à me rassasier (EZECH., XVI, 49). Je ne prendrai pas même l'habitude de boire rien que de l'eau avec excès, de peur que mon ventre distendu ne s'en trouve disposé aux appétits grossiers. L'hérétique agit autrement. Il a horreur du lait et de tout ce qui en provient, en un mot de tout ce qui tient à la génération ; ce serait bien et tout-à-fait conforme aux principes du christianisme, s'il le faisait, non parce que ce sont des choses qui en proviennent, mais parce que ce sont des choses qui y excitent. Mais que prétend-il, en témoignant cet éloignement pour tout ce qui provient de la génération ? Une observance si marquée par rapport aux aliments me fait naître des soupçons. Toutefois, si vous avez pour la justifier l'ordonnance de quelque médecin, nous ne blâmons point ce soin que vous prenez de votre corps : car qui jamais a voulu le mal de son propre corps (Eph., V, 29) ? Seulement, qu'un tel soin ne soit pas poussé à l'excès. Ou bien encore, si c'est pour suivre les instructions des médecins des firmes qui recommandent l'abstinence, nous n'avons que des éloges à donner à cet effort de vertu qui vous porte à dompter votre chair et à réprimer vos passions. Mais si, partisan de l'erreur insensée de Manès, vous prétendez limiter les bienfaits de Dieu, le payer d'ingratitude, et vous érigeant en censeur de ses ouvrages, déclarer impur, par une témérité inouïe ce qu'il a créé et nous à donné pour être reçu de nous avec action de grâces, en un mot, si vous vous abstenez de cette sorte d'aliments comme d'un mal, bien loin d'applaudir à votre abstinence, je n'aurai que des malédictions à
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donner à votre perversité et vos blasphèmes, et je vous appellerai impur vous-même, vous qui pensez qu'il y a quelque chose d'impur dans le monde. "
13. S. ISIDORE de Séville, Lib. I de officiis ecclesiasticis : " L'usage du vin et de la chair des animaux à été accordé à notre espèce à la suite du déluge. Car il n'avait pas été permis dès le commencement, et les premiers hommes, selon qu'il est écrit n'avaient pour nourriture que les fruits des arbres et les herbes qui portent leur graine sur la terre (Gen., I, 29). Mais plus tard, Noé reçut pour lui et ses descendants la permission de manger de la chair de toute espèce d'animaux, comme aussi celle de boire du vin. Lorsqu'ensuite Jésus-Christ a paru dans le monde, comme il est le principe et la fin, il nous a retiré à la fin des temps ce qu'il avait de même interdit au commencement des choses, en disant par l'organe de son apôtre : Il est bon de ne pas manger de viande et de ne pas boire de vin (Rom., XIV, 2). Et encore : Que celui qui est faible mange des légumes (Ibid., 21). Ce n'est donc pas parce qu'elle serait mauvaise en elle-même que la chair des animaux est défendue mais parce qu'elle favorise l'impureté charnelle ; car elle est le foyer comme l'aliment de tous les vices. Les viandes sont pour le ventre, et le ventre est pour les viandes, et un jour Dieu détruira l'un et l'autre (I Cor., VI, 13). Quant aux poissons, nous pouvons en manger, puisque Notre-Seigneur en a mangé après sa résurrection (JEAN, XXI, 10). Et ni le Sauveur ni les apôtres n'en ont jamais interdit l'usage. "
14. Le concile VI de Constantinople (C'est une erreur : il ne s'agit ici que du concile in Trullo, dit Quini-Sexti, dont les actes n'ont jamais été approuvés par l'Eglise romaine. Voir notre Dictionnaire universel des conciles, t. Ier, col. 748-756), canon 56 : " Nous avons appris qu'en Arménie et ailleurs, quelques-uns se permettent l'usage des œufs et du fromage les samedis et les dimanches du carême. Nous avons statué en conséquence, que toute l’Eglise de Dieu répandue dans l'univers doit suivre la même règle dans l'observation de la loi du jeûne en s'abstenant des œufs et du fromage aussi bien que de la viande, parce que ces choses proviennent d'une autre dont il est ordonné de s’abstenir. Si l'on n'observe pas cette ordonnance, on devra être déposé si l'on est clerc, ou excommunié si l'on est laïque. "
15. S. GREGOIRE-LE-GRAND, Epist. ad Augustinum Anglorum episcopum, comme la question précédente témoignage 11, page 327.
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16. S. ATHANASE, In Vitâ divi Antonii : " Il supportait avec une force de patience incroyable le tourment de la faim et l’austérité des veilles. Il passait le plus souvent la nuit en prières, ne mangeait qu'une fois le jour après le coucher du soleil ; quelquefois même il passait deux ou trois jours sans manger, et ne rompait le jeûne qu'au quatrième. Sa réfection consistait en du pain, du sel et quelque peu d'eau. Quant au vin et à la viande, il vaut mieux ne pas en parler, puisque ce sont là des choses qu'il est commun chez les moines de s'interdire totalement. . . "
" Comme Antoine vivait ainsi retiré dans des déserts et sur des montagnes inaccessibles, les moines l'ayant surpris tout occupé à prier, eurent bien de la peine à lui faire accepter, à force de supplications, et en considération de sa vieillesse, des olives, des légumes et de l'huile, qu'ils lui apportaient après avoir laissé passer quelques mois. "
17. S. JEROME, In Vitâ Pauli eremitæ : " Un palmier pourvoyait à sa nourriture et à son habillement. Pour que personne ne soit tenté de regarder la chose comme impossible, je prends à témoin Jésus et ses saints anges, que dans cette partie du désert qui confine à la Syrie et touche au pays des Sarrasins, j'ai vu des moines dont un, pendant trente années qu'il resta renfermé dans sa cellule, ne vivait que de pain d'orge et d'eau bourbeuse ; un autre, casané dans une vieille citerne, appelée cuba par les Syriens dans le langage du pays, ne prenait chaque jour que cinq figues sèches pour réparer ses forces. Tout cela paraîtra incroyable à ceux qui refusent de croire que tout devient possible pour ceux qui croient. "
18. Le même, In Vitâ S. Hilarionis : " Il (Hilarion) était à cette époque âgé de quinze ans. . . N'ayant pour se couvrir qu'un sac et un manteau de peau, que saint Antoine lui avait donné au moment de le congédier, ajoutez toutefois à ce vêtement une saye telle qu'en portent les gens de la campagne, il passait sa vie dans un vaste et affreux désert situé entre la mer et un marais, en ne prenant chaque jour pour nourriture que quinze figues sèches après le coucher du soleil. . . "
" De l'âge de vingt-un ans à celui de vingt-sept, il prenait pour sa nourriture les trois premières années un demi-setier de lentilles détrempées dans de l'eau froide, et les trois autres du pain sec avec du sel et de l'eau. De vingt-sept ans ensuite jusqu'à trente, il ne vivait que de l'herbe ; des champs et des racines crues de certains arbrisseaux. De l'âge de trente-un ans
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à celui de trente-cinq, il se nourrissait avec six onces de pain d'orge et des herbes à demi-cuites sans huile pour les assaisonner. Mais comme il sentit que sa vue s'affaiblissait, et que son corps tout entier éprouvait des contractions causées par des démangeaisons continuelles et une espèce de maladie de peau, il se permit alors d'ajouter aux aliments que nous venons de dire quelque peu d'huile, et continua ensuite la pratique de la même abstinence jusqu'à la soixante-troisième année de sa vie, sans goûter d'aucuns fruits ou d'aucune sorte de légumes ou de quelque autre chose que ce soit. Sentant alors ses forces épuisées et croyant sa fin prochaine, il se refusa l'usage du pain depuis la soixante-quatrième année de son âge jusqu’à la quatre-vingtième par l'effet d'une ferveur d'esprit incroyable, qui le portait à se mettre comme de nouveau au service de son Dieu à un âge où les autres ont coutume de se relâcher. Quand il eut atteint l'âge de quatre-vingts ans, il permit qu'on lui fit de petits biscuits composés de farine et d'herbes hachées, pesant avec l'eau qu'il buvait cinq onces à peine, et il passa ainsi le reste de ses jours, ne mangeant jamais avant le coucher du soleil, et n'interrompant ses jeûnes ni les jours de fêtes ni dans ses maladies mêmes les plus graves. "
19. S. EPIPHANE, In compendiariâ verâ doctrinâ de fide catholicæ et apostolicæ Ecclesiæ : " Dans cette sainte Eglise catholique, on voit s'observer encore d'autres manières de vivre de la plus haute perfection, comme de s'abstenir de toute espèce de viandes, et de la chair des oiseaux et des poissons comme de celle des quadrupèdes, d'œuf et de fromage même sans parler d'autres austérités. Car chacun recevra sa récompense particulière selon son travail (I Cor., III, 8). Quelques-uns donc s'abstiennent de toutes ces choses à la fois ; d'autres de la chair des quadrupède seulement, en se permettant celle des oiseaux aussi bien que le reste. D'autres s'abstiennent de manger des oiseaux, et se permettent l'usage du poisson et des œufs. D'autres s'interdisent même les œufs ; d'autres ne vivent que de poisson. D'autres se refusent le poisson, et se contentent de fromage. D'autres ne se permettent pas même l'usage du fromage. D'autres encore se refusent jusqu'au pain ; d'autres renoncent à manger des fruits des arbres et de tout ce qui est cuit. "
20. Le même, Hær. LXXV contra Aërium : " Aérius disait avec un emportement qui tenait plus du démon que de l'homme : Quelle différence y a-t-il entre un évêque t un prêtre ?. . . Le
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jeûne, disait-il encore, ne doit être prescrit à personne. Car cela sent les observances judaïques et nous ne sommes plus sous le joug de la servitude. La loi d'ailleurs n'est pas pour les justes, mais pour les parricides et les autres criminels. Après tout, si je veux jeûner, je puis choisir de moi-même pour cela tel jour que je voudrais, et je jeûnerai à ma fantaisie. De là vient que ces sectaires affectent de jeûnes les jours de fêtes, et de ne jeûner au contraire ni le mercredi ni le vendredi. Souvent encore ils jeûnent le mercredi ; mais ce n'est point en vertu d'une loi : c'est uniquement, disent-ils, par la libre détermination de leur volonté. Dans les jours qui précèdent la Pâque, tandis que nous couchons sur la dure, que nous faisons le sacrifice de toutes les voluptés de la chair, que nous jeûnons les jours entiers, ou que nous ne prenons que des fruits secs pour toute nourriture, que nous passons tout notre temps dans les veilles et les prières sans rien négliger de ce qui, en mortifiant le corps, pourra contribuer au salut de l'âme ; eux, dès le point du jour, se livrent à la bonne chère, se gorgent de vin et de viandes, en couvrant de leurs risées, en poursuivant de leurs railleries ceux qui se font un devoir de sanctifier cette grande semaine. Car, quoiqu'ils admettent une vie de renoncement, la pratique n'en existe pas parmi eux, mais ils préfèrent la remplacer par l'abondance du manger et du boire, moins que quelques-uns ne l'adoptent par un choix tout-à-fait libre : la plupart cependant aiment mieux ne rien se refuser en fait de plaisirs de la table, comme je l'ai déjà dit. Voilà quelles sont les énormités qu'Aérius a vomies dans le monde. " Puis, venant à réfuter cette erreur, saint Epiphane ajoute un peu plus loin : " Qui ne consent à admettre, en quelque partie que ce soit de l'univers, que le jeûne du mercredi et du vendredi est de règle dans toute l'Eglise ? S'il faut en appeler aux Constitutions apostoliques, on y verra comment ils ont réglé le jeûne du mercredi et du vendredi pour toutes les semaines de l'année, excepté les cinquante jours qui se trouvent entre Pâques et la Pentecôte comment, pour les six jours qui précèdent la Pâque, ils ont interdit toute espèce de nourriture, excepté le pain, le sel et l'eau, et comment ils ont ordonné de passer la veille entière de ce dimanche solennel (Constit. apost., c. 21). Qui doit être le mieux instruit de ces pratiques ? Est-ce ce nouveau venu, jouet de ses propres illusions, qui n'a paru que de nos jours et est même encore vivant, et non pas plutôt ceux qui ont vécu avant nous et qui ont été témoins de l'an-
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cienne discipline, qu'ils ont reçu par tradition de leurs pères, comme ceux-ci des leurs, et comme l’Eglise entière a reçue de nos premiers pères dans la foi les traditions qu'elle conserve fidèlement jusqu’à nos jours ? Quand même les apôtres n'auraient rien dit dans leurs Constitutions du jeûne du mercredi et du vendredi, nous pourrions encore justifier cet usage par la pratique universelle. Mais leurs écrits sont là pour témoigner de cette institution dans les termes les plus précis. L'Eglise ensuite n'a pas tardé à s'y soumettre en tous lieux avec un accord unanime, longtemps avant qu’Aérius et ceux qui de son nom sont appelé aériens eussent paru dans le monde. Peut-être aussi est-ce pour cette raison que le nom d’Aérius a été donné à cet homme, dont le cœur impur semble être le réceptacle des esprits répandus dans l'air, qui lui ont inspirés la révolte contre l'Eglise. "
21. S. AUGUSTIN, Lib. de hæresibus ad Quodvultdeum, hær 53 : " Les aériens tirent leur nom d’Aérius, qui, comme il était prêtre, ne put digérer dit-on, qu'on ne l'eût pas élevé à l'épiscopat, et pour cela se jeta dans la secte des ariens, en joignant aux erreurs de ces hérétiques d’autres erreurs qui lui sont propres, comme par exemple celles-ci, qu'il ne faut ni prier ni offrir le saint sacrifice pour les morts, ni observer les jeûnes solennels que l'Eglise, disait-il, n'a pas droit de prescrire ; mais que chacun ne doit jeûner qu’à sa volonté pour faire voir que nous ne sommes plus sous la loi. "
22. S. JEAN DAMASCENE, Lib. de hæresibus : " Les aériens sont appelés ainsi d'un certain Aérius, originaire du Pont. Cet homme exerça le ministère sacerdotal sous Eustache, son évêque, accusé de partager l'hérésie aérienne, et dont il était même le fils. Voyant qu'on lui avait refusé l’épiscopat, il se mit à dogmatiser contre l'Eglise, avec une fureur qui ne le cédait à celle d'aucun arien. Aux erreurs de ces hérétiques il en ajouta quelques autres qui lui sont propres. Car il nie, par exemple, qu'on doive faire des oblations pour les morts. Il défend d'observer le jeûne de la quatrième et de la sixième férie, ainsi que celui des quarante jours, et de célébrer la Pâque ; il condamne toutes ces institutions. Il mangeait sans scrupule et indifféremment de toute espèce de viandes comme d'aliments. Si quelqu'un veut jeûner, il y consent, pourvu qu'il le fasse sans observer de jours, et à sa pure fantaisie. Il nie toute autorité dans la loi. Il ne veut pas non plus qu'il y ait de différence entre un prêtre et un évêque. "
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23. S. JEROME, in caput IV ad Galatas : " Quelqu'un dira peut-être : S'il n'est pas permis d'observer les jours, les mois, les temps et les années, nous sommes donc nous-mêmes coupables de ce crime, nous qui observons le jeûne de la quatrième et de la sixième férie, la solennité du dimanche, le jeûne du carême, la fête de Pâques, celle de la Pentecôte, et bien d'autres fêtes ordonnées suivant la diversité des pays à l'honneur des martyrs. La réponse la plus simple à cette objection, c'est que les jours que nous observons ne sont pas ceux qu'observaient les Juifs. Car la pâque que nous célébrons, par exemple, n'est pas celle des azymes, mais celle de la résurrection et de la croix. Et pour la fête de la Pentecôte, nous ne comptons pas sept semaines comme les Juifs, mais nous célébrons la descente du Saint-Esprit. Ensuite, si nous fixons des jours pour les réunions solennelles du peuple chrétien, c’est parce que des rassemblements irréguliers pourraient porter atteinte à la foi chrétienne. Ce n'est pas que le jour où nous nous rassemblons soit plus grand ou plus saint en lui-même ; mais c'est afin que le plaisir de nous voir rassemblés en plus grand nombre, à quelque jour de la semaine ou de l'année que ce soit d'ailleurs, produise en nous une joie plus vive. Si l'on veut une autre réponse plus subtile à cette même objection, nous dirons en second lieu, que tous les jours sont indifférents et que ce n'est pas seulement le vendredi que Jésus-Christ est crucifié ni le dimanche seulement qu'il ressuscite, mais que tous les jours sont également des jours de résurrection comme tous les jours nous pouvons également nous nourrir de la chair du Sauveur. Cependant, on a sagement établi des jours particulièrement destinés soit au jeûne, soit aux offices publics, en faveur de ceux qui sont plus occupés des affaires du siècle que du service de Dieu, et qui ne peuvent ou ne veulent passer à l'église tout le temps de leur vie, ou offrir à Dieu le sacrifice de leurs prières avant de commencer leurs actions. Car ; combien y en a-t-il qui observent avec une constante exactitude seulement ce petit nombre de jours marqués, soit pour le jeûne, soit pour la prière ? Il nous est donc permis de toujours jeûner et de toujours prier, et de faire de tous les jours de notre vie comme autant de dimanches par la participation journalière au corps sacré de Jésus-Christ, tandis qu'il ne l'est pas aux juifs d'immoler tous les jours l'agneau pascal, ou de célébrer tous les jours leur fête de la Pentecôte, ou celle des tabernacles, ou de pratiquer tous les jours leurs jeûnes solennels. "
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24. S. LEON, Serm. 3 et 4 de jejunio septimi mensis, comme à la question précédente, témoignage 24, pages 348 et suiv.
25. Le même, Serm. 4 de Quadragesimâ, voir ibidem, témoignage 27, page 361.
26. S. BASILE, Orat. II de jejunio, comme à la question précédente, témoignage 20, page 340.
27. S. JEROME, Liv. II contre Jovinien, c. 5 (al. 1) : " Je suivrai donc le fil de la proposition énoncée, puis, avant d'en venir aux Ecritures, et de démontrer par elles que les jeûnes sont agréables à Dieu, et que la continence lui plaît, je comparerai mes arguments avec les arguments des philosophes, et je prouverai que nous ne suivons pas la doctrine d'Empédocle et de Pythagore, qui, au nom de la métempsychose, défendent de rien manger de ce qui vit et se meut, et regardent en conséquence comme coupables d'un même crime, et ceux qui tuent un bélier et ceux qui coupent un chêne, dont ils sont les parricides et les bourreaux ; mais que nous ne faisons qu'observer les lois de notre Créateur qui a créé toutes choses pour l'usage des hommes, et que de même que le bœuf a été créé pour labourer, le cheval pour servir de monture, les chiens pour garder leurs maîtres, les chèvres pour donner du lait, les brebis pour fournir de la laine, de même les pourceaux, et les cerfs, et les chevreuils, et les lièvres et les autres animaux l'ont été, non pour être mangés tout aussitôt, mais pour d'autres usages de l'homme (Cf. Œuvres choisies de saint Jérôme, trad. par F. -H. Collombet, t. VIII, p. 78-79). "
28. Ibidem, c. 10 (al. 5) : " Voilà pour ce qui est des philosophes et de leurs exemples. Passant maintenant à l'origine du genre humain, c'est-à-dire à ce qui nous concerne, je montrerai d'abord que, dans le paradis, Adam reçu l'ordre de jeûner d'un arbre, tout en mangeant des fruits des autres arbres. La félicité du paradis ne pouvait être inaugurée sans l'abstinence de nourriture. Tant qu'il jeûna, il fut dans le paradis ; quand il mangea, il en fut chassé ; et chassé, il prit aussitôt une épouse. Celui qui, à jeun dans le paradis, avait été vierge, rassasié ensuite contracta sur la terre un mariage ; et cependant, quoique banni, il ne reçut pas tout de suite la permission d'user de viande, mais il n'avait encore pour nourriture que les fruits des arbres, les blés des moissons, les légumes et les herbages, en sorte que, exilé du paradis, il se nourrissait, non pas de ces viandes qui n'étaient
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point dans le paradis, mais de fruits semblables à ceux du paradis. Dieu ensuite voyant que, dès l'adolescence, le cœur de l'homme était exercé et comme dressé à la malice, et ne pouvant souffrir que son esprit continuât à demeurer dans ces misérables parce qu'ils étaient chair, condamna par le déluge les œuvre de la chair ; puis, usant de condescendance pour le tempérament vorace des hommes, il leur donna la permission de manger de la viande, afin que, comprenant que tout leur était permis, ils ne désirassent plus avec tant d'ardeur ce qu'ils voyaient leur être permis, et qu'ils ne fissent pas d'une défense qui leur eût été intimée une cause de prévarication. Même alors cependant le jeûne leur fut encore prescrit en partie. Car lorsque parmi les animaux les uns sont appelés purs et les autres impurs, et que Noé introduit dans l'arche un couple de chaque espèce de ces derniers, et un nombre impair dans chaque espèce des premiers ; lorsque pour donner la raison de cette distinction, Dieu permet de manger de la chair de ceux-ci, en le défendant par rapport à ceux-là, appelé ainsi avec raison impurs, c'est bien là inaugurer, quoique encore imparfaitement, le jeûne et en retranchant l'usage de certaines choses seulement, apprendre à s'abstenir de toutes. "
" Pourquoi Esaü a-t-il perdu son droit d'aînesse (Gen., XXV, 31-33) ? N'est-ce pas pour un plat de lentilles, sans que ses larmes aient pu ensuite lui restituer ce que sa voracité lui avait fait perdre ? Le peuple d'Israël sorti de l'Egypte et sur le point d'être introduit dans la terre promise où coulaient le lait et le miel, se mit à regretter les viandes, les melons, et les oignons du pays qu'il venait de quitter. Plût à Dieu, s'écriait ce peuple, que nous fussions morts par la main du Seigneur dans la terre d'Egypte, pendant que nous étions assis près des marmites pleines de viandes (Exod., XXI, 3) ! Ils disaient encore : Qui nous donnera de la chair à manger ? Nous nous souvenons des poissons que nous mangions en Egypte, presque pour rien ; les concombres, les melons, les poireaux, les oignons et l'ail nous reviennent à l'esprit. Notre vie est languissante, nous ne voyons que manne sous nos yeux. (Nom., XI, 4-6). C'est ainsi que ce peuple soupirait après les viandes d’Egypte, et témoignait son mépris pour la nourriture des anges. Moise jeûna quarante jours et quarante nuits sur le mont Sinaï, et s'entretint avec Dieu pendant tout ce temps, en faisant voir par-là même que l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole de Dieu ; le peuple au contraire se rassasie de viandes,
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et bientôt après il se fait des idoles. Moïse à jeun reçoit la loi écrite du doigt de Dieu ; le peuple saturé de vin et de viandes se lève pour folâtrer, se fait un veau d'or en fonte, et préfère adorer le bœuf égyptien plutôt que son Seigneur et son Dieu. Ainsi le fruit de tant de journées de travaux fut-il perdu dans une heure seulement de débauche. Moïse brise sans hésiter les tables de la loi ; car il savait que des gens ivres n'étaient pas aptes à entendre les instructions du Seigneur. Ce peuple si aimé de Dieu, s’étant plongé dans la bonne chère, s'est révolté contre lui ; étant devenu tout chargé de graisse et d'embonpoint, il a dans son abondance abandonné Dieu son créateur et s'est éloigné de Dieu qui l'avait sauvé (Deut., XXXII, 18). De là encore cet avertissement donné à ce peuple dans le Deutéronome : Craignez qu'après que vous aurez mangé et que vous vous serez rassasiés, que vous aurez bâti de belles maisons et que vous vous y serez établis, que vous aurez eu des troupeaux de bœuf et des troupeaux de brebis, et une abondance d'or et d'argent et de toutes choses, que votre cœur ne s'élève et que vous ne vous souveniez plus du Seigneur votre Dieu qui vous à tiré du pays d'Egypte, de ce séjour de servitude (Deut., VIII, 12-14). En un mot, parce que ce peuple avait mangé, son cœur s'appesantit ; leurs oreilles devinrent sourdes, et ils fermèrent leurs yeux, de peur que leurs yeux ne vissent, que leurs oreilles n'entendissent et que leur cœur ne comprit (MATT., XIII, 15) ; et ce peuple repu et engraissé ne put soutenir le regard de Moïse qui était à jeun, et que son entretien avec Dieu faisait paraître comme ayant sur le front deux rayons de gloire, ou deux cornes de lumière, comme le fait entendre le texte hébreu C'est pourquoi notre divin Sauveur, lorsqu'il se transfigura sur la montagne, fit voir à ses côtés Moïse et Elie associés l’un et l'autre à sa gloire, non pour symboliser, comme se l'imaginent quelques-uns, d'un côté la virginité et de l'autre le mariage, mais parce qu'ils avaient jeûné ainsi que lui-même. Quoiqu'on doive dire aussi que Moïs et Elie représentaient la loi et les prophètes, et c'est ce que l’Evangile nous fait entendre ouvertement par ces paroles : Ils lui parlaient de sa sortie du monde, qu'il devait accomplir dans Jérusalem (LUC, IX, 31) ; car ce n'est ni la virginité ni le mariage, mais bien la loi et les prophètes qui ont annoncé ou prédit la passion de Notre-Seigneur. Si l'on veut absolument voir dans Moïse la personnification du mariage et dans Elie celle de la virginité, qu'on fasse donc attention, pour tout dire en deux mots, que Moïse est mort et a été enseveli, et qu'Elie a été enlevé tout
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vivant dans un char de feu, en commençant ainsi d'être immortel avant d'éprouver la mort. "
" Ce ne fut également que par le jeûne que Moïse put obtenir de nouvelles tables de la loi, et la diète seule put lui faire recouvrer ce que l'intempérance de son peuple lui avait fait perdre. Ce qui doit nous montrer que le jeûne peut nous faire rentrer dans le paradis, comme c'est la gourmandise qui nous en a expulsés. Nous voyons dans l'Exode que la prière de Moïse jointe au jeûne de tout le peuple prolongé jusqu'au soir, fut ce qui assura la victoire remportée sur les Amalécites (Exod., XVII, 11-12). Josué fils de Nun commanda au soleil et à la lune de s'arrêter et fit durer ainsi plus d'un jour le jeûne observé par l'armée victorieuse. Saül, comme nous le lisons au premier livre de Samuel, fit publier l’ordre suivant dans son armée : Maudit soit celui qui mangera avant le soir, jusqu'à ce que je me sois vengé de mes ennemis (I Sam., XIV, 24). Et tout son peuple se priva de manger, pendant que partout ailleurs les hommes prenaient leur repas. Et telle fut la force de cet édit pour lequel Dieu avait été appelé en témoignage, que Jonathas, à qui on était redevable de la victoire, désigné par le sort comme coupable, quoique involontairement, de l'avoir enfreint, put à peine être sauvé par les supplications du peuple de la vindicte qu'allait exercer sur lui la main de son père. Elie, pour s'être préparé par un jeûne de quarante jours, obtint la faveur de voir Dieu sur le mont Horeb, et de l'entendre lui adresser ces paroles : Que faites-vous là, Elie (I Rois, XIX, 9) ? Paroles bien différentes de cette autre question qu'on lit dans la Genèse : Adam, où êtes-vous (Gen., III, 9) ? Celle-ci était un reproche adressé à celui que la gourmandise avait perdu ; celle-là au contraire n'était qu'un encouragement donné au jeûne Samuel, après avoir réuni le peuple à Masphat, lui ordonna de jeûner et par ce jeûne même le rendit plus fort contre ses ennemis (I Sam., VII, 5). L'ardeur des Assyriens et toute la puissance de Sennachérib furent arrêtés, surmontées et vaincues par les larmes, le cilice et les jeûne du roi Ezéchias (Is., XXXVII, 6 et suiv.). Au contraire, la ville de Ninive détourna de dessus elle par ses jeûnes la colère de Dieu qui allait la frapper (JON., III, 5) ; et Sodome et Gomorrhe l'eussent également apaisée, si ces deux villes avaient voulu faire pénitence en joignant le jeûne aux larmes du repentir. Achab, ce roi si impie, obtint néanmoins par ses jeûnes et par le cilice dont il se couvrit, que Dieu révoqua sa sentence déjà
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portée contre lui, en remettant après la mort de ce roi l'anéantissement de sa famille (I Rois, XXI, 27). Anne, épouse d'Helcana, fut récompensée de ses jeûnes par la fécondité qui lui fut accordée (I Sam., I, 18). Les mages de Babylone sont menacés de leur entière destruction ; déjà on met à mort les devins, les enchanteurs, les aruspices. Daniel et les trois jeunes hommes méritent par leurs jeûnes d'être éclairés d’en haut, et en se contentant pour leur nourriture d'herbes et de légumes, ils deviennent plus beaux de visage et plus avancés en intelligence que ceux qui se nourrissaient des viandes apprêtées pour la table du roi (DAN., I et II). Nous lisons encore de Daniel qu'il jeûna trois semaines, que pendant tout ce temps il ne mangea d'aucun pain agréable au goût, que ni chair ni vin n'entra dans sa bouche, qu'il ne se servit d'aucune huile pour en oindre ses membres, et qu'alors l'ange de Dieu lui apparut et lui dit : Daniel, vous me touchez de compassion (DAN., X, 2 et suiv.). Ainsi ses jeûnes lui attirèrent la compassion de Dieu, et bientôt ils le rendirent terrible aux lions. Quoi donc de plus avantageux, que ce qui nous rend Dieu propice, apprivoise les lions et frappe les démons d'épouvante ? Habacuc est envoyé à Daniel (ce récit, il est vrai, ne se trouve pas dans l'hébreu), et ce prophète porte à cet autre prophète le dîner des moissonneurs : c'est qu'une semaine passée dans le jeûne avait mérité à ce dernier une telle visite. David, voyant en danger de mort le fils qu'il avait eu de son adultère, fit pénitence dans le jeûne et dans la cendre, et dit à cette occasion : Je mangeais la cendre comme le pain, et je mêlais mes larmes à ce que je buvais (Ps. CI, 10). Et encore : Mes genoux se sont affaiblis par le jeûne (Ps. CVIII, 24). Et pourtant il avait déjà entendu Nathan lui dire : Le Seigneur vous a remis votre péché. Samson et Samuel ne boivent ni vin ni toute autre boisson qui puisse enivrer : aussi étaient-ils des enfants de promesse, et ils devaient leur naissance à l'abstinence et au jeûne (Jug., XIII, 7; I Sam., I, 15). Aaron et les autres prêtres, lorsqu'ils devaient entrer dans le temple, ne buvaient rien de ce qui peut enivrer, sinon ils étaient frappés de mort : et nous pouvons conclure de là, qu'un ministre de l'Eglise qui remplirait ses fonctions dans un état d’ivresse, se donnerait la mort à lui-même. C'est pourquoi Dieu faisait le reproche suivant au peuple d'Israël : Vous donnez à vos nazaréens du vin à boire (AMOS, II, 12). Jonadab, fils de Réchab, avait fait une loi à ses fils de ne jamais boire de vin. Jérémie ayant donc offert du vin aux
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Réchabites, et ceux-ci lui ayant refusé d'en boire, le Seigneur leur dit par la bouche de ce prophète : Parce que vous avez obéi au précepte de Jonadab votre père, que vous avez gardé tout ce qu'il vous à ordonné et que vous avez fait tout ce qu'il vous a commandé, . . . la race de Jonadab fils de Réchab ne cessera point de produire des hommes qui se tiendront toujours en ma présence (JEREM., XXXV, 18). L’Evangile nous présente à son frontispice, pour ainsi dire, une sainte veuve, mariée seulement une fois, Anne fille de Phanuel, qui passait dans les jeûnes sa vie entière. La vie de Jésus-Christ sur la terre n'a été de même qu'un long exercice du jeûne comme de la chasteté. Jean, son précurseur et tout à la fois le prédicateur de sa venue, ne vit que de sauterelles et de miel sauvage ; la viande lui est inconnue ; voilà comment dans son désert, véritable berceau des moines, il inaugurait la vie monastique. Notre-Seigneur lui-même a célébré son baptême par un jeûne de quarante jours, et il nous a enseigné que les démons les plus à redouter pour notre salut ne peuvent être vaincus que par la prière et par le jeûne (MATTH., XVII, 20). Ce fut par ses jeûnes fréquents accompagnés d’aumônes, que le centenier Corneille mérita de recevoir le Saint-Esprit avant même qu'on lui eût conféré le baptême (Act., X, 2-30). L'apôtre saint Paul n'oublie pas ses jeûnes dans l'énumération qu’il fait de tout ce qu'il a souffert, comme de la faim et de la soif, des dangers que lui avaient fait courir les voleurs, de ses naufrages essuyés sur mer, de ses peines de toutes sortes. Son disciple Timothée ayant à se plaindre de la faiblesse de son estomac et de ses fréquentes maladies, il lui conseille alors de boire un peu de vin. Ne vous contentez plus de ne boire que de l’eau, lui dit-il (I Tim., V, 23). Jusque-là Timothée ne buvait donc que de l'eau, et l'apôtre ne lui eût pas encore accordé l'usage du vin, sans ses fréquentes maladies et la faiblesse de son estomac. Il est vrai que le même apôtre réprouve la doctrine de ceux qui défendaient de se marier, et prescrivaient de s'abstenir des viandes que Dieu à créées pour être reçues avec action de grâces ; mais il désigne par-là Marcion et Tatien, ainsi que tout autre hérétique qui prescrirait cette abstinence absolue en haine ou en mépris des ouvrages du Créateur. Nous, au contraire, nous louons sans distinction tous les ouvrages des mains de Dieu, tout en préférant la maigreur à la graisse, l'abstinence à la crapule, et le jeûne au rassasiement. Car ces pénibles épreuves sont à l'avantage de celui qui les endure, et
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comme une violence qui le rend victorieux de la mort (C'est le sens que nous avons cru pouvoir donner à ce passage difficile, dont voici le texte : Vir quippe in laboribus laborat sibi, et vim facit in interitum suum). Et depuis le temps de Jean-Baptiste, ce jeûneur et ce célibataire de profession, le royaume des cieux se prend par violence, et ce sont les violents qui l'emportent (MATTH., XI, 12). Car nous ne craignons rien tant que d'être surpris par l'avènement du juge éternel au moment où nous serions tout occupés de manger et de boire, de contracter et de célébrer des mariages, comme le furent les hommes au temps du déluge, ou à l'époque de la ruine de Sodome et de Gomorrhe : les eaux du déluge et le feu du ciel n'épargnèrent pas plus alors ceux qui mangeaient, que ceux qui prenaient des épouses. Et il n'y a point à s'étonner si l'Apôtre recommande d’acheter et de manger indifféremment de tout ce qui se vend à la boucherie, puisque pour des idolâtres de la veille que l'habitude entraînait encore dans les temples pour y manger des viandes offertes aux idoles, toute l'abstinence qu'ils étaient capables d'observer, c'était de prendre leurs repas séparément des gentils. Que si l'Apôtre dit aux Romains : Que celui qui mange de tout, ne méprise pas celui qui ne mange pas de tout, et que celui qui ne mange pas de tout, ne condamne pas celui qui agit autrement (Rom., XIV, 4), ce n'est pas qu'il veuille établir une sorte d'égalité entre celui qui mange et celui qui jeûne ; mais c'est qu'il avait à écrire en ce moment contre ceux qui, quoique devenus chrétiens, tenaient encore à judaïser, en même temps qu'il lui fallait avertir d'un autre côté les gentils convertis de ne pas scandaliser par leur manière de vivre leurs frères encore faibles dans la foi. Les paroles qui suivent immédiatement font bien voir que c'est là ce que voulait dire cet apôtre : Je sais et je suis persuadé, poursuit-il, que, selon la doctrine du Seigneur Jésus, rien n'est impur en soi-même, ou ne l'est qu’à celui qui le croit impur. Mais si en mangeant de quelque chose vous attristez votre frère dès-là vous n'êtes point conduit par la charité. Ne faites pas périr par votre manger celui pour qui Jésus-Christ est mort. Prenez donc garde d'exposer aux médisances des hommes le bien dont nous jouissons. Car le royaume de Dieu ne consiste pas dans le boire et dans le manger (ibid., 14-17). Et de peur que quelqu'un n'entende du jeûne ce qu'il dit, au lieu de l'entendre de la superstition judaïque, l'apôtre a commencé par dire : L'un
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croit qu'il lui est permis de manger de tout, et un autre au contraire qui est faible dans la foi ne mange que des légumes (ibid., 2). Et encore : L'un met de la différence entre les jours ; l'autre considère tous les jours comme égaux. Que chacun agisse selon qu'il est pleinement persuadé dans son esprit. Celui qui distingue les jours, les distingue pour plaire au Seigneur, et celui qui mange de tout, le fait pour plaire au Seigneur, et il rend grâces à Dieu ; et celui qui ne mange pas de tout, le fait également pour plaire au Seigneur, et il en rend de même grâces à Dieu (ibid., 5-6). C'est que ceux qui étaient encore faibles dans la foi, et qui croyaient certaines viandes pures et certaines autres impures, qui mettaient de la différence entre les jours, en regardant, par exemple, le sabbat, les néoménies et la fête des tabernacles comme des jours plus saints que les autres, sont avertis en conséquence de se contenter de légumes, puisqu'il n'y a personne qui se fasse scrupule d'en manger. D'autres, au contraire, d'une foi plus forte (ou plus éclairée) regardaient comme chose indifférente telle ou telle viande et tel ou tel jour. "
" Quant à ce que notre adversaire n'a pas craint de mettre en avant, savoir, que Notre-Seigneur était qualifié de mangeur et de buveur par les pharisiens, qu'il allait aux noces et prenait part aux repas des pécheurs, tout cela, je pense, est en faveur de ma propre thèse. Jésus-Christ, pensez-vous, est donc un mangeur, lui qui a sanctifié le jeûne chrétien par le jeûne de quarante jours qu'il à observé lui-même ; qui appelle heureux ceux qui ont faim et soif ; qui dit avoir une viande à manger autre que celle que connaissent ses disciples, et qui n'est point sujette à la corruption ; qui nous défend de nous mettre en peine du lendemain ; qui, bien qu'on dise de lui qu'il a eu faim et soif, et qu'il fréquentait les grands repas, ne paraît nulle part dans l’Evangile avoir rien fait pour l’intempérance ou pour la luxure, si ce n'est peut-être le mystère qu'il a institué en mémoire de sa mort, et le peu qu'il a accepté après sa résurrection pour prouver qu'il était vraiment ressuscité ; lui qui nous représente le riche vêtu de pourpre enseveli dans l'enfer en punition de ses repas somptueux, et le pauvre Lazare reçu au contraire dans le sein d'Abraham en récompense des privations qu'il avait endurées ; lui qui nous recommande de nous parfumer la tête et de nous laver le visage lorsque nous jeûnons afin que nos jeûnes soient rapportés à Dieu, et non à la vaine gloire ; lui qui, après sa résurrection, a mangé, il est vrai, quelque peu d'un poisson
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frit et d'un rayon de miel, mais non pour apaiser sa faim ou flatter son palais, et uniquement pour prouver la réalité de son corps ; et c'est ainsi qu'il en usait toutes les fois qu'il opérait une résurrection : il faisait donner à manger au mort ressuscité (MARC, V, 43), afin que personne ne pût le prendre pour un fantôme. C'est aussi pour cela que l'Evangile rapporte de Lazare ressuscité qu'il prit part à un repas où se trouvait aussi le Sauveur (JEAN, XII, 2). Si nous parlons ainsi, ce n'est pas pour interdire le poisson et les autres aliments à qui veut s'en
nourrir ; mais c'est que nous préférons aux viandes et au gorgement des intestins le jeûne du corps et la vie de l'esprit, comme au mariage nous préférons la virginité. Si nous lisons aussi que saint Pierre monta au cénacle à la sixième heure pour prendre son dîner, un besoin accidentel ne prouve rien contre le jeûne, puisqu'autrement il faudrait dire que, parce que Jésus-Christ, à la sixième heure du jour, s'est assis fatigué sur le bord du puits de Jacob, et a demandé à boire à la Samaritaine, tout le monde devrait pour cette raison boire, bon gré mal gré, à cette même même heure. Il peut d'ailleurs se faire que ce jour-là fût un sabbat, ou un dimanche, ou que l'apôtre eût faim à cette heure pour avoir jeûné les jours précédents : car je ne croirai jamais que, si cet apôtre avait bien soupé la veille, et de manière à se charger l'estomac, il eût eu faim le lendemain dès midi ; ou, s'il avait soupé la veille, et que néanmoins il ait eu faim à midi, c'est apparemment que la veille il n'avait pas trop mangé, puisque la faim lui était revenue de si bonne heure. "
" Maintenant, si nous lisons dans Isaïe que le Seigneur a réprouvé certains jeûnes, en disant : Votre volonté se trouve au jour de votre jeûne. . ., et vous maltraitez ceux qui dépendent de vous, et vous jeûnez pour faire des procès et des querelles, et vous frappez vos frères avec une violence impitoyable. . . ; tel n'est pas le jeûne que je demande de vous, dit le Seigneur ; il marque aussitôt après quel est le jeûne qu'il demande : faites part de votre pain, ajoute-t-il, à celui qui a faim; faites entrer en votre maison les pauvres qui ne savent où se retirer ; lorsque vous verrez un homme nu, revêtez-le, et ne méprisez point votre propre chair (Is., LXIII, 2-7). Sans réprouver le jeûne, il marque les conditions que le jeûne doit avoir. Car comment pourrait être agréable à Dieu une abstinence dont les procès, les rapines et les excès de tout genre détruiraient le mérite ? Si Dieu nous défend le jeûne, d'où vient donc que, dans le Lévitique, il prescrit à tout le peuple de jeûner
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jusqu'au soir le dixième jour du septième mois (Lévit., XVI, 29-31), en sorte que celui qui n'aurait pas affligé son âme aurait été condamné à mourir, et à être exterminé du milieu de son peuple ? Pourquoi ces sépulcres de la concupiscence qui se voient encore dans le désert et où fut enseveli tout ce peuple coupable de s'être rassasiés de viandes (Nom., IX, 34), jusqu’à en éprouver le besoin de vomir ? Pourquoi l'homme de Dieu, dont un mot avait suffi pour dessécher la main du roi Jéroboam, fut-il dévoré par un lion pour avoir mangé contre la défense que Dieu lui en avait faite (I Rois, XIII, 28) ? Pourquoi ce lion ne l'épargna t-il pas à son sortir de diner, tout en épargnant son ânesse ? Tant qu'il fut à jeun, ce prophète faisait des miracles ; il céda à la gourmandise, et le châtiment qu'il à mérité ne se fait pas attendre. Joël nous crie à son tour : Ordonnez un jeûne saint, avertissez le peuple qu'il se purifie (JOEL, II, 15-16), pour nous faire voir que le jeûne est sanctifié par les bonnes œuvres et qu'étant ainsi sanctifié, il nous aide à nous purifier de nos péchés. Et de même que le mérite de la vraie virginité n'est point anéanti par la fausse imitation que peuvent en faire les prétendues vierges du paganisme (Il y a dans le texte, virginum diaboli), ainsi le jeûne chrétien ne reçoit aucun préjudice de l'abstinence perpétuelle observée par les prêtres d'Isis ou de Cybèle par rapport à certains mets, d'autant plus que, chez ces infidèles ce qu'ils se refusent quant à l'usage du pain, ils se le rendent surabondamment en s'accordant l'usage de la viande. Et de même que les miracles de Moïse étaient faussement imités par ceux des Egyptiens, ainsi tout ce que fait le démon en contrefaçon des œuvres de Dieu ne prouve nullement que notre religion soit une superstition, mais prouve uniquement notre lâcheté qui se refuse à faire des choses dont l'excellence est reconnue par les hommes même du siècle. "
29. S. AUGUSTIN, Lib. de hæresibus ad Quodvultdeum, hær 82 : L'hérésie des jovinianistes, qui s'est élevée de mon temps, et lorsque j'étais encore jeune, a pour auteur un moine nommé Jovinien. Cet hérésiarque, à l'exemple des philosophes stoïciens, disait que tous les péchés sont égaux. Il soutenait de plus que l'homme ne peut plus pécher du moment où il se trouve régénéré dans l'eau du baptême, et que l'abstinence et le jeûne ne servent de rien.
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30. S. AMBROISE, Epist. 82 ad Vercellenses ; c'est le passage cité à la question précédente, témoignage 23, page 345.
31. S. AUGUSTIN, Epist. CXVII (al 54) ad Januarium, c. 2 : " Quant aux pratiques qui s'observent différemment selon les lieux, comme par exemple, que dans une église on jeûne le samedi, dans une autre non ; que dans une on communie tous les jours au corps et au sang du Seigneur, dans d'autres seulement à certains jours ; que dans l'une on l'offre tous les jours, dans une autre le samedi seulement et le dimanche, et dans une autre le dimanche seulement, ces choses-là, et d'autres semblables, sont de ces points sur lesquels chacun est libre ; ou plutôt, il n'y a point de meilleure règle pour un chrétien sage et prudent à suivre là-dessus, que de faire ce qu'il voit se pratiquer dans l'Eglise où il se trouve. Car tout ce qu'on voit clairement n'être ni contre la foi, ni contre les mœurs peut être indifféremment adopté et le bien de la société demande qu'on s'en rapporte sur ces sortes de matière à ce qui est établi parmi ceux avec qui l'on vit. "
" Je vous dirai à ce sujet ce qui m'est arrivé à Milan. Ma mère qui m'avait suivi dans cette ville, voyant que l'Eglise de Milan ne jeûnait pas le samedi, était inquiète sur ce qu'il lui fallait faire. Je ne me mettais guère en peine alors pour des choses de cette nature. Cependant, par égard pour ma mère je consultais l'évêque Ambroise, d'heureuse mémoire, qui me dit qu'il ne voyait rien à faire là-dessus de mieux que ce qu'il faisait lui-même puisque, s'il pouvait trouver quelque chose de meilleur à faire, il se ferait un devoir de s'y conformer. Je crus, d'après ces paroles, qu'il voulait que nous ne jeûnassions point le samedi, uniquement par déférence pour son autorité ; mais il ajouta : " Quand je suis à Rome, je jeûne le samedi, mais ici je ne jeûne pas. C'est ce qu'il vous faut faire aussi ; suivez ce qui se pratique dans l'Eglise où vous êtes si vous voulez ne scandaliser personne, et que personne ne vous scandalise. " Je rapportai cette décision à ma mère qui s'y rendit sans aucune peine, et après avoir réfléchi bien des fois sur cette règle, j’ai trouvé qu'en effet c’est une règle sûre et infaillible. "
32. Le même, Epist. LXXXVI (al 36) ad Casulanum episcopum : " Sur la question que vous me faites s'il est permis de jeûner le samedi, je vous réponds en un mot que, si cela n'était jamais permis, ni Moïse, ni Elie, ni Jésus-Christ n’auraient jeûné quarante jours de suite. Par ce même raisonnement on pourrait aussi conclure qu'il n'est pas défendu de jeûner le dimanche.
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Cependant, si l'on voulait jeûner ce jour-là comme quelques-uns le font le samedi, l'Eglise s'en trouverait scandalisée ; et avec raison. Car dans les choses où l'Ecriture ne détermine rien de certain, les coutumes reçues parmi les chrétiens ou établies par nos pères doivent tenir lieu de lois, et si chacun voulait disputer contre, ou que, sous prétexte de la coutume établie dans un endroit, on condamnait ce qui se pratique ailleurs, ce seraient des contestations sans fin, et la vérité ne nous fournissant rien de certain pour les décider, il serait fort à craindre que les disputes s'échauffant n'allassent jusqu’à altérer la charité. . . "
" Si vous me demandez quelle est ma pensée. . . , je dirai que le jeûne nous est prescrit par l'Evangile et par les écrits des apôtres, c'est-à-dire par tout le Nouveau-Testament ; mais je ne trouve point que Jésus-Christ, ni les apôtres, aient déterminé des jours où l'on doit jeûner ni ceux où on ne le doit pas. "
" Quant au jeûne du samedi, il n'y a pas grand inconvénient à l'observer, puisque l’Eglise de Rome l'observe aussi bien que quelques Eglises voisines, et même quelques autres assez éloignées, quoique en petit nombre. Mais de jeûner le dimanche, ce serait un très-grand scandale, surtout depuis la découverte de cette hérésie si détestable et si contraire à la foi catholique et à l'autorité de l’Ecriture, je veux dire l'hérésie des manichéens, qui affectent d'ordonner ceux qu'ils appellent leurs auditeurs, de jeûner le dimanche, et qui regardent ce jour-là comme un jour particulièrement consacré au jeûne. C'est ce qui fait qu'on a encore plus d'éloignement parmi les fidèles pour le jeûne du dimanche. Il serait toutefois pardonnable de jeûne ce jour-là à ceux qui pourraient pousser le jeûne au-delà de toute une semaine, pour approcher davantage du jeûne de quarante jours, comme nous savons qu'il y en a qui l'ont fait. Nous avons même appris de quelques-uns de nos frères très-dignes de foi, qu'il s'en est trouvé un qui a poussé son jeûne jusqu’à quarante jours de suite. Car, comme il n'y a aucune conséquence à tirer contre la coutume de ne pas jeûner le samedi, de ce qu'au temps de nos pères Moïse et Elie ont jeûné quarante jours de suite, on n'en saurait tirer non plus contre la coutume de ne pas jeûner le dimanche, de l'exemple de ceux qui pourraient passer sept jours entiers sans manger, puisque ce ne serait pas à dessein ou par affectation qu'ils jeûneraient ce jour-là, mais parce qu'il se rencontrerait dans le nombre des jours pendant toute la durée desquels ils auraient fait vœu de jeûner. Mais quand on interrompt le jeûne dans
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le courant de la semaine, le dimanche est le jour où il convient le mieux de l'interrompre. Si au contraire on ne prend de la nourriture qu'après sept jours écoulés, alors on ne jeûne pas le dimanche pour jeûner le dimanche, mais parce que le dimanche se trouve dans le nombre de jours fixés pour le jeûne. . . "
" Ce qui fait que c'est principalement le mercredi et le vendredi que l'Eglise est dans l'usage de jeûner c'est qu'il paraît par l'Evangile que ce fut le mercredi que les Juifs tinrent conseil pour faire mourir Notre-Seigneur, et que le vendredi fut le jour de sa passion, comme personne ne l'ignore. Entre ces deux jours se trouve celui sur le soir duquel Notre-Seigneur mangea la Pâque avec ses disciples, et c'est ce même soir qui termine le jour que nous appelons le jeudi, de sorte que la nuit suivante où Jésus-Christ fut livré appartenait au vendredi. Et de là vient que, bien que le vendredi fût le premier jour des pains sans levain, saint Matthieu dit que c'était alors le jeudi, parce que le vendredi commençait au soir du jour précédent, et que c'était dès le soir du jeudi qu'on devait faire la cène pascale, où commençait l'usage du pain sans levain, et où l'on mangeait l'agneau pascal. Il suit de là que ce fut le mercredi que Notre-Seigneur dit à ses disciples : Vous savez que ce sera dans deux jours qu'on célébrera la pâque, et que le Fils de l'homme sera livré pour être crucifié (MATTH., XXVI, 2). Ce qui fait donc que ce jour-là est consacré au jeûne, c'est ce qu'ajoute l’Evangéliste, qu'alors les princes des prêtres et les anciens du peuple s'assemblèrent dans la salle du grand-prêtre appelé Caïphe, et tinrent conseil ensemble pour trouver moyen de se saisir de Jésus et de le faire mourir (ibid., 3-4). Après ce jour-là vient celui que l'Evangile appelle le premier jour des pains sans levain, et c'est celui où les disciples s'étant approchés de Jésus, lui dirent : Où voulez-vous que nous vous préparions ce qui est nécessaire pour manger la pâque (ibid., 17) ? Ce fut le lendemain de ce jour-là, c'est-à-dire le vendredi, que Notre-Seigneur fut crucifié, comme tout le monde en convient, et c'est pour cela que ce jour est pareillement consacré au jeûne : car le jeûne marque l'humiliation, témoin cette parole du Prophète : J’humiliais mon âme par le jeûne (Ps. XXXIV, 13). "
" Après ce jour-là vient le samedi, où le corps de Jésus-Christ reposa dans le sépulcre, comme lors de la création du monde, Dieu se reposa de toutes ses œuvres le septième jour : et c'est au sujet de ce même jour qu'on à vu se former dans la robe de notre reine cette variété qui fait que quelques-uns, et entre autres
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tous les peuples d'orient, ont jugé plus à propos de rompre le jeûne ce jour-là, pour marquer le repos auquel il est consacré, et que d'autres au contraire, comme l'Eglise de Rome et quelques autres églises d’occident, observent le jeûne en mémoire de l'humiliation et de la mort de Notre-Seigneur. Les uns et les autres cependant jeûnent également le jour du samedi qui précède la fête de Pâques ; et ceux-là même qui font leurs repas accoutumé les autres samedis de l'année, jeûnent très-exactement celui-là : ce qu'ils font une fois tous les ans en mémoire de la douleur où furent plongés à pareil jour tous les disciples à cause de la mort de leur maître. S’ils ne jeûnent pas au contraire les autres samedis, c'est en mémoire du repos signifié par ce même jour. Car il y a deux choses qui nous font espérer la félicité des justes et la fin pour eux de toutes les misères : la mort et la résurrection. Dans la mort se trouve le repos dont il est dit par le Prophète : Entrez, mon peuple, dans les lieux souterrains ; tenez-vous cachés pour quelque temps, jusqu’à ce que la colère du Seigneur soit passée (Is., XXVI, 20). Et dans la résurrection se trouve ce qui fait la parfaite félicité de l'homme, à laquelle son corps a part aussi bien que son âme. . . . "
" Mais parce que nous ne trouvons point, ainsi que je l'ai déjà fait observer, que ni l’Evangile, ni les apôtres nous aient marqué aucun jour spécial pour jeûner et que c'est là, avec beaucoup d'autres choses, ce qui a produit quelque variété dans la robe de cette fille du Roi qui est l’Eglise, je vous dirai ce que le vénérable Ambroise, évêque de Milan, de la main de qui j'ai été baptisé, me répondit un jour que je le consultai sur ce sujet. Ma mère, qui se trouvait avec moi à Milan, était en peine de savoir s'il fallait jeûner le samedi selon la coutume de la ville d'où nous étions, ou ne pas jeûner ce même jour, selon celle de Milan. Pour la tirer de cette peine, je fus donc trouver l'homme de Dieu : car pour moi, qui n'étais encore que catéchumène, je ne prenais pas grand intérêt à ces sortes de questions ; et voici la réponse que j'en obtins : " Je ne puis, me dit-il, vous prescrire sur cela que ce que je fais moi-même ; " et par-là je crus d'abord qu'il voulait me faire entendre qu'il ne fallait pas jeûner le samedi, attendu que je savais que c'étai là ce qu'il pratiquait lui-même. Mais il ajouta : " Quand je suis ici, je ne jeûne point le samedi ; mais je jeûne ce même jour, quand je suis à Rome. Ainsi, dans quelque Eglise que vous vous trouviez, suivez-en les coutumes, si vous voulez ne causer de scandale à personne, et que personne ne
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vous en cause. " Je rapportai cette réponse à ma mère, et cela lui suffit : elle obéit sans hésiter et nous crûmes aussi que c'était la règle qu'il fallait suivre. Mais comme il arrive en quelques endroits, et particulièrement en Afrique, qu'entre les Eglises d'une même contrée, ou quelquefois entre ceux d'une même Eglise, il y en ait qui jeûnent le samedi, et d'autres qui ne jeûnent pas, il me semble qu'il faut se conformer là-dessus à ceux qui sont chargés de la conduite de ces peuples. "
34. S. EPIPHANE, in compendiariâ verâ doctrinâ de fide catholicæ et apostolicæ Ecclesiæ : " Les apôtres ont ordonné que les communions ou synaxes se fissent le mercredi, le vendredi et le dimanche. Le mercredi et le vendredi, on doit jeûner jusqu’à la neuvième heure du jour, parce que c'est dans la matinée du mercredi que Notre-Seigneur a été trahi, et le vendredi qu'il a été crucifié. Et ce sont les apôtres qui ont voulu que l'on jeûnât chacun de ces deux jours, afin que soit accomplie cette parole : que l'époux leur aura été enlevé, c'est en ces jours-la qu'ils jeûneront (Luc, V, 38). Ce n'est pas pour rendre bienfait pour bienfait à celui qui a souffert pour nous que nous jeûnons alors ; mais c'est pour nous rendre salutaire à nous-même la passion qu'il a endurée et pour faire satisfaction à Dieu pour nos péchés. Or, ce double jeûne je veux dire celui du mercredi et celui du vendredi, s'observe dans toute l’Eglise catholique et dans tout le courant de l'année et chacun de ces jours jusqu’à la neuvième heure, excepté pendant quarante jours entiers à partir de Pâques jusqu'aux approches de la Pentecôte, qu'on est dans l'usage de ne point fléchir les genoux, et de ne faire aucun jeûne qui soit d'obligation. Quant aux communions, elles se font à la neuvième heure du jour le mercredi et le vendredi, et dans la matinée le dimanche seulement. De plus, on ne jeûne pas pendant les cinquante jours de la Pentecôte dont j'ai déjà parlé, ni le jour de l’Epiphanie, c'est-à-dire de la manifestation et de la venue ou de la naissance temporelle du Sauveur (A l'époque où saint Epiphane arrivait, la fête de Noël n'était pas encore séparée de celle de l’Epiphanie, du moins généralement. De là peut-être l'usage observé de nos jours dans la liturgie romaine de réciter l'évangile de l’Epiphanie pour dernier évangile à la messe du jour de Noël), quand même ce jour-là se trouverait être un mercredi ou un vendredi. Néanmoins ceux qui font profession de piété continuent de jeûner même ces jours-là, excepté le dimanche et les cinquante jours après Pâques, et
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observent les vigiles en tous les temps de l’année. Mais l’Eglise catholique fait de tous les dimanches des jours de fête : ces jours-là, la communion se fait au matin, et il n'y a pas de jeûne. Car il y aurait une sorte de contradiction à jeûner le dimanche. Quant aux quarante jours qui précèdent la semaine des grands mystères, l'Eglise les passe dans le jeûne à l'exception du dimanche, qu'elle ne jeûne jamais, pas même dans ce temps de pénitence. Les six jours qui précèdent immédiatement celui de Pâques, tous les peuples ne se nourrissent que de fruits secs, ou de pain, de sel et d'eau ; encore ne se permet-on de prendre cette nourriture que lorsque le soir est arrivé. Les plus fervents passent même deux, ou trois, ou quatre jours entiers sans rien prendre, quelques-uns la semaine entière et ne rompent leur jeûne de toute la semaine que le dimanche matin au chant du coq. "
35. CALIXTE I, pape et martyr, Epist. ad Benedictum episcopum, c. 1 (Cette pièce n’a rien d’authentique) : " Nous ordonnons, comme plus convenable, de faire à l'entrée de chacune des quatre saisons le jeûne que vous savez qui s'observe chez nous trois fois dans l'année, afin que, comme l'année est partagée en quatre saisons, chacune de ces saisons soit consacrée par le jeûne. Et de même que le pain, le vin et l'huile servent au soutien du corps, ainsi le jeûne contribue au soutien de l'âme, conformément à cette parole du prophète Zacharie : Voici ce que dit le Seigneur des armées : Comme j'ai résolu de vous affliger lorsque vos pères ont irrité ma colère, dit le Seigneur, et que je n'ai point été touché de compassion ; ainsi j'ai résolu au contraire, en ce temps de combler de bienfaits la maison de Juda et la maison de Jérusalem. Ne craignez point. Voici donc ce que je vous ordonne de faire : Que chacun parle à son prochain dans la vérité et rendez dans vos tribunaux des jugements d'équité et de paix. Que nul ne forme dans son cœur de mauvais desseins contre son ami, et n'aimez point à faire de faux serments. Car ce sont là toutes choses que j’ai en haine, dit le Seigneur. Le Seigneur des armées m'adressa encore sa parole, et me dit : Voici ce que dit le Seigneur des armées : Les jeûnes du quatrième, du cinquième, du septième et du dixième mois, seront changés pour la maison de Juda en des jours de joie et d'allégresse et en des fêtes éclatantes et solennelles. Aimez seulement la vérité et la paix, dit le Seigneur des armées (ZACH., VIII, 14-20). Il faut que nous soyons tous unanimes sur ce point, afin que, comme l'enseigne l'Apôtre, nous
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ayons tous un même langage, et qu'il n'y ait point de schismes parmi nous, - mais que nous soyons tous unis ensemble dans un même esprit et dans un même sentiment (I Cor., I, 10). Nous nous félicitons de vous voir nous seconder dans l’établissement de cette discipline. Car il ne convient pas que les membres soient désunis d'avec leur chef ; mais ils doivent plutôt le suivre, comme le disent les écrivains sacrés (I Cor., XII, 12 et suiv.). Or, personne ne révoque en doute que l'Eglise apostolique est la mère de toutes les Eglises, et que vous ne devez vous écartez en rien des règles qu'elle prescrit. Et comme le Fils de Dieu est venu faire la volonté de son Père, ainsi devez-vous accomplir la volonté de votre mère qui est l'Eglise, à la tête de laquelle est, comme il a déjà dit, l'Eglise romaine. Donc tout ce qui se fait arbitrairement et contrairement à la discipline de cette Eglise, est nécessairement frappé de nullité. "
36. S. LEON-LE-GRAND, Serm. I de Pentecoste : " L'Esprit de vérité remplit l’Eglise de ses lumières et il ne peut souffrir dans son temple rien de ténébreux ou de tiède. C'est de ce principe que la pratique des jeûnes et de l'aumône nous est venue : tous les saints ont reconnu l'utilité de cette pratique, qui va suivre prochainement ce grand jour de fête et je vous la recommande de tout mon pouvoir. Si vous êtes tombé dans quelques fautes par votre négligence, il faut les expier par les jeûnes et par l'ardeur de votre piété. Nous jeûnerons donc la quatrième férie ainsi que la sixième et nous passerons le samedi en prières selon la coutume, par la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Cf. Sermons de saint Léon-le-Grand, p. 500). "
37. Le même, Serm. II de Pentecoste : " Il faut ajouter à nos œuvres de piété la pratique du jeûne, qui à été institué par les apôtres. Cette observance doit être comptée parmi les dons du Saint-Esprit ; elle est d'un grand secours pour nous faire résister aux attraits de la chair et aux embûches du démon ; c'est un moyen infaillible pour vaincre toutes les tentations avec la grâce de Dieu. Il faut donc que nous jeûnions, mes frères, la quatrième férie, ainsi que la sixième ; et nous passerons le samedi en prière dans l'église du bienheureux apôtre saint Pierre, qui nous aidera par son intercession à mériter la miséricorde de Dieu et la grâce de Jésus-Christ, etc. (Cf. Ibidem, p. 510). "
38. Le même, Serm. VIII et IX de jejunio septimi mensis ;
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passages cités plus haut, question précédente, témoignage 24, page 331 et suiv.
39. Le même, Serm. VIII de jejunio decimi mensis ; voir ibidem, témoignage 25, page 357.
40. RABAN MAUR, Lib. II de institutione clericorum, c. 24; voir ibidem, témoignage 10, page 322 et suiv.
41, 42 et 43. Le concile de Mayence, c. 34 ; celui de Sélingstadt, can. 2; S. BERNARD, in vigiliâ S. Andræ ; passages cités plus haut, article des commandements de l’Eglise, question XIV, témoignage 14, 16 et 18, tome II, pages 108 et suiv.
44. S. IGNACE, Epist. ad Philippenses (Cette lettre paraît supposée. V. NAT. ALEX., Hist. eccl., t. III, p. 60, édit. de Venise) : " Gardez-vous bien de ne pas observer le carême car il est une imitation du jeûne du Sauveur. Ayez soin aussi de passer saintement la semaine de la Passion (la semaine sainte). Ne manquez point à jeûner la quatrième et la sixième férie, en même temps que vous donnerez votre superflu aux pauvres. "
45. THEOPHILE d'Alexandrie, Lib. III Paschali ad totius Ægypti episcopos (Cette lettre pascale de Théophile est une des trois qui nous restent de la traduction de saint Jérôme. Voir sur les Lettres pascales un article fort curieux dans les Annales de philosophie chrétienne, 4e série, t.VII, p. 341-345) : " Il est juste que tous les fidèles célèbrent dignement la grande solennité qui se prépare après s'être purifié par le sentiment de la crainte de Dieu ; qu'ils réparent leurs faiblesses par la continence et par le jeûne, qu'ils réveillent leur foi endormie, et qu'ils imitent le chaste Daniel dont il est écrit : Il y a dans votre royaume un homme qui a en lui-même l'esprit de Dieu, et en qui on a trouvé plus de science et de sagesse qu'en aucun autre sous le règne de votre père (DAN.V, ,1 3). Ceux en effet qui s'appliquent à faire des progrès dans la vertu, considèrent la loi comme un chef invincible dont ils n'ont qu'à suivre les ordres ; et se rangeant sous sa conduite, ils triomphent des péchés qui leur faisaient la guerre, heureux d'ajouter à l'éclat de la solennité par l'éclat de leurs œuvres ; et la conscience tranquille, ils ne regardent plus les tentations qui leur surviennent que comme des traits impuissants, et d'avance ils se trouvent, par la solidité de leurs espérances, en possession de la victoire. Et ceux qui les imitent n'ont pas encore combattu, que déjà les palmes du triomphe apparaissent présentes à leurs désirs ; et bientôt, vain-
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queur des grossières voluptés, assuré de la couronne qui leur est réservée dans les cieux, ils s'écrieront en la contemplant dans tout son éclat : Le Seigneur mon Dieu est ma force, et il établira mes pieds sur une ferme assiette ; et il me placera sur un lieu élevé pour que je remporte la victoire en chantant des cantiques à sa louange (HABAC., III, 19, d'après la version des Septante). Mais ne pensons pas, mes frères que ce combat doive toujours durer, ce qui pourrait nous jeter dans l'abattement ; sachons au contraire qu'il cessera bientôt en nous laissant en possession paisible de la couronne de justice, qu'aucune durée de siècle ne pourra flétrir. Les travaux et les combats de la vie présente ne dureront qu'un temps ; et ceux qui auront parcouru d'un pied ferme cette courte carrière une fois parvenus au terme de leurs vœux se verront transportés dans une nouvelle patrie, et chanteront avec ravissement le cantique de leur victoire. "
" Ainsi donc, puisque la bonté de Dieu nous promet le triomphe sur nos perfides ennemis, appliquons-nous bien à observer les jeûnes prescrits, pour pouvoir participer ensuite à la joie de la fête. Ne nous permettons pas pendant le carême l'usage du vin, comme ont coutume de le faire les riches voluptueux, et, dans ces jours de combat, où nous devons être tout entiers aux pratiques laborieuses de la pénitence, sachons aussi nous interdire les viandes succulentes. Car ceux qui observent fidèlement la règle renoncent au vin dans les jours de jeûnes, aussi bien qu'à la chair des animaux, et la crainte de Dieu qui les conduit réprime en eux les ardeurs d'une insatiable avidité. C'est pour cela que l'Ecriture répète tous les jours à ceux qui professent la continence ce salutaire conseil, de ne boire ni vin ni boisson capable d'enivrer (Lévit., X, 9). Elle adressait au contraire le reproche suivant aux Juifs coupables : Vous avez licencieusement présenté du vin aux saints et aux prophètes (AMOS, II, 12, d'après la version des Septante). Ceux-là renoncent à amender leur vie, qui se plaisent à demeurer dans les liens de la volupté et que la raison, pas plus que les conseils, ne saurait détermine à réprimer leurs appétits gloutons par un jeûne sévère ; qui déshonorent la religion qu'ils professent par leur lâcheté et leur asservissement à d'éphémères plaisirs, ne rougissant pas de boire du vin en secret et d'assouvir sans témoin leur avidité grossière en choisissant en quelque sorte les temps consacrés au jeûne pour échanger contre l'ivresse et la débauche les pratiques de mortification qu'ils devraient plutôt embrasser d’eux-mêmes. Ils
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ignorent sans doute que, s'ils peuvent tromper les hommes en affectant au-dehors un air triste et mortifié, tandis que, dans l'intérieur de leurs maisons, ils se nourrissent de viandes et déchiquètent à belles dents la chair des oiseaux même en temps de carême, même aux approches de Pâques, ils n'échappent pas aux reproches de Dieu lui-même qui dit à leur sujet : Ces hommes commettent une grande iniquité en s'éloignant des pratiques saintes que je leur ai prescrites. Il ne convient pas dans les jours de jeûne et de mortification de se nourrir de viande contrairement à cet avis que nous donne l’Ecriture : Vous affligerez vos âmes (Lévit., XXIII, 27); ou d'aller à la recherche des faisans et des oiseaux les plus délicats, pour en repaître son avidité ou de se procurer à grands frais les cuisiniers les plus habiles pour apaiser sa faim gloutonne à l'aide de ragoûts variés, où la viande elle-même disparaît sous la multitude des ingrédients avec lesquels elle est apprêtée en même temps qu'on fait écumer sa coupe en la remplissant, pour le plaisir du palais, de vins délicieux et demandés, au mépris des lois de l'abstinence, à plusieurs vignobles différent. L’histoire du saint prophète Daniel et des trois vertueux jeunes hommes de la captivité nous invite puissamment à affectionner le jeûne et à en apprécier les avantages. . . . "
" Nous vous avons remis ces exemples sous les yeux en nous rappelant celui de saint Paul qui, après avoir fait l'éloge des vertus des saints, disait dans quelqu'une de ses épîtres : Considérant quelle a été la fin de leur vie, imitez leur foi (Hébr., XIII, 7). Nous engageons de même ceux qui, dans les temps de jeunes, aiment à se nourrir de viande, à imiter la mortification de ces saints, que tous les efforts de la puissance humaine n'ont pu amener à rien relâcher de la rigueur de leurs saintes observances, mais qui plutôt, en dépit de tous les supplices, ont su, au sein même de leur captivité à Babylone, conserver l'indépendance de leur volonté, assujettir les désirs de la chair et ses appétits déréglés à l’empire de la raison, et nous ont laissé dans leurs personnes le modèle du véritable courage : captifs à Babylone quant à leurs corps, mais, par leurs sentiments et par leur foi, concitoyens des anges dans la Jérusalem céleste, ils ont appris à tous les âges suivants à savoir s'abstenir en temps de jeûne de l'usage des viandes et du vin, à se contenter des plus maigres productions de la terre, et à ne boire que de l'eau, pour s'assurer le prix de la chasteté. Que dirai-je des célèbres victoires des Machabées, qui, plutôt que de goûte à des viandes défendues
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par leur loi, ont abandonné leurs corps aux tourments, et dont l'Eglise de Jésus-Christ répète les louanges dans tout l'univers (Encore aujourd'hui, l’Eglise fait mémoire des saints martyrs Machabées le jour de la fête de saint Pierre-ès-Liens), parce qu'ils ont été plus forts que tous les supplices, plus brûlant de l'amour de leur Dieu que le feu où ils se voyaient jetés n’était brûlant pour leurs corps. Ceux donc qui, par la pratique d'un jeûne sévère, imitent sur la terre la vie angélique, font voir qu'ils n'ont point oublié ces paroles : Le royaume de Dieu ne consiste pas dans le boire ou dans le manger, mais dans la justice, dans la paix et dans la joie que donne le Saint-Esprit (Rom., XIV, 17). Par la répression de leurs désir charnels, ils achètent à peu de frais et en fort peu de temps d'immenses biens pour toute l'éternité, ils reçoivent infiniment plus qu'ils ne sacrifient, et ils se rendent supportables les peines de la vie présente par l'avant-goût qu'ils ont déjà de la gloire à venir. "
46. MAXIME de Turin a écrit quatre homélies sur le jeûne quadragésimal. Il y exhorte fréquemment les fidèles à sanctifier par les bonnes œuvres le jeûne de quarante jours, et à s'abstenir non-seulement des aliments, mais aussi des vices. Il dit entre autres choses dans la troisième de ces homélies : " Nous donc, mes fières, pour qui notre invincible protecteur à institué cette sainte quarantaine, répudions tous les désirs charnels, et mortifions nos membres par le jeûne afin de faire croître nos âmes en vertus. Faisons jeûner en nous la luxure qui nous serait si funeste ; faisons jeûner toute espèce d'iniquités, faisons jeûner les inimitiés et les querelles ; tenons-nous éloignés des festins, mais encore plus des vices ; observons tellement la tempérance et la sobriété, que nous ne nous laissions point emporter à l'ivresse des passions. Car, que vous servirait de garder exactement les quarante jours de jeûne si vous négligiez la chose même pour laquelle le jeûne est institué ? Que vous servirait de vous interdire les festins, sans vous interdire les procès ? Que vous servirait d'épargner votre propre pain, en enlevant celui des pauvres ? Le jeûne des chrétiens doit profiter aux pauvres. Le jeûne des chrétiens doit entretenir la paix, et non les divisions. Quoi ! vous craindriez de toucher à la viande, et vous ne craindriez pas d'attenter à la réputation de votre prochain ? Une parole de détraction e souille-t-elle pas la bouche qui la profère plus que ne le ferait un aliment quelconque ? Quoi ! votre estomac se puri-
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fierait par les jeûnes, et votre langue en même temps se souillerait de mensonges ? Vous ferez bien, mon frère, de fréquenter l'église, si l'usure insatiable ne tient pas vos pieds engagés dans ses lacets. Vous ferez bien de prier Dieu, si l'envie, bannie de votre cœur, ne vient pas à l'encontre de vos prières. Vous ferez bien de vous frapper la poitrine, si en même temps vous en faites sortir toute pensée mauvaise. Le denier donné au pauvre sera de votre part une aumône bien entendue, si ce n'est pas un denier que vous ayez enlevé vous-même. Telle est la faim spirituelle que vous devez éprouver ; ainsi nourrirez-vous vos âmes, si vos jeûnes sont sanctifiés par la chasteté, ornés par la patience, vivifiés par la charité, fertilisés par la compassion, relevés par l'humilité. Faisons cortège au jeûne de Jésus-Christ avec toutes ces vertus, pour nous attirer la miséricorde de Dieu par le jeûne spirituel autant que par le jeûne corporel. "
47. S. AMBROISE (Les semons attribués à saint Ambroise ne paraissent pas être de lui.) traite la question du carême sermon XXIII et suivants. Le vingt-troisième contient en particulier ce passage : " Nous vous avons souvent entretenus du carême dans lequel nous entrons de nouveau, et nous vous avons dit plus d'une fois pourquoi nous jeûnons le nombre de quarante jours. Nous vous avons rappelé que c'est Notre-Seigneur Jésus-Christ qui a consacré ce nombre, en ne prenant aucune nourriture pendant tout ce temps-là dont il n'a fait qu'un même jeûne à proprement parler, en sorte que si chacun de ces jours a été interrompu par la nuit qui l'a suivi, le jeûne lui-même ne l'a pas été. Ainsi pour Notre-Seigneur les jours se succédaient mais ses jeûnes n'en faisaient qu'un cependant ; et par-là il a voulu nous faire entendre que, si nous ne pouvons pas faire de même un seul jeûne de tous les jours de carême, nous devons du moins ne laisser passer aucun de ces jours sans jeûner tellement que, si nous omettons un seul jour de le faire, nous nous trouverions avoir violé la loi du carême entier, et pour un repas d'un moment, perdu le fruit de tout notre travail. . . "
" C'est par un pèlerinage dans le désert d’un pareil nombre d'années que Moïse est parvenu au lieu de son repos, comme c'est par ce même nombre de jours de jeûne que nous espérons nous-même parvenir au ciel. Car nos jeûnes sont comme autant de stations dans le désert de cette vie, par lesquelles nous pouvons avancer continuellement dans la vertu, et par des progrès jour-
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naliers nous rapprocher continuellement de notre terre promise, où nous pourrons entrer avec d'autant plus de facilité, que nous aurons jeûné avec plus de ferveur. La foi et le jeûne, voilà les deux pieds de l'âme ; en les mouvant de concert, elle s'élève bientôt de cette vallée de larmes à la céleste Sion, de cette terre de malédiction à la félicité du ciel. "
48. Le même, Serm. XXV : " Nous devons donc remplir chacun de ces quarante jours par les exercices de la pénitence et faire de chacun de nos jeûnes comme un camp où nous stationnerons en sûreté. Oui, nos jeûnes sont autant de camps, où nous n'avons rien à craindre des attaques de l'enfer ; et on les appelle aussi stations, parce que nous pouvons de là comme d'une forteresse, nous défendre de nos ennemis. Malheur à nous, si nous avions l'imprudence de déserter quelqu'un de ces camps protecteurs ! Bientôt nous tomberions au pouvoir d'un Pharaon, d'un tyran de nos âmes, ou bien nous serions dévorés dans la solitude où ne croissent aucunes vertus. J'appelle solitude l'exclusion de la société des saints. Le jeûne est pour le chrétien comme un mur, derrière lequel il n'a rien à craindre du démon son ennemi. Car y a-t-il un seul exemple d'un chrétien qui ait jeûné et ait succombé aux pièges de cet esprit infernal ? ou qui ait été vaincu, tout en restant fidèle aux lois de la sobriété ? Ce sont les ivrognes et les intempérants, à la bonne heure, dont le démon n'a pas de peine à triompher. Mais dès qu'il se voit en présence du jeûne, il fuit, il tremble, il pâlit ; la diète que nous gardons affaiblit ses forces ; notre faiblesse le renverse. Oui, notre faiblesse le renverse ; car la faiblesse du corps est la force du chrétien, c'est ce qui a fait dire à l'Apôtre : Quand je suis faible, je n'en suis que plus fort (II Cor., XII, 10). Quelqu'un demandera : Comment peut-il y avoir de la force dans la faiblesse ? Il y a de la force dans la faiblesse, quand le corps s'amaigrissant par les jeûnes l’âme au contraire croît en vertus. Car autant vous retrancherez à l'un en fait d'aliments, autant vous donnerez à l'autre en fait de biens spirituels. L'homme qui jeûne est moins apte sans doute aux choses du siècle mais il l'est davantage au service de Dieu. Car il pense alors plus fortement à Dieu ; il se pénètre davantage de la crainte de ses jugements, et par-là même il remporte sur son ennemi une pleine victoire. Cette sorte de démons, a dit le Sauveur, ne peut se vaincre que par le jeûne et la prière (MATTH., XVIII, 20). Il s'agissait d'un énergumène ou d'un possédé du démon, que Notre-Seigneur déclare ne
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pouvoir être vaincu que par le jeûne. Voyez donc quelle est la force du jeûne : s'il guérit et purifie celui qui est actuellement encore au pouvoir du démon, combien ne devra-t-il pas davantage sanctifier celui qui est déjà l'ami de Dieu ? Quelles grâces puissantes ne devra-t-il pas lui procurer ? Chose admirable ! Quelqu'un jeûne et un autre pour qui jeûne ce premier en recueille lui-même les fruits. Donc, mes frères ne nous dépouillons jamais de cette armure ; n'omettons aucun des quarante jours de jeûne qui nous sont prescrits. C'est un nombre parfait et qui nous vaudra la victoire. C'est après avoir jeûné quarante jours que Notre-Seigneur remporta sa victoire sur le démon, non qu'il n'eût pu le vaincre avant ces quarante jours accomplis, mais c'est qu'il a voulu nous montrer que nous vaincrons le démon, si pendant quarante jours nous demeurons vainqueurs de nos désirs charnels, et que celui au contraire qui violerait ce nombre consacré en se laissant aller à l'intempérance de ses appétits se trouverait faible et sans aucune force pour résister à ses ennemis spirituels. Et comment celui-là pourrait-il vaincre dans quelqu'un de ses frères la malice du diable, s'il ne pouvait vaincre en lui-même l'intempérance de ses propres désirs ? O homme, commencez par vous vaincre vous-même si vous voulez remporter la victoire sur vos ennemis du dehors. Car vous avez au dedans de vous-même des ennemis domestiques qui ne vous laissent point de relâche. L'avarice, par exemple, est là qui vous obsède du désir de vous enrichir ; l'intempérance est là qui vous offre pour appât la délicatesse des mets ; l'hérésie est là qui cherche à vous séduire par l'attrait d'une fausse science. Vainquez donc ces ennemis intérieurs pour pouvoir vaincre ensuite ceux du dehors. "
" Ce n'est pas, mes frères, un péché léger que d'enfreindre la loi du carême imposée aux fidèles et de manquer à ce saint jeûne pour céder à la voracité de vos appétits. Il est écrit : Celui qui dit qu'il demeure en Jésus- Christ, doit marcher lui-même comme Jésus- Christ a marché (I JEAN, II, 6). Si donc vous voulez être chrétien, vous devez faire ce qu'a fait Jésus-Christ. Celui qui n'avait pas de péché a jeûné quarante jours entiers ; et vous qui péchez continuellement, vous refusez de jeûner quarante jours ? Il n'avait pas de péché, je le répète ; mais il a jeûné pour nos péchés. Quel est donc votre christianisme, de ne rien vous refuser en fait d'aliments, tandis que Jésus-Christ souffre de la faim pour vous ? de ne rien retrancher de vos repas, tandis que Jésus-Christ
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observe un jeûne sévère ? Ce n'est donc pas, je le répète, un péché léger, que d'enfreindre la loi du jeûne. Car pour citer en passant ce seul exemple, nous lisons dans les livres des Rois
(I Sam., XIV, 6 et suiv.) que Saül roi d'Israël, faisant la guerre aux Philistins, avait ordonné un jeûne général à toute son armée et qu'obéi de tous sur ce point, il avait alors engagé la bataille. Ben roi, qui vainquait ses ennemis, moins par l'effet de ses armes, que par celui de sa piété, et qui combattait plus par les moyens que la religion lui mettait en main, que par l’emploi d'un fer meurtrier ! Après donc que Saül eut ordonné à ses soldats de garder l'abstinence tout ce jour-là, son fils Jonathas, qui ignorait cet ordre, ayant, tout en poursuivant les ennemis qu'il avait déjà vaincus, goûté seulement d'un rayon de miel en y enfonçant la pointe de sa baguette, cette simple infraction fut d'une telle fatalité, que la victoire s'arrêta, et que Dieu donna des signes sensibles de sa colère. Les ennemis se relèvent ; le roi consulte le prophète et celui-ci ne lui donne point de réponse. Ce qui fait voir encore mieux que c'était l’abstinence gardée par les soldats, bien plus que leur valeur, qui avait rendu Saül d'abord vainqueur de ses ennemis. Mais la faute commise par un seul ôte en un instant la force à tous les bras, et abat tous les courages. Une armée, en effet, n'a plus de force, quand la discipline du jeûne cesse d'y être observée. Saül, instruit bientôt par la Divinité même de l'infraction qui avait eu lieu, déclare sans hésiter à Jonathas qu'il n'avait point de grâce à lui faire, mais qu'il fallait son sang pour expier sa désobéissance. Voyez combien Saül était un prince religieux, puisque, pour apaiser Dieu, il était prêt à faire le sacrifice de son propre fils ; combien aussi c'est un grand crime que d'enfreindre le jeûne puisque ce crime ne pouvait être expié que par la mort du coupable. Si Jonathas est condamné à mort pour avoir rompu le jeûne prescrit à son insu par son père, que ne mérite donc pas celui qui rompt sciemment le jeûne commandé par Jésus-Christ. Soyons donc fidèles, mes frères, à garder la loi du jeûne pour pouvoir vaincre nos ennemis spirituels et charnels. Car nous avons aussi des ennemis charnels, vous ne sauriez en douter. Jeûnons donc, pour que ces ennemis soient vaincus par notre armée et par Saül sa tête. Une fois l'abstinence commencée, n'allons pas jeter un regard même furtif sur un rayon de miel. Ce rayon de miel, ce sont les voluptés du monde, ce sont les vices, qui, comme le dit l'écrivain sacré, sont en apparence comme le rayon
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d'où coule le miel, mais qui par leurs effets sont amers comme l'absinthe. "
49. Le même, Serm. XXVII : " Nous donc, mes chers frères, jeûnons constamment et avec ardeur pendant tout ce carme, afin que le Seigneur nous soit propice, que les cieux nous soient ouverts, et que l'enfer ne puisse rien contre nous. "
50. Le même, Serm. XXXIII : " Nous avons dit dimanche dernier que le premier devoir imposé à notre religion était de jeûner avec ardeur pendant ces quarante jours, et que le moyen d'assurer notre salut était de pratiquer une exacte abstinence pendant tout ce temps. Nous devons en conséquence, mes frères, bien considérer en quoi ce jeûne consiste, afin d'en apprécier tous les avantages. Le jeûne serait inutile et tout-à-fait vain, s'il se réduisait à vider les intestins, sans porter l'âme à rompre les liens de l'iniquité ; un tel jeûne se saurait être agréable à Dieu. . . "
" La volonté de Dieu est qu'on jeûne par rapport aux péchés en même temps que par rapport à la nourriture. Nous imposons l'abstinence au corps, afin que l'âme puisse mieux s'abstenir des vices. Car un corps épuisé par la diète est un frein qui réprime les mouvements déréglés. . . "
" Le jeûne est salutaire, quand l'âme se retire du bourbier des vices, en même temps que le corps s'abstient des aliments. Ajoutons que, pour la perfection du jeûne, il faut distribuer aux pauvres le surplus d'aliments que nous nous refusons nous-mêmes. "
51. Le même, Serm. XXXIV : " Il est bon sans doute de jeûner en tout temps de l'année ; mais il est mieux de jeûner de préférence pendant le carême avec Jésus-Christ. Car Jésus-Christ a consacré par son propre jeûne le jeûne quadragésimal. J'ai dit, par son propre jeûne, et non pas, par ses jeûnes. Car ce ne fut qu'un même jeûne pour Notre-Seigneur, puisqu'il passa sans rien prendre tout le temps que durèrent ces quarante jours et ces quarante nuits. Tout chrétien donc qui manquera à jeûner ces quarante jours entiers, se rendra coupable de prévarication et de désobéissance pour avoir violé la loi que Dieu lui a faite pour son salut. Oui, vous êtes violateur de la loi, vous qui refusez de suivre, en observant le jeûne, l'exemple de votre divin maître. Comment osez-vous vous dire chrétien, lorsque vous ne vous refusez rien tandis que Jésus-Christ se refuse tout ? Il endure la faim pour votre salut ; et vous, vous avez peur de jeûner pour
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vos péchés ? Dites-moi, je vous le demande à vous qui ne retranchez rien à vos repas pendant le carême, si votre conscience ne vous dit pas à vous-même que vous êtes coupables, en vous livrant vous seuls, comme vous le faites, à vos appétits gloutons, tandis que le peuple entier obéit à la loi de l'abstinence ; si la rougeur ne vous monte pas au visage lorsque vous vous montrez en public, et que vous vous trouvez en présence d'exacts observateurs du jeûne si vous n'êtes pas en peine, lorsque vous allez à l'église, de savoir comment vous donnerez la paix à l'évêque sans que votre baleine même vous trahisse et vous condamne ? Si vous ne faites pas ces réflexions, votre erreur n'en est que plus funeste. Vous devez savoir que la personne à jeun qui vous rencontre dans ces jours de carême lorsque vous-mêmes vous n'êtes pas à jeun, ne peut pas se former sur vous une opinion bien avantageuse. Ce que je dis, parce que j'ai appris au sujet, hélas de plusieurs fidèles qu'ils ne jeûnaient qu’à moitié pendant la sainte quarantaine, et que leur intempérance les empêchait d'observer ce nombre consacré de jours, en sorte qu’après avoir jeûné sept jours, ils ne faisaient rien du jeûne les sept jours suivants. Je leur demanderai volontiers, pourquoi ils se font ainsi tort en jeûnant sept jours, puisque ce jeûne mutilé ne leur sert de rien. Car on aura beau jeûné un certain nombre de jours, et se priver pendant ce temps d'aliments délicats, il n'en sera pas plus agréable à Dieu, parce qu'on n'aura pas jeûné les quarante jours prescrits. J'ai honte de le dire, on voit des vieillards et des femmes décrépits observer le jeûne, tandis que des jeunes gens, de jeunes personnes ne l’observent pas. Mettons donc tous nos soins bien passer ces jours de salut, n'omettons le jeûne aucun de ces jours de carême et ne soyons pas moins exacts à observer la veille de chaque dimanche. Le carême est vraiment plein, quand on s'est préparé par les jeûnes et les veilles à célébrer la pâque. Si dans le reste de l'année, le jeûne est de perfection, en carême il est de rigueur. Les jeûnes du reste de l'année sont purement volontaires, ceux-ci sont obligatoires ; les premiers ont pour principe le choix de notre volonté ; les seconds ont pour motif la prescription de la loi ; on vous invite aux premiers, on vous oblige aux seconds. . . "
" Ce nombre de quarante jours de jeûne est un nombre heureux, puisqu'il nous ouvre toujours le ciel. C'est ce nombre accompli qui a fait surmonter à Noé les eaux du déluge (Gen., VII, 4), et qui a procuré aux enfants d'Israël l'entrée de la terre pro-
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mise (Jos., V, 6). Observons donc, nous aussi, ce nombre, afin que les cieux nous soient ouverts, que les dons spirituels descendent sur nous comme une pluie abondante, et que les sacrements nous nourrissent de la manne céleste qu'ils renferment en eux-mêmes. "
52. Le même, Serm. XXXVI : " Il y a quelques jours que, pour vous animer à passer saintement le carême nous vous avons cité des exemples pris dans les livres saints, qui ont dû vous prouver que ce nombre de quarante jours de jeûne n'est pas un nombre arbitraire, mais qu'il a été consacré par Dieu même, et que ce ne sont pas les hommes qui l'ont inventé, mais que c'est Dieu qui nous l'a prescrit. Celui donc qui mutile ce nombre en manquant au jeûne même un seul jour, n'est pas seulement coupable d'avoir violé le jeûne ce jour-là, mais il devient transgresseur du carême tout entier. Il est donc bon pour l'homme de jeûner volontiers ce nombre exact, et de sanctifier également chacun des jours de cette quarantaine. Cette loi, ce ne sont pas les prêtres, c'est Dieu qui vous l'impose. Et par conséquent celui qui en fait mépris ne méprise pas simplement le prêtre, mais il méprise Jésus- Christ qui lui a parlé par son ministre. Examinons donc si, par le temps même marqué pour cette observance, Notre-Seigneur n'a pas voulu mettre tous les éléments au service de l'homme. Dans ce temps ou nous sommes, les glaces qui couvraient la terre se fondent peu à peu ; les fleuves reprennent leur cours interrompu quelque temps par les gelées et c'est en ce temps aussi que nos péchés qui formaient comme une masse de glace, se fondent au souffle de la grâce de la réconciliation et notre vie, auparavant troublé dans son cours par les rafles glacées de l'esprit infernal, roule des flots plus purs. La terre, à l'annonce de la quadragésime, oublie la rigueur du froid ; et moi, à l'annonce de la quadragésime, je dépose les liens du péché. La terre est labourée par la charrue, pour être mise en état de produire ses fruits ; et moi, je laboure mon âme par le jeûne pour la mettre en état de faire germer en elle la semence céleste, etc. "
53. Le même, Serm. XXXVII : " Si vous l'avez bien retenu, nous vous avons fait voir dimanche dernier que le Seigneur lui-même a consacré le carême en jeûnant le premier, et en ne faisant même qu'un seul jour de ses quarante jours de jeûne par la continuité non interrompue de son abstinence ; que ne rien faire du tout de cette observance qui nous est commandée, c’est
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se rendre coupable d'une sorte de sacrilège ; que la violer en partie, c'est toujours un péché. Car c'est en vue de notre salut que Notre-Seigneur a embrassé cette pénitence, afin de nous en prouver l'utilité non-seulement par ses paroles, mais encore par ses exemples, et pour que nous ayons les mêmes traces à suivre dans la voie de l'abstinence, que dans celle de la foi. Voyons maintenant pourquoi Notre-Seigneur nous a prescrit le jeûne, et, comme un charitable médecin, a voulu nous en donner lui-même l'exemple. Car un bon médecin goûte le premier la potion qu'il veut faire accepter à un malade, pour montrer la confiance qu'il a dans la bonté de ses remèdes et afin que le malade, rassuré par cette expérience faite sous ses yeux, n'ait rien à craindre pour sa vie de la potion qu'il prendra, et ait au contraire tout à en espérer pour sa guérison. Voyons ensuite en quel lieu il a institué ce jeûne si salutaire. L'Evangile nous raconte qu'il a jeûné ces quarante jours et ces quarante nuits dans le désert. Je pense que la raison de cette institution du jeûne c'est que, comme le premier Adam avait perdu le privilège de son immortalité en s'abandonnant dans le paradis à l'intempérance de ses appétits, le second Adam, qui est Jésus-Christ, avait à nous rendre cette même immortalité par le miracle de son abstinence. Et parce que l'homme avait trouvé le péché et la mort en goûtant du fruit défendu contre la défense que Dieu lui-même lui en avait faite, il convenait que désormais nous ne pussions recouvrer l'état de justice et la vie spirituelle, qu'en jeûnant par obéissance pour le précepte divin. Car, pour nous retirer de l'abîme du péché, Notre-Seigneur ne veut faire autre chose que de nous aider à remonter le chemin par lequel nous sommes descendus ; c'est-à-dire que, comme l'homme a péché en mangeant, c'est en s'abstenant désormais qu'il pourra se corriger, et que comme c'est en mangeant le fruit défendu qu'il a fait l'épreuve de l'acte conjugal, c'est en jeûnant qu'il apprendra à en faire le sacrifice. Adam, en effet, n'a connu Eve qu'après y avoir été poussé par son intempérance. Au lieu que, tant qu'il était demeuré fidèle aux lois de la frugalité, il avait conservé sa virginité intacte ; et tant que les deux époux ont observé le jeûne par rapport aux aliments qui leur étaient interdits, ils l'ont observé de même par rapport aux péchés qui offensent la pudeur. Car la faim a d'ineffables sympathies avec la virginité, elle est ennemie de la mollesse. L'abondance au contraire des mets fait bon marché de la chasteté, et la lubricité trouve en elle son aliment. Ainsi
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donc, comme je l'ai déjà dit, Dieu s'est proposé de nous délivrer par des moyens diamétralement opposés à ceux qui nous avaient perdus. "
54. Le même, Serm. XXXVIII : " Grâce à Dieu, nous avons à peu prés accompli le jeûne quadragésimal, et en gardant cette abstinence nous avons satisfait au commandement que nous en avait fait le Seigneur. Il nous reste maintenant à obtenir de Dieu la même récompense de notre fidélité qu’ont obtenue de lui Moïse et Elie, ses serviteurs, en jeûnant les premiers ce nombre précis de jours, et comme nous avons passé par les même épreuves, recevoir aussi la même couronne. "
55. Le même, Serm. XL : " Nous lisons dans les prophètes que Ninive étant menacée de sa ruine prochaine, et le moment que Dieu avait marqué pour la détruire étant près d'arriver, ses habitants n'eurent pas d'autre ressource que de renoncer à leur vie débauchée et de s'imposer des jeûnes rigoureux, d'abjurer le faste de l'opulence et de prendre les livrées de la pauvreté, cherchant ainsi leur remède dans la cause même de leurs maux, afin d'apaiser par l'abstinence la colère divine qu'ils avaient irritée par leurs excès, et de réparer par leur humilité l'offense dont ils s'étaient rendus coupables par leur orgueil. . . "
" Les hommes ont coutume, quand ils se trouvent réduits à une extrême détresse, d'envoyer des ambassades aux peuples voisins et amis pour en implorer le secours. Pour nous, ce qui est bien mieux, adressons notre ambassade à Dieu même et que cette ambassade ce soient nos jeûnes ; implorons son secours, adressons-lui nos plus ardentes prières. Les Ninivites n'allèrent pas demander du secours aux peuples voisins ; mais ils trouvèrent, au moyen du jeûne, ce secours en eux-mêmes. Car pourquoi demander à d'autres ce qu'on peut si facilement trouver en soi-même ? Plus nous nous rapprocherons de Dieu, plus nous éloignerons de nous nos ennemis. Rapprochons-nous donc de Dieu, et gravons dans nos cœurs ces paroles du Prophète : Ceux qui s'éloignent de vous périront (Ps. LXXII, 27). Si ceux qui s'éloignent de Dieu doivent par-là même périr, ceux qui se rapprochent de lui doivent par-là même se sauver. C'est donc seulement par les jeûnes, par les prières et par les aumônes que nous pouvons nous rapprocher de Dieu ; car Dieu lui-même a jeûné, Dieu est miséricordieux, Dieu est saint. Donc celui qui veut se rapprocher de Dieu, doit travailler à se rendre semblable à Dieu. Toute la ville de Ninive jeûne dans la tribulation où elle
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était. C'est à dessein que je dis toute la ville ; car ce ne furent pas seulement les vieillards, les jeunes gens et les enfants qui jeûnèrent ; mais on fit jeûner jusqu'aux animaux. Chose singulière ! les animaux, pour qui il ne pouvait être question de péché jeûnent pour la ville qui a péché. D’où je conclus qu'ayant tous à redouter les effets de la colère divine, nous devons tous également pratiquer le jeûne et implorer la miséricorde de Dieu par l’unanimité de notre repentir. Car par quelle contradiction un chrétien ne ferait-il pas pour son salut ce que des animaux sans raison ont fait pour des hommes ? Ne pas observer le jeûne prescrit par l'Eglise, n'est-ce pas se montrer plus déraisonnable que ne le furent ces animaux ? N'est-ce pas se réduire à la condition des bêtes que de ne pas avoir l'intelligence des châtiments dont on est menacé, de ce qu'il faut faire pour les éluder. Une brute recule devant un précipice ; et vous, vous ne voulez pas échapper par le jeûne au péril que vous voyez devant vous ? C'est un désespoir d’un genre nouveau, que de vous obstiner à manger lorsque le devoir vous dit de jeûner, de vous abandonner la joie lorsque vous devriez vous répandre en larmes. C'est ce désespoir que l'Apôtre avait en vue lorsqu'il mettait dans la bouche de quelques insensé ces paroles : Mangeons et buvons, car nous mourrons demain (I Cor., XV, 32). Jeûnons donc, mes frères sans relâche, pour triompher de nos ennemis par l'abstinence en même temps que par la prière. "
56. S. AUGUSTIN, Serm. LV de tempore (Plusieurs de ces sermons, comme nous l'avons déjà fait remarquer, ne sont pas de saint Augustin. V. NAT. ALEX., Hist. eccles. V. sæc., t. V, page 105, édition de Venise) et suivants, parle au long du jeûne quadragésimal ; voici ce qu'il en dit, sermon XLV : " Nous voici, grâce à Dieu, arrivés au carême ; et je vous prie, mes frères, de passer si saintement, avec l'aide de Dieu, ce temps également favorable au salut de l'âme et du corps, que ce jeûne ne soit pas l'occasion de notre perte, mais plutôt de nouveaux progrès que nous ferons dans la vertu. . . "
" La volupté, la cupidité et la luxure, ces monstres plus redoutables les uns que les autres, nous préparent au moyen de plaisirs passagers des peines qui ne finiront jamais. L'abstinence au contraire, les veilles, les prières et le jeûne nous conduisent à travers un sentier étroit, il est vrai, mais fort court, aux délices du paradis, parce que la vérité ne ment point, et que c'est elle
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qui a dit dans L’Evangile : Le chemin qui conduit à la vie est étroit, et il y en a peu qui sachent y marcher (MATTH., VI, 47). "
57. Le même, Serm. LX de tempore : " Parfumez-vous la tête et lavez-vous le visage, afin que les hommes ne voient pas que vous jeûniez. Allons-nous donc contre la volonté du Sauveur, lorsque nous ordonnons des jeûne publics, et que nous jeûnons devant le peuple en faisant également jeûner le peuple avec nous ? Mais ces paroles doivent s'entendre en ce sens, qu'on ne doit pas jeûner en vue de s'attirer la louange des hommes, mais pour obtenir de la miséricorde de Dieu le pardon de nos péchés. "
58. Le même (Ce sermon est plutôt de saint Césaire d'Arles que de saint Augustin. V. NAT. ALEX., Hist. eccles., l. c., et les Sermons de saint Césaire), Serm. LXII de tempore : " Je vous avertis et vous supplie de ne pas vous donner la liberté de diner pendant le carême, ce temps si saint et si précieux, excepté les dimanches, à moins que quelque infirmité ne vous empêche de jeûner ; parce que, si jeûner dans un autre temps peut être un acte de courage ou un remède réclamé par l'état de l’âme, ne pas jeûner en carême c'est un péché. Celui qui jeûne dans un autre temps recevra le pardon de ses péchés, mais celui qui ne jeûne pas en carême quoiqu'il puisse le faire, sera puni pour cela seul. Que celui qui ne peut pas jeûner prenne son repas seul et en secret, ou avec quelque autre pareillement infirme s'il y en a dans la même maison, et qu'il n'invite à son diner personne de ceux qui se portent bien et qui peuvent jeûner : car s'il le faisait, ce ne serait pas seulement Dieu, mais les hommes mêmes qui verraient aisément que ce n'est pas par infirmité, mais par gourmandise et pour le plaisir de manger qu'il ne voudrait pas observer le jeûne. Que son impuissance de jeûner lui suffise donc à lui seul, et que ce ne soit qu’à regret et en gémissant qu'il prenne son repas, chagriné qu'il doit être de ne pouvoir pratiquer l'abstinence comme les autres. A quoi bon un infirme inviterait-il à son diner quelqu'un qui se porterait bien ? Serait-ce pour augmenter son péché par la bonne chère. Que plutôt, à la place du jeûne qu'il ne peut pas observer, il regarde comme un devoir de donner plus abondamment aux pauvres, afin de racheter ses péchés par ses aumônes, puisqu'il ne peut les guérir par le jeûne. Jeûner, c'est une bonne œuvre ; mais donner l'aumône en est une meilleure. Celui qui peut faire l'un et l'autre fait deux bonnes œuvres ; celui qui ne peut les faire toutes deux ensemble, fait mieux de donner l'aumône. "
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59. Le même, Serm. LXIV de tempore : " Nous devons considérer notre vie tout entière comme une arène où nous avons à combattre pour obtenir, par l'exercice de toutes les vertus, la récompense céleste qui doit en être le prix. Mais c'est surtout dans les jours de carême que nous devons nous rappeler cette vérité, dans ces jours consacrés à l'abstinence et au jeûne, et qui par-là même facilitent d'autant mieux l'accomplissement des devoirs, que le corps se trouve plus abattu par le retranchement de ce qui le flatte. Le nombre des jours que doit durer ce jeûne est fondé en raison, et consacré par d'augustes exemples. Moïse, sur le point de recevoir la loi des mains de Dieu, jeûne quarante jours et quarante nuits sans prendre pendant tout ce temps aucune nourriture ni aucune boisson, et se prépare ainsi par le jeûne à devenir le ministre des volontés du Seigneur. Elie, après un jeûne de quarante jours, fut enlevé de la terre au ciel dans un char de feu. Notre divin Sauveur lui-même jeûna quarante jours, et triompha par-là des tentations du diable : ainsi voulut-il préluder à la prédication de son Evangile. C'est donc à bon droit qu'il nous est ordonné d'observer ce même nombre de jours de jeûne, puisque ce nombre a été consacré par de tels exemples. Observons donc ce jeûne avec autant d'empressement que de joie ; préférons sans hésiter aux festins les plus délicats et les plus somptueux. Car c'est surtout dans ces jours où les penchants grossiers sont atterrés par l'abstinence, que nous nous trouvons disposés à accomplir avec ardeur la volonté du Seigneur. L'utilité du carême paraît aussi particulièrement en ce que ce soin que nous prenons de nous abstenir de choses d'ailleurs permises est pour nous une exhortation plus pressante encore à éviter ce qui est défendu. Car si nous nous abstenons de manger de la viande, don l'usage nous est permis le reste de l'année ; si nous nous abstenons de boire du vin, qu'il est pourtant permis de prendre modérément, à combien plus forte raison devons-nous éviter le péché qu'en aucun temps de l'année il ne nous est permis de commettre ! Si donc nous voulons que nos jeûnes par rapport aux aliments soient dans l'ordre, commençons par jeûner par rapport aux vices. Oui, jeûnons par rapport aux vices plus encore que par rapport aux aliments, sans négliger toutefois ce jeûne matériel ; par-là nous sanctifierons nos mœurs, et dans l'éternité nous recevrons une abondante récompense de tous nos travaux, suivant ce que nous lisons dans l’Evangile : Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu'ils seront rassasiés (MATTH., V, 6). "
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60. Le même, Serm. 65 de tempore : " Nous voici donc, mes frères, arrivés à ce saint temps de carême, temps si favorable au salut de nos âmes, et où nous pourrons, au moyen du jeûne, nous guérir des plaies qui nous ont été faites par le péché. Montrons par quelques exemples combien sont précieux les avantages du jeûne. Moïse fut le premier qui jeûna quarante jours et quarante nuits, et par-là il mérita de recevoir des mains de Dieu les tables de la loi, et de devenir le législateur de son peuple. Ainsi les jeûnes d'un seul homme purent-ils obtenir ce que l'intempérance de tout un peuple avait fait perdre. Admirons ici la différence qui se trouve établie entre le jeûne et l'excès du manger, entre un estomac épuisé par la diète et des poumons refoulés par la nourriture. Moïse, pour avoir jeûné, fut admis à voir Dieu ; le peuple, pour avoir bu et mangé, fut entraîné dans le crime d'idolâtrie. Mais pourquoi m'arrêter à Moïse et aux Israélites ? Le chef du genre humain, Adam, tant qu'il jeûna et garda la défense qui lui avait été faite : demeura dans le paradis. A peine eut-il mangé, qu'il s'en vit expulsé. Tant qu'il avait été dans le paradis, il était resté vierge ; il en est banni, et bientôt après il perd sa virginité. Car toujours l'incontinence vient se joindre à l'intempérance. Les organes de ces deux passions sont voisins l'un de l'autre dans le corps humain, et la coordination des membres indique ici celle des vices. Si donc c'est le manger qui nous a fait perdre le paradis, que la diète et le jeûne nous le fassent recouvrer. Nous avons vu ce que le jeûne a valu à Moïse ; passons maintenant à d'autres exemples. Elie jeûne et les éléments lui obéissent. Il parle, et le ciel reste fermé pendant trois ans et six mois ; il parle, et le feu du ciel descend sur son sacrifice. Et comme la reine Jézabel voulait le faire mettre à mort, et qu'endormi de lassitude, il s'était couché sous un arbre touffu, un ange est envoyé du ciel pour lui dire : Prenez un peu de pain et d'eau (I Rois, XIX, 3-6). Voyez combien Dieu est bon pour ceux qui jeûnent : ce n’était pas assez que le Seigneur lui eût envoyé un ange pour lui ordonner de prendre de la nourriture ; il fallut de plus qu'il en reçut l'ordre de fuir devant la princesse qui le persécutait. L'ange lui dit donc : Prenez un peu de pain et d’eau, parce qu'il allait avoir quarante jours à passer sans rien prendre dans le désert, avant d'arriver au mont Sinaï. Mais quoi ! Dieu qui a fait le ciel et la terre, et à qui toutes les créatures appartiennent, ne pouvait-il pas lui envoyer dans le désert par son ange de quoi dîner, comme il fit à Daniel dans
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la fosse aux lions en se servant du ministère d'Habacuc (DAN., XIV, 3S) ? Mais c'est que Dieu savait que son prophète ne pourrait surmonter les tentations du démon qu'autant qu'il aurait été formé par le jeûne à repousser les assauts de cet ennemi perfide. Daniel aussi, cet homme instruit des secrets de l'avenir, qui voyait et prédisait tant de siècles à l'avance la venue du Sauveur et la destruction de Jérusalem, à mérité le surnom d'homme de désirs, parce que, plus désireux de Jésus- Christ que des festins, il se priva du boire et du manger, objets des désirs des autres hommes. Jean, précurseur de Jésus-Christ, se nourrit dans le désert de sauterelles et de miel sauvage, et non de la chair des animaux, pas même des oiseaux qu'il aurait pu y trouver ; habitant près du Jourdain, il aurait pu vivre également de poisson ; mais comme il venait prêcher la pénitence, il devait enseigner par ses exemples ou ses actions, encore plus que par ses paroles, la pratique d'un jeûne rigoureux. Nous lisons encore dans l’Evangile, qu'un homme possédé du démon ayant été présenté à Jésus-Christ, les apôtres demandèrent à leur divin maître pourquoi ils n'avaient pu eux-mêmes guérir cet homme, et qu'ils en obtinrent pour réponse que ces sortes de démons ne pouvaient être chassées que par la prière et par le jeûne. Voyez donc, mes frères, combien est grande la vertu du jeûne puisqu'il peut opérer des effets dont les apôtres eux-mêmes n’étaient pas capables. Je passe le reste sous silence ; mais que cela suffise pour vous faire voir combien d'avantages le jeûne à sur l'intempérance, la mortification sur la vie immortifiée, l'austérité sur la mollesse, la sobriété sur la crapule, la liberté d’esprit que procure le jeûne sur la stupidité que produit l'excès des viandes. Je ne vous dis pas de jeûner des semaines entières mais au moins tâchons de passer chaque jour sans manquer aux lois de la tempérance et de la sobriété. Suspendons l'usage des bains, du vin et de la viande, non que nous ne réprouvions aucun de ces ouvrages de Dieu, mais pour vivre au moins quelques jours tout entiers au Seigneur, après ne nous être occupés que de nous-mêmes tout le reste de l'année. Mais pour que nos jeûnes soient pleins et parfaits, assaisonnons-les avec l'huile de la miséricorde ; donnons aux pauvres le pain que nous nous retranchons à nous-mêmes. Car ne pensez pas que les jeûnes puissent seuls suffire pour nous guérir des plaies de nos péchés : l'aumône en est avec le jeûne l'indispensable remède. Que vos jeûnes en affligeant votre corps à vous-même, répandent la joie dans l'âme de votre
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prochain ; qu'il trouve dans vos charitables épargnes le principe de son aisance. Donnez-vous la satisfaction, en jeûnant vous-mêmes de faire dîner les autres. Dieu aime celui qui donne avec joie (II Cor., IX, 7). En nourrissant le pauvre de vos propres biens, c'est comme si vous nourrissiez Jésus-Christ lui-même, qui nous déclare que c'est lui qui a faim dans la personne des pauvres. "
61. Ibidem, Serm. LXIX de tempore : " Nous devons accepter de tout cœur ces saints jours de carême et ne pas nous plaindre du trop de durée de ce temps de pénitence, parce que, plus il y a de jours consacré au jeûne, plus sera assurée la guérison de nos maux spirituels. Plus notre abstinence se prolongera, plus les fruits de salut que nous en espérons seront abondants. Plus le remède sera actif, plus la guérison sera prompte et facile. Dieu, qui est le médecin de nos âmes, a tellement réglé la durée du jeûne, que cette duré suffit pour les besoins des justes comme des pécheurs ; des justes, qui ont à demander à Dieu la fin de leur exil, et des pécheurs qui ont à implorer leur pardon. Cette durée de quarante jours est assez longue pour donner le temps d'exposer à Dieu ses besoins, et assez courte en même temps pour ne pas trop faire attendre la récompense. Quarante jours de jeûne suffisent pour expier un crime quelque grand qu'il soit, et pour apaiser Dieu quelque irrité qu'il soit contre nous. Que celui-là trouve le temps long, qui n'a ni pardon à demander, ni grâce à espérer. Car le désespoir n’inspire pas plus la pensée de confesser son crime, que d'espérer l'indulgence de son juge. C'est donc un temps bien salutaire que celui de carême puisqu'il donne occasion au pécheur d’apaiser Dieu par la pénitence et au juste de s'assurer son bonheur éternel. C'est en ces jours que la miséricorde est plus abondante, que le pécheur se pénètre d'une componction plus vive, et que le juste amasse plus de mérites. En ces jours le ciel est ouvert à l'indulgence, comme le cœur du pécheur l’est au repentir, et comme sa bouche l'est à la prière. Ce nombre de quarante est salutaire, je le répète, et mystérieux tout à la fois. Lorsque l'iniquité débordait sur le monde des premiers temps, c'est ce même nombre de jours que Dieu fit fondre les eaux du ciel comme un torrent, qui ne tarda pas à inonder toute la terre. Vous voyez donc que dès cette époque la figure préludait à l'accomplissement du mystère. Car de même qu'alors la pluie tomba quarante jours pour purifier le monde des crimes qui le souillaient, ainsi présentement encore, quarante jours sont donnés pour purifier le pécheur. Ces quarante jours
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sont le crible qui sert à séparer les méchants des bons, le voluptueux de l'homme chaste, l’intempérant de l'homme austère, le païen du chrétien, le catholique de l'hérétique. "
62. Ibidem, Serm. LXXI de tempore ; c'est le même passage que nous avons reproduit plus haut sous le titre de sermon XXXVII de saint Ambroise, témoignage 53, page 416.
63. S. LEON-LE-GRAND a écrit douze sermons sur le carême. Voir les passages dont il s'agit ici rapportés plus haut, question précédente, témoignage 27 et suiv., pages 560 et suiv.
64. S. BERNARD nous a laissé sept sermons sur le carême. Il dit dans le premier : " Nous entrons aujourd'hui, mes frères, dans le saint temps de carême qui est proprement le temps de la milice chrétienne. Car cette observance est particulière aux chrétiens et elle est gardée également par tous ceux qui sont unis ensemble par la profession de la même foi. Et comment le jeûne de Jésus-Christ ne serait-il pas commun à tous les chrétiens ? Comment les membres ne s'attacheraient-ils pas à suivre leur chef ? Si les biens que nous avons reçus sont dus à l'influence de ce divin chef, pourquoi n'en recevrions-nous pas aussi les maux ? Voulons-nous avoir part à sa joie sans avoir part à ses douleurs ? S'il en est ainsi, nous faisons bien voir que nous sommes indignes d'appartenir à un tel chef. Car tout ce qu'il a souffert, il l'a souffert pour nous. Si nous ne voulons pas apporter notre concours à ce qu'il a souffert pour notre salut, en quoi voulons-nous donc le lui accorder ? Qu'y a-t-il d'étonnant à ce que celui-là jeûne avec Jésus-Christ, qui doit s'asseoir avec lui à la table du Père céleste ? Qu'y a-t-il d'étonnant à ce qu'un membre qui sera un jour glorifié avec son chef, souffre aussi avec lui. . .? Le jeûne gardé par les membres est ce qui pénètre le chef de joie ; la diète que le corps s'impose est un baume pour le cœur. Comment n'appellerais-je pas baume ce qui guérit les blessures, ce qui apaise le tourment de la conscience coupable ? "
68. Le même, Serm. III de Quadragesimâ : " Appliquez-vous avec ardeur, je vous prie, à bien observer ce jeûne quadragésimal, que vous rend recommandable non-seulement la vertu d'abstinence qui en fait le fond, mais encore le mystère qui s'y trouve renfermé. Et si jusqu’à présent, nous avons jeûné avec ferveur, cette ferveur doit augmenter surtout dans ce saint temps où nous sommes. Car si d'une part l'abstinence est rendue plus rigoureuse, ne serait-il pas de l'autre indigne de nous de trouver trop pénible un fardeau que consent également à porter l’Eglise
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entière ? Jusqu'ici nous étions les seuls qui jeûnions, mais nous ne le faisions que jusqu’à la neuvième heure du jour ; maintenant nous jeûnerons jusqu'au soir, mais nous aurons pour compagnons de nos jeûnes les princes et les rois, le peuple et le clergé, les nobles et les roturiers, le riche et le pauvre. Mais pourquoi parler de ceux qui ont à jeûner en même temps que nous, puisque nous avons un bien plus puissant motif d'encouragement dans ceux qui ont embrassé avant nous cette carrière ou pour mieux dire, qui l'ont consacrée ? Avec quelle ardeur ne devons-nous pas suivre une pratique qui nous vient de Moïse comme par héritage, de ce Moïse qui a eu le privilège entre tous les prophètes de converser avec Dieu face à face, comme un ami avec son ami ? Avec quelle ferveur ne devons-nous pas nous soumettre à ce qui a fait mériter à Elie d'être enlevé au ciel dans un char de feu ? Combien de millions d'êtres humains n'ont pas subi la mort depuis cette époque ! Et lui-même reste toujours vivant, conservé miraculeusement par le Seigneur. Mais quelques grands qu'aient été Moïse et Elie qui nous recommandent déjà si fortement le jeûne par leur exemple, ils n'étaient après tout que les serviteurs de Dieu, aussi bien que nous-mêmes ; mais que dirons-nous de l'exemple de Jésus- Christ, qui a jeûné aussi ce même nombre de jours ? Quel est, je ne dis pas le moine, mais le chrétien qui répugne à pratiquer un jeûne qu'a pratiqué Jésus-Christ lui-même ? Nous devons nous porter à l'imiter avec d'autant plus de zèle, que nous savons que, s'il a jeûné, c'est pour nous qu'il l'a fait, et non pour lui-même. . . "
" Puisqu'en ce temps Dieu est particulièrement incliné à la miséricorde, cherchez-le, mes chers amis, tandis que vous pouvez le trouver ; invoquez-le tandis qu'il est proche (Is., LV, 6). C'est dans ce temps de carême que nous devons surtout le chercher avec ardeur, à cause du mystère en particulier que renferme ce nombre de jours, qui ne représente pas seulement une partie, mais toute la durée de la vie présente. Si donc votre ferveur s'était ralentie dans les autres temps de l'année, c'est maintenant plus que jamais qu'il convient de la ranimer. Si tous vos péchés se bornent à des excès de bouche, que la bouche jeûne seule, j'y consens. Mais si vos autres membres ont également péché, pourquoi ne jeûneraient-il pas aussi ? Faisons donc jeûner nos yeux, qui ont porté le ravage dans notre âme ; faisons jeûner nos oreilles ; faisons jeûner notre langue, nos mains, notre âme elle-même. Que nos yeux jeûnent par rapport aux regards curieux et imprudents ;
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humilions notre vue, mettons-la en pénitence, pour les fautes qu'elle nous a fait commettre en se donnant trop de liberté. Que nos oreilles si empressées à écouter sans motif, jeûnent maintenant par rapport aux discours inutiles, aux nouvelles du temps, à tout ce qui n'intéresse en rien notre salut. Que la langue jeûne par rapport aux médisances, aux murmures, aux paroles oiseuses ou bouffonnes, et même quelquefois par rapport aux paroles qu'il pourrait sembler nécessaire de dire, si la règle du silence le demande. Que les mains jeûnent par rapport aux signes qu'on peut se dispenser de faire, par rapport à toutes les œuvres qui ne sont pas d'ailleurs commandées. Mais surtout que l'âme elle-même jeûne par rapport aux vices et au dérèglement de sa propre volonté. Car sans ce jeûne-là, tous les autres que nous pourrions faire seraient réprouvés selon ce qui est écrit : Votre propre volonté se trouve au jour de votre jeûne (Is., LVIII, 3). "
66. Le même, Serm. IV de Quadragesimâ : " Nous voici à l’époque du jeûne quadragésimal, que je vous engage observer avec zèle, en considérant les fruits que vous en retirerez, et que je vais vous exposer, ainsi que la manière dont vous avez à remplir ce devoir. Premièrement, mes frères, en récompense de ce que vous vous serez abstenus de choses d'ailleurs permises, Dieu vous pardonnera les choses défendues dont vous pouvez vous trouver coupables. Or, n'est-ce pas là racheter par un jeûne très-court un jeûne de toute l’éternité ? Car ce que nous avons mérité, c’est l'enfer, où toute nourriture, comme toute consolation, sera refusée, où le riche demandera une goutte d'eau et ne pourra jamais l'obtenir. Qu'il est donc bon et salutaire, ce jeûne qui nous rachète de l'éternel supplice, en nous obtenant le pardon de nos péchés. En même temps que le jeûne est l'expiation des péchés commis, il est l'extirpation des vices. Non-seulement il nous mérite le pardon, mais il nous met de plus en grâce avec Dieu ; non-seulement il efface les péchés passés, mais il prévient de plus les péchés à venir. Ce qu'il me reste à vous en dire, vous le comprendrez aisément en ayant, comme je n'en doute pas, fait plus d'une fois l'expérience. Le jeûne donne à la prière la ferveur et la confiance. Admirez comment le jeûne et la prière se prêtent un mutuel secours, conformément à cette parole (Il y a dans le passage cité : Frater adjuvans fratrem, ambo consolabuntur. Nous n'avons pu trouver ces derniers mots dans l’Ecriture) : Le frère qui est aidé par son frère est comme une ville forte
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(Prov., XVIII, 19). La prière obtient la vertu du jeûne, et le jeûne donne du crédit à la prière. Le jeûne appuie la prière, la prière sanctifie le jeûne et le présente au tribunal de Dieu. Car à quoi nous servirait le jeûne s'il ne s'élevait pas de la terre au ciel ? A Dieu ne plaise qu'il en soit ainsi : que nos jeûnes s'élèvent vers le ciel sur l'aile de la prière. Mais de crainte que la prière ne suffise pas, donnons encore au jeûne un autre appui. La prière du juste pénètre le ciel, dit l’Ecriture (Ecclé., XXXV, 21). Qu'ainsi donc nos jeûnes, pour pénétrer jusque dans le ciel, soient portés sur ces deux ailes, la prière et la justice. Mais en quoi consiste la justice, sinon à rendre à chacun ce qui lui appartient ? Il ne faut, donc pas même vous borner à vous considérer par rapport à Dieu ; car vous êtes de plus débiteur envers vos supérieurs, envers vos égaux et vos inférieurs mêmes, et Dieu ne veut pas que vous méprisiez ceux qu'il ne méprise pas lui-même. "
67. ORIGENE, Lib. X in Leviticum : " S'abstenir de l'usage des viandes que Dieu à créées pour que les fidèles les prennent avec action de grâces, et le faire en communion avec ceux qui ont crucifié Jésus-Christ, c'est ce qui ne saurait être agréable à Dieu. Autrefois les pharisiens s'indignaient aussi contre Notre-Seigneur de ce qu'ils ne voyaient pas ses disciples jeûner comme eux ; mais Notre-Seigneur leur répondit : Les fils de l'époux ne peuvent pas jeûner, tandis que l'époux est avec eux (MATTH., IX, 18). Que ceux-là donc jeûnent à qui l'époux a été enlevé ; pour nous, qui avons l'époux avec nous, la chose nous est impossible. Toutefois, si nous parlons ainsi, ce n'est pas pour répudier le mérité de l'abstinence chrétienne car nous avons les jours du carême consacrés au jeûne, nous avons le quatrième et le sixième jour de chaque semaine, où nous sommes dans l'usage de jeûner. Et assurément un chrétien est libre de jeûner en tout temps, pourvu qu'il ne le fasse pas dans des vues superstitieuses, mais par esprit de mortification. Car comment pourrions-nous garder une chasteté parfaite, si nous n'appelions à notre aide les rigueurs de la pénitence ? Comment pourrions-nous vaquer à l'étude des livres saints, et faire des progrès dans la carrière des sciences les plus utiles au salut de l'homme, sans la répression continuelle des appétits grossiers ? Comment se rendre eunuque en vue du royaume du ciel, si l'on ne se retranche à soi-même l'abondance des mets, si l'on n'a recours aux saintes industries de l'abstinence ? Tel doit donc être le jeûne qui convient aux chrétiens. "
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68. S. ISIDORE de Séville, Lib. I de officiis ecclesiasticis, c. 36 ; comme plus haut, question précédente, témoignage 9, page 319.
69. S. AUGUSTIN, Epist. CXIX (al. 55) ad Januarium, c. 15 : " Quant au jeûne de quarante jours que nous appelons le carême, il est autorisé et par l'Ancien-Testament, où nous trouvons que Moïse et Elie ont jeûné quarante jours, et par l'Evangile, qui nous apprend que Jésus-Christ en a jeûné tout autant : par où il nous à fait voir la conformité de 1'Evangile avec la Loi figurée par Moïse et avec les Prophètes figurée par Elie. Aussi parut-il entre l'un et l'autre à sa transfiguration, afin de marquer plus authentiquement ce que l’Apôtre dit de lui, que la Loi et les Prophètes lui rendent témoignage. "
" Or, quel temps plus convenable pouvait-on prendre dans l'année pour le jeûne du carême que celui qui aboutit à la passion de Jésus-Christ, puisqu'elle nous représente la vie laborieuse que nous menons ici-bas, et qui doit être accompagnée d'une tempérance qui nous sèvre des fausses douceurs que ce monde nous étale de toutes parts, et des caresses trompeuses par lesquelles il ne cesse de s'efforcer de nous attirer (Cf. Les Lettres de saint Augustin, t. Ier, p. 549) ? "
70. S. AUGUSTIN, in Ps. CX : " Comme ces jours solennels, ces jours de joie succèdent aux quarante jours de carême qui marquent les afflictions de cette vie avant la résurrection du corps du Seigneur ; ainsi ce jour unique qui sera donné après la résurrection au corps entier de Jésus-Christ, c'est-à-dire à sa sainte Eglise, succédera à toutes les misères et à toutes les douleurs de cette vie, pour nous rendre éternellement heureux. "
" Cette vie présente demande donc de nous que nous la passions dans la pénitence. Elle demande que nous poussions des gémissements vers Dieu, dans le rude combat que nous avons à soutenir. Elle demande que, soupirant après le bonheur d'être revêtu de la gloire céleste, nous nous abstenions des plaisirs du siècle : ce qui nous est marqué par le nombre de quarante jours qu'ont jeûné Moïse, Elie et Jésus-Christ même. "
" Ainsi la Loi, les Prophète et l’Evangile, auquel la Loi et les Prophètes rendent témoignage, comme Jésus-Christ se fit voir sur le Thabor au milieu de Moïse et d'Elie, nous commandent de mettre un frein à notre avidité par le jeûne de la tempérance, si j'ose l'appeler ainsi, afin de renoncer à tous les attraits du monde, qui tiennent les hommes dans une captivité misérable
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et leur font oublier Dieu. Ils nous obligent à ce renoncement, pendant qu'on annonce et qu'on prêche dans les quatre parties du monde la perfection du Décalogue, ces dix commandements symbolisés par les dix cordes du psaltérion, et qui, multipliés par ce nombre de quatre, forment en effet le nombre parfait de quarante. "
" Pour ce qui est du nombre des cinquante jours de la résurrection du Seigneur, pendant lesquels nous chantons Alleluia, il ne nous marque ni la fin, ni le passage d'aucun temps, mais
une éternité bienheureuse ; parce que le denier, c'est-à-dire le nombre de dix étant ajouté à quarante, représente la récompense accordée aux vrais fidèles qui travaillent en cette vie, et que le père de famille réserve également à ceux qui sont venus les premiers, et à ceux qui sont venus les derniers (Cf. Sermons de saint Augustin, etc., t. VI, p. 46). "
71. Les Canons des Apôtres, can. 68 : " Si un évêque ou un prêtre, ou un diacre, ou un lecteur, ou un chantre, ne jeûne pas pendant la sainte quarantaine qui précède la Pâque, ou les jours de quatrième ou de sixième férie, sans avoir pour excuse une trop grande faiblesse de tempérament, qu'il soit déposé ; si c'est un laïque, qu'il soit excommunié. "
72. Le concile de Laodicée, canon 50 : " Il ne faut pas rompre le jeûne la cinquième férie de la dernière semaine de carême, et perdre ainsi le mérite du carême entier ; mais il faut jeûner tous ces jours-là sans exception, et ne s'y permettre que les aliments qui conviennent à ce temps d'abstinence, et qui doivent consister en légumes secs. "
73. Le concile dit deuxième de Brague, canon 9 : " Le concile a ordonné qu’après que tout aura été réglé dans chacun des conciles à venir, le métropolitain marquera à chaque évêque le jour du mois ou de la lune où la Pâque devra se célébrer l'année suivante. Les évêques et les autres ministres de l'Eglise prendront note de ce jour, et l'annonceront au peuple, chacun dans sa propre église, le jour de la Nativité de Jésus- Christ après la lecture de l’Evangile. A l'entrée de ce saint temps, les Eglises voisines se réuniront à la principale, et chanteront les litanies ou les prières publiques accompagnées de psaumes, trois jours de suite, en faisant la visite des basiliques des saints. Le troisième jour, après que la messe aura été célébré à la neuvième ou à la dixième heure, et au moment de congédier le peuple, on lui
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recommandera d'observer le jeûne du carême, et de présenter, au milieu du carême ou après les vingt premiers jours, les enfants à baptiser, pour qu'on fasse sur eux les exorcismes. "
74. Le quatrième concile de Carthage, can. 63: " Tout clerc qui, dans les temps marqués pour le jeûne aura rompu le jeûne sans une grande nécessité, sera réduit à un rang inférieur. "
75. Le concile de Tribur, canon 33 : " Nous ordonnons dans ce saint concile, conformément aux statuts des saints Pères, qu'aucun comte, ou séculier quel qu'il soit, ne tienne des cours de justice les dimanches, les fêtes, les jours de carême ou de jeûne ou prétende obliger le peuple à s'y rendre. Car Dieu serait irrité si, au lieu de vaquer à son service, le peuple fréquentait ces jours-là les lieux de contestations et de procès. Les jours de carême et les autres où l'on est obligé de jeûner, on s'acquittera avec zèle de cette obligation ; on fera en même temps des prières ferventes, et chacun répandra des aumônes selon ses facultés, en prenant soin de s'interdire les contestations et les procès. "
76. Le concile de Gangres, canon 49 : " Si quelqu'un de ceux qui font profession de piété se dispense sans besoin des pratiques de pénitence usitées parmi les autres fidèles, et que, jouissant de toute sa raison, il viole les jeûne observés de tradition par l’Eglise entière qu'il soit anathème. "
77. Le concile de Mayence tenu sous Charlemagne, canon 55 : " Si quelqu'un méprise insolemment les jeûnes indiqués et refuse de les observer avec les autres chrétiens, le concile de Gangres ordonne de le frapper d'anathème, s'il ne s'empresse de se corriger. "
78. Le huitième concile de Tolède, canon 9 : " Une surveillance attentive nous a fait découvrir des actes tout récents de mépris de la loi religieuse, qu'a fait commettre à quelques-uns leur intempérance effrénée, selon ce qui est écrit : Celui qui méprise les petites choses tombera peu à peu (Ecclé., XIX, 1). Ces hommes sont devenus tellement esclaves de leur ventre, qu'on les dirait déterminés à faire mépris des choses même les plus vénérables et les plus sacrées. Et comme le carême est censé avec raison être la dime de l'année entière, que l'on consacre au Seigneur par le jeûne dont on lui fait l'offrande, et qu'il a très-utilement institué pour expier les crimes de tout le genre humain ; qu'en conséquence, les fidèles des quatre parties du monde sont tenus également de l'observer ; que d'ailleurs la nature humaine se
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compose des quatre éléments, et qu'ainsi il convenait qu'une pénitence de quatre fois dix jours lui fût imposée pour ses transgressions contre les dix commandements : nous donnons à ceux qui osent mépriser cette loi sainte, qui refusent de réprimer leurs appétits voraces, et profanent par un crime plus horrible encore les fêtes de Pâques en se permettant des aliments défendus, cet avertissement sévère, que quiconque sans une évidente nécessité ou à moins de maladie ou d'infirmité, aura mangé de la viande en carême, non-seulement sera tenu pour profanateur de la résurrection de Notre-Seigneur, mais encore sera exclu de la communion ce jour-là ; enfin que l'usage des viandes lui sera interdit toute cette année, en punition de ce qu'il aura violé la loi de l'abstinence dans les jours qui y étaient consacrés. Pour ceux qui sont courbés sous le poids de rage, ou affaiblis par la maladie, ou forcés par la nécessité, ils ne s'accorderont point à eux-mêmes l'usage de la viande, qu'ils n'en aient auparavant obtenu la permission du supérieur ecclésiastique. "
79. S. TELESPHORE, pape et martyr, Epist. ad omnes universaliter (C’est une pièce supposée), c. 1 : " Sachez que nous et tous les évêques rassemblés dans cette ville sainte et apostolique avons arrêté que dès sept semaines avant Pâques, tous les clercs appelés à prendre part à l'héritage du Seigneur, s'abstiendront de manger de la viande, parce que comme leur sainteté doit être plus éminente que celle des autres fidèles, leurs jeûnes doivent être aussi plus rigoureux (Nous supprimons ici une phrase qui est évidemment d’un siècle postérieur et qui d'ailleurs ne va pas à la question actuelle). . . . . Et de même qu'ils s'emploient plus particulièrement au culte divin, et qu'ils composent la famille pour ainsi dire du Sauveur, ainsi doivent-ils se distinguer des autres fidèles par la sainteté de leur vie et de leurs mœurs. En conséquence les clercs s'interdiront pendant ces sept semaines entières l'usage de la viande et des mets délicats et s'appliqueront nuit et jour à se rendre Dieu favorable par le chant des hymnes, les veilles et les prières. "
80. THEOPHILE d’Alexandrie, Lib. III Paschali, passage rapporté plus haut sur cette même question, témoignage 45, p. 406.
81. S. AUGUSTIN, Serm. LXIV de tempore, passage rapporté de même sur la question actuelle, témoignage 59, page 421.
82. NICEPHORE- CALLISTE, Hist. eccl., lib. XVII, c. 32 : " Comme la famine avait augmenté à Byzance, l'empereur Justinien, ne
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trouvant pas d'autre remède à la disette des vivres, publia dés la deuxième semaine du jeûne l'ordre d'étaler de la viande sur le marché. Il eut besoin pour cela de recourir à la contrainte. Mais le peuple, résolu à rester fidèle à ses habitudes de piété, n'en achetait pas plus qu'il ne consentait à manger de cette viande, et se montrait prêt à mourir plutôt que de rien changer aux usages qu'il avait hérités de ses pères. "
83. S. CHRYSOSTOME, Hom. VI ad populum Antiochenum : " Quelle est la chose la plus aisée, ou de s'abstenir de jurer, ou de s'abstenir de manger pendant toute une journée et de
s'amaigrir en ne buvant que de l'eau et en se contentant d'aliments peu substantiels pour toute nourriture ? Nul doute que ce ne soit la première des deux que je viens de dire ; et cependant l'habitude nous a rendu la seconde tellement supportable et tellement facile, que lorsque les jours de jeûne sont arrivés, quelqu'un aurait beau vouloir nous engager, soit par les exhortations, soit par les menaces et toute sorte de violences, à goûter au vin ou à tout autre aliment dont l'usage est défendu dans les jours de jeûne, vous aimeriez mieux souffrir tous les maux que de toucher ces aliments que vous sauriez vous être interdits (Cf. S. Joannis Chrysostomi opera, t. II, p. 83, édit de Montfaucon ; pag.97, édit de Gaume). "
84. Le même, Hom. I et II in Genesim ; ces passages ont été rapportés à la question précédente, témoignage 15 et 16, pages 333 et 335.
85. S BASILE-LE-GRAND, Hom. II de jejunio ; v. ibidem, témoignage 18, page 338.
86. S. AUGUSTIN, Serm. 62 de tempore ; ce passage a déjà été rapporté à la question actuelle, témoignage 58, page 420.
87. Le même, Epist. 86 ad Casulanum ; v. ibidem, témoignage 32, page 399.
88. S. AMBROISE, Serm. 23, 25, 34, 36 et 37; v. ibidem, témoignage 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, pages 410 et suiv.
89. S. MAXIME de Turin, Hom. in litaniis et jejuniis Ninivitarum ; c'est la même que le sermon 40 publié sous le nom de saint Ambroise, et rapporté plus haut, témoignage 55, page 418.
90. S. JEROME, Lettre LIV à Marcella contre les montanistes : " Nous ne jeûnons, avec tout l'univers chrétien, qu'un seul carême suivant la tradition des apôtres ; les montanistes font trois carême par an, comme si trois sauveurs avaient souffert. Ce n'est pas qu'il ne soit permis de jeûner pendant toute l'année
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excepté les jours de la Pentecôte (C'est-à-dire les cinquante jours qui s'écoulent de Pâques à la Pentecôte); mais autre chose est d’offrir un présent par nécessité, autre chose de l'offrir de son propre mouvement (Cf. Œuvres choisies de saint Jérôme, trad. par Collombet, t. II, pag. 18-19). "
91. Le Concile de Trente, session XXV, Décret sur le choix des aliments, sur les jeûnes et sur les fêtes : " Le saint concile exhorte de plus et conjure tous les pasteurs, par le très-saint avènement de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, au service duquel ils se sont engagés, de recommander sans relâche à tous les fidèles toutes les choses qu'ordonne la sainte Eglise romaine, mère et maîtresse de toutes les Eglises, et tout ce qui a été ordonné, tant dans le présent concile, que dans les conciles antérieurs ; et d'apporter toute sorte de soins et de diligence pour obliger les peuples à s'y conformer en tout, mais particulièrement en ce qui a pour objet de mortifier la chair, comme sont les jeûnes et les abstinences de viande, ou en ce qui peut contribuer à accroître la piété, comme est la célébration pieuse et convenable des jours de fêtes en leur réitérant fréquemment l'avertissement d'obéir à leurs supérieurs ecclésiastiques, puisque ceux qui les écoutent s'attireront par-là les récompenses de Dieu lui-même, et que ceux qui les méprisent éprouveront un jour la rigueur de sa justice. "
92. S. AUGUSTIN, Tract. LXXIII in Evangelium Joannis : " Ce n'est pas une chose mauvaise par elle-même que de manger de la chair, puisque l'Apôtre dit sur ce sujet, que tout ce que Dieu a créé est bon, et qu'on ne doit rien rejeter de ce qui se mange avec action de grâces (I Tom., IV, 4) ; mais c'est une chose mauvaise que d'en manger, lorsque cela peut scandaliser quelqu'un, comme dit ailleurs ce même apôtre (Rom., XIV, 20) ; et à plus forte raison lorsque Dieu s'en tient offensé, comme il est arrivé dans le cas des Israélites, qui, rejetant la nourriture que Dieu leur fournissait dans le désert par sa sagesse, en demandèrent une autre que leur appétit déréglé leur faisait désirer avec ardeur, ou du moins murmurèrent de ce qu'ils en manquaient. Mais Dieu, pour nous faire connaître que ce n'est pas l'usage que l'homme peut faire de ses créatures, mais sa désobéissance au Créateur et son attachement à ses appétits déréglés qui le rendent criminel, a permis qu'Adam le soit
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devenu et se soit donné la mort lui-même, pour avoir mangé, non pas même de ces mets réputés impurs, tels que de la chair de porc, mais un simple fruit, et qu'Esaü ait de même vendu son droit d'aînesse pour des lentilles (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, t. III, p. 510-511). "
93. S. AMBROISE, Serm. XXV, comme plus haut sur cette même question, témoignage 48.
94. S. CHRYSOSTOME, Hom. XII in Epist. I ad Timotheum, écrivant sur ces paroles du chap. IV, v. 4, Omnis creatura Dei bona est, etc. : " L'Apôtre établi ici deux vérités : la première, qu'aucun ouvrage de Dieu n'est impur en lui-même, la seconde, que quand il le serait, nous aurions toujours un remède, qui est le signe de la croix, l'action de grâces, la gloire que nous devons en rendre à Dieu, pour qu'aussitôt toute impureté semblable disparaisse. Mais, direz-vous, si cette viande à été immolée à quelque idole, est-ce que nous pouvons la purifier de même ? Oui, dois-je vous répondre, si vous ignorez qu'elle ait été effectivement immolée aux idoles ; mais si vous avez été instruit, et que vous en mangiez cependant, vous deviendrez impur, non parce que cette viande aura été immolée aux idoles, mais parce que par-là vous avez communiqué avec les démons, malgré la défense qui vous en est faite. De sorte que si cette viande est impure, ce n'est pas qu'elle le soit en elle-même ; mais elle le devient par la disposition de votre propre volonté ou par l'effet de votre désobéissance à la loi. Quoi donc ? est-ce que la chair de porc n'est pas impure ? Nullement, du moment où vous la prenez avec action de grâces, et en faisant dessus le signe de la croix ; et je vous dirai la même chose de toute autre viande. La seule chose impure en cela, c'est la volonté de l'homme qui ne rend pas à Dieu des actions de grâces (Cf. S. Joannis Chrysost. opera, t. XI, p. 611, édit. de Montfaucon ; pag. 669 bis, édit. de Gaume). "
95. R ABAN MAUR, Lib. II de institutione clericorum,
c. 25 ; ce passage a été rapporté plus haut, question
précédente, témoignage 10, page 322.
Question III
Que nous enseigne l’Ecriture au sujet du jeûne ?
C'est Dieu même qui crie aux pécheurs par la bouche de Joël : Convertissez-vous à moi de tout votre cœur dans le jeûne, dans les
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larmes et les gémissements. . . faites retentir la trompette en Sion, ordonnez un jeûne saint, publiez une assemblée solennelle, faites venir tout le peuple. D'autres lisent ainsi ce dernier endroit : sanctifiez le jeûne, publiez une guérison solennelle, ou un remède général pour le peuple, afin que nous apprenions de là que le jeûne est sanctifié par les autres bonnes œuvres et qu'ainsi sanctifié, il sert à la guérison des pécheurs ; et cette interprétation est celle de saint Jérôme. Car, comme ce savant Père le prouve par les livres saints, Daniel, cet homme de désirs, obtint par ses jeûnes le don de connaître l'avenir ; les Ninivites apaisèrent par leurs jeûnes la colère de Dieu ; Elie et Moïse par leurs jeûnes de quarante jours, obtinrent la faveur d'être admis à sa familiarité, et Jésus-Christ lui-même a jeûné dans le désert ce même nombre de jours, pour nous recommander à notre tour cette pratique solennelle ; il nous à enseigné de plus que les démons les plus à redouter ne peuvent être vaincus que par la prière et par le jeûne. Saint Paul nous déclare de son côté qu'il a jeûné souvent, et le Psalmiste pénitent avait dit avant cet apôtre : Je mangeais la cendre comme le pain, et je mêlais mes larmes avec ce que je buvais. Et encore : Lorsqu'ils m'accablaient, je me revêtais d'un cilice ; j’humiliais mon âme par le jeûne. Enfin, quoi de plus propre à nous convaincre de la nécessité du jeûne que cette parole de Notre-Seigneur à ses disciples, que lorsque l'époux c'est-à-dire lui-même, objet de leur tendre attachement, leur aura été enlevé, alors ils jeûneront, et cela, même après que le Saint-Esprit leur aura été envoyé. C'est pourquoi saint Paul exhorte tous les fidèles en ces termes : Agissant en toutes choses comme des ministres de Dieu, rendons-nous recommandables par une grande patience dans les maux, dans les nécessités présentes, dans les extrêmes afflictions, dans les plaies, dans les prisons, dans les séditions, dans les travaux, dans les veilles, dans les jeûnes, etc. Et ailleurs le même apôtre dit encore : Ceux qui sont à Jésus-Christ ont crucifié leur chair avec ses passions et ses désirs déréglés.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Juges, XX, 24-28 : " Le lendemain, les enfants d'Israël s'étant présentés encore pour combattre les enfants de Benjamin, - ceux de Benjamin sortirent avec impétuosité des portes de Gabaa, et les ayant rencontrés ils en firent un si grand carnage, qu'ils tuèrent sur la place dix-huit mille hommes de guerre. - Après cela, tous les enfants d'Israël vinrent en la maison de Dieu, et, assis, ils pleuraient devant le Seigneur. Ils jeûnèrent ce jour-là jusqu'au soir, et offrirent au Seigneur des holocaustes et des hosties pacifiques ; - et ils le consultèrent touchant l'état où ils se trouvaient. En ce temps-la, l'arche de l'alliance du Seigneur était en ce lieu ; - et Phinées, fils d'Eléazar, fils d'Aaron, tenait le premier rang dans la maison du Seigneur. Ils consultèrent donc le Seigneur, et lui dirent : Devons-nous donc encore combattre nos frères les enfants de Benjamin, ou demeurer en paix ? Le Seigneur leur dit : Marchez contre eux, car demain je les livrerai entre vos mains. "
2. I Samuel, VII, 5-6, 10-11, 13 : " Samuel leur dit : Assemblez tout Israël à Masphath, afin que je prie le Seigneur pour vous. - Et ils s'assemblèrent à Masphath, ils puisèrent de l'eau qu'ils répandirent devant le Seigneur ; et ils jeûnèrent ce jour-là, et dirent : Nous avons péché devant le Seigneur. Or, Samuel jugea les enfants d'Israël à Masphath. - Lorsque Samuel offrait son holocauste, les Philistins commencèrent le combat contre Israël ; mais en même temps le Seigneur tonna avec un bruit épouvantable sur les Philistins, et les frappa de terreur ; ainsi ils furent, défaits par Israël. - Les Israélites étant sortis de Masphath poursuivirent les Philistins et les taillèrent en pièces, jusqu'au lieu qui est au-dessous de Betchar. - Les Philistins furent alors humiliés et n'osèrent plus venir sur les terres d'Israël car la
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main du Seigneur pesa sur les Philistins tant que Samuel gouverna son peuple. "
3. Ibid., XXXI, 11-13 : " Lorsque les habitants de Jabès de Galaad eurent appris le traitement que les Philistins avaient fait à Saül, - les plus vaillants d'entre eux sortirent, marchèrent toute la nuit, et ayant enlevé le corps de Saül et ceux de ses enfants qui étaient étendus sur la muraille de Bethsan, ils revinrent à Jabès de Galaad, où ils les brûlèrent. - Ils prirent leurs os, les ensevelirent dans le bois de Jabès, et jeûnèrent pendant sept jours. "
4. II Samuel, I, 11-12 : " Alors David prit ses vêtements et les déchira, et tous ceux qui étaient avec lui firent de même. - Ils s’abandonnèrent au deuil et aux larmes, et jeûnèrent jusqu'au soir à cause de Saül et de Jonathas, son fils, et du peuple du Seigneur et de la maison d'Israël dont un si grand nombre avait été passé au fil de l'épée. "
5. Ibid., III, 3i-32, 35 : " Alors David dit à Joab et à tout le peuple qui était avec lui : Déchirez vos vêtements, couvrez-vous de sacs et pleurez aux funérailles d’Abner. Et le roi David marchait après le cercueil. - Après qu'Abner eut été enseveli à Hébron, le roi David éleva sa voix et pleura sur son tombeau ; tout le peuple pleura aussi avec lui. - Et tous étant revenus pour manger avec David, lorsqu'il était encore grand jour, David jura et dit : Que Dieu me traite avec toute sa sévérité, si je prends une bouchée de pain, ou quoi que ce soit, avant le coucher du soleil. "
6. Ibid., XII, 15-17, 21-23 : " Nathan retourna ensuite à sa maison. Le Seigneur frappa l'enfant que la femme d'Urie avait eu de David, et on désespéra de ses jours. - David pria le Seigneur pour l'enfant ; il jeûna et s'étant retiré à part, il se coucha sur la terre. - Les principaux officiers de sa maison vinrent le conjurer de se lever ; mais il refusa et ne voulut point manger avec eux. . . - Alors ses officiers lui dirent : D'où vient cette conduite ? vous jeûniez et vous pleuriez pour l'enfant, lorsqu'il vivait encore ; et après qu'il est mort, vous vous êtes levé et vous avez mangé. - David leur répondit : J'ai jeûné et j'ai pleuré pour l'enfant tant qu'il a vécu, parce que je disais : Qui sait si le Seigneur ne me le donnera point, et s'il ne lui sauvera point la vie ? - Mais maintenant qu'il est mort, pourquoi jeûnerais-je ? Est-ce que je puis encore le faire revivre ? C'est moi plutôt qui irai lui, et il ne reviendra jamais à moi. "
7. I Rois, XXI, 17-29 : " En même temps le Seigneur
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adressa sa parole à Elie de Thesbé, et lui dit : - Lève-toi et descends à la rencontre d'Achab, roi d'Israël qui est dans Samarie ; car le voilà qui va dans la vigne de Naboth, pour en prendre possession. - Et tu lui parleras en ces termes : Voici ce que dit le Seigneur : Tu as tué (Naboth), et de plus tu t'es emparé (de sa vigne). Et tu ajouteras : Voici ce que dit le Seigneur : En ce même lieu où les chiens ont léché le sang de Naboth, ils lècheront aussi ton sang. - Et Achab dit à Elie : En quoi m'as-tu trouvé ton ennemi ? Elie lui répondit : En ce que tu t'es vendu pour faire le mal devant le Seigneur. - Je vais faire fondre les maux sur toi. Je te retrancherai, toi et ta postérité de dessus la terre, et je tuerai de la maison d'Achab tous les mâles, et jusqu'aux plus petits enfants, et depuis le premier jusqu'au dernier dans Israël. - Je rendrai ta maison comme la maison de Jéroboam, fils de Naboth, et comme la maison de Baasa, fils d'Abia, parce que tu as tout fait pour provoquer ma colère et que tu as fait pécher Israël. - Le Seigneur a prononcé aussi cet arrêt contre Jézabel : Les chiens mangeront lé sang de Jézabel dans le champ de Jézabel. - Si Achab meurt dans la ville, il sera mangé par les chiens ; et s'il meurt dans les champs, il sera mangé par les oiseaux du ciel. - Achab n'eut donc point son semblable en méchanceté, ayant été comme vendu pour faire le mal aux yeux du Seigneur ; car il y fut excité encore par Jézabel sa femme. - Et il devint tellement abominable, qu'il suivait les idoles des Amorrhéens, que le Seigneur avait exterminés à l’entrée des enfants d'Israël. - Achab ayant entendu ces paroles déchira ses vêtements, couvrit son corps d'un cilice, dormit avec le sac, et marcha ayant la tête baissée. - Alors le Seigneur adressa sa parole à Elie de Thesbé, et lui dit : - N'as-tu pas vu Achab humilié devant moi ? Puis donc qu'il s'est humilié à cause de moi, je ne ferai point tomber sur lui, pendant qu'il vivra, les maux dont je l'ai menacé ; mais sous le règne de son fils, je les ferai tomber sur sa maison. "
8. I Chroniques, X, 10-12 : " Ils consacrèrent les armes de Saül dans le temple de leur Dieu Astharoth, et suspendirent sa tête dans le temple de Dagon. - Quand les habitants de Jabès de Galaad eurent appris tout ce que les Philistins avait fait contre Saül, - les plus courageux d'entre eux se levèrent et enlevèrent les corps de Saül et de ses enfants, et les apportèrent à Jabès. Ils enterrèrent leurs os sous le chêne qui était à Jabès, et ils jeûnèrent pendant sept jours. "
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9. II Chroniques, XX, 1-6 : " Ensuite les Moabites et les Ammonites, avec leurs alliés s'assemblèrent contre Josaphat pour lui faire la guerre. - Des courriers vinrent en apporter la nouvelle à Josaphat, et lui dirent : Voici une grande multitude qui vient contre vous des lieux qui sont au-delà de la mer et de la Syrie ; et ils sont campés à Asasonthamar, qui est Engaddi. - Alors Josaphat, saisi de crainte, s'appliqua entièrement à prier le Seigneur, et fit publier un jeûne dans tout le royaume de Juda. - Tout Juda s'assembla pour implorer l'assistance du Seigneur ; et tous sortirent de leurs villes pour venir lui offrir leurs prières. - Et Josaphat, debout au milieu de cette multitude dans la maison du Seigneur, devant le nouveau parvis, - dit : Seigneur, qui êtes le Dieu de nos pères vous êtes le Dieu du ciel, etc. "
10. ESDRAS, VIII, 21-23 : " Or, je publiai le jeûne, près du fleuve Abava, afin de gémir devant le Seigneur notre Dieu, et de lui demander de nous conduire heureusement dans notre chemin, nous, nos enfants et tout ce que nous portions avec nous. - Car j'eus honte de demander au roi une escorte de cavaliers pour nous défendre de nos ennemis pendant le chemin, parce que nous avions dit au roi : La main de notre Dieu est sur tous ceux qui le cherchent sincèrement et son empire, sa puissance et sa fureur éclatent sur tous ceux qui l'abandonnent. - Nous jeûnâmes donc, et nous fîmes notre prière à notre Dieu, et tout nous réussit. "
11. NEHEMIE, I, 1-5 : " Paroles de Néhémias, fils de Helchias. Et il arriva au mois de Casleu, dans la vingtième année, lorsque j'étais dans le château de Suse. - Hanani, l'un de mes frères, vint me trouver, lui et quelques hommes de Juda, et je les interrogeai sur ceux des Juifs qui étaient restés de la captivité et qui vivaient encore, et sur Jérusalem. - Et ils me répondirent : Ceux qui sont restés et qui ont été laissés de la captivité dans la province, sont dans une grande affliction et dans l'opprobre. Les murailles de Jérusalem sont tombées et ses portes ont été consumes par le feu. Lorsque j'eus entendu ces paroles, je m'assis, je pleurai et je demeurai tout triste pendant plusieurs jours ; je jeûnai et je priai en la présence du Dieu du ciel. - Et je dis : Seigneur, Dieu du ciel, fort, grand et terrible, qui gardez l'alliance et la miséricorde à ceux qui vous aiment et qui observent vos commandements, etc. "
12. JOEL, II, 12-19 : " Maintenant donc, dit le Seigneur, convertissez-vous à moi de tout votre cœur, dans les jeûnes, dans
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les larmes et dans les gémissements. - Déchirez vos cœurs, et non vos vêtements, et convertissez-vous au Seigneur votre Dieu, parce qu'il est bon et compatissant, qu'il est patient et riche en miséricorde et qu'il peut se repentir du mal dont il vous a menacé. - Qui sait s'il ne se retournera point vers nous, s'il ne nous pardonnera point, et si, après nous avoir affligés, il ne nous comblera point de ses bénédictions, afin que vous présentiez au Seigneur votre Dieu vos sacrifices et vos offrandes ? Faites retentir la trompette en Sion ; ordonnez un jeûne public ; convoquez une assemblée solennelle. - Réunissez tout le peuple, avertissez-le qu'il se purifie, assemblez les vieillards, amenez les enfants et ceux qui sont encore à la mamelle ; que l'époux sorte de sa couche, et l'épouse de son lit nuptial. - Que les prêtres et les ministres du Seigneur pleurent entre le vestibule et l'autel, et qu'ils s'écrient : Pardonnez, Seigneur, pardonnez à votre peuple, et ne permettez pas que votre héritage soit livré à l'opprobre et aux insultes des nations ; souffrirez-vous qu'on dise parmi les peuples : Où est leur Dieu ? Le Seigneur a été saisi d'un amour jaloux pour sa terre, il a pardonné à son peuple. - Le Seigneur a parlé à son peuple, et lui a dit : Voilà que je vous enverrai du blé, du vin et de l'huile, et vous en serez rassasiés ; et je ne vous abandonnerai plus aux insultes des nations, etc. "
13. Id., I, 14 : " Ordonnez un jeûne saint, convoquez l'assemblée, faites venir les anciens et tous les habitants du pays, en la maison du Seigneur votre Dieu, et écriez-vous vers le Seigneur. "
14. DANIEL, IX, 3-4, 21-24 : " Et je tournai mon visage vers le Seigneur mon Dieu, pour le supplier et le conjurer dans les jeûnes, le sac et la cendre. - Et je priai le Seigneur mon Dieu, et je confessai mes fautes, et je lui dis : - Ecoutez, Seigneur, Dieu grand et terrible, qui gardez votre miséricorde à ceux qui vous aiment et qui observent vos commandements, etc. - Je n'avais pas achevé ma prière que Gabriel, que j'avais vu au commencement de ma vision, vola tout-à-coup à moi, et me toucha au temps du sacrifice du soir. - Il m'instruisit, me parla et me dit : Daniel, je suis venu maintenant afin de t'enseigner et de te donner l'intelligence. - Dès le commencement de ta prière j'ai reçu cet ordre, et suis venu pour te découvrir toutes choses, parce que tu es un homme de désirs : sois donc attentif à ce que je vais te dire, et comprends cette vision. - Dieu a réduit le temps à soixante-dix semaines en faveur de ton peuple
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et de la ville sainte, afin que les prévarications soient abolies, etc. "
15. Id., X, 2-4, 10-12, 14 : En ces jours-là, moi Daniel, je fus dans les pleurs tous les jours pendant trois semaines. - Je ne mangeais d'aucun pain agréable au goût ; ni chair, ni vin n'entra dans ma bouche ; je ne répandis sur moi aucun parfum, jusqu’à ce que les jours de ces trois semaines fussent remplis. - Or, le vingt-quatrième jour du premier mois, j'étais près du grand fleuve du Tigre, etc. - Et voilà qu'une main me toucha, et me dressa sur mes genoux et sur les articulations de mes mains, - et j'entendis ces mots : Daniel, homme de désirs, écoute les paroles que je viens te dire, et tiens-toi debout ; car je suis présentement envoyé vers toi. Et après que ces paroles eurent été prononcées, je me levai tout tremblant, - et la même voix me dit : Ne crains pas, Daniel ; car dès le premier jour où tu as appliqué ton cœur à comprendre en t'affligeant en présence de ton Dieu, tes paroles ont été exaucées, et je suis venu à ta prière. . . - Et je suis venu pour t'apprendre ce qui doit arriver à ton peuple, dans les derniers jours ; car cette prédiction est encore pour les jours éloignés. "
16. JONAS, III, 3-10 : " Et Jonas se leva, et se rendit à Ninive selon l'ordre du Seigneur. Ninive était une grande ville, de trois journées de chemin. - Jonas y étant entré, y marcha pendant un jour, et cria en disant : Encore quarante jours, et Ninive sera détruite. - Les Ninivites crurent au Seigneur ; ils ordonnèrent un jeûne public, et se couvrirent de cilices depuis le plus grand jusqu'au plus petit. - Cette nouvelle ayant été portée au roi de Ninive, il se leva de son trône, quitta ses habits, se couvrit d'un sac et s'assit sur la cendre. - Ensuite il fit crier partout et publier dans Ninive cet ordre de la bouche du roi et des grands : Que ni les hommes, ni les bêtes, ni les bœufs, ni les brebis, ne prennent de nourriture, ni n'entrent dans les pâturages, ni ne boivent d'eau. - Que les hommes, aussi bien que les bêtes soient couverts de sacs, que leurs cris s'élèvent vers le Seigneur, que chacun se convertisse et quitte sa mauvaise voie, ainsi que l'iniquité dont ses mains sont souillées. - Qui sait si Dieu ne se retournera pas vers nous pour nous pardonner, s'il n'apaisera pas sa colère, et s'il ne révoquera pas l'arrêt de notre perte ? - Et Dieu considéra leurs œuvres, et voyant qu'ils s'étaient convertis en quittant leur voie criminelle, il eut pitié d'eux, et ne leur envoya point les maux qu'il avait résolu de leur envoyer. "
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17. I Rois, XIX, 5-8 : " Elie se jeta par terre, et s'endormit à l'ombre du térébinthe. - En même temps un ange le toucha, et lui dit : Levez-vous, et mangez. - Elie regarda, et vit auprès de sa tête un pain cuit sous la cendre et un vase d'eau. Il mangea donc et but, et il s'endormit encore. - L'ange du Seigneur revenant une seconde fois, le toucha de nouveau et lui dit : Levez-vous, et mangez, car il vous reste un grand chemin à faire. - Et s'étant levé, il mangea et but ; et, fortifié par cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à Horeb, montagne de Dieu. "
18. Exode, XXIV, 15-18 : " Et lorsque Moïse fut monté, la nuée couvrit la montagne ; - et la gloire du Seigneur reposa sur le mont Sinaï, l'enveloppant d'une nuée pendant six jours, et le septième jour Dieu appela Moïse du milieu de cette nuée. - Or, la gloire du Seigneur apparaissant au sommet de la montagne, était comme un feu ardent devant les yeux de tous les enfants d'Israël. - Et Moïse entrant dans la nuée, monta sur la montagne, et y demeura quarante jours et quarante nuits. "
19. Ibid., XXXIV, 27-28 : " Le Seigneur dit encore Moïse : Ecris toutes ces paroles, par lesquelles j'ai fait alliance avec toi et avec Israël. - Moise demeura donc quarante jours et quarante nuits avec le Seigneur sur la montagne ; il ne mangea pas même de pain, ni ne but pas même d'eau, et le Seigneur écrivit sur les tables les dix paroles de l'alliance. "
20. Deutéronome, IX, 8-11, 15-19 : " Car vous l'avez irrité dès le temps que nous étions à Horeb, et, dans sa colère il voulut vous perdre dès-lors ; - quand je montai sur la montagne pour y recevoir les tables de pierre, les tables de l'alliance que le Seigneur fit avec vous ; et je demeurai sur cette montagne pendant toute la durée de quarante jours et de quarante nuits, sans manger même de pain, et sans boire même d'eau. - Et le Seigneur me donna deux tables de pierre écrite du doigt de Dieu, qui contenaient toutes les paroles qu'il vous avait dites du haut de la montagne, du milieu du feu, lorsque tout le peuple était assemblé. - Après que les quarante jours et les quarante nuits furent écoulées le Seigneur me donna les deux tables de pierre, les tables de l'alliance. . . - Et comme je descendais de cette montagne ardente, tenant dans mes deux mains les deux tables de l'alliance, - je vis que vous aviez péché contre le Seigneur votre Dieu, et que vous vous étiez fait un veau de fonte,
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et que vous aviez abandonné bientôt la voie qu'il vous avait montrée. - Et je jetai de mes mains les tables, et les brisai à vos yeux ; - et je me prosternai devant le Seigneur comme auparavant, durant quarante jours et quarante nuits, sans manger de pain et sans boire d'eau, à cause de tous les péchés que vous aviez commis devant le Seigneur, et par lesquels vous aviez provoqué sa colère. - Car je craignais l'indignation et la fureur qu'il avait conçu contre vous, et qui le portait à vouloir vous exterminer. - Et le Seigneur m'exauça encore cette fois. "
21. MATTHIEU, IV, 2 : " Et après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim. "
22. LUC, IV, 1-2 : " Or, Jésus, plein du Saint-Esprit, revint des bords du Jourdain, et fut poussé par l'Esprit dans le désert - où il demeura quarante jours, et fut tenté par le diable, et il
ne mangea rien pendant tout ce temps-là ; et lorsque ces jours furent passés, il eut faim. "
23. MATTHIEU, XVII, 18-20 : " Alors les disciples s'approchèrent secrètement de Jésus et lui dirent : Pourquoi n'avons-nous pu chasser ce démon ? - Jésus leur répondit : A cause de votre incrédulité ; car je vous le dis en vérité : si vous aviez seulement un grain de foi comme qui dirait un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : Transporte-toi d'ici là, et elle s'y transporterait ; et rien ne vous serait impossible. - Mais on ne chasse ces démons que par la prière et le jeûne. "
24. MARC, IX, 27-28 : " Jésus étant rentré dans une maison, ses disciples lui dirent en secret : D'où vient que nous n'avons pu chasser ce démon ? - Et il leur répondit : Ces sortes de démons ne sont chassés que par la prière et le jeûne. "
23. II Corinthiens, XI, 25-27 : " J'ai été trois fois battu de verges, j'ai été lapidé une fois, j'ai fait trois fois naufrage, j'ai passé un jour et une nuit au fond de la mer. - J'ai été souvent en péril dans les voyages, sur les fleuves, etc. - J'ai enduré toutes sortes de travaux et de fatigues, des veilles fréquentes, la faim, la soif, des jeûnes multipliés, le froid et la nudité. "
26. Psaume CI, 10 : " Je mangeais la cendre avec mon pain ; je mêlais mes larmes avec mon breuvage. "
27. Psaume XXXIV (comme dans le corps de la réponse).
28. LUC, V, 34-35 : " Il leur répondit : Pouvez-vous faire jeûner les amis de l'époux, tandis que l'époux est avec eux ? - Mais les jours viendront où l'époux leur sera enlevé, et en ces jours-là ils jeûneront. "
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29. MARC, II, 20 : " Il viendra un temps où l’époux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront. "
30. MATTHIEU, IX, 15 : " Et Jésus leur dit : Les amis de l'époux peuvent-ils dire qu'ils soient dans le deuil, tant que l'époux est avec eux ? Mais il viendra un temps où l'époux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront. "
31. Actes, XIII, 1-4 : " Il y avait alors dans l'Eglise d'Antioche des prophètes et des docteurs, entre lesquels étaient Barnabé Simon surnommé le Noir, Lucius de Cyrène, Manahem, frère de lait d'Hérode le Tétrarque et Saul. Or, pendant qu'ils rendaient leur culte au Seigneur, et qu'ils jeûnaient, le Saint-Esprit leur dit : Séparez-moi Saul et Barnabé pour l'œuvre à laquelle je les ai destinés. - Alors, après avoir jeûné et prié, ils leur imposèrent les mains, et les laissèrent partir. - Et étant ainsi envoyés par le Saint-Esprit, ils allèrent à Séleucie et de là ils firent voile vers l'île de Chypre. "
32. Ibid., XIV, 19-22 : " Mais les disciples s'étant assemblés autour de lui, il se leva et rentra dans la ville, et le lendemain il partit pour Derbé avec Barnabé. - Après avoir évangélisé cette ville, et y avoir instruit plusieurs personnes, ils retournèrent à Lystre, A Icône et à Antioche, - encourageant les disciples, et les exhortant à persévérer dans la foi. Car c'est par beaucoup d'afflictions, leur disaient-ils, qu'il nous faut entrer dans le royaume de Dieu. - Ayant ensuite ordonné des prêtres en chaque Eglise, au milieu des prières et des jeûnes, ils les recommandèrent au Seigneur qui leur avait accordé la grâce de croire en lui. "
33. II Corinthiens, VI (comme dans le corps de la réponse).
34. LUC, II, 36-37 : " II y avait aussi une prophétesse nommée Anne, fille de Phanuel, de la tribu d'Aser : elle était fort avancée en âge, et avait vécu sept ans avec son mari depuis sa virginité. - Et elle était demeurée veuve jusqu’à quatre-vingt-quatre ans ; elle ne s'éloignait point du temple, et servait Dieu jour et nuit dans les jeûne et les prières. "
35. MATTHIEU, VI, 1, 16-18 : " Prenez garde de faire vos bonnes œuvres devant les hommes, pour en être regardés autrement, vous n'en recevrez aucune récompense de votre Père céleste. - Mais lorsque vous jeûnez, ne vous montrez pas tristes comme font les hypocrites, qui affectent de paraître avec un visage exténué pour faire voir aux hommes qu'ils jeûnent : je vous dis en vérité qu'ils ont reçu leur récompense. - Mais
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lorsque vous jeûnez, parfumez votre tête, lavez votre visage, - afin de ne pas faire voir aux hommes que vous jeûnez, mais à votre Père qui voit ce qu'il y a de plus secret, et votre Père qui voit dans le secret, vous en rendra la récompense. "
36. Tobie, III, 7-11 : " En ce même jour il arriva que Sara, fille de Raguel, en Ragès, ville des Mèdes, fut émue d'un reproche que lui fit une des servantes de son père. - Elle avait déjà épousé sept hommes, et un démon nommé Asmodée les avait tués aussitôt qu'ils s'étaient approchés d’elle. - Comme elle reprenait cette servante pour une faute, celle-ci lui répliqua : Que jamais nous ne voyions de toi ni fils ni fille sur la terre, meurtrière de tes maris ! - Ne veux-tu pas me tuer aussi, comme tu as déjà tué sept maris ? A cette parole, Sara monta dans une chambre au plus haut de la maison, où elle demeura trois jours et trois nuits sans boire ni manger. - Et persévérant dans la prière, elle demandait à Dieu avec larmes qu'il la délivrât de cet opprobre. "
37. Judith, IV, 7-17 : " Et les enfants d'Israël exécutèrent l'ordre qui leur avait été donné par Eliachim, grand-prêtre du Seigneur. - Et tout le peuple cria vers le Seigneur avec une grande instance ; et tous, hommes et femmes, humilièrent leurs âmes dans les jeûnes et les prières. - Et les prêtres se revêtirent de cilices, et les enfants se prosternèrent devant le temple du Seigneur ; et on couvrit d'un cilice l'autel du Seigneur. - Et ils crièrent tous d'un même cœur et d'un même esprit vers le Seigneur, Dieu d'Israël, afin qu'il ne permît pas que leurs enfants fussent donnés en proie, leurs femmes enlevées et dispersées, leurs villes détruites, leur sanctuaire profané et eux-mêmes devenus l'opprobre des nations. - Alors Eliachim, le grand-prêtre du Seigneur, parcourut tout Israël et parla au peuple en disant : Sachez que le Seigneur vous exaucera, si vous persévérez dans le jeûne et la prière devant le Seigneur. - Souvenez-vous de Moïse, serviteur de Dieu, qui en combattant non avec le fer, mais par de saintes prières, vainquit Amalec qui se confiait en sa puissance, en son courage, en son armée, en ses boucliers, en ses chars et en ses cavaliers. - Il en sera ainsi de tous les ennemis d'Israël si vous persévérez dans l'œuvre que vous avez commencée. - Le peuple, touché de cette exhortation, priait le Seigneur et persévérait en sa présence. - Et ceux qui offraient des holocaustes au Seigneur étaient eux-mêmes couverts de cilices en présentant les victimes, et la cendre était sur leurs
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têtes. - Et ils priaient Dieu de tout leur cœur, qu'il daignât visiter son peuple d'Israël. "
38. Id., VIII, 4-6 : Et Judith était restée veuve depuis trois ans et six mois. - Et elle s'était réservée au plus haut de sa maison une chambre secrète où elle demeurait enfermée avec les filles qui la servaient. - Et ayant un cilice sur les reins, elle jeûnait tous les jours de sa vie, hormis les jours de sabbat et de nouvelle lune, et les fêtes de la maison d'Israël. "
39. Esther, IV, 1-3, 15-17 : " Mardochée ayant appris ces choses, déchira ses vêtements, se couvrit d'un sac, et mit de la cendre sur sa tête ; et jetant de grands cris au milieu de la place de la ville, il faisait comprendre à tous l'amertume de son âme. Il vint donc en se lamentant jusqu’à la porte du palais ; car il n'était pas permis d'entrer revêtu d'un sac dans le palais du roi. - Dans toutes les provinces et dans toutes les villes, et dans tous les lieux où le cruel édit du roi était parvenu, le deuil était grand parmi les Juifs : ce n'était que jeûnes que larmes, que gémissements, et la plupart n'avaient plus pour couche que le sac et la cendre. . . - Esther envoya faire cette réponse à Mardochée : - Allez, assemblez tous les Juifs que vous trouverez dans Suze ; et priez tous pour moi ; passez trois jours et trois nuits sans boire ni manger ; je jeûnerai également avec les filles qui me servent ; et après cela j'entrerai chez le roi sans y être appelé, malgré la loi qui le défend, m’exposant ainsi au péril et à la mort. - Et Mardochée se mit en marche et fit tout ce qu'Esther lui avait demandé. "
40. Id., XIV, 1-3 : " La reine Esther eut aussi recours au Seigneur, effrayée du péril qui menaçait de prés son peuple. - Et ayant quitté tous ses ornements de reine, elle prit des vêtements conformes à son affliction et à ses larmes ; et en place de parfums, elle se couvrit la tête de cendre et de poussière : elle affligea son corps par les jeûnes, et s'arrachant les cheveux, elle en remplit tous les lieux où elle avait coutume auparavant de se récréer. - Et elle suppliait le Seigneur Dieu d'Israël, etc. "
41. JEREMIE, XXXVI, 8-10 : " Baruch, fils de Nérias, exécuta tout ce que le prophète Jérémie lui avait ordonné ; et il lut dans ce livre les paroles du Seigneur dans la maison du Seigneur. - La cinquième année de Joachim, fils de Josias, roi de Juda, au neuvième mois, on publia un jeûne devant le Seigneur tout le peuple de Jérusalem et à tous ceux qui étaient venus en foule à Jérusalem de toutes les villes de Juda. - Et Baruch lut dans le
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livre les paroles de Jérémie dans la maison du Seigneur, en la chambre du trésor, où demeurait Gamarias, fils de Saphan, docteur de la loi, dans le vestibule supérieur, à l’entrée de la porte neuve de la maison du Seigneur, en présence de tout le peuple. "
42. BARUCH, I, 3-5 : " Baruch lut les paroles de ce livre devant Jéchonias, fils de Joachim, roi de Juda, et devant tout le peuple qui était accouru pour en entendre la lecture, devant les grands, devant les enfants des rois, devant les anciens, enfin devant tous les gens du peuple, depuis le plus petit jusqu'au plus grand de ceux qui habitent à Babylone, près du fleuve de Sodi. - Et entendant cette lecture, ils pleurèrent tous, ils jeûnèrent et ils prièrent devant le Seigneur. "
43. I Machabées, III, 44-53 : " Ils s'assemblèrent donc tous pour se préparer au combat, et pour prier le Seigneur et implorer sa bonté et ses miséricordes. - Jérusalem n’était point alors habitée, mais paraissait comme un désert ; aucun de ses enfants n'y entrait ou en sortait ; son sanctuaire était foulé aux pieds ; les fils des étrangers demeuraient dans la forteresse, devenue ainsi un lieu de retraite pour les nations ; toute joie était bannie de Jacob, et on n'entendait plus dans le pays le son de la flûte pas plus que celui de la harpe. - Ils s'assemblèrent donc, et vinrent à Maspha, vis-à-vis de Jérusalem, parce qu'il y avait eu autrefois à Maspha un lieu de prière pour Israël. - Et ils jeûnèrent ce jour-la, se revêtirent de cilices, se mirent de la cendre sur la tête et déchirèrent leurs vêtements - Et ils ouvrirent les livres de la loi, où les gentils cherchaient à trouver quelque chose qui eût rapport à leurs idoles. - Et ils apportèrent les ornements sacerdotaux et les prémices et les dîmes, et firent venir les Nazaréens qui avaient accompli leurs jours. - Et élevant leurs voix, ils crièrent vers le ciel en disant : Que ferons-nous à ceux-ci, et où les emmènerons-nous ? - Seigneur, votre sanctuaire a été souillé et foulé aux pieds ; vos prêtres sont dans les larmes et l'humiliation. - Et voilà que les nations se sont assemblées pour nous perdre ; vous savez ce qu'elles méditent contre nous. - Comment pourrons-nous subsister devant eux, si vous-même, ô Dieu, ne nous assistez ? "
44. Ibid., IV, 43-46 : " Et ils sortirent de leurs camps pour les combattre ; et ceux qui étaient avec Judas sonnèrent de la trompette. - Et ils en vinrent aux mains, et les troupes des nations furent battues, et elles s'enfuirent dans la plaine. - Les
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derniers furent tous taillés en pièces, et Judas avec ses gens les poursuivit jusqu’à Gézéron et jusqu'aux champs de l'Idumée, d'Azoth et de Jamnia ; et il en demeura trois mille étendus morts. - Et Judas revint avec son armée, qui le suivait. "
43. II Machabées, XIII, 9-16 : " Cependant le roi Antiochus s'avançait plein de fureur, dans le dessein de se montrer encore plus violent que son père envers les Juifs. - Judas, en ayant été averti, commanda au peuple de prier le Seigneur jour et nuit, afin qu'il les assistât comme il l'avait toujours fait : - car ils avaient à craindre l'abolition de leur loi, la perte de leur patrie et du temple saint. Et il demandait Dieu qu'il ne permît pas que son peuple, qui ne faisait encore que de commencer à respirer, fût assujetti de nouveau aux nations qui blasphémaient son nom. - Tous firent conjointement ce qu'il leur avait ordonné, et continuellement prosterné pendant trois jours, ils implorèrent la miséricorde de Dieu dans les larmes et dans les jeûnes. Alors Judas leur dit de se tenir prêts ; - et après avoir consulté les anciens, il résolut de se mettre en marche avant que le roi eût fait entrer ses troupes dans la Judée et se fût rendu maître de la ville, et d'abandonner au jugement du Seigneur le succès de cette entreprise. - Remettant donc tout au pouvoir de Dieu, créateur de l'univers, et exhortant ses gens à combattre avec courage et jusqu’à la mort pour la défense de leurs lois, de leur temple, de leur ville, de leur patrie et de leurs concitoyens, il fit camper son armée près de Modin. - Et après avoir donné pour signal aux siens la victoire de Dieu, et pris avec lui les plus braves d'entre les jeunes gens, il attaqua de nuit le quartier du roi, et tua dans son camp quatre mille hommes, et le plus grand des éléphants avec tous les combattants qui étaient dessus. - Ayant ainsi rempli tout le camp des ennemis de trouble et d'effroi, contents de ce succès, ils s'en retournèrent. "
46. Galates, V (comme dans le corps de la réponse).
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. GREGOIRE-LE-GRAND, Hom. XVI in Evangelia : " Sanctifiez le jeûne. Sanctifier le jeûne c'est rendre son abstinence agréable à Dieu par les bonnes œuvres dont on l'accompagne. Qu'on réprime la colère, qu'on étouffe les querelles et les différends. En vain mortifie-t-on la chair, si l'âme ne renonce en même temps à ses mouvements emportés. "
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2. MAXIME, Hom. I de jejunio Quadragesimâ : " Sanctifions nos jeûnes par des actes de religion. Qu'est-ce que sanctifier le jeûne, sinon en relever le mérite par de saintes affections, par des actes de piété et par la fuite de vice ? Celui-là sanctifie ses jeûnes qui ne se laisse détourner du droit sentier de la justice, ni par l'envie de plaire aux hommes puissants, ni par le désir d’être utile à ses amis ou à ses proches, ni par les présent modiques ou considérables que peuvent lui offrir ses clients. Celui-là sanctifie le jeûne qui ne met pas à prix sa fidélité aux devoirs de justice. Celui-là sanctifie le jeûne qui éteint en lui-même le feu de la colère par sa constance à suivre les règles de la douceur. Celui-là sanctifie le jeûne, qui oppose le frein de la chasteté à la tentation de permettre à ses yeux des regards lascifs. Il sanctifie le jeûne, celui qui sait émousser les traits que lui lancent ses ennemis, en opposant à leurs injures le bouclier de la patience. Il sanctifie le jeûne, celui qui apaise les disputes par des paroles pacifiques et par la sage modération de son langage. Il sanctifie le jeûne, celui qui, s'armant des instructions que fournit l’Evangile, extirpe de son cœur les pensées vaines, comme un laboureur arrache avec le soc de sa charrue les épines qui voudraient prendre racine dans son champ. Il sanctifie le jeûne, celui qui allège à proportion de ses moyens les besoins des indigents, en leur tendant avec amour une main secourable. Celui-là enfin sanctifie le jeûne qui, attentif d’observer tous les points de la loi divine, repousse de son cœur les diverses tentations dont l'assaille le démon. Si donc nous voulons, mes frères, rendre nos jeûnes agréables à Dieu, soyons fermes dans la foi, justes dans nos jugements, fidèles dans l'amitié, patients dans les injures, modérés dans la défens de nos intérêts, ennemis des mauvais discours, invincibles contre le vice, sobres dans les repas, modérés dans les plaisirs, simples à l'égard des bons, prudents à l'égard des méchants, compatissants pour ceux qui souffrent, sans faiblesse pour ceux qui résistent à la vérité, réservés dans nos soupçons, silencieux avec les médisants, humbles avec les humbles. Si nous nous appliquons à sanctifier nos jeûnes par l'exercice de toutes ces vertus, Dieu nous fera la grâce d'entrer pleins de confiance, et avec la joie d'une conscience pure, en participation des grâces que la Pâque nous offrira, gages précieux et assurés des biens et de la félicité du ciel. "
3. S. AUGUSTIN, Serm. 60, 62, 69, de tempore ; voir ces
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passages rapportés plus haut, question précédente, témoignages 57, 58, 61, pages 420 et 424.
4. Le même, Serm. 230 (Ce sermon n'est pas de saint Augustin. V. NAT. ALEX, Hist. eccl., tome V, p. 112, édit. de Venise) de tempore : " Faisons bien attention à la nature des armes dont Notre-Seigneur nous recommande l'emploi contre les démons. Ce genre de démons, nous dit-il, ne peuvent être chassés que par la prière et par le jeûne. Pratiquons ces deux moyens avec une vive foi ; c'est dans cette pratique que consiste la piété. Or, la piété est utile à tout ; c'est d elle qu'ont été promis les biens de la vie présente comme ceux de la vie future (I Cor, IV, 8). Appliquons-nous donc à amasser les fruits que produiront en nous la prière et le jeûne ; l'un et l'autre nous fourniront en même temps des armes contre les mauvaises pensées. Le jeûne purifie l'âme, épure les sens, soumet la chair à l'esprit. Le jeûne rend le cœur contrit et humilié et ce n'est pas le cœur ainsi disposé que Dieu méprisera (Ps. L, 19). Le cœur dissipe les tempêtes que soulèveraient les passions, amortit les ardeurs de la volupté, fait briller la chasteté de tout son éclat. Le jeûne ne s'accommode pas du flux de paroles, dédaigne les richesses comme des biens superflus, n'a que du mépris pour l'orgueil, réserve pour l'humilité toute son estime, donne à celui qui le pratique la connaissance de lui-même, c'est-à-dire la connaissance de sa faiblesse et de sa fragilité, et par-là même qu'il se sent faible, le rend plus propre à obtenir, comme il le dispose davantage à demander le secours de Dieu. Or, c'est par des prières fréquentes et assidues qu'on peut utilement adresser à Dieu cette demande. "
5. S. BERNARD, Serm. IV in Quadragesimâ, comme plus haut, question précédente, témoignage 6, page 427.
6. S. JEREMIE, in caput VI Danielis, sur ces paroles. Et abiit rex in domum suam, et dormivit incœnatus (DAN., VI, 18) : " Combien le roi n'était-il pas attaché à Daniel, pour se priver de nourriture le jour et la nuit, et pour n'accorder à ses yeux aucun sommeil, tant que la vie du prophète étai en péril. Or, si un prince qui ne connaît pas le vrai Dieu témoigna ainsi son affection pour un de ses serviteurs, qu'il voudrait voir hors de danger, à combien plus forte raison ne devons-nous pas solliciter la clémence de Dieu par nos jeûnes et par nos veilles, pour obtenir de lui le pardon de nos péchés. "
7. Le même, Lib. II adversus Jovinianum, c. 11; comme dans le
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corps de la réponse, et à la question précédente, témoignage 28, à commencer à ces mots : " L'Evangile nous présente, etc., " page 394 et suiv.
8. S. AUGUSTIN, Serm. 65 de tempore, comme plus haut, question précédente, témoignage 60, page 422.
9. S. CHRYSOSTOME, Hom. de Jonâ prophetâ : " L'ivresse et la luxure ont renversé les villes les plus fortes ; le jeûne les a relevées de leurs ruines. Daniel, après avoir jeûné a pu entrer sans crainte dans la fosse aux lions. . . "
" Admirez les avantages du jeûne et mettez tout
votre empressement à vous les procurer. Quand vous le voyez sauver
les trois jeunes hommes du milieu des flammes, protéger Daniel dans
la fosse aux lions, chasser l'esprit impur, faire révoquer à
Dieu ses propres arrêts, rendre la liberté aux captifs, quelle
serait votre folie de repousser ce qui serait pour vous la source de si
grands biens ? Vous direz peut- être que le jeûne diminue les
forces du corps. A cela je répondrai que, si l'homme extérieur
se détruit, l'homme intérieur se renouvelle de jour en jour
(II Cor., IV, 6). Bien plus, si vous voulez examiner la chose plus
à fond, vous trouverez que le jeûne contribue à augmenter
les forces du corps. Que si vous refusez de m'en croire là-dessus,
consultez les médecins, ils vous diront que la diète est
la mère de la santé. Car, ajoutent-ils, la goutte, les maux
de tête, les morts subites, etc., ont pour cause l'excès des
viandes et des plaisirs, qui jettent le désordre dans les organes
du corps et dans les opérations de l'âme. "
Article III. - DE LA PRIERE.
Question I
Qu’est-ce que la Prière ?
La Prière est un pieux mouvement de notre âme vers Dieu, pour lui demander avec foi ce qui peut être salutaire à nous-mêmes ou aux autres, pour lui rendre grâces de ses bienfaits, ou enfin pour rendre un hommage quelconque à cette suprême et éternelle majesté : de sorte qu'on peut rapporter la prière non-seulement les demandes faites à Dieu, mais encore l'adoration, l'oblation ou le sacrifice, l'invocation, la louange et l'action de grâces.
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Jésus-Christ, comme nous l'avons dit plus haut, nous a appris lui-même la manière de prier, en nous traçant à cet effet une formule particulière. Aucune pratique ne nous est d'ailleurs plus fortement recommandée dans l’Ecriture ; aucune n'est plus familière aux saints et à toutes les personnes qui font profession de piété, aucune dont l'obligation soit plus générale, plus fréquente, plus rigoureuse, plus indispensable pour toute la vie présente, que la prière dont nous traitons ici. Rien de plus digne de notre attention que cette parole : La prière de celui qui s'humilie pénétrera les nues ; et que cette autre : Il faut toujours prier : ce qu'il faut entendre d'une prière qui parte du cœur, d'une prière exempte d'hypocrisie et où l'on n'ait pas en vue les louanges des hommes, d'une prière enfin faite en esprit et en vérité.
D'ordinaire la prière affecte certaine posture du corps plus respectueuse, certains signes qui marquent les besoins de l'âme, et souvent elle est accompagnée de rites extérieurs. Tout cela est justifié par plusieurs exemples que nous offre l'Ecriture. Car Notre-Seigneur Jésus-Christ nous y est représenté priant son Père, tantôt avec les yeux élevés vers le ciel, tantôt en élevant sa voix, tantôt prosterné vers la terre. Nous y lisons ensuite que la prière de Daniel, comme celle des Ninivites, fut exaucée, parce que l'une et l'autre était accompagnée de jeûnes et qu'ils faisaient pénitence dans le sac et sur la cendre. Ce n'est pas non plus sans intention qu'il est dit du publicain, qu'il priait dans le temple humblement prosterné, les yeux baissés vers la terre, et en se frappant la poitrine. Quoique ces signes soient en eux-mêmes purement extérieurs et qu'ils puissent être pratiqués ou contrefaits par les impies, ils ne perdent pour cela rien de leur utilité, qui consiste en ce qu'ils réveillent l’attention de l'âme, la soutiennent, et aident par-là au culte intérieur. De plus ce sont des témoignages de foi, d'humilité et de piété qui ont pour effet d'inspirer l'édification non-seulement au prochain qui les a sous les yeux, mais encore à l'Eglise entière. "
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. Exode, XXXV, 20-21, 29 : " Alors toute l’assemblée des enfants d'Israël sortit de la présence de Moïse, - et ils offrirent au Seigneur avec une volonté prompte et dévouée les prémices de leurs biens pour tout ce qu'il y avait à faire au tabernacle du témoignage, et pour les vêtements sacrés, etc. - Les hommes et les femmes firent de bon cœur leurs offrandes pour les ouvrages que le Seigneur avait indiqués par le ministère de Moïse sous les enfants d'Israël firent ces offrandes au Seigneur avec une pleine volonté. "
2. II Chroniques, XXIX, 54 : " Ezéchias leur dit encore : Vous avez empli vos mains pour le Seigneur, approchez et offrez des victimes et des louanges dans la maison du Seigneur. Ainsi toute cette multitude offrit des hosties, des louanges et des holocaustes avec un cœur pieux. "
3. MATTHIEU, IV, 10 : " Alors Jésus lui dit : Retire-toi, Satan, car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul. "
4. MALACHIE, I, 11 : " Depuis le lever du soleil jusqu’à son coucher, mon nom est grand parmi les nations ; on me sacrifie en tout lieu, et on offre en mon nom une oblation pure, parce que mon nom est grand parmi les nations, dit le Seigneur des armées. "
5. ISAIE, LVI ; voir ce passage rapporté plus bas, témoignage 40.
6. JEAN, IV, 19-24 : " Cette femme lui dit : Seigneur, je vois que vous êtes un prophète. - Nos pères ont adoré sur cette montagne et vous vous dites que c'est dans Jérusalem qu'il faut
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adorer. - Jésus lui dit : Femme, croyez-moi, le temps va venir où vous n'adorerez le Père céleste, ni sur cette montagne, ni dans Jérusalem. - Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; pour nous, nous adorons ce que nous connaissons ; car le salut vient des Juifs. - Mais le temps vient, et il est déjà venu, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité : car ce sont là les adorateurs que le Père demande. - Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l'adorent l'adorent en esprit et en vérité. "
7. Romains, X, 12-14 : " Car il n'y a point de distinction entre le juif et le gentil, puisque tous n'ont que le même Seigneur, qui répand ses richesses sur tous ceux qui l'invoquent. - Car tous ceux qui invoquent le nom du Seigneur seront sauvés. - Mais comment l'invoqueront-ils, s'ils ne croient pas en lui ? Et comment croiront-ils en lui, s'ils n'en ont point entendu parler ? Et comment en entendront-ils parler, si personne ne leur prêche ? "
8. Psaume XVII, 4 : " Je bénis le Seigneur ; je l'invoque, et il me délivre de mes ennemis. "
9. Ps. CXLV, 4 : " Mon âme, bénit le Seigneur ; je bénirai le Seigneur tant que je vivrai ; je chanterai les louanges de mon Dieu jusqu’à mon dernier soupir. "
10. ISAIE, LVI, 7 : " Je les introduirai sur ma montagne sainte, et je réjouirai leurs cœurs dans ma maison de prière ; leurs holocaustes et leurs victimes me seront agréables sur mon autel : car ma maison sera appelée parmi tous les peuples une maison de prière. "
11. I Timothée, II, 1-3 : " Je vous conjure donc avant tout de faire des supplications, des prières, des demandes et des actions de grâces pour tous les hommes, - pour les rois et tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille en toute piété et honnêteté : car c'est une chose bonne et agréable à Dieu notre Sauveur. "
12 MATTHIEU, VI, 6-13 : " Lorsque vous vous voudrez prier, entrez dans votre chambre, et après en avoir fermé la porte, priez votre Père en secret, et votre Père qui voit tout ce qui se passe dans le secret vous en rendra la récompense. - Or, n’affectez pas en priant de parler beaucoup, comme font les païens qui croient que c'est à force de paroles qu'ils seront exaucés. - Ne vous rendez donc pas semblables à eux, car votre Père sait ce qui vous manque, avant que vous le lui demandiez. - Vous prierez donc ainsi : Notre Père qui êtes aux cieux, que votre nom
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soit sanctifié ; - que votre règne arrive ; que votre volonté soit faite en la terre comme au ciel. - Donnez-nous aujourd'hui notre pain qui est au-dessus de toute substance ; - et remettez-nous nos dettes, comme nous remettons à tous ceux qui nous doivent ; - et ne nous laissez pas succomber à la tentation, mais délivrez-nous du mal. Ainsi-soit-il. "
13. LUC, XI, 1-4 : " Un jour, comme il était en prières en un certain lieu, après qu’il eut cessé de prier, un de ses disciples lui dit : Seigneur, apprenez-nous à prier, comme Jean l'a enseigné à ses disciples. - Et il leur dit : Lorsque vous priez, dites : Notre Père, que votre nom soit sanctifié ; que votre règne arrive. - Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour ; remettez-nous nos offenses, comme nous remettons aussi nous-mêmes à tous ceux qui nous doivent ; et ne nous induisez point en tentation. "
14. Psaume CXL, 2 : " Que ma prière monte vers vous comme la fumée de l'encens ; que l'hommage de mes mains suppliantes soit accueilli comme le sacrifice du soir. "
15. Tobie, XII, 12 : " Tandis que vous priiez avec larmes, que vous ensevelissiez les morts, et que vous quittiez pour cela votre dîner, que vous cachiez les morts dans votre maison durant le jour, pour les ensevelir pendant la nuit, je présentais vos prières au Seigneur. "
16. Actes, X, 1-4 : " Il y avait à Césarée un homme nommé Corneille, qui était centenier dans une cohorte de la légion appelée l’Italienne. - Il était religieux et craignant Dieu, ainsi que toute sa famille; il faisait beaucoup d'aumônes au peuple, et priait Dieu sans cesse. - Cet homme, vers la neuvième heure du jour, vit clairement dans une vision un ange de Dieu qui se présenta devant lui, et qui lui dit : Corneille. - Et lui, le regardant, saisi de frayeur, lui répondit : Que voulez-vous, Seigneur ? Vos prières, lui dit l’Ange, et vos aumônes sont montées devant Dieu, et il s'est souvenu de vous. "
17. Exode, XXXII, 9-11, 14 : " Le Seigneur dit encore à Moïse : Je vois que ce peuple a la tête dure. - Laisse-moi donc faire, afin que mon indignation s'allume contre eux, et que je les extermine, et je te rendrai le chef d'un grand peuple. - Mais Moïse conjurait le Seigneur son Dieu, en disant : Seigneur, pourquoi votre colère s'allume-t-elle contre votre peuple, après que vous l'avez tiré de l’Egypte par la force et la puissance de votre bras ? etc. - Alors le Seigneur s'apaisa, et ne fit pas à son peuple le mal qu'il avait médité contre lui. "
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18. Psaume CV, 23 : Il allait les faire périr, si Moïse, son élu, ne s'était présenté sur la brèche devant lui pour apaiser sa colère. "
19. JEREMIE, VII, 16 : " Toi donc, n'entreprends point d'intercéder pour ce peuple, ni de me conjurer et de prier pour eux, et ne t'oppose pas à moi ; car je ne t'exaucerai point. "
20. Id., XXVII, 18 : " S'ils sont vraiment prophètes et que la parole du Seigneur soit en eux, qu'ils s'opposent au Seigneur des armées, afin que les vases qui ont été laissés en la maison du Seigneur, dans la maison du roi de Juda, dans Jérusalem, ne soient point transférés à Babylone. "
21. Ecclésiastique, XXXV, 20-21 : " Celui qui adore Dieu avec joie, lui sera agréable, et sa prière montera jusqu'aux nues. - La prière de l'homme qui s'humilie pénètre jusqu'au ciel ; et il ne se consolera point qu'elle n'ait été jusqu’à Dieu, et il ne se retirera point que le Très-Haut n'ait jeté sur lui son regard. "
22. Psaume CI, 18 : " Il a accueilli les vœux du pauvre abandonné, et il n'a pas rejeté son humble prière. "
23. Ps. XXXVI, 4-6 : " Mets tes délices dans le Seigneur, et il t'accordera ce que ton cœur désire. - Confie tes voies au Seigneur, et espère en lui, et il prendra ta cause en main. - Il fera briller ta justice comme la lumière et ton droit comme le soleil en son midi. - Demeure en paix devant le Seigneur ; sache le prier et l'attendre. "
24. Judith, IX, 16-17 : " Car votre puissance, Seigneur, n'est point dans la multitude ; votre volonté n'est point dans la force des chevaux, et dès le commencement les orgueilleux vous ont déplu ; mais toujours vous avez agréé les prières de ceux qui sont humbles et doux. - Dieu des cieux, créateur des eaux, maître de toute créature, exaucez-moi en ce moment que j'ai recours à vous dans ma misère et que je me repose en votre miséricorde. "
25. LUC, XVIII, 1 : " Il leur dit cette parabole, pour leur montrer qu'il faut toujours prier, et ne jamais cesser de le faire. "
26. Ecclésiastique, XVIII, 22-23 : " Que rien ne t'empêche de prier toujours, et ne cesse point de faire des progrès dans la justice jusqu’à la mort, parce que la récompense de Dieu demeure éternellement. - Avant la prière, prépare ton âme, et ne sois pas comme un homme qui tente Dieu. "
27. I Thessaloniciens, V, 17-18 : " Priez sans cesse. - Rendez
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grâces à Dieu en toutes choses ; car c'est là ce que Dieu veut que vous fassiez tous en Jésus-Christ. "
28. MATTHIEU, VI, 1, 5-6 : " Prenez garde de faire vos bonnes œuvres devant les hommes, pour en être regardés ; autrement, vous n'en serez point récompensés de votre Dieu qui est dans le ciel. - De même, lorsque vous priez, ne faites comme les hypocrites, qui affectent de prier en se tenant debout dans les synagogues et au coin des rues pour être vus des hommes ; je vous le dis en vérité, ils ont reçu leur récompense. - Mais pour vous, lorsque vous voudrez prier, entrez dans votre chambre, et, après en avoir fermé la porte, priez votre Père en secret, et votre Père qui voit ce qui se passe dans le secret, vous en rendra la récompense. "
29. JEAN, IV (comme ci-dessus, témoignage 6, page 454).
30. Id., XVII, 1 : " Apres que Jésus eut ainsi parlé, il leva les yeux au ciel et dit : Mon Père, l'heure est venue, glorifiez votre Fils, afin que votre Fils vous glorifie. "
31. Id., XI, 41 : " Jésus ayant levé les yeux au ciel, dit : Mon Père, je vous rends grâces, parce que vous m'avez entendu. "
32. MATTHIEU, XXIII, 46-50 : " Vers la neuvième heure, Jésus cria d'une voix forte, en disant : Eli, Eli, lama sabacthani, c'est-à-dire mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné ? - Mais Jésus, jetant encore un grand cri, expira. "
33. LUC, XXIII, 46 : " Jésus criant d'une voix forte, dit : Mon Père je remets mon esprit entre vos mains. "
34. MATTHIEU, XXVI, 39 : Et s’en allant un peu plus loin, il se prosterna le visage contre terre, priant en ces termes : Mon Père, que ce calice, s'il est possible, passe loin de moi ; mais cependant qu'il en soit, non comme je le veux, mais comme vous le voulez. "
35. MARC, XIV, 35 : " Et s'étant avancé un peu plus loin, il se prosterna contre terre, priant que, s'il était possible, cette heure s’éloignât de lui. "
36. LUC, XXII, 11-12 : " Ensuite il s’éloigna d’eux à la distance environ d'un jet de pierre, et s’étant mis à genoux, il priait. - En disant : Mon Père, si vous le voulez, témoignez de moi ce calice ; cependant que votre volonté se fasse, et non la mienne. "
37. DANEL, IX, 3 : " Et je tournai mon visage vers le Seigneur mon Dieu, pour le prier et le conjurer dans les jeûnes le sac et la cendre. "
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38. JONAS, III, 5-8 : " Les Ninivites crurent au Seigneur ; ils publièrent un jeûne, et se couvrirent de cilices, depuis le plus grand jusqu'au plus petit. - Cette nouvelle ayant été portée au roi de Ninive, il se leva de son trône, quitta ses habits, se couvrit d'un sac, et s'assit sur la cendre. - Ensuite il fit crier partout et publier dans Ninive cet ordre de la bouche du roi et de ses princes : Que les hommes et les animaux domestiques, les bœufs et les brebis ne mangent rien ; qu'on ne les même pas aux pâturages, et qu'ils ne boivent point d'eau. - Que les hommes se couvrent de cendre, et qu'ils en couvrent aussi les animaux ; qu'ils crient vers le Seigneur de toute leur force, etc. "
39. Judith, IV, 8-17 : " Tout le peuple ensuite cria vers le Seigneur avec une grande instance, et tous, hommes et femmes, humilièrent leurs âmes dans les jeûnes et les prières - Les prêtres se couvrirent de cilices, et on prosterna les enfants devant le temple du Seigneur ; et ils couvrirent d'un cilice l'autel du Seigneur. - Puis ils crièrent tous d'un même cœur et d'un même esprit vers le Seigneur Dieu d'Israël, afin qu'il ne permît pas que leurs enfants fussent donnés en proie, que leurs femmes fussent enlevées et dispersées, leurs villes détruites, leur sanctuaire profané, ni qu'eux-mêmes devinssent l'opprobre des nations. - Alors Eliacim, le grand-prêtre du Seigneur, alla dans tout le pays d'Israël et parla ainsi au peuple : - Sachez que le Seigneur vous exaucera, si vous persévérez tous les jours dans le jeûne et la prière devant le Seigneur. - Souvenez-vous de Moïse, serviteur de Dieu, qui en combattant, non avec le fer, mais par de ferventes prières, vainquit Amalec qui s'appuyait sur sa force et sa puissance, sur son armée, ses boucliers, ses chars et ses chevaux. - Il en sera ainsi de tous les ennemis d'Israël si vous persévérez dans l'œuvre que vous avez commencée. - Le peuple, touché de ces paroles, priait le Seigneur et demeurait toujours devant Dieu ; - en sorte que ceux mêmes qui offraient des holocaustes au Seigneur, étaient revêtus de cilices et avaient la tête couverte de cendre, en lui présentant leurs victimes. Et tous priaient Dieu de tout leur cœur qu'il lui plût de visiter son peuple d'Israël. "
40. Ibid., IX, 1-2 : " Lorsqu'ils se furent retirés, Judith entra dans son oratoire, et se revêtant d'un cilice, elle répandit de la cendre sur sa tête et se prosternant devant le Seigneur, elle criait vers lui en disant : - Seigneur, Dieu de mon père Siméon, qui lui avez mis le glaive entre les mains pour tirer vengeance
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des étrangers qui, transportés d’une passion impure, avaient violé une vierge, et l'avaient couverte de confusion en lui faisant outrage, etc. "
41. I Machabées, III, 46-47 : " Ils s'assemblèrent donc et vinrent à Maspha, vis-à-vis de Jérusalem, parce qu'il y avait eu autrefois à Maspha un lieu de prière dans Israël. - Ils jeûnèrent ce jour-là, se revêtirent de cilices, se mirent de la cendre sur la tête et déchirèrent leurs vêtements. "
42. LUC, XVIII, 13-14 : " Le publicain, au contraire, se tenant éloigné, n'osait pas même lever les yeux au ciel ; mais il frappait sa poitrine en disant : Mon Dieu, ayez pitié de moi, qui suis un pécheur. - Je vous déclare que celui-ci s'en retourna chez lui pleinement justifié, et non pas l'autre, car celui qui s'élève sera humilié, et celui qui s'humilie sera élevé. "
43. Exode, IX, 28-29, 33 : " Priez le Seigneur que le tonnerre et la grêle cesse, et je vous laisserai partir, et vous ne demeurerez plus ici. - Moïse répondit : Quand je serai sorti de la ville, j'élèverai mes mains vers le Seigneur ; et le tonnerre cessera, et il n'y aura plus de grêle, afin que vous sachiez que la terre est au Seigneur. - Après que Moïse eut quitté Pharaon, et fut sorti de la ville, il éleva les mains vers le Seigneur, et le tonnerre et la grêle cessèrent et la pluie ne tomba plus sur la terre. "
44. Ibid., XVII, 10-13 : " Josué fit ce que Moïse lui avait dit, et il combattit contre Amalec ; mais Moïse, Aaron et Hur montèrent sur le haut de la colline. - Et lorsque Moïse tenait ses mains élevées, Israël était victorieux ; mais lorsqu'il les abaissait un peu, Amalec avait l'avantage. - Cependant les mains de Moïse étaient fatiguées et devenues pesantes ; c'est pourquoi ils prirent une pierre qu'ils mirent sous lui ; il s'y assit, et Aaron et Hur lui soutenaient les mains des deux côtés. De cette manière ses mains ne se lassèrent point jusqu'au coucher du soleil. - Josué mit donc en fuite Amalec, et fit passer son peuple au fil de l'épée. "
45. Deutéronome, IX, 18, 25-26 : " Je me prosternai devant le Seigneur comme auparavant, sans boire ni manger pendant quarante jours, pour les péchés que vous aviez commis contre lui, et qui avaient excité sa colère contre vous. - Et je me prosternai durant quarante jours et quarante nuits devant le Seigneur, le priant et le conjurant de ne pas vous perdre, selon la menace qu'il en avait faite. - Et je lui dis dans ma prière, etc. "
46. Nombres, XX, 6 : " Moïse et Aaron ayant quitté le peuple,
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entrèrent dans le tabernacle de l'alliance ; et s'étant jeté le visage contre terre, ils crièrent vers le Seigneur, et lui dirent : Seigneur Dieu, écoutez le cri de votre peuple, et ouvrez-leur votre trésor, une fontaine d'eau vive, afin qu'étant désaltérés, ils cessent de murmurer. Alors la gloire du Seigneur apparut sur eux. "
47. Psaume LXXXVII, 10 : " Chaque jour, à mon Dieu, je vous appelle par mes cris ; j'étends vers vous mes mains suppliantes. "
48. Ps. CXL, 2 : " Que ma prière monte vers vous comme la fumée de l'encens ; que l'hommage de mes mains suppliantes soit accueilli de vous comme le sacrifice du soir. "
49. II Chroniques, VI, 12, 13-14 : " Salomon se tint donc devant l'autel du Seigneur, à la vue de toute l'assemblée d’Israël et il étendit ses mains. - Car il avait fait faire une espèce d'estrade d'airain, etc., et il se tint debout sur cette estrade ; puis il se mit à genoux tourné vers toute cette multitude, et les mains levées vers le ciel, il dit : Seigneur, Dieu d'Israël, etc. "
50. Ibid., XXIX, 20, 29 : " Le roi Ezéchias, se levant de grand matin, assembla les principaux de la ville, et monta à la maison du Seigneur, etc. - L'oblation finie, le roi se prosterna avec toute sa suite, et ils adorèrent. "
51. I Rois, VIII, 54 : " Salomon ayant achevé d'offrir au Seigneur cette oraison et cette prière, se leva de devant l'autel du Seigneur ; car il avait mis les deux genoux en terre, tenant
ses mains étendues vers le ciel. "
52. DANIEL, VI, 10 : " Daniel ayant appris que cette loi avait été portée, entra dans sa maison, et ouvrant les fenêtres de sa chambre du côté de Jérusalem, il fléchissait les genoux chaque jour à trois heures différentes, et il adorait son Dieu, et lui rendait comme auparavant ses actions de grâces. "
53. ESDRAS, IX, 5 : " Et lorsqu'on offrait le sacrifice du soir, je me relevai de mon affliction, et ayant mon manteau et ma tunique déchirée, je me mis à genoux, et j'étendis mes mains vers le Seigneur mon Dieu. "
54. MATTHIEU, II, 11 : " Etant entrés dans la maison, ils trouvèrent l'enfant avec Marie sa mère et s'étant prosternés, ils l'adorèrent. "
55. Actes, VII, 58-59 : " Et ils lapidaient Etienne qui priait et disait : Seigneur Jésus, recevez mon esprit. - Puis s'étant mis à genoux, il jeta un grand cri, en disant : Seigneur, ne leur imputez pas ce péché. "
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56. Ibid., IX, 40 : " Pierre ayant fait sortir tout le monde, se mit à genoux et pria ; puis s'étant tourné vers le corps, il dit : Tabithe, levez-vous. Celle-ci ouvrit les yeux, puis ayant vu Pierre, elle se mit sur son séant. "
57. Ibid., XX, 36 : " Paul ayant ainsi parlé, se mit à genoux et pria avec eux tous. "
58. Ibid., XXI, 5 : " Au bout de ces jours, nous partîmes, et ils vinrent tous, avec leurs femmes et leurs enfants, nous conduire jusque hors de la ville ; nous étant mis à genoux sur le rivage, nous priâmes. "
59. Ephésiens, III, 13-14 : " C'est pourquoi je vous prie de ne point perdre courage en me voyant souffrir tant de maux pour vous, puisque c'est là votre gloire. - Et c'est pourquoi je fléchis les genoux devant le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ. "
60. I Corinthiens, XI, 4-5, 13,16 : " Et tout homme qui prie ou qui prophétise ayant la tête couverte, déshonore sa tête. - Mais toute femme qui prie ou qui prophétise n'ayant point la tête couverte d'un voile, déshonore sa tête : car c'est comme si elle était rasée. - Jugez-en vous-même : convient-il à une femme de prier sans avoir la tête voilée. - Si quelqu'un aime à contester, pour nous ce n'est point là notre coutume, ni celle de l'Eglise de Dieu. "
61. Psaume CXVIII, 55, 62, 164 : " Je me suis rappelé votre nom pendant la nuit, et j'ai gardé votre loi. - Je me levais au milieu de la nuit pour vous bénir, et pour rendre hommage aux arrêts de votre justice. - Sept fois le jour, je redis vos louanges, je rends hommage et l'équité de vos jugements. "
62. Id., V, 5-4 : " C'est à vous, Seigneur, que s'adresse mon humble prière ; - dès le matin, ma voix s'élève vers votre trône. - Des le matin, je parais avec respect en votre présence et vous contemple. - Je le vois, Seigneur, vous n'êtes point un Dieu ami de l'iniquité. "
63. Id., LIV, 49 : " Le soir, et le matin, et au milieu du jour, je lui raconterai mes peines, et il écoutera ma voix. "
64. DANIEL, VI (comme ci-dessus, témoignage 52, page 461).
65. Actes, III, 1 : " Pierre et Jean montaient au temple pour la prière de la neuvième heure. "
66. Ibid., X, 9 : " Le lendemain, lorsqu'ils étaient en chemin, et qu'ils approchaient de la ville, Pierre monta au haut de la maison vers la sixième heure pour prier. "
67. Ibid., XVI, 23 : " Au milieu de la nuit, Paul et Silas
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s’étant mis en prières, chantaient des hymnes
en l'honneur de Dieu ; et les prisonniers les entendaient. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
§ 1er. - Natures et avantages de la prière.
1. S. JEAN DAMASCENE, Lib. III orthodoxe fidei, c. 24 : " La prière est une élévation de l'âme vers Dieu, ou la demande faite à Dieu de choses qu'il convient de lui demander. "
2. S. AUGUSTIN, Lib. II de sermone Domini in monte, c. 7 : " Nous répondons premièrement que ce qui nous fera obtenir de Dieu ce que nous désirons, ce ne sont pas nos paroles, mais les dispositions de notre cœur telles que notre amour pour lui, la pureté et la simplicité de notre intention. Mais ces dispositions mêmes, Jésus-Christ nous a appris à les lui exprimer par des paroles qui, confiées à notre mémoire, puissent nous revenir à la pensée au moment de la prière. . . "
" Dans la prière donc, notre cœur se tourne vers celui qui est toujours prêt à nous donner ce que nous lui demandons, si nous sommes nous-mêmes aptes à le recevoir. "
3. Le même, Serm. CCXXX de tempore (Ce sermon n'est pas de saint Augustin. V. NAT. ALEX., Hist. eccl., t. V, p. 110, édit de Venise) : " La prière est ce qui, dans le jeûne en particulier, répare les forces de l'âme, en attirant en nous les grâces de l'Esprit-Saint. La prière amollit la dureté du cœur, tempère l'austérité, adoucit le jeûne. Car, de même qu'un repas est défectueux lorsqu'on n'y trouve pas de quoi étancher sa soif, ainsi le jeûne sans la prière ne peut nourrir l'âme suffisamment. Mais qu'est-ce que la prière, que l'acte par lequel l'âme s'élève des choses de la terre à celles du ciel, que la demande qu'elle fait du secours d'en haut, que le désir qu'elle forme des biens invisibles ? Loin de l'âme qui prie l'embarras des choses de ce monde, dont le soin trop assidu étoufferait en elle ces sentiments élevés. La prière nous unit à l'Esprit-Saint, pourvu toutefois qu'elle soit fervente, ainsi que le Prophète dit à Dieu : Mon âme brûle d'une soif ardente pour vous ; et en combien de manières ma chair se sent-elle aussi pressée de cette ardeur (Ps. LXII, 2) ! Mais de quelle soif notre âme doit-elle brûler ? C'est ce que le même Prophète se hâte d'expliquer en ces termes : " Ut viderem viritutem tuam, pour contempler votre puissance. " Croyez-moi : Si l'âme brûle véritablement de la soif de con-
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templer pleinement la puissance de Dieu, et qu'elle ne se ralentisse pas dans son ardeur, elle sera remplie et comme rassasiée et engraissée des consolations que Dieu lui enverra ; et brûlant du désir de recevoir cette visite de Dieu, elle s'écriera avec foi : Mon âme s'est attachée à vous suivre, et votre droite m'a soutenu (Ps. LXII, 7). Le jeûne rend l'âme alerte, et lève les obstacles que la chair oppose à son essor. Mais de plus, la prière, quand elle est persévérante, nous unit à Dieu, et nous procure l'honneur d'entrer dans sa familiarité. Mon âme, en s'attachant au Seigneur, recouvre peu à peu la sécurité et vient de plus en plus libre, au lieu d'être comme auparavant dominée par la crainte. Quand l'âme est une fois sous le patronage du Tout-Puissant, quelle puissance aurait-elle à craindre ? Ce que l'Evangile nous promet, que personne ne ravira les brebis d'entre les mains du bon pasteur (JEAN, X, 28), c'est ce que nous procurent conjointement le jeûne et la prière. "
4. S. BASILE-LE-GRAND, Hom. in martyrem Julittam, quæ est quinta inter homilias variorum argumentorum : " La Price est une demande que les fidèles font à Dieu pour obtenir de lui quelque bien. Cette demande n'est nullement attachée à des paroles particulières, car nous n'avons point besoin du secours de la voix pour nous faire entendre à Dieu ; il connaît assez les choses dont nous avons besoin, sans que nous les lui demandions. Les paroles ne font donc point l'essence de la prière : elle consiste plutôt dans les opérations de l'âme qui prie, et dans les bonnes œuvres qui se font durant toute la vie par des motifs de vertu, selon cette maxime de saint Paul : Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu (I Cor., X, 31). "
" Priez lorsque vous vous mettez à table : rendez grâces à celui qui vous donne le pain dont vous vous nourrissez ; en buvant du vin pour reprendre de nouvelles forces, souvenez-vous de votre bienfaiteur qui vous a donné un si bon remède contre la tristesse et contre les infirmités. Quand vous êtes rassasié, n'oubliez pas celui qui vous a donné de quoi apaiser votre faim. En vous habillant, remerciez Dieu qui vous donne des habits ; en prenant votre manger, excitez-vous à aimer toujours davantage un Dieu qui vous donne si libéralement toutes les choses nécessaires à la conservation de votre vie dans toutes les saisons de l'année. A la fin du jour, remerciez Dieu de la bonté qu'il a eue de taire luire son soleil pour vous éclairer dans toutes vos
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actions, sans que vous l'ayez mérité, et de vous donner le feu pour vous éclairer pendant la nuit, et pour une infinité d’autres usages. La nuit pourra aussi vous fournir plusieurs motifs de prières : quand vous jetterez les yeux sur cette multitude infinie d'étoiles qui brillent dans le ciel, prosternez-vous devant Dieu qui est l'auteur de tous ces ouvrages si admirables ; adorez celui qui a fait ces merveilles avec tant de sagesse. "
" Quand vous verrez tous les animaux ensevelis dans le sommeil, remerciez Dieu qui nous soulage sans que nous y pensions, qui nous fait prendre de nouvelles forces dans le sein du repos, où nous nous délassons de tous nos travaux. Il ne faut pas employer toute la nuit à dormir, si vous ne voulez perdre la moitié de votre vie, en vous abandonnant au sommeil qui nous rend comme stupides et insensibles. Il faut que le sommeil et la prière partagent la nuit, et que vous tiriez du sommeil même des sujets de méditation. Les soins et les occupations qui nous ont agités pendant le jour, réveillent notre imagination pendant la nuit, et nous font naître des pensées ; nous croyons quelquefois entendre un petit bruit ou des sons agréables, les songes ont beaucoup de rapport avec les affaires qui nous ont occupé pendant le jour. "
" Il n'est pas nécessaire de proférer des paroles pour prier toujours ; pourvu que vous conformiez votre vie à la volonté de Dieu, toute votre vie sera une prière continuelle (Cf. S. Basilii opera, t. II, p. 35-36, édit de D. Garnier ; Sermons de saint Basile, p. 187-189, Paris, 1701). "
5. S. CHRYSOSTOME, Hom. XXX in Genesim : " La prière est une arme puissante, une source abondante de sécurité, un riche trésor, un port et un asile assuré, pourvu que nous nous présentions à Dieu avec un cœur pur, un esprit recueilli, et sans donner aucune prise sur nous à l'ennemi de notre âme. . . "
" La prière est un grand bien pour notre âme. Car s'il y a déjà tant d'avantages à converser avec un homme vertueux, combien ne devra-t-il pas y en avoir à pouvoir le faire avec Dieu ? car la prière est un entretien avec lui. Et pour vous en convaincre, écoute ces paroles du Prophète : Que mes paroles soient agréables à Dieu (Ps. CIII, 34), c'est-à-dire : que mon entretien avec Dieu puisse lui plaire. Ne pourrait-il pas nous donner ce qui nous convient avant que nous ne lui en fissions la demande ? Sans doute ; mais il préfère attendre, pour que nous
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puissions le mettre à même de nous honorer de ses attentions toutes spéciales. Soit que nous soyons exaucés soit que nous ne le soyons pas, persévérons dans la prière, et rendons grâces à Dieu, non-seulement lorsqu'il nous accorde nos demandes, mais encore lorsqu'il nous les refuse. Car l'un peut aussi bien que l'autre nous fournir la preuve de sa bonté pour nous, puisqu'il sait infiniment mieux que nous ce qui peut nous être avantageux (Cf . S. Joannis Chrysostomi opera, tome IV, pag. 301-302, édition de Montfaucon ; pag. 350-351, édition de Gaume). "
6. S. GREGOIRE de Nysse, Lib. de oratione : " A quoi bon entrer dans le détail des diverses manières et des moyens si multipliés par lesquels le péché se mêle à la vie humaine ? péchés qui n'ont pas d'autre cause que l'oubli que commettent les hommes de recourir au secours de Dieu, pour faire réussir les affaires dont ils ont à s'occuper, et auxquelles ils se livrent avec tant d'ardeur. Mais si la prière précède nos actions, le péché ne trouverait aucun accès dans notre âme. Car la pensée de Dieu, toujours bien présent à l'esprit, déjouerait toutes les manœuvres des puissances ennemies, la justice s'interposant en notre faveur dans les luttes que nous aurions à soutenir contre elles. La prière préserverait de même le laboureur occupé à cultiver son champ ; elle multiplierait ses récoltes, mais dans une juste mesure, de peur qu'un excès de prospérité ne fît entrer le péché dans son mur avec le désir d’avoir toujours davantage. Ainsi en serait-il du voyageur ; ainsi de celui qui songe à quelque entreprise ou à quelque établissement ; ainsi de tous ceux qui ont l'esprit occupé de quelque affaire : s'ils ne faisaient rien sans s'aider de la prière, ils verraient leurs affaires réussir parfaitement sans qu'il s'y entremêlât de péché de leur part, aucun de leurs ennemis n'osant plus se présenter pour les entraîner dans le vice. Mais, si l'on abandonne Dieu pour se livrer tout entier à l'affaire dont on poursuit le succès, il est inévitable qu'ainsi éloigné de Dieu, on se trouve bientôt en présence de son ennemi. Or, tous ceux-là s'éloignent de Dieu, qui ne s'unissent pas à lui par la prière. Donc la prière vous apprendra avant tout, qu'il faut que vous priiez sans vous lasser jamais. Car la prière fait que l'on est avec Dieu ; or, quand on est avec Dieu, on tient son ennemi loin de soi. La prière est le rempart et le soutien de la pudeur, le frein de la colère, le remède de l'orgueil, l'infaillible moyen d'oublier
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les injures ; elle surmonte l'envie, fait cesser l'injustice, corrige l’impiété. La prière répare les forces du corps, répand l’abondance dans les maisons, fonde les lois équitables et salutaires, soutient les empires, remporte les victoires, assure le bienfait de la paix, réconcilie entre elles les personnes divisées, entretient les rapports de bienveillance entre celles qui sont unies. La prière est le sceau de la virginité, le lien de la foi conjugale, le bouclier des voyageurs, l'ange gardien de ceux qui se livrent au sommeil, le gage de sécurité offert à ceux qui veillent, la rosée qui fertilise les champs du laboureur, le salut assuré des navigateurs. La prière est l'avocate des accusés, la libératrice des captifs, la consolation des affligés, le charme qui remplit l'âme de ceux qui sont dans la joie, la ressource des personnes désolées, la couronne des époux, le bouquet de fête des anniversaires de naissance, la pompe funèbre des mourants. La prière est l'entretien de l'homme avec Dieu, la contemplation des choses invisibles, la foi exempte de doute à ces biens incompréhensible auxquels on aspire, l'élévation de l'état de l'homme à l'état des anges, le progrès des bons dans la voie de la perfection, l'effroi des méchants, l'amendement des pécheurs, la mise à profit du présent, l'avant-goût des biens venir. La prière a fait du ventre d'une baleine l'asile du prophète Jonas, a ramené la vie Ezéchias déjà aux portes de la mort, a changé pour les trois jeunes hommes des flammes ardentes en un vent rafraîchissant ; elle a élevé pour les Israélites combattant contre Amalec, le trophée de la victoire ; elle a atteint d'un glaive invisible, en une seule nuit, cent quatre-vingt-cinq mille Assyriens. Nous pourrions citer mille autres exemples semblables empruntés à l'histoire, ce qui fait voir que de tout ce qui peut être ici-bas l'objet de nos vœux comme de notre estime, la chose la plus avantageuse pour nous c'est la prière. . . "
" La prière, dite en grec ????????, est la demande faite à Dieu avec humilité des biens qu'il peut nous être avantageux d'obtenir. "
7. S. AUGUSTIN, Epist. LIX (al. 149), ad Paulinum, q. 5 : " Ce qui est bien difficile à distinguer, c'est ce que l'Apôtre annonce dans ce passage de la première épître à Timothée : Je me conjure donc, avant toutes choses, que l'on fasse des supplications, des prières, des demandes et des actions de grâces. Il faut avoir recours au grec pour en bien faire la différence : car nos interprètes latins ne se sont pas donnés la peine de rendre ces mots-là exactement et selon leur propre et véritable signification. . . "
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" L'interprétation qui me plaît le plus consiste à entendre tous ces termes par rapport à ce que presque toute l’Eglise pratique dans la célébration des mystères ; en sorte que par le mot de supplications nous entendions ce qui se fait avant la bénédiction de ce qui se met sur la table du Seigneur ; par celui de prières ce qui se fait dans le temps qu'on bénit ces oblations, qu'on les sanctifie, et qu'on les partage pour les distribuer aux fiables ; ce qui se termine, selon la pratique de presque toutes les Eglises, par l'oraison dominicale. L'origine du terme grec favorise même cette pensée ; car rarement trouvera-t-on dans l'Ecriture que le mot grec ???? se prenne pour ce qu'on appelle en latin oratio. C'est pour ce que les latins appellent votum qu'il se prend le plus ordinairement ; et le terme qui répond particulièrement dans le grec à ce que nous appelons prière, et les latins oratio, est ???????? ; mais comme ???? se prend quelquefois pour oratio, ils ont cru que ???????? devait signifier adoration. Si donc le mot grec ???? se prend le plus ordinairement dans l'Ecriture pour ce que nous appelons votum, quoiqu'il puisse se rendre par le terme général de prière, on doit le prendre particulièrement pour la prière qui se fait ???? ?????, c’est-à-dire ad votum, pour vouer et consacrer quelque chose à Dieu, et surtout pour celle par laquelle on lui consacre l'oblation du saint autel, qui exprime ce grand vœu et cette consécration solennelle, par où nous nous sommes voués et consacrés à Jésus-Christ pour demeurer à jamais en lui, c'est-à-dire dans l'unité de son corps, selon laquelle nous ne sommes tous qu'un même corps et un même pain, par cette unité mystique dont le sacrement du saint autel est le symbole. "
" Ce sont donc particulièrement les prières qui servent de préparation à la sanctification des oblations, que je crois qu'entend l’Apôtre, et qu'il ordonne que l'on fasse, par le mot de ????????? que nous rendons par celui de prières, et que quelques-uns qui n'y ont pas assez pris garde, rendent par celui d'adorations, puisque le mot ???? se prenant le plus souvent dans l’Ecriture pour vœu et consécration celui de ???????? doit se prendre, comme je viens de le dire, pour la prière qui se fait pour vouer et consacrer quelque chose à Dieu. "
" Quant à ce que l’Apôtre appelle interpellations, et que vos exemplaires expriment par le mot de demandes, je crois que c'est ce qui se fait quand on bénit le peuple, et que les évêques qui en sont comme les avocats, étendant les mains sur lui, l'offrent à la miséricorde et à la toute-puissance de Dieu. Ensuite vient
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l’action de grâces, qui se fait après qu'on a participé à ce grand sacrement, et qui est comme la conclusion de tout le reste. Aussi est-ce là ce que l'Apôtre ordonne en dernier lieu dans ce
passage que nous expliquons (Cf. Les Lettres de saint Augustin, t. IV, p. 212-219). "
8. Le même, Tract. LXXIII in Joannem : " Le Seigneur promet de grandes choses à ceux qui espèrent en lui, lorsqu'il dit : Parce que je vais à mon Père ; et quoi que vous demandiez à mon Père en mon nom, je le ferai (JEAN, XIV, 12-13). Lors donc que Jésus est allé à son Père, ce n'a pas été pour abandonner ceux qui avaient besoin de lui ; ç’a été plutôt pour leur accorder encore plus efficacement ce qu'ils lui demandaient. Mais comment concilier la promesse qu'il fait ici d'accorder tout ce qu'on demandera à son Père en son nom, avec le refus qu'il fait souvent à ses plus fidèles serviteurs de ce qu'ils lui demandent ? Ne serait-ce point parce qu'ils le lui demandent mal, comme le reprochait l’apôtre saint Jacques à ceux à qui il disait : Vous demandez, et vous ne recevez point, parce que vous demandez mal (JAC., IV, 3), pour avoir de quoi satisfaire à vos passions et à vos plaisirs ? C'est donc par un effet de sa miséricorde que Dieu refuse les choses qu'on lui demande, à ceux qui en abuseraient. Ainsi, lorsque nous demandons à Dieu des choses qui nous nuiraient s'il nous les accordait, il est à craindre qu'il ne nous accorde dans sa colère ce qu'il nous refuserait sans aucun doute, s'il voulait nous faire miséricorde. Ne voyons-nous pas que les Israélites obtinrent de lui, pour leur malheur, ce qu'ils lui avaient demandé suivant le dérèglement de leur cœur (Nom., XI, 32) ? Car au lieu de se contenter de la manne que Dieu leur envoyait du ciel avec tant de bonté, ils s'en dégoûtèrent, et lui demandèrent avec impudence qu'il leur donna à manger de la chair ; comme s'il n'eût pas été plus utile pour eux, et moins injurieux à Dieu, de lui demander qu'il les guérir de leur dégoût et de s'en tenir à la nourriture qu'il leur avait donnée que de murmurer pour en avoir d'autre. Car quand nous sommes assez malheureux pour n'avoir de goût que pour les choses mauvaises, comme du dégoût que pour les bonnes, il vaut bien mieux demander à Dieu qu'il nous rende le goût des bonnes, que de lui en demander de mauvaises. . . "
" Ouvrons donc là-dessus les yeux, mes frères et observons avec soin que Jésus-Christ ne dit pas ici seulement : Tout ce que
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vous demanderez, comme s'il suffisait de demander de quelque manière que ce fût, mais qu'il ajoute : en mon nom. Or, quel est le nom de celui qui à promis une chose si avantageuse ? Il s'appelle Jésus-Christ. Christ signifie roi (Christ signifie directement marqué d'une onction, et indirectement marqué de l'onction royale), et Jésus Sauveur. Car il ne lui suffisait pas d'être roi pour nous sauver : il n'appartient à pas toutes sortes de rois de le faire : il fallait pour cela qu'il fût roi et sauveur tout à la fois. Et ainsi, tout ce que nous demandons à Dieu de contraire à notre salut, nous ne le demandons pas au nom du Sauveur. Cependant, il est toujours notre Sauveur, soit qu'il nous accorde ce que nous lui demandons, soit qu'il nous le refuse. Il marque même plus fortement qu'il l'est, lorsqu'il nous refuse les choses qu'il voit qui nuiraient à notre salut, s'il nous les accordait. Il est comme un médecin qui, connaissant mieux que son malade ce qui lui est bon et ce qui lui est contraire, ne lui accorde pas ce qu'il demande, lorsqu'il le croit nuisible à sa santé, dans le dessein qu'il à de le guérir. De sorte que, si nous voulons être exaucé de Dieu dans tout ce que nous lui demandons, il ne faut rien lui demander qu'au nom du Sauveur, c'est-à-dire, rien qui puisse être contraire à notre salut. Car autrement, en nous accordant ce que nous demandons, il n'agirait pas en Sauveur. C'est cependant le nom véritable de Jésus-Christ pour les fidèles, je dis, pour les fidèles qu'il sauve. Car pour les impies, il les condamne au lieu de les sauver, Jésus- Christ fait donc tout ce que demande celui qui croit en lui, pourvu qu'il le demande au nom qu'il porte pour ceux qui croient en lui, parce qu'en ce cas il le fait comme Sauveur. Mais si celui qui croit en Jésus-Christ lui demande sans le savoir une chose qui, lui étant accordée nuirait à son salut, il ne la demande point au nom du Sauveur, puisque ce ne serait point être son Sauveur que de lui accorder une chose qui l'empêcherait de faire son salut. De sorte qu'il est plus expédient dans ces occasions pour celui qui demande quelque chose, que le Seigneur ne fasse rien à sa prière de contraire au nom de Sauveur qu'il porte pour lui, que s'il lui accordait ce qu'il lui demande. C'est pour cela que Jésus, qui est notre maître aussi bien que notre Sauveur, pour pouvoir nous accorder toujours tout ce que nous lui demandons, a bien voulu nous composer lui-même et nous laisser une prière, qui nous apprend tout ce que nous
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devons demander. Cette prière sert aussi à nous faire penser que tous ne demandons pas au nom du maître, quand nous demandons au-delà de ce qui est contenu dans la règle qu'il nous a laissée. "
" Ce n'est pas qu'il n'y ait des choses que nous demandons en son nom, c'est-à-dire qui n'ont rien de contraire, ni à sa qualité de sauveur, ni à sa qualité de maître, quoiqu'il ne nous les accorde pas sur-le-champ ; mais alors, c'est qu'il juge expédient de ne nous les accorder que plus tard. Car lorsque, par exemple, nous lui demandons tous les jours que son règne arrive, ce n'est pas à dire qu'il n'exauce pas notre prière, de ce qu'il ne nous admet pas dès ce moment à régner dans l'éternité avec lui. Il ne rejette pas notre demande ; il diffère seulement pour quelque temps à l'exaucer. Mais ne nous lassons pas plus de prier, que le laboureur ne se lasse de semer, pour que nous puissions faire notre récolte quand le temps de la moisson sera venu. Et afin que notre prière soit telle qu'elle doit être, il faut aussi demander à Dieu qu'il ne nous accorde jamais rien de ce qu'il voit que nous lui demandons mal à propos. C'est cette grâce que nous lui demandons, quand nous le prions de ne pas nous laisser succomber à la tentation. Car ce n'est pas une tentation peu dangereuse, que celle qui nous porte à lui demander ce qui peut nous nuire (Cf. Les Traités de saint Augustin sur l'Evangile de saint Jean, tome III, pas. 319-326). "
9. S. BASILE-LE-GRAND, Constitution. monastic., c. 2 (al. 1) : " Il y a deux manière de prier Dieu, dont la première consiste à le glorifier avec une humilité profonde, et la seconde à lui faire des demandes. Lors donc que vous vous présentez à lui dans la prière, ne commencez pas par lui faire des demandes ; car ce serait le moyen de faire voir que votre volonté n'agirait que par un principe d'intérêt, que la nécessité seule vous porterait à vous adresser à lui. C'est pourquoi, au commencement de la prière, oubliez-vous vous-même, oubliez votre femme, oubliez vos enfants, laissez-là la terre, élevez-vous au-dessus de tous les cieux ; éloignez-vous de toutes les créatures visibles et invisibles ; commencez par rendre gloire à celui qui a créé toutes choses, et en le louant, prenez garde que votre esprit ne s'égare de tous côtés et que vous ne contiez des fables comme font les païens ; mais recueillant des saintes Ecritures ce que vous avez à lui dire, parlez-lui ainsi : " Je vous rends
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grâces, à mon Dieu, de la douceur et de la patience extrême avec laquelle vous me souffrez tous les jours, quoique je ne cesse de vous offenser, et de la bonté qui vous porte à nous recevoir tous à pénitence. Car c'est pour cela que vous vous taisez, Seigneur ; et si vous voulez bien nous souffrir, c'est afin que nous vous rendions de très-humbles actions de grâces pour le soin que vous prenez de notre salut, tantôt en nous ramenant par la crainte, tantôt en nous animant par vos exhortations, en nous visitant d'abord par le moyen des prophète que vous nous avez envoyés, et ensuite par la présence même de Jésus-Christ. Car c'est vous qui nous avez formés et nous ne nous sommes point faits nous-mêmes. Vous êtes notre Dieu. "
" Après que vous l'aurez ainsi glorifié, autant qu'il vous aura été possible, et que vous aurez emprunté les paroles de l’Ecriture pour le louer, commencez ensuite avec humilité et dites-lui : J'avoue, Seigneur, que je suis indigne de parler en votre présence, étant comme je le suis un si grand pécheur. C'est ainsi que vous devez parler, quand même vous ne remarqueriez en vous aucune méchante action. Car quoique nous commettions tous un très-grand nombre de péchés (JAC., V, 2), la plus grande partie nous en échappe et c'est ce qui faisait dire l'Apôtre : Quoique ma conscience ne me reproche rien, je ne suis pas juste pour cela (I Cor., IV, 3). C'était comme s'il eût dit : Il y a bien des péchés que je puis avoir commis sans que je les connaisse. C'est aussi ce qui faisait dire au Prophète : Qui est-ce qui connaît le nombre de ses fautes (Ps. XVIII, 1 3) ? Vous ne mentirez donc point, si vous dites que vous êtes pécheur. Car si vous ne reconnaissez que vous l'êtes en effet, vous péchez en cela même que vous dites que vous n'êtes pas pécheur. Dites donc plutôt : " Seigneur, je suis le plus grand de tous les pécheurs, ayant violé comme je l'ai fait votre divin commandement, et n'ayant point pratiqué ce que vous m'avez ordonné dans l'Evangile par ces paroles : Lorsque vous aurez accompli tout ce qui vous est commandé, dites encore : Nous sommes des serviteurs inutiles, nous n'avons fait que ce que nous étions obligés de faire (LUC, XVII, 10). "
" Il faut que vous vous occupiez continuellement de cette pensée ; que vous disiez sans cesse en vous-âme : Je suis un serviteur inutile, et que vous observiez aussi cette recommandation de saint Paul : Que chacun par humilité croie les autres au-dessus de soi (Philip., II, 3). Que la prière que vous adressez à Dieu soit donc accompagnée de crainte et d'humilité. "
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" Vous lui direz ensuite, en continuant de lui en donner des marques par vos paroles : Je vous rends grâces, Seigneur, de ce que vous me souffrez malgré mes péchés et de ce que vous ne m'avez pas encore puni jusqu'ici. Car j'ai mérité, je le confesse, et depuis longtemps, de subir une infinité de supplices, et d’être rejeté de devant votre face ; mais votre douceur ne s'est point lassée de me supporter avec une patience incroyable. Je vous en rends grâce encore une fois, ô mon Dieu, quelque incapable que je sois de vous remercier dignement pour une si grande bonté. "
" Après vous être acquitté de ces deux devoirs de louange et d'humilité, employez le reste de votre prière à demander à Dieu ce qu'il est à propos de lui demander, c'est-à-dire, ne lui demandez ni les richesses, ni la gloire de ce monde, ni la santé du corps. Car, comme c'est lui qui vous a formé, il a soin de votre santé et de votre conservation, et il sait ce qui peut être le plus utile pour chacun, de la santé ou de la maladie. Mais demandez-lui le royaume des cieux, comme il vous l'a commandé et il aura soin de vous donner ce qui vous est nécessaire pour la subsistance et les autres besoins de votre corps. En effet, comme notre roi est on ne peut plus grand, il s'indigne quand on ne lui demande que des choses basses et de vil prix, ou quand on ne lui demande que des choses qui ne sont nullement avantageuses. Ne l'irritez donc point par votre prière et ne lui demandez que des choses qui vaillent la peine de vous être accordées par la libéralité d’un roi et d'un Dieu. Mais soyez persuadé que, pourvu que vous lui demandiez des choses dignes d'un Dieu, vous ne sortirez point de sa présence qu'il ne vous les ait octroyées. Car c'est ce qu'il a voulu vous marquer lui-même quand il a dit dans l'Evangile : Si quelqu'un de vous avait un ami, et qu'il l'allât trouver au milieu de la nuit pour lui dire : Mon cher ami, prêtez-moi trois pains, parce qu'un de mes amis faisant voyage vient d'arriver chez moi, et je n'ai rien à lui donner ; et que cet homme lui répond du dedans de sa maison : Ne m'importunez point, ma porte est déjà fermée et mes enfants sont couchés aussi bien que moi ; je ne puis me lever pour vous en donner ; n'est-il pas vrai que, quand il ne se lèverait pas pour lui en donner à cause qu'il serait son ami, il se lèverait néanmoins à cause de son importunité, et qu'il lui en donnerait autant qu'il en aurait besoin (LUC, XI, 5-8) ? Jésus-Christ nous propose cet exemple, pour nous inviter à être ardents et importuns dans la prière. Car
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l'exemple dont il se sert pour cet effet, est tiré de la conduite d'un homme à l'égard d'un autre homme, pour nous apprendre à ne point nous rebuter, et à ne point nous retirer de devant Dieu, lorsqu'il ne nous accorde pas ce que nous lui demandons, jusqu’à ce qu'enfin il consente à nous l'octroyer. Mais, comme je l'ai déjà dit, cela ne doit s'entendre qu'autant que nous lui demandons ce qui est conforme à sa volonté. "
" Et ne dites point : Je suis pécheur, il ne m'exaucera pas : Car, pour vous ôter tout sujet de défiance, il a ajouté : Quand il ne se lèverait pas pour lui en donner à cause qu'il serait son ami, il se lèverait néanmoins à cause de son importunité, et il lui en donnerait autant qu'il en aurait besoin. "
" Au reste, quand il se passerait un mois entier, et même trois et quatre années, et encore davantage sans que vous puissiez obtenir l'effet de votre prière ne vous rebutez pas pour cela, mais continuez à le lui demander avec foi, sans vous dispenser, en attendant, de faire tout le bien dont vous êtes capable. . . Car, si un homme s'abandonne lâchement au dérèglement de ses désirs, et se livre ainsi lui-même à ses ennemis, Dieu ne l'assistera et ne l'exaucera point, parce qu'il s'est lui-même éloigné de Dieu par ses péchés. Et en effet, un homme qui désire sincèrement que Dieu l'assiste, ne s'écarte jamais de son devoir, et comme il ne l'abandonne point, Dieu ne l'abandonne point non plus, et il l'assiste toujours. "
" Il faut donc nous mettre en état de n'être point condamnés en quoi que ce soit par notre propre conscience, et dans cette disposition invoquer le secours de Dieu. Mais il ne faut pas l’invoquer lâchement et avec un esprit qui se dissipe et s'égare de tous côtés, puisque ce serait le moyen de l'irriter davantage, au lieu d'obtenir de lui ce que nous lui demanderions. Et en effet, si ceux qui sont devant des princes et des magistrats, ou qui ont à leur parler, demeurent debout en leur présence avec beaucoup de crainte et de tremblement, et tiennent dans une grande attention les yeux de leur âme et de leur corps, au-dedans comme au-dehors d'eux-mêmes, de peur que la dissipation ne les expose à quelque disgrâce, avec combien plus de frayeur et de tremblement ne devons-nous pas nous tenir en présence de Dieu, et n'avoir tout notre esprit appliqué qu'à lui, sans penser à quelque autre chose que ce puisse être, puisque en effet il ne voit pas seulement comme les hommes ce qui paraît au-dehors, mais qu'il pénètre dans tout ce que nous avons de plus secret et de plus intime. "
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" Si donc vous vous trouvez dans cette disposition devant Dieu, comme vous y êtes obligé et que vous apportiez de votre part tout ce qui dépend de vous, vous ne sortirez point de la prière que vous n'obteniez l'effet de votre demande. Mais si votre conscience vous reproche d'être lâche et négligent, et si, pouvant empêcher la distraction, vous êtes volontairement dissipé dans la prière, n’ayez point la témérité de vous présenter devant Dieu en cet état, de peur que votre prière ne tourne à péché (Ps. CVIII, 6). Ou si, après vous être déjà affaibli par le péché, vous ne pouvez prier sans dissipation d'esprit, faites tous vos efforts pour user de violence sur vous-même, et persistez en la présence de Dieu, en tenant toujours votre esprit occupé de sa divine majesté et recueilli en lui-même autant qu'il est possible ; et Dieu vous pardonnera cette distraction, parce que ce ne sera point par mépris, mais purement par impuissance que vous ne vous serez pas tenu appliqué à sa présence autant qu'il eût été nécessaire. Si vous usez ainsi de violence sur vous-même pour faire tout le bien dont vous êtes capable, vous ne sortirez point de devant lui que vous n'ayez obtenu ce que vous lui avez demandé. . . "
" Mais vous me direz peut-être : J'ai souvent demandé à Dieu cette grâce, et je ne l'ai point obtenue. C'est sans doute parce que vous la lui avez demandée mal, avec doute ou avec distraction, ou que vous l'avez prié de vous donner des choses qui ne vous étaient nullement utiles ; ou que, si vous lui en avez demandé d'utiles, vous n'avez point persévéré dans la prière Car il est écrit : C'est par la patience que vous posséderez vos âmes (LUC, XXI, 19). Et celui-là sera sauvé qui persévérera jusqu’à la fin (MATTH., X, 22). Dieu connaît le cœur de ceux qui le prient. . . "
" Il ne diffère peut-être à vous accorder ce que vous lui demandez, que pour éprouver l'assiduité et la ferveur avec laquelle vous vous adresserez à lui, et pour vous faire connaître que, comme c'est un don gratuit et un pur effet de sa libéralité, vous êtes obligé de conserver avec crainte ce qu'il vous aura donné. Et en effet, on conserve avec beaucoup de soin ce qu'on n'a acquis que par de très-grands travaux, de peur qu'en le perdant on ne perde aussi toutes ses peines, et qu'en négligeant la grâce de Dieu, on ne se rende indigne de posséder la vie éternelle (Cf. Les Ascétiques, ou Traités spirituels de saint Basile-le-Grand, trad. par God. Hermant, p. 482-492). "
10. S. BERNARD, Serm. IV de Quadragesimâ : " Plus la prière
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est efficace quand elle bien faite, plus notre adversaire emploie de ruses pour nous en détourner. Quelquefois il nous en détournera en nous inspirant une certaine pusillanimité d'esprit ou une crainte excessive et déraisonnable. C'est ce qui arrive, lorsque l'homme pense tellement à sa propre indignité qu'il ne tourne point ses regards vers la bonté divine. Car un abîme appelle un autre abîme, un abime lumineux appelle un abîme ténébreux, un abîme de miséricorde appelle un abîme de misère. Car le cœur de tous les hommes est un abîme impénétrable (JEREM., XVII, 9). Mais si mon iniquité est grande, votre bonté Seigneur, est encore bien plus grande. C'est pourquoi, lorsque mon âme se troublera en moi-même, je me rappellerai la multitude de vos miséricordes, et mon âme s'y dilatera ; et lorsque j'entrerai dans la considération de votre puissance, je me garderai bien de me souvenir seulement de votre justice. Toutefois, s'il y a danger à ce que la prière soit trop timide, le danger n'est pas moindre, et il est même plus grand, à ce qu'elle soit téméraire. Ecoutez ce que le Seigneur dit à son prophète de ceux qui prient dans cette autre disposition : Criez sans cesse, faites retentir votre voix comme une trompette, etc. (Is., LVIII, 1). Comme une trompette, dit-il, parce que c'est avec véhémence qu'il faut reprendre les esprits téméraires, ces esprits qui cherchent Dieu, et qui ne se sont pas encore trouvés eux-mêmes. Je ne dis pas ceci pour ôter aux pécheurs la confiance avec laquelle on doit prier ; ce que je demande de leur part, c'est qu'ils prient comme des gens qui ont mérité le châtiment, et non la récompense. Qu'ils demandent le pardon de leurs péchés avec un cœur contrit et dans un esprit d'humilité, de la même manière que ce publicain qui disait : Mon Dieu, ayez pitié de moi, qui suis un pécheur (Luc, XVIII, 13). Je dis qu'il y a témérité quand celui dont la conscience est encore sous le poids d'un péché ou d'une habitude vicieuse, se porte aux choses grandes et éclatantes qui sont au-dessus de lui (Ps. CXXX, 1), sans s'inquiéter en rien des dangers que court son âme. Un troisième danger à craindre, c'est que la prière ne soit tiède au lieu de procéder d’une piété vive. Une prière timide ne pénètre pas, il est vrai, jusque dans le ciel, parce qu'une crainte immodérée glace l'âme en quelque sorte, et bien loin de lui permettre de s'élever en haut, elle l'empêche même de marcher. Mais une prière tiède rend cette élévation de l'âme languissante, en sorte que les forces lui manquent, et qu'elle retombe à terre. La prière téméraire s'élève à la vérité mais elle est repoussée ; car elle
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trouve de la résistance là où elle s'adresse, et bien loin d'obtenir des faveurs, elle s'attire au contraire des disgrâces. Mais la prière qui, en même temps qu'elle sera faite avec foi, sera humble et fervente, pénètre sans aucun doute dans le ciel, et il est certain qu'elle ne restera pas sans effet. "
11. Le même, Serm. V de Quadragesimâ : " Je vous prie, mes frères de vous trouver toujours prêt à recourir à la prière dont je me souviens de vous avoir dit quelques mots à la fin de notre dernier entretien. Mais toutes les fois que je vous parle de la prière, il me semble vous entendre prononcer dans votre cœur certaines paroles de l'homme, que j'ai entendu souvent prononcer à d'autres, et que quelquefois aussi je me suis entendu prononcer en moi-même. D'où vient que, bien que nous ne cessions pas de prier, il n'arrive presque jamais que quelqu'un de nous ressente l'effet de ses prières. Nous sortons de la prière à peu près dans le même état que nous y sommes entré : personne ne nous répond, personne ne nous donne ; nous semblons avoir travaillé en vain. Mais que dit Notre-Seigneur dans l’Evangile ? Ne jugez pas selon l'apparence, mais jugez selon la justice (JEAN, VII, 24). Mais qu'est-ce qu'un jugement juste, sinon un jugement inspiré par la foi ? Car le juste vit de la foi (Rom., I, 47). Jugez donc selon la foi, et non d'après votre expérience personnelle, parce que la foi est infaillible, et que votre expérience au contraire est sujette à erreur. Quel est donc l’enseignement de la foi, sinon cette promesse que le Fils de Dieu lui-même nous fait dans son Evangile ? Tout ce que vous demanderez dans la prière, croyez que vous le recevrez, et il vous sera accordé (MARC, XI, 24). Qu'aucun de vous, mes frères, n'ait une faible estime des prières même qu'il fait : car je vous déclare que celui à qui nous adressons nos prière les a lui-même en grande considération. Avant même que cette prière soit sortie de notre bouche, il l'a déjà fait écrire dans ses registres. Et nous avons alors certainement à espérer de deux choses l'une, ou qu'il nous accordera ce que nous lui demandons, ou qu'il nous donnera à la place ce qu'il sait nous être plus utile. Car nous ne savons nous autres prier comme il faut (Rom., VIII, 26) ; mais il a pitié de notre ignorance, et tout en accueillant favorablement notre prière, il ne nous donne point ce qui ne nous serait pas utile, ou ce qui peut être remis à un autre temps ; car la prière ne saurait être infructueuse. Elle ne le sera pas du moins, si nous suivons l’exhortation que nous fait le Psalmiste de mettre notre joie dans le
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Seigneur : Mettez votre joie dans le Seigneur, nous dit-il, et il vous accordera les désirs de votre cœur (Ps. XXXVI, 4). "
12. Le même, Serm. de quatuor modis orandi : " Celui qui, après avoir persévéré quelque temps dans les gémissements et la pénitence, commence à éprouver la joie a comme l'assurance du pardon, peut demander désormais avec assurance. Seulement, qu'il prenne garde de demander autre chose que ce qu'il doit demander, ou d'omettre de demander ce qu'il doit demander à Dieu, ou de demander avec tiédeur ce qu'il doit demander sans relâche et de toute son âme. Vous demandez et vous ne recevez pas, dit saint Jacques (IV, 3), parce que vous demandez mal, c'est-à-dire conséquemment à vos désirs déréglés. Ainsi se conduit quiconque recherche les biens de la terre au-delà de ses besoins, quiconque ambitionne la gloire ou les plaisirs du monde. Telle est encore la prière de ces hommes animés de l'esprit du siècle, qui demandent dans leurs prières la mort de leurs ennemis, ou d'autres semblables choses qu'il n'est pas permis de demander. Les choses temporelles cependant qui nous manquent, si elles nous sont nécessaires, il nous est permis de les demander ; mais, comme l'observe saint Grégoire (Hom. XXVII in Evang.), nous ne devons pas le faire avec trop d'ardeur. Nous devons mettre en ce dernier rang les biens même spirituels sans lesquels nous pouvons faire notre salut, tels que le don de parler dans une haute sagesse, la vertu d'opérer des guérisons, toutes les choses enfin dont nous ne savons pas s'il est à propos pour nous de les obtenir, comme serait une tentation dont vous seriez tourmenté, et dont vous devriez sans doute demander la délivrance, mais sans y mettre toutefois trop d'insistance, en ne perdant jamais de vue cette sentence de l'Apôtre : Nous ne savons ce que nous devons demander à Dieu dans nos prières pour le prier comme il faut (Rom., VIII, 26) ; et il vaut mieux nous en remettre à Dieu, que de décider là-dessus témérairement en nous-mêmes. Mais voici ce qu'il faut que vous demandiez sans relâche et de toute votre âme, ce qui doit être le constant objet de vos désirs, de vos soupirs et de vos prières : d'être en grâce auprès de Dieu, de plaire à ses yeux si pleins de honte pour nous, de vivre et de mourir en union avec lui, de mériter, de contempler sa gloire et de le posséder éternellement C'est de ces choses qu'il est dit : Priez sans relâche (LUC, XVIII, 1). C'est ce que le Prophète demandait à Dieu, lorsqu'il disait : Mon visage vous a cherché ; je chercherai, Seigneur, votre face (Ps. XXVI, 8). Et
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encore : Je demanderai au Seigneur une seule chose, et je la rechercherai uniquement ; c'est d'habiter dans lu maison du Seigneur tous les jours de ma vie (ibidem, v. 4). . . "
" Quelle doit être la pensée d'un religieux qui entre en prière, sinon celle-ci du Prophète : Je passerai dans le lieu du tabernacle admirable jusqu’à la maison de Dieu (Ps. XLI, 5) ? Car, lorsque nous sommes en prières nous devons nous transporter tout entiers dans le ciel, dans ce palais où le Roi des rois est assis sur un trône tout brillant d’étoiles, entouré de l'armée innombrable des esprits bienheureux (DAN., VII, 40). Ce qui faisait dire à celui qui avait le bonheur d'être favorisé de cette vision, dans l'impuissance ou il était de trouver l'expression d'un nombre plus fort : Un million d'anges le servaient, et mille millions étaient devant lui (ibidem). Avec quel respect, avec quelle crainte, avec quelle humilité, vers de terre que nous sommes, ne devons-nous donc pas approcher de ce Roi des rois ! Comme elle doit être humble en même temps qu'empressée, comme elle doit être ardente la prière d'un misérable mortel, qui ose aborder ce roi de gloire, en présence des anges, au milieu de tous les justes assemblés ! Si donc nous avons besoin d'une grande vigilance dans toutes nos actions, c'est surtout dans la prière que cette vertu nous est nécessaire. Car, comme nous le lisons dans notre règle (Reg. S. Bazilii., c. 49), bien que les yeux du Seigneur soient fixés sur nous en tout temps et en tout lieu, c'est surtout dans le temps de nos prières. Et quoique nous soyons toujours vus de lui, nous nous montrons de plus nous-mêmes à lui dans la prière pour nous entretenir, pour ainsi dire, face à face avec lui. Or, encore bien que Dieu soit partout, nos prières doivent aller le trouver dans le ciel ; c'est là que notre pensée doit être dirigée lorsque nous le prions, en sorte que ni le toit de notre oratoire, ni la vaste étendue de l'air, ni 1'épaisseur des nues n’empêche notre âme de s'envoler jusqu’à lui, pour lui dire, en répétant la formule que nous tenons de Jésus-Christ même : Notre Père qui êtes dans les cieux. En effet, le ciel est appelé la demeure ou le trône de Dieu par excellence, parce qu'en comparaison de la claire vue que les saints anges et les âmes des élus ont de Dieu dans le ciel, ce que nous connaissons de lui ici-bas, nous misérables exilés, mérite à peine un nom. Que celui donc qui prie, le fasse dans la même disposition d'esprit que s'il était transporté dans le ciel, en présence de celui qui est mis sur un trône élevé entre les anges restés toujours fidèles et
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ces pauvres humains qu'il a appelés à lui de cette terre maudite, en les tirant de la poussière où ils étaient confondus avec nous. Qu'il se considère, dis-je, comme présenté au Seigneur de toute majesté, et qu'il dise avec Abraham : Je parlerai à mon Seigneur, quoique je ne sois que poussière et que cendre (Gen., XVIII, 27). Et si j'ose le faire, c'est parce que vous me l'ordonnez, et que vous m'avez appris vous-même à le faire, ô source inépuisable de bonté. "
13. S. JEROME, in caput VII Jeremiæ, sur ces paroles du verset 46, Tu ergò noli orare, etc. : " Pour épargner au prophète la honte de paraître n'avoir pas obtenu ce qu'il lui aurait demandé, Dieu lui défend de prier pour ce peuple qui refusait de faire pénitence de ses péchés. Quant à ces paroles qu'il ajoute : Ne vous opposez point à moi (ibidem), elles nous font voir que les prières des saints peuvent faire résistance à la colère de Dieu. C'est pour la même raison que le Seigneur disait à Moïse : Laissez-moi faire, afin que. . . je les extermine, et je vous rendrai le chef d'un grand peuple (Exod. XXXII, 40). Nous lisons encore ces autres paroles dans un psaume : Phinées s'éleva et apaisa le Seigneur. . . . , et ce zèle lui fût imputé à justice (Ps. CV, 30). Aaron aussi, ayant pris son encensoir, s'interposa entre le feu et le peuple que ce feu dévorait et la colère de Dieu se trouva apaisée. "
14. Le même, in caput XXVII Jeremiæ, sur ces paroles du verset 48 : Et si prophetæ sunt, et est verbum Domini in eis, occurrant Dormini exercituum : " Ces paroles, qu'ils s'opposent à moi ou au Seigneur des armées, font voir qu'un vrai prophète peut s'opposer au Seigneur par ses prières, comme nous voyons que Moïse s’opposa au Seigneur pour détourner sa colère de dessus son peuple, au moment où il le frappait (Exod., XXXII, 10). Samuel s'est conduit de la même manière (I Samuel, VIII, 6). Le Seigneur dit à Moise : Laissez-moi faire, afin que je frappe ce peuple. En disant : Laissez-moi faire, il marque bien que les prières des saints peuvent l’arrêter. "
15. Le même, lettre XII, à Gaudentius, de l'éducation de la jeune Pacatula : " Nous lisons que le pontife Aaron alla au devant des flammes dévorantes et que, prenant l'encensoir, il apaisa la colère du Seigneur. Le grand-prêtre se tint debout entre la vie et la mort, et le feu n'osa point aller au-delà de ses pieds. Dieu dit à Moïse : (Exod., XXXII, 10). Laissez-moi faire, et je détruirai ce peuple. Quand il dit : Laissez-moi faire, il
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montre qu'on peut le retenir, et l’empêcher d'accomplir sa menace. Et en effet les prières de son serviteur faisaient obstacle à ce qu'il déployât sa puissance (Cf. Œuvres choisies de saint Jérôme, etc., trad. par Collombet, tome V, pag. 398-399). "
§ 2. - Sur la posture qu’on peut tenir quand on prie.
16. TERTULLIEN, Apologétique, c. 30 : " Les yeux élevés au ciel, les mains étendues, parce qu'elles sont pures, la tête nue, parce que nous n'avons à rougir de rien, sans ministre qui nous enseigne des formules de prières parce que chez nous c'est le cœur qui prie, nous demandons pour les empereurs, quels qu'ils soient, une longue vie, un règne tranquille, la sûreté dans leur palais, la valeur dans les armées, la fidélité dans le sénat, la vertu dans le peuple, la paix dans le monde entier, enfin, tout ce que peut ambitionner un homme, tout ce que peut ambitionner un empereur. Vœux magnifiques ! . . . Je ne puis les adresser qu'à celui qui a le pouvoir de m'exaucer, parce qu'il est l'unique dispensateur des grâces, parce que je suis le seul qui aie le droit de les obtenir, comme son serviteur, comme son adorateur, prêt à être immolé pour sa loi. . . . . Tandis que nous épanchons ainsi notre âme devant Dieu, déchirez-nous, si vous le trouvez bon, avec des ongles de fer ; attachez-nous à des croix ; que vos flammes nous caressent de leurs langues dévorantes que vos poignards se plongent dans nos gorges, que vos bêtes féroces s'élancent sur nous, la seule attitude du chrétien en prière vous témoigne qu'il est prêt à tout souffrir. Courage donc, zélés magistrats, arrachez à cet homme une âme qui invoque son Dieu pour le salut de l'empereur ! . . . La vérité, le dévouement à Dieu, voilà donc nos crimes (Cf. Les Père de l'Eglise, etc., trad. par M. de Genoude, t. VII, p. 60). "
17. S. AUGUSTIN, Lib. de curâ pro mortuis gerendâ, c. 5 : " Ceux qui prient font prendre à leur corps la posture qui convient à des suppliants, en fléchissant les genoux, en étendant les mains, en se prosternant en terre, et autres actions semblables qui témoignent de leurs sentiments, quoique la disposition intime, et par-là même invisible, de leur volonté et de leur cœur soit connue de Dieu, qui n'a pas besoin de ces indices pour découvrir les sentiments de l'homme les plus cachés ; mais c'est l'homme lui-même qui s'excite par le moyen de ces signes à prier et à gémir
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avec plus d'humilité et de ferveur. Je ne sais même comment il se fait que, tandis que ces mouvements corporels ne peuvent avoir lieu qu’à la suite de quelques mouvements de l’âme, ils ajoutent cependant à ceux-ci une nouvelle intensité, en sorte qu’après leur avoir donné naissance, ils en reçoivent eux-mêmes leur aliment. Toutefois, si quelqu'un se trouve empêché, soit par quelque force extérieure, soit autrement, de plier ses membres à ces démonstrations sensibles de sa piété et de sa religion, l'homme intérieur n’en prie pas moins en lui, et Dieu, témoin secret de ses sentiments de componction, le voit prosterné devant ses yeux, alors même qu'une infirmité le retient couché dans son lit. "
18. S. JEROME, Dial. adversùs Luciferianos : " Une foi ferme en Dieu se trouve difficilement. Voici un exemple qui va éclaircir la chose : j'assiste à une prière ; je ne prierais pas, si je n'avais pas la foi ; mais d'un autre côté, si ma foi était véritable, je purifierais ce cœur par lequel je vois Dieu, je me frapperais la poitrine, j'arroserais mes joues de mes larmes, je me roulerais dans la cendre, je paraîtrais avec un visage pâle et défait, je me jetterais aux pieds de mon Dieu et je les baignerais de mes pleurs, je les essuierais avec mes cheveux, je me tiendrais attaché au bois de la croix, et je ne consentirais à m'en séparer qu’après avoir obtenu miséricorde. Au lieu de tout cela, il m'arrive souvent, au milieu de mes prières, de me promener sous une galerie, ou de calculer des intérêts, ou de rouler dans mon esprit des pensées d'objets que je ne puis pas même nommer sans rougir. Où est ma foi ? Est-ce ainsi, pensez-vous, que priait Jonas ? Est-ce ainsi que priaient les trois enfants ? Est-ce ainsi que priait Daniel au milieu des lions ? Est-ce ainsi du moins que priait le larron en croix ? "
19. Le même, in Vitâ S. Pauli Eremitæ : " Antoine étant entré dans la grotte, aperçut son corps (de Paul) inanimé dans l'attitude d'un homme agenouillé, la tête haute, les mains tendues et élevées vers le ciel. Le croyant toujours en vie, il se mit en prières à côté du cadavre. Mais comme il ne lui entendait pousser, suivant sa consume, aucun soupir, il se jeta tout éploré sur son corps qu'il couvrit de ses baisers, et vit bien que même à l'état de mort, le saint, par la posture au moins que son corps conservait, continuait de prier Dieu, pour qui tout est vivant. "
20. Le même, Lib. de viris illustribus, sive Catalog. Scriptorum ecclesiasticorum, de Jacob fratre Domini : " Hégésippe qui
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était voisin des temps apostoliques, dit en parlant de Jacques dans le cinquième livre de ses commentaires : " Apres le départ ou la mort des apôtres, l’Eglise de Jérusalem fut gouvernée par Jacques, frère du Seigneur et surnommé le Juste, pour qu'on pût le distinguer des autres de ce nom. Il avait été sanctifié dès le sein de sa mère ; il ne buvait ni vin ni boisson capable d'enivrer ; il ne mangea jamais de viande, ne se rasa jamais la barbe, ne se parfuma jamais, et ne fréquenta jamais de bains. Il jouissait seul du privilège d'entrer dans le Saint des saints. Ses vêtements n'étaient pas de laine, mais de lin ; il entrait seul dans le temple, et là, les genoux en terre, il priait pour le peuple, si bien que ses genoux avaient contracté la dureté de ceux des chameaux. "
24. S. JEAN DAMASCENE, Lib. IV de orthodoxâ fide, c. 43 : " Ce n'est pas sans dessein ou comme au hasard que nous prions tourné vers l’orient, mais c'est parce que, composé de deux natures, une visible et l’autre invisible, l'une spirituelle et l'autre corporelle, nous avons un double hommage à rendre à notre créateur, et que nos cantiques de louanges doivent être tout à la fois médités dans notre esprit et articulés par nos lèvres. Le baptême que nous recevons, nous le recevons dans l'eau et en même temps dans l'Esprit-Saint, et notre union avec Dieu est tout ensemble l'effet des mystères auxquels nous participons, et de la grâce que l'Esprit-Saint nous communique. Comme donc Dieu est la lumière de nos esprits et le soleil de justice, et que Jésus-Christ est appelé Orient dans les saintes Ecritures (ZACH., III, 8 ; MALACH., IV, 2 ; LUC, 1, 78), l'orient est le point du ciel vers lequel nous devons nous tourner de préférence pour l’adorer. Car il est dans l'ordre que nous offrions tout ce qu'il y a de plus parfait à celui qui nous prodigue ses biens avec tant de libéralité. David, inspiré de Dieu, dit de même : Royaumes de la terre, chantez les louanges de Dieu ; faites retentir des cantiques à la gloire du Seigneur ; chantez en l'honneur de Dieu, qui est monté au-dessus de tous les cieux vers l'orient (Ps. LXVII, 33-34). Et l’Ecriture, après avoir dit : Le Seigneur planta du côté de l'orient (L'expression hébraïque signifie indifféremment à principio, comme l'a traduite la Vulgate, ou ad Orientem, comme l’ont entendue les Septante) un jardin dans Eden où il plaça l'homme qu'il avait créé, ajoute qu'il l’en expulsa après son péché, et le condamna à passer le reste de ses jours du côté opposé à ce jardin, et par conséquent à l'occident. Lors
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donc que nous adorons Dieu, montrons par notre posture que nous soupirons vers notre ancienne patrie. Le tabernacle que Moïse fit construire avait son voile étendu vers l'orient ; le propitiatoire était aussi de ce côté et la tribu de Juda, comme de toutes la plus illustre, se campait de même à l'orient des autres, et le fameux temple de Salomon avait sa porte tournée vers l'orient. Jésus-Christ en croix avait le visage tourné vers l'occident ; et par conséquent, lorsque nous l'adorons tournés nous-mêmes à l'orient, c'est vers lui que nous dirigeons nos soupirs. Lorsqu'il s'élève au ciel, il dirigea son vol vers l'orient, et ses apôtres l'adorèrent dans la même direction. Et il reviendra sur la terre de la même manière qu'on l'a vu monter au ciel, ainsi que les anges l'ont déclaré aux apôtres et comme il s'en est expliqué lui-même : De même qu'un éclair part de l'orient et parvient jusqu’à l'occident, ainsi en sera-t-il de l'avènement du Fils de l'homme. C'est dans cette attente que nous l'adorons tournés vers l'orient. Il est vrai que cette tradition qui nous vient des apôtres n'a pas été écrite ; mais il est tant d'autres choses que les apôtres nous ont laissées sans écrit ! "
§ 3. - De certaines heures propres à la prière.
25. S. AUGUSTIN, Lib. de hæresibus ad Quodvultdeum, hær 57 : " La dernière hérésie mentionnée par Epiphane est celle des psalliens, mot dérivé du syriaque. Les Grecs les appellent euchites, ???????, du verbe qui dans leur langue signifie prier. Car telle est leur constance à prier, que ceux à qui on en parle et qui ne l'ont pas vu ne sauraient le croire. Comme notre Seigneur a dit : Il faut toujours prier, et ne jamais se lasser de le faire (LUC, XVIII, 1), et que l’Apôtre a dit de même : Priez sans relâche (I Thess., V, 17), paroles qui s'entendent très-bien en ce sens, qu'il ne faut laisser passer aucun jour sans donner du temps à la prière, ces hommes ont la simplicité de les prendre trop au pied de la lettre, et c'est pour cela qu'on doit les compter parmi les hérétiques. "
23. Le vénérable Bède, in caput XVIII Lucæ : " Il leur dit aussi cette parabole, pour montrer qu'il faut toujours prier, et ne pas se lasser de le faire. L'Apôtre a dit aussi : Soyez toujours dans la joie ; priez sans cesse. Mais qui peut ainsi toujours prier, et ne mettre aucune interruption dans ses prières, sans prendre seulement le temps de manger et de dormir ? Ou bien donc il faut dire que celui-là prie toujours et sans relâche, qui ne manque aucun
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jour à louer et prier Dieu en récitant des psaumes et des prières aux heures marquées d’après l'usage de l'Eglise fondé sur la tradition, et que c'est ainsi qu'il faut entendre ces paroles du Psalmiste : Je bénirai le Seigneur en tout temps, et sa louange sera toujours dans ma bouche (Ps. XXXIII, 2) ; ou bien, que tout te que le juste fait et dit en vue de Dieu renferme une prière. Car comme un juste ne cesse jamais de faire ce qui est juste, il priera par-là même sans interruption, et il ne pourra cesser de prier sans cesser en même temps d'être juste. "
24. S. ANSELME, archevêque de Cantorbery, in caput V prioris Espistolæ ad Thessalonicenses : " Priez sans cesse, c'est-à-dire, ne laissez passer aucun jour sans prier aux heures marquées. Au reste, un désir continuel des grâces de Dieu est une prière continuelle. Car est-ce que nous pouvons sans cesse fléchir les genoux, nous prosterner en terre, élever les mains vers le ciel, pour qu'on puisse dire de nous que nous prions sans cesse ? Mais que celui qui veut mettre de l'interruption dans ses prières, n'en mette pas du moins dans les désirs de son cœur. Ainsi priait Moïse à qui Dieu dit ces paroles dans un moment où il n'en prononçait aucune lui-même : Pourquoi criez-vous vers moi (Exod., XIV, 18) ? C'est qu'il priait dans son cœur quoique de bouche il gardât le silence. Ainsi un désir continuel, un amour de Dieu persévérant est dans les saints une prière continuelle. "
25. S. CLEMENT, pape et martyr (ou pour mieux dire, l'auteur inconnu des Constitutions apostoliques, l. VIII, c. 40) : " Faites vos prières le matin au point du jour, à la troisième heure, à la sixième, à la neuvième au soir et au chant du coq. Le matin, vous remercierez Dieu de ce qu'il vous aura rendu la lumière du jour en chassant les ténèbres, à la troisième heure, vous le remercierez de ce qu'il a à cette même heure accepté la sentence de Pilate ; à la sixième, de ce que c'est à cette autre heure qu'il a été mis en croix ; à la neuvième, de ce que tout s'est ébranlé à la mort du Sauveur, par horreur pour le crime des Juifs et pour l'ignominie qu'ils lui faisaient subir ; au soir, de ce qu'il nous à accordé la nuit pour nous délasser des travaux du jour ; au chant du coq, parce que ce moment est celui où le jour annonce son approche pour la reprise des travaux qu'on peut appeler des œuvre de lumière. "
26. TERTULLIEN, Apologétique, c. 2 : " Pline-le-Jeune, gouverneur de Bithynie, après avoir condamné à mort plusieurs chrétiens et en avoir dépouillé d’autres de leurs emplois, effrayé
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cependant de leur multitude, sollicita de l'empereur Trajan des instructions pour l'avenir. Il expose dans sa lettre que tout ce qu'il a découvert sur les mystères des chrétiens, outre leur entêtement à ne pas sacrifier, se borne à ceci : qu'ils s'assemblent avant le jour pour chanter des hymnes en l'honneur du Christ leur Dieu et entretenir parmi eux une exacte discipline ; qu'ils défendent l'homicide, la fraude, l’adultère, la trahison, et généralement tous les crimes. Trajan répondit qu'il ne fallait pas les rechercher, mais les punir quand ils seraient dénoncés (Cf. Les Père de l'Eglise, trad. par M. de Genoude, t. VII, pag. 5). "
27. S. CYPRIEN, de l'Oraison dominicale (Cf. ibidem, t. V bis, p. 420-421. Le véritable auteur de ce livre est Rufin d’Aquilée) : " Quand faut-il prier ? Daniel et les trois jeunes hommes de la fournaise, généreux athlètes dont la foi triompha jusque dans la captivité, observaient pour cet exercice la troisième la sixième et la neuvième heure, emblème de l'auguste Trinité qui devait se manifester vers la fin des temps. Entre chacune de ces heures se place un intervalle de trois autres. Chacun de ces intervalles marque à lui seul la Trinité. L'ensemble de ces trois heures, répétées chacune trois fois, achève et complète le symbole. Ainsi les adorateurs du vrai Dieu distinguaient autrefois les temps pour les consacrer à la prière. Les évènements ont prouvé depuis, que ce n'étai pas sans quelque dessein mystérieux que les anciens justes les avaient choisies pour prier. C'est à la troisième heure que l'Esprit-Saint descendit sur les disciples pour mettre le dernier sceau aux promesses du Rédempteur. C’est à la sixième heure que Pierre, qui tout-à-l'heure balançait à baptiser les gentils, monta sur la partie supérieur de l'édifice où il se trouvait, et reçu d'en-haut un signe miraculeux avec l’avertissement divin d'admettre indistinctement tous les hommes à la grâce du salut. C'est à la sixième heure que Jésus-Christ fut crucifié. Jusqu’à la neuvième heure il lava nos fautes dans son sang, paya la rançon de l'esclave, rendit à l'immortalité celui qui était mort, et consomma son triomphe dans les bras de la croix. "
" Pour nous, chrétiens, les heures de l'oraison se sont multipliées avec les mystères. Outre celles de l'antiquité, nous avons à sanctifier des heures particulières Nous devons prier le matin pour célébrer la mémoire de la résurrection de notre Sauveur.
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L'Esprit-Saint nous imposait d'avance cette obligation, quand il s'écriait par la bouche du Psalmiste (Ps. V, 4) : Mon Dieu et mon roi, je m'adresserai à vous ; vous m'exaucerez dès le matin ; dès le matin je répandrai mon âme en votre présence et je vous contemplerai dans vos œuvres. Ils penseront à moi dès le matin, dit le prophète Osée (VI, 1), et ils s'écrieront : Marchons, et revenons au Seigneur notre Dieu. "
" Le chrétien prie encore quand le soleil se retire. Car, puisque Jésus-Christ est le vrai jour et le vrai soleil, lui demander, au déclin de la lumière, d'allumer son flambeau sur nos têtes,
c'est lui demander que son règne arrive, et qu'il fasse briller sur nous l'aurore de sa lumière éternelle. "
28. S. ATHANASE, Lib. de virginitate sive de méditatione : " Méditez les saintes Ecritures, ayez un psautier, et apprenez les psaumes par cœur. Que le soleil à son lever vous trouve avec ce livre entre les mains. La troisième heure venue, vous vous rendrez à la synaxe, parce que c'est à cette heure-là qu'a été planté l'arbre de la croix. A la sixième heure, vous achèverez vos prières que vous accompagnerez de psaumes, de larmes et de prostrations, parce que c'est à pareille heure que le Fils de Dieu é été suspendu sur la croix. A la neuvième heure, vous chanterez encore des hymnes et des cantiques à la gloire de Dieu, et vous confesserez vos péchés avec larmes pour attirer sur vous la miséricorde de Dieu, parce que c'est à cette heure-là que Jésus en croix a rendu son dernier soupir (Cf. S. Athanasii opera. t. III, p. 116-117). "
29. S. BASILE, Serm. I de institutione monachorum, ou Traité spirituel pour la conduite des solitaires : " Il n'y a point de temps dans la vie qui ne doive être destiné à la prière ; mais comme il est besoin quelquefois de faire des pauses dans cette application de l'esprit et du corps à la psalmodie et au pénible exercice des génuflexions, il est bon d'observer les heures que les saints nous ont indiquées pour la prière. Car voici ce qu'a dit là-dessus le grand roi David : Je me levais au milieu de la nuit pour vous louer de la souveraine équité de vos ordonnances (Ps. CXVIII, 62). C'est ainsi que saint Paul et Silas, qui ont suivi son exemple, ont été trouvés à minuit appliqués à la prière dans la prison. Le même prophète dit encore : Le soir, le matin, à midi, je méditerai et je prierai avec empressement (Ps. LIV, 19). Nous lisons aussi dans les Actes des Apôtres, que le Saint-Esprit descendit sur ces derniers
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vers la troisième heure du jour, et que, comme les pharisiens avaient l'insolence de se railler de ce qu'ils entendaient les disciples parler devant eux diverses langues, saint Pierre leur déclara qu'ils n’étaient point ivres, puisqu'on n'en était encore qu’à la troisième heure du jour (Act., II, 15). "
" L'heure de none est un mémorial de la passion que le divin Sauveur à soufferte pour nous donner la vie. "
" Mais, comme David a dit : Sept fois le jour, je redis vos louanges ; je rends hommage à l'équité de vos jugements (Ps. CXVIII, 164), et que ces temps destinés à la prière dont nous venons de parler ne montent pas jusqu'au nombre de sept, il faut diviser en deux parties la prière du milieu du jour, en sorte que nous la fassions moitié avant le repas, et moitié en sortant de table, pour remplir tous les jours ce mystérieux nombre de sept dans le tribut de louanges que nous devons à Dieu (Cf. Les Ascétiques, ou Traités spirituels de saint Basile-le-Grand, trad. par Godefroy Hermant, p. 48-49). "
30. Le même, in Regulis fusiùs disputatis, interrog. 37 : " Quoique la loi de Dieu nous oblige de le remercier en tout temps, et que nous ayons montré que l'action de grâces est nécessaire pour vivre selon la nature et la raison, il ne faut pourtant pas négliger l'usage qui se pratique dans nos communautés religieuses de prier dans des temps réglés que nous avons choisis nous-mêmes, afin que chacun de nous se rappelle la mémoire des bienfaits qu'il a reçu de Dieu. "
" Nous le prions le matin, pour offrir et consacrer à Dieu les premiers mouvements de notre âme et de notre esprit, et ne nous occuper de rien autre chose avant de nous être délecté de la pensée de Dieu, conformément à ce qui est écrit : Je me suis souvenu de Dieu, et j'ai été dans la joie (Ps. LXXVI, 4) ; sans nous permettre aucun travail corporel, que nous ne nous soyons auparavant acquittés de ce que dit le Psalmiste : Seigneur, je vous adresserai ma prière : vous exaucerez ma voix dès le matin ; dès le matin, je me présenterai devant vous (Ps. III, 5). "
" Ensuite nous avons coutume de nous lever pour prier Dieu à l'heure de tierce, et alors toute la communauté s'assemble, quoique les frères soient disséminés en plusieurs lieux, et séparés les uns des autres par la diversité de leurs emplois ; et cherchant à retracer dans notre mémoire le souvenir des dons adorables de l'Esprit-Saint que reçurent les apôtres à la troisième heure du
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jour, nous nous réunissons tous par l'adoration que nous rendons à Dieu dans l'unité d'un même esprit, pour nous rendre dignes d'avoir part aussi bien qu'eux à la grâce de la sanctification de nos âmes, et pour lui demander qu'il ait la bonté de vouloir bien se charger de notre conduite, et de nous enseigner ce qui est plus avantageux pour notre salut, à l'exemple de David, qui a dit : Mon Dieu, créez en moi un cœur pur, et renouvelez l'esprit de justice dans mes entrailles. Ne me rejetez pas de devant votre face, et ne retirez pas de moi votre Esprit-Saint. Rendez-moi la joie de votre assistance salutaire, et fortifiez-moi par votre esprit souverain (Ps. L, 14-15). Et ailleurs : Votre esprit souverainement bon me guidera dans les routes de la droiture (Ps. CXLII, 11). Après quoi, il faut aussitôt se remettre au travail. Que s'il y a des frères absents, ou à cause de la nature de leur travail, ou à cause de la distance des lieux, et qu'ils n'aient pu rejoindre le reste de la communauté, ils doivent, en quelque lieu qu'ils se trouvent, s'acquitter chacun en leur particulier des prières que tous les autres font en commun, sans pouvoir s'en dispenser sous aucun prétexte, Dieu ayant dit dans l'Evangile, qu'en quelque lieu que deux ou trois personnes soient assemblées en son nom, il se trouve au milieu d'elles (MATTH., XVIII, 20). "
" Nous avons aussi jugé à propos d'imiter l'exemple des saints qui ont cru qu'il fallait prier à la sixième heure du jour, et qui ont dit : Le soir, le matin et à midi, je méditerai et je le prierai avec empressement, et il écoutera ma voix (Ps. LIV, 19). Et c'est en ce moment-là que nous récitons le psaume XC de David, afin que Dieu nous garantisse de toute chute, et des pièges du démon de midi. "
" Nous avons appris par la lecture des Actes que les apôtres ont jugé l'heure de none avantageuse pour la prière puisque nous y lisons que Pierre et Jean montaient au temple pour assister à la prière qui se faisait à la neuvième heure (Act., III, 1). "
" Quand la journée est finie, il faut rendre grâces à Dieu pour les bienfaits que nous avons reçu de lui ce jour-là, ou pour le bien même que nous avons pu y faire ; et s'il nous est arrivé de manquer en quelque chose, soit de notre consentement, soit malgré nous, soit même à notre insu, ou en paroles, ou en actions, ou dans le secret de nos pensées, en faire à Dieu la confession et le prier de nous le pardonner. Car la discussion et l'examen des péchés qu'on a commis est un excellent moyen pour n'en plus commettre. Et c'est ce qui à fait dire à David :
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Etendus sur vos lits, ouvrez vos cœurs à la réflexion et au repentir dans le silence (Ps. IV, 5). "
" Enfin, lorsque la nuit commence à répandre ses ténèbres, nous demandons encore à Dieu que le repos que nous allons prendre soit exempt de tentations et de chutes, et que notre esprit pendant ce temps ne soit le jouet d'aucune vaine imagination ; et c'est pour cela que nous répétons alors le psaume XC. Nous apprenons aussi de l'exemple de saint Paul et de Silas que le minuit est une heure obligatoire pour la prière car nous lisons dans les Actes des Apôtres, que vers minuit Paul et Silas s'étant mis en prière chantaient des hymnes d la gloire de Dieu (Act., XVI, 25). C'est aussi ce que le Psalmiste nous rapporte de lui-même : Je me levais au milieu de la nuit pour vous bénir, pour rendre hommage aux arrêts de votre justice (Ps. CXVIII, 62). "
" Après cela il faut devancer le point du jour, et se lever promptement pour la prière, de peur que le jour ne nous retrouve endormis, et ne nous surprenne dans le lit ; et c'est ce qui a fait dire encore au Prophète : Mes yeux ont prévenu le point du jour, afin de méditer votre loi (Ps. CXVIII, 148). "
" De tous ces temps que nous venons de marquer, il n'en est aucun qui puisse être négligé, par ceux dont la profession consiste à ne vivre que pour la gloire de Dieu, et de Jésus-Christ son Fils. Mais je crois qu'il est utile de diversifier ces exercices, et d'user de variété dans les prières et les psaumes qu'on à coutume de chanter pendant ces heures, parce que l'excès d'uniformité fait souvent que l'âme s'attiédit et se dissipe ; au lieu que le changement et la variété de la psalmodie inspire une nouvelle ardeur pour réciter les prières de chaque heure avec plus de recueillement, et excite l’âme à prier avec plus d'attention (Cf. S. Basilii opera, t. II, p. 382-384, édit. de D. Garnier ; Ascétique de saint Basile, trad. par God. Hermant, p, 190-193). "
31. S. CHRYSOSTOME, Hom. LIX ad populum Antiochenum, dit en parlant de la vie des moines de son temps : " A peine le jour a-t-il commencé à luire, que dis-je ? avant le jour et dès le chant du coq, tandis qu'ailleurs les serviteurs comme les maîtres sont plongés dans le sommeil, et que toutes les portes étant fermées, tout le monde semble mort ; eux, quittant leurs couches, se lèvent avec modestie, des qu'ils ont été éveillés par leur supérieur, et aussitôt se formant en chœur, ils étendent leurs mains et commencent le chant des hymnes. . . "
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" Ni guitare, ni flûte, ni tout autre instrument de musique ne rend des sons aussi enchanteurs que ceux que ces saints religieux font retentir alors dans le repos de la nuit et de la solitude. Leurs cantiques mêmes ne respirent que piété et qu'amour de Dieu. Le Prophète a dit : Elevez vos mains durant les nuits vers le sanctuaire, et bénissez le Seigneur (Ps. CXXXIII, 2). Et : Je m'éveillerai dès le point du jour pour vous chercher de toute l'étendue de mon esprit et de mon cœur parce que vos commandements sont la lumière qui m'éclaire ici-bas (Is., XXVII, 9). En même temps on récite les cantiques de David, ces cantiques si propres à faire couler les larmes, lorsqu'il dit, par exemple : Je me suis épuisé à force de soupirs ; je laverai toutes les nuits mon lit de mes pleurs ; j'arroserai de mes larmes le lieu où je suis couché (Ps. VI, 7). Et encore : Je mangeais la cendre comme le pain (Ps. CI, 10). Et encore : Qu'est-ce que l'homme, pour que vous vous soyez fait connaître à lui ; ou qu'est-ce que le fils de l'homme pour être si présent à votre pensée ? L'homme est devenu semblable au néant même ; ses jours passent comme l'ombre (Ps. CXLIII, 3-4). Et ailleurs : Que l'envie ne vous trouble point, lorsqu'un homme est dans l’opulence, et que la splendeur de sa maison s'accroît (Ps. XLVIII, 17). Et ailleurs encore : Dieu fait demeurer dans sa maison ceux qui n'ont qu'un même esprit (Ps. LXVII, 7). Et encore : Sept fois le jour, je redis vos louanges ; je rends hommage à l'équité de vos jugements (CXVIII, 164). Je me levais au milieu de la nuit pour vous bénir, pour rendre hommage aux arrêts de votre justice (ibid., 62). Le jour venu, chacun de nous autres appelle son compagnon, tient registre de ceux qui sortent, ou bien fait assigner son frère devant un tribunal, paraît devant le magistrat, tremble en sa présence, subit une amende ou une prison. L'un reste à la maison, l'autre sort pour quelque ouvrage. Mais eux, après avoir achevé les prières et les hymnes du matin, se mettent à la lecture de l'Ecriture sainte. Il y en a parmi eux qui, habiles à transcrire des livres, se renferment dans leurs cellules, et passent ainsi leurs loisirs, sans être jamais désœuvrés, sans rompre jamais leur silence. Ils s'acquittent en commun des prières de la troisième heure du jour, de la sixième et de la neuvième heure, et de celles du soir. Partageant ainsi la journée entière en quatre parts, ils en consacrent chacune à leur Dieu par le chant des psaumes et des hymnes (Nous n'avons pu trouver cette homélie dans les Œuvres authentiques
de saint Chrysostôme, de l'édition Gaume). "
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32. S. JEROME, in caput VI Danielis : " Il y a trois temps dans la journée où d'après la tradition ecclésiastique, nous avons à nous prosterner devant Dieu, savoir, la troisième, la sixième et la neuvième heure. En effet, c'est à la troisième heure que le Saint-Esprit est descendu sur les apôtres ; à la sixième, que saint Pierre, voulant manger, monta au cénacle pour prier d'abord, et à la neuvième que Pierre et Jean se rendirent au temple. "
33. Le même, à la vierge Eustochium, de custodiâ virginitalis, Epist. XXII : " Quoique l'Apôtre nous ordonne de prier sans cesse, quoique le sommeil lui-même soit pour les saints une sorte d'oraison, nous devons néanmoins partager en différentes heures le temps destiné à la prière afin que, s'il arrive que nous soyons retenus par quelque ouvrage, le temps lui-même nous rappelle un devoir à remplir. Qu'il faille prier à la troisième heure, à la sixième à la neuvième, le matin et le soir, il n'est personne qui ne le sache. On ne doit point prendre de nourriture sans avoir prié d'abord, ni sortir de table, sans rendre des actions de grâces au Créateur. La nuit, il faut se lever deux ou trois fois, et repasser dans sa mémoire les endroits des Ecritures que l'on sait par cœur. Au sortir de notre demeure, que la prière nous serve d'armure ; lorsque nous sommes revenus de la place publique, prions encore avant de nous asseoir, et que le corps ne se repose pas, avant que l'âme ait pris sa nourriture. A chaque action, à chaque démarche que notre main retrace sur notre corps la croix du Seigneur (Cf. Œuvres choisies de saint Jérôme, etc., trad. par Collombet, tome Ier, p. 228-231). "
34. Le même à la même, Epitaphe de Paula, Epist. XXVII, c. 20, dit en parlant des vierges des monastères que cette sainte veuve avait fondé : " Le matin, à la troisième heure, à la sixième, à la neuvième, le soir, au milieu de la nuit, elles chantaient une partie du psautier (Cf. Ibidem, t. IV, p. 411). "
35. Le concile d'Aix-la- Chapelle, tenu sous Louis-le- Débonnaire a inséré dans ses canons, c. 126, l'extrait suivant du dix-neuvième chapitre du livre premier de officiis ecclesiasticis de saint Isidore : " Daniel et les trois jeunes hommes ont consacré la prière à la troisième heure, la sixième et la neuvième du jour, afin que ces trois heures marquées pour le temps de la prière, à partir du lever du soleil, nous rappelassent le respect que nous devons à la sainte Trinité et que l'intervalle qui est
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entre la troisième et la sixième heure du jour étant le même que celui qui sépare la sixième de la neuvième, nous fussions avertis par-là de rendre trois fois le jour un culte semblable aux trois personnes divines. Une autre considération en faveur de ce culte, c'est que le Saint-Esprit est descendu sur la terre pour y répandre les grâces promises par Jésus-Christ, précisément à la troisième heure, c'est-à-dire à l'heure qui rappelle par son chiffre le rang qu'il occupe lui-même dans la sainte Trinité. Jésus-Christ mis en croix à la sixième heure, y est resté dans les tourments jusqu’à la neuvième. Ainsi, dans la distribution mystérieuse de ces temps marqués pour la prière, la Trinité, de trois en trois heures, est ou célébrée par des hymnes, ou invoquée par des supplications ; et si, prenant la journée dans son entier, on y compte un quaternaire au moyen de l'office du soir, on trouvera quatre ternaires, qui nous aideront à comprendre que le monde dans ses quatre parties ne peut être sauvé qu'au nom de la sainte Trinité. La nuit est de même partagée par les veilles et les stations militaires en quatre parties, dont chacune est encore de trois heures, pour nous faire vénérer le mystère de la Trinité jusque dans nos occupations séculières et dans nos heures de la nuit. "
36. Ibid., c. 127, ou vingtième de saint Isidore : " L'office du soir se fait à la chute du jour, et nous est recommandé même par l'Ancien-Testament. C'est à ce moment-là que les anciens offraient leurs sacrifices, et avaient coutume de brûler sur l'autel l'encens et les parfums. Nous avons pour témoin de cette pratique le roi-prophète, qui disait dans un de ses psaumes : Que ma prière s'élève vers vous comme la fumée de l'encens ; que l’élévation de mes mains vous soit agréable comme le sacrifice du soir (Ps. CXL, 2). Nous voyons aussi dans le Nouveau-Testament, que c'est dans ce même moment que notre divin Sauveur, faisant la cène avec ses disciples, leur distribua pour la première fois le sacrement de son corps et de son sang, pour donner à entendre, par l'heure même de son sacrifice, que nous étions arrivés au soir de la durée du monde. Il convient donc que pour célébrer la mémoire d’aussi grands mystères, nous nous présentions devant Dieu dans ces mêmes temps de la journée, pour chanter ses louanges, lui offrir le sacrifice de nos prières et lui rendre avec amour le culte qui lui est dû. Ce nom de vêpres, qui est celui de ce sacrifice du soir, vient de Vesper ou de l'étoile du soir qui paraît au coucher du soleil. C'est de cette étoile que le Prophète
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a dit les paroles suivantes : Vous faites lever sur les enfants des hommes l'étoile du soir (JOB, XXXVIII, 32). "
37. Ibid., c. 128, ou vingt-et-unième de saint Isidore : " Pour ce qui est de l'office de complies, voici ce qu'en disent les anciens. David a dit dans un de ses psaumes : Si je monte sur le lit préparé pour ma couche ; si je permets à mes yeux de dormir, et à mes paupières de se fermer, et à ma tête de sommeiller, jusqu’à ce que je trouve un lieu propre pour le Seigneur, et un tabernacle pour le Dieu de Jacob (Ps. CXXXI, 3-5). Qui n'admirerait l'amour ardent de ce prophète pour son Dieu ? Il se refusera jusqu'au sommeil, ce repos si nécessaire à chacun pour la réparation de ses forces, jusqu’à ce qu'il ait trouvé un lieu propre pour y élever un temple au Seigneur. Quelle puissante leçon pour nous apprendre que, si nous voulons être nous-mêmes le tabernacle ou le temple du Seigneur, nous devons imiter de tout notre pouvoir les exemples des saints, de peur qu'on ne nous applique ces autres paroles du même prophète : Tous les riches ont dormi leur sommeil, et ils n'ont rien trouvé dans leurs mains (Ps. LXXV, 6). "
38. Ibid., c. 129, ou vingt-troisième de saint Isidore : " Le même prophète nous est témoin de l'antiquité et de l'autorité de l’office des matines : Je serai, dit-il, tout occupé le matin de la méditation de votre grandeur, ô mon Dieu, parce que vous m’avez secouru (Ps. LXII, 7-8). Et ailleurs : Mes yeux se sont tournés vers vous de grand matin en prévenant la lumière pour méditer votre loi (Ps. CXVIII, 148). Or, nous prions le matin en mémoire de la résurrection du Sauveur. C'est le matin, et dès le point du jour, que Notre-Seigneur Jésus-Christ est sorti des enfers, et le soleil, qui avait retiré sa lumière aux pécheurs au moment de la mort de ce divin Sauveur, la rendit aux fidèles au moment de sa résurrection. Dans ce moment, en effet, a lui pour nous tous l'espérance de notre future résurrection, de ce jour où tous les justes, et même tous les hommes, sortiront de leurs tombeaux comme d'un profond sommeil. "
39. Ibid., c. 130, ou vingt-deuxième du premier livre de saint Isidore de officiis ecclesiasticis : Les vigiles sont une dévotion familière à tous les saints. Le prophète Isaïe poussait ce cri vers son Dieu : Je m'éveillerai dès le point du jour, pour vous chercher de toute l'étendue de mon esprit et de mon cœur, parce que vos commandements sont la lumière du monde (Saint Isidore rapporte ainsi ces paroles, prises dans le neuvième verset du chapitre XXVI d'Isaïe : De nocte vigilat spiritus meus ad te Deus, quia lux præcepta tua sunt super terram). Le roi-prophète à dit
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de même : Je me levais au milieu de la nuit pour vous bénir et pour rendre hommage aux arrêts de votre justice (Ps. CXVIII, 62). C'est dans ce moment, en effet, que l'ange exterminateur fit mourir tous les premiers-nés des Egyptiens. Nous devons veiller nous-mêmes, pour ne pas partager un sort semblable à celui de ce peuple. Le Seigneur nous avertit aussi dans l’Evangile que c'est à pareille heure qu'il viendra et c'est pour cela qu'il nous exhorte à la vigilance dans les termes suivants : Heureux les serviteurs que leur maître trouve en état de veille à son arrivée. Que s'il arrive à la seconde ou à la troisième heure, et qu'il les trouve en cet état, ces serviteurs-là seront heureux. . . Tenez-vous donc aussi toujours prêts, parce que le Fils de l'homme viendra à l’heure que vous n'y penserez pas (LUC, XII, 37-38, 40). Ce n'est pas seulement par ses paroles qu'il nous a enseigné à célébrer les vigiles ; mais c'est aussi par ses exemples. Car l’Evangile nous atteste que Jésus passait les nuits à prier Dieu (LUC, VI, 12). Nous lisons aussi de Paul et de Silas, que renfermés dans une prison publique, ils priaient vers le milieu de la nuit, et que tout le monde les entendait chanter des hymnes, quoiqu'ils fussent toujours dans les chaînes (Act., XVI, 25), lorsque tout-à-coup un tremblement de terre ayant eu lieu, les fondements de la prison furent ébranlés, les portes s’ouvrirent, et les chaînes tombèrent des pieds et des mains des prisonniers. Il faut donc que nous prenions l'habitude de chanter et de prier à ces mêmes heures en fréquentant l'office public, pour attendre le moment de notre mort avec plus de sécurité si ce moment nous trouve occupés à cette œuvre sainte. Il y a cependant des hérétiques qui regardent ces saintes veilles comme superflues et tout-à-fait inutiles pour le progrès spirituel, disant que c'est même aller contre la volonté de Dieu, qui a fait la nuit pour le repos, comme le jour pour le travail. Ces hérétiques sont appelés d'un mot grec nyctazontes, c'est-à-dire dormeurs. "
40. Ibidem, c. 131 : " Que les chanoines surtout s'appliquent à observer ces heures avec beaucoup de soin, et a en célébrer l'office divin avec humilité et dévotion. "
41. On peut encore consulter sur les heures canoniques Raban Maur, Lib. II, c. 1 et suiv., de institutione clericorum ; Rupert, abbé de Tuitz, Lib. I de divinis officiis, c. 1 et suiv.
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Question II
Pourquoi devons-nous être appliqués et assidus à la prière ?
C'est premièrement à cause des avantages considérables autant que nombreux qui résultent d’une prière bien faite. C'est, en second lieu, parce que la prière est l'exercice spécial et le produit, pour ainsi dire, spontané de la foi. Elle est d'ailleurs commandée en divers endroits de l’Ecriture, où nous lisons que les biens les plus précieux, les avantages les plus consolants sont attachés à sa pratique. Je vous le dis, ainsi parlait Jésus-Christ, c'est-à-dire la Vérité même, quoi que ce soit que vous demandiez dans la prière, croyez que vous l'obtiendrez, et il vous sera accordé. Et encore : Je vous dis : demandez, et il vous sera donné ; cherchez, et vous trouverez ; frappez à la porte, et elle vous sera ouverte. Car quiconque demande, reçoit ; qui cherche, trouve, et on ouvre à celui qui frappe. Et ailleurs : Si étant méchants comme vous l'êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il les vrais biens à ceux qui les lui demandent ! " Par ces paroles, " comme l'infère justement saint Chrysostôme, " et surtout par ces promesses, le Maître de toutes choses nous invite de la manière la plus pressante à lui adresser nos prières. Obéissons donc à Dieu, et consacrons notre vie entière à le prier aussi bien qu’à le louer, plus occupés du soin de lui rendre le culte qui lui est dû que de celui de nos intérêts les plus chers. Car c'est là pour nous le moyen de vivre toujours comme il convient à la dignité de notre nature. " C'est en ces termes que l’éloquent évêque nous recommandait les avantages de la prière.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. MATTHIEU, XXVI, 41 : " Veillez et priez, afin que vous n'entriez point en tentation. "
2. MARC, XIII, 33 : " Prenez garde, veillez et priez, car vous ne savez pas quand ce temps viendra. "
3. LUC, XVIII, 1-8 : " Il leur dit cette parabole, pour leur montrer qu'il faut toujours prier, et ne jamais cesser de le faire : - Il y avait, dit-il, dans une certaine ville un juge qui ne craignait pas Dieu, et ne se mettait point en peine des hommes. - Et il y avait aussi dans cette même ville une veuve qui venait vers lui, en lui disant : Faites-moi justice de ma partie. - Et il fut longtemps sans vouloir le faire ; mais enfin il dit en lui-même : Quoique je ne craigne point Dieu et que je ne me mette point en peine des hommes, - néanmoins, comme cette veuve m'importune, je lui ferai justice, de peur qu’à la fin elle ne vienne à me faire quelque affront. - Vous voyez, ajouta le Seigneur, ce que dit ce juge inique. - Et Dieu ne fera pas justice à ses élus qui crient à lui jour et nuit, et il souffrira toujours qu'on les opprime ? - Je vous dis qu'il ne tardera pas à les venger. "
4. Id., XI, 5-13 : " Si quelqu'un d'entre vous avait un ami qui vînt le trouver au milieu de la nuit, et qui lui dit : Mon ami, prêtez-moi trois pains, - parce qu'un de mes amis qui est en voyage vient d'arriver chez moi, et que je n'ai rien à lui donner ; - et que cet homme lui réponde de l'intérieur de sa maison : Ne m'importunez point, je vous prie ; ma porte est déjà fermée et mes enfants sont couchés aussi bien que moi, je ne puis me lever pour vous en donner ; - si néanmoins l’autre persistait à frapper, n'est-il pas vrai que quand même il ne se lèverait pas pour lui en donner par cela seul qu'il est son ami, il se lèverait à cause de son importunité et lui en donnerait autant qu'il en aurait besoin ? - Je vous dis de même : Demandez, et on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et on vous ouvrira ; - car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et on ouvrira à celui qui frappe. - En effet, quel est, le père parmi vous qui donnerait à son fils une pierre, lorsque celui-ci lui demanderait du pain ; ou qui lui donnerait un serpent lorsqu'il lui demanderait un poisson ; - ou qu'il lui donnerait un scorpion, lorsqu'il lui demanderait un œuf ? Si donc vous autres, tout méchants que vous êtes, vous savez néanmoins donner de bonnes
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choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père céleste donnera-t-il le bon esprit à ceux qui le lui demandent ! "
5. Id., XXI, 36 : " Veillez donc, et priez en tout temps, afin que vous méritiez d'éviter tous ces maux qui arriveront, et de paraître avec confiance devant le Fils de l'homme. "
6. Ecclésiastique, XVIII, 22 : " Que rien ne vous empêche de prier toujours, et ne cessez point de faire des progrès dans la justice jusqu’à la mort, parce que la récompense de Dieu demeure éternellement. "
7. Ibid., XXI, 1 : " Mon fils, avez-vous péché, ne péchez plus, mais priez pour vos fautes passées, afin qu'elles vous soient pardonnées. "
8. Romains, XII, 12 : " Soyez persévérants dans la prière. "
9. Philippiens, IV, 6 : " Ne vous inquiétez de rien ; mais en quelque état que vous soyez, présentez à Dieu vos demandes par des supplications et des prières accompagnée d'actions de grâces. "
10. Colossiens, IV, 2-4 : " Persévérez et veillez dans la prière, en l'accompagnant d'actions de grâces. - Priez aussi pour nous, afin que Dieu nous ouvre une porte pour prêcher sa parole, et pour annoncer le mystère de Jésus-Christ, pour lequel je suis moi-même dans les chaînes, et que je le découvre aux hommes de la manière que je dois le découvrir. "
11. I PIERRE, IV, 7 : Soyez donc prudents, et veillez dans la prière. "
12. I Thessaloniciens, V, 17-18 : " Priez sans cesse. - Rendez grâces à Dieu en toutes choses ; car c'est là ce que Dieu veut que vous fassiez tous en Jésus-Christ. "
13. Ephésiens, VI, 16-19 : " Servez-vous surtout du bouclier de la foi, afin de pouvoir repousser tous les traits enflammés du malin esprit. - Prenez encore le casque du salut, et l'épée spirituelle qui est la parole de Dieu, - invoquant Dieu en esprit et en tout temps par toutes sortes de supplications et de prières, et vous employant avec une vigilance et une persévérance continuelles à prier pour tous les saints, - et pour moi aussi, afin que Dieu m'ouvrant la bouche, me donne des paroles pour annoncer librement le mystère de l'Evangile. "
14. I Timothée, V, 5 : " Que la veuve qui est vraiment veuve et abandonnée espère en Dieu, et persévère jour et nuit dans les prière et dans les oraisons. "
15. Hébreux, IV, 16 : " Allons donc avec confiance au trône
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de la grâce, afin d’y obtenir miséricorde, et d'y recevoir le secours de la grâce dans nos besoins. "
16. JACQUES, I, 5-7 : " Si quelqu'un d'entre vous manque de sagesse, qu'il la demande Dieu, qui donne à tous libéralement sans reprocher ses dons, et la sagesse lui sera donnée. - Mais qu'il la demande avec foi, sans défiance ; car celui qui est dans la défiance ressemble au flot de la mer, qui est agité et emporté çà et là par la violence du vent. - Il ne faut donc pas que celui-là s'imagine qu'il puisse obtenir quelque chose du Seigneur. "
17. Id., IV, 2-3 : " Vous n'avez pas, parce que vous ne demandez pas à Dieu. - Vous demandez, et vous ne recevez point, parce que vous demandez mal, pour avoir de quoi satisfaire à vos passions. "
18. Id., V, 16-18 : " Confessez donc vos péchés les uns aux autres, et priez les uns pour les autres, afin que vous soyez sauvés ; car la prière assidue du juste à beaucoup de pouvoir. - Elie était un homme sujet, comme nous, à toutes les misères de la vie ; et cependant, comme il pria Dieu avec ferveur qu'il ne plût point sur la terre, il cessa de pleuvoir pendant trois ans et demi ; - et après qu'il eut prié de nouveau, le ciel donna de la pluie, et la terre produisit ses fruits. "
19. MARC, XI, 24-26 : " C'est pourquoi je vous le dis : Quoi que ce soit que vous demandiez dans vos prières, croyez que vous l'obtiendrez, et que cela vous sera accordé. - Mais lorsque vous vous présentez pour prier, si vous avez quelque chose contre quelqu'un, pardonnez-lui, afin que votre Père qui est dans le ciel vous pardonne aussi vos offenses. Que si vous ne pardonnez point, votre Père qui est dans le ciel ne vous pardonnera point non plus vos offenses. "
20. MATTHIEU, XXI, 22 : " Et tout ce que vous demanderez dans la prière vous l'obtiendrez, si vous le demandez avec foi. "
21. Id., XVIII, 19, 32-33 : " Si deux d'entre vous s'unissent ensemble sur la terre, quelque chose qu'ils demandent, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans le ciel. - Méchant serviteur, je vous avais remis tout ce que vous me deviez, parce que vous m'en aviez prié - ne fallait-il donc pas que vous eussiez aussi pitié, etc. ? "
22. LUC, XI ; comme ci-dessus, témoignage 4, et dans le corps de la réponse.
23. MATTHIEU, VII, 7-14 : " Demandez, et on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et on vous ouvrira. -
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Car quiconque demande reçoit et celui qui cherche trouve, et l'on ouvrira à celui qui frappe. - En effet, quel est celui d'entre vous qui donne une pierre à son fils, lorsque celui-ci lui demande du pain ? Ou s'il lui demande un poisson, lui donnera-t-il un scorpion ? - Si donc vous, tout méchant que vous êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il de bonnes choses il ceux qui les lui demandent ! "
24. JEAN, XIV, 13-14 : " Et tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. - Si vous me demandez quelque chose en mon nom, je le ferai. "
25. Id., XV, 7 : " Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez tout ce que vous voudrez, et il vous sera accordé. "
26. Id., XVI, 23-24 : " En vérité, en vérité je vous le dis, tout ce que vous demanderez à mon Père, il vous le donnera. - Jusqu'ici vous n'avez rien demandé en mon nom. Demandez, et vous recevrez, afin que votre joie soit pleine. "
27. I JEAN, III, 21-22 : " Bien-aimés si notre cœur ne nous condamne point, nous avons un juste sujet d'assurance devant Dieu ; - et quoi que ce soit que nous lui demandions, nous le recevrons de lui, parce que c'est alors que nous gardons ses commandements, et que nous faisons ce qui lui est agréable. "
28. Id., V, 14-15 : " Et ce qui nous donne de la confiance en Dieu, c'est qu'il nous exauce en tout ce que nous lui demandons de conforme à sa volonté. - Et nous savons qu'il nous exaucera en tout ce que nous lui demanderons, parce que nous savons que nous avons déjà reçu l'effet des demandes que nous lui avons faites. "
29. Psaume XLIX, 15-16 : " Offrez à Dieu un sacrifice de louanges, et accomplissez les veux que vous avez faits au Très-Haut. - Invoquez-moi au jour de l'affliction ; je vous délivrerai et vous m'en rendrez gloire. "
30. Id., CXLIV, 19-20 : " Le Seigneur est près de ceux qui l'invoquent ; oui, de tout ceux qui l'invoquent dans la vérité. - Il remplira les désirs de tous ceux qui le craignent ; il exaucera leurs prières, et il les sauvera. "
31. Proverbes, XV, 29 : " Le Seigneur est loin des impies, et il exaucera les prières des justes. "
32. II Chroniques, VII, 11-16 : " Salomon acheva donc
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la maison du Seigneur et le palais du roi, et il réussit dans tout ce qu'il s'était proposé de faire, tant par rapport à la maison du Seigneur que par rapport à son propre palais. - Ensuite le Seigneur lui apparut la nuit, et lui dit : J'ai exaucé ta prière, et j'ai choisi pour moi ce lieu, pour en faire une maison de sacrifice. - Si je ferme le ciel et qu'il ne tombe point de pluie, ou que j'ordonne et commande aux sauterelles de ravager la terre, et que j'envoie la peste parmi mon peuple ; - et que mon peuple, sur qui mon nom a été invoqué, se convertisse et qu'il me prie, qu'il recherche mon visage, et qu'il fasse pénitence de sa mauvaise vie, je l'exaucerai du haut du ciel, et je lui pardonnerai ses péchés et je purifierai la terre qu'il habite. - Mes yeux seront ouverts et mes oreilles attentives à la prière de celui qui m'invoquera en ce lieu ; - parce que j'ai choisi ce lieu, et que je l'ai sanctifié, afin que mon nom y soit à jamais invoqué, et que mes yeux et mon cœur y soient toujours attachés, etc. "
33. Ecclésiastique, I, 11 : " Considérez, mes enfants, tout ce qu'il y a eu d'hommes parmi les nations, et sachez que jamais personne qui à espérer dans le Seigneur n'a été confondu. "
34. Ibid., III, 4 : " Celui qui aime Dieu, obtiendra par ses prières le pardon de ses péchés, il se gardera d'y retomber, et il sera exaucé en ce qu'il demandera chaque jour. "
35. Ibid., XXXVIII, 9 : " Mon fils, ne vous méprisez pas vous-même dans votre infirmité ; mais priez le Seigneur, et lui-même vous guérira. "
36. Lévitique, IV, 26, 31, 35 : " Il fera brûler la graisse sur l'autel, comme on a coutume de le faire aux hosties pacifiques, et le prêtre priera pour lui et pour son péché, et son péché lui sera pardonné. - Il en ôtera aussi toute la graisse, comme on a coutume de l'ôter aux hosties pacifiques, il la fera brûler sur l'autel devant le Seigneur, comme une oblation d'agréable odeur ; il priera pour celui qui a commis la faute, et elle lui sera pardonnée. - Il en ôtera aussi toute la graisse, comme on a coutume de le faire au bélier offert comme hostie pacifique ; il la brûlera sur l'autel, comme un encens offert au Seigneur ; il priera pour celui qui l'offre et pour son péché, et il lui sera pardonné. "
37. Id., V, 10, 16 : " Il brûlera l'autre (tourterelle ou petit de colombe), et en fera un holocauste selon la coutume, et le prêtre priera pour cet homme et pour son péché, et il lui sera pardonné. - Il restituera le tort qu'il aura fait, en y ajoutant
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en plus la cinquième partie de sa valeur, qu'il donnera au prêtre et celui-ci offrira un bélier et priera pour lui, et son péché lui sera pardonné. "
38. Id., VI, 7 : " Le prêtre priera pour lui devant le Seigneur, et tout le mal qu'il aura fait en péchant lui sera pardonné. "
39. MATTHIEU, VII ; LUC, XI ; comme ci-dessus, témoignage
23 et 22.
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. ISIDORE, Lib. III de summo bono, c. 7 : " Voici le remède que doit employer celui qui se voit tourmenté par les tentations : c'est que, toutes les fois qu'il se sent assailli par quelqu'une, il ait recours à la prière dont l'usage fréquent suffit pour réprimer toutes les attaques des démons. On ne doit point se lasser de prier et de frapper pour ainsi dire à la porte, jusqu’à ce qu'on ait triomphé par une volonté forte des suggestions importunes des désirs charnels, qui s'insinuent dans l'âme presque à son insu ; on doit redoubler de vigilance et d'ardeur, jusqu’à ce qu'on ait remporté sur ce point une pleine victoire. Car les prières faites avec indifférence ont coutume de ne rien obtenir, pas même auprès des hommes. Celui qui prie attire en soi l'Esprit-Saint ; et dès que les démons qui font naître les tentations dans l'âme, sentent l'approche de cet Esprit divin, ils prennent l'épouvante et s'abandonnent à la fuite. La prière est le produit du cœur et non celui des lèvres. Car Dieu fait attention, non aux paroles de celui qui le prie, mais aux dispositions de son cœur. Si le cœur prie en silence, tandis que la bouche se tait, les affections du cœur peuvent alors rester inconnues aux hommes, mais elles sont connues de Dieu, pour qui la conscience n'a point de secrets. Il vaut donc mieux prier de cœur sans même prononcer une parole, que de prier de bouche sans aucune affection du cœur. La prière doit toujours être mêlée de gémissements : car le souvenir des péchés produit le regret de les avoir commis. Et lorsque nous prions, nous rappelons nos fautes à notre souvenir, et c'est alors surtout que nous nous reconnaissons coupables. C'est pourquoi, lorsque nous nous trouvons en présence de Dieu, nous devons gémir et pleurer, en nous remettant devant les yeux la grièveté de nos crimes, et la rigueur des peines de l'enfer, que nous avons à craindre. Que l'âme tâche ensuite de se conserver dans les dispositions où l'aura fait entrer
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la prière. Car la prière ne sert de rien, si l'on retombe tout aussitôt dans les mêmes fautes, pour en demander de nouveau le pardon. Celui-là au contraire obtient sans aucun doute l'effet de ses prières qui se garde bien de contracter de nouveau les taches dont il demande d'être purifié. Notre âme est céleste de sa nature, et elle prie Dieu et le contemple véritablement quand elle sait s'affranchir de tous les soins terrestres. Elle est propre à toutes sortes de biens, quand elle se contient dans les bornes de sa nature même ; elle tombe au contraire dans le désordre, quand elle sort de ces limites pour suivre les mouvements d'une nature étrangère à la sienne. La prière pour être pure, doit être dégagée des soins du siècle ; une âme est loin de Dieu, quand dans la prière même elle s'occupe de choses mondaines. Ainsi donc, pour prier véritablement il faut être tout entier à la prière. Mais il en est bien peu qui soient dans cette disposition d'esprit, on qui y soient toujours, quand même ils s'y trouveraient quelquefois. L'âme qui, avant de se mettre à la prière, était loin de Dieu et toute occupée de pensées criminelles, se représentera au milieu même de ses prières les images des choses qui faisaient tout-à-l’heure l'objet de sa pensée et ce seront autant d’obstacles qui l'empêcheront de s'élever au désir des biens célestes. L'âme a donc besoin avant tout de se purger de toute affection aux choses temporelles, pour pouvoir aller à Dieu avec franchise et simplicité. Car soyons persuadés que Dieu ne nous gratifiera de ses dons, qu'autant que nous les lui demanderons avec simplicité d'intention. Bien des causes peuvent contribuer à nous faire perdre cette simplicité d’intention, en réveillant dans notre esprit, quand nous ne sommes pas sur nos gardes, l'idée des vanités du monde. D'un autre côté, le démon ne voit pas plus tôt quelqu'un se mettre en prières qu'il est excité par-là même à le tourmenter davantage par mille pensées vaines qu'il lui suggère. Deux choses (La même pensée se retrouve dans les Morales de saint Grégoire-le-Grand, liv. X, chap. 17 et 18) particulièrement font obstacle à l'impétration de ce qu'on demande à Dieu dans la prière : la première ce sont les péchés auxquels on n'aurait pas renoncé ; la seconde, c'est le refus qu'on ferait de pardonner à son prochain. Celui qui saura se dégager de ce double obstacle, pourra s'adonner avec confiance à l'exercice de la prière et s'occuper sans embarras de ce qui fait l'objet de ses vœux. Que
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celui donc qui se sent offensé ne cesse de prier pour ceux qui lui ont fait tort ; car c'est la doctrine de notre divin maître que celui-là pèche, qui ne prie pas pour ses ennemis. De même que tous les médicaments ne sauraient guérir une plaie, tant que le fer qui l'a faite y reste enfoncé, ainsi la prière ne sert de rien à celui qui garde, soit l'affection au péché, soit la haine du prochain dans son cœur. Celui qui prie doit être tellement disposé envers Dieu, qu'il ne désespère point d'obtenir l'effet de sa prière. Mais notre prière sera vaine, si elle n'est pas accompagnée de confiance. Que chacun demande donc avec foi et sans aucun doute dans l'esprit, comme le dit un apôtre (JAC., I, 6) ; car celui qui doute est semblable au flot de la mer, qui est agité et emporté çà et là par la violence du vent. La défiance d’obtenir ce qu'on demande est inévitable si l'on se sent avoir encore de l'affection pour le péché. Car il est impossible qu'on ait confiance dans ses propres prières, lorsqu'on ne fait rien pour se mettre en devoir d'obéir à Dieu, et qu'on se réjoui à la pensée des péchés mêmes qu'on a commis. Celui qui fait mépris des commandements de Dieu, ne mérite pas d'obtenir de lui ce qu'il lui demande, et le crime de sa désobéissance lui attire justement le refus des grâces qu'il implore. Si au contraire nous exécutons ce que Dieu nous a ordonné, nous obtiendrons sans difficulté ce que nous lui demanderons. Car, ainsi qu'il est écrit, si quelqu’un détourne l'oreille pour ne point écouter la loi, sa prière même sera exécrable (Prov., XXVIII, 9). La prière et l'observation des commandements sont deux choses qui se prêtent un mutuel appui, et qui plaident l'une pour l'autre au tribunal de Dieu (On trouve encore cette même pensé exprimée par saint Grégoire dans ses Morales, liv. XVIII, chap. 5, et par saint Jérôme dans son commentaire sur le chap. 5 des Lamentations de Jérémie). C'est aussi ce qui a fait dire à Jérémie : Elevons au ciel nos cœurs avec nos mains vers le Seigneur (Lam., III, 41). Car celui-là élève son cœur avec ses mains, qui donne ses œuvres pour soutien à sa prière. Et quiconque prie sans œuvres qui soutiennent sa prière, élève bien son cœur, mais sans élever ses mains. Celui au contraire qui fait de bonnes œuvres, mais sans faire de prières élève bien ses mains, mais sans élever son cœur. Comme donc et la prière et les œuvres sont indispensables, ce n'est pas sans motif que le Prophète a dit : Elevons nos cœurs avec nos mains vers le Seigneur, dans la crainte que la négligence des commandements ne nous fasse encourir la damnation, en cherchant notre salut, ou dans la prière sans les œuvres ou dans
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les œuvres sans la prière. Lorsque nous faisons une bonne œuvre, ayons soin en même temps de prier avec larmes, pour que le mérite de notre action soit relevé par l'humilité de notre prière. Celui-là élève sans mérite ses mains vers Dieu, qui dans sa prière même relève avec jactance les bonnes actions qu'il peut avoir faites, comme ce pharisien qui se vantait, tout en priant dans le temple, en s'attribuant à lui-même plutôt que de la rapporter à Dieu, la gloire de ses bonnes œuvres. Il y en a dont les prières sont autant de péchés de plus, comme l'Ecriture le marque expressément de Judas l'Apostat (Ps. CVIII, 7). Car ceux qui prient avec jactance, en recherchant la louange des hommes, non-seulement n'obtiennent pas par leurs prières le pardon de leurs péchés, mais se rendent coupables d'un nouveau péché par la prière même qu'ils font dans ces dispositions. Ainsi les juifs et les hérétiques, quoiqu'ils paraissent jeûner et prier, n'obtiennent point le pardon de leurs péchés par leurs prières, et leurs prières, bien loin de les en purifier, deviennent au contraire de nouveaux péchés. Il arrive assez souvent que Dieu diffère d'exaucer les justes ou de leur accorder la délivrance de leurs maux, pour mettre dans tout son jour la perversité des méchants. Lorsque les justes au contraire sont exaucés, pour les biens temporels qu'ils demandent, ceux qui les affligent sont les premiers à en profiter pour leur propre salut ; car en voyant les justes réussir malgré l'oppression qu'ils voudraient faire peser sur eux, ils sont engagés par-là à ouvrir les yeux sur leurs véritables intérêts et par conséquent à se convertir. Ainsi le rafraîchissement que les trois jeunes hommes trouvèrent au milieu des flammes a eu pour effet de procurer à Nabuchodonosor la connaissance du vrai Dieu. C'est aussi ce quia fait dire au Psalmiste : Délivrez-moi à cause de mes ennemis (Ps. LXVIII, 19). Disons aussi que si quelques-uns tardent à obtenir l'effet de leurs prières, c'est afin que, fortifiés par cette attente, ils obtiennent une plus grande récompense comme le retard causé par les frimas à la croissance des productions de la terre ne fait qu'augmenter leur fécondité. Lorsque nous tardons à être exaucés dans nos prières, rappelons à notre mémoire le passé de notre vie, et nous trouverons dans la justice divine, et dans nos péchés à la fois, la cause de ce délai dont nous serions tentés de nous plaindre. D'autres fois, si nous ne sommes pas tout de suite exaucés c'est pour notre avantage, plutôt que pour notre malheur : car souvent, si Dieu ne nous accorde pas la chose que
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nous lui demandons, c'est pour pourvoir à notre salut mieux que nous ne pourrions le faire nous-mêmes. Bien des personnes ne sont pas exaucées dans leurs prières, parce que Dieu, par une providence attentive, leur réserve d'autres biens plus avantageux que ceux qu'elles lui demandent, comme il arrive à ces enfants qui prient Dieu pour que leur pédagogue ne les batte pas, et qui n'en obtiennent point l'effet de leur demande, parce que cela serait contraire à leurs progrès. Ainsi en est-il de certains dus. Ils prient Dieu pour obtenir de lui certains biens ou pour être délivrés de certains maux ; mais la Providence divine ne s'arrête point à leurs désirs, dont l'accomplissement ne leur procurerait que des avantages temporels, tandis qu'elle se propose de leur en assurer d'éternels. La prière doit se faire de préférence dans des lieux retirés, et on est plus sûr d'obtenir, quand on n'a que Dieu pour témoin des prières qu'on lui adresse. C'est le propre des hypocrites de se mettre en montre pour prier, et il résulte de là qu'ils déplaisent à Dieu, tout en s'attirant la louange des hommes. Ce n'est pas par un flux de paroles qu'on obtiendra d'être exaucé de Dieu, comme si c'étaient des paroles qu'il demanderait de nous pour nous être favorable. Ce qui touche son cœur, ce ne sont pas les discours éloquents, mais bien la pureté et la simplicité d'intention de celui qui le prie. Il est bon de prier toujours de cœur ; il est bon aussi d'élever la voix pour glorifier Dieu dans des hymnes spirituels. C'est chose vaine, que de prier des lèvres sans que le cœur y soit pour rien ; mais il faut, comme dit l'Apôtre (Eph., V, 19), chanter du fond de nos cœurs, c'est-à-dire chanter de tout son cœur, en même temps qu'on le fait de bouche. C'est pour cela que le même apôtre a dit ailleurs : Je chanterai de cœur des cantiques, mais je les chanterai aussi avec intelligence (I Cor., XIV, 15). Si la prière pourvoit à nos intérêts spirituels, le chant des cantiques nous procure en même temps une joie sainte. Il bannit de nos cœurs la tristesse, les ouvre à la reconnaissance, dissipe notre ennui, gourmande notre lâcheté, et, si nous sommes pécheurs, nous invite au repentir. Quelques durs que soient les cœurs des hommes charnels, ils se laissent amollir et tourner vers la piété par le chant des psaumes. Encore bien qu'un chrétien doive se laisser émouvoir bien moins par la douceur des accents, que par la parole divine que ces accents même font entrer dans son oreille, je ne sais comment il se fait que la componction est excitée par la mélodie de la voix plus encore que par le reste. Car combien n'en voit-on pas que
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l'harmonie des chants décide toute seule à pleurer leurs fautes, et qui se sentent touchés jusqu'aux larmes du moment où le cantique sacré a retenti à leurs oreilles ! La prière n'est de mise que dans la vie présente, où elle peut nous obtenir la rémission des péchés au lieu que le chant des psaumes se perpétuera dans la vie future pour la gloire éternelle de Dieu, comme il est écrit dans les Psaumes : Heureux ceux qui habitent dans votre maison, Seigneur ; ils vous loueront dans les siècles des siècles (Ps. LXIII, 5). Celui qui remplit un tel ministère avec fidélité et ferveur, entre pour ainsi dire en société avec les anges. "
2. S. AUGUSTIN, Serm. 226 de tempore (Ce sermon n'est pas de saint Augustin, mais se compose en partie des paroles de saint Ambroise, comme l'ont observé les docteurs de Louvain. Voy. NOEL-ALEXANDRE, Hist. eccles., sæc. V) : " La prière du juste est la clef du ciel. La prière monte vers Dieu, et fait descendre sur nous sa miséricorde. Quelque éloignée que soit la terre, quelque élevé que soit le ciel, Dieu entend toujours l'homme qui l'invoque, pourvu qu'il ait sa conscience pure. "
3. Le même, Serm. 231 de tempore : " La prière est, etc. ; " comme à la question précédente, témoignage 3, page 463.
4. Le même, Epist. CXXI (al. 150) ad Probam, c. 8 : " C'est donc cette bienheureuse vie que nous devons demander ; et c'est afin que nous sussions la demander, que celui qui est la vie par essence nous a enseigné à prier, et à prier en peu de paroles. Car ce n'est pas à force de parler que nous sommes exaucés, puisque, comme dit Jésus-Christ lui-même, celui à qui nos prières s'adressent sait ce qu'il nous faut, avant même que nous lui ayons rien demandé (MATTH., VI, 7-8). Et il y a lieu de s'étonner à cette occasion, que ce même Dieu qui sait tout ce qu'il nous faut, sans que nous ayons seulement ouvert la bouche pour lui faire nos demandes, et qui va jusqu’à nous défendre de parler beaucoup dans nos prières nous ait dit qu'il faut toujours prier, et ne s'en lasser jamais (Luc, XVIII, 4), et qu'il nous porte à le faire par l'exemple de cette veuve qui voulant avoir raison du tort que sa partie lui avait fait, à force de presser un juge inique, sur qui ni la justice ni la compassion n'avaient de pouvoir, en obtint enfin par ses importunités ce qu'elle lui demandait. Mais il a voulu nous faire entendre par-là combien nous devons nous tenir plus assurés d’être exaucés d’un Dieu plein de justice et de miséricorde, si nous ne nous lassons pas de le prier, puisque ce juge, quelque dur et quelque injuste qu'il fût ne put résister à la
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persévérance cette veuve ; et combien nous devons espérer de trouver Dieu propice et disposé à satisfaire nos bons désirs, quand nous remettons pour l'amour de lui les injures qu'on nous a faites, puisque cette veuve ne laissa pas d'obtenir ce qu'elle demandait, quoiqu'elle ne voulût autre chose qu'avoir raison du tort qui lui avait été fait. "
" C'est à quoi tend encore l'exemple de celui qui, ayant reçu chez lui un de ses amis, et n'ayant rien à lui présenter, alla chez son voisin déjà couché et endormi avec toute sa famille, pour lui emprunter trois pains (symbole sous lequel Jésus-Christ a peut-être voulu nous désigner la trinité des personnes dans l'unité d'une même substance), et qui le pressa tant, que, pour se délivrer de ses importunités, plutôt que par amitié, l’autre lui accorda tout ce qu'il voulait : ce qui doit nous faire comprendre que, si un homme troublé dans son sommeil par une demande importune, ne put s'empêcher d'accorder ce qu'on lui demandait, Dieu nous accordera avec infiniment plus de bonté l'effet des demandes que nous lui ferons, puisque, bien loin que nos prières le trouvent jamais endormi, c'est lui qui dissipe notre sommeil spirituel pour nous exciter à le prier. "
" C'est encore dans les mêmes vues que Jésus-Christ nous dit : Demandez, et vous recevrez ; cherchez, et vous trouverez ; frappez à la porte, et on vous ouvrira ; car qui demande reçoit, qui cherche trouve, et on ouvrira à celui qui frappe. Qui est celui d'entre vous qui donne une pierre à son fils qui lui demande du pain, ou un serpent quand il lui demande un poisson, ou un scorpion quand il lui demande un œuf ? Si donc, tout méchant que vous êtes, vous savez discerner ce qui est bon pour le donner à vos enfants, à combien plus forte raison votre père céleste, donnera-t-il ce qui est véritablement bon à ceux qui le lui demandent (LUC, XI, 11 et suiv.) ! Il semble que ces trois choses répondent aux trois excellents dons que l'Apôtre relève entre tous les autres. Car le poisson est un symbole très-naturel de la foi, soit cause que les poissons vivent dans l'eau, et que l'eau du baptême est ce qui nous rend fidèles, soit parce que les tempêtes de ce siècle ne peuvent rien contre une foi véritable, pas plus que celles de la mer ne portent atteinte à la vie des poissons. L'opposition du serpent au poisson est aussi très-naturelle, puisque ce fut le serpent qui, par ses pernicieux artifices, détourna nos premiers parents de croire à la parole de Dieu (Gen., III, 4). L'œuf est de même un symbole très-juste de l'espérance, puisque la vie du poussin qui doit se
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former de l'œuf n'est encore qu'en espérance, ou qu'elle ne se voit pas encore : Car quand on voit ce qu'on a espéré, ce n'est plus un objet d’espérance (Rom., VIII, 24) ; et rien ne pouvait mieux être opposé à l'espérance qu'un scorpion, puisque, au lieu que le propre de l'espérance est d'oublier tout ce qu'on a laissé par derrière et de ne regarder que devant soi, c'est à la queue du scorpion qu'il faut prendre garde au contraire, puisque c'est là qu'est l'aiguillon et le venin. Enfin la charité ne peut être mieux représenté que par le pain, qui tient le premier rang entre les aliments, comme la charité entre les vertus ; et Jésus-Christ ne pouvait rien opposer de plus juste à ce symbole de la charité qu'une pierre, puisque la dureté de la pierre est ce qui marque le mieux celle des cœurs fermés à la charité. "
" Peut-être qu'on pourrait donner à ces paroles quelque autre sens qui leur conviendrait mieux ; mais ce qu'il y a de certain, c'est que celui qui sait donner les vrais biens à ses enfants veut nous inviter par-là à demander, à chercher et à frapper à la porte, c'est-à-dire, à prier avec assiduité. "
" Et pourquoi le veut-il, lui qui sait ce qui nous est nécessaire sans que nous le lui demandions ? Ce n'est pas qu'il ait besoin de nos prières pour connaître nos désirs, puisque nous ne saurions les lui cacher ; mais c'est afin que nos désirs se réveillent et s'enflamment par l'exercice de la prière, pour nous rendre capables de recevoir ce qu'il nous prépare. Car ce qu'il nous prépare est quelque chose de grand, et notre capacité est très étroite ; et c'est pour cela que saint Paul nous dit : Dilatez-vous, et prenez garde que le joug de l'infidélité ne vous presse et ne vous resserre (II Cor., VI, 13-14). Nous serons donc d'autant plus capables de recevoir, et nous recevrons avec d'autant plus de plénitude ce bien suprême que l'œil n'a point vu, parce que ce n'est rien de coloré que l'oreille n'a point entendu, parce que ce n'est point un son, et qui n'est point venu dans l'esprit de l'homme, parce que l'esprit de l'homme doit plutôt s'élever vers lui ; nous le recevrons, dis-je, avec d'autant plus de plénitude que nous y aurons cru plus fidèlement, que nous l'aurons espéré plus fermement, et que nous l'aurons plus ardemment désiré. "
5. Le même, c. 9 : " Un désir continuel, formé par la charité et soutenu par la foi et par l'espérance est donc une prière continuelle. Mais nous ne laissons pas outre cela de prier même vocalement à certaines heures réglées afin que les paroles que nous prononçons ne nous rappellent ce que nous devons désirer et
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que, rentrant en nous-mêmes nous puissions connaître si nos désirs s'enflamment de plus en plus, et nous appliquer à les rendre effectivement de plus en plus vifs. Car c'est par l'ardeur du désir que se mesure l'effet de la prière. "
" Lors donc que l’Apôtre nous dit, Priez sans cesse (I Thess., V, 17), c'est comme s'il disait : Désirez sans cesse la vie heureuse, qui n'est autre que la vie éternelle, et demandez-la sans cesse à celui qui seul peut la donner. Il faut donc ne faire que la désirer et la demander sans cesse à Dieu. Mais, comme les soins et les occupations de la vie attiédissent ce saint désir pour le rallumer, nous revenons de temps en temps à la prière, en nous remettant devant les yeux ce qui doit en être l’objet : autrement, perdant sans cesse de son ardeur, il finirait par s'éteindre. "
" De là il suit encore que cette parole de l'Apôtre, Que vos prières se manifestent devant Dieu (Philippe, IV, 6), ne doit pas être entendue en ce sens que nous devions employer nos efforts à faire connaître à Dieu ce que nous désirons, puisqu'il le sait avant que nous lui ayons rien demandé ; mais elle nous indique le soin que nous devons prendre de juger devant Dieu, par notre patience et notre persévérance de la qualité de nos prières plutôt que d'en faire parade devant les hommes. Peut-être même que l’Apôtre souhaite encore par là que nos prières soient connues des anges qui sont devant le trône de Dieu, afin qu'ils les lui présentent, qu'ils consultent sur cela sa sainte volonté, et qu'ils deviennent visiblement ou invisiblement les ministres de l'effet que Dieu voudra donner à nos prières. Et cela revient à cette parole de l'ange Raphaël à Tobie : J'offrais vos prières à Dieu, et je les lui présentai devant le trône de sa gloire (Tob., XII, 12). "
6. Le même, c. 10 : " Ainsi donc il est très-bon et très-utile de prier longtemps, quand les autres bonnes œuvres et les occupations nécessaires de la vie le permettent, quoique dans ces actions mêmes il faille toujours, comme je l'ai dit, prier par le désir du cœur. Car de prier longtemps, ce n'est pas, comme quelques-uns se l'imaginent, ce que l’Evangile appelle affecter de parler beaucoup dans la prière ; et la prière que le mouvement du cœur soutient et fait durer, est bien différent de celle dont la seule multitude des paroles fait la longueur. Aussi voyons-nous dans l’Evangile que Jésus-Christ lui-même passait les nuits à prier, et que dans son agonie au jardin des Olives il redoublait ses prières : en quoi ce divin Sauveur, qui a prié si utilement pour nous dans les jours de sa vie mortelle, et qui maintenant,
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dans les splendeurs éternelles de sa gloire, reçoit et exauce nos prières avec son Père céleste, n’a fait que nous marquer l'exemple que nous avons à suivre. "
" On dit que les prières des solitaires d'Egypte sont fréquentes mais courtes, et faites comme par élans de peur que cette ferveur de l'esprit, qui est si nécessaire dans la prière, ne vînt se relâcher s'ils priaient trop longtemps : et par-là ils nous font assez voir que, comme il ne faut pas, si l'on sent que cette ferveur ne saurait se soutenir par ce moyen, s'exposer à l'affaiblir en prolongeant sa prière, il ne faut pas non plus interrompre celle-ci, si en la continuant on ne fait qu'entretenir sa ferveur. Ainsi, autant on doit être soigneux de bannir la multitude des paroles de ses prières, autant on doit l'être de persévérer dans la prière si l'on persévère en même temps dans la ferveur. Car ce qu'on appelle parler beaucoup en priant, c'est dire des paroles superflues pour remplir cet acte, d'ailleurs si nécessaire en lui-même. Ce qu'on appelle au contraire prier beaucoup, c'est frapper longtemps, et par les élans d’une véritable piété, à la porte du maître que nous prions, la prière étant de ces affaires qui ont coutume de se traiter plutôt par des gémissements et des larmes, que par des paroles et des discours ; et ces larmes et ces gémissements vont jusqu'au trône de celui qui a tout fait par sa parole, et qui n'a pas besoin de nos paroles. "
7. Le même, c. 11 : " Ce n'est donc qu’à nous-mêmes que ces paroles sont nécessaires dans la prière pour nous rendre présent à l'esprit ce que nous avons à demander, et non pour fléchir Dieu, ou pour lui apprendre ce que nous désirons. Ainsi, lorsque nous lui disons, Que votre nom soit sanctifié, c’est pour nous avertir nous-mêmes que nous devons désirer que le nom de Dieu, qui ne peut jamais cesser d'être saint, soit regardé comme saint parmi les hommes, c'est-à-dire, qu'il y soit toujours respecté (ce qui ne tourne qu’à notre avantage, et non au sien) ; et quand nous disons, Que votre règne arrive, ce règne qui viendra infailliblement, quels que soient nos désirs à cet égard, c'est pour nous exciter à le désirer, afin qu'il vienne pour nous, et que nous y régnions avec Dieu. Quand nous lui disons, Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel, nous lui demandons qu'il nous fasse obéir à sa sainte volonté afin qu'elle s'accomplisse par nous sur la terre, comme les saints anges l'accomplissent dans le ciel. Quand nous lui disons, Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour, nous lui demandons pendant le cours de cette vie, signifié par ce mot aujourd’hui,
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ce qui est nécessaire pour notre subsistance, désigne par le pain, qui est le principal de tous nos aliments, et nous lui demandons encore le sacrement des fidèles qui nous est nécessaire en cette vie pour acquérir, non une félicité temporelle, mais celle de l'éternité. Quand nous lui disons, Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés, nous nous remettons à nous-mêmes devant les yeux ce que nous devons demander, et ce que nous avons à faire pour l'obtenir. Quand nous lui disons, Ne nous abandonnez point à la tentation, nous nous excitons nous-même à lui demander que sa grâce ne nous abandonne pas, et qu'ainsi nous ne soyons jamais ni séduits par la surprise, ni emportés par la violence d'aucune tentation. Enfin, quand nous lui disons, Délivrez-nous du mal, c'est pour nous faire souvenir que nous ne sommes pas encore dans cet heureux état où nous n'aurons aucun mal à souffrir. Ces dernières paroles de l’oraison dominicale sont d'une si grande étendue, qu'elles comprennent tout ce que peut demander un chrétien en quelque affliction qu'il puisse se trouver, et tout ce qui peut être le sujet de ses larmes et de ses prières : c'est par-là qu'il faut qu'il les commence, qu'il les continue et qu'il les achève. Nous avions donc besoin des paroles que renferme cette prière, comme d'un mémorial des choses que nous avons à demander. "
8. Le même, c. 12 : " Car, de quelques autres paroles que nous puissions nous servir en priant, soit que le mouvement du cœur nous les inspire pour s'épancher au-dehors par leur moyen, soit qu'elles aient pour objet de seconder ce mouvement lui-même, nous ne disons autre chose, si nous prions comme il faut, que ce qui est compris dans l'oraison dominicale. Et lorsque nous disons autre chose, ou que nous faisons des demandes qui ne peuvent se rapporter à celles-là, notre prière si elle n'est mauvaise et vicieuse, est au moins terrestre et charnelle ; et dès-lors je ne sais même comment on peut s'empêche de dire qu'elle est mauvaise, puisque ceux qui ont été régénérés par l'esprit ne doivent prier que d'une manière toute spirituelle. "
" Aussi voyons-nous que toutes les prières des saints dans l'Ancien-Testament se rapportent à l'oraison dominicale. Car celui qui dit dans un endroit, Soyez glorifié dans toutes les nations, comme vous l’êtes parmi nous (Ecclé., XXXVI, 4) et ailleurs : Que vos prophéties soient reconnus fidèles et véridiques (ibid., 18), que dit-il autre chose, sinon : Que votre nom soit sanctifié ? Celui qui dit : Dieu des vertus, tournez-vous vers nous, faites luire sur
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nous la lumière de votre visage, et nous serons sauvés (Ps. LXXIX, 4), que dit-il autre chose, sinon : Que votre règne arrive ? Celui qui dit : Dressez mes pas dans la voie de vos préceptes afin que nulle iniquité ne me surmonte (Ps. CXVIII, 133), que dit-il autre chose, sinon : Que votre volonté soit faite sur la terre comme dans le ciel ? Celui qui dit : Ne me donnez point de richesses, mais ne me laissez pas non plus tomber dans la pauvreté (Prov., XXX, 8), que dit-il autre chose, sinon : Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour ? Celui qui dit dans un endroit : Seigneur, souvenez-vous de David et de son extrême douceur (Ps. CXXXI, 1), et ailleurs : Si j’ai rendu le mal pour le mal à ceux qui m'en ont fait, que je succombe devant mes ennemis (Ps. VII, 8), que dit-il autre chose, sinon : Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ? Celui qui dit : Délivrez-moi de la concupiscence de la chair, et faites qu'aucun désir d'impureté ne s'empare de moi (Ecclé., XXIII, 6), que dit-il autre chose, sinon : Ne nous laissez pas succomber à la tentation ? Enfin celui qui dit : Retirez-moi, ô mon Dieu, des mains de mes ennemis, et délivrez-moi de ceux qui s'élèvent contre moi (Ps. LVIII, 1), que dit-il autre chose, sinon : Délivrez-nous du mal ? Parcourez ainsi toutes les prières qui se trouvent dans l’Ecriture sainte, et vous n'y trouverez rien qui ne soit compris dans l'oraison dominicale. On peut donc, il est vrai, prier en d'autres termes ; mais on ne peut rien demander au-delà des choses comprises dans cette divine prière. "
" C'est là ce que nous devons demander sans hésiter, et pour nous-mêmes, et pour nos proches, et nos amis, et pour les étrangers, et pour nos ennemis mêmes, quoique, selon les diverses liaisons et les divers degrés d'amitié on puisse, ou être disposé de longue main, ou se sentir tout d'un coup porté à prier avec plus d'ardeur pour les uns que pour les autres. Quant à ceux qui disent à Dieu dans leurs prières : Seigneur, augmentez mes richesses, ou : Donnez-moi autant de biens que vous en avez donné à celui-ci ou celui-lit, ou : Faites-moi croître en honneurs et en dignités, ou : Rendez-moi puissant, et donnez-moi de la considération dans le monde, ou autres choses semblables, et qui les demandent par un mouvement de cupidité et non en vue de s'en servir selon Dieu pour le bien du prochain ; je ne crois pas qu'ils trouvent rien dans l'oraison dominicale, à quoi ils puissent rapporter de telles demandes. Si donc ils n'ont pas honte de désirer de pareilles choses, qu'ils en aient au moins de les demander ; et si, quoiqu'ils aient honte même de les désirer
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leur cupidité les emporte et les leur fait demander, que ne demandent-ils plutôt à celui à qui nous disons : Délivrez-nous du mal, qu'il les délivre du mal de cette cupidité même ? . . . "
9. Le même, c. 14 : " L'impatience de quelques-uns a fait que Dieu par un effet de sa colère leur a accordé ce qu'ils demandaient ; comme au contraire ç’a été par un effet de sa miséricorde qu’il a refusé à saint Paul ce que lui demandait cet apôtre. C'est ainsi qu'il exauça dans le désert la prière des Israélites (Nom., XI, 33) ; mais leur avidité ne fut pas plutôt rassasiée, que leur impatience fut très-sévèrement punie. C'est ainsi qu'il leur accorda un roi selon leur cœur, comme dit l'Ecriture, et non pas selon le sien : c’est ainsi qu'il accorda au démon même ce qu'il désirait en lui permettant de tenter le saint homme Job, dont Dieu voulait faire éclater la patience et la vertu (JOB, I, 12 ; II, 6). C'est ainsi enfin que Jésus-Christ permit à une légion de démons de se jeter dans un troupeau de pourceaux (LUC, VIII, 32). "
" Si donc l'Ecriture a eu soin de nous conserver ces exemples, c'est pour nous apprendre à ne pas nous faire un mérite de nous trouver exaucés, lorsque c'est notre impatience qui nous a fait demander à Dieu des choses qu'il nous aurait été plus avantageux de ne pas obtenir ; et à ne pas nous abattre, comme si la miséricorde de Dieu était fermée pour nous, lorsqu'il ne nous exauce pas sur des articles qui n'iraient qu’à nous causer de nouvelles douleurs bien plus cuisantes que celles dont nous voudrions être délivrés ou nous mettre dans un état de prospérité capable de nous corrompre et de nous perdre. Convenons donc que, dans ces sortes de choses, nous ne savons si ce que nous demandons est ce qu'il faut demander, et quand le contraire de ce que nous demandons arrive, supportons-le avec patience, et rendons grâces à Dieu de tout, ne doutant point que ce que Dieu a voulu ne soit ce qui nous convient, plutôt que ce que nous voutions. C'est sur quoi notre divin Médiateur nous a montré l'exemple, lorsqu'après avoir dit à son Père par un mouvement emprunté de la volonté de ceux dont il avait bien voulu prendre la nature : Mon Père s'il est possible, que ce calice s'éloigne de moi (MATTH., XXVI, 39), il ajouta aussitôt : Néanmoins que votre volonté s'accomplisse, et non pas la mienne ; et c'est ainsi qu'il est vrai de dire que l'obéissance d’un seul a été la source de la justification de plusieurs (Cf. Lettres de saint Augustin, t. III, pag. 317-331, 335-337). "
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10. Le même, Serm. V de verbis Domini : " Si vous voulez acquérir la justice, mendiez-la auprès de Dieu, qui vous avertissait tout-à-l'heure dans son évangile de demander, de chercher, de frapper à sa porte. Il savait quel mendiant avait besoin de lui, et voilà ce père de famille, ce grand riche, j'entends en richesses spirituelles et éternelles, qui vous adresse cette exhortation : Demandez, cherchez, frappez. Celui qui demande reçoit ; qui cherche trouve, et on ouvrira à celui qui frappe. Il vous exhorte à demander ; si vous lui demandez effectivement, vous payera-t-il d'un refus ? Rappelez-vous cette exhortation tirée de la comparaison d'un riche avare : Il y avait, dit Notre-Seigneur, un juge dans une certaine ville, qui ne craignait point Dieu, et ne se souciait point des hommes ; et il y avait aussi dans la même ville une veuve qui venait souvent le trouver, en lui disant : Faites-moi justice de ma partie : Et il fut longtemps sans vouloir le faire (LUC, XVIII, 2-5) ; mais elle insistait toujours, si bien qu'il accorda à l'importunité ce qu'il refusait d'accorder au besoin. Jésus-Christ a employé encore cette autre comparaison, pour nous engager à lui adresser nos demandes : Quelqu'un à qui un hôte venait d'arriver alla trouver son ami, et lui dit, en frappant à sa porte : Quelqu'un m'est arrivé qui demande à loger chez moi ; prêtez-moi trois pains ; l'autre lui répond : Je suis au lit, et mes serviteurs sont également couchés. Mais son ami ne se désiste pas pour cela de sa demande ; il insiste, il frappe, et il mendie comme un ami peut le faire auprès de son ami. Qu'est-ce que Notre-Seigneur ajoute ? Je vous dis que, quand même il ne se lèverait pas pour lui donner ce qu'il lui demande à cause qu'il est son ami, il se lèverait néanmoins à cause de son importunité, et lui donnerait autant de pains qu'il en voudrait (LUC, XI, 5-8). Ce n'est pas à cause de son amitié qu'il lui donne, dit Notre-Seigneur, mais à cause de son importunité. Que signifient ces paroles, à cause de son importunité ? Elles signifient que cet homme, malgré le refus qu'il venait d'essuyer, ne cessait pas de frapper pour cela, et ne se désistait point de sa demande. A combien plus forte raison Dieu ne nous accordera-t-il pas ce que nous lui demanderons, lui qui est la bonté même, qui nous exhorte le premier à lui demander, qui s'indigne si nous ne lui demandons pas, et qui, lorsqu'il diffère d'accorder ce que nous lui demandons, n'agit pas ainsi en vue de nous refuser, mais pour nous rendre ses dons plus recommandables ? Car ce qu'on désire depuis plus longtemps, fait un plaisir plus doux lorsqu'on l'obtient ; tandis qu'au contraire ce qui est accordé
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à la première demande : perd par-là même de son prix. Demandez, cherchez, redoublez d'instances. En demandant et en cherchant, vous acquerrez de nouveaux titres pour obtenir. Dieu vous tient en réserve ce qu'il refuse de vous donner tout de suite, pour vous apprendre à désirer ardemment d'aussi grands biens que ceux qu'il vous offre. Il faut donc toujours demander, et ne jamais nous lasser de le faire. Car nous sommes les mendiants de Dieu, en même temps que d'autres mendiants nous demandent à nous-mêmes. Si nous voulons qu'il nous reconnaisse pour ses mendiants, reconnaissons aussi les nôtres. "
11. S. CYPRIEN, de Oratione dominicâ (Nous avons déjà observé que ce traité n'est pas de saint Cyprien, mais de Rufin d'Aquilée) : " Puisque nous avons un avocat qui intercède auprès du Père pour nos péchés, pécheurs que nous sommes, lorsque nous demandons qu'ils nous soient pardonnés, n’employons pas d'autres paroles que celles de notre intercesseur. S'il est vrai qu'il a dit : " Tout ce que vous demanderez à mon Père, en mon nom, vous l'obtiendrez, " à plus forte raison sommes-nous assurés d'obtenir ce que nous demanderons au nom de Jésus-Christ en le demandant par ses propres paroles. "
" Lorsque nous prions, que ce soit avec le calme de l'esprit et une crainte respectueuse. Rappelons-nous que nous sommes en la présence de Dieu, et que nous devons chercher à lui plaire aussi bien par l'attitude du corps que par le son de la voix. . . Qu'ils sont nombreux, qu'ils sont féconds, qu'ils sont sublimes, frères bien-aimés, les mystères renfermés dans l'Oraison dominicale ! Resserrés dans des formules courtes, il est vrai, mais abondantes en vertu, ils présentent un tableau abrégé de la doctrine évangélique et embrassent, dans leur énergique brièveté tous les besoins de l'homme. "
" Le Seigneur ne se contenta point de nous apprendre à prier ; il nous prouva la nécessité de la prière par l'autorité de ses exemples. Lui-même priait fréquemment. L'Evangile nous le montre, tantôt s'enfonçant dans la solitude, tantôt se retirant sur la montagne pour s'entretenir avec son Père, et passant les nuits entières dans l'oraison. "
" L'innocence priait ! que doivent faire les criminels ? Les nuits du juste par excellence s'écoulaient dans l'oraison ! quelle obligation impérieuse pour des pécheurs de consacrer aux veilles
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et à l'oraison les heures du sommeil ! Et pourquoi priait-il ? Ce n'était pas pour lui, sans doute. L'innocence n'avait rien à demander. Il priait pour nos fautes, ainsi qu'il le déclare lui-même (LUC, XXII, 31-32) : " Satan a demandé à vous cribler comme le froment. Quant à moi, j'ai prié pour que votre foi ne vienne pas à défaillir. " Puis, quelques moments après, il s'adresse à son Père ; mais alors ce n'est plus pour un seul qu'il l'invoque, c'est pour tous sans exception : " Je ne prie pas seulement pour eux, mais pour tous ceux qui croiront en moi par leur parole, afin que tous ensemble ils soient un, comme vous, mon Père vous êtes en moi, et moi en vous, et qu'ils soient de même un en nous (JEAN, XVII, 20-21). " Prodige d'amour et de miséricorde ! Pouvait-il pousser plus loin la sollicitude pour notre salut ? Non content de nous avoir rachetés, il joint encore l'intercession à l'effusion de son sang. Mais comprenons bien la nature de ses désirs : il veut qu'à l'exemple du Père et du Fils, qui ne sont qu'une seule et même chose, nous demeurions tous retenus dans les mêmes liens. Jugez par-là quel est le crime du téméraire qui brise les nœuds de cette précieuse unité, que Jésus-Christ appelle de ses vœux, parce que son peuple, il le sait bien, ne peut se sauver que par la paix, et que jamais la discorde n'entrera dans le royaume de Dieu. "
" Quand nous vaquons à la prière, notre cœur doit s'y appliquer exclusivement, bannir toutes les réminiscences de la terre, et n'entretenir d'autre pensée que celle de Dieu. C'est dans ce but que le prêtre à l'autel, avant de commencer l'oraison, prépare au recueillement l'esprit des fidèles par cette invitation : " Elevez vos cœurs ! " et que l'assistance répond : " Nous les tenons élevés vers le Seigneur. " Fermons donc à l'ennemi toutes les avenues de notre âme, pour n'y laisser entrer que Dieu. Trop souvent le démon se glisse dans les abords de notre cœur, il s'y embusque furtivement, et là il surprend au passage nos prières puis les détourne du Seigneur, afin que nos lèvres et nos pensées soient en désaccord. Cependant, qui l'ignore ? C'est bien moins la bouche que la volonté, qui doit prier avec une religieuse attention. Quelle étrange indolence que de se laisser entraîner à d'oiseuses et profanes préoccupations comme si la pensée de Dieu ne devait pas alors absorber toutes les autres ! Vous voulez que le Seigneur vous entende, et vous ne vous entendez pas vous-même ! Vous voulez qu'il se souvienne de vous, et vous vous souvenez à peine de lui ! Est-ce la faire bonne garde contre
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l'ennemi ? Non, sans doute ; c'est outrager par une coupable négligence le Dieu que l'on implore ; c'est veiller des yeux, il est vrai, mais dormir du cœur, tandis que le chrétien doit veiller incessamment du cœur lors même que ses yeux s'assoupissent, semblable à l'épouse qui s'écrie au nom de L’Eglise : " Je dors, mais mon cœur veille. " - " Persévérez et veillez dans la prière, " nous crie encore l'Apôtre, afin de nous rappeler que les veilles et la prière ont seules le secret de fléchir le Seigneur. "
" Mais ne vous présentez pas à la prière les mains vides. Une oraison que les œuvres de charité n'accompagnent pas est inefficace, stérile. " Tout arbre qui ne produit pas de fruits est coupé et jeté au feu. " De même les suffrages célestes ne sont pas pour une demande qui arrive là-haut sans le cortège des bonnes œuvres. " La prière est bonne, dit encore l'Ecriture (Tob., XII, 8), quand elle a pour cortège le jeûne et l'aumône. " Car le même Dieu qui doit venir, au jour du jugement, récompense les aumônes et la charité, se montre, dès ce monde, prêt à écouter les demandes de celui qui joint la miséricorde à la prière. C'est ainsi que le centurion Corneille mérita d'être exaucé, parce que sa vie n'était qu'un long enchaînement d'oraisons et d'aumônes. Un ange lui apparut vers la neuvième heure : Corneille, lui dit-il, ta prière et tes aumônes sont montées en présence de Dieu, et il s'est souvenu de toi. Vous le voyez ! les prières montent plus facilement vers le trône de Dieu, soutenues et portées par les bonnes œuvres. L'archange Raphaël rend un semblable témoignage à Tobie, cet homme d'oraison et de miséricorde : Il est honorable de révéler et de confesser les œuvres de Dieu. Quand tu priais avec Sara, je présentais ta prière devant le trône et les splendeurs de Dieu ; et parce que tu ensevelissais les morts, que tu laissais sans retard ton repas, et que tu cachais durant le jour les morts en ta maison, et que tu les ensevelissais la nuit, il a été nécessaire que la tentation t'éprouvât. Et maintenant le Seigneur m'a envoyé pour te guérir, toi et Sara, la femme de ton fils ; car je suis l'ange Raphaël, l'un des sept qui assistent devant les splendeurs du Très-Haut (Cf. Les Pères de l'Eglise, t. V, trad. par M. de Genoude). "
12. S. AMBROISE, Lib. III de Virginibus : " Tâchons par des prières fréquentes de nous rendre Dieu favorable ; car si le Prophète a dit à Dieu : J'ai chanté vos louanges sept fois le jour (Ps. CXVIII, 164), lui qui était engagé dans les embarras de la royauté, que ne devons-nous pas faire nous-mêmes, nous à qui
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a été intimé ce précepte : Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation (MATTH., XXVI, 41) ? Au moins faisons les prières d'usage accompagnées d’actions de grâces, lorsque nous quittons le lit, lorsque nous sortons, lorsque nous sommes pour prendre notre repas, lorsque nous venons de le prendre, l'heure de l'encens, et enfin lorsque nous sommes au moment de nous coucher. Mais même pendant que vous êtes au lit, je voudrais que vous répétassiez en vous-même des psaumes avec l'oraison dominicale, soit dans vos intervalles de sommeil, soit avant de pouvoir vous endormir, afin que, libre de toute affaire séculière, dès le moment de votre entrée au lit, vous vous trouviez occupée de saintes pensées au moment d'être emportée par le sommeil. Enfin, celui-là même (Pythagore) qui adonné à la philosophie le nom qu'elle a encore aujourd'hui, prescrivait tous les jours à un joueur de flûte de lui jouer quelque air tendre au moment où il allait se mettre au lit, pour reposer son âme fatiguée des occupations de la journée. Mais ce philosophe, semblable en cela à celui qui laverait une brique, cherchait vainement à se délivrer des pensées du siècle au moyen d'une autre chose du siècle et en demandant à la volupté un remède à son mal, il ne faisait que s'enfoncer de plus en plus dans la fange. Nous autres au contraire, purifions nos âmes de tous les vices dont le corps est l'instrument, en nous détachant de plus en plus de toute affection terrestre. Nous devons aussi réciter tous les matins en particulier le symbole de notre foi, après l'avoir gravé comme un sceau dans notre cœur. Revenons-y encore toutes les fois que nous nous trouvons en quelque péril. Car un guerrier dans sa tente ou sur un champ de bataille peut-il se dépouiller de ses insignes militaires ? "
15. Le même, Serm. XCIII (al. 92) in natali sanctorum martyrum Nazarii et Celsi : " La prière quand on y joint des œuvres de mortification, de justice et de charité, nous élève au-dessus de ce monde qui passe, pénètre jusque dans le ciel, et est porté par l'ange jusqu'au trône de Dieu même, conformément à ce que l'ange Raphaël a dit quelque part : Lorsque vous priiez, j'offrais votre prière au Très-Haut (Tob., XII, 12). Heureuse l'âme, mes frères, dont les désirs, dont les vœux, dont les prières exemptes de toute infidélité, pures de toute affection grossière et charnelle, étrangère à tout sentiment de haine ou d'animosité mais animée d'une foi vive, fortes du témoignage de la conscience, respirant l'odeur de la pureté, répandant autour d'elles
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le parfum de la charité et de la concorde, s'élèvent jusqu’à Dieu comme un agréable encens, comme la fumée d’un holocauste, présentées à son trône par les messagers célestes. "
14. S. CHRYSOSTOME, Lib. I de Precatione : " Comme le soleil illumine les corps, ainsi la prière éclaire nos esprits. Si donc c'est un malheur pour un aveugle d'être privé de la vue du soleil, quel malheur n'est-ce pas pour un chrétien de ne pas prier sans cesse, et de ne pas introduire par la prière la lumière de Jésus-Christ dans son cœur. Qui n'admirerait cependant cette bonté de Dieu, et cet honneur qu'il nous fait, de nous admettre à le prier et à nous entretenir avec lui ? Car c'est à Dieu même que nous parlons dans le temps de la prière par laquelle nous pouvons nous associer aux anges, et mettre une distance incommensurable entre nous et les êtres privés de raison. Car la prière est le propre office des anges ; elle est même d’une dignité supérieure à la leur, s'il est vrai que converser avec Dieu, ce soit s'élever au-dessus des anges. Or, ils nous font voir eux-mêmes que c'est quelque chose de plus élevé, puisque ce n'est qu'en tremblant qu'ils présentent nos prières, nous apprenant par leur exemple à nous acquitter de ce même devoir avec joie et crainte tout à la fois : avec crainte, parce que nous devons craindre en effet d'être indignes de paraître devant Dieu ; avec joie, il cause de l'honneur accordé à notre nature mortelle d'entrer ainsi en intimité avec Dieu même, et de passer par ce moyen de notre état de mortalité à l'état d'une vie immortelle. . . Car si ceux qui conversent habituellement avec un roi, et qui sont honorés de ses faveurs, ne sauraient être pauvres, il est, encore bien plus impossible que ceux que Dieu admet à converser avec lui aient à craindre la mort ; au moins quant à leurs âmes : car la mort de l'âme, c'est une vie criminelle. Il suit de là que la vie de l’âme consiste à servir Dieu, et à faire ce que ce service exige de sa part ; or, c'est la prière qui procure à l'âme cette vie sainte et conforme à ce que le service de Dieu demande d'elle, c'est elle qui lui amasse ce riche trésor. . . Car il n'est pas possible, non, il ne l'est pas, que, demandant à Dieu la tempérance, la justice, la douceur, la bonté, nous n'obtenions pas l'effet de notre prière. Demandez, a dit le Sauveur, et on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et il vous sera ouvert ; car quiconque demande, reçoit ; qui cherche trouve, et on ouvrira à celui qui frappe (MATTH., VII, 7 ; LUC, XI, 9-10). Et ailleurs : Qui est celui d'entre vous qui donnerait à son fils une pierre, si celui-ci demandait
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du pain ; ou un serpent, s'il lui demandait un poison ; ou un scorpion, s'il lui demandait un œuf ? Si donc vous, quoique vous soyez méchants, vous savez néanmoins donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est dans le ciel donnera-t-il le bon esprit à ceux qui le lui demandent (Luc, XI, 41-45) ? En nous adressant de telles paroles, en nous faisant de telles promesses, le Maître de l'univers nous invite sans doute à le prier ; nous devons donc, pour obéir à Dieu, composer, pour ainsi dire, notre vie entière du chant des hymnes et de la prière, plus occupés du soin de lui rendre le culte qui lui est dû que de celui de nos intérêts les plus chers. Ce sera là le moyen de vivre toujours comme il convient à la dignité de notre nature. Celui qui ne prie pas Dieu, et qui ne cherche pas continuellement à s'entretenir avec lui, est véritablement mort ; il est sans âme, ou il a perdu le sens. Car, quelle plus forte preuve quelqu'un peut-il donner de sa folie, que d'ignorer sa propre grandeur, en se tenant dans l'indifférence par rapport à la prière et en refusant de croire que l'oubli de Dieu est la mort de l’âme ? . . . "
" Que de ne faire aucune prière ce soit pour nous un mal plus grand que la mort même, c'est ce que nous enseigne bien éloquemment Daniel, ce grand prophète, lorsqu'il préfère s’exposer à la mort, plutôt que de rester trois jours seulement sans prier. Car le roi des Perses ne commandait à Daniel aucune action impie ; tout ce qu'il exigeait de lui, c'était de rester trois jours sans adresser de prières (à aucun autre dieu ou à aucun autre homme qu’à lui. Mais le prophète ne peut consentir à rester sans prier même ce court espace de temps) (Les deux lignes renfermées ici entre parenthèses ne se trouvent pas dans l'édition de Gaume), attendu que sans Dieu nous ne sommes capables d'aucun bien ; la grâce de Dieu au contraire nous vient en aide dans nos travaux, et s'empresse de nous les alléger, si elle nous trouve appliqué à la prière, continuellement en posture de suppliants devant lui, et n'attendant que de sa bonté tous les biens désirables. Quand donc je vois quelqu'un indifférence pour la prière, et sans ardeur ni amour pour ce saint exercice, il m'est évident dès-lors qu'il n'est animé d'aucun sentiment généreux. Lorsqu'au contraire j'en vois un autre ne pouvoir se rassasier de rendre à Dieu ses devoirs, et regarder comme le plus grand de tous les malheurs celui de ne pas prier sans cesse, je prononce de lui sans crainte que
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son âme est un temple vivant de Dieu et le sanctuaire de toutes les vertus. Car si, comme le dit le roi Salomon (Ceci ne paraît pas tout-à-fait exact, l'Ecclésiastique étant l'ouvrage de Jésus, fils de Sirach, et non du roi Salomon, comme le dit ici l'auteur de cet opuscule, qui d'ailleurs n'est peut-être pas saint Chrysostôme ; car D. Montfaucon a rangé les deux livres De precatione, dont il est question ici, parmi les ouvrages dont il est douteux qu'ils soient de ce Père), le vêtement du corps, le rire des dents, la démarche de l'homme font connaître quel il est (Ecclé., XIX, 27), la prière et les autres actes de religion sont bien mieux encore le signe de la sainteté ; c’est comme un vêtement spirituel et divin qui donne de la grâce et une véritable beauté à notre âme ; qui met l'harmonie dans toute notre conduite ; qui nous empêche de nous porter quoi que ce soit de répréhensible ou d'inconvenant ; qui nous inspire la crainte de Dieu, et l'estime de l'honneur qu'il nous fait de converser avec lui ; qui nous apprend à déjouer toutes les ruses de l'esprit infernal ; qui écarte de notre esprit les mauvaises pensées et nous porte à dédaigner les voluptés sensuelles. Car c'est là le seul orgueil permis aux disciples de Jésus-Christ, de ne vouloir servir aucune passion mauvaise et de conserver son âme dans une sainte liberté. "
" Je crois démontré pour tout le monde qu'il est impossible d'être vertueux, ou de persévérer à l’être, sans la prière. Et comment l'être en effet si l'on ne recourt continuellement à celui qui donne et soutient la vertu ? Comment quelqu'un pourrait-il aspirer à la pratique exacte de la tempérance t de la justice, sans mettre son bonheur à s'entretenir avec celui qui nous en a imposé le devoir ? Mais je veux vous faire voir en outre que, quand même nous entrerions en prière couverts de crimes, nous en sortirions bientôt purifiés. En effet, quoi de plus grand et même de plus divin que la prière qui peut servir d'antidote à toute les maladies de nos âmes ? . . . "
" Or, que la prière purifie sans peine une âme de ses péchés, c’est ce que nous enseigne l'exemple du publicain, qui n'eut pas plus tôt demandé à Dieu son pardon, qu'il l'obtint ; c'est ce que nous enseigne aussi celui du lépreux, qui fut guéri en même temps qu'il se jeta aux pieds du Sauveur (LUC, XVIII, 13, 35 et suiv.). Car si Dieu n'a pas fait attendre la guérison que ce lépreux lui demandait d'un vice corporel, il sera encore bien plus porté à guérir une âme de ses maux ; puisque, plus l'âme est au-dessus du corps, plus il est raisonnable que Dieu témoigne
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la sollicitude qu'il a pour eux. Nous pourrions rapporter de même mille autres exemples tant anciens que nouveaux, si nous voulions énumérer tous ceux qui ont dû leur salut à la prière. Mais peut-être quelqu'un de ceux à qui une prière fervente et continuelle paraît une charge accablante ou trop pénible nous objectera-t-il ces paroles de Jésus-Christ : Tous ceux qui disent, Seigneur, Seigneur, n'entreront pas pour cela dans le royaume des cieux, mais ceux-là seulement qui font lu volonté de mon Père qui est dans le ciel (MATTH., VII, 24). Si ma pensée était que la prière toute seule suffise pour le salut, on aurait peut-être raison de m'objecter ces paroles ; mais on a tort de me les opposer, lorsque je me borne à dire que la prière est pour nous le principe de tous les biens, le fondement et la racine d'une vie vertueuse. Car ni la tempérance ne peut nous sauver toute seule sans les autres vertus, ni la pratique seule de l'aumône ne peut nous sauver non plus, ni la douceur toute seule, ni toute autre vertu, si les autres ne l'accompagnent ; mais il faut que toutes ensemble elles concourent au salut de notre âme : or, le fondement et la racine de toutes les vertus, c'est la piété. Et de même qu'un navire ou tout autre bâtiment emprunte sa solidité des bases qu'on lui donne, ainsi l’édifice entier de la vertu n'a pas d'autre fondement que la prière : sans elle point de vertus pour nous, point de salut par conséquent. C’est pour cela que saint Paul insiste tant sur ce précepte, lorsqu'il dit dans ses épitres : Persévérez et veillez dans la prière, en l’accompagnant d'action de grâces (Col ., IV, 2) ; Priez sans relâche, rendez grâces de toutes choses, car telle est la volonté de Dieu (I Thess., V, 17-18) ; invoquez Dieu en esprit et en tout temps, par toute sorte de supplications et de prières (Ephés., VI, 18). Ainsi ce prince (Cette expression est loin d’être exacte, au point de vue hiérarchique du moins ; mais il est douteux, ayons-nous déjà dit, que cet opuscule soit de saint Chrysostôme) des apôtres ne cesse-t-il dans son langage vraiment divin de nous exhorter à la prière. Instruits donc que nous sommes par ce grand maître, faisons de la prière l'occupation de toute notre vie, et n'en passons aucun moment sans donner ce rafraichissement à notre âme : car la prière n'est pas moins indispensable au salut, de l'homme, que l'eau ne l'est à la vie des plantes. Et de même que celles-ci ne peuvent fructifier, si elles ne sont continuellement arrosées ou rafraîchies dans leurs racines, ainsi nous ne
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porterons nous-mêmes aucun fruit de vertu, si la prière ne renouvelle chaque instant les forces de notre âme. Nous devons en conséquence devancer le lever du soleil tous les matins en quittant nos lits pour nous mettre en prières, prier de même avant nos repas, prier de même avant le reps de la nuit ; ou pour mieux dire, prier également à toute heure du jour, sans interrompre jamais cet exercice ; y employer de même la plus grande partie des nuits de l’hiver, et les genoux habituellement en terre, faire nos délices de rendre à Dieu l'honneur qui lui est dû. Dites-moi, comment pouvez-vous voir le soleil, sans vous prosterner devant celui qui envoie à vos yeux cette douce lumière ? Comment vous mettre à table, sans adorer celui qui vous procure tant de biens ? Que n'aurez-vous pas craindre à l'entrée de la nuit ? à quels songes devrez-vous vous attendre pour le sommeil, si vous ne cherchez votre défense dans la prière et si vous vous livrez ainsi sans précaution au sommeil ? Vous deviendrez sans peine le jouet et la victime de tous les malins esprits qui ne cessent de rôder autour de nous, et qui feront de nous leur proie, du moment où ils s'apercevront que nous ne serons pas armés de la prière. S'ils nous voient protégés par ce rempart, ils prennent aussitôt la fuite, comme des voleurs qui verraient suspendue sur leurs têtes l’épée d'un soldat. Mais si au contraire ils rencontrent quelqu'un qui ne soit pas armé de la prière, ils se saisissent de lui, et le poussent à toute espèce de crimes et de désordres. Pour vous mettre à couvert de ces malheurs, cherchez votre soutien dans le chant des hymnes et dans la prière, afin que Dieu, ayant pitié de nous, daigne nous admettre tous ensemble dans son royaume, par les mérites de son Fils unique Jésus-Christ (Cf. Sancti Chrysostomi opera, t. II, p. 779-783, édition de Montfaucon ; p. 931-937, édit. de Gaume). "
15. Le même, Lib. II de Precatione ; après avoir résumé en peu de mots ce qu'il a dit dans le premier livre, le saint docteur continue ainsi : " Si l'on disait que la prière est le nerf de l'âme, on ne dirait rien de trop inexact. Car de même que ce sont les nerfs qui donnent au corps la force, soit de courir, soit de se tenir debout, soit de remplir ses diverses fonctions, et que si l'on vient les couper, son organisme n'a plus de lien qui en unisse les parties ; ainsi c'est la prière qui met l'accord dans les opérations de l'âme, qui fait sa force, et qui lui donne l'agilité dont elle a besoin pour s'avancer dans les voies de la vertu. Vous ôter
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vous-même la ressource de la prière, c'est comme si vous retiriez un poisson de l'eau : car si le poisson trouve sa vie dans l'eau, votre âme doit trouver la sienne dans la prière. Au moyen de la prière, vous pouvez vous élever jusqu'aux cieux, et vous approcher de Dieu de plus en plus. Ce que je viens de dire doit suffire pour vous convaincre de la vertu de la prière ; mais il vaut peut-être mieux recourir aux divines Ecritures, et apprendre de la bouche de Jésus-Christ quel trésor de richesses la prière renferme pour ceux qui veulent en faire l'occupation de leur vie entière. " Il leur disait, ainsi le rapporte l'Evangéliste, la parabole suivante, pour faire voir qu'il faut toujours prier " (Luc, XVIII, 4 et suiv.). Ici saint Chrysostôme rapporte en entier la parabole du juge et de la veuve, puis il ajoute un peu plus loin : " Si celui qui de sa vie n'avait fait acte de clémence se trouva tout-à-coup changé et prit en pitié la pauvre veuve, quels effets de la miséricorde divine la prière ne devra-t-elle pas nous attirer ? On pourra concevoir quelle est la force et la vertu de la prière pour peu qu'on porte son attention sur les avantages qu'elle procure tous les jours et à toute heure à ceux qui y sont assidus. Car qui peut ignorer que Dieu, par une suite de cet amour infini qu'il a pour nous, dispense également à tous les hommes, justes ou injustes, la lumière du soleil, de la lune et des étoiles, toutes les diverses espèce d'aliments, les richesses, les moyens de subsistance et mille autres biens ? Or, si, sans être prié, sans qu'on lui fasse de demandes, il se montre tous les jours si prodigue de bienfaits, quels biens n'obtiendront pas de lui ceux dont la vie entière est une prière continuelle ? Disons maintenant combien il est souvent arrivé que des justes aient obtenu pas leurs prières le salut de tout un peuple, de toute une ville, de l'univers entier. "
" La prière a tantôt arrêté la violence du feu, et tantôt apprivoisé les lions. N'est-ce pas ainsi qu'elle a protégé d'un côté les trois jeunes hommes, de l’autre Daniel ? Cela seul, je pense, doit suffire pour prouver à tout le monde qu'elle est assez puissante pour sauver de tous les dangers tous ceux qui ont secours à elle. La prière est le principe du salut, le germe de l'immortalité, le rempart inexpugnable de l'Eglise, une forteresse imprenable, la terreur des démons et le refuge des fidèles (Cf. Sancti Joannis Chrysostomi opera, t. II, p. 785-789, édit. de Montfaucon ; p. 939-943, édit. Gaume)
16. Le même, Hom. V de incomprehensibili Dei naturâ contra
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anomæos : " La prière est une arme puissante, un trésor inépuisable, une richesse impérissable, un port inaccessible aux tempêtes, un principe de tranquillité et de bonheur, la source et la mère de mille biens, et sa puissance surpasse celle des rois (Cf. Ibidem, t. I, p. 488, édit. de Montfaucon ; p. 597, édit. Gaume). "
" La prière a eu la force de suspendre et d'arrêter la violence des flammes, de contenir la fureur des lions, de faire cesser les guerres, de séparer les combattants, de calmer les tempêtes, de chasser les démons, d'ouvrir les portes du ciel, de rompre les liens de la mort, de mettre les maladies en fuite, d'éloigner les calamités, de raffermir les villes ébranlées, d'apaiser la justice de Dieu et de déjouer la malice des hommes. Mais quand je parle de prières, je ne veux pas dire celles qui ne sont que sur les lèvres, mais celles qui s'échappent du fond le plus intime de l'âme. Car de même que les arbres qui poussent dans la terre des racines profondes et fortement entrelacées n'ont point à craindre d'être brisés ou arrachés par la violence des vents, ainsi les prières qui ont leurs racines dans les abîmes du cœur s'élèvent hardiment vers le ciel, sans pouvoir être détournées de leur direction par le tumulte des pensées profanes. C'est ce qui faisait dire au Prophète : Du fond de l'abîme, Seigneur, j'ai crié vers vous (Ps. CXXIX, 4) (Cf. Ibid., p. 490-491, édit. de Montfaucon ; p. 600-601, édit. de Gaume). "
" Rien ne pourra nous abattre, pourvu que nous n'apportions ni tiédeur ni négligence dans nos prières ; car, quels que soient les maux qui nous assaillent, nous les repousserons sans aucune peine. Eh ! qu'y a-t-il d'étonnant à ce que la prière ait la vertu de dissiper les chagrins, puisqu'elle à même la force de détruire et d'effacer le péché (Cf. Ibid., p. 491, édit. de Montfaucon ; p. 601, édit. Gaume) ? "
17. Le même, Hom. LXXI ad populum Antiochenum : " Mais si la foi nous est nécessaire, qu'est-il besoin que nous jeûnions en outre ? C'est que le jeûne joint avec la foi, nous donne une force bien plus grande ; c'est qu'il contribue puissamment à régler nos mœurs ; qu'il nous rend semblables aux anges ; qu'il nous rend forts contre les puissances infernales ; mais il ne suffit point encore par lui-même ; car la prière est aussi nécessaire, et même la prière l'est avant tout le reste. Voyez, en effet, combien d'avantages nous procurent ces deux vertus réunies. Celui qui prie, et qui
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jeûne en même temps comme il le doit, n'a pas besoin de beaucoup de choses ; celui qui n'a pas besoin de beaucoup de choses ne sera jamais avare, et n'en sera que plus disposé à faire l’aumône. Celui qui jeûne n'a rien qui l’embarrasse ; il prie sans distraction, et il éteint en lui les passions mauvaises ; il se rend Dieu propice, et il réprime les mouvements impétueux de son âme. Aussi les apôtres jeûnaient-il presque continuellement. Celui qui prie et jeûne en même temps a comme deux ailes qui le rendent en quelque sorte plus léger que les vents ; il n'est point accablé par le sommeil ; il n'est point comme tant d'autres, languissant dans la prière ; mais il est plus ardent que le feu ; il s'élève sans peine au-dessus de la terre et n'en devient que plus redoutable aux démons. Rien de fort comme l'homme qui prie dans ces dispositions ; car si une pauvre femme a pu vaincre la dureté d’un juge qui ne craignait ni Dieu ni les hommes, à plus forte raison Dieu se laissera-t-il gagner par celui qui lui adresse des prières continuelles, qui commande à ses appétits grossiers et ne se laisse point énerver par les délices. "
18. Le même, Hom. LXXIX ad populum Antiochenum: " Si David, quoiqu’il fût roi et embarrassé de tant de soins, priait sept fois le jour, malgré les distractions qui lui survenaient de tous côtés, quelle excuse pourrons-nous alléguer, nous qui avons tant de temps de reste, et qui ne prions pas continuellement, malgré tous les profits que nous retirerions de nos prières ? Car un homme qui prie avec ferveur et qui met de la continuité dans ses prières se trouve, j'ose le dire, dans l'impuissance de pécher. "
Plus loin, le saint docteur dit, en parlant de la mère de Samuel : " Dieu ne pouvait-il pas accomplir son désir sans attendre qu'elle lui en fît la prière ? ne savait-il pas d'avance ce qu'elle désirait ? Mais s'il le lui eût accordé avant qu'elle ne lui en eût fait la demande, il n'aurait point donné occasion à sa ferveur de se déployer, à sa vertu de se produire au grand jour, et elle n'eût pas ensuite à en recevoir la récompense. Il est donc nécessaire que nous rendions grâces à Dieu et au commencement et à la fin de nos repas (car celui qui se met à table avec cette précaution ne tombera point dans l'ivresse, ne donnera point dans l'excès du vin, ne se trouvera point incommodé par le trop de nourriture dont il aurait chargé son ventre ; mais l’idée de la prière sera comme un frein qui contiendra ses désirs ; il ne prendra d'aliments que dans la mesure convenable, et il attirera mille bénédictions sur toute sa personne. Un repas qui commence et finit par la prière est comme
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une source abondante d'où découle sur nous une infinité de biens. Gardons-nous donc bien de négliger cet avantage : car il serait contradictoire que, tandis que nos domestiques, à nous, se font un devoir de nous remercier et de nous combler de leurs louanges, lorsqu'ils reçoivent quelque chose de nous, nous manquassions nous-mêmes à louer Dieu, qui nous procure la jouissance de tant de biens) (Tout ce passage rapporté entre parenthèses se retrouve dans le Sermon II de Annâ, du saint docteur. Nous n'avons pu trouver le reste, l'édition bénédictine de ses œuvres ne portant que 21 homélies au peuple d'Antioche). Si tant de contretemps nous arrivent, tant dans nos affaires privées que dans celles qui intéressent le salut de la société, cela vient de ce que nous ne mettons pas le soin des choses spirituelles avant celui que nous devons prendre aussi des temporelles. Et qu'on ne me dise pas qu'un séculier occupé journellement à un tribunal ne peut pas jeûner des jours entiers et se rendre à l'église avec les autres fidèles : car il le peut au contraire, et même très-facilement. En effet, s'il ne peut se transporter sans inconvénient à l'église, il peut du moins, sans quitter son tribunal, prier tourné vers l'église placée comme elle l'est vis-à-vis de la place où il se trouve ; car pourvu que votre âme soit libre de toute pensée impure, vous pouvez toujours prier Dieu et obtenir de lui l'effet de vos prières, n'importe que vous soyez sur une place publique, ou dans un chemin y ou sur mer, ou dans un atelier. "
" Vous pouvez, je l'avoue, prier dans votre maison ; mais votre prière n'aura pas le même effet que si vous étiez à l'église, où prêtres et fidèles font monter de concert leurs cris jusqu'à Dieu. Dieu sera moins fortement invité à vous exaucer si vous priez seul, que si vous priez avec vos frères car il y a alors unanimité et concert de prière ; il y a de plus pour les recommander le lien de la charité et le concours des prières des prêtres ; car les prêtres sont institués précisément pour joindre leurs prières à celles des laïques moins puissantes par elles-mêmes que les leurs : et faire monter ensemble les unes et les autres jusqu'au tribunal de Dieu. Et si les prières de l'Eglise ont été à Pierre, qui en était pourtant le soutien, d'un si grand secours qu'elles lui ont obtenu d'être délivré de la prison où on l’avait renfermé (Act., XII, 5), comment pourrez-vous nier la puissance de la prière faite en public ? "
" De même que la charité ne peut être brisée par l'intervalle des lieux, ainsi la distance des lieux n'empêche point l’efficacité
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de ta prière ; mais la prière rapproche au contraire les distances, comme le fait aussi la charité, et établit une réciprocité de secours entre ceux mêmes que sépare une vaste étendue de terres ou de mers. . . . . "
" Il est donc très-avantageux d'être aidé par les prières des saints, mais pourvu qu'on y apporte en même temps son propre concours ; car l'absence de cette condition nous rendrait inutiles les prières des autres et ne nous empêcherait pas de périr. Qu'a-t-il servi en effet aux Juifs d'avoir Jérémie pour intercesseur ? Ce prophète n'a-t-il pas prié Dieu par trois fois pour ce peuple, et à chaque fois n'en a-t-il pas recueilli cette réponse : N'entreprenez point d'intercéder pour ce peuple, ni de me conjurer et de me prier pour eux, parce que je ne vous exaucerai pas (JER., VII, 16) ? Quel profit Saül a-t-il retiré de ce que Samuel a prié et pleuré pour lui jusqu’à la fin de sa vie ? Quel profit en ont retiré les Juifs ? Ne disait-il pas : A Dieu ne plaise que je commette le péché de cesser jamais de prier pour vous (I Sam., XII, 23) ? S'en sont-ils moins perdus ? Car écoutez ce que Dieu dit dans la suite par son prophète : Quand même ces trois hommes, Noé Daniel et Job, se trouveraient au milieu de ce pays, je jure par moi-même, dit le Seigneur Dieu, qu'ils ne délivreraient ni leurs fils ni leurs filles (EZECHX., IV, 20). Quoi donc ? les prières sont-elles inutiles ? Elles sont utiles, au contraire, et même beaucoup, mais pourvu que nous y apportions notre concours. Et si vous voulez savoir combien elles ont été utiles, rappelez-vous les histoires du centenier Corneille et de la veuve Tabithe ; écoutez Dieu lui-même vous dire : Je protégerai cette ville et je la sauverai, à cause de moi et de mon serviteur David (II Rois, XIX, 34). Mais dans quel temps ? Au temps du règne du juste Ezéchias. Autrement, si les prières des méchants pouvaient sauver, pourquoi Dieu ne l'a-t-il pas dit au roi Nabuchodonosor, et lui a-t-il au contraire laissé prendre la ville ? C'est que le péché avait prévalu. Samuel pria une autre fois pour les Israélites et fut exaucé pour eux ; mais dans quel temps ? Dans un temps ou ce peuple était agréable à Dieu, et c'est pour cela qu'il put mettre en fuite ses ennemis (I Sam., VII, 9). Eh ! qu'ai-je besoin, dira quelqu'un, que d'autres prient pour moi, si je suis moi-même agréable à Dieu ? - Que dites-vous, ô homme ? Saint Paul n'a pas dit : Je n'ai point besoin des prières de mes frères, quoique ceux-ci fussent au fond moins dignes que lui ; et vous, vous dites : Qu'ai-je besoin que d'autres prient pour moi ? Saint Pierre n'a pas dit : Qu'ai-je besoin de prières ? car nous lisons
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dans les livres saints : l’Eglise faisait sans cesse des prières à Dieu pour lui (Act., XII, 5), et Dieu le délivra aussitôt de ses liens ; et vous, vous dites : Qu'ai-je besoin de prières ? Vous en avez besoin, par-là même que vous dites qu'elles vous sont inutiles. Car si Dieu fait attention à notre tiédeur et à notre négligence ; s'il considère que, lorsque nous sommes en sa présence et au moment de la prière, nous lui portons moins de respect qu'un serviteur n'en porte à son maître, un soldat à son général, un ami à son ami, puisque, lorsque vous parlez à votre ami, vous pensez à ce que vous lui dites, et qu'au contraire, quand vous vous présentez à Dieu pour obtenir de lui le pardon de vos péchés et de vos crimes, qui sont peut-être bien nombreux, vous êtes sans énergie, et quoique agenouillé à terre, vous laissez votre esprit s'occuper de choses toutes différentes et s'égarer sur la place publique, se promener de rues en rues, de maisons en maisons, tandis que votre bouche prononce quelques mots auxquels vous n'attachez pas de sens, et cela non pas une fois ou deux, mais habituellement et presque toujours ; si Dieu veut vous tenir compte de tout cela, quelle excuse pourrez-vous lui alléguer, quel pardon pourrez-vous obtenir ? "
19. S. GREGOIRE-LE-GRAND, Hom. XXVII in Evangelia : " Si Dieu nous accorde tout ce que nous lui demandons au nom de son Fils (JEAN, XVI, 23), pourquoi donc saint Paul a-t-il prié par trois fois le Seigneur, sans pouvoir obtenir d'être exaucé et a-t-il reçu de lui cette réponse : Ma grâce vous suffit, la vertu se perfectionne dans la faiblesse (II Cor., XII, 9) ? Est-ce que cet excellent prédicateur de la foi n'adressait pas à Dieu ses demandes au nom de son Fils ? Et pourquoi n'a-t-il pas obtenu ce qu'il lui demandait ? Comment peut-il donc être vrai que tout ce que nous demandons au Père au nom du Fils, le Père nous le donnera, si l’Apôtre a demandé au nom du Fils d'être délivré de l'ange de Satan sans pouvoir en obtenir sa délivrance ? Mais c'est là que le nom du Fils est Jésus, que Jésus veut dire sauveur, et que celui-là seul demande au nom du Sauveur, qui demande ce qui peut contribuer à son salut ; car du moment où ce qu'on demande ne peut pas y servir, ce n'est plus au nom de Jésus qu'on fait cette demande au Père. De là vient que Notre-Seigneur dit à ses apôtres encore faibles dans la foi : Jusqu'à présent vous n'avez rien demandé en mon nom (JEAN, XVI, 24). C'était comme s'il eût dit : Vous n'avez pas demandé au nom du Sauveur, puisque vous ne savez pas ce que c'est que de chercher votre salut éternel. C'est
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pour cela aussi que saint Paul ne fût pas exaucé, puisque, s'il eut été délivré de la tentation, cela ne lui eût pas profité pour son salut. Nous avons vu de nos yeux, mes frères, votre empressement à vous rendre à la fête du martyr, la ferveur avec laquelle vous vous prosternez en terre, vous vous frappez la poitrine, vous vous répandez en prières et en cantiques de louanges, vous trempez vos visages dans vos larmes : mais examinez bien la qualité de vos prières ; voyez si vous les faites au nom de Jésus, si c'est votre salut éternel que vous sollicitez. Quoique vous soyez dans le temple de Jésus, ce n'est pas Jésus que vous cherchez, si, tout prosterné que vous êtes ici sur le seuil de l'éternité, vous vous arrêtez à demander des biens temporels. Celui-ci, dans la prière qu'il fait, demande une épouse ; celui-là une villa ; un autre un vêtement ; un autre des aliments. Je conviens que si vous avez besoin de ces choses, c'est à Dieu qu'il faut les demander ; mais nous devons nous rappeler sans cesse cette instruction que nous avons reçu du Sauveur : Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par surcroit (MATTH., VI, 33). On peut donc, sans commettre de fautes, demander à Jésus ces sortes de choses, pourvu qu'on ne le fasse pas avec trop d'attache. Mais ce qui est plus grave, c'est qu'il y a des gens qui demandent la mort d'un ennemi, et qui poursuivent ainsi par leurs imprécations ceux qu'ils ne peuvent atteindre de leurs épées. C'est là se rendre coupable de la mort de son ennemi du vivant de son ennemi même. Dieu nous ordonne d'aimer nos ennemis, et malgré cet ordre qu'il nous fait, nous le prions de nous en défaire. Quiconque prie de la sorte, s'attaque dans ses prières même à l'auteur de toutes choses. De là ce qui est dit par allusion au crime de Judas : Que sa prière même lui tourne à péché (Ps. CVIII, 7). La prière tourne à péché à celui qui demande la chose même que défend celui à qui il adresse sa prière. C'est pour cela que la Vérité incarnée nous a fait ce commandement : Lorsque vous vous présenterez pour prier si vous avez quelque chose contre quelqu’un, pardonnez-lui (MARC, XI, 27). Cette nécessité du pardon des injures sera mise encore dans un plus grand jour, si je puis vous rapporter à l'appui quelque témoignage de l'Ancien-Testament. Les Juifs ayant offensé leur Dieu par une révolte qui méritait une répression sévère, le Seigneur défendit à son prophète de le prier pour ce peuple rebelle : N'intercédez point pour ce peuple, lui dit-il (JEREM., XI, 14) ; ne me conjurez point et ne me priez point pour eux, parce que quand
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Moïse et Samuel se présenteraient devant moi, mon cœur ne serait point pour ce peuple (ibidem, XV, 1). Pourquoi Dieu, sans parler des autres patriarches, ne nomme-t-il ici que Moïse et Samuel, dont il recommande d'autant mieux la puissance d'intercession, qu'il déclare en ce cas leur intercession même impuissante ? C'est comme s'il disait : Je n'écouterai pas ceux-là même que j'ai coutume d'écouter le plus favorablement. Mais pourquoi Moïse et Samuel ont-ils plus de crédit pour cet effet que les autres patriarches, si ce n'est parce que ce sont les seuls de l'Ancien-Testament dont il soit rapporté qu'ils aient prié pour leurs ennemis ? L'un est poursuivi par son peuple à coups de pierre, et il n'en prie pas moins le Seigneur pour ceux mêmes qui le lapident (Exod., VIII, 8-12). L'autre est démis de sa charge et, sollicité de prier pour le peuple qui lui a fait cette injure, il s’écrie : Dieu me garde de me rendre coupable envers lui du péché que je commettrais en cessant de prier pour vous (I Sam., XII, 23). - Quand Moïse et Samuel se présenteraient devant moi, mon cœur n'en serait pas plus pour ce peuple. C'est comme s'il disait ouvertement : Je n'écouterais pas les prières qu'ils me feraient pour leurs amis, quoique je les sache portés à prier pour leurs ennemis mêmes. Le grand mérite de la prière est donc surtout dans l'héroïsme de la charité ; et on est plus sûr d'obtenir ce qu'on demande, quand la prière que l'on fait n'est pas restreinte par la haine que l'on garderait à son ennemi. "
20. Le même, in Psalmum sextum pænitentialem : " Dieu aime à être prié, à se voir contraint, à se laisser vaincre par nos importunités. C'est pour cela qu'il vous dit : Le royaume de Dieu souffre violence, et ce sont les violents qui l'emportent (MATTH., XI, 12). Soyez donc persévérant dans vos prières ; montrez-vous importun de cette manière ; ne vous lassez jamais de prier. Si celui que vous priez fait semblant de ne pas vous entendre, faites-vous ravisseur du royaume des cieux : usez de violence ; oui, faites violence au ciel lui-même. Quelle rapine pourrait vous enrichir plus que celle-là? Quoi de plus glorieux qu'un pareil acte de violence ? Sainte violence, dont Dieu ne s'offense pas, mais qu'il récompense au contraire ; qui, bien loin de nuire au prochain, sert particulièrement ses intérêts, qui n'augmente pas le nombre des péchés, mais le diminue au contraire. Sainte violence, je ne crains pas de le répéter, par laquelle on ne cherche pas à obtenir un bien périssable mais on entre en possession d'un royaume qui n'aura point de fin. "
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Question III
Quels exemples peuvent servir à démontrer l’efficacité et les heureux effets de la prière ?
L'apôtre saint Jacques nous démontre par l'exemple suivant la vertu de la prière : Elie était un homme sujet comme nous à toutes les misères de la vie ; et cependant, ayant prié Dieu avec une grande ferveur pour qu'il ne plut point, il obtint qu'il cessât de pleuvoir sur la terre l'espace de trois ans et demi. Il pria de nouveau, et le ciel donna de la pluie, et la terre produisit son fruit (JAC., V, 17-18). Saint Augustin allègue plusieurs autres exemples pour prouver cette même vérité : " A la prière de Moïse et de Samuel, le peuple juif remporte la victoire sur les Amalécites et sur les Philistins. Jérémie en prison puise de nouvelles forces dans la prière. La prière de Daniel lui fait goûter la paix parmi les lions. Celle des trois jeunes hommes les fait tressaillir de joie au milieu des flammes. Le larron prie attaché en croix, et gagne sur-le-champ le paradis. Suzanne, par sa prière triomphe de l'injuste accusation que lui avaient intentée d'infâmes vieillards. La prière d'Etienne lui ouvre le ciel et fait la conquête de Saul, rangé
parmi ceux qui le lapident. "
Ces exemples ne montrent pas seulement les heureux effets qui résultent de la prière, mais nous font voir aussi la ferveur et la constance d'application avec laquelle nous devons nous y adonner. De là ces exhortations que nous adressent les apôtres dans leurs écrits : Priez sans relâche ; rendez grâces à Dieu en toutes choses. . . Priez les uns pour les autres, afin que vous soyez sauvés, ca r la prière persévérante du juste a beaucoup de pouvoir. . . Ce qui nous donne de la confiance envers Dieu, c'est qu'il nous exauce en tout ce que nous lui demandons de conforme à sa volonté. . . Si quelqu’un voit son frère commettre un péché qui n'aille point à la mort, qu'il prie, et Dieu donnera la vie à ce pécheur.
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TEMOIGNAGES DE L’ECRITURE.
1. JACQUES, V, 16-17 : " Priez les uns pour les autres, afin que vous soyez sauvés ; car la prière assidue de l'homme juste peut beaucoup. - Elie était un homme semblable à nous, sujet à toutes les misères de la vie. . . " Et le reste comme dans le corps de la réponse.
2. I Rois, XVII, 1, 22 : " En ce temps-là, Elie de Thesbé, qui était un habitant de Galaad, dit à Achab : Vive le Seigneur, le Dieu d'Israël, devant qui je suis ! Il ne tombera pendant ces années ni rosée ni pluie, que selon la parole qui sortira de ma bouche. . . "
" Et le Seigneur exauça la voix d’Elie, et l'âme de l'enfant rentra en lui, et il recouvra la vie. "
3. Ibid., XVIII, 36, 38, U-45 : " Le prophète Elie s'approcha et dit : Seigneur Dieu d'Abraham, etc. - En même temps le feu du Seigneur tomba et dévora l’holocauste. - Et Elie dit à Achab : Va, mange et bois ; cas j'entends le bruit d'une grande pluie. - Achab s'en alla pour manger et boire. Et Elie monta sur le haut du Carmel, où, se penchant vers la terre, il mit son visage entre ses genoux, - et dit il son serviteur : Va, et regarde du côté de la mer. Ce serviteur étant allé regarda, et revint dire : Il n'y a rien. Elie lui dit encore : Retournes-y par sept fois. - Et la septième fois, il parut un petit nuage qui s'élevait de la mer, grand comme le pied d'un homme. Elie dit à son serviteur : Va, et dis à Achab : Mets les chevaux à ton char, et descends, de peur que 1a pluie ne te surprenne. - Et tandis qu'il se tournait de côté et d'autre, voilà que tout-à-coup le ciel se couvrit de ténèbres, en même temps que de nuées que poussait le vent, et il tomba une grande pluie. "
4. LUC, IV, 25-26 : " Je vous le dis en vérité : il y avait plusieurs veuves en Israël au temps d'Elie, quand le ciel fut fermé durant trois ans et demi, et qu'il y eut une grande famine sur
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toute la terre : - et néanmoins Elie ne fut envoyé à aucune d'entre elles, mais à une veuve de Sarepta, au pays des Sidoniens. "
5. Ecclésiastique, XLVIII, 1-4 : " Le prophète Elie s'éleva comme un feu, et ses paroles brûlaient comme un flambeau ardent. - Il frappa le peuple du fléau de la famine, et ceux qui
l'irritèrent par leur envie furent réduits à un petit nombre ; car ils ne pouvaient supporter les préceptes du Seigneur. - En parlant au nom du Seigneur, il ferma le ciel, et il en fit tomber le
feu par trois fois. - Quelle gloire, ô Elie, vous vous êtes acquise par vos miracles ! et qui peut se glorifier comme vous ? "
6. Exode, XVII, 8-14 : " Cependant Amalec vint à Raphidim pour combattre contre Israël. - Alors Moïse dit à Josué : Choisis des guerriers et va combattre contre Amalec ; je me tiendrai demain sur le haut de la colline, ayant en main la verge de Dieu. - Josué fit ce que Moïse lui avait dit, et alla combattre contre Amalec. Or Moïse, Aaron et Hur montèrent sur le haut de la colline. - Et lorsque Moïse tenait ses mains élevées, Israël était victorieux ; mais lorsqu’il les abaissait tant soit peu, Amalec avait l'avantage. - Cependant les mains de Moïse s'étaient lassées et appesanties ; c'est pourquoi ils prirent une pierre et la mirent sous lui ; il s'y assit, et Aaron et Hur lui soutenaient les mains des deux côtés. Ainsi ses mains ne se lassèrent plus jusqu’au coucher du soleil. - Et Josué mit en fuite Amalec, et fit passer son peuple au fil de l’épée. - Alors le Seigneur dit à Moise : Ecris ceci dans un livre, pour que cela serve de monument, et fais-le entendre à Josué, car j'effacerai la mémoire d’Amalec de dessous le ciel. "
7. Judith, IV, 11-17 : " Alors Eliacim, grand-prêtre du Seigneur, alla dans tout le pays d'Israël et parla au peuple, - en ces termes : Sachez que le Seigneur vous exaucera, si vous persévérez toujours dans les jeûne et les prières devant le Seigneur. - Souvenez-vous de Moïse, serviteur de Dieu, qui, en combattant non avec le fer, mais par de saintes prières, vainquit Amalec, qui se confiait en son courage, en sa puissance, en son armée, en ses boucliers, en ses chars et en ses cavaliers. - C'est ainsi que seront traités tous les ennemis d'Israël, si vous persévérez dans l'œuvre que vous avez commencée. - Emu par ces paroles, le peuple pria et persévéra en la présence du Seigneur ; - et ceux mêmes qui présentaient des holocaustes au Seigneur étaient couverts de cilices en lui offrant leurs sacrifices, et la cendre était
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sur leurs têtes. - Et ils priaient Dieu de tout leur cœur qu'il lui plût de visiter son peuple d'Israël. "
8. I Sam., VII, 5-13 : " Samuel leur dit : Assemblez tout Israël à Masphath, afin que je prie le Seigneur pour vous. - Et ils s'assemblèrent à Masphat, ils y puisèrent de l'eau qu'ils répandirent devant le Seigneur, jeûnèrent ce jour-là et dirent : Nous avons péché devant le Seigneur. Or, Samuel jugea les enfants d'Israël à Masphath. - Les Philistins ayant appris que les enfants d'Israël s'étaient assemblés à Masphat, leurs princes marchèrent contre Israël. A cette nouvelle, les enfants d'Israël eurent peur des Philistins, - et dirent à Samuel : Ne cessez point de crier pour nous vers le Seigneur notre Dieu, afin qu'il nous sauve de la main des Philistins. - Samuel prit un agneau qui était encore à la mamelle ; il l'offrit tout entier en holocauste au Seigneur, et cria vers le Seigneur pour Israël ; et le Seigneur l’exauça. - Au moment où Samuel offrait son holocauste, les Philistins commencèrent le combat contre Israël ; mais en même temps le Seigneur tonna avec un bruit épouvantable sur les Philistins, et les frappa de terreur ; et ils tombèrent devant Israël. - Les Israélites étant sortis de Masphat, poursuivirent les Philistins en les taillant en pièces jusqu’au lieu qui est au-dessous de Bethchar. Et Samuel prit une pierre qu'il mit entre Masphath et Sen, et il appela ce lieu la pierre du secours, en disant : Le Seigneur est venu jusqu'ici à notre secours. - Les Philistins furent alors humiliés et n'osèrent plus venir sur les terres d'Israël ; car la main du Seigneur pesa sur les Philistins tant que Samuel gouverna le peuple. "
9. JEREMIE, XXXII, 2-3, 16-17, 26-27-28, 36-38 : " Alors l'armée du roi de Babylone assiégeait Jérusalem, et le prophète Jérémie était enfermé dans le vestibule de la prison qui était dans la maison du roi de Juda. - Car Sédécias, roi de Juda, l'avait fait mettre en prison, en disant : Pourquoi nous dites-vous dans vos prophéties : Voici ce que dit le Seigneur : Je livrerai cette ville entre les mains du roi de Babylone, et il la prendra ?. . . - Et après avoir donné le contrat d'acquisition à Baruch, fils de Néri, je priai le Seigneur en disant : Hélas ! hélas ! hélas ! Seigneur Dieu, qui avez fait le ciel et la terre par votre grande puissance et la force invincible de votre bras, rien ne peut vous être difficile, etc. - Alors le Seigneur parla à Jérémie et lui dit : Je suis le Seigneur, le Dieu de toute chair. Y a-t-il rien qui me soit difficile ? - C'est pourquoi voici ce que dit, le Seigneur, etc.
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- Après cela néanmoins, voici ce que dit le Seigneur, le Dieu d'Israël, à cette ville dont vous dites qu'elle sera livrée entre les mains du roi de Babylone, et abandonnée à la famine et à la peste. - Je rassemblerai ses habitants de tous les pays où je les aurai dispersés dans le transport de ma fureur, de ma colère et de mon indignation ; je les ramènerai en ce lieu, et les y ferai habiter en assurance. - Ils seront mon peuple, etc. "
10. DANEL, VI, 10-11, 21-23 : " Daniel ayant appris que cette loi avait été portée, entra dans sa maison, et ouvrant les fenêtres de sa chambre du côté de Jérusalem, il fléchissait les genoux chaque jour à trois heures différent ; et il adorait son Dieu, et lui rendait ses actions de grâces comme il avait coutume de faire auparavant. - Ces hommes donc épiaient avec grand soin, etc. - Daniel répondit au roi : O roi ! vivez éternellement. - Mon Dieu à envoyé son ange, qui a fermé la gueule des lions et ils ne m'ont fait aucun mal, parce que j’ai été trouvé juste devant lui, et que je n'ai rien fait devant vous, ô roi, qui puisse me rendre coupable. - Alors le roi, transporté de joie, ordonna que Daniel fût tiré de la fosse aux lions ; et Daniel fut tiré de la fosse, et on ne trouva sur son corps aucune plaie, parce qu'il avait cru en son Dieu. "
11. Id., III, 23-26, 49-54 : " Cependant ces trois hommes, Sidrach, Misach et Abdénago, tombèrent tout liés au milieu des flammes de la fournaise. - Et ils marchaient au milieu de la flamme, louant Dieu et bénissant le Seigneur. - Cependant Azarias, se tenant debout, fit cette prière et ouvrant la bouche au milieu du feu, il dit : Soyez béni, Seigneur Dieu de nos pères et que votre nom soit loué et glorifié dans tous les siècles, etc. - Or, l'ange du Seigneur était descendu vers Azarias et ses compagnons, dans la fournaise, et écartant la flamme, - il avait formé au milieu de la fournaise un vent frais et une douce rosée, et le feu ne les toucha nullement, ne les incommoda point et ne les gêna en rien. - Alors ces trois hommes, etc. "
12. LUC, XXIII, 42-43 : " Il disait à Jésus : Seigneur, souvenez-vous de moi, lorsque vous serez parvenu dans votre royaume. - Jésus lui dit : En vérité, je vous le dis, vous serez aujourd'hui avec moi dans le paradis. "
13. DANIEL, XIII, 41-44 : " Toute l’assemblée les crut, en considération de leur qualité d'anciens et de juges du peuple, et ils condamnèrent Suzanne à mort. - Alors Suzanne jeta un grand cri, et dit : Dieu éternel, qui pénétrez ce qu'il y a de plus caché et qui connaissez toutes choses avant mêmes qu’elles soient faites,
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- vous savez qu'ils ont porté contre moi un faux témoignage ; et voilà que je meurs sans avoir rien fait de tout ce qu'ils ont inventé si malicieusement contre moi. - Le Seigneur exauça sa Prière, etc. "
14. Actes, VII, 55,58-59 : " Mais Etienne étant rempli du Saint-Esprit, et levant les yeux au ciel, vit la gloire de Dieu, et Jésus qui était debout à la droite de Dieu. - Ils lapidaient Etienne qui priait, et qui disait : Seigneur Jésus recevez mon esprit. - Puis s'étant mis à genoux, il jeta un grand cri, disant : Seigneur, ne leur imputez pas ce péché. Et quand il eut dit ces mots, il s’endormit dans le Seigneur. "
15. Genèse, XXV, 21 : " Isaac pria le Seigneur pour son épouse, parce qu'elle était stérile ; le Seigneur l’exauça et fit concevoir Rébecca. "
16. Exode, VIII, 42-45, 50-54 : " Moïse et Aaron étant sortis de devant Pharaon, Moise invoqua le Seigneur à cause de la promesse qu'il avait faite à Pharaon de le délivrer des grenouilles au jour marqué. - Et le Seigneur fit ce que Moïse lui avait demandé, et les grenouilles moururent dans les maisons, dans les villages et dans les champs, etc. - Moïse ayant quitté Pharaon, pria le Seigneur. - Et le Seigneur fit ce que Moïse lui avait demandé, et il chassa toutes les mouches qui tourmentaient Pharaon, ses serviteurs et son peuple, et il n'en resta pas une seule. "
17. Ibid., IX, 53 : " Après que Moïse eut quitté Pharaon et fut sorti de la ville, il éleva les mains vers le Seigneur, et le tonnerre et la grêle cessèrent et il ne tomba plus une seule goutte d'eau sur la terre. "
18. Ibid., X, 18- 19 : " Moïs ayant quitté Pharaon, pria le Seigneur, - qui ayant fait souffler de l’occident un vent impétueux y enleva les sauterc1les et les poussa dans la Mer Rouge, de sorte qu'il n'en demeura pas une seule dans toute l’Egypte. "
19. Ibid., XIV, 15-16, 21-22 : " Et le Seigneur dit à Moïse : Pourquoi cries-tu vers moi ? Commande aux enfants d'Israël de partir. - Et toi, élève ta verge et étend ta main sur la mer, et divise-la, pour que les enfants d'Israël y marchent au milieu à pied sec. - Moïse ayant étendu sa main sur la mer, le Seigneur en divisa les eaux, en faisant souffler pendant toute la nuit un vent impétueux et brûlant qui en dessécha le fond, et l’eau resta divisée. - Les enfants d'Israël marchèrent au milieu de la mer mise à sec, et les eaux s'élevaient comme une muraille à droite et à gauche. "
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20. Ibid., XXXII, 9-14, 30-35 : " Le Seigneur dit encore à Moïse : Je vois que ce peuple a la tête dure ; - maintenant donc, laisse-moi faire, et mon indignation va s'allumer contre eux, et je vais les exterminer, et je ferai de toi le chef d'un grand peuple. - Mais Moïse conjurait le Seigneur son Dieu en disant : Seigneur, pourquoi votre colère s'allume-t-elle contre votre peuple, que vous avez tiré de l'Egypte avec une grande puissance et par la force de votre bras ? - Ne permettez pas, je vous prie, que les Egyptiens puissent dire : Il les a tirés d’Egypte avec adresse pour les faire périr sur les montagnes, et les exterminer de dessus la terre. Que votre colère s'apaise, et épargnez à votre peuple le mal dont vous lui faites la menace. - Souvenez-vous d'Abraham, d'Isaac et d'Israël vos serviteurs, à qui vous avez juré par vous-même en disant : Je multiplierai votre race comme les étoiles du ciel, et je donnerai à votre postérité toute cette terre dont je vous ai parlé et vous la posséderez à jamais. - Alors le Seigneur ne voulut plus faire à son peuple le mal dont il venait de parler. - Le lendemain, Moïse dit au peuple : Vous avez commis un grand péché ; maintenant donc je monterai vers le Seigneur, pour voir si je pourrai en quelque manière le fléchir pour votre crime. - Et étant retourné vers le Seigneur, il lui dit : Ecoutez-moi, je vous prie. Ce peuple à commis un très-grand crime, car ils se sont fait des dieux de métal d'or ; mais je vous conjure de leur pardonner cette faute : - ou, si vous ne le faites, effacez-moi, je vous prie, du livre que vous avez écrit. - Le Seigneur lui répondit : J'effacerai de mon livre celui qui aura péché contre moi ; - mais pour vous, allez, et conduisez ce peuple au lieu que je vous ai dit ; mon ange marchera devant vous, et au jour de la vengeance, je visiterai ce peuple pour le péché qu'il a commis. - Le Seigneur frappa donc le peuple d'une plaie, pour avoir sacrifié au veau d'or qu'Aaron leur avait fait. "
21. Nombres, XI, 1-2 : " Cependant le peuple se laissa emporter aux murmures contre le Seigneur, en se plaignant de la fatigue qu'il endurait. Le Seigneur l'ayant entendu entra en colère, et le feu du Seigneur s'étant allumé contre eux, dévora tout ce qui était à l'extrémité du camp. - Alors le peuple ayant adressé ses cris à Moïse, Moïse pria le Seigneur, et le feu s'éteignit. "
22. Ibid., XII, 13-15 : " Alors Moïse cria vers le Seigneur, et lui dit : Mon Dieu, guérissez-la (Marie), je vous prie. - Le Seigneur lui répondit : Si son père lui avait craché au visage,
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n'aurait- elle pas dû demeurer au moins pendant sept jours couverte de honte ? Qu'elle soit donc mise à l'écart hors du camp pendant sept jours, et après cela on la fera revenir. - Marie fut donc reléguée hors du camp pendant sept jours, et le peuple ne quitta point ce lieu, jusqu'à ce que Marie fût rappelée. "
23. Ibid., XIV, 11-13, 19-21 : " Le Seigneur dit à Moïse : Jusqu'à quand ce peuple m'outragera-t-il par ses paroles ? Jusqu'à quand refusera-t-il de me croire, après tous les prodiges que j'ai faits à leurs yeux ? - Je les frapperai donc du fléau de la peste, et les exterminerai ; et pour toi, je t'établirai prince sur un autre peuple plus fort et plus puissant que celui-ci. - Moïse répondit au Seigneur : Les Egyptiens, du milieu desquels vous avez tiré ce peuple, etc. . . - Pardonnez, je vous supplie, à ce peuple son péché selon la grandeur de votre miséricorde, comme vous lui avez été propice depuis sa sortie d'Egypte jusqu'en ce lieu. - Le Seigneur lui répondit : Je leur ai pardonné selon que tu me l'as demandé. - Je jure par moi-même que toute la terre sera remplie de la gloire du Seigneur, etc. "
24. Ibid., XVI, 15, 31-33, 43-48 : " Moïse entrant donc dans une grande colère dit au Seigneur : Ne regardez point leurs sacrifices ; vous savez que je n'ai jamais rien reçu d'eux, pas même un âne, et que je n'ai jamais fait tort à aucun d'eux. - Aussitôt donc qu'il eut cessé de parler, la terre se rompit sous leurs pieds, - et ouvrant ses abîmes, elle les engloutit avec leurs tentes et toutes leurs richesses. - Et ils descendirent tout vivants dans l'enfer, engloutis qu'ils furent par la terre, et ils disparurent du milieu du peuple. Alors Moise et Aaron s'étant prosternés contre terre, - Moïse dit à Aaron : Prends ton encensoir, mets-y du feu de l'autel avec de l'encens, et va aussitôt vers le peuple assemblé, afin de prier pour lui ; car la colère est déjà sortie du trône de Dieu, et la plaie commence à éclater. - Aaron fit ce que Moïse lui commandait : il courut au milieu de la multitude que le feu dévorait déjà et offrit l'encens ; - et se tenant debout entre les morts et les vivants, il pria pour le peuple, et la plaie cessa. "
25. Ibid., XXI, 6-8 : " C'est pourquoi le Seigneur envoya contre le peuple des serpents, dont la morsure brûlait comme le feu ; plusieurs en ayant été blessés et tués, - les autres vinrent à Moïs et lui dirent : Nous avons péché parce que nous avons parlé contre le Seigneur et contre vous. Priez-le qu'il nous délivre de ces serpents. Moïs pria donc pour le peuple, - et le Seigneur
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lui dit : Fais un serpent d'airain, et expose-le pour qu'il serve de signe ; et quiconque étant blessé le regardera, vivra. "
26. I Sam., I, 10-11, 15-1 8 : " Anne, qui avait le cœur plein d'amertume, vint prier le Seigneur en répandant beaucoup de larmes, - et elle fit un vœu en disant : Seigneur des armées, si, jetant un regard sur l'affliction de votre servante, vous daignez vous souvenir de moi, si vous n'oubliez pas votre servante, et que vous donniez à votre servante un enfant mâle, je le donnerai au Seigneur tous les jours de sa vie, et le rasoir ne passera point sur sa tête. "
" Anne lui répondit : Pardonnez-moi, mon Seigneur ; je suis une femme plongée dans l'affliction ; je n'ai bu ni vin ni rien qui puisse enivrer ; mais j'ai répandu mon âme en présence du Seigneur. - Ne croyez pas que votre servante soit comme une des filles de Bélial ; car il n'y a que l'excès de ma douleur et de mon affliction qui m'ait fait parler jusqu'à cette heure. - Alors Héli lui dit : Allez en paix, et que le Dieu d'Israël vous accorde la demande que vous lui avez faite. Anne lui répondit : Plût à Dieu que votre servante trouvât grâce à vos yeux ! Cette femme alla ensuite retrouver son mari, prit de la nourriture, et ne porta plus comme auparavant un visage abattu. "
27. Ibid., XII, 17-1 8 : " Ne fait-on pas aujourd'hui la moisson du froment ? Cependant j'invoquerai le Seigneur, et il fera éclater le tonnerre et tomber la pluie, afin que vous sachiez et voyiez combien est grand devant le Seigneur le mal que vous avez fait en demandant un roi. - Samuel cria donc vers le Seigneur, et le Seigneur en ce jour-là fit éclater le tonnerre et tomber la pluie. "
28. II Rois, XIX, 14-15, 33 : " Ezéchias ayant reçu cette lettre de Sennachérib de la main des ambassadeurs, la lut, vint dans le temple, étendit la lettre devant le Seigneur, - et fit sa prière devant lui en ces termes : Seigneur Dieu d'Israël, qui êtes assis sur les chérubins, vous seul êtes le Dieu de tous les rois de la terre ; c'est vous qui avez fait le ciel et la terre, etc. - Cette même nuit l'ange du Seigneur vint dans le camp des Assyriens, et y tua cent quatre-vingt-cinq mille hommes. Et Sennachérib, roi des Assyriens, s'étant levé au point du jour, vit tous ces corps morts. " On retrouve ce même fait rapporté dans Isaïe chap. XXXVII.
29. Ibid., XX, 1-6 : " En ce temps-là, Ezéchias fut malade à mort, et le prophète Isaïe, fils d'Amos, vint le trouver et lui dit :
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Voici ce que dit le Seigneur : Mets ordre à ta maison, car tu ne vivras pas davantage, et tu vas mourir. - Alors Ezéchias, se tournant du côté du mur, fit sa prière au Seigneur en ces termes : - Seigneur, souvenez-vous, je vous prie, de quelle manière j'ai marché devant vous, dans la vérité et avec un cœur parfait, m'attachant à faire ce qui vous était agréable. Ezéchias versa ensuite beaucoup de larmes. - Et avant qu'Isaïe eût franchi la moitié du vestibule, le Seigneur lui parla, et lui dit : - Retourne, et dis à Ezéchias, chef de mon peuple : Voici ce que dit le Seigneur, le Dieu de David, ton père : J'ai entendu ta prière, et j'ai vu tes larmes, et tu vas être guéri, dans trois jours tu iras au temple du Seigneur. - Et j'ajouterai encore quinze années aux jours de ta vie ; et je te délivrerai, toi et ta ville, de la main du roi des Assyriens, et je la protégerai à cause de moi-même, et en considération de David, mon serviteur. " Ce même passage se retrouve dans Isaïe, chap. XXXVIII.
50. II Chroniques, XX, 1, 3-6, 12-13, 22-23 : " Ensuite les Moabites et les Ammonites avec leurs alliés s’assemblèrent contre Josaphat pour lui faire la guerre. . . - Alors Josaphat, saisi de crainte, s'appliqua entièrement à prier le Seigneur, et fit publier un jeûne dans tout le royaume de Juda. -Tout Juda s'assembla pour implorer l'assistance du Seigneur, et tous sortirent de leurs villes pour lui adresser leurs prières. - Et Josaphat, debout au milieu de cette multitude dans la maison du Seigneur devant le nouveau parvis, dit : Seigneur qui êtes le Dieu de nos pères etc. -Vous qui êtes notre Dieu, ne ferez-vous donc point justice de ces gens-là ? Nous reconnaissons que nous n'avons point assez de forces pour résister à toute cette multitude qui vient fondre sur nous. Mais comme nous ignorons ce que nous avons à faire, il ne nous reste qu’à tourner les yeux vers vous. - Or, tous les habitants de Juda étaient debout devant le Seigneur, avec leurs femmes, leurs enfants et ceux mêmes qui étaient encore à la mamelle. "
" Et lorsqu'ils eurent commencé à chanter ces paroles, le Seigneur tourna tous les desseins des ennemis, c'est-à-dire des enfants d'Ammon et de Moab et du mont Séïr, contre eux-mêmes, et comme ils s'étaient mis en marche pour combattre Juda, ils périrent tous. - Car les enfants d'Ammon et de Moab se levèrent contre ceux du mont Séïr et les exterminèrent. Et après cette action, ils tournèrent leurs armes contre eux-mêmes et se tuèrent les uns les autres. "
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31. Id., XXXIII, 9-1 3 : " Manassès séduisit donc Juda et tous les habitants de Jérusalem, les porta à faire le mal plus que toutes les autres nations que le Seigneur avait détruites devant les enfants d'Israël. - Dieu lui parla, à lui et à son peuple, et ils ne voulurent point l'entendre. - C'est pourquoi Dieu amena sur eux les princes de l'armée du roi des Assyriens, qui après avoir pris Manassès, lui mirent les fers aux pieds et aux mains, et l'emmenèrent à Babylone. - Manassès réduit à cet état de détresse pria le Seigneur son Dieu, et fit pénitence en présence du Dieu de ses pères. - Il lui adressa ses instantes supplications, et le Seigneur exauça sa prière et le ramena à Jérusalem dans son royaume, et Manassès reconnut que le Seigneur était le vrai Dieu. "
32. ESDRAS, VIII, 23 : " Nous jeunâmes donc, et nous priâmes notre Dieu à ce dessein ; et tout nous réussit. "
33. Tobie, III, 1-3, 7, 40-12, 24-25 : " Alors Tobie jetant un profond soupir, commença à prier avec larmes en disant : - Seigneur, vous êtes juste, tous vos jugements sont pleins d'équité et toutes vos voies ne sont que miséricorde, vérité et justice. - Et maintenant, Seigneur, souvenez-vous de moi, ne tirez pas vengeance de mes péchés et ne rappelez point en votre mémoire mes offenses, ni celles de mes pères. . . - En ce même jour, il arriva que Sara, fille de Raguel, à Ragès, ville des Mèdes, fut émue d'un reproche que lui fit une des servantes de son père. - Elle avait déjà épousé sept hommes, et un démon, nommé Asmodée les avait tués aussitôt qu'ils s'étaient approchés d’elle. - Comme elle reprenait cette servante pour quelque faute que celle-ci avait faite, cette autre lui répondit : Que jamais nous ne voyions de toi ni fils, ni fille sur la terre, meurtrière de tes maris. - Ne veux-tu pas me tuer aussi, comme tu as déjà tué sept maris ? A cette parole, Sara monta dans une chambre au plus haut de la maison, et y demeura trois jours et trois nuits sans boire ni manger. - Et persévérant dans la prière, elle demandait à Dieu avec larmes qu'il la délivrât de cet opprobre. - Le troisième jour, achevant sa prière, et bénissant le Seigneur, elle dit, etc. . . "
" Ces deux prière de Tobie et de Sara furent exaucées en même temps devant la gloire du Dieu souverain. - Et Raphaël, le saint ange du Seigneur, fut envoyé pour guérir ces deux personnes, dont les prières avaient été en même temps présentées au Seigneur. "
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34. Judith, IX, 1-2, 16-17 : " Après qu'ils se furent retirés, Judith entra dans son oratoire, et se revêtant d'un cilice, elle se mit de la cendre sur la tête, et se prosternant devant le Seigneur,
elle criait vers lui en disant : Seigneur Dieu de mon père Siméon, qui lui avez mis l'épée entre les mains pour se venger des étrangers qui, transportés d’une passion impure, avaient violé une vierge, et l'avaient couverte de confusion, en lui faisant outrage, etc. - Car votre puissance, Seigneur, n'est point dans la multitude ; votre volonté n'est pas dans la force des chevaux ; et dès le commencement du monde les orgueilleux se sont attirés votre disgrâce ; mais vous avez toujours agréé les prières de ceux qui sont humbles et doux. - Dieu des cieux, Créateur des eaux, Seigneur de toute créature, exaucez-moi, comme j'ai recours à vous dans ma misère, et que je me repose en votre miséricorde. "
35. Ibid., XIII, 6-10 : " Judith se tint devant son lit (d'Holopherne), priant avec larmes, et remuant ses lèvres en silence, - et elle dit : Seigneur Dieu d'Israël fortifiez-moi et rendez-vous favorable en ce moment ce que ma main va faire, afin que vous releviez, selon votre promesse, votre ville de Jérusalem, et que j'achève ce que j'ai cru pouvoir faire par votre assistance. - Ayant ainsi parlé, elle s'approcha de la colonne qui était au chevet du lit, et détacha le sabre qui y était suspendu. - Puis l'ayant tiré du fourreau, elle saisit Holopherne par les cheveux, et dit : Seigneur Dieu, fortifiez-moi à cette heure. - Elle lui frappa ensuite le cou par deux fois, et lui coupa la tête ; et détachant des colonnes le rideau du lit, elle jeta à terre son cadavre. "
36. Psaume XVII, 7-8 : " J'ai invoque le Seigneur dans ma tribulation, et j'ai crié vers mon Dieu. - Il a exaucé ma voix de son saint temple, et mes cris sont parvenus jusqu’à ses oreilles. "
37. Ps. CXIX, 1 : " J'ai crié vers le Seigneur lorsque j'étais dans la tribulation, et il m'a exauce. "
38. JONAS, II, 2-5, 8-11 : " Jonas adressa sa prière au Seigneur son Dieu, - et lui dit : J'ai crié au Seigneur du sein de mon affliction, et il m'a exaucé ; j’ai crié de l'abime du tombeau, et vous avez entendu ma voix. - Dans la douleur profonde dont mon âme était saisie, je me suis souvenu de vous, Seigneur, et ma prière est monté jusqu’à vous, jusqu’à votre temple saint. - Ceux qui s'attachent à la vanité et au mensonge oublient la miséricorde qui les délivrerait. - Mais pour moi, je vous offrirai
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des sacrifices avec des cantiques de louanges ; je rendrai au Seigneur tous les veux que j'ai faits pour mon salut. - Alors le Seigneur commanda au poisson, et le poisson jeta Jonas sur le bord de la mer. "
39. I Machabées, III, 38-47 : " Et Lysias choisit Ptolémée, fils de Dorymini, Nicanor et Gorgias, qui étaient des hommes puissants entre les amis du roi ; - et il envoya avec eux quarante mille fantassins et sept mille cavaliers : il leur ordonna d'aller dans le pays de Juda, et de le ruiner entièrement suivant les ordres du roi. - Ils s'avancèrent donc avec toutes leurs troupes, et vinrent camper près d'Emmaüs dans la plaine. - Les marchands des pays voisins, ayant su leur arrivée, prirent avec eux beaucoup d'or et d'argent, et des serviteurs, et vinrent au camp, afin d'acheter les enfants d'Israël que l'on devait faire esclaves ; et l'armée de Syrie se joignit à eux avec celle des étrangers. - Judas et ses frères reconnurent alors que leurs maux s'étaient multipliés, et que l'armée ennemie s'approchait de leur pays ; il sut l'ordre que leur roi avait donné de perdre le peuple et de l'exterminer, - et ils se dirent les uns aux autres : Relevons les ruines de notre nation, et combattons pour notre peuple et pour notre saint culte. - Ils s'assemblèrent donc pour se prépare à combattre, et pour prier le Seigneur et implorer sa bonté et ses miséricordes. - Jérusalem n'était point alors habitée, mais paraissait comme un désert ; on ne voyait plus aucun de ses enfants y entrer ou en sortir : son sanctuaire était foulé aux pieds ; les étrangers demeuraient dans la forteresse, devenue la retraite des nations ; toute la joie de Jacob en était bannie, et l'on n'y entendait plus le son de la flûte ni celui de la harpe. - Ils s'assemblèrent donc à Maspha, vis-à-vis de Jérusalem, parce qu'il y avait eu autrefois à Maspha un lieu de prière pour Israël. - Ils jeûnèrent ce jour-là, se revêtirent de cilices, se mirent de la cendre sur la tête, déchirèrent leurs vêtements, etc. "
40. Id., IV, 6-16, 28-34 : " Lorsque le jour fut venu, Judas parut dans la plaine, accompagné seulement de trois mille hommes, qui n'avaient ni épées ni boucliers. - Et ils reconnurent que l'armée des nations était forte, et soutenue de cuirassiers et de cavaliers exercés aux combats. - Alors Judas dit à ceux qui étaient avec lui : Ne craignez point cette grande multitude, et n'appréhendez point leur approche. - Souvenez-vous de quelle manière nos pères furent sauvés au passage de la Mer Rouge,
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lorsque Pharaon les poursuivait avec une grande armée. - Crions donc maintenant vers le ciel, et le Seigneur nous fera miséricorde ; il se souviendra de son alliance avec nos pères et brisera aujourd'hui même toute la force de cette armée devant nos yeux. - Et toutes les nations reconnaîtront qu'il y a un rédempteur et un libérateur pour Israël. - Alors les étrangers levant les yeux, virent les gens de Juda qui marchaient contre eux. - En même temps, ils sortirent de leur camp pour les combattre ; et ceux qui étaient avec Judas sonnèrent de la trompette ; - et ils les chargèrent et les troupes des nations furent battues, et s'enfuirent dans la plaine. - Les derniers furent tous taillés en pièces, et Judas avec ses gens les poursuivit jusqu'à Gézéron, jusqu'aux campagnes de l'Idumée, d’Azoth et de Jamnia, et il en resta sur la place jusqu’à trois mille. - Judas retourna avec son armée qui le suivait. . . "
" L'année suivante, Lysias leva une armé de soixante mille hommes choisis et de cinq mille chevaux pour exterminer les Juifs. - Cette armée s'avança en Judée et campa prés de Béthoron ; et Judas vint au-devant d’eux avec dix- mille hommes. Ils reconnurent que l'armée ennemie était forte, et Judas fit sa prière en disant : Soyez béni, Sauveur d'Israël, vous qui brisâtes la force du géant par la main de votre serviteur David, et qui livrâtes le camp des étranger aux mains de Jonathas, fils de Saül, et de son écuyer - Livrez maintenant cette armée de nos ennemis aux mains de votre peuple d'Israël et qu'ils soient couverts de confusion avec toutes leurs troupes et leur cavalerie. - Frappez-les de crainte ; faites-les sécher de frayeur, en abattant cette audace que leurs forces leur inspirent, et qu'ils soient renversés et brisés. - Détruisez-le par l'épée de ceux qui vous aiment, afin que tous ceux qui connaissent votre nom publient vos louanges dans leurs cantiques. - En même temps le combat fut livré, et cinq mille hommes de l'armée de Lysias furent taillés en pièces. "
41. Actes, XII, 5-7 : " Pierre était gardé dans la prison, et L’Eglise ne discontinuait de prier Dieu pour lui. . . - Et voici qu'un ange du Seigneur parut, et la prison fut remplie de lumière : et l'ange poussant Pierre par le côté, le réveilla et lui dit : Lève-toi promptement. Au même instant les chaînes tombèrent de ses mains, etc. "
42. I Thessaloniciens, V ; JACQUES, V ; I JEAN, V ; comme dans le corps de la réponse.
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TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. AUGUSTIN, Serm. XXII ad fratres in eremo (Les sermons dont il s'agit ici ne sont pas, au moins pour la plupart, de saint Augustin. V. NAT. ALEX., Hist. eccl., t. V, p. 112, édit. de Venise) : " Les religieux et les solitaires ont un besoin tout particulier de la prière qui nous concilie les grâces de Dieu, en attirant sur nous ses regards favorables. Le peuple juif avait adoré un veau d'or, en conséquence de quoi Dieu dit à Moïse : Laissez-moi faire, afin que le feu de mon indignation s'allume contre eux (Exod., XXXII, 10). Moise lui dit à son tour : Que votre colère s'apaise, je vous en prie, et laissez-vous fléchir en pardonnant l'iniquité de votre peuple (ibid., 16). Et Dieu se laissa toucher par cette prière de son serviteur. Oh ! qu'il est sublime cet office de la prière ! quel mystère consolant il renferme pour nous ! Moïs priait sur la montagne, et Israël avait l'avantage sur Amalec. Ezéchias obtient par sa prière la guérison de son corps et de son âme. La prière fait de Saul un Paul, ce docteur des nations, cet apôtre de l'univers entier. . . "
" Ce qui constitue la prière, ce sont moins les paroles que le sens qu'elles renferment. Jérémie en prison puise de nouvelles forces dans la prière. La prière de Daniel lui fait goûter la paix parmi les lions. Celle des trois jeunes hommes les fait tressaillir de joie au milieu des flammes. Job doit à la prière de triompher sur le fumier et au milieu du plus affreux dénuement. Le larron prie attaché en croix, et gagne sur-le-champ le paradis. Suzanne par sa prière parvient à confondre d'infâmes vieillards. La prière d'Etienne lui ouvre le ciel, et fait la conquête de Saul rangé parmi ceux qui le lapident. "
" Il n'existe pas de lieu où nous ne devions prier, parce que Dieu est partout, et que partout il daigne nous exaucer. Priez donc en tout temps et en tout lieu, pour assurer votre salut. Chacun doit prier non-seulement pour soi-même, mais encore pour tous les autres. Car, comme le dit Ambroise, mon vénérable père : " Si vous ne priez que pour vous, vous n'aurez à le faire qu'un simple profit ; au lieu que si vous priez pour tout le monde, tout le monde priera aussi pour vous. " La prière est la colonne de toutes les vertus, l'échelle de la sainteté, l'épouse des veuves, l'alliée des anges, le fondement de la foi, la couronne des moines, la consolation des personnes engagées dans le mariage. O sainte prière ! heureux celui qui vous aime ; plus heureux celui qui vous
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pratique ! Heureux celui qui vous épouse ; plus heureux celui qui vous est fidèle ! Heureux celui qui répand ses larmes dans votre sein, parce qu'il offre alors à Dieu un holocauste pur et sans tache. "
2. S. JEROME, adversùs Vigilantium, c. 3 : " Si les apôtres et les martyrs peuvent, lorsqu'ils sont encore enveloppés de chair, prier pour les autres, quoiqu'ils aient en même temps à s'occuper d'eux-mêmes, à combien plus forte raison le peuvent-ils après les couronnes, les victoires et les triomphes ? Un seul homme, Moïse, obtient de Dieu pardon pour six cent mille combattants ; Etienne, imitateur de son divin maître et premier martyr de Jésus-Christ, implore le pardon pour ses persécuteurs ; et lorsqu'ils seront une fois avec le Christ, ils auront moins de puissance ? L'Apôtre dit que, sur le navire qu'il montait, la vie de deux cent soixante-seize personnes lui fut accordée et lorsqu'une fois, après sa mort, il sera avec Jésus-Christ, il devra fermer la bouche, et ne pourra dire un mot pour ceux qui, dans l'univers entier, ont cru à sa prédication ? Et Vigilance, ce chien vivant, sera meilleur que ce lion mort (Cf. Œuvres choisies de saint Jérôme, etc., trad. par Collombet, tome VIII, p. 170-171) ? "
3. S. AUGUSTIN, Serm. I de Sanctis, qui est etiam I de S. Stephano : " J’aurais dû te perdre depuis longtemps (dit Jésus-Christ à Saul) ; mais Etienne a prié pour toi. Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? Tu as beau exhaler ta rage contre moi et mes disciples ; je saurai faire de toi mon serviteur. O Saul, loup ravissant, tu as dévoré ta proie ; mais attends quelque peu, et tu expieras ton crime. Disons-le ouvertement : le fils de perdition a été exterminé. Si saint Etienne n'avait pas prié, l’Eglise n'aurait pas aujourd'hui son Paul. Mais Paul à été conquis à l’Eglise, parce qu’Etienne a prié pour son salut et qu'il a été exaucé. Saint Etienne a été exaucé à ce point, que ses prières ont eu le mérite d'effacer le péché de Saul. Recommandons-nous donc à ses prières : car il sera exaucé bien mieux encore maintenant en faveur de ceux qui se recommanderont à lui. "
4. Le même, Serm. IV de Sanctis, sive de S. Stephano : " Eux, ils lui lançaient des pierres ; lui, il répondait par des prières qu'il faisait à Dieu, comme s'il eût dit : Seigneur, si vous faites périr mes ennemis, qui aurez-vous pour en faire vos amis ? Enfin, mes frères, si vous voulez savoir combien a été puissante la prière
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d'Etienne, jetez avec moi les yeux sur ce jeune homme qui s'appelait Saul, et qui gardait les vêtements de ceux qui lapidaient. Etienne, le lapidant ainsi pour ainsi dire lui-même par les
mains de tous les autres. Le fils de perdition a été
exterminé, et le vase d'élection a été mis
à sa place. A Saul persécuteur de l'Eglise, a été
substitué Paul apôtre des gentils. Si Etienne n'avait pas
prié de même, l’Eglise n'aurait pas eu de Paul. Mais Paul
s'est élevé de terre, parce qu'Etienne prosterné en
terre a prié pour lui. "
FIN DU TOME QUATRIEME.
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TABLE ANALYTIQUE DES MATIERES
CONTENUES DANS LE QUATRIEME VOLUME
DEUXIEME PARTIE.
PRINCIPES DE LA JUSTICE CHRETIENNE.
SECTION I. Du mal qu'il s'agit d'éviter, p.1-275.
Article III. Des péchés d'autrui qui peuvent nous être imputés, p.1-120.
Question I. Quels sont les péchés appelés spécialement péchés d'autrui, p.1-6.
Saint Paul précédé en partie, et suivi en partie par ses œuvres - Péchés qui précèdent les coupables, et autres qui les suivent - Les Hérésiarques ne cessent de faire du mal par leurs œuvres et doivent être punis dans l’enfer à proportion - Ils seront responsables de la perte éternelle de tous ceux qu'ils auront entraînés dans leur ruine, p.2-3 : S. BASILE. - Quelle responsabilité pèse sur les rois, les pontifes, les pères de famille, les maîtres, etc., p.3 : EUTHYME. - Ceux qui persuadent à d'autres de pécher sont plus coupables que ceux qui ne pèchent qu'en cédant à la suggestion d'autrui, p.3 : S. AUGUSTIN. - Diverses manières de participer aux œuvres des ténèbres, p.4-5 : S. BASILE. - Deux choses indispensables pour ne pas être souillé par le contact des méchants, savoir, ne leur donner ni sa participation ni son consentement - Ce n'est pas assez de ne pas participer au mal, il faut de plus exercer la correction, p.5-6 : S. AUGUSTIN.
Question II. Combien compte-t-on de ces péchés dits d'autrui, p.6.
Question III. Quand est-ce qu'on participe par conseil aux péchés d'autrui, p.6-18.
Question IV. Quand est-ce qu'on participe par injonction aux péchés d'autrui, p.18-24.
Question V. Quand est-ce que nous participons par consentement aux péchés d'autrui, p.24-29.
L'état de damnation où sont ceux qui pèchent se communique à ceux qui les fréquentent, p.28 : S. IRENEE. - Ordonner le crime, c'est y participer - On est apostat, dès qu'on autorise la déclaration publique de son apostasie, p.28-29 : le Clergé de ROME.
Question VI. Quand est-ce qu'on participe par provocation aux péchés d'autrui, p.29-32.
Question VII. Quand est-ce qu'on participe par flatterie ou adulation aux péchés d'autrui, p.33-50.
Les louanges qu'on donne aux gens vicieux font encourir une punition sévère - Approuver le mal est plus punissable que de le commettre - Celui qui admire les bons participe aux couronnes qui leur sont réservés, p.44 : S. CHRYSOSTOME. - Caresser le pécheur c’est fournir à la fureur qu'il
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a de pécher un nouvel aliment - Médecin qui aigrissent le mal en voulant l'épargner, p.45: S. CYPRIEN. - Péché que renferme l'apologie du mal - Approuver les méchants c'est mettre le sceau à sa propre condamnation, p.45 : S. BASILE. - Il faudrait avoir perdu l'esprit pour louer ce qui n'est pas bon, p.45 : S. AUGUSTIN. - C'est le propre des hérétiques de chercher à séduire par des paroles doucereuses - Genre de vie des disciples de Jovinien - En approuvant son langage, ils plaidaient la cause de leurs propres vices - Jovinien, prédicateur de la volupté - Toujours les faux prophètes promettent de douces choses - Ce mot, célibataire, signifie digne du ciel d'après une étymologie ingénieuse - Doctrines de Jovinien - Sa séquelle - Grandeur de Rome chrétienne - Le nom de Jovinien dérive de celui d'une idole, p.46-50 : S. JEROME.
Question VIII. Quand est-ce que, par réticence de notre part, nous devenons cause du péché d'autrui, p.50-69.
C'est consentir au mal, que de garder le silence quand on peut élever la voix, p.54 : S. BERNARD - Garder le silence avec discrétion - Silence qui serait coupable - Quiconque se charge du sacerdoce, prend les fonctions de héraut, p.54-56 : S. GREGOIRE. - On peut sans malveillance déférer les coupables aux supérieurs - Les postes occupés par les ministres de l’Eglise sont critiques pour leur salut - La crainte de la critique est une des causes qui ralentissent leur zèle, p.56-58 : S. AUGUSTIN. - Devoir des pasteurs d’élever la voix pour réprimer les méchants - Il ne suffit pas de vivre saintement soi-même à celui à qui est confiée la prédication de l’Evangile - Le prêtre est une sentinelle - Celui qui n'aura pas repris le pécheur sera livré avec lui aux flammes éternelles, p.58-59 : JULIEN POMERE. - Les bons doivent quelquefois s'abstenir d'enseigner aux méchants les prescriptions de la loi - Celui qui peut faire cesser le mal et qui le dissimule, devient coupable comme s'il y donnait son consentement - La crainte ne doit pas faire négliger l'office de l'enseignement - Quel serait le principe d'une telle crainte - Devoir des bons prêtres quand ils voient les pauvres opprimés - Les pasteurs qui restent muets porteront la peine de l'iniquité de leurs peuples - Héli condamné pour n'avoir pas repris ses fils aussi sévèrement qu'il le devait - Les prêtres doivent avoir en vue le salut de ceux qu'ils reprennent - Une réprimande secrète n'est pas ce qui convient pour la répression d'un désordre public - S'il est besoin d'assaisonner la correction de paroles amères il faut que la charité règne toujours au fond du cœur, p.60-62 : S. ISIDORE. - Trois motifs coupables qui font qu'on retient dans le silence les oracles de Dieu - Un maître est coupable de la perte de celui qu'il aurait pu soustraire à la mort, en l'avertissant de se relever de sa chute - On n'est pas dispensé du devoir d'enseigner, par cela seul que celui qu'on enseigne refuse de faire ce qu'on lui dit, p.62-64 : S. JEROME. - Lors même que le pécheur périt par sa propre faute, le supérieur n'en est pas moins jugé digne de mort pour le seul fait de son silence - Nous devenons coupables d'autant de meurtres spirituels, que nous laissons mourir de nos ouailles par notre indifférence et notre silence - Ce qu'il faut entendre par le sang que Dieu nous redemandera - Les choses que doit prêcher le pasteur se réduisent à deux, la foi et les œuvres - Discrétion à garder dans l’enseignement - Pourquoi l’Apôtre recommandait le zèle à Tite son disciple, et la patience à Timothée, p.64-66 : S. GREGOIRE. - La prédication
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ne doit pas être la même pour toutes sortes d'auditeurs - Dans quelle intention on doit menacer de l'enfer - Utilité des paroles sévères, p.66-68 : S. CHRYSOSTOME. - Doit-on pardonner jusqu'à soixante-dix fois à un enfant qui pèche - User de remontrances, et châtier même au besoin - La charité même peul faire un devoir d'user de sévérité - Exemple des médecins - Si le péché est secret, il doit être repris en secret ; s'il est public, on doit le reprendre en public - Si l'on voit son prochain sur le point de périr, on doit s'en mettre en peine, p.68-69 : S. AUGUSTIN.
Question IX. Quand est-ce que nous nous rendons coupables par connivence des péchés d’autrui, p.69-99.
Il y a une sorte de compassion qui est un péché contre la justice - La facilité du pardon est une amorce qui invite le pécheur à pécher encore, p.82 : S. AMBROISE. - Indulgence pour des coupables qui deviendrait une cruauté en tournant au détriment des autres - Conduite des médecins à l'égard des malades - Le châtiment infligé à quelques-uns sert au salut de tous les autres, p.82-83 : ORIGENE. - Vigilance tolérée inconsidérément par son évêque - Ce n'est pas être cruel que de prendre les intérêts de Dieu, p.83-84 : S. JEROME. - Douceur d'un père quelquefois intempestive, p.84-85 : S. AUGUSTIN. - On est coupable, si, pouvant s'opposer à ce que la loi soit violée, on ne s'y oppose pas cependant - Ceux qui ne rappellent pas dans la voie du salut ceux de leurs frères qui se perdent, se perdent eux-mêmes avec eux, p.85 : S. CHRYSOSTOME. - Erreur où était d'abord tombé S. AUGUSTIN, p.85- 86. - Pourquoi 1'Eglise dans ses commencements n'avait pas recours au bras séculier - Nabuchodonosor a figuré dans sa personne d'abord les princes persécuteurs de l’Eglise, et ensuite les princes chrétiens - Des villes entières ont dû leur conversion aux lois des empereurs portées contre les hérétiques - Saint Augustin reconnaît l'erreur où il avait d'abord été - Il est à propos de réprimer les hérétiques par l'autorité des puissances établies de Dieu - Les réprimer, ce n'est pas leur rendre le mal pour le mal -Tous ceux qui nous épargnent ne sont pas pour cela nos amis - Fausse douceur - Tous ceux qui souffrent persécution ne sont pas pour cela béatifiés - Différence de l'état de l'Eglise d'aujourd'hui d'avec celui où elle était au temps des apôtres - Comment es t-ce que les rois doivent servir Dieu dans la crainte - Obligation pour les souverains de protéger l'Eglise - Saint Paul a été amené à la foi par voie de contrainte - L’Eglise a le droit d'employer la force pour faire rentrer dans son sein les enfants qu'elle a perdus - Patience blâmable - Saint Paul en appelant à César - L'amour que nous devons avoir pour les hommes ne nous permet pas de les abandonner à leur mauvaise volonté - Les deux différents états de l'Eglise marqués par la parabole du festin - Epines, figure des hérétiques - C'est Dieu qui excite contre eux le zèle des puissances - Compte que les puissances temporelles auront à rendre un jour - Exemple de Nabuchodonosor - Les hérétiques tuent les âmes, et la peine qu'on leur inflige n'affecte que leurs corps, p.86-94 : S. AUGUSTIN. - Il vaut mieux réprimer les hérétiques par le glaive, que de les laisser répandre au loin leur erreur - Pouvoir du démon sur les hérétiques - Il n'y a point à établir de similitude entre la constance des martyrs et l'obstination des hérétiques, p.94-95 : S. BERNARD. - Il faut étouffer l'erreur dès qu'elle commence à se montrer - Exemple d'Arius, 95 : S. JEROME.- Il vaut mieux en condamner un seul, que d'exposer par ménagement
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pour lui le salut de tous - Parents qui ferment à leurs enfants le royaume des cieux - Terrible punition d'un enfant blasphémateur, p.95-97 : S. GREGOIRE. - Ce n'est pas une œuvre d'un léger mérite, que de consacrer à Dieu les enfants qu'on a reçus de Dieu - L'exemple d'Héli est un avertissement donné aux parents - Comment il faut élever les enfants - Invective contre les parents qui négligent 1’éducation de leurs enfants - Education des filles plus spécialement confiée aux mères - Vertus qui conviennent à la jeunesse, p.97-99 : S. CHRYSOSTOME.
Question X. Qu'est-ce que se rendre complice par participation du péché d’autrui, p.99-120.
Terrible punition d'un vol sacrilège, p.107-109 : S. GREGOIRE DE Tours. - Miracle opéré par l'intercession de saint Métrias pour venger l'injure faite à l'Eglise d'Aix, p.109-110 : le même. - Autres punitions de vols sacrilèges, p.111-118 : le même. - Vols sacrilèges punis sous Julien l'Apostat, p.118-119 : THEODORET. - Autre vol sacrilège puni, p.119-120 : VICTOR de Vite. - Le consentement que vous donnez au péché de votre frère devient le vôtre à vous-même, p.120 : S. AUGUSTIN.
Question XI. Comment se rend-on coupable du péché d'autrui en prenant sa défense, p.120-1 22.
Article IV. Des péchés contre le Saint-Esprit, p.122-200.
Question 1. Qu'est-ce que pécher contre le Saint-Esprit, p.122-123.
Question II. Combien y a-t-il de péchés contre le Saint-Esprit, p.123-131.
Trois opinions sur ce qu'on doit appeler péché contre le Saint-Esprit - Distinction à établir entre les péchés contre le Saint-Esprit - En quel sens les péchés contre le Saint-Esprit peuvent-ils être appelés irrémissibles, p.124-128 : S. THOMAS d'Aquin. - Trois manières de pécher, l'ignorance, la faiblesse et la malice - Autre chose est de ne savoir point, et autre chose de ne vouloir pas savoir, p.129-131.
Question III. Quelle est la sorte de présomption qui constitue le péché contre l'Esprit-Saint, p.131-158.
Une confiance déraisonnable provoque les vengeances de Dieu - Ne tomber ni dans la présomption, ni dans le désespoir - Il y aurait de la témérité à demander d'être assuré par une révélation du pardon de ses péchés - La sécurité est ordinairement la mère de la négligence, p.136-138 : S. GREGOIRE. - On ne doit pas persévérer dans l'habitude du péché sous prétexte qu'on a tout à espérer de la miséricorde divine - Deux sortes d'endurcissement - Aimer la miséricorde de Dieu, et en même temps craindre sa justice, p.139 : S. FULGENCE ou S. AUGUSTIN. - Danger du délai de la conversion, p.140 : S. BERNARD. - Illusion de ceux qui s'imaginent que la foi seule leur suffit pour se sauver - En quel sens l'Apôtre a dit que nous sommes justifiés par la foi sans les œuvres de la loi - L'hérésie qui enseigne l’inutilité des œuvres a été l’occasion des épîtres catholiques - De quelle foi a voulu parler Saint Paul - La foi qui sauve, c’est la foi vive ou qu'anime la charité - Sécurité qui serait funeste - Erreur qu'il y aurait à croire que tous ceux qui ne renoncent pas à la foi chrétienne seront sauvés quand même ils auraient persévéré jusqu'à la mort dans les plus grands crimes - La foi qui sauve est celle qui opère par l'amour - Une des erreurs d’Eunomius était que la foi suffisait sans les œuvres, p.144-145 : S. AUGUSTIN. - Au dire des hérétiques, Dieu ne se mettra pas en peine de ce qu'on pourra avoir fait, pourvu qu'on ait conserve la foi, p.146 :
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S. JEROME. - Personne ici-bas ne doit se croire absolument assuré d’être justifié devant Dieu - La considération de notre propre faiblesse et de l'imperfection de nos dispositions peut à bon droit nous inspirer des doutes sur notre état de grâce, p.146-147 : le concile de TRENTE. - Ceux-là sont bien téméraires qui promettent hardiment le pardon aux pécheurs, p.147 : S. JEROME. - Dieu est doux, mais il est équitable aussi - Dieu a promis le pardon au repentir, mais il n'a pas promis une longue vie au pécheur - Qui sont ceux qui se perdent, soit par un excès soit par un défaut d'espérance - Il n'y a point de salut pour ceux qui persévèrent dans le mal - On ne doit pas se croire sauve par cela seul qu'on porte le nom de chrétien - Un pécheur doit recourir à la puissance des clefs, p.147-150 : S. AUGUSTIN. - Quelque pécheur qu'on puisse être on pourra obtenir son pardon si l'on revient à pénitence - Tant que nous sommes en ce monde, la miséricorde de Dieu est disposée à nous accueillir - Celui qui remet à faire pénitence jusqu'à ce qu'il se voie en danger de mort, ne donne point l’assurance de sa réconciliation avec Dieu - Témérité qu'il y aurait à la leur promettre - Un pénitent ne doit jamais être absolument tranquille au sujet des péchés qu'il a commis, p.150-152 : S. ISIDORE. - Quelque juste qu'on soit, on doit toujours craindre - Personne ici-bas n'est assure d'être du nombre des prédestinés - Il est utile aux élus d'ignorer le secret de leur prédestination - Incertitude de la conversion entreprise seulement au moment de la mort - Confesser ses péchés à Dieu et à son ministre - Se hâter de se réconcilier - Pour avoir oublié Dieu pendant la vie, le pécheur s'oublie soi-même à la mort, p.152-155 : S. AUGUSTIN. - Péché qui va à la mort - La miséricorde de Dieu oublie celui qui a oublié sa justice, p.155-156 : S. GREGOIRE. - Au moment de notre conversion, nous devons baiser à la fois les deux pieds de Notre-Seigneur, qui sont sa miséricorde et sa justice - La crainte est le commencement de la sagesse, et l'espérance en est le progrès p.156-157 : S. BERNARD. - La providence de Dieu nous offre le port de l'espérance contre l'écueil du désespoir, et nous garantit contre la présomption par l'incertitude du jour de notre mort, p.157-158 : S. GREGOIRE.
Question IV. Comment pèche-t-on contre le Saint-Esprit par désespoir, p.158-170.
Le Seigneur lui-même nous exhorte à ne pas nous défier de sa miséricorde - Danger des rechutes - Que personne, quelque pécheur qu'il soit, ne désespère de la miséricorde de Dieu, p.161-163 : S. AUGUSTIN. - On peut entendre par le mot enfer le désespoir du pécheur, p.163-164 : S. GREGOIRE. - Rester dans l'état de péché, c'est descendre dans l'enfer - Le pénitent doit, tout en craignant la justice de Dieu, conserver la confiance en sa miséricorde - Personne ne doit désespérer de son pardon, quand même il ne se convertirait qu'à la fin de sa vie, p.164-165 : S. ISIDORE. - Se prémunir contre le désespoir en se rappelant tant d'exemples de conversions de pécheurs - C'est le démon qui cherche à nous inspirer le désespoir - Motifs qui doivent en détourner - Fussiez-vous arrivé à votre dernier jour, témoignez à Dieu votre repentir - Qu'est-ce que le péché si on le compare à la miséricorde de Dieu, p.165-167 : S. CHRYSOSTOME. - Dieu prend sa miséricorde dans son propre fonds et sa justice dans le nôtre - Dieu est le père des miséricordes, mais non le père des vengeances - La bonté de Dieu est plus grande que la malice du plus grand
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pécheur, p.167 : S. BERNARD. - Il ne faut désespérer d'aucun pécheur tant qu'il est en cette vie - L'excommunication même peut devenir un moyen très salutaire pour celui qui en est atteint - Il ne faut désespérer de personne, tant que la mort ne l'a pas enlevé - Jamais Dieu ne rebute le repentir, si ce repentir est humble et sincère - Le royaume des cieux a été fait pour nous ; l'enfer l'a été pour le démon - Tant que nous sommes en cette vie, nous pouvons effacer tous nos péchés par la pénitence, p.167-169 : S. AUGUSTIN. - Il ne faut pas refuser la réconciliation aux pécheurs, quels qu'ils soient, qui implorent la grâce de la pénitence en danger de mort - La miséricorde divine ne fait jamais attendre le pardon au repentir, p.169-170 : S. LEON. - Tous les prêtres indistinctement peuvent absoudre toute espèce de pénitent à l'article de la mort, p.170 : le concile de TRENTE.
Question V. Quand est-ce qu'on pèche contre le Saint-Esprit en résistant à la vérité, p.171-176.
Caractère obstiné des hérétiques, p.174 : S. LEON. - Toutes les hérésies ont pour cause ordinaire l’Ecriture mal entendue - Règle à suivre par rapport à l'Ecriture - Différence à faire entre les hérétiques proprement dits et ceux qui leur ajoutent foi - La résistance obstinée à l'autorité de l'Eglise est ce qui fait les hérétiques, p.175-176 : S. AUGUSTIN. - C'est pécher contre l'Esprit-Saint, que de violer les canons de propos délibéré, p.176 : S. DANASE cité par Gratien.
Question VI. En quels cas l'envie portée aux grâces que d'autres reçoivent est-elle un péché contre l'Esprit-Saint, p.176-179.
C'est un péché qui va à la mort, que d'être jaloux de la grâce qui a réconcilié nos frères avec Dieu - Il y a de la prudence à prier pour les pécheurs tant qu'ils sont en cette vie, p.177-179 : S. AUGUSTIN.
Question VII. Quelle est l’espèce d'obstination qui constitue un péché contre l'Esprit-Saint, p.180-195.
Crime de ceux qui font mépris du pouvoir qu'a l'Eglise de remettre les péchés - Dieu ne laisse aucun pécheur impuni - C'est commettre une iniquité énorme que de prendre la défense de ses propres péchés, p.182-184 : S. AUGUSTIN. - Comment Dieu a coutume de punir ceux qui diffèrent sans cesse leur conversion - En quel sens Dieu met une pierre d'achoppement devant ceux qui abandonnent sa justice, et en quel sens il endurcit le cœur des pécheurs, p.184-186 : S. GREGOIRE. - Ce que c'est qu'un cœur endurci - Il n'y a pas de frénésie plus effrénée que la volonté obstinée de pécher, p.186-187 : S. BERNARD. - Deux sens dans lesquels il est vrai que Dieu endurcit le cœur de Pharaon - Causes de cet endurcissement - La patience de Dieu présente aux uns la facilité de faire pénitence, et aux autres celle de persévérer dans le mal - Dieu n'abandonne jamais personne le premier - Pharaon s'est endurci par un effet de la patience de Dieu, et non par un effet de sa puissance - Pharaon avait mérité, par le nombre et l'énormité de ses péchés, d'être abandonné à son endurcissement - Comparaison tirée de la glace, p.187-190 : S. AUGUSTIN. - Dieu endurcit le cœur de Pharaon en ce sens qu'il s'abstint d'amollir sa dureté, p.190-191 : S. GREGOIRE. - Progrès que fait dans le mal celui qui refuse de mettre la correction à profit - Au mépris de la correction on joint l'impatience, et à l'impatience on joint l'impudeur - Combien il est dangereux de prendre la défense de ses propres fautes - Jamais Dieu n’est
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plus en colère contre nous, que lorsqu’il cesse de nous témoigner sa colère - De l'impudeur naît l'impénitence, mère du désespoir, p.191-193 : S. BERNARD.
Question VIII. Quand y a-t-il péché d’impénitence, p.194-200.
L'impénitence est un péché contre l'Esprit-Saint - Le péché d'impénitence ne sera remis ni dans le siècle présent ni dans le siècle à venir - On ne doit pas désespérer de celui que Dieu laisse encore en vie - La différence des péchés contre le Saint-Esprit d’avec les péchés contre le Fils de l'homme n'implique aucune inégalité dans les personnes divines - Raison de la grièveté du blasphème contre le Saint-Esprit - Le péché d'impénitence est une injure faite à la grâce reçue dans le baptême ou dans le sacrement de pénitence - Tout péché contre le Saint-Esprit n'est pas irrémissible, p.196-199 : S. AUGUSTIN. - Le péché contre le Saint-Esprit ne va à la mort que pour ceux qui y persévèrent - Il n'est aucun péché dont l’Eglise n'ait le pouvoir d'absoudre, p.199-200 : S. GELASE I. - Le péché qui va à la mort consiste à abandonner sans retour la foi qui opère par la charité, p.200 : S. AUGUSTIN.
Article V. Des péchés qui crient jusqu'au ciel, p.201- 235.
Question I. Quels sont les péchés dont on dit qu'ils crient jusqu’au ciel, p.201-205.
Ce que c'est qu'un cri dans les livres saints, p.201-204 : S. AUGUSTIN. - Un cri, c'est un crime commis avec une audace qui ne garde plus de mesure, p.204 : S. GREGOIRE.
Question II. De quelles vengeances l’Eglise nous dit-elle que Dieu poursuit l'homicide volontaire, p.205-211.
De quelle manière l’homicide était puni par l’Eglise des premiers siècles, p.208-209 : les conciles d'ANCYRE et d’EPAONE. - Adoucissement à la pénitence prescrite aux homicides - Quelle était cette pénitence - A quelle sorte d'abstinence ils étaient condamnés - L'homicide admis à la communion au bout de sept années de pénitence, p.209-210 : le concile de TRIEUR. - En quel sens criait le sang d'Abel - Pourquoi il est dit qu'il criait de la terre, p.210-211 : S. AMBROISE. - Ce qu'on doit entendre par ces mots, Celui qui se sert de l’épée, etc., p.211 : S. AUGUSTIN.
Question III. Que nous enseigne 1'Ecriture au sujet du péché de sodomie et de sa punition, p.211-221.
Le genre de la punition des Sodomites indique celui de leur crime, p.217 : S. GREGOIRE. - Cette punition est une image du jugement de Dieu à venir, p.217 : S. AUGUSTIN. - Spectacle qu'offrait le pays de Sodome à l'époque où vivait Tertullien, p.218 : TERTULLIEN. - Le péché contre nature est pire en un sens que l'homicide - ravale l'homme au-dessous des animaux, p.220-221 : S. CHRYSOSTOME. - C’est une monstruosité, p.221 : TERTULLIEN. - C'est violer l'alliance qui est entre Dieu et nous, p.221 : S. AUGUSTIN. - Peine portée contre ce crime dans le code de JUSTINEN, p.221.
Question IV. Que nous dit l'Ecriture du crime de l'oppression exercée à l'égard des pauvres, p.222-228.
Question V. Quel crime enfin y a-t-il, d'après l’Ecriture, à retenir ou à diminuer le salaire des ouvriers, p.228-229.
Question VI. A quelle partie de la doctrine chrétienne convient-il de rapporter toute cette étude sur les péchés et à quoi peut-elle être utile, p.229-234.
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L'ignorance de la loi divine n'excuse pas toujours - Il y a bien de la différence entre ne pas savoir et ne pas vouloir savoir, p.251-252 : S. AUGUSTIN. - On peut pécher par ignorance, p.232-234 : S. BERNARD. - Ignorance qui n'a pas d'excuse - Si nous faisons ce qui est en notre pouvoir, Dieu nous tendra la main pour nous aider à connaître ce que nous ignorons encore, p.234 : S. CHRYSOSTOME. - L’habitude de pécher enhardit à se faire gloire de ses péchés même - Les péchés auxquels nous ne sommes point habitués sont les seuls qui nous inspirent de l'horreur, p.234-235 : S. AUGUSTIN.
Article VI. De l'expiation des péchés, p.235-272.
Question I. Comment nos péchés peuvent-ils être expiés, p.235-255.
Le péché originel ne peut être effacé que par les mérites de Jésus-Christ, qui nous sont appliqués dans le baptême - Jésus-Christ est la cause méritoire de notre justification - En quel sens l'homme est justifié par la foi, p.245-246 : le concile de TRENTE. - La foi catholique est la seule qui soit vraie - Si la foi n'est simple et entière ce n'est plus une véritable foi, p.247 : S. LEON. - Les péchés nous sont remis par le baptême, par le martyre et par l'aumône - Ils peuvent aussi nous être remis au moyen du pardon des offenses - de conversions procurées - d'un amour ardent pour Dieu - de la pénitence et de la confession sacramentelle - de l'extrême-onction - Comparaison de ces moyens avec les sacrifices ordonnés dans l'ancienne loi, p.247-249 : S. AUGUSTIN. - Le baptême n'est pas le seul moyen qui nous soit donné pour nous purifier de nos péchés - La parole de vérité, le sacrifice d'un cœur contrit, l'aumône et la charité peuvent y contribuer aussi, p.249 : S. AUGUSTIN. - Moyens d'expier nos péchés - la confession - le pardon des offenses - l'aumône - la prière - le jeûne - la charité exercée à 1'égard de nos frères, p.249-250 : S. CHRYSOSTOME. - Dieu demande à être apaisé à force de prières et de bonnes œuvres - L'évêque et les prêtres ministres de la satisfaction, p.251-252 : S. CYPRIEN. - Commencer par changer de vie, et puis exercer l'aumône, p.252 : S. AUGUSTIN. - Quelles sortes d'œuvres ont pour effet de nous purifier de nos péchés - Quels sont ceux qui peuvent trouver grâce devant Dieu - Moyens de rentrer en grâce avec lui, 253-254 : S. CYPRIEN. - Les catholiques qui vivent mal iront en enfer aussi bien que les non-catholiques - La foi vive est la seule qui justifie, p.254-255 : S. AUGUSTIN.
Question II. Que doit-on penser au sujet des péchés légers, p.255-266.
Il n'est pas toujours facile de faire le discernement des péchés légers d'avec les péchés graves - L'Ecriture nous apprend à juger graves des péchés que nous serions tentés de croire légers - Ni l'intercession des saints, ni même le mérite de nos bonnes œuvres ne nous dispensent d'éviter les péchés même légers, p.257-260 : S. AUGUSTIN. - Nous pouvons passer noire vie sans commettre de crimes, mais non sans commettre de péchés - Pourquoi on doit éviter les péchés légers, p.260-261 : S. ISIDORE. - Moyens de nous purifier de nos péchés journaliers - Raisons de nous en préserver - Trois principaux remèdes contre les péchés légers - Quels sont les péchés qu'on appelle des péchés journaliers - Nécessité de les éviter - On rachète les péchés véniels par le jeûne et par l'aumône - Comment des péchés véniels peuvent devenirs mortels pour l'âme - Remède contre les péchés légers, p.261-263 : S. AUGUSTIN. - S'opposer au
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mal dès le principe - Pourquoi on fait bien d'en tenir compte, p.264-265 : S. CHRYSOSTOME. - C’est pécher contre l'Esprit-Saint, que de commettre par système des péchés légers - Le mépris et l'obstination peuvent rendre graves des péchés légers en eux-mêmes, p.265-266 : S. BERNARD.
Question III. Quels moyens avons-nous en cette vie de nous purifier de nos péchés légers, p.266-270.
Les macérations et la récitation de l'Oraison dominicale, l'aumône enfin peuvent servir à nous purifier de nos péchés légers - Les péchés véniels quand ils sont multipliés ternissent la beauté de l'âme, p.267-269 : S. AUGUSTIN. - Les péchés, soit petits, soit grands, ne peuvent rester impunis, p.270 : S. PROSPER.
Question IV. Suffit-il de s'abstenir du péché, p.270-272.
La perfection de la vie morale de l'homme se réduit à deux choses, p.271 : S. BERNARD. - Il ne suffit pas de s'abstenir du mal - C'est peu que de ne point faire le mal - Ordre à garder dans la concorde qu'on doit entretenir avec le prochain, p.271-272 : S. AUGUSTIN.
Section II. Du bien qu'il s'agit de faire, p.273-549.
Chapitre I. Des trois principales espèces de bonnes œuvres, p.273-549.
Article I. Des bonnes œuvres en général, p.273-515.
Question I. Quels biens sont l'objet de la justice chrétienne, p.273-279.
La justice se compose de la réunion d'un grand nombre de vertus - Sous ce nom de justice, l’Ecriture comprend toutes les vertus, p.277: S. CHRYSOSTOME. - Explication de trois mots de l'épître de saint Paul à Tite, p.277 : S. BERNARD. - C'est tomber dans un abîme que d'inférer des paroles de saint Paul que la foi toute seule suffit pour le salut - Saint Jacques a écrit son épître pour corriger cette erreur - Ces deux apôtres ne sont point contraires l'un à l'autre - Les bonnes œuvres qu'on aurait pratiqué avant d'avoir la foi sont comme une course rapide qu'on ferait hors de la voie, p.278-279 : S. AUGUSTIN. - La foi sans les œuvres est une foi morte, et les œuvres sans la foi sont des œuvres mortes, p.279 : S. CHRYSOSTOME.
Question II. Quels sont les fruits que peuvent produire les œuvres de la justice chrétienne, p.279-503.
Quelles sont nos armes spirituelles, p.293 : S. CYPRIEN. - Les bonnes œuvres nous font croître dans la justice, p.293 : le concile de TRENTE. - Ce qui nous fait croire, c'est la foi ; ce qui doit nous faire agir, c'est la charité - Chacun sera placé dans la maison du Père céleste suivant le rang dû à son mérite - Le denier du père de famille représente la vie éternelle, qui sera également éternelle pour chacun malgré la diversité des mérites - L'inégalité de gloire ne fera naître dans les saints aucun sentiment de jalousie, p.293-295 : S. AUGUSTIN. - Diversité de degrés dans la félicité céleste figurée par la différence des demeures, p.295 : S. GREGOIRE. - La vie éternelle sera tout à la fois une grâce et une récompense - Pourquoi et comment les œuvres que font les justes sont des œuvres méritoires - Les justes méritent véritablement la vie éternelle - Leur justice est tout à la fois la justice de Dieu et la leur propre - Leur récompense est une chose qui leur a été promise - Nos mérites eux-mêmes sont des dons de Dieu - Chacun de nous doit avoir devant les yeux et la justice de Dieu et sa bonté, p.295-297 : le concile de TRENTE. - Besoin que nous avons de faire des œuvres de justice, p.297 : S. CYPRIEN. - Les justes ont de véri-
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tables mérites - La grâce fait tout ce qu'il y a en nous de mérites - Dieu, en couronnant nos mérites, couronne ses propres dons - La vie éternelle est elle-même une grâce en même temps qu'une récompense - Elle est la solde de la justice - Nous ne devons pas prétendre l'obtenir avant de l’avoir méritée, p.297-299 : S. AUGUSTIN. - La vie éternelle doit être achetée par notre travail - Ce travail n'est que temporel, et le repos sera éternel - Quand vous faites une bonne œuvre faites-la en vue de la vie éternelle - En voyant achevé l'ouvrage commandé, le juste juge ne pourra en refuser le salaire - La couronne nous vient de lui, l'ouvrage de nous, mais avec son concours - Il pardonne gratuitement les péchés mais il doit la couronne par justice - Il nous doit, non qu'il ait reçu de nous, mais parce qu'il s'est engagé lui-même - Saint Paul regarde Dieu comme son débiteur pour le jour du jugement - Dieu donnera la couronne, parce qu'il est un juste juge, p.299-303 : le même. - En vivant de la foi, nous mériterons de posséder Dieu - Saint Paul réclame une dette, et demande qu'elle lui soit acquittée, p.303-304 : le même. - La récompense est due aux bonnes œuvres, p.304 : le concile d’ORANGE. - Les aumônes sont des œuvres de justice - Le royaume du ciel peut ne nous coûter qu'un morceau de pain donné à un pauvre - Il ne coûte qu'autant que nous avons pour l'acheter - Les œuvres de miséricorde sont une semence - A quel prix s'achète le royaume des cieux, p.304-305 : S. AUGUSTIN.
Question III. Quelles sont les principales espèces de bonnes œuvres où se fait reconnaître et s'exerce particulièrement la justice chrétienne, p.305-315.
Trois sortes de bonnes œuvres : la prière, le jeûne et l'aumône ; leurs avantages - Elles ne doivent point marcher séparées - elles plaident notre cause auprès de Dieu - elles nous obtiennent le pardon de nos péchés - elles donnent la mort à nos vices - elles nous associent aux mérites de tous les saints - Le démon est ennemi de la prière - Le jeûne nous fait réparer nos pertes - La miséricorde doit accompagner le jeûne, p.309-312 : S. PIERRE CHRYSOLOGUE. - Le jeûne de décembre est de tradition apostolique - Avantages que produisent les trois sortes de bonnes œuvres - Manière d'accomplir le jeûne des quatre-temps, p.312 : S. LEON. - Les trois sortes de bonnes œuvres contribuent à nous procurer la grâce de la justification, p.312-313 : S. BERNARD. - La récompense céleste ne sera donnée qu'à ceux qui auront travaillé - La perfection de notre justice ici-bas consiste à tendre vers la justice parfaite et souveraine par le jeûne, l'aumône et la prière - Ce sont les trois moyens qui nous sont enseignés par Jésus-Christ - Dans ces trois mots tout est compris, p.313-314 : S. AUGUSTIN. - On peut faire son aumône d'une manière secrète tout en la faisant en public - Jeûnes publics ordonnés par l'Eglise - Nous devons jeûner en vue d'obtenir le pardon de nos péchés - Comment expliquer ces mots, Que votre main gauche ne sache pas, etc. - Ce que c'est que prier dans le secret, p.314-315 : le même.
Article II. Du jeune, p.315-452.
Question I. Qu'est-ce que le jeûne, p.315-365.
En quoi consiste le grand jeûne, p.316 : S. AUGUSTIN. - Les gentils pratiquaient eux-mêmes l'abstinence, p.316-318 : S. JEROME. - Le jeûne du carême rappelle celui de Jésus-Christ, p.318 : l'auteur des Constitutions
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apostoliques. - Quatre temps marqués pou r les jeûnes dans l'Ecriture - Mystères renfermés dans le nombre quarante - Le carême est la dime de l'année - La loi du carême n'a pas été faite pour les parfaits - Diversité d'usages dans les Eglises par rapport au jeûne - On doit se conformer à l'usage de l'Eglise dans laquelle on se trouve, p.319-322 : S. ISIDORE. - Différence entre un jeûne et une station - Jeûnes du vendredi et du samedi - Ordinations fixées au samedi des quatre-temps - On doit s'attacher avant tout à observer les jeûnes prescrits - Si l'on ajoute des jeûnes particuliers aux jeûnes obligatoires, on aura droit à une récompense particulière - Se garder de la superstition dans la pratique de l'abstinence, p.322-326 : RABAN. - Les jeûnes des ecclésiastiques doivent surpasser en austérité ceux des autres fidèles - Interdiction du lait, du fromage, des œufs - Origine du jeûne des rogations - Il était défendu autrefois de rompre le jeûne avant la fin des vêpres : p.326-330, IVES de Chartres. - Merveilleux effets du jeûne, p.331 : ARNOULD de Bonneval. - C'est par le jeûne que nous pourrons rentrer dans le paradis - Ceux qui déprécient le jeune sont inspirés par l'ennemi de nos âmes. - Le jeûne est la vie des anges, p.331-333 : S. ATHANASE. - Le carême est le remède propre à guérir nos âmes - L'abstinence est la mère de tous les biens - Le jeûne est la nourriture de l'âme - Il lui donne des ailes - Aspect nouveau que donne à une ville la pratique exacte du jeûne, p.333-335 : S. CHRYSOSTOME. - Prophète dévoré par un lion pour n'avoir pas observé l'abstinence - Heureux effets du jeûne - Il est un remède et un préservatif - En jeûnant à l'exemple de Jésus-Christ nous prenons part à ses souffrances - Le jeûne assure notre liberté - Il nous guérit de nos blessures, p.335-338 : S. CHRYSOSTOME. - Le jeûne attaque le péché jusque dans le fond de notre cœur - Sans le jeûne, la pénitence est vaine et stérile - Tous les saints se sont affermis par le jeûne dans la voie qui conduit à Dieu - Jeûne spirituel - Abstinence des viandes et du vin - Le jeûne fortifie celui qui s’exerce à la piété - Les anges protègent surtout ceux dont le jeûne a purifie l'âme - Universalité du jeune quadragésimal - Avantages du jeûne public - Le jeûne conserve la santé, p.338-342 : S. BASILE. - Ce qu'il faut répondre au démon lorsqu'il cherche à nous détourner du jeûne - Nous devons traiter notre corps comme on traiterait un cheval fougueux, p.342 : S. AUGUSTIN. - La vertu du jeûne est grande - C'est au jeûne qu’Elie a dû tous ses miracles - Le jeûne est la mort du péché - un sacrifice de propitiation - Il rend les saints eux-mêmes plus éminents en sainteté, p.33-347 : S. AMBROISE. - Jeûnes d'obligations et jeûnes volontaires - Le jeûne nous procure le secours de Dieu contre nos ennemis - Jeûne des quatre-temps - La prière de ceux qui jeûnent est terrible aux démons - Les œuvres publiques de piété sont plus saintes et plus méritoires que celles que chacun s'impose en son particulier - L'obéissance adoucit le commandement - L'abstinence chrétienne est bien plus parfaite que celle des Juifs - Pourquoi certains jours sont consacrés à l'abstinence - Les deux Testaments ont également approuvé l'usage du jeûne - Les apôtres ont reçu de l'Ancien-Testament ce qu'ils ont cru conforme à la doctrine évangélique - On doit faire concourir ensemble le jeûne, l'aumône et la prière - La tradition nous fait une loi du jeûne des quatre-temps - Mérites de saint Pierre - C'est le propre de la piété de faire le bien même qui n'est pas commandé, mais ce serait une
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impiété au contraire de ne pas se mettre en peine de faire celui qui nous est solennellement prescrit - Les ennemis de notre salut redoublent leurs efforts, quand ils voient que nous nous appliquons à nous sanctifier - Les pratiques de l’ancienne loi ont cessé, parce qu’elles n’étaient que des figures - Pourquoi les préceptes qui regardent le jeûne n’ont point été abolis par la loi nouvelle - La prière accompagnée du jeûne et de l'aumône est très-efficace pour obtenir le pardon des péchés - Le mérite est plus grand, lorsque tous les fidèles s'appliquent de concert à la pratique des mêmes vertus - C'est par l'inspiration de l'Esprit-Saint que l'Eglise a assignée des jeûnes aux diverses saisons de l’année - L'abstinence est un moyen très-propre à détruire les vices - Le jeûne a été institué pour guérir les maux de l'âme et du corps - Toutes les saintes pratiques de la religion chrétienne sont d'institution divine -Un homme n'a dans les autres temps de l'année qu'une piété suspecte, si sa piété n'est pas plus ardente dans le temps du carême - Nous devons nous appliquer avec plus de zèle à nos progrès spirituels dans les temps ou se solennisent les mystères de notre rédemption - Le carême est le temps le plus favorable pour recourir aux remèdes divins - Le jeûne du carême a été sagement institué pour nous préparer à la fête de Pâques, p.347-363 : S. LEON.
Question II. Que faut-il répondre a ceux qui décrient et méprisent la loi du jeûne ecclésiastique, p.363-435.
On ne doit pas s'abstenir de la viande ou du vin comme de choses mauvaises en elles-mêmes, p.376 : Canons des Apôtres. - Manichéisme à éviter - Examiner quelle fin on se propose en s'abstenant de vin - Il est louable de le faire par motif d'économie ou pour réprimer les mouvements de la concupiscence - ou pour s'épargner des scrupules de conscience - ou enfin par motif de charité - Perfidie des hérétiques dans l'usage qu'ils font des Ecritures - L'Apôtre les a désignés dans son épitre à Timothée, p.377-380 : S. AUGUSTIN. - L’Eglise n'entend pas de la même manière que les hérétiques l'abstinence du vin, de la viande, etc. - La vie monastique n'est imposée à personne, p.380-381 : THEODORET. - On se montre hérétique, non en s'abstenant de viande, mais en le faisant dans des dispositions hérétiques - Motif légitime de s'abstenir de lait, etc., p.382 : S. BERNARD. - Origine de l'usage du vin et de la chair des animaux, p.383 : S. ISIDORE. - Austérité de saint Antoine - Vie monastique, p.384 : S. ATHANASE. - Jeûnes observés chez les moines de Syrie - Austérité d'Hilarion, p.384-385 : S. JEROME. - Diverses sortes d'abstinence - Aérius enseignait que l’Eglise n’avait pas le droit de prescrire des jeûnes solennels, p.387 : S. AUGUSTIN. - Il condamnait les jeûnes du mercredi, du vendredi et du carême - Il mangeait indifféremment de toute espèce de viandes - Il refusait toute autorité à la loi, p.387 : S. JEAN DAMASCENE. - Réponse à l’objection qu'il n'est pas permis d'observer les jours et les mois - Raisons de 1'établissement de certains jours particulièrement destinés au jeûne, p.388 : S. JEROME. - Les jeûnes sont agréables à Dieu - On le prouve par les livres de l'Ancien-Testament - Le jeûne peut nous faire rentrer dans le paradis - La même vérité se prouve par les livres du Nouveau-Testament - Quels hérétiques saint Paul avait en vue au chapitre IV de sa première épître à Timothée
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- Pourquoi il défendait de mépriser ou de juger ceux qui mangeait de tout - Mérite du jeûne - Jésus-Christ a sanctifié le jeûne quadragésimal - Quels sont les jeûnes que Dieu a réprouvé dans Isaïe - Le jeune est sanctifié par les bonnes œuvres, p.389-398 : S. JEROME. - Jovinien disait que l'abstinence et le jeûne ne servent de rien - Du jeûne du samedi - Coutumes de l'Eglise - Le jeûne nous est prescrit par tout le Nouveau-Testament - Comment il peut être permis de jeûner le dimanche - Universalité de l'usage de jeûner le samedi saint - Réponse de saint Ambroise, p.399-403 : S. AUGUSTIN. - Jeûnes du mercredi et du vendredi d'institution apostolique - Nous jeûnons pour faire satisfaction à Dieu pour nos péchés - Jeûnes observés chez les moines - Jeûnes de la semaine sainte, p.403-404 : S. EPIPHANE. - Jeûne après la Pentecôte - Les fautes commises par négligence sont expiées par les jeûnes, p.405 : S. LEON. - Le jeûne sert de préparation à la fête de Pâques - Usage ancien de s'abstenir de vin aussi bien que de viande en carême - Hypocrisie de ceux qui rompent le jeûne en Secret - Exemple de Daniel et des Machabées - Le jeûne est une imitation de la vie angélique, p.406-409 : THEOPHILE d’Alexandrie. - Ce que nous devons faire jeûner en nous - Joindre le jeûne spirituel au jeûne corporel, p.409-410 : MAXIME de Turin. - Raisons du jeûne quadragésimal - Ne jeûner qu'une partie du carême lorsqu'on peut observer le carême entier, c'est perdre tout le mérite de ses jeûnes - La foi et le jeûne sont les deux pieds de l'âme - Sens mystique de ce mot stations employé pour signifier les jeûnes - Le jeûne est comme un mur pour le chrétien - Nous pouvons rendre nos jeûnes profitables même à ceux qui ne jeûnent pas - C'est après avoir jeûné quarante jours que Noire-Seigneur remporta sa victoire sur le démon - Ce n'est pas un péché léger que d'enfreindre la loi du carême - Jeûnons afin que le Seigneur nous soit propice - La volonté de Dieu est qu'on jeûne par rapport aux péchés en même temps que par rapport à la nourriture - Jésus-Christ a consacré par son propre jeune le jeûne quadragésimal - Dans le reste de l'année le jeune est de perfection, en carême il est de rigueur - Le nombre de quarante jours est un nombre heureux - Le jeûne est pour l'âme comme un labour - Pourquoi Jésus-Christ a jeûné dans le désert - L'observation de la loi du jeûne quadragésimal nous méritera une récompense - L'abstinence est un moyen d'apaiser la colère divine - C'est seulement par les jeûnes, par les prières et par les aumônes que nous pouvons nous rapprocher de Dieu - Nous échapperons par le jeune aux périls qui nous menacent, p.410-419 : S. AMBROISE. - Le temps du carême est également favorable au salut de l'âme et du corps - L'abstinence, les veilles, les prières et le jeûne nous conduisent aux délices du paradis - Jeûnes publics ordonnés par l'Eglise - Nous jeûnons pour obtenir le pardon de nos péchés - Il n'est permis que les dimanches de dîner en carême - Celui qui ne jeûne pas en carême, quoiqu'il puisse le faire, sera puni pour cela seul - On se guérit du péché par le jeûne - Le jeûne quadragésimal consacré par les exemples de Moïse, d’Elie et de Jésus-Christ - Utilité du carême - Abstinence du vin - Jeûner par rapport aux vices - Exemples qui servent à prouver les avantages du jeûnes - La diète et le jeûne nous feront recouvrer le paradis, que le manger nous a fait perdre - Nous suspendons l'usage des bains, du vin et de la viande, pour
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vivre tout entiers au Seigneur - En jeûnant nous-mêmes, faire dîner les autres - Du jeûne quadragésimal - Le temps de carême est un temps de miséricorde - Mystères renfermés dans ce nombre de quarante – Ces quarante jours sont le crible qui sert à séparer les méchants des bons, p.419-425 : S. AUGUSTIN. - L’observance du carême est particulière aux chrétiens - La diète que le corps s'impose est un baume pour le cœur - Jeûne observé jusqu'au soir pendant tout le carême par les princes et les rois, comme par les religieux - Jeûner à l'exemple de Jésus-Christ, de Moïse et d'Elie - Le nombre des jours de jeûne du carême nous représente toute la dureté de la vie présente - Faire jeûner tous nos sens - En récompense de ce que nous nous serons abstenus de choses d’ailleurs permises, Dieu nous pardonnera les choses défendues dont nous pouvons nous trouver coupables - Ce sera racheter par un jeûne très-court un jeûne de toute une éternité - Le jeûne donne a la prière la ferveur et la confiance, p.425-428 : S. BERNARD. - Jeûne judaïque réprouvé - Avantages du jeûne chrétien, p.428 : ORIGENE. - Le jeûne quadragésimal est autorisé et par l'Ancien-Testament et par le Nouveau - placé à propos dans les jours qui précèdent l'anniversaire de la passion du Sauveur - Rapport du nombre quarante avec le denier de la parabole évangélique, p.429-430 : S. AUGUSTIN. - Peines décernées contre les infracteurs du jeûne, p.430-432 : Canons des Apôtres et conciles. - Le peuple de Constantinople résolu à mourir plutôt que de violer la loi de l'abstinence, p.432-433 : NICEPHORE CALLISTE. - Mêmes dispositions dans le peuple fidèle d'Antioche, p.433 : S. CHRYSOSTOME. - Le jeûne du carême de tradition apostolique, p.433 : S. JEROME. - Loi ecclésiastique du jeûne - Ceux qui méprisent leurs supérieurs ecclésiastiques éprouveront un jour la rigueur de la justice divine, p.434 : le concile de TRENTE. - Ce n'est pas l'usage que 1’homme fait des créatures de Dieu, mais sa désobéissance au Créateur qui le rend criminel, p.434 : S. AUGUSTIN. - On est impur, non pour avoir mangé de la viande immolée aux idoles, mais pour avoir communique avec les démons, 435 : S. CHRYSOSTOME.
Question III. Que nous enseigne 1'Ecriture au sujet du jeûne, p.435-452.
Comment sanctifier le jeûne, p.449-450 : S. GREGOIRE et MAXIME. - Effets du jeûne, p.451 : S. AUGUSTIN. - Les jeûnes nous procurent le pardon de nos péchés, p.451 : S. JEROME. - Avantages du jeûne - il contribue à augmenter les forces du corps, p.452 : S. CHRYSOSTOME.
Article III. De la prière, p.452-549.
Question 1. Qu'est-ce que la prière, p.452-495.
§1er. Nature et avantages de la prière, p.463-481.
Définition de la prière, p.463 : S. JEAN DAMASCENE. - Dans la prière notre cœur se tourne vers Dieu. - Puissance de la prière - Sa définition - Son excellence et ses avantages, p.464 : S. AUGUSTIN. - Ce qu'elle est - elle n'est nullement attachée à des paroles particulières - Prier lorsqu'on se met à table - en s'habillant - à la fin du jour - la nuit même - Toute notre vie peut être une prière continuelle, p.464-465 : S. BASILE. - Avantages de la prière - elle est un entretien avec Dieu - Pourquoi il attend nos prières - Ses refus mêmes peuvent être des bienfaits, p.465-466 : S. CHRYSOSTOME. - L'oubli de la prière cause de péchés et de malheurs sans nombre - C'est s'éloigner de Dieu, que de
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ne pas se tenir uni à lui par la prière - Utilité de la prière dans tous les états de la vie - La prière est l’entretien de l'homme avec Dieu, et la demande qu'il lui fait de ce qu'il peut lui être avantageux d’obtenir, p.466-467 : S. GREGOIRE de Nysse. - Explication d'un verset de l’épître 1ere de saint Paul a Timothée - Sacrifice de l'autel - Les évêques, avocats du peuple chrétien - Pourquoi Dieu refuse quelquefois à ses plus fidèles serviteurs ce que ceux-ci lui demandent - Ce que c'est que de prier au nom du Sauveur - Ne rien demander qui soit contraire à notre salut - L'oraison dominicale nous fait connaître ce que nous devons demander à Dieu -Dieu, sans rejeter nos demandes, diffère souvent de les exaucer - Demander à Dieu qu'il ne nous accorde jamais rien de ce qu'il voit que nous lui demandons mal à propos, p.467-471: S . AUGUSTIN. - Deux manières de prier Dieu, l'une en le glorifiant, l'autre en lui adressant des demandes - Commencer par lui rendre gloire - Se recueillir en soi-même - Demander à Dieu le royaume des cieux - Dieu s'indigne contre ceux qui ne lui demandent que des choses de vil prix - Persévérance dans la prière -Les pécheurs eux-mêmes peuvent être exaucés - Ne point abandonner Dieu, de peur qu'il ne nous abandonne nous-mêmes - Eviter les distractions - Dieu nous pardonne de lui-même les distractions involontaires - Pourquoi nous n'obtenons pas toujours - Pourquoi Dieu met du délai à nous accorder ce que nous lui demandons, p.471-475 : S. BASILE.- Le démon fait tous ses efforts pour nous détourner de la prière - La pusillanimité d'esprit peut nous être funeste - La témérité est encore plus à craindre - Autre danger, celui de la tiédeur - La prière faite avec foi, humilité et ferveur pénétrera jusque dans le ciel - Nous trouver toujours prêts à recourir à la prière - Nos prières sont écrites dans les registres de Dieu aussitôt qu'elles lui sont adressées - Causes qui empêchent nos prières d'être exaucées - Ne pas demander avec trop d'ardeur les choses temporelles, bien qu'elles nous soient nécessaires, ni même les choses spirituelles qui ne sont pas nécessaires à notre salut - Quelles sont les choses que nous devons demander sans relâche et de toute notre âme - Manière d'entrer en prière -vigilance à y garder - diriger notre pensée vers le ciel, p.479-480 : S. BERNARD. - Les prières des saints peuvent faire résistance à la colère de Dieu, p.480 : S. JEROME.
§ 2. Sur la posture qu'on peut tenir quand on prie, p.481-484.
Manière de prier des anciens chrétiens, p.481 : TERTULLIEN. - Posture qui convient à ceux qui prient - Les prostrations et les autres signes extérieurs aident à l'humilité et à la ferveur à la prière, p.481-482 : S. AUGUSTIN. - Ils sont l'effet naturel de la vivacité de la foi - Saint Paul ermite, même mort, continuait de prier par la posture que conservait son cadavre - Assiduité de saint Jacques le Mineur à prier à genoux, p.482-483 : S. JEROME. - Pourquoi les anciens chrétiens se tournaient vers l'orient pour prier - Jésus-Christ en croix avait le visage tourné vers l'occident - L'usage de prier tourné vers l'orient est de tradition apostolique, p.483-484 : S. DAMASCENE.
§ 3. De certaines heures propres à la prière, p.484-495.
Comment on doit entendre qu'il faut toujours prier, p.484 : S. AUGUSTIN. - Celui-là prie toujours, qui n'y manque aucun jour aux heures marquées d'après l'usage de l'Eglise, p.484-485 : le V. BEDE et S. ANSELME. - Heures canoniques instituées par les apôtres, et pourquoi, p.485 : Consti-
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tutions apostoliques. - Prières de la nuit, p.485-486 : TERTULLIEN. - Antiquité de l'usage de prier de trois heures on trois heures - Pour les chrétiens les heures de l'oraison se sont multipliées avec les mystères, p.486-487 : RUFIN. - Raisons de l'usage de prier à la troisième heure du jour, etc., p.487 : S. ATHANASE. - Utilité des heures canoniques - Leur nombre de sept - Utilité de cette variété d'exercices, p.487-490 : S. BASILE. - Assiduité des anciens moines à la prière, 490-491 : S. CHRYSOSTOME. - Trois temps dans la journée où, d'après la tradition ecclésiastique, nous avons à nous prosterner devant Dieu - Pourquoi des temps marqués pour la prière - Cette pratique usitée dans les monastères de vierges, p.491-492 : S. JEROME. - Heures de tierce, de sexte, de none, de vêpres, de complies, de matines - Hérétiques qui niaient l'utilité des prières nocturnes, p.492-495 : le concile d'AIX-LA-CHAPELLE.
Question II. Pourquoi devons-nous être appliqués et assidus à la prière, p.496-532.
La prière est le remède à employer contre les tentations - Nécessité de la persévérance dans la prière - Celui qui prie attire en soi l'Esprit-Saint - La prière doit toujours être mêlée de gémissements - Notre âme prie Dieu véritablement quand elle sait s'affranchir de tous les soins terrestres - Efforts que fait le démon pour nous détourner de la prière - Notre prière sera vaine, si elle n'est pas accompagnée de confiance - Cause de défiance dans celui qui prie - La prière et l'observation des commandements se prêtent un mutuel appui - C'est perdre le mérite de ses prières, que de relever avec jactance les bonnes actions qu'on a faites - Pourquoi Dieu tarde quelquefois à nous accorder l'effet de nos prières - La prière doit se faire de préférence dans des lieux retirés - Qualité que doit avoir la prière vocale - Utilité du chant, p.501-507 : S. ISIDORE. - La prière est la clef du ciel - Elle doit accompagner le jeûne - En quel sens il nous est recommandé de ne pas parler beaucoup dans nos prières - Explication de la parabole du juge inique - de celle de l'ami et des trois pains - Sens mystique du pain, du poisson et de l'œuf - Pourquoi Dieu veut que nous lui demandions ce qui nous est nécessaire, quoiqu'il le sache avant nous - Pourquoi les prières vocales, et à des heures réglées - Les anges présentent nos prières à Dieu - Prier longtemps n'est pas la même chose qu'affecter de parler beaucoup dans la prière - Prière jaculatoires - Commentaire abrégé de l'oraison dominicale - Dans toutes nos prières si nous prions comme il faut, nous ne disons autre chose que ce qui est compris dans l'oraison dominicale - A quels objets particuliers se rapporte chacune des sept demandes - On n'a rien à demander de plus, quoiqu'on puisse se servir en priant d'autres expressions - Il n'est pas toujours avantageux d'obtenir ce qu'on demande - Dieu nous engage lui-même à lui demander - Pourquoi il diffère quelquefois de nous accorder ce que nous lui demandons, p.507-516 : S. AUGUSTIN. - Puissance de l'oraison dominicale auprès de Dieu - Elle embrasse tous les besoins de l'homme - Le Sauveur nous a engagé par son exemple à prier - Il priait pour nous, et non pour lui - Avec quelle attention nous devons prier - Elever nos cœurs - Distractions à éviter - Joindre les bonnes œuvres à la prière, p.517-518 : RUFIN - Que nos prières soient fréquentes - A quelles heures il convient particulièrement de prier - Récitation journalière de l'oraison dominicale - Puissance de la prière, quand on y joint des œuvres
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de mortification, de justice et de charité, p.519-520 : S. AMBROISE. - La prière éclaire l'esprit - Elle est un entretien avec Dieu - Dispositions qu'il faut apporter à la prière - Honneur qu'il y a pour nous de paraître ainsi devant Dieu - La prière nous amasse un riche trésor - C'est folie que de se tenir dans l'indifférence par rapport à la prière - Ne faire aucune prière est un mal plus grand pour nous que la mort même - Ceux qui négligent la prière ne sont animés d'aucun sentiment généreux -Mérite de ceux qui regardent comme le plus grand des malheurs celui de ne pas prier sans cesse - Orgueil le seul permis aux disciples de Jésus-Christ - Il est impossible d'être vertueux sans la prière - Elle purifie l'âme de ses péchés -Elle est le principe de tous les biens – Moments qui conviennent à la prière - Elle nous défend contre les malins esprits - Elle est le nerf de l’âme - elle en est la vie - Avantages qu'elle procure à ceux qui y sont assidus - Elle a la force de détruire et d'effacer le péché - La prière est nécessaire avant tout le reste - Celui qui prie et jeûne en même temps a comme deux ailes - Exemple de David - Un homme qui prie avec ferveur se trouve dans l'impuissance de pécher - Prier avant et après le repas - Nous pouvons toujours prier Dieu et obtenir l'effet de nos prières, n'importe que nous soyons sur une place publique - Avantages de la prière faite à l’Eglise - Notre concours nécessaire pour que nous puissions être aides par les prière des saints - Outrecuidance de ceux qui croient n'avoir pas besoin que d'autres prient pour eux, p.527-530 : S. CHRYSOSTOME. - Quels sont ceux qui prient véritablement au nom du Sauveur - Manière dont on doit demander à Dieu les biens temporels - Crime de ceux qui demandent à Dieu la mort de leurs ennemis - Raison de l'efficacité des prières de Moïse et de Samuel - Dieu aime à se laisser vaincre par nos importunités, p.530-532 : S. GREGOIRE.
Question III. Quels exemples peuvent servir à nous prouver l'efficacité et les heureux fruits de la prière, p.533-549.
Exemples de l'efficacité de la prière -
Eloge de la prière, p.547-548 : S. AUGUSTIN. - Efficacité
des prières des saints, p.548 : S. JEROME. - Si Etienne n'avait
pas prié, l'Eglise n'aurait pas eu un Paul pour apôtre, p.548-549
: S. AUGUSTIN.
FIN DE LA TABLE DU TOME QUATRIEME.