Saint Thomas d’Aquin - Somme Théologique
Supplément =
5ème partie
Question 31 : Du ministre de l’extrême-onction
Nous
devons ensuite nous occuper de l’administration de l’extrême-onction. A cet
égard trois questions se présentent : 1° Un laïque peut-il conférer ce
sacrement ? (Le concile de Trente a décidé que par les mots employés par S.
Jacques il fallait entendre des prêtres ordonnés par l’évêque, et non des
vieillards qui seraient de simples laïques (sess. 14, chap. 3 et can. 4).) — 2°
Un diacre le peut-il ? — 3° N’y a-t-il que l’évêque qui le puisse ?
Article
1 : Un laïque peut-il conférer l’extrême-onction ?
Objection
N°1. Il semble qu’un laïque puisse aussi conférer l’extrême-onction. Car ce
sacrement tirant son efficacité de la prière, comme le dit saint Jacques (chap.
5), quelquefois la prière d’un laïque est aussi agréable à Dieu que celle d’un
prêtre. Un laïque peut donc conférer ce sacrement.
Réponse
à l’objection N°1 : Le prêtre ne fait pas cette prière en son nom, parce que
comme il est quelquefois dans le péché elle ne mériterait pas d’être exaucée,
mais il la fait au nom de l’Eglise entière en la personne de laquelle il peut
prier comme étant une personne publique, tandis qu’un laïque qui est une
personne privée ne le peut pas.
Objection
N°2. On dit que des Pères du désert en Egypte portaient l’huile aux infirmes et
les guérissaient, et on raconte aussi de sainte Geneviève, qu’elle oignait
d’huile les infirmes. Ce sacrement peut donc être aussi conféré parles laïques.
Réponse
à l’objection N°2 : Ces onctions n’étaient pas sacramentelles, mais la dévotion
de ceux qui les recevaient et les mérites de ceux qui les pratiquaient ou qui
envoyaient l’huile, produisaient la santé du corps par la grâce des guérisons,
mais non la grâce sacramentelle.
Mais
c’est le contraire. L’extrême-onction produit la rémission des péchés. Or, les
laïques n’ont pas le pouvoir de remettre les péchés. Donc ils ne peuvent
conférer ce sacrement.
Conclusion
Quoique à l’article de la mort, pour ne fermer à personne la voie du salut, un
laïque puisse conférer le baptême, l’extrême-onction néanmoins n’est pas d’une
nécessité si grande qu’elle ait besoin de dispense.
Il
faut répondre que d’après saint Denis (Eccles.
hier.,
chap. 5) il y en a qui exercent les fonctions hiérarchiques et il y en a qui ne
font que les recevoir, comme les laïques. C’est pourquoi la dispensation
d’aucun sacrement ne convient aux laïques ex
officio, mais la providence divine a voulu qu’ils
puissent baptiser en cas de nécessité, afin que la faculté d’être régénéré
spirituellement ne manquât à personne.
Article
2 : Les diacres peuvent-ils conférer ce sacrement ?
Objection
N°1. Il semble que les diacres puissent conférer ce sacrement. Car d’après
saint Denis (De hier. eccles., chap. 5) les diacres ont la puissance de purifier.
Or, ce sacrement a été établi uniquement pour purifier l’homme des infirmités
de l’âme et du corps . Les diacres peuvent donc aussi
le conférer.
Réponse
à l’objection N°1 : Ce sacrement purifie en illuminant par la grâce qu’il
confère. C’est pourquoi il ne convient pas à un diacre de l’administrer.
Objection
N°2. Le baptême est un sacrement plus noble que celui dont il est ici question.
Or, les diacres peuvent baptiser, comme on le voit au sujet de saint Laurent.
Ils peuvent donc aussi conférer ce sacrement.
Mais
c’est le contraire. Saint Jacques dit (5, 14) qu’il appelle les prêtres de l’Eglise.
Conclusion
Puisque l’extrême-onction confère la grâce, un diacre ne peut la conférer
d’office.
Il
faut répondre que le diacre a la puissance purgative, mais qu’il n’a pas
l’illuminative. Par conséquent puisque l’illumination est produite par la
grâce, le diacre ne peut administrer d’office aucun sacrement qui la confère.
C’est pourquoi il ne peut conférer l’extrême-onction, puisqu’elle donne la
grâce.
Réponse
à l’objection N°2 : Ce sacrement n’est pas un sacrement de nécessité comme le
baptême. Par conséquent on ne confie pas à tout le monde le soin de le conférer
dans le cas de nécessité, mais on charge seulement ceux auxquels cette fonction
convient d’office. Il ne convient pas non plus aux diacres de baptiser d’office
(Pour l’application de ces paroles voyez 3a pars, quest. 67, art.
1).).
Article
3 : N’y a-t-il que l’évêque qui puisse conférer ce sacrement ?
Objection
N°1. Il semble qu’il n’y ait que l’évêque qui puisse conférer
l’extrême-onction. Car ce sacrement est produit par l’onction, comme la
confirmation aussi. Or, il n’y a que l’évêque qui puisse confirmer. Donc il n’y
a que lui qui puisse conférer l’extrême-onction.
Réponse
à l’objection N°1 : la confirmation imprime un caractère qui place l’homme dans
un état de perfection, comme nous l’avons dit (4, dist. 7, quest. 2, art. 1, et
3a pars, quest. 63, art. 1, 2 et 6). Il n’en est pas de même de
l’extrême-onction, et c’est pour cela qu’il n’y a pas de parité.
Objection
N°2. Celui qui ne peut moins ne peut plus. Or, l’usage d’une matière sanctifiée
l’emporte sur sa sanctification, puisqu’elle est sa fin. Donc puisqu’un prêtre
ne peut sanctifier la matière, il ne peut pas non plus en faire usage.
Réponse
à l’objection N°2 : Quoique dans le genre de la cause finale l’usage de la
matière sanctifiée l’emporte sur la sanctification même de la matière,
cependant dans le genre de la cause efficiente la sanctification de la matière
l’emporte, parce que c’est d’elle que dépend l’usage, comme de sa cause active.
C’est pour cela que la sanctification exige une vertu active plus élevée que
l’usage.
Mais
c’est le contraire. On doit appeler le ministre de ce sacrement près de celui
qui le reçoit, comme on le voit (Jacq., chap. 5). Or,
l’évêque ne pourrait pas approcher de tous les malades de son diocèse. Il n’y a
donc pas que lui qui puisse conférer l’extrême-onction.
Conclusion
Puisque l’extrême-onction ne place pas celui qui la reçoit dans un de gré de
perfection au-dessus des autres, mais qu’on l’administre à tout le monde, elle
peut être conférée non seulement par les évêques, mais encore par de simples
prêtres.
Il
faut répondre que d’après saint Denis (De
eccles. hier.,
chap. 5) l’évêque possède proprement l’office de perfectionner, comme le prêtre
a celui d’illuminer. Par conséquent les sacrements qui placent celui qui les
reçoit dans un état de perfection supérieur aux autres, sont réservés pour être
dispensés par les évêques seuls. Comme cela n’a pas lieu dans l’extrême-onction
puisqu’on la confère à tout le monde, il s’ensuit que de simples prêtres
peuvent l’administrer (Il est à remarquer que tout prêtre peut validement
administrer l’extrême-onction, mais pour le faire licitement il faut avoir été
commis par l’évêque ou le curé qui a juridiction sur le malade.).
Copyleft. Traduction
de l’abbé Claude-Joseph Drioux et de JesusMarie.com qui autorise toute personne à copier et à rediffuser par
tous moyens cette traduction française. La Somme Théologique de Saint Thomas
latin-français en regard avec des notes théologiques, historiques et
philologiques, par l’abbé Drioux, chanoine honoraire de Langres, docteur en
théologie, à Paris, Librairie Ecclésiastique et Classique d’Eugène Belin, 52,
rue de Vaugirard. 1853-1856, 15 vol. in-8°. Ouvrage honoré des
encouragements du père Lacordaire o.p. Si par erreur, malgré nos vérifications,
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