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MGR JEAN-BAPTISTE BOUVIER

ABBÉ JEAN-BENOÎT VITTRANT

LA CHASTETÉ CATHOLIQUE

Saint Alphonse de Liguori, Docteur de l’Église, Théologie Morale, livre 3, N°413 : C’est à cause de la luxure que le plus grand nombre des âmes tombent en enfer.


Saint Antoine Marie Claret,

Autobiographie, 2, 11, 2-3-4 :

Je me dis souvent : il est de foi qu'il y a un ciel pour les bons et un enfer pour les mauvais ; il est de foi que les peines de l'enfer sont éternelles ; il est de foi qu'il suffit d'un seul péché mortel pour offenser un Dieu infini. Me rendant compte que ces principes sont très sûrs, voyant la facilité avec laquelle on pèche, aussi facilement que si l'on buvait un verre d'eau, comme pour rire ou par diversion, voyant la multitude qui est continuellement en état de péché mortel et va ainsi à la mort et en enfer, je ne puis rester en repos, je sens que je dois courir et crier et je me dis : Si je voyais quelqu'un tomber dans un puits ou dans un brasier, je courrais certainement et je crierais pour l'avertir et l'empêcher de tomber ? Pourquoi n'en ferais-je pas autant pour empêcher quelqu'un de tomber dans le puits et le brasier de l'enfer ? Je ne puis comprendre comment les autres prêtres qui croient aux mêmes vérités que moi, vérités que tous doivent croire, ne font ni prêches ni exhortations pour empêcher les gens de tomber en enfer.

Abbé Jean-Benoît Vittrant, s.j.

LA CHASTETÉ CHRÉTIENNE

Introduction


1029. – Introduction. – (…) je crois que si saint Alphonse [de Liguori], revenant parmi nous, se mettait à réviser son Traité de Théologie Morale, il n’aurait rien à modifier dans ce qu’il écrivait sur la luxure lorsqu’il déclarait : «La luxure est la matière la plus fréquente et la plus abondante des confessions, la majeure partie des âmes va en enfer à cause des péchés d'impureté [c’est à dire à cause des péchés sexuels] : qui plus est, je n'hésite pas à affirmer que ceux qui se damnent vont en enfer ou bien pour ce seul péché ou au moins pas sans lui.» (III, 413).


Dans un premier chapitre, après avoir donné quelques définitions et règles générales, nous traiterons de la chasteté des célibataires ; – dans un second, nous étudierons les droits des époux dans l’usage du mariage ; – les chapitres suivants seront consacrés aux abus sexuels interdits à tous ; – enfin, nous parlerons des «mauvaises pensées » et des fautes contre la pudeur.


En terminant, nous indiquerons les moyens propres à sauvegarder, dans les divers états [de vie], la chasteté chrétienne.


CHAPITRE 1 : LA CHASTETÉ EN DEHORS DU MARIAGE

St Thomas, 2a 2ae, q. 151-156 ; – St Alphonse, III, 413 ; – Vermeersch, De Castitate ; – Merkelbach, Quaestiones de Castitate ; – Payen, Déontologie Médicale, n°261 à 267 ; – Capellmann, La médecine pastorale, p. 206 à 224 ; – Dict. Vacant [Dictionnaire de Théologie Catholique, Paris, éd. Letouzey et Ané], art. Luxure et Chasteté ; – Dict. d’Alès, art. Chasteté ; – Franck Escande, Le problème de la chasteté masculine.

§ 1. DÉFINITIONS ET NOTIONS


1030. – La chasteté. – 1. – La chasteté est la vertu morale qui règle suivant la raison l’usage des fonctions sexuelles et de toute délectation charnelle.

Rattachée à la tempérance, comme la partie au tout, elle est cependant une vertu particulière. En effet, la «tempérance a pour objet propre les plaisirs du toucher. Si donc il y a lieu de distinguer entre ces plaisirs, il faudra distinguer aussi plusieurs vertus faisant partie de la tempérance. Or, les plaisirs sont proportionnés aux opérations. Et il est évident que l’usage de la nourriture, destinée à la conservation de l’individu, est distinct de l’usage de la volupté destinée la conservation de l’espèce. La chasteté qui règle celle-ci est donc distincte de l’abstinence qui règle celle-là » (St Thomas, 2a 2ae, q. 151, art. 3).

2. – Aussi, pour comprendre exactement quel est l’objet propre de la chasteté, il convient non seulement de bien distinguer la fonction sexuelle des autres fonctions, mais encore de distinguer nettement plusieurs délectations.

La délectation purement sensible est celle qui correspond au plaisir que procure aux divers sens du toucher, du goût, de l’odorat, de l’ouïe ou de la vue, la perception de leur objet proportionné, sans qu’il y ait aucun rapport direct avec le plaisir sexuel.

Le plaisir sensuel est dû à la présence ou au contact d’une personne aimée pour ses charmes extérieurs (...). De nature différente, elle donne cependant très facilement naissance à des désirs ou même à un plaisir sexuels.

Enfin, nous appelons délectation charnelle, vénérienne ou génitale, celle qui a son siège dans les centres nerveux des organes sexuels. Elle exprime au moins une excitation naissante de cette fonction qui a pour objet complet l’acte du mariage. – Cette excitation peut provenir de la mise en mouvement, par un moyen quelconque, de cet érotisme diffus dans tout le corps (…).

Accompagnée ordinairement de l’érection de l’organe viril ou du clitoris, la délectation charnelle ne suppose pas cependant nécessairement ce phénomène, qui peut du reste avoir lieu sans aucune délectation vénérienne.

3. – La pudeur sera la gardienne naturelle de la chasteté. Voisine de la modestie, elle comporte en plus un certain sentiment naturel de retenue et une certaine honte se rapportant aux organes sexuels. Cette retenue et cette honte s’expliquent par le fait que les mouvements de ces organes ne sont pas soumis à l’empire de la raison comme ceux des autres membres extérieurs. – Aussi le nudisme, destructeur de la pudeur, est nécessairement un ennemi de la chasteté.


1031. – Le célibat et la virginité. – 1. – Le célibat est l’état d’une personne qui vit en dehors du mariage.

2. – Du point de vue moral, la notion de virginité se confond avec celle de la chasteté parfaite, à laquelle elle ajoute ordinairement l’idée de préservation entière depuis la jeunesse.

L’état de virginité formelle se perd par toute faute de luxure, même solitaire, qui est à la fois extérieure, formelle et complète. La perte de cette virginité est irréparable.

3. – Dans un sens physique plus large, on dit qu’une femme est vierge lorsqu’elle n’a jamais eu de rapport complet avec une personne de l’autre sexe. – La perte de cette virginité, soit d’une manière coupable en dehors du mariage, soit même par l’accomplissement légitime de l’acte conjugal, rendrait gravement illicite la réception de la bénédiction spéciale réservée aux vierges. Cf. Prümmer, II, 67 nota.

Par analogie on dit qu’un homme est vierge lorsqu’il n’a jamais eu de rapports sexuels.


1032. – La continence et la luxure. – 1. – Le mot continence signifie une espèce de domination, un effort pour se retenir et résister à l’entraînement des passions.

Dans la pratique, ce mot ne sera employé que pour signifier l’abstinence de l’acte du mariage et de toute pollution [éjaculation ou orgasme volontaire].

2. – Si tout excès est luxure, nous conserverons à ce mot son sens courant en déclarant que la luxure est le vice qui se rapporte au plaisir sexuel défendu.

§ 2. MARIAGE ET CÉLIBAT


1033. – Légitimité du mariage et de son usage. – Le mariage est par la volonté du Créateur une nécessité sociale, un état normal et ordinairement bienfaisant pour l’homme (Livre de la Genèse, 2, 18). Nous savons de plus que le contrat du mariage chrétien est devenu, par la volonté du Christ, un sacrement de la Nouvelle Loi. Le mariage est donc nécessaire à la société, bon, légitime, et, pour le chrétien, sanctifiant.

Il est dès lors certain que le plaisir sexuel n’est pas nécessairement un péché. En effet, lorsque la relation sexuelle est raisonnable, ce qui a lieu dans l’usage légitime du mariage, le plaisir qui l’accompagne est dans l’ordre voulu par Dieu : il ne peut donc pas être coupable.


998. – Que faut-il penser de l’acte conjugal lui-même ?

1° L’œuvre de chair [= le coït] est un acte naturel. Rigoureusement interdit en dehors du mariage, et cela pour le plus grand bien de la société et en particulier des enfants, il devient honnête et parfaitement légitime lorsque les époux l’accomplissent suivant les règles dictées par la saine raison.

« Un péché ne peut-être la matière d’un précepte, nous fait remarquer saint Thomas (Supplément de la Somme Théologique, question 41, articles 3). Or l’acte conjugal est commandé, car saint Paul dit (1ère lettre aux Corinthiens 7, 3) : que le mari rende le devoir à l’épouse. Donc il n’est pas un péché ». Et saint Thomas continue : « …puisque la nature incline l’homme à perpétuer son espèce, on ne saurait poser comme un principe qui n’admet pas d’exception que la génération est toujours illicite, et qu’il ne peut s’y trouver ce juste milieu qui constitue la vertu. Pour le prétendre, il faudrait se ranger à l’opinion des Manichéens… »

Bien plus, « comme aucun acte procédant d’une délibération de la volonté n’est indifférent, l’usage du mariage est ou bien un péché, ou bien, chez celui qui est en étant de grâce, un acte méritoire ».


2° Que la fin primaire du mariage, la procréation des enfants, soit un motif qui légitime entièrement l’acte du mariage, c’est une doctrine évidente et admise de tous.

Mais puisque le mariage comporte des fins secondaires, elles peuvent par elles-mêmes en légitimer l’usage, à condition cependant de ne pas frustrer l’acte conjugal de son effet premier par une intervention positive contre nature. C’est pourquoi l’acte du mariage, posé normalement, est permis aux vieillards et aux [personnes] stériles ; c’est pourquoi aussi il peut être permis de choisir des jours agénésiques [= jours où la femme ne peut pas concevoir d’enfant faute d’ovulation] pour l’accomplir lorsqu’il est raisonnable de ne pas souhaiter une conception. Cf. Encyc. Casti Connubii ; saint Alphonse, VI, 927 ; et N°1058 plus bas.


[Contre nature signifie : « de telle sorte que la procréation n’est pas possible » cf. père Marie-Michel Labourdette, o.p., Cours de Théologie Morale N°15, La Vie Sexuelle La Chasteté, polycopié non publié, p.153-154. Le père Marie-Michel Labourdette (1908-1990), dominicain de la province de Toulouse, fut professeur de théologie morale, expert au concile Vatican II et membre de la commission nommée par le pape Paul VI sur la pilule contraceptive. Son Grand Cours de théologie morale, composé de 17 polycopiés format A4, constitue un commentaire de la 2ème partie de la Somme Théologique de saint Thomas d’Aquin. Parole et Silence ont publié en 2010 et 2012, le Petit Cours qui est sa version abrégée. Nos citations sont extraites du polycopié N°15 : Cours de Théologie Morale La Vie Sexuelle La Chasteté. Dans son Cours, il se prononce clairement et nettement contre la contraception, mais dans la Commission nommée par le Pape Paul VI, il se prononça malheureusement en faveur de la contraception.]


3° Mais user du mariage par simple volupté, c’est agir contre les principes de la sainte raison, se rendre coupable d’un désordre au moins léger, d’une faute vénielle (Denzinger-Bannwart, N°1159 ; saint Alphonse, 912). Bien plus, celui qui ferait de la volupté le but de sa vie commettrait une faute mortelle. (...)


999. Quels sont les droits et les devoirs des époux au sujet de l’acte conjugal ? « Que le mari, dit saint Paul (1 Corinthiens 7, 3 et ss.), rende à sa femme ce qu’il lui doit et que la femme agisse de même envers son mari. La femme n’a pas d’autorité sur son propre corps, mais c’est le mari [c’est le mari qui a autorité sur le corps de sa femme] et pareillement le mari n’a pas de pouvoir sur son propre corps, mais c’est la femme [c’est la femme qui a pouvoir sur le corps de son mari]. Ne vous privez pas l’un de l’autre, si ce n’est d’un commun accord pour un temps, afin de vaquer à la prière ; puis retournez ensemble, de peur que Satan ne vous tente par votre incontinence. Je dis cela par condescendance, ce n’est pas un ordre. »

De cet enseignement de l’Apôtre, nous devons conclure trois choses :

1° Chaque conjoint a un droit égal à l’acte conjugal et c’est pour l’autre une obligation grave par elle-même de ne pas se refuser à une demande faite raisonnablement et sérieusement. Cf. Code de Droit Canon de 1917, canon 1111 : « un droit et un devoir égal appartiennent dès le début du mariage à chacun des conjoints en ce qui concerne les actes propres à la vie conjugale. » [= les actes sexuels].

2° Il est toujours permis aux époux de garder d’un commun accord une continence raisonnable.

3° L’état conjugal confère une gravité particulière aux fautes de la chair, car elles impliquent alors la violation du droit d’autrui et compromettent l’équilibre d’une institution sociale. C’est pourquoi la fornication devient adultère ; les fautes solitaires elles-mêmes constituent une violation du mariage et doivent être accusées comme telles. Cf. N°1047 et ss.


1000. Quelques précisions relatives à ces devoirs et de ces droits.

a) Le droit de demander l’acte conjugal peut se transformer en un devoir de charité, s’il convient de le faire pour éviter au conjoint de graves tentations. Cf. saint Alphonse, 928-929. (...)

c) L’obligation de se prêter à l’acte conjugal suppose que la demande, faite implicitement ou explicitement, soit sérieuse, ferme et raisonnable. C’est pourquoi un motif grave de santé, ou même dans un cas particulier le manque de ressources pour élever les enfants, peut légitimer un refus.

d) Le droit à l’acte conjugal peut se perdre par l’adultère. Cf. Cappello, 811, 1° ; pour le for externe, voir le canon 1129.

e) Un mari paresseux, avare ou méchant qui ne prendrait pas sa part raisonnable des charges de famille perdrait par le fait son droit strict à l’acte conjugal.

f) On se souviendra aussi, pour interpréter ces droits et ces devoirs, de ce qui a été dit ci-dessus au sujet de l’obligation sociale d’avoir des enfants. Cf. supra N°977.

Remarque. Il est évident qu’un conjoint qui aurait perdu l’usage de la raison, ne pourrait plus user de son droit, puisqu’il ne pourrait plus le faire humainement. (...)


1003. (…) Le mariage est l’origine d’une association stable, physique et morale, qui exige des conjoints une grande affection mutuelle, une constante fidélité et une assistance réciproque dévouée et assidue. (...) Il y a pour les époux une obligation normale de vie en commun. Cf. Droit canon 1917, canon 1128. Mais la modalité de cette vie commune dépendra des coutumes et des circonstances. La raison doit y présider et permettre au mariage d’atteindre ses fins. (…) Les époux devront avoir l’un pour l’autre un véritable amour, chaste, profond, délicat, fidèle et chrétiennement charitable. L’union des âmes exigera souvent bien des sacrifices, bien des victoires sur ses défauts, beaucoup d’abnégation. Voir : Von Hildebrand, Le Mariage ; Viollet, La Bonne Entente Conjugale.


1034. Légitimité et supériorité d’un célibat vertueux. Bien que le mariage soit nécessaire au bien de l’espèce humaine, il n’y a cependant pour chacun des individus aucune obligation personnelle de le contracter.

« La nature nous pousse vers deux sortes de biens, nous dit saint Thomas (Supplément de la Somme Théologique, question 41, article 2), les uns sont nécessaires à la perfection de l’individu, chacun est alors obligé de le rechercher… Les autres sont nécessaires à la société : ces biens sont nombreux et se contrarient les uns les autres ; chacun n’est donc pas tenu de les poursuivre tous en même temps, sinon chacun devrait s’adonner à la fois à l’agriculture, à la construction et aux autres métiers indispensables à la société humaine. Pour obéir à la nature, il suffit de remplir un des emplois nécessaires à tout le groupe. Or, il est nécessaire au bien de la société humaine que certains hommes se consacrent à la contemplation, et celle-ci par ailleurs n’a pas de plus grand obstacle que le mariage. (Et l’on pourrait trouver facilement d’autres raisons sociales pour légitimer le célibat.) L’inclination naturelle qui pousse au mariage n’a donc pas force de loi, même au dire des philosophes. »

Aussi l’Église déclare-t-elle à bon droit que le célibat, embrassé pour des raisons pures d’égoïsme, est légitime.

Bien plus, si le motif pour lequel on adopte cet état est surnaturel, l’Église affirme solennellement la supériorité du célibat sur le mariage chrétien lui-même. Cf. Denzinger-Bannwart, 980.

Il est évident, à fortiori, que le célibat qui s’impose avant le mariage est louable et légitime.

§ 3. LES RÈGLES DE LA CHASTETÉ PARFAITE.


1035. – Introduction. – Chez les animaux dépourvus de raison, l’instinct est la règle unique de toute activité : pour eux tout acte, si bestial soit-il, est nécessairement conforme à la nature. – Chez l’homme, au contraire, les impulsions instinctives ne sont pas toujours, surtout dans notre état de déchéance originelle, entièrement conformes aux exigences profondes de son être. L’homme, pour agir suivant sa nature, devra parfois lutter contre ses impulsions, afin d’obéir à sa raison. Or, chacun sait qu’en matière sexuelle cet empire de la raison sur les sens est particulièrement nécessaire et difficile.

Quelles sont les règles de la vie sexuelle imposées par la raison au célibataire ? C’est la question que nous avons à examiner présentement.

La réponse ferme que nous fait la Morale Catholique est la suivante : Tout usage des fonctions sexuelles lui est interdit et tout plaisir sexuel strictement défendu, car, en dehors du mariage, la fonction vénérienne n’a pas d’objet légitime.

Ce principe certain fonde les règles de la chasteté parfaite que nous allons étudier. Nous le ferons en nous reportant constamment à l’enseignement commun des théologiens, afin d’éviter tout risque d’erreur en cette matière complexe et délicate.

1036. – Première règle. – Toute sensation sexuelle directement recherchée ou consciemment acceptée par un célibataire est, s’il y a pleine advertance [l’advertance est l’attention avec laquelle on surveille ses actes sous l'aspect du bien ou du mal] et entier consentement, une faute mortelle par son genre [ex toto genere suo = du seul fait de son genre].

Nous ne parlons dans cette première règle que de la sensation sexuelle considérée en elle-même, sans nous occuper ici de la façon dont elle a pu prendre naissance, ni de ses suites physiologiques.

1. – Dans les conditions indiquées, la recherche ou l’acceptation du plaisir sexuel est certainement une faute. – En effet, « un acte humain est un péché, dit saint Thomas, quand il va contre l’ordre établi par la raison. Or, cet ordre consiste dans l’adaptation des moyens à la fin ». Mais le but ou la fin naturelle du plaisir sexuel est le bien de l’espèce dans l’usage raisonnable des fonctions sexuelles. Le célibataire, à qui cet usage est interdit, ne peut donc raisonnablement jouir d’une façon consciente et voulue de la délectation correspondante.

Même si le plaisir est spontané, même s’il est dû indirectement à un acte légitime, le célibataire ne peut en jouir de propos délibéré, car ce serait nécessairement augmenter le désordre physique qui en est la cause et détourner au profit de son bien personnel ce qui a pour but premier le bien de l’espèce.

2. – La matière est grave de sa nature : « est materia gravis ex genere suo » [la matière est grave de sa nature, par son genre, du seul fait de son genre]. Tel est l’enseignement constant et unanime des théologiens. La relation est évidente entre le plaisir sexuel et l’acte du mariage. Aussi personne ne sera tenté de déclarer qu’il n’y a pas là une question importante et, au moins dans certains cas, matières à fautes mortelles. [Faute mortelle pour la grâce sanctifiante présente en l’âme d’une personne en état de grâce1].

3. – Bien plus, – cet enseignement est commun et cette doctrine certaine, – dans les conditions indiquées ci-dessus, il ne peut y avoir de faute vénielle par légèreté de matière : « le plaisir sexuel illicite est un péché grave par son genre [de son genre] de fait qui n'admet pas de légèreté de matière »

L'histoire nous apprend cependant que l’unanimité des théologiens n’a pas toujours existé sur ce point. Cf. Dictionnaire de Théologie Catholique, Vacant, tome IX, colonne 1341. C’est pourquoi, au XVIe et au XVIIe siècle, la thèse de la légèreté de matière gardait encore une probabilité au moins extrinsèque.

En 1612, le P. Claude Aquaviva, général de la Compagnie de Jésus, intervint disciplinairement pour imposer à ses religieux l’enseignement qui devint bientôt le seul professé par tous les théologiens catholiques. Actuellement, aucun auteur n’oserait soutenir qu’il peut y avoir légèreté de matière. [En 2023 et malgré l’excellente encyclique Veritatis Splendor du 6 août 1993, de nombreux auteurs se réclamant pourtant de leur appartenance à l’Église catholique, en contestent l’enseignement moral.]

4. – Si les moralistes s’entendent au sujet de la conclusion pratique, ils ne s’accordent pas pleinement sur l’argument spéculatif qui doit l’établir. Cf. Vermeersch, De Castitate, 353 ; – Noldin, II, 20 ; – Genicot-Salsmans, I, 399 ; – Prümmer, II, 682 ; – Aertnys, I, 599 ; – Wouters, 26.

Parmi les arguments proposés, deux nous semblent cependant irréfutables. Ils se complètent mutuellement en mettant en évidence deux aspects de la question.

a) Argument direct (cf. Vermeersch, loc. cit.).

Le péché véniel diffère du péché mortel parce que celui-ci est « contra legem » [contra legem = contre la loi, il atteint la fin dernière], celui-là « praeter legem » [praeter legem = passer outre la loi, au delà de la loi, en plus de la loi. Le péché véniel porte atteinte au moyen, attaque le moyen mais n’attaque pas le but même de notre existence, notre fin dernière, ce pour quoi Dieu nous a créé]. Une simple variation quantitative dans la matière de la faute ne suffit pas pour expliquer par elle-même cette différence. Une faute est vénielle non pas seulement parce qu’elle est moins grave (il y a bien des degrés dans la gravité du péché mortel), mais parce que le but de la loi n’est pas directement méconnu et, par conséquent, peut être encore atteint. – Or, dans le cas présent, toute jouissance sexuelle illégitime et égoïste, recherchée par le célibataire, détourne totalement de sa fin ce qui n’est fait que pour faciliter la génération et le bien de l’espèce dans l’usage du mariage. De même qu’il n’y a pas ici d’offense qui ne méconnaisse directement le but de la loi, il n’y a pas d’offense que la loi ne condamne gravement.

b) Argument psychologique.

« C’est un péché grave que de vouloir directement une chose mauvaise en elle-même qui implique de sa nature un danger prochain de péché grave. Or, le plaisir sexuel directement voulu ou librement accepté est mauvais par lui-même, puisqu’il est contre l’ordre établi (cf. supra : 1), et il contient essentiellement ce danger prochain car une fois voulu et accepté, il entraîne naturellement et pour ainsi dire irrésistiblement jusqu’au plaisir complet » (Vacant, IX, 1341-1342).

Seule une règle ferme et nette peut être efficace en cette matière qui présente toujours de graves dangers d’hallucination et d’entraînement.

REMARQUE. – En faveur de l’enseignement que nous venons de rappeler, on cite ordinairement la 40e proposition condamnée par Alexandre VII : « C’est une opinion probable celle qui dit que ce n’est qu’un péché véniel le baiser obtenu en vue de la délectation sensuelle provenant d’un baiser, s’il n’y a pas de péril de consentement ultérieur ou de pollution. »» (Denzinger Bannwart, N°1140) [Denzinger Hünermann N°2060 : C’est une opinion probable, que celle qui dit qu’un baiser donné à cause de la délectation charnelle et sensible que procure le baiser, sans péril de consentement ultérieur et de pollution, est un péché véniel seulement, cf. Symboles et Définitions de la Foi Catholique, Éditions du Cerf, Paris, 1996, p.520.]. Mais le sens de la proposition condamnée ne ressort pas très clairement, non plus que le sens exact de la condamnation elle-même. – Cf. Viva, Damnatae Theses, l. c.


1037. – Seconde règle. – Chez les célibataires, la provocation directe et volontaire de tout mouvement sexuel est toujours gravement défendue.

1. – On appelle « mouvement sexuel » toute commotion physique accompagnée de sensations strictement sexuelles. Le mouvement sexuel est donc un commencement de mise en action de la fonction génitale.

Il convient de remarquer que si tout mouvement sexuel commence normalement par une érection ou une congestion des organes génitaux, toute érection ou congestion de ces organes n’est pas nécessairement un mouvement sexuel. (...)

2. – Puisque tout mouvement sexuel comprend au moins un commencement de plaisir sexuel, il est évident que chez le célibataire, la provocation directe de ces mouvements est nécessairement une faute grave. Cf. Noldin, 48-49.


1038. – Troisième règle. – Chez les célibataires des deux sexes, la provocation directe de l’orgasme (qui chez l’homme est accompagné normalement de l’éjaculation) est toujours gravement défendue, même lorsqu’il n’est accompagné d’aucun plaisir consenti (St Alph., III, 476).

En effet :

a) (Raison spéculative.) Le célibataire, homme ou femme, qui recherche l’orgasme en dehors de l’acte légitime du mariage recherche pour un bien particulier et personnel ce qui se rapporte essentiellement au bien de l’espèce. Dès lors, nous devons conclure que le désordre est grave de sa nature, et n’admet pas de légèreté de matière.

De plus, cette recherche entraîne nécessairement, et par sa nature même, un danger prochain de consentement au plaisir sexuel ordinairement ainsi obtenu.

b) A l’argument de raison se joint l’argument d’autorité. En plus du consentement unanime des théologiens, nous pouvons citer la 49eme proposition condamnée par Innocent XI (Denz.-B., 1199), ainsi qu’une réponse récente du Saint-Siège qui condamne l’usage de la masturbation pour se procurer du sperme en vue d’une analyse médicale (AAS, 3 août, 1929). [L’instruction Donum Vitae du 22 février 1987, a redit l’interdiction morale catholique de la masturbation pour pouvoir réaliser un spermogramme : « La masturbation, par laquelle on se procure habituellement le sperme, est un autre signe de cette dissociation: même quand il est posé en vue de la procréation, le geste demeure privé de sa signification unitive. » « Il lui manque (…) la relation sexuelle requise par l'ordre moral, celle qui réalise, "dans le contexte d'un amour vrai, le sens intégral de la donation mutuelle et de la procréation humaine" » [Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Déclaration sur certaines questions d'éthique sexuelle, 9 : AAS 68 (1976) 86, qui cite la Const. past. Gaudium et Spes, 51 ; cf. Décret du Saint-Office, 2 août 1929 : AAS 21 (1929) 490 ; Pie XII, Discours aux participants au XXVIe Congrès de la Société Italienne d'Urologie, 8 octobre 1953: AAS 45 (1953) 678.]. » « Ces raisons permettent de comprendre pourquoi l'acte de l'amour conjugal est considéré dans l'enseignement de l'Église comme l'unique lieu digne de la procréation humaine. Pour les mêmes raisons, le « simple case », c'est-à-dire une procédure de FIVETE homologue purifiée de toute compromission avec la pratique abortive de la destruction d'embryons et avec la masturbation, demeure une technique moralement illicite, parce qu'elle prive la procréation humaine de la dignité qui lui est propre et connaturelle ». Le simple case est le cas où le mari se masturbe pour que le scientifique puisse ensuite déposer son sperme dans le vagin de l’épouse, sans fabrication de plusieurs fœtus dont certains seraient stockés dans un congélateur et éventuellement détruits si la première implantation de fœtus a donné lieu a une grossesse menée jusqu’à la naissance].

N. B. – l'éjaculation ou l'orgasme nocturne n’est coupable qu’autant qu’elle est volontaire ou acceptée quant au plaisir sexuel qu’elle apporte. Cf. Vermeesch, De Castitate, 385. [Dans la plupart des cas, l’éjaculation lors des rêves est involontaire, donc elle est innocente moralement, elle n’est pas du tout coupable. Elle est même parfois la suite de la victoire sur l’habitude vicieuse de la masturbation. Le corps humain étant très bien conçu, l’organisme éjacule naturellement, avec des régularités très variables selon les personnes, le sperme stocké, non dans les testicules mais dans les vésicules séminales qui se trouvent à l’arrière et sous la vessie, abouchant sur la prostate.]


1039. – Gravité de ces fautes. – Diverses espèces de péchés solitaires. – Il faut considérer comme spécifiquement distinctes les fautes complètes qui ont entraîné l’orgasme, – et les fautes incomplètes qui correspondent à de simples sensations sexuelles sans orgasme (...).

Mais il semble, bien que les avis soient partagés à ce sujet, que toutes les fautes solitaires complètes sont de même espèce, qu’il s’agisse d’un homme adulte, d’une femme, d’un enfant ou même d’un eunuque ou d’un homme qui a subi une vasectomie. La faute n’est pas en effet caractérisée par la perte de spermatozoïdes, mais par la recherche de l’orgasme en dehors de l’acte légitime du mariage (Vermeersch, 328). Dans le concret, les degrés de gravité sont multiples, car bien que toutes mortelles de leur nature, ces fautes comportent bien des atténuations et bien des aggravations. Cf. n°1080.

Enfin, si l’on veut comparer les fautes solitaires à la fornication il n’y a pas de doute que, dans leur entité concrète, les fautes solitaires soient ordinairement beaucoup moins graves que les fautes de fornication. Ces dernières supposent en effet une faute de complicité ou une violence, un danger de génération en dehors du mariage avec ses inconvénients multiples pour l’enfant [qui se retrouvera sans un père et une mère unis dans un mariage stable pour prendre soin de lui et l’élever dans l’amour et la concorde, puisqu’il aura été procréé dans un moment de simple appétit sexuel sans réels communion et amour profond et durable entre son père et sa mère] et la société, enfin une volupté défendue plus complète.

REMARQUE – Lorsqu’un célibataire s’accuse [en confession] d’avoir commis sur lui-même une faute grave contre la pureté, ou simplement d’avoir commis une mauvaise action, on est en droit, ordinairement, de conclure, sans avoir besoin de faire préciser davantage, qu’il s’agit d’une faute solitaire complète.


1040. – Quatrième règle. – Les sensations sexuelles spontanées et entièrement indépendantes de la volonté, indifférentes par elles-mêmes, ne peuvent devenir coupable qu’autant qu’elles se transformeraient en un des actes condamnés par les règles précédentes.

Étant en elles-mêmes entièrement indépendantes de la volonté, ces sensations représentent, au point de vue moral, des actes indifférents. C’est dans ce sens qu’on pourra dire : « l’éjaculation ou l’orgasme ne sont objectivement mauvais que s’ils ont été provoqués. » (d’Annibale, II, 65).

Les sensations physiologiques qui sont la conséquence naturelle et fatale de ces mouvements sexuels, constituent cependant un danger puisqu’il reste interdit de continuer ces sensations par un acte volontaire et positif (Règle 2) et de prendre à leur occasion un plaisir volontaire ou délectation charnelle consciemment acceptée (Règle 1).

C’est pourquoi, puisqu’il est interdit d’accepter volontairement le danger prochain d’une faute morale, on devra prendre les moyens qui écarteront efficacement ce danger. Dès lors, si on peut admettre qu’il est permis en soi d’avoir vis-à-vis de ces sensations sexuelles une attitude purement passive, il convient cependant de faire, au moins intérieurement, des actes positifs qui rendront psychologiquement impossible tout consentement coupable.

Ces principes rendent compte des conclusions auxquelles s’arrête saint Alphonse : « Quelqu’un n’est pas tenu (pourvu qu’il n’y ait pas de danger de consentir à la volupté, ou de la provoquer volontairement) d’empêcher l'éjaculation ou l'orgasme qui survient spontanément, ou qui est déjà commencée ; de la réprimer, par exemple, en rêve. Mais il peut, pour des raisons sanitaires, permettre que la nature se libère. Car cela n’est pas provoquer, mais supporter que s’écoule le corrompu qui autrement léserait la santé. Le même Sanchez admet que, même si l’effusion provenait de la faute, il suffit de s’en attrister, et de rejeter tout consentement ultérieur. Il ajoute que, la plupart du temps, il convient de se munir de la croix ; et, fuyant toute distraction, et tenant les mains jointes, de prier Dieu pour qu’il ne permette pas de chute dans la délectation2. » (III, 479.)

Et ce qui est une conséquence logique de cette première conclusion : « Il est licite, pour une fin honnête, comme la diminution de la tentation, la santé, la tranquillité de l’âme, de désirer, en toute simplicité, une évacuation spontanée et naturelle de la nature, pourvu que ce désir ne soit pas une cause efficace de l'éjaculation ou l'orgasme. De la même manière, il est même permis de s’en réjouir, si elle a eu lieu par voie naturelle et sans péché, car n’est pas mauvais l’objet de ce désir et de cette joie. » (III, 480).

Malgré tout pour éviter autant que possible à l’occasion de ces désordres physiques toute faute même vénielle, plus ou moins inévitable, une âme chaste s’efforcera avec calme de d’obtenir par les meilleurs moyens la pureté et la continence physique compatible avec son tempérament.

1041. – Cinquième règle. – Lorsque des mouvements sexuels, allant même jusqu’à l’orgasme, n’ont sincèrement pas été voulus, mais ont été seulement permis, lors d’une action ayant réellement un autre but, le fait de leur prévision ne constitue pas une faute grave contre la chasteté. Il n’y a pas alors en effet d’usage volontaire de la fonction sexuelle, tandis que le désordre psychologique permis, mais non voulu, n’a en soi que des conséquences facilement négligeables. – « Les mouvements sexuels et même l’orgasme… toutes les fois qu’ils surviennent par accident ou sans être voulus, sont exempts de toute faute, et certainement de péché mortel. » (d’Annibale, II, 65).

Cette proposition est certaine ; mais encore faut-il bien la comprendre. Rappelons donc que, de l’avis de tous, il y a pratiquement toujours péché mortel à poser sans raison valable, un acte par lui-même, prochainement et notablement excite les sensations sexuelles, - excepté le cas où l’on saurait par sa propre expérience qu’on ne ressentira sûrement aucun mouvement sexuel (Noldin, 13) – « De ce genre sont, sans aucun doute, toutes les choses qui, par elles-mêmes, sont des fautes graves dans le genre de la luxure, comme les touchers, les regards des parties sexuelles de son propre corps ou de celui d’autrui avec la délectation délibérée d’une chose honteuse, la contemplation d’un accouplement humain, et des pensées lascives de choses sexuelles. Tous les orgasmes donc qui proviennent de ces causes sont très certainement mortelles…Et ainsi, l’acte honteux qui est la cause de l’orgasme a une malice spéciale contre nature. » (St Alph., 482). Et saint Alphonse en donne un peu plus haut la raison « Car on estime que consentir dans la cause est consentir moralement dans l’effet ». Réellement, le volontaire est alors direct : une faute déjà condamnée par les règles précédentes est commise et elle aura la culpabilité d’une faute « complète » s’il y a orgasme.

Par ailleurs, on doit admettre, - que l’orgasme se produise ou non, - qu’il n’y a en soi qu’une faute vénielle à poser sans raison suffisante, un acte qui influe par lui-même mais de loin, - ou par accident sur les sensations sexuelles. Saint Alphonse nous dit en effet « La sentence commune et probable enseigne que l'éjaculation ou l'orgasme ne sont pas mortels, à moins qu’elle ou il ne provienne d’une cause mortelle en soi dans le genre de la luxure. La raison pour laquelle la cause doit être mortelle en soi est que, quand l'éjaculation ou l'orgasme n’est pas voulu(e) pour lui-même, mais seulement dans sa cause, il aura le degré de malice que possède la cause elle-même. La raison pour laquelle elle doit être mortelle dans le genre même de la luxure, est que, quand la cause concourt légèrement à l'éjaculation ou à l'orgasme, il n’y a pas d’obligation grave de l’éviter, à cause d’une éjaculation ou d’un orgasme qui peut arriver sans qu’on le veuille. (III, 484).

Mais, dans tous les cas où il n’y aura aucun désordre recherché directement, ni aucun plaisir accepté, un motif raisonnable mettra efficacement à l’abri de toute faute : « Si quelqu’un sur le point de faire une chose nécessaire, licite et honnête, prévoit qu’il s’ensuivra naturellement un orgasme, (et cela vaut encore plus pour la distillation qu’il ne veut, cependant, ni ne désire en aucune manière, il n’est pas tenu de s’abstenir de cette action, pourvu qu’il n’y ait pas de péril qu’il consente à la délectation, car en poursuivant ce qui est son droit, ne lui est pas imputé l’effet qui en découle par accident et contre sa volonté. [la distillation : écoulement de liquide translucide produit par les glandes de Cowper pour nettoyer l’urètre en vue de la future éjaculation, ou de la future pénétration dans le cas des femmes. Il semble que l’on puisse établir une analogie entre la distillation par ces petites glandes et la lubrification de la vulve et du vagin en tant qu’il s’agit de deux types de liquides différents par nature mais reliés à l’activité sexuelle] Voilà pourquoi, malgré le danger d’émotions sexuelles, d’excitations sexuelles, il est permis d’entendre les confessions des femmes, d’étudier des cas de conscience, de se toucher quand c’est nécessaire [par exemple pour se laver], de parler avec prudence avec les femmes quand il le faut, d’embrasser, d’étreindre selon les coutumes du pays, pour ne pas être taxé d’incivilité ou de manque de savoir vivre » (III, 481).

REMARQUE – La distillation est une sécrétion de la prostate et des autres glandes secondaires [glandes de Cowper]. Indifférente en elle-même lorsqu’elle se produit spontanément « sans excitation charnelle », elle ne peut pas être provoquée sans violer gravement l’une des règles données ci-dessus.


1042. Sixième règle. – Les fiancés et les veufs sont astreints aux règles de la chasteté parfaite. St Alphonse, III, 431-432 ; VI, 932,2.

§ 4. LA CHASTETÉ PARFAITE ET LA MÉDECINE.


1043. – La chasteté masculine est possible et sainte. – Il est de bon ton, pour certains, de déclarer que la continence, si souvent demandée par la morale catholique (qui prétend cependant n’être alors que l’écho de la morale naturelle) est simplement impossible et que toute résistance à la nécessité physique de l’activité sexuelle, est dangereuse pour l’équilibre nerveux et mental.

Cependant l’étude objective et scientifique de la continence masculine prouve que « la fonction de reproduction n’est pas indispensable à la vie, elle est une fonction de luxe », et « aucune des objections faites à la chasteté masculine, au nom de la physiologie, n’est irréfutable » (Docteur Escande, Le problème de la Chasteté masculine, au point de vue scientifique, p. 70 et p. 89).

De fait, nombreux sont les médecins qui, se basant uniquement sur leurs observations, affirment, scientifiquement parlant, la possibilité de la continence :

« Si les dangers de la continence existent, je ne les ai pas constatés, bien que les sujets d’observation ne m’aient pas manqué en la matière » ( Docteur Fournier).

« Ceux qui sont capables de chasteté psychique peuvent garder la continence » ( Docteur Féré).

« C’est un préjugé de croire que la continence est impossible » ( Docteur Héricourt).

« Un très grand nombre d’hommes normalement constitués peuvent mettre un frein à leur passion » (Docteur Kraft Ebing).

« Je connais bon nombre d’homme de vingt-cinq, de trente ans et au-delà, qui n’ont jamais eu de rapports sexuels, ou qui, mariés, n’en avaient jamais eu avant leur mariage. Ces cas ne sont pas rares, seulement ils ne s’affichent pas » (Dubreuilh).

« J’ai reçu de nombreuses confidences de la part d’étudiants sains de corps et d’esprit ; ceux-ci m’ont reproché de ne pas avoir assez insisté sur la facilité avec laquelle les désirs des sens peuvent être dominés » (Ribbings ; – cités par Escande, p. 90).

Mais il est certain que la chasteté est surtout affaire d’éducation, de principe et de volonté.

Aussi ne sommes-nous pas étonnés de voir le Congrès Médical de Bruxelles de 1902, formuler le vœu suivant : « Il faut enseigner à la jeunesse masculine que non seulement la chasteté et la continence ne sont pas nuisibles, mais encore que ces vertus sont des plus recommandables au point de vue purement médical et hygiénique ».


1044. – La continence n’est normalement, ni pour la jeune fille, ni pour la femme chaste, une cause de troubles nerveux et de déséquilibre physique ou mental. – On prétend quelquefois aussi que le célibat porte les femmes à l’hystérie : « Mais, fait remarquer le médecin viennois Kraft Ebing, si les filles vierges sont parfois hystériques, cela tient à des causes morales et non physiologiques. Les femmes non mariées qui remplacent le mariage par des occupations sérieuses auxquelles elles se donnent corps et âme, – comme par exemple les Sœurs de la Charité qui se donnent aux malades et aux enfants, – ne deviennent qu’exceptionnellement hystériques. Bien mieux, sur un grand nombre d’hystériques, Scanzoni en a trouvé 75% qui avaient eu des enfants et 65% en avaient eu plus de trois. Il faut donc rayer le célibat des causes de l’hystérie, comme aussi le mariage des remèdes de cette maladie ». (Cité dans Vacant., Dictionnaire de Théologie Catholique, tome III, colonne 1647)

Si parfois le mariage est bienfaisant pour la santé d’une jeune fille atteinte de névrose ou de neurasthénie, c’est seulement lorsque le mariage était l’objet d’un de ses plus chers désirs : dans ce cas, la réalisation d’une espérance jointe à un changement de vie peut être l’occasion d’une amélioration ou même d’une guérison. Mais, cette condition faisant défaut, le mariage pourrait fort bien être la cause d’une aggravation de l’état de la malade.

1045. – La chasteté perpétuelle peut, elle-même, être possible et bienfaisante. – Après s’être posé la question : Y a-t-il une pathologie de la continence, et avoir étudié le problème fort objectivement, le Dr Escande conclut : « Nous voyons que l’opinion des auteurs qui parlent des méfaits de la chasteté ne repose que sur quelques faits épars dans la littérature médicale dont aucun n’est irréfutable. Ces rarissimes observations peu démonstratives ne sauraient être mises en parallèle avec le grand nombre d’hommes vierges et bien portants. Il n’y a donc pas une seule maladie due à la continence. » (loc. cit., p. 151).

Bien plus, la chasteté loin d’amoindrir l’homme l’élève ; elle ne rétrécit pas nécessairement la vie, mais peut fort bien l’embellir et la dilater, car « la continence réalise une réserve de forces. L’économie sexuelle favorise la longévité et les différentes formes de l’activité intellectuelle. » (Dr Féré, L’instinct sexuel, p. 316)

Par ailleurs, le célibat vertueux est pour la société un bel exemple d’ascétisme, et le dévouement généreux et libre de toute entrave de ceux qui ont fait vœu de chasteté pour se donner entièrement à Dieu et au prochain est par son activité même un bienfait social (Cf. P. Bureau, L’indiscipline des mœurs, p. 323 et suiv.).


1046. – Conclusion. – Le médecin n’aura donc jamais de bonnes raisons à faire valoir pour donner des conseils contraires à la morale chrétienne ou pour condamner d’une façon générale la continence vertueuse durant toute la vie.

Dès lors, s’il est honnête, il ne se permettra jamais de prescrire la masturbation comme ayant des avantages thérapeutiques souhaitables, et il se gardera bien de conseiller à qui que ce soit des rapports sexuels avant le mariage, ou en dehors de l’usage légitime de celui-ci. [Ajout en 2023 : prétendre que la masturbation éloigne le cancer de la prostate n’est pas scientifiquement prouvée Les hommes ne se sont jamais autant masturbés qu’à notre époque en raison de la propagation de la pornographie gratuite sur les téléphones et pourtant le nombre de cancers de la prostate explose ces dernières années.]






CHAPITRE 2 : LA CHASTETÉ DANS L’USAGE DU MARIAGE


Saint Alphonse, VI, 913 à 919 ; 932 à 937 ; 954. Gousset, II, 893 à 897. Payen, II, 1970 à 2119. Capellman, p.300 à 344. [Pie XI, 31 déc. 1930] Encyclique Casti Connubii

§ 1. [Cinq] Règles Générales

N°1. Tout ce qu’exige l’acte conjugal et tout ce qui peut le favoriser, doit être considéré comme normal, naturel, entièrement permis dans l’usage légitime du mariage.


Cette première règle est une conclusion directe de la légitimité de l’acte conjugal. Elle déclare que si rien ne vient par ailleurs rendre l’usage du mariage contraire à la sainte raison, tout ce qui peut favoriser l’acte conjugal est permis aux époux.

C’est pourquoi : « Tous les baisers, les touchers, les étreintes, les regards, les paroles érotiques échangés entre époux présents l’un à l’autre, dans les limites de l’honnêteté naturelle, sont licites, s’ils sont faits dans le but de favoriser l’acte. » (Saint Alphonse de Liguori, VI, 932.)

«Elle n’est pas illicite, non plus, l’émotion vénérienne avec pleine volupté qu’a l’épouse immédiatement avant que l’homme ait dûment ensemencé, ou qu’elle se procure à elle-même par des touchers, si elle ne l’a pas eue. » (Saint Alphonse de Liguori, VI, 919.)

[Bien plus, comme dans le mariage, chacun des conjoints a également droit à l’accomplissement complet de l’acte conjugal, il est permis, pour synchroniser le plaisir final, de préparer par des attouchements la jouissance sexuelle, l’orgasme de l’épouse et même de le provoquer mais immédiatement avant l’acte ou de suite après dans le cas où l’époux serait plus prompt. Cf. Catéchèse Catholique du Mariage, Abbé Noël Barbara, éditions Forts dans la Foi, Tours, 1989, p.118.]

N°2. Dans l’accomplissement de l’acte conjugal, tout ce qui, sans être absolument normal, ne s’oppose cependant pas positivement à la fin première du mariage (la procréation [et l’éducation] des enfants), n’est en soi que faute vénielle, et peut même, pour une raison proportionnée, être exempt de toute culpabilité.

Il ne peut pas, en effet, y avoir, dans les conditions indiquées, de désordre grave, puisque la fonction n’est pas essentiellement détournée de son but normal.

Cette règle permet de résoudre les questions qui se posent au sujet de la manière dont est accompli l’acte conjugal : position, durée, époque, fréquence… Cf. Saint Alphonse, VI, 917 ; Vigouroux, Dict. de médecine, t. IV, p.64 et 65.

N°3. En dehors de l’acte conjugal normal, il est toujours gravement interdit aux époux soit de rechercher l’éjaculation ou l’orgasme, soit même de s’y exposer imprudemment.

Seul en effet l’acte conjugal peut légitimer l’usage complet des fonctions sexuelles et la recherche du plaisir qui l’accompagne.

Mais c’est dans le concret seulement qu’on déterminera exactement ce qui, à cet égard, est prudent ou imprudent. Et il faut bien admettre que des accidents se produisent sans qu’il y ait nécessairement faute ou du moins faute grave. « Les époux peuvent, pour une cause grave, faire quelque chose qui entraîne, par accident, une effusion du sperme. » (Saint Alphonse VI, 954)

N°4. A condition cependant d’éviter raisonnablement tout danger prochain d’éjaculation ou d’orgasme, une excitation voluptueuse, solitaire ou mutuelle, se rapportant au moins implicitement à la vie conjugale, ne peut être chez les époux qu’un désordre véniel ; une raison proportionnée pouvant même excuser de toute faute.

L’état de mariage est tel en effet que les époux ont droit au plaisir sexuel, du moins dans les limites du bon sens et de la raison. Et il ne peut y avoir pour eux de désordre grave lorsqu’il n’y a pas danger prochain d’éjaculation ou d’orgasme, puisqu’il n’a pas alors abus essentiel ni complet de la fonction naturelle. Cf. Noldin, 94-95 ; Saint Alphonse, VI, 933-936.

« Aux époux sont permis les touchers et les regards s’ils se réfèrent à l’acte conjugal, s’ils lui servent de licite incitation. S’ils sont faits dans un autre but, pour le plaisir seul, ce ne sont que des péchés véniels, parce que le mariage les rend honnêtes et que le défaut de la fin due n’est pas mortel, à moins qu’ils ne représentent un danger d’éjaculation ou d’orgasme. Auquel cas, ils sont mortels, en règle générale, tout au moins. » (Saint Alphonse III, 431.)

C’est pourquoi l’interruption même de l’acte conjugal (copula reservata) ne peut être une faute mortelle que dans deux cas : 1° lorsqu’elle entraîne un danger prochain d’éjaculation ou d’orgasme ; 2° lorsqu’elle prive l’un des conjoints de l’acte complet légitimement demandé. Cf. Saint Alphonse, VI, 918.

[La copula reservata est l’étreinte réservée c’est à dire un coït qui se déroule et prend fin sans que ni l’homme ni la femme n’éprouvent l’orgasme et sans éjaculation de l’homme. Elle fut notamment prônée, au XXème siècle, par le français Paul Chanson dont le livre fut d’abord publié avec imprimatur, avant que celui-ci lui fut finalement rétiré. Un Monitum du Saint Office du 30 juin 1952 émis des réserves : « C'est avec une vive inquiétude que le Siège apostolique constate qu'un certain nombre d'auteurs, traitant de la vie conjugale, en sont venus ici et là à en traiter publiquement et en allant sans pudeur jusque dans le détail, et que certains même décrivent, approuvent et conseillent un certain acte appelé "étreinte réservée". Dans une affaire aussi importante, qui touche à la sainteté du mariage et au salut des âmes, (...) la Congrégation du Saint-Office, pour ne pas manquer à son devoir et par mandat exprès (...) de Pie XII, avertit gravement tous les auteurs d'avoir à renoncer à cette façon de faire (...) Quant aux prêtres, dans le ministère des âmes et dans la direction des consciences, qu'ils ne se risquent jamais, soit de leur propre initiative, soit qu'on les interroge, à parler d'une façon qui laisserait entendre qu'il n'y a rien à objecter de la part de la loi chrétienne à l'étreinte réservée ». Cette monition fut sans doute émise par ignorance technique, les auteurs se figurant probablement qu’il était hors de la portée des époux catholiques de parvenir à une telle maîtrise du réflexe éjaculatoire et de la montée vers l’orgasme, alors que l’expérience démontre que cela s’apprend et que cela ne relève pas d’une sorte de pouvoir réservé à un nombre ridiculement petit d’hommes. L’acquisition d’une telle maîtrise implique des exercices musculaires et des exercices de respiration profonde. De tels exercices permettent notamment de régler le problème des éjaculations précoces dont le tiers des hommes souffrent encore à notre époque.]

N°5. Puisque l’acte du mariage est de sa nature même destiné à la génération des enfants, ceux qui, en l’accomplissant, s’appliquent délibérément à lui enlever sa force et son efficacité, agissent contre la nature, ils font donc une chose honteuse et intrinsèquement déshonnête. (Encyclique Casti Connubii.)

Nous consacrerons à l’explication de cette dernière règle le paragraphe suivant.

§ 2. LA CONTRACEPTION OU L’ONANISME CONJUGAL


1052. – Notions. – 1. – L’onanisme est le crime d’Onan (Genèse 38 : 6 Juda prit pour Her, son premier-né, une femme nommée Thamar. 7 Her, premier-né de Juda, fut méchant aux yeux du Seigneur et le Seigneur le fit mourir. 8 Alors Juda dit à Onan : Va vers la femme de ton frère, remplis ton devoir de beau-frère et suscite une postérité à ton frère. 9 Mais Onan savait que cette postérité ne serait pas à lui et, lorsqu'il allait vers la femme de son frère, il laissait la semence se perdre à terre afin de ne pas donner de postérité à son frère. 10 Son action déplut au Seigneur, qui le fit aussi mourir.) : « L’onanisme consiste en ceci que l’homme, après avoir commencé l’acte conjugal, se retire avant l’insémination [du vagin], et répand sa semence à l’extérieur du vase de l’épouse [c'est à dire à l'extérieur du vagin], pour empêcher la conception.».

D’une façon générale, on donnera ce nom d’onanisme conjugal à toute manœuvre qui aurait pour but de stériliser frauduleusement l’acte conjugal.

N. B. Les médecins donnaient souvent le nom d’onanisme à la masturbation ou à l'éjaculation ou l'orgasme provoquée [avec la main ou tout autre organe ou instrument ou objet].

2. – Le Néo-mathusianisme est la doctrine de ceux qui, déformant l’enseignement de Malthus (1767-1834), encouragent les époux, pour des raisons économiques, médicales ou seulement libidineuses, à stériliser le plus souvent l’acte conjugal : au prix de cette pratique criminelle, les époux pourront, en fraudant la nature, jouir du mariage, tout en évitant les charges qui leur sembleront indésirables.


1053. – Moyens employés pour empêcher les conceptions. – Ces moyens sont nombreux et variés : il suffit d’empêcher le sperme de pénétrer dans l’utérus ou de rencontrer l’ovule.

1. – Moyens employés par l’homme : le coït interrompu [après les mouvements de va et vient dans le vagin, le mari éjacule hors du sexe de la femme] ; (…) le préservatif.

2. – Moyens employés par la femme : des injections d’eau acidulée avant ou après l’acte ; l’introduction dans le vagin d’éponge ou de pessaire occlusif (« stérilet ») ; l’emploi de certains disques solubles contenant du bore, du tanin, de la quinine, des acides…[le stérilet provoque un avortement puisqu’il cause la mort de l’œuf fruit de la fusion entre l’ovule et le spermatozoïde].

3. – Moyens chirurgicaux : chez la femme, la ligature ou la dislocation des trompes ou même la suppression des ovaires et de l’utérus ; – chez l’homme, la castration ou la vasectomie. – (La stérilisation par les rayons X ne semble ni certaine ni définitive).

N. B. – Nous avons parlé ailleurs (n. 381 et suiv.) de l’avortement après la conception.


1054. – Gravité de la contraception, l’onanisme conjugal. – L’onanisme conjugal est nécessairement une faute grave contre nature de telle sorte que sa condamnation ne peut admettre aucune exception.

I. Argument d’autorité.

1° – Ce fut de tout temps l’enseignement constant et pratiquement unanime des auteurs catholiques.

Saint Thomas (Somme Théologique, 2a 2ae, q. 154, art. 11 ad. 3ème) nous dit : « A la troisième objection, on doit répondre que le luxurieux n’a pas pour but la génération humaine, mais la jouissance sexuelle, qu’un être humain peut éprouver sans poser les actes d’où découle la génération humaine. C’est ce qui est recherché dans le vice contre nature ». [Contre nature = de telle manière que la procréation est impossible].

Saint François de Sales (Introduction à la vie dévote, 3e partie, ch. 39, 5°) déclare : « Quand l’ordre naturel et nécessaire à la procréation des enfants est perverti… selon qu’on s’écarte plus ou moins de cet ordre, les péchés sont plus ou moins exécrables, mais toujours mortels : car la propagation de la société humaine étant la première et principale fin du mariage, jamais on ne peut se départir de l’ordre qu’elle demande ».

Le P. de Ledesma, O. P. († 1616) dans son Tractatus de Magno Matrimonii Sacramento écrit :

« Les époux pêchent mortellement quand ils répandent volontairement le sperme à l’extérieur du vase légitime [le vagin]….Car c’est un péché contre nature, donc mortel. »

Thomas Sanchez s.j. († 1650) n’est pas moins formel: «L’effusion volontaire du sperme à l’extérieur du vagin, ou toute façon d’agir qui y aboutit, est manifestement un crime mortel contre nature. » (De sancto matrimonii sacramento, liv. IX, disp. XVII, n°12). – Parlant de la femme qui prend un remède anti-conceptionnel (et supposant la coopération de l’époux), il ajoute : «...Ils sont coupables d’une faute mortelle contre nature. De telle sorte qu’elle ne peut être exonérée par aucune bonne fin ». [aucune bonne intention ne peut enlever le fait que c'est une faute mortelle] » (Ibid., disp. XX, n. 2).

Saint Alphonse (VI, 954) déclare clairement :

« Les époux pêchent si, dans l’usage du mariage, ils font, après usage, quelque chose par laquelle est empêchée la conception ou est rejetée la semence conçue... La raison en est qu’ils agissent contre l’engagement et la fin principale du mariage. Ne sont pas des excuses suffisantes la pauvreté imminente ou le danger que représente l’accouchement. »

Pour tous les auteurs modernes, c’est une doctrine commune et certaine dont on n’a pas le droit de s’écarter. Cf. Ballerini-Palmieri, Opus Morale (2) VI, n°451 ; Lehmkuhl, Theologia Moralis (7) II, n°834 ; Gousset, II, 892 ; Prümmer O. P., Manuale theologiae moralis (5) III, 700 ; Aertnys, C. S. R., Theologia Moralis (12) II, 894 ; Vermeesch, de Cast., 257, etc…

2° – Le même enseignement se trouve dans les réponses des Congrégations Romaines :

Depuis plus d’un siècle, les questions posées à ce sujet aux Congrégations Romaines furent très nombreuses. Or, les réponses du Saint-Office ou de la Pénitencerie ne varient que sur un point : au début on recommandait une grande prudence et discrétion dans l’intervention du confesseur ; – devant la généralisation du mal, cette attitude toute d’opportunité se modifie et on insiste davantage sur la nécessité et même l’obligation stricte d’enseigner et d’interroger.

Voici, à titre d’exemple, quelques-unes de ces réponses :

a) Saint office du 21 mai 1851 : « On demande au siège apostolique de quelle note théologique sont dignes les propositions suivantes :

1° Pour des raisons honnêtes, il est permis aux époux de se servir du mariage comme l’a fait Onan.

2° Cet usage du mariage est probablement bon, et n’est pas prohibé par le droit naturel.

3° Il ne convient jamais d’interroger à ce sujet les époux de l’un et l’autre sexe, même s’il est prudent de craindre que l’un ou l’autre des époux n’en abuse dans le mariage.

Réponse à 1° : cette proposition est scandaleuse, erronée et contraire au droit naturel du mariage. ».

Réponse à 2° : cette proposition est scandaleuse, erronée, et condamnée implicitement par Innocent IX, avec d’autres, proposition 49a (Denzinger Bannwart N°1199).

Réponse à 3° : Cette proposition est fausse, trop condescendante, et dangereuse dans la pratique. »

b) Saint office, 6 avril 1853 : « Aux demandes faites au sujet de l’usage imparfait du mariage, soit par onanisme, ou avec un préservatif, les éminents cardinaux inquisiteurs répondent.

1° L’usage imparfait du mariage à la façon d’Onan ou avec le préservatif, peut-il être licite dans certains cas ?

2° Si la femme est au courant qu’on emploie le préservatif, peut-elle se comporter passivement ?

Réponse à 1° : Non, cet usage est intrinsèquement mauvais.

Réponse à 2° : Non. Elle permettrait ainsi qu’ait lieu une chose intrinsèquement illicite. »

c) Sacrée Pénitencerie, 13 novembre 1901.

« Le curé Jean, embrassant humblement vos mains, propose avec respect le cas suivant : Mon paroissien Titus, homme riche, honorable, lettré et bon chrétien, interrogé prudemment en confession de l’usage qu’il fait du mariage, a avoué que, même si cela répugnait à sa femme, il abrégeait toujours l’acte conjugal pour ne pas avoir de progéniture. Et après que je l’eus blâmé, il me répliqua qu’il agissait ainsi pour deux raisons : pour qu’un grand nombre d’enfants (il en a déjà deux) ne soit pas un fardeau trop lourd à porter, et pour que des maternités répétées n’épuisent pas son épouse. Après m’avoir entendu dire que ces raisons ne valaient rien, il me répondit qu’un confesseur illustre avait approuvé cette façon de faire pourvu que, dans ce retrait, le mari recherche le soulagement de la concupiscence et non l'orgasme. Étonné que ce professeur illustre, qui donna autrefois un cours magistral dans un grand séminaire, approuve une telle façon de faire, le curé Jean n’osa pas absoudre Titus qui s’entêtait à persévérer dans ses vues. Offensé de son refus, Titus se mit à publier partout que son curé était un ignorant et un orgueilleux qui corrige les décisions d’autrui, et qui impose aux pénitents des fardeaux insupportables. Troublé par toutes ces choses qui font tort et au curé et à la religion, le curé Jean demande humblement et révérencieusement à vos éminences que penser de ce qui s’est passé, et comment il doit se comporter avec ce Titus s’il revient se confesser et persévère avec entêtement dans sa façon de voir ?

La Sacrée Pénitencerie, après avoir mûrement considéré la question, répond : Dans le cas qui nous est soumis, le curé a agi correctement, car il ne peut absoudre un pénitent qui ne veut pas s’abstenir de cette façon de faire, qui est de l’onanisme pur et simple [de la contraception pure et simple]. »

3° – Les Évêques furent amenés à donner un enseignement public de plus en plus explicite.

En Belgique, en Allemagne, en Espagne, aux États-Unis, en France, en Angleterre, les Évêques déclarèrent sous une forme ou sous une autre que « c’est pécher gravement contre nature et contre la volonté divine que de frustrer par un calcul égoïste et sensuel le mariage de sa fin » (Lettre collective de l’Épiscopat Français en 1919).


4° – Enfin, le Souverain Pontife intervint solennellement.

Le 31 décembre 1930, apparaissait l’Encyclique Casti Connubii. Or, dans ce document, nous trouvons le passage suivant : «…L’Église catholique, investie par Dieu même de la mission d’enseigner et de défendre l’intégrité des mœurs et de l’honnêteté, L’Église catholique, debout au milieu de ces ruines morales, afin de garder la chasteté du lien nuptial à l’abri de cette honteuse déchéance, se montrant ainsi l’envoyée de Dieu, élève bien haut la voix de Notre bouche, et elle promulgue de nouveau : que tout usage du mariage, quel qu’il soit, dans l’exercice duquel l’acte est privé par l’artifice des hommes, de sa puissance naturelle de procréer la vie, offense la loi de Dieu et la loi naturelle, et que ceux qui auront commis quelque chose de pareil se sont souillés d’une faute grave. »

Nous trouvons là, sinon une définition à proprement parler, du moins l’écho officiel d’un enseignement constant de l’Église qui comme tel est nécessairement infaillible. Cf. N. R. T., 1932, p. 133 et suiv.



1055. – II. Argument de raison.

Puisque l’Église nous enseigne que l’onanisme conjugal [la contraception] est un crime contre nature, la raison doit pouvoir établir qu’il y a là un désordre grave, n’admettant ni excuse, ni pardon.

Cet argument direct peut sans doute être proposé sous la forme suivante :

Vouloir l’usage d’une fonction naturelle importante en empêchant positivement son but premier et sa fin essentielle est, toujours et nécessairement, une faute grave contre nature.

Or l’onanisme conjugal est un acte de ce genre ;

Donc, l’onanisme conjugal est toujours et nécessairement une faute grave contre nature.

Preuve de la majeure :

Vouloir l’usage d’une fonction naturelle importante en empêchant positivement son but premier et essentiel, c’est violer en matière importante l’ordre naturel. – Or, un désordre de ce genre est toujours une faute grave, car Dieu en créant l’homme raisonnable lui impose nécessairement une obligation grave d’agir conformément aux lois de sa nature.

Preuve de la mineure :

1° L’onanisme conjugal consiste à user d’une fonction naturelle en empêchant positivement sont but premier et essentiel, c’est la définition même de cette pratique.

2° Que cette fonction soit une fonction particulièrement importante : son but même le prouve puisqu’elle est faite essentiellement pour le bien de la société par la procréation des enfants.

C’est pourquoi il est exact de dire que l’onanisme conjugal, comme la recherche du plaisir sexuel en dehors du mariage, est nécessairement une faute grave ; dans cet acte, en effet, l’individu détourne frauduleusement pour son bien particulier une fonction importante qui est essentiellement destinée au bien de la société.


1056. – III. Conséquences néfastes de l’onanisme et argument indirect. – 1. – La valeur de l’argument rationnel se trouve confirmée et renforcée par un argument indirect basé sur la constatation scientifique des conséquences personnelles et sociales de la pratique de l’onanisme.

2. – Les conséquences néfastes sont nombreuses. Voici les principales :

a) Conséquences de l’onanisme pour la femme.

(...) tous ces procédés criminels rabaissent la femme au niveau d’instrument de plaisir et font de la vie conjugale une école de démoralisation. Aussi bien souvent l’infidélité, l’adultère et le divorce n’ont-ils pas d’autre point de départ ni d’autre explication psychologique.

b) Conséquences sociales. – Par ce qui vient d’être dit, on voit déjà combien profondes et lamentables peuvent être les conséquences sociales des pratiques frauduleuses dans le mariage. Mais les statistiques apportent aussi un argument dont la force s’impose : là où la doctrine néo-malthusienne a été prêchée, ce fut toujours avec succès. L’effet ne tarde jamais à se constater ; les nombre des enfants diminue brusquement, et l’excès des décès sur les naissances a rapidement pour conséquence de faire fléchir la population d’une région contaminée. Cf. Bureau, L’indiscipline des mœurs, p. 170.

C’est pourquoi, la lutte contre l’onanisme conjugal s’impose non seulement au nom de la religion et de la morale, mais encore dans l’intérêt (...) de la famille (…) et de la société.

3. – Dès lors, l’argument qui s’appuie, pour condamner l’onanisme sur la constatation des effets néfastes de cette pratique et met indirectement en évidence la malice intrinsèque de la fraude conjugale, peut être présenté sous la forme suivante :

Si on érigeait en règle générale que la pratique de l’onanisme conjugal peut être autorisée, l’expérience prouve que ce serait sans tarder la ruine physique, économique et morale (...).

Or ce fait met justement en évidence que cet onanisme est criminel et générateur de mort, qu’il doit être considéré comme intrinsèquement mauvais, et par conséquent qu’il ne peut en aucun cas être permis.


1057. – Coopération illicite et licite. – 1. – Il est évident que toute coopération formelle à l’onanisme est gravement illicite et que les époux qui la pratiquent sont également coupables.

Une coopération matérielle peut être licite dans les cas prévus par les règles du volontaire indirect.

2. – C’est pourquoi la coopération matérielle de la femme au coït interrompu par l’éjaculation hors du vagin peut être tolérée pour une raison grave. En effet, l’acte auquel la femme donne sa coopération active commence naturellement, et n’est vicié que par une interruption dont l’homme peut avoir seul toute la responsabilité. Cf. Réponse de la Sacrée Pénitencerie du 1er février 1823.

Dans ce cas, il ne semble pas que l’on puisse interdire à la femme de consentir au plaisir naturel de l’acte conjugal, pourvu bien entendu qu’elle n’approuve en rien l’interruption frauduleuse imposée par son mari.

Si c’est la femme qui, par des injections faites après l’acte conjugal, chercher à le stériliser, le mari conserve le droit, pour une raison sérieuse, d’user normalement du mariage. Il doit cependant se servir de son autorité pour dissuader sa femme et lui interdire l’emploi de ces procédés coupables.

Dans le cas où le mari se servirait d’un préservatif, l’acte se trouverait vicié dès son début, la femme serait normalement tenue d’opposer une résistance active, – comme devrait le faire une vierge menacée d’un acte impur. Cf. Réponse de la Sacrée Pénitencerie du 3 juin 1916. – Seule donc une raison très grave pourrait permettre à la femme de tolérer passivement cette violation criminelle du droit naturel.

Lorsque la femme s’est munie avant l’acte conjugal d’un pessaire ou stérilet, l’acte est encore vicié dès son début. On ne peut permettre au mari, conscient de ce fait, d’accomplir l’acte conjugal.

REMARQUES. – a) Les injections vaginales faites dans le but de stériliser l’acte conjugal, – bien qu’elles soient souvent inefficaces, - sont gravement coupables. – Faites dans une intention loyale, dans un but de simple hygiène, elles semblent pouvoir être autorisées une heure ou deux après les rapports conjugaux. Vermeersch, IV, 71.

b) Uriner après l’acte conjugal n’empêche pas la conception. Ce n’est donc pas un péché. Mais si les femmes le font dans une intention perverse, elles peuvent pécher gravement. Cf. Saint Alphonse, 954, qui permet de résoudre le b).

c) L’union sexuelle à moitié faite [la totalité du pénis ne pénètre pas dans le vagin mais seulement la moitié ou le gland seul], ou le dépôt du sperme à l’entrée du vagin, dans l’intention d’empêcher la naissance d’un enfant, est tout simplement de l’onanisme, en désir tout au moins. Elle doit donc être toujours gravement condamnée. » Cf. Réponse. du Saint-Office, 1er décembre 1922 ; – Vermeesch, IV, 56, 2.

§ 3. QUELQUES QUESTIONS PRATIQUES.


1058. – La stérilité et la continence périodique. – Dans l’Encyclique Casti Connubii, après avoir sévèrement condamné l’onanisme conjugal et traité en quelques mots du problème de la coopération matérielle aux fraudes du mariage, le Saint Père ajoute :

« Il ne faut pas non plus accuser de fautes contre nature les époux qui usent de leur droit suivant la saine et naturelle raison, si, pour des causes naturelles, dues soit à des circonstances temporaires, soit à certaines défectuosités physiques, une nouvelle vie ne pouvait en sortir. Il y a en effet, tant dans le mariage lui-même que dans l’usage du droit matrimonial, des fins secondaires, – comme le sont l’aide mutuelle, l’amour réciproque à entretenir, et le remède à la concupiscence –, qu’il n’est pas du tout interdit aux époux d’avoir en vue, pourvu que la nature intrinsèque de cet acte soit sauvegardée et sauvegardée du même coup sa subordination à sa fin première. »

C’est dire que les fins secondaires du mariage peuvent suffire à légitimer l’acte conjugal chez les stériles, les vieillards, pendant la grossesse, etc…

Aussi les auteurs s’accordent-ils pour déclarer que, s’il existe des périodes agénésiques chez la femme [des périodes où la femme ne peut pas concevoir d’enfant], il ne peut pas être interdit, d’une façon absolue, d’en profiter délibérément, en limitant l’usage du mariage à ces périodes. Légitime en elle-même, cette pratique aura la valeur morale des motifs qui la feront adopter. Cf. Réponse de la Sacrée Pénitencerie du 16 juin 1880.

Si donc l’on appelle continence périodique la méthode qui consiste à n’user du mariage que d’une façon modérée et contrôlée, aux seules époques agénésiques, dans le but d’éviter de trop nombreux enfants, cette pratique pourra, pour de justes raisons, être légitimement utilisée.

(…) [Il existe la méthode du Docteur Billings, et la machine Persona et d’autres méthodes pour repérer les périodes où la femme n’est pas féconde et où il est possible de s’unir sexuellement sans qu’un enfant soit procréé].

On ne peut pas dès lors interdire au confesseur de la suggérer lorsqu’il le juge convenable, en particulier pour faire abandonner la pratique gravement frauduleuse de l’onanisme conjugal.


1059. – L’impuissance et l’usage du mariage.

1. Si l’impuissance est perpétuelle et antécédente, nous savons que le mariage est invalide. Dans ces conditions, toute intimité conjugale est nécessairement interdite.

2. Lorsqu’une impuissance totale survient après le mariage, les époux ne peuvent chercher délibérément la satisfaction complète, puisqu’ils ne peuvent plus accomplir ce qui constitue l’acte du mariage.

3. Cependant, si l’impuissance n’est pas évidente, les époux sont en droit d’essayer l’acte conjugal, tant qu’il reste quelque chance de pouvoir le réaliser plus ou moins normalement. Cf. St Alphonse, VI, 954, dub. 2.


1060. La stérilité chirurgicale et l’usage du mariage.

1. Toute opération chirurgicale ayant pour but d’obtenir la stérilisation de l’homme ou de la femme (vasectomie, ligature ou amputation des trompes, ou suppression des ovaires, etc…) est une mutilation toujours gravement coupable. Cf. n°372.

2. Lorsque cette stérilisation n’est pas définitive, parce qu’il est possible d’y remédier, il semble que le conjoint coupable doive s’abstenir de demander l’acte conjugal avant d’avoir fait porter remède à sa stérilité volontaire.

3. Si la stérilisation était définitive, il ne semble pas que l’on soit en droit d’interdire absolument l’acte conjugal, puisque les époux ne sont pas impuissants, et que les fins secondaires du mariage peuvent encore exister. Mais il ne faut pas oublier que le pardon d’une faute ne peut être obtenu sans repentir sincère. Si donc la stérilité a été criminellement provoquée, il semble que le regret de cette faute reste psychologiquement peu compatible avec l’usage fréquent du mariage rendu volontairement stérile.


1061. – La fécondation artificielle. – La fécondation de la femme par des procédés artificiels est-elle licite ? – Plusieurs cas sont à distinguer et à résoudre séparément :

1° – Il est certainement et toujours interdit de féconder une femme à l’aide de sperme provenant d’une autre personne que de son mari.

2° – Il est certainement et toujours interdit de provoquer une masturbation ou d’user onanistiquement [par un coït interrompu] du mariage pour se procurer le sperme nécessaire à une fécondation artificielle.

3° – Il est sans doute interdit de provoquer une fécondation artificielle qui n’aurait pas eu, comme point de départ, au moins un essai de rapprochement naturel.

4° – Il est permis de faciliter artificiellement la fécondation en aidant à l’accomplissement d’un acte conjugal légitime, mais difficile et imparfait. Cf. Cappello, 382 ; – Vermeersch, IV, 58.

REMARQUE. (…) [Sur la fécondation in vitro voir l’Instruction Donum Vitae du 22 février 1987, de la Congrégation pour la doctrine de la foi, www.vatican.va]


1062. – Rôle du confesseur auprès des personnes mariées.

1. – La sainteté du sacrement de pénitence ainsi que le souci nécessaire de sa vertu et de sa réputation, imposent au confesseur une grande prudence en ces matières délicates.

C’est pourquoi il semblait autrefois convenable de lui conseiller simplement de ne jamais l’interroger et de ne répondre que très brièvement aux questions qui pouvaient lui être posées au sujet de l’accomplissement de l’acte conjugal. Cf. Gousset, II, 897.

Cependant, dès 1851, le Saint Office déclarait que :

« soutenir qu’il n’est jamais expédient d’interroger les époux sur cette matière (des relations conjugales) même quand on a lieu de craindre prudemment que le mari ou la femme n’abuse du mariage, c’est une proposition fausse, relâchée, et dangereuse dans la pratique ».

En 1876, la Sacrée Pénitencerie formulait ainsi sa pensée à ce sujet : « Certains confesseurs n’interrogent jamais, même lorsqu’ils ont sujet de craindre prudemment que le pénitent n’abuse du mariage ; s’ils s’ont interrogés sur la gravité de l’onanisme [la contraception], ils évitent de répondre et ils ont recours à d’habiles circonlocutions, ou bien ils demandent au pénitent ce qu’il en pense lui-même, et quand celui-ci affirme qu’il ne peut voir là un grand mal, soit à cause du droit conjugal, soit à cause d’une autre raison de même force, ils sont heureux de le laisser dans sa bonne foi. – Favoriser ou créer cette prétendue bonne foi est une manière de faire qui n’est pas permise. »

Aussi le Souverain Pontife Pie XI dans son Encyclique Casti Connubii, a cru nécessaire d’insister solennellement sur ces obligations. En effet, après avoir condamné encore une fois le crime d’onanisme, il ajoute :

«C’est pourquoi, en vertu de notre suprême autorité, et de la charge que nous avons des âmes, nous avertissons les prêtres qui sont attachés au ministère de la confession et tous ceux qui ont charge d’âmes, de ne point laisser dans l’erreur touchant cette très grave loi de Dieu, les fidèles qui leur sont confiés, et bien plus encore de se prémunir eux-mêmes contre les fausses opinions de ce genre et de ne pactiser d’aucune façon avec elles. – Si d’ailleurs un confesseur ou un pasteur d’âmes, – ce qu’à Dieu ne plaise – induisait en ces erreurs les fidèles qui lui sont confiés, ou si du moins, soit par une approbation, soit par un silence calculé il les y confirmait, qu’il sache qu’il aura à rendre compte à Dieu, le Juge Suprême, un compte sévère de sa prévarication, – qu’il considère comme lui étant adressées ces paroles du Christ : Ce sont des aveugles, et ils sont les chefs des aveugles ; or si un aveugle conduit un aveugle, ils tomberont tous deux dans la fosse. »

2. – C’est pourquoi, au tact et à la discrétion, le confesseur devra joindre le courage, et s’il lui arrive, devant une mauvaise volonté évidente, de refuser l’absolution, qu’il se dise bien qu’en agissant ainsi, il ne fait que son devoir. Aussi a-t-il alors le droit d’attendre, en définitive, de cette fermeté méritoire, les meilleurs résultats pour la société chrétienne et pour le pénitent lui-même. – Cependant il conviendra parfois de procéder par étapes successives et de ne pas présenter immédiatement à des personnes faibles toute l’étendue d’un devoir qui risquerait de leur paraître au-dessus de leurs forces.

Mais si on nous dit que dans le mariage, la continence, même la continence périodique, est impossible, ou du moins néfaste, souvenons-nous de ce que rappelle un auteur laïque qui n’a rien d’un ascète :

« Le mariage est bien plus qu’une relation sexuelle. Il y a de nos jours beaucoup de ménages qui ne pratiquent aucun rapport sexuel, et ce ne sont pas toujours les moins heureux, pourvu qu’ils jouissent d’une compréhension mutuelle parfaite». (Havelock Ellis, Précis de psychologie sexuelle, p. 307).

Il est cependant certain que la chasteté chrétienne du mariage est surtout, – humainement parlant, – une question d’éducation, de volonté, d’équilibre moral et nerveux, de sorte que ceux qui ne veulent pas en prendre les moyens, peuvent de fait se trouver, par leur faute, incapables de la pratiquer.


CHAPITRE 3 : LA FORNICATION ET SES AGGRAVATIONS

§ 1. La fornication


1063. – Définition. – La fornication est l’acte conjugal, consommé volontairement en dehors du mariage, par des personnes libres et sans lien de parenté. « La fornication est l’union, par consentement mutuel, d’un homme non marié avec une femme non mariée. ».

Une seule circonstance manque pour que l’acte puisse être moralement bon : le lien conjugal. C’est pourquoi les moralistes déclarent ordinairement que la fornication est un péché selon la nature, conforme à la nature.


1064. – Gravité de la faute.

1. – « La fornication simple, dit saint Thomas (2a 2ae, q. 154, art. 2 in c.), est sans aucun doute, un péché mortel ». Et c’est là l’enseignement constant de l’Écriture (Tobie 4, 13 ;

1 Cor 6, 16-19), de l’Église enseignante (Denzinger Bannwart, 43, 477, 1125, 1198, 3031, 3044) et des théologiens (St Alph., III, 432).

Du reste l’opposition de la fornication avec la loi naturelle qui, pour le bien de l’enfant et de la société, impose le mariage stable, semble telle qu’on ne peut admettre normalement l’excuse de bonne foi et d’ignorance invincible.

Néanmoins dans certains milieux pervertis, l’immoralité de la fornication peut être si faiblement et si obscurément perçue qu’il existe une ignorance pratique et une certaine bonne foi. Mais cet aveuglement au moins partiel expose à des dangers si évidents la vie chrétienne et la vie simplement honnête, qu’on imagine difficilement des cas où il aurait lieu, pour le bien particulier du pénitent, de respecter ou de ménager son erreur.

2. – Théoriquement parlant, il est certain que la stérilisation de l’acte sexuel de la fornication doit être considérée comme une circonstance aggravante, et cette malice nouvelle devrait être accusée en confession. – Dans la pratique cependant bien des pénitents n’y pensent pas et croient plutôt avoir diminué par là l’importance de leur acte et leur responsabilité.

Du reste si l’on doit certainement considérer comme particulièrement coupable l’attitude de ceux qui, pour jouir plus à leur aise, pratiquent de propos délibéré, les méthodes anti-conceptionnelles dans leur rapports sexuels coupables, on peut, semble-t-il, ne pas considérer comme une aggravation, l’interruption de l’acte, même avec danger d’éjaculation, si cette interruption, non préméditée, a pour but de diminuer les conséquences de la faute et par le fait la culpabilité. – Cf. Sanchez, De Matrimonio, l. 9, d. 19, n. 7 ; – Noldin, de Sexto, 68, nota.

4. – Mais la fornication des stériles elle-même est gravement coupable, comme l’est toute recherche illicite du plaisir sexuel. Cf. Vermeesch, De Castitate, 310, 3.

REMARQUE. – Toutes les pensées et toutes les actions impudiques qui font moralement un avec le péché de fornication n’ont pas à être accusées explicitement en confession.


1065. – La prostitution. – 1. Les prostituées sont des femmes qui pour de l’argent, se livrent à tout venant. [Il existe également une prostitution masculine.]

Ces personnes (...) sont ordinairement les agents propagateurs des maladies vénériennes. Du reste il n’est pas rare qu’elles aient été pratiquement réduites en esclavage contre leur volonté. [Un grand nombre de prostituées furent victimes d’incestes ou de viol dans leur enfance, ce qui causa une profonde dévalorisations d’elles-mêmes ou d’eux-mêmes].

2. – Si la prostituée se trouve personnellement dans un état de péché qui exclut la possibilité de toute vie chrétienne et ainsi aggrave son cas, la faute du complice n’est pas nécessairement différente de la simple fornication.

3. – Peut-on en saine morale tolérer la prostitution et se contenter d’en souhaiter la réglementation sous prétexte d’éviter ainsi un plus grand mal ? (...) il semble que l’on doive répondre fermement par la négative. Cf. St Alphonse, II, 434 ; – Biot, Le problème prostitution, dans «Problèmes de la sexualité». [Le plus vieux métier du monde est chasseur. La tolérance de la prostitution ne diminue pas les viols et les crimes sexuels, au contraire].

1066. – Le concubinage. – On appelle concubinaires des personnes qui vivent maritalement en dehors du mariage. Le concubinage est donc une fornication organisée pour durer plus ou moins longtemps : d’où une circonstance aggravante qu’il est pratiquement nécessaire d’accuser en confession.

Au for externe, le Droit Canonique [de 1917] prévoit des peines contre les clercs et les laïques concubinaires : CC. 2357, 2358, 2359, 2176, 2181 et 133.

Au for interne, le confesseur doit normalement exiger la rupture de l’union illégitime ainsi que la réparation du scandale, avant d’accorder l’absolution. Cf. St Alphonse, VI, 454, 455 et 456 ; – supra, n°776, remarque b) et 835.

§ 2. LES AGGRAVATIONS DE LA FORNICATION

1. Le viol et le rapt.

1067. – Le viol : définition et gravité. – Le viol est une faute commise avec une femme, mais contre son gré. [Des hommes peuvent être également violés. Le viol est constituée, selon le droit pénal français, par toute pénétration sexuelle non consentie par la personne, homme ou femme].

En plus de la faute de luxure, le viol contient une grave injustice qui exigera réparation.

Quand la victime est une vierge, l’injustice revêt elle-même une gravité particulière.

REMARQUE. – Chez les Canonistes, le mot stupre désigne le plus souvent la défloration d’une vierge.


1068. – Coopération de la [victime]. – Pour être exempte de toute faute morale, la [victime] qui subit une violence doit n’accepter volontairement aucune jouissance sexuelle, et résister le mieux possible, même extérieurement.

Exceptionnellement néanmoins, sous menace de mort, ou d’un dommage très grave, une attitude extérieurement passive de la victime pourrait suffire pour dégager sa responsabilité. St Alphonse, III, 433.


1069. – Stérilisation après la violence. – L’avortement volontairement recherché ne peut en aucun cas être permis ; il ne peut donc en être question, même pour débarrasser la femme d’une grossesse due à une violence criminelle.

Mais avant que la fécondation ait pu avoir eu lieu, il n’est pas, semble-t-il interdit à la femme qui a subi une violence, de s’efforcer, par exemple par des injections, d’expulser le sperme injustement introduit et de rendre ainsi toute grossesse impossible. Si, en effet, la femme peut pour se défendre provoquer l’interruption de l’acte, même au risque d’être l’occasion d’une éjaculation, elle peut, au même titre, aussitôt après le crime, rejeter le sperme qui n’a pas encore eu le temps de provoquer une fécondation.


1070. – Le rapt. – Le péché de luxure appelé « rapt » est un enlèvement violent d’une personne, homme, femme ou enfant, pour commettre avec elle un péché de luxure. Dans certains cas ce sera une faute voisine du viol. Cf. CC. 2353-2354.

N. B. – Ne pas confondre la définition donnée ici avec celle qui convient à l’empêchement de mariage. Cf. C. 1074 ; n°946.

2. L’adultère.


1071. – Définition et gravité de la faute. – Toute fornication qui viole l’obligation de la fidélité conjugale est un adultère.

L’adultère sera double si les deux coupables sont des personnes mariées.

Tout adultère viole la sainteté du mariage et les devoirs qu’il impose. La faute contre la chasteté s’aggrave donc d’une violation de la piété et de la justice. Et cette aggravation spécifique existe même lorsque l’époux lésé a donné son consentement. Cf. Denz.-B., 1200.

Du reste, toute faute physique, même incomplète, contre la chasteté commise avec une personne mariée, revêt pour la même raison une gravité particulière et spécifique que l’on doit accuser une confession.


1072. – Peines. – Dans toutes les civilisations et à toutes les époques, l’adultère, au moins celui de la femme, fut sévèrement puni par les lois civiles et religieuses, et il est bien certain que dans la majorité des pays étrangers à la civilisation chrétienne, la répression brutale de l’adultère est l’élément le plus important du maintien de la moralité publique.

La loi juive (Deutéronome 22, 22 ; Lévitique 20, 10) et la loi romaine elle-même punissaient l’adultère de mort.

Le droit ecclésiastique punissait autrefois très sévèrement cette faute par une excommunication devant durer parfois toute la vie, ou encore en imposant la continence même dans le mariage. – Mais jamais la morale catholique ne permit au mari lésé de tuer sa femme surprise en adultère.

Si les lois modernes sont moins sévères, il faut bien avouer que cet adoucissement n’a pas contribué à relever la moralité de notre société.

Cf. CC. 2357 § 2, 2356, 1129 et 1075 ; – Code Pénal Fr., art. 336 et suiv. ; – Code Civil, art. 229 et 230.


1073. – Réparation. – L’injustice causée par le péché d’adultère devra normalement être réparée. Mais si la faute est secrète, il conviendra souvent de ne pas la révéler et il sera parfois bien difficile sinon impossible de trouver un équivalent pour réparer le dommage causé [c’est l’éditeur qui souligne].

S’il y avait conception et enfantement, les coupables devraient de plus, si c’est possible, prendre à leur compte la charge de l’enfant et veiller à ce que sa présence ne soit pas l’occasion d’injustices nouvelles à l’égard de l’époux lésé et des enfants légitimes. Cf. St Alphonse, III, 651-659.

3. L’inceste.


1074. – Définition et nature. – L’inceste pourrait se définir en général : une faute de luxure commise par des personnes entre lesquelles la loi naturelle ou la loi ecclésiastique prévoient un empêchement dirimant le mariage. – Ici peuvent donc intervenir sans distinction de degrés, la consanguinité et l’affinité, puis la parenté spirituelle, la parenté adoptive et l’honnêteté publique.

Souvent les moralistes, prenant le mot dans un sens plus strict, le réservent au péché de fornication commis par des personnes entre lesquelles existe consanguinité ou affinité à un degré dirimant.

Dans tous les cas la culpabilité spéciale de l’inceste réside en une violation de la piété familiale.

1075. – Diverses espèces. – 1. – La piété familiale dont la violation caractérise l’inceste au sens strict est, probablement, toujours de même nature, qu’il s’agisse de parents ou d’alliés à quelque degré que ce soit. – On n’est donc pas obligé, semble-t-il, de distinguer des espèces morales différentes dans les divers cas d’inceste, si du moins on prend ce mot dans le sens strict adopté par les moralistes : fornication commise entre consanguins ou alliés. Cf. Cappello, De Matrimonio, 211-212.

2. – Quant à la fornication incestueuse qui violerait la piété spéciale exigée par la parenté spirituelle ou légale, elle serait sans doute d’une espèce moins grave. – Enfin on peut se demander s’il convient encore d’appliquer ce qualificatif à une faute commise par des personnes séparées seulement par un empêchement d’honnêteté publique. – Cf. Vermeesch, De Cast., 315.

REMARQUE. – Tous reconnaissent que même les fautes incomplètes ou contre nature peuvent avoir la gravité spéciale de l’inceste. Cf. St Alphonse, III, 453 et 469 (…) [contre nature = procréation impossible].

1077. – REMARQUE. – Hesnard (Traité de sexologie, p. 39) fait remarquer que les méfaits héréditaires de l’inceste ont été exagérés. (...) La prohibition très grave de l’inceste se trouve néanmoins largement motivée par la nécessité de sauvegarder la chasteté avec un soin particulier dans la famille, où les occasions de fautes charnelles peuvent facilement se multiplier. (…)


CHAPITRE 4 : LES FAUTES CONTRE NATURE


[« Contre nature » signifie « de telle sorte que la procréation n’est pas possible » cf. Père Marie-Michel Labourdette, o.p., Cours de Théologie Morale N°15, La Vie Sexuelle La Chasteté, polycopié non publié, p.153-154. Le père Marie-Michel Labourdette (1908-1990), dominicain de la province de Toulouse, fut professeur de théologie morale, expert au concile Vatican II et membre de la commission nommée par le pape Paul VI sur la pilule contraceptive. Son Grand Cours de théologie morale, composé de 17 polycopiés format A4, constitue un commentaire de la 2ème partie de la Somme Théologique de saint Thomas d’Aquin. L’éditeur Parole et Silence a publié en 2010 et 2012, le Petit Cours qui en est la version abrégée. Nos citations sont extraites du polycopié N°15 : Cours de Théologie Morale La Vie Sexuelle La Chasteté.]


1079. – Introduction. – Les fautes de luxure dites contre nature peuvent être commises par les célibataires comme par les personnes mariées. Mais chez ces dernières, ces fautes revêtent une gravité spéciale puisqu’elles impliquent une violation des lois du mariage. Cf. St Thomas, 2a 2ae, q. 154, art. 1 et 2 ; – St Alphonse, III, 465-485.

§ 1. – LA MASTURBATION.


1080. – Généralités. – La masturbation (ou vice solitaire ou onanisme) est la recherche solitaire du plaisir sexuel par excitation mécanique, ordinairement par attouchement manuel. Elle aboutit normalement à l’orgasme et à l’éjaculation.

La culpabilité de cet acte provient directement de la recherche illicite du plaisir sexuel et de l’usage contre nature des organes sexuels [contre nature = un usage où toute procréation est impossible, la nature a prévu que la sexualité serve à la reproduction et à la fortification du lien entre l’épouse et l’époux]. C’est pourquoi la masturbation se trouve déjà condamnée par les règles de la chasteté des célibataires et des personnes mariées.

Ce vice très répandu dans toutes les classes de la société est presque aussi commun chez la femme que chez l’homme.

La masturbation féminine peut avoir lieu non seulement par toucher direct du clitoris et du vagin, mais encore par excitation d’autres centres érogènes, en particulier les seins.


1081. – Aspects divers du vice solitaire. – Que la masturbation ait pour but direct la recherche du plaisir sexuel ou seulement la procuration de l’éjaculation, nous savons qu’elle est toujours gravement défendue.

Malgré tout, ce vice peut prendre chez l’homme comme chez la femme et chez l’enfant des aspects différents qui pourront soit en atténuer, soit en aggraver la culpabilité.

1° La masturbation des petits enfants. – La masturbation existe parfois chez de très jeunes enfants, causée par des irritations accidentelles [ou par une angoisse intérieure ou un besoin non satisfait de tendresse, d’attention, d’affection]. Innocente au point de vue moral, cette masturbation peut devenir dangereuse par l’habitude qu’elle peut créer. Il faudra donc y porter le remède convenable (…).

2° La masturbation des enfants et des adolescents. – Chez les enfants et aussi chez les adolescents des deux sexes la masturbation est souvent provoquée par le mauvais exemple et l’instinct d’imitation [dans plus d’un tiers des cas, la masturbation est découverte seule, sans l’influence de personne]. Cette mauvaise habitude peut parfois devancer de beaucoup la puberté et cependant correspondre à de véritables excitations érotiques et sexuelles, bien que les fautes puissent alors n’avoir qu’une culpabilité morale atténuée. (...) On pourra y remédier par une bonne et douce surveillance, par le travail corporel au grand air, et surtout en détournant l’attention de l’enfant, l’occupant sainement et l’intéressant aux sports, au travail, à l’étude. Un traitement purement moral et religieux sera souvent insuffisant, et toute violence nuisible. [La masturbation ne cause pas de maladie physique sauf cas extrêmes. Il existe un certain nombre de cas connus de blessures graves par les objets parfois utilisés pour se masturber. Certaines pratiques causent la mort par asphyxie ou par hémorragie. Dans certains cas, elle favorise l’éjaculation précoce. Parfois, elle rend ensuite incapable d’accomplir l’union conjugale jusqu’à l’éjaculation, car le geste auquel s’est habitué le jeune homme est trop éloigné de la copulation normale du pénis dans le vagin. D’autres fois, l’homme n’est plus capable d’éjaculer sans voir du porno en même temps. Ayant habitué son cerveau à des scènes pornographiques trop éloignées de la réalité normale de l’intimité avec une femme, il n’est plus capable d’accomplir le coït sans sa dose de pornographie].

3° La masturbation compensatrice. – Le jeune homme, l’homme et même la femme qui sont excités par des désirs sexuels qu’ils ne veulent pas réprimer efficacement et qu’ils ne peuvent pas assouvir d’une façon légitime et naturelle (ce qui ne peut avoir lieu que dans le mariage) sont souvent tentés de se satisfaire par la masturbation compensatrice (…).

Toute masturbation compensatrice pleinement délibérée est une faute mortelle (…).

Pour combattre ce vice chez les jeunes, – en plus des moyens spirituels – en particulier la confession et la communion fréquentes qui, employées avec discernement, donnent des résultats excellents, – il convient de ne pas négliger les méthodes approuvées par une saine pédagogie. Or, dans le cas présent, une confiance affectueuse, unie au travail et à une direction à la fois bonne, ferme et attrayante, dans un milieu physiquement et moralement sain, est certainement beaucoup plus efficace que des punitions ou des menaces.

Chez l’adulte, la guérison est surtout affaire de vie chrétienne et d’auto-suggestion : il faudra en effet croire à la possibilité de la guérison et éviter avec fermeté les circonstances dans lesquelles l’imagination et les sens se laissent ordinairement entraîner (…).


1082. – La masturbation mutuelle. – Le vice solitaire, sous toutes ses formes, conduit assez souvent aux fautes commises avec un(e) complice et à la masturbation mutuelle.

Il y a alors circonstance aggravante et une culpabilité nouvelle spécifiquement différente, puisqu’il y a souvent scandale et toujours complicité. – Cette faute peut exister, nous l’avons vu, dans l’usage du mariage.

De plus, ces masturbations mutuelles s’accompagnent ordinairement d’imaginations et de désirs mauvais, qui, comme nous aurons l’occasion de le redire plus loin, contractent la gravité et la nature spécifique des actes qui en sont l’objet. Cf. St Alphonse, III, 465.

Mais c’est là souvent une considération plutôt théorique que pratique, car les fidèles ne pensent pas généralement à analyser ainsi leurs actes et il serait imprudent de poser des questions trop précises à ce sujet.

REMARQUE. – Dans tous les cas de masturbation, – à moins qu’elle ne soit l’occasion d’une faute de sodomie à proprement parler [Par le terme de sodomie, l’abbé Vittrant désigne, ici, non pas le coït anal, mais tout acte sexuel commis entre deux personnes de même sexe. Il me semble qu’il utilise dans le cas présent, le terme de sodomie selon le sens large qu’il peut avoir en théologie morale.] – la gravité de la faute de luxure ne dépendra pas de la manière dont elle aura été provoquée, ni de la partie du corps qui aura été l’objet des excitations érotiques. Il n’y aura donc jamais lieu de provoquer des explications ou des précisions à ce sujet.

§ 2. – LA SODOMIE.


1083. – Définition. - La sodomie est l’union sexuelle (…) contre nature avec une personne humaine du même sexe, ou de deux personnes de sexe différent (d’une façon non permise).

Ainsi, l’union sexuelle est l’application d’un corps sur un autre. Aucune pénétration d’un organe sexuel n’est requise. Cf. Vermeersch, De Castitate, 343.

[Contre nature veut dire : acte sexuel où toute procréation est impossible. L’expression contre nature ne signifie pas que ce genre de comportements sexuels (masturbation, fellation, coït entre les cuisses, coït par l’anus) ne se trouve jamais dans la nature, chez les animaux, mais les animaux ne sont pas conscients de leurs actes, ils ne délibèrent pas, ils obéissent à leur instinct ; leurs actes n’ont donc pas la même signification que les actes humains, lesquels peuvent être accomplis en toute conscience et après un choix mûrement réfléchi. Par ailleurs, l’homme ou la femme, peuvent se comporter de manière animale, en abolissant leur libre arbitre, en suivant de manière brutale et expéditive, l’impulsion à se procurer le plaisir sexuel malgré les interdits de la société ou ceux de la conscience morale individuelle.]

La sodomie est, même matériellement, un vice contre nature [un vice où la procréation est totalement impossible] ; elle se distingue donc par là-même de la fornication et de ses aggravations.

Ce vice est ancien et son nom a une origine Biblique (Genèse 19:5 [où la ville de Sodome est mentionnée]).


1084. – Diverses espèces. – 1. – La sodomie peut être complète ou incomplète. [La sodomie est complète quand elle est accompagnée de l’orgasme lors de l’acte sexuel. Le lieux ou l’organe où le sperme est éjaculé ne change pas la nature de la sodomie dans le sens d’acte sexuel entre personnes de même sexe. Les théologiens moralistes catholiques parlent de « sodomie » même quand il s’agit de deux femmes et sans coït anal avec objet commis sur l’une des deux ou sur les deux femmes.] Cf. Vermeesch, De Castitate, 343-344 ; – St Alphonse, 466.

2. – La sodomie parfaite ou proprement dite, est celle qui se comme entre personnes de même sexe ; la sodomie imparfaite est celle qui se comment entre personnes de sexe différent : cette dernière peut donc se produire dans l’usage – ou l’abus du mariage [ex : le mari accomplit une pénétration anale sur sa femme. Ou la femme sur son mari, au moyen d’objet sexuel destiné à cet acte] Cf. St Alphonse, VI, 916 et 935.

REMARQUE. – Il est évident que toutes ces fautes peuvent être [en plus] sacrilèges, incestueuses, adultères. [ex : si une femme mariée à un homme, couche avec une autre femme, la première commet un acte de sodomie et un adultère puisqu’elle trompe son époux avec une femme.]


1085. – Les peines. – Ce crime fut de tout temps sévèrement puni par les lois ecclésiastiques : Lévitique 20, 13 ; 1 Corinthiens 6, 9 – St Alphonse, III, 470 ; – CC. 2357-2359. (…)


CHAPITRE 5 : LES PÉCHÉS INTÉRIEURS ET LES FAUTES CONTRE LA PUDEUR


1094. – Pour résoudre spéculativement tous les problèmes qui peuvent se poser au sujet des péchés intérieurs contre la chasteté et des fautes contre la pudeur et la modestie chrétienne, il convient simplement de se reporter aux principes généraux de la morale et aux règles de la chasteté donnés ci-dessus.

Le but de ce chapitre sera uniquement de rappeler les principes et les règles essentielles, et de proposer un certain nombre d’applications pratiques.


[Fautes qui résident uniquement dans la volonté]

1095. – Cas des fautes qui résident uniquement dans la volonté. – Certaines fautes que nous appellerons purement intérieures peuvent, en soi, consister simplement en des actes divers de la volonté. Ce peut être :

1° – Un acte, délibéré et conscient, par lequel on approuve intellectuellement un acte abstrait gravement condamné par les règles de la chasteté chrétienne.

2° – Un désir (entièrement consenti) ayant pour objet une action gravement interdite par la morale sexuelle.

3° – Une joie (volontairement consentie) au souvenir d’un péché commis par soi ou par les autres.

Ces péchés, graves en soi si leur objet est gravement illicite, et formellement tels s’il y a eu pleine advertance et plein consentement, sont moralement distincts et contractent même les diverses espèces de malices contenues dans l’objet.

[advertance : attention avec laquelle on surveille ses actes sous l'aspect du bien ou du mal, on s’examine intérieurement en se demandant si tel acte est bien ou mal et à quel degrés. Cet examen intérieur diffère de la situation où la personne est mue par un accès subite de colère ou par une pulsion violente qui précipite son action. Par ailleurs, dans certains cas, la précipitation est en réalité motivée par le désir de fuir sa conscience et le constat que l’on s’apprête à faire le mal et donc que l’on devrait ne pas faire cette action ; ainsi la précipitation peut être vicieuse] – Cette contamination est certaine pour les désirs et les souvenirs, elle est moins discutable pour les autres péchés. Cf. n°109 et suiv.

REMARQUE. – Le plus souvent ces fautes occasionneront des désordres voluptueux actuels condamnés directement par les règles de la chasteté. – C’est ce que supposent implicitement presque tous les auteurs qui parlent de « délectation morose » (delectatio morosa). – C’est le cas que nous étudions explicitement dans le numéro suivant.


[Simples pensées accompagnées d’images troublantes]

1096. – Cas de simples pensées accompagnées d’images troublantes. – Si toute pensée relative aux choses sexuelles peut être l’occasion de faute, remarquons d’abord que la simple connaissance intellectuelle de ces choses ou même de péchés concrets de luxure, est en soi moralement indifférente ; acceptée ou recherchée dans un but honnête, elle peut être vertueuse et méritoire. [c’est l’éditeur qui souligne]

Mais cette connaissance qui s’accompagne d’imaginations plus ou moins vives reste dangereuse. Il faut donc avoir une intention droite et une raison proportionnée au danger prévu pour se la permettre licitement.

Si l’imagination prend le rôle principal, le danger deviendra grave et souvent on ne pourra invoquer l’excuse d’une raison proportionnée. C’est ce qui arrive facilement dans le cas de rêveries diurnes et de romans continués qui recherchent ou se permettent parfois des tempéraments timides ou imaginatifs et en particulier les jeunes filles. – Souvent donc « les mauvaises pensées » seront l’occasion de fautes intérieures et même de fautes extérieures directement condamnées par les règles de la chasteté.


[Résistance aux mauvaises pensées et aux mouvements sexuels]

1097. – Résistance aux mauvaises pensées et aux mouvements sexuels. – Doit-on résister positivement aux mauvaises pensées et aux mouvements sexuels, ou bien lorsque l’on ne les a pas provoqués délibérément ou imprudemment, peut-il se suffire de se comporter passivement et négativement ?

A cette question nous pouvons répondre :

1° – Il est certain qu’il faut prendre les moyens actuellement et subjectivement nécessaires pour observer les règles de la chasteté de son état.

2° – A cette fin il sera souvent utile, sinon nécessaire, d’opposer à ces pensées imaginatives ainsi qu’aux mouvements sexuels spontanés une résistance positive.

3° – Cependant il pourra parfois être plus prudent, pour ne pas fatiguer dangereusement le système nerveux, de mépriser plutôt ces pensées ou impressions inopportunes, du moins lorsqu’elles sont fréquentes et provoquées par les circonstances de la vie qui nous est imposée.

4° – Si ces pensées et impressions devenaient, sans aucune imprudence de la part du sujet, obsédantes et presque intolérables, il devrait se souvenir qu’on ne commet de péché grave de luxure qu’en deux circonstances : d’abord si on coopère activement et volontairement aux désordres charnels ; ensuite si au plaisir sexuel non provoqué on consent néanmoins résolument. Dès lors, la lutte indirecte par un dérivatif et par la prière sera souvent la plus efficace.


1098. – Les manquements à la pudeur. – On se gardera par ailleurs, – cela va de soi, – de manquer à la pudeur, vertu protectrice de la chasteté et souvent liée intimement à celle-ci. Cf. n. 1030, 3.

Or, toute parole, regard, toucher, manière de se tenir, manière de se vêtir ; tout ce qui provoque naturellement le désir des choses sexuelles ou même simplement attire sans motif l’attention, peut être considéré à bon droit comme un manque de pudeur.

Sans prétendre pouvoir, comme à priori, classer ces désordres en fautes intrinsèquement graves ou légères, nous rappellerons à leur occasion quelques principes, et nous proposerons, à titre d’exemple, quelques conclusions.

1. – A moins d’être légitimé par l’usage du mariage, tout manque de pudeur ayant un but érotique conscient doit être considéré comme gravement coupable, s’il y a pleine advertance et plein consentement [advertance : attention avec laquelle on surveille ses actes sous l'aspect du bien ou du mal].

« Les baisers, les étreintes, les regards, les touchers et autres choses semblables, s’ils ont lieu en dehors du mariage avec l’intention d’accomplir un acte luxurieux, ou de se procurer une jouissance sexuelle, sont toujours des péchés mortels, même si la jouissance n’est pas allée jusqu’au bout. Car, faits dans cette intention, en dehors du mariage, ces gestes sont impudiques, et, de par sa nature, une telle délectation tend à s’assouvir. » St Alphonse, III, 451, cf. 416, 2.

N. B. – Le baiser sur la bouche, quand il est actif de la part des deux partenaires, n’est le plus souvent qu’un commencement d’excitation érotique : il ne peut alors être licite qu’entre époux. Cf. St Alphonse, III, 417. [Il y a actuellement consensus entre tous les sexologues pour affirmer que le baiser profond, le baiser « avec la langue », est l’aphrodisiaque le plus puissant, c’est à dire que c’est l’acte le plus efficace pour inciter une personne à accomplir ensuite un acte sexuel. Cela ne veut pas dire que tout baiser profond cause systématiquement un acte sexuel.]

2. – Même en l’absence certaine de tout but voluptueux, les actions qui sont matériellement des manques de pudeur ne peuvent se justifier, en dehors du mariage, que par un motif proportionné : elles restent en effet, une occasion plus ou moins prochaine de péché et de scandale.

Mais là où ce motif existe il n’y a pas de faute.

3. – Nous comprenons, dès lors, les conclusions suivantes empruntées presque toutes à saint Alphonse de Liguori :

« Les médecins que leur profession amène à toucher ou à regarder les organes génitaux de l’autre sexe ne pêchent pas, même si, éventuellement, une éjaculation ou un orgasme involontaire s’ensuit.» (St Alph., III, 420, 1).

« Même s’ils prévoient une éjaculation ou un orgasme involontaire, il est permis aux curés et à d’autres confesseurs d’entendre la confession des femmes, et de lire des traités sur les choses sexuelles. Il est permis aux médecins de regarder et de toucher les parties de la femme malade, et d’étudier ce qui a trait à la médecine. Il est permis aux autres, dans les piscines ou autre endroits semblables, de parler aux femmes, de les embrasser, de les étreindre, si la coutume du pays le permet.» (III, 483).

«Les regards professionnels (pour motif professionnel) sont permis aux peintres et aux sculpteurs, car l’art en est une juste cause. Et quand sont prises les précautions nécessaires, il diminue le danger de poursuivre la recherche du plaisir. » – Vermeersch, De Cast., 399).

« Si l’ardeur du plaisir ne produit pas l’orgasme, il est permis à celui qui en fait habituellement et facilement l’expérience de le déclencher par le toucher.» (St Alph., III, 483).

« Les baisers, les étreintes, s’ils procèdent d’une vanité vénielle, du jeu, de la curiosité, de l’impétuosité, et même de la sensualité, ne dépassent pas la faute vénielle, s’il n’y a pas de délectation vénérienne, ni de recherche de délectation; si elle survient inopinément, et est aussitôt repoussée.» (418).

« On doit dire la même chose du toucher ou du regard des parties sexuelles de son propre corps ou de la vue des accouplements d’animaux.» (419).

« Regarder des peintures obscènes par curiosité n’est pas une faute mortelle, si sont absents et la délectation honteuse et le danger qu’elle se produise.» (424).

« Le regard et même le toucher (ce qui est plus rare à cause du péril adjoint) des parties honteuses d’un autre corps du même sexe causés par la curiosité ou l’irréflexion, quand on se baigne ou on se lave ensemble, ne sont pas des péchés mortels, s’ils sont étrangers à toute passion ou au péril d’un consentement vénérien.» (425.7).

« Regarder les parties moins honnêtes mais non honteuses de la femme comme les yeux, les bras, les jambes, ne constitue pas un péché mortel, s’il n’y a pas de péril de chute, et si le regard ne s’attarde pas.» (423).

« Les paroles à double sens, la lecture de livres obscènes, l’assistance à des comédies immorales, les gestes, les lettres et les cadeaux inspirés par l’amour ne sont pas des péchés mortels, s’ils sont motivés par la simple curiosité, ou par passe-temps.».

« Pêchent-ils gravement tous ceux qui par leur argent ou leurs encouragements, apportent un concours important à des comédies immorales, même s’ils n’y assistent pas ? Je penche pour l’affirmative. Mais je ne taxerai pas de péché mortel les simples spectateurs, si est écarté le danger d’une honteuse délectation.» (427).

« Il est certain que ceux qui composent ou représentent ces comédies renommées pour leur immoralité ne peuvent en aucune façon être exempts de péché mortel. Parce qu’ils ont scandalisé les autres, même si telle n’était pas leur intention. » (428).

REMARQUES. – a) Il est évident que nous devons être beaucoup plus sévères pour ceux qui créent un mouvement ou une « mode » immodeste ou impudique que pour ceux qui se laissent plus ou moins consciemment prendre par l’ambiance qui les enveloppe nécessairement.

b) – Bien que nous ne puissions pas étudier tous les problèmes qui se posent au sujet de la pudeur chrétienne, il convient cependant de nous arrêter un instant au cas de la danse et de dire un mot des lectures.


1099. – La danse – 1 - « Les danses, dit saint Alphonse de Liguori (III, 429), à moins qu’elles ne soient faites dans un but pervers, ou qu’elles ne comportent le danger d’exciter le plaisir sexuel en soi-même ou en autrui, ou dans toute autre intention condamnable, ne sont pas mauvaises en elles-mêmes, ni ne sont des actes libidineux, mais de simples réjouissances. »

La danse peut en effet être un exercice rythmique gai et esthétique, propre à reposer l’esprit et le corps. Pratiquée modestement et honnêtement dans un milieu familial sain et modeste, la danse peut favoriser l’équilibre nerveux et moral des jeunes, surtout des jeunes filles.

Facilement cependant la danse peut devenir l’occasion de flirts dangereux sinon gravement coupables, – ou même directement de touchers et d’excitations déshonnêtes.

2. – Il faut savoir de plus que dans toutes les civilisations, chez les sauvages comme dans les sociétés modernes, la danse peut prendre un autre aspect et devenir un moyen d’excitation érotique et charnelle. Un rythme rapide, des gestes trop suggestifs, des attouchements et des frottements indécents, peuvent fort bien la transformer en un exercice érotique qui n’est qu’un prélude excitant de l’acte sexuel. On trouve chez les animaux des danses de ce genre qui sont des phénomènes pré-copulatoires très caractérisés. – Ces danses sont alors nécessairement et gravement coupables.

1100. – Les lectures. – 1. – Les lectures sont l’occasion de fautes graves contre la chasteté :

a) si le lecteur se propose un but gravement coupable ;

b) s’il y a manquement grave à certaines lois de l’Index (cf. C. 1399, 3° et 9) ; une faute alors est commise contre la vertu qui motive la loi ;

c) si le livre est pour le lecteur l’occasion prochaine d’un manquement grave à la chasteté de son état.

2. – Il n’y aura que faute vénielle, si la lecture ne constitue à ces divers titres qu’un désordre léger, par exemple, chercher dans un dictionnaire le sens d’un mot lascif.

3. – On sera exempt de toute faute chaque fois que l’on agira d’une manière raisonnable (car la lecture est en soi quelque chose d’indifférent). C’est pourquoi on peut à bon droit donner ce conseil : « Celui qui en lisant un livre honnête, tombe sur un passage scabreux qu’il le parcoure à vol d’oiseaux, et continue sa lecture sans s’émouvoir. Qu’on ne choisisse aucun livre dans le but de favoriser de telles rencontres » (Verm., De Cast., 184, 4°).

REMARQUES. – a) Les mêmes principes sont à appliquer au cas du cinéma, en tenant compte du fait que les images animées peuvent être particulièrement excitantes et que l’obscurité des salles facilite trop souvent des touchers indécents.

b) – De même les modes féminines immodestes et les déshabillés sportifs ou balnéaires seront à condamner gravement lorsque le but est immoral ou les circonstances telles qu’ils constituent une occasion prochaine de péché grave ou de grave scandale.

c) – N’oublions jamais que la chasteté est un contrôle et qu’elle suppose une fermeté grandement facilitée par une ambiance saine et pudique.



CHAPITRE 6 : LA CONSERVATION DE LA CHASTETÉ


1101. – Les moyens naturels. – 1. – Ce sont avec la prière, – particulièrement au moment des tentations, – la dévotion filiale à la Sainte Vierge et la fréquentation des Sacrements.

On peut aussi parfois conseiller l’usage prudent des mortifications corporelles, et même des vœux.

2. – Mais si les moyens surnaturels ne doivent jamais être oubliés, il ne faut pas croire qu’ils suffiront toujours et supprimeront toutes les difficultés.

Dieu n’est pas obligé de faire des miracles. Il convient donc de tenir compte en ces matières des conditions psychologiques nécessaires à la pratique de la vertu, et parfois même de recourir aux remèdes physiques pour faire disparaître ou au moins diminuer les difficultés.


1102. – Les conditions psychologiques. – 1. – La chasteté est avant tout affaire de volonté. Il faut, pour rester chaste, être tout à la fois persuadé de l’importance et de la possibilité de cette vertu, et décidé à employer les moyens qui en facilitent l’observation.

Au point de départ, nous trouvons donc un jugement spéculatif et pratique. De là l’importance souvent prédominante de l’éducation et de l’ambiance, car « ce n’est pas la chasteté qui est une anomalie, dit le Dr Pasteau, c’est la continence dans l’impureté [un climat d’impureté = un climat favorable aux vices sexuels] ».

2. – Mais même dans les conditions les plus favorables, la conservation de la chasteté suppose une lutte constante contre les mauvais instincts, c’est-à-dire contre la concupiscence.

Normalement, seule une volonté aguerrie pourra dominer toujours les difficultés sans cesse renaissantes. La mollesse sous toutes ses formes, la paresse, la gourmandise, le luxe même, conduiront ordinairement à la défaite. Pour rester maître de ses sens, il faut savoir contrôler même les jouissances permises, et les jeunes mariés doivent savoir que là même où il n’y a pas de péché à craindre directement, il convient de se surveiller et de se modérer pour savoir, lorsque les circonstances l’exigent, s’abstenir.

3. – La luxure est un égoïsme. Les égoïstes seront facilement impurs ; tandis que ceux qui ont pris l’habitude de s’oublier pour se donner et pour pratiquer généreusement une véritable charité chrétienne seront pour ainsi dire naturellement chastes.

[Nous pouvons donner une anecdote pour illustrer ce lien entre la charité et la chasteté. Le Père Vincent Carme (1931-2016. Auteur du livre « Au Service des Derniers »), était missionnaire de saint Vincent de Paul, lors d’un entretien de deux heures qu’il nous a accorda pour parler des moyens de vivre la chasteté chrétienne, il nous a confié qu’il n’avait jamais commis le péché de masturbation ni le péché de fornication (ni aucun autre péché sexuel), pas même à l’adolescence. Ils étaient deux frères prêtres et ils partagea avec son frère prêtre, cette grâce d’une pureté, d’une continence et d’une virginité tout au long de leur vie et jusqu’à leurs morts. Pourtant, il dû lutter sa vie durant contre la tentation de la masturbation ; il fut longtemps missionnaire à Madagascar. Un soir que la tentation était plus terrible que d’habitude, il descendit en slip (il faisait très chaud et humide) pour supplier Jésus au tabernacle de l’autel, de ne pas le laisser succomber à la tentation, il résistât en priant continuellement et s’endormit ainsi devant la présence réelle de Dieu au tabernacle. Il se réveilla le lendemain matin au même endroit avant que les sœurs religieuses ne viennent dans la chapelle pour la messe du matin. A 70 ans passés, il était encore tenté par l’impureté qu’il n’avait pourtant jamais commise, et il lui arrivait à cet age avancé, de dormir, non sur son matelas mais à même le sol en carrelage enroulé dans ses draps et sa couverture, pour faire pénitence et vaincre ainsi la tentation de la luxure : il faisait cette pénitence pour lui-même et pour les autres (dans le cadre de la communion des saints, nos prières et nos bonnes actions aident et bénéficient aux autres). Il savait par la confession, que certains de ses confrères prêtres souffraient de leurs défaites face à l’impureté. Une fois, le père Vincent Carme vit un lépreux, à Madagascar et pris un repas en sa compagnie dans sa case, par amour fraternel, pour tenir compagnie à ce lépreux, pour le soutenir moralement dans cette terrible maladie qui isole du reste de la société. Le père Vincent Carme m’a raconté qu’il avait failli vomir devant le lépreux tellement les odeurs de pourriture causées par la lèpre étaient insoutenables, mais il réussi à tenir bon et à ne rien montrer au lépreux pour que le repas pris en commun soit un moment agréable pour ce dernier. A la suite de cet acte héroïque d’amour fraternel, il ne fut plus tenté sur la chasteté pendant six mois. Voilà donc un cas étonnant de lien entre la charité fraternelle et la chasteté.]

4. – Cependant, la volonté la mieux trempée succombera si elle ne commence [pas] par éviter courageusement les occasions de chute. Cette défiance de soi-même ne doit pas être crainte déprimante ou timidité maladive, mais sage prudence.

Pour les enfants, l’ambiance jouera un rôle de première importance et c’est pourquoi une bonne éducation de la chasteté ne pourra normalement se faire que dans un milieu sain et chaste.

5. – La pratique de la chasteté suppose en effet, plus que toutes les autres vertus, le contrôle des images et des associations [d’idées]. D’où la nécessité de veiller sur les sens et sur l’imagination.

Or, les préoccupations intellectuelles, l’étude, les travaux absorbants, les sports même dans une certaine mesure, facilitent grandement ce contrôle de l’imagination. Et c’est ainsi « que les plus ardents, en dérivant leur activité, savent devenir continents » (Dr Toulouse).

[Un célibataire sportif témoigne : Le sport en raison de ses bénéfices physiques et mentaux semblent particulièrement indiqué pour l’équilibre de vie, et tout spécialement pour les tempéraments nerveux :

- connaissance, estime et respect de soi et de son corps ;

- juste rapport à la nature et à ses semblables ;

- qualité du sommeil ;

- optimisme ;

- courage, force d’esprit et de volonté.

Le sport agit peut-être spécialement à titre de prévention dans la mesure où certains expérimentent que la faute contre la pureté est presque toujours précédée par une baisse de moral. « Quand mon esprit a déjà chuté, ce n’est pas avec des exercices physiques que je peux rattraper le coup. En revanche, si je suis bien dans ma peau, mon esprit est plus fort pour résister à la tentation. Les assouplissements et les étirements rentrent dans la même catégorie avec leurs effets sainement relaxants. J’ai expérimenté le fait que le sport et les assouplissements peuvent, en combinaison avec la prière, permettre de lutter contre la tentation dans certaines circonstances. A l’inverse, j’ai constaté qu’une grosse séance de sport sans étirements et hydratation peut ultérieurement, chez moi environ 24 heures après, faire naître des mouvements physiques de tentation.» ]

6. – On comprend dès lors combien l’oisiveté est dangereuse pour la chasteté. Et puisque « toutes les causes d’excitation sexuelles augmentent l’intensité du désir » (Forel), la mollesse dans le repos, les lectures lascives, ou même seulement celles où l’amour est poétiquement exalté, la musique sensuelle, les parfums, enfin la fréquentation des personnes jeunes et pleines d’attraits, conduiront presque fatalement à l’impureté.


1103. – La thérapeutique de la luxure. – Il est évident par ailleurs qu’un équilibre nerveux favorable facilite grandement la pratique de la chasteté, et il n’est pas moins évident que le régime alimentaire peut avoir sur le système nerveux une répercussion considérable. Un médecin consciencieux pourra donc donner à ce sujet des conseils précieux (…).

[Les douches froides peuvent utilisées à titre de pénitence ou pour renforcer la force de la volonté.]

L’hygiène générale et la propreté sont toujours à conseiller.

REMARQUE. – Aux parents incombe certainement le devoir de veiller à une sage éducation sexuelle de leurs enfants.


1104. – Conclusion. – Vous êtes le sel de la terre. Si le sel s’affadit, avec quoi le salera-t-on ? Il n’est plus bon qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes. (Matthieu 5.13).

[Aux prêtres] s’impose, d’une façon particulièrement pressante, l’obligation de la chasteté, non seulement comme un devoir personnel, mais comme un devoir social. [Ils doivent] par vocation être chastes pour aider les autres à le devenir.

Or il est certain que [leur] ministère même n’est pas sans danger à ce sujet. Il faut savoir que des prêtres, des religieux (et même des religieuses) peuvent tomber, et parfois très bas.

Le prêtre qui n’est pas fervent, et surtout celui qui n’est pas prudent, en particulier dans ses relations avec les femmes et les jeunes filles, tombera [dans la luxure].

Mais il est certain aussi, à condition cependant qu’il n’oublie pas les prescriptions canoniques et les conseils ascétiques reçus pendant sa formation, que le prêtre trouve toujours dans ses obligations mêmes la sauvegarde nécessaire.

S’il reste en effet fidèle à tous ses devoirs, il met par là même en œuvre les moyens surnaturels et il réalise les conditions psychologiques et physiques indispensables à la conservation de la chasteté.

A l’occasion de cette vertu qui, sans être la plus grande, est cependant très particulièrement importante dans la vie chrétienne et sacerdotale, efforçons-nous donc de mériter la bénédiction du Maître :

Celui qui fera et enseignera

celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux.

(Matthieu, 5, 1








Mgr Jean-Baptiste Bouvier

Évêque du Mans (France, 1783-1854)


DISSERTATION SUR LE SIXIÈME COMMANDEMENT



Mgr Jean-Baptiste Bouvier, évêque du Mans de 1834-à son décès en 1854, théologien, professeur de philosophie puis de théologie morale.


Par l’influence intellectuelle considérable qu’il a exercée sur le clergé de son temps, grâce à la diffusion dans presque tous les séminaires de France, des quinze éditions de ses Institutions Théologiques, Mgr Bouvier mérite une place à part, et une place d’honneur, dans l’histoire de la théologie au 19ème siècle. Sa théologie a eu la rare fortune d’être le premier, et, pendant longtemps, l’unique manuel qui convînt à la période de transition (1830-1870) caractérisée par l’agonie des deux erreurs, gallicane et janséniste, et par l’aurore des justes restaurations dans tous les ordres de la vie ecclésiastique : philosophie, théologie, droit, histoire, liturgie, etc. (…)


Au point de vue de la morale, l’œuvre de l’évêque du Mans était, au contraire, et est restée tout à fait remarquable. Elle prend nettement position contre le jansénisme ; elle introduit les doctrines de saint Alphonse de Liguori dans l’enseignement, et si cette réaction, aussi méritoire que courageuse, contre les sévérités de Collet [Pierre Collet, +1770] et d’autres innombrables manuels de casuistique plus ou moins issus de la même source, n’atteint pas du premier coup, et sur tous les détails, la perfection de nos théologies morales actuelles, on doit dire cependant que Mgr Bouvier en a été, avec le cardinal Gousset, parmi les théologiens français, le plus puissant initiateur (cf. article du Dictionnaire de Théologie Catholique, éditions Letouzey et Ané, Paris.


Introduction


Le sujet de la sexualité étant toujours dangereux, à cause de notre fragilité [du fait du péché originel, l’homme cède plus facilement au mal qu’au bien], on ne doit l'étudier que par nécessité, avec prudence, pour une fin louable et après avoir invoqué l'assistance divine. Quiconque présume trop de ses propres forces s'y livrerait en téméraire et sans discernement, s'exposerait à des chutes presque inévitables, d'après la sentence des livres saints (Ecclésiastique 3.27) : celui qui aime le danger y périra. Il faut invoquer fréquemment le secours de la très Sainte Vierge, surtout au commencement des tentations qui peuvent surgir. Il faut recourir à une prière comme la suivante :

O Vierge très pure, par votre très sainte virginité et votre conception immaculée, purifiez mon cœur et ma chair.

Le sixième et le neuvième précepte du Décalogue qui se trouvent renfermés au chapitre 20 de l'Exode, versets 14 et 17, ayant évidemment le même objectif, nous avons cru devoir les traiter dans un seul titre [Exode 20, 14-17 : Tu ne commettras pas d’adultère. Tu ne voleras pas. Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. Tu ne désireras pas la maison de ton prochain ; tu ne désireras pas sa femme, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni aucune de toutes les choses qui lui appartiennent.]


La Chasteté

De même qu’en prohibant le vol, on défend toute usurpation du bien d’autrui, de même, en prohibant l’adultère on réprouve tout acte opposé à la chasteté.

La chasteté, qui tire son nom du mot châtier parce qu’elle refrène les concupiscences, dit Saint Thomas 2a 2ae [Somme Théologique 2ème partie de la 2ème partie], question 151, article 1, [la chasteté] est une vertu morale qui met les plaisirs sexuels sous l’empire de la raison.

C’est une vertu spéciale car elle a un but distinct ; elle a pour annexe la pudeur qui, par respect pour les hommes, couvre d’un voile discret même les choses permises.

[Les valeurs du corps peuvent être en conflit avec les valeurs de la personne. La pudeur indique notre aspiration à être aimé en tant que personne et non à être utilisé comme instrument de plaisir sexuel. Cf. Saint Jean-Paul II, Audiences Générales sur la sexualité entre 1979 et 1984 : Homme et femme Il les créa, Paris, 2004, éditions du Cerf.]

On peut considérer la chasteté à un triple point de vue : la chasteté conjugale, celle des veufs et celle des vierges [= les célibataires]. La chasteté conjugale subordonne à la raison l’usage du mariage. Celle des veufs consiste dans l’abstention de tout plaisir sexuel après la dissolution du mariage. La chasteté virginale ajoute à cette parfaite abstinence l’intégrité de la chair [l'hymen n'a pas été rompu]. La virginité peut donc être considérée comme un état ou comme une vertu. Comme état, elle consiste dans l’intégrité de la chair, c’est-à-dire dans l’abstinence de tout acte sexuel consommé ; comme vertu, c’est la parfaite abstinence de toute action volontaire ou de tout plaisir opposé à la chasteté avec la résolution de rester toujours dans cette abstinence. L’état de virginité est donc très distinct de la vertu de ce nom.

L’état de virginité peut-être détruit par des actes involontaires comme le viol, et, une fois perdu, il ne peut se recouvrer, car on ne saurait rétablir l’intégrité de la chair [certains chirurgiens reconstruisent l’hymen rompu]. Aussi, ceux et celles qui ont été mariés ou les gens qui ont accompli l’acte sexuel hors du mariage ne peuvent être appelés vierges, seraient-ils devenus saints par le repentir.

La vertu virginale, au contraire, lésée par le péché qui lui est opposé, mais qui n’a pas été consommé, ou par un projet de mariage, se rétablit par la remise du péché, ou par le retour à la résolution de rester chaste à l’avenir. Et, comme la vertu ne consiste pas dans une disposition du corps, mais bien de l’âme, elle se conserve malgré des actes involontaires qui font disparaître l’état de vierge. D’où il suit que l’auréole de gloire préparée, dans le ciel, pour les vierges, ne sera jamais décernée à ceux ou celles qui, bien que saints, auront été mariés ou qui auront accompli volontairement l’œuvre de chair hors du mariage ; mais elle sera le partage de ceux et de celles qui auront conservé cette vertu ou qui l’auront recouvrée. Ce n’est donc nullement par un fait involontaire et par suite de violences que les vierges ont repoussées de toutes leurs forces, qu’elles perdent leurs droits à cette auréole. (...)



CHAPITRE 1 : DE LA LUXURE EN GÉNÉRAL


La luxure, qui tire son nom du mot luxer, est ainsi appelée parce que le propre de ce vice est de relâcher, de détruire les forces de l’âme et du corps : aussi l’appelle-t-on quelquefois dissolution ; et on dit de ceux qui s'y livrent avec déséquilibre, qu’ils sont dissolus. On définit la luxure ainsi : l’appétit désordonné des plaisirs sexuels. [« La luxure est un vice occupé aux plaisirs lascifs et aux voluptés de la chair » Nicolas de Hauteville, La Théologie Angélique].

Ces plaisirs sont appelés vénériens parce qu’ils ont pour but la génération à laquelle les païens faisaient présider la déesse Vénus. [Depuis la pilule contraceptive, les gens ont perdu de vue l’essence procréatrice et unitive de la sexualité, celle-ci est maintenant majoritairement perçue comme une activité d’abord ludique et secondairement reproductive].


PROPOSITION. — La luxure est de sa nature un péché mortel.


Cette proposition se prouve par l’Écriture sainte, par l’avis unanime des Pères de l’Église et des théologiens et par la raison.


1° Par l’Écriture sainte : lettre de saint Paul aux Galates, 5, 19 et 21 : Je vous déclare en vérité, comme je l’ai déjà fait, que ceux qui pratiquent les œuvres de chair, qui consistent dans la fornication, l’impureté, l’impudicité, la luxure… et autres choses semblables, n’entreront pas dans le royaume de Dieu.

2° Les pères de l’Église et les théologiens sont unanimes pour enseigner que, de sa nature, le péché de luxure est mortel [mortel pour la grâce sanctifiante déposée gratuitement par Dieu en notre âme moyennant la foi en Dieu].

3° Par la raison : Les plaisirs sexuels, dans l’intention du Créateur, sont uniquement destinés à la propagation du genre humain : Tout ce qui va à l’encontre de ce but constituant en soi un grave désordre, est donc un péché.

[Propagation du genre humain signifie procréation et éducation. Mgr Bouvier dit plus loin : il ne suffit pas de donner le jour à des enfants, il faut encore les nourrir, les soigner, les élever, les instruire ; de là, pour les parents, l’obligation naturelle de remplir des devoirs nombreux, qui exigent, du reste, une longue cohabitation. Pour la bonne éducation, il faut donc que les parents persévèrent dans la vie commune, c’est un des buts de leur vie sexuelle : éloigner les dangers de séparation et de divorce].



LA FORNICATION


La fornication est l’union intime et d’un consentement mutuel d’un homme libre et d’une femme libre ayant déjà perdu sa virginité [l'homme et la femme décident d’un commun accord de faire l'amour].


Nous disons :

1° d’un homme libre, c’est-à-dire qui ne soit pas empêché de commettre la faute par aucun lien spécial de mariage [aucun des deux n'est marié], de parenté, d’affinité, d’ordre sacré ou de vœu, mais seulement par le précepte de chasteté.

2° D’une femme libre ayant déjà perdu sa virginité, comme fornication simple, elle se distingue du stupre dont nous aurons bientôt occasion de parler.

3° D’un consentement mutuel, par ces mots, la fornication se distingue du rapt [ou l'un des deux n'agit pas librement mais est forcé par l'autre].

La fornication simple.


La fornication simple est celle qui résulte d’un commerce passager [relation sexuelle momentanée] avec une ou plusieurs femmes. [Ou relation sexuelle d’une femme avec un ou plusieurs hommes].

Les Nicolaïtes et les Gnostiques, hérétiques impurs des premiers siècles [de l’histoire de l’Église catholique], s’appuyant sur des raisons diverses, ont prétendu que la fornication simple était licite. Guillaume Durand de Saint-Pourçain (+1334) s’appuyant sur le droit naturel, la regardait comme un péché seulement véniel, qui ne devenait mortel qu’en présence du droit positif. Caramuel, venu après lui, disait qu’intrinsèquement elle n’était pas une action mauvaise, mais défendue seulement par le droit positif.


PROPOSITION. — La fornication simple est intrinsèquement une action mauvaise et constitue un péché mortel.


Preuve. Cette proposition admise par tous les moralistes chrétiens, se prouve par l’Écriture Sainte, par le témoignage des Pères de l’Église, par l’autorité des conciles et des pontifes [les papes] et par la raison.


1° Par l’Écriture Sainte : Parmi les textes nombreux que nous pourrions rapporter, choisissons-en seulement quelques-uns :

1ère Lettre aux Corinthiens, 6, 9-10 : Ni les fornicateurs, ni ceux qui s’adonnent au culte des idoles, ni les adultères ne posséderont le royaume de Dieu ;

Lettre aux Galates, 5, 19-21 : Or les œuvres de la chair sont manifestes : c’est la fornication, l’impureté, l’impudicité, la luxure, l’idolâtrie, les maléfices, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les animosités, les rixes, les dissensions, les factions, l’envie, les meurtres, l’ivrognerie, les débauches, et les choses semblables, dont je vous prédis, comme je l’ai déjà fait, que ceux qui les commettent ne seront pas héritiers du royaume de Dieu.

Lettre aux Éphésiens, 5, 5 : sachez que ni les fornicateurs ni les impurs n’auront de place dans le royaume du Christ et de Dieu. Saint Jean, dans L’Apocalypse, 21, 8, place les fornicateurs, dans la vie future, dans un étang de feu et de souffre : Quant aux lâches et aux incrédules, et aux abominables, et aux homicides, et aux impudiques, et aux magiciens, et aux idolâtres, et à tous les menteurs, leur part sera dans l’étang brûlant de feu et de soufre : ce qui est la seconde mort.

Il est certain, d’après ces textes, que la fornication, l’impureté et l’adultère et le culte des idoles sont, intrinsèquement, des actions mauvaises, et constituent des péchés mortels.

2° Par le témoignage des Pères de l’Église : Saint Fulgent, lettre 1, chap. 4 : La fornication ne peut jamais exister sans un grave péché. Saint Chrysostome, Homélie 22 sur 2ème aux Corinth. : Autant de fois tu auras fréquenté les femmes de mauvaise vie, autant de fois tu auras prononcé ta propre condamnation.

3° Par l’autorité des conciles et des souverains pontifes. Le Concile de Vienne, Clément V, liv. 5, t. 3, ch. 3, condamne cette proposition des Béguins : le baiser d’une femme, lorsque la nature n’y porte pas, est un péché mortel, mais l’acte charnel n’est pas un péché lorsque la nature commande, et surtout lorsque la tentation porte à s’y livrer.

Le Concile de Trente, session 24 sur le mariage, chapitre 8 « des Peines du Concubinage » déclare que le concubinage est un péché grave.

Innocent XI, en 1679, a condamné la proposition suivante de Caramuel : Il est de la plus haute évidence que la fornication ne porte, en soi, aucune malice, et qu’elle est seulement mauvaise, parce qu’elle est interdite, afin que toute opinion contraire paraisse tout à fait opposée à la raison.

4° Par la raison : L’union charnelle ne peut être permise que dans le but de la production de l’espèce ; c’est à cette seule fin qu’elle a été instituée ; or, il ne suffit pas de donner le jour à des enfants, il faut encore les nourrir, les soigner, les élever, les instruire ; de là, pour les parents, l’obligation naturelle de remplir des devoirs nombreux, qui exigent, du reste, une longue cohabitation. Or, la simple fornication est évidemment contraire à ces devoirs, puisque, de sa nature, elle est un acte passager, et qu’un accouplement pareil n’oblige, par aucun lien, à la cohabitation. Donc, elle est intrinsèquement mauvaise.

En outre, le bonheur de la société dépend de l’honnête institution des familles ; or, l’honnête institution des familles suppose le mariage ; donc, la simple fornication qui détruit les droits, les devoirs et les avantages du mariage est très mauvaise de sa nature.

De plus, la fornication avec un infidèle ou un hérétique constitue un péché bien plus grave, à cause de l’outrage fait ainsi à la véritable religion.

Mais, diriez-vous : 1° Dieu ordonne à Osée 1, 2, de prendre pour épouse une femme débauchée ; et, d’après les Actes des Apôtres 15, 29, la fornication est défendue comme l’usage de la chair des victimes, des animaux étouffés et du sang ; donc, la fornication n’est une action mauvaise que d’après le droit positif.

Réponse : Je nie la conséquence. En effet : 1° Dieu ordonna à Osée, non pas de forniquer, mais de prendre pour épouse une femme débauchée, ce qui est bien différent. 2° La fornication est expressément prohibée par les apôtres, parce que les païens prétendaient qu’elle était licite ; et il n’est pas dit, dans les Actes, qu’elle n’est pas défendue par le droit divin et naturel ; l’ancienne loi l’avait déjà plusieurs fois interdite : 1° par le sixième commandement du décalogue ; 2° la jeune fille qui se laissait déflorer [enlever sa virginité] était lapidée, parce qu’elle avait commis une infamie dans Israël (Deutéronome 22, 21) ; 3° Dieu avait dit à Moïse : que les fils d’Israël ne se livrent pas à la débauche (Deutéronome 23, 17).

2° Ceux qui, me direz-vous, se livrent volontairement à la fornication ne font injure à personne ; donc, ils ne font pas une chose mauvaise de sa nature. [Argument de ceux qui disent que deux adultes consentants, homme et femme, qui décident librement de faire l'amour ne font de mal à personne]

Réponse. Je nie la conséquence, car la fornication est mauvaise, non parce qu’elle fait tort à quelqu’un, mais parce qu’elle viole un ordre divin.

Vous objecterez qu’il est préférable de créer des enfants par la fornication que de les laisser dans le néant et qu’ainsi on ne viole pas les ordres divins.

Réponse. Je nie la conséquence. Nous avons déjà vu qu’il ne suffit pas d’avoir l’intention de créer des enfants pour en conclure qu’on a obéi à un ordre divin ; d’un autre côté, cette allégation tendrait à prouver que l’adultère est permis, et qu’il vaut mieux avoir des enfants par l’adultère que de ne pas en avoir.

Le Concubinage.


Le concubinage est la relation d’un homme libre avec une femme libre, et qui demeurant, soit dans la même maison, soit dans des maisons séparées, vivent ensemble, comme s’ils étaient mariés. [Ils font des actes sexuels comme s’ils étaient mariés].

Il est certain que le concubinage ainsi compris étant un péché beaucoup plus grave que la fornication simple, à cause de la disposition au péché dans laquelle l’esprit se trouve habituellement, cette circonstance doit être dévoilée dans la confession.

Le Concile de Trente, session 24, c. 8 sur le mariage, a décrété des peines très graves contre ceux qui vivent en concubinage, et dans la session 25, c. 14 « de la manière de procéder contre les clercs concubinaires », contre les clercs qui se livrent honteusement à ce vice. Mais ces peines doivent être prononcées par une sentence, et plusieurs d’entre elles n’ont jamais été admises en France, telles que l’expulsion hors de la ville ou hors du diocèse des personnes vivant en concubinage, le secours du bras séculier [la force publique] invoqué au besoin. Et pourtant, ce mal n’a pas été jugé moins grave chez nous que chez les étrangers.

On demande si celui qui vit en concubinage peut être absous avant d’avoir renvoyé sa concubine.

Réponse. 1° Si le concubinage a été public, ni l’une ni l’autre des personnes qui vivent dans cet état ne peut régulièrement être absoute, bien qu’elle paraisse avoir le repentir, avant qu’une séparation publique ait eu lieu car outre la séparation, il est nécessaire de donner une satisfaction proportionnée au scandale, et, ordinairement, cette satisfaction ne peut être obtenue que par la séparation.

[Catéchisme de l’Église Catholique, N°1459 Beaucoup de péchés causent du tort au prochain. Il faut faire le possible pour le réparer (par exemple restituer des choses volées, rétablir la réputation de celui qui a été calomnié, compenser des blessures). La simple justice exige cela. Mais en plus, le péché blesse et affaiblit le pécheur lui-même, ainsi que ses relations avec Dieu et avec le prochain. L’absolution enlève le péché, mais elle ne remédie pas à tous les désordres que le péché a causés (cf. Concile de Trente : Denz.Schon. N°1712). Relevé du péché, le pécheur doit encore recouvrer la pleine santé spirituelle. Il doit donc faire quelque chose de plus pour réparer ses péchés : il doit " satisfaire " de manière appropriée ou " expier " ses péchés. Cette satisfaction s’appelle aussi " pénitence ". N°1460 La pénitence que le confesseur impose, doit tenir compte de la situation personnelle du pénitent et doit chercher son bien spirituel. Elle doit correspondre autant que possible à la gravité et à la nature des péchés commis. Elle peut consister dans la prière, une offrande, dans les œuvres de miséricorde, le service du prochain, dans des privations volontaires, des sacrifices, et surtout dans l’acceptation patiente de la croix que nous devons porter. De telles pénitences aident à nous configurer au Christ qui, seul, a expié pour nos péchés (cf. Lettre aux Romains 3, 25 ; 1ère lettre de saint Jean 2, 1-2) une fois pour toutes. Elles nous permettent de devenir les cohéritiers du Christ ressuscité, " puisque nous souffrons avec lui " (Lettre aux Romains 8, 17 ; cf. Concile de Trente : DS 1690).]

De là plusieurs auteurs ont conclu que celui qui est réputé vivre en concubinage, bien qu’il soit accusé à tort, ou que les rapports intimes aient cessé depuis longtemps, n’en est pas moins tenu, à cause du scandale, de chasser ou d’abandonner la femme sur laquelle pèse une si abominable réputation. Voir Billuart, t. 13, p. 351. [Le mot scandale est ici utilisé, non avec le sens de grave affaire qui émeut l'opinion publique mais avec le sens de  fait immoral qui incite les autres à pécher. Cf. Dictionnaire Petit Robert]

Cela est encore plus nécessaire lorsqu’il s’agit de clercs qui doivent soigneusement conserver leur réputation, car, lorsque la bonne renommée est une fois atteinte, ils ne peuvent la recouvrer qu’en rompant aussitôt toute relation avec la femme suspecte. (...)


Réponse. 2° Mais si le concubinage est secret, que le commerce [les actes sexuels] ait déjà cessé ou non, on doit d’abord fortement conseiller la séparation parce qu’il est moralement impossible qu’une pareille cohabitation n’amène pas quelque danger de rechute. Cependant, nous sommes d’avis qu’elle ne doit pas être exigée sous peine de refus de l’absolution, surtout si on prévoit qu’il doive en résulter un scandale, le déshonneur ou autre grave danger.

Nous supposons qu’on juge sincère la résolution de ne plus pécher et qu’on puisse compter sur la persévérance dans la bonne résolution. Ainsi pensent Navarrus, Billuart, Saint Alphonse de Liguori et plusieurs autres.

Si, malgré cette résolution, il survient des rechutes, l’absolution doit être différée et, ordinairement, la séparation doit être prescrite car alors la persévérance est, avec raison, jugée improbable.

Mais si le commerce illicite n’a pas volontairement cessé, que doit-on faire ?

Réponse. 1° Si le pénitent est à toute extrémité [il va bientôt rendre son âme à Dieu] et déteste ses péchés, il doit être absous et muni des autre sacrements aux conditions déjà énoncées dans l’explication du mot régulièrement, sans toutefois être tenu à la promesse devant témoins.

Réponse. 2° Mais si la mort n’est pas imminente, le pénitent qui vit secrètement en concubinage ne doit pas, ordinairement, être absous avant que la séparation ait eu lieu, parce qu’il se trouve dans l’occasion prochaine de pécher : Dieu et la nature, du reste, nous imposent l’obligation formelle de fuir l’occasion prochaine de pécher. Aussi Alexandre VII a-t-il condamné la proposition suivante : Celui qui vit en concubinage n’est pas obligé de renvoyer sa concubine si elle est par trop utile au charme de sa vie, vulgairement, au régal de son existence ; si elle venait à lui manquer, il doit tomber dans un trop grand chagrin ; si des mets préparés par d’autres doivent lui être insupportables et s’il lui est trop difficile de trouver une autre servante. Ici, on suppose la résolution de ne pas tomber dans le péché et cependant, cette proposition est déclarée fausse.

J’ai dit ordinairement : car il y a des cas dans lesquels l’absolution doit être donnée sous la seule promesse de séparation, et même sur la seule résolution de ne plus pécher par la suite ; à savoir :

1° Si, à différents indices on reconnaît que le pénitent est véritablement repentant, et qu’au premier ou second avertissement il promette de cesser toute fréquentation ;

2° Si du refus de l’absolution il doit résulter déshonneur et scandale grave, si une jeune fille devait être soupçonnée de mener une mauvaise vie parce qu’elle n’approcherait pas de la sainte table, ou si un prêtre devait scandaliser le public en ne célébrant pas la messe de paroisse. On suppose la vraie contrition.

3° On ne doit pas exiger la séparation quand elle est impossible, par exemple lorsque c’est une fille ou un fils de famille qui commet le péché avec un domestique ou une servante de la maison paternelle. On éprouve d’abord ceux qui sont dans ce cas, en différant l’absolution, et s’ils éloignent l’occasion d’une faute prochaine et qu’on juge qu’ils ont le repentir sincère du péché, on devra leur donner l’absolution.

4° Lorsque deux personnes vivant secrètement en concubinage, ou seulement soupçonnées d’impudicité, ne peuvent se séparer sans grave danger de déshonneur ou de scandale, il faut faire de grands efforts pour les amener à résipiscence [« reconnaissance de sa faute avec amendement »], d’abord en refusant, ensuite en donnant l’absolution s’ils persévèrent dans leur résolution. Billuart, t. 13, p. 352, dit que, dans ce cas, il ne voudrait condamner ni le pénitent, ni le confesseur. Je ne serai pas plus rigoureux que lui.

La Prostitution.


La prostitution est un métier ou un acte : comme métier, c’est la condition d’une femme prête à recevoir le premier venu et ordinairement pour de l’argent ; comme fait, c’est l’union charnelle d’un homme avec une telle femme, ou d’une telle femme avec l’homme qui se présente pour forniquer.

Il est certain que la femme qui se livre à la prostitution commet un plus grave péché que celle qui se livre à la simple fornication, ou même que la concubine, à cause de sa disposition d’esprit, du scandale et du préjudice causé à la propagation de l’espèce. Aussi, les courtisanes ont-elles toujours été regardées comme la lie et l’opprobre du genre humain. Il ne suffit donc pas qu’une courtisane déclare en confession le nombre et la nature de ses fornications, elle doit déclarer son état de courtisane [son état de prostituée].

Cependant, Sylvius, Billuart, Dens, et d’autres théologiens enseignent comme très probable que l’homme qui a forniqué avec une courtisane n’est pas tenu de déclarer cette circonstance, parce que toutes choses égales par ailleurs, cette fornication, à leurs yeux, ne constitue pas une faute plus grave.

[Sur ce point, nous pensons que l'homme qui a eu recours a une prostituée, doit, lors de sa confession au prêtre, préciser ce fait et non pas seulement dire qu'il a forniqué. Chaque client(e) cause une souffrance supplémentaire à la prostituée ou à l’homme prostitué et il y a scandale quand le ou la prostituée vend publiquement ses charmes] (…).


Faut-il tolérer la prostitution ? (...)

[Beaucoup de théologiens soutiennent que l’expérience démontre que] la tolérance de la prostitution est une occasion de ruine pour beaucoup de jeunes gens, en excitant les flammes de la passion, et qu’ainsi les péchés de luxure se multiplient au lieu de diminuer. Voy. Concina, T. 15, p. 238, et Saint Alphonse de Liguori, L. 3, n° 434.

[Vingt ans d'expérience en tant que confesseur, dès 1728, ont permis à Saint Alphonse de Liguori de constater que la prostitution incitait ceux qui y avait recours à commettre toujours plus de péchés sexuels, cf. sa Théologie Morale] (…).

LE STUPRE – LE DÉPUCELAGE ILLICITE

On appelle généralement stupre toute union charnelle illicite : Ainsi, dans le Lévitique 21, 9, et dans les Nombres 5, 13, l’union charnelle de la fille d’un prêtre, à l’époque dont il est question, les prêtres se mariaient et avaient une famille, et l’adultère sont qualifiées de la même manière. (...)

Le stupre, cependant, en tant que crime d’une nature particulière, est qualifié par beaucoup de théologiens, violence, et mieux, par d’autre, défloration illicite d’une vierge.

Par le mot vierge, on n’entend pas ici une personne qui n’a jamais péché contre la chasteté, mais celle qui a conservé l’intégrité de la chair, ou mieux ce qu’on appelle — le sceau de la virginité — et qui est aux yeux du monde d’un prix inestimable.

Il est certain que la défloration violente d’une vierge, outre l’offense à la chasteté, revêtant une grave malice et une grande injustice, il est nécessaire de préciser le cas dans la confession. Quelle est, en effet, la jeune fille honnête qui n’aimerait mieux perdre une somme d’argent que d’être ainsi déflorée ?

S’il arrivait qu’un homme fût entraîné, par violence, dans le crime, par des femmes perdues de mœurs, ce serait un stupre ou quelque chose de semblable qu’il faudrait certainement déclarer en confession. Mais, le cas étant à peine possible, nous parlerons seulement du stupre de la jeune fille. [En réalité, le viol d’un homme par une femme est possible.]

Par le mot violence, on entend non seulement la violence physique, mais encore la violence morale, telle que la crainte, la fraude, les prières importunes, les grandes promesses, les caresses, les attouchements et tout ce qu’un homme rusé sait mettre en œuvre pour déterminer une jeune fille inexpérimenté à commettre le péché.

Les théologiens, cependant, ne sont pas d’accord sur le point de savoir si le stupre d’une jeune fille vierge consentant librement à sa défloration est un péché spécial de luxure différent de la fornication simple : D. Soto, Sanchez, Lessius, Saint Liguori et plusieurs autres disent non ; ils avouent cependant, que cette fornication est un péché d’une nature spéciale, à cause du déshonneur qui en résulte, du chagrin des parents, des rixes qu’elle peut entraîner, et de l’odieux et du scandale qui en résulte.

Le plus grand nombre des théologiens, et en particulier Saint Thomas, Saint Bonaventure, Sylvius, Collet, Billuart, Dens, disent qu’à leur avis elle a une malice spéciale opposée à la chasteté et ils appuient leur décision par les raisons suivantes :

1° Elle outrage les parents de la jeune fille sous la sauvegarde desquels avait été placée cette intégrité ;

2° En commettant cette faute, la jeune fille s’expose au danger évident de ne pas trouver à se marier, et ainsi elle pèche contre la prudence ;

3° Elle entre dans la voie de la prostitution d’où la détournait la crainte de perdre le sceau de la virginité ; ce sont les paroles de saint Thomas, 2a 2ae q. 154, art. 6 ;

4° Les péchés se spécifient par opposition à la vertu contraire : Or, la virginité est une vertu spéciale, et l’intégrité de la chair est un bien spécialement attaché à cette vertu.

Ces dernières raisons ne sont détruites ni par le consentement de la jeune fille ni par celui des parents : ce qui réduit à néant la raison fondamentale des défenseurs de l’autre système et qui est basée sur cet axiome partout admis : On ne saurait faire tort à celui qui sait et qui consent. En effet, il est nécessaire que celui qui sait et qui consent ait la faculté de céder son droit ; or, dans l’ordre, la jeune fille n’a pas le droit de commettre une faute contraire à la virginité. D’ailleurs le péché dont il s’agit ne forme pas une espèce à part, à cause du déshonneur ou de l’injustice qui en résulte, mais à cause d’un désordre spécial, parce qu’il est en opposition avec une vertu particulière.

Donc le stupre, même volontaire, est un péché spécial de luxure, et comme le Concile de Trente, Session 14, Canon 7, a posé en principe qu’il est nécessaire, d’après le droit divin, de déclarer en confession les circonstances qui changent l’espèce du péché, il se présente cette autre question qui ressort d’une pratique continuelle, à savoir si ceux qui sont volontairement coupables de stupre, soit de fait, soit par désirs, soit par délectation, sont tenus de déclarer la circonstance de virginité. Les théologiens se prononcent, en général, pour l’affirmative, et regardent cette nécessité comme une conséquence du principe admis.

L’ ADULTÈRE


L’adultère, comme son nom l’indique, dit St Thomas, 2a 2ae, q. 154, art. 8, consiste à entrer dans le lit d’autrui. Il peut être commis de trois manières :

1° Entre un homme marié et une femme libre ;

2° Entre un homme libre et une femme mariée ;

3° Entre un homme marié et la femme d’un autre ;


L’adultère, dans ce triple cas, est un péché de luxure d’une nature spéciale et certainement très grave, ainsi que l’enseignent l’Écriture Sainte, les saints Pères, la pratique de l’Église, le consentement des peuples et la raison.


1° L’Écriture Sainte, livre du Deutéronome, 22, 22 : Si un homme a dormi avec la femme d’un autre, que l’homme et la femme adultères soient mis à mort et vous ferez disparaître un scandale dans Israël. Dans les versets précédents, une semblable punition n’est pas appliquée à la fornication, qui est cependant déclarée une action mauvaise. Dans beaucoup d’autres passages, l’Écriture distingue les fornicateurs des adultères et nous les montre comme dignes des peines les plus graves. Par exemple dans la 1ère lettre de saint Paul aux Corinthiens 6, 9 : Ne vous y trompez pas, ni les fornicateurs… ni les adultères ne posséderont pas le royaume de Dieu.

2° Les Saints Pères [les Pères de l’Église] sont unanimes pour enseigner que l’adultère est un grave péché et différent des autres modes de fornication.

3° L’Église, en décrétant les peines canoniques, a décidé qu’il devait en être appliqué de bien plus graves aux adultères qu’aux simples fornicateurs.

4° Le consentement des peuples : On voit, par l’histoire de toutes les nations, que l’adultère a toujours été regardé comme une grave faute et distincte de la simple fornication.

Ainsi l’ont décidé les plus célèbres législateurs, comme Solon chez les Grecs, Romulus à Rome, et les auteurs de notre Code pénal (…).

5° Enfin, par la raison : car, outre la malice qu’il ajoute à la fornication, l’adultère a pour graves conséquences la rupture à la foi conjugale [la promesse conjugale] et le trouble des familles, d’où il résulte une grave injustice.

Il suit de là que l’acte sexuel entre un homme marié et une femme libre, constitue un péché de luxure d’une gravité spéciale ; mais l’acte sexuel est beaucoup plus grave, s’il a lieu entre un homme libre et une femme mariée, à cause du danger d’introduire des étrangers [un ou plusieurs enfants adultérins] dans une famille. Il est encore plus énorme si l’acte sexuel a lieu entre deux personnes mariées, parce qu’il en résulte un double adultère. Ces circonstances doivent donc être dévoilées dans la confession.


[Si le conjoint approuve l’Adultère ?]

On demande si la femme qui se livre au coït avec un autre homme mais avec l’accord de son mari, commet un adultère ?

Réponse : quelques [théologiens] probabilistes se sont prononcés pour la négative ; ils ont au moins prétendu que, dans ce cas, il n’était pas nécessaire de déclarer, en confession, la circonstance d’adultère. Mais Innocent XI a condamné la proposition suivante : L’union charnelle avec une femme mariée, du consentement du mari, ne constitue pas un adultère ; il suffit donc de dire, en confession, que l’on a forniqué.

Cette décision du Souverain Pontife est basée sur une raison évidente : en effet, le mari, par la force même du contrat et de la raison qui a présidé à l’institution du mariage, a le droit de [s’unir à] sa femme [par le coït], mais il ne peut ni la céder, ni la prêter, ni la louer à un autre [homme], sous peine de pécher contre l’essence du mariage ; son consentement ne peut donc rien enlever à la malice de l’adultère. Le cas est semblable à celui d’un clerc [un membre du clergé] qui ne peut valablement renoncer au privilège de la loi canonique qui prononce l’excommunication contre celui qui le frapperait injustement, parce que le privilège est attaché à la cléricature elle-même. [Le canon 1370 du Code de Droit Canon de 1983 ne reprend pas cette excommunication]. Mais le mari, dans ce cas, est censé avoir renoncé à l’indemnité qui lui serait due, de même qu’à la réparation de l’injure qu’il a subie.


[Acte sexuel avec le ou la fiancé(e) d’un(e) autre]

Le commerce charnel avec une personne fiancée à un autre ou de la personne fiancée avec une personne libre n’est pas, à proprement parler, un adultère, parce qu’il ne consiste pas à entrer dans le lit d’un autre ; c’est cependant un péché d’injustice d’une nature spéciale que l’on doit déclarer en confession, à cause du lien que les fiançailles ont commencé d’établir entre deux personnes de sexe différent.

L’INCESTE

L’inceste est l’union charnelle entre parents, par consanguinité, ou par alliance, aux degrés prohibés.

On doit certes, naturellement, le respect à ses parents, et par conséquent, à ceux qui leur sont unis par des liens rapprochés du sang ou de l’affinité. C’est pourquoi l’union illicite avec eux revêt une double malice dont l’une est opposée à la chasteté et l’autre au respect que l’on doit à ses parents, soit par consanguinité, soit par alliance. Aussi, ce péché a-t-il toujours été regardé comme une espèce particulière de luxure et d’ailleurs très grave. Dans le Lévitique, chapitre 20, il est puni de la peine de mort. Saint Paul, 1ère lettre aux Corinthiens 5, 1, nous dit : On n'entend parler que d'une impudicité commise parmi vous et d'une impudicité telle qu'il ne s'en rencontre pas de semblable même chez les païens, c'est au point que quelqu'un a la femme de son père. Voilà pourquoi ce genre d’unions inspire plus d’horreurs que la simple fornication. (…)

Saint Alphonse de Liguori, Théologie Morale, livre 6, N°470-471. (...)

L’union charnelle entre personnes qui ne peuvent contracter mariage pour cause d’empêchement d’honnêteté publique, se rapporte à l’inceste.

LE SACRILÈGE

Le sacrilège, en tant que péché de luxure, est la profanation d’une chose sacrée par l’acte sexuel. Il constitue, sans aucun doute, une espèce de luxure à part, car, outre le péché contre la chasteté, il renferme évidemment quelque chose de contraire au respect dû à Dieu.

Par chose sacrée, on entend : une personne consacrée à Dieu, un lieu destiné au culte, et autres objets spécialement consacrés.


1° Une personne est consacrée à Dieu par un vœu solennel de profession religieuse, ou par les ordres sacrés ou par le vœu simple de chasteté. Celui donc qui est ainsi consacré à Dieu est coupable de sacrilège lorsqu’il commet extérieurement ou intérieurement, un péché contre la chasteté. Il en est de même de celui qui pèche avec une telle personne ou qui désire la posséder [sexuellement]. Si les deux personnes sont consacrées à Dieu, il en résulte un double sacrilège parce que l’obligation religieuse est doublement violée. (…) Celui qui, par ses conseils, persuasion, discours déshonnêtes ou mauvais exemples, induit une personne consacrée à Dieu dans le péché contre la chasteté, est coupable de sacrilège, bien qu’il ne commette pas lui-même avec elle le péché de luxure ; car alors, suivant Pierre DENS, théologien belge (+1775), tome 4, p. 418 [la violation du vœu d’autrui doit lui être imputée comme s’il l’avait causée lui-même par un acte de scandale [scandale au sens de croche-pied pour faire tomber l’autre et non au sens de « fait qui émeut l’opinion publique »].


2° Un lieu consacré au culte ou lieu sacré : On entend par lieu sacré celui que l’autorité publique a destiné à la célébration des offices divins ou à la sépulture des fidèles ; tels sont les églises et les cimetières bénits.

Sous cette dénomination, on comprend tout l’intérieur des églises, comme chapelles, confessionnaux, tribunes, etc., mais non les parties extérieures comme les murs, le toit, les degrés qui précèdent les portes, les clochers qui ne tiennent ni à l’Église ni au cimetière, les chœurs des moines séparés de l’Église. On en excepte ordinairement les sacristies, quoique quelques théologiens soient d’une opinion contraire. (...)

Tout acte sexuel accompli volontairement, même d’une manière cachée, dans un lieu sacré, entraîne la malice du sacrilège, attendu, suivant l’opinion générale, que c’est une irrévérence envers le lieu saint et envers Dieu. (…)

Les péchés intérieurs contre la chasteté n’entraînent pas de malice spéciale par la circonstance du lieu sacré, à moins que l’on n’ait l’intention de les accomplir dans ce lieu ; attendu qu’en dehors de cette intention, il ne peut en résulter d’insulte au lieu sacré. Dens, t. 4, p. 261.


L’union charnelle, même légitime, entre époux, accomplie sans nécessité dans le lieu sacré, entraîne la malice du sacrilège ; les auteurs s’accordent généralement sur ce point Dist 68, c. 3. Si, cependant, cet acte est accompli dans le lieu sacré par pure nécessité comme lorsque deux époux y sont détenus en temps de guerre, et qu’ils sont en danger prochain d’incontinence [danger de commettre un péché sexuel] s’ils ne pratiquent pas le coït, le lieu n’est pas souillé et les époux ne pèchent pas, disent un grand nombre de théologiens, car l’Église n’est pas censée prohiber un acte en soi licite dans une pareille circonstance.

Mais l’opinion la plus ordinaire, et nous la partageons, est que l’union charnelle entre époux est, dans ce cas, illicite et sacrilège, parce qu’il est impossible que la nécessité soit telle que l’Église fléchisse sur la sévérité d’une loi qui a eu pour but le respect dû à Dieu. Chacun d’ailleurs, par la prière, le jeûne et autres moyens, peut calmer les aiguillons de la chair, comme il serait tenu de le faire si sa moitié est absente, malade ou décédée. C’est cette seule opinion qu’il faut admettre dans la pratique. Voir Billuart, De Temperantia, art. 8 et St Alphonse de Liguori, livre 4, n° 458.


3° Par choses sacrées on entend tous les objets, autres que personnes et lieux, qui sont consacrés au culte divin, comme les ornements liturgiques et les vases sacrés [calices, ciboires, patènes]. Il est certain que c’est un horrible sacrilège d’abuser de ces choses pour commettre des actes honteux, comme de se servir superstitieusement de l’eau bénite, des saintes huiles ou de l’Eucharistie dans un but de luxure (…).

DES PRÊTRES OU CONSACRÉ(E)S QUI EXCITENT A DES ACTIONS HONTEUSES

Tous ceux qui sont animés de l’amour de Dieu et qui ont souci de l’honneur de l’Église devraient être saisis de douleur en entendant dire qu’il se trouve des clercs, et qui plus est, des prêtres voués au service de l’autel, qui se vautrent d’une façon indigne ; qui célèbrent les redoutables mystères et tiennent dans leurs mains l’agneau immaculé, pendant qu’ils brûlent de flammes impures et se souillent de honte et d’infamie ; qui portent la mort dans les âmes dont le salut leur est confié, en faisant tourner à leur ruine le divin ministère dont ils sont revêtus. Quel est celui qui, voyant une pareille abomination dans un lieu saint, résistera à l’horreur qu’elle inspire et n’essaiera pas de l’en extirper par tous les moyens ?

Plusieurs souverains pontifes ont ordonné aux pénitents que leurs confesseurs porteraient à des actions déshonnêtes, de les dénoncer au tribunal de l’inquisition ou aux évêques du lieu : nous citerons Paul IV, 16 avril 1561 ; Pie IV, 6 avril 1564 ; Clément VIII, 3 décembre 1592 et Paul V, 1608, pour le royaume d’Espagne, du Portugal, etc.

Par sa constitution du 30 août 1622, Grégoire XV étendit cette obligation à tous les fidèles : Il ordonna, en effet, de dénoncer les prêtres qui, soit en confession, soit dans le lieu qui lui est destiné, en entendant la confession ou feignant de l’entendre, exciteraient leurs pénitents à des actions honteuses, ou leur tiendraient des discours déshonnêtes etc. Il ordonna, en outre, aux confesseurs, d’avertir leurs pénitents de l’obligation de faire cette dénonciation. Alexandre VII déclara, le 8 juillet 1660, que le pénitent était tenu de faire la dénonciation sans avoir, au préalable, employé les réprimandes fraternelles ni autres avertissements, et le 24 septembre 1665, il condamna deux propositions qui admettaient la doctrine opposée. En 1707 et 1727, la Congrégation du Saint-Office répondit dans le même sens.

Enfin, Benoît XIV, par sa constitution, le Sacrement de Pénitence du 1er juin 1741, ordonna :

1° De dénoncer et de punir, selon les circonstances, tous ceux qui, en confession ou à l’occasion de la confession, par paroles, signes, mouvements, attouchements, écrits à lire pendant ou après la confession, auraient excité à des actions honteuses ou tenu des propos déshonnêtes.

2° D’avertir les prêtres chargés d’entendre les confessions, qu’ils sont tenus d’exiger de leurs pénitents la dénonciation de ceux qui, de quelque façon que ce soit, les auraient excités à des actions honteuses.

3° Il défendit de dénoncer, comme coupables, les confesseurs innocents ou de les faire dénoncer par d’autres, et se réserva, pour lui et ses successeurs, le cas d’une si exécrable turpitude, à moins que le coupable ne fût à l’article de la mort.

4° Il déclara que les prêtres qui se seraient souillés d’un crime aussi infâme ne pourraient jamais absoudre leurs complices, même en temps de jubilé, à moins que ce ne fût à l’article de la mort, et à défaut d’autre prêtre, et prononça l’excommunication majeure réservée au Saint-Siège contre celui qui oserait le faire. (...)

[Code de droit canon de 1983, canon 977 : en dehors du cas de danger de mort, l’absolution du complice d’un péché contre le sixième commandement du Décalogue est invalide.]


Celui qui sait qu’un prêtre ou un clerc commet des actions honteuses ou excite à les commettre, est tenu, par la loi naturelle, de le dénoncer à l’évêque ou au vicaire général.

[Il faut également informer le Nonce apostolique, contact@nonciature.fr, et la Congrégation du clergé au Vatican (clerus.va, la congrégation ou Dicastère pour le clergé, peut-être contactée sur facebook et twitterou par lettre simple adressée à Rome, Cité du Vatican, DICASTERO PER IL CLERO), pour être sur que l’évêque ne puisse pas enterrer l’affaire ou que le prêtre ne puisse pas devenir évêque. Si le prêtre commet des actions honteuses envers des moins de 18 ans, il faut aussi écrire au Procureur de la République de son département. Pas besoin de timbre postal, la lettre arrivera quand même. Adresse : Monsieur le Procureur de la République, mettre la ville-préfecture du département et le code postal.]


Tous les théologiens enseignent, en traitant de la correction fraternelle3, que le crime secret doit être dénoncé, soit dans le but de corriger le coupable, soit dans celui d’éloigner le mal qui menace le public et les particuliers ; ainsi on doit dénoncer, sans avertissement préalable, les hérétiques qui propagent l’erreur, les voleurs, les maraudeurs, les traîtres à la patrie, les empoisonneurs, les pharmaciens qui vendent des substances vénéneuses, les faux monnayeurs, les corrupteurs de garçons et de filles, ceux qui trament la mort contre quelqu’un, etc. Or, il est indubitable que la conduite d’un clerc qui s’adonne aux actions honteuses prépare sa ruine et est une source très pernicieuse de déshonneur pour les âmes et pour la religion.

Aussi l’Église, avant l’ordination, annonce-t-elle aux assistants, par la voix du pontife [l’évêque du diocèse], que si quelqu’un a des griefs contre les ordinands [ceux qui vont devenir prêtres], il doit, de par Dieu et pour Dieu, se montrer et le dire en toute assurance (Pontifical Romain). C’est pour cela que dans plusieurs diocèses les noms des jeunes gens qui doivent être ordonnés sont publiés à la messe, comme les bans de mariage, afin que ceux qui connaissent quelque empêchement à l’ordination les révèlent. Donc, et à plus forte raison, ceux qui savent qu’un prêtre ou un clerc commet des actions honteuses ou excite à la débauche, doivent le faire connaître. Cette doctrine est expressément enseignée par Saint Thomas d’Aquin [dans son Commentaire des Sentences de Pierre Lombard] lorsqu’il dit dans la Sentence IV, tit. 19, q. 2, art. 3 : Mais si ce péché déteint sur les autres, il faut le signaler au prélat afin qu’il mette en garde son troupeau. (...)

Un prêtre corrompu et corrupteur est plutôt un ministre du démon que du Christ. (...)

La révélation peut être faite avec prudence pour que le complice ne soit pas connu. (...) Si le pénitent sait écrire, il doit mettre sur une feuille de papier, le nom seulement de celui qu’il dénonce et remettre le papier soigneusement cacheté à son confesseur ; celui-ci le transmet à l’évêque ou au vicaire général avec une lettre dans laquelle il expose le fait et donne son opinion sur la sincérité de la personne qui a fait la dénonciation ; il doit avoir bien soin de ne pas faire connaître cette dernière au supérieur et lui-même ne doit pas s’enquérir du nom du prêtre corrompu. (…)




CHAPITRE 2 : LA LUXURE CONSOMMÉE CONTRE NATURE

(...)

LA MASTURBATION


La masturbation, qu'on appelle aussi plaisirs voluptueux ou incontinence secrète, consiste dans [la recherche, seul ou avec une autre personne, du plaisir sexuel par excitation mécanique, ordinairement par attouchement manuel. Dans le cas des hommes, la masturbation va souvent jusqu’à] l'effusion du sperme en dehors de toute union charnelle. (…)

1°/ La masturbation simple ou qualifiée;

2°/ L’orgasme volontaire ou involontaire;

3°/ La masturbation volontaire en soi ou volontaire dans sa cause.


1°/ La Masturbation simple ou qualifiée


La masturbation est simple quand il ne vient pas s'y ajouter une malice supplémentaire, comme lorsque quelqu'un, dégagé de tout lien avec un homme ou avec une femme, trouve son plaisir dans la masturbation. On la dit « qualifiée » lorsqu'à sa propre malice vient s'en ajouter une autre, soit de la part :

a) de l'objet auquel on pense [pendant la masturbation]

b) de celui sur lequel on pratique,

c) de celui qui pratique la masturbation.


a) La masturbation revêt la malice de l'adultère, de l'inceste, du stupre, du sacrilège, de la bestialité ou de la sodomie selon que celui qui s'y adonne pense à une femme mariée, à sa parente, [à une personne vierge, à une personne consacrée à Dieu, ou à une personne du même sexe].

b) De la part de celui sur lequel on pratique la masturbation, s'il est marié ou consacré à Dieu par un vœu ou par les ordres sacrés.

c) De la part de celui qui pratique la masturbation, si, par exemple, c'est un religieux ou un prêtre.

Toutes ces circonstances doivent nécessairement être dévoilées en confession, parce qu'elles changent l'espèce du péché.


2°/ L’orgasme volontaire ou involontaire


L’orgasme volontaire est celui qu'on veut directement ou dont on recherche volontairement la cause. Il est involontaire lorsqu'il se produit sans la coopération de la volonté, soit à l'état de veille, soit pendant le sommeil.

Comme l’orgasme tout à fait involontaire ne peut pas être un péché, nous n'en parlerons pas ici, en tant que péché. C'est pourquoi nous traiterons :


1°/ De l’orgasme volontaire en soi ;

2°/ De l’orgasme volontaire dans sa cause ;

3°/ De l’orgasme nocturne ;

4°/ Des mouvements désordonnés [érections, excitations] ;

5°/ De la conduite des confesseurs à l'égard de ceux qui sont dans l'habitude de se livrer à la masturbation.


1°/ L’orgasme volontaire en soi

Plusieurs [théologiens] laxistes ont prétendu, avec Caramuel, que la masturbation n'était pas défendue par la loi naturelle ; que l'éjection du sperme pouvait être comparée à un excès de sang, de lait, d'urine et de sueur, et que, par conséquent, si ce n'étaient les prohibitions de la loi positive, il serait permis de la provoquer et que même ce serait une nécessité toutes les fois que la nature le demanderait. En cela, ils sont contraires à l'opinion de tous les théologiens.


Propositions - La masturbation considérée en elle-même est un grave péché contre nature [= anti-procréation]

Cette proposition est conforme à l'Écriture Sainte, à l'autorité d'Innocent XI, à l'opinion unanime des théologiens et à la raison.

On lit dans la 1ère lettre [de saint Paul] aux Corinthiens [6, 9-10] : 9 Ne savez-vous pas que les injustes ne posséderont pas le royaume de Dieu ? Ne vous y trompez pas : ni les impudiques, ni les idolâtres, ni les adultères, 10 ni les efféminés, ni les infâmes, ni les voleurs, ni les avares, ni les ivrognes, ni les médisants, ni les rapaces, ne posséderont le royaume de Dieu. [= Ils iront en enfer.]

Et dans la lettre [de saint Paul] aux Galates [5, 19-21]: 19 Or les œuvres de la chair sont manifestes : c’est la fornication, l’impureté, l’impudicité, la luxure, 20 l’idolâtrie, les maléfices, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les animosités, les rixes, les dissensions, les factions, 21 l’envie, les meurtres, l’ivrognerie, les débauches, et les choses semblables, dont je vous prédis, comme je l’ai déjà fait, que ceux qui les commettent ne seront pas héritiers du royaume de Dieu.


Par ceux qui se livrent aux plaisirs voluptueux, tout le monde entend ceux qui se masturbent ou qui se font masturber par d'autres4. Cette action infâme doit certainement être mise au rang des impuretés et des impudicités. Or l'apôtre, déclarant que ces péchés excluent du royaume céleste, ne les donne pas comme transgressant le droit positif, mais comme outrageant la nature.

Innocent XI a condamné le 2 mars 1679 la proposition suivante de Caramuel : Les plaisirs voluptueux ne sont pas défendus par le droit naturel, et, si Dieu ne les avait pas interdits, ils seraient souvent bons et même obligatoires.

Les théologiens sont unanimes pour enseigner, contre quelques probabilistes, que la masturbation est un péché contre nature [= contraire à la procréation].

Par la raison : il a été certainement dans l'esprit du Créateur d'affecter le sperme humain et l'acte sexuel tout entier à la procréation et à la perpétuité de l'espèce. S'il était permis de se livrer une fois à la masturbation, il n'y aurait pas de raison pour ne pas recommencer, et c'est ce qu'on ne peut pas admettre.

De plus, on est exposé, par le plaisir qui est inséparable de la masturbation volontaire, au danger d'en contracter l'habitude ; et nous établirons plus loin que c'est une grave faute de se livrer à une pareille habitude, à cause des fâcheux résultats qu'elle entraîne. L’orgasme ou l’éjaculation, en dehors de l'union naturelle, est donc évidemment un acte contre nature comme les païens eux-mêmes l’ont reconnu.

D'où on doit conclure qu'il n'est jamais permis de causer directement une éjaculation ou un orgasme, même quand il s'agit de conserver la santé ou la vie, car, pratiquée même dans ce but, la fornication est un acte illicite, et la comparaison faite par Caramuel du sperme humaine avec le sang, le lait, l'urine et la sueur n'a pas de valeur, puisque la destination de l'une est tout à fait différente de celle des autres. On ne doit pas non plus se fonder sur ce qu'il est quelquefois permis de pratiquer une saignée, ou d'amputer un membre et même les vases spermatiques, car le sang et les membres sont subordonnés à la santé de l'individu, et peuvent être enlevés pour la conserver. le sperme, au contraire, n'a pas été créée en faveur de l'individu, mais bien pour la conservation de l'espèce (…).

[Instruction Donum Vitae sur le Respect de la Vie Naissante et la Dignité de la Procréation, datée du 22 février 1987, cf. vatican.va : pour les mêmes raisons, le « simple case », c’est à dire une procédure de FIVETE homologue purifiée de toute compromission avec la pratique abortive de la destruction d’embryons et avec la masturbation, demeure une technique moralement illicite, parce qu’elle prive la procréation humaine de la dignité qui lui est propre et connaturelle.]


2°/ L’orgasme volontaire dans sa cause

On distingue ordinairement deux causes d’orgasme : une [cause] prochaine et une [cause] éloignée. Les causes prochaines tendent [à causer] par elles-mêmes le plaisir sexuel, comme les attouchements des parties génitales sur soi ou sur autrui, les regards que l'on porte sur elles, les paroles obscènes ou amoureuses et les pensées honteuses.

Les causes éloignées influent d'une manière moins directe sur la production du plaisir sexuel ; ce sont les excès dans le boire et le manger, l'étude des questions vénériennes, la confession5 etc. Ces causes peuvent être licites, véniellement ou mortellement mauvaises; aussi peuvent-elles, de près ou de loin, influer sur le plaisir sexuel. (...)


[Remarque pour les caractères inquiets ou scrupuleux]

[Beaucoup de personnes tombent dans une grande confusion d'idées et sont tourmentées de scrupules parce qu'elles confondent sentir et consentir, penser à une chose mauvaise et se délecter volontairement dans cette chose : elles doivent faire des études afin de sortir triomphantes de ces ténèbres et de ces anxiétés.

Ceux qui aiment sincèrement la chasteté peuvent demeurer certains qu'ils n'ont pas consenti aux mouvements [ou pensées] de concupiscence toutes les fois qu'il est resté dans leur esprit confusion ou incertitude ; car s'ils avaient consenti aux dits mouvements [ou pensées], ils auraient remarqué le changement survenu dans leurs résolutions, et ils en auraient gardé le souvenir.

Ceux, au contraire, qui ont la pernicieuse habitude de se livrer [en actes physiques, concrets] aux plaisirs des sens doivent, lorsqu'ils ne sont pas sûrs de s'être prêtés aux mouvements de concupiscence [ou aux pensées], décider qu'ils y ont consenti, car s'ils avaient résisté à leur penchant ils n'auraient pas perdu le souvenir de leurs efforts : et comme les péchés de luxure se multiplient en peu de temps outre mesure, ils peuvent, avec raison, dire avec le prophète pénitent, [le Roi David] : Mes iniquités se sont emparées de moi ..., elles sont plus nombreuses que les cheveux de ma tête, Psaume 39, 13. Cf. Mgr Bouvier, Chapitre 4 : Des Péchés de Luxure non consommée, article 1 : de la délectation morose.] (...)


1° C'est pécher mortellement que de faire, sans nécessité ni utilité, une action licite en soi mais que l'on prévoit devoir entraîner l’éjaculation ou l’orgasme, parce que l'on coopère d'une manière efficace à un résultat mortel, sans excuse légitime.

2° Pèche mortellement, s'il s'expose à donner son consentement au danger prochain, celui qui, pour son propre avantage ou celui d'autrui, fait une action en soi licite, qui, en raison de ses dispositions [personnelles], aurait une influence prochaine sur l’éjaculation ou sur l’orgasme. Tout le monde reconnaît qu'on pèche mortellement en s'exposant à un semblable danger, à moins de graves nécessités.

3° [Le cas des actes à double effets]

En cas de grave nécessité, l'action qui tend à un but légitime ne fournit pas matière à péché, car, dans un cas grave, on peut faire un acte qui produise un double résultat : un bon et un mauvais, à la condition de se proposer le bon et d'éloigner tout consentement au mauvais. Ainsi, ne pèche pas le chirurgien qui, pour guérir une infirmité ou faire un accouchement, touche ou regarde les parties sexuelles d'une femme et qui, à cette occasion, éjacule ou en éprouve un orgasme, pourvu cependant qu'il n'y consente pas, s'exposerait-il même au danger du consentement. Mais il serait dans l'obligation de renoncer à son art s'il tombait fréquemment dans ce danger, car la nécessité de son propre salut l’emporte sur toutes les autres.


4° Ne pèche pas celui qui, pour son utilité ou celle d'autrui, fait une action qu'il prévoit devoir amener l’orgasme, mais qui ne se met pas dans le danger prochain de consentement, car on doit supposer qu'il a la volonté d'éloigner tout résultat mauvais qu'il ne poursuit ni n'approuve. Ainsi pensent saint Thomas et les théologiens en général.

Aussi est-il permis d'étudier, dans un but honnête, les choses sexuelles, d'entendre les confessions de femmes, de converser avec elles d'une manière utile et honnête, de leur rendre visite et de les embrasser à la manière des parents, de monter à cheval, d'user modérément d'un médicament excitant prescrit pour la santé, de donner des soins aux infirmes et de les mettre dans un bain, d'exercer la chirurgie, etc., bien qu'on prévoie que l’orgasme doive s'ensuivre, à la condition de ne pas viser à ce résultat, d'avoir la ferme résolution de ne pas y consentir, et l'espoir de persévérer dans sa résolution.


[Le seuil d’excitabilité a bien changé depuis le XIXème]

Cependant, si pour des causes futiles ou sous de légers prétextes d’utilité, on se portait à des actes influant sur l’orgasme, on devrait s'en abstenir sous peine de pécher véniellement ou mortellement, selon qu'ils influeraient sur l’orgasme d'une manière légère ou grave. Si, par exemple, le café, l'eau-de-vie, le vin pur, etc., sans être utiles à la santé, comme c'est l'ordinaire, vous excitent à la masturbation, vous êtes dans l'obligation de vous en abstenir, sous peine de péché véniel si son influence est seulement probable, et sous peine de péché mortel si, pour des raisons qui vous sont personnelles, cette influence est prochaine et que l'effet en soit comme moralement certain.


5° On pèche mortellement en faisant une action véniellement mauvaise, si elle influe sur le risque de masturbation ou d’orgasme d'une manière prochaine ; cela résulte de ce qui vient d'être dit. Aussi, celui qui est trop sensible aux aiguillons de la chair, qui a un orgasme lorsque ses regards se portent sur certaines parties du corps d’une femme, ou lorsqu’il touche ses mains ou s’il presse ses doigts, en parlant avec elle ou quand il l’embrasse d'une manière honnête mais sans motif, ou lorsqu’il assiste à des bals, etc., celui-là devra s'abstenir de ces actions sous peine de péché mortel.


6° Mais si des péchés véniels en matière de luxure, et à plus forte raison en d'autres matières, influent sur l’orgasme d'une manière seulement éloignée, par exemple, si elle ne se produit que rarement, dans les cas dont il s'agit, la chasteté ne se trouve que véniellement blessée. Quant à savoir si elle serait mortellement blessée, soit dans l’éjaculation elle-même, soit dans sa cause, on peut répondre par une double négation : non, d'abord, lorsqu'il est à supposer qu'il y a absence de consentement actuel ; non, ensuite, dans l'hypothèse, si la cause est légère et influe sur l'acte d'une manière seulement légère. C'est ainsi que, contre un petit nombre, pensent généralement les théologiens avec saint Thomas.


7° Un péché mortel, autre qu'un péché de luxure, la colère et l'ivrognerie, par exemple, qui influe sur l’orgasme d'une manière éloignée, n'est regardé que comme péché véniel de luxure. La raison seule peut faire la part de l'influence. Or, dans ce cas, on la suppose légère. C'est l'opinion de saint Alphonse de Liguori, livre 3 n°484 et beaucoup de théologiens pensent comme lui. On devrait évidemment adopter l'opinion contraire dans le cas où l'on jugerait que le péché, par sa fréquence, influe sur l’orgasme d'une manière prochaine.


3°/ De l’éjaculation ou orgasme nocturne

Par pollution nocturne [éjaculation ou orgasme nocturne], on entend celle qui se produit pendant le sommeil. Si le sommeil est imparfait [on est dans un demi-sommeil], l’éjaculation ou l’orgasme peut être semi-volontaire, et le péché, par conséquent, véniel. L’éjaculation (ou l’orgasme) n'étant nullement volontaire dans le sommeil parfait ne peut entraîner de péché, car, dans ce cas, elle ne peut être mauvaise que dans sa cause.

Il est certain que celui ou celle qui a préparé une cause, dans l'intention de provoquer l’éjaculation ou l’orgasme pendant le sommeil, en prenant certaines positions dans son lit, ou par des attouchements voluptueux, ou par des lectures de romans, [ou par une sorte de méditation lubrique et volontaire avant de dormir] etc., pèche mortellement.

Ce cas excepté, on doit examiner quelle est la cause de l’éjaculation ou l’orgasme nocturne et de quelle manière elle influe sur l’éjaculation ou l’orgasme. Saint Thomas 2a 2ae q.154 art.5 et d'autres théologiens en distinguent trois : une [cause] corporelle, l'autre [cause] spirituelle intrinsèque et la troisième [cause] spirituelle extrinsèque.


1°/ Par cause corporelle, on entend :

1° L'excès de matière séminale dont la nature se dégage par l'écoulement lorsqu'elle est surchargée. [A noter que contrairement à la croyance populaire, les spermatozoïdes ne sont pas stockés dans les testicules mais dans les vésicules séminales qui sont situées derrière la vessie et se déversent dans la prostate.]

2° Les fantômes imprimés sur l'imagination par l'excès même de la matière, ou par toute autre disposition du corps.

3° L'excès dans le boire ou le manger, ou les propriétés trop aphrodisiaques de la nourriture et de la boisson.

4° Les causes diverses qui préparent le flux de la matière, telles que l'équitation, la vue ou le toucher des parties honteuses.

5° (...) l'irritabilité des nerfs, les attouchements pendant les rêves, la souplesse du lit, etc.

6° (…) l'habitude qu'on a contractée de se masturber (…).


2°/ La cause spirituelle intrinsèque, appelée par saint Thomas animale parce qu'elle réside dans l'âme, est la pensée, avant le sommeil, d'une chose honteuse : par là on entend les désirs, la délectation morose, les mauvaises conversations, la fréquentation des femmes, l'assistance aux spectacles et aux bals, la lecture des livres obscènes, etc.


3°/ D'après saint Thomas et tous les autres docteurs, la cause spirituelle extrinsèque est une opération par laquelle le démon provoque l’orgasme en frappant l'imagination et en provoquant une forte excitation sexuelle. Ces orgasmes ne peuvent en aucune manière être imputées à péché [être comptés comme péché] à ceux qui les éprouvent, s'il n'y a pas de consentement actuel, puisqu'ils procèdent d'une cause étrangère à la volonté.

Il n'y a pas non plus de péché dans les orgasmes provenant d'un excès d'humeurs spermatiques, de la faiblesse des organes génitaux, d'un état nerveux accidentel, et même d'une habitude de masturbation suffisamment délaissée, car, dans l'hypothèse, ces plaisirs ou ces orgasmes n'ont pas leur source dans une volonté libre et sont privées de tout consentement.

Mais, pour les autres plaisirs sexuels ou orgasmes, il faut étudier soigneusement si leur cause est licite, véniellement ou mortellement mauvaise, prochaine ou éloignée; ainsi on jugera prudemment s'il y a péché et quelle en est la gravité. Pour excuser une action, même licite, qui porte d'une manière prochaine aux plaisirs sexuels, il ne suffit pas qu'elle soit utile, il faut qu'elle soit nécessaire; mais s'il s'agit d'un danger éloigné, un motif raisonnable suffit.


On demande : 1° Ce que doit faire celui qui, en s'éveillant, s'aperçoit qu'il éprouve l'éjaculation ou l'orgasme ? [= qu’il ou elle est en train de jouir.]

Réponse. Il doit élever son esprit vers Dieu, l'invoquer, faire le signe de la croix, s'abstenir de provoquer l'écoulement du sperme, renoncer au plaisir voluptueux. Pourvu qu'il agisse ainsi, il peut se considérer comme exempt de péché, et il n'est pas tenu de contenir l'impétuosité de la nature, car déjà la sécrétion des humeurs s'est faite dans les vases spermatiques. (...)


On demande : 2° S'il est permis de se réjouir de l’éjaculation (ou de l’orgasme) lorsqu'elle (ou il) se produit dégagée de tout péché, en tant qu'elle décharge la nature, ou [s'il est permis] de la désirer à ce point de vue.

Réponse. Les auteurs enseignent généralement qu'il est permis de se réjouir des bons effets de l’éjaculation (ou de l’orgasme) involontaire, qui se produit soit pendant le sommeil, soit pendant la veille. Car, sous ce rapport, elle opère un bon résultat. Ils affirment plus généralement et d'une manière plus probable, et par les mêmes motifs, qu'il est permis de se réjouir des bons résultats que produira l’éjaculation ou l’orgasme.

Mais est-il permis de prendre plaisir à l’éjaculation (ou à l’orgasme) que l'on éprouve ou que l'on éprouvera, en dehors de toute participation de la volonté, et en la considérant comme soulagement de la nature ?

Un grand nombre de théologiens se prononcent pour l'affirmative, par la raison qu'à ce point de vue elle n'est défendue par aucune loi. Ainsi dit saint Thomas Commentaire du 4ème livre des Sentences, titre 9, q.1. art.1 : On ne croit pas qu'elle soit un péché, si elle est agréable [l’éjaculation], parce qu'elle décharge ou qu'elle soulage la nature. Remarquez qu'il ne dit pas si l'effet de l’éjaculation ou de l’orgasme est agréable. (...)


On demande : 3° Ce que l’on doit penser de la distillation du sperme ? [Mgr Bouvier parle du liquide transparent produit par les glandes de Cowper : « ces deux petites glandes, de la dimension d’un noyau de cerise, sont placées de chaque côté de l’urètre, sous la prostate. Elles ont pour unique fonction la lubrification de celui-ci. » Dr. Ronald Virag, Le Sexe de l’Homme, p.76, Paris, Albin Michel, 1997.]

Réponse. La distillation est l’écoulement qui se fait goutte à goutte, et sans grave mouvements de concupiscence, d’une semence imparfaite ou autre humeur muqueuse. Si elle se produit sans plaisir sexuel, comme il arrive quelquefois à cause de la faiblesse des organes ou des chatouillements provenant d’un prurit insupportable, il ne faut pas, disent Cajetan et les théologiens en général, s’en occuper plus que de la sueur. Mais elle constitue un péché mortel à cause du danger prochain de plaisir sexuel lorsque, par la volonté, elle se produit en grande quantité ou avec de notables mouvements des esprits génitaux [excitation sexuelle importante]. C’est l’opinion de Sanchez, saint Liguori, etc.

Mais si elle se produit par petites quantités, sans qu’il en résulte plaisir ou notable mouvement des esprits génitaux, lorsque sa cause réside dans la raison et l’utilité, elle est exempte de péché ou, tout au plus, il en résulte un péché véniel. Cela est conforme à ce que nous avons dit sur le plaisir sexuel indirectement voulus.


4°/ Des mouvements désordonnés [érections, excitations] (…)


5°/ De la conduite des confesseurs à l'égard de ceux qui se livrent à la masturbation (...)

[La mauvaise habitude de la masturbation favorise l'endurcissement de cœur, l'hébétement, le dégoût de la vertu et le mépris de la religion. Certains estiment que cela les rend tristes, peu capable d'énergie et de résolution] (...)


Les confesseurs doivent donc apporter toute leur sollicitude à prémunir contre de si grands maux et à arracher à cette infâme habitude ceux qu'ils croiraient en être atteints ou l'avoir contractée. Ils doivent surtout prendre garde, en interrogeant les jeunes gens, et particulièrement les jeunes filles, de ne pas blesser imprudemment leur imagination et de les faire tomber ainsi dans des actions honteuses, comme cela arrive souvent. Il serait de beaucoup préférable de s'exposer au danger de ne pas obtenir une confession entière, que de corrompre les âmes ou de les blesser au détriment de la religion. (...)

Si le pénitent n'est pas encore arrivé à la puberté, il ne doit pas être interrogé sur la masturbation, car il n'est pas probable qu'il l'ait pratiquée (…). Mais s'il est pubère, qu'il ait pratiqué des attouchements impudiques avec d'autres personnes, et surtout qu'il ait couché avec des adolescent(e)s plus âgé(e)s que lui, il est moralement certain qu'il y a eu plaisir sexuel, et il est suffisamment clair que la masturbation a eu lieu.


Le confesseur peut cependant dire avec prudence : Avez-vous ressenti des mouvements dans le corps, (ou dans la chair) ? (...)

[Les Remèdes à la Masturbation]

A la masturbation positivement reconnue, il faut opposer des remèdes convenables : les uns sont physiques et les autres moraux.

Les remèdes physiques peuvent servir à la guérison (...) : ils consistent dans une grande sobriété, un genre de vie bien réglé, l'abstinence d'aliments excitants, de liqueurs spiritueuses (...) [Notons que le manque de sommeil fatigue ce qui dans de nombreux cas fragilise les forces de résistance de la personne face à la tentation], des bains froids [ou douches froides]. (...)

Les remèdes moraux sont surtout la fuite des objets qui ont provoqué les mauvaises idées, la vigilance sur soi-même, la garde des sens, la mortification de la chair, la méditation sur les maux qu'engendre l'habitude de la masturbation, la pensée de la mort, du jugement de Dieu, de l'enfer et de l'éternité, la fuite de l'oisiveté, le silence, la vie solitaire, la prière, la confession fréquente, [l’amour et la lecture de l’Écriture Sainte : je crois me souvenir qu’un saint aurait dit « aime l’Écriture Sainte et tu vaincras l’impureté », des prières pleines d’affection à la Vierge Marie, la dévotion à Saint Raphaël Archange qui a vaincu le démon de l’impureté, Asmodée, dans le livre de Tobie, le 17ème livre de la Bible] etc. (...).


[Désespoir des Confesseurs]

L'exécrable habitude de la masturbation, quand elle est invétérée, jette les confesseurs dans une espèce de désespoir. Il est très difficile de juger prudemment si l'on peut - si l'on doit - admettre aux sacrements de pénitence et d'Eucharistie les pénitents livrés à ce vice. Il est à craindre qu'ils s'éloignent de la confession et deviennent plus mauvais si on les traite sévèrement. Mais si on les accueille avec trop d'indulgence, ils s'endormiront dans la fange du vice.

Il faut donc user d'une très grande prudence et d'un grand zèle, afin que ces malheureux pénitents s'approchent souvent du sacré tribunal de la pénitence [le sacrement de la confession], par exemple toutes les semaines, se repentent de leurs fautes et renouvellent fréquemment le bon propos de ne plus pécher.

Il faut examiner attentivement si les rechutes proviennent de la malice, de l'indolence ou du défaut de bon propos, ou bien de la faiblesse de la chair et de la violence de la tentation.


Dans le premier cas [la malice], on doit différer l'absolution jusqu'à un amendement réel ; mais dans le second [les différents cas de faiblesse], il faut aller au secours des malheureux pénitents qui luttent contre une passion tyrannique et ont la contrition : on doit leur accorder l'absolution et la sainte Eucharistie. Par là, on diminue peu à peu les rechutes et on finit par faire disparaître l'habitude ; tandis qu'au contraire une trop grande sévérité, éloignant les pénitents des sacrements, les jetterait dans le gouffre de la corruption et enlèverait presque tout espoir d'amendement.

En conséquence, ce serait une mesure excessive et dangereuse de remettre à deux mois sans nouvelles rechutes, comme le veulent Juenin, Collet et beaucoup d'autres, cette catégorie de pénitents. Saint Alphonse de Liguori, livre 6 n°463, et plusieurs autres avec lui pensent même que le délai d'un mois est trop long, et que, dans ces cas, l'absolution ne doit pas être différée de plus de huit, dix ou quinze jours, pourvu qu'il y ait des signes de vraie contrition. [Ces lignes ont été écrites avant la magnifique réforme du pape saint Pie X en faveur de la communion fréquente.]

Mais, en règle générale, on ne saurait déterminer le délai : il dépend de la prudence du confesseur, qui le prorogera ou l'abrégera selon qu'il le croira utile à l'amendement du pénitent. Remarquez bien que les pauvres pécheurs qui désirent sincèrement leur salut ne doivent pas être confondus avec les endurcis, ni jetés dans le désespoir par une sévérité hors de saison. Les confesseurs doivent y bien prendre garde et user de la plus grande prudence. Parfois, il faut conseiller le mariage à ceux qui peuvent le contracter comme le remède unique, ou au moins le plus efficace.


[Témoignage d’un autre célibataire : je constate dans ma propre vie que le simple fait de voir une amie femme sur une journée me garantit un apaisement concernant les tentations de luxure pour toute la semaine, et cela quelque soit l’age de la femme : c’est qu’elles possèdent un caractère complémentaire et différent qui rend plus léger le quotidien. Je l’ai expérimenté cette année et l’ai adopté comme une des règles de vie, avec le sport : il faut fréquenter régulièrement des femmes, pas n’importe lesquelles bien sur, il faut si possible que cela soit une amitié mais il ne m’est pas bon de rester cloîtré sans présence féminine.]


On doit user d'une grande circonspection lorsqu'il s'agit de jeunes gens qui doivent faire vœu de continence perpétuelle [ex : prêtres, moines, religieuses]. Ceux qui sont atteints d'un tel vice et se livrent souvent à des masturbations seraient ordinairement disposés au vœu téméraire et imprudent de chasteté ils doivent donc être éloignés de la profession religieuse et, à plus forte raison, de l'état ecclésiastique [diacres, prêtres], à moins qu'ils ne donnent des signes extraordinaires de conversion et que, par une longue épreuve de plusieurs années, ils ne témoignent de la fermeté de leur résolution et de leur persévérance.


LA SODOMIE [Les Actes d’Homosexualité]


[Notre intention est de lutter contre l’homophobie. Nous luttons contre les discours de haine et les discriminations. Nous prônons le respect de toutes les personnes quelque soit leur sexualité et nous attendons que notre liberté de vivre le catholicisme et de le professer soit respectée de la même manière ; même si les normes morales catholiques enseignent que Dieu punit par la damnation éternelle les graves violations des 6ème et 9ème commandements dans le cas où les personnes sont surprises par la mort alors que leur volonté est attachée à approuver ou à commettre ces péchés. Pour l’homosexualité, l’Église catholique invite à vivre une homosexualité platonique, cette invitation n’a pas à être prise comme une agression ou une injustice. Toutes les personnes non mariées, veuves ou séparées, sont appelées à vivre l’abstention de tout acte sexuel de la même manière. Gaëtan Poisson, en France, est un exemple concret de bonheur à travers l’homosexualité platonique.

Informations susceptibles d’intéresser les personnes concernées par l’attraction sexuelle pour le même sexe :

La branche française de COURAGE, apostolat de l’Église catholique

https://www.facebook.com/couragefrancophone/?locale=fr_FR

La Fraternité Aelred (frataelred.free.fr).

En Californie, le psychologue athée Arthur Janov (+2017), pense avoir mis au point une thérapie qui permet aux gens de comprendre les particularités de leur sexualité Cf. Le Cri Primal, Flammarion, Paris, 1975, et Sexualité et Subconscient, Éditions du Rocher, Monaco, 2006. Il existe en France et en Europe, des thérapeutes formés à sa méthode.

Le Blog homopasgay.blogspot.com a disparu, on peut le retrouver sur https://web.archive.org

Gaëtan Poisson, catholique et homosexuel déclaré, affirme être plus heureux dans la continence et la chasteté cf. L'homosexualité au risque de la foi, Le témoignage d'un gay qui défend l'Église, Éditions Téqui, 2020, Paris, France.

https://gaetanpoisson.fr/category/Homosexualite/

https://www.facebook.com/GaetanPoissonPAB/?locale=fr_FR

https://www.librairietequi.com/A-66508-l-homosexualite-au-risque-de-la-foi.aspx ]


Saint Thomas d’Aquin définit ainsi (...) : Accouplement entre deux personnes du même sexe, par exemple d'un homme avec un homme, ou d'une femme avec une femme. Somme Théologique, 2a 2ae q.154 art.11. (…)


[Mgr Bouvier rappelle :

- le châtiment de Sodome dans le 1er livre de la Bible (qui en compte 73) : le livre de la Genèse, chapitre 19 : 1 Les deux anges arrivèrent à Sodome le soir, et Lot était assis à la porte de Sodome. En les voyant, Lot se leva pour aller au-devant d'eux et il se prosterna le visage contre terre, 2 et il dit : Voici, mes seigneurs, entrez, je vous prie, chez votre serviteur pour y passer la nuit, lavez vos pieds, vous vous lèverez de bon matin et vous poursuivrez votre route. Ils répondirent : Non, nous passerons la nuit sur la place. 3 Mais Lot leur fit tant d'instances qu'ils vinrent chez lui et entrèrent dans sa maison. Il leur prépara un festin et fit cuire des pains sans levain, et ils mangèrent. 4 Ils n'étaient pas encore couchés que les hommes de la ville, les hommes de Sodome, entourèrent la maison, depuis les enfants jusqu'aux vieillards, le peuple entier, de tous les bouts de la ville. 5 Ils appelèrent Lot et lui. dirent : Où sont les hommes qui sont entrés chez toi cette nuit ? Fais-les sortir vers nous, pour que nous les connaissions. 6 Lot s'avança vers eux à l'entrée de la maison et, ayant fermé la porte derrière lui, 7 il dit : Non, mes frères, je vous en prie, ne faites pas le mal 8 Voici, j'ai deux filles qui n'ont pas connu d'homme, laissez-moi vous les amener, et vous leur ferez ce qu'il vous plaira. Mais ne faites rien à ces hommes, car c'est pour cela qu'ils sont venus s'abriter sous mon toit. 9 Ils répondirent : Ote-toi de là. Et ils ajoutèrent : Cet individu est venu comme étranger, et il fait le juge Eh bien, nous te ferons plus de mal qu'à eux. Et, repoussant Lot avec violence, ils s'avancèrent pour briser la porte. 10 Les deux hommes étendirent la main et, ayant retiré Lot vers eux dans la maison, ils fermèrent la porte. 11 Et ils frappèrent d'aveuglement les gens qui étaient à l'entrée de la maison, depuis le plus petit jusqu'au plus grand, et ceux-ci se fatiguèrent inutilement à chercher la porte. 12 Les deux hommes dirent à Lot : Qui as-tu encore ici ? Gendres, fils et filles, et qui que ce soit que tu aies dans la ville, fais-les sortir de ce lieu. 13 Car nous allons détruire ce lieu, parce qu'un grand cri s'est élevé de ses habitants devant le Seigneur, et que le Seigneur nous a envoyés pour le détruire. 14 Lot sortit et parla à ses gendres, qui avaient pris ses filles : Levez-vous, leur dit-il, sortez de ce lieu, car le Seigneur va détruire la ville. Mais, aux yeux de ses gendres, il parut plaisanter. 15 Dès l'aube du jour, les anges pressèrent Lot, en disant : Lève-toi, prends ta femme et tes deux filles qui sont ici, afin que tu ne périsses pas dans le châtiment de la ville. 16 Comme il tardait, ces hommes le prirent par la main, lui, sa femme et ses deux filles, car le Seigneur voulait l'épargner, ils l'emmenèrent et le mirent hors de la ville. 17 Lorsqu'ils les eurent fait sortir, l'un des anges dit : Sauve-toi, sur ta vie. Ne regarde pas derrière toi, et ne t'arrête nulle part dans la Plaine, sauve-toi à la montagne, de peur que tu ne périsses. 18 Lot leur dit : Non, Seigneur. 19 Voici votre serviteur a trouvé grâce à vos yeux, et vous avez fait un grand acte de bonté à mon égard en me conservant la vie, mais je ne puis me sauver à la montagne, sans risquer d'être atteint par la destruction et de périr. 20 Voyez, cette ville est assez proche pour m'y réfugier, et elle est peu de chose, permettez que je m'y sauve, n'est-elle pas petite ? Et que je vive. 21 Il lui dit : Voici, je t'accorde encore cette grâce, de ne pas détruire la ville dont tu parles. 22 Hâte-toi de t'y sauver, car je ne puis rien faire avant que tu n'y sois arrivé. C'est pour cela qu'on a donné à cette ville le nom de Ségor. 23 Le soleil se leva sur la terre, et Lot arriva à Ségor. 24 Alors le Seigneur fit pleuvoir sur Sodome et sur Gomorrhe du soufre et du feu d'auprès du Seigneur, du ciel. 25 Il détruisit ces villes et toute la Plaine, et tous les habitants des villes et les plantes de la terre. 26 La femme de Lot regarda en arrière et devint une colonne de sel. 27 Abraham se leva de bon matin et se rendit au lieu où il s'était tenu devant le Seigneur. 28 Il regarda du côté de Sodome et de Gomorrhe, et sur toute l'étendue de la Plaine, et il vit monter de la terre une fumée, comme la fumée d'une fournaise. 29 Lorsque Dieu détruisit les villes de la Plaine, il se souvint d'Abraham, et il fit échapper Lot au bouleversement, lorsqu'il bouleversa les villes où Lot habitait.]

- La lettre de saint Paul aux Romains, chapitre 1 : 16 Car je n'ai pas honte de l'Évangile, c'est une force divine pour le salut de tout homme qui croit, premièrement du Juif, puis du Grec. 17 En effet, en lui est révélée une justice de Dieu qui vient de la foi et est destinée à la foi, selon qu'il est écrit : "Le juste vivra par la foi." 18 En effet, la colère de Dieu éclate du haut du ciel contre toute impiété et toute injustice des hommes, qui, par leur injustice, retiennent la vérité captive, 19 car ce qui se peut connaître de Dieu, est manifeste parmi eux : Dieu le leur a manifesté. 20 En effet ses perfections invisibles, son éternelle puissance et sa divinité sont, depuis la création du monde, rendues visibles à l'intelligence par le moyen de ses œuvres. Ils sont donc inexcusables, 21 puisque, ayant connu Dieu, ils ne l'ont pas glorifié comme Dieu et ne lui ont pas rendu grâces, mais ils sont devenus vains dans leurs pensées et leur cœur sans intelligence s'est enveloppé de ténèbres. 22 Se vantant d'être sages, ils sont devenus fous 23 et ils ont échangé la majesté du Dieu incorruptible pour des images représentant l'homme corruptible, des oiseaux, des quadrupèdes et des reptiles. 24 Aussi Dieu les a-t-il livrés, au milieu des convoitises de leurs cœurs, aux péchés sexuels, en sorte qu'ils déshonorent entre eux leurs propres corps, 25 eux qui ont échangé le Dieu véritable pour le mensonge et qui ont adoré et servi la créature de préférence au Créateur, lequel est béni éternellement. Amen. 26 C'est pourquoi Dieu les a livrés à des passions d'ignominie : leurs femmes ont changé l'usage naturel en celui qui est contre nature, 27 de même aussi les hommes, au lieu d'user de la femme selon l'ordre de la nature, ont, dans leurs désirs, brûlé les uns pour les autres, faisant hommes avec hommes des actes infâmes et recevant, dans une mutuelle dégradation, le juste salaire de leur égarement. 28 Et comme ils ne se sont pas souciés de bien connaître Dieu, Dieu les a livrés à leur sens pervers pour faire ce qui ne convient pas, 29 étant remplis de toute espèce d'iniquité, de malice, [de fornication], de cupidité, de méchanceté, pleins d'envie, de pensées homicides, de querelle, de fraude, de malignité, semeurs de faux bruits, 30 calomniateurs, haïs de Dieu, arrogants, hautains, fanfarons, ingénieux au mal, rebelles à leurs parents, 31 sans intelligence, sans loyauté, [implacables], sans affection, sans pitié. 32 Et bien qu'ils connaissent le jugement de Dieu déclarant dignes de mort ceux qui commettent de telles choses, non seulement ils les font, mais encore ils approuvent ceux qui les font. Chap. 2. 1 Ainsi, qui que tu sois, ô homme, toi qui juges, tu es inexcusable car, en jugeant les autres, tu te condamnes toi-même, puisque tu fais les mêmes choses, toi qui juges. 2 Car nous savons que le jugement de Dieu est selon la vérité contre ceux qui commettent de telles choses. 3 Et tu penses, ô homme, toi qui juges ceux qui les commettent et qui les fais toi-même, que tu échapperas au jugement de Dieu ? 4 Ou méprises-tu les richesses de sa bonté, de sa patience et de sa longanimité ? Et ne sais-tu pas que la bonté de Dieu t'invite à la pénitence ? 5 Par ton endurcissement et ton cœur impénitent, tu t'amasses un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, 6 qui rendra à chacun selon ses œuvres : 7 la vie éternelle à ceux qui, par la persévérance dans le bien, cherchent la gloire, l'honneur et l'immortalité 8 mais la colère et l'indignation aux rebelles, indociles à la vérité, dociles à l'iniquité. 9 Oui, tribulation et angoisse sur tout homme qui fait le mal, sur le Juif premièrement, puis sur le Grec. 10 Gloire, honneur et paix pour quiconque fait le bien, pour le Juif premièrement, puis pour le Grec 11 car Dieu ne fait pas de favoritisme entre les personnes. 12 Tous ceux qui ont péché sans loi périront aussi sans loi et tous ceux qui ont péché avec une loi seront jugés par cette loi. 13 Ce ne sont pas, en effet, ceux qui écoutent une loi qui sont justes devant Dieu mais ce sont ceux qui la mettent en pratique qui seront justifiés. 14 Quand des païens, qui n'ont pas la loi, accomplissent naturellement ce que la Loi commande, n'ayant pas la loi, ils se tiennent lieu de loi à eux-mêmes, 15 ils montrent que ce que la Loi ordonne est écrit dans leurs cœurs, leur conscience rendant en même temps témoignage par des pensées qui, de part et d'autre, les accusent ou les défendent. 16 C'est ce qui paraîtra au jour où, selon mon Évangile, Dieu jugera par Jésus-Christ les actions secrètes des hommes (...)

- les graves peines décrétées dans le droit canon et dans la bulle de saint Pie V, du 30 août 1568, Horrendum illud scelus, contre les clercs [prêtres ou moines] qui pratiquent la sodomie.

- Les pères de l'Église qui ont attaqué les actes d’homosexualité (et non les personnes) avec une grande vigueur dont saint Jean Chrysostome, dans sa 4ème Homélie sur la lettre de saint Paul aux Romains.]


La sodomie revêt la malice de l'adultère, de l'inceste ou du sacrilège, selon que les personnes qui s'y livrent sont mariées, parentes par consanguinité ou par alliance, ou consacrées à Dieu.

Des théologiens nombreux disent que le pénitent est tenu de déclarer si, dans l'acte de sodomie, il a été pénétrant ou pénétré (…) Beaucoup d'auteurs, cependant, avec plus de probabilité, rejettent cette nécessité, prétendant que la nature du péché est suffisamment exprimée par la déclaration du fait : c'est l'opinion du père Concina lui-même très peu suspect de relâchement. Comme en cette matière il convient d'éviter les questions superflues, nous nous abstenons toujours d'interrogations de cette nature (…).


[Catéchisme de l’Église Catholique, promulgué et publié par le pape saint jean-Paul II : Chasteté et homosexualité

N°2357 L’homosexualité désigne les relations entre des hommes ou des femmes qui éprouvent une attirance sexuelle, exclusive ou prédominante, envers des personnes du même sexe. Elle revêt des formes très variables à travers les siècles et les cultures. Sa genèse psychique reste largement inexpliquée. S’appuyant sur la Sainte Écriture, qui les présente comme des dépravations graves (cf. Genèse 19,1-29 Lettre aux Romains 1,24-27 1ère lettre aux Corinthiens 6,10 1ère lettre à Timothée 1,10), la Tradition a toujours déclaré que "les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés" (Congrégation pour la Doctrine de la Foi, déclaration "Persona humana sur certaines questions d’éthique sexuelle du 29 décembre 1979", §8). Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas.


N°2358 Un nombre non négligeable d’hommes et de femmes présente des tendances homosexuelles foncières. Cette propension, objectivement désordonnée, constitue pour la plupart d’entre eux une épreuve. Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste. Ces personnes sont appelées à réaliser la volonté de Dieu dans leur vie, et si elles sont chrétiennes, à unir au sacrifice de la croix du Seigneur les difficultés qu’elles peuvent rencontrer du fait de leur condition.


N°2359 Les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté. Par les vertus de maîtrise, éducatrices de la liberté intérieure, quelquefois par le soutien d’une amitié désintéressée, par la prière et la grâce sacramentelle, elles peuvent et doivent se rapprocher, graduellement et résolument, de la perfection chrétienne.]


CHAPITRE 4 : LES PÉCHÉS DE LUXURE NON CONSOMMÉE


[Les péchés de luxure non consommée sont ceux qui n'arrivent pas jusqu'à l’orgasme. A cette espèce se rapportent : la délectation morose ou contemplative, les baisers, les attouchements et regards impudiques, la mauvaise parure des femmes, les mauvaises peintures et les sculptures indécentes, les paroles déshonnêtes, les livres obscènes, les mauvaises danses dont l’intention ou l’effet est érotique, les spectacles incitant à la luxure de manière directe ou indirecte].

(…)


CHAPITRE 5 : DES CAUSES, EFFETS ET REMÈDE À LA LUXURE

§ 1. Les causes de la Luxure


Les causes principales et les plus fréquentes des péchés de luxure sont les suivantes :


1°) L'intempérance dans le manger et surtout dans le boire. Le vin est une source de luxure et l'ivrognerie est tumultueuse : quiconque y met son plaisir ne sera pas sage (livre des Proverbes, 20, 1) ; Ne vous enivrez pas de vin, c’est de la débauche ; mais remplissez-vous du saint Esprit (lettre aux Éphésiens, 5, 18) ; Le libertinage et la luxure sont les accessoires de l'intempérance (Tertullien, Du Jeûne ou Contre les Psychiques). L'expérience confirme cette doctrine.


2°) L'oisiveté enseigne beaucoup de malice (Livre de l’Ecclésiastique, 33, 29), un sommeil prolongé, la mollesse ou la chaleur du lit, les jeux, les agréments et les délices de la vie.


3°) La familiarité entre personnes de sexe différent, même sous prétexte de mariage, les regards, les attouchements, les embrassements, les entretiens voluptueux, suivant ces paroles de l'Ecclésiastique, 9, 11 : Beaucoup, pour avoir admiré la beauté d’une femme étrangère, ont été réprouvés ; car sa conversation brûle comme un feu.

4°) Les bals, les comédies et autres spectacles profanes, la lecture des livres obscènes et des romans, les discours déshonnêtes, les chansons amoureuses, les vêtements immodestes ou superflus, la fréquentation des cabarets, toutes ces choses, dit Tertullien, indiquent la perte de la chasteté.


[Autres causes :

l’absence d’éducation sexuelle catholique,

l’ignorance de l’Écriture Sainte,

Saint Jérôme : Aime l’Écriture Sainte et tu vaincras l’impureté (c’est à dire les péchés sexuels).

Saint François de Sales, Introduction à la Vie Dévote, 3ème partie, Avis pour conserver la chasteté : Occupez-vous souvent de la lecture des Livres Sacrés ; car la Parole de Dieu est chaste et rend chaste ceux qui l’aiment : c’est pourquoi David la compare à cette pierre précieuse, qu’on appelle topaze et dont la propriété spéciale est d’amoindrir l’ardeur de la concupiscence.

l’ignorance des enseignements officiels de l’Église sur la sexualité, l’ignorance des écrits des docteurs de l’Église, des pères de l’Église et des grands mystiques catholiques sur le sujet.

l’erreur sur nos besoins véritables : pour être équilibré et épanoui nous avons besoin d’amour de personne à personne et non pas d’une ration hebdomadaire ou mensuelle d’orgasmes, à défaut de laquelle notre équilibre serait soit disant fragilisé ou remis en cause.

la concupiscence de la chair,

les mauvais exemples,

Le mauvais amour propre, source de tous les vices selon les pères de l’Église,

l’orgueil,

le refus de quitter les occasions prochaines,

la paresse pour la prière et la pénitence,

l’abus de la miséricorde divine,

la présomption d’être sauvé sans mérite,

le refus de croire aux paroles de saint Paul : les débauchés n’hériteront pas du Royaume des Cieux (1 Corinthiens 6, 9-10) ; ceux qui commettent ces fautes-là n’hériteront pas du Royaume de Cieux (Galates 5, 19-21) ; Ni le fornicateur, ni le débauché n’ont droit à l’héritage dans le Royaume du Christ et de Dieu (Éphésiens, 5, 5). Paroles reprises par la Vierge Marie à la bienheureuse Jacinthe de Fatima : ce sont les péchés de la chair qui conduisent le plus d’âmes en enfer. Cf. Témoignages sur les Apparitions de Fatima, Giovanni de Marchi, p.279.]

§ 2. Les effets de la luxure


Saint Thomas, 2a 2ae, q.153, art. 5 après saint Grégoire le Grand, donne huit filles à la luxure. Quatre dans le domaine de l'intelligence :

1°) L'aveuglement, dont Salomon lui-même nous a donné un exemple terrible [sa luxure le conduisit à l’idolâtrie, cf. 1 Rois, 11.1-13] ;

2°) La précipitation, qui pousse l’homme à des actions inconvenantes qu’il n’eut pas faites s’il avait pris le temps d’en calculer la portée ou de demander conseil.

3°) Le défaut de réflexion, qui fait mal juger de la fin qu'on se propose et des moyens pour y arriver.

4°) L'inconstance, celui qui est adonné à la luxure veut et ne veut pas, comme s'il était dans l'engourdissement (livre des Proverbes, 13, 4), et il ne persiste pas dans sa résolution de mener une vie meilleure.

Les quatre filles que saint Thomas donne à la luxure, comme produites par la volonté, sont les suivantes :

1°) L'amour démesuré de soi-même. Celui qui se livre à la débauche place sa fin dernière dans les plaisirs de la chair, et il applique toutes ses pensées aux moyens de s'y livrer.

2°) La haine envers Dieu, qui proscrit les péchés contraires à la chasteté et les punit de peines graves.

3°) L’amour du monde présent, dans lequel le débauché trouve les plaisirs dont il désire faire sa principale occupation.

4°) L'horreur de l’autre monde, le débauché sait qu'à la place des plaisirs obscènes, il trouvera dans l’enfer, comme punition, des supplices atroces. Cette pensée l’obsède, le pousse au désespoir, parce qu'il lui semble impossible d'abandonner les plaisirs de ce monde. Ceux qui arrivent à ce désespoir se jettent dans toutes sortes d'obscénités ; c'est ce qui a fait dire à Paul : Ayant perdu tout sens moral, ils se sont livrés à l’impudicité, à la pratique de toute espèce d’impureté et à l’avarice (lettre aux Éphésiens, 4, 19) et à David : Dieu n’est pas devant ses yeux ; ses voies sont souillées en tout temps. (Psaume 10, 5) C'est comme s'il disait, écrit Sylvius, tome 3, p.821, une fois qu'il a mis de côté le respect et la crainte de Dieu, il mène la vie la plus impure.

Outre ces effets moraux, il en est d'autres (...) sans compter les horribles maladies vénériennes, ainsi nommées parce qu'elles sont la conséquence de l'abus des plaisirs sexuels.

§ 3. Les Remèdes aux péchés de luxure


Il est d'abord nécessaire de faire disparaître les causes des péchés de luxure que nous avons déjà énumérées. En outre, il convient de prescrire les moyens suivants :

1°) La prière fréquente et fervente : Voyant que je ne pouvais avoir la continence sans le secours de Dieu ..., je suis allé vers lui et je l'ai prié. (Livre de la Sagesse 8, 21).

2°) La lecture des livres de piété, les méditations sur la Passion du Christ et sur les supplices réservés aux débauchés dans l'autre monde : Dans toutes tes actions, souviens-toi de ta fin et tu ne pécheras jamais. (Ecclésiastique 7, 40) ;

3°) S'abstenir d'une nourriture délicate et abondante : Les iniquités de Sodome furent le résultat de l'orgueil, de l'abondance et de l'oisiveté. (Ézéchiel 16, 49) ;

4°) La garde des sens, surtout de celui de la vue : N’arrête pas tes regards sur une jeune fille, de peur que sa beauté ne te soit un sujet de chute. (Ecclésiastique 9, 5) ;

5°) Fuir l'oisiveté et éviter avec soin les occasions : Celui qui aime le danger y périra. (Ecclésiastique 3, 27).

Que les parents ne permettent pas à des enfants de sexe différent, même frères et sœurs, de coucher dans le même lit, car l'expérience prouve que cet usage est très pernicieux pour la chasteté.

6°) Les macérations de la chair et les jeûnes, car les contraires se guérissent par les contraires. Cette sorte de démons ne se chasse que par la prière et le jeûne. (Évangile selon saint Matthieu 17, 20).

7°) Les aumônes et autres actes de charité, qui sont la source de grâces abondantes.

8°) L'approche fréquente des sacrements de pénitence [la confession] et d'Eucharistie [la messe].

9°) L'assiduité à se mettre en la présence de Dieu et à se rappeler l'éternité.

10°) La résistance aux premiers mouvements de la volupté, ayant soin de diriger son attention vers un autre objet, surtout vers un objet saint : Résistez au diable et il fuira loin de vous. (Lettre de saint Jacques 4, 7).

11°) Les conseils d'un confesseur prudent et, autant que faire se peut, de son confesseur ordinaire ; car il suggérera au pénitent des remèdes proportionnés à ses faiblesses et très propres à surmonter la tentation.

[§ 4. Les 25 Conseils et Tactiques pour guérir la luxure]

[N°1 La patience dans la lutte cause immanquablement la victoire. La grâce du Christ est si puissante que tous peuvent changer de vie du jour au lendemain et quitter les péchés mortels commis en matière de sexualité. De telles conversions fulgurantes existent encore de nos jours, bien que dans la plupart des cas, la cessation des actes de luxure prenne un temps plus long. Les pères de l’Église sont unanimes à déclarer que la patience dans la lutte cause immanquablement la victoire. Avec de la patience, on pourrait même abattre un grand arbre avec un canif. Pourtant beaucoup cèdent au désespoir et croupissent dans la luxure toute leur vie.


N°2 Travailler à avoir une vie équilibrée (sommeil, nourriture, sport, vie familiale, vie amicale, altruisme).


N°3 Travailler à éclairer son intelligence et sa foi : plus la personne possède la certitude que la chasteté est bien indispensable pour n°1 éviter l’enfer, n°2 aller au paradis, n°3 aimer en vérité et n°4 être heureux, et plus le changement est facile et définitif.


N°4 Une des clés de la conversion est d’avoir expérimenté intérieurement que l’on est plus heureux en suivant la ligne fixée par les commandements de Dieu plutôt qu’en commettant tel ou tel péché sexuel. Cette vérité est à trouver en vous-même, nul ne peut le faire à votre place. Si l’on devait prendre une image, il y a comme une balance à deux plateaux.

Dans le premier plateau se trouve le péché sexuel, le plaisir et la sorte de bonheur qu’il peut procurer.

Dans l’autre plateau, se trouve le plaisir et le bonheur que procure la vie selon l’Évangile. Dans ce plateau figurent aussi toutes les souffrances causées par les péchés sexuels. A chacun de prendre conscience de la tristesse du péché et du bonheur de la persévérance dans l’état de grâce. Saint Paul parle des convoitises trompeuses de la chair (Lettre aux Éphésiens 4, 22) : trompeuses parce que l’on pense y trouver le bonheur alors que l’on y récolte l’insatisfaction, la déception, la souffrance et le désespoir.


N°5 On ne supprime un plaisir qu’en le remplaçant par un autre. On supprime le plaisir lubrique, qu’en développant le plaisir d’aimer Jésus lequel inclut le plaisir de satisfaire les besoins de notre nature en tant que personne humaine : trouver le bonheur par le don de nous-même. Le meilleur critère de la vertu authentique c’est le plaisir que le vertueux éprouve (cf. Albert Plé, op, Par Devoir ou par Plaisir, Cerf, 1980, p.227).


N°6 Étudier le thème de la maladie du plaisir chez les pères de l’Église.


N°7 La Bible souligne à plusieurs reprises que le pécheur souffre sept fois plus que le juste : Ainsi en est-il de toute chair, depuis l’homme jusqu’à la bête et c’est sept fois pire pour les pécheurs. De plus, la mort, le sang, les querelles, le glaive, les oppressions, la famine, la ruine et les fléaux, toutes ces choses ont été créées contre les méchants (Ecclésiastique 40, 8-10). « Ces souffrances ne sont en eux qu’une pure peine et comme un commencement de leur enfer ; alors qu’ils sont dans les bons, un effet de la miséricorde de Dieu qui les humilie pour les rendre humbles et qui les prépare ainsi à un bonheur éternel » Commentaire de la Bible Sacy (aussi appelée Bible de Port Royal dont chacun des 32 volumes (fort in-8°, 1665-1708) a été revêtu de l’approbation de l’Église catholique) Ecclésiastique, p. 623. « Les pécheurs, bien plus encore que le reste des hommes, ignorent la paix et le repos, parce qu’il n’y a pas de paix pour les impies, et que le souvenir de leurs crimes et les remords de leur conscience les poursuivront nuit et jour » Commentaire de la Bible Allioli, Ecclésiastique, p.382. Bible Sacy et la Bible Allioli


N°8 Le combat est à traiter comme un exploit sportif. La victoire ne vient pas par hasard, il faut être méthodique et persévérant. Tout comme on note les chronomètres et les performances sportives réalisées aux entraînements, il faut noter ses défaites, ses luttes et ses victoires pour ne pas avoir à s’en remettre à la mémoire. Pour accroître la confiance en soi, il faut se fonder sur des certitudes et non sur des souvenirs. Sur ce sujet des notes à prendre dans le combat spirituel, lire l’article Comptabilité spirituelle du Dictionnaire de Spiritualité, éditions Beauchesne, Paris. Sainte Faustine, l’apôtre de la miséricorde divine avait recours à cette pratique, saint Ignace de Loyola, le fondateur des jésuites, également.


N°9 Il convient d’analyser le motif que l'on se donne pour céder à la tentation, motif que l'on se donne juste avant de commettre le péché. Un même individu peut céder pour des motifs différents suivant les circonstances. Il faut connaître et noter immédiatement ces motifs.

En même temps que la résolution prise à chaque confession de ne plus jamais recommencer le péché commis, on peut se concentrer sur sa période la plus longue de continence pour se fixer comme objectif de la doubler : celui qui a été capable de tenir une semaine, qu'il se fixe comme objectif prioritaire de tenir deux semaines, celui qui succombe tous les jours, qu'il se fixe comme objectif de rester continent une journée entière. Et une fois que la personne a réussi à résister à la tentation pendant une journée, la tactique consiste à se fixer comme objectif prioritaire de résister à la tentation au moins pendant deux jours, puis 4 jours, puis 8 jours, etc. Celui qui succombe toutes les deux heures, qu'il se fixe de tenir 4 heures, etc…. Il faut adapter à chaque cas.

Tout progrès aussi minime soit-il permet de repousser le désespoir et de faire la preuve qu’il n’existe aucune fatalité face à la luxure.

N°10 Repérer ce qui fortifie et soutien notre désir de continence et de chasteté.


N°11 Repérer également ce qui, à l’inverse, le fragilise.


N°12 Se punir et se récompenser suivant les progrès ou les échecs que l’on accumule.


N°13 Seuls les premiers combats et les premiers temps de lutte sont difficiles, une fois passés quelques mois, un premier pli est pris et la tentation a compris qu’elle perdait son temps. On entre dans une période de tranquillité. Il faut juste se tenir éloigné des circonstances ou des personnes qui constituent un danger prochain de retomber.


N°14 Dans le cas de la fornication, l’attachement à une ex-copine ou à un ex-copain pourra être tel que la seule solution sera de ne plus jamais la ou le voir.


N°15 Un des pivots est le jour où la personne réalise qu’elle est libre de choisir alors qu’elle s’était habituée à penser qu’elle n’avait qu’à subir une sorte d’impuissance cyclique.


N°16 Se confesser après chaque chute et participer à la messe tous les jours ou le plus souvent en semaine et, bien sûr, tous les dimanches et jours de fête religieuse.


N°17 Prier lentement et avec le cœur le rosaire ou le chapelet tous les jours. Il faut absolument au moins trente minutes de prière qui vienne du cœur chaque jour. Considérez que votre journée est entièrement perdue pour Dieu avec moins de trente minutes de prière par jour.


N°18 Jeûner au pain et à l’eau sans que personne ne le sache (ou le moins de monde possible).


N°19 Dans le cas de personnes membres d’un groupe de prière, envoyer des sms pour demander la prière lors de la tentation. Lutter en groupe est une grande force.


N°20 Ne pas confondre une habitude ancienne avec de la dépendance. Dans la dépendance, le péché sexuel ne sert pas à se donner du plaisir mais à suspendre momentanément un état d’angoisse et de souffrance intense. Dans un cas, on se fait plaisir, dans l’autre, on essaie de moins souffrir.


N°21 Se fixer un but, savoir ce que l’on veut et le prix que l’on est prêt à payer pour l’obtenir ; mettre en place une stratégie, avancer pas à pas, adapter, progresser, ce n’est pas de l’obsession, c’est de la stratégie et d’un point de vue théologique, c’est ce que l’on appelle la vertu de prudence. On ne construit pas une maison dans la distraction ou l’à-peu-près. Permettre au Christ de fortifier et sanctifier le temple sacré de notre âme est une tâche exaltante, réjouissante qui mérite une participation active et volontaire.


N°22 La peur de l’enfer permet de changer de vie sexuelle, elle permet de se convertir mais pas de persévérer, du moins telle est notre expérience personnelle. Le désir du paradis et le bonheur d’aimer Jésus permettent de persévérer jusqu’au jugement particulier. On se convertit par la peur de l’enfer, on persévère par l’amour et par le désir d’aller au paradis.


N°23 Fuir les confesseurs qui apprennent à leurs pénitents à vivre avec les fautes sexuelles (sous prétexte d’humilité ou de miséricorde).

"Au sujet du fait que certains prêtres peuvent être des obstacles dans la lutte pour la chasteté ou la continence, il est bon d’être réaliste sur la situation morale réelle d’une partie du clergé. Ainsi selon le père Labourdette, déjà cité, un tiers des prêtres vivent continuellement dans la luxure et ont renoncé à lutter : « Un vieux confesseur, qui n'est pas un exagéré, me disait que, sur l'ensemble des prêtres : un tiers reste intégralement fidèle, un tiers tombe et se relève, un tiers abandonne la lutte...ce n'est évidemment par une statistique scientifique ; les chiffres sont arrondis et simplifiés ; mais c'est avec des plus ou des moins selon les régions et les époques, une expérience commune qu'un confesseur averti ne contestera pas fondamentalement » (cf. Cours de Théologie Morale N°15 La Vie Sexuelle La Chasteté p.140).

Les chiffres données par le dominicain Labourdette concordent avec ceux donnés par le père jésuite Paul Jury, prêtre devenu apostat et premier prêtre psychanalyste français dans Journal d’un prêtre, éditions Gallimard, Paris, 1956 : « Le brave père de B…, dont le père Léonard Cros a écrit l’histoire, était un grand prédicateur et confesseur de prêtres. Il a couru toutes les retraites sacerdotales de vingt diocèses au moins. Il résumait ainsi son expérience : un tiers de prêtres tombe et ne se relève pas, un tiers tombe et se relève, un tiers échappe » (Journal d’un prêtre, Pensée N°48, p.128). Je ne pense pas que la généralisation de l’Internet dans les séminaires et les presbytères ait fait baisser ces chiffres.

De tels prêtres mal à l’aise avec leur célibat souffrent et se sentent accusés quand ils voient de simples fidèles déployer des efforts pour connaître le bonheur de la continence et de la chasteté.


N°24 Ne discutez pas avec eux, fuyez-les avec tact et délicatesse. Poursuivez la recherche du bonheur que vous avez commencée à expérimenter durant vos périodes de continence.]


N°25 Gardez secrètes vos victoires autant que possible. Avant d’arriver à accueillir le don de la continence pour plusieurs années, je n’ai connu que des victoires d’une semaine puis de deux, puis d’un mois, puis de trois mois, puis de six mois, puis d’un an etc. Mais cela n’a pas été linéaire et facile. On peut finalement se lasser d’une grâce que l’on a pourtant eu tant de mal à conserver. Peut-être que les terribles combats avant d’arriver à vivre une certaine pureté pendant plusieurs années, sont là pour nous aider à rester humbles et lucides sur notre si grande fragilité en ce domaine.

SUPPLÉMENT AU TRAITÉ DU MARIAGE


CHAPITRE 1 : DU DEVOIR CONJUGAL DEMANDÉ ET RENDU


Il est certain que les époux sont dans la stricte obligation de se garder mutuellement la foi conjugale [=le pacte conjugal, tout ce qu’ils se sont promis par leur mariage]; ils en font la promesse solennelle devant le prêtre, lorsqu’il les interroge et les bénit au nom de Dieu dont il est le ministre. D’ailleurs, d’après l’institution du mariage elle-même, l’homme et la femme sont deux dans une seule chair ; l’un des époux ne peut donc avoir de relation avec une autre personne sans faire une grave injure à son époux. D’où il suit que tout acte sexuel accompli avec une autre personne ou en pensant à elle (…) revêt une double malice qu’il est nécessaire de déclarer en confession, une contre la chasteté et l’autre contre la justice.


Il en est de même des mouvements voluptueux qui sont, a leur manière, contraires à la foi jurée, comme, par exemple l’abus que l’un des époux ferait de son corps [ex : par la masturbation] dont l’autre époux a acquis la propriété pour l’accomplissement des actes sexuels.


Ces préliminaires posés, nous diviserons le présent chapitre en trois articles : dans le premier nous traiterons de l’acte conjugal considéré en soi ; dans le second, du devoir conjugal demandé ; et dans le troisième, du devoir conjugal rendu.

ARTICLE 1 : L’ACTE CONJUGAL CONSIDÉRÉ EN SOI


[« L’acte conjugal peut devenir méritoire s’il est dicté par un motif surnaturel »]

Nous avons prouvé, dans le Traité du Mariage, tome 4, p.216, 7ème édition, contre plusieurs hérétiques, que le ariage considéré en soi était bon et honnête : il est donc certain que l’acte conjugal n’a, par lui-même, rien de mauvais et peut devenir méritoire s’il est dicté par un motif surnaturel, par exemple, pour conserver à son époux la foi promise en présence de Dieu, dans un but de religion, pour avoir des enfants qui servent Dieu fidèlement, ou en représentation de l’union du Christ avec l’Église.

Donc, si on rencontre quelque difficulté dans la matière, c’est au sujet du coït pratiqué uniquement par passion ou pour prévenir l’incontinence [pour éviter que l’autre ne commette un péché sexuel, ex : adultère, masturbation, recours à la prostitution.]

§ 1. Le coït pratiqué uniquement par passion.


C’est un péché de se livrer à l’acte conjugal dans le seul but de se procurer du plaisir, mais le péché est seulement véniel [=léger]. La preuve que le coït entre époux constitue un péché [dans ce cas là] résulte :

1° De l’autorité d’Innocent XI, qui condamna, en 1679, la proposition suivante, qui avait pour objet de le déclarer licite : L’acte conjugal pratiqué pour le seul plaisir qu’il procure est exempt de tout péché, même véniel.

2° La raison nous dit que le plaisir attaché à l’acte conjugal est le moyen d’obtenir le but de cet acte, c’est-à-dire la procréation des enfants : ce plaisir pris en dehors de ce but est donc illicite, à plus forte raison l’acte est-il illicite si, le détournant de son but, on le fait servir uniquement au plaisir.

On prouve de la manière suivante que le péché est seulement véniel : Le plaisir qu’on prend dans un acte licite n’est pas mauvais en soi, mais il est mauvais lorsqu’il ne se rapporte pas à une fin légitime ; tel est le plaisir qu’on prend à manger : tout le monde s’accorde à reconnaître que dans certains cas particuliers, l’absence de raison légitime, ce qui arrive lorsqu’on mange pour le seul plaisir de manger, constitue un péché véniel seulement. C’est l’opinion des théologiens en général, conforme, en cela à celle de Saint Augustin, de Saint Ambroise, de Saint Thomas et de Saint Bonaventure ; d’autres prétendent que le péché est mortel, et il y en a beaucoup qui veulent, avec Sanchez, l. 9, disp. 11, n° 1, qu’il n’y ait aucune espèce de péché.

§ 2. L’acte conjugal pratiqué dans le but de prévenir la masturbation


On demande si c’est un péché de demander le devoir conjugal dans le seul but de prévenir l’incontinence et quelle espèce de péché a été commis. Les théologiens sont très divisés sur cette question ; leurs opinions se résument à deux principales que Sanchez, liv. 9, disp. 9, et le P. Antoine, Des Obligations des époux, chap.3, q.5, nouv. édit., t. 4, p. 296, exposent d’une manière assez claire.

1°/ Beaucoup de théologiens prétendent qu’il n’y a pas de péché dans le coït entre époux [dans ce cas là], et ils appuient leur opinion des preuves suivantes :

1°) 1ère lettre aux corinthiens, 7, 2 : toutefois à cause de la fornication que chaque homme ait sa femme et que chaque femme ait son mari. L’apôtre [saint Paul] ajoute, verset 5 : Ne vous refusez pas l’un à l’autre, si ce n’est d’un commun accord et pour un temps, afin de vaquer à la prière, et ensuite revenez ensemble, de peur que Satan ne vous tente par votre incontinence. Verset 6. je vous dis cela par concession, je n’en fais pas un ordre. Verset 7. car je voudrais que vous fussiez tous comme moi. Saint Paul allègue ici l’incontinence, seulement pour autoriser l’acte conjugal : or, on ne peut pas dire que l’Apôtre donne la faculté de faire un acte entaché de péché [donc ce n’est pas un péché].

2°) Par l’autorité du catéchisme du concile de Trente qui, dans sa seconde partie, chap. 14, § 3., formule de la manière suivante la troisième raison qui a fait établir le mariage après la chute de nos premiers parents [Adam et Eve] : celui qui a conscience de sa faiblesse et qui ne veut pas combattre les révoltes de la chair, doit trouver dans le mariage un secours pour son salut. Et c’est ce qui fait dit à l’Apôtre : Pour éviter la fornication, etc. [Cf. Catéchisme du Concile de Trente, éditions Dominique Martin Morin p.327.]


3°) L’Église bénit chaque jour les mariages de vieillards qui ne sont certainement pas en état d’avoir des enfants ; on ne dit cependant pas qu’ils ne doivent pas user du mariage et l’Église ne les détourne, en aucune manière, de l’acte conjugal ; elle pense donc qu’ils doivent pratiquer le coït pour calmer la concupiscence.


4°) Un acte en soi honnête et qui tend à une fin honnête ne peut pas être mauvais. Or, l’acte conjugal est honnête en soi et c’est une fin honnête que de calmer la concupiscence en évitant l’incontinence. Voyez, dans ce sens, St Antoine, Paludanus, Soto, Sylvestre, Saint Alphonse de Liguori, livre 6, n° 882, et beaucoup d’autres dont l’autorité est citée tant par ce dernier que par Sanchez, l. 9, n° 3. (...)


[Quand le plaisir sexuel constitue un acte de chasteté]

[Père Michel-Marie Labourdette, o.p., Cours de Théologie Morale N°15 La Vie Sexuelle La Chasteté, p.79-80 : « Il faut réagir contre l’idée peu réfléchie que se font spontanément beaucoup de gens, selon laquelle la chasteté serait proprement une vertu de célibataire, le mariage ayant pour effet d’en relâcher les exigences. Bien au contraire, l’état normal et commun de la chasteté est précisément le mariage, où elle a un exercice fort positif, celui de garder dans la juste mesure, d’éliciter [susciter, tirer de] elle-même en leur forme vertueuse les réactions affectives de l’appétit sensible rattachées à l’exercice de la vie sexuelle. Dans l’acte matrimonial qu’aucune circonstance ne vicie, la délectation vénérienne non seulement ne s’oppose en rien à la chasteté, mais elle est elle-même un acte de chasteté »,

D’un point de vue thomiste, la délectation suit la qualification morale de l’acte d’où elle prend sa source. La délectation est le fruit de l’acte, elle lui est directement liée. Si l’acte est bon en lui-même, la délectation qu’il cause est également bonne et vertueuse.] (…)


ARTICLE 2 : LA DEMANDE DU DEVOIR CONJUGAL


Les époux ne sont pas tenus de demander le devoir conjugal pour eux-mêmes ; car personne n’est tenu d’user de son droit. Ils y sont cependant quelquefois tenus d’une manière accidentelle, savoir :

1°) Lorsqu’il est nécessaire d’avoir des enfants pour prévenir de graves préjudices que pourraient en éprouver la religion ou la république : c’est de toute évidence.

2°) Si l’un des époux, l’épouse principalement, fait connaître à certains signes le désir d’user du remède que la pudeur l’empêche de demander, l’autre époux doit prévenir le désir, et c’est plutôt, dans ce cas, rendre le devoir implicitement demandé que le demander réellement. (...)

[Faire l’amour pendant la grossesse]

Ce n’est pas un péché mortel de demander le devoir conjugal pendant le temps de la grossesse, pourvu qu’il n’y ait pas danger d’avortement ; c’est l’opinion très ordinaire des théologiens, et c’est la conséquence de ce que nous avons dit au sujet de la demande du devoir ayant pour but d’éviter l’incontinence [ex : masturbation]. Comme le fœtus humain se trouve tellement enveloppé dans le vagin que le sperme de l’homme ne peut le toucher, on ne peut pas facilement présumer le danger d’avortement [le fœtus se trouve dans l’uterus et non dans le vagin, il n’y a donc pas de contact entre le pénis et le foetus], et on ne doit pas tracasser les pénitents sur ce point par des interrogations importunes.

Sanchez, l.9, disp.22, n°6, et beaucoup de théologiens dont il cite l’autorité, enseignent qu’il n’y a même pas de péché véniel à demander le devoir pendant le temps de la grossesse, car autrement on devrait s’abstenir presque toujours à l’acte conjugal, et le mariage institué comme remède à la concupiscence serait plutôt propre à enflammer qu’à calmer les passions, et ne serait qu’un véritable piège. Cependant, Saint Alphonse de Liguori, livre 6, n°924, avec beaucoup d’autres, ont limité cette faculté au seul cas où il y a danger d’incontinence. (...)

Quant à nous, nous ne tenterons pas de trancher le différend. Et, nous apitoyant sur le sort des personnes mariées, nous nous contenterons de dire qu’il faut les laisser dans leur bonne foi et ne pas les détourner de leurs habitudes, de crainte qu’ils ne retombent dans des fautes plus graves. (...)

[Faire l’amour les dimanches et jours de fêtes ]

Tous les théologiens disent avec St François de Sales (Introduction à la vie dévote, 2e partie, chap. 20 [« en la primitive Église, les chrétiens communiaient tous les jours, quoiqu’ils fussent mariés et bénis de la génération des enfants ».]) que la femme qui, ce jour où elle a reçu ou doit recevoir la sainte Eucharistie, rend le devoir que demande son mari, ne commet pas de péché ; bien plus, qu’elle est tenue de le rendre si son époux ne veut pas céder à ses prières.

[Communier si éjaculation ou orgasme involontaire la nuit]

A cette occasion, les théologiens se demandent si celui qui a éprouvé l’éjaculation ou l’orgasme pendant le sommeil peut recevoir la sainte Eucharistie. Ils répondent avec saint Grégoire le Grand, dans sa lettre au sublime Augustin, apôtre de la Grande-Bretagne, rapportée dans le Décret, part. 1re, dist. 6, chap. 1, en faisant, la distinction suivante : Ou cette éjaculation provient d’un excès de force ou de la faiblesse, et, dans ce cas, il n’y a pas le moindre péché ; ou bien elle provient de certains excès dans l’usage des aliments, et c’est alors un péché véniel ;

[ou] elle peut encore être le résultat des pensées [volontaires] qui l’ont précédée et elle peut, dans ce cas, constituer un péché mortel. Dans le premier cas, on ne doit éprouver aucun scrupule ; dans le second, elle n’empêche pas de recevoir le sacrement ou de célébrer les saints mystères si on y est engagé par quelque motif d’excuse, comme la circonstance d’un jour de fête ou de dimanche : mais dans le troisième, nous dit saint Augustin : on doit s’abstenir de participer ce jour-là au saint Mystère à cause d’une telle éjaculation [on doit aller à la messe mais ne pas communier]. (…)

ARTICLE 3 : L’OBLIGATION DE RENDRE LE DEVOIR CONJUGAL


Nous avons à parler :

1° De l’obligation de rendre le devoir conjugal ;

2° Des raisons qui dispensent de le rendre ;

3° De ceux qui pèchent mortellement en le rendant ;

4° De ceux qui commettent le péché d’Onan [la contraception] ;

5° De ceux qui pèchent véniellement en rendant le devoir.

§ 1. L’obligation de rendre le devoir.


L’Écriture sainte et la raison imposent à chacun des époux la stricte obligation de rendre le devoir conjugal à l’autre lorsque la demande lui en est faite d’une manière expresse ou tacite :

1° L’Écriture sainte : 1ère lettre aux corinthiens, 7, 3 : Que le mari rende à sa femme ce qu’il lui doit, et pareillement, la femme à son mari. verset 5 : Ne vous refusez pas l’un à l’autre, si ce n’est d’un commun accord et pour un temps, afin de vaquer à la prière, et ensuite revenez ensemble, de peur que Satan ne vous tente par votre incontinence. L’obligation de rendre le devoir conjugal résulte clairement de ces paroles.


2° La raison : Tout contrat implique l’obligation naturelle de se tenir dans les termes de la convention ; or, le but principal du mariage consiste dans l’abandon mutuel du corps, pour l’accomplissement, selon les règles, de l’acte conjugal ; donc, celui qui, sans motif légitime, refuserait de rendre le devoir conjugal, manquerait gravement à une convention solennellement faite, et confirmée par serment, et, par conséquent, il pécherait mortellement. C’est l’opinion de tous les théologiens.


D’où il résulte :


1° que c’est un péché mortel de refuser, même une fois, sans motif légitime, de rendre le devoir à l’époux qui le demande avec raison et insistance : Mais si celui qui le demande acceptait facilement les motifs de refus et qu’il n’en résultât pas de danger d’incontinence : il n’y aurait nul péché, ou, du moins, le péché ne serait pas mortel, à refuser une fois et même deux fois de se prêter aux désirs de son conjoint.


2° L’un des époux ne peut pas, lorsque l’autre s’y oppose, faire une longue absence, à moins d’absolue nécessité, car une pareille absence équivaudrait au refus de rendre le devoir et la justice en serait gravement blessée.

§ 2. Des raisons qui dispensent de rendre le devoir.


De même qu’un motif légitime dispense quelquefois de la restitution, une raison légitime dispense aussi de rendre le devoir conjugal. On compte plusieurs de ces raisons, savoir :


1°/ Si l’époux qui demande le devoir n’est pas en possession de lui-même, si, par exemple, il est dans la démence ou s’il est ivre, il n’y a pas d’obligation pour le conjoint de lui rendre le devoir, car ce serait céder à la demande d’une brute. Cependant si l’homme qui le demande, étant dans cet état, est capable de consommer l’acte conjugal, la femme doit se rendre à ses désirs ; bien plus, elle est tenue de le faire si elle a des raisons de craindre qu’ayant repoussé son mari, celui-ci ne tombe dans l’incontinence, ne se livre à d’autres femmes, ou ne profère des blasphèmes ou des paroles déshonnêtes devant ses domestiques et ses enfants. Sanchez, l.9, disp.23, n°9, Saint Alphonse de Liguori, livre 6, n°948, etc., pensent ainsi lorsqu’ils disent que la femme, qui est dans un état de démence ou de fureur, ne peut ni demander ni rendre le devoir conjugal à cause du danger d’avortement.


2°/ Celui qui ne peut rendre le devoir sans grave danger pour sa santé en est dispensé ; car il est préférable d’exister et d’être bien portant que de rendre le devoir. Il faut en dire de même lorsqu’il y a grave danger de nuire à la propagation de l’espèce.

Par conséquent, 1° : Il n’y a pas d’obligation de rendre le devoir à un mari atteint d’une maladie contagieuse comme une maladie vénérienne, la peste, la lèpre, etc. Cependant, Alexandre III dit qu’il faut rendre le devoir à un lépreux, mais Sanchez, l.9, disp.24, n°17, Saint Alphonse de Liguori, l.6, n°930, et beaucoup d’autres qu’ils citent, enseignent que cela s’entend ainsi pour le cas où, en rendant le devoir, on ne se mettrait pas dans le danger de contracter la lèpre ; car il répugne d’admettre qu’un époux soit tenu de s’exposer à un pareil danger. Mais les mêmes auteurs exceptent le cas où la lèpre aurait précédé le mariage et aurait été connue de l’autre époux : cependant il faut supposer qu’il n’y a pas un danger trop grave, celui de la mort, par exemple.

Par conséquent, 2° : L’époux malade, qui ne peut rendre le devoir sans grave préjudice, en est dispensé tant que dure la maladie : mais il n’est pas permis de le refuser à cause des inconvénients de la grossesse ou de l’allaitement des enfants ou des difficultés ordinaires de l’enfantement, car ce sont là des accessoires du mariage.


3°/ L’époux n’est pas tenu de rendre le devoir à celui qui a perdu le droit de le demander en commettant un adultère ; car on ne doit plus fidélité à celui qui a violé ses promesses ; mais s’il était lui-même coupable d’adultère, il ne pourrait pas refuser le devoir, car les injures se trouveraient compensées. Cela est vrai pour la femme à l’égard de son mari, mais à un degré moindre pour l’homme à l’égard de sa femme, car la femme adultère a commis un péché plus grave que l’homme, à cause du danger d’introduire des étrangers dans la famille ; le mari est donc plus autorisé que la femme à refuser le devoir conjugal pour le cas d’adultère.

Du reste, celui qui a pardonné l’adultère en rendant le devoir après qu’il a eu connaissance de l’infidélité de son conjoint, ne peut déjà plus refuser le devoir.

[Pas d’obligation de dire au conjoint qu’on l’a trompé]

Néanmoins, l’adultère peut demander comme une faveur le devoir à son époux qui n’ignore pas l’infidélité commise, et s’il l’ignore il n’y a pas obligation de la lui faire connaître, car personne n’est tenu de s’infliger une grave punition.

[Demande trop fréquente]

4°/ (…) La femme doit cependant, autant que la chose est en son pouvoir, dit Sanchez, l.9, disp.2, n°12, se prêter aux besoins libidineux de son mari lorsqu’il éprouve de violents aiguillons de la chair : la charité l’oblige en effet à éloigner de lui autant que possible, le danger d’incontinence. [La même règle s’impose au mari si c’est sa femme qui est plus ardente et demandeuse d’unions que lui]. (…)

§ 4. Ceux qui commettent le péché d’Onan [La Contraception]


Ce péché a lieu lorsque l’homme retire son pénis après l’avoir fait pénétrer dans le vagin afin de répandre sa semence hors du vagin de la femme dans le but d’empêcher la génération. Il tire son nom d’Onan, second fils du patriarche Judas, qui fut forcé d’épouser Thamar, veuve de son frère Her, mort sans postérité, afin de perpétuer la lignée de son frère : Onan sachant que les enfants qui naîtraient de la femme de son frère ne seraient pas considérés comme étant les siens, répandit le sperme par terre pour ne pas donner naissance à des enfants qui porteraient le nom de son frère. (livre de la Genèse 38, 9). Rien n’est aujourd’hui plus fréquent que cette détestable coutume entre les jeunes mariés qui, n’étant pas retenus par la crainte de Dieu, foulent aux pieds ce précepte de l’apôtre : Que le mariage soit honoré de tous et que le lit nuptial soit sans tâche (lettre de saint Paul aux Hébreux, 13, 4) et vivent comme des chevaux et des mulets qui n’ont pas d’intelligence (Psaumes 31, 9). Recherchant uniquement les plaisirs dans le mariage, ils en évitent les charges, ne veulent pas avoir d’enfants ou les avoir en nombre déterminé, et cependant se livrent à la passion honteusement et sans frein, appliquant leur adresse à éviter les effets du coït en éjaculant hors du vagin.

1°) Il est certain que l’homme qui agit ainsi, quelle que soit la raison de sa conduite, pèche mortellement, à moins que sa bonne foi ne l’excuse ; il ne peut pas être absous à moins qu’il ne se repente de sa faute et qu’il ne prenne la ferme résolution de ne plus tomber dans le péché : car il est évident qu’il a commis une énormité contre le but du mariage ; c’est pourquoi Dieu le frappa de mort (Onan) parce qu’il faisait une chose détestable (38, 10).


2°) Il est certain par la même raison, que la femme qui engage le mari à agir ainsi ou qui consent à cette action détestable, ou, à plus forte raison, qui fait sortir de son vagin le pénis contre le gré de son mari, avant que l’écoulement du sperme ait eu lieu, commet un péché mortel et est tout à fait indigne de l’absolution [si elle ne reconnaît pas son péché et ne s’engage pas à ne plus jamais le faire]. Les femmes, très souvent, en accomplissant l’acte charnel, au moment de l’éjaculation, font sortir le pénis, ou se prêtent complaisamment à la même manœuvre de la part de l’homme, pour éviter de tomber enceinte.

3°) Il est certain que la femme, ordinairement du moins, est tenue d’avertir son mari, et de le détourner, selon son pouvoir, de cette action perverse ; la charité l’y oblige.

4°) Il est certain que la femme peut et doit rendre le devoir conjugal si, averti par elle, le mari promet d’éjaculer dans le vagin, et s’il est fidèle à sa promesse au moins quelquefois ; car sur le doute de l’abus qu’il peut faire de son droit, elle ne peut pas se refuser au coït : mais c’est aussi son devoir de réprimander son mari quand celui-ci retire le pénis du vagin avant l’éjaculation ; si elle ne protestait pas contre cette action, elle commettrait un péché mortel.

La difficulté consiste donc maintenant à décider si, en sûreté de conscience, elle peut rendre le devoir lorsqu’elle sait, d’une manière certaine, que son mari retirera son pénis du vagin avant l’éjaculation, lorsqu’elle ne peut pas douter que ses prières ni ses avertissements ne parviendront à le détourner de sa résolution.

Beaucoup de théologiens prétendent que, dans ce cas, la femme doit se refuser à rendre le devoir, même pour éviter la mort dont elle serait menacée :

1 ° Parce que le mari, en retirant, son pénis du vagin, commet une action essentiellement mauvaise, et que la femme participerait à sa malice en se rendant à sa demande ;

2° Parce que l’homme, dans l’hypothèse, ne demande pas l’acte conjugal, mais réclame de sa femme sa complicité pour introduire le pénis dans le vagin et s’y exciter à l’éjaculation.

3° Parce que si le mari exigeait de sa femme la participation à un acte de sodomie [au sens de pénétration de l’anus avec l’intention d’éjaculer dans l’anus], celle-ci ne pourrait y consentir pour aucun motif, même pour éviter la mort ; or, dans le cas supposé, la demande du mari se réduit à l’acte sodomique puisque le parfait accomplissement de l’acte conjugal en est exclu. Voyez Habert, t. 7, p. 745, Collator de Paris, t. 4, p. 348, plusieurs docteurs de la Sorbonne cités par Collet, t. 15, p. 244 ; Collator Andeg., sur les Etats, t, 3, dernière partie, Bailly, etc.

Beaucoup d’autres enseignent que la femme qui acquiesce a la demande de son mari et qui se prête à l’acte conjugal dans la position ordinaire est exempte de tout péché si elle désapprouve entièrement la conduite de son mari, car elle fait une chose licite et use d’un droit qui lui appartient et dont la malice de son mari ne peut nullement la priver : car elle ne fait rien qu’elle ne puisse faire d’une manière licite comme femme mariée. Le mari qui l’approche et qui introduit son pénis dans ses parties sexuelles ne pèche pas en cela, mais bien en le retirant et en répandant sa semence au dehors : donc, si la femme désapprouve entièrement cette dernière partie de l’acte de son mari, elle ne participe nullement à son péché, Voyez Sanchez, l. 9, disp. 17, n 3, Pontius, l. 10, chap. 11, n° 3, Tamburinus, l. 7, chap. 3, § 5, n° 4, Sporer, p. 356, n°490, Pontas, mot Devoir Conjugal, cas 55, Saint Alphonse de Liguori, livre 6, n° 947.

Roncaglius et Elbel, que cite Saint Alphonse de Liguori, ibid., permettent même à l’épouse de rendre le devoir conjugal à son mari lorsqu’il a manifesté l’intention de retirer son pénis avant le parfait accomplissement de l’acte charnel, pourvu qu’elle ne participe pas à son péché en y donnant son consentement, mais ils exigent, pour l’excuser, qu’elle ait de graves motifs pour y donner son consentement [consentement donné au coït et non au retrait].

Cette décision nous paraît la seule admissible car nous sommes fermement convaincus que la conduite de la femme n’est nullement répréhensible dans ce cas ; par conséquent, nous croyons que la décision de Habert et des autres théologiens qui pensent comme lui est trop sévère et n’est nullement fondée. La femme peut donc, lorsqu’elle a des raisons suffisantes, pour accéder aux désirs de son mari, se prêter passivement à ce qu’il exige d’elle ; mais la raison d’excuse doit être en rapport avec la malice du péché et l’efficacité de la coopération ; car on ne saurait nier que la femme, dans ce cas, coopère directement au péché de son mari ; c’est pour cela qu’on exige un grave motif d’excuse. C’est aujourd’hui le sentiment ordinaire des confesseurs doctes et pieux, sentiment qui a été partagé par la Sacrée Congrégation de la Pénitence lorsqu’elle a été interrogée de la manière suivante :

Une épouse pieuse peut-elle permettre à son mari de l’approcher lorsque l’expérience lui a prouvé qu’il pratique le coït suivant l’abominable coutume d’Onan… particulièrement si, en refusant de pratiquer le coït, elle s’expose à des violences de la part de son mari ou si celui-ci s’adresse à des courtisanes [prostituées] ? La Congrégation de la Pénitence a répondu le 23 avril 1822 :

Comme dans le cas proposé la femme ne fait, de son côté, rien de contraire à la nature, qu’elle se prête à un acte licite, que tout ce qu’il y a d’irrégulier dans cet acte doit être attribué à la malice du mari, qui, au lieu de consommer l’acte conjugal, retire le pénis et répand sa semence hors des parties sexuelles de sa femme : celle-ci peut sans pécher, comme l’enseignent des théologiens très estimés, se prêter passivement aux désirs de son mari, si les avertissements qu’elle est dans l’obligation de lui donner, sont demeurés sans résultat, si le mari insiste et menace sa femme de coups, de la mort, ou d’autres violences graves, car dans ces circonstances elle tolère simplement le péché de son mari, et elle a, pour agir ainsi, de graves motifs d’excuse, puisque la charité qui lui commande de s’opposer à une pareille conduite de la part de son mari ne l’oblige pas en présence de pareils inconvénients.

Donc la femme ne pèche pas, dans ces circonstances, en rendant le devoir, pourvu qu’elle soit excusée par de graves raisons : or les raisons sont réputées graves :

1° Lorsqu’elle a à craindre la mort, des coups ou des injures grossières ; la réponse de la Sacrée Congrégation de la Pénitence, et la raison indiquent clairement qu’il doit en être ainsi.

2° Lorsque la femme a lieu de craindre que son mari n’introduise une concubine sous le toit conjugal et ne vive maritalement avec elle, car il n’y a pas de femme sensée qui ne préfère supporter les coups que d’assister, dans sa propre maison, a un commerce aussi injurieux pour elle.

3° Le mari n’entretiendrait-il pas sa concubine sous le toit conjugal, s’il était à craindre qu’il n’entretint ailleurs des relations avec une femme, ou qu’il ne fréquentât des courtisanes [des prostituées], il nous paraît que la femme aurait des motifs d’excuse légitime, quoique la Sacrée Congrégation de la Pénitence n’ait pas répondu sur ce point ; car une pareille conduite de la part du mari lui occasionnerait de graves désagréments tels que disputes, dissensions, dissipation du bien commun, scandale, etc.

4° Il faut remarquer, cependant, que la gravité de ces désagréments doit être appréciée selon les circonstances de personnes. Ce qui est réputé léger à l’égard d’une femme peut être très grave à l’égard d’une autre ; ainsi les rixes passagères, les dissensions, et même les coups, ont peu d’importance chez certains paysans, mais ce type de sévices serait intolérable pour une femme timide, ayant une certaine éducation et habituée aux bonnes manières d’une société raffinée.

Or, la crainte de graves disputes serait, dans ces circonstances, un motif suffisant de rendre le devoir conjugal sur la demande du mari.

5° La femme peut également rendre le devoir conjugal quand elle sait, d’une manière certaine, que son mari irrité par son refus blasphémera contre Dieu, contre la religion, qu’il proférera des injures contre son confesseur et les prêtres en général, et qu’il prononcera des paroles scandaleuses devant ses domestiques et ses enfants ; car en voulant prévenir un péché, elle serait cause [ou plutôt l’occasion] qu’il en serait commis d’autres aussi graves ou même plus graves, elle n’aboutirait donc à aucun résultat favorable ; par sa résistance, et elle s’attirerait inutilement de graves désagréments.

6° La crainte du divorce, de la séparation, de la honte ou d’un scandale grave serait, à plus forte raison, une raison suffisante pour se rendre aux désirs de son mari.

7° Il n’est pas nécessaire que la femme persiste dans son refus de se prêter au coït jusqu’à ce qu’elle ait éprouvé les violences, les injures et les autres désagréments dont nous avons parlé plus haut ; car il lui arriverait souvent, dans ce cas, de ne pas parvenir à détourner le mal déjà fait, en rendant ou offrant le devoir conjugal, et, d’ailleurs, elle n’est pas tenue de subir ces mauvais traitements pour empêcher son mari de commettre un péché : il suffit donc que ses craintes de mauvais traitements ne soient pas dépourvues de fondement.

8° La femme n’est pas davantage tenue d’avertir son mari chaque fois qu’il demande le devoir avec l’intention de retirer son pénis avant l’accomplissement de l’acte charnel, lorsqu’elle sait par expérience, qu’elle n’obtiendra aucune satisfaction [parce qu’il ne changera pas sa manière de faire]. Elle doit cependant, du moins quelquefois, montrer qu’elle ne donne pas son consentement au crime de son mari. Elle doit, surtout, prendre soigneusement garde de ne pas y donner un consentement tacite, par crainte d’avoir des enfants, ou pour tout autre motif. Elle doit être dans la disposition de mourir plutôt que de s’opposer à la génération lorsque c’est de sa volonté [à elle] que dépend le fait de l’éjaculation [dans son vagin].

Dans tous ces cas, il est permis à la femme tout ce qui lui serait permis si le mari accomplissait l’acte conjugal selon les règles [de la morale catholique].

Nos principes exposés plus haut sont maintenant admis d’une manière générale. Néanmoins il y a encore beaucoup de questions inquiétantes que nous avons exposées au Souverain Pontife, dans l’année qui vient de s’écouler, de la manière suivante :


Bienheureux Père,


L’évêque du Mans, prosterné aux pieds de Votre Sainteté, vous expose humblement ce qui suit :

On ne trouve presque pas de jeunes époux qui veuillent avoir une trop nombreuse famille, et ils ne peuvent cependant pas, raisonnablement, s’abstenir de l’acte conjugal.

Ils se sentent, ordinairement très offensés lorsque leurs confesseurs les interrogent sur la manière dont ils usent des droits matrimoniaux ; on n’obtient pas, par les avertissements, qu’ils se modèrent dans l’exercice de l’acte conjugal, et ils ne peuvent se déterminer à trop augmenter le nombre de leurs enfants.

Aux murmures de leurs confesseurs, ils opposent l’abandon des sacrements de pénitence et de l’Eucharistie, donnant ainsi de mauvais exemples à leurs enfants, à leurs domestiques et aux autres chrétiens ; la religion en éprouve un préjudice considérable.

Le nombre des personnes qui s’approchent du tribunal [= la confession] diminue d’année en année, dans beaucoup d’endroits, et c’est surtout pour cette raison-là, de l’aveu d’un grand nombre de curés qui se distinguent par leur piété, leur science et leur expérience.

Quelle était donc la conduite des confesseurs d’autrefois? Disent beaucoup de personnes. Chaque mariage ne produisait pas, généralement, un plus grand nombre d’enfants qu’il n’en produit aujourd’hui. Les époux n’étaient pas plus chastes et néanmoins ils ne manquaient pas au précepte de la confession pascale.

Tout le monde reconnaît que l’infidélité d’un époux à l’égard de l’autre et les projets d’avortement sont de très graves péchés. Or c’est à peine si on peut persuader à quelques personnes qu’elles sont tenues, sous peine de péché mortel, de rester parfaitement chastes dans le mariage, ou de courir le risque d’engendrer un grand nombre d’enfants.

Le susdit évêque du Mans, prévoyant les grands maux qui peuvent résulter d’une semblable manière d’agir, sollicite, dans sa douleur, de votre Béatitude, une réponse aux questions suivantes :

1° Les époux qui usent du mariage de manière à empêcher la conception commettent-ils un acte en soi mortel ?

2° Cet acte étant considéré comme mortel en soi, peut-on considérer les époux qui ne s’en accusent pas comme étant dans une bonne foi qui les excuse d’une grave faute ?

3° Doit-on approuver la conduite des confesseurs qui, pour ne pas blesser les personnes mariées, s’abstiennent de les interroger sur la manière dont ils usent du mariage?


RÉPONSE :

La Sacrée Congrégation de la Pénitence, après avoir mûrement examiné les questions qui lui sont posées, répond à la première :

Lorsque tout ce qu’il y a de contraire aux règles, dans l’acte conjugal, provient de la malice du mari qui, au lieu de consommer cet acte, retire son pénis et répand sa semence hors du vagin, la femme peut, si après les avertissements qu’elle est tenue de donner et qui demeurent sans résultat, son mari insiste en la menaçant de coups et de la mort, se prêter passivement et sans pécher (comme l’enseignent les théologiens dont les décisions font autorité) à la condition que, dans ces circonstances, elle permettra simplement le péché de son mari, et par un grave motif d’excuse, car la charité qui lui commande de s’opposer à la conduite de son mari, n’oblige pas lorsqu’il doit en résulter de semblables inconvénients.

La Sacrée Congrégation répond à la 2e et à la 3e question : que le susdit confesseur se rappelle cet adage : « On doit traiter saintement les choses saintes », qu’il pèse bien ce que dit Saint Alphonse de Liguori, cet homme savant et très expert dans la matière, dans sa Pratique des Confesseurs, § 4, n° 7 : « Le confesseur n’est pas tenu ordinairement, de parler des péchés que les époux commettent relativement au devoir conjugal, et il n’est pas convenable de poser des questions sur cette matière, si ce n’est à la femme, pour lui demander, le plus modérément possible, si elle a rendu le devoir….. Il doit garder le silence sur tout le reste, à moins qu’on ne lui pose des questions, qu’il ne manque d’ailleurs pas de consulter les autres auteurs approuvés.

Donné à Rome, le 8 juin 1842.


On trouve les paroles de Saint Alphonse de Liguori ci-dessus rapportées à la onzième édition in-4°, au paragraphe indiqué, mais sous le n° 41.

Il faut remarquer que la Sacrée Congrégation de la Pénitence : 1° suppose que l’action du mari qui abuse du mariage est mortellement mauvaise ; 2° reconnaît que la pratique que conseille St Alphonse de Liguori est très prudente, et que les confesseurs peuvent la suivre en toute sûreté.

Les confesseurs, les jeunes prêtres surtout, doivent prudemment s’abstenir de questions indiscrètes qui mettent les personnes mariées, pour y répondre, dans de grands embarras ; ils doivent agir et parler avec une extrême précaution, sans cependant blesser la vérité dans leurs réponses, et [ils doivent] s’abstenir de donner à tort l’absolution, lorsqu’ils sont persuadés que leurs pénitents sont dans le cas de péché mortel ; mais il ne faut pas qu’ils décident sans réflexion qu’il manque à leurs pénitents cette bonne foi qui excuse de péché mortel. Néanmoins, on doit s’appliquer à amener les époux à vivre saintement dans le mariage.

L’épouse doit, par tous les moyens en son pouvoir, les caresses, toute espèce de marques d’amour, les prières et les exhortations, amener son mari à accomplir l’acte conjugal selon les règles, ou le décider à s’en abstenir complètement et à vivre d’une manière chrétienne : l’expérience prouve que plusieurs femmes sont parvenues à vaincre la résistance de leurs maris en s’attachant ainsi à gagner leurs bonnes grâces.


On demande 1° Si l’épouse peut demander le devoir à son mari lorsqu’elle sait qu’il en abusera.


Réponse. Plusieurs théologiens affirment que la femme peut demander le devoir conjugal et ne fait qu’user de son droit. C’est l’opinion de Pontius, de Tamburinus, de Sporer, etc. Mais d’autres, avec plus de raison, comme cela résulte de ce que nous avons dit, exigent une raison qui lui permette de demander le devoir d’une manière licite, car sans cela elle donnerait à son mari une occasion prochaine de péché ; mais c’est à peine si cette raison peut se présenter, alors qu’elle peut trouver d’autres moyens de surmonter les tentations. Mais étant posée une cause grave de fait, par exemple, la difficulté de surmonter la tentation, elle ne pécherait nullement ; car il est permis de demander, avec des intentions droites et pour de graves raisons, une chose bonne en soi, à celui qui peut l’accorder sans commettre de péché, quoique l’abus qu’il en fait l’empêche de le faire sans péché ; c’est ainsi que pour des motifs graves, pour des raisons suffisantes, on peut demander à un prêtre indigne l’administration d’un sacrement, de l’argent à un usurier, le serment à un païen, etc.

[Si une nouvelle grossesse risque de tuer la mère]


On demande 2° Si le mari peut répandre le sperme hors du vagin de la femme, lorsque les médecins ont déclaré que la femme ne peut pas enfanter sans un danger de mort évident.


Réponse. Nous répondons négativement avec tous les théologiens, parce que l’éjaculation hors des parties sexuelles de la femme est une action contre nature et détestable. Il faut accomplir l’acte si le danger de mort n’est pas très probable. Ou il faut s’en abstenir complètement, si le danger est moralement certain. Dans ce cas, les époux n’ont pas d’autre moyen de salut que la continence. Leur condition est déplorable : mais on ne saurait la changer. Alors, ces malheureux époux doivent s’abstenir de coucher dans le même lit, afin de rester plus facilement dans la continence et de vivre saintement.

Il est à remarquer que les fornicateurs et les adultères ne peuvent pas [moralement] s’opposer à la génération en répandant le sperme hors du vagin, parce que cette circonstance est contre nature : il est donc nécessaire de la déclarer en confession [s’ils le font, ils doivent le préciser en confession]. (...)


CHAPITRE 2 : L’USAGE DU MARIAGE


Nous examinerons dans ce chapitre :

1° Quand les époux tombent dans le péché en usant du mariage [en faisant l’amour].

2° Ce qu’il faut décider des attouchements voluptueux et réciproques. [Préliminaires et actes qui accompagnent et suivent le coït]

ARTICLE 1 : QUAND LES ÉPOUX PÈCHENT EN USANT DU MARIAGE

[La Sodomie interdite également comme préliminaire]

Les époux commettent un péché mortel, non seulement lorsque leur union charnelle a lieu hors du vagin, ou que, par des moyens adroits, ils répandent le sperme hors de ce vase, mais encore lorsqu’ils préludent à l’acte sexuel dans le vase qui ne lui est pas destiné, par exemple, en introduisant le pénis dans l’anus, avec l’intention de terminer la jouissance dans le vagin ; car ils prennent ainsi un moyen qui s’écarte des voies naturelles, et comme cet acte tend, par lui-même, à faire répandre le sperme hors du vagin, cette pratique n’est pas autre chose qu’une véritable sodomie [avec, en plus, contamination bactérienne dangereuse pour le vagin]. Voyez Sanchez, l. 9, disp. 17, n° 4 ; Saint Alphonse de Liguori, l. 6, n° 916, et beaucoup d’autres dont ils rapportent les décisions.(...)



[Fellation et Cunnilingus]

[Père Marie-Michel Labourdette, op, ibid. p.98 : Il y a cependant des pratiques, assez spontanées au comportement animal, qui heurtent l’instinct de pudicité ; aussi arrive-t-il que le confesseur soit consulté (…) [sur la fellation ou le cunnilingus] (…) Interrogé il donnera le principe général que tout ce qui tend à l’acte normal, sans affection au péché, peut être justifié, surtout à certaines périodes : encore une fois, la discipline monogamique est lourde et il peut être nécessaire de combattre les tentations de la satiété. Il [le confesseur] pourra ajouter que dans cet acte profondément animal et qui appelle assez spontanément des comportements même psychiquement très grossiers, il faut garder le souci habituel de la dignité humaine et chrétienne, toutes les aspirations de la chasteté en sa fonction de pudicité.]


Pèchent mortellement les personnes mariées qui pratiquent l’acte conjugal d’une manière qui s’oppose à la génération, par exemple si l’homme répand sa semence hors du vagin, comme nous l’avons dit, s’il s’oppose à l’écoulement complet du sperme, si la femme rejette le sperme ou fait des efforts pour le rejeter, si elle reste passive afin d’empêcher la conception, etc.

[Étreinte réservée, Méthode Paul Chanson]

St Antoine, Sanchez et beaucoup d’autres cités par Saint Alphonse de Liguori, l. 6, n° 918, prétendent qu’il n’y a pas de péché lorsque le mari, du consentement de sa femme, retire son pénis du vagin avant l’écoulement du sperme, afin de ne pas donner naissance à des enfants, à la condition, cependant que ni le mari ni la femme ne tomberont dans le danger d’éjaculation ou d’orgasme. (...)


[Adultère en pensée pendant l’union conjugale]

Les époux pèchent encore mortellement lorsque, dans l’accomplissement de l’acte conjugal, ils ont des désirs adultères, c’est-à-dire s’ils se figurent que c’est une autre personne qui est présente et s’ils prennent volontairement plaisir en pensant que c’est avec cette personne que le commerce a lieu. Il en est de même lorsqu’ils accomplissent l’acte conjugal dans un but mortellement mauvais, par exemple, si l’homme demande ou rend le devoir conjugal avec le désir que sa femme meure dans les douleurs de l’enfantement [ou parce qu’il croit à tort que sa femme, fragile du cœur, pourrait succomber durant l’union].

[l’acte conjugal devant d’autres personnes]

Pèchent encore mortellement les époux qui pratiquent l’acte conjugal devant d’autres personnes, à cause du grave scandale qui en résulte [incitation des personnes qui voient et ou entendent, à commettre eux-mêmes un péché sexuel] : Ils doivent donc éviter, avec soin, de faire coucher d’autres personnes dans leur chambre.

Les gens pauvres et les habitants des campagnes qui n’ont souvent qu’une seule chambre pour eux, leurs enfants et leurs domestiques, doivent s’observer nuit et jour avec soin, de crainte qu’en usant des leurs droits [en faisant l’amour] ils ne soient pour les autres une occasion de ruine. Hélas ! que de servantes, que d’enfants en bas âge sont déjà perdus de mœurs et doivent leur dépravation au défaut de précaution de personnes mariées !

[Les jeunes enfants qui surprennent, par hasard, leur parents en pleine union conjugale s’imaginent souvent avoir surpris une violente dispute, incapables qu’ils sont de comprendre la réalité de ce qu’ils ont vu. Ils pensent que le père agresse sa femme.]

ARTICLE 2 : DES ATTOUCHEMENTS ENTRE ÉPOUX

[Les Préliminaires]

(…) Les attouchements qui ont pour but de parvenir à l’acte charnel légitime sont, sans aucun doute, licites à la condition de ne pas entraîner le danger d'éjaculation ; ils sont, en effet, comme les accessoires de cet acte [l’union conjugale] : ils ne peuvent donc pas être défendus puisque cet acte est licite.

Si cependant ils avaient pour but d’obtenir une plus grande jouissance, il en résulterait un péché véniel, quoique tendant à l’acte charnel, car ce but serait véniellement mauvais. [Cette affirmation est fausse. En effet, on ne savait pas à l’époque que l’orgasme de l’épouse favorise la grossesse, cf. Docteur Seguy, Garçon ou Fille à votre Choix, p.158-159.

Mgr Bouvier ignore complètement les souffrances qui peuvent être ressenties par l’épouse si l’union n’est pas préparée de manière à produire l’huile naturelle sécrétée par le corps de la femme pour que l’union se déroule sans douleur : la lubrification du vagin et de la vulve.] (...)


[Tout n’est pas permis dans le mariage]


Tels sont les principaux péchés qui souillent d’habitude la sainteté du mariage : Dieu les punit souvent, même dans cette vie, par l’extinction des familles, le défaut de soumission des enfants, la mort subite et autres calamités. Les personnes mariées sont donc gravement dans l’erreur, lorsqu’elles pensent que tout leur est permis dans le mariage : elles commettent d’innombrables péchés en soi mortels, qu’elles ne découvrent pas en confession [péchés qu’elles ne confessent pas] et dans lesquels pourrissent les pécheurs. (...)



CHAPITRE 3 : DE LA CONDUITE DES CONFESSEURS A L’ÉGARD DES PERSONNES MARIES


Tout confesseur, principalement un curé, doit bien se pénétrer de la science dont il a besoin pour discerner les choses licites des choses illicites, de la pureté qu’il faut avoir pour ne pas se souiller en écoutant les turpitudes d’autrui, et de la prudence dont il doit s’entourer pour n’interroger que lorsqu’il le faut et de la manière qui convient, de peur qu’en voulant éloigner les pénitents des choses défendues, il ne les mette sur la voie du mal qu’ils avaient heureusement évité jusque-là.

Deux écueils sont également à éviter : l’imprudence, qui tient à la curiosité et à l’indiscrétion, et la timidité, qui fait qu’on ne dit rien de crainte de dire trop. Le confesseur doit parfois garder un silence prudent si, d’ailleurs, le pénitent est dans la bonne foi et qu’on prévoie que les avertissements ne produiront pas d’amendement. Mais sur beaucoup de points, la bonne foi qui excuse le péché ne se présume pas, par exemple, lorsqu’il s’agit de la sodomie (...)


1°/ Les confesseurs doivent, avant le mariage, avertir les époux des obligations qu’impose l’état qu’ils embrassent, en leur disant, par exemple :

beaucoup de personnes mariées croient à tort que tout leur est permis dans l’acte charnel ; elles agissent comme les chevaux et les mulets : elles commettent des péchés nombreux ; elles attirent dans cette vie, sur elles et sur leur famille, de graves fléaux, et se perdent misérablement pour toujours [en enfer] : prenez donc garde de ne pas agir ainsi et de souiller la sainteté de ce divin sacrement. Sachez que cela seul est permis aux personnes mariées, qui est nécessaire pour avoir des enfants [et pour pouvoir bien les éduquer]. Je ne veux pas vous en dire plus long en ce moment ; s’il vous survient des doutes sur certaines questions, ne manquez pas de vous en ouvrir soit à moi, soit à un autre confesseur prudent.

Ces préceptes généraux donnés avant que le mariage soit consommé, nous paraissent être suffisants ; car si le confesseur en disait davantage, il scandaliserait peut-être de jeunes époux qui ont vécu dans la chasteté ; il troublerait leur imagination et exciterait chez eux de violents aiguillons de la chair.

Le confesseur doit avoir soin de les faire revenir au confessionnal peu de temps après que le mariage aura été contracté, et alors il développera d’une manière plus convenable, les règles exposées plus haut sur l’obligation de rendre le devoir (...) et le demander sur la manière dont le coït doit être pratiqué pendant les règles, la grossesse, etc. ; mais il devra toujours expliquer ces choses avec précaution, d’une manière chaste et en peu de mots ; il est même souvent beaucoup plus sûr de ne rien dire et de répondre simplement aux questions posées par le pénitent.


2°/ L’expérience prouve que beaucoup de personnes mariées ne déclarent pas les péchés commis dans le mariage, à moins qu’elles ne soient interrogées là-dessus. Or, le confesseur peut les interroger de la manière suivante sur les choses permises entre époux : Avez-vous quelque chose à avouer qui répugne à votre conscience ? Si elles répondent négativement et qu’elles paraissent être suffisamment instruites et d’ailleurs timorées, il ne sera pas nécessaire d’aller plus loin. Mais si elles paraissent ignorantes et que leur sincérité soit suspecte, le confesseur devra insister. Il demandera au pénitent s’il a refusé à son conjoint de lui rendre le devoir : Si le pénitent ne comprend pas cette manière de parler, le confesseur peut lui demander : Avez-vous refusé l’acte que l’on fait pour avoir des enfants, le coït ? S’il répond qu’il a refusé, il faut savoir pour quelle raison, et on jugera à ses réponses si le péché est mortel ou véniel ou s’il n’y a pas de péché.


3°/ Le confesseur doit généralement s’enquérir auprès du pénitent s’il s’est livré à des actes déshonnêtes contre la sainteté du mariage. Si le pénitent répond affirmativement, il convient de lui faire dire en quoi consistent ses infractions, de peur de lui enseigner ce qu’il ignore ; on ne devra pas d’abord l’accuser à la légère de péché mortel.


Ce que nous venons de dire sur cette lubrique matière doit être suffisant. Les curés et confesseurs doivent proclamer la chasteté, l’honnêteté et la sainteté des devoirs matrimoniaux ; ils doivent souvent dire avec saint Paul : que chacun de vous sache posséder son corps dans la sainteté et l’honnêteté et non en suivant les convoitises de la passion comme les païens qui ne connaissent pas Dieu. (1ère lettre aux Thessaloniciens, 4, 4-5.). A ces paroles, les auditeurs comprendront facilement par où ils ont péché et de quoi ils doivent de s’abstenir afin d’accomplir le devoir conjugal, d’une manière chaste et sainte, selon la doctrine de l’apôtre. Concina nous dit, t. 21, p. 248, que les curés acquerront plus de science pour l’instruction des personnes mariées, en suivant les doctrines de St Paul qu’en gravant dans leur mémoire tous les raisonnements imaginés par Sanchez, Diana, Gobatius et autres. Rien ne nous paraît plus vrai ; c’est pourquoi nous supplions les jeunes confesseurs d’être prudents, graves et retenus en interrogeant les personnes mariées, car en agissant autrement, ils pourraient manquer aux lois de la pudeur et s’exposer eux-mêmes à tomber dans le péché.


ISBN 978-2-493832-32-0

EAN 9782493832320

Copyleft Alexis Maillard, auteur-éditeur, Paris, France. sitejesusmarie@gmail.com

CE LIVRE EST CONSACRÉ À

L’IMMACULÉE VIERGE MARIE

PLEINE DE GRACE,

BÉNIE ENTRE TOUS LES ENFANTS D’ADAM,

BIEN-AIMÉE DE DIEU,

SA COLOMBE,

SA TOURTERELLE PRÉFÉRÉE,

HONNEUR DU GENRE HUMAIN,

DÉLICE DE LA TRÈS SAINTE TRINITÉ,

SANCTUAIRE DE CHARITÉ,

MODÈLE D’HUMILITÉ,

MIROIR DE TOUTES LES VERTUS,

MÈRE DU BEL AMOUR,

MÈRE DE LA SAINTE CONFIANCE,

MÈRE DE LA MISÉRICORDE,

AVOCATE DES MALHEUREUX,

APPUI DES FAIBLES,

LUMIÈRE DES AVEUGLES,

GUÉRISON DES MALADES,

ANCRE D’ESPÉRANCE,

CITÉ DE REFUGE,

PORTE DU PARADIS,

ARCHE DE VIE,

ARC-EN-CIEL DE LA PAIX,

PORT DE SALUT, ÉTOILE DE LA MER,

OCÉAN DE DOUCEUR,

MÉDIATRICE DES PÉCHEURS,

ESPOIR DES DÉSESPÉRÉS,

RESSOURCE DES DÉLAISSÉS,

CONSOLATRICE DES AFFLIGÉS,

SECOURS DES MOURANTS,

ALLÉGRESSE DU MONDE.


Précisions



Ce qui est entre [crochets], ce qui est mis en gras, ce qui est souligné, est ajouté par l’éditeur au texte original de Mgr Bouvier ou de l’abbé Vittrant. Ces ajouts sont le fruit d’une réflexion personnelle et n’engagent par l’Église catholique.



Le mot pollution désigne, dans le cas des hommes, la masturbation ou l’éjaculation et (ou) l’orgasme ; dans le cas des femmes, il désigne : la masturbation et (ou) l’orgasme. Ce mot pollution ayant complètement changé de sens, nous l’avons donc souvent remplacé par masturbation / éjaculation / orgasme / plaisir sexuel, suivant le contexte.



(...) signale des passages que nous ne publions pas en raison de leur caducité. Les personnes intéressées peuvent retrouver sur l’Internet, les pdf originaux des deux livres, les pdf des textes originaux latins et français tels qu’ils furent publiés : au XIXème siècle pour Mgr Bouvier et en 1941 pour l’abbé Vittrant.



Pour nous faire part de vos critiques, suggestions ou questions : sitejesusmarie@gmail.com



Avant Propos

Sous le titre LA CHASTETÉ CATHOLIQUE, nous publions une traduction française de la théologie morale de l’abbé Jean-Benoit Vittrant sur la sexualité, de larges extraits du livre de Mgr Jean-Baptiste Bouvier sur le même sujet et 25 conseils et tactiques inédits pour guérir la luxure, c’est à dire vaincre l’habitude des péchés dans le domaine de la sexualité.

LA THÉOLOGIE MORALE de Monsieur l’abbé Jean-Benoît Vittrant (+1942), jésuite, professeur à la faculté de théologie de Paris, fut publiée en 1941 chez Beauchesne et ses Fils, Paris, Rue de Rennes, 117.


Nihil obstat

Paris, le 20 juin 1941

François Datin, S. J.

Provinciat de France


Imprimatur

Lutetiae Parisiorum,

die XXI junii 1941

V. Fupin, v.


DISSERTATION SUR LE SIXIÈME COMMANDEMENT ET SUPPLÉMENT AU TRAITÉ DU MARIAGE de Monseigneur Jean-Baptiste Bouvier, évêque du Mans (France), fut originellement publié, en latin, à Paris, au format in-12°, sous le titre : DISSERTATIO IN SEXTUM DECALOGI PRAECEPTUM ET SUPPLEMENTUM AD TRACTATUM DE MATRIMONIO. Ce fut un succès : il y eut 17 éditions entre 1827 et 1864.

L’édition latine que nous avons consultée est la 16ème, datée de 1861, on la trouve sur googlebooks. La traduction française est de Paulin Franques, publiée par la LIBRAIRIE DU PROGRÈS MARIK-LEBRENN, Imprimeur-Libraire, 9. – CORSO DELLA MARINA – 9. SAN REMO (Italie), [vers 1875-1878] sous le titre : MANUEL DES CONFESSEURS OU LES DIACONALES DISSERTATION SUR LE SIXIÈME COMMANDEMENT ET SUPPLÉMENT AU TRAITE DU MARIAGE PAR MGR BOUVIER ÉVÊQUE DU MANS.

Selon Claude Langlois (Le Crime d’Onan, avril 2005, Paris, Les Belles Lettres, p.347) Paulin Franques aurait traduit l’édition de 1843.



approbation générale des évêques catholiques

Ce livre, écrit par un évêque diocésain en exercice, reçu lors de sa parution l’approbation générale des évêques et valu à son auteur de hautes distinctions honorifiques accordées par le souverain pontife Pie IX : celles de comte romain, de prélat assistant au trône pontifical et de membre de la congrégation de l’Index.

Préface de l’éditeur

Les Dix Commandements révélés par Dieu nous protègent de l’égoïsme, du narcissisme, de l’immaturité et de la chosification de l’autre. Ils aident à accéder à une qualité de vie affective et sexuelle digne de nous. En tant que personne, nous trouvons la perfection par le don de nous-même à Dieu et aux autres. L’esclavage des péchés sexuels est un des pires obstacles à l’accomplissement de notre aspiration profonde à aimer et à être aimé en vérité. Malgré la double révolution de la pilule contraceptive et du porno de masse, il se trouve encore des âmes pour vivre les demandes de Jésus, y compris dans le domaine de la sexualité et elles y trouvent le bonheur. Elles expérimentent la douceur et la légèreté du joug du Christ : Prenez mon joug sur vous (...) vous trouverez le repos de vos âmes (Math 11, 29). Les catholiques sont porteurs d’une capacité spéciale à réussir leur vie affective, leur vie sexuelle et leur mariage.

Nous éditons ce livre dans l’espoir qu’il aide de nombreuses personnes à vivre la chasteté et à expérimenter cette joie inhérente à la vie chrétienne fervente et authentique.

Nous espérons que ce livre sera :

- une aide pour les prêtres,

- un outil de formation en théologie morale,

- un outil d’éducation sexuelle,

- un moyen d’apprendre à mieux se confesser,

- et un instrument de préparation au mariage.

Paris, le 18 mai 2023, en la fête de l’Ascension du Seigneur.

JesusMarie.com

1Sur ces notions d’état de grâce et de grâce sanctifiante, lire le Catéchisme du concile de Trente, le Catéchisme de Saint Pie X, le Catéchisme de l’Église Catholique, le Précis de Théologie Dogmatique, tome 2, de Mgr Bernard Bartmann. Gratuitement téléchargeables sur JesusMarie.com et lisible sur vatican.va en ce qui concerne le Catéchisme de l’Église catholique.

2Cf. http://jesusmarie.com/jean-benoit-vittrant.html pour le texte latin original.

3[Cf. http://jesusmarie.com/jean-benoit-vittrant.html, n°154 et 156 sur la correction fraternelle. Voir également l’article Correction Fraternelle dans les grandes encyclopédies de théologie catholique : Dictionnaire de Spiritualité, Catholicisme, Dictionnaire de Théologie Catholique.]

4[Phrase originale latine de Mgr Bouvier : Omnes fatentur per molles eos intelligendos esse qui voluntarie se polluunt, vel ab aliis pollui patiuntur.]

5[Lorsque les prêtres confessent, ils peuvent être confrontés à des récits causant une excitation sexuelle. C’est pourquoi, la prudence voulait auparavant que seuls des prêtres avec dix ans de sacerdoce confessaient. Hormis les cas où la confession peut causer une excitation sexuelle, le danger consiste parfois à être l’objet de sollicitations ou de manœuvres de séduction par la ou le pénitent durant la confession.]