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Islam
Père Zakaria Boutros
Episode 21
Père Zakaria Boutros
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  Le concept d'abrogation.

 Quel est le sens du terme « abrogation » dans le coran?
 En fait il a deux sens: le sens littéral et le sens courant.
Le sens littéral c'est l'annulation, l'ablation ou l'invalidation d'un verset du coran.
Le sens courant, quant à lui, a fait l'objet d'études sérieuses par des docteurs de l'islam. Aussi je transmets maintenant la connaissance que j'en ai acquise, sans exprimer jamais mon opinion personnelle, mais telle qu'elle a été exprimée par ces derniers.
1 – Ibn Kathir nous rapporte le commentaire suivant fait par Ibn-Jarir sur le verset 106 de la sourate la Génisse (Al-Baqarah): « Quel que soit la verset que nous abrogeons, ou que nous effaçons des mémoires, c'est pour en promulguer un meilleur ou un semblable », et Ibn Kathir ajoute: « cela n'est rien d'autre que de rendre ce qui est licite, illicite, ce qui est permis, interdit, et ce qui est interdit, permis ». (1)
2 – L'imam Al-Nasfy ajoute: « la réalité de l'abrogation (Nasekh) c'est de changer un arrêt judiciaire ou de lui mettre un terme ». (2)
 Ainsi trouve-t-on dans la sourate le Tonnerre (Ar-Ra'ad) au verset 39: « Allah efface ce qu'Il veut. »
 De fait ce verset ajoute un nouveau sens à l'abrogation en affirmant que Dieu efface des versets et cet effacement est terrible; ainsi Dieu abroge, ou affaiblit, ou efface, ou remplace à sa guise, et le sens s'en trouve changé comme le commentateur l'a relevé.

 Importance de l'ablation dans le coran.
 Voilà un sujet qui s'avère particulièrement important quand on parcourt les livres qui traitent de l'abrogation, comme « Abrogateur et abrogé » de Hebat Allah Al-Baghdadi (mort en 410 de l'Hégire) ou « Abrogateurs et abrogés dans le noble coran » d'Abou Gaffer Al-Nahas. Et bien d'autres livres et sites web soulignent l'importance de ce phénomène, établissant clairement que l'on ne peut pas comprendre le coran à moins d'être parfaitement informé sur ce problème de l'abrogation.

 Supposons par exemple une législation toute entière basée sur un certain nombre d'attendus et toujours présente dans le coran. Mais cette législation a été abrogée. Or si l'on n'en sait rien on considérera cette législation comme toujours valable alors qu'il en existe une nouvelle!
 Voici une anecdote dont Ali ben Abou-Taleb fut l'un des protagonistes! « Un jour, comme il entrait dans une mosquée d'Al-Kophah, il y vit un homme connu sous le nom d'Abdoul Rahman ben Dab, un ami d'Abou Moussa El-Awari. Les fidèles faisaient cercle autour de lui alors qu'il prêchait. Quand Ali ben Abou-Taleb l'entendit, il n'aima pas du tout  ce qu'il entendait. Il interpella l'homme: « Connais-tu l' abrogateur et les abrogés? » L'autre répondit: « Non! » Alors il lui rétorqua: « Tu fais partie des morts, et tu entraînes les autres à la perdition »... Il le saisit séance tenante par l'oreille et l'expulsa de la mosquée en lui interdisant d'y remettre jamais les pieds. (3)
 On voit ici l'importance de connaître les règles de l'abrogation pour interpréter correctement le coran!

 Mais d'où vient donc ce concept « d'abrogateur et d'abrogé »? voilà une question aussi sérieuse qu'importante puisque l'on trouve dans le coran des versets très connus qui parlent clairement de l'abrogation de certains autres versets. En voici les plus connus:
. Sourate la Génisse (Al-Baqarah) – v. 106: « Quel que soit le verset que nous abrogions ou que nous poussions dans l'oubli, nous en donnons un semblable sinon un meilleur. »

. Sourate les Abeilles (An-Nahl) – v. 101: « Quand nous remplaçons un verset par un autre:  Allah sait mieux que personne ce qu'Il révèle, ils disent alors: « Vous n'êtes qu'un menteur » - Non! Mais cela dépasse simplement l'entendement de la plupart d'entre eux. »
. Sourate le Tonnerre (Ar-Ra'ad) – v. 39: « Allah efface ce qu'Il veut et confirme ce qu'Il veut, car en Lui est la source du livre. »
. Sourate le Pèlerinage (Al-Hajj) – v. 52: «  Allah abroge ce que Satan a semé »!!
 Voilà les versets les plus connus qui confirment la réalité de l'abrogation dans le coran.

 Pour ceux qui disent que Dieu est le Tout-puissant et qu'Il sait tout, en sorte qu'Il peut faire  ce qu'Il veut: Dieu est en effet Tout-puissant, Il fait ce qu'Il décide de faire. Mais Il respecte l'esprit des hommes, Ses créatures. Ainsi ne met-Il jamais l'esprit en contradiction avec lui-même. Il peut entraîner l'esprit au plus haut, mais jamais le heurter. De notre côté il nous faut,  pauvres humains, prendre conscience de la sagesse de Sa création. Dieu nous a donné un esprit pour chercher et comprendre. Il fait ce que bon Lui semble, mais sans aller jamais contre la logique ni la saine raison, comme nous pouvons le voir et nous en assurer.

 Comment doit-on comprendre: « à oublier »?
 Cela veut dire tout simplement que Dieu provoque l'oubli dans l'esprit même du messager afin qu'il « oublie » les versets en cause. Ainsi raconte-t-on que le prophète Mahomet lui-même, le prophète de l'islam, a « oublié » un certain nombre de versets du coran.
 Par exemple, dans Sahih El-Bokhary (proposition 5092), Aïcha nous dit: « J'ai entendu le prophète, la paix soit sur lui, dire alors qu'il écoutait un homme réciter une sourate: « Dieu l'ait en pitié, il vient de me rappeler le verset n° tant de telle sourate qu'il me fallait oublier ... »
 Certains disent qu'il se considérait lui-même comme un pauvre être humain à la mémoire incertaine.
 On notera que la proposition en question (la 5092) ne dit pas qu'il a oublié un certain verset, mais que Dieu le lui a fait oublier.
 Comment est-il possible que Dieu amène son prophète à oublier des versets qu'il vient précisément de lui révéler???

 Nous le demandons aux docteurs de l'islam et aux érudits: pourquoi Dieu lui communique-t-Il d'abord un verset, pour ensuite le lui faire oublier? Nous ne cherchons pas à dénigrer le coran ou à le combattre, mais nous tenons à poser une question que beaucoup de gens se posent. Les livres de l'islam sont largement accessibles, et nous les étudions en vue de les comprendre. Nous avons même demandé à l'un des éminents spécialistes d'Al-Azhar de nous prouver que nous sommes dans l'erreur, et de nous dire où est la vérité...

. Sahih Muslim nous rapporte cette parole d'Aïcha: « Le prophète, la paix soit sur lui, écoutait un jour un homme réciter le coran dans une mosquée. Il dit alors: « Dieu le prenne en pitié, il vient de me rappeler un verset qu'il m'a été enjoint d'oublier? » (4)
. Ibn Kathir écrit de son côté: « Comme l'ont rapporté Ibn-Jarir et El-Hassan: « Le prophète, la paix soit sur lui, déclarait lui-même avoir lu une partie du coran, puis l'avoir oubliée. » - ce que nous confirme Ibn Abbas: « De ce qu'il lui était révélé pendant la nuit, au matin il l'avait oublié. » (5)
 Nous pouvons nous demander si Dieu n'aurait pas mieux fait de ne pas lui révéler ce verset, plutôt que de le lui faire oublier...

 Toutes ces interrogations demandent réponse pour tout homme qui respecte son propre esprit – sa propre raison - et cherche la vérité.
 Le problème vient de ce que bien des gens prennent ces choses comme des postulats; ils répètent « Dieu l'a dit » et « le prophète l'a dit », sans penser à ce qu'ils disent.
 Et si Dieu a provoqué l'oubli de sa révélation dans l'esprit même de son prophète, alors que ne le fait-Il pas aussi dans l'esprit de ceux qui apprennent le Coran par coeur?

 Nous attendons une réponse de ces éminents docteurs, ô combien dignes de respect, à ces questions qui se posent à l'intelligence des petits.

  Que signifie aussi: « un meilleur »?
 La question qui s'impose d'elle-même est la suivante: peut-il y avoir un verset meilleur qu'un autre? Ou, en d'autres termes, y en a-t-il de valables et d'autres encore plus valables? Et s'il en est ainsi ne pouvons-nous pas oser dire que Dieu laisse échapper parfois des paroles incorrectes – Dieu nous pardonne cette sottise...
 Et s'il y a des paroles meilleures que d'autres, pourquoi Dieu ne les a-t-il pas révélées d'emblée?
 Et doit-on avoir des préférences dans les révélations divines?

 Selon le coran, certains versets sont préférables à d'autres puisqu'Il a dit « un meilleur ou un semblable ». Mais si le prophète nous en rapporte un semblable, pourquoi donc ne s'est-il pas souvenu du premier puisque le second lui est similaire?
 Et enfin, quels sont les mots réellement gravés dans les tables éternelles?
 Voilà un problème très important et très complexe.

 Quels sont les mots gravés dans les tables?? Ceux qui ont été abrogés, ou jetés dans l'oubli?? Ou les derniers révélés, réputés meilleurs, qui ont été substitués à ceux qui ont été abrogés ou qui sont tombés en désuétude?

 A toutes ces questions personne ne donne de réponse.
 Les musulmans croient-ils eux-mêmes en la réalité de l'abrogation?

 Voici quelques opinions de juristes islamiques sur ce problème:
. Ibn Kaphir affirme: « Tous les musulmans admettent la possibilité qu'un précepte de Dieu puisse être abrogé. »
. L'imam Al-Nasfy nous dit: « Il est permis d'abroger des parties du coran ou de la sunna, comme d'en rajouter, ou d'effacer certains textes des mémoires. » (7)
. L'encyclopédie islamique – 3ème partie, p. 9900 nous dit: « L'abrogation est un acte divin parfaitement délibéré, prédéterminé depuis l'origine des temps. » (8)
. Sur le site internet d'Al-Azhar, on peut lire un article particulièrement important de M. Abdoul-Fattah Mahmoud-Idriss à propos des versets abrogateurs et des versets abrogés dans lequel il écrit: «  La plupart des docteurs en droit islamique s'accordent sur la probabilité de l'abrogation, autant que sur sa logique et sa réelle existence. »
. Abou Gaffar Al-Nahas a dit: « Comme un certain nombre de prescriptions du coran devaient être abrogées, il est évident que l'abrogation est une nécessité. » (9)
. Al-Nahas dit aussi: « Nous devons souligner que la dénégation de l'abrogation dans le coran est une vieille question déjà posée par Abou Muslim Al-Afshany. » (10)
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(1)  Ibn Kathir, « Exégèse » (Tafsir) – 1ère partie, p. 104
(2)  Al-Nasfy, « Exégèse » - 1ère partie, p. 116
(3) « Les abrogateurs et les abrogés », d'après Hebat Allah Al-Baghdadi, p. 12
(4)  Shahih Muslim, proposition n° 1874
(5)  Ibn Kathir, « Exégèse » - 1ère partie, p. 104
(6)  id. p. 105
(7)  Imam Al-Nasfy, « Exégèse » - 1ère partie, p. 116
(8)  L'Encyclopédie islamique, 3ème partie, p. 9900
(9) « Les abrogateurs et les abrogés », d'après Ali Gaffer Al-Nahas, p. 5
(10)  id. p. 7
 
 

Traduction française placée sous licence commons creatrive :  autorisation de copie gratuite avec indication de la source : jesusmarie.com, France, Paris, 2009.

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