Saint Thomas d’Aquin - Somme Théologique

Supplément = 5ème partie

Question 9 : De la qualité de la confession

 

          Nous devons ensuite nous occuper de la qualité de la confession. A cet égard quatre questions se présentent : 1° La confession peut-elle être informe ? — 2° Faut-il qu’elle soit entière ? (Luther et quelques autres novateurs ayant prétendu que l’on n’était pas obligé de confesser tous ses péchés, le concile de Trente les a ainsi condamnés (sess. 14, can. 7) : Si quis dixerit in sacramento pœnitentiæ ad remissionem peccatorum, necessarium non esse de jure divino confiteri omnia et singula peccata mortalia, quorum memoria cum debita et diligenti præmedittatione habeatur, etiam occulta, et quæ sunt contra duo ultima Decalogi præcepta, et circunstantias quæ peccati speciem mutant, anthema sit.) — 3° Peut-on se confesser par un autre ou par écrit ? (Le pape Clément VIII a condamné en 1602 la proposition suivante comme fausse, téméraire et scandaleuse : Licere epr litteras seu internuncium confessario absenti peccata sacramentaliter confiteri, et ab eodem absente absolutionem obstinere, et il a défendu de la mettre en pratique d’aucune manière.) — 4° Les conditions déterminées par les docteurs sont-elles requises en confession ? (Après avoir énuméré ces seize conditions, Mgr Gousset ajoute qu’elles peuvent se réduire à quatre : l’intégrité, la simplicité, l’humilité et la sincérité (Theolog. morale, t. 2, p. 273).)

 

Article 1 : La confession peut-elle être informe ?

 

          Objection N°1. Il semble que la confession ne puisse pas être informe. Car il est dit (Ecclésiastique, 17, 26) : La confession n’est pas pour les morts, parce qu’ils sont comme anéantis. Or, celui qui n’a pas la charité est mort, parce que la charité est la vie de l’âme. Donc la confession ne peut exister sans la charité.

          Réponse à l’objection N°1 : Ce passage doit s’entendre du fruit de la confession qu’on ne peut recevoir quand on est hors de la charité.

 

          Objection N°2. La confession est divisée par opposition avec la contrition et la satisfaction. Or, la contrition et la satisfaction ne peuvent jamais avoir lieu en dehors de la charité. La confession ne peut donc pas se faire sans non plus.

          Réponse à l’objection N°2 : La contrition et la satisfaction se rapportent à Dieu, au lieu que la confession se fait à l’homme. C’est pourquoi il est de l’essence de la contrition et de la satisfaction que l’homme soit uni à Dieu par la charité, tandis que cela n’est pas de l’essence de la confession.

 

          Objection N°3. Dans la confession il faut que la bouche soit d’accord avec le cœur : parce que le nom même de confession l’exige. Or, celui qui demeure encore dans l’affection du péché s’il se confesse, n’a pas le cœur conforme à ce qu’il dit ; puisqu’il tient du cœur au péché qu’il condamne des lèvres. Il ne se confesse donc pas.

          Réponse à l’objection N°3 : Celui qui a des péchés les expose et parle avec vérité ; par conséquent le cœur est d’accord avec la parole ou avec les mots quant à la substance de la confession, quoiqu’il soit en désaccord avec la fin du sacrement.

 

          Mais au contraire. Tout le monde est tenu à confesser ses péchés mortels. Or, si on s’est confessé une fois même en état de péché mortel, on n’est pas tenu de confesser ultérieurement les mêmes péchés ; parce que, comme on ne sait jamais si on a la charité, on ne saurait jamais si on a été confessé. Il n’est donc pas nécessaire pour la confession qu’elle soit faite en état de grâce.

 

          Conclusion La confession considérée comme partie du sacrement peut avoir quelquefois lieu dans quelqu’un qui n’est pas contrit et qui n’a pas la charité, mais comme acte de vertu elle ne peut exister proprement dans quelqu’un sans la charité.

          Il faut répondre que la confession est un acte de vertu et qu’elle est une partie d’un sacrement. Comme acte de vertu, elle est un acte méritoire proprement dit ; en ce sens la confession ne vaut rien (C’est-à-dire elle ne vaut rien pour le ciel, car elle pourrait être une œuvre normalement bonne.) sans la charité qui est le principe du mérite. Mais, comme partie du sacrement, elle met celui qui la fait en rapport avec le prêtre qui a les clefs de l’Eglise et qui connaît par la confession la conscience de celui qui se confesse. De cette manière la confession peut exister même pour celui qui n’est pas contrit ; parce qu’il peut découvrir ses péchés au prêtre et se soumettre aux clefs de l’Eglise ; et quoique alors il ne reçoive pas le fruit de l’absolution, cependant quand ses mauvaises dispositions cesseront, il commencera à le recevoir (Les anciens thomistes ont ainsi cru, d’après ce passage, que le sacrement de pénitence pouvait être tout à la fois informe et valide ; mais aujourd’hui tous les théologiens soutiennent généralement le contraire. Saint Thomas paraît s’être rétracté plus loin (quest. 29, art. 8). La question 9 étant issue du liv. 4 Sent., dist. 17 et la question 29 de la dist. 23, Billuart observe avec raison qu’il aurait traité avec plus de soin cette matière s’il eût achevé sa Somme.), ainsi qu’il arrive dans les autres sacrements. Celui qui s’approche de la pénitence mal disposé n’est donc pas tenu de recommencer sa confession, mais il est obligé de faire ensuite l’aveu de ses mauvaises dispositions.

 

Article 2 : Faut-il que la confession soit entière ?

 

          Objection N°1. Il semble qu’il ne soit pas nécessaire que la confession soit entière, c’est-à-dire qu’on confesse tous ses péchés à un même prêtre. Car la honte contribue à affaiblir la peine. Or, on éprouve d’autant plus de honte qu’on se confesse à un plus grand nombre de prêtres. La confession est donc plus fructueuse si on la divise entre un plus grand nombre de prêtres.

          Réponse à l’objection N°1 : Quoique la honte soit plus multipliée quand on divise ses fautes entre différentes confesseurs (S’il s’agit de péchés mortels, on ne peut pas dire les uns à un confesseur et les autres à un autre sans rendre ces confessions nulles et sacrilèges par défaut d’intégrité.), cependant toutes ces humiliations réunies ne produisent pas une aussi grande confusion que celle qu’on éprouve quand on confesse simultanément tous ses péchés ; parce qu’un seul péché considéré en lui-même ne montre pas aussi bien la mauvaise disposition du pécheur que quand il est considéré avec plusieurs autres. Car quelque fois on tombe par ignorance ou par faiblesse dans un péché ; au lieu que la multitude des fautes démontre la malice du pécheur ou sa grande corruption.

 

          Objection N°2. La confession est nécessaire dans la pénitence pour que la peine soit proportionnée à la faute d’après la sentence du prêtre. Or, plusieurs prêtres différents peuvent imposer une peine suffisante pour les divers péchés. Il ne faut donc pas confesser tous ses péchés à un seul prêtre.

          Réponse à l’objection N°2 : La peine imposée par divers prêtres ne serait pas suffisante, parce que chacun d’eux ne considérerait chaque péché qu’en lui-même sans voir la gravité qu’il a par suite de son union avec les autres ; et quelquefois la peine qu’on déterminerait contre un péché serait le moyen de provoquer l’autre. De plus le prêtre qui entend la confession tient la place de Dieu. C’est pourquoi la confession doit lui être faite de la même manière que la contrition se fait par rapport à Dieu. Ainsi, comme il n’y aurait pas de contrition si on n’était pas contrit de tous les péchés qui se présentent à la mémoire, de même il n’y aurait pas de confession si on ne se confessait de toutes les fautes dont on se souvient.

 

          Objection N°3. Il peut se faire qu’après que la confession est faite et que la satisfaction est complète, on se souvienne d’un péché mortel qu’on n’avait pas dans la mémoire quand on s’est confessé, et que dans ce cas on n’ait plus à sa disposition son propre prêtre auquel on s’était d’abord confessé. On pourra donc confesser à un autre ce seul péché, et par conséquent confesser ses divers péchés à des prêtres différents.

          Réponse à l’objection N°3 : Il y a des auteurs qui disent que quand on se rappelle des fautes qu’on avait oubliées auparavant, on doit se confesser de nouveau de celles qu’on a déjà accusées (surtout si on ne peut avoir le même prêtre auquel on s’était confessé auparavant et qui connaît tous les péchés qu’on a faits.), afin que le même prêtre connaisse toute l’étendue de la faute. Mais cela ne paraît pas nécessaire, parce qu’un péché tire sa gravité de lui-même et des autres péchés qui lui sont adjoints. Or, pour qu’un prêtre connaisse cette double gravité du péché qu’on avait oublié, il suffit que celui qui confesse ce péché le dise explicitement et qu’il nomme les autres en général, en disant que lorsqu’il en a confessé beaucoup d’autres, il a oublié celui-là (On ne devrait faire recommencer les confessions antérieures que dans le cas où cet oubli serait grièvement coupable, parce qu’alors il aurait rendu ces confessions nulles et sacrilèges.).

 

          Objection N°4. On ne doit confesser ses péchés à un prêtre que pour en recevoir l’absolution. Or, quelquefois un prêtre qui entend une confession peut absoudre certains péchés et ne pas les absoudre tous. Donc, au moins dans ce cas, il ne faut pas que la confession soit entière.

          Réponse à l’objection N°4 : Quoique un prêtre ne puisse pas absoudre tous les péchés, cependant le pénitent est tenu de les lui confesser tous, pour qu’il connaisse toute l’étendue de la faute et qu’il le renvoie à un supérieur pour ceux dont il ne peut pas l’absoudre.

 

          Mais c’est le contraire. L’hypocrisie empêche la pénitence. Or, il appartient à l’hypocrisie de diviser sa confession, comme le dit saint Augustin (alius auct., liv. De vera et falsa pœnit., chap. 15). La confession doit donc être entière.

          La confession est une partie de la pénitence. Or, la pénitence doit être entière. Donc la confession aussi.

 

          Conclusion Comme le médecin du corps doit avoir une connaissance parfaite de son malade pour lui administrer les remèdes qui lui conviennent ; de même il faut faire au prêtre une confession entière de tous ses péchés.

          Il faut répondre que dans la maladie corporelle il ne faut pas que le médecin connaisse seulement la maladie contre laquelle il doit donner une médecine, mais il faut qu’il connaisse encore universellement l’état et le tempérament de son malade ; parce qu’une maladie s’aggrave par suite de son alliance avec une autre, et qu’un remède qui convient pour une maladie devient nuisible pour une autre. Il en est de même pour les péchés ; car l’un s’aggrave par suite de son union avec un autre, et ce qui serait un remède, et ce qui serait un remède convenable pour l’un ne ferait qu’enflammer l’autre, puisque quelquefois on est souillé par des fautes contraires, comme l’enseigne saint Grégoire dans son Pastoral (part. 3, chap. 3). C’est pourquoi il est nécessaire à la confession qu’on confesse tous les péchés qu’on a présents à la mémoire (Les théologiens examinent si l’on doit accuser toutes les circonstances aggravantes. Ils sont très divisés à ce sujet. Un très grand nombre en font un devoir ; d’autres, en nombre non moins considérable, disent qu’on n’y est pas tenu. Sains Thomas regarde ce dernier sentiment comme le plus probable (Cf. in 4 Sent., dist. 46, art. 2, quest. 5).). Si on ne le fait pas, ce n’est pas une confession véritable, mais une confession simulée.

 

Article 3 : Peut-on se confesser par un autre ou par écrit ?

 

          Objection N°1. Il semble qu’on puisse se confesser par un autre ou par écrit. Car la confession est nécessaire pour que le pénitent découvre au prêtre sa conscience. Or, on peut faire connaître à un prêtre sa conscience par un autre ou par écrit.

          Réponse à l’objection N°1 : Comme dans le baptême il ne suffit pas de faire l’ablution d’une manière quelconque, mais on doit employer un élément déterminé, de même dans la pénitence il ne suffit pas de manifester ses péchés d’une manière quelconque, mais il faut le faire par un acte déterminé.

 

          Objection N°2. Il y a des pénitents que leurs propres prêtres ne comprennent pas, parce qu’ils ne parlent pas la même langue, et qui ne peuvent se confesser que par les autres. Il n’est donc pas nécessaire au sacrement qu’on se confesse par soi-même ; et par conséquent il semble que si on s’est confessé par un autre de quelque manière, cela suffise pour être sauvé.

          Réponse à l’objection N°2 : Pour celui qui ne peut parler, il suffit qu’il se confesse par écrit, ou par signe (C’est ainsi qu’on reçoit les confessions des sourds-muets qui peuvent s’exprimer de ces deux manières.), ou par interprète (Les étrangers qui ignorent la langue du pays et qui ne trouvent pas de prêtres qui la comprennent ne sont pas tenus de se confesser par interprète, d’après le sentiment le plus probable. Mais pour assurer la validité de l’absolution, on doit l’engager, dit Mgr Gousset, à prendre un interprète, et alors il suffit qu’il déclare par son intermédiaire un seul péché véniel. Ce sentiment est celui des docteurs de Salamanque, de Viva, Billuart, Suarez, saint Alphonse, etc.) ; car on n’exige pas d’un homme plus qu’il ne le peut ; quoique l’homme ne puisse ni ne doive recevoir le baptême que dans l’eau qui est une cause absolument extérieure et qui nous est appliquée par un autre. Mais l’acte de la confession est intérieur et vient de nous. C’est pour cela que quand nous ne pouvons nous confesser d’une manière, nous devons le faire comme nous le pouvons.

 

          Objection N°3. Il est nécessaire au sacrement qu’on se confesse à son propre prêtre, comme on le voit d’après ce que nous avons dit (quest. préc., art. 5). Or, quelquefois le propre prêtre est absent et le pénitent ne peut lui parler lui-même de vive voix ; mais il pourrait lui faire connaître sa conscience par écrit. Il semble donc qu’il doive le faire.

          Réponse à l’objection N°3 : Dans l’absence de son propre prêtre, on peut aussi faire sa confession à un laïque (Voyez ce que nous avons dit au sujet de cette confession, quest. 8, art. 2.) ; c’est pourquoi il n’est pas nécessaire qu’on la fasse par écrit, parce que l’acte de la confession appartient plus à la nécessité du sacrement que celui auquel on la fait.

 

          Mais c’est le contraire. On est tenu de confesser ses péchés, comme on est tenu de confesser sa foi. Or, on doit confesser sa foi de bouche, comme on le voit (Rom., chap. 10). On doit donc aussi confesser de la sorte ses péchés.

          Celui qui a péché par lui-même doit se repentir par lui-même. Or, la confession est une partie de la pénitence. Le pénitent doit donc confesser ses péchés de sa propre bouche.

 

          Conclusion On doit faire de sa propre bouche la confession de ses péchés, si on considère la confession comme une partie d’un sacrement, à moins qu’on n’en soit empêché par quelque obstacle naturel.

          Il faut répondre que la confession n’est pas seulement un acte de vertu, mais qu’elle est encore une partie d’un sacrement. Quoique comme vertu il suffise qu’on la fasse d’une manière ou d’une autre (Par lettre ou de vive voix.), bien qu’elle ne soit pas aussi difficile d’une manière, cependant si on la considère comme partie d’un sacrement elle a un acte déterminé de la même façon que les autres sacrements ont une matière déterminée. Et comme dans le baptême pour signifier l’absolution intérieure on emploie l’élément qui est le plus en usage pour les ablutions, de même dans l’acte du sacrement pour le manifester on emploie ordinairement l’acte par lequel nous avons le plus souvent coutume de manifester nos pensées, c’est-à-dire notre propre parole (Confessio, dit saint Liguori (liv. 6, n° 493), potest fieri nutu, scripto aliove signo ; v. g. si quis ob anxietatem loqui non possuit, aut puella supra modum verecrunda aliter se non possit explicare quàm scripto, quo à confessario lecto, addat voce : De his me accuso. Ita Suarez, Vasquez, cardinalis de Luquo, Laymann, Salmanticenses.) ; car les autres modes ne sont employés que pour suppléer à celui-là.

 

Article 4 : Les seize conditions qu’on assigne sont-elles requises pour la confession ?

 

          Objection N°1. Il semble que les seize conditions assignées par les docteurs ne soient pas requises pour la confession et qu’il ne soit pas nécessaire qu’elle soit simple, humble, pure, fréquente, claire, discrète, volontaire, modeste, entière, secrète, larmoyante, prompte, forte, accusatrice et obéissante, comme on l’exprime dans ces vers :

 

                    Sit simplex, humilis confessio, pura, fidelis,

                    Atque frequens, nuda, discreta, libens, verecrunda,

                    Integra, secreta, et lacrymabilis, accelerata,

                    Furtis, et accusans, et sit parere pareta.

 

Car la fidélité, la simplicité et la force sont par elles-mêmes des vertus. On ne doit donc pas en faire des conditions de la confession.

          Réponse à l’objection N°1 : Il ne répugne pas que la condition d’une vertu se rencontre dans l’acte d’une autre, soit parce que celle-ci est commandée par elle, soit parce que d’autres vertus possèdent par participation le moyen qui appartient à l’une d’elles principalement.

 

          Objection N°2. Ce qui est pur, c’est ce qui est sans mélange. De même ce qui est simple n’admet ni composition, ni mélange. L’une de ces deux expressions est donc superflue.

          Réponse à l’objection N°2 : Le mot pur exclut la perversité d’intention dont l’homme se purifie, tandis que le mot simple exclut le mélange de tout ce qui est étranger.

 

          Objection N°3. On n’est tenu de ne confesser qu’une fois un péché qu’on n’a commis qu’une fois. Si l’homme ne retombe pas dans son péché, il n’est donc pas nécessaire que sa pénitence soit fréquente.

          Réponse à l’objection N°3 : Cette condition n’est pas absolument nécessaire à la confession, mais elle est seulement utile pour qu’on la fasse mieux.

 

          Objection N°4. La confession a pour but la satisfaction. Or, la satisfaction est quelquefois publique. Donc la confession ne doit pas toujours être secrète.

          Réponse à l’objection N°4 : La confession ne doit pas se faire en public (Des novateurs ayant prétendu que la confession secrète n’avait été introduite que fort tard dans l’Eglise, le concile de Trente s’est exprimé ainsi à ce sujet : Cùm à sanctissimis et antiquissimis Patribus magno unanimique consensu secreta confessio sacramentalis, quâ ab initio Ecclesia sancta usa est, et modò etiam utitur, fuerit semper commendata, manifestè refellitur inanis eorum calumnia qui eam à divino mandato alienam et inventum humanum esse, atque à Patribus in concilio Lateranensi congregatis initium habuisse docere non verentur (sess. 14, chap. 5).), mais en secret à cause du scandale des autres qui pourraient être portés au mal par l’audition des fautes. Mais la peine satisfactoire ne scandalise pas de la même manière, parce qu’on fait les mêmes œuvres satisfactoires pour de petites fautes et même sans qu’on ait fait de péché.

 

          Objection N°5. On ne requiert pas de nous ce qui n’est pas en notre pouvoir. Or, il n’est pas en notre pouvoir de répandre des larmes ; on ne doit donc pas l’exiger de celui qui se confesse.

          Réponse à l’objection N°5 : On doit entendre cette expression des larmes intérieures ou spirituelles (Les larmes du corps ne sont qu’un effet de la sensibilité physique, et par conséquent elles ne sont pas essentielles à la contrition, qui doit être purement intérieure.).

 

          Mais le sentiment des docteurs est contraire.

 

          Conclusion Il faut que la confession considérée comme acte de vertu soit discrète, volontaire, pure, forte, modeste, larmoyante, humble, vraie, claire, simple, entière ; mais si on la considère comme partie d’un sacrement, il est nécessaire qu’elle soit accusatrice, obéissante et secrète, et il est utile qu’elle soit fréquente et prompte.

          Il faut répondre que parmi ces conditions il y en a qui sont nécessaires à la confession, et d’autres qui ont pour but sa perfection. Celles qui sont nécessaires lui conviennent comme acte de vertu et ou comme partie d’un sacrement. Si on la considère de la première manière, on peut l’envisager par rapport à la vertu en général, ou par rapport à la vertu spéciale dont elle est l’acte, ou par rapport à l’acte lui-même. Par rapport à la vertu en général il y a quatre conditions, comme le dit Aristote (Eth., liv. 2, chap. 4). La première c’est qu’on sache ce que l’on fait ; c’est pour cela qu’il est dit que la confession doit être discrète, dans le sens que dans tout acte de vertu il faut de la prudence. Cette discrétion consiste à confesser les fautes les plus graves avec plus de poids et de gravité. La seconde c’est qu’on soit libre, parce que les actes des vertus doivent avoir ce caractère, et c’est pour ce motif qu’on dit qu’elle doit être volontaire. La troisième c’est qu’on agisse pour une fin légitime. C’est ce qui fait dire que la confession doit être pure, c’est-à-dire inspirée par une intention droite. La quatrième c’est qu’on agisse d’une manière constante, et c’est à cet égard qu’on dit que la confession doit être forte, c’est-à-dire qu’on ne doit pas s’écarter de la vérité par honte. Si l’on considère la confession comme un acte de la vertu de la pénitence, on remarque : 1° qu’elle commence par l’horreur qu’on a de la honte du péché, et à ce titre la confession doit être modeste, c’est-à-dire qu’on ne doit pas se vanter de ses péchés à cause de la vanité du siècle qui s’y mêle. 2° Elle s’élève à la douleur que l’on a du péché qu’on a commis, et sous ce rapport on dit qu’elle est larmoyante. 3° Enfin elle a pour terme le mépris de soi-même, et par rapport à cela elle doit être humble, de telle sorte qu’on avoue sa misère et sa faiblesse. D’après la nature propre de cet acte qui est une confession, il faut qu’elle soit une manifestation. Cette manifestation peut être empêchée de quatre manières : 1° Par la fausseté, et à cet égard on dit qu’elle doit être fidèle, c’est-à-dire vraie. 2° Par l’obscurité des mots, et c’est pour obvier à cet inconvénient qu’on demande qu’elle soit claire, de manière que les expressions ne renferment rien d’obscur. 3° Par la multiplicité des paroles, et c’est pour cela qu’on dit qu’elle doit être simple, c’est-à-dire qu’il ne faut exposer en confession que ce qui se rapporte à l’étendue de la faute. 4° En sous-entendant quelques-unes des choses que l’on doit déclarer, et c’est contre ce défaut qu’on dit qu’elle doit être entière. Si l’on considère la confession comme une partie d’un sacrement, alors elle implique le jugement du prêtre qui en est le ministre. Il faut donc qu’elle soit accusatrice par rapport à celui qui se confesse ; prête à obéir par rapport au prêtre ; secrète, quant à la condition du tribunal dans lequel il s’agit des secrets de la conscience. Mais pour que la confession soit meilleure, il est bon qu’elle soit fréquente, et qu’elle soit prompte, c’est-à-dire qu’on se confesse immédiatement (Ces deux dernières conditions sont de conseil, mais elles ne sont pas obligatoires.).

 

Copyleft. Traduction de l’abbé Claude-Joseph Drioux et de JesusMarie.com qui autorise toute personne à copier et à rediffuser par tous moyens cette traduction française. La Somme Théologique de Saint Thomas latin-français en regard avec des notes théologiques, historiques et philologiques, par l’abbé Drioux, chanoine honoraire de Langres, docteur en théologie, à Paris, Librairie Ecclésiastique et Classique d’Eugène Belin, 52, rue de Vaugirard. 1853-1856, 15 vol. in-8°. Ouvrage honoré des encouragements du père Lacordaire o.p. Si par erreur, malgré nos vérifications, il s’était glissé dans ce fichier des phrases non issues de la traduction de l’abbé Drioux ou de la nouvelle traduction effectuée par JesusMarie.com, et relevant du droit d’auteur, merci de nous en informer immédiatement, avec l’email figurant sur la page d’accueil de JesusMarie.com, pour que nous puissions les retirer. JesusMarie.com accorde la plus grande importance au respect de la propriété littéraire et au respect de la loi en général. Aucune évangélisation catholique ne peut être surnaturellement féconde sans respect de la morale catholique et des lois justes.