François-Robert-Romulus BELLARMIN
cardinal, archevêque de Capoue,
l’un des principaux théologiens de la Compagnie de Jésus
et, comme controversiste, l’un des plus savants et des plus habiles défenseurs
de l’Eglise romaine.
article du Dictionnaire de Théologie
Catholique
I. Notice biographique. II. Ecrits. III. Caractéristique, doctrine, influence.
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I. NOTICE BIOGRAPHIQUE.
1° Enfance et jeunesse religieuse,
1542-1568.
Robert Bellarmin naquit à Montepulciano,
au territoire de Florence, le 4 octobre 1542. Son père, Vincent,
appartenait à une famille noble, mais ruinée ; sa mère,
Cynthia, était sœur du cardinal Cervin qui, sous les papes Paul
III et Jules III, présida le concile de Trente et, en 1555, occupa
pendant trois semaines le trône pontifical sous le nom de Marcel
II. L’enfance de Robert nous est connue par des notes autobiographiques
qu’il rédigea dans sa vieillesse et qui furent imprimées
pour la première fois en 1676, comme pièces du dossier relatif
à la cause du vénérable serviteur de Dieu. Positio
super dubio an contest de virtutibus, Rome, 1712, Summarium, p. 118 sq.
Quelques détails complémentaires se tirent de lettres inédites
de la famille Cervin, récemment publiées par G. Buschbell,
Aus Bellarmins Jugend, dans Historisches Jahrbuch, Munich, 1902, t. XXIII,
p. 52 sq., 307 sq. Celui qui devait fournir une carrière si bien
remplie nous apparaît d’abord comme un enfant faible et maladif,
mais doué de qualités d’esprit exceptionnelles, où
dominent la facilité à tout saisir, un rare talent d’appropriation
et un vif penchant pour la poésie. En même temps les exemples
et les leçons de sa sainte mère développaient dans
cette nature d’élite une tendre et solide piété. Au
milieu des difficultés qu’entraînaient pour eux l’entretien
et l’éducation d’une nombreuse famille, les parents de Robert comptaient
déjà sur lui pour relever leurs affaires ; il allait se rendre
à Padoue, pour étudier la médecine, quand l’arrivée
des jésuites à Montepulciano tourna ses pensées vers
un autre objet. En 1558, il sollicita du P. Jacques Lainez, vicaire général
de la Compagnie de Jésus, son admission dans cet ordre.
Cette résolution, dont la conséquence
voulue était le renoncement aux dignités ecclésiastiques,
renversait les espérances de Vincent ; le consentement paternel
se fit attendre pendant un an ; qui devint un vrai temps de noviciat, consacré
à l’étude et à la piété dans la solitude
d’une maison de campagne. Libre enfin, Robert entra dans la Compagnie de
Jésus à Rome le 21 septembre 1560. Bientôt, il commença
l’étude de la philosophie au Collège romain, où enseignaient
des maîtres tels que Tolet, Perpinien et Mariana. Malgré son
mauvais état de santé, il obtint de grands succès
et se signala dès lors par la netteté et la solidité
de l’esprit. Quelques années, laborieuses et fructueuses, se passèrent
ensuite dans l’enseignement des belles-lettres, d’abord à Florence
en 1563, puis à Mondovi en Piémont, de 1564 à 1567.
La poésie le charmait toujours ; pour les grandes fêtes il
composait des vers qu’on affichait à la porte de l’Eglise. Autob.,
§ 11. Mais il détruisit plus tard ses œuvres de jeunesse ;
il n’en reste que très peu de chose : une petite pièce De
sancta cordula, vierge et martyre, dont il fait hommage à son oncle,
Alexandre Cervin, dans une lettre du 23 novembre 1558, publiée par
G. Buschbell, loc. cit. ; l’hymne au Saint-Esprit, Spiritus celsi dominator
axis, qui a été inséré, sans nom d’auteur,
dans les Selecta carmina virorum illustrium : quelques poésies profanes
qu’il avait corrigées et qui se trouvent dans le dossier de sa cause.
Summarium additionale, p. 27 sq. En 1567, le jeune professeur fut envoyé
à Padoue pour commencer
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ses études de théologie
; il y passa deux ans, ayant pour maîtres un dominicain et un jésuite.
Dans un acte public qu’il soutint à Gênes, il fit preuve des
mêmes qualités et obtint les mêmes succès qu’au
Collège romain.
2° Sermons et leçons
de Louvain, 1569-1576. L’hérésie menaçait alors
les provinces de Flandre ; on demandait à Louvain un prédicateur
qui pût tenir tête. Dans les divers endroits où il avait
passé, Bellarmin s’était signalé par ses succès
oratoires ; il fut désigné par le général de
la Compagnie de Jésus, saint François de Borgia, mais il
devait en même temps continuer, pendant un an, ses études
de théologie. Il partit de Rome au printemps 1569, et fit route
avec le célèbre William Allen, plus tard cardinal. A Louvain,
le nouveau prédicateur obtint un succès remarquable, et par
le nombre des auditeurs qui se pressaient autour de sa chaire à
l’église saint Michel, et par les fruits de grâce ou de conversion
qui s’ensuivirent parmi les étudiants, le peuple et même les
hérétiques. Voir la lettre d’un témoin, Thomas Sailly,
dans l’Annuaire de l’université catholique de Louvain, 1841, p.
169 sq. Au ministère de la prédication s’en joignit bientôt
un autre, non moins important. Ordonné prêtre à Gand,
par l’évêque de cette ville, Corneille Janssens, le 25 mars
1570, Bellarmin inaugura, au mois d’octobre suivant, l’enseignement public
de la théologie au collège des jésuites. Il remplit
cet office jusqu’en 1576, prenant pour texte de ses leçons la Somme
théologique de saint Thomas d’Aquin. En même temps, il composa
pour ses élèves ou son usage personnel deux ouvrages d’inégale
importance : une grammaire hébraïque, imprimée peu de
temps après son retour à Rome, et une sorte de patrologie,
publiée en 1613, sous le titre De scriptoribus ecclesiasticis. Autob.,
§ 23 et appendice.
Comme professeur de théologie,
le futur controversiste eut à lutter contre un adversaire de marque,
Michel Baius, dont les erreurs, condamnées par saint Pie V, le 1er
octobre 1567, n’en continuaient pas moins d’exercer une pernicieuse influence
à Louvain. Lutte courtoise et qui n’eut d’autre objet que les vérités
en jeu ; sans nommer jamais son adversaire, le jeune professeur profitait
des occasions que son cours lui offrait naturellement, pour réfuter
les erreurs baianistes. De retour à Rome, il ne cessa pas de suivre
cette affaire avec la plus grande attention ; on en peut juger par le rapport,
intéressant et instructif, qu’il composa en 1579 et qui se trouve
dans la continuation des Annales de Raynaldi par Laderchi. Annales ecclesiasticis
ab anno 1566, Rome, 1728, t. XXII, p. 366 ; t. XXIV, p. 183 sq. Bellarmin
n’en resta pas moins en bons termes avec l’université de Louvain.
Lorsqu’en 1600, celle-ci eût à se défendre ses privilèges
en cour de Rome, il y eut échange de lettres et d’aimables procédés
entre les docteurs lovanistes et l’ancien adversaire de Baius, devenu cardinal
influent. Annuaire de l’université, 1841, p. 164sq. La correspondance
imprimée de Bellarmin contient même une lettre amicale, adressée
en 1606 au fameux Jacques Janson. Venerabilis servi Dei Robert Bellarmini
S. R. E. cardinalis e Soc. Jesu epistolæ familiares, epist. XLVII,
in-12, Rome, 1650. Plus tard, quand on traita en cour de Rome de la béatification
du vénérable serviteur de Dieu, une requête favorable
fut adressée au Saint-Siège, en 1713, par le vicaire capitulaire
de l’archevêché de Malines. Annuaire de l’université,
1841, p. 172.
3° Cours de controverse au Collège
romain¸1576-1588. Les troubles excités en Flandre par
l’invasion du prince d’Orange, Guillaume le Taciturne, avaient été
pour Bellarmin l’occasion de grandes souffrances et de grands dangers.
Autob., § 24 sq. Sa santé, toujours chétive, s’affaiblit
tellement que, la dernière année de son séjour dans
l’Athènes brabançonne, il dut renoncer à la prédication
et se borner au travail de l’enseigne-
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ment. Mais, comme ses forces ne cessaient
de décliner, en 1576, le P. Everard Mercurian, quatrième
général de la Compagnie de Jésus, le rappela en Italie.
Des demandes vinrent de divers côtés : à Paris, on
offrait au P. Robert les chaires les plus considérables, à
Milan, saint Charles Borromée le désirait pour prédicateur
de sa cathédrale. Le P. Mercurian avait d’autres vues ; il se proposait
de créer au Collège romain une chaire de controverse, dont
les leçons s’adresseraient surtout aux jeunes gens du Collège
germanique et du Collège anglais. Grégoire XIII bénit
ce projet, et Bellarmin fut désigné pour occuper la chaire.
A la fin d’octobre s’ouvrit le célèbre cours, d’où
sortit le principal ouvrage du grand controversiste : Disputationes de
controversiis christiniæ fidei adversus hujus temporis hæreticos.
Dès le début, le nouveau professeur se fit admirer par sa
méthode claire et compréhensive, son érudition, la
franchise et la dignité de sa polémique. Aussi l’enseignement
d’abord, puis la publication de ce cours de controverses, eurent, chez
les protestants comme chez les catholiques, un immense retentissement.
Bellarmin se trouva dès lors au premier rang parmi les champions
de l’Eglise romaine, mais il eut surtout la joie d’être l’instrument
de nombreuses et insignes conversions ; les Epistolæ familiares nous
en font connaître quelques-unes. Epist. XI, XLVI, LXI, CVII, CL.
D’autres travaux s’ajoutèrent
à l’enseignement pendant cette période d’intense activité.
Pendant ses vacances, du mois de mai au mois d’octobre1579 ou 1580, le
P. Robert révisa à Naples les quatre premiers livres des
commentaires de Salmeron sur l’Ecriture sainte et lui suggéra beaucoup
de corrections. Autob., appendice. Les circonstances l’amenèrent
ensuite à publier divers ouvrages de polémique : 1584, l’écrit
Sur la translation de l’empire romain des Grecs aux Francs, en 1585, le
Jugement du livre de la Concorde, augmenté plus tard d’une Courte
apologie ; en 1586, sous le nom de François-Romulus, la Réponse
aux principaux arguments d’une apologie, faussement intitulée catholique,
en faveur du droit de succession d’Henri de Navarre, au trône de
France. Enfin, un livre anonyme, paru à Monaco en 1586 et dirigé
contre le pape Sixte V, à l’occasion de la bulle qu’il avait lancée
contre Henri de Navarre le 9 septembre 1585, donna lieu à la Réponse
au livre anonyme qui a pour titre : Aviso piacevole dato alla bella Italia.
Vers la même époque, Bellarmin se trouva mêlé,
comme censeur et comme apologiste, à la controverse survenue à
Louvain entre la faculté de théologie et deux professeurs
jésuites, Léonard Leys ou Lessius et Jean Duhamel. La faculté
avait censuré, en septembre 1587, trente-quatre propositions, dont
trois se rapportaient à l’Ecriture sainte, et le reste aux matières
brûlantes de la grâce et de la prédestination. Sans
endosser personnellement toutes les opinions des professeurs incriminés,
Bellarmin émit sur la censure de Louvain un jugement motivé,
où il dénonça le côté arbitraire et excessif
; il composa en même temps, pour la défense de Lessius, un
petit traité dont il sera question dans la seconde partie de cette
étude.
La considération dont le
P. Robert jouissait à Rome avait depuis longtemps porté le
pape et les cardinaux à s’aider de ses lumières et de son
concours. Il fut l’auxiliaire du cardinal Montalto dans l’édition
des œuvres de saint Ambroise que le futur Sixte-Quint entreprit en 1580.
Il travailla, dit-on, avec d’autres savants à l’édition du
Rituale, imprimée à Rome sous Grégoire XIII, en 1584.
Son nom figure enfin parmi ceux des consulteurs que le même pape
adjoignit à la congrégation précédemment instituée
par Pie IV pour la révision de la Vulgate, et qui, en guise de travail
préliminaire, édita en 1587 l’Ancien Testament d’après
les Septante. Mais bientôt une mission extérieure écarta
momentanément de Rome le P. Bellarmin.
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4° Légation de France,
1590. Après le meurtre du roi Henri III, accompli le 2 août
1589, Sixte-Quint résolut d’envoyer en France le cardinal camerlingue
Henri Gaétani, avec le titre de légat apostolique et la mission
d’étudier l’état des esprits, de protéger aux mieux
les intérêts du catholicisme et de faire autant que possible
œuvre de paix, tout en conservant vis-à-vis des paris une entière
indépendance. Comme le légat pouvait se trouver en face de
questions juridiques et théologiques des plus graves, le pape voulut
qu’il fût accompagné de savants prélats et que Bellarmin
leur fût adjoint en qualité de théologien. Gaétani
et ses auxiliaires partirent de Rome au commencement d’octobre et arrivèrent
à Paris le 20 janvier 1590 ; ils y restèrent jusqu’à
la fin d’août. Les incidents du voyage, le séjour à
Paris dans l’inaction et les souffrances d’un siège rigoureux, puis
la très grave maladie dont il fut atteint au retour, ont été
racontés par Bellarmin lui-même dans son autobiographie, §
29-32.
Le légat avait pris à
l’égard du roi de Navarre une attitude d’hostilité intransigeante,
qui l’a fait juger sévèrement par les historiens français,
et qui provoqua le mécontentement de Sixte-Quint. H. de l’Epinois,
La législation du cardinal Gaétani en France, dans la Revue
des questions historiques, 1881, t. XXX, p. 460 sq., étude résumée
dans le livre du même auteur sur La ligue et les papes, Paris, 1886
; Caringi, Sixte-Quint et la Ligue, dans la Revue de monde catholique,
10 février et 10 avril 1867. De son côté, le théologien
du légat ne cacha pas sa sympathie pour le parti de la Ligue, et
plus tard, dans la préface du tome IV de ses Controverses, il a
rendu au cardinal Gaétani un bel hommage d’estime et d’admiration.
Mais, en pratique, il se renferma scrupuleusement dans le rôle qui
lui avait été désigné par le pape. Consulté
un jour par le légat sur une affaire purement politique, il fit
cette réponse, au rapport d’un témoin, Pierre Seguier : «
Monseigneur, comme je n’ai été envoyé en France que
pour les questions qui touchent la religion et à ses progrès,
je ne crois pouvoir sans désobéir m’occuper de celles où
les intérêts temporels sont en jeu. » N. Frizon, Vie
du cardinal Bellarmin, in-12, Avignon, 1827, t. I, p. 170. Pour le reste,
il s’est rendu ce juste témoignage, qu’il ne fit rien qu’au nom
du légat : Nihil ibi egit N. nisi nomine cardinalis legati. Des
bruits alarmants ayant couru, comme celui d’un concile national où
il serait question de créer un patriarche indépendant, il
composa une lettre latine qui devait être adressée, au nom
du cardinal, à tous les évêques français pour
empêcher toute assemblée de ce genre. Le 4 août, il
fut invité avec d’autres théologiens à répondre
à ce problème délicat : « Les Parisiens encourraient-ils
la peine de l’excommunication dans le cas où ils se soumettraient
au Navarrais ? » Il se prononça nettement pour la négative.
Henri IV sut gré à Bellarmin de sa conduite sage et réservée
: devenu le roi Très-Chrétien, il vit toujours dans le cardinal
jésuite un ami, et ne se souvint point des attaques du controversiste
contre le prince huguenot. Voir, sur toute cette question, J.-B. Couderc,
S. J., Le vénérable cardinal Bellarmin, l. II, c. XII, XIII,
2 in-8°, Paris, 1893.
5° Les controverses à
l’Index : préface de la Vulgate, 1590-1592. La mort de Sixte-Quint,
survenu le 27 août 1590, mit fin à la légation du cardinal
Gaétani et aux appréhensions que lui causait le mécontentement
connu du rude pontife. Le théologien du légat n’avait pas
non plus à se louer du pape défunt. Depuis, trois ans, celui-ci
avait fait travailler à la rédaction d’un nouvel Index, que
vingt-deux nouvelles règles accompagneraient ; en 1590, l’ouvrage
fut imprimé. Or, dans les rares exemplaires de cet Index qui ont
survécu, on lit à la page 52, au verso : Roberti Bellarmini
disputationes de controversiis christianæ fidei adversus hujus temporis
hære-
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ticos. Nisi prius ex superioribus recglis
recognitæ fuerint. Il s’agissait du Ier tome des Controverses, paru
en 1586. Le fait est indubitable, non moins que le motif de cette rigueur
qui atteignait en même temps et pour la même raison un théologien
dominicain de mérite, François de Victoria : Sixte-Quint
avait trouvé que ces auteurs limitaient trop la juridiction temporelle
du souverain pontife en affirmant qu’il n’avait pas le domaine direct du
monde entier, et il avait, de sa propre autorité, fait inscrire
les deux ouvrages à l’Index. Autob., § 33 ; Etudes religieuses,
1870, 4e série, t. V, p. 634 sq. ; Couderc, op. cit., t. I, p. 131
sq. Toutefois, un détail généralement omis doit s’aoute
: Sixte-Quint avait fait préparer, dès le 9 mars, la bulle
qui devait donner au nouvel Index force de loi, mais il fut surpris par
la mort avant que cette bulle eut été publiée. Aussitôt,
les exemplaires imprimés de l’Index furent recueillis et, après
un examen fait sur l’injonction du nouveau pape, Bellarmin et Victoria
furent innocentés. Reusch, Der Index der verbotenen Bücher,
Bonn, 1883, t. I, p. 501 sq. Ainsi la condamnation voulue par Sixte-Quint
ne fut ni réellement consommée sous son pontificat, ni sanctionnée
par son successeur. C’est ce que confirme d’une manière explicite
une lettre, écrite le 9 novembre 1590 par le général
de la Compagnie de Jésus, Claude Aquaviva, au P. Ferdinand Alber,
provincial de la Haute Germanie ; je donne le texte même de ce document
inédit : De libro P. Bellarmini Reverentia V. ita loqui videtur
ac si putaret fuisse prohibitum, quod non ita est. Nam inter ceteras Dei
providentias hæc fuit quod, cum Sixtus incumberet in eam voluntatem
eum prohibendi, immo jam index excussus esset, in quo ipse quoque nominabatur
tamen et ipse propter aliorum operam a nobis interpositam aliquamdiu inhibuit
et suspendit, et multo magis eo mortuo cardinales, qui statim revocarunt
vel suspenderunt indicem illum.
En 1591 et 1592, d’abord sous Grégoire
XIV, puis sous Clément VIII, Bellarmin prit une part active à
la préparation et à la publication de l’édition définitive
de la Vulgate, dite sixto-clémentine. Ce qu’il pensait de l’édition
sixtine, parue l’année précédente, nous est connu
par une lettre qu’il adressa, en 1602, à Clément VIII : «
Votre Béatitude sait à quel danger Sixte-Quint s’exposa lui-même
et toute l’Eglise, lorsqu’il entreprit la correction des saint Livres d’après
les lumières de sa science particulière, et je ne sais vraiment
pas si jamais l’Eglise a couru un plus grand danger. » Cependant,
quand il s’agit de reprendre le travail en sous-œuvre, l’auteur des Controverses
conseilla de sauvegarder autant que possible la mémoire du pontife
; au lieu de prohiber publiquement sa Bible, mieux valait la corriger et
la réimprimer sous le nom de Sixte lui-même. L’avis prévalut,
et Bellarmin fut l’âme de la nouvelle commission qui, sous la présidence
et dans la villa du cardinal Marc-Antoine Colonna, à Zagaroto, poursuivit
rapidement le travail et l’acheva vers le commencement d’octobre 1591.
Autob., § 33.
L’édition sixto-clémentine
ne parut cependant que le 9 novembre de l’année suivante, sous le
pontificat de Clément VIII. Bellarmin est l’auteur de la Præfatio
ad lectorem, qui parle de « fautes d’impression » dans l’édition
sixtine et attribue à Sixte-Quint lui-même le projet d’une
révision et d’une réimpression ; d’où, dans l’édition
clémentine, ce titre de Biblia sacra vulgatæ editionis Sixti
pontificis maximi jussu recognita. Grave question, où la véracité
et la loyauté du serviteur de Dieu ont été mises en
cause ; car ses adversaires ont révoqué en doute la résolution
attribuée à Sixte-Quint, et opposé au passage de la
préface de la Bible clémentine celui de l’autobiographie
où il est parlé de « changements regrettables »
et de fautes dues à la précipitation « soit des typographes,
soit d’autres personnes ». Mais, sur le premier chef, le doute est
arbitraire, et le témoi-
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gnage de Bellarmin se trouve corroboré
par celui d’Ange Rocca, secrétaire de la commission chargée
de préparer l’édition de la Vulgate. Voir F. Prat, La Bible
de Sixte-Quint, dans les Etudes religieuses, septembre 1890, p. 47 sq.
; Couderc, Op. Cit., l. II, c. XV. Et sur l’autre chef, la difficulté
n’a-t-elle pas été grossie et exagérée à
plaisir ? Sans doute, dans ce document strictement prié qu’était
l’autobiographie, Bellarmin parle plus librement que dans la préface
officielle d’une Bible destinée à la plus grande publicité
; mais cette différence de langage, dans des écrits d’un
caractère si différent, se comprend fort bien, sans qu’il
soit nécessaire d’incriminer l’écrivain ; c’est ce qui a
été longuement établi dans les débats soulevés
à ce sujet au procès de béatification. L’expression
même de la préface, præli vitium, ne serait-elle pas
susceptible d’un sens plus large que l’expression française de «
fautes d’impression » ? Positio super dubio an constet de virtutibus
theologalibus, part. III, c. I, § 8, in-fol., Rome, 1749. En tout
cas, il n’y a dans un tel langage qu’une réticence parfaitement
motivée et digne de louange, comme l’a remarqué le cardinal
Cavalchini dans sa relatio, in-4°, Rome, 1753, p. 178 ; car c’est un
langage dicté par la réserve et la charité, ut nimirum
modestiore, quoad posset, minusque invidiosa loquendi formula uteretur,
ubi necessitas non ex poscebat apertius ac liberius loqui.
6° Emplois et travaux divers
; l’élevation au cardinalat, 1593-1599. ? Après son retour
de France, Bellarmin avait repris au Collège romain la charge de
père spirituel, qui lui avait été confiée en
1588, quand il eut terminé son cours de controverse. C’est dans
cet office qu’il eut le bonheur de diriger et d’assister à sa mort,
dans la nuit du 20 au 21 juin 1591, saint Louis de Gonzague. Plus tard,
il rendit à son illustre pénitent les plus précieux
témoignages ; d’abord, dans une lettre adressée au P. Cépari
le 17 octobre 1601, et qu’on trouve citée dans presque toutes les
histoires du saint patron de la jeunesse ; puis, dans un panégyrique
prononcé en 1608 dans l’église du Collège romain,
au jour anniversaire de la mort de Louis ; surtout, dans la S. C. des Rites,
où son zèle et son autorité furent d’un grand poids
pour promouvoir la cause de béatification. Autob., appendice. En
1618, il eut enfin le bonheur de vénérer sur les autels son
illustre pénitent.
Bientôt commença pour
Bellarmin l’élévation aux plus hautes charges dans la Compagnie
de Jésus, puis à la cour pontificale. Nommé recteur
du Collège romain en décembre 1592, il assista l’année
suivante, comme député, à la cinquième congrégation
générale de son ordre. Choisi en premier lieu pour faire
partie de la commission chargée de mettre la dernière main
au Ratio studiorum, il proposa plusieurs règles fort sages qui furent
approuvées à l’unanimité, en particulier celle qui
prescrit aux professeurs jésuites d’avoir saint Thomas pour maître
en théologie scolastique. Provincial de Naples en 1595, il montra
dans l’exercice de sa charge, une prudence, une douceur, un ensemble de
vertu qui lui méritèrent cet éloge du bienheureux
Bernardin Réalino : « C’est véritablement un grand
saint. » Mais, au début de l’année 1597, il fut rappelé
à Rome ; le cardinal Tolet, théologien du pape, venait de
mourir et, sur le conseil de Baronius, Clément VIII lui désignait
pour successeur celui que Sixte-Quint avait jadis donné pour théologien
au cardinal Gaétani. En même temps, il le nommait consulteur
du Saint-Office ; il joignit ensuite à cette fonction celle d’examinateur
des évêques. Bellarmin, de son côté, n’oubliait
pas sa mission d’écrivain. Outre la publication, en 1597, du dernier
tome de ses Controverses, il composa plusieurs ouvrages : en 1596, la Réfutation
d’un libelle sur le culte des saints ; au début de 1597, sa Doctrine
chrétienne, et, l’année suivante, l’Exposition plus complète
de la doctrine chrétienne, en d’autres termes, son petit et son
grand catéchisme ;
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en 1599, un traité Sur les indulgences
et le jubilé, un autre Sur l’exemption des clercs, enfin la Courte
apologie de son travail, contre le livre de la Concorde. L’hymne Pater
superni luminis, insérée au bréviaire romain dans
l’office de saint Marie-Madeleine, date plus ou moins de la même
époque ; elle fut composée à Frascati dans une sorte
de joute provoquée par Clément VIII entre son théologien
et le cardinal Antoniani.
Bellarmin venait d’être nommé
recteur de la Pénitencerie, quand, le 3 mars 1599, le pape le créa
subitement cardinal, en lui enjoignant sous peine de faute grave de s’abstenir
de toute résistance. Dans le consistoire, Clément justifia
son choix en des termes fort honorables pour l’élu : « Celui-ci,
dit-il, nous l’avons choisi, parce que l’Eglise de Dieu n’a pas son pareil
pour la doctrine, et qu’il est le neveu d’un excellent et très saint
pontife. Hunc eligimus, quia Ecclesia Dei non habet parem in doctrina,
et est nepos optimi et sanctissimi pontificis. » Bellarmin reçut
le titre cardinalice de Sainte-Marie in via ; il l’échangea plus
tard contre celui de Sainte-Praxède, par un sentiment de dévotion
envers saint Charles Borromée qui avait eu ce dernier titre. Il
fut nommé membre du Saint-Office, des Rites sacrés, de l’Index
et de deux autres congrégations nouvellement instituées,
l’une pour la réforme du bréviaire romain, l’autre pour l’examen
du mariage du roi Henri IV. Bientôt il eut la joie et l’honneur de
faire réhabiliter un innocent, calomnié par ceux qu’il avait
voulu dénoncer, Jean de la Barrière, abbé de Feuillant,
dans l’ancien diocèse de Rieux. Couderc, op. cit., t. I, p. 285
sq.
L’élévation de Bellarmin
ne diminua en rien sa ferveur ni ses habitudes de vie simple et austère
; on en peut juger parles résolutions qu’il prit alors et qu’il
observa fidèlement, de ne rien changer au genre de vie qu’il avait
eu dans son ordre, de ne point thésauriser ni d’enrichir ses proches,
de ne rien solliciter du pape en dehors de ce qui lui serait attribué
et de ne pas accepter de présents de la part des princes. Autob.,
§ 38 ; cf. Epist. famil., XIV, XVIII, CIX, et lettre du 16 juillet
1599, dans Couderc, op. cit., t. I, p. 276 sq. Conseiller écouté
de Clément VIII, il fit preuve d’une noble franchise et ne recula
jamais devant la crainte de déplaire, quand il crut devoir déconseiller
des mesures préjudiciables ou signaler des réformes urgentes
; ainsi dissuada-t-il le pape de fonder, au collège de la Sapience,
une chaire pour enseigner la philosophie de Platon, en montrant les inconvénients
de ce projet ; ainsi surtout, dans un mémorial resté célèbre
: De rebus reformandis, exposa-t-il nettement les abus qu’il avait remarqué
dans le gouvernement de l’Eglise et de l’état ecclésiastique.
C’est l’écrit qui se trouve, avec les humbles et édifiantes
réponses du pape, à la fin des Epistolæ familiares,
sous ce titre : Clementi VIII P. R. De officio primario summi pontificis,
et ejusdem pontificis responsiones. Bientôt les circonstances allaient
mettre plus délicatement à l’épreuve la franchise
du cardinal.
7° Congrégation De auxiliis
; Bellarmin à Capoue, 1600-1605. ? La publication du livre de Molina
sur la Concorde du libre arbitre avec les dons de la grâce, en 1588,
avait donné le signal de la grande controverse, dite De auxiliis.
Bellarmin alors professeur au Collège romain, avait pris position
dans le débat : tout en faisant sur des points de détail
les réserves qu’on verra plus loin, il s’était franchement
rallié à la science moyenne, dont Molina faisait en quelque
sorte le pivot de sons système sur la prédestination et sur
la nature de la grâce efficace ; par contre, il s’était fortement
prononcé contre la prédétermination physique, soutenue
par Banez. Au fort de la mêlée, il rédigea, sur le
désir de Clément VIII, un mémoire très net,
opusculum dilucidum, qui plut d’abord beaucoup au pape ; il y faisait voir
en quoi consistait toute la controverse, et comment l’opinion des
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dominicains était plus dangereuse
que celle de Molina. Autob., appendice. Banez ayant adressé, le
28 octobre 1597, une supplique au souverain pontife, pour solliciter en
faveur de son ordre l’exemption de la loi du silence qui venait d’être
imposée aux deux partis. Bellarmin, invité à y répondre,
réfuta les raisons alléguées et montra qu’il n’y avait
pas lieu de faire une exception pour les uns au détriment des autres.
Voir la requête de Banez et la réponse de Bellarmin dans Liévin
de Meyer, S. J. Historia controversiæ de divinæ gratiæ
auxiliis, 2e édit., in-fol., Venise, 1742, t. I, p. 798 sq. Enfin,
dans une lettre adressée à Clément VIII en 1598, il
exposa ses vues sur les moyens propres à terminer le débat
: il lui semblait difficile de définir les points en litige ; mieux
vaudrait porter un décret enjoignant aux intéressés
de ne point s’accuser mutuellement d’erreur ni de témérité,
mais laissant à chacun la liberté de réfuter par de
bons arguments les propositions qu’il jugerait insoutenables ; de plus,
on devait éviter et de mettre en cause les ordres eux-mêmes,
et se contenter de dénoncer au Saint-Office les doctrines réputées
hérétiques, erronées ou dangereuses. Poussines, Historia
controversiarum quæ inter quosdam e sacro prædicatorum ordine
et societate Jesu agitatæ sunt ab anno 1548 ad 1612, in-4°, Paris,
Biblioth. nation., fonds latin, n. 9757, l. IV, p. 683 sq.
Devenu membre du sacré collège,
Bellarmin fut donné pour assesseur au cardinal Madruzzi, président
de la congrégation De auxiliis, Plusieurs fois il essaya, mais inutilement
de trouver un terrain d’entente, en proposant de définir un certain
nombre de propositions sur les quelles les deux partis ne pouvaient manquer
de se mettre d’accord. Quand, en 1602, Clément VIII manifesta l’occasion
d’étudier et de trancher par lui-même la question si complexe
et si délicate qu’il avait évoquée à son suprême
tribunal, le conseiller dont il avait tant de fois agréé
les franches remarques lui écrivit une lettre confidentielle, où
il le dissuadait de toutes ses forces de s’engager dans cette voie et lui
représentait les embarras qui s’ensuivraient pour lui. Serry, Hist.
congreg. de auxiliis, l. II, c. XXVI, in-fol., Louvain, 1700, col. 325
sq. ; Couderc, op. cit., t. I, p. 347sq. Le pape ayant affirmé un
jour qu’il définirait la question, Bellarmin n’hésita pas
à prédire résolument que la chose n’aurait pas lieu.
Attitude où ses adversaires, le cardinal Passionei en particulier,
ont dénoncé à grands cris de l’irrévérence
à l’égard du vicaire de Jésus-Christ et de l’opiniâtreté
à soutenir ses vues personnelles et celles de son ordre. Des esprits
moins prévenus ont rapproché de la lettre incriminée
le conseil de ne rien décider en cette affaire, donné plus
tard à Paul V par saint François de Sales, et les paroles
dites par le même pape : « Clément se repentit de s’être
enfoncé dans cette affaire, et après des années et
des années de discussion, il ne trouvait pas moyen de la terminer
dignement. » G. Schneemann, Controversiarum de divinæ gratiæ
liberique arbitrii concordia initia et progressus, in-8°, Fribourg-en-Brisgau,
1881, p. 287, 296. Prosper Lambertini, parlant comme promoteur de la foi,
a déclaré n’avoir rien à objecter de ce chef. Positio
super dubio. . . Rome, 1712, litt. H, Animadversiones fidei promotoris,
p. 34-35.
Clément VIII fut-il froissé
par la conduite de Bellarmin, ou plutôt, voulant donner suite à
son projet de trancher la grande controverse, jugea-t-il opportun d’écarter
de Rome, sous un prétexte honorable, un champion dont la présence
pouvait être embarrassante ? Toujours est-il, que l’archevêché
de Capoue s’étant trouvé vacant, il nomma le cardinal à
ce siège et lui donna de ses propres mains la consécration
épiscopale, le 21 avril 1602. Le pasteur n’oublia pas en cette circonstance
les principes qu’il avait toujours professés sur le devoir de la
résidence et contre la pluralité des
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bénéfices ecclésiastiques.
Quatre jours après son sacre, il quitta Rome et, le 1er mai, il
était dans sa ville épiscopale. Il y resta près de
trois ans, jusqu’en mars 1605, se consacrant à sa charge sans réserve
et avec joie, parce qu’elle le rendait au ministère actif. Aussi
ne composa-t-il à cette époque des sermons, restés
inédits, et une Explication du symbole, rédigée pour
ses prêtres au cours d’une visite pastorale. Vie simple et toute
de dévouement, prédication assidue et vraiment apostolique,
assistance régulière à l’office canonial ; visite
annuelle de son diocèse et célébration de synodes
où furent rédigés, suivant les règles du concile
de Trente, de sages et durables ordonnances ; réforme des abus et
rétablissement de la discipline dans la cathédrale et dans
le clergé ; œuvres multiple de charité et sainte prodigalité
à l’égard des pauvres ; réserve et fermeté
dans les rapports avec les autorités séculières ;
tels furent les grands traits de sa carrière épiscopale.
Autob., § 40-47. Le pape applaudissait à cette sainte activité
et, comme autrefois, sollicitait du cardinal de sages conseils ; de là,
en décembre ; de là, en décembre 1603 ou en janvier
1604, la lettre sur les obligations pour les évêques d’annoncer
la parole de Dieu, lettre qui fait le plus grand honneur au zèle
pastoral de Bellarmin, et qu’il faut rapprocher des avis donnés,
soit à son neveu, Angelo della Ciaia, dans la belle instruction
de 1612 sur les devoirs d’un évêque, soit à l’archevêque
de Rouen, François de Harlay, dans une lettre du 20 février
1617. Epist. famil., CXLI. Dieu lui-même se plût à récompenser
les mérites de son serviteur par ces dons extraordinaires qui ont
fourni à ses biographes le chapitre intitulé : « Le
thaumaturge. »
Après la mort de Clément
VIII, arrivée le 3 mars 1605, le cardinal Bellarmin reparut à
Rome, pour y prendre part à deux élections qui se suivirent
de très près, celle de Léon XI et celle de Paul V.
Dans ces conclaves, l’archevêque de Capoue vit un grand nombre de
voix se réunir sur son nom ; la seconde fois il aurait été
vraisemblablement élu, s’il n’avait eu contre lui son aversion bien
connue pour certains abus, et surtout sa qualité de jésuite.
Couderc, op. cit., t. II, p. 14 sq. Il se refusa, du reste, à toute
démarche qui aurait pu favoriser sa candidature : eût-il suffi,
disait-il, de lever de terre un fétu pour devenir pape, il ne se
serait pas baissé pour le prendre. Plus tard, une maladie du pape
ayant ouvert la perspective d’une nouvelle élection où la
tiare pourrait lui être imposée, Bellarmin écrivit
ces lignes, le 26 septembre 1614 : « Je fais vœu, dans le cas où
je serais élu souverain pontife (ce que je ne désire pas
et ce que je prie Dieu de détourner de moi), de n’élever
aucun de mes parents ou de mes proches, ni au cardinalat, ni à aucune
principauté temporelle, ducat ou comté, ou toute autre noblesse.
Je ne les enrichirai pas non plus, je me contenterai de les aider à
vivre décemment dans leur état. . . »
Paul V retint à Rome l’archevêque
de Capoue ; et comme celui-ci, fidèle à ses principes, ne
voulait pas garder un titre dont il ne pouvait plus remplir personnellement
les obligations, sa démission fut acceptée, et il devint
conservateur de la bibliothèque du Vatican. Peu après, il
fit partie de la nouvelle congrégation de cardinaux chargée
de terminer la controverse De auxiliis ; il s’y trouva uni de sentiment
avec le cardinal du Perron, auquel il avait écrit de Capoue, en
février 1605, pour l’engager à faire voir le danger du système
des prédéterminations physiques. Laemmer, Meletematum romanorum
mantissa, in-8°, Ratisbonne, 1875, p. 381. Voici, au témoignage
de Paul V lui-même, quel fut son avis, à la dernière
réunion, tenue le 28 août 1607 : « Bellarmin ? Il est
d’avis que la prédétermination physique est de Luther et
de Calvin. Les pères dominicains sont dignes d’excuse, parce qu’ils
n’ont pas vu les livres des hérétiques. Banez a parlé
plus mal que Molina, quand il a blâmé l’explication que saint
Augustin
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donne de la réprobation. Le livre
de Molina a été approuvé par deux universités.
On pourrait faire une bulle dans laquelle on condamnerait quelques
propositions certaines dont les deux partis conviendraient ; on laisserait
de côté les questions plus difficiles, comme le fit Célestin.
» G. Schneemann, op. cit., p. 290.On sait quel fut le résultat
final du grand débat : le pape se contenta de dissoudre la congrégation
De auxiliis, et laissa la liberté de leur opinion aux deux partis,
en attendant que le Saint-Siège crût opportun de donner un
jugement définitif.
8° Controverse vénitienne,
1606. ? Pendant les quinze années qui suivirent son retour à
Rome, le cardinal Bellarmin fut mêlé à toutes les grandes
affaires religieuses de son temps, comme membre actif des principales Congrégations
romaines et personnage influent auquel on s’adressait de toute part. De
là, une vaste correspondance, dont le recueil très restreint
qui porte le titre d’Epistolæ familiares, ne donne qu’une faible
idée. Mais il joua surtout un rôle important dans plusieurs
controverses politico-religieuses, qui se succédèrent sans
interruption. La première se rapporte à la querelle qui éclata,
en 1605, entre le Saint-Siège et la république de Venise,
et fut provoquée par des actes et des mesures préjudiciables
aux anciens privilèges de l’Eglise et du clergé. Deux ecclésiastiques
avaient d’abord été emprisonnés et jugés par
l’autorité séculière ; puis deux fois, portées
par le sénat le 10 janvier 1603 et le 26 mars 1605, prohibèrent
la fondation de nouvelles églises ou de nouveaux cloîtres
ou hôpitaux, et retirèrent aux corporations religieuses, régulières
ou séculières, le droit d’acheter, d’hériter et de
recevoir en gage ou en don toute propriété foncière,
en dehors d’une autorisation expresse du pouvoir civil. Après des
protestations et des monitions restées sans effet, Paul V lança
l’interdit contre Venise, le 17 avril 1606. Mais, encouragé et vraisemblablement
conseillé par le trop fameux moine servite Paolo Sarpi, le sénat
de la république répondit par des menaces de mort éditées
contre tout ecclésiastique qui observerait l’interdit et par le
bannissement des jésuites.
En même temps se forma, sous
la direction de fra Paolo, un comité de sept théologiens,
les sept « fous » de Venise, avec pour mission de démontrer
la justice des mesures prises et l’irrégularité de l’acte
de Paul V. De là diverses publications : un écrit anonyme,
de Jean Marsilli, comprenant huit propositions sous forme de réponse
à la lettre d’un ami sur les censures pontificales ; un traité
des sept théologiens de Venise, sur l’interdit lancé par
le pape ; deux écrits de Gerson sur la validité de l’excommunication
et sur cette assertion : Sententia pastoris etiam injusta est timenda,
réédités par fra Paolo avec un préface tendant
à prouver que, suivant les principes étables par le chancelier,
la sentence de Paul V, était un acte injuste et invalide ; enfin,
une défense, par Jean Marsilli, des huit propositions avancées
dans son premier écrit anonyme. Il s’ensuivit toute une guerre de
plume, où figurèrent une trentaine d’écrivains, en
particuliers les cardinaux Baronius et Bellarmin, ce dernier au premier
rang. Aux opuscules cités ici il fit autant de réponses dont
les titres précis seront donnés ci-après. Il y discute,
pied à pied, toutes les assertions des théologiens de Venise,
et défend en même temps, d’après les principes qu’il
avait exposés dans ses Controverses, les points en litige : l’exemption
des clercs, l’immunité ecclésiastique, le pouvoir coercitif
de l’Eglise, l’infaillibilité du pape et sa puissance indirecte
sur le temporel. Sans jamais rien sacrifier à l’erreur, le cardinal
garda, dans cet état, à l’égard des personnes une
modération et une charité chrétienne qui est tout
à son honneur, mais que ses adversaires n’ont pas eu honte de lui
reprocher. La lutte de Paul V et de Venise se termina disciplinairement,
sinon doctrinalement, en 1607,
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par la médiation du cardinal de
Joyeuse agissant au nom de Henri IV ; l’interdit fut alors levé.
L. Ranke, Histoire de la papauté pendant les XVIe et les XVIIe siècles,
2e édit., Paris, 1848, t. II, p. 438 sq.
9° Controverse anglicane, 1607-1609.
? Une autre affaire mit le grand polémiste aux prises avec une tête
couronnée, Jacques Ier, roi d’Angleterre. Alors qu’il n’était
encore qu’assis que le trône d’Ecosse et semblait animé de
bonnes intentions à l’égard des catholiques, ce prince avait
eu l’occasion d’écrire au cardinal Bellarmin, et celui-ci lui avait
adressé, le 1er juin 1600, une réponse où les remerciements
et les espérances étaient accompagnés de salutaires
avis. Epist. famil., I. Lettre très belle, dont la seule lecture
convertit un célèbre calviniste, au rapport de Sébastien
Badus, Decora Roberti card. Bellarmini, in-4° Gênes, 1671, part.
II, p. 2. Devenu roi de la Grande-Bretagne, Jacques Ier trompa l’attente
des catholiques anglais ; leur situation devint surtout déplorable
après la conspiration des poudres, découverte le 5 novembre
1605. Non seulement les mesures pénales édictées sous
le règne d’Elisabeth furent renouvelées, mais, le 5 juillet
1606, un serment leur fut imposé sous peine d’emprisonnement perpétuel
et autres conséquences très graves. Voici quels étaient
les termes les plus significatifs de ce fameux oath of allegiance : «
Je, A. B., reconnais, confesse, atteste et déclare en toute vérité
et sincérité, en ma conscience, devant Dieu et devant les
hommes, que notre souverain seigneur le roi Jacques est le vrai et légitime
roi de ce royaume. . ., et que le pape n’a, ni par lui-même, ni par
aucun autorité de l’Eglise ou du siège romain, pouvoir quelconque
ni autorité de déposer le roi, ou de disposer des domaines
et royaumes de Sa Majesté. . ., ou de délier aucun de ses
sujets de l’obéissance et de la soumission qu’ils doivent à
Sa Majesté. . . De même je jure de cœur, que nonobstant toute
déclaration ou sentence d’excommunication ou de déposition.
. ., je garderai fidélité et obéissance à Sa
Majesté. . . Je jure, en outre, que du fond du cœur j’abhorre, déteste
et j’abjure, comme impie et hérétique, cette damnable doctrine
et assertion : « Les princes excommuniés et déclarés
déchus de leurs droits par le pape, peuvent être déposés
et mis à mort par leurs sujets ou tous autres gens. » De plus,
je crois et j’admets en conscience, que ni le pape ni personne d’autre
n’a le pouvoir de me délier de ce serment, ou tout ou en partie.
. . » Traduit des Opera du roi Jacques, in-fol., Londres, 1619, p.
242.
Par un bref du 22 septembre 1606,
Paul V avait déclaré ce serment illicite, cum multa contineat
quæ fidei et saluti aperte adversantur. Mais l’archiprêtre
Blackwell refusa de publier l’acte pontifical et, le 7 juillet de l’année
suivante, se prononça pour le serment dans une lettre adressée
à son clergé. Aussi Paul V publia, le 23 septembre, un second
bref pour confirmer l’authenticité et l’autorité du premier.
De son côté, Bellarmin, se prévalant d’une ancienne
amitié avec l’archiprêtre, lui avait, écrit, le 18
du même mois, une lettre très ferme où il essayait
de lui faire comprendre sa faute et lui montrait dans le serment un piège
tendu aux catholiques anglais : « Il est composé avec tant
d’artifice que personne ne peut détester la trahison envers le roi
et faire profession de soumission civile, sans être perfidement contraint
à renier la primauté du siège apostolique. »
Epist. famil., LII. Paroles qu’on peut utilement rapprocher de cette appréciation
portée sur le même serment, par un historien anglican : «
Il était rédigé en des termes si ambigus, qu’une conscience
délicate, d’ailleurs aussi bien disposée que possible à
faire acte d’obéissance civile, ne pouvait pas le supporter, could
not digest it. » Dodd, Church History of England, édit. Tierney,
in-8°, Londres, 1841, t. IV, p. 70. Blackwell persista dans son erreur
et fut déposé dans sa charge
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d’archiprêtre, le 1er février
1608. Le roi Jacques n’était pas resté indifférent
à tous ces actes ; il avait voulu descendre dans l’arène
comme polémiste. Au commencement de 1608 parut à Londres
une apologie du serment intitulée : Triplici nodo triplex cuneus,
mais sans nom d’auteur et avec une préface signée par l’aumônier
royal L. Cicestriensis, c’est-à-dire Lancelot Andrewes, évêque
de Chichester. Par le triple nœud, auquel il opposait son triple coin,
Jacques Ier entendait les deux brefs pontificaux et la lettre du cardinal
Bellarmin ; mais il attaquait surtout ce dernier, comme s’il eût
eu la coquetterie de se mesurer avec un homme auquel il donnait l’épithète
de viri eruditione clarissimi. Telle fut l’occasion de la Réponse
au livre intitulé Triplici nodo triplex cuneus ; elle parut à
Cologne, sous le nom de Mathieu Torti, chapelain du cardinal.
Le royal polémiste ne se
tint pas pour battu ; après s’être enfermé pendant
un mois avec ses théologiens, il fit quelques corrections à
son ancienne apologie et la publia de nouveau, mais en y mettant son nom
et en l’augmentant d’une préface pompeusement dédiée
à l’empereur Rodolphe II, à tous les monarques et rois, à
tous les princes, états et ordre de la chrétienté.
Il essayait de les convaincre tous qu’il s’agissait d’une cause commune,
le débat portant sur les droits et la dignité de ceux qui
ont reçu de Dieu le pouvoir suprême. A son tour le théologien
du Saint-Siège reprit la plume et, en 1609, fit paraître à
Rome l’Apologie de sa Réponse au livre du roi Jacques. Celui-ci
ne redescendit pas dans l’arène ; son aumônier l’évêque
Andrewes, continua la lutte par la publication de sa Tortura Torti, Londres,
1609. Bellarmin ne manqua pas de défenseurs ; à leur tête
se signalèrent deux membres de son ordre Eudæmon-Joannès
et Martin van der Beeck, ou Becanus, qui publièrent, celui-ci à
Mayence, en 1610, une Refutatio torturæ Torti, et le premier à
Cologne, en 1611, son Parallelus Torti et tortoris ejus L. Cicestriensis.
Le cardinal faillit lui-même rentrer en scène, à propos
d’un ouvrage intitulé Apologia cardinalis Bellarmini pro jure principum,
Cosmopoli [Londres], 1611. Le livre portait le nom de Roger Widdrington,
pseudonyme de Thomas Preston, supérieur des bénédictins
anglais ; telle était du moins l’opinion commune, avant la rectification
publiée récemment par dom E. Taunton, dans English historical
Review, janvier 1903, t. XVIII, p. 146 sq. Comme Widdrington prétendait
surtout la légitimité du serment d’allégeance en se
servant des principes mêmes de Bellarmin, celui-ci prépara
une réponse ; mais le pape Paul V jugea prudent d’en ajourner la
publication. Malgré la mise à l’index de ses écrits,
Widdrington revint plusieurs fois à la charge. Dictionary of national
biography, édité par Leslie Stephen, Londres, 1900, t. LXI,
p. 182. De la sorte, le débat relatif au serment de fidélité
se poursuivit en dehors des deux premiers combattants. Voir J. de la Servière,
De Jacobo I Angliæ rege cum cardinali Roberto Bellarmino S. J. super
potestate cum regia tum pontificia disputante, in-8°, Paris,
1900.
10° Controverse gallicane, 1610-1612.
? Cette nouvelle lutte eut point de départ la publication faite
en 1609, à Londres d’abord, puis à Pont-à-Mousson,
d’un ouvrage anonyme intitulé : De potestate papæ, an et quatenus
in reges et principes sæculares jus et imperium habeat. C’était
l’œuvre posthume d’un juriste de renom, Guillaume Barclay. Voir col. 389.
L’auteur proclamait l’indépendance absolue de la puissance civile
et de la puissance ecclésiastique ; il attaquait tous ceux qui attribuaient
au pape un pouvoir quelconque dans les choses temporelles, mais prenait
tout particulièrement à partie l’auteur des Controverses
pour la doctrine contenue dans le traité De romano pontifice, l.
V, c.VI sq. L’année même où il fut publié, ce
livre fut mis à l’index par décret du 9 novembre ;
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mais, parce que venant d’un catholique
de marque, il ne pouvait manquer d’exercer de l’influence dans les controverses
qui s’agitaient alors, une réponse parut nécessaire. De là,
en 1610, le Traité de la puissance du souverain pontife dans les
choses temporelles, contre Guillaume Barclay. Bellarmin y défendait
longuement, en la donnant comme doctrine catholique, la thèse du
pouvoir indirect, conférant au pape le droit de déposer les
princes apostats ou hérétiques.
L’ouvrage du cardinal fut déféré
au parlement de Paris, puis prohibé le 26 novembre, après
un long réquisitoire de l’avocat royal Louis Servin, où celui-ci
avait relevé les passages attribuant aux papes « la puissance
aux choses temporelles », avec le droit de déposer les rois,
et ceux où Bellarmin disait « son avis sur l’établissement
des puissances royales, ou autres souveraines ». Duplessis d’Argentré,
Collectio judiciorum, Paris, 1728, t. II b, p. 19 sq. Cet arrêt froissa
extrêmement le pape Paul V ; on voit par ses lettres et celles du
cardinal Borghèse au nonce de Paris avec quelle insistance il en
demanda il en demanda l’abrogation. Laemmer, op. cit., p. 293 sq. Bellarmin
écrivit lui-même à la reine régente, Marie de
Médicis, et celle-ci évoqua l’affaire à son conseil
: intimidée par la résistance du premier président,
Achille de Harlay, elle n’osa pas casser l’arrêt, mais elle en suspendit
l’exécution. J.-M. Prat, Recherches historiques et critiques sur
la Compagnie de Jésus en France du temps du P. Coton, in-8°,
Lyon, 1876, t. III, p. 310 sq. Ce fut pour ne pas exciter davantage le
parlement, que Paul V ajourna la réponse préparée
par le cardinal contre Roger Widdrington. Jean Barclay, de son côté,
fit paraître en 1612 une apologie en faveur de son père et
de la cause qu’il avait soutenue : Pietas, sive publicæ pro regibus
et principibus et privatæ pro Guilielmo Barclaio parente vindiciæ
adversus Bellarminum. Ce nouveau livre fut mis à l’index l’année
suivante ; mais le soin d’y répondre fut laissé au P. Eudæmon-Joannès.
Les faits justifièrent ces mesures de prudence ; un théologien
de Cologne, Adolphe Schulcken, ayant publié en 1613 une réfutation
de Widdrington sous le titre d’Apologia pro illustrissimo Domino D Roberto
Bellramino, S. R. E. card., de potestate romani pontificis temporali, l’ouvrage
fut condamné par le parlement et, sur l’ordre du prévôt
de Paris, brûlé en place de Grève. Le même sort
échut aux livres de Lessius, Becanus, Suarez et autres qui parurent
à la même époque pour défendre les droits du
pape ou soutenir l’opinion des scolastiques sur l’origine du pouvoir civil.
11° Les dix dernières
années, 1612-1621 ; Bellarmin et Galilée. ? Pendant la période
de lutte qu’on vient de parcourir, le cardinal était demeuré
à Rome, occupé surtout aux travaux des nombreuses Congrégations
dont il faisait partie. Il eut la joie, en 1609, d’assister à l’heureuse
conclusion d’une cause à laquelle, de concert avec son grand ami
le cardinal Baronius, il s’était consacré de tout son cœur,
la béatification du fondateur de la Compagnie de Jésus, Ignace
de Loyola. Aux occupations principales s’en ajoutaient d’autres dont il
serait superflu de parler en détail ; tels par exemple, l’administration
pendant quatre ans (27 novembre 1607-14 octobre 1611) du diocèse
de Montepulciano, et le protectorat non moins actif que fécond de
l’ordre des célestins. Epist. famil., LX, XCIII, XCIX, CXIV, CXXIX,
CLI, CLVI. Deux écrits méritent d’être signalés
: le commentaire sur les Psaumes, publié en 1611, et le mémoire
autobiographique que Bellarmin composa en 1613, sur les instances du P.
Eudæmon-Joannès et du P. Mutius Vitelleschi, alors assistant
d’Italie, et qui, dans l’intention de ce dernier, devait servir comme source
de renseignements pour l’histoire de la Compagnie de Jésus. E. Morin,
La vie du cardinal Bellarmin, préface, in-8°, Paris, 1625 ;
Bartoli, Della vita di Roberto cardi-
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col.573 début
nal Bellarmino, in-8° Rome, 1678,
p. 361. Ce mémoire n’est pas à proprement parler une biographie,
mais plutôt une série de notes ou de récits qui se
succèdent dans un ordre chronologique et portent en général
sur des évènements extérieurs déjà connus,
mais qu’il importait de préciser. Document d’ailleurs plein de simplicité
et de candeur où, suivant une remarque faite au cours du procès
de béatification, l’auteur « a fait entrer non seulement des
choses importantes et graves, mais encore des détails personnels
et des anecdotes où la note joyeuse et plaisante a sa part, comme
c’est l’usage entre amis ». Positio super dubio an constet de virtutibus,
Rome, 1712, document F, Nova informatiæ, p. 4. Apprécié
d’un point de vue faux, parfois même pharisaïque, cet écrit
est devenu, aux yeux des adversaires du cardinal jésuite, la pierre
de scandale et, dans leurs mains, l’arme offensive par excellence.
Comme membre du Saint-Office, Bellarmin
fût mêlé à une affaire des plus brûlantes,
le premier procès de Galilée. Il avait suivi avec intérêt
les découvertes de ce savant ; on en a la preuve dans une consultation
qu’il adressa, le 19 avril 1611, aux mathématiciens du Collège
romain, plusieurs lettres écrites à Galilée et l’hommage
que celui-ci fit au cardinal, en août 1612, de son discours sur les
corps flottants. Galilei, Opere, in-8°, Florence, 1851, t. VIII, p.
160, 216, 384. Une lettre écrite le 12 avril 1615 au P. Foscarini,
carme, qui lui avait adressé une apologie du système de Copernic,
nous renseigne exactement sur la pensée de Bellarmin. Il ne pouvait
croire qu’il fût question de proscrire le système, mais il
estimait qu’il fallait, en le proposant, se contenter « de parler
ex suppositione, et non d’une manière absolue » ; autrement,
ce serait « courir grand risque, non seulement d’irriter les philosophes
et les théologiens scolastiques, mais de nuire à notre sainte
foi, en accusant l’Ecriture d’erreur. . . S’il était vraiment démontré
que le soleil est au centre du monde, et la terre dans le troisième
ciel, que le soleil ne tourne pas autour de la terre, mais la terre autour
du soleil, il faudrait apporter beaucoup de circonspection dans les passages
de l’Ecriture qui paraissent contraires, et dire que nous ne les comprenons
pas, plutôt que de déclarer faux ce qui est démontré.
Mais, pour croire à une telle démonstration, j’attends qu’on
me la présente ». Le cardinal ajoute même qu’il doute
fort qu’on puisse faire cette démonstration, et conclut : «
Or, dans le cas de doute, on ne doit pas abandonner l’interprétation
des Ecritures donnée par les Saints Pères. » D. Berti,
pernico e le vicende del sistema copernicano in Italia. . ., in-8°,
Rome, 1876, p. 121 sq. Quand Galilée se rendit à Rome, en
décembre 1615, Bellarmin l’accueillit avec beaucoup de bienveillance.
L’affaire avait été déférée au Saint-Office
; le 24 février 1616, les théologiens consulteurs de cette
congrégation qualifièrent d’absurdes en philosophie, et d’hérétique
ou du moins erronées en théologie, ces deux propositions
: Sol est centrum mundi, et omnino immobilismotu locali. Terra non est
centrum muni nec immobilis, sed secundum se totam movetur, etiam motu diurno.
H. de l’Epinois, Les pièces du procès de Galilée,
in-8°, Paris, 1877, p. 38 sq. Bellarmin fut chargé par le pape
de
notifier ce jugement à l’intéressé ; ce qu’il exécuta,
deux jours après, dans sa propre demeure. Le 3 mars, il fit un rapport
à la Congrégation sur l’accomplissement de son mandat et
la soumission de Galilée. Les adversaires de celui-ci firent bientôt
courir le bruit qu’il avait été forcé d’abjurer ses
idées et d’accepter une pénitence ; le cardinal rétablit
les faits par cette attestation donnée par écrit le 26 mai
: « Galilée n’a abjuré entre nos mains, ni entre celles
de nul autre à Rome ou ailleurs que nous sachions, aucune de ses
opinions et doctrines ; il n’a pas non plus reçu de pénitence
salutaire ; on lui a seulement dénoncé la déclaration,
faite par le pape et
col.573 fin
col.574 début
publiée par la Congrégation
de l’Index, où il est dit que la doctrine attribuée à
Copernic, que la terre tourne autour du soleil et que le soleil reste au
centre du monde sans se mouvoir d’orient en occident, est contraire à
la Sainte Ecriture et ne peut en conséquence ni se défendre,
ni se soutenir. » H. de l’Epinois, op. cit., p. 72. Telle fut la
part prise par le cardinal Bellarmin au premier procès de Galilée
; cela ne suffit pas pour qu’on puisse voir en lui l’âme de toute
cette affaire, der geistige Urheber, comme a dit Reusch. Der Process Galilei’s
und dit Jesuiten, in-8°, Bonn, 1879, p. 125.
Ni les années ni les infirmités
n’affaiblissaient l’ardeur du vaillant athlète. De 1615 à
1620, il composa les divers écrits ascétiques dont le détail
sera donné plus loin. En 1616, il prêta son concours à
saint François de Sales, l’un de ses grands admirateurs, pour obtenir
l’approbation de l’ordre de la Visitation. Œuvres complètes de saint
François de Sales, édit. Peltier, in-8°, Paris1875, t.
VI, p. 372-391. Il ne fut pas étranger aux mesures prises, en 1616
et en 1617, par le pape Paul V, en faveur de la doctrine de l’immaculée
conception. lui-même eut l’occasion de dire toute sa pensée
sur ce sujet dans une réunion du Saint-Office, tenue en présence
du souverain pontife, le 31 août 1617 : « A mon avis, dit-il,
on peut définir que la doctrine d’après laquelle la très
sainte Vierge a été conçue sans péché,
doit être acceptée par tous les fidèles comme pieuse
et sainte, de sorte qu’il ne soit plus permis de soutenir ni d’adopter
le sentiment contraire sans témérité ni scandale et
sans être suspect d’hérésie. » Il justifia ensuite
son avis et répondit aux principales objections. « Si l’on
ne veut pas, conclut-il, en venir maintenant à une définition
formelle, il faudrait du moins imposer à tous les ecclésiastiques,
séculiers et réguliers, le précepte de réciter
l’office de la conception, comme l’Eglise le récite. De la sorte
on on arriverait au but sans définition. » Idée qui,
par la suite, fut réalisée. H. Maracci, Purpura mariana,
c. XV, § 7, rééditée dans Summa aurea de laudibus
B. V. M., édit. Bourassé, Paris, 1862, t. X, col. 1340 ;
J. Perrone, De immaculato B. V. M. conceptu, an dogmatico decreto definiri
possit, disquisitio theologica, in-8°, Rome, 1847, p. 174 ; C. Passaglia,
De immaculato Deiparæ semper virginis conceptu commentarius, in-fol.,
Rome, 1855, p. 1908, note 5. En 1621, le cardinal prit au conclave, qui,
le 9 février, élut Grégoire XV. Comme ce pontife lui
témoignait la plus entière confiance, il en profita pour
rendre à l’Eglise un éminent service, en suggérant
d’utiles mesures tendant à réformer les abus qui se produisaient
trop facilement dans l’élection des papes ; l’élection se
ferait désormais en conclave fermé et, en principe, par les
suffrages secrets des deux tiers des cardinaux présents. La constitution
de Grégoire XV, réglant le cérémonial qui est
encore en vigueur, parut le 15 novembre1621, quelques semaines seulement
après la mort du serviteur de Dieu. Voir Couderc, op. cit., t. II,
p. 305 sq.
Après de longues instances,
Bellarmin avait enfin obtenu, au mois d’août de la même année,
la faveur de résigner toutes ses fonctions, sauf la cause du bienheureux
Philippe de Néri dont il voulu s’occuper encore, par affection pour
ce saint et par attachement à la mémoire du cardinal Baronius.
Il se retira au noviciat de Saint-André, pour s’y préparer
à la mort ; depuis longtemps il avait fait ses dernières
recommandations dans un testament plein de piété et d’humilité.
Atteint mortellement à la fin du mois, le cardinal ne songea plus
qu’au ciel ; on a l’impression d’assister à la mort d’un saint en
lisant ses derniers jours, racontés en détail dans une sorte
de bulletin quotidien qui figure dans l’Informatio de 1749, p. 377 sq.
Visité par le pape Grégoire XV, il témoigna de son
respect pour le vicaire du Christ en répétant les paroles
du centurion. Il mourut, âgé de près de quatre-vingt
ans, le 17 septembre, en
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une fête qu’il avait contribué
à établir, la fête des Stigmates de saint François
d’Assise. Il avait, pendant sa dernière maladie, fait une déclaration
qu’il est juste de rappeler : « Il protesta de mourir en la foy,
en laquelle il avait vescu, et dit au Père André Eudémon-Jean,
qui estoit présent, que tout ce que le dit cardinal avoit escrit
et imprimé de ce qui concernait la foy, à l’encontre des
hérétiques, et aussi de la matière De gratia et de
auxiliis, il le ratifioit et le confirmoit de nouveau, et vouloit que le
dit Père en rendît témoignage particulier en public,
principalement contre les hérétiques, qui alloient calomniant
qu’il s’estoit dédict en beaucoup de choses. » Discours des
choses mémorables qui se sont passées au trespas, et aux
funérailles du feu cardinal Bellarmin de très illustre et
glorieuse mémoire, in-12, Paris, 1622, p.32. Même témoignage
dans l’Imago virtutum Roberti card. Bellarmini, par Marcel Cervin, c. XLI,
Sienne, 1622.
12° La cause de Bellarmin. ?
Tout concourait à glorifier la mémoire du défunt :
la vénération témoignée par la foule à
ses funérailles, les magnifiques éloges que lui décernèrent
un grand nombre de cardinaux et de saints personnages, les immenses travaux
qu’il avait entrepris pour l’honneur de Dieu et de l’Eglise, la vie toute
de piété, de zèle et de charité qu’il avait
menée, enfin l’éclat des dons surnaturels qui ne lui avaient
pas manqué, surtout pendant son séjour à Capoue et
après sa mort. La cause fut introduite sous Urbain VIII, le 15 janvier
1627, et le titre de Vénérable fut dès lors acquis
au serviteur de Dieu. Une première congrégation préparatoire
fut sur l’héroïcité des vertus aboutit, le 7 septembre
1675, à un vote unanimement favorable des vingt-deux théologiens
consulteurs. Dans la congrégation générale qui eut
lieu sous Innocent XI, le 26 septembre 1677, et qui se composa de trente-huit
membres, seize cardinaux et vingt-deux consulteurs, la pluralité
des suffrages, en tout vingt-huit, restèrent favorables ; mais de
vives oppositions s’élevèrent. Quelques-uns, comme le cardinal
Barbarigo, ne contestaient pas au vénérable serviteur de
Dieu la sainteté de la vie ; ils doutaient seulement de l’héroïcité
des vertus, ou du moins n’en trouvaient pas la preuve suffisamment établie
: et ce fut aussi la principale objection du promoteur de la foi, Prosper
Bottini. D’autres, comme le cardinal Azzolini, allaient plus loin : s’appuyant
sur les faits déjà signalés, ils accusaient Bellarmin
d’avoir, en diverses circonstances de sa vie, manqué d’humilité,
de charité, de prudence, de discrétion et même de véracité.
A ces difficultés s’ajoutèrent des défauts de forme
qui retardèrent la cause. Une nouvelle information eut lieu en 1719,
sous Clément XI ; Prosper Lambertini y parut comme promoteur de
la foi. Le pape, on ne sait pourquoi, ne prit aucune décision. Sur
d’instances demandes, adressées au Saint-Siège, la cause
fut reprise par ordre de Benoît XIV ; le 16 juillet 1748, il nomma
rapporteur le cardinal Cavalchini. Une nouvelle congrégation générale
se tint le 5 amis 1753 ; vingt-cinq suffrages sur vingt-sept furent
favorables, malgré l’opposition violente et tapageuse du cardinal
Passionei qui, dans un vote souvent exploité depuis lors, tira de
l’autobiographie de Bellarmin les mêmes objections que le cardinal
Azzolini, mais en les aggravant et en y joignant des considérations
d’ordre politique sur les difficultés que pourrait susciter au Saint-Siège,
en France ou ailleurs, la béatification de l’auteur des Controverses
et du traité contre Barclay. Voti. . . nella causa della beatificazione
del venerabile servo di Dio card. R. Bellarmino, 2e édit., Ferrare,
1762.
Contre l’attente générale,
Benoît XIV en resta là. Ce n’est pas que son jugement fût
opposé à celui de la majorité ; il était facile
de le présumer en se reportant à ce qu’il a dit de cette
cause en plusieurs passages de son grand ouvrage De servorum Dei beatificatione
et
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col.576 début
beatorum canonizatione, l. III, c. X,
n. 11 ; c. XXI, n. 10 ; c. XXXIII, n. 20 ; c. XXXIV, n. 30 ; c. XL, n.
9, 19 ; cf. l. II, c. XXXVIII, n. 4. Mais on n’en est plus à des
présomptions ; dans des papiers du même pape, on a retrouvé
son Votum, ou l’expression de ce qu’il dit dans la congrégation
générale du 5 mai. Les conclusions pleinement favorables
au serviteur de Dieu ; le point capital de l’héroïsme y est,
en particulier, nettement résolu. Après avoir remarqué
que la méthode ordinaire consiste à prouver l’héroïsme
dans l’exercice des vertus théologales et morales que le vénérable
a eu l’occasion et l’obligation de pratiquer, Benoît XIV ajoute (je
traduis littéralement sur une copie du document photographié)
: « C’est là que les postulateurs ses sont efforcés
de faire, non seulement en répétant ce qui avait été
déjà dit, mais en le renforçant de preuves plus importantes
qui n’avait pas été d’abord donnés dans le sommaire.
Mais pour ce qui est de l’héroïsme dans le cas dont nous nous
occupons, il semble plus expédient de se demander si, présupposé
ce qui dans le cas présent est prouvé, à savoir la
pureté de conscience ou absence de péché dans la longue
carrière d’un homme qui vécut soixante-dix-neuf ans, et l’observance
continuelle des préceptes et des conseils évangéliques,
selon l’état de religieux de la Compagnie de Jésus que le
serviteur de Dieu avait embrassé, ? si, dis-je, le fait de n’avoir
jamais manqué en rien de ce qui touche à l’état de
religieux, de cardinal et d’archevêque, le fait aussi de s’être
dépensé utilement toue sa vie pour notre sainte foi, ne suffit
pas pour faire de ce serviteur de Dieu un héros supérieur
au commun degré des autres gens de bien. Cela suffit, croyons-nous,
et c’est ce que nous nous sommes efforcés de prouver, dans notre
ouvrage De canonizatione, avec les auteurs que nous y avons cités.
»
Les raisons qui déterminèrent
l’auteur de ce Votum à ne pas émettre le décret sur
l’héroïcité des vertus, sont connues maintenant. Une
série de lettres, échangées à ce sujet entre
Benoît XIV et le cardinal de Tencin, montre que le grand pape fit
céder sa ferme conviction et ses propres désirs à
des raisons de haute prudence, à la crainte surtout de fournir une
nouvelle matière au feu des fureurs gallicanes et jansénistes
dans les parlements de France. Dans une lettre du 29 août 1753, Benoît
XIV dit au sujet de la réunion du 5 mai : « Nous parlâmes
de la cause fort au long et nous renvoyâmes notre déclaration
à un autre temps. Nous l’aurions même déjà donnée
conforme à la pluralité des voix, si les prudentes réflexions
que vous nous avez fait faire ne nous avaient déterminé à
un plus long délai et à attendre des conjonctures plus favorables.
. . Nous avons dit en confidence au général des jésuites
que le délai de la cause ne venait point des pauvretés débitées
par le cardinal Passionei, mais des tristes circonstances du temps. »
Voir Etudes religieuses, 15 avril 1896, t. LXVII, p. 668 sq. Sous le pape
Léon XII, on put croire à l’existence de conjonctures plus
favorables, et un nouvel examen de la cause fut entrepris en 1828 ; mais
la mort du pape et celle du général des jésuites créèrent
un nouvel obstacle.
D’ailleurs, pour conclure par une
remarque du docteur Hefele, « Bellarmin, sans être canonisé,
reste pour tout catholique vénérable au plus haut degré,
et ceux qui ont voulu le salir n’ont fait que se clouer eux-mêmes
au pilori. » Kirchenlexicon, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau,
1883, t. II, col. 292. « La sincérité de sa dévotion,
sa charité et le désintéressement de son zèle,
lit-on dans la Grande Encyclopédie, n’ont jamais été
contestés que dans des libelles émanés de basse officine
protestante, tels que la Fidèle et véritable histoire de
la mort désespérée de Robert Bellarmin, jésuite.
»
Il s’agit là d’un immonde pamphlet que les protestants eux-mêmes
ont stigmatisé, comme « plein de grossiers
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mensonges et de calomnies, dont l’effet
ne put être que d’augmenter la vénération des catholiques
d’alors pour le cardinal. » Ersch et Gruher, Allgemeine Encyclopädie
der Wissenschaften und Künste, art. Bællarmino, 8e partie, Leipzig,
1822, p. 434. Cf. Janssens, L’Allemagne et la Réforme, trad. E.
Paris, Paris, 1899, t. V, p. 571 sq. Quelque chose d’analogue s’est produit,
quand poussés par leurs rancunes de vieux catholiques, Döllinger
et Reusch ont cherché dans une nouvelle publication de l’autobiographie
de Bellarmin une occasion de notes malveillantes conte l’Eglise romaine
et la Compagnie de Jésus et, contre le cardinal, d’attaques renouvelées
d’Azzolini et de Passionei. Le vénérable serviteur de Dieu
n’a rien perdu, mais il a plutôt grandi dans l’estime et l’amour
des catholiques, comme on peut le voir par la conclusion de quatre articles
parus en 1890 dans les Historisch-politische Blätter de Munich, t.
CVI, sous ce titre : Cardinal Bellarmin in altkatholischer Beleuchtung.
Le premier document à consulter,
pour l’histoire de Bellarmin, est son autobiographie, souvent citée
au cours de cette notice. Elle a été imprimée à
part à Louvain, en 1753, sous ce titre : Vita ven. Roberti cardinalis
Bellarmini quam ipsemet scripsit rogatu familiaris sui P. Eudæmon
Johannis Cretensis. Elle se retrouve, texte latine et traduction allemande,
dans Sammlung der neuesten Schriften, welche die Jesuiten in Portugla betreffen,
Francfort et Leipzig, 1762, t. IV ; de même dans l’ouvrage polémique
de Döllinger et Reusch, Die Selbstbiographie des Cardinals Bellarmin,
in-8°, Bonn, 1887. A l’autobiographie s’ajoutent les Epistolæ
familiares, choix très incomplet de lettres, dont la publication
est due au P. Jacq. Fuligatti, in-12, Rome, 1650, etc. En dehors des lettres
relatives à la jeunesse de Bellarmin qui ont été signalées,
G. Buschbell a publié trois autres lettres du cardinal dans Romische
Quartalschrift, 1901, p. 191 sq., 327 sq.
Biographies principales : 1°
J. Fuligatti, S. J., Vita del cardinale Bellarmino della Compagnia di Gièsu,
in-4°, Rome, 1624, etc. ; trad. franç. par le P. Pierre Morin,
S. J., in-8°, Paris, 1625 ; trad. lat., avec additions, par le P. Silvestre
Petrasancta par un prêtre de Franconie, Leben des Cardinal Robert
Bellarmin, in-12, Ratisbonne, 1846. ? 2° D. Bartoli, S. J., Della vita
di Roberto cardinal Bellarmin, en quatre villes, in-8°, Rome, 1678,
etc. ? 3° N. Frizon, S. J., La vie du cardinal Bellarmin, in-4°,
Nancy, 1709, etc. ? 4° J.-B. Couderc, S. J., Le vénérable
cardinal Bellarmin, 2 in-8°, Paris, 1893. A signaler encore l’Imago
virtutum Roberti card. Bellarmini Politiani, par un neveu du cardinal,
Marcel Cervin, in-8°, Sienne, 1622, etc. Les autres biographies ne
sont, en général, que des extraits ou des adaptations des
vies composées par Fuligatti et Petrasancta. Voir A. Carayon, Bibliothèque
historique de la Compagnie de Jésus, in-4°, Paris, 1864, n.
1522 sq., 2788, 4342 ; ouvrage dont la seconde partie de la Bibliothèque
de la Compagnie de Jésus contiendra une édition augmentée
et améliorée. On y trouvera également l’indication
des actes relatifs à la cause de béatification, et celle
des écrits, favorables ou défavorables, publiés à
cette occasion.
II. ECRITS. ? Cinq groupes généraux
: 1° les Controverses et traités complémentaires ; 2°
les œuvres de polémique spéciale ; 3° les œuvres d’exégèse
et de littérature sacrée ; 4° les œuvres d’instruction
pastorale et morale ; 5° les œuvres inédites.
I. LES CONTROVERSES ET TRAITES COMPLEMENTAIRES.
? C’est le groupe le plus important, puisqu’il comprend l’œuvre capitale
de Bellarmin avec quelques ouvrages qui s’y rattachent d’une façon
plus étroite.
1° Disputationes de controversiis
christianæ fidei adversus hujus temporis hæreticos. ? Cours
de controverse professé au Collège romain de 1576 à
1588. Il fut d’abord imprimé à Ingolstadt en trois in-folio,
dont le premier parut en 1586, après l’écrit sur la translation
de l’empire romain, Autob., § 28, le second en 1588, et le troisième
en 1593. Bellarmin revit son œuvre et en fit faire à Venise, en
1596, une nouvelle édition en quatre volumes, qui devrait servir
de modèle pour toutes celles qui suivraient. Dans l’admonitio, il
dit avoir remarqué dans la première édition aliqua
errata
col.577 fin
col.578 début
non levis momenti ; mais rien n’autorise
à soutenir que les jésuites d’Ingolstadt s’y seraient permis
des changements désapprouvés par Bellarmin. Voir Liévin
de Mayer, op. cit., l. II, c. XX, t. I, p. 149 sq. Le contenu général
de l’ouvrage répond au but que se proposait l’auteur, de réunir
en un seul corps les travaux de détail faits auparavant sur les
points discutés en matière de religion. Le tome Ier traite
des règles de la foi ; il renferme trois controverses générales
: 1re, de la parole de Dieu, écrite ou conservée par la tradition,
l. IV ; 2e, du Christ chef de toute l’Eglise, l. V ; 3e, du souverain pontife,
son vicaire ici-bas, l. V. A cette troisième controverse se rattachent
les graves questions du pouvoir du pape au spirituel et temporel. Le tome
II a pour objet l’Eglise ; il se divise en quatre controverses générales
: 1re, de l’Eglise réunie en concile ou dispersée par toute
la terre, l. IV ; 2e, des membres de l’Eglise militante, clercs, moines
et laïques, l.III ; 3e, de l’Eglise souffrante en purgatoire, l. II
; 4e, de l’Eglise triomphante aux cieux, l. III. A la seconde controverse
appartiennent ces questions importantes : immunité des clercs, vœux
religieux, origine et nature du pouvoir civil. Le tome III est consacré
tout entier aux sacrements, répartis en cinq controverses : 1re,
des sacrements en général, l. II ; 2e, du baptême et
de la confirmation, l. II ; 3e, de l’eucharistie, l. VI ; 4e, de la pénitence,
l. IV ; 5e, de l’extrême-onction, de l’ordre et du mariage, l. III.
A la quatrième controverse se rattache les deux livres, publiés
à part, des indulgences et du jubilé. Le tome IV s’occupe
de la grâce en trois controverses : 1re, de la grâce du premier
homme, l. I ; 2e, de la perte de la grâce et de l’état de
péché, l. VI ; 3e, du recouvrement de la grâce, matière
importante qui se subdivise en trois controverses spéciales : de
la grâce et du libre arbitre, l. VI ; de la justification, l. V ;
des bonnes œuvres, l. III. Les Controverses ont eu de très nombreuses
éditions, dont les suivantes sont particulièrement appréciées
: Pairs, 1608, édition des Triadelphes ; Prague, 1721 ; Rome, 1832
sq. Des traductions françaises partielles se trouvent à la
Bibliothèque nationale de Paris.
2° De exemptione clericorum
liber I, in-12, Paris, 1599. ? Opuscule destiné à préciser
et à compléter ce que l’auteur des Controverses avait dit
précédemment de l’exemption des clercs. Dans le c. I, Bellarmin
se demande si les clercs sont exempts du joug de la puissance séculière.
Oui, répond-il, ils le sont, et de droit divin, dans les causes
ecclésiastiques. Mais s’il s’agit des lois civiles qui ne sont point
en opposition avec les sacrés canons et leurs devoirs d’état,
les clercs doivent observer ces lois ; ils le doivent pour le bien commun
et le bon ordre de la société, obligatione non coactiva,
sed solum directiva. Aussi, en cas de violation, leurs juges naturels ne
sont point les juges séculiers. Leurs biens jouissent de l’immunité
ecclésiastique. Ces privilèges ont pour origine le droit
humain et, dans une certaine mesure, le droit divin. Dans le c. II, l’auteur
va plus loin et pose cette question : L’exemption des clercs est-elle de
droit naturel ? Non, si l’on considère le droit naturel proprement
dit, celui qui est fondé sur les premiers principes et leurs conséquences
prochaines ; oui, si l’on considère le droit des gens, dont l’objet
sont ces conséquences éloignées qui ont besoin d’être
déterminées et sanctionnées par les lois positives.
Le c. III résout les objections. Bellarmin dut défendre ces
principes dans ses trois grandes luttes politico-religieuses. Voir surtout
le traité contre Barclay, c. XXXIV sq. Dans les éditions
postérieures des Controverses, l’opuscule De exemptione clericorum
se trouve incorporé au tome II, De membris Ecclesiæ, l. I,
c. XXVIII-XXX.
3° De indulgentiis et jubilæo
libri duo, in-8°, Cologne, 1599. ? Traité complet sur les indulgences.
Il devait faire suite, dans les Controverses, au sacrement de la pénitence,
mais le manque de loisirs força Bellarmin à en
col.578 fin
col.579 début
ajourner la publication ; elle eut lieu
très à propos, au moment où Clément VIII se
préparait à proclamer le grand jubilé de l’an 1600.
Dans le l. I, l’auteur résout avec clarté et méthode
les questions dogmatiques relatives aux indulgences : leur nature, leur
légitimé fondée sur le trésor spirituel de
l’Eglise et le pouvoir qu’elle a de le dispenser, leurs variétés,
leurs fruits et leur utilité, enfin les conditions nécessaires
pour leur promulgation et pour leur application aux fidèles, vivants
ou trépassés. Le l. II est une réponse aux attaques
des novateurs, Luther, Calvin, Hesshus et Kemnitz. C’est à tort
que, dans la Selbstbiographie, p. 133 sq. , Döllinger et Reusch ont
prétendu voir une sorte d’opposition entre la doctrine contenue
dans cet ouvrage et les réflexions d’ordre pratique que Bellarmin
expose au P. Carminata dans une lettre privée du 5 septembre 1608.
Voir Couderc, op. cit., t. I, P. 244 sq.
4° Recognitio librorum omnium
Roberti Bellarmini. . . ab ipso. . . edita. Accessit correctorium errorum,
qui typographorum negligentia in libros ejusdem cardinalis editionis venetæ
irrepreserunt, in-fol., Rome, 1607 ; in-8°, Ingolstadt, 1608. ? Comme
le titre l’indique, la partie principale de cet ouvrage est une revue des
ouvrages que Bellarmin avait publiés avant 1607 : « J’ai expliqué
des passages obscurs, dit-il lui-même au début, j’en ai complété
d’autres trop laconiques, d’ailleurs j’ai fait des corrections, mettant
ainsi la dernière main à l’ensemble de mes œuvres. »
Presque toutes les remarques se rapportent aux Controverses, quelques-unes
à l’opuscule De translatione imperii. Sauf ce qui concerne le traité
De gratia et libero arbitrio, les changements ou additions sont, en général,
peu considérables, mais il en est qu’il est nécessaire de
connaître, pour avoir sur plusieurs points importants la pensée
exacte et définitive du cardinal. Ainsi, dans le traité
De summo pontifice, l. IV, c. VIII, il révoque en doute la chute
du pape saint Marcellin qu’il avait admise auparavant ; l. V, c. IV, il
précise la nature du royaume du Christ ; De eucharistia, l. III,
c. XIII, il explique en quel sens, d’après lui, la transsubstantiation
peut se dire conversio adductiva ; De justificatione, l. I, c. XVII, l.
III, c. IX, il justifie ce qu’il avait dit de la foi comme causa formalis
inchoata justificationis, et de l’incertitude où nous sommes par
rapport à notre sanctification. D’autres exemples se rencontrent
au cours de cette étude. A la fin du volume il y a un correctorium
ou longue liste d’errata se rapportant à l’édition des Controverses
faite à Venise en 1596, édition qui, par la négligence
de l’imprimeur, s’était trouvée plus défectueuse encore
que celle d’Ingolstadt.
II. ŒUVRES DE POLEMIQUE SPECIALE.
? 1° De translatione imperii romani a Græcis ad Francos, adversus
Matthiam Flaccium Illyricum, libri tres, in-8°, Anvers, 1589 (et non
1584). ? Un des principaux champions du pur luthéranisme, Matthias
Flack Frankowitz, avait publié à Bâle, en 1566, un
livre De translatione imperii romani ad Germanos ; il y niait que l’empire
romain eût été transféré des Grecs aux
Germains par l’autorité pontificale ; si le fait avait eu lieu,
ajoutait-il, ce transfert n’aurait été qu’un absurde abus
de pouvoir de la part des papes. Comme ce livre faisait beaucoup de mal
dans les cours allemandes, Bellarmin en entreprit la réfutation
en 1584, mais il semble que la publication ait été différée
jusqu’en 1589. Döllinger, Die Selbstbiographie, p. 88. Dans le l.
I, l’auteur établit d’abord que l’empire romain a été
réellement transféré des Grecs aux Francs par l’autorité
du souverain pontife, Charlemagne n’étant parvenu à la dignité
impériale par aucun titre ; puis il soutient, c. XII, qu’en déplaçant
ainsi l’autorité impériale, le pape n’a fait qu’user de son
droit et de son droit de déposer les rois et les princes chrétiens,
quand la cause du Christ et de l’Eglise le demande. Dans le l. II, Bellarmin
montre que ce pouvoir s’est appliqué
col.579 fin
col.580 début
une seconde fois en 962, quand le pape
Jean XII fit passer l’autorité impériale de la famille de
Charlemagne et de la nation franque à la famille des Othons et à
la nation saxonne. Le l. III tend à prouver que l’institution des
sept électeurs de l’empire est le fait du pape Grégoire V,
en 996 ; thèse historique généralement abandonnée
maintenant. Sur la question de droit, l’ouvrage De translatione imperii
n’est qu’une application de la doctrine de l’auteur des Controverses sur
le pouvoir indirect du pape dans les choses temporelles.
2° Judicium. . . de libro, quem
lutherani vocant, Concordiæ, in-8°, Ingolstadt, 1585. ? Les luthériens
avaient publié Le livre de la Concorde d’abord en allemand, en 1580,
puis en latin, en 1584. Bellarmin y signale de très graves erreurs
contre le symbole des apôtres et de nombreuses faussetés ;
il relève six erreurs sur la personne du Christ et soixante-sept
mensonges. Dans une nouvelle édition, en 1599, il ajouta une Brevis
apologia ; il y raconte, au début, quelle occasion l’avait amené
à publier son Jugement de la Concorde.
3° Responsio ad præcipua
capita apologiæ, quæ falso catholica inscribitur, pro successione
Henrici Navarreni in Francorum regnum, auctore Francisco Romulo, in-8°,
Rome, 1586. ? Cet ouvrage ne figure pas dans les éditions des œuvres
complètes du cardinal. Pendant longtemps on a hésité
à lui en attribuer la paternité ; mais le doute n’est plus
possible. Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, édit.
C. Sommervogel, t. I, col. 1180. C’est la réponse à une apologie
en faveur des droits de Henri de Navarre au trône de France, publiée
à Paris en 1585 et qui paraît avoir eu pour auteur Pierre
de Belloy. Bellarmin, désigné par ses prénoms François
Romulus, s’arrête à ce seul argument : Le chef suprême
de l’Eglise, Sixte V, a déclaré Henri de Navarre hérétique
notoire et relaps ; il l’, comme tel, privé du droit de succession
et l’a déclaré incapable de porter la couronne des rois chrétiens.
Le développement contient quatre parties. L’auteur de l’apologie
se dit faussement catholique ; son langage témoigne d’un hérétique,
sinon d’un athée. La secte des huguenots, à laquelle Henri
de Navarre appartient, est une secte hérétique, que l’Eglise
catholique a depuis longtemps condamnée. Le siège apostolique
a le droit de déposer les princes hérétiques, et de
les priver du droit de régner sur les peuples catholiques. Ce serait
donc faire acte d’imprudence et manquer de zèle pour la foi orthodoxe,
que de ne pas faire tous ses efforts pour écarter du trône
un prince hérétique, jugé et condamné par l’Eglise.
Les idées émises sur le pouvoir du pape dans l’écrit
de translatione imperii, c. XII, se retrouvent et sont même développés
dans la troisième partie du présent ouvrage.
4° De controversia Lovanii nuper
exorta inter facultatem theologicam et professorem quemdam S. J. ? Tel
est le titre exact du petit traité que Bellarmin composa vers 1588,
pour défendre Lessius contre la censure portée par la faculté
de théologie de Louvain. On le trouve imprimé dans Liévin
de Mayer, op. cit., t. I, p. 1780 sq. sous ce titre : Scriptum R. P.Roberti
Bellarmini in defensionem doctrinæ P. Lessii. Après avoir
remarqué que les controverses relatives à la providence,
à la grâce suffisante et efficace, à la prédestination
et à la persévérance, viennent toutes d’une même
source, la divergence de vues sur la manière dont Dieu concourt
avec le libre arbitre, Bellarmin soutient que le système des prédéterminations
physiques ne peut pas se recommander de la tradition catholique, la plupart
des scolastiques et des Pères enseignant expressément que
la volonté n’est pas prédéterminée dans les
actes libres ; il justifie ensuite dans le détail les assertions
de Lessius. Dans cet écrit, comme dans l’échange de lettres
qui eut lieu à la même occasion, le professeur du Collège
romain ne fait de réserves que sur deux points : l’élection
à la gloire ex præscientia meritorum, et la troisième
col.580 fin
col.581 début
proposition de Lessius sur l’Ecriture
sainte : Liber aliquis (qualis forte est secundus Machabæorum) humana
industria sine assistentia Spiritus Sancti scriptus, si Spiritus Sanctus
postea testebur ibi nihil esse falsum efficitur Scriptura sacra. Schneemann,
op. cit., p. 138 sq., 481. On peut lire dans ce même auteur l’appréciation
plus sévère que porta Bellarmin sur les vingt propositions
de Jacques Janson, déférées à Rome, et son
jugement sur toute la controversa : Censura ad sententias Lovanio missas,
p. 366 ; Sententia Bellarmini de controversia Lovaniensi, p. 367 sq.
5° Responsio ad librum anonynum,
cujus titulus est : Aviso piacevole dato alla bella Italia. ? Cet opuscule,
divisé en vingt-quatre chapitres, parut comme appendice au traité
De summo pontifice, dans l’édition des Controverses faite à
Venise en 1599 ; il se retrouve aussi parmi les Opuscula dans les œuvres
complètes de Bellarmin. L’Avis bienveillant donné à
la belle Italie par un jeune gentilhomme français n’était
qu’un pamphlet, où Nicolas Perrot se déchaînait sans
mesure contre Sixte-Quint et la papauté ; il prétendait montrer
l’Antéchrist dans le souverain pontife, opposait à la cour
romaine des textes empruntés à Dante, Pétrarque et
Boccace, enfin, pour terminer dignement, lançait contre le pape
cinquante et un poèmes satiriques. Après avoir relevé
finement le procédé peu noble de ce gentilhomme anonyme qui
traite en riant des sujets les plus sacrés, le cardinal renverse
avec vigueur les arguments que le jeune pamphlétaire avait prétendu
emprunter à la tradition catholique pour décrier la papauté
; aux textes invoqués des grands poètes italiens, il oppose
les passages nombreux et si beaux, où ils ont fait entendre des
accents tout autres ; enfin il réduit à néant
les accusations satiriques portées contre Sixte-Quint et les papes.
6° Refutatio libelle de cultu
imaginum, qui falso synodus Pariensis inscribitur. ? Opuscule très
court, qui parut dans l’édition vénitienne des Controverses,
comme appendice au traité De cultum imaginum ; il était dirigé
contre une publication anonyme, faite à Francfort en 1596 : Synodus
pariensis de imaginibus, anno 824. Ex vetustissimo codice descripta. Bellarmin
soumet à une sévère critique les données du
manuscrit invoqué et la doctrine, peu favorable au culte des images,
qu’on y attribue au synode parisien de 824 ; il conclut à un faux
synode et à un manuscrit sans autorité ; conclusion qui,
aujourd’hui, n’est plus adoptée. Hefele, Histoire des conciles,
trad. Delarc, t. V, p. 236 sq.
7° Risposta del cardinal Bellarmino
ad un libretto intitolato : Risposta di un dottore di teologia ad una littera
scrittagli. . . sopra il breve di censure della Santita di Paolo V. . .,
in-4°, Rome, 1606. ? 8° Risposta. . .ad un libretto intitolato
: Trattato e risolutione sopra la validatà delle scomuniche di Giov.
Gersone, in-4°, Rome, 1606. ? 9° Risposta. . . la Trattato dei
sette teologi di Venizia sopra l’interdetto. . . ed ella opposizioni di
F. Paolo Servita contra la prima scriturra dell’ istesso cardinale, in-4°,
Rome, 1606. ? 10° Rsiposta. . . alla difesa delle otto proposizioni
di Giovanni Marsiglio Napolitano, in-4°, Rome, 1606. ? Tous ces écrits
se rapportent à la controverse vénitienne ; l’objet en est
suffisamment connu par ce qui a été dit de cette controverse
dans la notice historique. Ils se retrouvent traduits en latin et groupés
autrement dans les éditions complètes des œuvres de Bellarmin,
par exemple dans l’édition de Cologne, 1617, t. VII, p. 1027 sq.
11° Responsio Matthæi
Torti presbyteri, et theologi papiensis, ad librum inscriptum : Triplici
nodo triplex cuneus, in-8°, Cologne, 1608. ? C’est la réponse
à l’apologie de Jacques Ier ; réponse digne et solide où,
sans négliger les points secondaires, en particulier les accusations
portées par le roi d’Angleterre contre ses sujets catholiques, le
champion du Saint-Siège insiste avant
col.581 fin
col.582 début
tout et à bon droit sur la question
capitale, le serment d’allégeance. Pour Jacques Ier, le principal
moyen de défense consistait à soutenir qu’il s’agissait uniquement
de l’hommage civil, dû pas ses sujets à leur prince légitime.
Afin de montrer que la portée du serment dépasse l’ordre
purement politique, Bellarmin en invoque d’abord le titre, qui témoigne
manifestement d’une préoccupation religieuse : ad delegeradoset
reprimendos papistas. Argument d’autant plus fort que, d’après un
historien anglican, le serment avait été rédigé
avec l’intention expresse de mettre une distinction entre les catholiques
qui niaient et ceux qui admettaient dans le pape le pouvoir de déposer
les rois. S. Gardiner, History of England from the accession of James 1,
in-8°, Londres, 1887, t. I, p. 228. Le cardinal examine ensuite le
contenu même du serment ; trois pouvoirs y sont niés qui,
suivant la doctrine énoncée dans plusieurs conciles généraux,
appartiennent au pape : pouvoir de déposer les rois quand le bien
spirituel de l’Eglise le demande, pouvoir de les excommunier en cas d’hérésie,
pouvoir de délier les chrétiens des vœux et des serments
quand la gloire de Dieu et le salut des âmes l’exigent. Comparant
enfin la formule de Jacques Ier avec le serment de suprématie imposé
par Henri VIII, il n’y reconnaît qu’une différence d’expression,
ce qui est dans l’un d’une façon nette et explicite se trouvant
dans l’autre d’une façon implicite, en termes obscurs, équivoques
et captieux. Appréciation qui n’étonnera guère, si
l’on remarque qu’un historien protestant a dit du serment d’allégeance,
qu’il était en fait une reconnaissance de la suprématie royale.
L. Ranke, Englische Geschichte, in-8°, Berlin, 1859, t. I, p. 542.
12° Apologia Robertis S. R.
E. cardinalis Bellarmini, pro responsione sua ad librum Jacobi Magnæ
Britanniæ regis, cujus titulus est : Triplici nodo triplex cuneus
: in qua apologia refellitur præfatio monitoria regis ejusdem, in-4°,
Rome, 1609. ? Comme l’écrit de Jacques Ier qui la provoqua, cette
apologie était adressée à l’empereur et à tous
les rois et princes catholiques. Cf. Epist. famil., LXVIII. Avec un calme
et une majesté d’allure qui contrastent singulièrement avec
le ton prétentieux et la marche lourde de son adversaire, l’habile
controversiste relève d’abord la dignité, méconnue
par le roi d’Angleterre, du souverain pontificat et de la pourpre cardinalice
; puis il discute sa prétendue justification du serment d’allégeance
et défend contre ses attaques le pouvoir indirect du pape sur les
choses temporelles et l’exemption des clercs. Comme pour se disculper d’être
apostat et même hérétique, Jacques Ier avait fait une
longue profession de foi, remarquable à titre de document historique,
où il adhérait au symbole des apôtres, de Nicée
et de saint Athanase, puis aux dogmes tenus d’un consentement unanime par
les Pères des quatre premiers siècles, mais s’opposait vivement
aux doctrines de l’Eglise romaine touchant les Ecritures, le culte du saint,
des morts, des reliques et de la croix, le purgatoire, la transsubstantiation,
la primauté et l’infaillibilité pontificale, etc., le cardinale
le suit sur ce terrain ; on trouve par le fait même dans cet écrit
une apologie substantielle et instructive des doctrines catholiques que
le chef de l’Eglise anglicane avait attaquées. Les trois derniers
chapitres sont consacrés à la réfutation de trois
listes de prétendus mensonges, histoires fausses ou dogmes nouveaux.
13° Tractatus de potestate summi
pontificis in rebus temporalibus, adversus Gulielmum Barclay, in-8°,
Rome, 1610. ? Le titre de cet ouvrage en indique l’objet. Aux quarante
et un chapitres du livre inachevé de Barclay, Bellarmin en oppose
quarante-deux, où il soutient, en donnant de nouveaux développements,
la doctrine du pouvoir indirect du pape, répond aux objections faites
par l’adversaire et défend les arguments dont il s’était
servi lui-même dans sont traité De romano pon-
col.582 fin
col.583 début
tifice, l. V, c. VI sq. Dans les prolégomènes,
il apporte les témoignages de nombreux auteurs de nationalités
diverses, et des conciles généraux de Latran en 1215 et de
Lyon en 1245.
14° Roberti S. R. E. card. Bellarmini
Examen ad librum falso inscriptum : Apologia cardinalis Bellarmini pro
jure principum, etc., auctore Roger Widdringtono, catholico anglo, in-8°,
Rome, 1612. ? Cet ouvrage n’est connu que par son titre et les indications
données par le P. Zaccaria, qui se proposait de le publier dans
une nouvelle édition des œuvres de Bellarmin. Couderc, Le vénérable
cardinal Bellarmin, 2 vol. in-8°, Paris, 1893, t. II, p. 140. Le cardinal
en parle lui-même dans son autobiographie, § 50, et dans une
lettre du 12 septembre 1612 à l’archiprêtre d’Angleterre,
Birkhead. Epist. famil., XCVI. Le cardinal Passionei et beaucoup d’autres,
avant ou après, ont prétendu ce livre avec la réfutation
de Roger Widdrington, publiée en 1613 à Cologne, par Adolphe
Schulcken, et insérée par Rocaberti, dans sa Bibliotheca
maxima pontificia, Rome, 1698, t. II. L’identification est vraie en
ce sens que le manuscrit de Bellarmin fut envoyé à Cologne
avec pleine liberté d’en tirer le parti qu’on jugerait convenable.
Schulcken utilisa de fait, non seulement la doctrine, mais les trois quarts
du temps, la rédaction même de Bellarmin. Ces conclusions
différentes de celles qui avaient été émises
précédemment reposent sur l’examen du manuscrit autographe
retrouvé depuis lors par l’auteur de cet article et de la correspondance
échangée entre Aquaviva et les Pères de Cologne.
III. ŒUVRES D’EXEGESE ET DE LITTERATURE
SACREE. ? 1° In omnes Psalmos dilucida expositio, in-4°, Rome,
1611. ? Commentaire remarquable, où le cœur n’eut pas moins de part
que l’esprit. Epist. famil., XCVIII. De là un parfum de piété
et d’onction qui s’allie heureusement avec une intelligence du texte sérieuse
et approfondie. Richard Simon a donné de cette œuvre une appréciation
judicieuse : « La méthode que le cardinal Bellarmin a suivie
dans le commentaire des Psaumes est bonne et digne de lui. Il examine le
texte hébreu qui est l’original, puis les deux anciennes versions
que l’Eglise a autorisées. Il n’est pas cependant assez critique,
et il me paraît avoir su que médiocrement la langue hébraïque
; de sorte qu’il se trompe quelquefois. Comme il a écrit après
Génébrard, il a pris de lui la plupart de ce qui regarde
la grammaire et la critique, en y changeant seulement quelque chose. Il
y a aussi des endroits qu’il aurait pu expliquer plus à lettre et
selon le sens historique ; mais il y a bien de l’apparence qu’il n’a pas
voulu faire, afin que son commentaire fût plus utile aux chrétiens.
» Histoire critique du Vieux Testament, l. III, c. XII, in-4°,
Rotterdam, 1685. Les exégètes protestants ont aussi rendu
hommage à la valeur de cet ouvrage. Voir le P. Cornely, Introductio
generalis, Paris, 1885, p. 681-683. On compte plus de trente éditions
et diverses traductions, en particulier une traduction française
par l’abbé E. Darras, 3 in-8°, Paris, 1856.
2° De editio latina vulgata,
quo sensu a concilio Tridentino definitum sit, ut ea pro authentica habeatur.
? Dissertation publiée en 1749, à Wurzbourg, par le P. Widenhofer,
d’après un manuscrit autographe de Bellarmin, trouvé chez
les jésuites de Malines ; L’authenticité en a été
défendue dans les Mémoires de Trévoux, septembre et
octobre 1753, a. 94, 100, 105. L’auteur se demande en quel sens le concile
de Trente a déclaré authentique la version latine de la Bible,
dont l’Eglise sert depuis saint Jérôme. Réponse : «
Tous ceux que j’ai pu lire jusqu’à présent paraissent s’accorder
sur deux points touchant la Vulgate, savoir : que cette version doit être
regardée comme exempte de toute erreur, en ce qui concerne la foi
catholique et les bonnes
col.583 fin
col.584 début
mœurs, et qu’elle seule doit être
conservée dans l’usage public des églises et des écoles,
quoique d’ailleurs il puisse s’y trouver des fautes. » Onze témoignages
sont cités, depuis Driedo jusqu’à Génébrard
; puis la thèse est confirmée par cinq raisons, tirées
soit du décret lui-même, soit de la comparaison de la Vulgate
avec les textes originaux, soit de l’expérience qui nous force à
reconnaître des fautes en maint endroit de cette version. Comparer,
dans les Controverses, le traité De verbo Dei, l. II, c. X sq. Cette
dissertation, sous sa forme actuelle, appartient à l’époque
où Bellarmin était déjà professeur au Collège
romain, car on y trouve cités plusieurs ouvrages, dont les premières
éditions sont de 1577, 1578, 1580. Mais il est possible qu’il y
ait eu une première rédaction à Louvain. L’étude
que Bellarmin fit alors de la sainte Ecriture est attestée par un
exemplaire de la Bible, annoté de sa main, qu’on conserve aujourd’hui
à la bibliothèque de l’université de cette ville.
Couderc, Le vénérable cardinal Bellarmin, 2 vol. in-8°,
Paris, 1893, t. II, p. 141, note 2. En outre, une lettre adressée,
le 1er avril 1575, au cardinal Sirlet, porte précisément
sur le même objet que la dissertation. Voir, pour cette lettre, Mgr
Batiffol, La Vaticane de Paul III à Paul V, Paris, 1890, p. 29 sq.
; J. Thomas, Mélanges d’histoire et de littérature religieuse,
in-12, Paris, 1899, p. 312 sq. On trouve une traduction française
de la dissertation de Bellarmin dans la Bible de Vence, généralement
au t. I, parmi les préliminaires.
3° Insitutiones linguæ
hebraicæ ex optimo quoque auctore collectæ, et ad quantam maximam
fieri potuir brevitatem, perspicuitatem alque ordinem revocatæ, in-8°,
Rome, 1578. ? Bellarmin composa cette grammaire hébraïque à
Louvain pour son propre usage, et s’en servit ensuite dans l’intérêt
de ses élèves ; c’est son premier ouvrage imprimé.
Autob., § 23, 28. Dans quelques éditions, on ajouta un exercice
sur le Ps. XXXI et un lexique. Cette grammaire, de valeur secondaire, est
depuis longtemps vieillie.
4° De scriptoribus ecclesiasticis
liber unus, in-4°, Rome, 1613. ? Catalogue des écrivains ecclésiastiques
jusqu’en 1500, avec une courte chronologie depuis la création du
monde jusqu’en 1612. Dans une préface qui se lit dans les anciennes
éditions, Bellarmin explique comment, professeur de théologie
à Louvain, il fut amené à composer cet ouvrage en
parcourant les auteurs anciens pour se servir de leur doctrine et aussi
pour distinguer leurs écrits authentiques des apocryphes. Il le
retouche et l’augmenta quarante ans plus tard, avant de le publier. Livre
assurément imparfait, mais remarquable pour l’époque et témoignant
tout à la fois d’un travail considérable et d’un grand esprit
d’initiative. Aussi vaut-il à son auteur l’estime des érudits,
mêmes protestants, comme le proclame entre autres J. Fabricius. Historia
bibliothecæ fabricianæ, part. V Wolfenbuttel, 1722, p. 448.
Il a eu plus de vingt éditions, dont la principale est celle du
P. Jacques Sirmond, Paris, 1617. Le P. Labbe, André du Saussay et
Casimir Oudin ont travaillé successivement à le rendre plus
correct et plus complet.
IV. ŒUVRES D’INSTRUCTION PASTORALE
ET MORALE. ? 1° Dottrina cristiana breve, Rome, 1597 ; puis, Dichiarazione
piu copiosa della dottrina cristiana, 1598. ? Bellarmin composa ce petit
et ce grand catéchisme à la prière du cardinal Tarugi,
archevêque de Sienne, et sur l’ordre de Clément VIII. Autob.,
§ 36 ; Epist. famil., XXXVII. Il y rapporte toute la religion chrétienne
aux trois vertus théologales ; à la foi se rattache le symbole
des apôtres ; à l’espérance, l’oraison dominicale et
la salutation angélique ; à la charité, les commandements
de Dieu et de l’Eglise, les sacrements qui l’engendrent et la nourrissent,
puis les vertus et, par opposition, les vices et les péchés.
Le tout couronné par un
col.584 fin
col.585 début
chapitre sur les fins dernières.
Le développement est clair, simple, pieux et précis, sous
forme de questions et de réponses ; dans le petit catéchisme,
le maître interroge et le disciple répond ; dans le grand,
l’ordre est inversé. Clément VIII fit examiner l’œuvre de
Bellarmin par la Congrégation de la Réforme et, le 15 juillet
1598, publia un bref très élogieux où il imposait
ce catéchisme aux diocèses des Etats pontificaux et exprimait
le souhait qu’il fût universellement adopté. L’ouvrage commença
dès lors à se répandre d’une façon extraordinaire.
Par un bref du 22 février 1633, Urbain VIII en recommanda l’usage
dans les missions d’Orient ; des traductions s’en firent en toute sorte
de langues. Benoît XIV adressa, le 7 février 1742, à
tous les évêques de la chrétienté une constitution
spéciale où il formulait le même souhait que Clément
VIII. La prohibition de ce catéchisme à Vienne, en 1775,
et l’opposition que lui firent dans la haute Italie le P. Martin Natali,
des Ecoles pies, et l’évêque janséniste Scipion Ricci,
n’eurent pour effet que de recommander davantage à l’estime des
catholiques attachés à Rome. Dans le projet d’un catéchisme
universel qui fut proposé au concile du Vatican, le petit catéchisme
de Bellarmin était désigné pour servir de modèle.
Acta et decreta SS. Conciliorum recentiorum, Fribourg-en-Brisgau, 1890,
t. VII, col.663 sq. Enfin, dans l’approbation donnée par Léon
XIII, le 3 décembre 1901, à une nouvelle édition de
ce même catéchisme, on lit ces paroles : Quoniam de eo libro
agitur, quem sæculorum usus et plurimorum episcoporum doctorumque
Ecclesiæ judicium comprobavit. . . Anacleta ecclesiastica, Rome,
décembre 1902, p. 483.
2° Dichiarazione del simbolo,
in-16, Rome (?), 1604. ? Explication, article par article, du symbole des
apôtres, que Bellarmin rédigea à Capoue, dans l’intérêt
de ses prêtres. Autob., § 45. Elle fut traduite en français
dès 1906, et se trouve en latin au t. VII des œuvres complètes
du cardinal, Cologne, 1617.
3° Admonitio ad episcopum Theanensem,
nepotem suum, quæ necessaria sint episcopo, qui vere salutem suam
æternam in tuto ponere velit, in-8°, Paris, 1616 ; Cologne, 1619
(édit. plus complète). ? Instruction courte et solide, adressée
par le cardinal à son neveu, Angelo della Ciaia, promu à
l’évêché de Téano, sur les devoirs des évêques,
ou plutôt sur ce qui leur est nécessaire pour mettre leur
salut en sûreté. Neuf questions y sont traitées, dont
les principales concernent la résidence et la prédication
de la parole divine, la perfection exigée par l’épiscopat,
les ordinations, la pluralité des bénéfices et l’emploi
des revenus ecclésiastiques, les rapports avec les princes et avec
les parents. Le cardinal Passionei fit lui-même réimprimer
cet opuscule ; une édition parue à Rome, en 1805, contient
en appendice un traité jusqu’alors inédit de Bellarmin sur
la manière de prêcher, De ratione formandæ concionis.
4° Concionis habitæ Lovanii,
in-4°, Cologne, 1615 ; Cambrai, 1617. ? Ces deux éditions des
sermons latins, prêchés à Louvain par Bellarmin, sont
à distinguer. La première, faite sur des notes précises
par un auditeur, se trouva très défectueuse, et le cardinal
s’en plaignit. Epist. famil., XCIV, CXVIII. La seconde, exécutée
sur une copie qui avait été transcrite de son propre manuscrit
par des religieux prémontrés, ibid., CLXXXV, reçut
l’approbation de l’auteur. On y compte quatre-vingt-sept sermons, dont
quarante-cinq sur les dimanches et les fêtes, cinq sur les fins dernières
et autant sur le Missus est, douze sur la vraie foi et la véritable
Eglise, huit sur les tribulations et douze sur le psaume Qui habitat in
adjutorio. Discours méthodiques et vigoureux, mais dont on a pu
dire qu’ils sont plus instructifs qu’éloquents ; ce sont plutôt,
selon le mot de Dupin, des leçons de théologie. Au début
de sa carrière oratoire, Bellarmin avait donné beaucoup aux
ornements du style
col.585 fin
col.586 début
mais instruit par l’expérience,
il avait renoncé à ce genre pour être plus apostolique.
Autob., § 16. Les sermons de Louvain ont été traduits
en français par l’abbé E. Berton, 4 in-8° ou in-18, Paris,
1856.
5° De ascencione mentis in Deum
per scalas rerum creatarum, in-12, Rome, 1615. ? 6° De æterna
felicitate sanctorum libri quinque, in-8°, Rome et Anvers, 1616. ?
7° De gemitu columbæ, sive de bono lacrymarum libri tres, in-12,
Rome ; in-8°, Anvers, 1617. ?8° De septem verbis a Christo in cruce
prolatis libri II, in-12, Anvers, 1618. ? 9° De arte bene moriendi
libri duo, in-12, Rome ; in-8°, Anvers, 1620. ? Petits traités
ascétiques dont le titre même indique l’objet. Bellarmin les
composa pendant ses retraites annuelles d’un mois au noviciat de Saint-André.
Dupin les déclare « pleins d’une moral très pure et
d’une piété solide. » Saint François de Sales,
parlant du premier, dans la préface du Traité de l’amour
de Dieu, le dit merveilleux. Aussi ces cinq opuscules ont-ils été
souvent réédités et traduits en diverses langues.
Le troisième, De gemitu columbæ, donna lieu, après
la mort de son auteur, à des plaintes, du reste exagérés,
de la part de religieux qui se crurent dénigrés par les gémissements
de la colombe sur le relâchement dans quelques ordres. Couderc, op.
cit., t. II, p. 295 sq.
10° De officio principis christiani
libri tres, in-8°, Rome et Anvers, 1619. ? Dans ce traité, composé
sur la demande des jésuites polonais et dédié au prince
Ladislas, fils du roi Sigismond III, Bellarmin développe les obligations
d’un roi chrétien envers Dieu, envers ses inférieurs, envers
ses égaux et envers lui-même ; puis il propose comme modèles
huit princes ou chefs de l’Ancien Testament et dix du Nouveau, dont
il décrit la vie et les vertus dans une série de courtes
biographies.
11° De cognitione Dei. . . opus
ineditum, in-8° de 60 p., Louvain, 1861. ? Considérations ascétiques,
divisées en treize chapitres, sur Dieu, son essence et ses attributs,
sagesse, science, providence, miséricorde et justice. Presque tout
se retrouve dans l’ouvrage qui suit :
12° Exhortationes domesticæ.
. . ex codice autographo bibliothecæ rossianæ S. J., in-12,
Bruxelles, 1899. ? Exhortations spirituelles en latin ou en italien, publiées
par le P. Van Ortroy, bollandiste, d’après un autographe conservé
à Vienne, en Autriche. Elles furent adressées par Bellarmin
aux religieux de la Compagnie de Jésus, soit au Collège romain,
soit à Naples et dans quelques autres maisons. A la fin du volume,
on trouve trois panégyriques de saint Ignace de Loyola, prêchés
par le cardinal au Gesù de Rome en 1599, 1605 et 1606.
13° Tractatus de obedentia quæ
cæca nominatur ; Summa responsionis ad censuram Julianii Vincentii
in epistolam sanctæ memoriæ P. Ignatii. ? Deux écrits
de circonstance, composés par Bellarmin, en 1588, comme réponse
à des attaques portées par un religieux brouillon contre
la lettre de saint Ignace sur l’obéissance. Ils ont été
publiés par le P.J.-B. Couderc dans un petit volume intitulé
: La lettre de saint Ignace sur l’obéissance commentée par
Bellarmin, in-16, Limoges, 1898. Dans le Traité de l’obéissance
dite aveugle, l’apologiste explique ce que le fondateur de la Compagnie
de Jésus entendait par obéissance aveugle, et montre que
cette sorte d’obéissance est autorisée par les saintes Ecritures,
les témoignages des Pères et des marques de l’approbation
divine ; il répond enfin à quelques objections.
V. ŒUVRES INEDITES. ? Il suffit de signaler
un grand nombre de lettres et les sermons prêchés à
Capoue. Couderc, op. cit., t. II, p. 143. L’opuscule De militia ecclesiastica,
dont parle Döllinger, Die selbstbiographie, p. 187, paraît controversé.
trois manuscrits méritent une mention spéciale.
1° Commentarii in Summam S. Thomæ.
? C’est le cours de théologie enseigné à Louvain,
du 10 octobre 1570 au 17 avril 1576 ; quatre volumes petit in-4°, con-
col.586 fin
col.587 début
servés aux archives secrètes
du Vatican. Dans le premier, la Ia, q. I-CXIX, 618 p. ; dans le second,
la Ia IIæ, q. LV-CXIV, 760 p. ; dans le troisième, la Ia IIæ,
q. I-LXIII, a. 1-2, 780 p. ; dans le quatrième, la suite de la Ia
IIæ, q. I-LXIII, a. 3-CXLVII, 1668 p. Bellarmin nous a fait connaître
lui-même le temps qu’il passa sur chaque partie de la Somme. Autob.,
§ 22. Dans ces commentaires, il s’attache constamment à l’ordre
des questions et des articles de saint Thomas, mais d’après une
méthode qui rappelle, dans l’ensemble, le genre du P. Grégoire
de Valentia. Après avoir proposé le sujet, le professeur
en entreprend par lui-même l’exposition, la preuve et la discussion.
Dans la suite des articles, il passe légèrement chez ceux
qui sont faciles ou purement métaphysiques, mais quand une question
importante se présente, il la discute ex professo, soit en la divisant
en propositions ou conclusions, soit en posant des dubia qu’il résout.
Divers manuscrits, dénommés Annotationes in Summam ou Rhapsodiæ
in D. Thomam, ne sont vraisemblablement que des copies ou des extraits
des Commentarii répandus par les élèves de Bellarmin
; on voit, par exemple, par le Diarum secundum du collège anglais
de Douai, qu’en 1577 les professeurs de théologie y dictaient dans
leurs cours les Commentationes P. Roberti itali, docte, breviter et perspicue
elaborates, ac non ita pridem Lovanii prælectas. T. F. Knox, Records
of the English Catholics under the penal Laws, Londres, 1878, t. I, p.
117, 128. Ce qu’il y a d’important dans les leçons de Louvain se
retrouve, en grande partie, dans les Controverses.
2° Sententiæ D. Michaelis
Baii doctoris lovaniensis a duobus pontificibus damnatre et a Roberto Bellarmino
refutatæ. ? A la bibliothèque royale de Bruxelles, ms. 4320,
fol. 144 sq. Ce manuscrit comprend quinze chapitres, où les propositions
de Baius sont groupées par ordre de matière, et réfutées
à l’aide de passages extraits des Commentarii in Summam. J’ai utilisé
ce travail dans l’article BAIUS, col. 64 sq.
3° De novis controversiis inter
patres quosdam ex ordine prædictatorum et P. Molinam, 1597 (?). ?
Manuscrit dont deux copies existent à Rome, aux bibliothèques
Corsini, Misc. cod. 1323, et Vittorio Emmanuele, mss. Gesuitici, n. 1493
(3622). C’est, à n’en point douter, l’Opusculum dilucidum dont Bellarmin
parle dans son autobiographie et qu’il composa, à la demande de
Clément VIII, sur la censure portée, en 1596, par des frères
prêcheurs, contre neuf propositions extraites du livre de Molina
et une autre relative à la confession par lettres. Liévin
de Meyer, op. cit., t. I, p. 197 sq. Cet écrit contient un jugement
motivé sur les propositions incriminées, en même temps
qu’une exposition vraiment claire des points essentiels du débat
: grâce efficace, science des futurs contingents, concours de Dieu
avec le libre arbitre, prédestination, providence et grâce
du premier homme. Je reviendrai sur cet opuscule, en parlant de la doctrine
de Bellarmin.
Edition complète des œuvres
de Bellarmin : 7 in-fol., Cologne, 1617-1620 ; Paris, 1619 ; Venise, 1721-1728
; 8 in-4°, Naples, 1856-1862, 1872 ; 12 in-4°, Paris, 1870-1874.
Pour les éditions, réimpressions et traductions des différents
ouvrages, ou les livres publiés pour ou contre les Controverses
et autres écrits du cardinal, voir la très riche bibliographie
contenue dans la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, édit.
C. Sommervogel, S. J., Bruxelles et Paris, 1890 sq., t. I, col. 1151-1254,
avec les Addenda, p. X-XI, t. VIII, col. 1797-1807.
Cf. Niceron, Mémoires pour
servir à l’histoire des hommes illustres, Paris, 1715, t. XXXI,
p. 2 sq. ; Ellies du Pin, Nouvelle bibliothèque des auteurs ecclésiastiques,
in-4°, Utrecht, 1745, t. XVII, p. 18 sq., analyse détaillée
des Controverses ; Döllinger et Reusch, Die Selbstbiograpie, beaucoup
de notes utiles ; Hurter, Nomenclator literarius, 2° édit.,
Inspruck, 1892, t. I, p. 228-229.
III. CARACTERISTIQUE, DOCTRINE, INFLUENCE
DE BELLARMIN. ? Il ne s’agira ici des œuvres exégétiques
ou
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col.588 début
ascétiques, ni des œuvres oratoires
ou pastorales, bien que toutes aient contribué pour leur part à
la renommée de leur auteur ; l’étude vise le théologien
dans sa physionomie proche.
I. CARACTERISTIQUE ET TRAITS GENERAUX.
? On doit les chercher dans le rôle apologétique du cardinal,
dans son œuvre et sa méthode.
1° Rôle apologétique.
? Prosper Lambertini, parlant comme promoteur de la foi dans la cause du
vénérable serviteur de Dieu, lui a rendu ce témoignage,
qu’il a mérité le nom de marteau des hérétiques,
en confondant l’erreur par ses écrits. C’est bien là ce qui
paraît au premier plan dans l’auteur des Controverses. Mais son rôle
apologétique n’est pas tout entier dans la lutte contre l’hérésie
; Bellarmin a été encore, dans les luttes politico-religieuses
auxquelles nous l’avons vu mêlé, le grand champion du siège
romain et des droits inhérents à la primauté du vicaire
de Jésus-Christ. Sur ce double terrain il eut un rôle de premier
ordre ; amis et ennemis en conviennent. « Il est sûr, a écrit
Bayle, qu’il n’y a point de jésuite qui ait fait plus d’honneur
que lui à son ordre, et qu’il n’y a point d’auteur qui ait soutenu
mieux que lui la cause de l’Eglise romaine en général, et
celle du pape en particulier. Les protestants l’ont bien reconnu. »
Dictionnaire historique et critique, 2e édit., Paris, 1820, t. III,
p. 264. Ranke l’a proclamé « le plus grand controversiste
de l’Eglise catholique, auquel on rend la justice de dire que nul ne mena
une vie plus apostolique. » Histoire de la papauté,
t. II, p. 108. Il y a là pour Bellarmin un titre d’autant plus réel
à la connaissance des catholiques, qu’il comprit de bonne heure
sa mission et s’y donna sans réserve. Il fut aidé, assurément,
par ses qualités naturelles, cette riche mémoire, cette facilité
à tout saisir et à tout s’approprier, cette netteté
de pensée et cette clarté méthodique dans l’exposition
qui manifestèrent dès son enfance ou pendant ses études.
Les circonstances l’aidèrent aussi ; son enseignement et ses prédications
à Louvain, dans un milieu où l’influence protestante cherchait
à pénétrer, furent pour lui comme une première
orientation. Mais il sut mettre à profit les dons reçus et
les circonstances providentielles ; ses études de patristique l’armèrent
d’une érudition remarquable pour l’époque ; la lecture des
auteurs protestants le prépara encore plus directement à
son rôle futur. Et quand il monta la chaire de controverse au Collège
romain, il fut à sa place et dans sa vocation. Enfin une idée
apostolique le guida dans la publication de ses Disputationes ; il comprit
qu’il fallait multiplier les livres pour la défense de la vraie
foi : Illa prima ratio me movit, dit-il dans l’avis au lecteur, quod non
solum non obesse, sed etiam prodesse censeam ecclesiastice caussæ,
si plurimi hoc tempore scribant. La publication venait, du reste, à
son heure.
2° L’œuvre et la méthode.
? Beaucoup de doctes travaux avaient paru sur les points controversés
en matière de religion, mais des travaux de détail, isolés
et éparpillés dans un grand nombre d’ouvrages ; Bellarmin
jugea qu’il serait grandement utile de les réunir en un seul corps.
On a vu comment il a réalisé ce plan. L’idée apologétique
se retrouve dans l’application, comme elle fut au début ; partout,
à côté des donnés traditionnelles, l’adaptation
aux besoins du temps. Ainsi paraissent, dans le traité De verbo
Dei, la canonicité des Livres saints, l’authenticité de la
Vulgate, l’interprétation des divines Ecritures qui ne pourrait
être laissée à l’examen privé, mais relève
de l’Eglise, de son magistère vivant, l’existence enfin et la nécessité
de la tradition. De même, dans les autres traités ; rien n’échappe
au controversiste de ce que l’hétérodoxie d’alors avait avancé
contre la personne du Christ, ses attributs et son rôle de médiateur,
ou contre l’Eglise catholique, son chef, ses membres, ses usages, son culte,
ses sacrements, sa doctrine sur
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col.589 début
la grâce, la justification, le mérite
et les bonnes œuvres. Véritable Somme en son genre où, suivant
l’expression de Montague dans la préface de l’Apparatus æd
origines ecclesiasticas, n. 56, in-fol., Oxford, 1635, « seul et
le premier, Bellarmin exploita, avec autant de de bonheur que de talent
et d’habileté, cette énorme masse et ce vaste chaos de controverses
pour y faire succéder l’ordre à la confusion. »
Le style des Disputationes est net,
précis et, quoique scolastique, n’est pas dépourvu d’élégance,
clarus, non inelegans, disait Campanelle, De libris propriis et recta ratione
studendi syntagma, c. IX, a. 9, in-8°, Paris, 1542, p. 84. La méthode
est simple, mais parfaitement appropriée au dessein de l’auteur.
Il rapporte d’abord, sur chaque question, les erreurs des hérétiques
et les sentiments des théologiens catholiques, puis explique en
peu de mots la doctrine de l’Eglise ou le sentiment qu’il adopte. Suit
l’argumentation, serrée, vigoureuse, appuyée sur la sainte
Ecriture, les définitions conciliaires ou pontificales, les témoignages
patristiques, la pratique de l’Eglise et le consentement des théologiens
; la spéculation n’a qu’une part secondaire. Bellarmin restait
en cela fidèle à ce principe qu’on lui prête : la théologie
est avant tout théologie et non pas métaphysique. La question
se termine par une réponse concise aux difficultés. On a
rendu à l’auteur des Controverses ce témoignage qu’il reproduit
exactement les objections comme les sentiments de ses adversaires. Il n’épargne
pas l’erreur ; il relève vivement chez les hérétiques
les mendacia, les fallaciæ, tout ce qui faussait la vraie notion
du dogme catholique ; mais il garde à l’égard des personnes
un ton digne et respectueux, pratiquant ce qu’il avait prêché
à Louvain dans un sermon De moribus hæreticorum : «
Haïssons fortement l’infection, l’hérésie, les vices
des hommes, mais non pas les hommes, non quidem homines, sed pestem, sed
hæresim, sed vitia illorum. »
II. PRINCIPAUX POINTS DE DOCTRINE.
? Tels sont, en premier lieu, ceux qui furent plus directement en cause
dans les grandes luttes politico-ecclésiastiques où le cardinal
fut mêlé activement : la primauté du pontife romain,
son pouvoir indirect sur le temporel et l’origine du pouvoir civil. A ces
points doit s’ajouter, pour la part qu’il prit à la controverse
De auxiliis, la doctrine de Bellarmin sur la grâce et la prédestination.
Les références particulières, avec indication de tome
et de page, se rapporteront, sauf exception, à l’édition
de Cologne de 1617.
1° Primauté du pontife
romain. ? Il y a une connexion étroite, chez l’auteur des Controverses,
entre la primauté papale et l’Eglise, « assemblée d’hommes
unis ensemble, par la profession d’une même foi chrétienne
et la participation aux mêmes sacrements, sous l’autorité
de pasteurs légitimes, principalement du pontife romain unique vicaire
de Jésus-Christ ici-bas. » De conciliis et Ecclesia, l. III,
c. II. L’Eglise ainsi définie n’est pas seulement une société
visible, c’est une société hiérarchique, avec subordination
organique des fidèles à leurs pasteurs immédiats,
et de tous au chef suprême, l’évêque de Rome. Là
se trouve le caractère propre du régime ecclésiastique.
De romano pontif., l. I. Après avoir passé en revue et apprécié
les différentes formes de gouvernement, Bellarmin établit
que l’Eglise ni une démocratie, ni une aristocratie, mais une monarchie,
tempérée par un élément aristocratique ; car
Jésus-Christ a fait de son Eglise un royaume et un bercail ayant
à sa tête saint Pierre chef unique et pasteur suprême,
mais les évêques n’en sont pas moins, de droit divin, vrais
pasteurs et princes, non pas simples vicaires, dans leurs églises
particulières. Recognitio, de summo pontifice, l. V, c. III. Saint
Pierre, ayant fixé son siège à Rome, a transmis sa
primauté aux pontifes romains, ses successeurs.
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col.590 début
La première fonction du pape
est d’instruire ; à ce titre il est juge souverain dans les questions
qui concernent la foi et les mœurs. De là son infaillibilité
quand, pasteur suprême, il enseigne toute l’Eglise en matière
de foi ou détermine un principe en matière de mœurs. C’est
là une doctrine tout à fait certaine et qu’il faut tenir,
certissima et asserenda. De romano pontif., l. IV, c. II. A l’endroit correspondant
de la Recognitio, Bellarmin remplace même le mot opinio, dont il
était servi dans les Controverses, par celui de sententia, ce dernier
terme n’impliquant la nuance d’incertitude qui s’attache au premier. Les
conciles généraux sont subordonnés au pape ; son approbation
est nécessaire, pour que leurs décrets en matière
de foi puissent être considérés comme infaillibles.
De conciliis, l. II, c. II, sq. Mais le privilège de l’inerrance
ne s’étend pas aux jugements qui portent sur de simples questions
de fait, où tout repose sur des informations et des témoignages
d’ordre purement humain. De romano pontif., l. IV, c. II. Restriction dont
les jansénistes ont abusé et que, pour cela même, les
adversaires de Bellarmin ont attaquée comme dangereuse ; mais le
cardinal Calvachini s’est contenté de répondre que, la doctrine
étant vraie, l’abus ne saurait être imputé qu’à
la mauvaise interprétation des hérétiques. Relatio,
n. 278. Autre chose sont les faits purement personnels dont parle
l’auteur des Controverses, autre chose les faits dogmatiques dont il s’agissait
dans la querelle janséniste. A plus forte raison, le privilège
de l’inerrance ne s’applique pas au pape parlant et écrivant comme
particulier ou docteur privé ; pourrait-il alors non seulement se
tromper, mais tomber dans l’hérésie formelle ? question secondaire,
où la négative paraît probable et se peut tenir pieusement.
De romano pontif., l. IV, c. VI. Le déraisonnable serait de confondre
l’impeccabilité avec l’infaillibilité. Le pape est homme
et, comme tel, peut pécher, avaient objecté les théologiens
de Venise dans leur 12e proposition : rien de plus vrai, répliqua
le cardinal controversiste, t. VII, col. 1108. Dans l’exercice même
de son suprême magistère, le pape n’a pas à compter
sur des révélations spéciales, il ne doit pas fier
exclusivement à son propre jugement, mais il doit recourir aux moyens
ordinaires pour parvenir à la connaissance de la vérité.
De conciliis, l. I, c. XI. Telle est dans son ensemble, la doctrine de
Bellarmin sur l’infaillibilité pontificale ; doctrine qu’un théologien,
le Dr Hauck, trouve singulièrement modérée. Realencyklopädie
für protestantische Theologie und Kirche, 3e édit., Lepizig,
1897, t. II, p. 551.
La seconde fonction du pape est
de régir le troupeau de Jésus-Christ ; il possède
à cette fin la plénitude de la juridiction ecclésiastique.
Comparé sous ce rapport aux autres évêques, il les
dépasse non-seulement par l’étendue et l’efficacité,
mais encore par l’origine de son pouvoir ; seul, en effet il tient immédiatement
de Jésus-Christ sa juridiction, tout autre évêque reçoit
la sienne par son entremise. Bellarmin voit là une conséquence
du régime monarchique de l’Eglise. De romano pontif., l. IV, c.
XXII sq. Comparé à l’ensemble de l’épiscopat, même
réuni en concile, le pape garde la supériorité ; les
évêques sont, à la vérité, de vrais juges
de la foi, mais leur jugement reste toujours subordonné à
celui du docteur suprême, De conciliis, l. II, c. XV sq. ; dans la
controverse vénitienne, Responsio ad libellum Jo. Gersonis, et Responsio
ad tractatum septem theologorum, prop. 9, t. VII, col. 1073 sq., 1096 sq.
Le vicaire du Christ n’est justiciable d’aucune juridiction humaine. De
romano pontif., l. II, c. XXVI. Un seul cas paraît faire exception,
celui où un pape tomberait formellement dans l’hérésie
; alors il pourrait être déposé par un concile. Mais
l’exception n’est qu’apparente ; la vérité est que par le
fait même de l’hérésie, il cesserait d’être membre
de l’Eglise, et le concile le déclarait plutôt déchu
du
col.590 fin
col.591 début
pontificat qu’il ne le déposerait
lui-même. Ibid., c. XXX ; De potestate summi pontificis in temporalibus,
c. XXII, t. VII, col.939.
En vertu de sa juridiction souveraine,
le pape a sur tous les chrétiens un véritable pouvoir dans
l’ordre spirituel, comme les princes sur leurs sujets, dans l’ordre temporel.
Il peut faire des lois qui obligent en conscience, condamner et punir les
transgresseurs de ces lois. De romano pontif., l. IV, c. XV sq. Son pouvoir
coactif s’étend aux peines corporelles, même à la peine
de mort, en droit du moins. Responsio ad anonymi epistolam, prop. 1 ; Responsio
ad oppositiones f. Pauli, consid. 11a t. VII, col. 1039-1157 sq. Bellarmin
traite, au cours des Controverses, des principales applications du pouvoir
pontifical : jugement des causes majeures en particulier ; convocation
et présidence des conciles ; élection ou confirmation des
évêques ; canonisation des saints ; approbation des ordres
religieux ; dispensation des indulgences, etc. Mais quelle que soit l’étendue
de ce pouvoir, on fausse la doctrine du cardinal quand on lui fait dire,
dans la Grande Encyclopédie, que le pape « est un monarque
absolu, auquel une obéissance inconditionnelle est due. »C’est
abuser d’une preuve ab absurdo, dont se sert l’auteur des Controverses,
De romano pontif., l. IV, c. V, et dont il a compris lui-même l’équivoque,
puisqu’il s’est expliqué dans le passage correspondant de la Recognitio
: il affirme qu’en cas de doute la présomption est pour le supérieur
qui parle ou commande, mais « si un pape enjoignait ce qui
est vice manifeste ou proscrivait ce qui est vertu manifeste, on devrait
dire avec saint Pierre, Act. V, 29 : Il faut plutôt obéir
à Dieu qu’aux hommes ». Cf. Responsio ad tract. septem theologorum,
prop. 12, t. VII, col. 1101.
Une autre conséquence de
la primauté pontificale qu’il suffit de signaler, est le privilège
de l’exemption, qui est de droit divin pour le vicaire du Christ. De potestate
summi pontificis in temporalibus, c. XXXIV, t. VII, col. 972. Si, au début
de l’Eglise, les souverains pontifes comme les apôtres nous apparaissent
soumis aux pouvoirs civils, on n’en peut conclure au droit, mais seulement
au fait. Recognitio, de summo pontif., l. II, c. XXIX. Le pouvoir temporel
du pape ne relève pas des mêmes principes ; il se rattache,
dans son origine, à la piété des princes et repose
sur une nécessite d’ordre moral. De romano pontif., l. V, c. IX.
Bellarmin s’est expliqué d’une façon défavorable à
la donation de Constant dans une lettre au cardinal Baronius, du 9 avril
1607 ; elle a été publiée par Læmmer, op. cit.,
p. 364 sq.
2° Pouvoir indirect du pape
sur le temporel. ? Il importe de déterminer exactement ce que Bellarmin
entend par ce pouvoir, quel objet il lui attribue et sur quels fondements
il l’appuie. D’après la définition donnée dans le
Recognitio : de summo pontifice, l. V, c. VI, il faut entendre le pouvoir
que le souverain pontife possède sur les choses temporelles in ordine
ad spirituala, en vue des choses spirituelles, qui seules tombent proprement
et pour elles-mêmes sous sa juridiction. Les mots direct et indirect
ne s’appliquent pas précisément au mode dont le pouvoir s’acquiert
; ils en visent l’objet considéré dans son rapport avec le
pouvoir lui-même, lequel, atteignant proprement et premièrement
les choses spirituelles, ne s’étend aux choses temporelles que secondement
et par voie de conséquence. De potestate summi pontificis in temporalibus,
c. V, XII, t. VII, col. 867, 901. La comparaison, empruntée par
le cardinal à saint Grégoire de Nazianze, éclaire
bien sa pensée. Le pouvoir spirituel est au pouvoir temporel ce
que, dans l’homme, l’esprit est à la chair. Semblables à
deux sociétés qui ont leurs fins propres et leurs fonctions
spéciales, l’esprit et la chair peuvent se trouver dans un double
état, de séparation ou d’union mutuelle.
col.591 fin
col.592 début
Qu’on les suppose unis, il y aura nécessairement
connexion et subordination entre les deux éléments. L’esprit
n’empêchera pas la chair d’exercer ses fonctions naturelles et de
tendre à sa fin particulière ; mais, élément
plus noble, il présidera, et s’il est nécessaire, réfrènera
et châtiera la chair, lui imposera même de grands sacrifices,
dans la mesure où sa fin propre l’exigera. L’application aux deux
pouvoirs, le spirituel et le temporel, se comprend aisément. De
romano pontif., l. V, c. VI.
L’auteur des Controverses détermine
au même endroit l’objet du pouvoir indirect. D’une façon régulière
et comme en vertu d’une juridiction ordinaire, le souverain pontife ne
peut pas déposer les rois, même pour juste motif, comme il
dépose les évêques ; il ne peut pas faire des lois
civiles, ni unciforme ou annuler celles qui ont été portées
par l’autorité compétente ; il ne peut pas juger des choses
temporelles. Mais il peut faire tous ces actes par voie d’intervention
spéciale, quand le salut des âmes l’exige et dans la mesure
même où il l’exige. L’exercice de ce redoutable pouvoir a,
du reste, ses règles et ses limites. S’agit-il par exemple, de transférer
l’autorité civile, « il n’est pas loisible au souverain pontife
d’en disposer à sa guise, il doit la faire passer à celui
que le droit de succession ou d’élection appelle au trône
; personne n’ayant droit, la raison guidera son choix. » De potestate
summi pontificis, c. XII, t. VII, col. 901. Le pape viendra que lentement
et comme malgré lui aux dernières extrémités
à l’égard des princes : « L’usage des souverains pontifes
est d’employer d’abord la correction paternelle, ensuite de les priver
de la participation aux sacrements par les censures ecclésiastiques,
et enfin de délier leurs sujets du serment de fidélité
et de les dépouiller eux-mêmes de toute dignité et
de toute autorité royale, si le cas l’exige. L’exécution
appartient à d’autres. » Ibid., c. VII, col. 876. Inutile
de se forger des craintes chimériques sur les dangers que pourrait
courir la vie des rois : « On n’a jamais entendu dire, en effet,
que, depuis le commencement de l’Eglise jusqu’à nos jours, aucun
souverain pontife ait fait mettre à mort, ou approuvé que
d’autres missent à mort un prince quelconque, fût-il hérétique,
fût-il païen, fût-il persécuteur. » Epist.
ad Blackvellum, t. VII, col. 662.
Bellarmin soutient sa thèse
non comme une opinion nouvelle ou simplement probable, mais comme une doctrine
ancienne et certaine. De romano pontif., l. V, c. I ; De potestate summi
pontificis, c. III. Il l’appuie sur des raisonnements théologiques
et sur des faits d’ordre historique et juridique. Les faits nous sont déjà
connus : acte pontificaux atteignant le temporel, comme la translation
de l’empire romain des Grecs aux Francs, et de ceux-ci aux Germains, puis
divers cas où des rois ont été déposés
par des papes, ceux surtout où la déposition s’est faite
dans des conciles généraux, comme celle d’Othon IV sous Innocent
III au concile de Latran en 1215, et celle de Frédéric II
sous Innocent IV au concile de Lyon en 1245. En principe, le pouvoir indirect
du pape sur le temporel est, pour le cardinal, une simple conséquence
de deux vérités dogmatiques : d’une part, la plénitude
de juridiction conférée par Jésus-Christ au souverain
pontife pour mener les âmes au salut éternel ; d’autre part,
la subordination de la fin temporelle du pouvoir civil à la fin
spirituelle de l’Eglise. Les deux sociétés sont, à
la vérité, distinctes et parfaites, chacune dans sa sphère
; mais il ne s’ensuit pas, comme le prétendait Barclay, qu’elles
soient totalement indépendantes, car si les fins sont subordonnées,
il en doit être de même des pouvoirs. Si donc le pouvoir civil
devient un obstacle au salut des âmes, il appartient au pouvoir spirituel
d’apporter le remède. De là vient que, dans la décrétale
Novit, Innocent III revendique le droit et le devoir de s’opposer aux crimes
et aux scandales des
col.592 fin
col.593 début
princes, comme à ceux de tout chrétien,
et que, dans la bile Unam sanctam, Boniface VIII dit des deux pouvoirs,
symbolisés par les deux glaives, le spirituel et le temporel : «
Il faut que le glaive soit subordonné au glaive, et que l’autorité
temporelle soit subordonnée à la puissance spirituelle. .
. Si donc la puissance temporelle s’égare, elle sera jugée
par la puissance spirituelle. » Tel est l’argument fondamental, où
reviennent toutes les raisons particulières qui sont développées
principalement dans la controverse De romano pontifice, l. V, c. VII, et
le traité contre Barclay, c. III sq. , secondairement dans les autres
écrits polémiques : De translatione imperii, c. XII ; Responsio
ad præcipua capita apologiæ, quæ falso catholica inscribitur,
Paris, 1558, p. 73 sq. ; Apologia pro responsione sua ad librum Jacobi,
c. III, XVII.
La vigueur et le succès avec
lesquels Bellarmin a défendu le pouvoir indirect ont fait attacher
son nom à cette doctrine, bien qu’en réalité il n’en
soit nullement l’inventeur. Dans la suite, et quoi qu’il en soit des diverses
manières dont on explique maintenant encore ce pouvoir indirect,
la doctrine elle-même a été généralement
admise en dehors de l’école régaliste et gallicane. L’attaque
a consisté surtout à opposer à l’interprétation
des faits que suppose la doctrine de Bellarmin ; une autre interprétation
toute différente : de droit divin, le pouvoir pontifical est purement
directif, il se borne à exhorter les princes et à les enseigner
sur leurs devoirs ; mais, au moyen âge, les papes acquirent un pouvoir
effectif, fondé sur uniquement sur le droit public du temps, et
par suite d’origine humaine et arbitraire. Fénelon, De summi pontificis
auctoritate dissertatio, dans Œuvres complètes, Paris, 1848, t.
II, p. 46 ; Gosselin, Pouvoir du pape au moyen âge, part. II, c.
III, in-8°, Paris, 1845. A cette théorie, le cardinal aurait
répondu qu’elle ne conserve pas aux faits leur vraie signification,
que saint Grégoire VII, Innocent III, Innocent IV et les autres
papes ont prétendu exercer un droit divin, dont ils trouvaient le
titre dans leur office de vicaire de Jésus-Christ, et que pour cela
même ils faisaient appel, dans l’exercice de ce pouvoir, au Quodcumque
ligaveris et au Pasce oves. De potestate summi pontif., c. III, t.
VII, col. 853. Toutefois l’explication donnée par Bellarmin n’a
pas été aussi généralement admise que la doctrine
même du pouvoir indirect ; un certain nombre d’auteurs ont trouvé
et trouvent encore qu’en réalité, cette explication suppose
dans le pape un pouvoir vraiment temporel, et par suite ne différencie
pas assez l’opinion du savant cardinal de celle du pouvoir direct. J. Moulart,
L’Eglise et l’Etat, l. II, 2e édit., in-8°, Louvain, 1879, t.
II, p. 175 sq. De là ce qu’on appelle parfois le système
du pouvoir directif, mais dans un sens équivoque ; car ces auteurs
ne reconnaissent pas seulement au pape le droit d’éclairer ou de
diriger la conscience des princes et des peuples chrétiens ; ils
lui attribuent encore le droit de déclarer nulles et de nul effet
les prescriptions de l’autorité civile qui sont contraires à
la loi morale, et même celui de déclarer en quels cas les
princes sont déchus, pour cause de religion, de leurs droits au
trône, et leurs sujets dispensés du devoir de leur obéir.
On donne pour représentant le plus autorisé de cette explication
le franciscain J.-A. Bianchi, Traité de la puissance ecclésiastique
dans ses rapports avec les souverainetés temporelles, l. I, §
8, n. 1 ; § 13, n. 4, trad. par M. l’abbé A.-C. Peltier, Paris,
1857, t. I, p. 90, 134. Mais Bianchi a-t-il mis entre son explication et
celle de Bellarmin l’opposition qu’on prétend y voir ; et n’est-ce
pas mal comprendre la pensée du cardinal, que du faire du pouvoir
indirect qu’il accorde au pape un pouvoir vraiment temporel ? Bianchi lui-même
donnera la réponse, l. VI, § 11, n. 8 ; § 12, n. 2, t.
II, p. 771, 791.
3° Origine du pouvoir civil.
? Bellarmin traite de la société civile à propos des
membres de l’Eglise, l. III,
col.593 fin
col.594 début
De laicis. Il défend d’abord contre
les anabaptistes le pouvoir et la magistrature politique, puis établit
qu’un prince, même chrétien, peut porter des lois et que la
loi civile n’oblige pas moins en conscience que la loi divine, c. XI. Aussi
cria-t-il justement à la calomnie, lorsque, dans son Triplici nodo,
Jacques Ier lui prêta cette assertion : On doit obéissance
au pape par devoir de conscience, mais on ne doit obéissance au
roi qu’en considération de l’ordre public. Le royal polémiste
avait confondu deux questions fort distinctes : l’exemption des clercs
et l’obéissance due aux princes légitimes par leurs sujets.
Resp. ad apolog., t. VII, col. 701 sq. Mais ce qui porta le plus
d’ombrage à jacques Ier et aux théologiens réalistes,
ce fut la page relative à l’origine du pouvoir civil, c. VI. Le
point n’avait été touché qu’incidemment ; après
avoir prouvé que la puissance politique est bonne et légitime,
parce que, suivant l’enseignement des Ecritures, elle vient de Dieu, l’auteur
des Controverses avait ajouté quelques remarques pour préciser
cette dernière assertion. Pris en général, abstraction
faite des formes particulières, monarchie, aristocratie ou démocratie,
le pouvoir civil est de droit naturel et vient de Dieu immédiatement
; mais personne n’ayant à ce pourvoir de titre déterminé
et suffisant, il a pour sujet immédiat la multitude. Celle-ci, ne
pouvant l’exercer par elle-même doit nécessairement le transmettre
à un ou plusieurs hommes. Les formes particulières de gouvernement
ne sont donc pas de droit naturel, mais elles se réfèrent
au droit des gens, puisqu’il dépend de la multitude de se donner
un roi ou des consuls ou d’autres magistrats, et qu’elle peut, s’il y a
motif suffisant, transformer une monarchie en aristocratie ou démocratie,
et réciproquement, comme il est arrivé à Rome. De
là deux différences notables entre le pouvoir civil et le
pouvoir ecclésiastique : le premier réside immédiatement
dans la multitude, et considéré dans ses formes particulières
n’est pas de droit divin ; l’autre a pour sujet immédiat un seul
homme et est simplement de droit divin. Pensée sur laquelle le cardinal
revient souvent, en concluant de là que les hommes peuvent modifier
la forme de leurs gouvernements, mais qu’ils ne le peuvent pas en ce qui
concerne la monarchie ecclésiastique. Disput. de exemptione clericorum,
c. I. Quand il révisa ses œuvres, l’auteur des Controverses compléta
sa doctrine, en indiquant comme chefs d’arguments l’autorité d’un
grand nombre de théologiens, l’expérience qui montre dans
un même pays, à Rome par exemple, la succession de divers
régimes, enfin des témoignages et des exemples empruntés
à la sainte Ecriture, où le consentement du peuple intervient
dans la transmission de l’autorité civile. Recognitio, de laicis,
c. VI.
Bellarmin eut l’occasion de défendre
ces doctrines dans toutes ses polémiques politico-ecclésiastiques
: contre Pierre de Belloy, Responsio ad præcipua capita apologiæ,
Paris, 1588, p. 54 sq. ; contre les théologiens de Venise, Responsio
ad anonymi epistolam, prop. 1 et ad defensionem octo porpositionum Jo.
Marsilii, t. VII, col. 1030-1176 sq. ; contre Jacques Ier, Responsio ad
apologiam ; Apologia pro responsione sua, c. XIII, t. VII, col. 700 sq.,
801 sq. ; contre Barclay, De potestate summi pontif., c. III, t. VII, col.
860. La lecture de ces passages est nécessaire, si l’on veut connaître
exactement toute la pensée du cardinal. Il n’exclut pas, dans la
possession ou la transmission du pouvoir civil, mais reconnaît formellement
l’existence et la légitimité de droits particuliers et permanents,
élection, hérédité, donation ou conquête.
Il réprouva ces assertions que Jacques Ier lui avait prêtées
: Tout roi est élu par son peuple ; les princes peuvent, pour divers
motifs, être déposés par leurs sujets. Il défie
Jean Marsilli dans ses œuvres un seul passage où il ait affirmé
que, dans le cas d’une royauté absolue, le peuple puisse
col.594 fin
col.595 début
déposer le roi ou restreindre son
autorité. Il distingue enfin entre ses propres affirmations et les
citations qu’il a empruntées à des auteurs universellement
respectés. Ce qu’il soutient proprement, c’est que tous les titres
invoqués sont de droit humain et n’empêchent aucunement que,
du moins à l’origine, le pouvoir civil ne se soit trouvé
dans la multitude et n’ait passé, de son consentement, à
des sujets déterminés ; ce qui ne peut se dire de la monarchie
ecclésiastique.
Ainsi comprise, la théorie
de Bellarmin ou plutôt la théorie commune des scolastiques
sur l’origine du pouvoir civil, est une opinion discutable et discutée,
dont l’examen ne rentre pas dans le cadre de cette étude. Deux remarques
seulement seront utiles : les objections faites contre le caractère
trop particulier et trop exclusif de cette explication supposent, en général,
une interprétation incomplète et par là même
inexacte de la pensée du cardinal ; sur tout, il serait aussi déraisonnable
qu’injuste de confondre son opinion avec la théorie révolutionnaire
de J.-J. Rousseau et autres apôtres du pacte social et de la souveraineté
absolue de la multitude. Voir les auteurs cités dans la bibliographie.
4° Grâce et prédestination.
? Dans le dernier volume des Controverses, Bellarmin ne réfute pas
seulement les erreurs des protestants sur ces graves matières ;
il y traite aussi des problèmes discutés entre théologiens
catholiques. De singulières affirmations se répètent
à ce propos. « Dans les questions relatives à la grâce,
en un temps où le molinisme florissait déjà, lit-on
dans la Grande Encyclopédie, il s’abstint des doctrines qui prévalaient
dans son ordre, et il resta un thomiste intransigeant, à tel point
que les jansénistes ont cru parfois pouvoir invoquer son autorité
et le citer comme augustinien. » Cf. Gery, c’est-à-dire Quesnel,
dans
un passage de son Apologie historique des Censures de Louvain et de Douay,
que reproduit le Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle, Paris,
1820, t. III, p. 273 sq. De leur côté, Döllinger et Reusch
se sont fait l’écho d’une accusation utilisée déjà
par le cardinal Passionei, Voto, p. 42 sq. : par complaisance pour ses
supérieurs et par esprit de corps, le cardinal jésuite aurait
transigé avec ses propres convictions, soit en laissant faire ou
en faisant lui-même des modifications dans son enseignement primitif,
soit en défendant dans la Concorde de Molina des propositions qu’il
regardait personnellement comme fausses et erronées.
Pour démêler les confusions
étonnantes ou les suppositions gratuites que contiennent ces attaques,
il suffit de rappeler quels furent, dans l’accord du libre arbitre et de
la grâce, les points considérés comme fondamentaux
par les théologiens jésuites et soutenus en leur nom dans
les congrégations De auxiliis. Schneemann, op. cit., p. 246, 256,
Tous rejetaient les prédéterminations physiques et la grâce
dite efficace par elle-même et de sa nature ; tous, pour expliquer
l’efficacité de la grâce, faisaient appel à la science
moyenne, guidant Dieu dans le choix des grâces et l’exécution
de ses desseins. Or, sur ces deux points, Bellarmin eut dès le début
de sa carrière théologique et conserva jusqu’à la
fin de sa vie une conviction arrêtée. Dans ses leçons
de Louvain, il enseigne que la grâce efficace n’est pas une détermination
invincible de la volonté, mais un appel fait par Dieu dans des circonstances
où il sait qu’il sera écouté, vocationem qua Deus
ita vocat sicut novit hominem secuturum. Même doctrine dans l’écrit
qu’il composa en faveur de Lessius, son ancien élève, dans
le jugement motivé qu’il porta sur la censure de Louvain en 1587,
et dans les Controverses, qu’il s’agisse de l’édition d’Ingolstadt
qu’on prétend modifiée par Grégoire de Valentia ou
de l’édition de Venise, ab ipso auctore aucta et recognita. Aussi
fut-il facile plus tard,
col.595 fin
col.596 début
aux jésuites de Rome de dresser
une sorte de concordance entre la doctrine de Molina et de celle de Bellarmin
relativement à la science de Dieu et à la grâce efficace.
Liévin de Meyer, op. cit., l. II, c. XIX, XX, t. I, p. 145 sq. Pour
l’époque du grand débat, il suffit d’invoquer l’opuscule
De novis controversiis, dont l’auteur se déclare pleinement d’accord
avec Molina en ce qui concerne le rejet des prédéterminations
physiques et la science des futurs contingents ; puis toute la conduite
du cardinal et son vote définitif dans la congrégation De
auxiliis. Dans la Recognitio de 1607, il n’est pas moins explicite. De
gratia et libero arbitrio, l. I, c. XII ; l. IV, c. XI, XIV. On connaît
enfin la protestation solennelle que le serviteur de Dieu fit sur son lit
de mort.
Mais il y avait dans le livre de
la Concorde des assertions de détail sur des questions difficiles,
où les théologiens jésuites n’étaient pas tous
de l’avis de Molina, Bellarmin en particulier. Lui-même, dans l’appendice
de son autobiographie, dit à propos de cet ouvrage : « Avant
qu’aucune dispute se fût élevée, N. avertit le Père
Général qu’il y avait dans Molina des propositions malsonnantes,
et il lui en remit la liste par écrit. Le Père Général
les envoya en Espagne ; aussi, dans une nouvelle édition, le P.
Molina s’efforça d’adoucir ces propositions, et déclara qu’il
les énonçait par manière, on d’affirmation, mais de
discussion. » De quelle nature étaient les assertions incriminées
? L’opuscule inédit De novis controversiis permet de le déterminer,
et de faire en même temps le partage entre les opinions de Molina
que Bellarmin n’admettait pas, mais qu’il déclarait libres, et les
assertions qu’il trouvait male sonantes. Dans la première catégorie
se rangent les vues exposées dans le livre de la Concorde sur la
nature du concours divin, la prédestination et les prédéfinitions.
Molina conçoit le concours comme une coopération de Dieu
et du libre arbitre à un même effet, les deux étant
causes partielles, chacun dans son ordre ; Bellarmin pense qu’il est plus
exact de le concevoir comme une motion du libre arbitre, suivant l’explication
qu’il en donne dans son traité De gratia et libero arbitrio, l.
IV, c. XVI. Dans le problème de la prédestination, le docteur
espagnol nous montre l’élection divine se portant, sous la lumière
de la science de simple intelligence et de la science moyenne, sur tel
ordre de choses pris dans son ensemble tombant simultanément sur
la gloire et la série de grâces qu’elle suppose ; Bellarmin
suppose d’abord le choix des élus à la gloire, puis la préparation
des grâces efficaces comme moyen ordonné à la fin déjà
voulue, mais il confesse que, du moment où Molina maintient la gratuité
de l’effet total de la prédestination, la divergence de vues est
plus apparente que sérieuse : non est magna controversia , si res
ipsa inspiciatur, tametsi videtur maxima, si sola verba considerentur.
De même pour le problème connexe des prédéfinitions
: l’auteur de la Concorde ne pense pas que tous les effets des causes secondes
aient été voulus par Dieu directement et pour eux-mêmes,
per se intentos ; Bellarmin préfère l’autre opinion, mais
en voyant là, comme dans les deux cas précédents,
un point libre.
Par contre il fait des réserves
formelles sur les propositions suivantes, sans approuver toutefois les
censures, excessives à son avis, que les adversaires de Molina en
avaient données.
Fieri potest ut eisdem auxiliis Dei datis duobus hominibus qui tentabantur eadem tentatione, unus ex sola libertate sua resistat, alter non resistat. (Il peut se faire que, les mêmes secours divins étant donnés, de deux hommes soumis à la même tentation, l’un résiste en vertu de sa seule liberté, et l’autre ne résiste pas.)
Potesti fieri, ut aliquis cum pluribus
et majoribis auxiliis damnetur et, alter cum paucioribus et minoribus salvetur,
quia ille pro innata libertate uti volluit auxiliis, alter non voluit.
(Il peut se faire qu’un homme se damne avec des secours plus nombreux et
plus grands, et qu’un autre se sauve avec des secours moindres et moins
nombreux, parce que, usant de sa liberté native, l’un a voulu profiter
des secours, et l’autre ne l’a pas voulu.)
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Divisio auxilii in efficax et inefficax
ab effectu et arbitrii libertate pendet ; cum ille assentitur fit efficax,
cum rejicitur fit inefficax. (La division de la grâce en efficace
et inefficace dépend de l’effet et du libre arbitre ; quand on y
consent elle devient efficace, et quand on la rejette elle devient inefficace.)
Bellarmin estime que, prises à
la lettre, les deux premières propositions sont fausses ; car celui
qui résiste à la tentation ne le fait pas en vertu de sa
seule liberté, mais en vertu de la congruité du secours qu’il
a reçu ; pareillement si quelqu’un se sauve, ce n’est pas à
sa seule liberté, mais à la congruité des grâces
reçues qu’il faut attribuer. Cependant les deux assertions sont
susceptibles d’une interprétation raisonnable et fondée sur
saint Augustin, De civitate Dei, l. XII, c. VI, P. L., t. XLI, col. 354.
Mais la 3e proposition surtout déplaît à Bellarmin
; il n’y reconnaît pas la vraie notion de la grâce efficace,
considérée en elle-même ou dans sa vertu propre et
distincte du consentement de la volonté. La grâce efficace
doit être telle in actu primo et par conséquent renfermer
un élément d’ordre sinon physique, du moins moral, qui en
fasse un bienfait plus grand, un don divin plus appréciable que
la grâce purement suffisante. Cet élément d’ordre,
Bellarmin le ramène à la congruité du secours ou appel
divin, gratia congruæ vocationis sive excitationis. Recognitio, l.
I, c. XII ; l. VI, c. XV. Ainsi, ses exigences et ses conceptions personnelles
se réduisaient à ce qu’on appelle communément le congruisme,
appliqué directement à l’explication de l’efficacité
de la grâce in actu primo, mais supposant en outre, dans la pensée
du cardinal, l’élection à la gloire comme logiquement supérieure
aux choix des grâces et la prédéfinition formelle de
tous nos actes bons. Voir sur cette question délicate l’article
CONGRUISME. Le célèbre décret, porté par le
P. Aquaviva le 24 décembre 1613, eut Bellarmin pour principal instigateur
; dans son ensemble, cet acte répondait pleinement à ses
vues, qui étaient aussi celles de Suarez. Denzinger, Enchiridion,
n. 964.
Il serait inutile de nous arrêter
au prétendu augustinisme de l’auteur des Controverses. Si l’on entend
le mot dans son acception baianiste et janséniste, la conduite de
Bellarmin pendant son professorat de théologie à Louvain,
son apologie en faveur de Lessius, la réfutation manuscrite des
propositions de Baius condamnées par saint Pie V, la doctrine même
des Controverses donne aux assertions intéressées de Quesnel
un démenti éclatant. La note d’augustinisme pourrait uniquement
s’appliquer à cette disposition d’esprit, très réelle
et très réfléchie, qui portait l’auteur des Controverses
à s’attacher étroitement à saint Augustin et à
suivre dans les questions discutées ce qu’il jugeait être
la pensée de ce grand docteur. Comme exemple qu’il suffise de citer
ici son opinion sur la douleur qu’éprouvent les enfants morts sans
baptême. De amissione gratiæ et statu peccati, l. VI, c. VI.
Opinion qui a fourni l’occasion d’une violente attaque contre le cardinal,
dans la Contemporary Review, Londres, 1874, t. XXII, p. 525, 992, puis
d’une réplique à cette attaque dans une brochure, publiée
au même endroit et la même année par W. Humphrey, sous
ce titre : Mr Fitz james and cardinal Bellarmin, in-8° de 32 pages.
III. INFLUENCE ET AUTORITE DE
BELLARMIN. ? L’influence exercée par l’auteur des Controverses est
un fait notoire, qu’il s’agisse des catholiques ou des protestants. Dès
qu’il parut, le cardinal Baronius salua avec enthousiasme « ce très
noble ouvrage, nobilissum plane opus, qui serait dans l’Eglise comme cette
forteresse bâtie par David, où l’on voyait suspendus
col.597 fin
col.598 début
mille boucliers et toute l’armure des
vaillants. » Annales, an. 53, n. 32, édit. Pagi, Lucques,
1738, t. I, p. 196. Le présage s’est réalisé ; fréquente,
dans la suite, est cette comparaison des Disputationes de controversiis
christianæ fidei à un arsenal où les défenseurs
de l’Eglise catholique sont allés chercher ou cherchent encore leurs
meilleures armes ; car, suivant le mot de Montague, loc. cit., les controversistes
tirent presque tout de lui, ut ab Homero poetæ. De ce point de vue,
on a justement rapproché les deux grands cardinaux de Clément
VIII, qui vécurent en amis et rivalisèrent de vaillance pour
la défense du siège apostolique : « Dans la lutte engagée
alors entre le catholicisme et le protestantisme, et à laquelle
les jésuites prirent une part si active et si décisive, lit-on
dans la Grande Encyclopédie, Bellarmin partage avec Baronius l’honneur
d’avoir fourni aux défenseurs de l’Eglise romaine leurs armes les
plus puissantes. Ce que Baronius fit pour l’histoire, par ses Annales ecclesiastici
(1588), Bellarmin l’avait fait, dès 1581 (?), avec une valeur plus
grande, pour la controverse théologique, par la publication de ses
Disputationes. » La lettre adressée à Bellarmin que
le cardinal du Perron, au mois de février 1605, montre assez quelle
estime il faisait de cette œuvre capitale ; il y rappelait l’ordre qu’il
avait donné à son secrétaire, Chastillon, d’en commencer
la traduction française, op. cit., t. I, p. 118 sq. Cette estime
du grand cardinal français pour l’œuvre de Bellarmin en saurait
être infirmée par la critique de portée restreinte
que lui attribue le collectionneur de Perroniana et qu’on retrouve dans
Bayle, op. cit., p.276. Pour ce qui est des protestants, un fait singulier
témoigne de l’émotion produite dans leur camp par l’apparition
des Controverses : pendant plus d’un demi-siècle, cet ouvrage fut
le point de mire de leurs principaux théologiens, à tel point
qu’il n’en est peut-être pas un qui n’ait alors publié un
écrit ou brisé quelques lances contre Bellarmin. En 1600,
David Parée fonde à Heidelberg un Collegium antibellarminianum
; vers le même temps, la reine Elisabeth faisait donner, dans le
même dessein, des leçons à Cambridge et à Oxford.
On peut voir dans la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus,
loc. cit., le titre de près de deux cents ouvrages, soit pour, soit
surtout contre les Controverses.
L’influence du cardinal ne fut pas
moins grande dans la lutte entre théologiens gallicans et théologiens
pontificaux. On l’a nommé « le docteur éminent du catholicisme
ultramontain ». Appellation équivoque en ce qui est du terme
de catholicisme ultramontain, mais il est vrai que, dans la lutte qui se
rattache à cet ordre d’idées, le nom de Bellarmin tient un
rang d’honneur. Bossuet le prouve, dans sa Defensio declarationis cleri
gallicani, par ces expressions et autres du même genre qui courent
sous sa plume : Bellarminus, quo uno vel maxime adversariorum causa nititur
; Bellarminus, cui suo more accinunt alii, part. II, l. IV, c. XIV, XXX.
Jean de Launoy le prouve aussi, mais dans un tout autre esprit que Bossuet,
en traitant l’auteur des Controverses comme l’adversaire de prédilection.
Anti Bellarminus Joannis Launoii, sive Defensio libertatum Ecclesiæ
gallicanæ, in-4°, Deventer, 1720. Döllinger et Reusch constatent,
non sans une certaine amertume, que des doctrines soutenues par le cardinal
jésuite et traitées par les théologiens gallicans
d’opinions ultramontaines, les plus importantes sont devenues au concile
du Vatican des dogmes officiels : telles, l’infaillibilité du pape
et le caractère irréformable de ses jugements ex cathedra,
sa plénitude de juridiction ordinaire et immédiate sur toute
l’Eglise, sa supériorité par rapport au corps entier de l’épiscopat.
La doctrine du pouvoir indirect sur le temporel n’est pas dans les mêmes
conditions ; mais, quand on admet la primauté du pontife romain
dans son intégrité, et la subordination né-
col.598 fin
col.599 début
cessaire de la fin temporelle du pouvoir
civil à la fin spirituelle de l’Eglise, si nettement affirmée
par Pie IX et Léon XIII, il est difficile de ne pas arriver logiquement
au même point que Bellarmin ; difficile aussi d’évite la conclusion
qui se dégage naturellement de la réprobation, faite par
Pie IX dans le Syllabus, de cette assertion : « L’Eglise n’a pas
de pouvoir coactif, ni de pouvoir temporel quelconque direct ou indirect.
» Denzinger, Enchiridion, n. 1572.
Est-ce à dire que l’œuvre
soit parfaite, et, partant ne soit pas susceptible de nombreuses améliorations
? Non certes ; l’ensemble des connaissances qui ont concouru à la
production des Controverses, l’exégèse, la patristique, l’histoire,
la linguistique, la critique, ont progressé, et beaucoup. En outre,
l’orientation générale des traités fondamentaux, Ecriture,
Tradition et Eglise, bonne contre le protestantisme orthodoxe que l’auteur
des Disputationes avait devant lui, adversus hujus temporis hæreticos,
n’est pas aussi directement appropriée au protestantisme libéral,
si répandu de nos jours. L’adaptation est nécessaire, si
elle est possible. D’ailleurs, parmi les attaques formulées du côté
protestant, plusieurs se rattachent à des divergences de principe,
où la question préalable serait à poser : par exemple,
les attaques contre l’exégèse doctrinale de Bellarmin ou
contres les preuves par voie d’autorité. D’autres lui ont reproché
des contradictions plus apparentes que réelles : qu’on lise la réponse
à Jacques Ier, initiateur dans ce genre d’attaques. Responsio ad
librum inscriptum : Triplici nodo triplex cuneus, t. VII, col. 671 sq.
Quoi qu’il en soit des critiques de détail, l’autorité du
cardinal Bellarmin reste incontestable, comme son influence. On peut répéter
l’éloge inscrit, à l’occasion de sa mort, dans le registre
des consistoires, et que rapporte Antoine Sanders, Elogia cardinale sanctitate,
doctrina et armis illustrium, Louvain, 1626, p. 67 : « Ce fut un
homme très remarquable, théologien éminent, intrépide
défenseur de la foi catholique, marteau des hérétiques,
et en même temps pieux, prudent, humble et très charitable.
»
Hefele, art. Bellarmin, dans Kirchenlexicon,
2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1883, t. II, col. 285 sq. ; Scheeben,
art. Bellarmin, dans Staatslexicon, édité par A. Bruder,
in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1889, t. I, col. 921 sq. ; J. Hergenröther,
Katholische Kirche und christlicher Staat in ihrer geschichtlichen Entwickelung,
in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 411 sq., 460 sq. ; M. Liberatore,
S. J., Le droit public de l’Eglise, trad. par A. Onclair, c. IV, a. 1,
in-8°, Paris, 1888 ; abbé Quilliet, De civilis potestatis origine
theoria catholica, in-8°, Lille, 1893, passim ; J. Costa-Rossetti,
S. J., Philosophia moralis, 2e édit., Inspruck, 1886, part. IV,
c. I, passim ; Jos. Herce, S. J. Super mente ven. card. Bellarmini de systemate
scientiæ mediæ, in-4°, Assise, 1971.
X. LE BACHELET.
*******************
Saint Robert Bellarmin, (1542-1621), docteur
de l'Église, prélat, théologien et
jésuite italien, grande figure
de la Contre-Réforme.
Pour saint Pierre Canisius, saint Robert
Bellarmin incarne un des aspects fondamentaux de
l'activité de la Compagnie de Jésus
: le service intellectuel de l'Eglise.
Goethe appelait Bellarmin "mon saint"!
Ce petit homme a été l'une
des plus belles intelligences de la renaissance
italienne, mais loin de nous écraser,
il attire. Peu de saints furent aussi aimables,
aussi attachants. Il est probablement
le jésuite qui a servi avec le plus d'humilité
et de loyauté le plus grand nombre
de papes.
Saint Robert Bellarmin a vécu dans
l'intimité de huit papes successifs, avec la
réputation d'un don étonnant
de prescience à leur sujet. A un ami qui demandait à
Saint Robert Bellarmin : "Vous avez prédit
la mort du Pape Sixte, celle du Pape
Clément et maintenant celle du
Pape Paul. Comment faites-vous ?", Saint Robert
Bellarmin répondit en riant:
"Eh bien ! je vais vous le
dire; tous les papes croient, et d'autres
le croient pour eux, qu'ils régneront tant
d'années; j'en enlève un
tiers, et je donne ce chiffre."
Saint Robert Bellarmin est né en
1542 à Montepulciano en Italie. Après s'être
demandé s'il ne deviendrait pas
médecin, Saint Robert Bellarmin choisit d'entrer
dans l'ordre nouveau des jésuites.
Pendant vingt-huit années, Robert
Bellarmin sera professeur et prédicateur. Saint
Robert Bellarmin viendra notamment
à Louvain (Leuven en Belgique) pendant
sept années (1569-1576), prêchant
avec grand succès à l'église Saint Michel.
En 1576, Saint Robert Bellarmin est professeur
à l'université grégorienne.
Saint Robert Bellarmin y publie son ouvrage
réputé : Débats sur les controverses
de la foi chrétienne, Disputationes
de controversiis fidei christianae (1586-1593), dans lequel saint Robert
Bellarmin réfute point par point, en plusieurs
volumes, les différentes professions
de foi protestantes.
Cet ouvrage eut un très grand succès
et connut vingt éditions de son vivant.
Théodore de Bèze, un
des leaders protestants de l'époque, dira : "C'est le livre
qui nous a perdu !"
C'est à Rome que Saint Robert Bellarmin
fait la connaissance de saint Louis de
Gonzague dont Saint Robert Bellarmin
deviendra le père spirituel.
A partir de 1592, Saint Robert Bellarmin
est Recteur pendant deux ans, puis
Saint Robert Bellarmin est Provincial
de Naples pendant deux ans,
ensuite Saint Robert Bellarmin est
théologien du Pape pendant trois ans, lequel pape Clément
VIII, le nomma cardinal en 1599. C'est à son initiative que fut
révisée la Vulgate, Bible
traduite en latin par saint Jérôme.
Sa révision fut amendée par Clément VIII et
publiée en 1592.
Saint Robert Bellarmin est nommé
archevêque de Capoue en 1602, mais
démissionna en 1605 pour travailler
à la Curie romaine auprès du pape Paul V. Il
négocia des traités et des
dossiers importants, dont l'affaire Galilée. Lors de ce
procès, Saint Robert Bellarmin
, qui n'était ni physicien ni astronome, fut d'avis
qu'il ne fallait pas condamner le savant.
Mais Saint Robert Bellarmin ne fut pas
écouté.
En 1597, Saint Robert Bellarmin publie
le Grand et le Petit Catéchisme qui
connurent aussi un grand succès:
quatre cents éditions et traductions en soixante langues.
L' exposé de la position catholique par Saint Robert Bellarmin,
clair et logique,
devint le modèle des exposés
doctrinaux de la foi catholique pendant plusieurs
siècles.
Saint Robert Bellarmin écrit aussi
un Commentaire des psaumes qui comptera
trente-trois éditions.
Saint Robert Bellarmin n'est pas
seulement un professeur et théologien, Saint
Robert Bellarmin est un pasteur au coeur
large, qui aime les hommes et veut les aider. Saint Robert
Bellarmin a toujours voulu vivre
d'abord sa vocation de jésuite : prêcher,
confesser, aider les malades et les mourants,
catéchiser les pauvres et les
enfants.
Homme d'oraison, Saint Robert
Bellarmin a écrit un livre
mystique intitulé Le gémissement de la colombe, ou le
don des larmes , De gemitu columbae sive
de bono lacrymarum libri tres, Lugduni,
1617.
Enfin, arrivé au terme de sa vie,
en 1620, Saint Robert Bellarmin a encore publié
un livre L'art de bien mourir, De arte
bene moriendi libri duo, Viterbii, 1620)
Le 17 septembre 1621, Saint Robert Bellarmin
meurt au noviciat de Saint André,
un mois après saint Jean Berchmans.
Toute la vie de Saint Robert Bellarmin
a été un service ardent, passionné de
l'Eglise et du Souverain Pontife. Mais
cet amour de l'Eglise et du Pape a été
assez fort pour que Saint Robert Bellarmin
ose parler avec sa liberté de
prophète.
Saint Robert Bellarmin a su dénoncer
les abus de la Cour romaine, rédigeant à
l'adresse de Clément VIII ( 24
février 1536 - 3 mars 1605)un mémoire dénonçant
les grands abus qui sévissaient
dans son entourage. Saint Robert Bellarmin
eut le courage de
soutenir que le Pape n'avait qu'un pouvoir
indirect sur les Etats : en 1610, il publie
Du pouvoir du Souverain Pontife dans
les affaires temporelles , De potestate
Summi Pontificit in rebus temporalibus.
À la mort de Clément VIII,
plusieurs cardinaux voulaient choisir Saint Robert
Bellarmin comme successeur. Mais au conclave,
Robert Bellarmin donna cet
avertissement :"Prenez garde: dans ma
famille on vit très vieux, presque
centenaire "
Robert Bellarmin était un surdoué.
Mais tandis que tant d'hommes intelligents sont
tentés de suffisance ou d'orgueil,
lui a reçu son intelligence comme un don de
Dieu, humblement demandé et accueilli
dans la prière. "J'ai prié et l'intelligence
m'a été donnée."
Il fut canonisé en 1930 et proclamé
docteur de l'Église l'année suivante, en 1931.
La fête de Robert Bellarmin dans
l'Église catholique est le 17 septembre.
Anecdote : Saint Robert Bellarmin était
de petite taille, il lui fallait
un escabeau pour prêcher en chaire
mais il lui
est arrivé [d'être empêché
par la foule de quitter la chaire s'il ne promettait
pas de revenir le lendemain.] que la foule
empêche Saint Robert Bellarmin de
quitter la chaire s'il ne promettait pas
de revenir le lendemain.
BELLARMIN, Robert. 1619. Petit catechisme
familier Pour instruire les Enfans
aux fondemens de la Religion Chrestienne.
Derniere edition. Sans nom d'auteur.
LYON : Loys MVGVET. M. DCXIX [1619]. 35
p. FA Part - Dieu : 802 657
Bellarmin, Robert, De aeterna felicitate sanctorum libri quinque, Romae, 1616
Bellarmin, Robert, De arte bene moriendi
libri duo, Viterbii, 1620
Bellarmin, Robert, Explicatio symboli apostolici, Coloniae, 1617
Bellarmin, Robert, Roberti Bellarmini Societatis
Iesu... explanatio in psalmos,
Lugduni, 1664 / Rouen, 1682
Débats sur les controverses de la foi chrétienne , Disputationes de controversiis fidei christianae ( 1586-1593)
En 1597, le Grand et le Petit Catéchisme
Commentaire des psaumes qui comptera trente-trois éditions.
Le gémissement de la colombe,
ou le don des larmes,
De gemitu columbae sive de bono
lacrymarum libri tres, Lugduni, 1617.
L'art de bien mourir,
De arte bene moriendi libri duo,
Viterbii, 1620
en 1610,
Du pouvoir du Souverain Pontife
dans les affaires temporelles,
De potestate Summi Pontificit in
rebus temporalibus
La suite est une reprise de http://www.ulb.ac.be/philo/scholasticon/nomenB.htm.:
Cardinal Roberto Bellarmino, S.J.
Louvain, Rome
(Montepulciano 1542-Sant'Andrea 1621),
neveu de Marcello Cervini, devenu le pape Marcel II.
Eduqué dans le collège jésuite
nouvellement fondé de sa ville natale, il rejoint la société
en 1560, il étudia ensuite la philosophie au Collège Romain,
puis enseigna les humanités à
Florence et à Mondovi.
En 1567, il commence les études
de théologie à Padoue, et les poursuit dès 1569 à
Louvain, un lieu particulièrement exposé aux hérésies.
Il y enseigna jusqu'en 1576, date de son
retour en Italie, où il obtint la nouvelle chaire "de controverses"
qui venait d'être fondée au Collège Romain.
Ses leçons donnèrent son
De
Controversiis christianae fidei adversus huius temporis haereticos,
qui est la première tentative englobante de systématiser
toutes les controverses doctrinales de l'époque, principalement
liées au protestantisme.
L'ouvrage eut un retentissement immense,
et des chaires spéciales furent établies en Allemagne et
en Angleterre pour le réfuter.
En 1588, Bellarmin devint le "Père Spirituel" du Collège Romain, mais en 1590 il partit avec le cardinal Gaetano comme le théologien de l'ambassade que Sixte V avait envoyée en France pour protéger les intérêts de l'Eglise dans les troubles de la guerre civile.
C'est alors qu'il apprit que Sixte V s'était
demandé s'il ne fallait pas mettre son ouvrage
De controversiis
à
l'index, en raison de sa défense de la thèse d'un pouvoir
seulement indirect du Saint-Siège sur les affaires temporelles (et
non un pouvoir direct).
Le débat fut résolu par
la mort de Sixte V, son successeur Grégoire XIV approuvant l'ouvrage
de Bellarmin.
A son retour à Rome, il siégea
à la commission de la révision de la vulgate (promue par
le Concile de Trente).
En 1592, il devient recteur du Collège
Romain, et en 1595 provincial de Naples.
En 1597, le pape Clément VIII le
rappelle à Rome et fait de lui son théologien attitré
et consulteur au Saint-Office.
Lors des congrégations De Auxiliis
chargées d'examiner le problème de la grâce efficace
et de la liberté suite à la publication de la Concordia de
Luis de Molina, il est assesseur du président des congrégations,
le cardinal Madruzzi.
La position de Bellarmin était que la question doctrinale ne devait pas être décidée d'autorité, mais laissée à la discussion dans les écoles, les parties en présence se voyant néanmoins fermement interdire de censurer ou de condamner leurs adversaires respectifs.
Clément VIII partagea au départ
cette position, mais par la suite préféra une définition
doctrinale.
La présence de Bellarmin devint
alors embarrassante, et il fut nommé archevêque de Capoue
(on parle de la "disgrâce du cardinal").
En 1605, Clément VIII mourut, succédé par Leon XI qui ne régna que 26 jours, puis par Paul V, et lors des deux conclaves, le nom de Bellarmin fut fréquemment cité.
Sa qualité de jésuite joua
cependant en sa défaveur aux yeux de nombreux cardinaux.
Il resta cependant le principal conseiller
théologique du Saint-Siège, et les congrégations De
Auxiliis furent conclues avec un règlement dans l'esprit de Bellarmin.
Bellarmin continua à agir comme
un grand prélat politique dans une série d'affaires.
En 1606 commença la lutte entre
le Saint-Siège et la République de Venise, qui avait abrogé
la loi d'exemption pour l'Eglise de la juridiction civile, ainsi que le
droit de l'Eglise a posséder de la propriété.
Bellarmin mena l'offensive, avec Baronius,
par de nombreux pamphlets.
A la même époque eut également
lieu l'affaire du serment d'allégeance qu'étaient forcés
de prendre les catholiques anglais.
Le Saint-Siège interdit aux catholiques
de prendre ce serment, et Jacques Ier lui-même prit l'offensive dans
son Tripoli modo triplex cuneus, auquel Bellarmin répondit
par un.
Alors qu'il était autrefois vu comme trop régaliste (1590), Bellarmin devient maintenant le symbole du papalisme.
Bellarmin ne vécut pas suffisamment
longtemps pour connaître les phases les plus sérieuses du
procès de Galilée, mais en 1615 il participa à ses
débuts.
Il avait toujours manifesté beaucoup
d'intérêt à l'égard des progrès de la
science moderne, et était même entré en correspondance
avec Galilée.
Il y estimait que si une théorie
scientifique entrait en contradiction avec l'Ecriture (comme l'héliocentrisme
de Galilée), elle devrait être avancée seulement à
titre d'hypothèse.
Mais si cette théorie était
fermement établie, alors l'Ecriture devait être interprétée
en accord avec celle-ci.
Par un excès opposé dans
le sens inverse, lorsque le Saint-Siège condamna l'héliocentrisme,
c'est à Bellarmin qu'incomba de le signifier à Galilée
et de recevoir sa soumission.
Il mourut en 1621, avant de voir l'issue
du procès.
Au cours de sa vie, Bellarmin s'était
attiré une telle réputation que dès 1627, Urbain VIII
l'éleva au rang de Vénérable.
Sa béatification a ensuite été
introduite plusieurs fois (1675, 1714, 1752 et 1832) mais a suscité
chaque fois des oppositions déterminées, il a finalement
été béatifié en 1923, canonisé par le
Pie XI en 1931 et déclaré Docteur de l'Eglise en 1932.
Il est le saint patron des catéchistes.
Ses oeuvres sont très nombreuses.
Des éditions complètes de
ses Opera Omnia ont été publiées à Cologne
(1617), Venise (1721), Naples (1856) et Paris (1870).
Oeuvres de controverse:
Disputationes de Controversiis
Christianae Fidei adversus hujus temporis hereticos,
très nombreuses éditions: Ingolstadt, (1586-89), Venice (1596), revue par l'auteur, Paris ou "Triadelphi" (1608), Prague (1721), Rome (1832);
De Exemptione clericorum, et De Indulgentiis et Jubilaeo publiées comme monographies en 1599, puis incorporées aux De Controversiis;
De Transitu Romani Imperii a Graecis ad Francos (1584);
Responsio ad praeciupua capita Apologiae . . . pro successione Henrici Navarreni (1586);
Judicium de Libro quem Lutherani vocant Concordiae (1585);
quatre réponses aux écrits
rédigés pour la république vénitienne par Giovanni
Marsiglio et Paolo Sarpi (1606);
Responsio Matthaei Torti ad librum inscriptum
Triplici nodo triplex cuneus (1608); Apologia Bellarmini pro responsi one
sub ad librum Jacobi Magnae Britanniae Regis (1609);
Tractatus de potestate Summi Pontificis
in rebus temporalibus, adversus Gulielmum Barclay (1610).
Ouvrages spirituels et de catéchèse :
Dottrina Cristiana breve, et
Dichiarazione più copiosa della
dottrina cristiana (1598), deux ouvrages de catéchèse qui
ont reçu l'approbation papale et ont été traduits
en de nombreuses langues.
Dichiarazione del Simbolo (1604), à
l'usage des prêtres;
Admonitio ad Episcopum Theanensem nepotem
suum quae sint necessaria episcopo (1612); Exhortationes domesticae, publiées
seulement en 1899 par le P. van Ortroy;
Conciones habitae Lovanii (1615);
De Ascensione mentis in Deum (1615);
De Aeterna felicitate sanctorum (1616);
De gemitu columbae (1617);
De septem verbis Christi (1618);
De arte bene moriendi (1620).
Ouvrages exégétiques :
De Scriptoribus ecclesiast. (1615);
De Editione Latinae Vulgatae, quo sensu
a Concilio Tridentino definitum sit ut ea pro authenticae habeatur, inédit
jusque 1749;
In omnes Psalmos dilucida expositio (1611).
Bibliographie. J. Brodick, The Life
and Work of Blessed Robert Cardinal Bellarmin, 2 vols. (London, 1928);
X.-M. Le Bachelet, S.J., Bellarmin avant son cardinalat 1542-1598. Correspondance
et documents (Paris, 1911); Id., Auctarium Bellarminianum. Complément
aux Oeuvres du Cardinal Bellarmin (Paris, 1913); Id., Prédestination
et grâce efficace. Controverses dans la Compagnie de Jésus
au temps d'Acquaviva, 2 vols. (Louvain, 1931); E.A. Ryan, The Historical
Scholarship of Saint Bellarmine (New York, 1936); S. Tromp, "Progressus
doctrinalis in tractatibus S. Rob. Bellarmini de praedestinatione", Gregorianum
15 (1933), 313-355; R. de Le Court, "Saint-Robert Bellarmin à Louvain
1569-1576", RHE 28 (1932), 74-83; Louis Leahy, Dynamisme volontaire et
jugement libre. Le sens du libre arbitre chez quelques commentateurs thomistes
de la Renaissance (Bruges-Paris, 1963), 19-49; G. Galotea, Bellarmino contro
Baio a Lovanio (Rome, 1966); V. Grossi, Baio e Bellarmino interpreti di
S. Agostino nelle questioni del soprannaturale (Rome, 1968); L. Perrottet,
"Un exemple de polémique religieuse à la fin du XVIe siècle:
la défense de la tradition par Robert Bellarmin (1542-1621) et la
république calviniste", Revue de théologie et de philosophie
114 (1982), 395-413; Manfred Biersack, Initia Bellarminiana. Die Prädestinationslehre
bei Robert Bellarmin SJ bis zu seinen Löwener Vorlesungen 1570-1576,
Stuttgart, 1989 [Historische Forschungen, 15]; G. Parotto, "Legge e obbligo
in Roberto Bellarmino", Rivista internazionale di filosofia del diritto
1989, 95-130. Richard J. Blackwell, Galileo, Bellarmine and the Bible (Notre
Dame, 1991); Manfred Biersack, "Bellarmin und die Causa Baii", in M. Lamberigts
(éd.), L'augustinisme à l'ancienne faculté de Théologie
de Louvain, Leuven, 1994, 167-178; Lucien Ceyssens, "Bellarmin et Louvain.
1569-1576", in M. Lamberigts (éd.), L'augustinisme à l'ancienne
faculté de Théologie de Louvain, Leuven, 1994, 179-205; Th.
Dietrich, Die Theologie der Kirche bei Robert Bellarmin (1542-1621) (Paderborn,
Bonifatius, 1999); R. Daly, "Robert Bellarmine and Post-Tridentine Eucharistic
Theology", Theological Studies 61 (2000), 239-260.
reprise venant de http://www.ulb.ac.be/philo/scholasticon/nomenB.htm.
(avec modification le 7 juin 2007, des fausses informations inclues dans
la page d'origine concernant la soit disant mise à l'index de l'ouvrage
lequel ouvrage n'a pas été du tout mis à l'index )
Voir Bellarmin, Controversiae, VI « De Ecclesia quae est in Purgatorio » II, ch. 11-13 (Opera, Paris, Vivès t. 3 1870, p. 119-20).
Robert Bellarmin, De purgatorio, Venise, 1599.