Le feu du purgatoire et ses équivalences
- Jésus a dit "Tout homme
sera salé par le feu" Marc 9,49; Doit-on en conclure que le feu
est-il le même en enfer au purgatoire et au paradis?
Les Pères de l'Église
ont souvent interprété ce feu divin d'après deux textes
de l'Ecriture:
Ps. 66,12. "nous sommes passés
par le feu et par l'eau"
Isaïe 43,2 : "Si tu traverses
le feu, tu ne t'y brûleras pas et la flamme ne te consummera pas,
car je suis Yavhé ton Dieu, le Saint d'Israël, ton Sauveur"
(cf. Origène, In Ps. 36. hom. 3, 1, PG 12, 1337bc).
"Tous ceux qui désirent retourner au paradis doivent être éprouvés par le feu... Tous doivent traverser les flammes... Un seul ne put sentir le feu : c'est le Christ, justice de Dieu; parce qu'il était sans péché ; le feu ne put rien trouver à brûler en lui" (Ambroise, Expositio in Ps. 118, XX, 12 et14,PL 15, 1487b-88a).
« Lorsque nous aurons dépassé
l'ère présente parvenus à la fin de la vie, et qu'ensuite
nous serons devenus quoique ce soit après être passés
au feu, soit au feu des "traits enflammés du malin" (cf. Éph.
6, 16), soit au feu divin, puisque notre Dieu est aussi "un feu destructeur"
( Hébr. 12,29), alors... nous ne pouvons plus être refaits
et notre état n'est plus susceptible d'amélioration" (Origène,
Hom.
sur Jérémie 18,1, SC 238, 1977, p. 178-79).
Pour Grégoire de Nazianze, "les damnés verront comme feu Celui qu'ils n'ont pas reconnu comme lumière" (Oratio 21, 2, PG 1084d).
Pour Isaac de Ninive, « il n'est pas juste de dire que les pécheurs de l'enfer soient privés de l'amour de Dieu... Mais l'amour agit de deux manières. ll tourmente les pécheurs... Et il réjouit ceux qui ont fait ce qui convient". (Discours ascétiques 84; trad. franç., Paris, 1981, p.415)
La méme idée apparait
chez Isidore de Séville (+636)
" le Christ éclaire les croyants
que vivifie l'esprit de foi, mais il brûlera de l'ardeur d'un feu
éternel ceuxqui le nient" (De natura rerum. éd. J.
Fontaine, Bordeaux, 1960, p.229)
On la retrouve bien plus tard chez
Abelard (Dialogus..., PL 178, 1673-1675 ; trad. M. de Gandillac, paris,
1945, chez Jacob Boehme (Mysterium magnum, Sämmtliche Werke, Leipzig,
1831-1846, t 5, p. 38), etc.
Jean de la Croix identifie plutôt le feu du purgatoire à celui du ciel : « Le feu qui s'unira un jour à l'âme pour la glorifier et celui qui l'envahit d'abord pour la purifier ne sont qu'un seul et même feu d'amour » (Llama I, 19).
Les théologiens d'aujourd'hui retiennent cette manière de voir : « Dans son essence inchangée, le même Feu divin qui pour celui-là est Supplice, est Purification pour cet autre, pour cet autre enfin Béatitude » (H. de Lubac, De la connaissance de Dieu, 2° éd., Paris, 1948, p. 132).
« Le même principe, qui
est l'Amour éternel, est le ferment de ces trois états que
l'imagination (sic) appelle : ciel, purgatoire, enfer. Partout où
il n'y a pas de résistance qui s'oppose à sa touche, cette
Energie apparaît comme Lumière et elle donne la joie complète.
Là où une résistance lui est opposée, elle
apparaît comme Feu... Le feu du purgatoire est un feu de joie, celui
de l'enfer un feu de tourment. L'Amour nous enveloppe toujours : c'est
nous qui, par notre attitude envers lui, le transformons en Feu ou en Lumière
»
(J. Guitton, L'enfer et la mentalité
contemporaine, dans le vol. collectif L'enfer, Paris, 1950,
p. 346-47).